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Ecole Supérieure Polytechnique (E.S.

P) Cours d’Organisation Juridictionnelle et Administration du Travail 2021-2022


Département Gestion Option : Gestion des Ressources Humaines 1

Introduction
Le droit du travail protège principalement le travailleur en raison de sa dépendance ou
subordination juridique à l’autre partie à la relation contractuelle de travail, l’employeur.
La protection du travailleur est recherchée à travers la finalité des règles du droit du travail
(sécurité de l’emploi et des conditions de travail, participation du travail dans son unité de
travail) et le principe fondamental mais non constitutionnel de faveur (primauté, application
exclusive de la règle la plus favorable au travailleur en cas de pluralité de règles applicables).
Elle est également recherchée par la mise en place d’institution, de services, d’organes et de
mécanisme permettant de veiller à son effectivité et formant d’une part l’organisation
juridictionnelle (Chapitre I) et d’autre part l’administration du travail (Chapitre II).

CHAPITRE I : ORGANISATION JURIDICTIONNELLE DU TRAVAIL


L’organisation juridictionnelle du travail désigne l’ensemble des institutions, organes ou
juridictions (cours et tribunaux) investi(e)s de la mission d’appliquer le droit social (droit du
travail et de la sécurité sociale) pour régler les différends du travail et comprenant
nécessairement dans leur composition au moins un magistrat professionnel.
Elle a principalement comme sources au niveau international la Constitution et les conventions
de l’OIT et au niveau national la Constitution du 22 janvier 2001, la loi du 3 novembre 2014
fixant l’organisation judiciaire du Sénégal, la loi du 1er décembre 1997 portant Code du travail,
les lois du 21 juillet 1965 portant Code pénal et Code de procédure pénale modifiées et enfin le
décret du 30 Juillet 1964 portant Code de Procédure civile.
Elle repose sur les principes de l’organisation juridictionnelle en général comme le principe de
la collégialité (prise de décision en formation collégiale, en groupe, en nombre impair, 3 juges
au minimum sauf exception), le principe du double degré de juridiction (possibilité de faire
rejuger une affaire par une juridiction supérieure), le principe de l’unité de juridiction (le
jugement des affaires civiles, pénales et publiques par les mêmes juridictions sous réserve de
certaines exceptions), le principe de la hiérarchie des juridictions (l’existence de juridictions
inférieures ou de premières instance également appelés les tribunaux, et de juridiction
supérieures, les cours), le principe de la gratuité (le non-paiement du service de la justice, de la
rémunération du personnel judiciaire en principe par les parties au litige), le principe de la
continuité du service public de la justice (fonctionnement même pendant les vacances
judiciaires), le principe d’un procès équitable (par des juges neutres et indépendants respectant
le droit de la défense) dans un délai raisonnable (célérité, accessibilité).
A l’instar du droit du travail, droit autonome, comportant à la fois des règles communes et des
règles spécifiques, l’organisation juridictionnelle du travail est en partie de droit commun
(SECTION I) et spécialisée (SECTION II).

SECTION I : ORGANISATION JURIDICTIONNELLE DE DROIT COMMUN


L’organisation juridictionnelle de droit commun s’applique en principe aux relations de travail.
Ainsi, les différends du travail peuvent faire l’objet de règlement par des modes alternatifs,
devant les juridictions grâce au personnel judiciaire de droit commun.

Ousmane MANE Enseignant-Chercheur, FSJP/UCAD ousmane.mane@ucad.edu.sn; mane.ousmane@esp.sn;


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§ I : MODES ALTERNATIFS DE REGLEMENT DES DIFFERENDS DE DROIT


COMMUN
Le droit, conformément à l’adage « un mauvais arrangement vaut mieux qu’un bon procès »,
encourage ou permet en principe à toutes les personnes (physiques ou morales, publiques ou
privées) de régler les litiges, non pas devant les juridictions, mais en dehors de celles-ci par les
modes ou voies extrajudiciaires (alternatifs) de règlement des conflits constitués de l’arbitrage,
de la médiation, de la conciliation, de la transaction et du recours administratif.
L'arbitrage est défini comme le « jugement », la résolution, le règlement d'un litige par une ou
des personnes privées, pas nécessairement des juristes, désignées pour la circonstance et
appelées des arbitres. Il est toujours possible même en droit social mais sur les droits dont les
parties ont la libre disposition (droit d’ordre privé).
Il nécessite une convention d’arbitrage c'est-à-dire l’accord par lequel les parties acceptent de
recourir à l’arbitrage et désignent éventuellement les arbitres.
Cette convention doit être passée par écrit et est dite un compromis si le litige est déjà né et
actuel ou une clause compromissoire si le litige est éventuel, n’est pas encore né au moment de
sa conclusion.
L’arbitrage était le seul mode de règlement et est toujours possible en matière de différends
collectifs de travail.
La médiation est le processus par lequel un tiers dit médiateur (neutre, indépendant, impartial
et de bonne moralité), choisi par l’une ou les deux partie(s), aide ces dernières à trouver elles-
mêmes un accord dit de médiation en soumettant à leur acceptation un projet de solution juste
et équitable en vue de la résolution amiable et ensemble de leur différend.
La conciliation est également le processus par lequel un tiers dit conciliateur (neutre,
indépendant, impartial et de bonne moralité, généralement un juge ou une autorité
administrative) saisi par une partie, aide deux ou plusieurs parties à trouver elles-mêmes un
accord, dit accord de conciliation en les rapprochant à l’appui des propositions et avis en vue
de la résolution, de l’extinction amiable de leur différend.
Elle est possible devant l’inspecteur du travail aussi bien en matière de différends individuels
que collectifs de travail.
La promotion de la médiation et de la conciliation ainsi que le rapprochement de la justice des
justiciables ont motivé la création et le maintien du modèle de justice de proximité composée
des maisons de justice, des bureaux d’accueil et d’orientation et des bureaux d’information du
justiciable.
Les maisons de justice sont créées dans les communes pour permettre d’obtenir un règlement
rapide, gratuit, simple, amiable et discret des litiges par un médiateur-conciliateur
(généralement un ancien magistrat par médiation et conciliation).
Les bureaux d’accueil et d’orientation et les bureaux d’information du justiciable sont mis en
place au sein respectivement des juridictions et au niveau des universités pour rendre effective,
permettre effectivement l’accessibilité à la justice.
La transaction est la convention par laquelle les parties se font des concessions, des
renonciations réciproques pour éteindre un litige actuel ou éventuel. Elle n’implique pas
l’intervention d’une tierce personne.
Le recours administratif (gracieux ou hiérarchique) est le mode de règlement consistant à porter
facultativement ou obligatoirement une contestation (acte administratif litigieux) devant une

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autorité administrative (auteur de l’acte ou son supérieur hiérarchique) en vue de provoquer une
décision préalable (recours administratif préalable) ou de trouver une solution alors même qu’il
existe une décision préalable. Il est le seul recours possible contre la décision de l’inspecteur
du travail en matière de licenciement des délégués du personnel.
Le recours aux juridictions reste cependant le principe. En effet la justice privée est en principe
interdite par le vieil adage « nul ne peut se faire justice soi-même».
Le recours au juge constitue la réalisation du droit au juge consacré comme un droit de l’homme
permettant de recourir à un tribunal pour obtenir la résolution d’une contestation portant sur un
droit ou une liberté et obligeant tout Etat de droit à mettre en place des organes, en principe des
tribunaux ou des juridictions.

§ II : JURIDICTIONS DE DROIT COMMUN


Les juridictions de droit commun sont les juridictions qui connaissent de toutes les affaires à
l’exception de celles que la loi a expressément attribuées à d’autres juridictions.
Elles peuvent par conséquent connaître en matière de travail des contestations que la loi n’a pas
expressément retirées de leur compétence ni attribuées à une autre juridiction ou leur a
expressément attribuées.
Elles sont composées principalement des tribunaux de grande instance auxquels peuvent être
ajoutés les tribunaux d’instance.
En principe, elles statuent, siègent avec des juges exclusivement professionnels, des magistrats
du siège ou juges. C’est ce que l’on appelle l’homogénéité ou la composition homogène.
Elles sont saisies en matière civile par une assignation c’est-à-dire un acte ou exploit d’huissier.
En matière pénale les tribunaux d’instance et les tribunaux de grande instance sont en principe
saisis par le délégué du procureur de la République, le procureur de la République ou encore
par le juge d’instruction.
Ce dernier a pour mission de contrôler, établir, vérifier lors de la phase de l’instance pénale
appelée « instruction » (facultative en matière de délit et obligatoire en matière de crimes),
l’existence d’une infraction et des (charges), griefs suffisant(e)s à l’encontre des personnes
poursuivies pour qu’une juridiction de jugement soit saisie.
Le délégué du procureur et le procureur de la République sont informés par notamment
l’inspecteur du travail et de la sécurité sociale à travers la communication obligatoire du procès-
verbal établis constatant les infractions relevées lors des visites et faisant foi jusqu’à preuve
contraire ou par le délégué du personnel.

I : TRIBUNAUX D’INSTANCE
Les tribunaux d’instance sont institués, établis au niveau des départements en remplacement
des tribunaux départementaux. Ils sont présidés par un magistrat du siège et comprennent
d’autres magistrats du siège dont le nombre varie en fonction de leur classement et en principe
un parquet comprenant un délégué du procureur de la République.
Ils connaissent en matière civile et commerciale en principe de toutes actions personnelles
(relatives aux contrats) ou mobilières (relatives aux meubles) jusqu’au montant de 2 000.000
de francs CFA.
Ils connaissent également des actions relatives au contrat de louage d’immeubles à usage
d’habitation quel que soit le montant du loyer et des actions relatives au contrat de louage (bail)

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à usage professionnel (usage commercial, industriel, artisanal) lorsque le montant du loyer


mensuel est inférieur ou égal à 100 000 francs CFA.
Ainsi par exemple un litige entre travailleurs de différentes entreprises peut être soumis au
tribunal d’instance si la valeur ne dépasse pas 2 000 000 francs. Il en est de même d’une action
en responsabilité civile dirigée par un travailleur contre un tiers (personne qui ne fait pas partie
de l’entreprise et autre que la caisse de sécurité sociale) auteur d’une faute, cause d’accident
de travail ou de maladie professionnelle.
En matière pénale les tribunaux d’instance connaissent en premier ressort en principe de tous
les faits qualifiés de contravention (infraction punie d’un emprisonnement allant d’un jour à un
mois ou d‘une amende de 200 à 20.000 FCFA). Ils sont alors appelés des tribunaux de simple
police.
La violation de certaines dispositions du Code du travail, du code de la sécurité sociale est
expressément considérée comme une contravention par notamment le décret du 22 janvier
1962. Il en est ainsi par exemple de l’omission du visa à la conclusion du contrat de travail
nécessitant l’installation du travailleur hors de sa résidence habituelle, de la constitution d’un
syndicat pour un objet autre que l’étude et la défense des intérêts des membres.
Les tribunaux d’instance connaissent exceptionnellement des délits (infractions punies d’une
amende supérieure à 20 000 francs CFA ou d’un emprisonnement supérieur à un mois) pour
lesquels la loi leur a donné compétence comme par exemple la violation d’une interdiction de
séjour, la provocation à un attroupement non armé, les coups et blessures volontaires
n’entraînant pas plus de 20 jours d’incapacité, le vol simple.
Les décisions des tribunaux d’instance sont des jugements soit en premier ressort (avec
possibilité d’appel) s’ils sont rendus en matière civile, commerciale pour des actions
personnelles ou mobilières d’un montant excédant 300.000 de francs CFA, en matière de
contrat de louage et en matière pénale quel que soit leur montant, soit en dernier ressort (avec
possibilité de recours ou pourvoi en cassation seulement, sans appel possible) s’ils sont rendus
en matière civile, commerciale pour des actions mobilières et personnelles d’un montant
n’excédant pas 300 000 francs.
L’appel est interjeté devant les tribunaux de grande instance en matière civile et devant les
Cours d’appel en matière pénale tandis que le pourvoi est formé devant la chambre civile et
commerciale de la Cour suprême (exceptionnellement devant la Cour Commune de Justice et
d’Arbitrage de l’OHADA).

II : TRIBUNAUX DE GRANDE INSTANCE


Les tribunaux de grande instance sont institués, établis dans les régions et dans certains
départements (Pikine-Guédiawaye, Mbour, Rufisque, Tivaouane).
Ils comportent chacune une chambre criminelle, une formation de référé (possibilité d’autres
chambres et des sections), un personnel magistrat réparti entre le siège (le président, le vice-
président, les juges d’instruction, les autres juges) et le parquet (représenté par le Procureur de
la République assisté de ses substituts).
Les tribunaux de grande instance sont juges de droit commun en première instance en toutes
matières. En d’autres termes, ils ont une compétence générale, connaissent en matière civile,
pénale et administrative de l’ensemble des matières à l’exception de celles qui sont
spécialement attribuées aux autres juridictions en premier et dernier ressort (exemple : Cour

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suprême, cours d’appel) ou en premier ressort (exemple : tribunaux du travail, tribunaux de


commerce, tribunaux d’instance et organismes administratifs à caractère juridictionnel).
En matière civile et commerciale, ils connaissent des contestations immobilières (quel que soit
le montant), des actions personnelles (relatives aux contrats) ou mobilières (relatives aux
meubles) dont le montant ou la valeur excède 2 000.000 de francs CFA et des actions relatives
au contrat de louage (bail) à usage professionnel (usage commercial, industriel, artisanal)
lorsque le montant du loyer mensuel est supérieur à 100 000 francs CFA.
En matière sociale, ils ont également compétence pour connaître des contestations entre
employeurs et travailleurs que la loi n’a pas attribuées à une autre juridiction ou lui a
expressément attribuées. Ainsi, ils connaissent en principe, peuvent être saisis par voie d’action
et en première instance, des contestations de la validité ou de l’application des conventions
collectives, du règlement intérieur, du syndicat, de la représentativité syndicale (élection,
décision de l’employeur ou du ministre), des litiges entre un syndicat et ses membres, du recours
des personnes déclarées incapables d’occuper des fonctions de dirigeant syndical par le
procureur de la République, du recours de ce dernier (procureur de la république) en dissolution
d’un syndicat, de l’inéligibilité ou de l’interdiction de l’employeur (pendant 2 ans à la requête
du Ministre du travail) pour cause de lock-out illicite et de manière générale des différends
collectifs de travail.
En matière pénale, ils connaissent de tous les délits autres que ceux qui sont spécialement
attribués aux autres juridictions. Ils sont alors appelés des tribunaux correctionnels.
Les tribunaux de grande instance plus précisément leurs chambres criminelles, ont également
plénitude de juridiction, une pleine compétence, pour juger en premier ressort les personnes
renvoyées par soit une ordonnance du juge d’instruction, soit un arrêt de la chambre
d’accusation (cour d’appel) pour des infractions qualifiées crimes (infraction punie par la loi
d’une peine criminelle comme par exemple la peine de mort, la réclusion criminelle à temps ou
à perpétuité, la détention criminelle, la dégradation civique) et toutes infractions connexes.
Les infractions pénales constituées par la violation des règles du droit social, qualifiées délit
par notamment le Code du travail et Code de la sécurité sociale et les infractions qualifiées délit
ou crime de droit commun (vol, coups et blessures, meurtre, détournement, corruption, faux et
usage de faux) survenues dans les relations de travail sont également de la compétence des
tribunaux de grande instance ou de leur chambre criminelle. Il en est ainsi par exemple des
délits commis à la formation du contrat de travail, de la violation de l’interdiction du travail
forcé, du paiement du salaire en alcool, de l’entrave à la désignation, à l’exercice du mandat de
délégué du personnel, du refus de déférer à l’ordre de réquisition, de l’occupation des lieux de
travail par les travailleurs grévistes, de la fausse déclaration d’accident du travail ou de maladie
professionnelle, du non versement de cotisations sociales ou du prélèvement des cotisations à
la caisse de sécurité sociale, de l’action du syndicat pour la défense des intérêts professionnels,
de la responsabilité pénale du chef d’entreprise du fait des travailleurs.
L’ensemble du contentieux administratif et fiscal relève en principe de la compétence des
tribunaux de grande instance à l’exception des recours en matière électorale et du recours pour
excès de pouvoir réservés respectivement aux Cours d’appel et à la Cour suprême.
Les tribunaux de grande instance rendent aussi des jugements en premier ressort, susceptibles
d’appel devant la chambre civile et commerciale, la chambre correctionnelle, la chambre
administrative ou la chambre criminelle de l’une des six cours d’appel (Dakar, Thiès, Saint-

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Louis, Kaolack, Ziguinchor et Tambacounda) du Sénégal en principe saisies par assignation en


principe.
Les arrêts de la Cour d’appel peuvent faire l’objet d’un pourvoi (recours en cassation) devant
les chambres civiles et commerciales (2), pénales (2) ou administratives (2) de la Cour suprême
(Dakar) et parfois devant la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA (Abidjan)
également saisies en principe par assignation.
Le délai d’appel ou de pourvoi en cassation est en principe de 1 mois.
Les cours d’appel, comme les tribunaux d’instance et les tribunaux de grande instance, existant
en plusieurs, en nombre, exercent leur compétence matérielle dans un espace, une partie du
territoire appelé(e) compétence territoriale.
La compétence territoriale également appelée la compétence rationae loci ou le ressort est donc
l’aptitude d’une juridiction à connaître d’une affaire déterminée par des critères géographiques,
en fonction du lieu, de l’espace (territoire d’au moins une commune, un département ou une
région) quelle que soit la matière du litige.
Elle est en principe, normalement déterminée pour chacune de ces juridictions par le domicile
du défendeur. En d’autres termes, chacune de ces juridictions compétentes est, sauf dispositions
contraires, celle du lieu du domicile du défendeur.
Mais la compétence territoriale de chacune de ces juridictions est spécialement déterminée par
le lieu de situation du bien immobilier (en matière immobilière), le lieu du domicile ou de la
résidence de l’épouse (en matière de mariage) ou le lieu choisi par les parties contractantes (en
matière de contrat). Ainsi le tribunal pour enfants territorialement compétent est celui du lieu
de commission de l’infraction, de résidence ou de placement du mineur ou encore du domicile
de ses parents.
En principe, la compétence matérielle a un caractère d’ordre public, impératif tandis que la
compétence territoriale a un caractère d’ordre privé, supplétif.

§ III : PERSONNEL JUDICITIAIRE DE DROIT COMMUN


L’organisation judiciaire repose sur un personnel, dit personnel judiciaire composé des
magistrats et des auxiliaires de justice.
Les magistrats sont des fonctionnaires recrutés en principe par voie de concours ouvert aux
titulaires de Maitrise en droit ou d’un diplôme admis en équivalence (Master en droit), formés
au Centre de Formation Judiciaire (CFJ), Cycle A, pendant deux ans pour rendre la justice,
nommés par le Président de la République et répartis en deux grandes catégories : le siège et le
parquet.
Les magistrats du siège également appelés les magistrats assis ou les juges magistrats
(conseillers ou auditeurs dans certaines juridictions comme les cours d’appel, la cour suprême)
sont les Présidents, les Vice-Présidents, les juges d’instruction et les juges des cours et
tribunaux.
Ils ont pour mission de juger (trancher) ou d’instruire (contrôler, établir, vérifier l’existence
d’une infraction et de charges, griefs suffisant(e)s à l’encontre des personnes poursuivies pour
qu’une juridiction de jugement soit saisie) les affaires portées à la connaissance de leur
juridiction. Ils sont indépendants. Autrement dit, ils ne sont soumis qu’à l’autorité de la loi.

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Leur indépendance est garantie par des principes comme le principe de l’inamovibilité qui
signifie que les magistrats du siège ne peuvent pas recevoir une affectation nouvelle, même par
voie d’avancement, sans leur consentement préalable.
Ce principe souffre néanmoins d’exceptions. Ainsi, les magistrats du siège peuvent être
déplacés exceptionnellement sans leur consentement lorsque les nécessités du service l’exigent
(dans l’intérêt du service) par le Président mais temporairement ou d’office en matière
disciplinaire.
Les magistrats du parquet appelés aussi les magistrats debout, les représentants du Ministère
public ou les magistrats non juges sont par contre les délégués, les adjoints, les substituts, les
procureurs de la République, les procureurs spéciaux ou généraux, les substituts généraux et les
avocats généraux.
Ils ont pour mission de défendre l’ordre public, l’intérêt général de la société par la recherche
des infractions, la constitution des preuves, la mise des délinquants à la disposition de la justice
pour être jugés.
Ils ne sont pas indépendants et sont exclus notamment du principe de l’inamovibilité. Autrement
dit, ils sont soumis, placés, comme tous les fonctionnaires, à leur hiérarchie, à la direction et au
contrôle de leurs chefs hiérarchiques (procureur de la République, procureur général de la cour
d’appel, procureur général de la Cour suprême) et à l’autorité du Ministre de la justice (en
l’occurrence) qui peut leur donner des ordres, les affecter d’une juridiction à une autre d’office,
dans l’intérêt du service en principe.
Les auxiliaires de justice sont des personnes, fonctionnaires ou non fonctionnaires, appelées à
apporter leur concours aux juges ou aux parties.
Ils comprennent notamment les greffiers, les administrateurs de greffe, les huissiers de justice,
et les avocats.
Les greffiers et les administrateurs de greffe sont des fonctionnaires également recrutés en
principe par voie de concours ouvert aux titulaires de la licence (CFJ, Cycle B pour les greffiers)
ou de la maitrise en droit (CFJ, Cycle A, pour les administrateurs), formés pendant deux ans au
Centre de Formation Judiciaire et nommés par le Président de la République.
Ils apportent leur concours aux juridictions et aux juges à travers notamment la gestion des
ressources budgétaires et humaines (administrateurs de greffe), la tenue de la plume, la
conservation et la délivrance des décisions de justice (greffiers).
Les huissiers de justice sont juridiquement des professionnels indépendants (pas des
fonctionnaires), recrutés par concours ouvert aux titulaires de la maîtrise (Master) en sciences
juridiques, soumis à un stage de deux ans en principe, nommés par décret.
Ils sont titulaires d’une « charge, d’un office » (établissement public industriel ou commercial)
c’est-à-dire investis par l’autorité publique d’une mission de service public et payé par la
clientèle sous forme d’honoraires fixés par décret.
Ils ont le monopole, sont en principe les seuls habilités à dresser et signifier tous actes et
exploits, exécuter les décisions de justice ainsi que tout autre acte ou titre en forme exécutoire,
dresser procès-verbal de constat, dresser à toute heure, les jours fériés et ouvrables, procès-
verbal de constat de dommages matériel résultant d’accident de circulation.
Les avocats sont en principe recrutés par un examen ouvert aux titulaires de la maitrise en droit
ou d’un diplôme admis en équivalence et un stage de 3 ans sanctionné par un Certificat
d’Aptitude à la Profession d’Avocat (CAPA).

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Ils apportent leur concours aux parties par leur qualité exclusive pour plaider (exposer
oralement l’une des thèses en présence à la barre), postuler (accomplir au nom d’un plaideur,
les actes ordinaires de la procédure, remplir les formalités nécessitées par le procès) ou
représenter en toutes matières devant les juridictions, organismes juridictionnels ou
disciplinaires, sauf dispositions particulières prévues par la loi.
L’application du droit du travail ne relève pas du seul contrôle des juridictions de droit commun.
Elle est également de la compétence des juridictions spécialisées.

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