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-I
POINTS
DE VUE
INITIATIQUE S
pages
Albert Bouzanquet 45
Bibliographie . 50
Au cours des prochaines années, le monde dans le cadre de
ses prospections philosophiques, sociales et politiques, va être
appelé à saisir toute l'importance d'une option procédant à la fois
de in tradition occidentale et de l'intégration des techniques nou-
velles d'aide à la décision.
C'est pourquoi nous avons tenu à donner à ces Cahiers une
présentation plus conforme à ses aspirations, c'est-à-dire plus véhi-
culaire, leur conférant ainsi leur véritable vocation d'instrument de
travail.
Il nous a paru particulièrement souhaitable de donner vie aux
nouveaux Points de Vue Initiatiques « dans le même temps où
l'élaboration de textes doctrinaires de la Grande Loge de France
arrivait à son terme. Ainsi le concept de Grand Architecte de l'Uni-
vers, premier de ces textes, s'inscrit dans un nouveau contexte qui
se veut une plate-forme oecuménique. Ce nouveau contexte ou nou-
vel ordre s'explique par une connaissance meilleure et un ensei-
gnement propre à la Franc-Maçonnerie traditionnelle de la pratique
initiatique liée à la maîtrise scientifique. Doctrine prend ici le sens
de Port-Royal ( Logique «). Il y a deux sortes de méthodes la pre-
mière pour découvrir la vérité qu'on appelle analyse... et qu'on peut
appeler méthode d'invention, la seconde, pour la faire entendre aux
autres quand on l'a trouvée, qu'on appelle synthèse... et qu'on peut
appeler aussi méthode de doctrine.
Cette valorisation dignifiante haussera l'homme à une cons-
cience culturelle dont la société l'a longtemps frustré et la repré-
sentation éthique ancestrale sera projetée en une nouvelle image.
Points de Vue Initiatiques « contribuera à désaliéner l'homme
exploité seulement par la mécanique, la thermodynamique, la biolo-
gie et la physiologie, lui apportant cette dimension supplémentaire
à l'effet de le produire tel qu'il paraît à Hamlet. noble par la raison
et doué d'infinies facultés.
PIERRE-SIMON,
Grand Maître.
3
LIES DEVOIRS
DELA
GRANDE LOGE DE FRANGE
LE GRAND ARCHITECTE DE L'UNIVERS
(4)
T 11E
C HA RG E 0F .
(ço)
I. Concénivg Goo ml REL1G1o,
A Maroit is oblig'd, by hisTentite, ro obey the motu Lw acI
ig(u!y undrrftunds thé Axt,h will rwver hé s flupd tDUfl, nor an izre..
hgiou Llberrtnr. But thougb in ancienr Times Mifoos wer cbsrgd
in every Couinz-yto ht of the Religion oU that Country oo Nario;
wliate'er it was, yet 'tisnow thoughc more expedient only to oblige
them to that Religion in which aU Men agree, leaving theii particulat
Opininr to th<mfelves; thit in, no hé cad Moi and IrMO, or Mon ok'
}onour nid Hone(v, by wlutevcr Denominations or Pexfaalrjns they
enay he di(nguiflsd; whereby Mafonry becomes tise nzn oU Uio,v,
rsd the Mesns oU oncs1sting truC FriedLhp arnorg Perfisna that
nsuft have ncmjsnd Lx s porpetuai Diflance.
6
DECLARATION DE PRINCIPE
DELA
GRANDE LOGE DE FRANCE
(5 décembre 1955)
PREMIERE PARTIE
HISTOIRE ET SYMBOLISME
La franc-maçonnerie : initiation et tradition.
La franc-maçonnerie est une société.
Mais de quel genre ?
Ni église, ni secte, ni parti politique, ni club, ni académie.
Elle se donne pour école mieux : pour guide, pour maître.
Car elle prétend éclairer l'aveugle et instruire l'ignorant.
De quel genre, à son tour, est la science maçonnique ?
Historiens et docteurs divergent dans leurs réponses.
Mais la méthode maçonnique est évidente, elle suffit à définir son
objet.
Cette méthode est, en effet, symbolique, et l'exercice de la méthode
symbolique procure l'expérience de la gnose.
Or, l'acquisition de la gnose, c'est l'Initiation,
Parce qu'elle recourt au symbolisme, la pédagogie maçonnique
s'avère une mystagogie.
Si la franc-maçonnerie est une société, cette société ressortit au
genre initiatique. La franc-maçonnerie est un ordre.
En tant que société, la franc-maçonnerie repose sur des lois.
7
En tant que société initiatique, ou ordre, la franc-maçonnerie ne pro-
gresse, et n'accommode ses lois, que dans le respect actif, c'est-à-dire
la continuité, de sa tradition (1).
Les lois de la franc-maçonnerie ne sauraient donc ignorer ou renver-
ser les landmarks les plus certains, ses devoirs.
Or, les Old Charges implicitement, et les premières constitutions de
la franc-maçonnerie spéculative explicitement, affirment que le bon
maçon, le vrai maçon ne peut être athée.
La croyance en Dieu parait donc d'obligation pour tout membre de
la société dite franc-maçonnerie.
Mais que signifie ici le mot « Dieu «
8
CHRIST AU COMPAS. LE LOGOS, VERBE-RAISON-VIE, TIRE LE PLAN DU
MONDE QU'IL INSPIRE,
Référence Bible moralisee. probablement remoise. XIII siecle
9
soit par quelque tolérance oecuménique : indifférentisme religieux ou
indifférentisme confessionnel (2).
Il s'agit en réalité d'une tactique de deux pasteurs antidéistes, pour
décatholiciser la confrérie maçonnique et lui épargner d'être prise dans
les luttes religieuses contemporaines pour lutter en revanche contre
l'athéisme forcené des HeIl-fire clubs et, peut-être, pour faire franchir
aux libertins un premier pas vers l'Evangile dont Anderson et Désaguliers
n'ont jamais oublié qu'ils étaient les ministres.
Dans une conjoncture différente, les versions continentales des
Constitutions de 1723 (document suédois « et document « d'Amster-
dam «) maintiennent le caractère chrétien de la franc-maçonnerie, infi-
dèles à la lettre, mais fidèles, sans doute, à l'arrière-pensée des auteurs
de l'original.
Après Anderson, en Grande-Bretagne et en France.
Comment va évoluer le déisme tactique d'Anderson-Désaguliers ?
En Grande-Bretagne. dans les deux directions que son ambiguïté
même lui ouvrait : la religion naturelle qu'accentuera, dans la deuxième
èdition des Constitutions (1738) une référence au noachisme ; et le
conformisme religieux, anglican en l'espèce, qu'encouragera la troisième
édition (par John Entik, 1756).
L'empirisme britannique gardera les contradictions, voire les prévien-
dra, Dès 1760 (cf. J. and B. et Hiram) certaines loges diront Grand
Architecte de l'Univers « au lieu de ' Dieu tout puissant «. Ce sera
dans l'intention qu'on vient de dire, et non pas dans une intention
d'ésotérisme.
Même après 1813, et l'apport des éléments symboliques pré-ander-
soniens, qu'avaient conservés ou récupérés les Antients, l'ésotérisme
maçonnique qu'on eût pu croire réactivé, demeurera lettre morte. La
Constitution de la Grande Loge Unie (1815) rejoint Anderson, l'Anderson
obvie du fameux article 1er, et s'y tient. Seul avantage le conformisme
10
LE GRAND HOMME, LES OUTILS DE L'ARCHITECTE ET LAME
UNIVERSELLE.
Référence Albert le Grand. Philosophia naturalis, Bâle. 1650.
anglican s'inscrit moins dans les textes. Mais il est ancré dans la men-
talité.
Cette perspective britannique justifie et exige le conformisme reli-
gieux des maçons appartenant à d'autres religions que la religion catho-
lique anglicane, ou même que toute confession chrétienne.
En France, où les premières constitutions n'avaient pas de motif pour
taire le caractère chrétien de la franc-maçonnerie, celui-ci allait de soi.
Il allait même si bien de soi qu'il ne marquait guère plus qu'il ne choquait.
11
La même évolution d'un déisme aussi ambigu que celui des constitutions
anglaises, quoique aucune tactique n'eût imposé de le proclamer sur le
continent, la même évolution s'observe : vers la religion naturelle et vers
le conformisme religieux, catholique en l'espèce.
Le conformisme catholique disparaîtra quasiment au XlX siècle pour
des raisons historiques claires application des condamnations pontifi-
:
L'écossisme.
La franc-maçonnerie française, cependant, n'est pas qu'un rameau, ni
même qu'un rejeton de la maçonnerie anglaise, comme on vient de le
supposer jusqu'à présent.
Y' I La tradition proprement française en maçonnerie (3), c'est-à-dire la
tradition de I'écossisme souligne l'aspect initiatique essentiel de
l'ordre, et le renforce. Car l'ésotérisme hermétique, chevaleresque et
magique frappe davantage que celui de la maçonnerie opérative, dont on
sait peu.
Ce déisme de fait des premières constitutions, l'écossisme le méta-
morphosera en un gnosticisme, et c'est encore sa volonté d'ésotérisme.
ici confondue avec une fidélité traditionnelle, qui lui inspirera de réim-
poser, avec pleine signification, le caractère chrétien de la franc-maçon-
nerie. Non point par conformisme religieux, mais parce que l'ésotérisme
paraissait exiger la base d'un exotérisme correspondant, selon un schéma
classique, mais point si contraignant qu'on le répète.
Exemples : le cas du Régime écossais rectifié, où l'on exige la pro-
fession de la religion chrétienne (Code de 1778) et qui recèle une doc-
trine ésotérique, de tradition martinésiste (judéo-chrétienne) et cheva-
leresque, sans doute plus élaborée et systématisée que dans aucun autre
régime ou rite maçonnique.
f (3) Quel que soit le lieu d'apparition du grade de Maître Ecossais, dont
certains fixent la naissance à Londres.
12
Autre exemple : le grade de Rose-Croix (qui deviendra le 18' Degré
du Rite écossais ancien accepté) très profondément ésotérique, d'un
ésotérisme judéo-chrétien lui aussi, où la Sainte Trinité est invoquée et
Jésus de Nazareth au moins typifié.
L'écossisme n'insiste, danc certains cas, sur le caractère chrétien de
la franc-maçonnerie qu'afin d'offrir un objet à la réflexion initiatique, que
pour disposer d'un ensemble de symboles propres à médiatiser la connais-
sance ésotérique.
Les notions d'ésotérisme et d'universalisme sont connnexes. Seul
ésotérisme fonde un universalisme authentique. L'exemple et l'enseigne-
ment de Ramsey, qui ne fabriqua aucun grade niais qui est un Père de
l'écossisme, comme on dit Père de l'Eglise, aident à désigner la voie (4).
Il est vrai qu'en 1875, l'écossisme, à Lausanne, paraît avoir rejoint
I'Anderson légal et versé dans le maçonnisme philosophique au détriment
de l'ésotérisme maçonnique.
La voie cependant reste ouverte, où nous sommes engagés, bon gré
mal gré, et où il faut marcher, sauf à nier notre situation et à renier
notre vocation. Car nous sommes situés en écossisme et appelés à l'ini-
tiation.
Il est juste et réjouissant que le tracé historique, débouchant sur
l'implantation écossaise de la Grande Loge de France, confirme l'examen
philosophique au terme duquel la franc-maçonnerie se qualifie comme
société initiatique. Dans cette perspective, posons le problème du Grand
Architecte de l'Univers.
(4) Sujet capital, au point que mieux vaut n'en pas dire un peu plus qui
serait dérisoire. Remarquons un détail topique le noachisme de James Arider-
:
13
TOUT VIT EN TROIS, TOUT JOUIT EN OUATRE
Réference Herbandt Jamsthaier. Viatorium spagyricem. Das ist Ein gebenedeyter
spagyrischer Wegweiser, Franctort-surie-Main, 1625.
14
voire à une coordination de concepts. le symbole du Grand Architecte
de l'Univers. Car cette opération aboutit à détruire le symbole en tant
que tel, donc à condamner la méthode symbolique et à effacer, par
conséquent, e caractère initiatique, pourtant essentiel, de la franc-ma-
çonnerie.
De quoi le Grand Architecte de l'Univers est-il le symbole ?
Impossible, par définition, de répondre adéquatement.
Le passage du polygone inscrit, au cercle exige un saut. L'imagina-
tion seule, en l'occurrence, peut effectuer ce saut. Car elle est la fonc-
tion symbolique. Du symbole est possible une approche esthétique ou
intellectuelle ou mystique, du symbole ou plutôt de l'un ou l'autre de
ses aspects qu'il déborde. L'appréhension du symbole en tant que tel,
génératrice de l'expérience gnostique, est l'oeuvre de l'imagination, quels
que soient ses états expérience ineffable tout à fait.
Mais, s'il faut parler, on peut multiplier les côtés du polygone. Rele-
vons au fil de l'histoire
Le Grand Architecte de [Univers symbolise ad libitum « Dieu
le Dieu .. de telle, ou telle, ou telle religion
le « Dieu « des déistes le « Dieu « des théistes
le Dieu « de toute philosophie qu'on voudra
- l'Harmonie universelle, la Loi suprême, le triangle équilatéral,
l'élan vital, le feu, la vie, la lettre G.....que certains distinguent de
Dieu ,' comme des créatures du Créateur, et d'autres comme des éner-
gies de leur source
- tel aspect du « Dieu des religions ou des philosophies : créa-
'
17
Qu'à partir de cette expérience du Grand Architecte de 'Univers, cer-
tains déduisent des conséquences philosophiques, que d'autres dédui-
sent des conséquences théologiques que certains y éprouvent a pré-
sence d'un Dieu personnel ou que d'autres concluent à l'existence de
ce Dieu, c'est affaire individuelle, affaire de raisonnement, et donc de
langage. Chaque maçon a le droit, et même le devoir, de réfléchir sur
son expérience du Grand Architecte de l'Univers ; et ainsi d'aborder la
philosophie et la théologie, chacun en son particulier.
Mais, en tant que franc-maçon, son affirmation et sa glorification du
Grand Architecte de l'Univers signifient précisément qu'il a choisi d'exis-
ter authentiquement et de travailler contre l'absurde, père du mensonge,
selon le plan qu'il décrypte et parfait à la fois, en lui-même et dans le
monde.
Semblable à l'âme socratique, au nous, le Grand Architecte de 'Uni-
vers, auquel réfère, dans le grand livre du monde, la nature, contradictoire
du hasard, est appréhendé, par excellence, grâce à la connaissance de soi,
non pas introspection psychologique mais plongée, ou ascension, méta-
physique. Semblable à l'esprit universel est en effet celui qui, de son
c6mpas, marqua les limites du monde et régla au dedans comme au
dehors tout ce qui se voit et tout ce qui est caché (7) celui qui se
;
Pour mémoire
Le problème du Volume de la Loi Sacrée est inséparable du pro-
blème du Grand Architecte de l'Univers. La solution doit, pour les francs-
maçons écossais, en être cherchée selon la même ligne, que trace leur
tradition et où l'on a cherché présentement celle du Grand Architecte de
l'Univers.
18
ll PARTIE
PR EA M BU LE
THESES
19
COMMENTAIRE
*
actes.
20
III PARTIE
DOCUMENTATION
TEXTES PHILOSOPHIQUES
Avertissement
L'idée de Grand Architecte de l'Univers est difficile à comprendre et à
définir. En elle viennent se rejoindre et parfois se fondre des caractères issus,
soit de la tradition religieuse, soit de la tradition philosophique. C'est pourquoi
il nous a semblé utile, voire nécessaire, d'évoquer la Bible et des textes tirés
des grandes oeuvres philosophiques de l'Antiquité, du XVII siècle et du XVIII
siècle où nous rencontrons l'idée de Dieu ou de I'Etre.
On peut penser que l'idée de Dieu ou de l'Etre ne recouvre pas exactement
l'idée de Grand Architecte de 'Univers, mais on peut la considérer comme
une approche qu'il est utile, voire nécessaire, à tout franc-maçon de
connaître et de méditer.
Nous nous sommes volontairement limités à quelques textes qui nous
semblent significatifs. Mais il va sans dire que cette liste n'est pas et ne veut
as ètre limitative, et que tout franc-maçon peut, et doit, la compléter et
enrichir.
Nous ne donnons ces textes qu'à titre d'indication, voire d'incitation, car
ils ont pour nous, francs-maçons du Rite écossais, au-delà de leur valeur spéci-
fiquement religieuse ou philosophique, la plus haute valeur spirituelle.
*
LA BIBLE. Genese I. 1.
mencement Dieu créa les cieux et la terre soit par une proposition indé-
oendante. Dans ce cas, il s'agirait d'une création ex nihilo. Mais beaucoup de
traducteurs modernes et anciens (parmi les anciens on peut citer Rashi et lbn
Esra) considèrent le verset I comme une proposition subordonnée à ce qui suit.
21
Cette compréhension est beaucoup plus conforme à la grammaire et à la
phraséologie hébraique. Breshit, dans la Bible, n'est jamais pris à la fois abso-
lument et temporellement dans le sens de commencement. Ici, l'état construit
est donc plus probable.
Si le verset est donc subordonné à ce qui suit. Deux traductions sont
1
possibles
lbn Esra « Au commencement que Dieu créa le ciel et la terre, la
.
l'organisation d'un chaos. Dans les écrits sacrés juifs, l'idée de création ex
nihilo n'apparaît que dans le 2 livre des Macchabées, VII, 28.
De plus, dans ce contexte, tohu-bohu ne désigne pas à proprement parler
le néant, mais bien plutôt un chaos liquide désigné à la fin du verset 2 par le
mot « Tahom « qui dans les textes bibliques désigne les eaux souterraines,
l'océan cosmique sur lequel repose la terre. Comme dans les mythes babylo-
niens de création, l'oeuvre créatrice de Dieu apparaît donc dans un certain ordre
de la nature exprimé dans Genèse I par la séparation des eaux (apparition
du firmament) et dans Génése VIII par le maintien du rythme des jours et
des saisons après le déluge. L'idée d'un démiurge organisateur d'un chaos pré-
existant et non-créateur ex nihilo n'est donc pas étrangère à la pensée biblique.
*
PLATON
Les savants disent que ie ciel et la terre, les dieux et les hommes sont
unis ensemble par l'amitié, la règle, la tempérance et la justice et c'est pour
cela qu'ils donnent à tout cet univers le nom d'ordre et non de désordre et de
dérèglement. Gorgias, 568 a.
Ce qui répand la lumière de la Vérité sur les objets de la connaissance
et confère au sujet qui connaît le pouvoir de connaître c'est l'idée de Bien.
Puisqu'elle est le principe de la science et de la vérité, tu peux la concevoir
comme objet de connaissance, mais si belles que soient ces deux choses, la
Science et la Vérité, tu ne te tromperas pas en pensant que l'idée dLI Bien
en est distincte et les surpasse en beauté. Comme dans le monde visible on a
raison de penser que la lumière et la vue sont semblables au soleil mais tort
de croire qu'elles sont le soleil, de même dans le monde intelligible il est
juste de penser que la science et la vérité sont l'une et l'autre semblables au
Bien mais faut-il croire que l'une ou l'autre soit le Bien la nature du Bien
doit être regardée comme beaucoup plus précieuse. La République, 508 e - 509 b.
Quant au ciel entier ou monde, il faut se poser la question qu'on doit se
22
poser dès le début pour toute chose. A-t-il toujours existé, sans avoir aucun
commencement de génération, ou est-il né et a-t-il eu un commencement ?...
II est né... ce qui est né doit nécessairement sa naissance à quelque
cause....
- A propos de l'univers il faut examiner d'après lequel des deux modèles
son architecte l'a construit, d'après le modèle immuable ou d'après celui qui
est né. Timée, 29 e.
Celui qui a formé le devenir et l'univers a voulu que toutes choses fussent
autant que possible semblables à lui-même. Que ce soit là le principe le plus
effectif du devenir et de l'ordre du monde c'est l'opinion des hommes sages.
Le Dieu... prit toute la masse des choses visibles qui n'était pas en repos,
mais se mouvait sans règle et sans ordre et la fit passer du désordre à l'ordre
estimant que l'ordre était préférable à tous égards. Timée, 29 a.
(Traduction Chambry.)
*
ARISTOTE
Il existe quelque chose toujours mû par un mouvement sans arrêt, mou-
.ement qui est le mouvement circulaire...
.11 y a par suite aussi quelque chose qui le meut et puisque ce qui
est à la fois mobile et moteur n'est qu'un terme intermédiaire, on doit supposer
un extrême qui soit moteur sans être mobile, être éternel, substance et acte
pur.
Le Premier rvloteur est un être nécessaire et en tant que nécessaire son
être est le Bien et c'est de cette façon qu'il est principe...
...A un tel principe sont suspendus le Ciel et la Nature. Et ce principe est
une vie comparable à la plus parfaite qu'il nous soit donné à nous de vivre
cour un bref moment.
Et la vie aussi appartient à Dieu car l'acte de l'intelligence est vie et Dieu
est cet acte même ; et l'acte substistant en soi de Dieu est une vie parfaite et
éternelle. Aussi appelons-nous Dieu un vivant éternel parfait la vie et la durée
continue et éternelle appartiennent donc à Dieu car c'est cela même qui est
Dieu. Métaphysique, (trad. J. Tricot).
*
DESCARTES
23
car encore qu'on puisse feindre qu'un tel être n'existe point, on peut feindre
néanmoins que son idée ne représente rien de réel. Méditations métaphy-
siques, III.
*
MA LEB R ANCH E
L'idée de l'être sans restriction, de l'infini, de la généralité, n'est point
l'idée des créatures ou l'essence qui leur convient mais l'idée qui représente
la Divinité ou l'essence qui lui convient.
Tous les êtres particuliers participent à l'être mais nul être particulier ne
l'égale. L'être renferme toutes choses mais tous les êtres et créés et possibles
avec toute leur multiplicité ne peuvent remplir la vaste étendue de l'être.
*
**
Dieu ou l'infini n'est pas visible par une idée qui le représente. L'infini est
à lui-même son idée. li n'a point d'Archétype. Il peut être connu mais il ne
peut être fait.
***
L'Infini ne se peut voir qu'en lui-même : car rien de fini ne peut représenter
l'infini. Si on pense à Dieu il faut qu'il soit.
On ne peut voir l'essence de l'infini sans son existence, l'idée de l'être sans
l'être car l'Etre n'a point d'idée qui le représente. Il n'a point d'archétype et
il renferme en lui l'archétype de tous les êtres. Entretiens métaphysiques, II.
*
SPINOZA
Dieu existe nécessairement il est unique. il existe et agit par la seule
nécessité de sa nature il est la cause libre de toutes choses toutes
choses sont en lui et dépendent de lui, de telle sorte qu'elles ne peuvent être,
ni être conçues sans lui enfin tout a été prédéterminé par Dieu non pas en
vertu d'une volonté libre ou d'un absolu bon plaisir mais en vertu de sa nature
absolue ou de son infinie puissance. Ethique 1, De Dieu, Appendice.
J'entends par Dieu un être absolument infini, c'est-à-dire une substance
constituée par une infinité d'attributs dont chacun exprime une essence éter-
nelle et infinie. Ibid., Définition VI.
*
LEI B N IZ
Il est vrai qu'en Dieu est non seulement la source des existences mais
encore celle des essences (en tant que réelles, ou de ce qu'il y a de réel dans
la possibilité). La Monadoloqie, art. 43.
24
Il y a en Dieu la Puissance qui est la source de tout, puis la Connaissance
.ii contient le détail des idées et enfin la Volonté qui fait les changements ou
production selon le principe du meilleur. Ibid., art. 48.
...Nous devons remarquer une autre harmonie entre Dieu considéré comme
Architecte de la machine de 'Univers et Dieu considéré comme Monarque de
!a Cité divine des Esprits. Ibid., art. 87.
On peut dire encore que Dieu comme Architecte contente en tout Dieu
cnme législateur. Ibid., art. 88.
*
KANT
La raison humaine ne contient pas seulement des idées mais des idéaux...
la vertu et la sagesse humaine sont des idées. Mais le sage (du
stocien) est un idéal, c'est-à-dire un homme qui n'existe que dans
la pensée mais qui correspond pleinement à l'idée de sagesse. De même
que l'idée donne la règle, l'idéal sert en pareil cas de prototype à la
détermination complète de la copie et nous n'avons pour juger nos actions
d'autre règle que la conduite de cet homme divin que nous portons en
en nous et auquel nous nous comparons pour nous juger et pour nous
corriger aussi, mais sans jamais pouvoir atteindre la perfection.
L'idéal de l'Etre Suprême n'est autre chose qu'un principe régulateur de
la raison, principe qui consiste à regarder toute liaison dans le monde comme
résultant d'une cause nécessaire et absolument suffisante pour y fonder la
règle d'une unité systématique et nécessaire suivant les lois générales dans
'explication de cette liaison il n'est pas l'affirmation d'une existence néces-
saire en soi.
Cet objet, cet Idéal de la Raison, porte le nom de
être originaire « ens originarium
:
*
25
VOLTAIRE
26
1971
LES RAISONS
D 'ESP1RER
par le docteur Pierre-Simon
Ces jeunes de mai 68 qui proclamaient, assis sur la chaussée. nous som-
mes tous des juifs allemands «, qu'exprimaient-ils sinon un profond besoin
de communion et de justice ? Leur révolte était refus des idoles, des fausses
valeurs de la société de consommation. Leur sentiment d'être comme en exil
dans un monde sans âme peut bien se retourner en rage de détruire, quand
ce n'est pas. hélas, en rage de se détruire. Qu'ils le sachent ou non, oui certes
ils sont à la recherche d'une Eglise
Cependant les Eglises établies ne se bornent pas à pr000ser à leurs caté-
chumènes la chaleur d'une communauté fraternelle et la spiritualité d'une éthi-
que. Elles fondent leur morale sur un dogme, elles offrent à leurs fidèles un
asile dans le sein de leur Dieu, une explication du monde et de la destinée par
référence au surnaturel.
28
L'HOMME S'ALIENE-T-IL VRAIMENT?
C'est ainsi qu'à l'aube de l'histoire la civilisation elle-même est née de l'im-
plantation en des vallées fertiles d'une agriculture sédentaire :d'où la maçon-
nerie de pierre et de brique le marché autour de celui-ci la ville, capitale
économique, politique et religieuse du territoire et enfin, sous le clair soleil
de la Grèce, l'avènement de la raison, fille de la Cité. Pourquoi l'humanité d'au-
jourd'hui serait-elle forcément incapable de fonder une civilisation rénovée sur
les richesses et les pouvoirs nouveaux dont le progrès technique lui permet de
disposer ?
29
EXISTE-T-IL UNE DEMISSION DE LA RAISON?
Aussi voit-on, tant est puissant l'attrait du merveilleux, l'appel au surna-
turel revêtir, hors des Eglises, ces formes sauvages ou dégradées que dénon-
çait Jean Daniélou. On se presse chez les voyantes, on consulte les chroniques
astrologiques des journaux ou de la radio, on s'arrache toute une littérature
qui exploite au niveau le plus bas le sens humain du mystère des choses.
Cette démission de la raison n'est pas l'aspect le moins paradoxal de la
crise de notre temps, d'un temps où trop de philosophes ne nous proposent
que considérations abstruses, désolantes ou sophistiquées.
C'est un sentiment de méfiance, de déception, voire de rancune à l'égard
du progrès scientifique et technique qui pousse tant de nos contemporains,
à défaut de certitudes religieuses, à chercher un refuge illusoire dans les pires
superstitions, ou dans une doctrine politique érigée en vérité absolue. Cette
rancune contre la science ne nous parait ni réaliste, ni justifiée
Ce n'est pas en nous détournant de ia science, c'est en faisant appel à elle
que nous parviendrons, par exemple, à maitriser la pollution envahissante, la
dégradation de l'environnement humain à quoi aboutit une exploitation anar-
chique des ressources naturelles
Mais cette science, qui a tant fait déjà pour élargir notre horizon et
soulager la peine des hommes, ne doit être confondue ni avec ses applications
techniques, ni avec un scientisme périmé. Ce n'est pas son affaire de nous
révéler le pourquoi des choses, le secret de nos fins dernières, de nous
apprendre comment nous comporter. Elle ne saurait à elle seule ni résoudre
la crise de notre civilisation, ni répondre aux aspirations de ceux qui sont à la
recherche d'une Eglise.
30
Mais si elle ne professe aucun dogme, elle n'en a pas moins une éthique,
une méthode, un symbolisme. En ces causeries, nous ne pouvons guère vous
en donner que des aperçus, car la Franc-Maçonnerie ne s'enseigne ni ne se
prêche, elle se vit. Mais quel Franc-Maçon n'a éprouvé, en loge, puis de retour
dans le monde profane, leur efficacité, leur rayonnement, le bienfait intime et
durable qu'on en retire ? Ce qui était vrai il y a des siècles l'est encore au-
jourd'hui. La Franc-Maçonnerie réalise la méthode privilégiée pour l'étude et
l'analyse des problèmes de notre temps. Le Franc-Maçon est moralement armé
pour affronter la quotidienneté.
LA METHODE INITIATIQUE
Les pessimistes évoquaient tout à l'heure l'aliénation par la culture. La
culture que nous acquérons en Loge, par l'écoute attentive, puis la libre contes-
tation de la pensée d'autrui, nous libère de nos préjugés et de nos erreurs.
Les pessimistes désespèrent de voir jamais la paix régner entre les des-
cendants des tueurs de rhinocéros '. Voilà des siècles qu'en un temps d'into-
lérance, de luttes civiles et religieuses, notre Ordre a tenu et gagné ce beau
pari de rassembler des hommes de tous les camps pour en faire une commu-
nauté fraternelle. Et comment ne croirait-il pas à la fécondité de l'effort, à la
perfectibilité de l'homme, quand sa méthode initiatique se fonde sur un patient
travail rie soi sur soi, quand les symboles qu'il a reçus des bâtisseurs de cathé-
drales exaltent la grande idée de construction ?
Mais c'est aussi par sa permanence séculaire, par la stabilité des valeurs
fondamentales auxquelles elle demeure attachée que la Franc-Maçonnerie peut
répondre aux besoins d'une jeunesse désorientée par le tourbillon d'idéologies
éphémères. Les règles de sagesse dégagées depuis si longtemps par quelques
individualités supérieures que nous honorons conservent tout leur prix à l'âge
de la bombe atomique. Conçues par eux pour l'usage non de leur nation, mais
du genre humain tout entier, ces ' ois non écrites « qu'invoquait l'Antigone de
31
Sophocle, les normes universelles de la raison, du courage, de la justice et de
l'amour n'ont pas vieilli. Bien loin de là, elle anticipaient le point où nous voici
venus : le pullulement de notre espèce, les pouvoirs prodigieux qu'elle a
conquis pour le meilleur ou pour le pire la mènent à sa propre perte si elle
ne se décide pas enfin à s'en inspirer pour tout de bon.
En ce début d'année, mes chers amis, c'est la grâce que je nous souhaite.
Elle dépend de nous.
32
LA FRANC-MAÇONNERIE
1COSSAISE DANS
L'ORDRE FRANCAIS
DIVISi
(1772-1789)
Organisation de la Résistance
(I) Voir « Points de Vue Initiatiques «, n°' 15-16. pp. 15-19, n 17, pp. 12-14.
n°' 18-19, pp. 13-14, n 20. pp. 7-14.
33
tôt implantée rue de la Pelleterie, en face du Palais de Justice, se contes-
tent réciproquement toute filiation avec la première Grande Loge de
France et toute ' régularité '. Il y a donc dorénavant « deux obédiences,
tantôt rivales, tantôt alliées, qui prétendent détenir en exclusivité cette
régularité... C'est pour interdire aux Maçons de la Grande Loge de pou-
voir assister aux tenues des loges qu'il reconnaît que le Grand Orient
institue le 23 octobre 1773 le mot secret qui sera exigé à l'entrée des
temples « (2).
Oue l'on considère que la Grande Loge de Clermont est la continua-
tion de celle qui existait avant 1773 ou qu'elle est vraiment une deuxième
Grande Loge de France, elle n'en apparaît pas moins comme beaucoup
plus importante qu'on ne l'a cru jusqu'ici, par suite d'une sorte de cons-
piration du silence, Des travaux importants sont attendus qui la montre-
ront sous un jour nouveau (3) et déjà des documents comme la circulaire
que nous avons reproduite témoignent de sa vigueur en face de la puis-
sance rivale (4).
Mais, le duc de Montmorency-Luxembourg, Substitut d'un Grand Maî-
tre non encore installé, n'allait pas laisser utiliser contre l'organe admi-
nistratif qu'il avait suscité les timbres conservés par leur ancien déten-
teur, le Garde des Sceaux DURET.
S'est-il adressé au pouvoir pour les faire restituer ? Ou peut le croire
en voyant que les trois signataires DURET, BOURGEOIS et LABADIE sont
mentionnés au registre d'écrou du Châtelet comme ayant été incarcérés
le 9 octobre 1773 pour « affaire de Franc-Maçonnerie «. Ils seront remis
en liberté le 17 octobre sans doute après retrait de toute plainte.
Notons que si les sceaux furent effectivement rendus au Substitut, les
archives restèrent aux mains des Officiers de la Grande Loge et une
partie d'entre elles constituent le fond Chapelle à la Bibliothèque Natio-
nale.
C'est le vendredi 22 octobre seulement que le Grand Maître put être
installé solennellement par le Substitut, le Grand Orateur Bacon de la
Chevalerie, le Grand Secrétaire Baron de Toussainct et le Hérault
d'Armes Méry d'Arcy (5).
34
Dans sa harangue au Grand Maître, le Substitut prend grand soin de
fixer les dimensions de son propre rôle : « Flatté de vous avoir initié
dans le mystère, il m'était dû de vous inaugurer et de vous installer
parmi nous. Dirigez nos travaux, soyez-en le protecteur et daignez ne
jamais oublier l'hommage tendre et sincère que je vous consacre dans
ce moment au nom du Peuple Maçon, et que mon coeur répète avec le
plus grand plaisir
De son côté, le Duc de Chartres confirme les nominations, et fait
porter au bas des statuts la mention suivante qu'il paraphe o Nous
confirmons et approuvons les présents statuts et règlements pour être
exécutés par toutes les Loges dans toute l'étendue du globe français
maçon, le 22 octobre 1773
F.L.P.J. d'ORLEANS.
(Frère Louis-Philippe-Joseph)
Des deux premiers articles ainsi approuvés, le premier portait que
le Grand Maître pourrait se présenter et présider à toutes les Assem-
blées de l'Ordre » le second que « ne pouvant se livrer aux détails
de l'administration «, il réfèrerait à l'Administrateur Général les mémoires
ou demandes à lui adressés, relativement à l'Ordre ,
35
Aussitôt qu'une loge régulière connaîtra une autre loge non comprise
sur le Tableau envoyé par le Grand Orient, ou dont elle doutera des
constitutions, elle donnera avis à la Très Respectable Grande Loge avec
tous les renseignements possibles
Le Frère Gouillard, docteur régent de la Faculté de Droit de Paris,
Grand Orateur de la Grande Loge de Clermont, exprime fort habilement
le point de vue de son obédience dans des épîtres présentées comme
lettres critiques sur la Franc-Maçonnerie d'Angleterre , dont il dit que
la guerre est allumée plus vivement que jamais entre les Frères ».
Il y a en tout six lettres, publiées en deux brochures parues au prin-
temps de 1774. Trois lettres sont censées émaner du Très Illustre Grand
Orateur de la Grande Loge de Londres (lire évidemment du Grand Orient
de France) qui présente et tente de défendre la réforme « deux
du Très Puissant Orateur de la Grande Loge de Dublin (lire de Clermont...)
qui l'attaque vigoureusement la sixième faisant appel à la sagesse, com-
me émanant du prétendu tradUcteur qui se serait adressé à tous les
francs-maçons répandus sur la surface de la Terre
On y lit de malicieuses satires contre un frère Mylord Taterd serru-
rier de la Cité (en réalité Testard, Vénérable de la Loge la Victoire «),
contre le Frère Doct. Méd. G., créateur d'une Université maçonnique
(Gerbier de Werchamp, médecin du Comte de Provence, le futur Louis
XVIII, et Maître de la Parfaite Unité), contre les mots du guet «, etc.
'
37
Suivait une défense de l'inamovibilité des Vénérables car « par le
nouveau règlement, on a ôté aux Maîtres leur Constitution personnelle
et on a transporté leur droit à la loge où ils présidaient.
Il s'agit, au fond, d'une opposition qui se situe, au plan de la bour-
geoisie libérale comme celle des Grands de l'époque par rapport à la
monarchie absolue. L'ironie du ton rappelle toujours celle d'un Montes-
quieu, d'un Jean-Jacques Rousseau ou d'un Voltaire : « Comment imaginer
qu'un Lord ou qu'un Chevalier baronnet prenne séance à côté d'un vil
mercenaire qui n'a d'autre recommandation que sa probité ? On a trouvé
que vous aviez très bien fait de secouer ces vieux préjugés et de rappro-
cher un peu la Maçonnerie de notre siècle
En revanche, l'auteur souligne l'incohérence démagogique qu'il voit
dans l'association constituée par dessus la bourgeoisie parisienne entre
les représentants de la haute noblesse et ceux du peuple, entre les hobe-
reaux chevronnés et de tout jeunes gens « qui sont à peine initiés dans
nos mystères
Vous mettez parmi vos officiers des Frères dont nous ne rougirions
pas, nous autres petites gens, mais qui ne répondent guère à la bonne
opinion que vous voulez qu'on prenne de votre administration... Vous
mettez à la tête de vos bureaux le député d'une très petite loge d'un
petit canton d'une petite province, laquelle est présidée par un tailleur,
Un autre de vos députés représente un perruquier un autre est porteur
de la procuration d'un serrurier. Et ce sont ces députés que vous nous
représentez comme l'élite de la Maçonnerie. En vérité, ce n'était pas la
peine de dépouiller nos bons bourgeois de Londres des charges qu'ils
avaient à la Grand Loge pour leur substituer de pareils représentants...
Puis la diatribe porte sur la question financière et sur la nécessité
de se soumettre à toutes sortes de formalités désagréables, pour finale-
ment consentir, à seule fin d'être « régularisé « un impôt appelé par
ironie « don gratuit «.
Vous avez été visiter les travaux de vos anciens Maîtres, vous les
avez installés de nouveau et vous avez déclaré que ce n'était que de ce
moment qu'ils étaient véritablement enfants de la lumière «... mais
qu'est-ce qu'un Maçon régulier et cesse-t-on d'être un Maçon régulier
parce qu'on n'appartient plus à une obédience qui s'érige en gardienne
de l'orthodoxie maçonnique ? «. Et il pose l'ultime question « :Si nous
ne sommes pas réguliers, nous qui vous avons constitués, de qui tenez-
vous vos pouvoirs, et de quel droit prétendez-vous donner la vie à ceux
de qui vous l'avez reçue ?
Tout naturellement, la série se termine en mai 1774 par une décla-
ration de principes de la (deuxième) Grande Loge de France
38
Pour nous, suivant pas à pas es routes que nous ont tracées nos
ancêtres, nous nous contenterons d'une honnête médiocrité. Fuyant avec
soin le luxe.., loin d'être à charge aux loges qui communiqueront avec
vous par des impôts masqués sous d'autres dénominations, nous les se-
courerons de tout notre pouvoir. Nous serons toujours assez riches si
nous conservons la paix et l'union qui sont les seuls biens après lesquels
nous aspirons, et que nous espérons maintenir parmi nos Frères, malgré
les efforts que vous ferez pour les détruire
En attendant une étude exhaustive qui enrichira certainement et
modifiera sans doute les connaissances acquises sur ce que nous avons
appelé la deuxième Grande Loge de France, qui fut au moins la gardienne
d'une tradition, mentionnons un tableau tiré des archives de la loge Saint-
François du Parfait Contentement. Il y apparaît pour Paris en 1777 le chif-
fre de 129 Vénérables, et pour la province celui de 247. soit un total de
376, chiffre souvent cité (8).
De son côté et vers le même temps, le Grand Orient accuse les chif-
fres de 623 loges en activité : 63 à Paris, 442 dans les provinces, 38 aux
colonies, 69 attachées à des corps militaires, 17 en pays étrangers (9).
La comparaison avec une statistique de la Grande Loge de 1771
(la première) est particulièrement édifiante : total des loges à cette
date, 164, soit à Paris 71, 85 en province, 5 aux colonies, 1 à l'étranger,
2 ' ambulantes ' (10).
On est en droit de penser que, par une sorte d'émulation dans le
recrutement et d'attrait rayonnent dans le monde profane, la dualité des
obédiences n'a nullement paralysé la vie maçonnique et l'a même long-
temps animée.
Cette dualité qui règne de 1733 à 1789 dans les loges bleues se
retrouve dans la Maçonnerie Ecossaise.
Dès le mois de décembre 1733, le Grand Orient invite ses loges à ne
plus travailler qu'aux trois premiers degrés, et nomme une Commission
pour élaborer un règlement des grades supérieurs.
39
Cette décision est jugée abusive par nombre d'ateliers de régime
écossais, malgré le privilège qui leur était offert d'avoir à leur tête un
seigneur aussi puissant que le duc Philippe. Mais elle suscite égale-
ment des protestations à la base «, et notamment celles du frère
Guillotin.
C'est sur les Directoires écossais de la Stricte Observance, créés
par le baron de Hund quelques années auparavant que portèrent les pre-
miers efforts du Grand Orient. Ceux de Bacon de la Chevalerie, membre
du Directoire de Lyon et Grand Orateur du Grand Orient, aboutirent à un
traité signé en 1776, après plus de deux ans de pourparlers, entre les
deux puissances qui comptaient des membres de rang social comparable.
Les pouvoirs sont alors partagés et l'unité amorcée (11).
Les alliances réalisées n'allèrent pas sans difficultés et ne furent
pas toujours respectées, quand elles purent être nouées, ce qui fut par-
fois dramatique, comme avec la Mère Loge Ecossaise de France (12).
Deux historiens taxés en leur temps d'un honnête parti pris, les
frères Albert Lantoine et Gaston Martin tombent à peu près d'accord dans
leurs conclusions sur ce point.
Pour Albert Lantoine (13), la tolérance du Grand Orient « masque
son adroite politique d'accaparement. Sa fondation a été basée surtout
sur le besoin d'unité qui s'imposait dans la Maçonnerie française, sur une
concentration des pouvoirs réels et des forces morales empêchant l'épar-
pillement des efforts et la rivalité des petites ambitions personnelles.
Quand le XVlI siècle s'achève, le Grand Orient se dit seul et uni-
que Grand Orient de France «... Il a presque raison. De petits foyers
intransigeants demeurent encore, mais d'une ardeur peu communicative.
40
Les réfractaires et la survivance d'un esprit écossais
Gaston Martin est certes moins généreux à l'égard de sa propre obé-
dience. Pour lui (14) ' les petites Puissances ne sont pas insensibles à
ce que représente pour elles la force chaque jour accrue du Grand Orient.
Elles ne résistent que faiblement à l'attraction de la masse. Elles sont
constituées, d'abord, de Maçons réguliers... Tous (les) concordats sont
établis sur les trois mêmes principes : suprématie dogmatique du Grand
Orient, soumission de toutes les loges bleues à son obédience, autono-
mie administrative des Hauts-Grades de l'Obédience associée. En 1787,
le Grand Orient, malgré l'existence continue d'un certain nombre de peti-
tes puissance dissidentes, crée le Souverain Chapitre Général Métropoli-
tain, chargé de la collation des Grades de 18 à 25. et section permanente
du Grand Orient.
Il reste encore en ce moment beaucoup de sectes irréductibles, qui
tiendront en vue d'une improbable unité de nombreux convents entre
1780 et 1788. Le plus illustre de ceux-ci est celui de Wilhelmsbad. Le
Grand Orient n'y fut pas convoqué. Mais sa situation très forte ne fut nul-
lement ébranlée par l'ostracisme où le tinrent ces sectes confidentielles,
et pour la plupart étrangères.
Ce commentaire manque de courtoisie fraternelle. Le ton serait sans
doute assez différent aujourd'hui, et depuis que des érudits étudient les
archives trop négligées de la Mère Loge du Rite Ecossais philosophique,
Mère Loge Ecossaise, ou encore Saint-Jean d'Ecosse du Contrat Social
et celles des loges constituées ou reconstituées par elle au rite écos-
sais (15). Cette puissance était propriétaire de son hôtel, rue du Coq-
Héron, où se situe aujourd'hui la Caisse d'Epargne, alors que le Grand
Orient et la Grande Loge de Clermont étaient seulement locataires des
leurs. Et nous ne devons pas compter pour négligeable l'Académie des
Sublimes Maîtres de l'Anneau lumineux dont un des grades est celui
d'Elu de la Voûte sacrée de Jacques VI (16).
Ces Puissances ne perdent pas une occasion de manifester leur indi-
vidualité et de revendiquer leur indépendance. C'est ainsi que des loges
du Grand Orient ayant vers 1780 projeté d'armer des vaisseaux à leurs
frais pour la guerre d'Amérique, la Mère-Loge du Rit Ecossais mit la
41
question à l'étude et rejeta la proposition comme enfreignant les princi-
pes de l'institution maçonnique. Puissance spirituelle, la Franc-Maçonne-
rie n'avait pas à intervenir dans cette guerre et devait respecter la
neutralité traditionnelle de l'Ordre (17).
Notons cependant qu'en dépit des divergences entre les autorités
les frères devaient avoir des rapports moins tendus que leurs chefs. On
rencontre même des cas non douteux de double appartenance (18).
42
Certaines ne sont cependant pas souchées sur les tableaux du Grand
Orient, comme la loge de Bourbon Infanterie qui figure au tableau de la
Grande Loge en 1778 (Vénérable de Fréval) ou celle de Beaufremont-
Dragons (Vénérable de Varennes)
Mais c'est au cours des guerres de l'Empire que cette forme de
Maçonnerie se développera dans l'armée et dans la marine d'une façon
extraordinaire, essaimant en pays étranger au point que des dizaines de
loges portent encore les noms français qui leur ont été donnés alors.
Quant aux « Loges d'Adoption », ce qu'en disaient Antonio Coen et
Michel Dumesnil de Gramont reste valable (21).
Le duc de Luxembourg, pour affermir son oeuvre, eut une idée heu-
reuse. Depuis la création de la Franc-Maçonnerie, les femmes y étaient
considérées comme indésirables. C'était un Landmark (borne ou loi)
fixé par le Livre des Constitutions (22) et observé par l'universalité des
francs-maçons, qui ne pouvait être transgressé sans susciter de la part
de l'étranger des représentations dangereuses et la mise à l'index de
l'institution française.
Seulement, en France, le beau sexe a toujours eu une influence
considérable sa prospection ne manquait pas de susciter des propos
malveillants et des protestations intéressées.
D'autres sociétés s'étaient unies à l'instar de la Franc-Maçonnerie,
qui admettaient les femmes et qui risquaient de compromettre le bon
renom de celles-ci, d'autant plus que leurs jeux n'étaient pas toujours
de la plus parfaite innocence. Le Grand Orient résolut de remédier à cet
état de choses en fondant un organisme à part qui, faisant tout de même
collaborer les dames au labeur maçonnique, leur donnait satisfaction
sans attenter aux règles de 'Ordre.
C'est ainsi que furent créées les Loges d'Adoption qui, souchées
'
43
naissance particuliers, et comme les frères pouvaient assister à leurs
réunions - alors que la réciproque n'existait pas le principe était
sauf.
Sous leur impulsion, des têtes, des « tenues blanches « s'organi-
sèrent où la Société - on dirait le monde aujourd'hui prenait un agré-
ment délicieux. Nous précisons la Société « parce que les familles de
la grande noblesse se trouvaient représentées dans cette franc-maçon-
nerie d'adoption, à laquelle le Grand Maître, le duc de Chartres, avait
initié sa femme et sa soeur, la duchesse de Bourbon, qui en devint la
Grande Maîtresse (24).
44
Albert BOUZANQUET
Le 3 février 1971, dans son grand temple de la rue Puteaux, tout tendu
de noir, la Grande Loge de France et la Loge Le Général Peigné, rendaient
hommage à l'un de ses plus dévoués membres, Albert BOUZANOUET, Conseiller
Fédéral de la Grande Loge, et Secrétaire Général de l'Entraide Fraternelle,
qui venait de disparaitre, et pour employer notre terminologie maçonnique, était
passé à l'Orient Eernel.
e
e.
45
Général de l'Union des Syndicats, de 1925 à 1935. date à laquelle il sera
expulsé par e Résident Général de France, pour son action syndicale, Il se
rend alors en France, et milite dans les milieux syndicaux grenoblois.
*
es
46
Ecoles, le journaliste du PROVENÇAL et de LA DEPECHE Dli MIDI, le profes-
seur du Collège Libre des Sciences Economiques et Sociales. Mais ses activités
se manifestent aussi à l'extérieur de notre pays.
Il participe à la conférence de NEW DELHI, en 1947, comme délégué du
Gouvernement Français il accomplit des missions en Afrique du Nord, en
Afrique Noire, et au VIET-NAM. Il est expert à la Haute Autorité du Pool
Charbon-acier de 1952 à 1958, pour les questions économiques et sociales.
il s'occupe également du Mouvement Européen.
s
s.
s
**
L'Entraide Fraternelle est une Organisation dont nous sommes, à juste titre,
très fiers, car si on nous surnomme parfois « Les Enfants de la Veuve «, c'est
parce que nous voulons manifester notre solidarité et notre fraternité aux
familles de nos amis disparus, comme nous la manifestons à tous nos Frères
dans le besoin.
47
lors de notre dernière rencontre, sa grande silhouette, longue et mince
s'éloigner comme une ombre dans le désert de la nuit.
Mais si la grande figure d'Albert BOUZANOUET est allée rejoindre l'Orient
Eternel. nous n'oublions pas que l'image de la mort est toujours présente aux
Maçons depuis le moment où, jeunes initiés, ils réfléchissent au sens de la
vie dans le cabinet de réflexion, jusqu'aux cérémonies d'accession aux degrés
supérieurs où ils méditent sur la disparition du Maître HIRAM, légendaire cons-
tructeur du Temple de Salomon à JERUSALEM.
La disparition d'un Maçon est marquée par une cérémonie funèbre dont
la signification profonde doit vous permettre de comprendre le sens de notre
Ordre et sa symbolique.
Après avoir marqué par une batterie de tristesse la disparition d'un Frère
bien aimé, nous célébrons par une batterie d'allégresse notre foi dans la vie.
BOSSUET, à peine âgé de 30 ans, devait, à METZ en 1656, dans un de ses
premiers grands éloges funèbres, définir sa conception de la condition humaine
Quand l'Eglise ouvre la bouche de ses prédicateurs dans les funérailles de
ses enfants, ce n'est pas pour accroître la pompe du deuil par des plaintes
étudiées, ni pour satisfaire l'ambition des vivants par de vains éloges des
morts, elle se propose un objet plus noble dans les derniers devoirs que l'on
rend aux morts en faisant contempler à leurs auditeurs la commune condition
de tous les mortels, afin que la pensée de la mort leur donne un sain
dégoût de la vie présente n.
Cette conception de la mort, et par suite, ce sens donné à la vie, ne
pouvaient en rien satisfaire Albert BOUZANQUET dont la vie entière, comme
celle de tant d'autres Maçons, a été consacrée à l'amélioration de la condition
de l'homme ici bas
Ce grand humaniste, ce grand syndicaliste, voulait au contraire que l'homme
sur terre appréciât la valeur de chacun des instants terrestres. Il avait compris,
comme le NATHANAEL des Nourritures Terrestres, que chaque instant de la
vie ne prendrait pas son éclat admirable, sinon détaché, pour ainsi dire, sur
le fond très obscur de la mort.
Albert BOUZANQUET voulait que l'Ordre Ecossais dont nous sommes les
dépositaires, corresponde aux besoins profonds de l'homme, qu'il lui permette
de répondre à son angoisse que face à un monde apparemment absurde il
trouve un sens à la vie, il ne se réfugie pas dans le désespoir comme les héros
d'Albert CAMUS ou comme tant de jeunes qui sont privés présentement de
tout idéal, .'
48
La connaissance du réel, le goût du travail que nous glorifions dans notre
Ordre issu des Compagnons opératifs, il l'avait durement acquis dans ses
luttes syndicales.
li souhaitait faire comprendre à tous les jeunes perdus dans la foule soli-
taire, qu'ils doivent oeuvrer, au sein d'un groupe librement consenti, li prônait
que la véritable lutte de l'homme contre la mort, c'est de comprendre que la
vie ne peut être vécue que solidairement et moralement avec ses semblables.
Il aimait répéter, comme le dit un de nos amis heureusement ici-bas, que les
loges sont remplies de tous les Maçons disparus, et de tous ceux qui, pré-
sents, oeuvrent dans e même dessein et donnent ainsi un sens à la mort
comme ils le donnent à la vie.
Aussi, est-ce la raison pour laquelle nous terminons toujours nos réunions,
même les plus tristes, par cette batterie d'allégresse, par cet hommage à la
vie et à la joie, semblable à ce grand initié que fut BEETHOVEN qui, malgré
les infirmités de la maladie, célébrait les joies du monde.
49
BIBLIOGRAPHIE (1)
Jacques LÂCARRIERE, Dieu inconnu, méconnu par toutes les
religions antérieures.
La Cendre et les Etoies
Edit. André Balland.
Cependant, notre auteur manifeste
pour les gnostiques un tel amour et
même une telle passion qu'il en arrive
Une étude sur le gnosticisme est au ton du plaidoyer présentant avec
toujours difficile et l'auteur reconnaît une certaine complaisance comme évo-
d'ailleurs que « le terme de gnostique lution souhaitable ce qui n'est que
est vague et recouvre des significa- perversion ou non-sens théologique. De
tions bien différentes «. Cependant, nombreux exemples pourraient être
et c'est là un des mérites de M. Jac- cités. Un m'a particulièrement frappé
ques Lacarrière, celui-ci donne quel- en ce qui concerne Marcion (p. 112).
ques bonnes définitions de la démar- Voir dans sa tentative qui consistait
che intellectuelle gnostique basée sur à séparer le christianisme de toute la
la critique systématique de notre tradition juive une évolution souhaita-
monde sensible. « Mais cette critique ble qui aurait enfin abouti à un chris-
radicale de toute la création, ajoute- tianisme adulte, est une aberration et
t-il, s'accompagne d'une certitude tout un non-sens. Si certains chrétiens en
aussi radicale, qui la suppose et la sont là aujourd'hui en fait, c'est qu'ils
sous-entend à savoir qu'il existe en
: méconnaissent ce qui constitue l'es-
l'homme quelque chose qui échappe sence même de leur foi et ce n'est
à la malédiction de ce monde, un pas faire oeuvre historique valable que
feu, une étincelle, une lumière issue de présenter cette évolution comme
du vrai Dieu, lointain, inaccessible, conforme au génie du christianisme.
étranger à l'ordre pervers de l'univers De même une certaine interprétation
réel, et que la tâche de l'homme est moderniste et o antitraditionnelle « de
de tenter, en s'arrachant aux sorti- la pensée gnostique ne me semble
lèges et aux illusions du réel, de rega- pas tout à fait exacte. Je ne suis pas
gner sa patrie perdue, de retrouver sûr qu'on puisse dire que « le gnosti-
l'unité première et le royaume de ce cisme ait toujours dénié au passé
comme au futur toute valeur ensei-
gnante «. Aussi est-ce d'un oeil très
(1) Les titres suivis d'un astérisque
sont ceux des publications déposées critique qu'il faut lire cet ouvrage
au Grand Secrétariat de la Grande beaucoup plus polémique qu'histo-
Loge de France. rique.
50
Edmond PARIS, nec, archevêque de Zagreb, des sémi-
Histoire secrète des Jésuites naires jésuites et franciscains avec
(Edition I.P.B. Diffusion Fischbacher, les oustachis. Le pape Pie XII collabora
Paris). avec ce régime. C'est pourquoi sa voix
L'historien Edmond Paris vient d'en- s'est tue devant cet immense holo-
richir, par cet ouvrage posthume, la causte.
littérature déjà abondante sur les dis- Le lecteur trouvera tous ces rensei-
ciples d'ignace de Loyola, autrement gnements dans ce dernier ouvrage
dit la Compagnie de Jésus et sur l'or- d'Edmond Paris qui vient de paraîte.
ganisation secrète politique catholique
d'une création plus récente
*
l'Opus
:
Michel BARBIER,
Dei.
Dictionnaire de la Vieille France,
C'est un livre abondamment docu-
menté si.ir ce corps de « janissaires Mots et choses d'autrefois traite
comme il les appelle, au service de tous aspects de la vie quotidienne
la papauté à laquelle ses membres ont poids, mesures, monnaies, coutumes,
rendu d'immenses services
institutions, costumes, armes, mobi-
depuis
lier, archéologie, administrations,
l'époque du « jésuitisme « et précise
la part qu'il prit dans les événements moeurs, usages, corporations, occul-
de portée historique et la responsabi- tisme, prix, Droit, outils, ustensiles,
lité de cet ordre dans le déclenche- etc., de l'an 800 à 1848 en France.
ment de deux guerres mondiales. 'lus Québec, Wallonie, Romandie, etc.
spécialement, pour l'histoire de la Documentation auprès de l'auteur
Seconde Guerre mondiale, le chapitre 14, rue Mozart, F 54 TOMBLAINE
sur les événements en Croatie satel- *
lite, ce génocide pareil à celui commis
par Hitler contre les juifs, l'ouvrage Annales Historiques de la Révolution
Française, n 197, juillet-septembre
d'Edmond Paris est d'un très grand
1969 La Franc-Maçonnerie au siècle
:
51
393 C.-H. Chevalier : Maçons écos- Champagne, Région parisienne,
sais du XVIII siècle Picardie, Basse Normandie,
409 J. Servier Utopie et franc-
: Centre, Auvergne, Saint-Domin-
maçonnerie du XVIII siècle gue, Sarre, Espagne.
415 Le Bihan Personnalités et mi-
:
La documentation fournie par ce nu-
lieux sociaux des Maîtres de
méro spécial est fondamentale et sauf
Loge de la Grande Loge de
France
à corriger quelques bévues, surtout
dans les noms propres comme Marnet
425 Loge Etienne Dolet La Franc- :
pour Mornet (p. 375), Mellon pour
Maçonnerie orléanaise du XVIII Mellor (p. 381), Thony pour Thory (p.
siècle 379) ou Mutatis Mutandi (s) p. 399,
433 Mme R. Robin La Loge « La l'apport ne peut être décevant que
Concorde « à l'Orient de Dijon: pour ceux qui ne veulent admettre
447 C. Mesliand Franc-Maçonne-
:
qu'une vérité, la leur.
rie et religion à Avignon au S'il fallait une conclusion en manière
XVlil siècle de synthèse, nous la retiendrions dans
469 J. Bartier Regards sur la l'avant-propos du professeur Saboul.
Franc - Maçonnerie belge du En admettant dans ses loges des
XVIII siècle hommes de classes différentes et par
487 A. Bouton : Dispersion politi- le fait qu'elle constituait une société
que des francs-maçons du de libre discussion, la franc-maçonne-
Maine au printemps 1792 rie fut un élément de dissociation de
I' Ancien Régime «. N'est-ce pas pour
505 6. Barrai Les Francs-Maçons
: cette raison que de tous temps les
grenoblois et la Révolution fran- régimes qui n'ont pas bonne
çaise conscience sont par système, et com-
511 D. Ligon Structures et sym- me par définition, hostiles à l'ordre ?
bolisme maçonniques sous la
Révolution *
525 P. Chevailier : Pierre Thomas
Le Breton et André François Le L'INITIATION
Breton, vénérable du Louis L'abondance des matières a fait diffé-
d'Argent rer notre mention habituelle des der-
529 J. Signoret Un Manuel de
: niers numéros de l'Initiation. Nouvelle
Charbonnerie « à Mâcon, en adresse :6, rue Jean-Bouverie, 92
1751 Boulogne.
533 Bibliographie : Alain Le Bihan, Voici les extraits de son sommaire
Francs-Maçons parisiens.., et qui nous a été demandé
Loges et Chapitres... (compte N 2 (1970)
rendu par Daniel Ligon) L'annonce du nouvel homme par
542 Essai de Bibliographie régio- Louis-Claude de Saint-Martin, par
nale... Bretagne, Pays de la Octave Beliard
Loire, Aquitaine, Midi-Pyrénées. Sur le front de la recherche,
Languedoc, Provence - Côte Raymond Christoflour et La
d'Azur, Rhône-Alpes, Bourgo- drachme perdue «, par Robert
gne, Franche-Comté, Lorraine, Amadou
52
- La voie spirituelle, par Papus Synarchie et arbitrage universel,
- Stanislas de Guaita. par F. Ch. Bar- par Saint-Yves d'Alveydre
let Ordre martiniste :« Le Billet du
- Le Tarot : Etude de la 8 Lame, par Grand Orateur «, par Maurice Gay
Suzy Vandeven Méditations sur la prière, par A.
- Le Désintéressement de la prière, AL.
par Henri Canal Nous avons lu pour vous, par Pierre
- Le Chrétien Johannite devant le Mariel. Serge Hutin et Henry Bac;
monde de la fin des temps, par La tombe de Papus, au Père La-
Jean Phaure chaise
Nous avons lu pour vous, par RA., Pensées de Louis-Claude de Saint
Serge Hutin, Pierre Mariel Martin.
Mon livre vert, par Louis-Claude de *
Saint-Martin
Thierry MAULNIER
Informations martinistes et autres,
par le Dr Philippe Encausse et Gilbert PROUTEAU
Directives, par Sedir. L'honneur d'être juif
N 3 (1970) Cet ouvrage que dans leur dédicace
- Une pensée de Louis-Claude de à la Grande Loge de France les au-
Saint-Martin teurs intitulent Codicille au nouveau
- Goethe initie, par Pierre Mariel Testament « essaie de retracer et d'ex-
- Le Faust de Goethe, par Papus pliquer la prodigieuse aventure du peu-
- Le Tarot ple de la loi (1). Trois noms dominent
Etude de la 9 Lame, par
:
notre siècle et laissent les auteurs rê-
Serge Hutin, Jacqueline Encausse, veurs : Marx, Freud, Einstein. Sans
Pierre Mariel aborder le détail des divers noms ci-
- Piétaille, par Jean Phaure tés, ils en arrivent à croire que le XX0
- Informations martinistes et autres, siècle a été et sera le siècle de la
par le Dr Philippe Encausse Pensée juive.
- Directives, par Sedir. Pour justifier cette hypothèse, ce li-
vre est divisé en deux parties, la pre-
N° 4 (1970) mière intitulée « ce peuple qui empê-
- Constant Chevillon. par Mme Bri- che le monde de dormir signée
caud Thierry Maulnier, est d'une haute élé-
- Pensées de Louis-Claude de Saint- vation spirituelle. Elle essaie de poser
Martin le problème dans son contexte philo-
- Stanislas de Guaita, par Papus sophique et psychologique.
- Ordre martiniste (Documentation) A l'instant où craquent l'une après
l'autre les vieilles servitudes, il reste
- Le Tarot Etude de la 10 et de la ce système de commandement et d'in-
11 Lames, par Suzy Vandeven terdits qui se fait servitude à son tour.
- Nous avons lu pour vous, par Pierre D'où un sentiment complexe fait de
Mariel et Serge Hutin crainte et d'attachement car ce sys-
- Informations niartinistes et autres, tème était un refuge, était le refuge
par le Dr Philippe Encausse. fait de la tentation de la révolte,
N° 1 (nouvelle série 1971)
fait de l'angoisse et de la culpabilité
dans cette révolte même Et Thierry
- Propos sur l'alchimie, par Jean Maulnier constate avec raison :Voi-
Henry là donc e plus conservateur des peu-
- Puissance de l'âme, par Henry Bac: ples, amené à saluer avec joie la re-
Le marquis Alexandre Saint-Vves
d'Alveydre, par Pierre Mariel (1) Ed. Fobert Laffont.
53
mise en question par le monde En citer les titres n'est peut-être
contemporain de tout le contenu de la pas inutile Naissance Rêve d'enfant
:
vie sociale, de la connaissance et de
la culture et à prendre place à l'avant- - Les voiles Marine Adieu à la
garde du mouvement de transforma- mer - Nouvel an Le vieillard et le
tion et de découverte, mais le voilà Paradis La Place Valince Préhis-
en même temps conscient que ce toire Jeunesse Le Phare Hibou
monde finissant, qui était celui de ses Adieu - Rencontre Passion Sympa-
épreuves, était aussi celui de sa per- thie.
manence, de son extraordinaire fidé-
lité à lui-même. De cette dernière fleur, un sonnet,
Certes, tout homme de culture est détachons une pétale
bipolaire issu de sa propre terre en
même temps qu'étranger sur sa pro- Vibrant à 'unisson, les âmes se
pre terre, du passé et de l'avenir, fils comprennent.
et rival du pére, porteur de doute et
de vérité. Mais aucun peuple n'a
«
Un seul regard suffit pour sceller
vécu cette dualité conflictuelle avec l'alliance.
autant d'intensité que le juif.
La deuxième partie est beaucoup Et referme enfin un maillon de la
moins intéressante. Ce n'est qu'un re- chaîne.
portage qui essaie de faire l'histori-
que du rôle que jouèrent les juifs dans A propos du Dictionnaire des Sociétés
les arts et la pensée. secrètes en Occidet.
Un tel ouvrage, inconcevable il y a
quelques décennies, laisse quand mê- En tête d'un Dictionnaire des socié-
me un malaise, C'est malgré tout un tés secrètes en Occident, récemment
racisme, il ne fait que reprendre les
théses juives et antijuives, celles des paru aux éditions du CAL, mon nom
élus, ' sûrs d'eux-mêmes et (peut- figure parmi ceux des « collabora-
être) dominateurs «. Vouloir les juger teurs « de l'ouvrage. Afin d'éviter tout
par rapport à d'autre pensée n'en est malentendu, je tiens à préciser ce qui
pas moins du racisme et il reste une suit
sensation de gêne. Tuer le père est
une nécessité psychologique, décou- J'ai fourni à la rédaction du Dic-
verte de Freud, et qui s'applique à la tionnaire, sur la demande qu'elle avait
civilisation. Dépasser la notion pour un bien voulu m'en faire, une documenta-
universalisme, être fidèle à son pays tion relative à plusieurs sujets qui
et à l'univers, se sentir partie inté- devaient être, et dont certains ont été
grante du cosmos, remettre tout et
toujours en question, n'est-ce pas aus- traités dans le livre.
si une qualité du Franc-Maçon et n'est-
ce pas là l'explication du nombre de Nous étions convenus que la ré-
nos Frères qui ont subi l'influence de daction disposerait librement des élé-
la pensée juive. ments de cette documentation qui lui
sembleraient utiles à son propos.
Georges VIREY,
Ainsi a-t-il été fait,
Vacances, essai poétique,
(Illustrations de Jean Pillet), en vente Ainsi advient-il aussi que ma res-
chez l'auteur à 77 - Ozoir-la-Ferrière, ponsabilité ne se trouve engagée ni
Prix par le texte d'aucun article, ni, natu-
L'absence de table et de pagination rellement, par l'économie de l'ouvrage.
vous imposera de feuilleter cette bro- Paris, le 10 mars 1971.
chure menue et dense. Robert AMADOU.
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