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Préambule de la Déclaration des droits de la femme et

de la citoyenne

Introduction

Ce texte constitue l’introduction de la DDFC. O de G y


expose les buts de sa démarche. Les modifications
qu’elle apporte à la DDDH, apparemment mineures, vont
au-delà d’une simple féminisation. Elle coule son
discours dans le moule de ses adversaires pour le
rendre acceptable, tout en retournant contre eux leurs
propres mots.

Projet de lecture :
En quoi cette réécriture du préambule fait apparaître
ses insuffisances pour mieux défendre l’égalité des
sexes ?

Mouvements du texte :

I. Entrée en matière. 1re phrase. (l 1 et 2)


II. L’objet de la demande. 2e phrase. (l 3 à 15)
III. Introduction aux articles. 3e phrase (l16 à 19)

I. Entrée en matière.
O de Gouges dessine dès le départ son projet : mettre
au-devant de la scène les femmes, revendiquer leur
liberté d’expression. Le préambule s’ouvre sur une
énumération sur un rythme ternaire : « les mères, les
filles, les sœurs ». Il s’agit là d’un procédé rhétorique
fréquent dans les textes révolutionnaires. Cette
périphrase désignant toutes les femmes remplace « les
représentants du peuple français ». L’autrice met en
relief leur rôle familial. Elle souligne les liens naturels
«liens du sang» qui unissent les femmes entre elles et
aux hommes, excluant celui du mariage qui peut être un
lien social imposé et contestable. Elle se fait ainsi porte-
parole des femmes qu’elle représente en tant que mère,
fille et sœur. L’ouverture « les mères… » rappelle
d’ailleurs que les hommes sont tous nés d’une femme.
Le GN apposé « représentantes de la nation » opère un
glissement du biologique au politique. Elle affirme
d’emblée sa volonté de conférer aux femmes un rôle
politique, de les placer comme les égales de l’homme,
en tant que membres de la nation, dont elles constituent
la moitié.
Le verbe de requête « demandent » souligne l’objectif
véritable de la déclaration : exiger que les droits des
femmes soient respectés. Le présent de l’indicatif
indique l’urgence de ce changement.
La Constitution qui est en voie d’adoption au moment où
O de G écrit sa D, exclut les femmes. En composant sa
D dans l’urgence, elle espère influer sur la rédaction de
la Constitution. « d’être constituées en Assemblée
nationale » : l’Assemblée nationale rassemble les
individus élus pour représenter les intérêts de la nation.
(Au jeu de Paume, quand les représentants du peuple
se sont constitués en Assemblée nationale, les députés
étaient tous des hommes.)
Revendication forte : O de G exige le droit des femmes à
gouverner la France, à faire partie de la vie politique.
Véritable révolution dans les mentalités. Sous
citoyennes, sans droit de vote.

II L’objet de la demande : l 3 à 15

Longue phrase complexe, structurée, comportant trois


subordonnées finales : période oratoire dont l’ampleur
apporte au préambule une force de conviction.

L 3 à 7 : « considérant que l’ignorance, l’oubli ou le


mépris des droits de la femme » En remplaçant le cdn
« des droits de l’homme » par « des droits de la
femme », elle modifie en profondeur l’hypotexte
puisqu’elle met à jour la façon dont les femmes sont
maltraitées. Le groupe ternaire péjoratif «ignorance,
oubli ou mépris » en témoigne. Elle met aussi en valeur
le fait que les femmes sont oubliées dans la Dddh,
invisibilisées derrière le mot « homme » qui ne renvoie
en réalité qu’aux personnes du sexe masculin. Elle
revendique ainsi la prise en compte des droits de la
femme.
« considérant que l’ignorance, l’oubli ou le mépris des
droits de la femme sont les seules causes des malheurs
et de la corruption des gouvernements » Elle présente
les inégalités entre les femmes et les hommes comme
la cause des dysfonctionnements de la société :
comme l’indique le vocabulaire hyperbolique :
« malheurs », « corruption » = champ lexical du
malheur.
L’inégalité homme/femme apparaît comme un fléau qui
ronge la société. La misogynie est une maladie qui
affecte tout le corps social. Mépriser les femmes, c’est
causer le malheur de tous. L’emploi de l’adjectif exclusif
« seules », épithète de « causes » fait de l’inégalité
homme/femme l’unique origine des problèmes
sociaux et politiques.
« les droits naturels, inaliénables et sacrés de la
femme » En reprenant l’énumération ternaire d’adjectifs
de la Dddh, elle insiste sur le caractère fondamental
des droits de la femme. Ce sont les mêmes que ceux
des hommes mais elles doivent d’abord gagner le droit
d’être considérées comme les égales des hommes
pour accéder aux mêmes droits.

L 7 à 15. L’anaphore de « afin que » sur un rythme


ternaire introduit les différents buts de cette
Déclaration.
L 7 à 9 « afin que cette déclaration constamment
présente… leur rappelle sans cesse » Ces adverbes
temporels suggère que l’égalité entre H et F est un
principe qui demande de la vigilance, des efforts de
tous les instants.
L 9 à 12 « afin que les actes du pouvoir des femmes et
ceux du pouvoir des hommes » remplace « du pouvoir
législatif et du pouvoir exécutif » La modification entraîne
une perspective plus polémique : les pouvoirs ne sont
pas égaux. L’homme domine la femme socialement,
politiquement et économiquement. Par ce parallélisme,
elle donne bien une portée universelle à sa
Déclaration.
L 12 à 15 « afin que les réclamations des citoyennes…
au maintien de la Constitution, des bonnes mœurs et au
bonheur de tous » Elle désigne les femmes comme
citoyennes, un statut que les révolutionnaires
masculins leur ont d’abord refusé avant de leur
accorder une citoyenneté passive (sans droit de
vote) dans la constitution de 1791. En employant ce
mot, elle met en valeur leur nécessaire participation
à la vie politique.
L’ajout des « bonnes mœurs » rappelle que les
femmes sont considérées à l’époque comme pouvant
facilement sombrer dans l’immoralité. O de G anticipe de
possibles objections en associant l’égalité H/F aux
« bonnes mœurs ».
III L’introduction aux articles de la Déclaration : L 16 à 19

La périphrase « le sexe supérieur en beauté comme en


courage dans les souffrances maternelles » est une
formule qui renverse l’organisations sociale et les
rapports de force. Le GN « le sexe supérieur » remet en
cause l’infériorité de la femme instituée par le
christianisme.
Elle fait référence aux expressions traditionnelles, « le
beau sexe » pour désigner les femmes. Elle fait aussi
l’éloge des femmes à l’aide de termes mélioratifs qui la
magnifient.
En rappelant les souffrances de l’accouchement, elle
montre que les femmes ne sont pas si faibles et fragiles
que les hommes semblent le croire. En soulignant son
rôle de génitrice, elle fait apparaître le paradoxe selon
lequel, alors qu’elle donne la vie, elle n’a qu’une place
de subalterne dans la société.
La référence à l’accouchement rappelle l’ouverture du
préambule « Les mères… ». Elle pousse donc les
femmes à réclamer leur dû et à s’emparer du pouvoir
que les hommes leur ont toujours refusé.
« les droits suivants de la femme et de la citoyenne ». O
de G s’apprête à définir de nouvelles lois garantissant
pour tous une égalité de traitement. Son projet est donc
de réécrire la Dddh qu’elle juge imparfaite, incomplète.
Conclusion
O de G reconnaît l’autorité de la Dddh puisqu’elle s’en
sert de modèle mais la critique par ses ajouts et ses
corrections qui en soulignent les manques.
L’imperfection de la Dddh rend une nouvelle Déclaration
nécessaire, affirmant l’égalité des sexes, pour lutter
contre la corruption de la société.
En ouverture : A mettre en parallèle avec le postambule
qui vise à donner aux femmes l’énergie de réclamer
leurs droits.

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