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Cours d'Histoire et de Géographie / Secondaire 4

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Cours d'Histoire et de Géographie / Secondaire 4

Chapitre I

HAITI DE 1915 À 1941

Le 28 juillet 1915 débute l’occupation du territoire haïtien par les américains. Les présidents
Sudre Dartiguenave et Louis Borno vont à leur manière collaborer avec eux entre 1915 et 1930.

Des réactions diverses des patriotes haïtiens, obligent l’administration américaine à déléguer en
Haïti, une commission d’enquête. Elle conclut à la nécessaire évacuation du territoire qui sera effective
sous la présidence de Sténio Vincent.

Installé en 1930, celui-ci garde le pouvoir pendant 11 ans. Au-delà du recouvrement de


l’indépendance, son gouvernement est marqué par une certaine prospérité économique. Toutefois, il va
perdre le support de la population pour sa dictature et la question du massacre de 1937.

Incapable de prendre un troisième mandat, il abandonne le pouvoir en avril 1941, après l’élection
de Lescot par l’Assemblée Nationale.

1- A LA BOTTE DE L’OCCUPANT (1915-1930)


A la fin du XIXe siècle, les Etats-Unis affirment un intérêt stratégique important pour la Caraïbe :
la région est considérée comme indispensable pour le contrôle des circuits commerciaux en direction
de l’Amérique du Sud et pour la défense du continent nord-américain. En 1898, deux des pays des
Grandes Antilles sont militairement occupés par les américains : Porto Rico et Cuba. En Haïti, les Etats-
Unis, se heurtent à des intérêts commerciaux et bancaires allemands et français relativement
importants. Mais, faisant pression sur le président Antoine, ils obtiennent entre 1910 et 1911 ; des
contrats pour la construction des voies ferrées… et 20% du capital constitutif de la Banque Nationale de
la République d’Haïti. Ils ont désormais les moyens de contrôler la vie économique du pays.
Dans le même temps, la situation politique se détériore de jour en jour. Les émeutes paysannes
quasi permanentes mettent en place et chassent des présidents de plus en plus éphémères dont le
dernier Guillaume Sam sera lynché par la foule le 27 juillet 1915 après avoir donné l’ordre de
massacrer 173 prisonniers politiques.
Dans l’après-midi du 28 juillet 1915, les marines américains débarquent à Bizoton. Ils vont rester
dix-neuf ans (1915-1934), mais pas sans la collaboration des dirigeants de l’époque.

TEXTE I
Au XIXe siècle et au début du XXe siècle, les principaux partenaires commerciaux d’Haïti sont
européens. D’ailleurs, la Banque Nationale d’Haïti est une institution française ayant son siège principal à
Paris. A ce cahier des charges vient s’ajouter l’Affaire Baez.
Dès lors, il fallait rappeler à l’ordre et surtout châtier cette turbulente Haïti. Mais comment y
parvenir ? Les Etats-Unis d’Amérique sont avant tout une Nation civilisée. C’est la Patrie de Thomas
Jefferson, rédacteur de la Déclaration de l’indépendance américaine, document juridique fondé sur les
droits inaliénables des peuples à disposer d’eux-mêmes. Aussi, faut-il de justes motifs pour occuper
militairement un pays souverain.
A ce compte, les américains ont longtemps évoqué les incursions trop répétées des navires de
guerre européens dans les américaines (Affaire Batsch Affaire Luders…). Mais ce n’était pas suffisant. Les
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évènements qui se déroulaient à Port-au-Prince et à travers le pays les 26, 27 et 28 juillet 1915 (massacre
des prisonniers politiques, violation de la légation de France, assassinat du président Vilbrun Guillaume
Sam) constitueront la goutte d’eau qui fera déverser le vase.
En effet, dans l’après-midi du 28 juillet 1915, pour garantir la protection des vies et des biens,
disent-ils, les marines au nombre de 330 ont débarqué à Bizoton du navire «amiral Washington», sous les
ordres du Vice-amiral, William B. Caperton, commandant de l’escadre des Croiseurs de la Flotte
américaine de l’Atlantique. Leurs premiers furent de dissoudre le comité révolutionnaire de Port-au-
Prince qui faisait office du pouvoir exécutif. Le sénateur Philippe Sudre Dartiguenave, fut préféré à son
rival nationaliste intransigeant Rosalvo Bobo et placé à la tête de l’Etat.
Les Etats-Unis d’Amérique ne reconnurent le gouvernement de Dartiguenave qu’après avoir
obtenu le contrôle des Finances du pays, des Douanes, des Travaux Publiques, du Service d’Hygiène et
l’Organisation d’une Force de Police locale sous le commandement de la Navy.
Par l’adoption de la Convention Haïtiano-américaine de 1919, l’Etat d’Haïti devient vassal du
président des Etats-Unis d’Amérique
Ainsi donc, pendant dix-neuf ans, les américains ont tenu dans les fers tous les patriotes dignes de
ce nom. Et la Bannière Etoilée, malgré tout ce qu’elle représentait et représente encore aujourd’hui,
demeura silencieusement devant toutes les atrocités que les siens commirent au nom de la liberté.
Lafontaine JOSEPH, le Drapeau Symbole de la Patrie, Collection l’Humanisme1992, page 20.

A. Sudre Dartiguenave (1915-1922)


Accédé au pouvoir le 12 août 1915 avec le support du Département d’Etat, Sudre Dartiguenave
acceptera de faire le jeu des américains. L’acceptation de la Convention, la dissolution de l’armée et du
parlement, l’adoption de la constitution de 1918, sont parmi d’autres, des actes visant à renforcer la
position américaine en Haïti. Mais parfois, le président Dartiguenave fait preuve de réticence face à
certains agissements des yankees qui n’hésitent pas à utiliser le chantage comme moyen d’aboutir à
leurs fins.
Abandonné par les Etats-Unis, il quitte le pouvoir le 15 mai 1922, à la suite d’une série de
mouvements dirigés par l’opposition nationaliste. Il est remplacé par Louis Borno qui va être le fidèle
serviteur de l’occupant.

TEXTE II
Elu sous la protection sinon à l’instigation de l’armée américaine, le président Sudre Dartiguenave
est vite confronté aux réalités d’occupation américaine. Le président et les secrétaires d’Etats doivent
d’abord signer une convention qui implique le contrôle financier du pays, le renvoi de l’armée haïtienne et
la présence des forces américaines sur le territoire pendant dix ans. Cette première exigence fait éclater le
robinet ministériel et provoque une crise tant avec le parlement qu’avec les forces d’occupation. La
convention est finalement signée en août 1915. Dartiguenave renvoie deux fois, en 1916 et en 1917, le
parlement qui refuse d’adopter une constitution taillée sur mesure par le Département d’Etat, et
gouvernera avec le seul appui législatif d’un conseil d’Etat. *…+ Si la gendarmerie se met en place, si de
nombreuses réformes administratives se réalisent, si on peut parler de stabilité politique certaine (c’est la
première fois depuis Tirésias Simon Sam qu’un président finit son mandat), le développement
économique ne suit pas, seul le campêche permet à l’économie de souffler un peu. *…+ Certaines
initiatives échouent lamentablement, notamment le rétablissement de la corvée entre 1916 et 1918 qui
sont une source d’abus et de corruption sans précédent pour les magistrats communaux.

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B. Louis Borno (1922-1930)


Comme Sudre Dartiguenave, Louis Borno a eu l’appui des américains pour accéder à la
présidence du Pays. Son élection étant non conforme à la constitution, est validée par John Russel, le
Haut Commissaire des Etats-Unis qui espère du nouveau président une collaboration sincère et franche.
Une attente qui sera comblée car, Borno ne sera rétif aux mesures de consolidation de la présence
américaine en Haïti. Ses initiatives seront propres à satisfaire l’attente du Département d’Etat : Emprunt
de 40 millions de dollars aux Etats-Unis dont l’objectif premier serait de divorcer avec les créanciers
européens, transfert de la Banque Nationale à la Nationale City Bank de New-York, loi du 22
septembre permettant à l’Etat d’affermer les terres du domaine public à des entreprises américaines,
amendement de la constitution d 1918 permettant aux agents administratifs américains de prendre en
charge directe des services qui leur échappent…
Le président Borno quitte le pouvoir le 15 mai 1930. Deux évènements marquent la fin de son
gouvernement. La grève des étudiants de Damien et le soulèvement des paysans du Sud. Ceux-ci sont le
corollaire d’une série de réactions armées et intellectuelles des patriotes haïtiens.

- Réactions patriotiques
Le débarquement américain en Haïti provoque en premier lieu la réaction armée du soldat Pierre
Sully, le jour même de l’arrivée des marines, qui en est mort. Puis, c’est le Dr Rosalvo Bobo qui proteste
contre l’occupation dans une lettre ouverte en date du 8 septembre 1915 adressée au président
américain. Le 18 novembre 1915, il soulève ses cacos qui subissent une défaite sanglante à Fort-Rivière.
Entre-temps, le député Raymond Cabèche refuse de signer la convention proposée par les américains. Il
la qualifie de « protectorat imposé à Haïti par M. Wilson ».
Le 5 janvier 1916, Antoine Pierre Paul et le général Joseph Misaël Codio organisent le premier
mouvement armé d’envergure contre l’occupation. Après leur prise d’armes, ce sont les paysans cacos
ayant à leur tête Charlemagne Péralte et Benoit Batraville qui opposent une résistance armée aux
américains. Quand les cacos seront vaincus, le flambeau de la lutte sera repris par les cacos de la plume
avec l’Union Patriotique, sous la direction de Georges Sylvain, Elie Guérin, Perceval Thoby, Pauléus
Sanon, Joseph Jolibois Fils etc. Ces réactions culminent en la grève des étudiants de Damien.
C’est alors que le 6 décembre 1929, des paysans du Sud, voulant se rendre aux Cayes pour
exprimer leur mécontentement contre les taxes et contre l’occupant, sont mitraillés par des soldats
américains à Marchaterre. On relèvera 22 morts et 51 blessés.
Une commission d’enquête (la commission Forbes) recommande le départ des marines qui
quitteront le pays sous le gouvernement de Sténio Vincent.

TEXTE III
Si Dartiguenave a illustré la collaboration honteuse et réticente avec l’occupant, Borno veux
incarner « la collaboration franche et loyale ». Pendant huit ans, il va gouverner en bonne intelligence
avec John H. Russell, haut-commissaire du gouvernement américain en Haïti. Le travail du gouvernement
bicéphale est appréciable.
L’assainissement des finances publiques haïtiennes avait été l’une des justifications de
l’intervention américaine. Borno-Russell, par le biais d’un prêt de 40 millions de dollars, liquident la dette
intérieure, repaient a dette contractée par le gouvernement Simon auprès des français en 1910, satisfont
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les réclamations étrangères qui se sont acculées au cours des 20 dernières années, reprennent les
paiements à la compagnie nationale des chemins de fer de Roger Farnham. *…+ Le duo travaille aussi à
changer la structure des revenus de l’Etat et créer une fiscalité interne d’un rapport au moins aussi
important que les recettes douanières. Cette nouvelle fiscalité sera mal perçue, notamment la taxe sur
l’alcool et le tabac introduite en 1929 et qui provoquera des remous importants chez les notables de
province et les opposants politiques*…+ Avec l’avènement de Louis Borno, on assiste donc à un
mouvement général de réforme qui se poursuivra pendant ses huit années de gouvernement. Il s’agit de
la consolidation du nouveau régime dont témoignent la mise en place de nouveaux organismes
administratifs et l’introduction de nouvelles pratiques de gestion, toutes choses qui facilitent la
pénétration américaine dans les rouages de l’Etat haïtien.

2- LE DERNIER COLLABORATUER (1930-1941) ?


Installé le 18 novembre 1930, le président Sténio Vincent marque la transition entre l’occupation
américaine et l’indépendance recouvrée.
Durant les premiers mois de son administration, Vincent revient à la politique de collaboration
de ses prédécesseurs. Mais à partir de 1931, débute le processus d’évacuation des troupes américaines.
L’opération commence le 1er août 1931 et se terminera le 21 août 1934. Cette date ne marque que la fin
de l’occupation physique du territoire, car les américains vont continuer à contrôler la vie politique et
économique du pays.
Sous le gouvernement de Vincent, le pays connait une certaine prospérité économique marquée
par l’essor de la banane, du sisal et le démarrage de la construction immobilière à Port-au-Prince et à
Pétion-ville. Par ailleurs, c’est le début du tourisme de croisière.
Cependant, en octobre 1937, plus de 20.000 haïtiens sont massacrés par les dominicains. Ce
dossier étant mal géré par le président Vincent, suscitera le mécontentement de la population haïtienne.
A ce problème vient s’ajouter son désir de s’octroyer un troisième mandat, après avoir établi un régime
de pouvoir personne (constitution de 1935). Ses manœuvres ne font que raviver la colère du peuple qui
réclamera son départ.
En avril 1941, sous la pression des Etats-Unis et de la République dominicaine, il fait désigner Elie
Lescot pour son successeur.

TEXTE IV
La plate-forme électorale de Vincent a été la libération. Le président Vincent tient la promesse du
Candidat Vincent. En quatre ans, il orchestre l’haïtianisation des institutions publiques.
Dès le départ, les relations avec le parlement sont tendues. Les parlementaires veulent changer la
constitution pour prolonger leur mandat de trois ans. Véto présidentiel. Le premier cabinet est poussé à la
démission. Les points de conflits sont nombreux : l’haïtianisation trop lente au gré des parlementaires, le
droit pour l’exécutif de faire des décrets pendant les vacances parlementaires, le droit pour le parlement
de blâmer les ministres, le refus des parlementaires de ratifier le rachat de la BRNH et de faire un contrat
de production et d’exportation de la figue-banane avec la Standard Fruit.
*…+ Le gouverneur Vincent réalise à travers le pays un vaste programme de travaux publics qui a
laissé ses traces dans le paysage jusqu’à aujourd’hui : Ecoles, systèmes d’irrigation, églises, casernes,
bibliothèques, ponts.

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*…+ Vincent opère un changement constitutionnel en 1932, pour revenir aux principes politiques
d’avant 1915, nouveau changement en 1935 pour instaurer sans complexe la dictature : la séparation des
trois pouvoirs est supprimée, le président de la République, « personnification de la Nation », est élu au
suffrage universel direct, peut renvoyer les chambres et désigner directement dix Sénateurs sur vingt et
un. Le mandat de Vincent est prolongé de cinq ans.

TEXTE V
Aussi surprenant que cela puisse paraît, Haïti et sa voisine, la République dominicaine,
vivaient en bonne intelligence, leurs relations semblaient même assez cordiales au moment où
survint le massacre du 2 octobre 1937. […] Les rencontres entre les chefs d’Etats des deux
pays s’étaient multipliées depuis 1933, et les accords qu’ils avaient signés sur la question des
frontières pouvaient être considérés comme un succès diplomatique exceptionnel. Pour un
observateur plus attentif, cependant, la situation était beaucoup moins rose qu’elle pouvait le
paraître. […] Trujillo regardait avec inquiétude ce qu’il appelait l’haïtianisation progressive de sa
région frontalière où s’introduisaient des hordes de paysans haïtiens qu’il accusait de n’être rien
d’autre que des maraudeurs, des voleurs e bœufs.

Depuis longtemps, les petits commerçants dominicains se prétendaient lésés par


l’intense contrebande de produits manufacturés d’origine française et de denrées vivrières qui
se pratiquait sur la frontière entre les deux pays. Ces idées étaient reprises par d’influents
intellectuels dominicains qui s’en prenaient régulièrement à la mollesse de leurs dirigeants
politiques et proposaient rien de moins que la désafricanisation des régions frontalières. Selon la
propagande officielle du gouvernement de Trujillo, la République dominicaine subissait l’invasion
silencieuse de la paysannerie haïtienne. […]

Le samedi 2 octobre 1937, le président Raphael Leonidas Trujillo Molina, en tournée


officielle de Dajabon, déclarait dans une harangue enflammée prononcée devant la foule venue
l’accueillir : « Aux dominicains qui se plaignent des déprédations de la part des haïtiens qui
vivent parmi eux, je réponds : nous règlerons cette affaire ! Environ trois cents haïtiens ont été
tués à Banica. Et nous devons continuer à résoudre ce problème ». Ce sont donc en des termes
passablement provocateurs que Trujillo annonçait ses intentions, approuvait publiquement la
« Corte », ordonnait le massacre des haïtiens. Dans la nuit même du 2 octobre1937, commença
dans la région de Dajabon un massacre d’haïtiens qui dura jusqu’au matin du surlendemain.
Pour tuer les haïtiens, les soldats dominicains reçurent l’ordre formel de Trujillo de ne pas les
assassiner qu’à l’arme blanche. Les meurtriers utiliseront donc des haches, des poignards, des
baïonnettes mais surtout des machettes, afin de tromper l’opinion et les éventuels enquêteurs
étrangers, en faisant croire qu’il s’agissait d’une tuerie spontanément organisée par des paysans
dominicains en révolte contre les voleurs de bœufs haïtiens dont ils n’auraient que longtemps
toléré les actes de banditisme. Personne ne fut épargné. Avec une méchanceté démonique, les
soldats égorgèrent indistinctement les hommes, les femmes et les enfants qu’ils rencontraient
sur leur chemin. […]

Bien que l’évaluation du nombre exacte des victimes de ce carnage soit bien difficile à
établir, les observateurs les plus crédibles s’accordent habituellement autour du chiffre de vingt
mille morts qui leur semble assez juste et nullement exagéré […]
Dupuy CHARLES, Nouvelliste,
2013.
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Questions de révision
1- Quelles sont les causes de l'occupation du territoire haïtien par les américains?
2- Comment Sudre Dartiguenave et Louis Borno avaient-ils participé à la consolidation de la présence
américaine en Haïti?
3- Souligne les différentes réactions haïtiennes à l'occupation américaine.
4- Fais le bilan du gouvernement de Sténio Vincent.

Chapitre II

GOUVERNEMENT DE LESCOT (1941 - 1946)

1- QUI EST ELIE LESCOT?


Antoine Léocardie Elie Lescot est né à Saint-Louis du Nord, le 9 décembre 1883. Il est fils du
ferblantier Ovide Julien et de Florélia Catherine Laforest. IL a fait ses études classiques au Lycée Philippe
Guerrier du Cap Haïtien. Boursier du gouvernement d'Alexis Nord, il fait à Port-au-Prince, des études de
pharmacie qu'il ne termine pas, puis des études de droit à l'Ecole libre de droit du Cap.
De couleur griffe, Lescot est un homme sans complexe et très sympathique. Durant sa
présidence, il n'est pas rare de le voir se rendre au cinéma où il serre les mains autour de lui, se mêle aux
genres ordinaires, rit avec eux et répand sa bonne humeur inaltérable. Mais, cela n'empêche pas qu'il soit
un mulâtrophile.
Il semble que Lescot débute sa carrière professionnelle comme interprète à la douane de Port-
de-Paix. En 1915, il remplace monsieur Théodule Saindoux, dans ses fonctions de Directeur de l'école
Secondaire de Port-de-Paix. Il occupe presque tous les postes judiciaires du pays: juge au tribunal de
première instance de Port-de-Paix, juge d'instruction près le tribunal civil de Port-au-Prince, juge au
tribunal de cassation, secrétaire d'Etat de la justice, etc. Sténio Vincent lui confie le poste de ministre
plénipotentiaire à Santo-Domingo en 1934 et à Washington, en 1937. En 1941, il accède à la première
magistrature de l'Etat, après avoir passé quatre mois comme sénateur de l'Ouest.
Lescot dirige le pays pendant cinq (5) ans (1941-1946). Il respecte scrupuleusement les deniers de
l'Etat haïtien. A son départ pour l'exile, il n'a que l'argent nécessaire au transport de la famille et à ses
premiers jours sur la terre étrangère. Il ne possède qu'un seul bien, le manoir des lauriers. Et il est
hypothèque avec la Banque Nationale, pour la somme de 20 000 dollars. Ce fait inhabituel en Haïti, est
qualifié par les croches, de piyay Lescot.
Il est expiré à Laboule (Haïti), le 20 octobre 1974, à 91 ans.

2- CONTEXTE DE SON ACCESSION AU POUVOIR.


Lescot accédait à la présidence du pays, avec l'appui des Etats-Unis et de la République
dominicaine.
Durant l'occupation, les présidents qui dirigeaient le pays ont été choisis en fonctions des intérêts
de la bannière étoilée. Ainsi, sous la pression du département d'Etat, l'Assemblée Nationale laissait
tomber le Dr Rosalvo Bobo (parce que nationaliste) et choisissait Sudre Dartiguenave comme président
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de la République. L'élection de Borno a été validée par le général John Russel, le haut commissaire des
Etats-Unis, en dépit de son inconstitutionnalité. Sténio Vincent, élu président par l'assemblée nationale à
majorité nationaliste, se mettra très tôt au service de l'occupant.
La désoccupation n'a pas mis fin à la vassalisation des institutions étatiques d'Haïti par les Etats-
Unis. Tout aspirant à la présidence du pays, dans le contexte post-occupation, devait avoir l'aval de
l'Oncle Sam. Elie Lescot souhaitant succéder à Vincent, parvenait à convaincre Washington, sur sa
disponibilité et sur sa franche collaboration. Le président Roosevelt suggèrera à Vincent de quitter le
pouvoir et de désigner l'ambassadeur Lescot, pour lui remplacer à la présidence du pays.
Rafael Léonidas Trujillo soutenait aussi, la démarche d'Elie Lescot. Lorsque Vincent manifestait le
désir de briguer un troisième mandat, il mettait tout son poids dans la balance, pour l'empêcher d'y
arriver et faciliter par le chantage, la montée de Lescot au pouvoir. Il menaçait de rendre publique, une
lettre compromettante que Vincent lui avait adressé et que tenait Lescot. Sous la menace de cette
révélation scandaleuse, et sous la pression de Washington, le président Vincent se voit obligé de
renoncer à son projet de rester au pouvoir; et de choisir Lescot pour successeur. le 15 avril 1941,
l'Assemblée Nationale, constituée majoritairement de vincentistes, le nomme président de la République
pour un mandat de cinq ans. Ainsi, avait-il raison de Jean Price Mars, Timothée Paret et Amilcar Duval qui
se portait aussi candidats devant l'Assemblée Nationale.

3- CARACTERISTISQUES DU REGIME : DESPOTISME, MULATRISME ET NEPOTISME

A-Despotisme
Le despotisme de Lescot se manifestait dès le début de son mandat. Par un arrêté en date du 5
juin 1941, il prenait le commandement effectif de toutes les forces armées de terre et de mer de la
République, créait le bureau d'information à la presse (BIP) et plaçait sous son contrôle personnel; la
Garde et du Palais et la Direction de Police de Port-au-Prince. Le 8 décembre 1841, il décrétait l'Etat de
Siège, qui habilitait l'autorité militaire à avoir le contrôle de toutes les activités nationales. Le 23 janvier
1942, il suspendait les garanties constitutionnelles et s'accordait le privilège de diriger par décret. La
constitution de 1935, sur la base de laquelle, il a été nommé président, est pratiquement écartée. Mais
en 1944, il exigeait du Corps Législatif, un amendement de cette constitution, en ce qui à trait à la durée
de son mandat, qui passait de 5 ans à 7 ans renouvelable sans restriction.

B-Mulâtrisme
Sous le gouvernement de Lescot, les mulâtres étaient au premier rang. Ils occupaient les postes
les plus décoratifs de l'administration. L'historien Charles Dupuy souligne que : " sous la présidence de
Lescot, on ne pouvait aucunement espérer devenir membre du service diplomatique ou consulaire, si l'on
a la peau sombre..." Quand on recommandait un noir du calibre d'Antonio vieux ou d'un Emile Saint-Lôt
au président Elie Lescot, celui-ci repoussait la proposition en affirmant de manière péremptoire :" M'pap
boule ak moun sa yo!" (Je refuse de frayer avec ces gens-là). Les actes officiels de la République pour la
période s'étendant du 15 septembre 1944 au 15 septembre 1945 étaient contresignés par des
secrétaires mulâtres ; mise à part Maurice Dartigue, Gérard Lescot et son père, le président Lescot étant
trois griffes. Rares étaient des noirs faisant partie de ce gouvernement: Jacques C. Antoine, Joseph
Raphaël Noël, François Georges, Théophile Richard étaient ministres; Edgar Pierre Louis, neveu de
d'Anténor Firmin, était délégué du pouvoir exécutif dans le Nord...
C-Népotisme

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Le Népotisme caractérisait aussi le régime. Lescot distribuait des faveurs à des parents, proches
parents et amis intimes. Son ami, Gontran Rouzier était son conseiller privé et sous secrétaire d'Etat à
l'intérieur. " De 1941 à 1946, l'assistant direct du président était son propre fils, Roger Lescot, un haut
gradé de l'armée. Gérard Lescot, son fils aîné, était ministre des Affaires étrangères. Henry Lescot, un
autre fils du président, considéré comme le génie financier du régime et de famille, s'était fait octroyer le
monopole du commerce des produits en pite. Les prétentions de la famille Lescot portaient préjudice
même à la Standard Fruit qui s'était vu retirer le monopole d'exportation de la figue banane en 1944, au
profit d'un beau-frère de Gérard Lescot, qui avait reçu la libre disposition d'exploiter les cultivateurs de
cette denrée pour toute l'étendue de la péninsule du Sud. Dès lors, il n'était plus possible de différencier le
domaine privé du président et sa famille du domaine public..."

4- ADMINISTRATION
En dépit de sa mulâtrophilie, Lescot avait une conscience politique. S'il favorisait les mulâtres et
les levantins (Surtout les syro-libanais, à qui, par son décret du 11 janvier 1943, il ouvrait le commerce de
détail en Haïti), il prenait aussi des mesures sociales progressistes. En effet, " c'est sous sa présidence que
l'on instituait la première caisse d'assurance et introduisait la première politique de salaire minimum en
Haïti. Lescot était le premier président à obtenir que la femme haïtienne âgée de 30 ans, quoique encore
privée du droit de vote, puisse occuper des fonctions ministérielles, devenir membre des administrations
commerciales et sont éligibles à l'Assemblée Nationale. C'est encore sous le gouvernement de Lescot, que
les femmes étaient légalement autorisées à disposer leur salaire. C'est Lescot qui établissait la première
législation haïtienne en faveur des enfants naturels. C'est lui qui lançait la première campagne
d'alphabétisation en créole. Lescot créait aussi, le premier service d'encadrement médical de la
population rurale et exigeait par le décret loi du 17 juin 1942, des nouveaux diplômés de l'école de
médecine, deux années de service socio-sanitaire obligatoire dans les campagnes d'Haïti ".

5-POLITIQUE EXTERIRURE
Lescot a choisi de coopérer avec les Etats-Unis et les Etats de l'Amérique latine en particulier la
République dominicaine. Mais, il plaçait le pays sous la protection de Washington : " Il faut que le monde
entier sache que la république d'Haïti entend marcher dans une union parfaite avec ses vingt républiques
sœurs de ce continent, et convient de proclamer avec la force d'une profession de foi, que notre sort est
profondément lié au sort des Etats-Unis d'Amérique; j'entends que notre politique internationale soit le
reflet fidèle et sincère de la politique internationale de notre généreuse et puissante voisine... Des
circonstances géographiques inéluctables et aussi certaines contingences d'ordre international, font de
la République dominicaine notre alliée naturelle ".
Pour exprimer sa solidarité avec les pays alliés, particulièrement les Etats-Unis, le gouvernement
haïtien posait les actes suivants: déclaration de guerre les 08 et 12 décembre 1941 aux pays de l'axe et
séquestration des biens de leurs ressortissants, contribution d'un million ( 1000 000) de dollars à l'effort
de guerre des alliés , expédition aux Etats-Unis, un chèque de 5.738,72 dollars, comme quote-part d'Haïti
dans la lutte contre la paralysie infantile et création de la SHADA, lorsque les alliés perdaient
l'approvisionnement en caoutchouc du Sud-ouest asiatique, par l'invasion des troupes nippones.

TEXTE VI
UNE AFFAIRE DE CRIME, D’ESCROQUERIE ET D’INJUSTICE

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Haïti n’a pas toujours été cet Etat tendant sa sébile aux étrangers. Son agriculture répondait
autrefois, aux besoins alimentaires de tous les haïtiens et dégageait un excédent que l’on exportait vers
d’autres pays. Paul Moral, dans son livre « le paysan haïtien », souligne le rôle important que jouait
l’agriculture dans l’économie haïtienne et avance des chiffres concernant l’exportation des denrées
d’Haïti vers l’étranger. Aujourd’hui, la situation agricole haïtienne est catastrophique ! Le pays ne peut
plus produire pour satisfaire le marché local, voire répondre à certains besoins externes. Des facteurs que
vous connaissez peut-être mieux que moi, peuvent expliquer cette désorganisation de notre agriculture.
Mais, devrait-on admettre que le point de départ du désastre, c’est l’installation en Haïti, sous le
gouvernement de Lescot, de la société haïtiano-américaine de développement agricole (SHADA).
Elle prit naissance le 30 juillet 1941. Elle devrait répondre aux besoins des pays alliés en
caoutchouc, à la suite de l'occupation Japonaise de certaines zones productrices de cette plante. La
Compagnie obtint de l'Etat haïtien, un contrat qui mit les terres les plus fertiles et d'immenses espaces de
forêt du pays à son service. " On n'aurait pu les obtenir sans le président Lescot", écrivait le journal Daily
News dans sa livraison du 3 avril 1943.
Ces terres occupées par de milliers de petits cultivateurs, propriétaires et fermiers, furent
déclarées Zones stratégique par le gouvernement. " Grâce à la politique d'expropriation mise en œuvre
par Lescot, La SHADA parvint à concentrer entre ses mains, 133 400 hectares de terre, représentant à
l'époque, 21.55 % de la superficie totale des terres cultivée en Haïti".
L'Etat haïtien disposait cinq millions de dollars pour la matérialisation du projet. Son exécution
impliquait des actes arbitraires, des cas d'abus du pouvoir. Les paysans étaient chassés brutalement de
leurs terres. " On arrachait à tour de bras la production vivrière et abattait sans crier gare, les arbres
fruitiers ". Privés de leurs terres et de leurs jardins, les paysans se mettront au service de la Compagnie.
Ainsi, on assistait à la prolétarisation de la population rurale. " En 1942, la SHADA employait 15 000
ouvriers agricoles. En 1943, le nombre d'ouvriers travaillant dans les plantations, s'élevait à 64 000. A la
fin de l'année, elle avait prévu d'en embaucher 100 000 pour les quatre années suivantes ".

Pourtant, le projet de la SHADA de produire du caoutchouc pour l'exportation n'a pas été réalisé.
Elle se limitait à l'exportation du bois de construction et du sisal. " En 1942, Thomas Fennell, le président
de la Compagnie, se félicitait d'avoir débité sur le marché local, 60 000 (soixante mille) pièces de planches
de pins! Informant par ailleurs, de bonnes perspectives d'exportation vers le venezuela ". Quant au
caoutchouc, " pas une tonne n'a été exportée ". Echec?

Il est possible que la SHADA eût une autre mission n'ayant été clairement dévoilée, celle de
détruire l'agriculture haïtienne et réduire Haïti à la dépendance agricole américaine. Dès le départ,
Thomas Fennell à la tête de la Compagnie, annonçait la politique américaine d'exporter vers Haïti, "
beaucoup, beaucoup de produits alimentaires... ". Les plantations de nourriture seront remplacées par du
caoutchouc et Haïti perdra sa capacité d'autosuffisance alimentaire. Lescot mettait à la disposition de ce
projet criminel, le ministère de l'agriculture, la justice et l'armée. D'aucuns parleront de relation perverse
entre les Etats-Unis et l'Etat haïtien, en vue de saboter notre agriculture.

C'était une mésaventure agricole."SHADA a dévié le pays, écrivait la professeure Myrtha Gilbert,
de la vocation d'avoir une autosuffisance alimentaire, grâce à son agriculture, vocation que même
l'occupation américaine n'avait pas réussi à pervertir".

10
Cours d'Histoire et de Géographie / Secondaire 4

Elle était néfaste pour l'environnement. 78 000 ha de forêts étaient livrés à l'exploitation
scientifique (Expression utilisée dans les contrats signés entre l'Etat haïtien et les américains). Un million
d'arbres, dont 200 mille pins étaient abattus dans moins de trois ans. L'abattage féroce des arbres
affectait considérablement la couverture forestière. " Avant l'occupation américaine, elle s'élevait à 60%.
Au départ des américains en 1934, elle était réduite à 21% ". Avec la SHADA, cette destruction forestière
s'accélérait. Paul Moral parlera de la dénudation du territoire haïtien.
Gardy MOISE, août 2018.

6-FIN DU GOUVERNEMENT
Des facteurs à la fois externes et internes contribuaient à la chute du régime autoritaire,
personnaliste et népotiste de Lescot. Le président Roosevelt, dans son message au congrès, sur l'état de
l'Union, le 6 janvier 1941, insistait sur le danger que représentait les régimes dictatoriaux, et mettait
l'accent sur les quatre libertés humaines fondamentales : la liberté de la parole et d'expression, la
liberté pour chacun d'adorer Dieu comme il l'entend, la liberté de vivre à l'abri de besoin, la liberté de
vivre à l’abri de la peur. Quand les haïtiens exigeaient l'application de ces quatre libertés, Lescot leur
donnait la réponse suivante: " Oui nous sommes décidé à les appliquer intégralement, lorsque l'homme
haïtien saura en user convenablement... ". Le 14 août 1941, Roosevelt complètera le discours de janvier
1941, par la Charte de l'Atlantique signé par lui-même et le premier ministre britannique Winston
Churchill. Celle-ci établissait " le droit qu'à chaque peuple de choisir la forme de gouvernement sous
laquelle il doit vivre ". Ce contexte international mettait le gouvernement de Lescot en mauvaise posture.
La fin de la deuxième Guerre Mondiale et la ratification de la Charte de l'ONU le 25 octobre 1945, par le
parlement haïtien, embrouillait davantage le régime en place. C'était l'occasion opportune pour les
intellectuels des classes moyennes et les hommes politiques, de prendre des initiatives en vue de doter
le pays d'un nouveau régime.
Ils avaient de nombreux griefs contre le régime arbitraire: monopolisation du pouvoir par
l'élite mulâtre, situation de misère créée par l'engagement du pays dans l'effort de guerre aux côtés
des Etats-Unis, outrances du marché noir, dont les bénéficiaires étaient de gros commerçants, amis du
pouvoir, agressions contre les traditions culturelles des masses populaires, écartement intentionnel ou
non de l'élément noir des cadres administratifs, conséquences de la destruction des plantations de
nourriture par la SHADA...
A travers des cercles littéraires et mondains de Port-au-Prince, comme l'amicale d'Emile Saint-Lôt
ou le cénacle d'Etudes du Dr René Salomon, de nouvelles idées sociales étaient débattues. Des journaux
mettaient aussi en question le comportement réactionnaire de Lescot : Daniel Fignolé fondait Chantiers,
Jean Fouchard, Haïti journal, René Depestre, Théodore Baker et Gérald Bloncourt, la Ruche. Ils
dénonçaient les ancrages sociaux du gouvernement, réclamaient un Etat fondé sur la justice, la liberté et
la dignité.

C'est dans cette atmosphère d'effervescence que le Département d'Etat et la République


dominicaine décidaient de tourner le dos au président Lescot. Rafael Léonidas Trujillo faisait circuler à
Port-au-Prince, en novembre 1945, " une lettre rappelant à Lescot ses obligations envers lui ". Mais, c'est
surtout le président américain, à travers son ambassade à Port-au-Prince, qui mettait le feu aux poudres,
par un écrit sur sa constitution relatant " le droit du peuple à la Révolution ".

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Cours d'Histoire et de Géographie / Secondaire 4

Le 2 janvier 1946, le gouvernement interdisait la publication du journal la Ruche et procédait à


l'arrestation de René Depestre et Théodore Baker, deux jeunes du groupe la Ruche. Cette décision
arbitraire et répressive du gouvernement, déclenchait la résistance et la mobilisation des écoliers et des
étudiants qui se mettaient en grève, le 7 janvier 1946. Quatre jours plus tard, l'armée s'emparait du
pouvoir et son chef d'état-major, le colonel Franck Lavaud, annonçait la destitution du président Lescot
et la prise en charge des obligations de l'Etat par le comité exécutif militaire, composé trois membres :
lui-même et les majors Antoine Levelt et Paul Eugène Magloire.

TEXTE VII
Personnage controversé de l’histoire contemporaine haïtienne, Elie Lescot a occupé des fonctions
importantes dans l’administration publique, avant d’accéder à la présidence de la République, le 15 mai
1941, grâce à des relations personnelles, cultivées à la fois avec les présidents Vincent et Trujillo et à
l’appui du département d’Etat américain. Parvenu au pouvoir, il a sacrifié aux funestes dissentiments qui
ont donné à son gouvernement le caractère calamiteux que l’histoire lui a conservé. Il s’avérait incapable
de porter remède aux maux séculaires dont souffrait la nation.

« A l’heure des choix difficiles, la nation haïtienne attendait du président Lescot la réalisation d’un
programme socio-économique et politique susceptible d’encourager l’activité créatrice de l’haïtien et de
concrétiser les espérances trop longtemps bafouées des majorités nationales… ». Malheureusement, il
n’a pas pu « renoncer à la vieille politique de castes et de classes qui séparait, en Haïti, la minorité
citadine de la majorité rurale, les clairs des bruns, les riches des pauvres…Timonier de la barque de l’Etat,
il n’a pu démontrer sa capacité à répondre aux sollicitations du changement ».
Ainsi, le président Elie Lescot a piteusement échoué dans l’entreprise assignée au chef de l’Etat
d’assurer l’union de la famille haïtienne et à la nation, la féconde tranquillité qu’elle recherche pour
travailler à son propre bonheur. Le 11 janvier 1946, Lescot fut renversé par une junte militaire, à la suite
d’une grève d’étudiants qui dégénéra en fureur populaire.
Georges-Pierre ANTHONY, L’Exile dans la Politique Haïtienne, C3, pages 206-207.

Questions de révision
1- Décris le contexte de l'accession de Lescot au pouvoir?
2- Quelles sont les principales caractéristiques du régime politique de Lescot?
3- Que sais-tu de sa politique extérieure?
4- Quels sont les fais sociopolitiques pouvant expliquer la chute de Lescot?

Chapitre III
LA REVOLUTION DE 1946 ?
En 1946 débutait en Haïti une période d’effervescence. Le premier mois de l’année était marqué
par une série de luttes revendicatives pour la conquête des libertés démocratiques et la promotion des
droits sociaux en faveur des secteurs démunis et appauvris. Ces différents mouvements revendicatifs
allaient conduire au départ du président Lescot et provoquer dans le pays, des tensions sociales et une
lutte politico-idéologique entre noirs et mulâtres, sous couvert de vouloir défendre les intérêts de la
population.

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Cours d'Histoire et de Géographie / Secondaire 4

Deux principaux courants d’idées allaient donc marquer cette période d’agitation : le noirisme et
le socialisme. Ils étaient divisés par deux problèmes essentiels : la couleur de la peau et la politique
sociale. Mais, c’est la couleur de la peau qui allait constituer la véritable ligne de démarcation. Etienne
Charlier parlait de la résurgence aiguë de la question de couleur.
L’élite noire qui était écartée du pouvoir depuis l’occupation américaine, voulait à tout prix en
reprendre, en réclamant un noir à la tête du pays. Au début du mois de février, elle créait le Front
Révolutionnaire Haïtien (F.R.H.) dont devient président Emile Saint-Lot, un politicien noiriste.
Les mulâtres eux-mêmes, voulant consolider, semblerait-il, leur position politique, fondaient le
Parti Socialiste Populaire (P.S.P.). Etant donné que les noirs étaient en majorité et que le noirisme
influence profondément cette période mouvementée, ils choisissaient Edgard N. Numa, un sénateur noir
comme candidat présidentiel. Cela ressemblait beaucoup à la politique de doublure.
Malgré tout, le noirisme triomphera. Les militaires qui accaparaient le pouvoir exécutif depuis la
chute de Lescot, allaient faciliter l’accession d’un noiriste modéré à la présidence du pays, monsieur
Dumarsais Estimé. Ainsi, les noirs supplantaient les mulâtres qui contrôlaient le pouvoir depuis 1915,
avec la complicité des américains. Mais, faut-il parler de révolution ?
Certainement, les évènements de janvier à août 1946 ont permis aux noirs de reprendre le
pouvoir au détriment des mulâtres, mais ils n’ont pas abouti à une révolution comme le prétend certains
historiens. Aucun changement réel n’a été opéré dans les structures économiques et sociales du pays.
Les élites politiques n’étaient pas capables de concilier leurs intérêts avec ceux de la population pour
l’édification d’une société juste, égalitaire et démocratique. René Depestre, l’un des initiateurs du
mouvement de Janvier 1946 connu sous le nom de Cinq glorieuses, parlait de situation révolutionnaire
qui pourrait déboucher sur la révolution. Sauveur Pierre Etienne préférait parler de Crise
révolutionnaire.
Cependant, 46 marquait un tournant important dans notre histoire politico-sociale avec
l’éclosion du syndicalisme et le fonctionnement de partis politiques. Outre le Front Révolutionnaire
Haïtien (F.R.H.) formé à partir de groupes radicaux noirs et le Parti Socialiste Populaire (P.S.P.) fondé par
des mulâtres marxistes, le P.P.N. (Parti Populaire National), le P.D.P.J.H. (Parti Démocratique Populaire
de la Jeunesse Haïtienne) et le MOP (Mouvement Ouvrier Paysan) du populiste urbain, Daniel Fignolé,
ont aussi vu le jour.

TEXTE VIII
Les évènements politiques de 1946, de l’éviction de Lescot en janvier à l’élection de Estimé en août, ne
peuvent être compris qu’à la lumière des conflits idéologiques de la période précédente, qui sont eux-
mêmes en rapport avec l’évolution de la structure de classes du pays. Si 1934 avait marqué la victoire du
mouvement nationaliste, 1946 vit le triomphe du noirisme. Au fur et à mesure de la campagne électorale
de 1946, les affinités de couleur prirent de plus en plus le pas sur les ententes idéologiques dans la
formation des alliances. Les leaders de la classe noire moyenne s’étaient laissé convaincre que les
divisions de couleur et de classe coïncidaient en Haïti, et leur réussite à concentrer l’intérêt sur le
problème de couleur dissimulait le fait qu’ils appartenaient à une classe dont les intérêts étaient
complètement distincts de ceux de la masse.*…+
David NICHOLLS, idéologie et mouvements politiques en Haïti, 1915-1946, Annales, 1975.

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Cours d'Histoire et de Géographie / Secondaire 4

Révision : Fais le point sur les évènements politiques de 1946.

Chapitre IV

GOUVERNEMENT DE DUMARSAIS ESTIME (1946-1950)

Avec le support du comité exécutif militaire, et du Sénateur Jean David, Dumarsais Estimé
accédait à la présidence du pays le 16 août 1946. Il avait donc raison de son adversaire Démosthène
Calixte, qui se portait aussi candidat à la présidence d'Haïti.

1- L’HOMME
Fils de la commune des Verrettes, dans le Département de l'Artibonite, Léon Dumarsais Estimé est
né le 21 avril 1900 des œuvres des époux, Alciné Estimé et Florence Massillon qui n'ont pas eu la chance
de le voir grandir. Un oncle, Estilus Estimé, se chargeait alors de son éducation.

Dumarsais terminait ses études classiques au Lycée Alexandre Pétion de Port-au-Prince et


s'enrôlait plus tard à l'Ecole de Droit de Port-au-Prince.
Il débutait sa carrière professionnelle, comme professeur de mathématiques au Lycée d'Alexandre
Pétion. Il a été renvoyé de ce poste par le gouvernement de Borno, pour avoir exprimé publiquement, son
opposition à l'occupation américaine. En 1930, il entrait à la chambre des députés, représentant alors la
circonscription des Verrettes. En 1937, Vincent le nommait secrétaire d'Etat à l'instruction publique et à
l'agriculture. Le 16 août 1946, il accédait à la présidence d'Haïti. Il dirigeait le pays jusqu'au 10 mai 1950.
Il est mort, le 20 juillet 1953, à New York, à l'âge de 53 ans.

2- REGIME POLITIQUE
Au début, Estimé se montrait libéral et conciliant. Il faisait appel à ses adversaires pour diriger
avec lui: Démosthène était nommé inspecteur des consulats, Fignolé secrétaire d'Etat à l'éducation,
François Duvalier secrétaire d'Etat à la santé, Georges Rigaud secrétaire au commerce. Dans son discours
inaugural, il exprimait sa volonté de doter le pays d’un régime démocratique : " Je prends l'engagement
formel de respecter les principes de la séparation des pouvoirs, seules garanties pour le peuple de ne pas
voir son destin échapper à son propre contrôle. Quant à la presse, ce quatrième pouvoir que le peuple
s'est donné pour être un œil ouvert sur tous les autres, je ne porte jamais la main sur elle, car j'espère
n'avoir jamais aucune honte à cacher ". Cet engagement républicain et d'autres libertés étaient
préservés par la constitution du 22 novembre 1946, dans ses articles 5, 6, 7, 12, 26, 27, 35 et 36.
Mais Trois ans plus tard, cette constitution allait être mise en question par le président qui
exigeait du parlement, une modification de l'article 81, en vue de prolonger son mandat qui devrait
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Cours d'Histoire et de Géographie / Secondaire 4

prendre fin en 1952. Cette démarche a été réfutée par le Sénat qui devra faire face à une démonstration
tumultueuse des éstimistes. D'autres actes, comme des mesures pour contrôler la presse, les partis
politiques et les syndicats, justifiaient la dictature de Dumarsais Estimé qui n'était pas prêt à établir
véritablement, un régime libéral et démocratique en Haïti.

3- REALISATIONS
Parmi les grandes réalisations de Dumarsais Estimé, on peut citer : la reconstruction du village
frontalier de Belladères qui allait servir de vitrine de la réussite haïtienne sur la façade dominicaine ( ce
projet a été boycotté par Trujillo qui fermait le poste-frontière d'Elias Pina, pour l'établir à Jimani ),
l'augmentation du salaire minimum, la fondation de 40 écoles rurales et des lycées dans certaines villes
du pays ( Port-au-Prince, Petit Goâve, Hinche), création de L'Ecole Normale Supérieure de Port-au-Prince,
l'exposition internationale du bicentenaire de Port-au-Prince ( Haïti était devenue la deuxième
destination touristique de La Caraïbe ), l'haïtianisation de la Banque Nationale de la République d'Haïti, la
construction d'un Pont métallique sur la Grande-Anse, la création de l'Office de Développement de la
Vallée de l'Artibonite (ODVA).

4- RELATIONS DIPLOMATIQUES
Contrairement à ses prédécesseurs, Estimé n'entendait pas traiter avec le dictateur dominicain,
monsieur Léonidas Trujillo. D'ailleurs, il n'a pas renouvelé le mandat de son représentant en Haïti.
Pourtant, il maintenait le principe de la fidélité à l'alliance américaine.

Les représentants de son gouvernement à l'ONU, ont su défendre valablement les intérêts d'Haïti
et ceux de certains territoires subissant encore le colonialisme occidental. En 1948, la délégation
haïtienne, votait pour la reconnaissance de l'Etat d'Israël. En 1949, le sénateur Emile Saint-Lôt votait
contre le plan Bevin-Sforza qui permettrait le partage de la Libye entre l'Italie l'Angleterre et la France.

Et l'un des plus grands actes posés par Dumarsais Estimé, est l'envoie " d'une escadre des garde-
côtes haïtiennes au large de la Navase, afin de faire acte de souveraineté et en reprendre possession. Par
ce geste émouvant, Estimé voulait rappeler aux américains qui l'occupaient depuis 1858, que ce rocher
désert était encore une île adjacente de la République d'Haïti ".

5- FIN DU GOUVERNEMENT
En dépit des efforts déployés en vue de mettre le pays sur les rails du développement et
restaurer son image sur le plan international, Estimé n'arrivait pas à prendre ses distances avec la
corruption administrative. Nombreux étaient ses partisans qui s'enrichissaient au détriment de l'Etat.
L'Affaire Standard Fruit, dont les principales victimes étaient les paysans, est un cas probant
d'enrichissement rapide des éstimistes. Quand les associations politiques et les syndicats protestaient
contre ses dérives administratives, le président répondait par la répression. Ainsi, a-t-il jeté de l'huile sur
le feu.
Au printemps 1950, le pays a connu une grande crise. Estimé cherchait à obtenir une révision de
la constitution de 1946, afin de faire prolonger son mandat et de pouvoir se succéder à la présidence. Le
Sénat s'y opposait. Un bras de fer s'organisait donc, entre partisans et opposants du régime. Malgré la
formation d'un nouveau cabinet, ainsi que des démonstrations de soutien à Estimé, la pression pour son
départ persistait. Il quittait ses fonctions le 10 mai 1950. Le Colonel Paul E. Magloire, le Colonel Antoine

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Cours d'Histoire et de Géographie / Secondaire 4

Levelt et le Général Franck Lavaud qui avaient succédé au président Lescot assumaient de nouveau le
pouvoir.

TEXTE IX
Estimé applique un programme de réformes destinées à consolider le mouvement qu’il a
déclenché. Les travailleurs voient leur salaire quotidien minimum passer de trente à soixante-dix cents.
On met en train des lois qui constituent la première ébauche de sécurité sociale qu’ait connue Haïti.
L’industrie et le commerce sont encouragés ainsi que les investissements étrangers. Un coup de fouet est
donné au tourisme grâce au financement de nouveaux hôtels et à l’ouverture de l’exposition du
bicentenaire en 1949-1950. Dans ce but, on a rasé vingt-quatre hectares de taudis et dépensé six millions
de dollars. On coopère avec les organisations internationales à vocation culturelle et économique.
L’Emprunt américain de 1922 est remboursé et la Banque Nationale retrouve du même coup son
autonomie financière. Le programme d’Estimé s’appuie donc sur les noirs. Il est réformiste dans sa
conception mais ne cherche pas à renverser les structures existantes.

Parmi les projets d’Estimé figure la reconstruction de Belladères, ville frontière située en face
d’Elias Pina, que Trujillo avait pour sa part reconstruit. *…+ Estimé fera paver la grand-rue, édifier un
nouvel hôtel et de nouvelles habitations, installer l’eau et l’électricité.
*…+ Port-au-Prince connait un boom économique. Le choix du siège de l’exposition a partiellement
transformé la physionomie du quartier des docks. La laideur a reculé. Les touristes de l’après-guerre
affluent, aguichés par la beauté naturelle de l’île et le confort luxueux de ses nouveaux hôtels. Estimé
décide que les paysans devront porter des chaussures lorsqu’ils viennent à la ville. On instaure l’impôt sur
le revenu. Le new-look se manifeste aussi dans l’agriculture et l’instruction publique. Désormais les
étrangers ne sont plus autorisés à enseigner l’histoire nationale.
Bernard DIEDERICH et Al BURT, Papa Doc et les tontons macoutes, Henry Deschamps. 1986, page 63.

Questions de révision
1- Qui était Dumarsais Estimé?
2- En dépit du laxisme à l'égard de son entourage corrompu et sa dictature, Dumarsais Estimé est l'un
des présidents qui a œuvré pour le progrès d'Haïti. Montre-le.
3- Quels évènements ayant conduit à la chute de Dumarsais Estimé

Chapitre V

PAUL EUGENE MAGLOIRE (1950-1956)

1-STRATEGIES POLITIQUES ET ELECTION DE MAGLOIRE


Après le renversement du président Estimé, Magloire a compris qu'il lui fallait prévenir toute
protestation contre le Coup d'Etat. Il fit procéder à l'arrestation de tous les leaders partisans d'Estimé;
même parmi les hauts fonctionnaires. Les chambres étaient dissoutes immédiatement. La junte militaire
dont Magloire en était l'homme fort prenait en charge l'organisation des élections. Une nouvelle
constitution était adopté, celle de 1950 fixant le mandat présidentiel : six ans et le président n'est pas
immédiatement rééligible.

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Cours d'Histoire et de Géographie / Secondaire 4

Bien qu'il fût membre de la junte militaire, Magloire se portait candidat aux élections
présidentielles. En grand tacticien, il avait trouvé les moyens de gagner l'opinion publique. Il laissait
entendre qu'un vaste complot était tramé contre les vies et les biens; et qu'il avait arrêté un massacre
dans lequel devait périr un grand nombre de citoyens, notamment les mulâtres. La légende avait un tel
succès que la population voyait en Magloire, un sauveur.
Il n’y avait qu'un seul candidat en face de Magloire; monsieur Fénelon Alphonse. Les élections
réalisées pour la première fois au suffrage universel masculin direct, annonçaient Magloire comme
vainqueur, avec 99% des voix. Le président entrait en fonction, le 6 décembre 1950.

2-METHODES DE GOUVERNEMENT
Magloire se faisait passer pour l'apôtre de l'union nationale. Il se démarquait du noirisme et
entendait mener une politique d'équilibre sur la question de couleur.
Toutefois, il établissait un régime autoritaire et utilisait les mêmes moyens que ses prédécesseurs
pour contenir le mécontentement provoqué par sa politique conservatrice favorable surtout au patronat
et au secteur commercial. Des partis politiques, des syndicats seront dissous, des journaux seront fermés.
La torture par la bastonnade sera pratiquée sur des opposants au régime. Il méritera le surnom de
"kanson fè". Le système de corruption était maintenu et beaucoup de privilégiés du régime pourront
s'enrichir très rapidement...

3-POLITIQUE EXTERIEURE
Magloire renouait des relations diplomatiques avec la République Dominicaine. "Hector Trujillo
venait en visite officielle, un accord était signé pour l'embauche légale des travailleurs saisonniers
haïtiens en République Dominicaine".
La coopération avec les Etats-Unis était renforcée : création du Service Coopératif d'Education Rurale
(SCAMER); augmentation des crédits accordés à l'ODVA, passant de quatre à quatorze millions de dollars.

4-REALISATIONS
"Dans son discours d'investiture, le président a promis d'accorder la priorité au secteur rural par la
formation des coopératives pour combattre la spéculation, l'ouverture des routes, la création d'écoles,
l'introduction de soins médicaux. A l'actif du gouvernement, on peut souligner : la création de l'Institut de
Crédit Agricole et Industriel, l'aménagement de la Vallée de l'Artibonite, le fonctionnement de certaines
coopératives agricoles. Les efforts du gouvernement ont également porté sur un programme de travaux
publics, d'urbanisme, principalement au Cap-Haïtien, aux Gonaïves où furent fêtés les cent
cinquantenaires de l'indépendance. A l'occasion de la guerre de Corée, nos produits d'exportation
connaissent une hausse des prix sur le marché extérieur, favorisant une grande circulation d'argent dans
le pays et le financement partiel des programmes d'équipement et de travaux publics entrepris par le
gouvernement. L'aide extérieure fera le reste, mais fera passer la dette extérieure de 39.7 millions de
gourdes en 1952 à 241.1 millions en 1956 ..."
Des compagnies étrangères ont été implantées en Haïti, mais au détriment des intérêts nationaux
: la Reynolds Métal Co. (Société américaine pour l'exportation des gisements de Bauxite de Miragoâne),
la Sedren (Société canadienne pour l'exploitation du cuivre de Terre-neuve), une cimenterie à Fond-
Mombin par les ciments Lafarge (Société française) et une minoterie par Maple (Société canadienne).

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Cours d'Histoire et de Géographie / Secondaire 4

5-FIN DU GOUVERNEMENT
Le Cyclone Hazel, en octobre 1954, pouvait être considéré comme le début de la fin pour
Magloire. Il devait faire face à des dépenses imprévues, ne pouvait gérer les énormes dégâts matériels et
humains, la hausse du coût de la vie. Les dépenses imposées par les travaux dans l'Artibonite et à Péligre
dépassent toutes les prévisions, la dette public augmente chaque année, pendant que les ressources
diminuent, du fait que la chute du prix du café, des huiles essentielles sur le marché international.
En janvier 1955, des élections législatives douteuses créaient une crise politique : tous les élus
étaient des fidèles du régime; même Daniel Fignolé a perdu son siège de député. Lorsque les manœuvres
traditionnelles pour la réélection commençaient en janvier 1956, La riposte ne tardait pas. La déclaration
de candidature à la présidence de Louis Déjoie était le coup envoie. La lutte politique prenait des formes
variées : grève du commerce, grève des chauffeurs de transports publics, explosion de bombes à travers
la capitale, manifestation d'étudiants et d'écoliers. Les arrestations se multipliaient, sans même ralentir
la détérioration de l'ambiance politique. Abandonnant la présidence, Magloire tentait de se faire
accepter comme chef du pouvoir exécutif, formule du XIXe siècle qui n'était pas acceptée, puis comme
chef de l'armée. Le rejet était total.
Ayant raté son tour de passe-passe de la présidence à l'état-major, ne pouvant maîtriser
l'impatience de ses jeunes confrères aspirant aux honneurs, il quittait le pays à bord d'un avion de
l'armée, d'abord pour la Jamaïque, puis pour les Etats-Unis. Il était condamné à mort par contumace
sous François Duvalier. Gracié, il revenait dans le pays en 1986. Aveugle, il mourra à Pétion-Ville le 12
juillet 2001 à l'âge de 94 ans.

TEXTE X
Les années Magloire font figure d’âge d’or en Haïti. Déjà encouragé par Estimé, la vie artistique
va se développer. Les touristes affluent à Port-au-Prince. Les abus de pouvoir qu’on signale semblent peu
de chose eu égard à ce qu’on a connu dans le passé. Le colonel noir ne pourrait trouver une situation plus
favorable à ses débuts au pouvoir. Il jouit de l’appui à la fois de l’élite, de l’armée, de l’Eglise et des Etats-
Unis, Pas de querelle avec Trujillo. Sa popularité est réelle. On trouve même quelques-uns des partisans
d’Estimé pour l’apprécier. *…+ Magloire réussit à se concilier presque tout le monde. Louis Déjoie sera
réintégrer dans ses fonctions de député. Fignolé lui, toujours aussi populaire, sera élu d’une
circonscription de Port-au-Prince.
Aux élections d’octobre 1950, tous les citoyens adultes à l’exception des femmes, ont le droit de
vote.*…+ Sous Magloire, Haïti va s’accoutumer aux fastes officiels. La première cérémonie prend place le
cinq décembre. Elle va se poursuivre trois jours durant. Vingt et un coups de canon saluent l’investiture du
nouveau président. On hisse les couleurs. Des messes solennelles sont célébrées *…+
Le cent cinquantième anniversaire de l’indépendance étant proche, on prépare les cérémonies qui
doivent prendre place aux Gonaïves, cité historique. Magloire fait ériger une cathédrale ultra-moderne,
réaménager deux jardins publics et il est l’ordonnateur d’une célébration absolument grandiose. Au
cours de celle-ci,, on peut applaudir une reconstruction de la dernière bataille livrée par les insurgée.
Bernard DIEDERICH et Al BURT, Papa Doc et les tontons macoutes, Henry Deschamps. 1986, pages 66-67

Questions de révision
1- Comment Magloire accédait-il au pouvoir?
2- En quoi le gouvernement de Magloire contraste-il avec celui de Dumarsais Estimé?
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Cours d'Histoire et de Géographie / Secondaire 4

3- pourquoi dit-on que Haïti a connu sa période de gloire et son âge d'or durant le mandat de Paul E.
Magloire?
4- Décris les évènements ayant mis fin à son gouvernement.

Chapitre VI

SITUATION SOCIO-POLITIQUE D'APRES MAGLOIRE


Entre le départ de Magloire le 12 décembre 1956 et les élections du 22 septembre 1957, le pays a
connu une situation d'effervescence. C'était une période électorale où les candidats se livraient à une
lutte violente pour le contrôle du pouvoir. Ils étaient nombreux. Mais les plus connus étaient, Clément
Jumelle, Louis Déjoie, Daniel Fignolé et François Duvalier.
Le président de la Cour de Cassation, Joseph Nemours Pierre-Louis, assumait la fonction de
président provisoire, en vertu des dispositions de la constitution de 1950; avec pour mission d'organiser
les élections présidentielles. Mais, il a été accusé d'être magloiriste et qu'il soutenait la candidature de
Jumelle. A Port-au-Prince, le "Rouleau Compresseur" de Fignolé occupait les rues. Aux Cayes, les
partisans de Déjoie attaquaient bureaux publics et maisons privées pour en déloger les "hommes de
Magloire". Incapable de faire face à cette situation d'anarchie, Nemours démissionnait le 3 février 1957.
La démission de Nemours aggravait la situation politique du pays. Rodolphe Barau qui devait lui
succéder, selon l'article 81 de la constitution de 1950, abandonnait son siège de vice-président à la cour
de cassation, pour se mettre au service du gouvernement provisoire, comme secrétaire d'Etat. Il n'était
donc plus habilité à remplacer le président. Mais, Louis Déjoie se déclarait favorable à l'application de
l'article 81, déjà épuisé et réfuté par les autres candidats. Ces derniers ont soumis une liste de trois
personnalités indépendantes à l'Assemblée Nationale, qui a élu l'une d'entre elles, Franck Sylvain,
président provisoire, le 17 février 1957.
Le nouveau président n'a pas pu œuvrer à l'établissement d'un climat de paix et de confiance;
condition sine qua non pour l'organisation des élections crédibles. Il était soupçonné de planifier
l'accession de Duvalier au pouvoir. Partout, c'était la panique. A Martissant, des bombes artisanales ont
explosé et occasionné la mort de deux officiers. Les suspects identifiés par la police étaient des partisans
connus du candidat François Duvalier. Le président Sylvain serait complice de cet acte odieux. Le 1er avril
1957, il a été arrêté et mis en résidence surveillée. Les candidat à la présidence, sauf Jumelle, se
concertaient et créaient un conseil exécutif du gouvernement où treize ministres pensaient assurer
collégialement le pouvoir exécutif, sans président de la république.
Ce conseil exécutif ne durera que quelques jours seulement. Duvalier retirera ses ministres
rendant le Collégial caduc. Avant de tomber, le Conseil dominé par les hommes de Fignolé et Déjoie,
révoquait le général Léon Cantave et le remplaçait par le colonel Pierre Armand; une décision que l’on
n’arrivait pas à faire appliquer. Le 25 mai 1957, les troupes ralliées à Armand, bombardaient les casernes
Dessalines où le général Cantave était en réunion avec tous les candidats, sauf Déjoie. Une escouade
sortie des casernes prenait les batteries à revers et en tuait les servants. Une médiation du clergé
catholique permettait d'obtenir une trêve et la démission des deux chefs, Cantave et Armand. Pendant ce
temps, un compromis politique était trouvé : le candidat Fignolé acceptait la présidence provisoire et
nommait le colonel Antonio Kébreau chef d'état-major de l'armée.

La présidence provisoire a été peut-être pour Fignolé, un pont, devant lui permettre d'accéder à
un mandat définitif. Il a maintenu sa candidature à la présidence, en dépit de son statut de président
19
Cours d'Histoire et de Géographie / Secondaire 4

provisoire. Mais, sa volonté manifeste de contrôler l'armée (distribution des grades, annonces des
augmentations de salaire pour les enrôlés) inquiétait les autres candidats et le chef de l'état-major, le
général Kébreau. Le 14 juin 1957, il était arrêté et déporté aux Etats-Unis. Kébreau formait une junte
militaire, prenait le pouvoir et rétablissait un ordre musclé : dure répression des partisans de Fignolé au
Bel Air et à la Saline, état de siège, interdiction de faire grève. Une nouvelle loi électorale abolissait les
listes électorales et confirmait l'élection au suffrage universel direct pour tous les postes à pourvoir. Le 22
septembre 1957, le Dr Duvalier sortait vainqueur des élections.

TEXTE XI
Daniel Fignolé, instituteur réputé pour son enseignement des mathématiques dans les écoles de
la Capitale. Il fait son apparition sur la scène politique en 1946, à la tête d'un mouvement ouvrier-paysan
: le MOP.
Fignolé est un orateur remarquable. Il s'exprime avec une flamme passionnée aussi bien en
créole qu'en français. Il a le don de conquérir les foules des faubourgs, et devient la terreur des bourgeois
qui le tiennent pour un ennemi dangereux. Ils ne lui pardonnent pas de se faire l'avocat des
revendications sociales du monde ouvrier...
François Duvalier est un associé politique de Daniel Fignolé. Ils font leurs premières armes côte à
côte au MOP. Fignolé en est le président et Duvalier le secrétaire. Ce jeune médecin fréquente la clinique
du Docteur Félix Coicou où il pratiquait son art.
Il a en outre d'autres activités intellectuelles : il s'intéresse à l'ethnologie et à l'anthropologie [...]
Et Fignolé et Duvalier deviendront les ministres d'Estimé. Le secrétaire de MOP restera aux côtés
d'Estimé jusqu'à sa chute tandis que Fignolé doit cesser sa collaboration à l'homme des Verrettes qui
avait pris ombrage de la popularité grandissante de son trop bouillant ministre de l'Education.

Louis Déjoie. Il est le seul homme de couleur qui depuis la chute de Lescot, a pu prendre un essor
remarquable sur la scène politique.
Ingénieur-Agronome, diplômé de Gembloux, sa compétence professionnelle est notoire.
Industriel, il s'est fait une bonne situation dans les huiles essentielles. Il est le pionnier de cette industrie
nouvelle. Travailleur infatigable, Déjoie a une connaissance à nulle autre pareille des possibilités agricoles
et industrielles du pays. Malheureusement, il n'a aucune idée des questions sociales qui d'ailleurs de
l'intéresse pas [...]
Il doit en grande partie son prestige et sa popularité à ses attaches dans le Département du Sud,
où il possède des usines qui servent de débouchés aux planteurs et a sa position de Président de la
Chambre de Commerce, dont il tire avantage pour prendre une part active dans l'émeute de 1946. En
raison de sa participation à ce mouvement dont il réclame le bénéfice, il se présente aux élections de
1946 et est élu sénateur *…+

Révision : Décris la situation sociopolitique d'Haïti de 1956 à 1957.

20
Cours d'Histoire et de Géographie / Secondaire 4

Chapitre VII

FRANCOIS DUVALIER (1957-1971)


I- "Papa Doc"
Fils du journaliste Duval Duvalier et de la boulangère Ulyssia Abraham, François Duvalier naquit à
Port-au-Prince le 14 avril 1907. Il fit ses études classiques au Lycée Pétion. En 1934, il obtint son diplôme
de l'école de médecine de l'Université d'Haïti et devint médecin hospitalier. En 1939, le jeune Duvalier
épousa une jeune infirmière, Simone Ovide Faine, avec laquelle il aura trois filles (Marie Denise, Nicole et
Simone) et un garçon, Jean Claude. En 1943, il participa activement à la campagne contre le pian,
parrainée par les Etats-Unis. C'est à cette époque qu'il fut amicalement surnommé "Papa Doc" par ses
patients.

Parallèlement à son métier de médecin, Duvalier mena une vie intellectuelle. Collaborateur du
quotidien Action Nationale, il développa un profond intérêt pour ses racines africaines, contribuant à
fonder en 1938, le journal "Les Griots", avec un groupe d'écrivains qui considérèrent le nationalisme noir
et le vaudou comme les principales sources de la culture haïtienne.

"Papa Doc" commença sa carrière politique en 1946, comme secrétaire général du Mouvement
des Ouvriers Paysans(MOP). La même année, grâce à son aisance et à sa popularité, il fut nommé
Directeur général du Service National de la Santé Publique, par le président Dumarsais Estimé. En 1949, il
devint Ministre de la Santé Publique et du Travail. Après la chute de Dumarsais, il retourna à ses
anciennes activités médicales. En 1951, il organisa la résistance contre le président Magloire et devint en
1954, le personnage central de l'opposition. En 1957, François Duvalier se déclara candidat à l'élection
présidentielle. Recourant à un populisme noiriste, il s'assura le solide soutien des paysans
majoritairement noirs, et de l'armée. Le 22 avril 1957, avec l'appui du Général Antoine Kébreau, il fut élu
président d'Haïti pour un mandat de six ans.
Mais en juillet 1958, il dut faire face à une tentative de Coup d'Etat organisé par trois officiers de
l'armée exilés et cinq mercenaires américains. François en profita alors, de mettre en place, avec l'aide
de Clément Barbot, les "Tontons Macoutes", rebaptisés par la suite, "Volontaire de la Sécurité Nationale"
(VSN); une milice privée estimée à 40.000 hommes qui furent usités dans le but de terroriser et assassiner
les opposants politiques de Duvalier.

Pour renforcer son pouvoir, le président Duvalier fit adopter les constitutions de 1957 et de 1964
qui lui permirent de s'octroyer un deuxième mandat, et se faire plébisciter président à vie. Avec lui, ce
fut l'établissement d'un régime de terreur. Plus de 30.000 personnes furent assassinées durant son
passage à la tête du pays.

"En 1970, frappé par la maladie, "Papa Doc" fit modifier la constitution de 1964, afin de pouvoir
désigner son successeur, son fils de 19 ans, Jean Claude. Cette modification constitutionnelle fut validée
par le référendum de 1971. Il mourut le 21 avril 1971, après 13 ans et demi de pouvoir absolu. Son fils
surnommé "Baby Doc", lui succéda dès lendemain".

II- Mise en place du Régime Politique

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Cours d'Histoire et de Géographie / Secondaire 4

Issu d'une corruption électorale orchestrée par l'armée, François Duvalier devrait compter avec
ses adversaires politiques, en vue de combler le déficit de légitimité de son gouvernement. Il semblait
vouloir le faire, lorsqu'il prenait l'initiative de les invités au palais. Mais, cette démarche a été mal
accueillie par ses concurrents qui préféraient prendre leurs distances avec le nouveau pouvoir. Ce sera
donc par la répression que "Papa Doc" tentera de se légitimer.
Le 18 novembre 1957, les membres du groupe Alliance Démocratique (Dr Georges Rigaud, Michel
Roumain, Etienne Charlier, Edgar Nérée Numa) étaient accusés par le gouvernement de Duvalier, d'être
des moscovites à la solde du communisme international, pour avoir dénoncé dans leur journal, le
caractère frauduleux des élections du 22 septembre 1957. le 27 novembre 1957, les sbires de Duvalier
procédaient à l'arrestation de Léonce Bernard, ex-secrétaire d'Etat de l'intérieur sous les gouvernements
du Collégial et de Daniel Fignolé et tuaient Jean Dessé, beau-frère de l'ex-président Daniel Fignolé. Des
dizaines de partisans de Clément Jumelle et de Louis Déjoie étaient arrêtés par les officiers duvaliéristes
dans le courant du même mois. Par ces actes répressifs, Duvalier parvenait à affaiblir l'opposition et
l'occasion lui était offerte de jeter les bases de son Régime Politique.
En décembre 1957,il faisait adopter une constitution lui accordant le droit de dissoudre le corps
législatif (article 60). Il s'en servira pour s'octroyer un deuxième mandat. Mais, il faudra d'abord
s'approprier le terrain politique.

Dans la nuit du 5 janvier 1958, la journaliste Yvonne Hakim Rimpel qui aurait reçu chez elle, les
partisans de Déjoie pour écrire des tracts contre le gouvernement et les faire distribuer, fut battue et
violée par des civils portant des cagoules dont Clément Barbot le bras droit de "Papa Doc". A partir
d'avril 1958, François Duvalier s'en prenait aux journalistes indépendants et fermait les journaux Haïti-
Miroir, Indépendance, le Patriote, Judex ect. Le 20 juillet, "Doc" ordonnait à sa police de liquider Ducasse
Jumelle et son frère Charles, deux opposants à son pouvoir.

Entre-temps, le commandant en chef de l'armée, le Général Kébreau qui avait facilité son
accession au pouvoir, fut remplacé par le Colonel Maurice Flambert. "La reconnaissance est une lâcheté
", dira-t-il. A la suite de l'invasion du 29 juillet 1958 avec Pasquet, Perpignan, Dominique et les Shérifs
américains, Duvalier instaurait l'Etat de Siège. Le 31 juillet, il obtenait du parlement le pouvoir de
gouverner par décret et donc de pouvoir annuler ou promulguer des lois au gré de ses propres désirs.
Ensuite, il mettait en place la milice des Volontaires de la Sécurité Nationale (VSN), pour terroriser la
population, liquider ce qu'il considérait comme ses ennemis et servir de contrepoids à l'armée. Au sein
de cette organisation criminelle se formaient des bandes de tueurs professionnels qui assassinaient,
volaient, extorquaient sans avoir de compte à rendre à personne. Parmi les plus immondes chefs de
bandes se détachaient les noms de : Clément Barbot, Luc Désir, Lucien Chauvet, Edner Day, Zacharie
Delva, Astrel Benjamin, André Simon, Mme Max Adolphe, Ti bobo, Boss Pinte, Adherbal Lhérisson...

Voilà donc l'instauration de la dictature duvaliériste. L'opposition et l'armée neutralisées, la


presse indépendante muselée, Duvalier pouvait désormais, diriger comme bon lui semblait. La crise
cardiaque et la tentative d'invasion de 1959 ne représentaient point un obstacle à son entreprise. A
partir de 1961, il prendra des mesures en vue de consolider son pouvoir.

III- Consolidation du pouvoir

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Cours d'Histoire et de Géographie / Secondaire 4

La constitution de 1957 adoptée quelques jours après l'investiture de Duvalier, contenaient des
éléments lui permettant de renforcer sa dictature. En effet, elle n'interdisait pas au nouveau président
d'exercer deux mandats consécutifs. Par contre, elle lui accordait le pouvoir de dissoudre le parlement
bicaméral et de le remplacer par une chambre unique. la tâche était donc devenue facile pour Duvalier
de consolider son pouvoir .
En 1961, tandis que son mandat et celui des parlementaires n'étaient pas encore arrivés à terme,
le président prenait la décision convoquer le peuple en ses comices, mais pas avant la dissolution du
parlement. Les élections ont été organisées, et Duvalier, le seul candidat à la présidence, a été réélu pour
six. Il établira le monocaméralisme qui lui renouvèlera les pleins pouvoirs, tous les six mois.
La prise en otage du pouvoir par Duvalier, mécontentait le Clergé Catholique qui protestait
ouvertement contre cet abus de pouvoir. Le président réagissait en chassant plusieurs prêtres et
archevêques , dont l'archevêque de Port-au-Prince, à la suite de quoi, il a été excommunié. Mais, il
reprendra contact avec le Vatican et obtiendra le droit de nommer lui même la hiérarchie Catholique.
En juin 1964, afin que son autorité ne soit plus remise en question, Duvalier se proclamait
président à vie. A partir de ce moment, toutes les institutions étatiques devenaient un appendice de
l'exécutif, et donc une extension de la main du chef.

IV- " Papa Doc" face aux actions conspiratrices


Duvalier dut faire face aux actions conspiratrices et armées d'haïtiens vivant à l'intérieur et à
l'extérieur du pays. La première crise sérieuse fut la prise des Casernes Dessalines le 28 juillet par un
commando de huit hommes dont trois ex-officiers haïtiens et cinq mercenaires américains. L'opération
faillit réussir à chasser "Papa Doc" du Palais National. Le dictateur en profita pour renforcer son système
de défense en créant les Volontaires de la Sécurité Nationale (VSN), une formation militaire parallèle à
l'armée régulière. Ce que certains officiers n'étaient pas prêts à accepter sans réagir. En 1963, un groupe
d'officiers dirigés par le Colonel Lionel Honorat et d'autres membres de l'état-major ourdit, sans succès,
un complot contre Duvalier. Cet échec conduisit, le 10 avril, à l'élimination physique ou au départ pour
l'exil d'un nombre considérable d'officiers et d'ex-officiers de l'armée d'Haïti.
Durant ce mois d'avril 1963, le pays connut les pires moments de la dictature duvaliéristes. A la
tentative d'enlèvement par Clément Barbot, de Simone et Jean-Claude Duvalier devant le collège Bird,
qui provoqua la mort de leurs gardes du corps, le président répondit sauvagement par la terreur. Les
échecs répétés des invasions de l'ex-général Léon Cantave, à partir de la République dominicaine, au
mois d'avril et août 1963, les incursions du mouvement de guérilla des frères Baptiste dans le Sud-Est et
de celui des 13 de "Jeune Haïti, dans la Grande-Anse à l'été 1964, par de jeunes haïtiens vivant aux Etats-
Unis, créèrent un climat de tensions et de répression dans le pays. Après l'assassinat de Kennedy en 1963
et l'instauration de la présidence à vie, Duvalier parvint à surmonter toutes les crises internes. Ainsi, une
nouvelle tentative d'invasion, au Cap-Haïtien, le 10 août 1968, et la résistance armée de la gauche
marxiste, en 1969, furent facilement anéanties par le dictateur.
Mais, la répression duvaliériste n'empêcha pas au commandant de la Marine haïtienne, le Colonel
Octave Cayard, de se soulever le 24 avril 1970. Malgré les trois jours d'incertitude et la destruction d'une
aile du Palais présidentiel et d'une partie du Fort Lamentin par les canons des navires de guerre, les
mutins durent se plier aux ordres du Département d'Etat et se retirer des eaux territoriales haïtiennes ,
sans parvenir à obtenir la Chute du régime de "Papa Doc".

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Cours d'Histoire et de Géographie / Secondaire 4

V- Politique étrangère
Duvalier savait que son maintien au pouvoir dépendait de l'appui des Etats-Unis; ce qu'il
recherchait activement. Il faisait tout pour entretenir de bonnes relations avec Dwight Eisenhower, le
président américain d'alors. Il lui offrit d'établir une base militaire en Haïti. L'offre fut rejetée. Mais, le
dictateur obtint de l'administration américaine d'importants appuis budgétaires et militaires.
Avec le support des Etats-Unis, Duvalier avec donc les moyens de faire fonctionner son
gouvernement, d'armer les Tontons Macoutes, d'installer tranquillement sa dictature. Au moment où
l'occident faisait face aux menaces communistes, le président haïtien se permettait, au nom de la lutte
contre le communisme, de faire comme bon lui semblait, sous le regard des américains. Cette logique
connut un coup d'arrêt, avec l'élection de John F. G. Kennedy, comme président des Etats-Unis.
Le président Kennedy qui rêvait d'une Amérique latine démocratique, ne cacha pas sa difficulté à
digérer la décision que Duvalier avait prise de consolider son pouvoir à partir de 1961. Donc, toute sa
politique visait à forcer le président haïtien à laisser le pouvoir en 1963, à la fin de son mandat
constitutionnel. Kennedy, dans sa démarche, était rejoint par le président dominicain, Juan Bosch. Aussi,
les relations haïtiano-américano-dominicaines sont-elles alors marquées par des tentatives d'invasion,
de menace de guerres et de bataille diplomatiques. De temps en temps, Duvalier faisait ressortir le
spectre communiste pour faire pression sur Kennedy. Il marchandait les votes d'Haïti dans les
organisations internationales, par exemple, lors de la Conférence de Punta del Este qui consacrait
l'exclusion de Cuba de l'OEA. Au cours de cette période, plusieurs diplomates ont été expulsés du pays. Il
s'agissait de toute évidence des années les plus mouvementées des relations internationales d'Haïti sous
Duvalier.
Cette période permettait de saisir le poids de la Guerre Froide dans les relations internationales
d'Haïti. Kennedy n'aimait pas Duvalier, mais les considérations liées à la menace communiste,
l'empêchait d'adopter certaines mesures qui auraient pu provoquer la chute du régime.
Le 22 novembre 1963, Duvalier sablait le Champagne au Palais national. Son plus grand ennemi,
John Kennedy n'était plus. Bosch avait été victime d'un coup d'Etat deux mois plus tôt . Duvalier avait
donc le champs libre. Il pouvait tranquillement instaurer la présidence à vie en Haïti et confier le pouvoir
à son fils âgé de 19 ans, avant de mourir tranquillement dans son lit en 1971.

VI- Politique économique


Duvalier opta pour l'industrie par substitution aux importations (une stratégie de développement
économique consistant à sortir de la dépendance aux importations de biens transformés, en les
remplaçant par la production intérieure). Il apporta son appui aux industries de consommation; ce qui
permettrait le remplacement des produits importés par des produits nationaux et la création d'emplois.
cette approche économique impliquait le renforcement du système énergétique, l'amélioration de la
communication et du transport. Des mesures ont été donc prises, en vue d'augmenter les réseaux
hydrauliques (le président-dictateur allait jusqu'à nationaliser la Compagnie d'Eclairage Electrique qui
devenait l'Electricité d'Haïti) et moderniser les réseaux téléphoniques. L'aéroport international de Port-
au-Prince fut construit. "De telles initiatives pouvaient avoir des effets positifs sur le développement
économique du pays. Mais l'Etat, mis au service du pouvoir personnel du dictateur, ne pouvait se plier aux
principes rigides de la gestion rationnelle et aux lois du marché. Les politiciens mis à la tête de certaines
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Cours d'Histoire et de Géographie / Secondaire 4

entreprises, avait vite fait comprendre à Duvalier qui avait besoin d'argent pour soudoyer ses partisans,
qu'il pouvait utiliser les fonds de la Régie du tabac, par exemple. Immédiatement, des comptes non
fiscaux n'entrant pas dans les gestions budgétaires furent créés. C'était l'occasion pour ces politiciens de
s'assurer une richesse personnelle, selon la logique de création d'une bourgeoisie noire". Ce système de
corruption constituera une entrave au décollage économique du pays; et la nation connaîtra une
situation de misère dont les gens d'en bas, particulièrement les paysans seront les principales victimes.

VII- Nature du pouvoir duvaliériste


La répression, la corruption, le vaudou et le noirisme constituaient les piliers du pouvoir
duvaliériste. Dans l'Etat duvaliérien, la répression n'avait pas de limites. Elle pouvait toucher tous les
secteurs et, contrairement à la violence des régimes autoritaires traditionnels, elle faisait fi de la
protection conférée par l'âge et le sexe. L'Etat duvaliérien est caractérisé par une infraction systématique
aux codes d'application de la violence en Haïti qui, historiquement, avait épargné en général les enfants,
les vieillards et les femmes. En outre, la violence du pouvoir duvaliériste était aveugle. Il y'a eu de
nombreux cas de victimes par hasard, par erreur : des gens qui se trouvaient aux mauvais endroits aux
mauvais moments, des gens qui, par malheur ressemblaient à un opposant, ou dont la physionomie
laissait croire qu'ils auraient pu appartenir à une famille donnée. Cette violence aveugle n'était toutefois
pas absurde; elle répondait à la logique de la dictature duvaliériste : tuer d'abord et vérifier ensuite.
Dans l'Etat duvaliérien, la corruption étaie érigée en système et l'administration publique allait être le
pivot des pratiques de corruption. La fonction publique fut débarrassée des opposants, des employés
suspects, sans tenir compte des cadres expérimentés et des techniciens qui occupaient des postes de
responsabilité sous les gouvernements antérieurs. Place nette sera faite aux duvaliéristes, en dépit de la
non-qualification et de l'incompétence de la majorité d'entre eux. L'allégeance au pouvoir duvaliérien
était la condition sine qua non pour accéder à la fonction publique. De ce faite, la corruption et le
parasitisme devenaient inhérents au pouvoir duvaliériste.
Au-delà du support de l'armée , Duvalier misait aussi sur le vaudou pour accéder au pouvoir.
Celui-ci allait être entre ses mains, un instrument lui permettant de consolider son pouvoir personnel. Le
dictateur parvenait à réaliser une symbiose parfaite entre les appareils répressifs de son gouvernement
et les structure socioculturelles de la religion vaudou. En effaçant les frontières entre forces répressives
et magie liée aux croyances du vaudou, Duvalier parvenait à cumuler en sa personne, le pouvoir
politique et le pouvoir religieux. Il savait que la connotation mystique de son pouvoir, pouvait lui
permettre de contrôler l'imaginaire collectif, de zombifier les gens, de les rendre incapables de réagir à
l'inacceptable, à l'insupportable. Sur ce plan, toute sa stratégie consista à faire circuler les rumeurs les
plus folles sur ses pouvoirs surnaturels et ses discours étaient émaillés de propos rappelant sa puissance
mystique.
Duvalier s'engageait aussi dans le noirisme. L'un des instigateurs de 1946 mettant fin à la longue
période de suprématie politique des mulâtres en Haïti, "Papa Doc" se présentaient aux élections de 1957,
comme le messie appelé à défendre les masses urbaines et rurales noires, et à assurer les promotions
des classes moyennes. Devenu président, il établissait un gouvernement d'éléments noirs. Mais, qui en
bénéficiait? En effet, le régime que Duvalier promettait d'être l'espoir des masses noires n'était qu'une
fiction. Une décennie après son arrivée au pouvoir, le taux d'analphabétisme est de 92%. La paysannerie
croupissait dans une misère honteuse, avec une espérance de vie à la naissance de moins de quarante
ans et un taux de mortalité infantile de 204/1000. Les ouvriers du prolétariat industriel ne recevaient que
3,50 g/jour. En 1967, Duvalier, le défenseur de négritude, envoyait 20.000 haïtiens en République
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Cours d'Histoire et de Géographie / Secondaire 4

dominicaine pour couper la canne. Selon le contrat conclu avec le gouvernement dominicain, il recevait
$10/tête et $49/ contrat de chaque travailleur, soit un total de $ 1380.000 de dollars qui allait enrichir
ses poches et celles de ses amis. Cela dit, le président-dictateur n'a pas su défendre les intérêts des
masses noires comme il l'avait promis durant sa campagne électorale. Donc, cette révolution qu'il
prétendait avoir réalisé, se résumait essentiellement à des nominations et aux distributions de privilèges
en échange d'allégeance et assujettit le soutien de cliques essentiellement parasitaires composées
d'éléments de la fonction publique de l'armée et du clergé.

TEXTE XII
Duvalier prête serment sur la constitution de 1950 qui prévoit en son article 77 que le mandat du
président est fixé à six ans sans aucune possibilité de prolongation ou réélection immédiate.
Moins de deux mois après l'investiture du nouveau président, une nouvelle constitution est
promulguée. En effet, le conseil électoral avait prévu dans son décret électoral du 25 août 1957 que les
parlementaires élus devront doter le pays d'une nouvelle charte. Les parlementaires élus exécutent à la
lettre et dans le délai prévu ces recommandations. Et le conseil électoral et les nouveaux élus au
parlement acquis à Duvalier semblent agir selon un plan arrêt à l'avance.

Cette constitution, tout en respectant les acquis démocratiques des précédentes constitutions,
introduit des éléments dont se servira Duvalier pour construire sa dictature. Cette nouvelle charte établit
le monocaméralisme ou chambre unique. L'article 48 stipule : Le pouvoir législatif est exercé par une
assemblée unique dénommée " Chambre Législative ". L'article 51 fixe à six (6) ans la durée du mandat
des Députés et ils sont indéfiniment rééligibles.

Dans l'article 68, on lit : Les membres du corps législatif sont inviolables et inamovibles du jour de
leur prestation de serment jusqu'à l'expiration de leur mandat [...]
Et l'article 69 prévoit : Aucune contrainte par corps ne peut être exercée contre un membre du
corps législatif pendant la durée de son mandat. Quant au pouvoir exécutif, l'article 87 de la nouvelle
charte stipule : "La durée présidentiel est de six ans" et cette période commence et se termine le 15 mai
sans qu'il soit possible au chef du pouvoir exécutif de continuer à exercer ses fonctions un jour de plus,
mais nulle part dans la nouvelle charte, il n'est dit que le président de la république n'est pas
immédiatement rééligible. En outre, la nouvelle charte reconnait au Président de la République la faculté
de dissoudre le corps Législatif "article 60".
Emmanuel W., Histoire, Période Nationale, Nouveau secondaire III et VI, page 154.

Questions de révision
1- Fais une brève biographie de François Duvalier.
2- Comment François Duvalier parvenait-il à mettre en place son régime politique?
3- Quelles sont les caractéristiques du pouvoir duvaliériste?
4- Que sais-tu de la politique étrangère de Duvalier?
5- Existe-t-il un lien entre la situation internationale d'alors et l'instauration de la dictature duvaliériste
en Haïti? Explique.

Sujets de réflexion

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1 - Dans leur rapport d'enquête sur l'occupation américaine d'Haïti, Welson Johnson et Hubert
Coligmann soulignent : "le principal objet de l'occupation est d'avoir le contrôle total de la vie
économique du pays". Qu'en penses-tu?

2 - Commente ce point de vue d'un analyste : "L'occupation états-unienne à absorbé la dignité nationale
et les forces morales du pays"

3 - "Lescot n'avait aucun préjugé de couleur, il voulait s'entourer de personnes compétentes pendant
toute son administration". Cela te semble-t-il raisonnable?
4 - Analysant le régime politique mise en place par Elie Lescot, le professeur Sauveur Pierre Etienne
déclare : "c'était tout simplement la résurgence de l'Etat néopatrimonial d'avant l'occupation". Explique.

5 - La dictature instaurée dans le pays par le président Lescot, a-t-elle été la seule cause des
soulèvements populaires conduisant à sa chute?

6 - Commente cette déclaration du politologue Roudy Stanley Penn, concernant le passage du président
Dumarsais Estimé au pouvoir : " Mal venu, mal sorti, mais bien installé ".

7 - Fais le point sur les évènements politiques de 1946.

8 - Fais le bilan du gouvernement de Paul E. Magloire.

Parlant de la situation sociopolitique d'Haïti de 1956 à 1957, un analyste déclare que c'était "un vrai
cauchemar à la Kafka". Explique.

9 - François Duvalier "incarne la malice politique, la politique raciale, le choc noir-mulâtre, la soif du
pouvoir, la violence démesurée...". Commente.

10 - Pierre-Raymond Dumas écrit : "En dehors de tout ce que vous avez entendu, au-delà de la présidence
à vie et de sa sanglante radicalité, François Duvalier reste un maître à penser de la question haïtienne".
Cela te semble-t-il raisonnable?

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Cours d'Histoire et de Géographie / Secondaire 4

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Chapitre I
LA PREMIÈRE GUERRE MONDIALE
(28 juillet 1914 - 11 novembre 1918)

L'Europe de 1914 domine presque entièrement le Monde, par son avance technique et
scientifique, son développement industrielle, son rayonnement commercial, sa puissance financière et
par la possession d'un immense domaine colonial. Pourtant, elle était divisée. Des conflits entre les pays
de ce continent ont eu pour conséquences le déclenchement d'une guerre qui deviendra mondiale.

1- CAUSES PROFONDES
a- L’aggravation des rivalités balkaniques : L'Allemagne, convoitée par les richesses balkaniques
soutient l'Autriche-Hongrie contre la Serbie qui lutte pour l'indépendance des pays slaves. La Russie
slave, entend elle-même, supporter le mouvement serbe.
b- Les susceptibilités nationales demeurent très vives en ce qui concerne les minorités : la perte de
l'Alsace-Lorraine n'est toujours pas acceptée par la France.
c- La concurrence commerciale se fait plus dure. L'Allemagne cherche à se réserver le marché sud-est
européen et à prendre pied sur les marchés extra-européens (asiatiques surtout). Elle se heurte à
l'Angleterre qui défend ses positions acquises. La concurrence japonaise en Extrême-Orient menace aussi
les intérêts britanniques.

d- La concurrence navale oppose également l'Angleterre à l'Allemagne, dont le programme


d'armements navals menace la traditionnelle primauté britannique.
e- Simultanément, les armées de terre sont renforcées en Allemagne, France, Russie. C'est la course aux
armements.

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f- Devant la complexité et la gravité de ces problèmes, les grandes puissances cherchent à assurer leur
sécurité par des alliances solides. Deux blocs se forment: a) la Triple-Alliance (Allemagne, Autriche-
Hongrie et Italie) et la Triple-Entente (France, Russie et Royaume-Uni).

2- CAUSE IMMEDIATE OU OCCASIONNELLE


Assassinat de l'Archiduc héritier François Ferdinand à Sarajevo, par Gravrilo Princip. L'Autriche-
Hongrie veut exploiter l'affaire pour écraser la Serbie, qu'elle accuse de complicité, et éliminer ainsi
l'obstacle serbe à sa politique balkanique. Assurée de l'appui de l'Allemagne, L'Autriche-Hongrie adresse
à la Serbie, un ultimatum le 23 juillet 1914. Celle-ci, l'a réfuté. Devant ce refus, l'Autriche-Hongrie
mobilise, puis déclare la guerre à la Serbie, le 28 juillet 1914.

3- L'ENTREE EN GUERRE DES ETATS-UNIS


D'abord isolationnistes, les Etats-Unis se sont peu à peu rapprochés des puissances de l'entente:
par intérêt matériel : l'Entente est le meilleur client des Etats-Unis. Et ses achats se développent sans
cesse.

Par intérêt moral : Sympathie d'une puissance démocratique pour la France et l'Angleterre.
Par conviction idéologique : le président Wilson croit pouvoir jeter les bases d'une paix juste et
durable, par l'application de principe strictement démocratique.
La guerre sous-marine décidée par l'Allemagne soulève la réprobation et menace les Etats-Unis
dans leurs intérêts. De là, la rupture des relations diplomatiques suivie de la déclaration de guerre des
Etats-Unis à l'Allemagne, le 2 avril 1917.

4- LA GUERRE A L’OUEST (1914-1918)


Le front occidental n'est qu'un théâtre d'opérations de la guerre de 1914-1918, mais il est le plus
important. En effet, c'est à l'Ouest que l'état-major allemand voulait assurer sa victoire en écrasant la
France en six semaines (Plan Schlieffen). Et c'est à l'Ouest que parte l'offensive alliée qui contraint
l'Allemagne à l'armistice du 11 novembre 1918.
a- Guerre de mouvement (août - novembre 1914). L'offensive allemande à travers la Belgique
bouscule toute résistance (Bataille de Charleroi, 21-23 août) et contraint les Français à la retraite.
L’imprudence de l'aile droite allemande permet à Joffre de contre-attaquer (Bataille de la Marne, 6-13
septembre). La tentative allemande pour occuper alors les ports du Nord est arrêtée par Foch (Bataille
de l'Yser).
b- Guerre de position (novembre 1914 - mars1918). Le front s'est stabilisé. Pour vaincre, il faut
percer les lignes adverses: lignes de tranchées, équipées d'emplacements de tir, protégées par des
réseaux de fil de fer barbelé, enfin reliées entre elles par des boyaux. Les troupes se terrent dans des
abris souterrains. Des armes nouvelles sont utilisées : armes à tir rapide (mitrailleuse), armes à tir courbe
(grenade, mortier). Cette nouvelle forme de guerre exige des effectifs considérables et un énorme
matériel de tout genre. Ainsi, parle-t-on d'une guerre totale.

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Les français lancent leurs attaques en Artois (1915), en Champagne (1915), sur la Somme (1916),
sur l'Aisne (1917). Les allemands attaquent Verdun (1916). Les pertes son très lourdes de part et d'autre
(la France à 275 000 tués à Verdun et l'Allemagne 240 000). Les résultats sont dérisoires.
c- Reprise de la Guerre de mouvement (mars-novembre 1918). Les conditions de la Guerre sont
modifiées au profit de la Triple Entente par l'intervention des troupes américaines (250 000 hommes par
mois) et l'unité de commandement (Foch généralissime des armées Alliés, 14 avril 1918).
L'Allemagne comprend le danger et veut arracher la victoire en attaquant la première. Les
offensives allemandes de Picardie (mars 1918), Flandre (avril 1918), Champagne (mai 1918) obtiennent
des résultats très limités, mais en Juillet, encore en Champagne, les Allemands sont arrêtés et refoulés :
C'est la deuxième bataille de la Marne. Dès lors, les Alliés prennent l'initiative. Les troupes allemandes
refluent au centre et à l'Ouest; abandonnant le Nord de la France et la Belgique occidentale. Parce
qu'elle est épuisée et pour éviter que la guerre n'atteigne son propre territoire, l'Allemagne accepte
l'armistice qu'elle signe à Rethondes le 11 novembre 1918.

5- CONSEQUENCES
La " Grande Guerre " a été le premier conflit réellement mondial. Elle a exigé, de la part des
belligérants, un effort sans précédent dans tous les domaines. Aussi a-t-elle affecté d'une manière
profonde et durable l'équilibre interne des Etats qui ont pris part au conflit. Les pertes sont énormes.
a- Pertes humaines. 8 500 000 morts environ (dont environ 1800 000 allemands et 1 400 000
français). Cette saignée terrible affectera longtemps la situation démographique des Etats les plus
touchés. Dans l'immédiat, elle les prive gravement de main-d'œuvre. En outre, l'ampleur des pertes
humaines soulève l'indignation et l'horreur. Pour ne voir " plus jamais cela ", les tendances pacifistes se
développent.
b- Pertes matérielles. La guerre de position, les bombardements et les combats qui l'ont
accompagnée, ont dévasté des régions entières (3 millions d'hectares en France). Des villages et des
villes sont détruits (300 000 maisons en France) ainsi que des installations industrielles et des moyens de
transport. A l'arrière l'équipement est usé.
c- Pertes financières. Pour faire face aux énormes dépenses de guerre, les belligérants ont émis
en masse du papier-monnaie; d'où dépréciation de la monnaie et hausse des prix, ce qui aggrave les
misères des populations. En outre, les puissances de l'entente ont contractés de grosses dettes, surtout à
l'égard des Etats-Unis.
d- L'effort de guerre et les destructions ont gravement affecté le potentiel industriel de
l'Europe : partout la production agricole ou industrielle est en baisse. En revanche, les fournisseurs de
l'Europe, l'Amérique du Sud, Dominions britanniques, Etats-Unis surtout; ont pu accroître production et
exportation. Les Etats-Unis sont parvenus au premier rang des grandes puissances économiques. En
Asie, le Japon a tiré parti de l'effacement des puissances occidentales; sa clientèle s'est
considérablement étendue.

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e- Les Traités de Paix. Le rétablissement de la paix et l'édification d'un nouveau statut européen
ont été réalisés par les armistices de 1918 et les traités de 1919-1920.
-Le traité de Versailles ( 28 juin 1919), concerne l'Allemagne. Elle comporte des clauses
territoriales (l’Allemagne cède à la France l'Alsace-Lorraine), des clauses militaires (l'armée allemande
est limitée à 100 000 hommes) des clauses morales (l'Allemagne est déclarée responsable de la guerre,
elle doit donc réparer les dommages subis par les victimes de la guerre) et des clauses économiques
(l'internationalisation des grands fleuves allemands).
- Les traités de Saint-Germain (10 septembre 1919) et de Trianon (4 juin 1920), concernent
l'Empire Autriche-Hongrie. Le premier traité fixant le sort de l'Autriche et le seconde celui de la Hongrie.
L’Empire est démantelé et de nouveaux Etats prennent naissance (Tchécoslovaquie, Yougoslavie...).

NB : Les traités de 1919-1920 portaient en eux tous les germes de la deuxième guerre mondiale. Ils
humiliaient l'Allemagne sans vraiment l'affaiblir puisqu'elle conservait son potentiel industriel. En
détruisant l'Autriche-Hongrie, ils balkanisaient l'Europe centrale et multipliaient des frontières, motifs de
discorde. Ils décevaient cruellement l'Italie. Et surtout, les traités sont ignorés par deux grandes
puissances : les Etats-Unis et la Russie.

6- LA SDN
La Société des Nations (SDN) est créée en avril 19191. Les Etats membres de cette Société sont
les Alliés de la guerre (sauf les Etats-Unis dont le Congrès ne ratifie pas l'accord) ainsi que certains Etats
neutres (Etats scandinaves, Suisse, Espagne, Portugal).
la Société des Nations a pour but : 1) d'assurer la paix mondiale; 2) de garantir l'indépendance
politique et l'intégrité territoriale de tous les Etats, grands ou petits (des sanctions économiques et
militaires sont prévues à l'encontre de l'Etat qui se rendrait coupable d'agression).
La SDN représente un immense espoir de paix, mais la construction est fragile pour les raisons
suivantes: 1) Elle ne dispose d'aucune force militaire internationale pour imposer le respect de ses
décisions; 2) deux grandes puissances n'adhèrent pas au pacte en 1919 : les Etats-Unis et la Russie.

Chapitre II

LA REVOLUTION RUSSE (1917)

Le peuple et l'armée russe sont accablés par la misère et la disette que la guerre aggrave
terriblement. En 1917, le désespoir provoque à Petrograd une agitation qui se transforme très vite en
insurrection contre l'autocratie.
La Révolution s'est faite en deux étapes :
1-LA REVOLUTION DE MARS 1917
D'abord, des émeutes ouvrières dues à la disette et à la misère; puis, un mouvement politique dirigés
par les libéraux et les socialistes (mencheviks); enfin, une insurrection unissant la population ouvrière de

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Petrograd à une partie de l'armée passée à la rébellion. Le mouvement s'amplifie et se rend maître de la
Capitale. Conséquences:
- Abdication de Nicolas II (15 mars 1917). Son frère le grand Duc Michel, renonce à la couronne. Un
gouvernement provisoire, issue de la Douma (assemblée élue) est alors constitué sous la présidence du
prince Lvov. C’est la République de fait. Mais, deux pouvoirs s'opposent :
a) Le gouvernement provisoire : il est composé de libéraux et de sociaux-démocrates (dont
Kerenski, président du gouvernement à partir d'août 1917. Bien que ne disposant que d'un mince appui
bourgeois, il s'efforce de poursuivre la guerre et d'éluder la révolution sociale en faisant élire une
Constituante.
b) Les soviets : A l'imitation de Petrograd où un Soviet est élu en mars 1917, le peuple russe tout
entier s'est constitué en Soviets, Conseils d'ouvriers, de paysans et de soldats. Les socialistes
révolutionnaires (Bolcheviks), dont les chefs rentrés d'exil sont Lénine et Trotski, travaillent à gagner ces
Soviets à la doctrine marxiste.

2- LA REVOLUTION D’OCTOBRE 1917


Elle est préparée par Trotski, en accord avec Lénine : implantation des Bolcheviks dans des
Soviets, création des Gardes rouges (recrutement surtout ouvrier), création d'une direction
insurrectionnelle (le Comité Militaire Révolutionnaire).
Le 24 octobre 1917, la Révolution est déclenchée, Kerenski est chassé, la constituante est
dissoute; et le pouvoir est transféré aux Soviets. Il est exercé par le Conseil des Commissaires du Peuple
que préside Lénine. Des mesures sont prises, comme le retrait de la Russie du conflit, l'armistice avec
l'Allemagne le 15 décembre 1917 qui débouchera sur la paix germano-russe signée à BREST-LITOVSK le 3
mars 1918, le décret abolissant la grande propriété foncière et remettant la terre aux " comités agraires
", le décret de socialisation de l'industrie.
3- POUR SAUVER LA REVOLUTION
La Révolution d'octobre 1917 a triomphé, mais la Russie, bouleversée, est dans une situation
effroyable. L'énergie de Lénine, véritable chef du nouveau régime, la sauve de l'anarchie.
a- Le Communisme de guerre rétablit l'ordre, restaure le travail, assure le ravitaillement. Grâce
au dévouement des membres du parti, à une police sévère (Tcheka), à des procédés dictatoriaux
(censure, exécutions, confiscations) et à un régime économique étatisé.
b- L'armée rouge, animée par Trotski (500 000 hommes en 1918, 5 millions en 1920), profite de
la désunion des Russes blancs, mal soutenus par les Alliés. Elle résiste d'abord (1918) à la pression des
armées contre-révolutionnaires (Denikine au Sud-ouest, Youdenitch au Nord-Ouest, Koltchak en Sibérie).
Puis, elle prend l'offensive et s'assure le contrôle du pays en 1919-1920. En même temps, l'attaque
préventive déclenchée par la Pologne et d'abord victorieuse (prise de Kiev) est repoussée (1920).

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Cependant, tout est compromis par la crise de 1921. La famine provoque la mort d'environ 5
millions de personnes, le désespoir est général. De sanglantes émeutes éclatent à Petrograd. Trotski
brise la mutinerie par la force (mars 1921). mais, pour sauver la Révolution, Lénine adopte la
N.E.P.(Nouvelle Politique Economique) : rétablissement de la liberté économique pour les paysans et les
petits commerçants; adoucissement du régime policier.
Deux autres mesures d'organisation suivent :
- Création de l'Union des Républiques Socialistes Soviétiques (30 décembre 1922), fédération
des quatre républiques de Russie : Russie blanche, Ukraine et Transcaucasie.
- Constitution de 1924, qui donne le pouvoir exécutif aux commissaires du peuple, le pouvoir
législatif au Praesidium, assisté du Congrès des Soviets et du Comité central exécutif. Mais, le parti
communiste, dirigé par le secrétaire général, double toutes les institutions et assure par là unité de vues
et discipline.

4- L'ASCENSION DE STALINE
Lénine meurt le 21 janvier 1924. Staline, secrétaire général du parti communiste depuis 1922, lui
succède à la direction de fait de L'U.R.R.S., qu'il exercera jusqu'à sa mort, en 1953.
La succession de Lénine était difficile, car il était devenu le symbole du communisme et son
prestige, intérieur et extérieur, était considérable. Staline manœuvra habilement et réussit à écarter
successivement ses concurrents dont Trotski. En décembre 1927, Staline devient le vrai maître de
l'U.R.S.S.
L'œuvre de Staline présente trois très principaux :
a- Elimination brutale des adversaires. Les trotskistes qui veulent tout sacrifier à la révolution
mondiale, sont éliminés (1927-1929). Trotski lui-même est déporté au Turkestan, puis expulsé d'U.R.S.S.
Plus tard, Staline procède à une gigantesque purge, très sanglante, qui frappe d'anciens amis de Lénine,
ainsi qu'une opposition de droite. Des milliers d'hommes sont tués ou déportés en Sibérie (1934-1938).
Cette rigueur implacable a certainement affaibli l'U.R.S.S.
b- Reprise des relations extérieures avec les État bourgeois : entrée à la SDN, 1934, traité avec la
France, 1935.
c- Développement de la production, par les plans quinquennaux pour faire de l'U.R.S.S. un Etat
moderne. Les obstacles rencontrés dans le monde rural sont impitoyablement brisés et le gouvernement
soviétique réussit à imposer la socialisation de l'agriculture avec les Kolkhozes (fermes collectives) et les
Sovkhozes (fermes de l'Etat).
En 1936, une nouvelle constitution est publiée : le gouvernement central, simplifié, se compose
des Commissaires du peuple, du Praesiduim et du Conseil suprême.
En dépit des difficultés, l'U.R.S.S. devient une grande puissance, aux institutions solides et à l'économie
moderne. Le régime résistera à l'effroyable épreuve de la deuxième guerre mondiale.

Chapitre III
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LA CRISE ECONOMIQUE DE 1929 ET SES CONSÉQUENCES


En 1929, la situation économique mondiale est très satisfaisante. L'Europe a relevé ses ruines. Les
vaincus de 1918, grâce surtout aux capitaux américains, paraissent eux-mêmes avoir retrouvé leur
équilibre. C'est alors qu'une crise sans précédent s'abat sur le monde.

La crise prend naissance le 22 octobre 1929, à New York. Les causes en sont particulièrement aux
Etats-Unis :
1- Revenus agricoles menacés par la surproduction due à la difficulté d'écouler les excédents de
production vers l'Europe où une situation normale est progressivement rétablie;

2- revenus industriel très inégaux selon les secteurs considérés, menacés aussi par la
surproduction, enfin gonflés artificiellement par le développement exagéré des ventes à crédit.
Panique boursière à l'origine, la crise affecte très vite toute les formes d'activité : les faillites de
banques entraînent la fermeture des usines, donc le chômage qui, lui-même, provoque la réduction de la
consommation. Cette limitation des achats est la cause de nouvelles difficultés pour les producteurs...Les
prix s'effondrent.
La crise gagnent rapidement l'Europe, puis le reste du monde car, financièrement et
économiquement, de très nombreux Etats étaient devenus dépendants des Etats-Unis en raison de : a)
leur puissance financière depuis la guerre (prêts et investissements à l'étranger); b) leur essor
commercial (conquête de marchés).
Le monde est ainsi en présence de : crise financière, crise économique, crise sociale (30 millions
de chômeurs aux Etats-Unis et en Europe), crise politique (seul l'Etat a des moyens suffisants pour
intervenir).

Les conséquences de la crise sont démesurées :


a) aux Etats-Unis, les républicains sont dérobés; un président démocrate, F. D. Roosevelt, est élu,
qui emploie une politique économique hardie : aide aux fermiers par des prêts et en encourageant la
limitation de la production; aide aux ouvriers par le relèvement des salaires et la réduction du temps de
travail ainsi que par la création d'un système fédéral d'assistance sociale; lutte contre le chômage par
l'organisation de grands travaux d'intérêts général. C'est le New Deal (Nouvelle répartition de revenus).
b) en France et dans le Royaume-Uni, le marasme économique est cause de sérieuses difficultés
politiques; à Paris, il y a une véritable crise du régime parlementaire.
c) en Allemagne, la crise pose à nouveau la question des réparations et la misère prédispose à
des solutions dictatoriales.
Partout l'Etat intervient pour défendre l'économie en péril. D'abord, par des procédés empiriques :
destruction des stocks et action sur les prix; protectionnisme allant parfois jusqu'à l'autarcie. Puis, on
cherche à accroître les débouchés intérieurs par l'ouverture de grands travaux, qui fait appel à un grand
nombre d'industries. Enfin, les puissances s'efforcent de conquérir des débouchés extérieurs par des
procédés économiques (dumping ou vente à perte) ou politiques (formation de blocs).
La crise mondiale a ainsi deux conséquences de portée immense : la fin du capitalisme libéral; la
concurrence accrue des impérialismes.
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TEXTE I
*…+ Partie de Wall Street, la crise financière avait gagné le monde entier, à l’exception de l’URSS dont les
fondements économiques ne dépendaient plus du capitalisme international. Mais ces troubles financiers
n’étaient que l’expression d’une crise économique générale.
La surproduction est en réalité la cause profonde de la « grande dépression ». Dès 1928 ou 1929, selon les
pays et les produits, la capacité d’absorption du marché se révèle inférieure aux prévisions trop
optimistes qui avaient incité industriels et agriculteurs à forcer sans discernement leur production. La
mévente s’installe, engendrant une baisse à peu près générale des prix de gros. Les achats fléchissent,
soit que la clientèle, escomptant la poursuite de la baisse, différât ses achats, soit que les marchés fussent
saturés. Cependant que les stocks s’accumulent, les entreprises dépendent plus que jamais du crédit.
Or, le ralentissement imprévu de l’activité industrielle, contrastant avec la spéculation, provoque la chute
des cours boursiers. Cette crise financière est le pivot de la crise générale : conséquence des premiers
troubles économiques, elle contribue à les amplifier. En effet, par suite des retraits massifs ou des
blocages de fonds, la circulation des capitaux, qui avait été un facteur déterminant de la prospérité, est
perturbée. Industriels, agriculteurs, commerçants, sont privés de l’appui bancaire qui leur permettrait de
surmonter des difficultés encore limitées.
J. BOUILLON, P.SORLIN, Le Monde Contemporain, Histoire-civilisations, Pages 133-134.

Chapitre IV

L'ITALIE DE 1918 A 1939


L'Italie sort épuisée de la première guerre mondiale qui a créé une situation catastrophique: la
guerre a gravement éprouvé le pays (700 000 morts, dettes à l'égard de l'étranger). Les traités
n'apportent pas les compensations espérées, ni en Europe (l’Italie n'obtient pas Fiume et la côte
Dalmate), ni en Afrique (aucune annexion coloniale). La misère et le chômage provoquent une crise
sociale qui affecte les masses ouvrières, aussi bien que les masses paysannes du Nord; donnant ainsi
naissance à des mouvements de grève dans les villes industrielles. Ces conditions anarchiques facilitent
les débuts du fascisme, mouvement politique qui apparaît en Italie dès 1919 sur l'initiative de Mussolini.

1-LA MONTEE DU FASCISME


En 1919, Mussolini organise un parti politique dont le programme est publié en mars de la même
année. Trois thèmes : exaltation du sentiment patriotique et défense des intérêts italiens, qui lui vaut
l'appui des chefs militaires; réformisme social préconisant l'organisation corporative des travailleurs;
rétablissement de l'ordre (création des faisceaux de combat et les chemises noirs), évidemment
approuvé par la bourgeoisie et les chefs d'entreprise.
- Quatre phases dans l'histoire du fascisme jusqu'en 1939 :
1919-1921. Premiers progrès. Le fascisme s'impose dans le pays par les violences commises contre les
hommes et les partis de gauches. Sous prétexte de collaborer au rétablissement de l'ordre, il entretient
une atmosphère de guerre civile et prépare l'opinion à tous les abus. Avec 30 élus aux élections en 1921,
Mussolini, réclame déjà le pouvoir.

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1922. Prise du pouvoir. La puissance grandissante du fascisme se manifeste en août, lorsqu'il


s'oppose avec succès à un mouvement de grève général décidé par les syndicats ouvriers qui voulaient
protester ainsi contre les violences continuellement perpétrées par les chemises noires.
En octobre, sous la menace d'une marche des colonnes fascistes sur Rome pour s'emparer du
pouvoir par la force, Mussolini est désigné comme président du Conseil par le roi Victor-Emmanuel.
1922-1925. Elimination des oppositions. Après le succès du fascisme aux élections de 1924 (406
fascistes sur 535 députés), Mussolini procède à l'élimination des oppositions: assassinat du chef
socialiste Matteotti; interdiction des parti politiques à la seule exception du parti fasciste; interdiction
des syndicats indépendants, au profit des syndicats fascistes; réforme de la Constitution donnant les
pleins pouvoirs à Mussolini.

1926-1939. Dictature. Mussolini, le Duce, chef absolu du gouvernement, responsable seulement


devant un roi faible et résigné, organise alors l'Italie fasciste avec la collaboration du Grand Conseil
Fasciste.

Deux décisions sont importantes : a) 1927. Charte du Travail, organisant les syndicats fascistes
sous le contrôle de l'Etat; b) 1938. Suppression de la Chambre des députés. Création de la Chambre des
faisceaux et des corporations pour remplacer la Chambre des députés.

2- LE REGIME FASCISTE
Mussolini veut créer une nouvelle forme de gouvernement et un esprit nouveau, l' " esprit
fasciste " que résume la devise : " croire, obéir, combattre ".
L'Esprit fasciste repose sur trois principes fondamentaux :
Totalitaire. Le fascisme élimine la démocratie et subordonne tout à l'intérêt national. Il s'incarne
dans le chef, Duce.
Nationalistes. Fier du passé antique de l'Italie, le fascisme veut faire de la Méditerranée une mer
italienne et, pour trouver un débouché à une population qui s'accroît, il veut développer les colonies.
Constructeur. L'Etat fasciste prétend rénover l'Italie au point de vue agricole, industriel et, en
même temps, améliorer le sort du peuple.
A cette fin, Mussolini donne au pays des institutions autoritaires : le Duce est le chef politique et
militaire de l'Etat; le Grand Conseil Fasciste dirige le parti et assiste le Duce.
En revanche : La chambre des députés n'a aucune autorité, les députés étant nommés sur
présentation des syndicats. En 1938, elle est remplacée par la Chambre des faisceaux et des corporations
(émanation des syndicats fascistes, seuls autorisés). La monarchie est tenue à l'écart.
L'Etat fasciste contrôle toutes les activités intellectuelles (presse, cinéma, radio) et
professionnelles (syndicats). Il a fallu pourtant composer avec l'Eglise : les Accords de Latran (1929)
créent l'Etat du Vatican et assurent à l'Eglise une certaine indépendance en échange de sa neutralité
bienveillante à l'égard du régime.

Chapitre V

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L'ALLEMAGNE DE 1918 A 1939


Bien que la guerre ne soit pas déroulée sur son propre sol (sauf en Prusse orientale), l'Allemagne
a été durement touchée : 1 800 000 morts, une économie à bout de souffle, une population épuisée par
l'effort militaire et l'effort de production qui lui ont été imposés.

1-L'ALLEMAGNE A LA FIN DE LA PREMIERE GUERRE MONDIALE


La défaite militaire, l'Abdication de Guillaume II (9 novembre 1918), la signature de l'armistice (11
novembre 1918) aggravent le désarroi... Il en résulte :
agitation révolutionnaire inspirée par l'extrême-gauche communiste ( groupe Spartakus de Rosa
Luxemburg et Karl Liebknecht) qui inspire de l'exemple russe; agitation nationaliste des milieux
militaires (Ludendorff) qui refusent de reconnaître la défaite, veulent sauver l'armée et rendre possible
un revanche et, éventuellement, une restauration; réveil des tendances séparatistes, alimentées par les
oppositions d'intérêts (entre régions rurales et régions industrielles) et les oppositions religieuses ( entre
régions catholiques et régions protestantes). Mais, c'est le mouvement ouvrier de Berlin qui a permis,
en novembre 1918, la proclamation d'un gouvernement provisoire.

2- LE GOUVERNEMENT PROVISOIRE

Il est formé de six commissaires du peuple présidé par Ebert. Il se heurte à deux adversaires :
opposition spartakiste. Des émeutes tentent de renverser le Conseil provisoire qui se défend en faisant
appel à l'armée; opposition nationaliste. Les corps francs de la Baltique tentent un coup de force sur
Berlin. A cette situation d'anarchie, s'ajoutent les grandes difficultés économiques et financières.
C'est donc dans ces circonstances particulièrement difficiles que s'est réunie, en janvier 1919,
l'Assemblée Constituante de Weimar, Chargée d'organiser la république constitutionnelle.

3- LA REPUBLIQUE DE WEIMAR
La constitution de Weimar (août 1919) fait de l'Allemagne une république fédérale divisée en dix-
sept pays, mais pourvue d'un gouvernement central fort :
Président, élu au suffrage universel pour sept ans (Ebert, socialiste, président du gouvernement
provisoire, est désigné) est doté de pouvoir étendus; chancelier, désigné par le président, chargé de
diriger le gouvernement et responsable devant le Reichstag (élu au suffrage universel pour quatre ans, il
a le pouvoir législatif).
En avril 1925, à la mort d'Ebert, la droite porte à la présidence le vieux maréchal Hindenburg. Ce
dernier rétablit des relations normales avec les vainqueurs de la première guerre mondiale. Par le traité
de Locarno, l'Allemagne reconnaît volontairement ses frontières occidentales (octobre 1925); puis elle
entre à la SDN en 1926.
Mais entre 1929 et 1933, l'Allemagne connaîtra une grande difficulté économique ( 7 millions de
chômeurs) dont les répercussions seront graves (renouveau de l'agitation de rue...). Le 30 janvier 1933,
Hindenburg appellera Hitler à Chancellerie, comme représentant du parti le plus nombreux au Reichstag
(230 nazis). Et pour avoir obtenu 13 millions de voix aux élections présidentielles de mars 1932.

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4) L'AVENEMENT DU NATIONAL-SOCIALISME
Hitler, président du parti national-socialiste allemand du travail, (le parti nazi), à la tête de la
chancellerie, devient le chef absolu de l'Allemagne en quelque mois :
Par l'élimination des communistes, puis des socialistes; par l'élimination des syndicats
indépendants, remplacés par les groupements professionnels du Front du Travail nazi; par l'élimination
de l'opposition dans le parti (c'est la nuit du Long Couteau, 30 juin 1934); par la succession
d'Hindenburg. A la mort de celui-ci, en août 1934, Hitler unissant les fonctions de président et de
chancelier, devient Reichsführer, dictateur tout-puissant. En fin, par le contrôle de l'armée en 1938,
Hitler devient le commandant suprême de l'armée allemande.

5) LE REGIME NATIONAL-SOCIALISTE
Il a bouleversé la vie allemande; par l'introduction d'une doctrine politique nouvelle, diffusée en
Allemagne par le livre d'Hitler lui-même, " Mein Kampf "(Mon Combat), la véritable "Bible" du Nazisme;
par l'implacable résolution montrée par les dirigeants nazis pour appliquer cette doctrine jusqu'à ses
plus extrêmes conséquences.
Le but est de fonder le IIIe Reich pour mille ans. Cet Etat est défini par la formule " Ein Volk, ein
Reich, ein Führer " (un seul peuple, un seul Etat, un seul chef).

a) Ein Volk (un seul peuple). Ce peuple, c'est le peuple allemand, seul authentiquement aryen. En
effet, la doctrine hitlérienne repose essentiellement sur la notion de racisme, théorie de la supériorité de
la race aryenne. Celle-ci doit être protégée par l'élimination des étrangers qui risquent de la contaminer.
Les juifs sont éliminés de la communauté allemande par les lois de Nuremberg (1935).
b) Ein Reich (un seul Etat). Réunir en un seul grand Etat allemand toutes les communautés
germaniques d'Europe; donner au peuple allemand, ainsi rassemblé, l'espace vital, auquel il a droit;
effacer la honte du "diktat" de Versailles en rendant à l'Allemagne l'égalité des droits, c'est-à-dire, la
liberté d'armer à sa guise.
c) Ein Führer (un seul chef). L'Etat est totalitaire. le chef de l'Etat, le Reichsführer Hitler exerce
tous les pouvoirs, sans aucune entrave parlementaire et sans aucun contrôle de son propre parti, seul, il
dirige les destinées. c'est le principe du chef.

Chapitre VI

LA DEUXIEME GUERRE MONDIALE : 1939-1945


1-CAUSES
La guerre trouve son origine dans l'agressivité des régimes totalitaires : le Nazisme et le fascisme.
Adolf Hitler, convaincu de la supériorité de la race germanique qui étouffe sur un territoire exigu,
préconise la conquête par la violence, d'un espace vital. En 1934, il abandonne la SDN. En 1939, il occupe
La Bohême et la Moravie et réclame à la Pologne le couloir de Danzig.
Benito Mussolini, soutenu par Hitler, se lance à l'assaut de L'Ethiopie en octobre 1935.

39
Cours d'Histoire et de Géographie / Secondaire 4

Aussi, faut-il souligner que les traités de 1919 et de 1920 qui ne satisfont ni les vainqueurs, ni les vaincus
et les difficultés économiques qui frappent ces pays dans l'entre-deux-guerres sont deux autres causes
fondamentales de la deuxième guerre mondiale.
Mais, cette guerre débute 1er septembre 1939, par l'invasion de la Pologne par l'Allemagne. Le 3
septembre, en vertu des alliances faites avec la Pologne, la France et l'Angleterre déclarent la guerre à
l'Allemagne, et s'engagent dans un conflit entraînant la ruine de l'Europe et le bouleversement de
l'équilibre mondial.

2- LA DEUXIEME GUERRE MONDIALE PRESENTE DEUX ASPECTS SUCCESSIFS :


a- 1939-1942, succès des offensives éclaires (Blitzkrieg) lancées par l'Allemagne. La Pologne est
conquise en un mois. La France écrasée, signe l'armistice du 22 juin 1940. L’Allemagne attaque l'URSS le
22 juin 1941 et s'avance profondément en territoire russe. Les Alliés perdent le Balkans. Ceux-ci
connaissent une situation tragique, surtout après la guerre aérienne et navale déclenchée par
l'Allemagne. Mais, l'entrée en guerre des Etats-Unis leur permet de résister.
b- 1942-1945, offensives victorieuses des Alliés. Les Alliés entreprennent leurs premières contre-
offensives, dans le Pacifique, en URSS où une nouvelle attaque allemande est brisée à Stalingrad. En
1943, ils débarquent en Sicile, puis en Italie où le Régime fasciste s'effondre. L'année 1944 est décisive,
car l'Allemagne est violemment attaquée par l'Est (Russes), le Sud (Français) et l'Ouest (Anglo-Saxons).
Elle résiste pourtant jusqu'à l'épuisement complet de ses forces. Malgré tout, elle est envahie, Berlin est
occupé (Hitler se suicide) et la capitulation sans conditions est signées à Reims le 7 mai et à Berlin le 8
mai 1945, par les chefs militaires.
En Asie, soumis à une offensive aérienne sans précédent (une nouvelle arme, la bombe atomique
est lancée sur l'Hiroshima, le 6 août 1945 et sur Nagasaki, le 9 août 1945), le Japon doit capituler à son
tour le 2 septembre 1945.

3- L’ENTREE DES ETATS-UNIS DANS LA GUERRE


Les progrès du Japon inquiétant l'opinion américaine, le gouvernement des Etats-Unis réclame
l'abandon de la Chine et cesse toute relation commerciale avec le Japon. Celui-ci, le 7 décembre 1941,
attaque par surprise les bases américaines du Pacifique (Midway, Wake, Guam) et surtout Pearl Harbor,
dans les îles Hawaii. Les Etats-Unis entrent donc dans la guerre, en avril 1941, en vue de défendre leurs
intérêts.

4- CONSEQUENCES
50 millions de morts. Les Etats-Unis ont acquis la prépondérance économique sur le monde
entier. Le régime républicain est rétabli en France. Les régimes totalitaires sont effondrés. Certains
peuples coloniaux accèdent à l'indépendance. Le 24 juin 1945, à San Francisco, une nouvelle organisation
prend naissance (l'Organisation des Nations Unies, ONU), en vue de rétablir la paix dans le monde.

TEXTE II

40
Cours d'Histoire et de Géographie / Secondaire 4

Dan sa dimension européenne, la seconde guerre mondiale constitue, en fait, la deuxième phase
de ce qu’on a appelé la « grande guerre civile de l’Europe », commencée en 1914 et seulement suspendue
temporairement en 1918. Aussi les origines de cette deuxième phase sont-elles relativement plus simples
que celles de la première, et les responsabilités, plus claires.
Cette fois, c’est un homme, c’est le gouvernement d’un pays, qui organise systématiquement la
marche à l’abîme. Son objectif fondamental est d’accroître « l’espace vital » de la race allemande par une
guerre de conquête dirigée vers les grandes plaines de l’Europe de l’Est, aux confins de la Pologne, de
l’Ukraine et de la Russie. Pour cela, il faut d’abord réorganiser l’Allemagne sur le plan intérieur, c'est-à-
dire installer l’Etat totalitaire nazi, puis déchirer le traité de Versailles en réarmant l’Allemagne et en
rassemblant dans le Grand Reich tous les Allemands qui en ont été exclus. Dès lors, après l’élimination de
la France pour éviter une guerre sur deux fronts comme en 1914, pourra commencer la marche vers l’est
et la colonisation des territoires conquis.
*…+ A l’été 1939, l’Empire hitlérien, grossi de toutes ses annexions « pacifique » (Autriche,
Tchécoslovaquie), s’attaque à la Pologne. Cette fois, la France et la Grande Bretagne avertissent qu’elles
ne laisseront pas passer. Mais, il est trop tard, et personne ne les croit. Staline signe un pacte de non-
agression avec Hitler et accepte même de lui fournir de pétrole et du blé moyennant une moitié de
Pologne. Le 1er septembre, non sans une vague inquiétude malgré tout, Hitler déclenche la foudre qui,
après avoir détruit toute l’Europe, s’abattra sur l’Allemagne elle-même.
Georges LANGLOIS, Gilles VILLEMURE, Histoire de la Civilisation Occidentale, Beauchemin, page 350

TEXTE III
*…+ Issue en droite ligne des conceptions hitlériennes, la solution finale de la question juive est
lancée le 20 janvier 1942 (conférence de Wansee). Sous un langage à peine codé, il s’agit, tout
simplement, d’exterminer tous les juifs d’Europe. Gigantesque entreprise : Ils sont 11 millions. Mais le
génie humain est inventif ; après les exécutions en masse à la mitrailleuse, trop coûteuses et trop visibles,
après les camions à gaz au rendement trop faible, viennent enfin les camps d’extermination
méthodiquement organisés autour d’immenses crématoriums comprenant chacun une salle de
déshabillage, une chambre à gaz pour la mise à mort et une salle de fours crématoires pour l’élimination
des cadavres. A partir du quai de débarquement où le train les amène, le cheminement des victimes est
soigneusement planifié comme une chaîne de montagne pour réduire au minimum le temps et le coût de
l’opération. A Treblinka, un train entier de voyageurs est éliminé en trois heures : de 12000 à 15000
victimes par jour, jour après jour.
Georges LANGLOIS, Gilles VILLEMURE, Histoire de la Civilisation Occidentale, Beauchemin, pages 351-352.

Chapitre VII

ONU (ORGANISATION DES NATIONS UNIES)

L'Organisation des Nations Unies a été préparée par la conférence de Dumbarton Oaks en
septembre 1944, puis effectivement constituée par la conférence de San Francisco, le 24 juin 1945. La
Charte de San Francisco a jeté les bases de l'institution, dont les premières assemblées générales se sont
tenues à Londres en 1946, à New York en 1947, à Paris en 1948. Par la suite, le Siège de l'organisation a
été fixé à New York.
41
Cours d'Histoire et de Géographie / Secondaire 4

L'ONU a pour but le maintien de la paix dans le monde, par la conciliation, l'arbitrage ou,
éventuellement, l'intervention. Cependant, pas plus que la SDN, l'ONU ne dispose d'aucune force armée
permanente. Si nécessaire, elle constitue une force internationale (les casques bleus), en recourant à
l'aide des Etats membres.

L'ONU comporte six organismes politiques principaux :


a-L'Assemblée Générale est le seul organisme dans lequel tous les Etats Membres ont le même
pouvoir : un Etat, une voix. Mais, pour éviter l'impasse que causerait le vote par l'Assemblée, où les
petits Etats sont plus nombreux, d'une décision qui serait combattue par une grande nation (membre du
Conseil de Sécurité), l'Assemblée ne peut émettre que des recommandations.
Cette Assemblée compte des représentants des 193 Etats Membres de l'ONU qui y discutent,
coopèrent sur tout un éventail de questions internationales citées dans la Charte des Nations Unies,
comme le développement, la paix et la sécurité, le droit international etc. Tous les Etats Membres se
rassemblent en septembre, dans la Salle de l'Assemblée Générale à New York pour une session annuelle.
b- Le Conseil de Sécurité compte 11 membres : cinq membres permanents correspondant aux
cinq grands vainqueurs de 1945 : Etats-Unis, Russie, Royaume-Uni, France, Chine; et six membres élus
pour deux ans par l'Assemblée Générale.
Le Conseil de Sécurité est chargé par les Etats membres de veiller au maintien de la paix et de la
sécurité. Il doit donc étudier toute les questions susceptibles de troubler la paix mondiale, recommander
les moyens d'un règlement pacifique et même proposer les termes d'un tel règlement. En cas de menace
contre la paix, le conseil peut prendre toutes les mesures nécessaires, y compris recourir à une
intervention armée.
c- Le Secrétariat est une institution permanente qui administre l'Organisation, puis fait exécuter
les décisions. Il est dirigé par le secrétaire général (le portugais António Guterres Manuel de Oliveira est
l'actuel secrétaire général) élu pour cinq ans par l'Assemblée Générale sur recommandation du conseil
de sécurité.

d- La Cour Internationale de Justice est composée de quinze juges élus indépendamment par le
Conseil de sécurité et par l'Assemblée Générale et siégeant à la Haye (Pays-Bas). La Cour peut juger
toutes les affaires qui lui sont soumises par le Conseil de Sécurité, l'Assemblée Générale, les Etats
membres ou certaines institutions spécialisées.
e- Le Conseil Economique et sociale, composé des représentants de 18 Etats membres de l'ONU,
élus par l'assemblée Générale, a pour mission : de coordonner l'action des institutions spécialisées; de
proposer toutes mesures qu'il peut juger nécessaire pour la réalisation des objectifs de l'ONU; de
négocier les accords d'association avec des institutions nouvelles, existantes ou à créer.
f- Le Conseil de tutelle assure la surveillance à l'échelon international des 11 territoires sous
appropriées étaient prises pour préparer les territoires à l'autonomie ou l'indépendance.
En 1994, tous les territoires sous tutelle avaient acquis l'autonomie ou l'indépendance, soit qu'en tant
qu'Etat à part entière, soit en s'intégrant à des Etats voisins.

1-PROGRAMMES ET FONDS

42
Cours d'Histoire et de Géographie / Secondaire 4

CNUCED : La Conférence des Nations Unies sur le Commerce et le Développement, est l'organe des
Nations Unies chargé des questions de développement, en particulier du commerce international qui en
est le principal moteur.
FNUAP : Le fonds des Nations Unies pour la population, vise à créer un monde où chaque grossesse est
désirée, chaque accouchement est sans danger et le potentiel de chaque jeune est réalisé.
HCR : LE Haut-commissariat pour les Réfugiés, protège les réfugiés à travers le monde et aide à leur
retour dans leur pays d'origine.
ONU-FEMMES : ONU-FEMMES est dédiée exclusivement à l'égalité des sexes et à l'autonomisation des
femmes.
ONU-HABITAT : Le Programme des Nations Unies pour les établissements humains, s'attache à
promouvoir des établissements humains durables, répondant au besoin de la société en respectant
l'environnement.
ONUDC : L'office des Nations Unies contre la drogue et le crime, aide les Etats Membres à lutter contre la
criminalité, la drogue et le terrorisme.
PAM : Le Programme Alimentaire Mondial vise à éradiquer la faim et la malnutrition.
PNUD : Le Programme des Nations Unies pour le Développement est l'un des organismes contribuant à
éradiquer la pauvreté et réduire les inégalités et l'exclusion.
PNUE : Le Programme des Nations Unies pour l'environnement est l'entité du système des Nations Unies
désignée pour répondre aux problèmes environnementaux aux niveaux régional et national.
UNICEF : Le fonds des nations Unies pour l'enfance, apporte une assistance humanitaire et un soutien au
développement pour les mères et les enfants.
UNRWA : L'Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les refugiés de Palestine dans le
Proche-Orient, apporte des services d'éducation, de santé, de secours ainsi que des services sociaux aux
réfugiés palestiniens. Elle gère les infrastructures des camps et les améliore. Elle propose des
microcrédits et une assistance d'urgence notamment en période de conflit.

2- INSTITUTIONS SPECIALISEES.
Les institutions spécialisées des Nations Unies sont des organisations indépendantes travaillant
avec l'ONU.
a-Banque Mondiale : Elle a pour mission de réduire la pauvreté et d'améliorer les niveaux de vie
partout dans le monde en offrant des prêts à taux réduits, des crédits sans intérêts et des bourses pour
les pays en développement.
b- L'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'Agriculture (FAO) est l'agence phare
pour la lutte contre la faim dans le monde.
c- Fonds international de développement agricole (FIDA), travaille exclusivement avec les
populations rurales pauvres des pays en développement pour les aider à sortir de la pauvreté, à garantir
leur sécurité alimentaire et nutritionnelle.

43
Cours d'Histoire et de Géographie / Secondaire 4

d- Le Fonds monétaire international (FMI) vise à promouvoir la croissance économique et le


plein emploi en offrant une assistance financière temporaire aux pays ayant besoin d'aide ou d'une
assistance technique pour ajuster la balance des paiements.
e- L'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI) élabore des normes pour le transport
aérien mondial.
f- L'Organisation international du Travail (OIT) vise à promouvoir un travail décent pour tous, en
établissant des normes internationales sur la liberté d'association, l'abolition du travail forcé et l'égalité
des chances et des traitements.
g- L'Organisation maritime internationale (OMI) a mis en place un cadre normatif international
pour les transports maritimes, renforçant la sécurité et la sûreté en mer.
h- L'Organisation météorologique mondiale (OMM) favorise l'échange d'information et de
données sur le climat au niveau planétaire et contribue à l'application de la météorologie.
i-L'Organisation mondiale de la santé (OMS) est l'autorité directrice et de coordination des
efforts visant à amener tous les peuples au niveau de santé le plus élevé possible. Son but est
d'améliorer les perspectives d'avenir et la santé future pour toutes les populations du monde.
j- L'Organisation mondiale du tourisme (OMT) est l'institution des Nations Unies chargée de la
promotion d'un tourisme responsable, durable et accessible à tous.
k- L'Organisation des Nations Unies pour le développement industriel (ONUDI) est l'institution
spécialisée des Nations Unies chargée de promouvoir le développement industriel pour la réduction de
la pauvreté.
l- L'Union internationale des télécommunications (UIT) est l'institution spécialisée des Nations
Unies pour les technologies de l'information et de la communication.
m- L'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture (UNESCO)
s'intéresse à des questions aussi diverses que la formation des enseignants, l'amélioration de l'éducation
au niveau mondial et la protection de sites historiques et culturels importants à travers le monde.

3- AUTRES ENTITÉS
ONUSIDA : Le Programme commun coparrainé des Nations Unies sur le virus
d'immunodéficience, vise à stopper et renverser la diffusion du VIH/SIDA.
UNOPS : Le bureau des Nations Unies pour les services d'appui aux projets, aide ses partenaires à
mettre en œuvre efficacement des projets humanitaires, de consolidation de la paix et de
développement, partout au monde.
OIM : L'Organisation internationale pour les migrations est la principale organisation
intergouvernementale dans le domaine de la migration.
OMC : L'Organisation mondiale du commerce offre une enceinte où sont négociés des accords de
commerce, ainsi qu'un cadre juridique et institutionnel pour le règlement des différends découlant de
leur interprétation et de leur application.

TEXTE IV

44
Cours d'Histoire et de Géographie / Secondaire 4

ONU : UNE INSTITUTION IMPUISSANTE ET INEFFICACE


Depuis plus de 50 ans, l’ONU est partout : en Haïti, au Rwanda, en Bosnie, en Somalie, en Afrique,
au Moyen-Orient… Elle est aussi présente, à travers ses organismes spécialisés, sur tous les fronts.
Néanmoins, de l’époque de la guerre froide à la période de crise en ex-Yougoslavie, l’Organisation des
Nation Unie se révèle impuissante à empêcher l’éclatement et l’extension des conflits. En outre, l’ONU est
un instrument au service des grandes puissances, notamment les Etats-Unis, outil souvent utilisé en
fonction de leurs intérêts politiques et stratégiques. Ainsi, comme le constate Michel Herteaux, « a-t-on
vu l’ONU décider des interventions militaires dans certains cas et pas dans d’autres. Des résolutions
pourtant votées à l’unanimité du conseil de sécurité, n’ont pas toujours été appliquées ». Alors, comme a
dit l’autre, doit-on réformer l’ONU ?

VIII
LA GUERRE FROIDE (1947-1991)
Entre 1947 et 1991, le monde est marqué par l'opposition idéologique et stratégique entre les deux
Grands, les Etats-Unis et l'Union soviétique. On appelle cette période la «Guerre froide» car les deux
Etats s'opposent tout en évitant l'affrontement direct.

1-LA CONSTITUTION DES BLOCS


Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, la Guerre froide oppose les deux Grands : les
Etats-Unis et l'URSS. Dès 1945, les relations entre les anciens alliés se tendent. La transformation de
l'Europe de l'Est en zone d'influence soviétique et le pillage organisé de l'Allemagne de l'Est augmentent
les inquiétudes américaines face à l'impérialisme de l'URSS. Entre 1945 et 1948, l'URSS impose par la
force des gouvernements communistes dans tous les pays d'Europe centrale et orientale où son armée
est présente, contrairement aux engagements pris à la conférence de Yalta en février 1945. Winston
Churchill dénonce déjà un rideau de fer qui partage le continent.
En 1947, la doctrine énoncée par le président Truman vise à contenir l'expansion du
communisme, notamment par une aide économique via le plan Marshall et par une aide militaire aux
pays menacés comme en Grèce où une guerre civile oppose communistes et monarchistes : c'est la
politique du Containment. L'URSS répond avec la doctrine Jdanov qui propose un soutien aux Etats
communistes. On assiste à une bipolarisation du monde, structuré autour des Etats-Unis et de l'URSS.
Les deux Grands organisent des réseaux d'alliances militaires dans le monde. Il s'agit pour chaque bloc
d'étendre sa propre zone d'influence dans une logique impérialiste. Face à l'Alliance atlantique
(renforcée par l'OTAN en 1950), organisée en 1949 autour des Etats-Unis, l'URSS répond par la mise en
place du CAEM (Conseil d'assistance économique mutuelle) en 1949 et du Pacte de Varsovie en 1955.

2- UN CONFLIT IDEOLOGIQUE
La Guerre froide est avant tout, un conflit idéologique. Si elle oppose les deux grands dans tous
les domaines (politique, diplomatique, militaire et économique), c'est surtout la division idéologique
entre les deux blocs qui rend toute paix impossible, avec le communisme que les soviétiques souhaitent
diffuser à l'échelle du monde et le libéralisme défendu par le monde occidental.

45
Cours d'Histoire et de Géographie / Secondaire 4

Le conflit idéologique prend la forme d'une guerre de propagande. Tous les moyens de
communication sont mis au service de la propagande pour dénoncer l'adversaire: affiches, radio,
cinéma... L'art, sur les bases du réalisme socialiste, exalte les réussites du modèle soviétique.

3- LES GRANDES CRISES DE LA GUERRE


a- La première crise de Berlin (1948-1949). C’est l’une des crises majeures qui marquent les
débuts de la guerre froide. Les américains, les britanniques et les français fusionnent leurs zones
d’occupation pour bénéficier de l’aide Marshall. L’unification de ces zones occupées par les occidentaux
inquiète Staline qui considère comme une menace cette présence occidentale à Berlin.
Le 24 juin 1948, il décide d’établir un blocus pour empêcher tout ravitaillement des quelque 2
millions de berlinois vivant à l’Ouest de la ville. Les axes ferroviaires et routiers sont systématiquement
coupés et contrôlés par les soviétiques, la navigation sur le canal de la Spree est également interrompue.
Seule la voie des airs reste libre et le général américain Clay met alors rapidement en place un
pont aérien pour ravitailler la ville.
Durant 11 mois, les avions occidentaux transportent environ 2.5 millions de tonnes de
marchandises, notamment de la nourriture et du charbon.
Devant l’échec de son coup de force, Staline décide de lever le blocus de Berlin le 1er mai 1949.
Mais, en septembre, sous l’égide des américains, des britanniques et des français, la République
Fédérale d’Allemagne (RFA) est créée avec Bonn pour Capitale. L’URSS réplique en créant la République
Démocratique Allemande (RDA) en octobre dont Berlin-Est est la Capitale.
b- La guerre de Corée (1950-1953). A l’instar de l’Allemagne, la Corée, depuis 1948, est divisée en
deux zones d’occupation. La Corée du Nord soutenue par l’URSS et la Corée du Sud soutenue par Les
Etats-Unis. Souhaitant réunifier le territoire, le gouvernement nord-coréen décide le 25 juin 1950,
d’envahir la Corée du Sud. Le 30 juin, les Etats-Unis déploient des troupes pour contrer l’offensive nord-
coréenne. Ce conflit qui dure trois ans ne permet malheureusement pas, au régime du Nord d’atteindre
son objectif, celui de réunifier le pays. Le 27 juillet 1953, Américains et soviétiques reconnaissent
l’existence de deux pays distincts. La République sud-coréenne capitaliste et la République nord-
coréenne communiste. Cette guerre a fait plus de deux millions de morts.
c- La répression de l'insurrection hongroise (1956). Après la mort de Staline, les populations de
plusieurs Etats satellites essaient de se libérer du joug de Moscou, parmi lesquels la Hongrie où les
opposants politiques hongrois vont prendre les armes pour exiger le départ des troupes soviétiques et
l’organisation d’élections libres et pluralistes. En novembre 1956, Nikita Khrouchtchev décide de mettre
fin à cette insurrection hongroise. Entre le 4 et le 8 novembre, il charge l’armée rouge de la liquider par
la force. Les troupes soviétiques attaquent en masse et destituent le gouvernement d’indépendance
nationale. Le nouveau gouvernement hongrois à la solde de Moscou rétablit dans le pays, un régime
dictatorial.
d- La deuxième crise de Berlin (1958-1961). Le 27 novembre 1958, Nikita Khrouchtchev exige le
rattachement de Berlin de l’Ouest à la RDA. Les Etats-Unis s’y opposent. Ne pouvant pas aboutir à ses
fins, le dirigeant soviétique fait construire le mur de Berlin dans la nuit du 12 au 13 août 1961, séparant
ainsi, la ville de Berlin-Est et Berlin-Ouest pendant plus de vingt-huit ans.

46
Cours d'Histoire et de Géographie / Secondaire 4

e- La crise de Suez (1956). Elle est née de la rencontre de plusieurs facteurs. Elle est déclenchée
dans le contexte du rapprochement de l’Egypte avec l’Union Soviétique. Ce rapprochement est lié à la
conclusion du Pacte de Bagdad en février 1955 et qui pousse l’Egypte à se tourner vers l’URSS.
Dans le même temps, dans le cadre de la mise en valeur économique du pays, Gamal Abdel
Nasser souhaite construire un barrage sur le Nil, afin de réguler le fleuve. Cette régulation permettra de
répondre aux besoins de l’agriculture et de produire de l’électricité. L’emplacement choisi est Assoudan.
Pour sa construction, Nasser sollicite l’aide financière et technique des Etats-Unis. Mais, ceux-ci refusent
en raison de l’orientation pro soviétique de l’Egypte. En représailles, Nasser décide de nationaliser la
compagnie du canal de Suez dont les revenus permettront de financer la construction du Barrage
d’Assoudan.
Cette nationalisation suscite les réactions occidentales (surtout de la France et de la Grande-
Bretagne) et celles d’Israël qui décident d’intervenir militairement contre l’Egypte (29 octobre 1956), afin
de reprendre le canal de Suez et maintenir la présence occidentale dans la région.
Mais, les diplomaties américaine et soviétique contraignent les deux puissances occidentales à
cesser les combats. Devant ce rapport de force, la Grande Bretagne accepte le cessez-le-feu le 6
novembre suivie par la France. Leurs troupes restent, toutefois, dans la région du canal jusqu’en
décembre. Israël, évacue la bande de Gaza en 1957.Il réussit, cependant, à obtenir la libre circulation
dans le Golfe d’Akaba.
f- La crise de Cuba (1962). Elle oppose directement Les Etats-Unis et l’URSS. En 1959, Fidel Castro
s’est emparé du pouvoir à Cuba et s’est rapproché de l’URSS. La tentative de rétablir un régime
anticommuniste par un débarquement dans la baie des Cochons échoue (1961). Se sentant menacé,
Castro accepte d’installer des rampes de lancement de missiles nucléaires soviétiques sur son territoire.
Les Etats-Unis réagissent avec fermeté à ce qu’ils voient comme une intrusion soviétique dans
leur aire d’influence. Dans un discours prononcé le 22 octobre 1962, le président Kennedy expose la
position américaine : Cuba est mis en quarantaine et l’URSS est sommée de retirer ses missiles de l’île.
Les deux Grands sont donc en état d’alerte. Ils accepteront une solution négociée.
Devant la fermeté américaine et afin d’éviter un conflit nucléaire, Khrouchtchev négocie. Le 28
octobre 1962, un accord prévoit le démantèlement des missiles soviétiques à Cuba, sous contrôle de
l’ONU, la levée du blocus et la promesse américaine de ne pas envahir Cuba. Mais, les américains doivent
aussi accepter la présence durable sur le continent américain d’une enclave socialiste.
g- L'écrasement du Printemps de Prague (1968). Le printemps de Prague désigne une courte
période de libération de la Tchécoslovaquie. Il débute le 5 janvier 1968. Alexandre Dubček est élu
président de la République socialiste tchécoslovaque. Très vite il prend ses distance avec Moscou et
installe une autre vision du communisme : démocratisation des partis politiques, libération économique,
décentralisation administrative. Les droits individuels évoluent. La presse et la parole ne sont plus
soumises au joug soviétique.
Face à cet engouement démocratique, le bloc soviétique va s’organiser pour mettre un terme au
Printemps de Prague. Cette nouvelle idée du «socialisme à visage humain» n’est pas du goût de Léonid
Brejnev. Il met au point la doctrine de Brejnev qui limite l’autonomie des Etats soviétiques. Les armées
du Pacte de Varsovie composé de l’URSS, de la Pologne, de la Bulgarie, de la Hongrie et de la RDA, font
irruption en Tchécoslovaquie dans la nuit du 20 au 21 août 1968. Prague est rapidement prise, signant la
fin du Printemps de Prague.
47
Cours d'Histoire et de Géographie / Secondaire 4

4- LA COEXISTENCE PACIFIQUE
En 1953, la mort de Staline permet un certain dégel lorsque son successeur Nikita Khrouchtchev
lance son appel à la coexistence pacifique.
Mais dans l'esprit de Khrouchtchev, la coexistence pacifique ne constitue pas un renoncement
aux objectifs expansionnistes de l'URSS. La course aux armements et à l'espace en 1961, (le soviétique
Youri Gagarine est le premier homme envoyé dans l'espace) témoignent d'une compétition toujours
forte entre les deux Grands.
La crise de Cuba marquant le point culminant de la Guerre est un autre exemple vivant de la
compétition : Après l'invasion de la Baie des cochons, Castro va accepter d'installer des rampes de
lancement des missiles nucléaires soviétiques sur son territoire. Mais, pour inviter un conflit nucléaire,
les deux grands acceptent une solution négociée. Le 28 octobre 1962, un accord prévoit le
démantèlement des missiles à Cuba et la promesse américaine de ne pas envahir cuba.

5- LA DETENTE
La crise de Cuba amène les deux Grands à établir un dialogue pour réguler la course aux
armements. A partir de 1962, les Etats-Unis et l'URSS conscients du risque de destruction mutuelle,
cherche à apaiser leurs relations et surtout à atténuer les tensions liées à la stratégie de la dissuasion
nucléaire. C'est la détente.

Le téléphone rouge permet d'établir une liaison directe entre Washington et Moscou. En 1963,
le traité de Moscou interdit les essais nucléaires aériens. Le TNP (traité de non-prolifération nucléaire)
est signé en 1968 par 62 pays, les puissances qui possèdent l'arme atomique s'engagent à ne pas aider
d'autres à l'avoir, celles qui ne l'ont pas, s'engagent à ne pas l'acquérir. Les accords SALT sont signés en
1972 entre les Etats-Unis et l'URSS pour limiter la fabrication des missiles de longe portée et des
systèmes de défense antimissiles. La Détente culmine lors de la conférence d'Helsinki (juillet 1973-août
1975) qui consacre les principes de la non-ingérence, du renoncement formel à la force et du respect des
droits de l'homme.
Toutefois, les deux Grands maintiennent leur emprise sur leurs alliés les plus proches : l'URSS
intervient en Tchécoslovaquie pour réprimer le printemps de Prague (1968); les Etats-Unis n'hésitent
pas à soutenir ou à installer des dictatures militaires en Amérique latine, comme en Chili en 1973.

6- FIN DE LA GUERRE
Le 11 1985, Mikhaïl Gorbatchev devient le nouveau secrétaire général du Parti communiste de
l'Union soviétique. Dès sa prise du pouvoir, il se distingue de ses prédécesseurs par sa volonté de
moderniser l'URSS et de la sortir de la crise économique. Il entreprend alors des négociations avec le
président américain, Ronald Reagan, pour réduire le nombre d'armes atomiques. À leur troisième
rencontre, le 8 décembre 1987, à Washington, les deux hommes signent un accord pour éliminer tous les
missiles d'Europe en trois ans. C'est la première fois que l'on parle de désarmement.
Dans le même temps Gorbatchev imagine la Perestroïka, qui autorise la petite entreprise privée
et rend la terre aux paysans. Avec la politique de la Glasnost, il rétablit certaines libertés individuelles et
libère des prisonniers politiques. Face à ce pouvoir moins autoritaire, les courants nationalistes
fleurissent dans les pays de l'URSS. En 1989, Lech Walesa et son syndicat, Solidarnosc remportent les

48
Cours d'Histoire et de Géographie / Secondaire 4

élections en Pologne. Le 9 novembre le mur de Berlin est détruit. En 1991, c'est la proclamation
d'indépendance pour les 15 Républiques d'URSS. Le 25 décembre, Gorbatchev démissionne, c'est la fin
de la Guerre froide.

Vocabulaire
Containment (endiguement) : politique menée par Truman consistant pour Les Etats-Unis à intervenir
contre les agressions soviétiques.
Démocratie populaire : régime politique communiste, copié sur celui de l'URSS, caractérisé par un parti
unique, la restriction des libertés, l'adoption du communisme comme doctrine politique et économique
officielle.
Détente : rapprochement mutuel des deux grands pour éviter tout risque de conflit nucléaire
Dissuasion nucléaire : politique menée par un Etat visant à détenir l'arme nucléaire afin de dissuader un
autre de l'attaquer.
Equilibre de la terreur: parité approximative des moyens de destruction massive avec acceptation de sa
propre vulnérabilité.
Kominform : organisation unissant les principaux partis communistes européens permettant à l'URSS de
les contrôler.
Non-ingérence : principe qui interdit de s'impliquer dans les affaires intérieures d'un pays (politique de
l'Est).
Ostpolitik : politique d'ouverture vers la RDA et les démocraties populaires menée par le chancelier de la
RFA Willy Brandt, de 1969 à 1974.
OTAN : organisation du traité de l'Atlantique Nord (mise en place en 1950 autour des Etats-Unis, du
Canada et de dix pays européens).
Pacte de Varsovie : alliance militaire fondée en 1955 pour faire contrepoids à l'OTAN, rassemblant
l'Union soviétique et les pays d'Europe de l'Est.
Satellisation : perte d'indépendance des pays de l'Est vis à vis de 'L'URSS.

TEXTE V

UNE NOUVELLE ORDRE MONDIAL UNIPOLAIRE


En 1985, Gorbatchev arrive au pouvoir en Union Soviétique dans un contexte politique très
difficile. Après la mort de Brejnev, les luttes internes ont été vives et ses deux successeurs, Andropov et
Tchernenko, sont décédés dans un temps très bref, ouvrant une crise de succession majeure à la tête de
l’Union Soviétique. Gorbatchev est un réformateur. Il a conscience que l’Union Soviétique n’a pas les
moyens économiques et technologiques de suivre les américains dans la course aux armements. A l’instar
de Khrouchtchev trois décennies plus tôt, il considère que seule une politique de pause dans la rivalité
entre les deux Grands peut permettre de sauver le système soviétique. C’est pourquoi il propose une
réduction des dépenses militaires et offre aux américains de discuter du désarmement. Tout va alors très
vite. D’une certaine manière, la logique bipolaire continue à fonctionner. Les soviétiques usent ainsi de
leur influence pour mener leurs alliés vietnamiens à évacuer le Cambodge qu’ils occupaient. Les
soviétiques se retirent eux-mêmes d’Afghanistan. Dans le même temps, ils cessent leur soutien aux
guérillas et régimes procommunistes africains. En l’espace de quelques mois, l’essentiel des conquêtes de
l’ère Brejnev est abandonné. Mais, la tentative de Gorbatchev de réformer le système échoue. L’Union
Soviétique perd le contrôle des démocraties populaires, le mur de Berlin tombe, l’Allemagne se réunifie
et, finalement, l’Union Soviétique elle-même implose. La Russie, qui succède à l’Union Soviétique, est
49
Cours d'Histoire et de Géographie / Secondaire 4

amputée territorialement en raison de l’indépendance autoproclamée de plusieurs anciennes républiques


soviétiques. En décembre 1989, lors du sommet de Malte, les leaders des deux superpuissances
annoncent la fin de la guerre froide. La guerre du Golfe, en 1991, voit la Russie s’associer à une guerre
contre son ancien allié, l’Irak. Les Etats-Unis sont désormais le seul Grand.

50
Cours d'Histoire et de Géographie / Secondaire 4

Chapitre I

L'UNION EUROPEENNE

1- PROCESSUS D'UNIFICATION DE L'EUROPE.


L'Unification de l'Europe, condition de son relèvement, est préconisée après la Seconde Guerre
Mondiale, par le Général Marshall, ministre des Affaires étrangères des Etats-Unis.
Le plan Marshall propose l'aide financière des Etats-Unis et exige la constitution, par les Etats
bénéficiaires, d'une organisation permanente chargée d'élaborer et de faire exécuter les programmes
économiques.
Le 16 avril 1948, l'Organisation Européenne de Coopération Economique (OECE) est créée par
des pays de l’Europe de l’Ouest, groupant alors seize membres : Autriche, Belgique, Danemark, France,
Grèce, Irlande, Islande, Italie, Luxembourg, Norvège, Pays-Bas, Portugal, Royaume-Uni, Suède, Suisse,
Turquie. Plus tard, devaient se joindre à l'OECE l'Allemagne occidentale et l'Espagne. Enfin, les Etats-Unis
et le Canada étaient associés à l'Organisation, près de laquelle la Yougoslavie est représentée par un
"observateur".
En 1960, du fait de l'amélioration sensible de la situation économique en Europe, de
l'indépendance effective ou prévisible des anciennes colonies européennes et de l'intérêt d'une union
économique plus étroite entre l'Amérique du Nord et l'Europe, l'élargissement de l'OECE était décidé et
l'Organisation devenait l'OCDE, Organisation de Coopération et de Développement Economique,
englobant les Etats-Unis et le Canada et travaillant à réaliser un triple objectif: amélioration de la
production dans tous les pays membres; expansion du commerce mondial; coordination des efforts en
faveur des pays sous-développés.
51
Cours d'Histoire et de Géographie / Secondaire 4

Parallèlement à ces efforts se multiplient les tentatives pour organiser l'Europe,


indépendamment des Etats-Unis. En 1950, Robert Schuman, ministre français des Affaires étrangères,
propose la création d'une Communauté Européenne du Charbon et de l'Acier (CECA) qui entre en
fonctionnement en avril 1951. Elle a pour but d'établir un marché commun du charbon et de l'acier entre
la France, l'Allemagne occidentale, l'Italie et les trois Etats du Benelux (Belgique, Luxembourg et Pays-
Bas). Elle a organisé la rationalisation et l'harmonisation de la production, veillé à l'amélioration des
conditions de travail et de vies ouvrières, introduit des garanties spéciales contre le chômage.
Des difficultés conduisent à la mise sur pied, en 1952, de la Communauté Européenne de
Défense (CED). Cette nouvelle institution prévoit l'organisation d'une armée européenne dans laquelle
serait intégrée l'armée allemande, dont la France redoute la reconstitution.
La réalisation rapide de l'unité européenne n'étant guère possible, un programme d'unification
progressive est alors étudié par la conférence de Messine (juin 1955). De nouvelles conceptions se font
jours : le traité de Rome (25 mars 1957) crée une Communauté Economique Européenne (CEE),
groupant la CECA, déjà existante, et l'Euratom (communauté européenne de l'énergie atomique),
constitué en 1958. La communauté crée la PAC (politique agricole commune) et prévoit la suppression
des barrières douanières et l'organisation de la libre circulation des capitaux et de la main-d'œuvre.
En 1993, les trois institutions (CECA, CEE et Euratom) sont devenues un marché unique, par le
traité de Maastricht. C'est la naissance de l'Union Européenne (UE). Elle compte aujourd'hui 28 pays
(France, Suède, Allemagne, Hongrie, Italie, Pologne, Belgique, Tchéquie, Pays-Bas, Slovaquie,
Luxembourg, Slovénie, Royaume-Uni, Estonie, Danemark, Lettonie, Irlande Lituanie, Espagne, Chypre,
Portugal, Malte, Grèce, Roumanie, Autriche, Bulgarie, Finlande et Croatie) dont 19 d'entre eux, utilisent
officiellement l'euro qui est en circulation depuis 1er janvier 2002.

TEXTE I

LE TRAITE DE ROME : BUTS ET ACTION DE LA CEE


« Art.1 - Par le présent traité, les hautes parties contractantes instituent entre elles une communauté
économique européenne.
Art.3 - L’action de la Communauté comporte, dans les conditions et selon les rythmes prévus par le
présent traité :
a. l’élimination, entre les Etats membres, des droits de douane et des restrictions quantitatives à
l’entrée et à la sortie des marchandises, ainsi que de toutes autres mesures d’effet équivalent ;
b. l’abolition entre les Etats membres, des obstacles à la libre circulation des personnes, des services
et des capitaux ;
c. l’instauration d’une politique commune dans le domaine de l’agriculture ;
d. l’instauration d’une politique commune dans le domaine des transports ;
e. la création d’un Fonds social européen, en vue d’améliorer les possibilités d’emploi des travailleurs
et de contribuer au relèvement de leur niveau de vie. ;
f. l’institution d’une Banque européenne d’investissement destinée à faciliter l’expansion
économique de la Communauté par la création de ressources nouvelles ;
52
Cours d'Histoire et de Géographie / Secondaire 4

Art.7 – Dans le domaine de l’application du présent traité, et sans préjudice des dispositions particulières
qu’il prévoit, est interdite toute discrimination exercée en raison de la nationalité ».

2- INSTITUTIONS L'UE.
Les institutions administrent et coordonnent le travail de UE :
- Le parlement européen, composé de députés élus au suffrage universel direct, qui représente les
citoyens européens.
- Le conseil de l'Union européenne qui représente les gouvernements des Etats membres. La présidence
du conseil est assurée alternativement par chaque Etat membre, selon un système de rotation.
- La commission européenne qui représente les intérêts de l'Union dans son ensemble.
Ensemble ces trois institutions élaborent les politiques et la législation mise en œuvre dans toute l'UE. En
principe, la commission présente des propositions de législation, qui sont adoptées par le parlement et le
conseil. Une fois adoptés, les actes législatifs sont mis en œuvre par les Etats membres et la commission,
qui est chargée de veiller à ce qu'ils soient correctement appliqués

3- LA POLITIQUE AGRICOLE COMMUNE (PAC).


Créée en 1957 (traité de Rome) et mise en place en 1962, la Politique agricole commune (PAC)
est un accord des différents pays de l'Union européenne dont le but est de garantir un apport
alimentaire pour les populations, tout en garantissant des revenus acceptables pour les agriculteurs.
a-Objectifs et principes de la PAC. Elle a pour principal objectif de fournir des denrées alimentaires à la
population, à des prix abordables, tout en fournissant des revenus corrects pour les agriculteurs. Le PAC
repose donc sur deux grands principes : le contrôle des prix et le financement des agriculteurs.
Les objectifs définis par l'article 33 de la PAC sont les suivants :
accroître la productivité de l'agriculture en développant le progrès technique, en assurant le
développement rationnel de la production agricole ainsi qu'un emploi optimum des facteurs de
production, notamment de la main-d'œuvre;
assurer un niveau de vie équitable à la population agricole, notamment par le relèvement du revenu
individuel de ceux qui travaille dans l'agriculture;
stabiliser le marché;
garantir la sécurité des approvisionnements;
assurer des prix raisonnables dans les livraisons aux consommateurs.
Ces objectifs doivent être remplis tout en respectant l'environnement, en produisant une alimentation
de qualité et saine et, en contribuant au développement rural.
Chaque année, tous les pays de l'Union européenne versent une contribution en fonction de leur
richesse. Actuellement, ce budget constitue le plus important de l'Union européenne avec 58 milliards
d'euros par an (un peu moins de la moitié du budget total).
Ensuite, cet argent est redistribué aux Etats qui s'en servent notamment, pour reverser des aides
financières aux agriculteurs en fonction de différents critères, la taille de l'exportation agricole et le
respect des consignes imposées par la PAC.

53
Cours d'Histoire et de Géographie / Secondaire 4

b- La PAC, source de conflits. La Politique agricole commune ne fait évidemment pas l'unanimité et elle
suscite des critiques aussi bien de la part des pays qui y sont soumis, que de pays extérieurs à l'UE.
Il est d'abord reproché à la PAC de favoriser le productivisme, quitte à oublier l'aspect environnemental.
A l'échelle internationale, deux aspects sont principalement reprochés à la PAC et aux gouvernements
concernés : d'une part le manque de transparence concernant les flux monétaires. D'autre part, elle est
accusée de favoriser les produits de l'UE, que les pays qui n'y appartiennent pas considèrent comme
une concurrence déloyale.

c- La réforme de la PAC. Une nouvelle version de la PAC a vu le jour en 2014, et ce jusqu'en 2020. Cette
nouvelle PAC a notamment pour objectifs de prendre en considération les nouveaux problèmes auxquels
les sociétés sont confrontées, comme le changement climatique. Elle vise également à répartir plus
équitablement les aides financières aussi bien au niveau national qu'à celui de l'UE, tout en continuant à
remplir les objectifs de 1957.

4- RELATIONS ENTRE L'UE ET L'ACP.

Le premier accord entre l'Union européenne et les pays d'Afrique, Caraïbes et Pacifique est la
Convention de Lomé (28 février 1975, Lomé I), renouvelée en 1979 (Lomé II), 1984 (Lomé III), 1990
(Lomé IV). Celle-ci met en place principalement des préférences tarifaires donnant accès à ces pays au
marché européen ainsi que des fonds spéciaux destinés à garantir la stabilité des prix à l'achat pour les
produits agricoles et miniers. Le STABEX (Système de stabilisation des recettes d'exportation pour
certains produits agricoles) et le Sysmin (le Système de développement du potentiel minier), par
exemple, ont été mis en place, lors de Lomé I et II.

La Convention de Lomé fut remplacé le 23 juin 2000, par l'accord de Cotonou, signé au Bénin. Ce
nouvel accord a pour objectif de rétablir les équilibres macro-économiques, de développer le secteur
privé, d'améliorer les services sociaux, de favoriser l'intégration régionale, de promouvoir l'égalité des
chances hommes-femmes, de protéger l'environnement et d'abolir de manière progressive et
réciproque les entraves aux échanges commerciaux.

5- ACCORDS DE PARTENARIAT ECONOMIQUE (APE).


Les APE sont un exemple de la nouvelle approche que l'UE a choisie afin de créer des relations
commerciales avec les pays en voie de développement. Jusqu'à fin 2007, tous les pays ACP pouvaient
encore bénéficier d'un accès privilégié au marché européen. Par après, ils ne pourraient conserver cet
accès qu'à condition d'ouvrir leurs propres marchés aux produits européens, services et investissements.
Les APE sont donc avant tout, des accords de libre-échange que l'UE a négociés avec d'autres pays
beaucoup plus développés.

TEXTE II
Le développement du commerce entre l’UE et les pays ACP (Afrique, Caraïbes, Pacifique), surtout les pays
africains, est au cœur de l’ambition de l’accord de Cotonou. Une volonté qui devait prendre vie avec les accords de
partenariat économique régionaux (APE) avec l’UE.

Ce système n’a cependant pas marché comme prévu. Au total 8% des exportations de l’UE et moins de 7%
des importations européennes arrivaient ou venaient d’Afrique en 2016.

54
Cours d'Histoire et de Géographie / Secondaire 4

Lents à négocier, les APE n’ont pas été un franc succès. Car certains blocs régionaux d’Afrique estimaient
que la commission européenne les poussait à ouvrir l’accès à leur marché à des firmes européennes. Seul un APE a
été ratifié, celui avec les six membres de la communauté de développement de l’Afrique australe (CDAA).

Chapitre II

LES ETATS-UNIS
1-UNE HYPERPUISSANCE
A la fin de la Guerre Froide après l’effondrement du bloc communiste, les Etats-Unis sont restés
le seul «grand» pour devenir actuellement une «hyperpuissance». Les domaines permettant aux Etats-
Unis de revendiquer ce titre sont les suivants :
A-UN TERRITOIRE VASTE ET MAITRISE
Devenues indépendantes en 1783, les 13 colonies anglaises de la côte Est se sont regroupées
pour créer la Fédération des Etats-Unis d'Amérique. Pendant les deux siècles suivants, la conquête de
l'Ouest a permis de repousser la "frontière" jusqu'au Pacifique. Aujourd'hui, les Etats-Unis comptent 50
Etats, avec l'Alaska et les îles Hawaï.

Avec 9,3 millions de km2 et 7% des terres émergées, les Etats-Unis ont une taille comparable à
celle de l'Europe. Seuls la Russie, le Canada et la Chine sont des Etats plus étendus.

L'immensité de cet Etat-continent est maîtrisée grâce à sont vaste réseau de transport, le plus
important du monde. Mais sa densité est inégale selon les régions. Le Nord-est est pourvu de moyens
de communication denses et variés, alors que les espaces peu peuplés de l'Ouest sont moins bien
desservis.

La route est le premier mode de transport mais, en raison des grandes distances, l'avion s'utilise
beaucoup. Les voies navigables intérieures comptent peu. Par contre, le trafic maritime est intense. Le
territoire s'ouvre largement sur les océans et le reste du monde.

Le relief est structuré selon une disposition est-ouest. A l'Est, la plaine côtière a été le berceau
du peuple américain. Les Appalaches ont donné le charbon et l'électricité nécessaires au développement
industriel du nord-est du pays. Les grandes plaines forment une immense cuvette dont les sols fertiles et
la diversité climatique font la richesse agricole.
A l'Ouest, les contraintes naturelles sont fortes. Les Montagnes rocheuses et les chaîne côtières
encadrent des hauts plateaux et des bassins parfois entaillés par des vallées profondes. Ces reliefs
bloquent les influences océaniques. Il en résulte une aridité qui laisse peu de place à l'agriculture non
irriguée. Mais le sous-sol regorge de richesses minérales et énergétiques.

B-UNE POPULATION NOMBREUSE ET CITADINE


Avec environ 285 millions d'habitants, les Etats-Unis ont la troisième population du monde. Leur
rapide croissance démographique résulte d'une forte immigration et d'un accroissement naturel élevé.
Après avoir décimé les indiens, les WASP (White Anglo Saxon Protestant) ont fourni le fonds du
peuplement. Les blancs restent majoritaires dans la population totale; cependant, leur part relative

55
Cours d'Histoire et de Géographie / Secondaire 4

diminue. Depuis 1950, les Etats-Unis ont accueilli 70 millions d'immigrants. La proportion des minorités
ethniques s'est accrue, notamment celle des hispaniques.
Les difficultés d'assimilation des nouveaux immigrants remettent en cause le melting pot.
Depuis les années 1980, les inégalités sociales et ethniques augmentent. Le multiculturalisme conduit
les différentes communautés à se côtoyer sans se mélanger. La langue anglaise n'est plus parlée
partout; 40% des New-Yorkais ne parlent pas l'Anglais chez eux. Dans les Etats du Sud, l'Usage de
l'Espagnol favorise l'apparition d'une "Mexamerica".
La population américaine est très urbanisée: Huit américains sur dix vivent en ville. Un sur deux
réside dans une agglomération de plus d'un million d'habitants. Les littoraux présentent les taux
d'urbanisation les plus élevés.
Par leur poids démographique, leur puissance économique et financière, leur influence culturelle,
New York, Los Angeles et Chicago ont un rayonnement mondial. De Boston à Washington, la
Megalopolis regroupe presque 50 millions de personnes.

C-UN RAYONNEMENT CULTUREL PLANÉTAIRE


Les Etats-Unis exportent sur tous les continents leur vision du monde et leur mode de vie. L'attrait d'une
société de consommation qui met en avant la réussite matérielle et le bonheur individuel s'exerce dans
le monde entier. Les américains ont su faire de l'american way of life un modèle culturel qui symbolise
le progrès et la modernité.
La langue anglo-américaine est la langue maternelle de plus de 700 millions de personnes. Elle
contribue fortement à la mondialisation. Elle s'impose surtout comme la langue de commercialisation
internationale. Sa connaissance est indispensable pour qui veut faire des affaires, du tourisme ou de la
recherche scientifique. Elle diffuse dans le monde entier des mots comme fast food, jean ou jogging,
des valeurs et des comportements américains qui, peu à peu, deviennent universels.
La culture américaine jouit d'un grand prestige dans le monde. La littérature américaine compte
de nombreux prix Nobel. Les musées et les marchés de l'art y sont très importants. New York est
devenue la capitale mondiale de la création artistique.
Un réseau de télévision par satellites comme CNN et ABC assurent la diffusion de la culture
américaine. Sans oublier l'arrivé d'Internet (invention de l'armée américaine) et de tout ce que cela
comporte (Google, Facebook, Youtube...) des services américains qui peuvent héberger, recenser,
analyser les données mondiales.
Les grandes universités du pays comme Stanford ou Harvard, très réputées, attirent nombre
des meilleurs étudiants et chercheurs étrangers. L'attraction est telle qu'elle alimente une véritable
"fuite des cerveaux" qui renforce les Etats-Unis et affaiblit les pays de départ.

D-UNE HAUTE TECHNOLOGIE DE POINTE


Des centres américains de recherche sont sortis au cours du siècle le transistor, l'ordinateur et le
laser. Cette puissance dans la haute technologie s'explique en partie par les moyens mis en œuvre : les
Etats-Unis utilisent le tiers des investissements consacrés à la recherche dans le monde.

56
Cours d'Histoire et de Géographie / Secondaire 4

Les nouvelles technologies sont la première industrie des Etats-Unis. Un travailleur actif
industriel sur dix est employé dans l'électronique, l'informatique, les télécommunications ou les
biotechnologies.
Le multimédia, producteur de sons et d'images, occupe une place centrale dans cette
révolution technologique. La télévision câblée ou par satellite et l'ordinateur sont largement présents
dans la vie des américains. Le réseau de l'Internet né aux Etats-Unis, tisse sa toile sur le monde entier.
Une firme comme Microsoft réussit à avoir, dans son domaine, un quasi-monopole.

E-UN GÉANT ÉCONOMIQUE


Première puissance industrielle, l'économie des Etats-Unis représente le quart du PIB mondial.
Le capitalisme américain a pour bases la propriété privée, la libre entreprise et la recherche du profit. Les
firmes multinationales en constituent le fer de lance. Sur les dix premiers groupes mondiaux, sept sont
américains. Les richesses produites proviennent pour moitié du secteur tertiaire. Trois actifs sur quatre
travaillent dans les services.
L'espace économique américain s'étend à toute la planète. L'énorme marché intérieur des Etats-
Unis lui donne une base solide. L'accroissement des échanges dans le cadre nord-américain de l'ALENA le
renforce. Mais son développement dépend de plus en plus de l'extérieur, à l'exemple des firmes
automobiles qui fabriquent le tiers de leur production à l'étranger.
Les Etats-Unis ont le dollar, qui reste la monnaie de réserve internationale (le billet vert); de plus,
les transactions internationales se font essentiellement en dollar, par exemple pour le pétrole, avec ce
que l'on appelle les "pétrodollars". Ils jouent aussi un rôle très important dans le cadre de la sphère
financière, avec des capacités d'investissement considérables. Ainsi, contrôlent-ils les grandes instances
économiques internationales comme le FMI (Fonds Monétaire International), l'OMC (Organisation
Mondiale du Commerce), la Banque Mondiale etc.

F-UNE PUISSANCE GEOPOLITIQUE


Incontestablement, au moins depuis 1992, avec l'effondrement de l'URSS et de l'Empire
soviétique, les Etats-Unis sont la seule superpuissance militaire de la planète (le gendarme du monde),
avec des points de présence géopolitique très importants (zones d'influence et bases militaires), en
somme la première puissance (en force de frappe) mondiale.
Cela se matérialise à travers leur poids au sein de l'ONU, dont ils furent l'une des puissances
fondatrices en 1945, au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, et l'un des membres permanents du
Conseil de sécurité.
Il y a aussi l'OTAN, l'Alliance atlantique, née en 1949, une organisation à la fois politique et
militaire de défense mutuelle entre un certain nombre de pays occidentaux plus la Turquie, justifiée à
l'origine par la Guerre Froide avec l'URSS.
Les Etats-Unis, sur le plan géopolitique ont établi un nombre très important de bases dans le
monde, ce qui fait dire à certains qu'il y a un «Empire US». Ces bases (notamment navales, avec les
porte-avions) donnent à cette nation une capacité et une mobilité, une rapidité d'intervention
extrêmement efficace.

57
Cours d'Histoire et de Géographie / Secondaire 4

2- LIMITES DE LA PUISSANCE AMERICAINE


Le mode de vie et les valeurs de la société américaine ne sont pas acceptés par tous. Derrière le
village-monde et l'uniformisation des modes de vie se cachent de grandes disparités et des résistances.
L'anti-américanisme reste courant en Europe. Certains Etats rejettent en bloc le modèle américain.
Sur le plan économique, les Etats-Unis doivent faire face à la concurrence internationale (les
dragons d'Asie, l'UE, le Japon, l'Inde et la Chine). En 2014, le FMI a confirmé que les Etats-Unis ne
dominent plus l'économie mondiale. Ils sont supplantés par la Chine qui est aujourd'hui, la première
puissance économique mondiale.

Aussi, les Etats-Unis ne peuvent plus assumer son rôle de gendarme du monde. Le
désengagement par rapport au Proche et au Moyen-Orient et l'incapacité à résoudre le problème
ukrainien sont deux exemples vivants de la faiblesse de l'hyperpuissance militaire américaine. L'actuel
président des Etats-Unis, Donald Trump, en visite en Irak a confirmé que "les Etats-Unis ne peuvent plus
être le gendarme du monde".

TEXTE III
Les attentats du 11 septembre 2001 à New York et Washington révèlent la vulnérabilité de
l'hyperpuissance américaine. Ils conduisent le président George W. Bush (2001-2009) à se lancer dans
une guerre contre le terrorisme : intervention militaire en Afghanistan en 2001 et en Irak en 2003. Cette
politique suscite les critiques des alliés des Etats-Unis (France, Allemagne) et un fort antiaméricanisme
dans le monde arabe, sans déboucher sur des succès militaires (enlisement et lourdes pertes humaines).
Barack Obama, qui succède à George W. Bush en 2009, décide l'évacuation de l'Irak (achevée en 2011) et
de l'Afghanistan (2014). Cependant, les Etats-Unis poursuivent leur lutte contre le terrorisme (exécution
de Ben Laden en 2011) [...]
Par ailleurs, depuis le début du XXIe siècle, s'esquisse un monde multipolaire dans lequel les Etats-
Unis doivent composer avec des puissances émergentes (BRICS). Dans le domaine économique, la Chine
devient un redoutable concurrent. Dans le domaine géopolitique, la Russie et la Chine font obstacle aux
initiatives américaines (ex.: refus d'une intervention militaire en Syrie en 2013).
Enfin, les États-Unis doivent faire face à de graves problèmes financiers (ex.: endettement vis-à-vis de la
Chine) et économiques (depuis la crise des subprimes qui débute en 2007).

Chapitre III

LE JAPON
Le Japon est peuplé depuis le Paléolithique. Mais, les premières vagues migratoires auraient
débuté à partir du VIIe siècle avant notre ère. La légende rapporte que le Japon fut fondé au VIIe siècle
av, J.-C. par l'Empereur Jimmu.

1-RELIGION

58
Cours d'Histoire et de Géographie / Secondaire 4

Le Bouddhisme fut introduit au Japon durant les Ve et VIe siècles par des bouddhistes chinois et
coréens, amorçant une longue période d'influence culturelle chinoise. Cependant, le Japon aura sa
propre religion le Shintoïsme.
Le Shintoïsme ou shinto (littéralement "la voie des dieux" ou "la vois du divin") est une religion
polythéiste, et la religion fondamentale la plus ancienne du japon, liée particulièrement à sa mythologie.
Le terme « shinō », lecture sino-japonaise, est apparu pour différencier cette vieille religion du
bouddhisme importé au Japon au Ve siècle. Ses pratiquants sont aujourd'hui plus de 50 millions.

2-REGNE DES TOKUGAWA


De 1603 à 1867, le Japon est gouverné par la famille Tokugawa. Les membres de cette famille
influente exercent la fonction de Shogun, c'est-à-dire que ce sont eux qui détiennent le pouvoir, tandis
que l'Empereur héréditaire garde une fonction uniquement symbolique. La famille Tokugawa maintient
le Japon dans un isolement et contribue à conserver les structures féodales.
De 1631 à 1635, de nombreuses restrictions et de nombreux interdits sont mis en place et
contribuent à la politique de fermeture du Japon. Il est défendu pour les Japonais de voyager et de
résider outre-mer, et interdit de revenir pour ceux qui avaient déjà émigré. La majorité des ports du pays
sont fermés aux navires occidentaux. Cette fermeture fut provoquée par l'intolérance des nouveaux
arrivants à l'égard des traditions locales, particulièrement dans le domaine religieux. Cependant, les
relations avec les autres pays asiatiques ne sont pas totalement coupées. Les bateaux chinois peuvent
continuer d'aborder aux ports japonais et quelques bateaux ont la permission de poursuivre leur
commerce avec les établissements japonais du Sud Est asiatique.
L'isolement ne concerne pas que les étrangers. Les Tokugawa ne donnent aucun droit aux
individus japonais. Au Japon, "Chaque être humain ne devait être qu'une machine obéissante qui, à son
tour, devait retransmettre à ses subordonnés les ordres venus de l'étage supérieur".

Le dernier de la lignée des Tokugawa, Yoshinobu, prend le Pouvoir en 1867. IL sera en poste pour
une année seulement. Un courant nationaliste exige la restauration de l'autorité impériale. Prenant
conscience qu'un Etat unifié doit remplacer le système de fiefs, Yoshinobu abdique et rend son pouvoir
au jeune Empereur de 15 ans, Mutsuhito. L'abolition du shogunat favorise la mis en place et la réception
efficace des réformes de Meiji.

3-REVOLUTION MEIJI (1868-1912)


L'arrivée de Mutsuhito marque une rupture radicale avec le régime antérieur et entraîne la
modernisation du Japon. Du côté politique, en 1871, Meiji abolit officiellement la hiérarchie instaurée
par ses prédécesseurs. Les seigneurs doivent rendre leurs fiefs et les clans militaires sont dissous. Il a
ainsi des hommes et des fonds pour constituer une armée impériale. Tous les privilèges sont abolis et
pour une première fois, c'est vraiment l'Empereur qui gouverne et non une famille influente. Le but du
gouvernement est de détruire la féodalité et de tendre vers une centralisation des pouvoirs.
Sous Meiji, il n'y a plus d'intermédiaires entre l'incarnation du pouvoir qu'est l'Empereur et le
peuple. Dès 1885, il est possible de penser que le Japon est un pays qui peut se démocratiser. A la fin des
années 1880, le gouvernement Meiji crée un corps législatif qui donne au Japon une légitimité politique
qui lui permet de traiter avec les puissances d'alors. L'Empereur se distingue de ses prédécesseurs en
59
Cours d'Histoire et de Géographie / Secondaire 4

désirant intégrer le Japon à la communauté internationale, en souhaitant que son pays sorte de
l'isolationnisme. Pour ce faire, il y a mise en place d'un gouvernement de type occidentale : élaboration
d'un parlement et rédaction de la première constitution du pays en 1889.

Pour le développement du Japon, Meiji établit un système d'écoles publiques. En 1869,


l'Université de Tokyo voit le jour. Aussi, le gouvernement accorde beaucoup d'importance à
l'industrialisation. Pour favoriser celle-ci, il modernise les moyens de transport et de communication. Par
exemple, il y a création d'un service de poste en 1870, vers 1875, les premiers chemins de fer voient le
jour et des compagnies de navigation se créent. Grâce aux moyens de transport qui s'améliorent et se
généralisent, les paysans peuvent diversifier leurs cultures et vendre plus aisément leurs produits.

En 1871, le yen est créé. Cette nouvelle monnaie facilite les échange commerciaux avec
l'occident. En 1882, c'est la création de la Banque du Japon. Elle devient la seule institution pouvant
émettre et contrôler la monnaie.
Le Japon doit sa modernisation aux sociétés extérieures : "On ira chercher à travers le monde la
connaissance afin de renforcer les fondements de la règle impériale." Ce cinquième article, de la Charte
du 6 avril 1868 (la Charte des cinq articles) exprime bien la façon de Meiji de moderniser le Japon. L
'Empereur accueille des savants et techniciens du monde entier en leur offrant des salaires alléchants et
il emprunte tout ce qu'il estime bon aux occidentaux. Le gouvernement envoie également plusieurs
étudiants dans les Universités étrangères; ils sont chargés d'apprendre de l'Occident ce qui pourrait être
bénéfique pour leur pays. En s'appropriant rapidement les savoirs occidentaux, le Japon entre dans la
modernité et rattrape son retard sur l'occident. Ce que l'Europe, sur le plan économique, a mis deux
siècles à réussir, le Japon l'a ainsi réalisé en une seule génération.
En plus de la modernisation, la grande expansion territoriale, ordonnée par Meiji, permet au
Japon de se tailler une place au sein des grandes puissances. En 1894, le Japon part en guerre contre la
Chine. Cette guerre sino-japonaise avait plusieurs buts : le Japon voulait acquérir des avantages
économiques à l'extérieur, asseoir le prestige du Japon en Extrême-Orient et éviter d'être colonisé par
les puissances occidentales. Avec sa victoire sur la Chine, le Japon montre qu'il est possible qu'un pays se
modernise et devienne puissant sans être complètement dépendant de l'occident et confirme aux yeux
du monde qu'il peut accéder au rang des grandes puissances. En 1905, il obtient une victoire éclatante
dans la guerre russo-japonaise. Japon devient le premier pays non occidental à devenir une puissance
coloniale et impérialiste. De la Révolution Meiji jusqu'en 1945, l'élite japonaise se considère comme un
modèle vis-à-vis des pays d'Asie orientale.

TEXTE IV
NAISSANCE DU JAPON MODERNE
L’année 1868, début de l’ère Meiji, marqua la naissance du Japon moderne. Le nouvel Empereur
Mutsuhito, plus tard désigné sous le nom de «Meiji Tennō» (gouvernement éclairé), n’avait que quatorze
ans et, jusqu’à la fin des années 1870, n’exerça presque aucun pouvoir. Les affaires politiques étaient
dirigées par des partisans de l’autorité impériale, qui avait imposé par la force la disparition du shogunat
en 1867. Allant à l’encontre de la xénophobie née de l’ouverture forcée du Japon aux étrangers en 1853-
1854, ils décidèrent de tirer partie des avantages de la science et de la technologie occidentale, tout en
contrôlant l’activité des européens au Japon. Dès mars 1868, l’Empereur annonçait au corps
diplomatique que les attaques contre les étrangers ne seraient plus tolérées. En quelques années, le
60
Cours d'Histoire et de Géographie / Secondaire 4

système féodal fut aboli, une administration centralisée mise en place, le service militaire fut rendu
obligatoire, le système financier fut réorganisé (création du Yen) et les premiers chemins de fer furent
construits. Après avoir été pendant des siècles à l’école de la Chine, le Japon se mettait à celle de
l’Europe. A la mort de Mutsuhito, en 1912, le Japon étant l’une des grandes puissances mondiales.
Encyclopaedia Universalis

4-JAPON : UNE PUISSANCE ECONOMIQUE


A-Deuxième puissance industrielle. Ruiné et vaincu en 1945, le Japon est occupé par les
Américains. Ces derniers lui imposent la démocratie comme régime politique et favorisent son
développement industriel en l'engageant sur la voie de l'innovation. Ce développement permet au
Japon d'assurer 15% de la production industrielle mondiale et de connaître rapidement une forte
croissance ainsi qu'un faible taux de chômage et ce, jusqu'au début des années 1990.
Les atouts qui lui ont permis de connaître ce développement sont nombreux : 1) une cohésion
sociale liée à la très forte hiérarchisation de la société; 2) une main-d'œuvre docile et travailleuse; 3) une
relative maîtrise des contraintes du territoire; 4) des investissements colossaux dans le domaine de la
recherche engagés par les entreprises mais aussi par l'Etat.

L'industrie lourde est le premier fleuron de l'industrie japonaise. Aujourd'hui, elle est certes
fortement concurrencée et largement délocalisé mais les secteurs de la sidérurgie et de la construction
navale sont encore bien placés, en revanche celui du textile décline.
Mais le secteur industriel le plus dynamique est celui de l'automobile puisque avec des marques
comme Toyota, Nissan et Honda, le Japon s'impose comme le premier constructeur mondial. Ces firmes
s'implantent systématiquement à l'étranger ou s'associent avec des entreprises étrangères : c'est le cas
entre le constructeur français Renault et Nissan.

Enfin, il y a deux secteurs où le Japon exerce une supériorité incontestable, c'est celui de
l'industrie de pointe avec des marques comme Sony, Fujitsu pour l'électronique, la robotique,
l'audiovisuel... et celui des biotechnologies.
B- Troisième puissance commerciale. Le Japon ne dispose pas de matières premières et
énergétiques, son économie est fortement tournée vers l'extérieur. Cette dépendance, le Japon la
rencontre également dans le domaine des produits alimentaires, ce qui le conduit à ériger des normes de
protection de son marché intérieur.

En revanche dans le domaine des produits industriels, le Japon s'impose comme un des premiers
exportateurs de la planète notamment de produits électroniques, audiovisuels...
C'est avec la Triade, qu'il constitue avec l'Union européenne et les Etats-Unis, que le Japon
réalise l'essentiel de ses échanges, principalement avec les Etats-Unis d'ailleurs.

C- Une puissance financière : Ses échanges économiques permettent au Japon de dégager


d'énormes excédents qu'il réinvestit ensuite pour deux tiers au sein de la Triade en particulier aux Etats-
Unis, dans les secteurs de l'industrie (automobile, électronique) des services (assurances, immobilier,
finances) et de l'art.

61
Cours d'Histoire et de Géographie / Secondaire 4

Le Japon s'impose ainsi comme le deuxième investisseur de la planète. Mais, grâce à la


puissance de son système bancaire, il s'impose également comme un des principaux créanciers, c'est-à-
dire qu'il prête de l'argent notamment aux Etats-Unis et aux pays d'Asie.

5- LIMITES DE LA PUISSANCE JAPONAISES


Une économie fragile : A partir du début des années 90, le pays connaît une grave crise
économique et financière, son taux de croissance devient l'un des plus faibles des pays industrialisés.

Ce marasme économique est accompagné d'une crise politique et provoque, aussi chez les
particuliers que les investisseurs, une perte de confiance générale en l'avenir.
Mais, à partir de la fin de 2002, stimulé par le rapide développement de la Chine voisine,
l'économie japonaise amorce un mouvement de reprise.

Une crise de la société : Comme les autres pays développés, le Japon rencontre depuis quelques
années un certain nombre de problèmes qui plongent sa société dans une crise morale et sociale
importante.
Les facteurs de cette crise sont comme aux Etats-Unis ou en Europe : 1) le vieillissement de la
population; 2) le déclin des valeurs traditionnelles, notamment celle du travail et de la discipline,
remplacées par l'aspiration aux loisirs et au bien être ; 3) le recul des valeurs de solidarité de groupe au
profit de l'individualisme.
Une puissance incomplète : Le Japon n'est pas une puissance politique et militaire. En effet, en
1945, les Etats-Unis lui ont imposé de renoncer à la puissance militaire. Ce point figure d'ailleurs dans
l'article 9 de la constitution, votée en 1946 : «le peuple japonais renonce à jamais à la guerre».

Par ailleurs, le Japon n'est pas membre permanent du conseil de sécurité de l'ONU et ne
possède pas l'arme nucléaire. Cependant, depuis plusieurs années, il cherche à se faire une place sur la
scène internationale en envoyant des casques bleus dans des zones de conflits et en revendiquant un
siège de membre permanent au Conseil de sécurité

Chapitre IV

LE CANADA

1-SITUATION GEOGRAPHIQUE
Le Canada est le pays le plus au Nord des Amériques et le deuxième plus grand pays dans le
monde. Il possède des frontières avec l’océan Pacifique à l’ouest, l’océan Arctique au nord et les Etats-
Unis d’Amérique (USA) au Sud. Il s’étend sur une superficie totale qui couvre près de dix millions de
kilomètres carrés (9984670 km2). Il a également le littoral le plus long de tous les pays.
La plus grande partie du pays est constituée de plaines avec les montagnes à l’ouest et les prairies
au sud-est. Canada possède plus de lacs et de sources d’eaux internes que quel n’importe quel autre

62
Cours d'Histoire et de Géographie / Secondaire 4

pays.75% de sa population totale vit dans les grandes villes. Ottawa est sa capitale ; c’est là que siège le
gouvernement central, chargé des dossiers telles, la défense, les relations internationales etc. L’anglais
et le français sont ses deux langues officielles.
Le Canada a un climat boréal. Les hivers sont froids avec des températures moyennes variant
entre 2.5 degré Celsius et 10 degré Celsius et les étés sont relativement chauds par comparaison avec
des températures moyennes variant entre 16 degré Celsius et 28 degré Celsius dans les régions
méridionales.

2-POLITIQUE INTERIEURE
Le Canada est une monarchie constitutionnelle. La reine Elisabeth II est représentée par un
gouverneur général, Mme Julie Payette, dont les pouvoirs sont symboliques. Le Système politique, régi
par une constitution composée des deux lois constitutionnelles de 1867 et 1982 (Chartes des droits et
libertés), est une démocratie parlementaire de type britannique.

Le parlement est bicaméral. La Chambre des Communes est composée de 338 députés élus pour
un maximum de 5 ans au scrutin uninominal à un tour (majorité absolue : 170 sièges). Le Sénat du
Canada est composé de 105 sénateurs, nommés par le gouverneur général sur proposition du premier
ministre, et inamovibles jusqu’à leurs 75 ans.

Cinq partis fédéraux sont représentés à la Chambres des Communes : Parti libéral du Canada
(Justin Trudeau), Parti conservateur du Canada (Andrew Scheer), Nouveau Parti Démocratique (Jagmeet
Singh), Bloc Québécois, Parti Vert (Elizabeth May).
Après la victoire du Parti libéral aux élections d’octobre 2015, Justin Trudeau est devenu le premier
ministre du Canada (4 novembre 2015).
Administration territoriale. Le Canada est divisé en Provinces (l’Alberta, la Colombie-Britannique,
l’Île-du-Prince-Édouard, le Manitoba, le Nouveau-Brunswick, la Nouvelle-Ecosse, l’Ontario, le Québec, la
Saskatchewan et Terre-Neuve-et-Labrador) et territoires (les territoires du Nord-Ouest, le Nunavut et le
Yukon).

Les provinces sont des Etats fédérés possédant, dans leurs champs de compétences législatives,
des pouvoirs souverains, indépendamment du gouvernement fédéral. Quant aux territoires, ce sont des
subdivisions administratives d’un espace géographique appartenant au gouvernement fédéral et dont
l’administration est attribuée au Parlement canadien, qui, par une loi, peut y décentraliser des pouvoirs
législatifs en les accordant à des organes politiques chargés d’administrer la partie de territoire qui leur
est assignée.

3-SITUATION ECONOMIQUE
Le Canada figure parmi les pays les plus développés de la planète, et a longtemps dominé le
classement de l’indice de développement Humain.

Le pays est ouvert sur l’extérieur : les échanges de biens comptent pour près des trois-quarts du
PIB. Le Canada possède des accords de libre-échange avec les Etats-Unis et le Mexique (ALENA) et
d’autres pays du monde. Le partenariat transpacifique global et progressiste qui intègre les économies
des régions Asie-Pacifique et Amérique (sauf les Etats-Unis) a été conclu en mars 2018 et l’Accord
63
Cours d'Histoire et de Géographie / Secondaire 4

économique et commercial global entre l’UE et le Canada est entré provisoirement en vigueur le 21
septembre 2017. Des réflexions sont menées sur un éventuel accord avec la Chine.

Canada est immensément riche en matières premières (hydrocarbures, minerais, produits


agricoles). Il détient ainsi les troisièmes réserves mondiales de pétrole, en est le 6ème producteur. C’est
le premier pays exportateur d’uranium. Ces matières premières représentent une part croissante des
exportations du pays.

Le Canada possède plusieurs filières industrielles d’excellence. C’est en premier lieu le cas de
l’aérospatiale (Bombardier), mais aussi des télécoms (Bell Canada, Blackberry, Rogers, Aastra), de
l’informatique (ATI), de l’automobile (Magna), des bois et papiers (Résolu, Cascades), des
biotechnologies etc. Cependant, le manque de compétitivité, complété de problèmes spécifiques, amis
en difficulté des entreprises comme Blackberry et Bombardier.

4- POLITIQUE ETRANGERE
Promoteur historique du multilatéralisme, le Canada est membre de l’OTAN, de l’OMC, de
l’OCDE, de l’OSCE, de l’OEA, de l’APEC, du Commonwealth, de la Francophonie, et la cour pénale
internationale.
Le gouvernement conservateur, au pouvoir de 2006 à 2015, avait cependant opéré un recentrage
de la politique étrangère canadienne sur la promotion des intérêts économiques (renforcement des
liens avec les pays émergents, retrait du protocole de Kyoto et favorisation de l’extraction des
matières premières) et de l’affirmation de la souveraineté nationale canadienne et sa capacité
militaire (engagement militaire en Afghanistan, en Libye, en Irak et en Syrie).
Justin Trudeau a indiqué vouloir redonner toute sa place au Canada sur la scène internationale
(«Canada is back») et en particulier dans les enceintes multilatérales (candidature au Conseil de
Sécurité pour la période 2021-2022). Justin Trudeau a également mis fin aux frappes canadiennes en
Syrie et en Irak et a accueilli près de 35000 réfugiés syriens. Une reprise des relations diplomatiques
avec l’Iran est également envisagée.
L’un des nouveaux axes principaux de la politique extérieure comme intérieure canadienne est la
lutte contre le changement climatique. Justin Trudeau a annoncé un investissement massif dans les
technologies et infrastructures vertes, ainsi que l’établissement d’un prix sur le carbone.
Cependant, plusieurs axes de la politique étrangère canadienne restent stable ; comme le soutien
infaillible à l’Ukraine et à Israël, ou encore la promotion des accords de libre-échange, en particulier
l’Accord économique et commercial global entre l’Union entre l’Union européenne et le Canada,
«priorité numéro 1» de l’agenda commercial.

5- LE CANADA ET LE COMMONWEALTH
Le Commonwealth est une organisation intergouvernementale composée de 53 Etats membres
qui sont presque d’anciens territoires de l’Empire britannique.
Le Commonwealth a émergé au milieu du XXe siècle pendant le processus de la décolonisation. Il
est formellement constitué par la Déclaration de Londres de 1949 qui fait des Etats membres des

64
Cours d'Histoire et de Géographie / Secondaire 4

partenaires «libres et égaux». Le Symbole de cette libre association est la reine Elisabeth II qui est chef
du Commonwealth.
En 1931 le Canada s’est joint au Commonwealth. En 1965, Arnold Smith, un diplomate canadien,
devient le premier secrétaire général de l’organisation. La secrétaire générale actuelle (sixième
secrétaire du Commonwealth), Patricia Scotland est la première femme à occuper ce poste.
Le Commonwealth a le mandat de servir les besoins des gouvernements membres et de leurs
citoyens en matière de développement politique, économique et social. Il offre également une tribune
aux délibérations, à la résolution de problèmes, à l’atteinte de consensus et à la prise de mesures qui
sont importantes pour l’organisation.
Le Commonwealth se considère comme le défenseur des Etats vulnérables ou de petite taille, de
sorte qu’il les aide à accroître leur résilience et à s’intégrer à l’ordre mondial.
Le Canada est l’un des trois principaux donateurs du Commonwealth. Il a versé 10,5 millions de
dollars à l’organisation en 2017-2018. Canada participe à la réunion des chefs de gouvernement du
Commonwealth (RCGC), qui a lieu tous les deux ans. Les dirigeants examinent les progrès réalisés par
rapport aux engagements antérieurs, discutent des questions de participation mutuelle et donnent une
orientation à l’organisation. La dernière RCGC s’est tenue à Londres, au Royaume-Uni, en avril 2018, et la
prochaine aura lieu au Rwanda en 2020.
Le Commonwealth comprend trois organisations intergouvernementales :
-Le secrétariat du Commonwealth. Fondé en 1965, il convoque les sommets et les réunions de haut
niveau ; exécute les plans approuvés par les chefs de gouvernement des pays du Commonwealth ; fait la
promotion des valeurs et des principes du Commonwealth ; facilite le travail des organisations du
Commonwealth, comme le définit son plan stratégique de 2017 à 2021 ; coordonne diverses missions
d’observation d’élections chaque année.
En 2017-2018, le Canada a versé 6,8 millions de dollars au secrétariat du Commonwealth.

-La fondation du Commonwealth. Il a pour but de soutenir la société civile dans les pays du Commonwealth en
vue de faire connaître des exemples de réussite, de faciliter l’apprentissage et de favoriser la coopération de façon
à influencer les institutions qui façonnent la vie des gens. La Fondation du Commonwealth cherche à assurer une
gouvernance plus efficace, mieux adaptée et plus responsable au sein des pays du Commonwealth grâce à la
participation de la société civile, ce qui contribue à l’amélioration des résultats en matière de développement
En 2017-2018, le Canada a versé 1,09 million de dollars à la Fondation du Commonwealth.
-Le Commonwealth of Learning. Il met l’accent sur le renforcement des institutions dans les pays en
développement du Commonwealth qui s’efforcent de fournir une éduction abordable à un plus grand nombre de
leurs citoyens. C’est la seule organisation intergouvernementale vouée à l’élaboration et à l’échange de
connaissances, de ressources et de technologies en matière d’apprentissage ouvert et d’enseignement à distance.
Le Commonwealth of Learning aide les pays en développement membres à accroître l’accès à l’enseignement et à
la formation de qualité. Le Canada est le plus important donateur à l’égard du Commonwealth of Learning. En
2017-2018, il a versé 2,6 millions de dollars à cette organisation.

6- L’ACDI (AGENCE CANADIENNE DE DÉVELOPPEMENT INTERNATIONAL)


L’Agence Canadienne de Développement international (ACDI) a été fondée en 1968 afin de gérer la
majorité des programmes d’aide publique au développement (APD) du Canada en Afrique, au Moyen-Orient, dans
les Amériques et en Asie. L’ACDI a pour mission de mener les efforts internationaux déployés par le Canada pour
venir en aide aux personnes qui vivent dans la pauvreté. C’est une association de charité à vocation internationale
65
Cours d'Histoire et de Géographie / Secondaire 4

dont les buts et les objectifs sont entre autres d’assister les individus et les organisations de part le monde à
travers des prêts pour les affaires, l’éducation, le développement économique et la protection de
l’environnement ; de soutenir les organisations qui s’intéressent aux problèmes d’ordre social, économique et
environnemental et divers projets humanitaires grâce au dons et financements ; d’informer d’éduquer et de
sensibiliser les populations en vue de limiter la propagation du VIH\SIDA, de soutenir et de défendre les causes
de ceux qui sont déjà infectés et affectés par cette pandémie du siècle, de promouvoir le Bien-être de
l’humanité à travers le renforcement des capacités des organisation charitables afin de leur permettre
d’élaborer et exécuter des programmes viables.

TEXTE V
*…+Les agences nationales d’aide, telles que l’ACDI, sont selon le CAD (Comité d’Aide au Développement),
présentes dans un trop grand nombre de pays, œuvrent dans trop de secteur et entretiennent des liens avec trop
de partenaires. Le CAD indiquait également que ces agences étatiques ont un nombre d’objectifs démesurément
élevé. Pour remédier à cette situation, des recommandations ont été élaborées en vue d’améliorer l’efficacité de
l’aide. Les plus récentes se trouvent dans la Déclaration de Paris de 2005, laquelle a été endossée par plus d’une
centaine d’États à travers le monde. L’une des principales recommandations consiste à encourager les agences
bilatérales et les organisations multilatérales à se limiter davantage quant au choix de leurs partenaires et à se
concentrer de façon sectorielle (concentration géographique et sectorielle). La Déclaration de Paris encourage
également les donateurs à mieux coordonner leurs activités afin de limiter le dédoublement des efforts et
permettre une approche concertée avec les pays bénéficiaires. *…+
Parmi tous les pays donateurs membres membre du CAD, le Canada a longtemps été un de ceux dont l’aide
était la moins concentrée. A titre d’exemple, en 1999-2000, les 15 pays bénéficiaires en tête de liste du programme
canadien d’aide ne recevaient que 15,8% de l’aide publique au développement (APD) totale du Canada, le reste
allant à une multitude d’autres pays récipiendaires. La moyenne des autres pays donateurs s’élevait à 25% pour
leurs 15 principaux bénéficiaires. En fait, à l’époque, aucun autre donateur ne donnait moins de 20% de son aide à
ses 15 pays bénéficiaires de base, à part le Canada.

François AUDET, M. DESROSIERS, Stéphane ROUSSEL, L’Aide Canadienne au Développement Presse de


l’Université de Montréal, 2008.

Chapitre V

LA MONDIALISATION

1-DEFINITION
« La mondialisation (ou globalisation) désigne l’accélération des mouvements et échanges (d’être
humains, de biens et de services, de capitaux, de technologies ou de pratiques culturelles) sur toute la
planète. La mondialisation entraîne un niveau d’interaction croissant entre les différentes régions et
populations du globe ».
En géographie, « elle se définit comme l’ensemble des processus (économiques, sociaux,
culturels, technologiques, institutionnels) qui contribuent à la mise en relation des sociétés et des
individus du monde entier. C’est un processus progressif d’intensification des échanges et des flux entre
les différentes parties du monde ».

2-LES ORIGINES DE LA MONDIALISATION


66
Cours d'Histoire et de Géographie / Secondaire 4

Pour certains, la mondialisation est inhérente à la nature humaine : elle aurait débuté dès le
début de l’histoire humaine, il y a environ 60 000 ans. Tout au long de leurs histoires, les sociétés
humaines ont eu tendance à échanger de plus en plus entre elles. Dès l’Antiquité, les différentes
civilisations ont ainsi développé des routes commerciales, des échanges culturels, elles ont aussi vécu
des phénomènes migratoires qui ont contribué à des échanges entre les populations.
Ce phénomène s’est poursuivi un peu partout dans le monde durant l’histoire, notamment via les
conquêtes militaires et les grandes explorations. Mais la mondialisation s’est surtout accélérée grâce aux
progrès technologiques en matière de transports et de communication. C’est particulièrement depuis la
seconde moitié du 20e siècle que les échanges mondiaux se sont accélérés au point que l’on finisse par
employer le terme « mondialisation ».

3-LES DIFFERENTS ASPECTS DE LA MONDIALISATION


On parle souvent de la mondialisation comme un phénomène économique et financier (avec le
développement du commerce et des échanges monétaires et financiers) mais le phénomène englobe un
champ bien plus large que celui de la simple circulation des biens et services et des capitaux. La
mondialisation a en fait plusieurs volets :
La mondialisation financière. Emergence d’une finance mondiale, avec échanges financiers
internationaux, échanges monétaires…
La mondialisation culturelle. Interpénétration des cultures dans toute leur diversité, mais
aussi émergence d’une supraculture mondialisée.
La mondialisation politique. Développement et influence croissante des organisations
internationales telles que l’ONU ou l’OMS, ainsi que des ONG.
La mondialisation sociologique. Circulation de l’information en temps réel, interdépendance des
évènements et de leurs conséquences.
La mondialisation économique. Développement des échanges commerciaux, avec des acteurs
transnationaux comme les entreprises transnationales.

TEXTE VI
LES FTN : SYMBOLES ET MOTEURS DE LA MONDIALISATION
Les FTN (Firmes transnationales) sont des acteurs majeurs de l’économie mondiale et dominent
tous les secteurs économiques. Quelques exemples : Pétrole (Royal Dutsh Shell, Exxon Mobil, Total,
Sinopec) ; Divertissement (Walt Disney Company, Vivendi) ; Agro-alimentaire (Unilever, PepsiCo, Nestlé) ;
Cosmétique (l’Oréal, Pocter et Gamble) ; Grande distribution (Wal-Mart, Carrefour) ; Automobile (Toyota,
General Motors, Volkswagen ; Télécommunication (Apple, Samsung, Google) ; Banques et Assurances
(Axa, ING Group)…
Les FTN dominent l’économie mondiale. Ce sont 80 000 sociétés mères qui sont à l’origine des 2/3
des échanges mondiaux. Elles emploient 80 millions de salariés et disposent de 800 000 filiales dans le
monde entier. L’ensemble des FTN représente 1/4 du PIB mondial.

67
Cours d'Histoire et de Géographie / Secondaire 4

Les FTN concentrent donc des richesses colossales à l’échelle mondiale. Ce sont des puissances
financières majeures qui investissent dans le monde entier (IDE, investissement direct à l’étranger). Leurs
stratégies d’investissement en font donc des acteurs spatiaux très importants de la mondialisation.
Les produits fabriqués par les FTN peuvent bénéficier d’une distribution mondiale massive. La
diffusion des produits mondialisés participe à l’homogénéisation des modes de consommation
notamment dans la consommation alimentaire (Mc Donald’s, Coca Cola). Sur certains marchés, il n’existe
que quelques FTN qui rivalisent entre elles (exemple de la construction aéronautique avec Airbus-
Boeing).

4- LES CONSEQUENCES DE LA MONDIALISATION


La mondialisation est un phénomène complexe, profond et global. A ce titre, elle a donc une
influence considérable sur la réalité des sociétés contemporaines et des conséquences marquées dans
presque tous les domaines.
Les conséquences économiques de la mondialisation. Les conséquences les plus visibles de la
mondialisation sont sans doute celles qui touchent au monde économique. La mondialisation a entraîné
une nette augmentation des échanges commerciaux et économiques, mais également une multiplication
des échanges financiers.

Cette accélération des échanges économiques a été à l’origine d’une forte croissance
économique mondiale. Elle a permis un développement industriel global rapide. Selon certains analystes,
la mondialisation a aussi contribué à améliorer les conditions économiques globales, en créant de
nombreuses richesses économiques.
Toutefois, cette croissance économique tirée par la mondialisation ne s’est pas faite sans éveiller
les critiques. Les conséquences de la mondialisation sont loin d’être homogènes : inégalité de revenus,
de développement, dégradation des termes de l’échange. Certains acteurs (pays, entreprises, individus)
bénéficient plus des phénomènes de mondialisation, tandis que d’autres sont parfois perçu comme
« perdants » de la mondialisation.
Les conséquences de la mondialisation sur l’environnement. De nombreux critiques ont aussi
mis en évidence que la mondialisation a des effets négatifs sur l’environnement. Ainsi, le développement
massif du transport qui a été à la base de la mondialisation est aussi responsable de sérieux problèmes
environnementaux : émissions de gaz à effet de serre, réchauffement climatique, pollution de l’air.
La croissance économique mondiale et la productivité industrielle qui sont à la fois le moteur et
les conséquences principales de la mondialisation ont aussi des conséquences environnementales
majeures : déplétion des ressources naturelles, déforestation, destruction des écosystèmes.

TEXTE VII
UN MONDE POLARISÉ
La mondialisation se traduit par un clivage NORD-SUD. Les pays développés sont situés dans
l’hémisphère NORD. La Triade correspond au pôle dynamique de l’économie. Le Japon, l’Europe
occidentale, l’Amérique du Nord représentent les deux tiers du PIB mondial.
68
Cours d'Histoire et de Géographie / Secondaire 4

Ils sont de plus en plus concurrencés par les BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud) et
les Nouveaux Pays industrialisés (NPI). Ils restent tout de même en périphérie de la mondialisation. Les
pays émergents sont devenus la manufacture du monde.
Les pays pétroliers arrivent aussi sur la scène internationale à cause de la raréfaction des produits
fossiles.
La majorité des Etats restent en marge de ce processus, ont donc peu d’impact dans les échanges
économiques et leurs matières premières sont exploitées par les leaders de la Triade.

HISTOIRE

ET

69
Cours d'Histoire et de Géographie / Secondaire 4

GEOGRAPHIE
SECONDAIRE IV

Préparé par Gardy MOISE, Normalien Supérieur,

Professeur D'Histoire et de Géographie.

Septembre 2018

RÉFRÉNCES BIBLIOGRAPPHIQUES
 LAFONTAINE Joseph, le Drapeau Symbole de la Patrie, Collection
l’Humanisme1992.
 GEORGES-PIERRE Anthony, L’Exile dans la Politique Haïtienne, C3, 2006.
 SAUVEUR Pierre Étienne, L'énigme haïtien, Échec de l'État moderne en Haïti,
Presse de l'Université de Montréal, 2007.
 GILBERT Myrtha, Shada, Chronique d'une extravagante escroquerie, 2011.
 BELLEGARD Dantès, Histoire du peuple haïtien, Editions Fardin, 2014.
 NICHOLLS David, idéologie et mouvements politiques en Haïti, 1915-1946,
Annales, 1975.
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Cours d'Histoire et de Géographie / Secondaire 4

 DIEDERICH Bernard et BURT Al, Papa Doc et les tontons macoutes, Henry
Deschamps. 1986.
 EMMANUEL W. Histoire, Période Nationale, Nouveau secondaire III et VI, 2018.
 LANGLOIS Georges, VILLEMURE Gilles, Histoire de la Civilisation Occidentale,
Beauchemin, 2001.
 BOUILLON J., SORLIN P., Le Monde Contemporain, Histoire-civilisations, 1996.
 AUDET François, DESROSIERS M., ROUSSEL Stéphane, L’Aide Canadienne au
Développement Presse de l’Université de Montréal, 2008.

TABLE DES MATIÈRES

HISTOIRE D'HAITI
I - HAITI de 1915 à 1941 ......................................................................................
II- GOUVERNEMENT DE LESCOT (1941 - 1946) ..............................................
III- LA REVOLUTION DE 1946 ? ...........................................................................
IV- GOUVERNEMENT DE DUMARSAIS ESTIME (1946-1950) ................................
V- GOUVERNEMENT DE PAUL EUGENE MAGLOIRE (1950-1956) .....................
VI- SITUATION SOCIO-POLITIQUE D'APRES MAGLOIRE .............................................
VII- GOUVERNEMENT DE FRANCOIS DUVALIER (1957-1971) ......................................

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Cours d'Histoire et de Géographie / Secondaire 4

HISTOIRE UNIVERSELLE
I- LA PREMIÈRE GUERRE MONDIALE ..............................................................................
II- LA REVOLUTION RUSSE (1917) .......................................................................................
III- LA CRISE ECONOMIQUE DE 1929 ET SES CONSÉQUENCES ............................................
IV- L'ITALIE DE 1918 A 1939 ...................................................................................................
V- L'ALLEMAGNE DE 1918 A 1939 ....................................................................................
VI- LA DEUXIEME GUERRE MONDIALE : 1939-1945 ...........................................................
VII- ONU (ORGANISATION DES NATIONS UNIES) ....................................................................
VIII- LA GUERRE FROIDE (1947-1991) .....................................................................................

GEOGRAPHIE
I- L'UNION EUROPEENNE ......................................................................................................
II- LES ETATS-UNIS ..................................................................................................................
III- LE JAPON ...........................................................................................................................
IV- LE CANADA ........................................................................................................................
V- LA MONDIALISATION ........................................................................................................

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