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Infrastructures et développement : une revue des débats

récents et à venir
Antonio Estache
Dans Revue d'économie du développement 2007/4 (Vol. 15), pages 5 à 53
Éditions De Boeck Supérieur
ISSN 1245-4060
ISBN 2804154301
DOI 10.3917/edd.214.0005
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Infrastructures et développement :
une revue des débats récents et à venir
Infrastructure and Development :
A Survey of Recent and Upcoming Issues

Antonio Estache *
Banque mondiale

Gouvernements et pays donateurs ont tiré un certain nombre d’enseignements en matière d’infras-
tructures et de développement au cours de ces quinze dernières années. Aussi bien les travaux
scientifiques publiés que les travaux non publiés mettent en relief les principales dimensions du
secteur ainsi que les relations entre les infrastructures et un certain nombre de variables telles
que la croissance, la lutte contre la pauvreté, le coût budgétaire du secteur, le rôle potentiel du
secteur privé et enfin l’impact sur le niveau de corruption.
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Governments and donors have learned many key lessons about infrastructure and development over
the past 15 years. Published and unpublished research over this period yields a snapshot of the
main dimensions of the sector and examines the linkages between infrastructure and growth, the
relevance of infrastructure reform for the poor, the fiscal cost of the sector, the potential for a pri-
vate sector role, and corruption.

Les infrastructures semblent susciter un nouvel intérêt pour les économistes


du développement 1. Cela fait suite au récent retour des infrastructures en tête
de l’agenda de nombreux gouvernements et donateurs. Cet engouement subit
pour les infrastructures n’est pas surprenant malgré une période de dix ans

* L’auteur remercie François Bourguignon, Jean-Jacques Dethier, Marianne Fay, Ana Goicoe-
chea, Michel Kerf, Christine Kessides, Lazlo Lovei, Marisela Monteliu, Joseph Narke-
vic, Maximo Torero, Lourdes Trujillo, Quentin Wodon, et deux rapporteurs anonymes
pour leurs commentaires utiles sur une version précédente de cet article.
1 Le concept d’infrastructures a un large champ de définition dans la littérature. Dans
cet article, le terme fait référence à toute installation utilisée pour fournir de l’énergie,
de l’eau et de l’assainissement, des télécommunications, et les services de transport.
Cela ne prend pas en compte l’irrigation, bien que ce soit une dimension essentielle de
la gestion dans le secteur de l’eau.

5
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6 Antonio Estache

sans un réel intérêt attaché au secteur des infrastructures 2. En effet l’accès à


des infrastructures financièrement abordables continue d’être limité pour une
importante partie des populations les plus pauvres dans le monde. L’Afrique
illustre bien ce fait, où malgré les efforts consentis dans l’amélioration de
l’approvisionnement en eau et en électricité afin de suivre la croissance de la
population dans les années 1990, elle reste l’endroit au monde où la couverture
en infrastructures est la plus faible, particulièrement pour les plus pauvres.
L’un des principaux freins à la croissance reste la faiblesse des infrastruc-
tures dans les pays en développement si bien que nombre d’études sur le climat
des affaires suggèrent fortement aux gouvernements de placer les infrastruc-
tures au sommet de leurs priorités. Selon la Banque mondiale, afin d’attein-
dre les Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD), les pays les plus
pauvres doivent consacrer au moins 9 % de leur PIB aux dépenses de cons-
truction, d’entretien et d’amélioration de leurs infrastructures. Bien qu’il soit
difficile de mesurer avec exactitude la part du budget des gouvernements des-
tinée aux différents secteurs, l’on peut dire qu’environ seulement la moitié est
allouée aux dépenses d’infrastructures.
Malgré les enseignements tirés au cours de ces quinze dernières années
sur les déterminants du fonctionnement, de la réglementation, de la gestion et
du financement des services d’infrastructures, il reste cependant que les gou-
vernements et les pays donateurs ont une connaissance plutôt vague des
besoins d’investissement. Dès lors, les actions des différents partenaires dans
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ce secteur des infrastructures ne devraient être guidées que par le seul senti-
ment d’humilité reflétant les connaissances limitées sur beaucoup de points
relatifs aux infrastructures.
Parmi les questions qui demeurent sans réponse, il y a la mesure de l’impact
des infrastructures sur la croissance ; aussi il reste à savoir si les infrastructu-
res agissent de façon uniforme aux différentes étapes du développement éco-
nomique et si l’impact est identique pour toutes les régions dans un même pays,
pour les zones urbaines et rurales. Les incertitudes concernant l’importance de
l’aspect budgétaire pour ce secteur sont certainement les plus importantes.
Dans quelle mesure et dans quelles proportions les réformes changent-elles le
coût pour le budget de l’État, l’État au sens agrégé du terme et également à
ses différents niveaux, des infrastructures ? Est-ce que les politiques de réduc-
tion de la dette des pays pauvres agissent à l’encontre de la promotion des

2 La dernière fois que le monde académique s’est intéressé massivement aux infrastruc-
tures remonte à la publication en 1989 de l’article d’Aschauer sur l’importance du capi-
tal public aux États-Unis.
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Infrastructures et développement 7

infrastructures ? Le secteur public peut-il fournir des services sans l’aide du


secteur privé ? Pour une grande part, ces questions sont dues aux connaissan-
ces encore faibles concernant la pertinence des réformes institutionnelles.
Entre autres questions relatives à l’aspect institutionnel, l’on peut se deman-
der s’il y a un besoin réel d’agences de régulation, si tel est le cas doivent-elles
être indépendantes ? Serait-il pertinent de baser les réformes sur des modèles
institutionnels alliant traditions anglo-saxones et certaines autres formes
d’organisation ? De quelles réformes institutionnelles a-t-on besoin pour amé-
liorer la gestion et purger la corruption de ce secteur ? Ainsi, comme on le
constate, beaucoup de questions restent sans réponses en ce qui concerne la
relation entre infrastructures et pauvreté, ce fait est d’autant plus accentué
par le manque de données actuelles sur les dépenses et la consommation des
pauvres en services d’infrastructures.
Cet article résume les principaux enseignements tirés de ces débats au
cours de ces quinze dernières années. Pour cela, l’étude s’appuie aussi bien
sur les travaux publiés que sur ceux qui ne l’ont pas été mais qui apportent
une contribution assez significative pour la compréhension des relations entre
décideurs et infrastructures. Cette étude fournit également un schéma général
pour l’agenda des recherches dans ce domaine, qui consiste simplement à pla-
cer les recherches en infrastructures au sommet des priorités tant la mécon-
naissance en la matière est grande.
Cet article est organisé comme suit. La section suivante trace les contours
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des grandes dimensions du secteur. La deuxième section examine les relations
entre infrastructures et croissance. La troisième partie est consacrée à la
revue des preuves sur la pertinence des réformes d’infrastructures pour les
pauvres. La quatrième section résume les principaux débats sur l’impact sur
le budget des investissements en infrastructures ainsi que le rôle potentiel du
secteur privé dans ce domaine. La cinquième section porte sur la corruption,
et pour finir la dernière partie apporte des remarques de conclusion.

1 LA SITUATION ACTUELLE
DANS LE SECTEUR DES INFRASTRUCTURES
Dans la plupart des pays, l’essentiel des infrastructures sont fournies par
l’État 3. Malgré un rôle plus important du secteur privé, le financement et la
fourniture en infrastructures demeurent majoritairement l’œuvre du secteur
public.

3 Voir Estache et Goicoechea (2005a) pour une plus longue discussion.


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8 Antonio Estache

Au cours des années 1990, plusieurs États confrontés à des difficultés


financières se sont orientés vers un désengagement progressif du secteur des
infrastructures mais sans pouvoir parvenir réellement à substituer au finan-
cement public des investissements privés. De plus, pour les pays qui sont arri-
vés à impliquer davantage le secteur privé, le bilan reste mitigé.

Tableau 1 : Pourcentage de pays avec un niveau élevé d’investissement


privé en infrastructures, par secteur, 2004

Lignes
Niveau du Production Distribution Eau et
Rails téléphoniques
revenu national d’électricité d’électricité assainissement
fixes
Faible 41 29 18 34 50
Intermédiaire- 48 37 50 26 62
faible
Intermédiaire-
supérieur 58 48 47 60 72
En développement 47 36 35 36 59
Source : Estache et Goicoechea 2005a.
Note : Les données ferroviaires sont de 2002.

Tableau 2 : Pourcentage de pays avec une agence de régulation


indépendante, par secteur, 2004

Niveau du revenu Eau et Lignes


Électricité Rails
national assainissement téléphoniques fixes
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Faible 38 13 2 69
Intermédiaire-faible 63 32 8 60
Intermédiaire-supérieur 63 28 19 71
En développement 51 22 8 66
Source : Estache et Goicoechea 2005a.
Note : Les données ferroviaires sont de 2002.

Une revue récente de la littérature révèle à quel point dans les pays en
développement, les grandes entreprises du secteur privé contribuent significa-
tivement au financement des principaux types d’infrastructures (tableau 1).
Cette contribution étant logiquement plus importante pour les pays ayant les
revenus les plus élevés. La présence du secteur privé dans le secteur des
infrastructures est toutefois en deçà de l’importance qui lui est généralement
accordée 4. Dans les pays en développement, seulement un tiers de la provi-

4 Cela ne vise pas à dénier la présence du secteur privé. En fait, là où l’État et un large
secteur privé ont échoué à fournir les services, le secteur privé, de petite échelle, géné-
ralement local, a comblé le vide. La preuve sur leur rôle, et les détails de leurs coûts, est
cependant généralement anecdotique.
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Infrastructures et développement 9

sion des services d’électricité, d’eau et de chemins de fer sont assurés par le
secteur privé. Le secteur de la téléphonie fixe, détenu par des opérateurs pri-
vés dans 60 % des pays, représente la plus forte présence du secteur privé
dans la provision des services d’infrastructures. Au cours des quinze dernières
années, les investissements privés ont représenté en général 20 à 25 % des
investissements réalisés dans les pays en développement avec une part se
situant à moins de 10 % pour l’Afrique subsaharienne 5.
Dans plusieurs pays, en particulier les plus pauvres, cette faible contribu-
tion du secteur privé dans le financement et le fonctionnement des infrastruc-
tures majeures a été source d’une grande déception. Plusieurs de ces pays ont
suivi les recommandations émises par les « spécialistes » dans le but d’attirer
le secteur privé. Ils dégroupent leurs services, introduisent la compétition là
où ils le peuvent (sur et pour le marché) et mettent en place des agences indé-
pendantes de régulation (tableau 2) 6.
Cependant, comme le montre le tableau 2, la mise en place d’une agence
indépendante de régulation, l’une des principales recommandations concer-
nant les politiques d’infrastructures sur les dix ou quinze dernières années, ne
garantit pas des prises de participation du secteur privé. En effet, le nombre
de pays disposant de ces agences de régulation est supérieur au nombre de
pays dans lesquels le secteur privé participe à la distribution de l’électricité.
Inversement, la présence d’une agence de régulation n’est pas nécessaire pour
l’attractivité du secteur privé : le nombre de pays dans lesquels le secteur
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privé a des participations dans le secteur de l’eau et celui des chemins de fer
est supérieur au nombre de pays avec des agences de régulation indépendan-
tes dans ces secteurs.

5 Cette estimation a été faite indépendamment par des chercheurs au Département pour
le Développement International (DFID) et la Banque Mondiale (2005). Très grossière-
ment, cela été calculé de la façon suivante. La communauté internationale a une certaine
idée du stock de capital physique par pays et peut ainsi l’évaluer à prix constant. Le chan-
gement dans la valeur du stock donne une idée de l’investissement total dans les secteurs.
La contribution du secteur privé à cet investissement est donnée par l’engagement
total fait sur la même période par le secteur privé selon la base de données de la Banque
Mondiale sur la Participation du Secteur Privé dans les Infrastructures (PPI). Cela ris-
que d’être une surestimation, parce que les engagements ne sont pas nécessairement
déboursés.
6 Aucun pays n’a des agences de régulation complètement indépendantes. Souvent ces
agences ont un degré d’autonomie vis-à-vis du ministère en charge du secteur concerné.
Quand les politiciens veulent s’emparer de la fonction de régulation, ils le font tout sim-
plement, comme l’expérience de l’Amérique latine de ces trois dernières années le suggère.
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10 Antonio Estache

Le paradoxe entre les tableaux 1 et 2 n’est qu’apparent. La participation


du secteur privé dépend d’un plus grand nombre de facteurs autres que les ris-
ques associés à un mauvais régulateur ou à l’absence d’un régulateur indépen-
dant. Les risques de change, les risques commerciaux, et l’instabilité politique
peuvent également représenter des contraintes. Ces risques sont généralement
pris en compte dans l’estimation du taux de rendement minimum espéré par
les opérateurs privés sur un projet dans un pays. En ne prenant pas en compte
les raisons stratégiques qui peuvent entraîner l’entrée d’un opérateur privé
dans un pays même dans le cadre d’une transaction à faible rendement, le
coût du capital associé à une transaction est généralement perçu comme une
bonne approximation du rendement minimum espéré.
Plusieurs articles récents ont examiné ce coût du capital en expliquant
pourquoi les pays à plus faible revenu reçoivent moins de capitaux privés 7. En
effet, ces études indiquent que les rendements requis pour la mise en œuvre
d’un projet d’infrastructure dans un pays à faible revenu doivent être au
moins 2 à 3 points de pourcentage plus élevés que dans un pays en développe-
ment plus riche et en général plus de 2 fois le rendement espéré dans un pays
développé 8. En réalité, le taux de rendement moyen a été généralement en
deçà de ce coût du capital, particulièrement en Europe orientale et en Améri-
que latine où l’État se réengage de manière significative dans la provision des
services. Toutes conditions non financières étant égales par ailleurs, ces sta-
tistiques indiquent que le prix moyen indispensable pour obtenir le taux de
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rendement minimum requis dans les pays en développement les plus pauvres
doit être plus élevé que partout ailleurs car ce dernier doit couvrir un coût de
capital plus élevé. Cette situation est très difficile à assumer politiquement et
de moins en moins d’opérateurs privés sont disposés à le faire, en particulier
dans des secteurs sensibles tels que l’eau et le transport de personnes.
Les expériences de réformes ont apporté des éclaircissements sur les points
devant être analysés davantage par les chercheurs ainsi que ceux sur lesquels
les décideurs politiques doivent accorder plus d’attention. Ces leçons sont tou-
tefois très diverses à travers les différentes régions. L’Amérique latine a été
probablement la région la plus convaincante pour les analyses du rôle impor-
tant des infrastructures pour la croissance avec un nombre relativement plus
élevé d’études illustrant les coûts pour la croissance d’une baisse des investis-

7 Voir Estache et Pinglo (2005) pour tous les pays en développement et Sirtaine et al.
(2005) pour l’Amérique latine.
8 Sirtaine et al. (2005) fournissent une analyse détaillée de l’évolution du coût du capital
en Amérique latine et le comparent au taux de rendement qui peut être estimé à partir
des comptes des principaux opérateurs d’infrastructures dans la région.
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Infrastructures et développement 11

sements en infrastructures dans la région (voir Easterly et Serven 2003). Il


existe également un nombre croissant d’études qui désignent les infrastructu-
res comme facteur explicatif de l’écart entre les régions pauvres et riches au
sein des grands pays. L’expérience récente de l’Amérique latine a montré le
besoin d’analyser davantage les risques sociaux et politiques car ils jouent un
rôle important pour l’effectivité des réformes et donc leur soutenabilité. Il
n’est plus possible de réformer tout simplement par décret sans aucun effort
de mettre en place des politiques d’accompagnement. Dans cette région, les
pauvres ont clairement affirmé le type de services d’infrastructures dont ils
ont besoin 9. Cela nécessite donc très souvent, de la part des décideurs politi-
ques, d’appréhender comment concilier au mieux les préoccupations d’équité
ainsi que les incitations d’investissements qui ont dominé au cours des quinze
dernières années de réformes. L’expérience a également montré qu’il est pré-
férable de rechercher les possibilités permettant un engagement de l’État et
des opérateurs à accroître la responsabilisation des utilisateurs et des contri-
buables. Cela peut être obtenu en adoptant des modèles de régulation qui per-
mettent une connaissance transparente de l’efficience, de l’équité ainsi que
des questions budgétaires 10.
L’expérience des quinze dernières années a également montré que la com-
munauté internationale ignore encore les méthodes de réduction efficaces des
risques. L’Asie de l’Est pourrait avoir été le cas le plus illustratif en mettant
en exergue l’importance du risque de change pour le financement des infras-
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tructures 11. La première génération du partenariat public/privé en Asie de
l’Est a été fortement secouée par la crise de 1997. Environ dix années plus
tard, ces partenariats ne sont pas encore entièrement rétablis excepté en
Chine. Des expériences en Europe orientale et en Afrique ont également mon-
tré qu’il y a encore un long chemin à parcourir afin de comprendre le fonction-

9 Le rejet de la réforme des infrastructures des années 1990, en particulier, le rôle accru
du secteur privé dans la fourniture des services, n’a pas joué un rôle mineur dans la
vague de changements politiques en Argentine, en Bolivie, au Brésil, en Uruguay, ou
au Venezuela.
10 En effet, les réformes ont souvent un coût fiscal, souvent engendré comme faisant partie
des renégociations qui pourraient avoir été anticipées si un cadre de cohérence docu-
mentant les sources de coûts et les revenus des opérateurs de régulation et prenant en
compte les prévisions de la demande avait été adopté plus largement. Il est d’importance
cruciale de reconnaître que l’écart entre le taux de rendement d’une activité et les coûts
du capital sera payé par les contribuables ou les usagers. Il apparaît que les contribua-
bles ont été plus souvent sollicités qu’on ne le reconnaît. Voir Campos et al. (2003) sur
le coût fiscal réel du secteur après dix années de réformes en Amérique latine.
11 Les investisseurs en Argentine soutiendraient probablement que la pesofication de l’éco-
nomie réalisée en janvier 2002 est jusque-là la meilleure preuve de ce que signifie ce risque.
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12 Antonio Estache

nement des réformes institutionnelles dans ce secteur. Il se peut que les réformes
nécessitent d’être introduites lentement. Une meilleure connaissance est en
effet nécessaire sur la contre-productivité à instaurer des changements insti-
tutionnels sans pour autant prendre le temps nécessaire de mettre en place les
capacités institutionnelles en accord avec les réformes souhaitées. En Afrique
francophone par exemple, il a été difficile de mettre en place des contrats de
concessions qui sont des dérivés du système légal anglo-saxon. L’importance
de ce risque en Afrique a été moins bien étudiée que l’intensité et le moteur de
la renégociation (voir Guasch 2004 pour une revue du sujet sur l’Amérique
latine).
L’expérience souligne également l’importance des politiques. Des cas anec-
dotiques en Asie, en Europe orientale et en Amérique latine montrent que les
hommes politiques sont moins enclins à abandonner le contrôle d’un secteur
pourvoyeur de voix de vote dans les sociétés démocratiques. En outre, au sein
des sociétés largement corrompues, les hommes politiques n’abandonneront pas
le contrôle d’un secteur pourvoyeur d’importantes sommes d’argent et dans
lequel l’octroi de contrats est souvent à la source de transactions non contrôlées.
Enfin, les spécialistes partagent largement un sentiment selon lequel les
acteurs se préoccupant de la corruption doivent accorder un plus grand inté-
rêt aux régulations économiques ainsi qu’aux procédés régulateurs bien que
très peu d’évidences existent sur le lien direct entre la corruption et les régu-
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lations laxistes. Comme exposé ci-dessous, les évidences commencent à émerger
mais demeurent encore insuffisantes pour confirmer les intuitions des experts.
En réalité, la régulation ne sera probablement jamais indépendante bien que
plus de transparence et de responsabilisation des actions soient des objectifs
atteignables. Du fait des efforts et du temps que les gouvernements, déjà occu-
pés par d’autres aspects de l’agenda des réformes, devront consacrer à ces
objectifs, il est important de tester plus formellement si cela en vaut la peine.
Améliorer la responsabilisation des régulateurs et des opérateurs doit
commencer par une amélioration des indicateurs de mesure dans les diffé-
rents secteurs. La communauté internationale, par exemple, a des connaissan-
ces limitées sur le taux d’accès, l’abordabilité (pour financièrement accessible
aux personnes) la qualité ou le coût financier du secteur. La majeure partie de
l’information nécessaire pour s’assurer d’un minimum de responsabilisation
de la part du gouvernement, des donneurs ainsi que des opérateurs est soit
jamais estimée de manière assez rigoureuse, soit jamais ou très peu collectée.
Avant d’aborder les aspects généralement connus ou qui doivent l’être sur
chaque sujet, il convient de conclure cette section par une brève illustration
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Infrastructures et développement 13

chiffrée du secteur (tableau 3). Considérons cette illustration comme la situa-


tion avant-réforme à partir de laquelle les progrès après-réforme sont mesu-
rés. L’indicateur fondamental afin de définir cette situation de référence
pourrait être la part de la population ayant accès aux infrastructures de base.
Le tableau 3 indique un écart important entre les pays ayant les revenus les
plus faibles et les pays à revenu intermédiaire soulignant ainsi le long chemin
qui reste à parcourir pour les acteurs du développement.
Le tableau 3 ne met pas en exergue la dimension la plus fâcheuse de ces
écarts -la sévérité de l’exclusion des pauvres dans l’accès aux infrastructures 12.
Briceño et Klytchnikova (2006) montrent à partir d’une étude transversale
que les 20 % les plus pauvres sont beaucoup plus pauvres que les 20 % les plus
riches et que l’écart est plus grand pour les pays à revenu faible (tableau 4).

Tableau 3 : Accès aux services d’utilité publique, par secteur


ayant accès à une source d’eau

ayant accès à l’assainissement


Pourcentage de la population

Pourcentage de la population

Pourcentage de la population
ayant accès à un réseau

1000 personnes (2003)


téléphoniques pour
Nombre d’abonnés
Niveau du revenu

potable (2002)
électrique

(2002)
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Faible 31 76 65 41
Intermédiaire-
faible 82 319 85 72

Intermédiaire-
87 672 93 86
supérieur
En développe- 58 290 77 59
ment

Source : Estache, Goicoechea, et Trujillo 2006.

12 Dans les données des Enquêtes Démographiques et de Santé, les plus pauvres et les
plus riches sont définis à partir d’un indice d’actif utilisé comme approximation du
niveau de bien-être. Dans les données des Enquêtes sur la Mesure des Standards de Vie
(LSMS), les ménages sont classés par dépenses totales par tête.
EDD_2007-04.book Page 14 Thursday, January 31, 2008 7:49 PM

14 Antonio Estache

Tableau 4 : Accès aux services d’infrastructures de base pour les 20 pour cent
plus riches et les 20 pour cent plus pauvres de la population.
(Pourcentage de la population recevant des services)

Electricité Eau Assainissement Téléphone


Niveau 20 % 20 % 20 % 20 % 20 % 20 % 20 % 20 %
du revenu plus plus plus plus plus plus plus plus
national pauvres riches pauvres riches pauvres riches pauvres riches
Faible 9,7 68,7 41,1 78,5 27,2 68,8 3,2 24,5
Intermédiaire-
79,5 99,3 64,5 86,6 48,2 78,7 21,2 66,1
faible
Intermédiaire-
81,4 99,5 76,7 95 73,4 96,4 32 73,1
supérieur
Source : Briceño et Klytchnikova 2006.
Note : Données les plus récentes disponibles pour 2000-04.

Les Objectifs du Millénaire ont en partie absorbé les engagements pris afin
d’améliorer l’accès à l’eau et au téléphone 13. Les engagements pour l’électrifi-
cation ont été rajoutés comme éléments constitutifs de la déclaration de Johan-
nesburg. Un engagement similaire n’existe pas pour le secteur du transport et
très peu d’information existe sur ce qui pourrait être la situation de référence
dans le but d’évaluer la performance de ce secteur. La densité routière dans les
pays en développement les plus pauvres est d’environ le tiers de celle des pays
en développement les plus riches et d’environ le sixième de celle des pays déve-
loppés (Estache et Goicoechea 2005b). En majorité, comme établi par la section
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suivante, les études qui mettent en exergue l’importance du secteur des trans-
ports sont des travaux macroéconomiques analysant les facteurs de la crois-
sance. Une situation de référence idéale afin d’apprécier quantitativement les
progrès effectués devrait inclure des informations sur l’abordabilité et la qua-
lité des services. Ce type d’information est indisponible pour une grande majo-
rité des pays en développement. En général, les informations disponibles ne
sont pas basées sur une méthode scientifique rigoureuse et les comparaisons
entre pays ont assez souvent peu de sens étant donné les définitions assez dif-
férentes des standards de qualité et des pratiques de prix entre ces pays.
Une situation de référence idéale devrait également inclure des informa-
tions sur les coûts du secteur. Cela est particulièrement important compte
tenu de la taille des projets et de l’importance des transactions financières
engagées. Il existe très peu de données sur les coûts des infrastructures com-
parables entre les pays en développement malgré l’insistance auprès des déci-
deurs politiques sur l’amélioration du recouvrement des coûts du fait de leur

13 La preuve la plus récente suggère que les OMD ne seront pas atteints dans beaucoup
de pays du monde (Banque Mondiale 2005).
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Infrastructures et développement 15

charge financière très élevée pour le contribuable. En réalité, le coût pour le


contribuable de ce secteur est inconnu. Les statistiques financières de l’État
du FMI, la référence en données sur les finances publiques, contiennent très
peu d’informations permettant d’évaluer la performance du secteur des infras-
tructures 14.
L’expérience des quinze dernières années a montré que davantage d’efforts
doivent être consentis afin de s’assurer du fait que les leçons tirées des expé-
riences soient parfaitement prises en compte dans les recommandations émi-
ses pour les décideurs politiques. Cette expérience a également montré que la
communauté internationale a besoin de mieux évaluer les performances dans le
but de mesurer le degré d’efficacité des réformes et de garantir une meilleure
responsabilisation de tous les acteurs -gouvernements, opérateurs, banques et
autres acteurs financiers, usagers et donneurs.

2 QUEL EST L’EFFET DES INFRASTRUCTURES


SUR LA CROISSANCE ?

Depuis le milieu des années 1980, plus de 180 articles publiés en anglais, en
français ou en espagnol – et au moins autant d’articles non publiés – ont ana-
lysé les effets macroéconomiques des infrastructures. Il s’agit probablement
du sujet le plus abordé dans la littérature sur les infrastructures actuellement
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ainsi que du plus connu pour les personnes ne travaillant pas sur les infras-
tructures. Cette explosion de littérature a été principalement le résultat de
développements techniques et conceptuels associés à la nouvelle théorie de la
croissance et des débats ainsi suscités sur les politiques régionales (voir de la
Fuente 2002 pour une revue incluant une discussion sur les infrastructures).
Un des aspects les plus importants de cette littérature est le débat sur
l’importance des dépenses d’infrastructures à différents stades de développe-
ment. Le message principal de cette littérature semble être que le degré
d’importance des dépenses d’infrastructures est une question empirique et
que les infrastructures sont plus importantes dans les pays ou régions à faible
revenu que dans les pays ou régions plus riches.
La manière la plus fréquente d’évaluer quantitativement l’importance des
dépenses d’infrastructures est d’estimer des taux de rentabilité socio-écono-

14 Certains pays commencent à dresser indépendamment leurs propres lignes de réfé-


rence. L’Inde par exemple, a créé la très utile série annuelle du Rapport sur les infras-
tructures (India Infrastructure Report series), édité par 3iNetwork.
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16 Antonio Estache

miques des investissements nouveaux et antérieurs à partir d’une fonction de


production. La littérature académique estime en majorité ces rendements à
partir d’équations macroéconomiques de la croissance. Ces rendements sont
généralement obtenus à partir de données propres à un pays ou à un groupe
de pays sur plusieurs périodes. Au cours des années récentes, ces méthodes
ont avancé des rendements économiques des projets d’investissement de 30 à
40 % en moyenne pour les télécommunications, de plus de 40 % pour la pro-
duction d’électricité et de plus de 200 % pour les routes (lorsque les points
aberrants sont exclus, la moyenne est de l’ordre de 80 % pour les routes). Les
rendements sont plus élevés dans les pays à bas revenu que dans les pays à
revenu intermédiaire (voir Canning et Bennathan 2000 ; Briceño, Estache, et
Shafik 2004).
La nouvelle théorie de la croissance a également analysé les facteurs de
convergence – et de divergence – des taux de croissance entre régions riches et
pauvres d’un même pays et de pays différents. Cette recherche a engendré des
classements de secteurs entre régions d’un même pays illustrant le fait que les
besoins en investissements publics d’un pays ne sont pas forcément homogè-
nes entre les différentes régions 15.
De nombreuses contributions sont apportées par la nouvelle économie
géographique qui a connu un essor après les travaux précurseurs de Krugman
(1991). La principale question dans ce cadre étant d’analyser les décisions de
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localisation des firmes. Le principal arbitrage – entre la proximité des mar-
chés et la concentration de la production – est déterminé par les coûts du
transport ainsi que les économies d’échelle dans la production. En relation
avec cette théorie, on observe également une (re)-émergence des concepts de
planification territoriale, avec une vision des dépenses directes sur la base des
priorités territoriales plutôt que des priorités sectorielles. Toutefois, l’impor-
tance d’un grand nombre de facteurs différents a entraîné un développement
rapide de cette littérature 16. Le résultat à ce niveau pourrait être que bien
que la théorie mette en évidence un rôle potentiellement important des infras-
tructures, davantage d’évidences empiriques sont nécessaires.
La littérature portant sur l’importance de la croissance s’interroge en
majorité si la priorité doit être donnée au développement rural ou urbain. Il

15 Voir l’analyse de l’Espagne par de la Fuente et Vives (1995) pour un exemple parfait de
comment des études empiriques créatives se fondant sur une bonne théorie peuvent
guider les décisions d’investissement public.
16 Voir Baldwin et al. (2003) pour une vue d’ensemble, y compris un chapitre sur l’impor-
tance des infrastructures pour l’efficacité des politiques régionales.
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Infrastructures et développement 17

pourrait s’agir du plus grand domaine de recherches futures 17. Étant donné
que les pauvres vivent dans des zones relativement peu peuplées et dépendent
fortement de productions liées aux ressources naturelles, leurs besoins en
infrastructures sont différents de ceux des pauvres urbains 18. Les deux grou-
pes ont un accès limité aux infrastructures publiques ainsi qu’aux services mais
les contraintes physiques d’accès au travail et aux marchés de produits sont
plus élevées pour les ruraux pauvres (voir les études de cas de Fan et de ses co-
auteurs sur la Chine, la Thaïlande et l’Ouganda ; voir Van de Walle et Cratty
2004 pour de récentes études détaillées). Les enquêtes ménages récentes sem-
blent indiquer que les pauvres urbains ne peuvent généralement pas supporter
les coûts afin d’avoir accès aux services d’eau et d’électricité. L’accès des ruraux
pauvres aux réseaux d’eau et d’électricité est encore plus faible car la majorité
d’entre eux préfèrent subvenir à leurs besoins par le biais de moyens locaux
plus abordables tels que l’énergie solaire, les pompes à eaux et les télécommuni-
cations par le biais de satellites. Dans le contexte d’urbanisation, la croissance
des grandes villes est en passe de devenir une source majeure de demande
d’infrastructures additionnelles suscitant un sentiment d’urgence dans cer-
tains milieux politiques 19. Ce sentiment d’urgence est toutefois critiqué par
certains universitaires qui l’accusent de favoriser une concentration urbaine
excessive (Henderson 2002). Il y a en effet un débat houleux sur le fait que les
nouvelles infrastructures, particulièrement dans le domaine du transport inter-
régional, créent des incitations additionnelles pour la migration rurale-urbaine.
Le débat est d’autant plus houleux que les évidences avancées par chacune des
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deux parties manquent de pertinence dans la mesure où les discussions repo-
sent sur des études de cas plutôt que sur des analyses techniques.

17 Le seuil minimum de population pour définir les zones urbaines varie fortement entre
les pays, mais « l’urbain » est généralement caractérisé par la densité des habitations
dans une zone construite de façon contiguë, par la structure de l’activité économique,
et parfois par les attributs administratifs.
18 La diversification des sources de revenu est un élément clé des stratégies de réduction de
la pauvreté rurale et qui dépend des infrastructures pour être efficace (voir Ellis 1998
pour une revue).
Dans une revue de la littérature identifiant une trappe à pauvreté similaire à celle obser-
vée dans des régions avec de fortes populations rurales, comme en Afrique, Booth (2004)
dresse la liste de huit facteurs utilisés par tous les auteurs pour expliquer la pauvreté qui
est principalement rurale dans ces régions. De pauvres terres et infrastructures de trans-
port maritime en sont un, qui font que le développement des marchés est particulière-
ment difficile. Fan, Jitsuchon, et Methakunnavut (2004) ; Fan, Zhang, et Rao (2004) ; et
Fan et Chan-Kang (2004) fournissent des preuves impressionnantes sur les canaux à par-
tir desquels les infrastructures contribuent à la réduction de la pauvreté et montrent
comment ces différents canaux peuvent être entre pays et à l’intérieur des pays.
19 Il y a plus de 400 villes avec une population de plus de 1 million d’habitants – contre
seize villes il y a 100 ans.
EDD_2007-04.book Page 18 Thursday, January 31, 2008 7:49 PM

18 Antonio Estache

3 COMMENT LES RÉFORMES DANS LE SECTEUR


DES INFRASTRUCTURES ONT-ELLES AFFECTÉ
LES PAUVRES ?

Au cours des quatre dernières années, les organisations internationales, les


agences bilatérales ainsi que les groupes d’experts ont produit sept livres de
référence analysant l’effet des réformes du secteur des infrastructures sur les
pauvres (Estache, Foster, et Woodon 2002 sur l’Amérique latine pour la Banque
Mondiale ; Ugaz et Waddams-Price 2003 sur l’Amérique latine et l’Europe pour
les Nations unies ; Brook et Irwin 2003 sur l’expérience mondiale pour le
Département du Développement International et la Banque Mondiale ; Kessides
2004 pour la Banque Mondiale ; Nellis et Birdsall 2005 sur l’expérience mon-
diale pour le Centre de Développement Global ; Alam et al. 2005 sur l’Europe
orientale pour la Banque Mondiale ; et Estache et Wodon 2006 sur l’Afrique
pour la Banque Mondiale) 20. Le message principal issu de ces recherches est
que les réformes des années 1990 ont de manière générale accru l’efficience
du secteur des infrastructures bien que ces gains d’efficience n’aient pas tou-
jours été partagés avec les usagers particulièrement les pauvres. Les six raisons
principales pour lesquelles les pauvres n’ont pas toujours été bénéficiaires de
ces gains sont les suivantes :
(a) lorsque les droits de douanes ont été révisés de manière à être plus effi-
cients (lorsque les pays ont supprimé les subventions croisées par exemple) ils
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deviennent moins progressifs ou plus dégressifs ; (b) des augmentations
importantes des taux de taxations indirectes – qui tendent à être plus dégres-
sifs que les autres types d’impôts – étaient appliquées pour réformer le sec-
teur des infrastructures afin de permettre à l’État de récupérer une partie de
la rente générée par les gains d’efficience ; (c) les opérateurs améliorent leurs
opérations de collecte des sommes dues par les usagers ; (d) l’augmentation de
la qualité des services rend ces derniers beaucoup trop chers et donc inacces-
sibles pour certains usagers ; (e) l’écrémage des ordres profitables dans la con-
ception des restructurations supprime les subventions croisées, ralentissant
les programmes d’investissements dans les régions les plus pauvres lorsque
les gouvernements ne peuvent pas les compenser par des subventions supplé-
mentaires et (f) les échecs des politiques visant à éliminer le rationnement du
crédit augmentent les difficultés de financement des besoins d’expansion des
usagers pauvres.

20 Ces institutions ont aussi généré un nombre élevé d’études non publiées et d’articles,
dont certains sont disponibles sur leurs sites web. Ils sont trop nombreux pour qu’enfin
justice leur soit rendue ici.
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Infrastructures et développement 19

Tout ceci implique que la pauvreté n’était pas traitée soigneusement lors
des politiques de régulation et des autres programmes mis en œuvre dans les
années 1990. Des études récentes en Europe orientale indiquent que l’aborda-
bilité devrait être un défi aussi important que l’accès 21. Dans la majeure partie
des cas, les effets négatifs sur la pauvreté sont le résultat de la mise en place de
subventions mal ciblées.
Les décideurs politiques dans le domaine des infrastructures essaient géné-
ralement d’atteindre des objectifs d’abordabilité et d’accès séparément, utili-
sant ainsi différentes mesures pour atteindre ces objectifs. Concernant l’accès,
trois mesures principales existent : (a) les mesures indiquant l’obligation de
fourniture par l’opérateur (une obligation de service universel évitant ainsi
toute exclusion unilatérale de la part du fournisseur) 22 ; (b) les mesures per-
mettant de réduire les coûts de connection (par des subventions croisées ou
des subventions directes intégrées dans la conception des tarifs ou par le biais
de crédit ou de mécanismes de paiement discriminatoires en faveur des pau-
vres) ; et (c) les mesures visant à accroître la gamme de fournisseurs (donnant
ainsi le choix aux usagers, y compris la possibilité de réduire les coûts en choi-
sissant des fournisseurs dont la qualité des services est moindre).
Pour l’abordabilité de manière générale, toutes les mesures ont un effet
par au moins l’un des mécanismes suivants : (a) par une réduction de la facture
pour les ménages pauvres (grâce à un service minimum ou des subventions à
partir d’une évaluation des ressources basée sur les caractéristiques socioéco-
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nomiques ou les caractéristiques de la connection de l’usager qui sont financés
par des subventions croisées ou des subventions directes prises en compte dans
la conception de la taxation) ; (b) par une réduction du coût des services (en
évitant de donner le droit de monopole lorsque cela n’est pas nécessaire ou en
incitant les fournisseurs à réduire les coûts et à s’assurer que cette réduction
de coût est transmise aux usagers) ; et (c) en facilitant le paiement des factures
(en autorisant des facilités administratives uniquement pour les pauvres per-
manents ou temporaires) (voir Estache, Foster, et Wodon 2002).
Pendant longtemps, l’analyse de ces mesures, généralement abordée sur
le plan théorique par les spécialistes des finances publiques, s’est attardée sur
l’efficience. Au cours des dix ou quinze dernières années, d’importants pro-

21 Voir Alam et al. (2005) et Estache et Wodon (2002) sur l’Afrique ; Estache, Foster, et
Wodon sur l’Amérique latine (2002) ; et Komives, Whittington, et Wu (2006) pour un
échantillon de pays dans des régions variées.
22 Cette question n’est pas traitée ici ; les lecteurs intéressés devraient voir Chisari, Estache,
et Waddams-Price (2003) ; Clarke et Wallsten (2002) ; Cremer et al. (2001) ; Gasmi et al.
(2002) ; et Laffont (2005).
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20 Antonio Estache

grès méthodologiques ont permis aux chercheurs d’établir de meilleures évalua-


tions de ces mesures, non seulement sur le plan de l’efficience mais également
en termes d’effets de ces mesures sur le comportement des pauvres et des four-
nisseurs de services. Les développements méthodologiques concernent trois
domaines : la microéconomie (particulièrement le développement de l’écono-
métrie des données de panel), les techniques d’évaluations ainsi que la théorie
des incitations appliquée à la théorie de la régulation. Une revue exhaustive
des différents aspects des techniques d’évaluations est donnée par Bourguignon
et Pereira da Silva (2003). Bien que non encore assez répandue, la majeure par-
tie des analyses basées sur la théorie des incitations est exposée dans Laffont
et Tirole (1993) de manière générale et dans Laffont (2005) pour le cas parti-
culier des pays en développement.
Les évidences empiriques ne sont toutefois pas à la hauteur des espéran-
ces des décideurs politiques dans le domaine des infrastructures. Les meilleu-
res revues économiques contiennent relativement peu d’articles portant sur le
ciblage, l’abordabilité, ou la régulation des services d’infrastructures dans les
pays en développement (même pour la santé et l’éducation, secteurs pour les-
quels il existe largement plus de données et la qualité des données pousse à
des publications académiques) 23.
Bien que le besoin de davantage d’études empiriques soit présent, les résul-
tats existant de nos jours sont surprenants. En dépit de leur popularité dans
les milieux politiques, particulièrement dans le domaine des infrastructures,
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les subventions ciblées (ainsi que les mesures de protection sociale) ont pen-
dant longtemps été négligées par les chercheurs pour leur inefficacité présu-
mée (en termes d’efficience économique et de coût des incitations). Cependant,
les données récentes soulignent dans plusieurs cas que ces coûts sont modes-
tes : les subventions directes et les subventions croisées ne sont pas toujours
aussi néfastes comme il est généralement admis. Ces résultats semblent
demeurer en considérant la pauvreté temporaire aussi bien que la pauvreté
chronique 24. Ils confirment ainsi les intuitions de nombreux praticiens dans
le domaine des infrastructures 25.
Les résultats suggèrent que les pauvres peuvent être défavorisés dans
l’accès aux services d’infrastructures de plusieurs manières. Comme générale-

23 Pour une vue d’ensemble de la littérature sur les subventions qui ont une importance
pour les infrastructures, voir Foster et al. (2005).
24 Pour une révision utile du débat et une revue des preuves empiriques, voir Ravallion
(2003).
25 Voir Foster, Gomez-Lobo, et Halpern (2000a, 2000b) ; Foster et Irusta (2003) ; Foster
et Araujo (2004) ; et Gomez-Lobo et Contreras (2003) par exemple.
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Infrastructures et développement 21

ment mis en exergue par les spécialistes des problèmes d’accès, les pauvres
ont assez souvent besoin de subventions pour couvrir les coûts de connection,
mais aussi pour supporter les coûts liés à un niveau minimum de consomma-
tion 26. Il est donc inutile de fournir l’accès lorsque les revenus ne permettent
pas de couvrir les coûts liés à la consommation.
Les résultats montrent également que du fait de la difficulté à mobiliser
les ressources pour le financement des subventions ciblées à laquelle font face
un grand nombre de gouvernements, la solution la plus réaliste est assez sou-
vent la subvention croisée. Ces subventions aident à financer les besoins des
pauvres par le biais de mécanismes de redistribution à l’intérieur d’un sec-
teur. Pour chaque cas répertorié de subvention croisée mal ciblée, il existe un
cas répertorié de réussite de la mise en œuvre d’une subvention croisée, indi-
quant ainsi qu’il s’agit d’une option à prendre en compte. Toutefois, il est éga-
lement important de reconnaître que les mécanismes de ciblage bien planifiés
ont également été régressifs et ces régressions pourraient provenir d’un échec
au niveau du ciblage de l’accès, de la consommation ou des deux 27.
La pauvreté est également un sujet assez souvent lié au phénomène de
distribution. Les techniques d’évaluation permettent actuellement des études
systématiques des effets distributifs des réformes. Une réforme peut être en
faveur des pauvres et être régressive, mais elle peut aussi être régressive sans
bénéficier aux pauvres. Ces interrogations peuvent de nos jours être traitées
rigoureusement à partir d’analyses quantitatives. Les nouvelles techniques
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permettent l’identification et l’étude des groupes les plus vulnérables lors des
réformes. Elles permettent également de bonnes évaluations de l’impact
nominal et relatif des réformes. Cette littérature va au-delà de simples conclu-
sions formulées au lendemain des réformes. Elle incite à des contrôles systé-
matiques des effets des nouvelles réformes et projets afin de s’assurer qu’ils
prennent en compte les leçons du passé. Cela peut être fait au niveau projet
(voir Baker 2003 et Duflo 2003 pour des revues), au niveau sectoriel (voir
Torero et von Braun 2006 pour un large éventail d’études de cas de pays dans
le secteur des télécommunications), ou au niveau macroéconomique. Les con-
trôles systématiques peuvent être importants lorsque les données ménages
sont de mauvaise qualité ou que les interactions avec les autres secteurs ont
besoin d’être évaluées.

26 Les organisations internationales et la plupart des pays définissent un niveau mini-


mum de consommation pour l’eau et l’énergie. Les règles de méthode sont que les
ménages dans les pays en développement ne devraient pas dépenser plus de 5 pour cent
de leur revenu en eau et en assainissement ou plus de 5-10 pour cent en énergie (en
fonction des régions).
27 Estache, Foster, et Wodon (2002) montrent combien cela est courant en Amérique latine.
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22 Antonio Estache

Les réformes dans le secteur des infrastructures se produisent dans un


cadre intégré ; ces réformes ont un impact sur les pauvres par le biais de leur
impact sur les autres marchés (tels que le marché du travail et celui des inves-
tissements et de l’épargne) qui ont une influence importante sur les pauvres.
Ces effets rétroactifs sont potentiellement importants pour la réduction de la
pauvreté ; une analyse économique d’ensemble s’avère donc nécessaire. Ce
type d’analyse globale fait généralement appel aux modèles multi-agents à
plusieurs biens. Les modèles d’équilibre général calculable (EGC) deviennent
de plus en plus une alternative à ce type d’analyse.
Les modèles d’équilibre général calculable simulent les impacts économi-
ques et sociaux des réformes. Ils sont basés sur la structure socioéconomique
de la matrice de comptabilité sociale (MCS) qui présente une désagrégation
multisectorielle. L’idée principale sur laquelle repose une MCS est d’identifier
les relations dans un système économique. Les éléments essentiels lors de la
construction d’une MCS sont les tableaux d’entrées-sorties qui sont combinés
avec les comptes de l’État et les enquêtes ménages. Les enquêtes ménages
sont primordiales pour réaliser des analyses d’impact sur la pauvreté et le
bien-être. La profondeur de l’analyse dépendra du type de données disponi-
bles. La littérature des modèles EGC sur les effets des réformes des services
d’infrastructures publiques est assez limitée 28. La contribution majeure de
cette littérature est de mettre en exergue l’importance des infrastructures
pour l’atteinte des OMD et peut-être surtout de montrer que des régulations
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bien menées sont progressives et ont des effets de redistribution.
Ces techniques n’ont pas encore permis de mettre fin à un débat ancien
sur les infrastructures – le débat sur la nécessité de subvenir différemment
aux besoins des ruraux et des urbains. L’impact des infrastructures en milieu
rural sur l’amélioration de la productivité agricole et la réduction de la pauvreté
rurale bénéficie d’un large consensus 29. Toutefois, des recherches actuelles
illustrent des effets sur les disparités rurales-urbaines qui sont soit au béné-
fice des réformes ou plutôt à leur encontre. Boccanfuso, Estache et Savard
(2006) montrent que les réformes du secteur de l’eau au Sénégal ont eu des
impacts initiaux assez différents dans la capitale, les villes secondaires et les
zones rurales. A condition d’utiliser des subventions croisées entre les régions,

28 Voir Chisari, Estache, et Romero (1999) ; Chisari, Estache, et Waddams-Price 2003 ; et


Navajas (2000) pour l’Argentine. Voir Andersen et Faris (2002) pour le gaz naturel en
Bolivie ; Boccanfuso, Estache, et Savard (2006) pour le Sénégal ; et Adam et Bevans
(2004) pour l’Ouganda.
29 Voir van de Walle et Nead (1995) ; Lanjouw (1999) ; Jacoby (2000) ; van de Walle
(2002) ; Gibson et Rozelle (2001) ; Renkow, Hallstrom, et Karanja (2004) ; Lokshin et
Yemtsov (2005) ; et Warr (2005).
EDD_2007-04.book Page 23 Thursday, January 31, 2008 7:49 PM

Infrastructures et développement 23

la majorité des politiques financières de recouvrement des coûts affectent diffé-


remment les pauvres dans chaque région lorsque la différence entre les fournis-
seurs (qui peuvent être des grandes unités publiques, de grandes unités privées
ou de petites entreprises privées) des différentes régions est prise en compte.
Adam et Bevan (2005) trouvent que les investissements en infrastructu-
res en Ouganda en faveur du secteur des biens échangeables ont des effets dif-
férents sur la distribution de la pauvreté entre les zones rurales et urbaines
ainsi que sur le taux de change réel et les autres variables macroéconomiques.
Lorsque les infrastructures sont relativement plus destinées aux secteurs qui
favorisent les activités portant sur les biens échangeables (il s’agit par exem-
ple des télécommunications ou de l’énergie qui stimulent plus la demande en
provenance du secteur manufacturier et des services par rapport au secteur
du transport), l’appréciation du taux de change est la plus importante. Lors-
que les infrastructures sont, par contre, relativement plus dirigées vers le sec-
teur des non échangeables (les routes rurales et urbaines par exemple), le
taux de change réel varie assez difficilement. La différence principale entre les
deux cas de figure est l’effet de distribution. Les politiques d’infrastructures
en faveur du secteur des échangeables sont bénéfiques pour toutes les catégo-
ries de revenus ; des politiques en faveur du secteur des non échangeables
sont bénéfiques pour les urbains pauvres et, contre-intuitivement, sont en
défaveur des pauvres lorsque les phénomènes migratoires ne sont pas pris en
compte. Les pauvres ruraux ont des gains en termes d’un accès plus impor-
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tant aux produits alimentaires mais enregistrent également des pertes du fait
des revenus plus faibles qu’ils perçoivent pour leurs activités de productions
alimentaires. Cette perte est d’autant plus élevée que les investissements en
infrastructures sont plus destinés au secteur des non échangeables.
Une des rares illustrations quantitatives de l’importance actuelle du débat
ancien sur l’importance des besoins ruraux/urbains en infrastructures pour la
formulation des politiques est apportée par Adam et Bevan (2005). Ce type de
débat basé sur des données quantitatives est assez rare. Il serait par exemple
intéressant de savoir à quel point il existe un biais en faveur de la réduction de
la pauvreté rurale par rapport à la pauvreté urbaine 30. Les recherches limitées
des infrastructures sur ce sujet font que les décideurs politiques doivent se

30 Beaucoup de ceux qui sont dans la communauté de l’eau argumenteront contre cela, au
moins pour leur secteur. Selon les statistiques de l’Organisation Mondiale de la Santé,
les régions rurales dans les pays en développement ont 5.3 fois plus de personnes qui
ne sont pas desservies en eau et 3.6 fois plus de personnes qui ne sont pas desservies en
assainissement que les zones urbaines (Site web de l’OMS). Ce manque de services
n’est pas bien corrélé avec l’orientation des programmes de prêts de beaucoup de dona-
teurs. Par exemple, dans le portefeuille de prêts de la Banque mondiale entre 1990 et
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24 Antonio Estache

baser sur des évidences non rigoureuses scientifiquement. Un problème du même


ordre non encore abordé par les chercheurs serait la possibilité d’observer ce
type d’arbitrage entre les différents secteurs (le secteur de l’eau comparé à
celui de l’énergie, des télécommunications et des transports).
Tout cela suppose bien entendu que l’évolution de la pauvreté soit un phé-
nomène compris. Un grand nombre d’études montrent que les pauvres s’urba-
nisent plus rapidement par rapport à la population dans son ensemble, ce qui
implique qu’une anticipation des besoins de ces derniers nécessite une plus
grande attention sur les problèmes urbains 31. Déjà dans plusieurs régions, les
données suggèrent autre chose. En Afrique par exemple, plus des deux tiers
de la population est rurale de nos jours et il est fort probable que cette popula-
tion rurale demeure majoritaire pendant encore longtemps. Généralement, on
observe que la majorité des pauvres dans les pays en développement sera tou-
jours dans les zones rurales bien que la majeure partie de la population sera
plutôt urbaine (Ravallion 2002) 32.
Le choix entre les infrastructures rurales et urbaines étant une question
empirique (Reardon 2001 ; Sahn, Stifel, et Younger 2003 ; Lall, Harris, et
Shalizi 2006), les données sont donc d’une grande importance. Les enquêtes
sur les conditions de vie des populations (Living Standard Measurement
Surveys : LSMS), les enquêtes démographiques et de santé (EDS) et les enquê-
tes de consommation des ménages ne fournissent pas des données permettant
une bonne analyse de la question, et ce pour plusieurs raisons 33. En premier
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lieu, le secteur des infrastructures n’est généralement pas bien couvert par
ces enquêtes. En second lieu, une différence significative existe au niveau de
la qualité des données entre les zones rurales et urbaines 34.

2001, les zones urbaines ont reçu six fois plus de fonds de prêt que les zones rurales,
une différence qui ne s’explique pas par les différences de coûts unitaires. La différence
peut refléter des décisions plus stratégiques dans l’allocation des ressources. Selon le
Département de l’Évaluation de la Banque Mondiale, chaque dollar dépensé dans un
système d’eau rural fournit une couverture de population environ quatre fois plus éle-
vée que pour un investissement urbain équivalent. Cela pourrait impliquer que l’on
devrait faire davantage pour couvrir les zones rurales, au moins dans certaines régions.
Cela pourrait aussi impliquer que ces nombres reflètent un biais de sélection dans le
portefeuille de la Banque Mondiale. Améliorer la connaissance collective sur cette ques-
tion pourrait être un domaine intéressant de recherche.
31 Voir Ravallion (2002) et Cohen (2004) pour une discussion des tendances de population.
32 Cela n’est pas un nouveau débat. Lipton (1977) et Mellor (1976) étaient préoccupés par
la question opposée : le biais urbain de la communauté internationale était-il rationnel ?
33 Voir Sahn, Stifel, et Younger (2003) pour une approche plus pertinente d’évaluation de
l’importance relative des infrastructures dans les schémas de dépenses des personnes
pauvres.
34 Satterthwaite (2004) fournit une discussion intéressante sur les questions de données.
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Infrastructures et développement 25

Ces problèmes de données sont assez importants mais peuvent être sur-
montés. Lokshin et Yemtsow (2005) établissent des données de panel au niveau
communautaire à partir d’enquêtes ménages classiques avec un module spé-
cial qu’ils utilisent pour mesurer l’impact de projets de réhabilitation d’infras-
tructures en Georgie entre 1998 et 2001. A partir de données obtenues à faibles
coûts, leur analyse aboutit à un possible classement des gains de rendements
provenant de chaque type de projet dans un pays donné. Cette approche peut
être utile pour l’analyse d’impact de micro-projets basés sur la participation
communautaire dont bénéficient un très grand nombre de populations ou de
programmes d’investissements décentralisés de l’État.
Les chercheurs n’ont pas réussi à analyser des questions fondamentales.
En quoi les meilleures stratégies résultant de ces différentes évaluations des
besoins des pauvres ruraux et urbains sont-elles en accord avec les stratégies
qui permettent de maximiser la probabilité d’atteindre les objectifs de pau-
vreté des OMD ? La réduction de la pauvreté provenant d’un dollar supplé-
mentaire investi est-elle plus importante au niveau de la population rurale
assez dispersée ou au niveau d’une population urbaine et péri-urbaine forte-
ment concentrée ? Des arbitrages évidents existent également en fonction du
coût de la technologie (coût unitaire faible dans les zones rurales et coût
moyen faible du fait des économies d’échelle dans les zones urbaines). A moins
que les besoins ruraux et urbains soient traités séparément au niveau des dif-
férents Objectifs du Millénaire, la réduction de la pauvreté rurale ne recevra
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probablement pas la priorité qu’elle mérite 35. Le fait que les OMD ne fassent
pas de distinctions entre pauvreté chronique et pauvreté transitoire favorise
les pauvres ruraux. Cela implique que les stratégies conçues pour accélérer la
croissance afin d’atteindre la réduction de la pauvreté souhaitée mesurée à
partir d’un indice global de pauvreté seraient meilleures que les stratégies
bénéficiant aux pauvres chroniques uniquement (Gaiha 2003).

35 Selon Mitlin (2004), à cause de la défaillance typique à faire baisser les moyennes urbai-
nes (où l’accès paraît invariablement meilleur que dans les zones rurales, parce que les
riches vivent dans les villes), le bénéfice du doute dans la planification de l’assistance de
la plupart des pays, y compris les Documents de Stratégie de Réduction de la Pauvreté
(DSRP), est en train d’être donné aux zones rurales. Elle étaye son point de vue dans une
revue de 23 DSRP, trouvant qu’ils ne donnent pas trop de poids aux zones urbaines.
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26 Antonio Estache

4 LE FINANCEMENT BUDGÉTAIRE ET LES AUTRES


MOYENS DE FINANCEMENT COMME DÉFIS

Les principaux débats académiques et politiques sur les dimensions budgétai-


res du secteur des infrastructures portent sur les limites macroéconomiques
des financements publics et privés. Le point de désaccord le plus important est
probablement la marge financière qui permettrait de financer d’importants
investissements en réponse aux besoins de croissance et de réduction de la pau-
vreté. Ce débat est particulièrement sensible car la participation privée accroît
implicitement l’engagement fiscal du fait des garanties assez complexes four-
nies par le secteur public 36. Le débat est également attisé par le fait que dans
les pays pauvres, il est de plus en plus certain qu’il existe une limite à imposer
aux pauvres des paiements couvrant totalement les coûts pour les services
dont ils bénéficient. Cela implique donc la prise en compte probable de sub-
ventions directes ou croisées au niveau des équations financières.
Les exigences budgétaires et les options financières sont intimement liées.
Il s’agit de deux aspects liés d’un même problème : le montant du budget pou-
vant être alloué aux dépenses d’infrastructures pour atteindre un certain
niveau de croissance dépend de la capacité des usagers à couvrir les coûts
d’investissement ou de fonctionnement et de l’abordabilité.
Le cœur du débat porte sur l’importance de la conception des programmes
d’ajustements budgétaires macroéconomiques pour un niveau d’investissement
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en infrastructures. Les règles budgétaires classiques mises en place pour garan-
tir la soutenabilité de la dette comme composante de programmes d’ajuste-
ments macroéconomiques sont de plus en plus critiquées car elles sont accusées
de représenter des contraintes excessives à des politiques contra-cycliques
appropriées. En outre, une préoccupation assez répandue est que ces règles
pourraient réduire de façon permanente la contribution du secteur public à
l’accumulation du capital, particulièrement dans les infrastructures. Condi-
tionnée à un certain nombre de facteurs, la compression des dépenses d’inves-
tissement public dans les infrastructures peut être – et a été – associée à une
faible croissance économique et à une réduction moins efficiente de la pau-
vreté. Cela a donc attisé l’insolvabilité budgétaire, le principal problème que
les réductions de dépenses étaient supposées résoudre.
Ce débat a été intense en Europe comme élément constitutif de l’évalua-
tion du Pacte de stabilité (pour une revue, voir Turrini 2004 ; Buiter et Grafe
2004). Il a également émergé récemment dans les pays en développement dans

36 Pour une bonne vue d’ensemble des questions, voir Irwin (2007).
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Infrastructures et développement 27

un contexte de recherche d’une hausse du rôle du secteur privé dans le finan-


cement des infrastructures. Mis en exergue dans le livre édité par Easterly et
Serven en 2003, il constitue actuellement le courant dominant dans les
milieux politiques. En 2004, les chefs d’États brésilien et pakistanais ont sou-
ligné la nécessité de trouver des solutions alternatives à des ajustements bud-
gétaires qui ne pénaliseraient pas les projets d’infrastructures bien qu’admettant
que ces nouvelles règles devront éviter les éléphants blancs.
Le débat peut être résumé comme suit. Les programmes d’ajustements
classiques du FMI ont pour but de garantir que les dépenses publiques, incluant
les allocations sectorielles des dépenses, soient en accord avec (a) la contrainte
de liquidité de court terme du pays, (b) l’équilibre agrégé de court terme (pas
de pression inflationniste due à une demande excédentaire), (c) une soutena-
bilité de la dette à moyen terme, (d) le besoin d’éviter de supporter des dépen-
ses publiques excessivement coûteuses et inefficientes, et (e) la promotion de
la participation du secteur privé dans les infrastructures. La méthode pour
résoudre chacun de ces problèmes suscite un désaccord car il n’y a pas de con-
sensus sur des mesures précises à mettre en oeuvre. Pour chaque problème, il
existe des marges pour une analyse de sensitivité.
Des inquiétudes sont exprimées sur le fait que les contraintes de liquidités
fixent une limite inférieure pour tous les niveaux de dépenses plutôt qu’un
indicateur précis. Bien que cette contrainte soit un indicateur utile, il est
nécessaire de le compléter par une limite supérieure. Cette limite supérieure
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provient de trois sources : (a) la définition de la liquidité (voir Easterly et Ser-
ven 2003 pour des illustrations en Amérique latine), (b) l’horizon temporel
pendant lequel cette liquidité doit être considérée et calculée, et (c) le niveau
et le type de dépenses à prendre à compte 37.
En plus, il semble raisonnable d’avoir un meilleur sens de l’importance du
niveau, de l’origine et de la durée des sources de financement pour l’évalua-
tion de la faisabilité des investissements en infrastructures. Ce domaine a été
l’un des plus créatifs dans les politiques d’infrastructures sur les dix ou
quinze dernières années. Les questions de base qui nécessitent des réponses

37 Les questions sont les suivantes : quels types d’entreprises publiques devraient être
pris en compte ? Devraient-ils avoir des contraintes budgétaires sévères ? Les entrepri-
ses publiques devraient-elles être hors du budget (comme au Chili) ? Quelles sortes de
projets doivent être prises en compte ? Quelles sortes de garanties devraient être prises
en compte comme dépenses et à quel moment ? Ces garanties devraient-elles être prises
en compte sur une base de cash ou sur la base de la comptabilité d’exercice ? Les dépen-
ses récurrentes et les dépenses de capital doivent-elles être systématiquement séparées
pour chaque secteur ? (à la Blanchard et Giavazzi 2003) ?
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28 Antonio Estache

incluent les questions suivantes : quel type de sources de financement, budgé-


taire ou quasi-budgétaire, doit être considéré ? Quelle est l’importance des
sources de financement (institutions financières internationales, donneurs
bilatéraux, ou autres) ? Quand une partie du déficit quasi-fiscal est-il dû ?
Quelle part de participation privée empêche l’équilibre du projet ? Ce choix
conduira-t-il à un écrémage des ordres profitables dans la conception du projet ?
Devrait-il dépendre du niveau de partage de risque ou de quelque chose
d’autre ?
Plusieurs problèmes techniques vont au-delà de l’objectif de cet article. Un
de ces problèmes mérite toutefois une plus grande attention. Il est important
de prendre en compte lors du calcul de la marge budgétaire le fait que la solva-
bilité soit une notion inter-temporelle. En effet, la solvabilité doit dépendre des
valeurs présentes des créances et des dettes. Plusieurs universitaires ont mis
en exergue qu’il ne semble pas correct d’évaluer l’état des comptes budgétaires
uniquement en fonction de la durée des engagements financiers bruts 38.
Un aspect d’intérêt particulier dans ce contexte est que les investisse-
ments en infrastructures se manifestent par des flux financiers non classiques
qui se caractérisent par des coûts de court terme élevés et une forte rentabilité
de long terme. La comptabilité budgétaire classique ignore cela et introduit un
biais à l’encontre de tout projet ayant des flux de trésorerie initialement néga-
tifs, avec les coûts supportés dans le présent et les bénéfices qui s’accumulent
au cours du temps. Ce biais entraîne une réduction excessive des dépenses
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d’investissements, d’exploitation et d’entretien particulièrement lors des pério-
des d’efforts vers un objectif de déficit. Cela peut donc être désastreux pour les
dépenses contribuant à améliorer la croissance future. En effet, toute analyse
des infrastructures a besoin de faire la distinction entre les dépenses récur-
rentes et les dépenses en capital puis de les considérer en fonction de leur con-
tribution dans la croissance et dans l’agenda social. Ces deux types de dépenses
sont liés mais leur importance relative varie significativement selon les sec-
teurs. Jusqu’à présent les réductions tendent à tout affecter, avec des consé-
quences lourdes (y compris régressives) sur la distribution (voir Calderon et
Chong 2004).
Une recherche récente étend le débat. Engel, Galetovic et Fisher (2006)
pensent qu’il est utile d’observer le coût final des participations privées dans
les infrastructures du point de vue de l’importance des modes de financement
pour les comptes du secteur public. Ils trouvent un « résultat non significatif »,

38 Pour une discussion économique, voir Ballasone et Franco (2000) ; Blanchard et Giavazzi
(2003) ; Buiter et Grafe (2004) ; et Turrini (2004). Pour un point de vue comptable, voir
McCrae et Aiken (2000).
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Infrastructures et développement 29

selon lequel, sous un certain nombre de conditions raisonnables, le déficit ne


devrait pas être influencé par le mode de financement des infrastructures. Ce
résultat non significatif ne tient pas dans plusieurs situations mais les auteurs
mettent en exergue la possibilité de prédire le signe de l’impact à partir des
situations spécifiques à traiter. Tirole (2006a) oriente le débat au niveau de la
politique et du besoin de mettre en relation les problèmes d’incitations dans le
secteur des infrastructures et les problèmes budgétaires de ce secteur.
Il ne s’agit pas uniquement d’un problème de comptabilité. Au cours des
vingt dernières années, la prise de décision politique a remplacé les critères
économiques dans la détermination de l’allocation des ressources dans les pays
en développement. L’ensemble des institutions multilatérales de développement
avaient chacune il y a vingt ans leurs manuels d’analyses coûts-bénéfices éco-
nomiques qui étaient supposés être utilisés lors des révisions annuelles des
dépenses publiques. Ces révisions étaient censées guider l’allocation des res-
sources entre les secteurs. Les allocations sectorielles ainsi que les décisions
d’investissements intra-sectorielles étaient facilement mises en place, car elles
dépendaient des taux de rentabilité économiques. Les changements dans la
procédure d’allocation des ressources au cours des vingt dernières années ont
conduit à moins d’investissements dans les infrastructures (de manière géné-
rale à cause de leur faible présence dans l’agenda international de l’aide au
développement), sans une plus grande attention accordée aux rendements éco-
nomiques.
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La nécessité de contrôler l’allocation des ressources pour l’entretien des
biens est importante au moins pour certains secteurs et certains pays. Riojas
(2003) montre que dans certains pays, l’entretien serait plus important pour
la croissance que de nouveaux investissements. A partir d’un modèle dans
lequel la croissance est tirée par les infrastructures, Kalaitzidakis et Kalyvitis
(2004) montrent que la durabilité des capitaux publics est endogène et varie
selon son usage et le niveau des dépenses d’entretien. Ils montrent également
que les changements dans les dépenses totales et la part des dépenses d’entre-
tien guident l’état régulier et le comportement dynamique de l’économie. Les
règles d’allocation qui impliquent des proportions fixées de manière perma-
nente entre les investissements et les opérations d’entretien peuvent donc
avoir des conséquences désastreuses à long terme.
Pour un grand nombre de pays, le partenariat avec le secteur privé sera
une option rationnelle quels que soient les résultats des recherches actuelles
sur le degré de soutenabilité des dépenses publiques en infrastructures et leur
allocation entre dépenses d’entretien et investissement. Le défi à relever dans
ce partenariat sera probablement d’évaluer l’impact des risques d’allocation
entre le secteur public et privé sur la décision du secteur privé de prendre part
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30 Antonio Estache

au partenariat. Malgré l’importance de la conception des mécanismes d’allo-


cation de risque, il y a relativement peu de littérature théorique innovatrice
spécifique aux infrastructures sur ce sujet provenant des chercheurs spéciali-
sés dans la modélisation des problèmes d’agence. Cela est d’autant plus sur-
prenant que la littérature théorique portant sur les possibilités de partenariat
public/privé est vaste 39.
Cette recherche a engendré plusieurs éclaircissements importants. Le pre-
mier est que les régulateurs doivent arbitrer entre les niveaux de risque et
leur distribution, le niveau d’efficience qui peut être atteint dans les infras-
tructures, et les rentes qui restent aux opérateurs. En d’autres termes, pour
être viable, il pourrait être nécessaire à un mécanisme de financement et à un
régime de régulation de se fier à une allocation de risque qui ne produit pas le
résultat le plus efficient dans la fourniture de service. Cela implique par exem-
ple que lorsque les niveaux de risque sont identifiés comme élevés, la régulation
du taux de rentabilité pourrait être plus efficace qu’un régime de plafonnement
des prix dans l’attractivité des capitaux privés. De manière générale, cette lit-
térature avance que les caractéristiques des pays en développement condui-
sent assez souvent à des recommandations très différentes de celles émises
pour les restructurations des infrastructures dans les pays industrialisés. En
effet, une absence de succès total des réformes d’infrastructures est observée
dans les pays en développement car ces derniers ont des capacités limitées en
termes de mise en œuvre effective des réformes et font face également à des
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niveaux de risque particulièrement élevés. Cette littérature indique également
l’importance des questions institutionnelles, y compris l’importance du dévelop-
pement du marché des capitaux.
Un autre axe de recherche se focalise sur les questions du niveau de déve-
loppement des marchés financiers locaux. Cet axe analyse généralement des
ressources financières supérieures aux ressources nécessaires pour les inves-
tissements en infrastructures uniquement (voir Bortolotti et Siniscalco 2004
pour une revue récente portant sur l’expérience mondiale et von Hirshausen
2002 pour une discussion détaillée des interactions entre le développement
institutionnel et les réformes d’infrastructures dans les pays d’Europe de
l’Est). Le message principal – l’importance des infrastructures – est actuelle-
ment le fonds de commerce de plusieurs agences d’aide.
Un troisième axe de recherche se focalise sur la distribution optimale du
risque entre les financeurs. Il implique le développement de nouveaux produits
de réduction de risque et des applications pour accroître la mobilisation des

39 Laffont et Tirole (1993) catalysent cette littérature. Voir aussi Armstrong et Sapington
(à paraître) ; Bos (1994, 2003) ; Hart (2003) ; Laffont (2000, 2005) ; et Newberry (2000).
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Infrastructures et développement 31

capitaux privés destinés au développement des infrastructures (voir Esty 2004


pour une revue générale ; Irwin 2003 pour une application aux infrastructu-
res). La littérature fournit quatre leçons principales aux décideurs politiques :
• D’un point de vue strictement financier, la structure financière est impor-
tante – particulièrement pour la conception des stratégies financières des
pays en développement. La structure de l’autorité associée au financement
des projets d’infrastructures revêt également une importance particulière
(Tirole 2006b).
• Les mécanismes améliorés d’allocation des risques prenant en compte les ris-
ques de change et les risques de régulations peuvent permettre de réduire les
incertitudes qui affectent les investisseurs privés en considérant les risques
liés aux infrastructures (Irwin 2007).
• La coordination devrait permettre aux établissements de crédit de réduire le
niveau des risques individuels lorsque les marchés sont imparfaits (Tirole
2006b).
• Un domaine de recherche en expansion illustre l’importance des audits et les
limites de la créativité dans les montages financiers lorsque la responsabili-
sation financière est limitée (Iossa et Legros 2004).
Le quatrième axe de recherche reflète le fait qu’une grande partie du
développement des infrastructures se fait au niveau sous-souverain avec des
entités sous-souveraines qui sont responsables de la fourniture des services
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publics (voir Freire et Peterson 2004 pour une revue d’ensemble). La capacité
budgétaire est le problème principal pour le financement des besoins d’inves-
tissement infra-national (voir Lewis 2003 sur l’Indonésie). La mobilisation de
capitaux privés supplémentaires pour les services d’infrastructures dépend
donc fortement de l’appui dont bénéficient ces entités afin de passer d’un
mode de financement central unique au niveau de l’État à un financement de
marché sur lequel elles peuvent avoir accès aux marchés financiers privés
pour couvrir leurs besoins.
Bien que ces quatre axes de recherches apportent tous des enseignements
intéressants, la conclusion pouvant être tirée est assez modeste. La principale
leçon de cette littérature pourrait être que les nouvelles mesures devront
mieux faire en améliorant le crédit afin de permettre une solvabilité au niveau
projet et souvent au niveau de l’administration locale. Très peu d’informa-
tions sont connues sur la mise en œuvre de cette mesure en situation réelle
avec des niveaux de risque élevés. La génération suivante de contrats d’infras-
tructures entre le secteur privé et le secteur public devra mieux allouer ces
risques.
EDD_2007-04.book Page 32 Thursday, January 31, 2008 7:49 PM

32 Antonio Estache

Le développement de lois ainsi que l’agenda des recherches économiques


qui analyseraient l’importance des risques associés aux incohérences entre les
systèmes légaux et les choix de mesures de régulation associées aux réformes
d’infrastructures (contrats de concession ou d’affermage et création d’agences
indépendantes de régulation) sont d’un intérêt particulier. L’Afrique franco-
phone et plusieurs pays dans d’autres parties du monde ont à chaque fois
réagi négativement à l’instauration de régulateurs indépendants qui ne s’ins-
crivent pas dans les habitudes légales de ces pays. Les contrats de concession
relèvent des compétences des régulateurs qui sont exercées généralement à
travers d’autres canaux sous les dispositions constitutionnelles existantes qui
partagent le pouvoir entre les trois branches du gouvernement. Cela a pour
conséquence de faire souvent apparaître les régulateurs comme la quatrième
branche du gouvernement. Bien que beaucoup de travail soit déjà fait sur
l’efficacité relative de divers systèmes légaux dans leur état brut en termes
d’efficience, d’équité, ou d’effets budgétaires, peu d’études ont examiné le
coût des solutions hybrides dans lesquelles les systèmes légaux sectoriels, les
formes de contrats et les procédures de régulation ou des mesures de différen-
tes traditions légales sont combinés. Jusqu’à ce que cette question soit réso-
lue, les risques de régulation et les risques légaux continueront à être des
obstacles majeurs au succès des partenariats public/privé dans le secteur des
infrastructures.
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5 LA CORRUPTION

Le dernier vaste thème de recherche qui émerge des récentes expériences de


réformes en infrastructures est peut-être le plus complexe. A première vue, il
s’agit de la corruption. Finalement, il renvoie à la responsabilité des défaillan-
ces gouvernementales, mais il a affaire à des types de défaillances qui exigent
davantage un engagement politique qu’une expertise, en particulier dans un
secteur où la corruption a toujours existé 40.
En plus de l’explication habituelle donnée aux bas salaires dans le secteur
public, deux caractéristiques importantes des infrastructures alimentent le
risque de corruption plus élevé que la moyenne : les projets ont tendance à
être plus grands que dans les autres secteurs, et les services sont souvent
accordés avec un monopole sur la livraison aussi bien que sur le contrôle de
l’information dont on a besoin pour s’assurer qu’il n’y aucun abus de la part

40 Flyvberg, Bruzelius, et Rothengatter (2003) donnent une excellente idée de l’étendue


du problème dans ce secteur, en particulier dans les économies développées.
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Infrastructures et développement 33

du monopole 41. Alors que ces caractéristiques n’ont pas beaucoup changé au
cours du temps pour l’électricité et la distribution d’eau et pour la majorité des
infrastructures de transport, la perception de leur impact sur la corruption a
évolué. Au début des années 1990, l’existence d’une corruption répandue
parmi les monopoles publics dans le secteur était souvent un des arguments
avancés pour justifier les privatisations. Ce constat anecdotique était conforté
par la modélisation théorique sur la corruption comme le non-bénévolat du gou-
vernement par des auteurs comme Shapiro et Willig (1990), Shleifer et Vishny
(1993), et Boycko, Shleifer, et Vishny (1996), aussi bien que beaucoup de
preuves anecdotiques 42. En supposant qu’il est facile à des politiciens corrom-
pus de contrôler les entreprises publiques plutôt que celles qui sont privées, ces
recherches ont soutenu que la privatisation pouvait réduire le contrôle que le
gouvernement a sur la rente offerte par un contrôle complet du secteur en ren-
dant les interférences politiques plus coûteuses ou plus visibles.
Après plusieurs réformes, le débat principal est maintenant passé des inte-
ractions entre opérateurs publics et usagers à celles entre opérateurs privés et
gouvernement. Cela peut se voir dans l’enquête réalisée pour Transparency
International sur la corruption et la privatisation dans les infrastructures
dans les pays en développement (Booehm et Polanco 2003 ; Transparency
International, 2005). Cela apparaît aussi dans différentes publications par des
organisations non gouvernementales (Allouche et Finger, 2002 ; Hall et
Lobina 2002), examinant des évènements légaux qui ont fait apparaître des
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cas de corruption dans le secteur. Les Amis de La Terre (2001) et différents
politologues ont fourni des études documentées présentant la corruption
comme un facteur de coût dans la négociation et la renégociation de contrats
dans le secteur. Il y a aussi un nombre croissant de preuves académiques. Flyvb-
jerg, Skamris Holm, et Buhl (2002, 2003) ; Flyvbjerg, Bruzelius, et Rothengatter
(2003) ; Naess, Flyvbjerg, et Buhl (2006) ; et Mitlin (2004) établissent des
pratiques indésirables et des pratiques coûteuses au niveau projet. Une
recherche plus conceptuelle (Benitez et Estache 2005) analyse les change-
ments dans la structure du marché mondial caractérisée par une domination

41 Le favoritisme, la fraude, le copinage, le népotisme, les détournements de fonds, les


pots de vin, et les États captifs sont tous des concepts qui été depuis longtemps associés
à la fourniture de services d’infrastructures dans beaucoup de pays. Il y a une large lit-
térature sur comment définir la corruption et sur les pratiques sémantiques de diffé-
rentes institutions ; une récente revue utile est Lanyi (2004). Pour une revue récente
sur l’analyse économique de la corruption, voir Aidt (2003) ; sur les niveaux de corrup-
tion, voir Kaufmann, Kraay, et Mastruzzi (2003).
42 De nouveaux modèles incluent des structures d’incitations qui sont cohérentes avec les
faits stylisés de l’Amérique latine (voir Martimort et Straub 2006). Ils montrent que la
propriété privée peut renforcer les investissements tout en augmentant la corruption.
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34 Antonio Estache

accrue de quelques acteurs. Celentani, Ganiuza, et Peydro (2004) développent


un modèle cohérent avec le fait qu’une augmentation de la compétition dans les
transactions économiques internationales peut accroître la corruption dans le
secteur.
La plupart des preuves présentées par ces enquêtes sont anecdotiques et
indirectes. Il n y a pas de mesure systématique réelle du niveau de corruption
dans le secteur. A l’exception d’une base de données compilée par Clarke et Xhu
(2004) pour l’Europe de l’Est et un classement des services publics parmi les
institutions corrompues dans le Rapport sur la Corruption dans le Monde
publié par Transparency International (2005), le Rapport annuel sur la Com-
pétitivité Mondiale fournit la seule vue d’ensemble multi-pays, comparable,
quantitative de la corruption dans le secteur des infrastructures, classant 59
pays en développement selon le degré de perception de la corruption (basé sur
une enquête auprès des firmes privées), parmi beaucoup d’autres critères 43.
Quelques recherches étayent les effets de la corruption sur les performan-
ces des infrastructures. La plupart concernent les services d’utilité publique.
Quelques études présentent des mesures directes de la corruption dans le sec-
teur (Davis 2003 sur l’Asie du Sud ; Clarke et Xhu 2004 sur l’Europe de l’Est ;
Lovei et McKechnie 2000 sur l’Europe de l’Est et l’Asie du Sud ; et Reinikka et
Svensson (2002) et Svensson (2003) sur les services publics en Ouganda). Quel-
ques autres études fournissent une évaluation indirecte à partir d’analyses de
régressions testant la significativité statistique de mesures de corruption sur
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des indicateurs de performance en infrastructures à l’échelle-pays (Rossi et del
Bo 2004 sur les compagnies d’électricité d’Amérique latine ; Estache et Kouassi
2002 sur les compagnies d’eau africaines ; Estache, Goicoechea, et Trujillo 2006
pour tous les services d’utilité publique à travers les pays en développement).
Un domaine de recherche très prometteur est l’usage de champs d’expé-
rience aléatoires. Olken (2007) rapporte les résultats d’une expérience aléa-
toire en Indonésie qui mesure les dépenses manquantes dans plus de 600
projets villageois. L’étude compare les dépenses officielles des villages avec les
estimations de prix et de qualité de tous les intrants utilisés dans la construc-
tion et la maintenance des routes, chacune réalisée par des ingénieurs indépen-
dants. Cette approche permet de séparer l’échantillon en sous-échantillons en
vue de tester l’efficacité de différents types de politiques de réduction de la
corruption.

43 Il y a aussi des bases de données spécifiques-pays traitant des services publics, mais cel-
les-là sont plutôt l’exception que la règle (voir Reinikka et Svensson 2002 ; Svensson
2003 ; et beaucoup de rapports-pays de Transparency International disponibles sur son
site Internet).
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Infrastructures et développement 35

Que montrent ces études ? Premièrement, la simple analyse des données


provenant du rapport sur la Compétitivité Mondiale suggère que la fréquence
avec laquelle les firmes ont eu à faire des paiements supplémentaires sans piè-
ces justificatives ou des pots de vins pour être connectées à des services publics
ou pour gagner des contrats publics est, en moyenne, négativement corrélée
avec le revenu national : plus un pays est pauvre, plus élevé est le niveau de
corruption dans son secteur d’infrastructures. Bien qu’elles soient utiles, ces
données ne sont pas précises. Elles sont basées sur des enquêtes auprès des
directeurs, lesquelles sont problématiques, parce qu’elles ne racontent qu’une
face de l’histoire et reposent sur des évaluations relativement subjectives.
Plus important, les résultats disent peu à propos de ce que le gouvernement et
les autres usagers des infrastructures domestiques pensent de la corruption.
Deuxièmement, la corruption peut être reliée à une plus grande contrainte
de capacité des services publics et à une moindre concurrence parmi eux,
comme l’établissent Clarke et Xu (2004) pour 21 pays d’Europe de l’Est. Ils éta-
blissent que la propriété publique des services dans cette région est plus étroite-
ment corrélée avec la corruption que la propriété privée des services publics.
Troisièmement, la corruption peut être associée à des coûts plus élevés que
ceux anticipés. L’étude la plus détaillée (Flyvbjerg et divers collègues) montre
que le coût excédentaire peut être attribué aux règles d’attribution qui don-
nent aux candidats à l’appel d’offre une incitation à annoncer des coûts faibles
pour augmenter leur chance de gagner le projet et renégocier ensuite.
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Les règles d’attribution en elles-mêmes ne sont pas suffisantes. Vérifier la
conformité contractuelle compte aussi. L’analyse détaillée, d’Olken (2007), des
projets routiers indonésiens en est une bonne illustration. Il teste le gain poten-
tiel des vérifications et d’autres instruments de politique destinés à réduire le
coût de la corruption. Son évaluation implique qu’annoncer une probabilité
accrue de vérification du gouvernement à partir d’un niveau de base de 4 % à
100 % réduit les coûts inexpliqués de 8 points de pourcentage. Cette économie
de coût justifie le coût des vérifications.
Tous les résultats ne sont pas comme attendus. La plupart des surprises
viennent des estimations indirectes des effets de la corruption sur les services
d’infrastructures basées sur des modèles de régressions transversales-pays
mesurant la corruption au niveau pays plutôt qu’au niveau secteur ou projet.
Mauro (1997) et Tanzi et Davoodi (1997) trouvent des signes opposés de l’effet
de la corruption sur la dépense publique : Mauro trouve qu’elle accroît ces
dépenses, alors que Tanzi et Davoodi soutiennent qu’elle les baisse. Les deux
résultats peuvent ne pas manquer de cohérence. Il se peut, par exemple, que
la corruption augmente les coûts unitaires et accroît alors la dépense d’un
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36 Antonio Estache

échantillon, alors que sous la contrainte budgétaire qui domine l’autre échan-
tillon, elle réduit le nombre de projets et (parce que les projets sont irrégu-
liers) diminue la dépense dans le secteur.
Estache, Goicoechea, et Trujillo (2006) présentent un test économétrique
de l’impact des réformes d’infrastructures des années 1990 et de la corrup-
tion, aussi bien que leurs interactions sur l’accès, l’abordabilité, et la qualité
des services d’infrastructures dans les pays en développement. Ils trouvent
que la corruption réduit le taux d’accès et la qualité dans l’électricité et l’abor-
dabilité des télécommunications pour les usagers domestiques, n’a pas d’effet
statistique significatif sur les taux d’accès à l’eau ou sur l’abordabilité de l’eau
et de l’électricité, et accroît les taux d’accès et la qualité dans les télécommu-
nications. L’explication de ces résultats peut être la suivante. Dans beaucoup
de pays, le secteur des télécommunications était le premier à être privatisé.
Cela ne s’est pas produit facilement, et beaucoup de participants à cette tran-
saction initiale rapportent que l’ouverture du marché a requis des paiements
connexes. Cela ne fait pas de ceux-ci des droits. Le résultat, cependant, était
un accroissement de l’accès et de la qualité. Ces accès améliorés ont eu un coût :
tarifs plus élevés pour les utilisateurs, dans un secteur où la technologie tend
à pousser les coûts plus bas. Pour l’électricité, la corruption n’a pas affecté les
coûts, mais elle a réduit la qualité et les taux d’accès. En somme, quand la cor-
ruption concerne l’argent – plutôt que le pouvoir ou d’autres facteurs non
monétaires – elle engendrera finalement des flux de trésorerie plus élevés
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pour les parties corrompues. Elle peut faire ainsi en accroissant le revenu pro-
venant des services d’infrastructures (c’est-à-dire, en augmentant l’accès et
ainsi les usagers ou les prix) ou en amputant les coûts (c’est-à-dire, en rédui-
sant la qualité). Ces deux stratégies sont faciles à mettre en œuvre pour un
monopole quand il est mal régulé ou quand les régulateurs et les opérateurs
sont en collusion, comme discuté dans Laffont (2005) et après.
Un autre résultat relevant du puzzle vient de Rock et Bonnett (2004). Ils
montrent qu’alors que dans la plupart des régions la corruption a les effets néga-
tifs attendus, dans les grands pays d’Asie de l’Est avec des gouvernements
avec de longs horizons temporels, la corruption a eu des effets positifs de court
à moyen terme sur la croissance, grâce à la collusion entre les gouvernements et
leurs grands partenaires d’affaires. Rock et Bonnett notent qu’il n’est pas clair
que les choix d’investissement associés à la corruption dans ces pays sont ceux
qui étaient appropriés pour la croissance à long terme, parce qu’ils satisfont
aux préférences des affaires locales. La corruption a des coûts de long terme
aussi bien dans ce cas, mais ceux-là sont beaucoup plus difficiles à évaluer.
Qu’est-ce qui peut être fait pour réduire la corruption dans les infrastruc-
tures ? Les chercheurs théoriques ont poussé dans quatre directions principa-
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Infrastructures et développement 37

les au cours des vingt années écoulées : privatisation, régulation et procédures


associées, décentralisation plus forte, et adoption de processus de participa-
tion dans la sélection, la mise en œuvre, et la supervision de projets. Depuis
que plusieurs pays ont adopté ces recommandations, il y a maintenant assez
de faits à analyser. Cette analyse est encore très nouvelle, mais elle produit
déjà des résultats intéressants.
La preuve de l’impact de la privatisation des infrastructures sur la corrup-
tion n’est pas encore très substantielle 44. Laffont et Meleu (1999) fournissent
une description générale des interactions entre les deux phénomènes. Obser-
vant les expériences africaines, ils indiquent une interaction en forme de U
entre la corruption et le taux de privatisation : jusqu’à un certain point, la cor-
ruption facilite la privatisation, mais finalement elle l’affecte négativement.
Ce résultat demande à être opposé au fait que, dans une enquête récente (rap-
portée dans Nwanko et Richards 2001), la corruption était considérée comme
le plus grand obstacle à la conduite des affaires dans la région. Ces deux his-
toires impliquent que pour le moment, la corruption en Afrique est un handi-
cap à l’adoption de politiques qui pourraient réduire la corruption.
Certaines littératures sur l’impact de la nature de la propriété sur l’effica-
cité des opérateurs peuvent être interprétées comme une approximation de
l’impact de la privatisation sur la corruption quand l’efficacité est mesurée
par les coûts. Parmi les quelques études qui offrent cette possibilité il y a
Kirkpatrick et Parker (2004), qui se fondent sur plusieurs études qu’ils ont
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conduites. Le premier point d’intérêt ici est leur analyse d’un large échan-
tillon de services d’eau africains en 2000. Ils trouvent que la propriété
n’affecte pas significativement les coûts. Alors que les auteurs ne testent pas
formellement les liens entre corruption et propriété, il pourrait être soutenu
que si les coûts étaient affectés par la corruption, la propriété n’a aucun
impact sur la corruption. Une seconde étude importante se réfère à un large
échantillon de compagnies d’électricité, pour lesquelles la privatisation a
besoin d’être couplée avec la régulation pour avoir l’impact désiré sur les prix.
Ce résultat pourrait être interprété comme signifiant qu’un changement vers
la propriété privée bien régulé pourrait réduire la corruption.

44 La preuve sur les gains de gouvernance de la privatisation ne s’applique pas nécessai-


rement à la privatisation des infrastructures. La privatisation d’industries compétiti-
ves, la plupart desquelles ne sont rattachées à aucun concept de service public, implique
des acteurs et des intérêts très différents. Ces différences ont rarement été prises en
compte dans la littérature sur les privatisations, qui tend à extrapoler tout ce qui a été
appris des télécommunications, le plus compétitif des services d’infrastructures, à tous
les autres secteurs.
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38 Antonio Estache

Observant un échantillon beaucoup plus large de données et couvrant une


période temps plus longue (1990-2002), Estache, Goicoechea, et Trujillo
(2006) fournissent un test formel de l’interaction entre privatisation et cor-
ruption en en évaluant leur impact sur l’accès, l’abordabilité, et la qualité des
services d’infrastructures dans les pays en développement. S’appuyant sur une
série de muettes d’interaction dans un modèle expliquant ces variables, ils
trouvent que généralement la privatisation n’interagit pas de façon statisti-
quement significative avec la corruption dans l’électricité, les télécommunica-
tions, ou l’eau. Cela est en contradiction avec la conclusion dressée par Clarke
et Xu (2004), qui trouvent que le passage de la propriété publique à la pro-
priété privée réduisait le niveau de corruption en Europe de l’Est.
Le fait que cette enquête rapporte seulement trois études suggère qu’il y a
peu de test formel de l’efficacité de la privatisation comme un moyen de réduc-
tion de la corruption. Il y a un besoin évident d’envisager de compléter la litté-
rature relativement large sur l’impact de la privatisation des infrastructures
sur l’efficacité, la qualité, ou l’équité. La recherche a aussi besoin d’aller au cœur
de ce qui semble caractériser les monopoles, comme suggéré par Estache, Goi-
coechea, et Trujillo (2006). L’objectif des monopoles est de maximiser les pro-
fits. Cependant, les chercheurs ont eu tendance à se concentrer sur les prix,
les quantités, et la qualité indépendamment, parce que les données sur les
profits ne sont pas disponibles. Ils ont besoin maintenant de commencer à
regarder comment les réformes affectent ensemble ces variables, et ainsi les
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profits, pour compenser les effets de la corruption (par exemple, il n’y a aucun
besoin d’affecter les prix si la qualité et ainsi les coûts peuvent être diminués
pour accroître les profits).
Le second instrument généralement recommandé par les chercheurs est
la régulation. La régulation doit promouvoir l’efficacité (statique et dynamique)
tout en protégeant les consommateurs, en particulier les pauvres, des abus
potentiels du monopole et les investisseurs et les opérateurs de l’influence
politique. Un certain degré de flexibilité est souhaitable, mais les résultats des
gouvernements dans leur usage de la flexibilité sont généralement perçus
comme ayant été si problématiques que les règles contenues dans divers ins-
truments de privatisation sont destinées à limiter cette flexibilité. Une des
composantes clé de ces mécanismes de sauvegarde est la formulation spécifi-
que d’institutions de régulation et la préoccupation de l’importance d’institu-
tions de régulation indépendantes, autonomes, et comptables pour des réformes
durables dans les secteurs régulés. Une contribution majeure de la littérature
théorique résumée dans Laffont (2005) dans le contexte de pays en développe-
ment est de montrer que les processus, particulièrement les processus quanti-
tatifs, comptent beaucoup plus que ce que les décideurs politiques semblent
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Infrastructures et développement 39

appréhender. En pratique, cela signifie que les processus de planification


des réformes doivent veiller à maintenir les incitations correctes et à rendre
l’information plus transparente et mieux vérifiée. L’adoption des directives
comptables de la régulation, par exemple, est généralement oubliée par les ré-
formateurs, bien qu’elle soit centrale à la capacité de parvenir à des décisions
de régulation justes, efficaces, et comptables (voir Estache, Rodriguez-Pardina,
et Sember, 2003 ; Schlirf, Rodriguez-Pardina, et Groom à paraître). Ces direc-
tives sont cohérentes avec les arguments théoriques pour le suivi, la vérifi-
cation, et le système de sanctions associé (voir Laffont, Faure-Grimaud, et
Martimort 1999 ; Armstrong et Rochet 1999 ; et Khalil et Lawarree 2001).
De nouvelles bases de données apparaissent qui couvrent une durée de
temps assez longue pour engendrer des informations utiles. La ligne de recher-
che la plus prometteuse peut être celle poursuivie par Olken (2007) pour tester
l’efficacité des processus de régulation tels que les vérifications. Mais ce type
de recherche prend du temps et des ressources. Un complément à court terme
est de s’appuyer sur les études économétriques transversales au niveau pays
pour soutirer autant d’informations que possible des bases de données inter-
nationales Reconnaissant la difficulté de la modélisation d’une chose aussi
complexe que la régulation, Estache, Goicoechea, et Trujillo (2006) s’appuient
sur la série de données courantes la plus large pour tester l’interaction entre la
corruption et la régulation en termes de son impact sur l’accès et le prix des
services publics dans les pays en développement. Dans leur modèle la régula-
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tion est approximée par l’existence d’une agence de régulation indépendante,
c’est-à-dire une variable institutionnelle pour résoudre un problème institu-
tionnel. Ils trouvent que ces agences ont souvent été efficaces mais elles n’ont
pas les mêmes performances selon les secteurs et les objectifs de la régulation.
Les agences de régulation ont compensé l’impact de la corruption sur l’accès à
l’électricité et aux télécommunications mais n’ont eu aucun effet sur l’accès à
l’eau. La régulation réduit l’impact de la corruption sur les services de télé-
phones domestiques et sur les prix de l’électricité industrielle ; elle n’a aucun
effet sur les autres prix. Ces résultats mitigés sont généralement cohérents
avec les résultats partiels obtenus par d’autres auteurs. Dans leur analyse des
services d’eau courante en Afrique, Kirkpatrick et Parker (2004) trouvent que
la régulation n’a pas un impact statistiquement significatif sur leurs coûts.
Suivant un raisonnement similaire à celui adopté dans les thèses en faveur de
la privatisation, si les coûts sont influencés par la corruption, la régulation n’a
aucun impact sur la corruption. Pour l’électricité et dans un plus large échan-
tillon de pays, Kirkpatrick et Parker trouvent que la régulation peut améliorer
les performances mais pas pour tous les types d’indicateurs. Ces résultats sont
cohérents avec ceux d’Estache, Goicoechea, et Trujillo (2006). Comme dans la
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40 Antonio Estache

thèse en faveur de la privatisation, la mesure dans laquelle la régulation com-


pense les effets indésirables de la corruption sur les services d’infrastructures
est aussi un sujet de recherche prometteur.
Guasch et Straub (2005) modélisent l’interaction entre la corruption et la
régulation dans le contexte de ses effets sur la renégociation des concessions
d’infrastructures en Amérique latine. Ils trouvent que plus le niveau de la cor-
ruption est élevé, plus il est important d’avoir un régulateur en place pour
limiter l’incidence des renégociations. Il y a aussi beaucoup de littérature
théorique sur ce qu’est la régulation et sur comment la régulation peut aider
(voir Laffont 2005 sur ce que cela signifie pour les pays en développement).
Les arguments sur ce sujet ne sont pas cohérents à travers les articles.
La décentralisation est la troisième façon suggérée par la théorie pour
accroître la responsabilité et réduire ainsi la corruption 45. Depuis les années
1970 plusieurs pays, particulièrement les pays en développement, ont connu
une augmentation majeure de la décentralisation. Bien qu’une partie impor-
tante de la recherche économique ait porté sur le sujet en général, les résul-
tats pour les infrastructures ont été modestes. Bardhan et Mookherjee (2000,
2003) fournissent un des résultats les plus influents sur le sujet. Ils se concen-
trent sur les infrastructures, mettant en évidence le rôle de la corruption
locale sur l’efficacité de la décentralisation des services d’utilité publique. Ils
montrent que sous des hypothèses modérément justes, la décentralisation
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financée par les frais des usagers plutôt que par des taxes locales ou des aides
intergouvernementales est supérieure, peu importe le mauvais fonctionne-
ment de la démocratie locale. Plus important, si les frais des usagers ne sont
pas utilisés, la supériorité des services décentralisés sur la fourniture de servi-
ces centralisés n’est plus nettement tranchée comme beaucoup de conseillers
semblent le croire quand la corruption est prise explicitement en compte.
Enfin, quand la capacité à payer est contrainte et que la facturation des usa-
gers ne peut plus être utilisée pour financer les programmes anti-pauvreté, le
degré optimal de décentralisation dépend du degré de corruption des gouver-
nements locaux et centraux. Cela est une recherche qui demande à être testée.
Pour le moment, il y a des tests relativement prédictibles de l’impact de la
décentralisation sur l’efficacité des différents modes de fourniture et de types
d’infrastructures, spécialement dans les pays en développement (voir Shah,
Thompson, et Zhou 2004 pour une revue générale). Cependant, très peu de
travail a été fait sur l’interaction avec la corruption. Bardhan et Mookherjee

45 Une exception notable est Shleifer et Vishny (1993), qui soutiennent que plus de niveaux
verticaux de gouvernance tendent à affaiblir la gouvernance.
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Infrastructures et développement 41

(2006b) conduisirent une revue des rares preuves 46. Le premier résultat empi-
rique important date de 1995, quand Estache et Sinha montrèrent que pour
un échantillon de 10 pays industrialisés et de 10 pays en développement cou-
vrant la période 1970-1992, la décentralisation tend à augmenter la dépense
totale et la dépense infra-nationale en infrastructures beaucoup plus dans les
pays en développement que dans les pays développés. Cela pourrait impliquer
soit un changement de préférence avec la décentralisation soit un accroisse-
ment de coût avec la décentralisation. Les modèles testés ne permettent pas
de distinguer parmi les deux explications.
Il y a ensuite un vide dans la recherche jusqu’en 2002, quand Fisman et
Gatti atteignent des résultats similaires mais plus spécifiques, utilisant une
spécification de modèle beaucoup plus sophistiquée appliquée à une série de
données de 59 pays. Ils trouvent une corrélation négative entre corruption et
décentralisation pour 1980-95.
Les résultats de Faguet (2004) suggèrent que la décentralisation est plus un
mécanisme de révélation de demande qu’un stimulant à la corruption. Il mon-
tre qu’en Bolivie, la décentralisation a conduit à un reclassement des program-
mes d’investissement en faveur de l’agriculture, de l’éducation, de l’eau et de
l’assainissement. Ceux-ci sont des résultats préliminaires, mais ils attendent
confirmation. Davantage d’études spécifiques-pays comme celle de Faguet ou
des études transversales qui réalisent un diagnostic plus complet sont nécessai-
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res afin de pouvoir déclarer que la décentralisation réduit la corruption.
Le dernier domaine intéressant de recherche observe l’interaction entre la
décentralisation des infrastructures et la privatisation. Travaillant avec des
données de panel de 40 pays entre 1990 et 2000, Ghosh Barnerjee, Oetzel, et
Ranganathan (2006) trouvent que la décentralisation fiscale affecte significa-
tivement le niveau et la fréquence de la participation privée mais les décentra-
lisations politique et administrative ne le font pas. La décentralisation fiscale
tend à accroître la participation privée dans les infrastructures. Si la décen-
tralisation est un mécanisme de révélation de la demande, ce résultat est quel-
que peu surprenant au regard du nombre croissant des voix qui s’élèvent
contre la gestion privée des services publics en Amérique latine.

46 Une grande partie de la littérature d’administration publique mène des études docu-
mentées sur les impacts de diverses formes de décentralisation de services publics dans
les pays en développement. Des analyses des services de santé et d’éducation décentrali-
sés sont présentées dans le Rapport sur le Développement dans le Monde 2003 (Banque
mondiale 2002).
EDD_2007-04.book Page 42 Thursday, January 31, 2008 7:49 PM

42 Antonio Estache

De plusieurs façons, la recommandation d’approches plus participatives


pour la fourniture des services – le quatrième type de solution politique pour
amoindrir les risques de corruption – peut être vue comme un produit dérivé
de la littérature sur la décentralisation (voir Turk 2001 sur comment cela ap-
paraît au Viêtnam). Comme avec la décentralisation, très peu de la recherche
économique publiée se concentre sur les services d’infrastructures (les excep-
tions récentes incluent Chuwa, Zovu, et Mbula 2002 et Ackerman 2004). Déjà
les efforts pour promouvoir la participation dans les projets, les programmes,
et les consultations de politiques sont maintenant courants dans la commu-
nauté internationale. Alors qu’il n’y a rien de spécifique aux infrastructures,
plusieurs des évaluations de ces approches sont basées sur des évaluations
qualitatives ou fondées sur l’impression, plutôt que quantitatives (Isham, Na-
rayan, et Pritchett 1995 est une exception notable). Comme Ghazala (2004) le
remarque, jusqu’à son propre article de 2004, pas une seule étude n’avait établi
une relation quantitative causale entre un quelconque résultat et les éléments
participatifs d’un projet de développement basé sur une communauté.
L’image principale qui se dégage de l’efficacité de la participation donne
des raisons de préoccupation. Ghazala (2004) et Cornwall (2003) observent
que les projets qui revendiquent une « pleine participation » et la « responsa-
bilisation » se sont révélés être orientés par des intérêts particuliers ou des éli-
tes, laissant les moins forts sans voix ou sans beaucoup de choix. L’efficacité
de la réduction de la pauvreté de ces programmes a aussi bien besoin d’être
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mesurée plus systématiquement. L’unique étude quantitative d’une activité
d’infrastructures a été faite par Olken (2007), qui a trouvé qu’une base de
participation croissante avait peu d’impact dans la réduction de la corruption
associée aux dépenses routières en Indonésie. Il montre qu’un suivi de haut-
en-bas peut être une meilleure solution, même dans un environnement haute-
ment corrompu. En d’autres termes, les instruments traditionnels de régulation
ont été plus efficaces que les instruments participatifs dans les programmes
routiers indonésiens.
Cette vue d’ensemble dans un large volume de recherches théoriques sur
la manière de faire face à la corruption suggère deux domaines principaux
dans lesquels davantage d’efforts sont requis. Le premier, ce sont les données.
La mesure de la corruption dans le secteur est toujours approchée par le
niveau de corruption dans le pays. Le second domaine est l’évaluation de
l’efficacité des instruments de politique pour le secteur des infrastructures. Le
principal message de cette discussion de l’efficacité des solutions théoriques
peut être qu’il n’y a pas assez d’évidences pour se faire une raison sur com-
bien et sous quelles circonstances chacune compte réellement. Quand les évi-
dences sont disponibles, elles sont trop étroites ou pas suffisamment robustes.
EDD_2007-04.book Page 43 Thursday, January 31, 2008 7:49 PM

Infrastructures et développement 43

Cela définit un important agenda de recherche pour le secteur. Découvrir


davantage à propos de l’efficacité des recommandations théoriques sur com-
ment traiter la corruption dans le secteur devrait être une grande priorité.

6 COMMENTAIRES DE CONCLUSION

Cette revue de la littérature omet un nombre important de recherches de bonne


qualité sur le thème abordé ici. De plus, elle exclut beaucoup de thèmes impor-
tants, non parce qu’ils ne seraient pas importants mais simplement parce que
pour certains ils n’étaient pas sur les écrans des radars des recherches. Prin-
cipalement parmi ces thèmes omis, il y a le besoin de revisiter la question de
comment améliorer les performances des fournisseurs publics des services
d’infrastructures quand la privatisation n’est pas une option. Beaucoup d’éner-
gie a été dépensée au cours des dix dernières années dans l’identification de ce
qui marche et de ce qui ne marche pas avec les partenariats public/privé ; très
peu a été allouée à la réflexion sur la manière de mieux gérer les entreprises
publiques (une rare exception est Gomez-Ibanez 2006). Rétrospectivement, cela
est un manque de chance. Le secteur privé finança juste 20-25 % du total des
investissements en infrastructures dans les pays en développement et les éco-
nomies en transition au cours des années récentes, et la tendance est mainte-
nant à la baisse. Les bonnes affaires dans l’énergie et les télécommunications
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ont été signées ; de nouveaux flux massifs sont improbables pendant encore
un certain temps. Dans un avenir immédiat, le secteur public continuera
d’être un acteur clé, particulièrement dans les pays à plus faible revenu.
Très proche est le besoin d’examiner la régulation des opérateurs publics.
La plupart de la recherche sur les infrastructures a eu tendance à se concen-
trer sur la régulation indépendante des opérateurs privés . Que dire de la régu-
lation indépendante des opérateurs publics ? Les instruments de régulation
devraient-ils être les mêmes pour les monopoles publics et privés ? Les stan-
dards comptables des régulateurs devraient-ils être les mêmes pour ces deux
types de monopoles ? Les partenariats public/privé qui n’exigent pas d’inves-
tissement du secteur privé devraient-ils affecter le choix et la formulation de
la régulation ?
Tout aussi proche est le besoin d’établir un bien meilleur pont entre la
recherche théorique qui est conduite sur les équipements et la formulation et
l’exécution de politiques pour fournir des services publics en infrastructures.
Alors que la théorie de la vente aux enchères a eu un grand impact sur les télé-
communications (mise aux enchères de la plateforme d’administration des
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44 Antonio Estache

réseaux), l’électricité (la formulation de la mise en commun des installations


de production), et les aéroports (l’attribution des tranches horaires), ses con-
tributions majeures n’ont certainement pas permis d’évoluer vers des équipe-
ments du secteur public plus standards au niveau pays ou dans les pratiques
en matières d’équipements des donneurs bilatéraux ou multilatéraux. Le
potentiel d’économie des coûts et le contrôle des coûts qui peuvent être réali-
sés grâce aux enchères sont rarement pris en compte dans les réformes du sec-
teur public. De façon similaire, le secteur privé a fait un travail bien meilleur
que le secteur public en intégrant les résultats de la recherche théorique dans
la sélection des participants, dans la structuration des contrats, et la centralisa-
tion des décisions d’équipement 47. La recherche récente a développé des tests
beaucoup plus avancés pour minimiser le risque de collusion tout en conti-
nuant de profiter des avantages d’un vaste ensemble de fournisseurs.
Enfin, un point commun dans tous les thèmes abordés dans cet article est
le besoin de produire des données. Plus de données sont nécessaires, pas sim-
plement pour produire un plus grand nombre et de meilleures recherches qui
finalement guideront les réformes futures et les choix de politiques à plus long
terme. Davantage de données sont nécessaires avant tout pour accroître la
responsabilité de court à moyen terme de tous les acteurs impliqués. Essayer
d’améliorer la responsabilité des donneurs, des gouvernements, des politiciens,
des opérateurs, des investisseurs, et des usagers à travers des réformes insti-
tutionnelles n’ira pas très loin jusqu’à ce qu’il y ait assez d’informations
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quantitatives pour déterminer clairement une ligne de référence à partir de
laquelle les progrès peuvent être mesurés. Les OMD sont un bon départ, mais la
responsabilité ne doit pas valoir seulement pour l’accès, elle devrait aussi con-
cerner l’abordabilité, les coûts publics et privés, les risques, et la qualité. Sans
des données plus importantes en quantité et en qualité sur ces dimensions de la
fourniture des services d’infrastructures, il n’y aura pas de responsabilité
dans le secteur, laissant inévitablement les plus pauvres usagers et les contri-
buables porter le fardeau des coûts de pauvres services et de la corruption.

47 Un livre à paraître, dirigé par Dimitri, Piga, et Spagnolo, est peut être le premier depuis
Laffont-Tirole (1993) à traiter la question des équipements de façon systématique. Ce
livre a aussi le bénéfice de beaucoup d’illustrations importantes pour les praticiens.
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