Vous êtes sur la page 1sur 28

Chapitre 10: Equilibres d’un corps pur sous plusieurs

phases : changement d’état Liquide-Vapeur

1. Les différents états de la matière


On rencontre par exemple l’eau dans la nature sous trois états: solide: glace; liquide :
eau courante et gaz: vapeur d’eau. Suivant les conditions physiques du milieu on
peut passer d’un état à un autre. Ces changements sont aussi appelés changement
de phase
2. Vocabulaire
Les changements d’état physique sont également appelés changement de phase.
Une phase étant définie comme toute partie homogène d’un système; ce qui n’a de
sens qu’au niveau macroscopique.
1
D’une façon simplifiée, on considère qu’un corps pur peut exister sous trois phases:
solide, liquide et gazeuse. Les mélanges de gaz ne forment qu’une seule phase. Les
mélanges de liquides peuvent former une phase ou plusieurs selon la miscibilité. Les
mélanges de solides forment en général plusieurs phases.
Le schéma suivant résume les différentes transitions de phases concernant un corps
pur.

2
Cette nomenclature n’est pas toujours respectée et cela appelle quelques remarques
complémentaires.
Le terme « vapeur » désigne l’état gazeux d’un corps qui ordinairement est soit
liquide, soit solide. On dit vapeur d’éther, vapeur d’eau, vapeur de sodium.
Pour une vapeur, on parle quelquefois de condensation au lieu de liquéfaction. On
écrit par exemple que « la vapeur se condense » mais que « le dioxygène peut se
liquéfier ».
L’évaporation est une vaporisation lente due à un phénomène de surface faisant
intervenir l’air atmosphérique (séchage, humidificateur d’air, marais salant ...).
La cristallisation est une solidification avec formation de cristaux.

3
Règle des phases de Gibbs
Soit un système thermodynamique formé de C constituants et en équilibre sous φ
phases .
Le nombre de variables intensives indépendantes pour définir un tel système est
appelé sa variance, notée V. Gibbs a établi une règle générale reliant V à φ et C : V =
C + 2 − φ.
3. Equilibre d’un corps pur sous deux phases
Considérons un corps pur subissant un changement de phase φ1 ↔ φ2 et se trouvant
en équilibre thermodynamique.
Variance du système : La règle de Gibbs V = C + 2 − φ, nous donne C = 1 et φ = 2
et V = 1.
4
Il y a donc une seule variable d’état intensive indépendante. Pour décrire la
transformation, faisons le choix de T (variable intensive indépendante) alors on a :
P = f(T).
Dans le diagramme (T, P), la courbe P = f(T) est la courbe d’équilibre du système
sous deux phases. En dehors de la courbe, on a deux variables intensives
indépendantes dans le domaine d’existence d’une seule phase.

5
3.1. Potentiel chimique
Pour un système en équilibre sous plusieurs phases, le potentiel chimique μ prend la
même valeur dans chacune d’elles : μφ1 = μφ2 .
La relation μφ1 (P, T) = μφ2 (P, T) est équivalente à P = f(T).
3.2. Enthalpie libre massique
Considérons une masse unité d’un système en équilibre sous deux phases φ1 et φ2
de masses respectives m1 et m2 tel que m1 + m2 = 1. Soient g1 (T, P) et g 2 (T, P) les
enthalpies libres massiques du corps sous les phases φ1 et φ2 .
A l’équilibre, on a : G = m1 g1 + m2 g 2 = m1 g1 + 1 − m1 g 2 ;
soit G T, P, m1 = m1 g1 − g 2 + g 2 .
Au cours d’une transformation élémentaire, dm1 + dm2 = 0 et dG = dm1 g1 − g 2 .
6
Comme la fonction potentielle, G(T, P) est minimale à l’équilibre, on a : dG = 0 ⇔ g1 =
g 2 ∀ dm1 .
Si on rapporte g à une mole de matière, le potentiel chimique est l’enthalpie molaire et
on a :
Sous φ1 , μφ1 = Mg1
Sous φ2 , μφ2 = Mg 2
Finalement, à l’équilibre, on a : μφ1 = μφ2 ⇒ g1 (T, P) = g 2 (T, P).
4. Formule de Clapeyron pour les changements de phase
4.1. Chaleur latente de changement de phase L
Définition: C’est la quantité de chaleur à fournir à l’unité de masse d’un corps pur
pour le faire passer de φ1 à φ2 .
Au cours du changement d’état φ1 ⟶ φ2 , g1 (T, P) = g 2 (T, P). 7
Un développement de g1 et g 2 autour de (T, P) donne :
𝜕g1 𝜕g1 𝜕g 2 𝜕g 2
ቇ dT + ቇ dP = ቇ dT + ቇ dP
𝜕T P 𝜕P T 𝜕T P 𝜕P T

𝜕g1 𝜕g2 𝜕g2 𝜕g1


En séparant les variables, on obtient : ቁ − ቁ dT = ቁ − ቁ dP
𝜕T P 𝜕T P 𝜕P T 𝜕P T

𝜕g 𝜕g
Comme dg = −sdT + vdP, on a : s = − ቁ et v = ቁ , on a : s2 − s1 dT =
𝜕T P 𝜕P T

v2 − v1 dP
s2 , s1 et s2 , s1 sont les entropies massiques et les volumes massiques du système
dans les phases 1 et 2.
Soit L12 la chaleur latente de changement de phase φ1 ⟷ φ2 , on a :
δQ L12
= dS ⇒ s2 − s1 =
T T
8
L12
v2 − v1 dP = dT
T
D’où la formule de Clapeyron :

𝐝𝐏
𝐋𝟏𝟐 = 𝐓 𝐯𝟐 − 𝐯𝟏
𝐝𝐓
𝐝𝐏
est la pente de la tangente à la courbe 𝐏 = 𝐟(𝐭) dans le diagramme (𝐓, 𝐏).
𝐝𝐓

4.2. Diagramme d’état d’un corps pur


Il s’agit de l’ensemble des trois courbes de fusion, de sublimation et de vaporisation
tracées sur le même diagramme (P, T). Ces trois courbes se coupent au point triple
A3 où l'on a la variance du corps pur nulle.
Règle de Gibbs : v = N + 2– φ avec N = 1 et φ = 3 alors v = 0
9
Il n’y a donc aucune variable d’état intensive indépendante ; les trois phases du corps
pur coexistent en A3 à P3 , T3 fixés et uniques.
Graphe 𝐏 = 𝐟(𝐓) - Point triple.
En relevant les différentes températures de changement d’état en fonction de la
pression, on peut placer dans le diagramme (T, P) un ensemble de points formant une
ligne appelée courbe d’équilibre.
On a donc trois courbes d’équilibre:
courbe de fusion : équilibre solide ↔ liquide
courbe de vaporisation : équilibre liquide ↔ gaz
courbe de sublimation : équilibre solide ↔ gaz

10
On remarque tout d’abord sur ces diagrammes que les trois courbes d’équilibre se
coupent au même point. Ce point est le point triple pour lequel l’état du système est
invariant c’est-à-dire qu’il n’existe qu’une seule valeur (T,P) réalisant la coexistence
des trois états: solide, liquide et gaz.
On a de plus fait figurer sur le diagramme (T,P) les domaines où les corps purs sont
11
sous une phase unique: glace, eau liquide, eau vapeur (pour l’eau).
Corps pur 𝐻2 𝑂 𝐶𝑂2 𝑂2 𝑁2 𝑁𝑒
𝑇3 (𝐾) point triple 273,16 329,8 55 63 25
𝑃3 (𝑎𝑡𝑚) point 6,10. 10−3 5,1 2,6. 10−3 0,12 0,42
triple
Au point triple, il existe une relation simple entre les chaleurs latentes Lf , Lv et Ls . Si
nous faisons décrire à la masse unité d’un corps pur un cycle autour de son point
triple A3 , S → V → L → S . La pression et la température restant constante, les
quantités de chaleur mises en jeu sont simplement les chaleurs latentes des
transformations envisagées. Pour le cycle total ∆H = 0, donc
Lf + Lv − Ls = 0 ⇔ Ls = Lf + Lv

4.3. Point critique: Continuité liquide - gaz

Revenons au diagramme (P, V) et changeons la température de l’isotherme, en


augmentant celle-ci. 12
𝑃

𝐴′ 𝐵′
𝑇 > 𝑇𝐶
Vapeur
𝐴 𝐵 𝑇 = 𝑇𝐶
Liquider Liquide+vapeur 𝑇 < 𝑇𝐶
𝑇 ≪ 𝑇𝐶
Courbe de rosée
𝑉
Courbe de vaporisation

13
L’équilibre liquide-gaz s’observe sur un nouveau palier A’ B’ avec une pression de
vapeur saturante plus élevée. La longueur du palier est plus petite. En élevant encore
la température, on atteint un point C où l’isotherme n’a plus qu’un point d’inflexion à
tangente horizontale. Pour des températures supérieures on n’observe plus
d’équilibre gaz-liquide.
Le lieu des points A B est la courbe de saturation.
La température de l’isotherme Tc est la température critique. Au-dessus de la
température critique, il n’est pas possible d’observer un équilibre liquide-gaz ; il n’est
pas possible de liquéfier un gaz par simple compression.

14
Exemple:
Butane Tc = 152°C - à la température ambiante, la compression donne du butane
liquide.

Tc = −147°C
Azote ቤ - à la température ambiante, l’azote comprimé dans les bouteilles
Pc = 51 atm

est gazeux.
Si on veut liquéfier de l’azote, il faut commencer par le refroidir au-dessous de
− 147°C.
5.Système diphasique liquide – vapeur
Le passage d’un corps pur de la phase liquide à la phase vapeur est la vaporisation et
l’inverse est la liquéfaction.
La courbe P = f(T) est la courbe de vaporisation ou de pression saturante. 15
5.1. Courbe de vaporisation
dP
L’application de la relation de Clapeyron L12 = T v2 − v1 en tenant compte de ce
dT
dP
que v2 ≫ v1 en général (v2 ≫ v1 , toujours ) conduit à : ∆H12 = L12 ≈ Tv2 avec
dT
dP
>0
dT

16
 Le point critique C est déterminé expérimentalement (T, P)
 La vapeur saturante est la vapeur en présence du liquide
 Le liquide saturant est le liquide en présence de sa vapeur
La formule de Clapeyron de changement de phases liquide-vapeur est:

𝒅𝑷
𝑳𝒗 = 𝐓 𝒗𝑮 − 𝒗𝑳
𝒅𝑻
Avec
vG : volume massique de la vapeur saturante
vL : volume massique du liquide saturé
Lv la chaleur latente de vaporisation (Lv dépend de la température).
5.2. Etude de l’équilibre liquide – vapeur dans le diagramme

17
𝑇2

𝑣𝐿 𝑣 𝑣𝐺 𝑉
ACB : courbe de saturation
AC : courbe d’ébullition
CB : courbe de rosée

18
C : point critique
T : isotherme critique à point d’inflexion à tangente horizontale
AMB : palier de vaporisation ou de liquéfaction
A l’extérieur de la courbe de saturation on a le domaine d’existence du fluide
homogène.
Au point critique 𝑣𝐿 = 𝑣 = 𝑣𝐺 = 𝑣𝐶 le domaine du fluide hypercritique est celui dans
lequel on en peut pas passer de l’état vapeur à l’état liquide par simple compression
isotherme.
5.3. Titre en vapeur x
Le changement de phase liquide – vapeur à un température donné T correspond à
une évolution du système à pression P qui est celle de la vapeur saturante.

19
Le volume massique du système diphasé est nécessairement compris entre vL et vG
(vL ≪ v ≪ vG ).
Dans le diagramme de Clapeyron, les extrémités A, B du palier correspond
respectivement à l’état de liquide de saturation pur (A) et de vapeur saturante pure
(B). Un état diphasé quelconque sera représenté par un point M sur le palier de
liquéfaction, caractérisé par le volume massique moyen v du système qui est égal à
la somme du volume de vapeur saturante et du volume de liquide de saturation
L’état diphasé peut être caractérisé par le titre de vapeur x.
v = x vG + 1 − x vL ⇔ x vG − vL + vL = v
𝒗−𝒗𝑳 𝑨𝑴 𝑴𝑩
𝐱= = et 𝟏 − 𝐱 =
𝒗𝑮 −𝒗𝑳 𝑨𝑩 𝑨𝑩

20
Le rapport de la masse x de vapeur à la masse 1– x de liquide est :

x AM
=
1 − x MB
Le point M partage donc le palier en deux segments dont le rapport correspond au
rapport de masse des deux phases en présence.
Schéma à faire
Exemple
PC = 73,9 bars
𝐂 ተvC = 94 cm3 . mol−1 pour le CO2
t C = 31,1°C
5.4. Variation de la chaleur latente de vaporisation avec la température
Elle correspond à la variation d’enthalpie du système qui subit la vaporisation
Lv = ∆H (liquide → vapeur) à T, PS (T) 21
D’où
𝐋𝐯 = ∆𝐔 + 𝐏𝐒 𝐯𝐆 − 𝐯𝐋 avec H = U + PV
Si la vaporisation a lieu dans le vide : 𝐋𝐯 = ∆𝐔 (pas de travail de refoulement à PS ),
l’expression de 𝐿𝐺 est donnée par la formule de Clapeyron

𝐝𝐏𝐒
𝐋𝐯 = 𝐓 𝐯𝐆 − 𝐯𝐋
𝐝𝐓

La détermination expérimentale de 𝐋𝐯 par les méthodes calorimétriques donne la


courbe ci-contre :
T ∈ 𝐓𝟑 , 𝐓𝐂 où 𝐓𝟑 est température du point triple et 𝐓𝐂 celle du point critique loin de 𝐓𝐂 ,
la formule linéaire 𝐋𝐯 = 𝐚 − 𝐛𝐓 est bien vérifiée ( Régnault)

22
5.5. Formules approchées de la pression de saturante
L’équilibre liquide - vapeur saturante étant univariant, si l’on fixe une variable intensive
T par exemple, alors la pression p est fixée. Dans le cas général, les principes de la
thermodynamique sont insuffisants pour donner l’équation de la courbe PS = f(T).
Aussi fait-on appel à l’expérience et recourt-on à l’approximation.
23
a/ Formule de Rankine
Hypothèses :
 𝐋𝐯 ≈ 𝐜𝐬𝐭𝐞
 𝐓 éloigné de 𝐓𝐂
 𝐯𝐆 ≫ 𝐯𝐋
 Vapeur saturante assimilée à un gaz parfait
La formule de Clapeyron s’écrit :
dp
Lv = TvG 𝑻 𝟐 𝑹 𝒅𝒑
dTൢ ⇒ 𝑳 =
R 𝒗
𝑴 𝑷 𝒅𝑻
PvG = T
M
D’où la formule de Rankine :
𝐝𝐩 𝐌𝐋𝐯 𝐝𝐓 𝐌𝐋𝐯
= 𝟐
⇒ 𝐥𝐧 𝐏 = − +𝐀
𝐏 𝐑 𝐓 𝐑𝐓 24
b/ Formule de Dupré
Avec les mêmes hypothèses que dans la formule de Rankine sauf que Lv = a − bT.
Vapeur assimilée à un gaz parfait (vG ≫ vL ).
T2 R dp dp M
D’où la formule de Dupré :Lv = ⇒ = a − bT dT
M P dT dT RT2

𝐌𝐚 𝐌𝐛
𝐥𝐧 𝐏 = − − 𝐥𝐧 𝐓 + 𝐁
𝐑𝐓 𝐑
6. Formules empiriques de la pression saturante
Ces formules tirées de l’expérimentation ne sont valables que dans un petit domaine
de températures. Elles donnent avec une bonne précision la pression de vapeur
saturante.
25
 Formule de Duperray pour l’eau entre 100 °C et 200 °C
𝐭 𝟒
𝐏=
𝟏𝟎𝟎
𝐏 en atm et 𝐭 en °C
 Formule de Joseph Bertrand pour l’eau entre 95 °C et 105 °C
𝐏 = 𝟕𝟔𝟎 + 𝟐𝟕, 𝟏𝟑 𝐭 − 𝟏𝟎𝟎 + 𝟎, 𝟒𝟎 𝐭 − 𝟐𝟎𝟎
𝐏 en mmHg et 𝐭 en °C
7. Fonctions d’état d’un système diphasé
7.1. Enthalpie d’un système diphasé
La différence d’enthalpie massique entre la phase vapeur et la phase liquide
correspond à la chaleur latente molaire de vaporisation
∆𝐯𝐚𝐩 𝐇 = 𝐦𝐋𝐯𝐚𝐩 = 𝐇𝐆 − 𝐇𝐋
26
L’enthalpie massique du système diphasé est égale à la somme des enthalpies des
deux phases.
𝐻𝑥 = 1 − 𝑥 𝐻𝐿 + 𝑥𝐻𝐺 = 𝐻𝐿 + 𝑥∆𝑣𝑎𝑝 𝐻
7.2. Energie interne d’un système diphasé
Connaissant l’enthalpie massique du système diphasé, on en déduit l’énergie interne
sous la forme :
𝐔 = 𝐇 − 𝐏𝐕 = 𝐇 − 𝐏𝐬𝐚𝐭 𝐓 𝐯 = 𝐯𝐋 + 𝐱∆𝐯𝐚𝐩 𝐔
Avec : ∆𝐯𝐚𝐩 𝐔 = ∆𝐯𝐚𝐩 𝐇 + 𝐏𝐬𝐚𝐭 𝐓 𝐯𝐆 − 𝐯𝐋
Ce qui correspond à la prise en compte du travail de refoulement isobare à la
pression Psat T . La variation d’énergie interne accompagnant la vaporisation est de
ce fait, toujours supérieure à la variation d’enthalpie.
27
7.3. Entropie du système diphasé
La différence d’entropie massique entre φ1 et φ2 (vapeur ou gaz et liquide) s’exprime
simplement. Il suffit d’envisager une vaporisation réversible isobare et isotherme

𝛅𝐐 ∆𝐯𝐚𝐩 𝐇
∆𝐯𝐚𝐩 𝐬 = 𝐬𝐆 − 𝐬𝐋 = න =
𝐓𝐯𝐚𝐩 𝐓𝐯𝐚𝐩

On en déduit l’expression de l’entropie massique du système diphasé

∆𝐯𝐚𝐩 𝐇
𝐬 = 𝐬𝐋 + 𝐱∆𝐯𝐚𝐩 𝐬 = 𝐬𝐋 + 𝐱
𝐓𝐯𝐚𝐩
Ces fonctions d’état massiques H, U, S d’un système diphasé ne dépendent que du
titre en vapeur x et de la température T.

28

Vous aimerez peut-être aussi