Vous êtes sur la page 1sur 12

Encyclopédie Médico-Chirurgicale 17-023-A-44

17-023-A-44

Troubles de l’oculomotricité
MC Gaumond-Jallu
C Vignal-Clermont
Résumé. – La pathologie de l’oculomotricité regroupe les atteintes intrinsèques et les atteintes extrinsèques.
L’atteinte pupillaire provoque une anomalie de la taille et/ou de la réactivité de la pupille. L’atteinte
extrinsèque se traduit par la perte du parallélisme des axes visuels et/ou l’apparition d’oscillations des globes
oculaires. La gêne fonctionnelle est très variable et les étiologies sont multiples mais l’analyse clinique fournit
souvent une orientation topographique qui guide la demande d’examens complémentaires.
© 2001 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.

Mots-clés : anisocorie, diplopie, oscillopsie, paralysie oculomotrice, saccades, poursuites, paralysie du


regard, syndrome de Parinaud, « skew deviation », nystagmus, intrusions saccadiques.

Introduction
2
1
Les troubles de l’oculomotricité concernent l’oculomotricité 3 4
intrinsèque et l’oculomotricité extrinsèque. a 6
Nous décrivons ici d’abord la pathologie oculomotrice pupillaire liée 5
7
à l’atteinte des connexions tecto-oculo-motrices (syndrome d’Argyll
8
Robertson), de la voie parasympathique (III et pupille tonique) ou
de la voie sympathique (syndrome de Claude Bernard-Horner).
9
Nous envisageons ensuite la pathologie extrinsèque qui se traduit
par la limitation des mouvements oculaires normaux ou par
l’apparition de mouvements anormaux. Ces atteintes sont décrites b 10
suivant l’anatomie des voies de la motilité oculaire : atteintes
11
musculaires, pathologies des noyaux oculomoteurs, en infra- ou en
supranucléaire. 12
Enfin, nous verrons les nystagmus pathologiques et les intrusions
saccadiques qui représentent les mouvements anormaux. Leur 13
classification suivant les caractéristiques cliniques est la plus utile
en pratique.
c

Oculomotricité intrinsèque :
atteintes pupillaires
La pupille est un orifice réglable par lequel les rayons lumineux 1 Principales structures anatomiques du tronc cérébral impliquées dans le contrôle
pénètrent dans le globe oculaire et arrivent à la rétine. Elle adapte sa des mouvements oculomoteurs. a. Pédoncule ; b. protubérance ; c. bulbe ; 1. noyau in-
terstitiel rostral du faisceau longitudinal médian (FLM) (FLMir) ; 2. commissure pos-
taille à différents paramètres pour assurer à la rétine un
térieure ; 3. noyau interstitiel de Cajal ; 4. colliculus supérieur ; 5. colliculus inférieur ;
fonctionnement optimal. Les anomalies pupillaires sont des 6. noyau du III ; 7. noyau rouge ; 8. noyau du IV ; 9. FLM ; 10. formation réticulée pa-
anomalies de taille (myosis bilatéral, mydriase bilatérale ou rapontique ; 11. noyau du VI ; 12. noyau vestibulaire ; 13. noyau préposé de l’hypo-
différence de taille entre les pupilles [anisocorie]) et/ou de réactivité glosse.
des pupilles.
Après un bref rappel anatomophysiologique, nous décrivons
RAPPEL ANATOMOPHYSIOLOGIQUE
l’examen des pupilles. Ensuite, nous abordons la pathologie
pupillaire. Les tests aux collyres sont développés au niveau de Le sphincter de l’iris, constricteur, est innervé par le
chaque atteinte pupillaire. parasympathique dont le médiateur est l’acétylcholine. C’est une
voie à deux neurones dont le centre est situé dans les pédoncules
cérébraux au niveau du noyau d’Edinger-Westphal, à la partie
Marie-Christine Gaumond-Jallu : Ancien chef de clinique des hôpitaux de Paris, attachée des hôpitaux de antéro-interne du noyau du moteur oculaire commun (III) (fig 1).
Paris, 1, boulevard de Courcelles, 75008 Paris, France. Les fibres directes et croisées empruntent le tronc du III et font relais
Catherine Vignal-Clermont : Praticien hospitalier, chef de service, service d’ophtalmologie, centre hospitalier
général de Saint-Denis, 93205 Saint-Denis cedex. France ; attachée à l’hôpital Lariboisière, 75475 Paris
dans le ganglion ciliaire. Les fibres postganglionnaires constituent
cedex 10. les nerfs ciliaires courts.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Gaumond-Jallu MC et Vignal-Clermont C. Troubles de l’oculomotricité. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), Neurologie,
17-023-A-44, 2001, 12 p.
17-023-A-44 Troubles de l’oculomotricité Neurologie

Le système sympathique, dont le médiateur est la noradrénaline, – les pupilles sont égales en lumière ambiante mais une anisocorie
assure un tonus permanent au dilatateur irien. C’est une chaîne à apparaît dans la pénombre, signant une paralysie du dilatateur irien
trois neurones qui ne traverse pas la ligne médiane. Elle naît dans (sympathique) : c’est un syndrome de Claude Bernard-Horner qui
l’hypothalamus, au niveau du plancher du IIIe ventricule (centre de est affirmé par un test à la cocaïne.
Karplus et Kreidl) ; le premier neurone diencéphalomédullaire se
termine dans le centre de Budge et Waller, situé entre C8 et D2, le ¶ Étude de la dynamique pupillaire
deuxième neurone rejoint la chaîne du sympathique cervical
jusqu’au ganglion cervical supérieur. De là naît le troisième neurone – Il s’agit de la recherche d’une pupille amaurotique ou relative
qui chemine le long de la carotide interne puis gagne le ganglion de afferent pupillary defect (RAPD) ou signe de Marcus Gunn, qui
Gasser, l’ophtalmique de Willis, et innerve le dilatateur via les nerfs témoigne de l’atteinte de la partie centripète du RPM, c’est-à-dire
ciliaires longs. essentiellement du nerf optique. On peut utiliser pour cela la
méthode décrite par Levatin en 1959 et développée ensuite par
Dans les conditions physiologiques, la taille de la pupille varie de
Thompson en 1976 [16] : c’est le swinging flashlight test ou méthode
1,7 mm (myosis) à 8 mm (mydriase). Les deux pupilles sont de taille
de l’éclairement alterné. Elle doit être réalisée dans une pièce
égale, dites isocores. Il faut savoir qu’il existe de fréquentes
sombre, alors que le patient regarde à l’infini. On fait passer
anisocories physiologiques (17 % des anisocories environ). Dans ce
rapidement une lumière vive d’un œil à l’autre en restant un temps
cas, les réflexes photomoteurs (RPM) direct et consensuel et le
égal (3 à 5 secondes) sur chaque œil.
myosis lié à l’accommodation convergence sont normaux. La
différence de taille entre les pupilles est en règle minime (0,3 à – La réaction pupillaire à la vision de près est ensuite étudiée : elle
0,7 mm) et ne se modifie pas en fonction de l’éclairage ambiant. comporte l’association d’un myosis, de l’accommodation et de la
Les pupilles se contractent à la lumière de façon simultanée : c’est le convergence.
RPM direct (homolatéral) et consensuel (controlatéral). Cette Au terme de l’examen et en fonction du contexte, le diagnostic est le
constriction est sous la dépendance du contingent parasympathique plus souvent posé et les tests aux collyres ne sont donc qu’un
du III. C’est une voie à quatre neurones : support.
– elle part des photorécepteurs rétiniens et chemine via le nerf
optique puis le chiasma, où une partie des fibres croisent, ce qui PATHOLOGIE PUPILLAIRE [18]

explique le RPM direct et consensuel. Les fibres abandonnent la


bandelette un peu en avant du corps genouillé externe ; Nous n’envisageons pas ici la pathologie pupillaire liée à une
atteinte de la voie afférente du RPM, c’est-à-dire survenant dans les
– le relais se fait dans la région prétectale du tubercule atteintes du nerf optique quelle qu’en soit l’étiologie, qui ne
quadrijumeau antérieur et le deuxième neurone va jusqu’au noyau constitue pas à proprement parler un trouble de l’oculomotricité.
d’Edinger-Westphal ; Nous n’envisageons pas non plus les atteintes pupillaires
– le retour se fait par la voie parasympathique à deux neurones sus- congénitales, la pathologie pupillaire médicamenteuse et les
décrite et se termine sur le muscle sphincter de l’iris. modifications survenant lors des comas.
De plus, les pupilles se contractent de façon égale en vision de près.
Ce myosis s’accompagne d’une réaction d’accommodation en ¶ Atteinte des connexions tecto-oculomotrices
rapport avec une contraction du muscle ciliaire. La consigne de mise
C’est le syndrome d’Argyll Robertson.
au point parvient aux noyaux du prétectum de façon bilatérale selon
des voies supranucléaires mal connues. La voie efférente de ce Devant un myosis bilatéral peu ou pas réactif à la lumière, le
réflexe myosis-accommodation-convergence met en jeu la voie premier diagnostic est celui de syndrome d’Argyll Robertson. Les
parasympathique provenant du noyau d’Edinger-Westphal. Environ critères cliniques du diagnostic sont :
90 % des efférences du ganglion ciliaire se destinent au muscle – le myosis : il s’agit de pupilles de petite taille (myosis). Cependant,
ciliaire, contre moins de 5 % au sphincter de l’iris. les pupilles peuvent être de taille intermédiaire ;

EXAMEN DES PUPILLES


– la dissociation de la réaction pupillaire à la lumière par rapport à
l’accommodation-convergence est le signe essentiel : le RPM est en
Le diagnostic d’une pathologie pupillaire repose en grande partie règle diminué, voire totalement aboli au cours de l’évolution, mais
sur l’examen clinique. On recherche à l’interrogatoire la notion il existe une conservation du myosis réflexe lié à l’accommodation-
d’instillation préalable d’un collyre par le patient ou son entourage convergence étonnamment bon pour des pupilles de si petite taille ;
dans les heures ou jours précédents, ainsi que la prise par voie
générale de certains médicaments pouvant interférer avec la taille – ce syndrome est en règle bilatéral, mais il existe de nombreux cas
et/ou la dynamique pupillaire (par exemple anticholinergiques). Il asymétriques quant à la taille et/ou la réactivité des pupilles ;
faut également éliminer, par un examen ophtalmologique, toute – l’irrégularité pupillaire : les pupilles sont en règle irrégulières, ce
cause oculaire d’anisocorie : anomalies de l’iris, synéchies d’autant qu’il existe, lors de l’évolution, des zones plus ou moins
iridocristalliniennes, myosis d’une inflammation oculaire, semi- étendues d’atrophie de l’iris.
mydriase d’un glaucome aigu.
Les pupilles d’Argyll Robertson se développent sur plusieurs mois,
L’examen comporte deux temps. voire des années. Elles évoluent en général vers des pupilles de
¶ Étude de la taille des pupilles moins en moins réactives à la lumière, voire fixes avec une relative
épargne de la contraction pupillaire à la convergence.
Elle se fait par l’étude statique pupillaire avec un éclairage simultané
La lésion responsable est située au niveau de la partie dorsale du
des deux pupilles à la lumière ambiante, puis dans la pénombre,
tronc cérébral, dans la région de l’aqueduc de Sylvius. Elle
puis avec une lumière plus forte.
interrompt les connexions tecto-oculomotrices qui abordent la partie
Ceci permet de mettre en évidence différents types de situations dorsale du noyau d’Edinger-Westphal et épargne les fibres plus
pathologiques : ventrales responsables de la réaction en vision rapprochée. Le
– il existe une anisocorie à la lumière ambiante : une étude myosis, inconstant, serait lié à l’interruption des voies inhibitrices
dynamique (RPM et dilatation à l’obscurité) va permettre de préciser supranucléaires.
la pathologie, la pupille pathologique étant en règle celle dont la La constatation d’une telle pathologie pupillaire impose la recherche
taille varie le moins en fonction de l’éclairement ; d’une cause, au premier rang desquelles se trouvait la syphilis
– les pupilles sont de taille égale mais anormale et peu ou pas secondaire qui doit toujours être envisagée, en particulier s’il existe
modifiée par un changement d’éclairement : myosis ou mydriase un myosis important. Cependant, d’autres causes ont été décrites :
bilatérale ; maladies générales (diabète, alcoolisme), encéphalites, sclérose en

2
Neurologie Troubles de l’oculomotricité 17-023-A-44

plaques (SEP), maladies inflammatoires (sarcoïdose), tumeurs du ¶ Troubles pupillaires lors de l’atteinte
tronc cérébral, maladies dégénératives. L’association d’un syndrome de la voie sympathique
d’Argyll Robertson avec un syndrome de Parinaud signe une
atteinte de la partie dorsale du mésencéphale, le plus souvent Il s’agit essentiellement du syndrome de Claude Bernard-Horner.
tumorale (pinéalome, tumeur de la calotte pédonculaire, métastase) À la lumière, on peut retrouver une anisocorie, mais les deux
ou une hydrocéphalie. pupilles sont parfois à peu près égales. À l’obscurité, l’anisocorie
apparaît ou se majore avec un myosis du côté pathologique. Il existe
¶ Troubles pupillaires lors de l’atteinte une atteinte du dilatateur irien et donc la pupille dilate moins et
de la voie parasympathique plus lentement que la pupille normale. En revanche, la voie
parasympathique est intacte, le RPM et la réaction pupillaire à
L’atteinte de la voie parasympathique peut se situer au niveau du l’accommodation-convergence sont donc conservés. On recherche
tronc cérébral (noyau du III), du premier neurone qui emprunte le toujours un discret ptôsis associé, lié à l’atteinte du muscle lisse de
trajet du tronc du III, du ganglion ciliaire (relais premier-second Müller, innervé par le sympathique. De même, la paupière inférieure
neurones) ou au niveau du deuxième neurone (nerfs ciliaires courts). s’élève, l’ensemble créant un rétrécissement de la fente palpébrale,
Cette atteinte est responsable, sur le plan pupillaire, d’une mydriase avec une apparente énophtalmie.
aréactive, avec souvent une paralysie accommodative (cycloplégie)
Il peut exister, en particulier lors d’atteinte préganglionnaire au
plus ou moins complète.
niveau de la chaîne sympathique cervicale, des troubles de la
L’existence d’une mydriase unilatérale aréactive doit faire rechercher sécrétion sudorale (anhidrose) et de la vasorégulation au niveau de
une atteinte de la musculature extrinsèque du moteur oculaire l’hémiface homolatérale à la lésion (vasodilatation). Ceci peut
commun. L’atteinte isolée du III intrinsèque est exceptionnelle, et s’accompagner d’une hyperhémie conjonctivale homolatérale, d’un
une mydriase unilatérale isolée indolore est le plus souvent une larmoiement et d’une obstruction nasale.
pupille d’Adie. En cas d’atteinte compressive du III, il existe en règle
Le diagnostic de syndrome de Claude Bernard-Horner est avant tout
une atteinte du III extrinsèque associée à l’anomalie pupillaire. Les
clinique et repose sur le contexte (chirurgie cervicale [thyroïde] ou
atteintes du III posent en effet le problème de leur étiologie, faisant
thoracique [pacemaker], lésion de l’apex pulmonaire...) et l’examen
craindre une pathologie anévrismale ou tumorale. La prise en charge
des pupilles. Il faut toujours s’assurer, dans les cas de syndrome de
des patients se fait au cas par cas, mais obéit à des règles (cf infra).
Claude Bernard-Horner acquis, du caractère récent du ptôsis
La pupille d’Adie est une pupille de grande taille avec une abolition (photographies). En effet, une anisocorie physiologique associée à
du RPM. À la lampe à fente, il existe des mouvements dits un ptôsis congénital peut, à première vue, passer pour un syndrome
« vermiformes » de la marge pupillaire et l’on peut observer des de Claude Bernard-Horner. Dans les cas difficiles, le diagnostic peut
paralysies parcellaires du sphincter irien. Il existe une paralysie être confirmé et précisé par les tests aux collyres :
accommodative responsable de la gêne en vision de près, avec une
contraction très lente et progressive de la pupille à la convergence. – la cocaïne, sympathomimétique, a une action indirecte en inhibant
C’est une pupille tonique : la contraction obtenue en le recaptage de la noradrénaline au niveau des synapses
accommodation-convergence est excessive et provoque un myosis sympathiques. Le collyre à la cocaïne à une concentration de 4 à
serré qui inverse l’anisocorie. Ce myosis persiste plusieurs minutes 10 % dilate donc la pupille normale mais est sans action sur la
après la fin de l’épreuve, et la redilatation est lente et tonique. Enfin, pupille sympathique, quel que soit le niveau de l’atteinte. Le test à
l’instillation d’un collyre myotique dilué (pilocarpine 0,125 %, une la cocaïne majore l’anisocorie. Plus la concentration est élevée, plus
goutte deux fois à 5 minutes d’intervalle avec examen du patient à le délai d’action est rapide. En pratique, une goutte est placée dans
45 minutes) qui n’agit pas sur la pupille normale provoque un chaque œil et une seconde goutte 5 minutes plus tard. Le patient est
myosis et inverse l’anisocorie dans 85 % des cas de pupille d’Adie : observé toutes les 15 minutes, jusqu’à 45 minutes, pour évaluer la
c’est l’hypersensibilité de dénervation, typique mais non vitesse et l’importance de la réponse pupillaire.
pathognomonique de l’atteinte postganglionnaire. La pupille d’Adie Pour localiser la lésion, l’élément le plus fiable est encore la clinique
signe en effet une atteinte du ganglion ciliaire ou de ses racines : et la recherche des signes associés ;
c’est une atteinte postganglionnaire de la voie parasympathique. – un test à l’épinéphrine (ou adrénaline) diluée (1/1 000) ou à la
Les pupilles d’Adie sont divisées en trois catégories [17] : néosynéphrine (phényléphrine à 1 %) en s’assurant de l’intégrité de
l’épithélium cornéen et plus de 48 heures après le test à la cocaïne
– pupille tonique s’intégrant dans une atteinte locale du ganglion peut être utilisé. Les sympathomimétiques dilués sont sans action
ciliaire, inflammatoire ou infectieuse, isolée ou dans le cadre d’un sur la pupille sympathique en cas d’atteinte préganglionnaire
processus systémique (herpès, sarcoïdose, polyarthrite rhumatoïde). (premier et deuxième neurones), mais dilatent la pupille
Il peut s’agir aussi d’une atteinte traumatique (traumatologie pathologique (hypersensibilité de dénervation) en cas d’atteinte
orbitaire, chirurgie orbitaire ou oculaire, injections rétrobulbaires) ; postganglionnaire ;
– pupilles toniques associées à une neuropathie périphérique ou – le test de référence pour différencier les atteintes sympathiques
dysautonomique (alcoolisme, diabète, syndrome de Guillain et préganglionnaires (premier et deuxième neurones) et post-
Barré), à un syndrome dysautonomique aigu, à une neuropathie ganglionnaires (troisième neurone) est le test à l’hydroxy-
héréditaire sensitivomotrice (syndrome de Charcot-Marie-Tooth) ou amphétamine à 1 % (Parédrinet) qui dilate la pupille normale et le
à une amylose ; syndrome de Claude Bernard-Horner en cas d’atteinte
– syndrome d’Adie qui apparaît de façon isolée chez des individus préganglionnaire, mais est sans effet en cas d’atteinte
en bonne santé. Son incidence est de 4,7/100 000 ; il survient le plus postganglionnaire (l’hydroxyamphétamine agit en relargant de la
souvent chez la femme (70 %) entre 20 et 50 ans et est en général noradrénaline au niveau de la synapse des neurones
unilatéral (80 %). Dans le syndrome d’Adie, la parésie préganglionnaires). Ce test n’est pas pratiqué en France.
accommodative se résout en règle en quelques mois. L’atteinte
pupillaire s’accompagne souvent d’une hypo- ou d’une aréflexie Étiologies : syndrome de Claude Bernard-Horner acquis
ostéotendineuse qui tend à se majorer dans le temps.
En vieillissant, la pupille d’Adie diminue de taille, garde son • Central
caractère aréactif et la parésie accommodative s’améliore (50 % des L’atteinte concerne le premier neurone ; c’est la plus rare. Les causes
patients ont retrouvé toute leur accommodation à 2 ans). La vasculaires sont responsables de la majorité des atteintes du premier
bilatéralisation n’est pas rare ; la fréquence de l’atteinte du deuxième neurone. Parmi elles, l’occlusion de l’artère cérébelleuse postérieure
œil est estimée par Thompson à 4 % par an. En cas de bilatéralité, la et inférieure est responsable du syndrome de Wallenberg. Ces
pupille d’Adie vieillie peut alors poser des problèmes de diagnostic atteintes, pédonculaires, protubérantielles ou bulbaires, vasculaires
différentiel avec le syndrome d’Argyll Robertson. ou tumorales, donnent des syndromes bien individualisés, d’une

3
17-023-A-44 Troubles de l’oculomotricité Neurologie

grande valeur localisatrice. Parmi les autres causes, beaucoup plus d’un muscle ou d’un nerf oculomoteur, ou plus rarement dans
rares, on retrouve : la syringomyélie, la SEP, les traumatismes et les certaines atteintes des voies supra- ou internucléaires, les
causes infectieuses. correspondances motrices et sensorielles vont être perturbées et le
patient se plaint de voir double. Parfois, les deux images ne sont
• Atteinte préganglionnaire du second neurone pas clairement séparées et le patient se plaint d’un flou visuel.
Les lésions sont médiastinales hautes, cervicales basses et Les nystagmus et les mouvements anormaux se caractérisent par
thoraciques hautes. Elles représentent 20 à 60 % des syndromes de l’impossibilité de maintenir l’image de façon stable sur la macula.
Claude Bernard-Horner, selon les séries. Les causes peuvent être Le patient se plaint d’oscillopsie, c’est-à-dire d’une instabilité de
traumatiques, chirurgicales, tumorales. Citons les lésions de l’apex l’image qui va le gêner en vision de loin et à la lecture, et être
pulmonaire, responsables du syndrome de Pancoast-Tobias. responsable d’une baisse de l’acuité visuelle.

• Atteinte postganglionnaire MÉTHODES D’EXAMEN

Le troisième neurone qui naît dans le ganglion cervical supérieur, L’interrogatoire est le premier temps de l’examen. Il renseigne sur la
suit dans un premier temps la carotide interne, passe brièvement symptomatologie fonctionnelle (diplopie, oscillopsie, existence d’une
dans le sinus caverneux avec le VI et ensuite entre dans l’orbite. Les symptomatologie neurologique associée : par exemple troubles de
lésions touchant le troisième neurone peuvent donc être l’équilibre), ses circonstances de survenue (traumatisme, effort
extracrâniennes, intracrâniennes et orbitaires. Au niveau physique, lecture), le terrain (âge, antécédents oculaires, vasculaires)
extrâcranien, la principale étiologie du syndrome de Claude et l’existence de signes associés (céphalées, douleurs périoculaires,
Bernard-Horner est la dissection de la carotide interne éclipses visuelles, baisse d’acuité visuelle ou trouble du champ
extracrânienne [1]. En effet, celle-ci s’accompagne dans un tiers des visuel, nausées, vertiges, signes généraux évoquant un Horton)…
cas d’un syndrome de Claude Bernard-Horner homolatéral, L’inspection recherche :
particulièrement évocateur quand il est associé à une douleur – une attitude vicieuse de la tête ou torticolis : s’il existe une
orbitaire unilatérale. En pratique, un syndrome de Claude Bernard- diplopie, pour essayer de la diminuer, le patient a tendance à
Horner douloureux est une dissection carotidienne jusqu’à preuve tourner la tête dans le champ d’action du muscle atteint ;
du contraire et impose de faire réaliser en urgence un écho-
– un strabisme ou tropie en position de repos (dite position
tomographie-doppler carotidien, voire une imagerie par résonance
primaire) : celui-ci peut être convergent (ésotropie), divergent
magnétique (IRM), pour en faire le diagnostic.
(exotropie) ou vertical (hyper- ou hypotropie) ;
Il existe d’autres causes de syndrome de Claude Bernard-Horner
– un ptôsis : il traduit l’atteinte du releveur de la paupière
douloureux : l’algie vasculaire de la face et le syndrome de Raeder.
supérieure. S’il couvre l’aire pupillaire, il supprime la diplopie.
Au niveau de la loge caverneuse, les atteintes sont essentiellement L’association d’un ptôsis à une atteinte oculomotrice doit faire
tumorales et inflammatoires (syndrome de Tolosa et Hunt réalisant rechercher un déficit des autres muscles innervés par le III.
également une atteinte douloureuse). Une paralysie oculomotrice
L’examen de la motilité oculaire comprend :
(POM) du VI, associée à un syndrome de Claude Bernard-Horner
homolatéral, évoque fortement une lésion à ce niveau. Au niveau – l’étude des différents types de mouvements oculaires, dans le plan
du sinus caverneux, un syndrome de Claude Bernard-Horner peut horizontal et vertical :
être associé à une atteinte du III avec un ptôsis. Parfois il existe une – les saccades sont étudiées œil par œil, puis les deux yeux
mydriase, et dans ce cas, l’atteinte du III masque l’atteinte ensemble, en demandant au patient de déplacer ses yeux ;
sympathique postganglionnaire. Le plus souvent, la pupille n’est pas
– la poursuite oculaire s’étudie également œil par œil, puis les
dilatée, mais il ne s’agit pas d’une épargne pupillaire et l’atteinte
deux yeux ensemble, en faisant suivre le doigt de l’examinateur
pupillaire sympathique peut être affirmée par un test à la cocaïne.
ou un objet déplacé lentement ;
Les atteintes orbitaires peuvent être tumorales, inflammatoires ou
– les mouvements vestibulo-oculaires sont étudiés en déplaçant
traumatiques (injection rétrobulbaire lors d’une chirurgie de la
la tête du patient qui fixe l’examinateur : c’est le réflexe
cataracte). Mais il existe presque toujours dans ce cas des POM
oculocéphalique ;
associées, faisant passer le syndrome de Claude Bernard-Horner au
second plan. – un examen sous écran opaque (en réalisant une occlusion
unilatérale intermittente puis une occlusion alternée ou cover test) :
– soit les globes restent immobiles et le sujet est orthophorique ;
Oculomotricité extrinsèque – soit l’œil couvert est dévié, mais reprend la fixation quand on
le découvre, sans faire bouger l’autre œil : le sujet est
PHYSIOLOGIE ET RÔLE DES MOUVEMENTS OCULAIRES
hétérophorique (exophorique si la déviation est vers le dehors et
ésophorique si elle est vers le dedans) ;
Les mouvements oculaires sont au service de la vision. La
– dans le cas d’une POM, la reprise de la fixation quand on
correspondance sensorielle est servie par la correspondance motrice
découvre l’œil dévié se fait au prix d’une déviation de l’autre œil :
qui assure une double fonction :
il s’agit d’une tropie (strabisme ou paralysie oculomotrice). En cas
– maintenir les deux macula de façon stable face à l’image fixée, et de POM, la déviation n’est pas stable ; elle est maximale dans le
ceci quels que soient les déplacements du sujet, de l’objet fixé et de champ d’action du muscle paralysé et diminue dans la direction
l’environnement. Les mouvements oculaires lents assurent cette opposée ;
fonction (poursuite, phases lentes du nystagmus optocinétique et du – s’il existe une diplopie binoculaire traduisant une anomalie de
nystagmus vestibulaire) ; l’alignement oculaire, celle-ci peut être étudiée par la méthode du
– quand une nouvelle image est sélectionnée, les mouvements verre rouge ou par un test de Lancaster. Ces deux techniques sont
oculaires rapides, ou saccades, permettent de changer de point de développées dans l’article consacré à la diplopie.
fixation.
ATTEINTES INFRANUCLÉAIRES :
MUSCLES ET JONCTION NEUROMUSCULAIRE
SIGNES FONCTIONNELS
La diplopie, c’est-à-dire la perception d’un même objet dans deux ¶ Anatomie
endroits différents de l’espace visuel, est la principale plainte Les muscles oculomoteurs sont au nombre de six par œil : quatre
rencontrée en pathologie oculomotrice. En effet, lors de l’atteinte muscles droits (interne, externe, inférieur et supérieur) et deux

4
Neurologie Troubles de l’oculomotricité 17-023-A-44

obliques (grand oblique ou oblique supérieur, petit oblique ou lentes et hypométriques. La cataracte polychromatique est constante.
oblique inférieur). Les quatre muscles droits ont leur origine au Des anomalies pigmentaires rétiniennes sont fréquentes.
sommet de l’orbite, au niveau du tendon de Zinn. À partir de là, ils – La dystrophie oculopharyngée est aussi une maladie à
forment le cône musculaire. Leur insertion antérieure sur le globe transmission autosomale dominante qui apparaît après 40 ans dans
oculaire se fait à une distance variable du limbe, comprise entre 5,5 certains groupes ethniques. Le ptôsis est partiel, symétrique.
et 7,5 mm. Le grand oblique, rétroéquatorial, se réfléchit sur une L’ophtalmoplégie est souvent modérée. La biopsie musculaire est
poulie à la face interne de l’orbite et s’insère sur la partie typique.
postéroexterne du globe. Le petit oblique est également
rétroéquatorial. Il naît de la face interne de l’orbite, cravate le globe Les dystrophies musculaires congénitales sont rares.
oculaire dans sa partie inférieure et s’insère dans le quadrant
Maladies des canaux ioniques
temporal au niveau du méridien horizontal.
Les troubles oculomoteurs induits par une pathologie périphérique C’est un groupe de maladies rares, caractérisé par la myotonie. La
sont divers et multiples, puisque n’étant pas provoqués par une maladie est provoquée par une anomalie de transfert de certains
atteinte systématisée. Il n’y a presque jamais d’atteinte pupillaire. ions (calcium, potassium, chlore) à la surface membranaire
En revanche, les muscles palpébraux sont souvent atteints (releveur musculaire.
de la paupière supérieure et orbiculaire), l’atteinte est souvent L’atteinte des muscles oculomoteurs est très rare. En revanche, il
bilatérale et asymétrique. Enfin, des signes systémiques existent existe souvent une asynergie oculopalpébrale lors des poussées, avec
parfois. parfois un blépharospasme (paralysie familiale périodique
Ces atteintes périphériques peuvent être classées en trois groupes : hyperkaliémique).
les myopathies par atteinte musculaire primitive, les orbitopathies
qui entraînent une limitation mécanique de l’action musculaire, et la Myosites
pathologie de la jonction neuromusculaire où muscle et nerf sont L’atteinte inflammatoire d’un ou plusieurs muscles se traduit par
initialement normaux. une diplopie douloureuse.
Le plus souvent idiopathique, cette atteinte est une forme a minima
¶ Myopathies de pseudotumeur inflammatoire que nous verrons plus loin.
Au décours des myopathies, il faut se souvenir que si l’atteinte
musculaire paraît le plus souvent primitive, des modifications ¶ Atteintes musculaires restrictives
musculaires secondaires à une dénervation sont également La limitation « mécanique » de l’action musculaire entraîne une
possibles [6]. diplopie.
Myopathies mitochondriales Le plus souvent, il s’agit d’un traumatisme (fracture du plancher de
l’orbite) ou d’une maladie de Basedow. Mais tout processus
Les maladies mitochondriales sont des maladies liées au intraorbitaire infiltrant, compressif ou inflammatoire peut être
dysfonctionnement de la chaîne respiratoire, une des fonctions de la responsable [8].
mitochondrie. Ce dysfonctionnement entraîne un déficit énergétique
cellulaire, particulièrement sensible au niveau des tissus Orbitopathie dysthyroïdienne
consommateurs d’énergie que sont le muscle et le système
Maladie auto-immune, l’orbitopathie dysthyroïdienne (OT) est la
nerveux [12].
cause la plus fréquente des orbitopathies restrictives. Elle s’associe
L’ophtalmoplégie externe progressive chronique (OEPC) associe de parfois à une myasthénie. Elle peut précéder la pathologie
façon lentement progressive un ptôsis bilatéral à une limitation à thyroïdienne. Le diagnostic est alors difficile (biologie, imagerie
peu près symétrique et importante des mouvements oculaires. Ce orbitaire).
syndrome n’est pas spécifique des myopathies mitochondriales,
Elle associe à des degrés variables des signes de congestion oculaire
puisqu’il se rencontre au cours d’autres atteintes musculaires, mais
(chémosis, hyperhémie), des signes palpébraux (œdème, rétraction,
il reste très évocateur. Les patients se plaignent rarement de
asynergie oculopalpébrale), une exophtalmie, une ophtalmoparésie,
diplopie. En revanche, la faiblesse des muscles palpébraux, en
une neuropathie optique compressive.
particulier des orbiculaires, est responsable de kératites d’exposition
invalidantes. La maladie débute souvent dans les trois premières La diplopie est une plainte fonctionnelle fréquente, rarement
décennies. La biopsie musculaire montre une accumulation révélatrice. Les symptômes sont souvent plus marqués le matin, au
mitochondriale avec fibres musculaires anormales (red ragged fibers). réveil. Les muscles qui sont élargis par infiltration lymphocytaire
L’atteinte est liée à une délétion de l’acide désoxyribonucléique diffuse sont diversement atteints : le droit inférieur est le plus
(ADN) mitochondrial et est habituellement d’apparition sporadique souvent atteint, entraînant une atteinte de l’élévation, puis sont
et non transmissible. progressivement atteints le droit interne (atteinte de l’abduction), le
droit supérieur, le droit externe et plus rarement les obliques.
Le syndrome de Kearns-Sayre associe une OEPC importante, un
L’atteinte est souvent bilatérale et asymétrique. Passé la phase active
début avant 20 ans et une rétinopathie pigmentaire. De plus, doit
d’inflammation orbitaire, une phase séquellaire avec fibrose
exister au moins l’un des signes suivants : bloc cardiaque complet,
musculaire s’installe (fig 2). Dans les formes les plus évoluées, le
hyperprotéinorachie (supérieure à 1 mg/mL), atteinte cérébelleuse.
patient a une ésotropie et une atteinte complète de l’élévation.
La rétinopathie débute au pôle postérieur et s’accompagne d’une
mauvaise acuité nocturne. Un nystagmus pendulaire peut exister.
2 Orbitopathie dysthy-
roïdienne.
Dystrophies musculaires
Ce sont des maladies génétiquement déterminées qui entraînent
progressivement un affaiblissement et une destruction musculaires
par atteinte primitive du muscle.
– La dystrophie myotonique ou maladie de Steinert est une maladie
à transmission autosomale dominante, associant une faiblesse
musculaire distale à une myotonie, retard involontaire à la relaxation
après une contraction musculaire. Le ptôsis et l’atteinte des
orbiculaires sont fréquents. L’atteinte oculomotrice associe, à des
degrés variables, une ophtalmoparésie à des saccades retardées,

5
17-023-A-44 Troubles de l’oculomotricité Neurologie

L’évolution de l’orbitopathie est indépendante du contrôle de la La moitié des myasthénies initialement oculaires restent purement
maladie thyroïdienne, mais la chirurgie de la thyroïde peut oculaires, surtout lorsqu’il n’y a pas de généralisation dans les 2
provoquer une exacerbation de l’orbitopathie. ans.
Une correction prismatique est proposée dans les diplopies La myasthénie est une maladie auto-immune avec atteinte des
gênantes. La chirurgie des muscles oculomoteurs ne se fait qu’après récepteurs postsynaptiques nicotiniques à l’acétylcholine. L’atteinte
stabilisation de la maladie. La corticothérapie est indiquée dans de la transmission neuromusculaire se traduit par la faiblesse
certaines formes très évolutives. musculaire. En revanche, les modifications des saccades sont liées à
des mécanismes adaptatifs d’origine centrale [7].
Fractures de l’orbite Les anticholinestérasiques sont d’efficacité modérée sur le ptôsis, et
Les traumatismes du cadre orbitaire, en particulier les fractures du surtout sur la diplopie. La corticothérapie peut être proposée dans
plancher de l’orbite, provoquent une incarcération du droit inférieur les formes avec diplopie invalidante [4].
qui se traduit par une limitation de l’élévation (restriction) et de
l’abaissement (défaut de contraction). Les fractures du mur interne Syndrome de Lambert-Eaton
sont plus rares. Ce syndrome myasthéniforme associe une faiblesse et une
fatigabilité musculaires proximales à une dysautonomie. L’atteinte
Pseudotumeurs inflammatoires oculomotrice, inconstante, est modérée. Il s’agit d’une pathologie
Le tableau clinique d’une pseudotumeur inflammatoire de l’orbite auto-immune présynaptique. Le plus souvent, il existe un
est parfois proche de celui de l’OT. La survenue brutale d’une carcinome, parfois occulte (cancer pulmonaire à petites cellules) [2].
diplopie très douloureuse est évocatrice. Il peut s’y associer un
chémosis, une hyperhémie conjonctivale, une exophtalmie. À l’IRM, Botulisme
l’épaississement inflammatoire du ou des muscles (myosite) se Lié à l’ingestion d’aliments ou l’injection d’héroïne contaminés par
prolonge au niveau des tendons, alors que ceux-ci sont typiquement Clostridium botulinum, le botulisme associe un ptôsis, une
respectés au cours de l’OT. ophtalmoparésie et une mydriase par blocage fonctionnel et
destruction de la terminaison nerveuse (atteinte présynaptique).
Causes moins fréquentes
Le syndrome de Brown est un syndrome restrictif de la gaine du
ATTEINTES INFRANUCLÉAIRES ET NUCLÉAIRES :
grand oblique, habituellement congénital, défini par une limitation PARALYSIES OCULOMOTRICES [11]
active et passive de l’élévation en adduction. En adduction, l’œil
atteint s’abaisse, ce qui permet le diagnostic différentiel avec une ¶ Anatomie
paralysie du grand oblique [6].
Toute lésion occupant l’orbite, à proximité ou dans les muscles Les muscles oculaires sont commandés par les trois nerfs
oculomoteurs, peut entraîner une diplopie : métastases (carcinomes oculomoteurs (III, IV et VI) qui ont leur origine dans des noyaux
ou lymphomes) assez fréquemment, rhabdomyosarcome, sarcoïdes, situés au niveau du tronc cérébral (fig 1).
parasites, dépôts amyloïdes. Le complexe nucléaire du moteur oculaire commun (III) est situé au
Les fistules carotidocaverneuses peuvent se compliquer de diplopie niveau de la calotte pédonculaire. Les fibres provenant du noyau du
dans un tableau clinique proche de l’OT. L’auscultation orbitaire, et III se dirigent vers le sinus caverneux et pénètrent dans sa paroi
surtout l’imagerie, permettent le diagnostic. externe. L’accès à l’orbite se fait par la fente sphénoïdale. Le III
innerve les muscles droits supérieur, inférieur, interne, le petit
Une ischémie localisée d’un ou plusieurs muscles peut se oblique, le releveur de la paupière supérieure et le sphincter de la
compliquer de troubles oculomoteurs : artérite de Horton, maladie pupille (fibres parasympathiques suivant le trajet du III).
de Wegener, périartérite noueuse, lupus érythémateux. Au cours des
vascularites systémiques, l’atteinte ischémique touche également les Le noyau du nerf pathétique (IV) est situé à proximité du noyau du
nerfs oculomoteurs. III dans la calotte pédonculaire. Les fibres du IV croisent toutes la
ligne médiane et émergent à la face postérieure du tronc cérébral
¶ Atteintes de la jonction neuromusculaire (fig 1). Le IV chemine dans la paroi latérale du sinus caverneux. Il
pénètre dans l’orbite par la fente sphénoïdale et innerve le muscle
L’atteinte de la jonction neuromusculaire pré- ou postsynaptique grand oblique.
s’accompagne souvent d’une parésie oculomotrice et d’un ptôsis [11]. Le noyau du moteur oculaire externe (VI) est situé au niveau
pontique. Les fibres émergent au niveau du sillon
Myasthénie bulboprotubérantiel, en dedans et en avant de l’origine du VII. Le
Le ptôsis et la diplopie sont les signes initiaux de la maladie dans VI se dirige ensuite vers la face postérieure du rocher et passe au-
plus de 50 % des cas de myasthénie, et 90 % des patients ont des dessus de sa pointe (fig 1). Au niveau de la loge caverneuse, le VI
signes oculomoteurs au décours de la maladie. est situé à l’intérieur même du sinus caverneux, au contact de la
Les signes oculaires sont typiquement variables dans la journée et, carotide interne. L’accès à l’orbite se fait par la fente sphénoïdale. Le
d’un jour à l’autre, aggravés par l’effort, asymétriques. VI innerve le muscle droit externe.
Le ptôsis est presque constant, s’aggravant au cours de la journée, Parmi les paralysies oculomotrices, l’atteinte du VI est la plus
parfois à bascule, ce qui est très évocateur. Le signe de Cogan est fréquente (30 % à 40 % environ), suivie par l’atteinte du III partielle
une rétraction transitoire de la paupière ptosée qui survient lors de ou totale (25 % des cas environ), et enfin les atteintes du IV dont la
la refixation du regard du bas vers la position primaire. L’orbiculaire fréquence varie en fonction du recrutement ou non de pathologie
et les muscles du visage sont souvent parétiques. congénitale. Le reste est représenté par les atteintes multiples qui
sont fréquentes. Les étiologies les plus fréquentes sont les causes
La diplopie est non systématisable puisque toutes les combinaisons traumatiques (20 % environ), vasculaires (15 % environ), tumorales
d’atteinte sont possibles : atteinte d’un seul ou de plusieurs muscles (10 à 20 % selon les séries) et congénitales (20 % environ).
pouvant simuler une atteinte du III, du IV, du VI, une
ophtalmoplégie internucléaire antérieure (OINA), un syndrome « un ¶ Atteintes du moteur oculaire commun (III)
et demi », une parésie de la latéralité ou de la verticalité ; mais il n’y
a jamais d’atteinte pupillaire. De façon précoce et très sensible, les Elles représentent entre 25 et 33,5 % de l’ensemble des POM.
saccades sont atteintes : hypométrie des grandes saccades et L’atteinte peut être totale ou partielle. Dans sa forme complète, il
hypermétrie des petites saccades. Les modifications des saccades existe un strabisme divergent et, du côté de l’atteinte, un ptôsis qui
sont mises en évidence lors du test au Tensilon. peut masquer la diplopie. En cas d’atteinte intrinsèque, la pupille

6
Neurologie Troubles de l’oculomotricité 17-023-A-44

du côté atteint est en mydriase aréactive. Lorsque l’œil est maintenu ¶ Atteintes combinées de plusieurs nerfs oculomoteurs
ouvert, il existe une diplopie croisée avec un petit décalage vertical Les étiologies les plus fréquentes sont traumatiques et tumorales.
des images. La mobilisation fait apparaître un déficit de l’adduction, L’association de différentes POM a une grande valeur localisatrice.
de l’élévation et de l’abaissement. L’atteinte intrinsèque isolée est Les syndromes ainsi constitués sont listés dans l’article consacré à la
exceptionnelle. Une mydriase unilatérale isolée est en règle une diplopie.
pupille d’Adie et non un III intrinsèque pur.
Chez l’adulte, l’existence d’une atteinte pupillaire fait redouter une ATTEINTES INTER- ET SUPRANUCLÉAIRES
compression extrinsèque du nerf, le plus souvent par un anévrisme Le fonctionnement correct du système oculomoteur nécessite, « au-
intracrânien (responsable de 20 à 30 % des paralysies du III sur ce dessus » des noyaux oculomoteurs, l’existence de centres
terrain). L’existence d’une paralysie douloureuse du III avec atteinte prémoteurs, internucléaires et supranucléaires, qui coordonnent et
pupillaire est une urgence et impose la réalisation d’une IRM stabilisent les mouvements oculaires (fig 1). Leur atteinte peut
complétée par une artériographie cérébrale, seul examen permettant provoquer une paralysie de la motricité conjuguée ou un trouble de
d’éliminer formellement l’existence d’un anévrisme intracrânien. À l’alignement oculaire [20].
l’inverse, une paralysie du III sans atteinte pupillaire évoque plutôt
¶ Centres internucléaires
une étiologie ischémique (20 % des cas environ), avec une grande
fréquence des atteintes du III d’origine diabétique qui peuvent être Les voies de connexion internucléaires assurent la coordination des
douloureuses. mouvements conjugués. Lors des mouvements des yeux dans une
même direction, ces noyaux prémoteurs coordonnent l’action des
Les autres étiologies sont traumatiques (10 à 20 %), tumorales avec
muscles agonistes opposés. Ils ont aussi un rôle de relais et de
ou sans hypertension intracrânienne (HIC) ou plus rarement la SEP,
redistribution des informations des centres supranucléaires vers les
la maladie de Horton (à évoquer chez le sujet âgé+++), les étiologies
noyaux oculomoteurs [15].
infectieuses (méningites, encéphalites), le syndrome de Tolosa et
Hunt. Dans 10 à 14 % des cas, la POM du III reste d’étiologie Latéralité
indéterminée, avec probablement une grande proportion d’atteintes La formation réticulée parapontique (FRPP) forme le centre de la
vasculaires. latéralité. Située dans la protubérance, à proximité du noyau du VI,
L’atteinte du noyau du III réalise un syndrome particulier qui elle reçoit des afférences supranucléaires et à son tour active ce
associe une paralysie du III homolatéral à une atteinte du droit noyau. Le noyau du VI active alors le droit externe ipsilatéral et le
supérieur controlatéral. Ceci est expliqué par le fait que les fibres sous-noyau du droit interne controlatéral par l’intermédiaire du
innervant le droit supérieur sont toutes des fibres croisées. Les faisceau longitudinal médian (FLM) controlatéral. Le mouvement
accidents vasculaires en sont l’étiologie la plus fréquente. résultant est un mouvement conjugué des yeux du même côté.
La conduite à tenir devant une atteinte du III isolée dépend de Les atteintes les plus fréquentes de la latéralité sont l’OINA, la
l’existence ou non d’une atteinte pupillaire et de l’âge du patient. parésie de la latéralité, le syndrome « un et demi » (fig 3).
• Ophtalmoplégie internucléaire antérieure
¶ Atteintes du nerf pathétique (IV) Dans l’OINA, l’atteinte du FLM interrompt la connexion entre le
La paralysie du IV entraîne une attitude vicieuse de la tête, inclinée noyau du VI controlatéral et le noyau du III ipsilatéral. Ainsi, une
et tournée vers le côté sain, menton abaissé. La diplopie verticale OINA gauche se traduit par un déficit de l’adduction de l’œil gauche
prédomine dans le regard en bas et en dedans et gêne la lecture, la dans le regard vers la droite. Le regard vers la gauche est normal.
Dans les atteintes modérées, le déficit d’adduction se traduit
marche, la descente des escaliers. En position primaire, l’hypertropie
seulement par un « retard » de l’œil gauche sur l’œil droit. Un
est modérée ou absente et l’œil ne peut se porter en bas et en
nystagmus ataxique dans le regard à droite est habituel sur l’œil
dedans ; la diplopie augmente si le sujet incline la tête sur l’épaule
abducteur, œil droit dans ce cas. L’OINA unilatérale est souvent
du côté paralysé avec, dans ce cas, un mouvement d’élévation de
associée à une skew deviation. La SEP [3] et les atteintes vasculaires
l’œil paralysé : c’est la manœuvre de Bielschowsky.
du tronc cérébral sont les causes les plus fréquentes d’OINA. La
Les deux grandes étiologies de l’atteinte du IV isolée sont l’origine myasthénie est parfois responsable de pseudo-OINA (fig 4).
traumatique et l’atteinte congénitale. Les autres étiologies
(vasculaires, SEP, tumeurs, infections, collagénoses…) sont beaucoup • Paralysie de la latéralité
plus rares. Elle est due à l’atteinte de la FRPP ou du noyau du VI ipsilatéral.
Cette atteinte peut être difficile à différencier d’une atteinte corticale
¶ Atteintes du moteur oculaire externe (VI) des zones d’initiation du regard (dans ce dernier cas, la manœuvre
« des yeux de poupée » est normale).
C’est la plus fréquente des POM ; elle n’a pas de valeur localisatrice.
Elle associe une attitude vicieuse de la tête, tournée vers le côté du droit gauche
muscle paralysé, un strabisme convergent, œil atteint en adduction
avec abduction impossible, et une diplopie horizontale homonyme, 1
maximale dans le regard du côté paralysé. Chez l’adulte, l’étiologie
traumatique est la plus fréquente. En dehors de ce contexte, les
atteintes vasculaires sont les plus fréquentes. Le bilan retrouve une
hypertension artérielle et/ou un diabète. L’atteinte régresse en 3 à 6 a b
mois.
Les autres causes sont les causes tumorales (par irritation,
compression du nerf ou par HIC), la SEP, les causes infectieuses 2
(méningites, mastoïdites), les causes inflammatoires (maladie de
Horton, sarcoïdose, syndrome de Tolosa et Hunt).
Une paralysie bilatérale du VI peut s’observer dans les atteintes 3
traumatiques et au cours de l’HIC. Il existe dans ce cas une diplopie
horizontale qui augmente dans le regard latéral droit et gauche et 3 Atteintes de la latéralité. a. Atteinte du faisceau longitudinal médian (FLM) : oph-
est moins importante dans le regard de face. Il existe une limitation talmoplégie internucléaire droite ; b. atteinte du FLM et du noyau du VI et/ou de la for-
bilatérale de l’abduction avec une hyperaction de l’adduction mation réticulée parapontique (FRPP) : syndrome « un et demi » ; 1. noyau du III ; 2.
également bilatérale. FRPP ; 3. noyau du VI.

7
17-023-A-44 Troubles de l’oculomotricité Neurologie

1 6 Voies de la verticalité. 1. Commissure


postérieure ; 2. noyau interstitiel rostral du
faisceau longitudinal médian (FLMir) ; 3.
noyau interstitiel de Cajal ; 4. noyau du III ;
*
A *
B 2
5. noyau du IV.
Flèche noire : élévation. Partie latérale du
4 Ophtalmoplégie internucléaire anté- noyau interstitiel rostral du FLMir vers les
rieure gauche. sous-noyaux du III controlatéraux (droit su-
A. Regard de face. périeur et petit oblique).
B. Regard vers la droite. Flèche rouge : abaissement. Partie interne du
FLMir vers le sous-noyau du III (droit infé-
*
C C. Regard vers la gauche.
rieur) et le noyau du IV homolatéraux.

*
A *
B
4
5 Syndrome « un et demi » de Fischer
gauche.
A. Regard de face.
B. Regard vers la droite.
*
C C. Regard vers la gauche.

• Syndrome « un et demi » de Fischer


5
Il associe une atteinte de la FRPP ou du noyau du VI à une atteinte
du FLM ipsilatéral. Cliniquement, seule l’abduction de l’œil
controlatéral persiste. Outre la SEP et les atteintes vasculaires,
l’encéphalopathie de Wernicke peut être en cause. L’exotropie Tableau I. – Syndrome de Parinaud.
pontine paralytique associe au syndrome « un et demi » une
Paralysie de l’élévation
exotropie nette de l’œil situé du côté sain (fig 5). Nystagmus en convergence et rétraction
Dissociation pupillaire lumière accom
Verticalité modation
Rétraction palpébrale (signe de Collier)
Le noyau interstitiel rostral du FLM (FLMir) constitue le centre de la Spasme de convergence
verticalité. C’est un noyau pair, situé dans la partie haute et Spasme accommodatif
antérieure du mésencéphale, à proximité du noyau du III. La partie Skew deviation
latérale contrôle l’élévation, la partie médiane l’abaissement. Les
influx de la partie latérale activent les sous-noyaux controlatéraux
du droit supérieur et du petit oblique (décussation par la ¶ Centres supranucléaires
commissure postérieure) ; ceux de la partie médiane activent le sous- Le système oculomoteur doit donner une vision parfaite en
noyau ipsilatéral du droit inférieur et le noyau ipsilatéral du grand permettant une fixation fovéolaire binoculaire et en prévenant un
oblique par l’intermédiaire du FLM. Ainsi, la verticalité dépend de glissement de l’image sur la rétine.
l’activation bilatérale du FLMir et l’atteinte de la verticalité implique
l’existence d’une lésion bilatérale ou paramédiane (fig 6). Pour ce faire, il existe deux types de mouvements : les mouvements
rapides (saccades) pour positionner l’axe visuel sur l’objet du regard,
Les atteintes les plus fréquentes de la verticalité sont le syndrome les mouvements lents (poursuites) pour maintenir l’axe visuel sur
de Parinaud, la skew deviation, la déviation tonique vers le bas. l’objet du regard malgré les mouvements de l’observateur ou du
monde périphérique [9].
• Syndrome de Parinaud ou syndrome de l’aqueduc de Sylvius
Six systèmes du contrôle oculomoteur existent. Quatre d’entre eux
Il associe une atteinte de l’élévation, un nystagmus en convergence permettent le contrôle des mouvements conjugués : les saccades, les
rétraction dans le regard vers le haut, une dissociation lumière/ poursuites, le système oculovestibulaire, le système optocinétique.
accommodation des pupilles et une rétraction des paupières. Il se Le système des vergences contrôle les mouvements dysconjugués
voit essentiellement dans les sténoses de l’aqueduc, les tumeurs de (convergence-divergence). La fixation assure le maintien de la quasi-
la région pinéale, certaines malformations artérioveineuses et au immobilité des yeux sur l’objet fixé [13, 14].
cours de la SEP (tableau I).
Saccades
• « Skew deviation »
Les saccades sont des mouvements rapides, le plus souvent
C’est une dissociation verticale des axes visuels. Elle survient dans volontaires, qui dirigent les yeux vers un nouvel objet d’intérêt. La
de nombreuses situations pathologiques périphériques ou centrales, saccade est initiée par la décharge phasique, synchronisée d’un
entraînant un déséquilibre des influx otolithiques (lésion potentiel de haute fréquence (pulse). L’intensité de ce potentiel est
labyrinthique, du nerf ou des noyaux vestibulaires, du FLM, du proportionnelle à l’amplitude du mouvement et est destinée à
noyau interstitiel de Cajal). Elle s’accompagne souvent d’une vaincre les forces viscoélastiques intraorbitaires. Les cellules
inclinaison controlatérale de la tête et d’une cyclotorsion conjuguée phasiques sont sous le contrôle de cellules pauses, situées dans le
des yeux (ocular tilt reaction). Les atteintes unilatérales pédonculaires noyau préposé de l’hypoglosse, qui assurent une inhibition
se traduisent par une hypertropie de l’œil ipsilatéral. Le diagnostic constante sauf au moment de la saccade. Puis apparaît une décharge
est parfois difficile avec une atteinte partielle du III ou une atteinte tonique (step), destinée à maintenir la déviation oculaire. La
du IV. coordination des décharges phasiques et toniques (pulse-step) est
La déviation tonique vers le bas se voit au décours des hémorragies sous le contrôle de l’intégrateur neuronal (noyau préposé de
thalamiques, des hydrocéphalies obstructives. l’hypoglosse et noyau vestibulaire médian).

8
Neurologie Troubles de l’oculomotricité 17-023-A-44

Tableau II. – Principales étiologies des saccades pathologiques. Tableau III. – Principales étiologies des poursuites lentes.
- Anomalies de production Dégénérescences spinocérébelleuses
Lésions frontales - atrophie olivopontocérébelleuse
Lésions du colliculus supérieur Maladie de Huntington
Apraxie oculomotrice congénitale Paralysie supranucléaire progressive
- Anomalies de vitesse et de précision Maladie de Parkinson
Lésions cérébelleuses Maladie de Whipple
Paralysie supranucléaire progressive Maladies de stockage des lipides
Maladie de Parkinson - Tay-Sachs
Maladie d’Alzheimer - Gaucher
- Intrusions saccadiques : flutter, opsoclonus - Niemann-Pick
Lésions du tronc cérébral Maladie de Wilson
Lésions des voies cérébelleuses Intoxications médicamenteuses
- antiépileptiques
- benzodiazépines
La FRPP est le centre de production des saccades horizontales. Elle
reçoit ses afférences essentiellement du champ visuel frontal et du Réflexe optocinétique
colliculus supérieur controlatéraux. Le FLMir produit les saccades
C’est aussi un système réflexe et involontaire qui, par des
verticales sous contrôle cortical bilatéral.
mouvements oculaires conjugués ressemblant aux poursuites,
Les troubles des saccades comprennent l’impossibilité de coordonne ces mouvements à ceux du champ visuel global.
production, les saccades inappropriées (vitesse ou précision), les Son origine est dans le cortex visuel, puis il chemine par les voies
intrusions saccadiques (tableau II). des saccades et des poursuites. Ainsi, il est ralenti, voire aboli, au
Les lésions du lobe frontal entraînent une diminution de la cours des atteintes des saccades (PSP), des poursuites (lésions
production des saccades controlatérales ; les yeux sont alors déviés pariétales profondes).
du côté atteint. Mais les poursuites, le nystagmus optocinétique et
le réflexe oculovestibulaire (ROV) sont normaux. L’amélioration se Vergences
fait en quelques semaines par activation de zones corticales Ce système produit des mouvements dysconjugués des yeux
secondaires. permettant de garder la fixation sur un objet qui se rapproche ou
L’apraxie oculomotrice est une incapacité à produire des saccades s’éloigne. Il fait partie de la triade : accommodation, convergence,
horizontales. En cas d’atteinte congénitale, des mouvements myosis, assurant la netteté d’un objet qui se rapproche. Le « centre »
typiques de la tête interrompent la fixation et permettent une des vergences est probablement situé à proximité du noyau du III.
nouvelle fixation compensatrice. Les lésions frontopariétales Les déséquilibres entre la convergence et l’accommodation sont
bilatérales sont responsables d’apraxie acquise. fréquents. Un excès de convergence par rapport à l’accommodation
induite par la vision rapprochée entraîne un strabisme convergent.
La dégénérescence olivo-ponto-cérébelleuse, la maladie de À l’inverse, l’insuffisance de convergence se traduit par une
Parkinson, la maladie d’Alzheimer, la paralysie supranucléaire exophorie de près et une gêne lors des activités de près. Isolée, il
progressive (PSP) s’accompagnent de ralentissement progressif des s’agit d’une atteinte bénigne. La rééducation orthoptique est efficace.
saccades pouvant éventuellement entraîner une ophtalmoplégie
L’insuffisance de divergence est rare et discutée. Les patients sont
complète.
orthophoriques en vision de près et ésophoriques en vision de loin.
Les atteintes cérébelleuses entraînent une perte de précision des Le diagnostic différentiel avec une parésie bilatérale du VI est
saccades qui sont hypométriques (en deçà de l’objet fixé) ou plus difficile, mais en cas d’atteinte de la divergence, les ductions sont
souvent hypermétriques. normales.
Les intrusions saccadiques sont traitées avec les mouvements Le spasme de convergence peut aussi poser problème avec une
anormaux (cf infra). atteinte bilatérale du VI, mais les pupilles sont en myosis. Le plus
souvent anorganique, il se voit rarement après traumatisme crânien
Poursuites ou crise d’épilepsie.
Les poursuites permettent de suivre un objet en mouvement. Fixation
Le cortex visuel primaire du lobe occipital, sensible aux mouvements Les quatre systèmes de contrôle des mouvements conjugués
dans l’espace, est à l’origine de ce système. Le carrefour occipito- fonctionnent suivant le principe phasique-tonique ou pulse step vu
pariéto-temporal intègre ces informations puis, à travers le lobe plus haut. Dans tous les cas, c’est l’intégrateur neuronal qui contrôle
pariétal, elles activent les centres prémoteurs. Le noyau interstitiel la composante tonique permettant le maintien de la fixation dans la
de Cajal est le centre des poursuites verticales. nouvelle direction du regard.
Les lésions pariétales profondes altèrent les poursuites ipsilatérales En cas d’atteinte de cet intégrateur (noyau préposé de l’hypoglosse,
(nystagmus optocinétique ralenti du côté de la lésion). Les noyau vestibulaire médian), une déviation lente des yeux vers la
poursuites sont également atteintes au cours de la maladie de position initiale, puis une correction rapide par saccades se produit.
Parkinson, de la PSP (tableau III). La répétition de ce mouvement provoque un nystagmus induit par
le regard (cf infra).
Réflexe oculovestibulaire
MOUVEMENTS ANORMAUX :
Ce système réflexe et involontaire assure la coordination des NYSTAGMUS ET INTRUSIONS SACCADIQUES
mouvements oculaires avec les mouvements de la tête, permettant
Pour qu’un objet soit vu nettement, son image doit être maintenue
de garder la fixation sur l’objet regardé malgré les mouvements
fixe sur la fovéa, zone centrale de la rétine. Tout déplacement
céphaliques [19].
excessif de cette image, par un mouvement oculaire anormal,
Il induit des mouvements oculaires conjugués, ressemblant à des entraîne une baisse visuelle, voire une oscillopsie, illusion de
poursuites, dans la direction opposée à celle des mouvements de la mouvement du monde extérieur.
tête. La latence de ce système est courte. Deux types de mouvements anormaux interrompent la stabilité de
En cas d’atteinte, apparaît un nystagmus vestibulaire pathologique la fixation oculaire : les nystagmus pathologiques et les intrusions
(cf infra). saccadiques.

9
17-023-A-44 Troubles de l’oculomotricité Neurologie

– Le nystagmus oculovestibulaire est déclenché par un mouvement


Tableau IV. – Classification et valeur localisatrice des mouvements continu de la tête, sa phase rapide étant dirigée dans le sens de la
anormaux.
rotation. Il peut être exploré par les épreuves caloriques (stimulation
Type de mouvements Localisation des canaux semi-circulaires) et les épreuves de rotation (chaise de
Barany).
Nystagmus à ressaut
Nystagmus ataxique FLM controlatéral – Le nystagmus optocinétique est déclenché par un mouvement
Nystagmus vestibulaire Voies vestibulaires et jonction continu du stimulus visuel et permet d’éviter un glissement excessif
bulboprotubérantielle de l’image du stimulus sur la rétine. Il est exploré par la présentation
Nystagmus de Brun Angle pontocérébelleux d’un tambour en rotation, sa phase rapide battant dans le sens
Up beat nystagmus Voies cérébelleuses, protubérance, bulbe
opposé au sens de rotation du tambour.
Down beat nystagmus Voies cérébelleuses, jonction craniocervi-
cale – Le nystagmus physiologique du regard (end point nystagmus) est
Nystagmus périodique alternant Jonction craniocervicale, cervelet un nystagmus horizontal, symétrique des deux côtés, apparaissant
Nystagmus à rebond Cervelet
en positon latérale extrême du regard, de faible amplitude et de
Nystagmus pendulaire
fréquence modérée et irrégulière.
See saw nystagmus Région optochiasmatique
Noyau interstitiel de Cajal
Intrusions saccadiques et associées
• Nystagmus pathologiques
Nystagmus en convergence et rétraction Pédoncule postérieur (commissure La classification physiopathologique des nystagmus repose sur
postérieure)
l’atteinte de l’un des trois mécanismes physiologiques permettant
Flutter oculaire Voies cérébelleuses, tronc cérébral
Opsoclonus Voies cérébelleuses, tronc cérébral
de prévenir la déviation de la ligne du regard de l’objet fixé : la
fixation qui suppose une afférence visuelle normale et la suppression
FLM : faisceau longitudinal médian. des saccades anormales, le ROV et la capacité sous contrôle cérébral
de maintenir une fixation excentrée de l’œil dans l’orbite [5, 10, 11].
Le nystagmus est un mouvement rythmique de va-et-vient des yeux En pratique clinique, il est plus facile d’étudier un nystagmus
dont le mouvement initial pathologique est une déviation oculaire suivant ses caractéristiques cliniques : soit nystagmus à ressaut qui
lente éloignant l’axe visuel de l’objet du regard. À l’inverse, peut être présent en position primaire ou dans le regard latéral, soit
l’intrusion saccadique est caractérisée par l’irruption inappropriée nystagmus pendulaire [14].
d’une saccade venant interrompre la stabilité de la fixation Nous verrons à part le nystagmus congénital et le nystagmus de
(tableau IV). l’enfant.
Nystagmus congénital et nystagmus de l’enfant
¶ Nystagmus
– Le nystagmus congénital est un nystagmus présent à la naissance
Terminologie des nystagmus ou peu après, qui reste stable tout au long de la vie.
L’acuité visuelle est souvent abaissée mais il n’y a pas d’oscillopsie.
L’oscillation nystagmique élémentaire est un mouvement biphasique
C’est un nystagmus binoculaire, conjugué, à ressaut ou pendulaire.
comportant un « aller » et un « retour ». Le nystagmus se caractérise
Il est toujours dans le même plan, habituellement horizontal, dans
par :
toutes les positions du regard. Ainsi, il reste horizontal dans le
– l’aspect relatif des deux phases : lorsqu’elles sont d’amplitude et regard vers le haut, à la différence du nystagmus acquis. Il est
de vitesse identiques, le nystagmus est dit pendulaire ; lorsque les augmenté par les efforts de fixation, l’anxiété, et diminué lors de la
vitesses sont différentes, le nystagmus est dit à ressaut. Dans ce cas, convergence. Habituellement, il disparaît ou est fortement diminué
la phase rapide, qui se voit le mieux, définit le sens du nystagmus, dans une position de « blocage » que l’enfant trouve spontanément,
bien que ce soit la phase lente qui traduise le mouvement initial entraînant une attitude vicieuse de la tête.
pathologique. Ainsi, un nystagmus « bat » à droite lorsque la phase Un strabisme est associé dans 30 % des cas.
rapide est dirigée vers la droite du patient. Habituellement, le L’inversion de la réponse à un stimulus optocinétique est
nystagmus est plus évident dans le regard latéral dirigé du côté de pathognomonique mais inconstante.
la phase rapide, dans cet exemple lorsque le patient regarde vers la Le traitement chirurgical est parfois utile (utilisation de la position
droite (loi d’Alexander) ; de blocage).
– son orientation : rectiligne (horizontal, vertical, oblique, elliptique – Le nystagmus latent est un nystagmus à ressaut n’apparaissant
ou circulaire) ou rotatoire (autour de l’axe visuel). Un nystagmus qu’à l’occlusion d’un œil et souvent de découverte fortuite. Il est
composé associe un mouvement rectiligne et un mouvement retrouvé dans les deux yeux. Lorsqu’il est associé à une amblyopie
rotatoire ; unilatérale, on parle de nystagmus manifeste latent. Ce nystagmus,
qui est toujours congénital, sans lésion neurologique, est confirmé
– sa fréquence : nombre d’oscillations par seconde (faible, moyenne,
par l’occlusion du bon œil, entraînant alors une inversion de la
importante) ;
direction du nystagmus.
– son amplitude : étendue de l’oscillation (faible, moyenne,
– Le nystagmus acquis de l’enfant par déprivation sensorielle est
importante).
typiquement pendulaire. Associé à une atteinte des afférences
Le nystagmus est dissocié lorsque le mouvement est différent entre visuelles, il impose une exploration neuroradiologique.
les deux yeux.
Le nystagmus est susceptible de se modifier dans certaines – Le spasmus mutans est un nystagmus acquis, bilatéral et
circonstances : fixation, convergence, occlusion palpébrale, asymétrique ou monoculaire, intermittent, de grande fréquence et
changements de position du corps et de la tête, fixation excentrique. faible amplitude. Il est associé à un torticolis et à des mouvements
anormaux de la tête. Il apparaît avant 2 ans et disparaît
Différents nystagmus spontanément avant 4 ans. De nature bénigne, il impose néanmoins
une exploration neuroradiologique pour éliminer une atteinte des
voies visuelles (gliome).
• Nystagmus physiologiques
Principaux nystagmus à ressaut
Dans les conditions physiologiques, certains nystagmus permettent
de maintenir une acuité visuelle normale et ne s’accompagnent – Le nystagmus pathologique du regard (gaze evoked ou gaze paretic
jamais d’oscillopsie. De plus, ils peuvent être induits lors de nystagmus) est le plus fréquent.
l’examen clinique oculomoteur. Il s’agit d’un nystagmus binoculaire induit par l’excentration du

10
Neurologie Troubles de l’oculomotricité 17-023-A-44

regard et qui apparaît plus tôt que le nystagmus physiologique. Son Nystagmus pendulaires
amplitude est plus grande, sa fréquence variable, il s’associe à des Le nystagmus pendulaire peut être congénital ou acquis.
anomalies cliniques des poursuites ou de la fixation. Il est lié à une
Dans les cas acquis, il entraîne souvent une gêne fonctionnelle
atteinte de l’intégrateur neuronal (vestibulocervelet, noyau préposé
majeure avec baisse visuelle importante et oscillopsie.
de l’hypoglosse et noyau vestibulaire médian, noyau interstitiel de
Habituellement, le nystagmus est dissocié, les oscillations des deux
Cajal) qui est responsable des mécanismes de maintien et de fixation
yeux étant asymétriques en direction, amplitude et fréquence.
du regard.
L’étiologie toxique est fréquente : antiépileptiques, sédatifs, alcool. Les affections démyélinisantes en sont la cause la plus fréquente. La
Le nystagmus ataxique de Harris, ou nystagmus dissocié, est une gabapentine est habituellement efficace, entraînant une nette
forme particulière de nystagmus pathologique du regard, souvent diminution des symptômes (900 à 1 500 mg/j).
associé à une OINA par atteinte du FLM. Le nystagmus prédomine Le valproate est proposé par certains.
ou n’existe que sur l’œil abducteur, alors que l’œil adducteur est Il peut aussi se voir en cas de syndrome myoclonique oculopalatal
parétique. La SEP et les atteintes vasculaires du tronc sont les apparaissant quelques mois après un infarctus mésencéphalique ou
étiologies les plus fréquentes. cérébelleux. Ce nystagmus est vertical.
– Le nystagmus d’origine vestibulaire est lié à l’atteinte de la voie Des oscillations pendulaires en convergence s’observent au cours de
vestibulaire périphérique (oreille interne, VIII) ou centrale (noyaux la maladie de Whipple (myorythmie oculomasticatoire).
vestibulaires) et résulte d’un déséquilibre entre l’activité de la voie Le nystagmus en bascule (see saw nystagmus) est une forme
droite et de la voie gauche. particulière de nystagmus pendulaire qui associe une élévation et
Il est associé à un vertige, plus marqué en cas d’atteinte une intorsion d’un œil à un abaissement et une extorsion de l’autre
périphérique. Il s’agit d’un nystagmus horizontal ou œil, puis le mouvement s’inverse. Il s’associe très souvent à une
horizontorotatoire. hémianopsie bitemporale. Il peut être congénital ou, le plus souvent,
En cas d’atteinte périphérique, le nystagmus bat du côté opposé à la acquis par tumeur ou traumatisme de la région optochiasmatique.
lésion, son intensité augmente dans la direction de cette phase
rapide, il est diminué, voire supprimé par la fixation. Il est souvent ¶ Intrusions saccadiques
associé à une baisse auditive ou des acouphènes. Il disparaît en et autres oscillations nystagmiformes
quelques semaines à quelques mois.
Les étiologies les plus fréquentes sont les infections, la maladie de Intrusions saccadiques
Ménière, les atteintes traumatiques, vasculaires, les toxicités
médicamenteuses, ainsi que les tumeurs de l’angle pontocérébelleux. Ce sont des saccades spontanées, involontaires, qui interrompent la
Le nystagmus d’origine vestibulaire périphérique évolue stabilité de la fixation oculaire. Elles seraient en partie liées à
favorablement en quelques jours. Parfois, une rééducation l’inactivation des neurones inhibiteurs du raphé médian.
vestibulaire est nécessaire. L’enregistrement oculomoteur est important pour les étudier.
Le nystagmus de Brun, typique des atteintes de l’angle Il peut s’agir d’ondes carrées isolées, de flutters ou d’opsoclonus.
pontocérébelleux, associe un nystagmus pathologique du regard
(grande amplitude, faible fréquence) quand le patient regarde du • Ondes carrées
côté de la lésion et un nystagmus vestibulaire périphérique (petite Ce sont des saccades isolées qui interrompent la fixation de façon
amplitude, grande fréquence) lorsqu’il regarde du côté opposé. très courte, avec retour rapide à cette fixation. Les saccades de petite
En cas d’atteinte centrale, le nystagmus peut être bidirectionnel, amplitude sont physiologiques. Au-delà de 1 degré, elles sont
avoir une composante verticale. Les étiologies habituelles sont les pathologiques. Elles ne sont pas spécifiques ni localisatrices, mais
atteintes démyélinisantes, vasculaires, tumorales et les encéphalites. sont souvent associées à une atteinte du cervelet [19].
La gabapentine est parfois efficace.
• Flutter oculaire
– Le nystagmus battant vers le bas (down beat nystagmus) est causé
par un déséquilibre des connexions vestibulocérébelleuses. Toujours Il est constitué par des oscillations horizontales, rapides, autour du
présent en position primaire mais parfois minime, il augmente dans point de fixation, qui surviennent par accès intermittent. Ce sont
le regard vers le bas et en bas sur les côtés. Il est associé à une des enchaînements de saccades sans intervalle intersaccadique. Il
atteinte des poursuites verticales et souvent à une skew deviation. existe habituellement une dysmétrie associée.
Il est typiquement associé aux atteintes de la jonction craniocervicale Dans l’opsoclonus, ou saccadomanie, les saccades sont
(Arnold-Chiari), aux atteintes cérébelleuses (dégénératives, multidirectionnelles. Elles persistent les yeux fermés.
paranéoplasiques, vasculaires), à la SEP et aux atteintes toxiques et Le flutter et l’opsoclonus se rencontrent au cours des encéphalites
métaboliques. postvirales, des atteintes cérébelleuses [19], des intoxications (lithium).
– Le nystagmus battant vers le haut (up beat nystagmus) est aussi lié à L’association opsoclonus-myoclonus est un syndrome rare qui doit
un déséquilibre des connexions vestibulocérébelleuses. Il est toujours faire rechercher une atteinte paranéoplasique (neuroblastome chez
présent en position primaire et augmente dans le regard vers le haut. l’enfant, cancer pulmonaire ou du sein chez l’adulte).
Les causes principales sont les atteintes du cervelet et de la partie La prescription de benzodiazépines (clonazépam) ou de gabapentine
inférieure du tronc cérébral, la SEP, l’encéphalopathie de Wernicke est classique et d’efficacité variable. En cas d’opsoclonus
et les intoxications. paranéoplasique, l’exérèse de la tumeur primitive n’entraîne pas
– Le nystagmus périodique alternant est un nystagmus présent en toujours la disparition de celui-ci.
position primaire, horizontal dans toutes les positions du regard,
qui change de direction toutes les 2 à 3 minutes. Myokymie du grand oblique
Il peut être congénital ou acquis : anomalies de la jonction Elle se manifeste par de très courts accès de diplopie ou d’oscillopsie
craniocervicale, SEP, cécité bilatérale, intoxication par les unilatérale verticale ou oblique qui peuvent se répéter plusieurs fois
antiépileptiques. Il est sensible au baclofène. par jour. Ces accès de « trémulation » unilatérale peuvent être
– Le nystagmus à rebond est un nystagmus horizontal, transitoire, déclenchés par les mouvements de l’œil dans le champ d’action du
rapide, induit par l’excentration du regard. Après les premières grand oblique atteint. Les oscillations sont minimes : intorsion en
secousses du nystagmus battant dans le sens du regard, apparaît un position primaire et vertical en adduction. C’est une atteinte
nystagmus de sens contraire. Il traduit une atteinte cérébelleuse. bénigne, parfois spontanément résolutive. La carbamazépine et le

11
17-023-A-44 Troubles de l’oculomotricité Neurologie

baclofène sont parfois efficaces. L’affaiblissement chirurgical du clonazépam (flutter oculaire), le valproate, la carbamazépine.
grand oblique est proposé dans les cas invalidants. L’efficacité est variable suivant le patient et le trouble oculomoteur.
L’injection de toxine botulique supprime souvent le nystagmus, mais
Nystagmus en convergence et rétraction
les effets secondaires et la limitation dans le temps limitent
Il se manifeste par des saccades d’adduction asynchrones qui considérablement son intérêt.
induisent une convergence et une rétraction des yeux dans le regard
Certains systèmes optiques complexes, en particulier les prismes,
vers le haut. Il est intermittent à l’inverse du nystagmus pendulaire
peuvent avoir un intérêt lorsqu’il existe une position de blocage
convergent-divergent. Il traduit une atteinte au niveau de la
(nystagmus congénital).
commissure postérieure le plus souvent. Parfois, il est associé à une
malformation de Chiari ou à une crise épileptique. La chirurgie est surtout indiquée en cas de nystagmus congénital :
intervention de Kestenbaum qui déplace la position primaire sur la
¶ Traitements du nystagmus position de blocage ou intervention de divergence artificielle
et des intrusions saccadiques intéressante lorsque le nystagmus diminue en convergence.
Les possibilités thérapeutiques sont essentiellement La décompression sous-occipitale en cas de malformation de Chiari
médicamenteuses, optiques et chirurgicales. diminue le down beat nystagmus.
Les différentes molécules utilisées sont la gabapentine (nystagmus La chirurgie du grand oblique est parfois indiquée en cas de
pendulaire), le baclofène (nystagmus alternant périodique), le myokimie de ce muscle.

Références
[1] Biousse V, D’Anglejan Chatillon J, Massiou H, Bousser MG. [8] Lacey B, Chang W, Rootman J. Nonthyroid causes of [16] Thompson HS. Pupillary signs in the diagnosis of optic
Head pain in non traumatic carotid artery dissection: a extraocular muscle disease. Surv Ophthalmol 1999 ; 44 : nerve disease. Trans Am Ophthalmol Soc UK 1976 ; 96 :
series of 65 patients. Cephalalgia 1994 ; 14 : 33-36 187-212 377-381
[2] Dubas F, Letournel F. Syndromes neurologiques paranéo- [9] Lee A, Brazis P. Clinical pathways in neuro-ophthalmology.
plasiques. Encycl Méd Chir (Éditions Scientifiques et Médi- New York : Thieme, 1998 : 229-255-287-331 [17] Thompson HS. A classification of tonic pupils. In : Thomp-
cales Elsevier SAS, Paris), Neurologie1998 : 17-162-A-10, [10] Leigh J, Averbuch-Heller L. Nystagmus and related ocular son HS, Daroff S, Frisen L, Glaser JS, Sanders MD eds. Topics
1-6 motility disorders. In : Miller NR, Newman NJ eds. Walsh in neuro-ophthalmology. Baltimore : Williams and Wilkins,
[3] Frohman EM, Solomon D, Zee DS. Nuclear, supranuclear and Hoyt’s clinical neuro-ophthalmology. Baltimore : 1979 : 95-96
and internuclear eye movement abnormalities in multiple Williams and Wilkins, 1998 : 1460-1505
sclerosis. Int MSJ 1995 ; 2 : 79-89 [11] Leigh J, Zee DS. The neurology of eye movements. New [18] Thompson HS, Miller NR. Disorders of pupillary function,
[4] Gajdos PH, Chillet P, Clair B, Goulon-Goeau C, Raphael JC. York : Oxford University Press, 1999 : 350-383-405-564 accommodation and lacrimation. In : Miller NR, Newman
Traitement de la myasthénie. Rev Neurol 1997 ; 153 : [12] Lombès A. Les maladies mitochondriales humaines : diffi- NJ eds. Walsh and Hoyt’s clinical neuro-ophthalmology.
91-105 cultés diagnostiques et approches thérapeutiques. [thèse], Baltimore : Williams and Wilkins, 1998 : 961-1043.
[5] Godde-Jolly D, Larmande AM. Nystagmus. Encycl Méd Chir Paris, 1998 : 1-24
(Éditions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris), [13] Martin TJ, Corbett JJ. Neuro-ophthalmology: the requisites [19] Yee RD. Cerebellar control of eye movements and eye
Ophtalmologie1986 : 21-560-A-10, 1-18 in ophthalmology. St Louis : CV Mosby, 2000 : movement abnormalities. In : Neuro-ophthalmology. Lon-
[6] Hadjadj E, Conrath J, Ridings B, Denis D. Syndrome de 142-174-175-190 don : Mosby International Limited, 1998 : 1-5
Brown : actualités. J Fr Ophtalmol 1998 ; 21 : 276-282 [14] Newman NJ. Neuro-ophthalmology: a practical text.
Norwalk : Appleton and Lange, 1992 : 187-195-217-225 [20] Zee DS. Supranuclear and internuclear ocular motor disor-
[7] Kuncl R, Hoffman P. Myopathies and disorders of neuro-
ders. In : Miller NR, Newman NJ eds. Walsh and Hoyt’s clini-
muscular transmission. In : Miller NR, Newman NJ eds. [15] Sharpe JA. Cerebral and brainstem ocular motor disorders.
Walsh and Hoyt’s clinical neuro-ophthalmology. Balti- In : Neuro-ophthalmology. London : Mosby International cal neuro-ophthalmology. Baltimore : Williams and
more : Williams and Wilkins, 1998 : 1351-1460 Limited, 1998 : 1-16 Wilkins, 1998 : 1283-1350

12

Vous aimerez peut-être aussi