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Résumé de l’article

Blondé, J. Girandola, F. (2016). Faire « appel à la peur » pour persuader ? Revue de la


littérature et perspectives de recherche. L’Année Psychologique, vol. 116(1), 67-103.
https://doi.org/10.4074/S0003503316000282

Les campagnes de sensibilisation sur les conduites à risque ne sont pas toujours efficaces. Si les
idées changent, la diffusion de l’information ne conduit pas toujours au cpt attendu.
Faire appel à la peur semble privilégié dans la construction des campagnes de prévention sanitaire.
Ex : campagnes de prévention routière
Objectif → créer une émotion négative pour entraîner une prise de conscience des risques et
inciter aux actions préconisées.

L’appel à la peur (Witte, 1992)


Message persuasif conçu de manière à éveiller un sentiment de peur via la description d’une
menace pertinente
Objectif → montrer la réalisation d’une recommandation permettant la protection face à la
menace

Trois éléments caractérisent l’appel à la peur (Witte & Allen, 2000)


▪ Une menace : ensemble des conséquences négatives causées par le maintien d’un
comportement risqué (souvent explicite, information objective).
Trois façons de la présenter :
1. Renforcer la gravité de la menace
2. Augmenter le sentiment de vulnérabilité personnelle à la menace
3. Construire le message de façon à faire apparaître explicitement la menace
▪ Une recommandation : l’ensemble des moyens permettant de se protéger de la menace
(souvent implicite)
▪ La peur : Réaction émotionnelle, procède de l’évaluation de la menace exposée dans le
message. Elle se caractérise à travers des réponses motrices et physiologiques spécifiques
ainsi que des tendances comportementales liées à la fuite ou l’évitement (réaction
subjective)

Les modèles principaux :

1. Le modèle de réduction de la pulsion motivante Drive reduction model, Janis


1967

Inspiration néo-behavioriste.
Objectif → donner à la peur une place prépondérante dans les mécanismes de changement
La peur est conçue comme une pulsion négative incitant les individus à la réduction de la tension
qu’elle suscite
▪ Si la peur est faible ou modérée : l’individu utilise les recommandations proposées dans le
message
▪ Si la peur est trop forte : les recommandations sont inefficaces à la réduction de la tension
→ L’individu à recours à des stratégies de défense (évitement, minimisation, …) → réduit la tension
→ ne favorise pas l’acceptation des recommandations
➔ Effet de résistance et diminue la persuasion → Relation entre peur et résistance
curvilinéaire : courbe en U inversé
Modèle progressivement abandonné :
▪ Pas de vérification empirique retrouvée
▪ Pas de prise en compte des processus cognitifs sous-tendant l’acceptation des messages

2. La théorie de la motivation à la protection Protection Motivation Theory : PMT,


Rogers 1975

Revisitée Maddux & Rogers (1983), Rogers (1983)


Perspective essentielle cognitive (Dillard, 1994)
Dans le sens des approches cognitives des émotions selon Arnold, 1960 ; Mandler, 1975 ;
Schachter & Singer, 1962.
Les modifications physiologiques induites par la peur sont cognitivement réinterprétées et
traitées (Rogers, 1983)
Les réactions aux appels à la peur → combinaison entre plusieurs évaluations → forment deux
types de perception :
▪ La menace perçue : perception des conséquences négatives encourues si maintien du cpt
Deux évaluations :
- La vulnérabilité : susceptibilité d’être confronté à la menace
- La sévérité : la menace parait-elle grave ?
▪ L’efficacité perçue : pour se protéger face à la menace
Deux évaluations :
- L’efficacité des recommandations face à la menace
- L’auto-efficacité : suis-je capable d’appliquer les recommandations ?

La persuasion s’exprime par la motivation à se protéger de la menace


Menace perçue + efficacité perçue fortes → individu motivé à se protéger → adopte les
recommandations
Menace perçue + efficacité perçue faibles → individu pas motiver à se protéger → ne se protège
pas

Appel à la peur réussi nécessite :


- Forte menace
- Sentiment de vulnérabilité
- Recommandations efficaces

PMT critiquée :
Négligence peur et facteurs émotionnels
Pas d’explication sur le mécanisme de rejet du message
3. Le modèle étendu des processus parallèles : Extended Parallel Process Model
EPPM, Witte 1992

Revisitée Witte 1994, Witte & Allen, 2000


Cadre théorique le plus consensuel, le plus utilisé pour déterminer la réussite des campagnes
de prévention
EPPM → extension du modèle des processus parallèles Parallel Process Model (Leventhal, 1970)
Deux types de processus lors de l’exposition au message indépendamment l’un de l’autre :
- Processus de contrôle du danger → - Processus de contrôle de la peur →
processus cognitif de résolution de processus émotionnel de régulation
problème de l’émotion
Recommandations + connaissances de Gestion de la peur ressentie → stratégie de
l’individu → plans d’action réduction de la peur

Witte :
La menace perçue : L’Efficacité perçue :
• Evaluation de la sévérité • Evaluation de l’efficacité des
• Evaluation de la vulnérabilité recommandations
• Evaluation de l’auto-efficacité

➔ Si efficacité perçue > menace perçue → contrôle du danger → acceptation du message


➔ Si menace perçue > efficacité perçue → contrôle de la peur → rejet du message (stratégies
défensives)
L’individu se focalise soit :
Sur le danger présent et les moyens de s’en prémunir
Sur la peur et aura recours à des stratégies défensives

Lorsque la menace perçue est faible le message est rejeté

L’EPPM combine les deux modèles précédents, combine les dimensions cognitives et émotionnelles
mais pas de prise en compte des processus de traitement de l’information face au message.

4. Le modèle de probabilité d’élaboration Elaboration Likelihood Model : ELM,


Petty & Cacioppo 1986 et le modèle du traitement heuristique-systématique
Heuristic-Systematic Model : HSM, Chaiken, Liberman & Eagly 1989.

Deux voies de traitement de l’information :


 Traitement systématique/voie centrale : analyse minutieuse et approfondie du contenu

argumentatif du message dans le but de construire un jugement exact


 Traitement heuristique/voie périphérique : traitement simplifié et rapide reposant sur

- l’application de règles simples « la majorité a toujours raison »


- d’indices heuristiques : crédibilité, expertise, attractivité de la source, nombre d’arguments,
vitesse d’élocution
L’activation des modes de traitement dépend des capacités cognitives et de la motivation au
traitement
→ si faible motivation et capacités insuffisantes de traitement → traitement heuristique
→ si forte motivation et fortes capacités cognitives → traitement systématique

Traitement systématique si forte peur


Traitement heuristique si peur faible

La peur provoquée par une menace forte → renforcement de la motivation + capacités


d’élaborations → pensées favorables envers les recommandations

Peur faible → motivation insuffisante → recours aux indices heuristiques


Une émotion à valence négative (peur colère etc) → traitement systématique de l’information →
résoudre les responsables de l’état négatif ressenti

5. Le traitement biaisé défensif


Le traitement systématique ne garantit pas l’acceptation des recommandations
La peur → défense par la fuite → motivation d’évitement et moyen de protection → influence sur
ressources cognitives allouées et traitement de l’information
➔ message traité de manière sélective, biaisé pour défendre l’individu face à la menace et
contrôler la tension émotionnelle
C’est le traitement biaisé défensif
Peur → évitement des sources potentielles de menace + focalisation sur infos rassurantes
permettant la protection
Forte peur entraîne :
 une moins bonne mémorisation des informations soutenant l’existence de la menace

 une lecture moins longue du message

 une + forte inhibition des éléments menaçants

 une allocation réduite aux ressources attentionnelles

Moyens permettant de réduire le traitement biaisé défensif :


 L’auto-affirmation
 L’humeur positive

Les individus auto-affirmés ont moins de réactions défensives à un message menaçant :


 Le jugent plus convainquant

 Le critiquent moins

 Plus d’info contenues rappelées

 Moins d’évitement attentionnel

L’auto-affirmation favorise le maintien d’une identité personnelle positive lorsqu’elle est menacée
→ ressource personnelle permettant
- une analyse plus objective du message
- une meilleure acceptation des recommandations

Modèle Mood-as-resources : Raghunathan & Trope, 2002.


➔ L’humeur positive sert de ressource dans le contrôle de la menace et l’anxiété qu’elle génère
➔ Permet d’envisager les recommandations plus objectivement
6. Le modèle par étape du traitement des communications éveillant la peur The
Stage Model of Processing of Fear-Arousing Communications : Das &al. 2003,
DeHoog & al. 2005, Stroebe, 2000.

Combine les apports des modèles duaux de la persuasion (chaiken, 1980 ; Chaiken & al., 1989 ; Petty
et Cacioppo, 1986) et des modèles principaux d’appel à la peur (Rogers, 1983 ; Witte, 1992).
Double objectif :
1. Identifier le type de traitement menant à l’acceptation ou rejet des recommandations
préconisées dans le message
2. Identifier les conditions de son apparition

Approche séquentielle selon deux étapes successives :


1. Au niveau de la menace
2. Au niveau des recommandations
Deux phases de traitement : Traitement de la menace qui influence le traitement de la
recommandation qui influence l’acceptation des recommandations.
Evaluation de la sévérité + vulnérabilité → traitement de la menace

Quatre situations :
1. Sévérité faible/vulnérabilité faible : Traitement heuristique, minimal et superficiel prenant
appui sur les indices heuristiques → pas de traitement des recommandations

2. Sévérité forte/vulnérabilité faible : Traitement systématique et objectif car information


importante → pas de prédiction de forte acceptation des recommandations

3. Sévérité faible/vulnérabilité forte : Traitement systématique et objectif. Forte vulnérabilité


→ implication personnelle → élaboration approfondie du message. →Pas de forte
acceptation des recommandations car risques mineurs

4. Sévérité forte/vulnérabilité forte : Traitement systématique et défensif → Analyse


approfondie pour assurer leur défense → évitement des informations menaçantes,
minimisation de la gravité ou implications personnelles de la menace. → plus forte
acceptation des recommandations. Entraîne successivement :
1. Traitement biaisé négatif (biaisé défensif)
2. Traitement biaisé positif
➔ L’individu prend conscience des risques et du besoin de se protéger. Efficacité des mesures
surestimé → acceptation des mesures.
Etude de DeHoog, Stroebe et de Wit (2008) sur les effets de l’hypoglycémie : Les participants exposés
à une forte menace : forte sévérité, forte vulnérabilité
1. Produisent plus de pensées défensives envers la menace, le plus de pensées favorables
envers les recommandations
2. Plus fortes intentions comportementales de participer au stage (régime pour réduire
l’hypoglycémie)

➔ Le modèle par étape montre qu’un traitement biaisé défensif de l’information permet un
traitement favorable des recommandations contenues dans le message et favorise
l’expression de plus fortes intentions comportementales de protection.
Ce modèle : intégration synthétique des modèles duaux et du traitement biaisé défensif.
Le traitement biaisé défensif n’est pas synonyme d’échec de la persuasion mais peut contribuer
à une plus forte acceptation des recommandations qu’un traitement motivé à l’objectivité.
Limites : seulement 6 études.
Deux éléments fondamentaux écartés :
1. Le rôle de la peur : comme le modèle de Rogers le traitement de l’information ne relève que
des seules évaluations cognitives
2. Le rôle de l’efficacité : surestimation des recommandations perçues, auto-efficacité pas prise
en compte.
Manque d’explication du passage entre traitement biaisé négatif et traitement biaisé positif :
conditions d’apparition ? Processus cognitifs ?

Perspectives de Recherches

Dillard, 1994 : les émotions sont au cœur des processus qu’initie l’exposition à un appel à la peur.
Emotions, élément central des modèles
- De réduction de la pulsion motivante
- Étendu des processus parallèles
Au second plan ou exclues des modèles :
- De traitement par étapes
- La théorie de la motivation à la protection

La peur : ressenti conscient


Evaluée par des échelles à six points : effrayé, tendu, nerveux, anxieux, mal à l’aise, nauséeux
Et à 9 points : de pas du tout d’accord à tout à fait d’accord

Une émotion est caractérisée par (Keltner & Gross, 1999 ; Scherer, 1984, 200, 2001) :
- Une composante physiologique
- Une composante motrice
- Une composante cognitive
- Une tendance à l’action (approche, évitement)
- Un ressenti subjectif
Elle peut affecter le jugement sans que l’individu en ait conscience (LeDoux, 2002 ; Zajonc, 1980)

Chaque émotion est associée à des évaluations spécifiques appraisals (Ortony, Clore, & Colins, 1988 ;
Scherer, Shorr & Johnstone, 2001 ; Smith & Ellsworth, 1985) qui déterminent l’influence de l’émotion
sur le traitement de l’information ou le jugement. Ces évaluations définissent l’effet de l’émotion sur
la cognition.

La peur est caractérisée par :


L’incontrôlabilité de la situation
L’incertitude
➔ Évaluations plus pessimistes des risques (Lerner & Keltner, 2001)
Il serait intéressant d’évaluer ces aspects inconscients pour comprendre les implications de cette
émotion dans la dynamique persuasive des appels à la peur
D’autres émotions doivent être prises en compte
Appels à la peur → plusieurs émotions (Dillard & Nabi, 2006, Dillard & Peck, 2000 ; Dillard, Plotnick,
Godbold, Freimuth, & Edgar, 1996) :
- Tristesse
- Dégoût
- Culpabilité
- Honte
➔ Influence sur le traitement de l’information et la persuasion → modération de la peur

Ex :
Morales, Wu & Fitzsimons, 2012 : Dégoût + peur → réduction des réactions défensives, favorise les
intentions comportementales
Leshner & al, 2009, 2010, 2011 : Dégoût + peur → traitement défensif ++ → plus forte résistance à
la persuasion

Agrawal & Duhacheck, 2010 ; Passyn & Sujan, 2006 : Culpabilité + peur → renforcement des
intentions d’agir, facilitation du recours aux stratégies protectrices

Examiner de nouvelles stratégies défensives

Quatre stratégies défensives face à la menace selon Blumberg, 2000 :


1. L’évitement attentionnel : les individus ne prêtent pas attention au message et se focalisent
sur d’autres sources plus attractives
2. L’évitement de la compréhension : les individus ne chercher pas à comprendre le message
et ce qu’il préconise
3. L’évitement de l’inférence : le message est compris mais les individus nient son importance
ou sa pertinence
4. La contre-argumentation : les individus manifestent du désaccord ou du doute vis-à-vis du
message et adoptent une position critique envers les arguments développés
Les trois premières stratégies → processus d’évitement défensif les seules à avoir été prises en
compte dans le traitement biaisé défensif (Van’t Riet & Ruiter, 2013).

Autres stratégies
1. Stratégies de régulation du stress
- Stratégies d’approche
L’affrontement
La confrontation
On pourrait rajouter la stratégie de contre-argumentation (Blumberg, 2000)
Les individus confrontés à une menace personnellement impliquante sont plus critiques envers les
arguments soutenant l’existence de la menace plutôt qu’envers les arguments s’y opposant
Les individus n’évitent pas les informations menaçantes mais s’y confrontent et cherchent à les
réfuter

Ditto & Lopez, 1992 : Participants soumis à un examen médical avec faux diagnostic
➔ Les participants exprimaient plus de doute envers le test souhaitaient davantage en réévaluer
la validité et pointaient plus d’irrégularités dans le diagnostic final à réception de résultats
négatifs plutôt que positifs
➔ Cette stratégie traduit un « scepticisme motivé » : remise en question de l’existence de la
menace, confrontation directe à la source de la menace
Parfois (Janis & Feshbach, 1953) : agressivité des récepteurs envers la source génératrice de
sentiments inconfortables

Examen des stratégies d’approche, conditions de leur apparition, effets sur la persuasion → voie de
recherche à développer

Le rôle de l’efficacité

Hovland, Janis & Kelly, 1953 :


Les réactions défensives plus susceptibles d’émerger lorsque les recommandations proposées et
celles expérimentées échouent à réduire la tension émotionnelle à un niveau élevé
➔ Il ne suffit pas d’inclure des recommandations pour obtenir l’acceptation
Recommandations doivent être perçues à efficacité forte pour que l’individu ait le sentiment de
pouvoir se protéger et réduire la peur

Rogers & Witte reprennent ces propositions : La réussite d’un appel à la peur repose sur les
capacités du message
- A éveiller une peur suffisante pour motiver la protection
- Les possibilités d’avoir des moyens efficaces de protection
Peur → rôle facilitateur seulement si couplée à une forte efficacité
Le renforcement de l’efficacité peut réduire les réactions défensives et améliorer l’adoption
des recommandations (Witte & Allen, 2000)
Ex Eppright & al., 2002 :
Brochures sur les risques liés au cancer des testicules à une population masculine.
Menaces de peur de faible puis modérée à forte.
La moitié ont pris connaissance d’une méthode simple de détection rapide du cancer.
➔ Plus d’intention d’aller passer un examen de détection + moins de réactions défensives
lorsque la peur est forte et qu’ils ont reçu des informations sur la mesure de protection

Une moindre prise en compte de l’efficacité dans les recherches récentes, plus focalisées sur la
menace.
Une efficacité forte serait susceptible de favoriser la réduction du traitement biaisé défensif alors
qu’une efficacité faible le renforcerait → les individus ne réussissant pas à se protéger et réduire la
peur seraient plus enclins à traiter l’information de manière biaisée afin de se défendre de la menace.
L’efficacité → moyen efficace de réduction du traitement défensif au même titre que l’auto-
affirmation ou l’humeur positive.

Evaluer le traitement des recommandations

Le modèle par étape distingue :


- Le traitement de la menace
- Le traitement des recommandations
Qui relèvent de processus distincts impactant différemment sur la persuasion (DeHoog & al. 2005,
2008)

Le traitement des recommandations est motivé par la protection : La recherche de moyens


efficaces pour se protéger de la menace (Rogers, 1975, 1983).
Le traitement des recommandations serait susceptible d’être caractérisé par la focalisation (par
opposition à l’évitement) sur les informations liées à la protection (= recommandations) et s’ils
peuvent les appliquer personnellement (= auto-efficacité).

Kessels & Ruiter, 2012 :


Exposition de fumeurs et non-fumeurs à un paquet comportant un message d’avertissement visuel
menaçant et des informations de protection.
➔ Les fumeurs passent plus de temps à examiner les recommandations que celles
menaçantes
➔ Les non-fumeurs passent plus de temps sur les informations menaçantes que les
recommandations

➔ Les fumeurs se sentent vulnérables détournent leur attention des informations


menaçantes et se focalisent sur les informations permettant la protection
➔ Une forte peur entraînerait l’allocation des ressources attentionnelles, via un processus de
focalisation ou vigilance, au traitement des recommandations surtout si celles-ci présent une
efficacité forte

Une nouvelle contribution théorique : Le modèle par étape révisé

Suggestion d’une nouvelle modélisation : Le modèles par étape révisé


Enrichit le modèle initial en mettant l’accent sur le rôle de la peur et l’efficacité
Dans quelle mesure l’exposition à un appel à la peur peut-il conduire à l’acceptation ou au rejet des
recommandations ?
Ce modèle révisé par du principe que l’acceptation des recommandations dépend de deux types
de traitement initiés de manière consécutive :
1. Le traitement de la menace
2. Le traitement des recommandations
L’acceptation du message dépend du traitement des recommandations qui dépend du
traitement de la menace
Du traitement de la menace :

Le traitement de la menace est fonction de la sévérité perçue et de la vulnérabilité perçue


→ Menace forte
→ Menace faible
➔ Trois traitements différents

1. Traitement objectif heuristique


Lorsque la perception de la menace est faible, traitement objectif et heuristique
La motivation n’est pas suffisante à l’identification de moyens de protection
Les recommandations ne sont pas l’objet d’une attention particulière, ne sont pas traitées et le
message est rejeté

2. Un traitement objectif systématique


Dans deux situations :
1. Lorsque perception de la sévérité forte + vulnérabilité faible : l’existence d’une menace
sévère sera l’objet d’un traitement approfondi, les individus souhaitent être informés des
risques si jamais eux-mêmes ou leurs proches y sont exposés à l’avenir
2. Lorsque perception de la sévérité faible + perception de la vulnérabilité forte : l’individu
s’assure que la menace ne comporte aucune gravité et que le comportement peut être
maintenu
Dans ces deux situations la menace n’est pas suffisamment forte → pas de motivation à
la protection → recommandations pas utiles → pas de traitement particulier → pas
acceptées

3. Un traitement défensif systématique


Lorsque sévérité et vulnérabilité fortes → menace perçue forte
Ce traitement implique la peur qui assure un rôle médiateur dans la relation entre la menace et le
traitement du message
Sur la base des tendance comportementales à l’évitement et la fuite et des évaluations cognitives
d’incontrôlabilité de la situation et l’incertitude qui la caractérisent, la peur motive à la défense et
à l’évitement des sources menaçantes et conduit de manière automatique les traitements cognitifs
vers un traitement défensif systématique : les informations sont scrutées minutieusement pour se
défendre et réguler la tension émotionnelle.
Un traitement défensif ne conduit pas systématiquement au rejet des recommandations mais
autorise le traitement des recommandations et sous certaines conditions à leur acceptation.
Wiebe & Korbel : l’individu exprime des réactions défensives pour assurer le contrôle des émotions
négatives, la prise de conscience du danger et le besoin de protection.
Les métacognitions sont importantes à ce stade : L’individu évalue le traitement défensif qu’il
vient d’utiliser, constatie qu’il est l’objet d’une menace importante nécessitant d’adopter des
moyens de protection. Cette évaluation métacognitive active une motivation à la protection
qui favorise l’attention envers les recommandations et leur traitement.

Du traitement des recommandations à l’acceptation des recommandations

Le traitement des recommandations repose sur une motivation à la protection : les individus
focalisent leur attention sur les moyens proposés pour faire face à la menace.
Le traitement des recommandations dépend :
- De l’efficacité des recommandations proposées
- De l’auto-efficacité
➔ Perception générale de l’efficacité
- Efficacité perçue forte
- Efficacité perçue faible
➔ Deux types de traitement selon l’efficacité perçue
Pas de satisfaction de la motivation à la
1. Un traitement positif protection
Efficacité perçue forte → recommandations Un niveau faible d’efficacité n’induit pas une
efficaces et facilement applicables évaluation biaisée positive des
Offrent des ressources suffisantes pour se recommandations (surestimation de leur
protéger de la forte menace efficacité) et une plus grande acceptation
➔ Traitement des recommandations Existence d’un traitement négatif des
positif recommandations :
→ Production d’un ensemble de pensées Font l’objet d’une production de pensées
favorables à l’utilisation des actions défavorables conduisant à leur rejet
préconisées Mais les individus peuvent utiliser d’autres
➔ Recommandations acceptées et moyens permettant une protection efficace
réalisées

2. Un traitement négatif
Efficacité perçue faible → pas efficaces ou pas
applicables
Le Modèle par étape révisé offre une nouvelle contribution théorique en mettant l’accent sur trois
propositions importantes :

1. Lorsque la menace est forte, la peur induit un traitement systématique défensif


impliquant un évitement des sources menaçantes permettant de la canaliser et la réduire
Ce modèle renoue avec le Modèle de Réduction de la Pulsion Motivante
La peur dirigerait automatiquement les traitements cognitifs vers la réduction de la tension
induite et la défense face à la menace, seuls objectifs de stratégies défensives liées au
traitement défensif

2. Le traitement défensif est une condition nécessaire à l’acceptation


La possibilité de réagir de manière défensive garantit un traitement efficace des
recommandations
Wiebe & Korbel, 2003 : Les traitements défensifs permettent le contrôle des émotions
négatives et l’élaboration d’une représentation objective de la menace et des actions
protectrices
Un traitement défensif est seul en mesure de favoriser la prise de conscience de la menace et
l’activation de la motivation à la protection

3. Un traitement défensif → meilleure acceptation des recommandations si l’efficacité


perçue est forte
Les recommandations sont traitées de manière positive → acceptation des
recommandations
Si l’efficacité est faible → traitement négatif des recommandations
Dualité du traitement des recommandations : positif ou négatif

Certaines controversent demeurent :


La peur produit un effet bénéfique et relève d’une stratégie efficace afin de parvenir au
changement désiré, confirmé par plusieurs méta-analyses
La peur exerce une influence contre-productive car susceptible d’entraîner de multiples réactions
défensives favorisant le maintien, voire le renforcement des comportements à risque ou « effet
boomerang ».

Selon le modèle par étape revisité : la peur suscite l’émergence de stratégies défensives attirant
l’attention sur les recommandations qui si elles sont efficaces motivent à leur acceptation
Les réactions défensives sont des éléments favorables à la réussite d’un appel à la peur

Pas de considération des effets des appels à la peur et le rôle de l’efficacité dans les recherches ayant
mis en évidence l’apparition de réponses défensives concluant à l’inefficacité des appels à la peur

Ce modèle suggère que le traitement défensif observé chez Kessels & al. n’empêche pas une plus
forte acceptation des recommandations
Hypothèse : un tel traitement résulte d’une efficacité faible

A l’inverse des recherches attestent des effets bénéfiques des appels à la peur suggèrent que la peur
facilite le changement via l’absence de réactions défensives → l’expérience de Witte, 1994, montre
une plus forte acceptation du message lorsque les stratégies de défense sont inhibées. Leur
activation serait un frein au contrôle du danger.

Le modèle revisité : La présence de réactions défensives est positivement lié à la réussite d’un
appel à la peur → permettent de prendre conscience de la menace, la nécessité de s’en défendre
et motivent au traitement des recommandations
➔ Réinterprétation de résultats contradictoires
➔ Nouvelle compréhension des effets produits par des appels à la peur

Conclusion

Malgré les connaissances acquises en > 60ans de recherche : certaines ambiguïtés et questions
demeurent dans certains modèles
➔ Nouvelle contribution par Le Modèle Par Etape Revisité qui tente de grouper les apports
des modèles précédents (modèle étendu des processus parallèles et modèle par étape) dans
une versions plus complète des modalités de réponses face aux appels à la peur

Faire appel à la peur est un outil efficace si et seulement si certaines précautions sont prises en
amont
Selon Witte & Allen, 2000 :
« Les appels à la peur doivent être utilisés avec prudence dans la mesure où ils peuvent avoir des
effets inverses si les individus ne croient pas qu’ils sont capables d’éviter efficacement la menace »

Si la peur doit être suffisamment forte pour motiver au changement, il faut garantir un sentiment
d’efficacité afin que les individus canalisent l’anxiété ressentie et assurent leur protection face à la
menace
Sans ressources suffisantes pour se protéger, la peur conduit à l’émission de réponses défensives et
au maintien des comportements non souhaités.
Par conséquent si on peut faire « appel à la peur » pour motiver au changement il est impératif de
rassurer simultanément
Les campagnes de prévention actuelles axées sur la communication des risques ne développent
pas suffisamment de solutions efficaces visant la réduction des comportements à risque (Ruiter
& al., 2014).
Trasher, Osman, Abad-Vivero, Hammond, Bansal-Travers & al., 2014 : sur un échantillon de 5000
participants seulement un tiers es fumeurs déclarent avoir pris connaissance de cette information
au moins une fois dans le mois précédent
Il est donc essentiel d’insister davantage sur des solutions pratiques et concrètes que les
individus peuvent facilement mettre en œuvre afin de se protéger de la menace et changer
efficacement de comportement

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