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Pratique de l’EEG

Bases neurophysiologiques
Principes d’interprétation et de prescription
CHEZ LE MÊME ÉDITEUR

Dans la même collection


NEUROPSYCHOLOGIE, par R. GIL. Abrégés de médecine. 4e édition, 2006,
432 pages.
NEUROLOGIE, par J. CAMBIER, M. MASSON, H. DEHEN. Abrégés de médecine.
11e édition, 2004, 576 pages.
ÉPILEPSIE, par P. THOMAS, A. ARZIMANOGLOU. Abrégés de médecine. 2003,
3e édition, 240 pages

Autres ouvrages
MANUEL DE L’EEG DE L’ADULTE, VEILLE ET SOMMEIL par C. HAUSSER-
HAUW. Monographies de neurologie 2007, 352 pages.
NEUROPSYCOLOGIE DE LA MALADIE DE PARKINSON ET DES SYNDROMES
APPRENTÉS, par K. DUJARDIN, L. DEFEBVRE. Neuropsychologie, 2e édition,
2007, 184 pages.
LES NERFS CRÂNIENS, par D. DOYON, K. MARSOT-DUPUCH, J.-P. FRANCKE.
Monographies de neurologie. 2e édition, 2006, 304 pages.
TUMEURS CÉRÉBRALES, DU DIAGNOSTIC AU TRAITEMENT, par J. PHILIPPON.
2004, 304 pages.
ÉLECTROENCÉPHALOGRAPHIE DE L’ENFANT, par D. SAMSON-DOLLFUS. 2e édition.
2001, 152 pages.
NEUROPÉDIATRIE, par G. LYON, P. ÉVRARD. 2e édition, 2000, 568 pages.
ANATOMIE CLINIQUE DU SYSTÈME NERVEUX CENTRAL, par J.-M. PRADES.
1999, 272 pages.
Pratique
de l’EEG
Bases
neurophysiologiques
Principes
d’interprétation et
de prescription

Jean VION-DURY
Maître de conférences - praticien hospitalier
au CHU de Marseille
Responsable de l'Unité de neurophysiologie
et psychophysiologie
du pôle de psychiatrie universitaire,
hôpital Sainte-Marguerite, Marseille

France BLANQUET
Maître de conférences - praticien hospitalier
au CHU de Marseille
Responsable de l'unité de neurophysiologie,
hôpital de la Conception, Marseille
Tous droits de traduction, d’adaptation et de reproduction par tous procédés réservés pour tous
pays.
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© 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés


ISBN : 978-2-294-08622-9

ELSEVIER MASSON SAS – 62 rue Camille-Desmoulins, 92442 Issy-les-Moulineaux cedex


PRÉFACE

C’est bien volontiers que je préface l’« Abrégé » d’Électroencéphalographie


que Jean Vion-Dury et France Blanquet nous proposent.
Les manuels d’EEG en français qui ne se limitent pas à aligner des illustra-
tions des aspects normaux ou pathologiques de l’EEG, et qui ne traitent pas
seulement de l’épilepsie ne sont pas légion. Voici enfin un ouvrage qui
explique bien, longuement et très clairement, les fondements de la méthode. Il
est destiné aux débutants comme aux praticiens confirmés de l’EEG soucieux
d’approfondir ou mettre à jour leurs connaissances. Il s’adresse également à
ceux qui ne pratiquent pas directement l’enregistrement et la lecture de l’EEG
mais qui ont besoin d’en connaître l’essentiel ou de disposer d’un ouvrage de
référence fondamental méthodologique et clinique.
Les auteurs ont choisi d’être pédagogues. Les deux premiers chapitres, large-
ment documentés et enrichis de nombreux schémas, expliquent les bases de
l’électrogénèse cérébrale et ce qu’il faut en retenir pour comprendre ce qu’est
un EEG afin de l’enregistrer convenablement. Le chapitre suivant est consacré
à l’EEG du cerveau en développement. Les derniers chapitres étudient la
sémiologie électroclinique des principales situations où l’EEG peut compléter
la clinique et l’imagerie. Le chapitre sur l’épilepsie ne prétend pas à l’exhaus-
tivité tant il y a d’ouvrages déjà parus sur le duo EEG-épilepsie. En revanche,
les chapitres abordant les différentes encéphalopathies, le coma et la mort
cérébrale, sont là pour nous rappeler qu’aujourd’hui les deux grands domaines
cliniques de l’EEG sont l’épileptologie et la réanimation.
Le résultat est un texte libre, chargé d’expérience pédagogique et clinique.
L’intérêt majeur de cet « Abrégé » réside dans sa présentation didactique des
fondements et techniques de l’EEG, ainsi que dans la mise en valeur de cet
examen lors du diagnostic de toutes les affections neurologiques pour
lesquelles il reste indiqué (après l’évolution des techniques et des pratiques
médicales, et sans se limiter au domaine de l’épilepsie).
Voici un ouvrage de lecture agréable qui sera un précieux compagnon des
neurologues, physiologistes, physiciens, praticiens confirmés de l’élec-
troencéphalographie ou en formation.

Docteur Catherine FISCHER


Praticien hospitalier
Centre hospitalier Le Vinatier, Bron
REMERCIEMENTS

Les auteurs remercient :


Docteur Catherine Fischer pour avoir effectué une relecture attentive et
critique de cet ouvrage et pour avoir accepté de le préfacer. Sa compétence en
neurophysiologie et sa très grande expérience clinique nous ont été très utiles.
Docteur David Tammam, qui a bien voulu soumettre au crible de la perspec-
tive neurologique l’approche proposée dans cet ouvrage.
Professeur Frank Vidal, pour avoir accepté de critiquer ce texte selon un axe
plus physiologique.
Roselyne et Jean-Paul Rousseau qui ont, avec beaucoup de dévouement,
assuré le long travail de relecture formelle du texte.
AVANT-PROPOS

Il pourrait sembler présomptueux de proposer un nouveau livre sur l’EEG


alors que d’autres publications décrivent, avec beaucoup de pédagogie, les
différentes caractéristiques des tracés normaux ou pathologiques.

Notre ambition, dans un tel contexte, est double. Elle consiste d’une part à
donner à l’étudiant ou au médecin une synthèse des bases physiologiques et
physiopathologiques connues de la structure et de la modification des activités
électriques cérébrales. Il nous semble ainsi plus facile de comprendre et de
retenir les différentes modifications de l’électrogénèse que l’on observe en
clinique. Pour autant, ceci doit se faire à nouveaux frais, en raison de la multi-
plicité des études qui nous permettent de moins mal comprendre ce qui est en
jeu d’un point de vue neurophysiologique. C’est donc bien de neurophysio-
logie (et non pas de la présentation commentée de tracés dans telle ou telle
condition normale ou pathologique) dont traitera principalement ce livre.
Cette neurophysiologie sera orientée non pas vers la motricité, les fonctions
cognitives ou les processus perceptifs, mais vers la compréhension, inévitable-
ment partielle, de ce qui semble sous-tendre la genèse et la transformation de
l’électrogénèse cérébrale.

Parallèlement, notre objectif est de reconsidérer les indications de l’EEG dans


un contexte où désormais l’imagerie médicale est omniprésente. Nous devons
accepter de réfléchir autrement devant cette masse considérable de données
accumulées avant les méthodes de TDM et d’IRM, mais qui, en raison de
l’importance de ces méthodes d’imagerie, est en grande partie, sinon caduque,
du moins sans intérêt diagnostique. Pour autant, une telle attitude ne revient en
aucune manière à déconsidérer l’EEG en le plaçant à la marge des examens
paracliniques. Au contraire, ce raisonnement nous conduira (particulièrement
aux chapitres 5 et 6) à mettre en exergue les indications dans lesquelles l’EEG
nous semble irremplaçable, là où souvent l’IRM ou le scanner à rayons X
restent sans impact diagnostique.

Ainsi, nous espérons à travers cet ouvrage, convaincre l’étudiant ou le


médecin en formation que l’exploration d’un organe aussi complexe que le
cerveau, y compris avec une technique ancienne, demeure une démarche
d’une brûlante actualité qui s’avère portée par une littérature internationale,
sans doute moins massive qu’en IRM mais cependant très riche et évoluant
rapidement.

Dans ce livre, nous avons délibérément abordé l’EEG clinique de manière non
conventionnelle, privilégiant l’étude de stratégies cliniques concrètes plutôt
que le développement de chapitres basés sur la nosographie. Ce choix pourrait
sembler un peu simplificateur, mais il permet de concilier une sémiologie
complexe avec une attitude nécessairement pragmatique du médecin qui pres-
crit l’examen.
VIII Avant-propos

Pratique de l’EEG peut être lu de trois manières selon le lecteur qui l’aborde :
– le lecteur novice en EEG aura intérêt à commencer par les chapitres 1, 5, 6
et 7 et par les planches d’EEG dans lesquelles il trouvera des renvois principa-
lement aux figures et paragraphes plus théoriques; il abordera dans un second
temps les chapitres plus physiologiques et physiopathologiques (2, 3 et 4);
– le neurologue ou le psychiatre qui prescrit des EEG sans les interpréter sera
tout particulièrement concerné par les chapitres 5, 6 et 7 conçus pour aider à la
prescription de l’examen;
– le neurologue ou le psychiatre qui connaît déjà l’EEG sera plus intéressé par
la synthèse bibliographique, physiologique et physiopathologique des
chapitres 2, 3, 4.
Enfin, pour introduire cette méthode paraclinique, nous proposons au lecteur
de lire cet ouvrage avec deux métaphores en tête.
La première est que le tracé EEG ressemble, couché sur une feuille de papier,
à une partition d’orchestre où les lignes dédiées aux instruments sont des déri-
vations. Ceci souligne qu’en EEG, comme en musique, la structure temporelle
(le rythme) est au premier plan de la perception, contrairement à l’image qui
privilégie les rapports spatiaux. Il faut donc penser l’EEG comme une struc-
ture temporelle complexe qui se déroule, harmonieusement ou non.
La seconde est que faire l’interprétation d’un EEG c’est comme jouer à
« Sherlock Holmes au pays des neurones ». Interpréter un EEG, c’est recher-
cher dans une multitude de signes, dans un embrouillamini d’artéfacts et de
rythmes, pertinents ou non, les indices d’une lésion cérébrale ou d’un
dysfonctionnement. Il est sans intérêt de répondre « souffrance cérébrale ». Il
faut chercher le coupable, caractériser le crime, en savoir plus sur le mobile,
bref, prendre sa loupe et mener l’enquête, avec comme seule scène du crime,
20 minutes d’enregistrement.
ABRÉVIATIONS

5HT sérotonine
ACH acétylcholine
BDNF Brain Derived Neurotrophic Factor
BT boîte têtière
CAD convertisseur analogique digital
CAP Cyclic Alternating Patterns
CNV variation contingente négative
CPU Central Process Unit
CSA Compressed Spectral Array
DA dopamine
DC Direct Currents
DLA dysrythmie lente antérieure
DSC débit sanguin cérébral
ECG électrocardiogramme
EEG électroencéphalogramme
EMG électromyogramme
EOG électro-oculogramme
ERD Event Related Desynchronization
ERP Event Related Potentials
ERS Event Related Synchronization
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

FIRDA Frontal Intermittent Rythmic Delta Activity


FR formation réticulée
HE encéphalopathie hépatique.
HSH hypersynchronie hypnagogique
HPN hyperpnée
IRM imagerie par résonance magnétique
LC locus coeruleus
LTP Long Term Potentiation
LTS Low Threshold Spiking
MCI Mild Cognitive Impairment
MEG magnétoencéphalographie, magnétoencéphalogramme
NA noradrénaline
NGF Nerve Growth Factor
OIRDA Occipital Intermittent Rythmic Delta Activity
X Abréviations

OY ouverture des yeux


PE potentiel évoqué
PEV potentiel évoqué visuel
PES potentiel évoqué somesthésique
PEM potentiel évoqué moteur
PDS Paroxysmal Depolarisation Shift
PGO pointes géniculo-occipitales
PLEDS Periodic Lateralized Epileptiform Discharges
PO pointe-onde
POSTS Positive Occipital Sharp Transients of Sleep
PPO polypointe-onde
PPR pointes positives rolandiques
PPSE potentiel postsynaptique d’excitation
PPSI potentiel postsynaptique d’inhibition
RCIU retard de croissance in utero
RE neurones réticulothalamiques
REM Rapid Eye Movements
ROC réflexe oculocardiaque
RSA Rythmic Slow Activity
SA sommeil agité
SC sommeil calme
SFA souffrance fœtale aiguë
SLI stimulation lumineuse intermittente
SP sommeil paradoxal
SQUID Superconducting Quantum Interference Device
SREDA Sub Clinical Rythm Electroencephalographic Discharges
of Adult
TCR neurones relais thalamocorticaux
TDM tomodensitométrie
TF transformée de Fourier
VA veille agitée
VC veille calme
VPLO noyau préoptique ventrolatéral
1 LES DIFFÉRENTS ASPECTS
DE L’ÉLECTRO-
ENCÉPHALOGRAPHIE

POURQUOI PRESCRIRE UN EEG?


Avec la débauche des moyens modernes d’imagerie cérébrale (IRM, tomoden-
sitométrie, PET scan), qui tous, désormais plus précis les uns que les autres,
donnent accès à une vision très détaillée des structures cérébrales et de leurs
anomalies, il semble démodé de proposer un ouvrage sur l’EEG dans la
pratique médicale courante.
Cet examen paraclinique paraît vieillot et complètement dépassé, soit par sa
version plus attrayante parce que techniquement sophistiquée qu’est la
magnétoencéphalographie, soit par l’imagerie radiologique contemporaine.
Et pourtant, face à une pathologie hépatique, il ne viendrait à l’esprit d’aucun
médecin compétent de ne pas demander de bilan hépatique au prétexte que
l’on dispose d’un scanner, d’une échographie et d’une IRM du foie.
Ainsi, d’une certaine manière, l’EEG est donc au cerveau ce que le bilan hépa-
tique est au foie : un moyen, certes insuffisant et incomplet mais
irremplaçable, d’évaluer ce qui relève du fonctionnement cérébral et non pas
seulement de la structure de l’organe.
Ce qui dessert l’EEG, c’est, d’une part, son caractère abstrait (comme
d’ailleurs la neurophysiologie dans son ensemble) et, d’autre part, le fait qu’il
ne semble pas toujours répondre aux questions que se pose le clinicien. Le
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

problème est que souvent, par méconnaissance, les indications de l’EEG sont
mal posées et le résultat attendu peu en rapport avec les caractéristiques de la
méthode. Enfin, tout le monde peut lire ou interpréter une image; en revanche
l’interprétation d’un examen d’EEG nécessite un long apprentissage et une
formation spécifique.
Si l’imagerie et les explorations fonctionnelles ou métaboliques par RMN sont
promises à un brillant avenir, l’EEG, peu coûteux, d’accès facile, répétable et
réalisable au lit du patient possède des atouts très sérieux dans l’exploration
quotidienne des patients.

UNE « SIMPLE » AFFAIRE D’ÉLECTRICITÉ


La pose d’électrodes adéquatement placées sur le scalp et reliées à une chaîne
d’amplification permet l’enregistrement, sur divers supports, d’oscillations
électriques de forme plus ou moins sinusoïdale et survenant à des fréquences
variables mais globalement inférieures à 50 Hz. Ces oscillations électriques
constituent l’électroencéphalogramme (EEG).
2 Les différents aspects de l’électroencéphalographie

C’est en 1924, à Iéna, que Hans Berger put recueillir avec un galvanomètre à
corde le premier EEG humain à partir d’électrodes placées sur le scalp (on
imagine la difficulté d’enregistrer des différences de potentiel de l’ordre de
quelques dizaines de millionième de volt avec les piètres galvanomètres
disponibles à l’époque et sans le moindre dispositif d’amplification). Il publia
en 1929 sa découverte de deux types d’activités électriques cérébrales quasi
sinusoïdales qu’il dénomma « rythme alpha » et « rythme bêta ». La difficulté
fut de s’assurer que les variations de potentiels obtenues constituaient bien
une activité bioélectrique d’origine corticale et non pas des artéfacts provo-
qués par la pulsation des vaisseaux, la contraction des muscles, le mouvement
des yeux ou le tremblement de la tête. C’est lui qui donna le nom d’élec-
troencéphalogramme à cette méthode. À l’époque, il était nécessaire d’utiliser
des polyencéphalographes comprenant plusieurs chaînes juxtaposées d’enre-
gistrement. L’importance de la découverte de Berger ne fut vraiment reconnue
qu’en 1937. La réaction d’arrêt (arrêt du rythme alpha quand le sujet est
attentif) fut également découverte à cette époque par Berger. L’enregistrement
des premières crises d’épilepsie fut réalisé en 1938 par Gibbs.
Cependant, la Seconde Guerre mondiale allait retarder l’éclosion de cette
exploration du cerveau humain et ce n’est qu’après celle-ci que la méthode
d’EEG se généralisa comme méthode diagnostique en neurologie.
À la fin des années 1940, les premières explorations intrusives par électrodes
profondes furent réalisées. Les premières analyses de fréquences eurent lieu dans
le contexte du développement des méthodes de traitement du signal. Les grands
noms de cette période sont Penfield, Jasper, Walker, Magoun, Moruzzi, puis, en
France, Gastaut, Naquet, Roger. Magoun et Moruzzi, en réalisant les sections
étagées du tronc cérébral, mirent en évidence le rôle fondamental de la substance
réticulée activatrice ascendante dans la régulation de l’activité électrique cérébrale.
L’EEG devint véritablement un examen très répandu dans les hôpitaux dans
les années 1950.

DÉFINITIONS ET LIMITES
DE L’ÉLECTROENCÉPHALOGRAPHIE
Contrairement à ce que pourrait laisser penser le bref historique ci-dessus ou
même la culture médicale courante, l’électroencéphalographie, partie de
l’électrophysiologie, n’est pas limitée au tracé EEG enregistré dans le cadre de
l’exploration de patients. D’ailleurs, si l’on s’en réfère à l’étymologie, l’élec-
troencéphalographie concerne tout ce qui relèverait de l’enregistrement d’une
activité électrique cérébrale.
On peut dire alors que l’électroencéphalographie est une constellation de tech-
niques et de méthodes qui permettent d’une manière ou d’une autre
d’enregistrer et d’analyser le signal électrique en provenance du cerveau et
d’en étudier les différentes variations. La figure 1.1 résume cet ensemble de
différentes méthodes.
Définitions et limites de l’électroencéphalographie 3

Stimuli externes
(sensoriels)
Petites populations de neurones
Extraction du signal par sommation
Stimuli internes
(cognitifs)

Potentiels
évoqués

EEG Continu PE Sensorimoteurs


Grandes populations de
PE Cognitifs
neurones Réponses EEG
Analyse visuelle évoquées
Analyse spectrale ERD / ERS
Analyses non linéaires (Chaos)

Stimuli externes ou
internes
Activités de fond

Disparition de l’a à l’OY Populations de neurones variables


Réponse à la SLI (réponse immédiate) Analyse spectrale
Méthodes non linéaires (Chaos)

Fig. 1.1. Les trois modalités principales de l’analyse de l’activité électrique céré-
brale par l’EEG (d’après Pfurtscheller et Lopez Da Silva, Event-Related
Desynchronization, Handbook of Electroencephalography and Clinical
Neurophysiology, Elsevier Science, 1999, vol. 6, p. 51-65. Avec la permission
d’Elsevier Masson SAS).
Les cercles grisés représentent les méthodes d’EEG à visée clinique.

Cette activité électrique cérébrale est, dans les conditions physiologiques,


© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

présente en permanence et de manière spontanée, indépendamment de toute


stimulation sensorielle ou de toute activité mentale consciente (ce qui ne va
pas de soi si l’on tient compte du fonctionnement des nerfs ou des muscles ou
d’autres organes excitables). Mais des stimulations externes ou internes
(cognitives) peuvent avoir deux effets sur cette activité cérébrale spontanée :
soit générer des réponses spécifiques, d’importance topographique et de
décours temporel variables (il s’agit dans ce cas de potentiels évoqués – sous-
entendu par une stimulation ou une activation mentale), soit de modifier l’état
de fonctionnement des réseaux neuronaux actifs et il s’agira alors des
synchronisations ou désynchronisations liées à l’événement.
Ainsi, alors que le rythme alpha de l’EEG, dont l’amplitude est de l’ordre de
50 microvolts, est recueilli dans un état de veille calme quand des zones étendues
du cerveau présentent une activité cohérente, l’enregistrement d’activités liées à
un stimulus spécifique (potentiels évoqués) est réalisé à partir de petites popula-
tions de neurones présentant une activité étroitement synchronisée. En dehors de
ces activités, il est possible d’enregistrer également des variations lentes de
potentiels liées à un événement particulier comme la variation contingente néga-
tive (CNV) ou d’autres modifications en relation avec un événement extérieur.
4 Les différents aspects de l’électroencéphalographie

Les différents types de variations de potentiels, lentes ou rapides, sont regroupés


sous le nom de potentiels liés à l’événement (Event Related Potentials ou ERP).
On voit donc, dans une analyse plus fine, qu’en réalité tout est relié et que
toute séparation entre ces différentes activités enregistrables est partiellement
artificielle et dépendante essentiellement de la méthode d’observation utilisée,
voire du choix pédagogique d’explication. C’est ainsi que l’on peut décrire
quatre approches différentes de ces phénomènes électriques cérébraux :
- L’enregistrement d’activités de base (dit EEG continu) dans des conditions
de repos relatif (veille calme) qui traduisent l’organisation topographique et
rythmique de cette activité cérébrale globale : l’EEG enregistré en clinique
donne, après de multiples sommations, déformations, modifications et altéra-
tions, une image de cette électrogenèse globale extraordinairement complexe
provenant des neurones et, on l’oublie trop souvent, des cellules gliales. C’est
cette image complexe et labile que les enregistrements tentent de fixer, soit en
y cherchant des régularités naturelles (rythmes), soit en les créant artificielle-
ment (potentiels évoqués, blocage de rythmes mu ou alpha). Ces modulations
de l’électrogenèse, soit de survenue, soit d’évolution, sont à la base de la
sémiologie de l’EEG au sens large. Les effets de modifications métaboliques
(variation de la fourniture des substrats) sur cet état basal sont évalués lors de
l’hyperpnée (HPN) ou lors d’un réflexe oculocardiaque (ROC), ceux d’une
stimulation visuelle le sont par la stimulation lumineuse intermittente (SLI) ou
l’ouverture des yeux. C’est cette modalité d’exploration de l’activité élec-
trique dont il sera le plus largement question dans ce livre.
- Les potentiels évoqués sensoriels ou moteurs qui enregistrent l’activité des
seules populations de neurones nécessaires à l’analyse d’une information
sensorielle ou la génération du geste : les composantes les plus précoces des
réponses électriques en relation avec un stimulus sont enregistrées dans les
aires primaires en général ou dans des structures sous-corticales (comme le
tronc cérébral, le thalamus) et plus rarement dans des aires associatives. La
stimulation lumineuse intermittente relève, pour partie, de la génération de
potentiels évoqués qui ne sont pas analysés pour eux-mêmes (voir tracé n° 11).
- Les potentiels évoqués cognitifs, qui mettent en jeu des populations de
neurones plus importantes, moins localisées mais nécessaires à la prise en
compte secondaire des informations sensorielles ou des actes moteurs, voire à
la réalisation de tâches cognitives particulières telles que la détection
d’anomalies dans une série de stimuli. Dans ce cas, ce sont les activités élec-
triques en relation (même lointaine) avec la pensée qui sont étudiées par
l’électroencéphalographie, même s’il s’agit là d’une exploration incroyable-
ment rudimentaire de celle-ci.
- Les désynchronisations ou les synchronisations (ERD, ERS) liées aux
événements tels que l’ordre d’ouverture des yeux, l’appel du nom, l’acte
moteur ou les stimulations nociceptives et qui reflètent l’état d’activation du
cortex et dont l’analyse plus fine (plutôt du domaine de la recherche) condui-
sent à une meilleure compréhension de l’organisation rythmique du cerveau.
Ces modifications de l’activité cérébrale ne seront pas évoquées dans ce
manuel bien que leur intérêt physiologique soit considérable.
Dispositifs d’enregistrement de l’EEG standard en clinique 5

C’est ainsi que l’on peut considérer que l’EEG continu ou la MEG correspondent
à une analyse globale de l’activité cérébrale alors que les potentiels évoqués ou les
ERD et les ERS correspondent à une analyse plus focale de cette activité.

DISPOSITIFS D’ENREGISTREMENT
DE L’EEG STANDARD EN CLINIQUE
Ce paragraphe nous permettra à la fois de décrire les dispositifs d’enregistre-
ment de l’activité électroencéphalographique et de présenter les différentes
modalités d’analyse de cet enregistrement.

Dispositifs analogiques
Historiquement, les premiers appareils EEG étaient constitués de chaînes analogi-
ques d’amplification et d’écriture du tracé. Les électrodes recueillaient les
microcourants issus du scalp qui étaient amplifiés au moyen d’amplificateurs
différentiels1. Le courant de sortie des amplificateurs mobilisait les plumes d’une
table traçante dont le papier se déroulait à une vitesse définie préalablement. Selon
les appareillages et leur taille, on disposait de huit à seize voies d’amplification
correspondant au même nombre de traces produites sur le papier (figure 1.2).
Les paramètres de l’enregistrement de l’EEG étaient sur ce type d’appareils :
– l’amplification (donnée en µV/mm) ;
– la constante de temps 2 des condensateurs des amplificateurs;
– la vitesse de déroulement du papier correspondant à une base de temps
exprimée en secondes de tracé par page 3.
Un système permettait de calibrer l’amplitude de la déviation des plumes
avant le début de chaque tracé.
Dans ces conditions, le tracé paraissant sur le papier fixait, sans modification
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

ultérieure possible, l’amplitude de la déviation des ampèremètres sous l’effet


des variations de courants recueillies à la surface du scalp puis amplifiées.
Les appareils analogiques d’enregistrement de l’EEG en clinique ne sont plus
fabriqués actuellement et ils ont été remplacés par des appareils numériques
(figure 1.2) 4.

1. Un amplificateur différentiel est un amplificateur dont la sortie est proportionnelle à la tension


(U, différence de potentiel) présente entre les deux entrées.
2. La constante de temps correspond au temps mis par le signal pour diminuer de 37 % par
rapport à la déflection d’un signal continu appliqué aux bornes d’entrée du stimulateur. Elle est
calculée par le produit des valeurs de la résistance (en mégaohms et de la capacité (en microfa-
rads) d’un canal (système complet de détection, d’amplification et d’affichage des différences de
potentiels entre deux électrodes) d’amplification d’EEG. Il s’agit en effet d’un circuit RC.
3. Ceci correspond à la base de temps de la trace des oscilloscopes (en unité de temps par unité de
longueur). En pratique, le papier était préimprimé avec des lignes verticales correspondant aux
secondes et aux dixièmes de secondes et, aussi, en général à une vitesse de déroulement de
20 secondes par page, dans les conditions standard.
4. Pour les exemples de tracés analogiques, voir les tracés n° 22, 28 et 29.
6 Les différents aspects de l’électroencéphalographie

EEG ANALOGIQUE
Boîte têtière
Ampèremètres à cadre mobile

Amplificateurs TRACÉ PAPIER

Plumes + encre
Filtres

Multiplexage
Analyse spectrale : Analyse de la phase :
Convertisseur analogique digital transformée de Fourier
(CAD) cohérences
± Filtres numériques
Analyse
Fibre optique spectrale continue :
CSA

Données de base Analyse de l’aspect


sinusoïdal de l’EEG
CPU,
Disque dur carte graphique Analyse de la structure
des états de vigilance :
analyse de sommeil…
Logiciels d’analyse
Ecran
Analyse non linaire (Chaos).
Dimensions de complexité

Localisation de sources Analyse rétrospective


Imprimante (Laplaciens) des potentiels évoqués :
rétromoyennage

EEG NUMÉRIQUE

Fig. 1.2. Principe des dispositifs d’enregistrement du signal EEG.


Dans le cadre en traits pleins : dispositif du type EEG analogique. Dans le
cadre en pointillés : dispositif du type EEG numérique. Dans les appareils
modernes, la boîte têtière (BT) contient à la fois les connecteurs mais aussi
les amplificateurs et le CAD. Le signal est transformé en lumière. Le lien
avec l’ordinateur se fait par une carte interface lumière-interface fibre
optique. Le multiplexage se fait dans la BT avant le transfert sur la fibre.
CPU : Central Process Unit.

Dispositifs numériques
La numérisation des courants électriques issus du scalp constitue une étape
décisive dans l’histoire de l’EEG. Le principe de la numérisation est présenté
Dispositifs d’enregistrement de l’EEG standard en clinique 7

dans la figure 1.3. La numérisation du signal EEG 1 demande une vitesse


d’échantillonnage assez faible (128 à 256 Hz). Très souvent, elle s’effectue
selon la technique du multiplexage correspondant à un entremêlement de
signaux provenant simultanément des différentes voies d’acquisition. Ce
procédé est permis du fait de la relative faiblesse de la fréquence d’échan-
tillonnage nécessaire en EEG, au regard de la vitesse actuelle des horloges des
ordinateurs. Pour les PE, la fréquence d’échantillonnage dépend de la
fréquence de l’onde recherchée.
Sur les appareils contemporains, la boîte têtière, qui n’était initialement qu’un
système de connexion des fils d’électrodes, contient les amplificateurs et dans
certains cas le convertisseur analogique numérique (CAD : convertisseur
analogique digital). Le signal arrive ainsi sous une forme amplifiée et numé-
risée directement à l’ordinateur qui, par le biais d’une carte graphique, réalise
la présentation des données. Le transfert boîte têtière-ordinateur se fait
souvent par l’intermédiaire d’une fibre optique, ce qui a pour intérêt de dimi-
nuer considérablement le bruit électronique et l’effet d’antenne des fils
connectés.

Dispositifs de stimulation et synchronisation


Le plus souvent, les systèmes d’enregistrement de l’EEG sont reliés à un (des)
système(s) de stimulation, notamment quand il s’agit de l’enregistrement de
potentiels évoqués (figure 1.4). Le plus simple des stimulateurs employés est
le module de stimulation lumineuse intermittente (SLI) qui génère des
éclairs 2. Le stimulateur peut être intégré dans l’appareil d’enregistrement
(SLI) ou constituer un module extérieur (potentiels évoqués).
La génération de stimuli pour les potentiels évoqués cognitifs requiert souvent
des ordinateurs extérieurs au système d’enregistrement, capables de générer
les stimuli complexes (des images, des phrases préenregistrées…) qui sont
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présentés au sujet.
Mais, dans tous les cas, l’élément essentiel est le système de synchronisation
entre stimulus et acquisition (enregistrement) du signal. Par ce moyen, une
information est émise par le module de stimulation : 1) pour que le système
d’acquisition se déclenche (cas des PE au cours de moyennage) quand le
stimulus apparaît et 2) pour que le système de visualisation ou de calcul puisse
disposer de cette information pour l’analyse ultérieure : on aura ainsi les
marqueurs de SLI (ce qui est le plus simple) ou bien des marqueurs différen-
tiels de diverses tâches cognitives pour réaliser le rétromoyennage des
potentiels évoqués complexes.

1. La numérisation d’un signal doit respecter le théorème de Shannon qui pose que la fréquence
d’échantillonnage d’un signal doit être au moins le double de sa fréquence. Ainsi, si on veut
numériser de l’EEG de routine, soit donc une bande passante allant de 0 jusqu’à 50 Hz, la
fréquence d’échantillonnage sera au moins de deux fois 50 Hz, soit 100 Hz.
2. Il s’agit d’éclairs de lumière blanche, de durée 200 ms (flashes), avec une énergie de 0,3 joule
par éclair et délivrés à 50 cm des yeux.
8 Les différents aspects de l’électroencéphalographie

Tension (V)
Signal analogique ÉLECTRODES
(valeurs continues) AMPLIFICATEURS

temps

Horloge (MHz)
Échantillonnage
Tension (V) CAD
Signal échantillonné
Point n°1
(en n valeurs discrètes)
Point n° 64
TA = n DW

temps

Dynamique du DW= 1 / 2 f0
signal = 2n’, avec
n’ = nombre de bits

Matrice de valeurs du signal

Points 1 2 3 4 5 … n 63 64
Tension i1,1 i2,1 i3,1 i4,1 i5,1 in,1 i63,1 i64,1

ÉCRAN

Fig. 1.3. Principe de la numérisation, en partant du signal analogique (fond gris


uni).
DW = Dwell Time, ou temps d’échantillonnage. TA = temps d’acquisition du
signal. La matrice du signal numérisé donne l’intensité ou la tension de
courant, pour chaque point échantillonné (ici 64). Ce schéma vaut pour une
seule voie d’enregistrement. Dans les appareils actuels (voir fig. 1.2), les
signaux des différentes voies sont entrelacés par la méthode du
multiplexage.
Tracé EEG standard en clinique 9

Stimuli complexes

Stimuli simples Boîte têtière


Signal numérisé

Synchronisation Carte d’acquisition


interne

Disque dur
Module de stimulation
interne :
SLI,
PEA, PES, PEV

Logiciel de
présentation et de
lecture

Synchronisation
externe
Écran Imprimante
Ordinateur générant des stimuli complexes
pour PE cognitifs

Fig. 1.4. Dispositifs de stimulation dans les systèmes d’enregistrement d’EEG et


de potentiels évoqués sensorimoteurs et cognitifs.
Selon le cas, la synchronisation est interne (lorsque le module de stimula-
tion est intégré à l’appareil d’enregistrement) ou externe.
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D’une manière générale, rares sont les systèmes qui permettent à la fois
l’enregistrement des potentiels évoqués et de l’EEG sur le même appareillage,
pour des raisons de largeur de bande passante des amplificateurs qui ne sont
pas les mêmes dans chaque type d’application. Les appareils d’enregistrement
de PE sont souvent des appareils d’EMG à plusieurs voies, équipés d’un
stimulateur interne ou externe. Ils sont le plus souvent destinés aux PES. Les
appareils d’EEG (de bande passante 1-30 Hz) peuvent enregistrer tous les
potentiels cognitifs (composantes lentes).

TRACÉ EEG STANDARD EN CLINIQUE


Conventions de polarité du signal
L’enregistrement de l’activité électrique cérébrale s’effectue très généralement
de manière bipolaire, soit entre deux électrodes actives, soit entre une électrode
10 Les différents aspects de l’électroencéphalographie

active et une référence. La différence de potentiel entre les deux électrodes


entraîne la déviation des plumes vers le bas ou le haut selon qu’elle est positive
ou négative.
Mais, dans tous les cas, il reste très difficile de trouver des corrélations simples
entre ce qui se passe au niveau des structures corticales (neurones, groupes de
neurones) et la morphologie complexe de l’activité électrique cérébrale telle
qu’elle est présentée à l’écran ou sur le papier.
La déflexion des plumes de l’appareil d’EEG, c’est-à-dire le mouvement des
ampèremètres, pose le problème général des flux de courants. Comme le dit
E. Niedermeyer, « aussi longtemps que l’EEG sera composé de sinusoïdes, la
question de la polarité (c’est-à-dire de la négativité versus la positivité) est
presque inadaptée. Il sera usuellement suffisant de déterminer les relations de
phase (en phase ou non en phase) de tels potentiels dans une zone donnée ».
Cependant, en EEG, la règle qui veut que la déviation de la plume vers le haut
traduise une négativité et celle de la plume vers le bas une positivité est
erronée. Sur la figure 1.5, on voit comment s’organise (de manière toute théo-
rique) la polarité du signal en fonction de la quantité relative d’électrons sous
chaque électrode.

Déflexion vers le haut Déflexion vers le bas

Négatif
Négatif

Positif Positif

Plus d’électrons sur Moins d’électrons sur Moins d’électrons sur Plus d’électrons sur
l’électrode 1 = l’électrode 2 = l’électrode 1 = l’électrode 2 =
NÉGATIVITÉ POSITIVITÉ POSITIVITÉ NÉGATIVITÉ
(relative) (relative) (relative) (relative)

Électrode ou Électrode ou Électrode ou Électrode ou


circuit 1 circuit 2 circuit 1 circuit 2

Fig. 1.5. Évolution de la déflexion du signal EEG en fonction de la configuration


de charges au niveau de chaque électrode.
Par convention, l’axe des intensités est orienté vers le bas. Une déflexion
vers le haut est donc une déflexion négative.
Tracé EEG standard en clinique 11

Ainsi, dans un système bipolaire, par convention de polarité, on aura :


– négativité (relative) dans l’électrode 1 (ou circuit) ⇒ déflexion vers le haut;
– positivité (relative) dans l’électrode 1 (ou circuit) ⇒ déflexion vers le bas;
– négativité (relative) dans l’électrode 2 (ou circuit) ⇒ déflexion vers le bas;
– positivité (relative) dans l’électrode 2 (ou circuit) ⇒ déflexion vers le haut.
C’est pour cette raison, que dans les montages bipolaires de type A-B, la
première électrode A sera connectée au circuit 1 et la seconde électrode B au
circuit 2. Le montage A-B ne sera donc pas équivalent au montage B-A.
Il est possible également d’utiliser des montages référentiels ou monopolaires,
c’est-à-dire construits entre une électrode active et une électrode de référence :
soit électrode de référence « moyenne » de Wilson (average reference) consti-
tuée de la moyenne des différences de potentiels des électrodes actives 1, soit
électrode commune, par exemple nasale (ce qui constitue un montage dit en
référence commune).
En réalité, il faut comprendre que l’électrogenèse des potentiels de l’EEG
implique des myriades de sources microscopiques de courant et que le signal
produit est le résultat de courants générés par ces sources.

Électrodes et montages
La disposition des électrodes sur le scalp se fait, en routine clinique, le plus
souvent selon le système 10-20 (figure 1.6). Chaque canal d’amplification
reçoit le courant de deux électrodes (soit deux électrodes actives, soit une
électrode active et une électrode de référence). Cette paire d’électrodes est
appelée dérivation (par exemple dérivation Cz-Pz). Un ensemble de dériva-
tions permettant d’enregistrer autant de traces qu’il y a de canaux
d’amplifications actifs est dénommé montage. En d’autres termes, un montage
est une disposition selon laquelle un certain nombre de dérivations sont affi-
chées simultanément sur un enregistrement EEG (figures 1.7 et 1.8). On
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

remarquera que les électrodes paires correspondent au côté droit et les élec-
trodes impaires au côté gauche. Les électrodes centrales ont l’indice z.
En routine clinique, trois montages sont essentiellement utilisés (figure 1.7) : le
montage standard zéro (qui est un bon montage d’analyse rapide de l’activité
cérébrale), le montage longitudinal et le montage transverse ou la combinaison
des deux (qui permet une bonne visualisation des phénomènes paroxystiques).
D’autres montages, comme le montage à longues distances ou en « hameçon »
sont utilisés dans des applications plus spécifiques, respectivement évaluation
de la mort cérébrale et les enregistrements chez les bébés. Les montages réfé-
rentiels permettent d’étudier et de comparer l’amplitude des grapho-éléments.
Sur les appareils analogiques, les montages sont changés à l’aide d’un contac-
teur et ne peuvent être rétrospectivement modifiés. En revanche, sur les
appareillages numériques, c’est le courant de sortie de chaque électrode qui est
numérisé et sauvegardé. Ainsi, il est possible de créer après l’enregistrement

1. Les montages avec électrode moyenne sont câblés dans l’appareil EEG.
12 Les différents aspects de l’électroencéphalographie

Gauche = Droite =
impair pair
Fpz

Fp1 Fp2
F3
C3

F3 Fz F4 Fp1 F7
P3
F7 F8
T3 T5
O1

T3 C3 Cz C4 T4
A1 A2

T5 P3 Pz P4 T6

O1 O2

Fig. 1.6. Positionnement des électrodes dans le système 10-20. Aperçu de la face
gauche du cerveau avec les électrodes impaires.

Montage « standard zéro » Montage longitudinal Montage transverse

Montage « en hameçon » Montage longues distances


(bébés) (mort cérébrale)

Fig. 1.7. Les principaux montages utilisés en EEG clinique.


Tracé EEG standard en clinique 13

Type de montage
Sensibilité présenté Valeur du filtre Valeur de la constante
(en µV/mm) passe-bas de temps
Échelle de temps des condensateurs

- Message indiquant
Polarité
+ les évènements
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ECG
Dérivations systématiquement enregistré Ligne sur laquelle
du montage utilisé (permet de détecter des artéfacts) seront les marqueurs
indiquant les éclairs
délivrés par la SLI

Fig. 1.8. Un tracé EEG normal (appareil EB Neuro, type Mizar 33).
On remarque que, sur les systèmes numériques, les principaux paramètres sont
présentés et qu’ils peuvent être modifiés à la demande lors de la relecture.

tous les montages et dérivations que l’on souhaite. Cette possibilité donne une
impressionnante flexibilité à l’analyse ultérieure de l’EEG.

Réalisation pratique de l’examen


La réalisation d’un tracé électroencéphalographique, en routine clinique,
comprend les étapes suivantes :
– préparation, positionnement et branchement des électrodes, le patient étant
assis ou allongé;
14 Les différents aspects de l’électroencéphalographie

– vérification des impédances et des paramètres d’amplification, c’est-à-dire


vérification de la chaîne d’enregistrement;
– enregistrement dans les conditions de veille calme, yeux fermés, avec des
épisodes d’ouverture et de fermeture des yeux de 10 secondes pour évaluer la
réactivité; cet enregistrement se fait selon différents montages;
– épreuves d’activation : hyperpnée, SLI (stimulation lumineuse intermit-
tente), voire autres manœuvres type réflexe oculocardiaque (voir tableau 4.II,
p. 86-87); l’hyperpnée peut être répétée une seconde fois après la SLI dans le
cas de la recherche de processus paroxystiques;
– fin d’enregistrement dans les conditions de veille calme;
– démontage des électrodes.
La durée de la préparation du patient est de l’ordre de 15 minutes. L’enregis-
trement ne doit pas être inférieur à 20 minutes chez un patient coopérant.
Il existe plusieurs types d’électrodes : cupules, tampons, aiguilles, qui présen-
tent chacune des avantages, des inconvénients et des usages plus ou moins
spécifiques. Le contact est généralement assuré par une pâte comprenant de la
pierre ponce et des électrolytes.
L’amplification normale en EEG correspond à une échelle de 10 µV/mm, mais
elle peut être modifiée pour atteindre une échelle de 2,0 µV/mm dans l’explo-
ration des morts cérébrales (voir tableau 4.VIII, p. 130). La constante de
temps habituellement employée est de 0,3 seconde. Une page de tracé stan-
dard est présentée dans la figure 1.8.
La numérisation du signal EEG et le développement de logiciels, le plus
souvent conviviaux et de manipulation agréable, a permis une évolution signi-
ficative de l’analyse d’un tracé : la possibilité de faire varier tous les
paramètres d’enregistrement (montages, amplification, constante de temps,
base de temps) lors de la relecture permet, dans certains cas, d’être plus précis
et plus fiable dans l’interprétation. De plus, un avantage considérable de la
numérisation est la capacité d’archivage sur support numérique. L’utilisation
d’ordinateurs portables et la miniaturisation des composants électroniques
font que les appareillages sont de faibles dimensions et facilement transporta-
bles tout en conservant des performances maximales. Cette miniaturisation a
également permis une augmentation considérable du nombre de canaux qui,
de manière classique, est supérieur ou égal à 32.

STRUCTURE ET CARACTÉRISTIQUES
DU SIGNAL EEG
On peut considérer classiquement le signal EEG comme un signal sinusoïdal1
formé de très nombreuses fonctions sinusoïdes qui s’ajoutent pour former le
tracé inscrit sur la feuille ou à l’écran. Le simple comptage des fréquences

1. On peut également le modéliser sous la forme d’une équation de fonctions périodiques.


Structure et caractéristiques du signal EEG 15

dans l’interprétation standard (visuelle) de l’EEG témoigne de la prégnance et


de l’importance de ce modèle. L’analyse spectrale se base sur cette hypothèse.
En réalité, le signal EEG enregistré au cours d’un examen standard présente
des caractéristiques fondamentales de polarité, de non-stationnarité et de
complexité qu’il faut bien connaître pour espérer comprendre et interpréter un
tel examen.

Non-stationnarité, synchronisation, désynchronisation


Le cerveau est un système changeant en permanence son mode de fonctionne-
ment sous l’effet des événements extérieurs ou intérieurs (pensées,
motivations). On doit donc considérer qu’il existe en permanence des configu-
rations dynamiques, spatialement et temporellement organisées, spécifiques
d’une tâche de l’activité cérébrale et qui peuvent se modifier en une fraction
de seconde. On parle alors de configurations spatio-temporelles à court terme
(états métastables) qui reposent sur le fait que les neurones fonctionnent en
réseaux (éventuellement labiles, plus ou moins étendus) et que leurs activités
sont régulées dynamiquement dans ces réseaux. On doit donc intégrer dans
toute analyse d’un électroencéphalogramme que le signal EEG est fondamen-
talement non stationnaire. Cependant, on admet que, malgré cette non-
stationnarité, l’analyse de l’EEG est possible pendant de courtes périodes au
prix d’une approximation acceptable.
Dans l’EEG clinique standard du système 10/20, on n’étudie pas une seule
bande de fréquence mais plusieurs et dans des localisations multiples. Le
caractère non stationnaire apparaît clairement à la lecture du signal EEG, mais
il est fortement émoussé par les conditions de son enregistrement. Le moyen-
nage des activités à travers le scalp est considérable et la localisation des
événements médiocre ou imprécise.
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

Ce que l’on appelle une synchronisation de l’activité sera caractérisée par la


mise en synchronie de grandes populations de neurones mais se traduira alors
par un changement de la bande dominante de fréquences qui correspondra à
un ralentissement de l’EEG (passage par exemple de la bande alpha à la bande
bêta). La désynchronisation correspondra, à l’inverse, à la non-synchronie des
populations neuronales, accompagnée d’une diminution de l’amplitude et
d’une augmentation de la fréquence de la bande des fréquences dominantes
(ce qui correspond à l’« accélération » du tracé) (voir figure 2.8, p. 45).

Signal EEG : un signal non linéaire (chaotique)


Comme nous l’avons vu plus haut (p. 14), les méthodes d’analyse de l’EEG
acceptent l’hypothèse de la linéarité du signal, c’est-à-dire que les modèles
utilisés pour décrire les processus neurophysiologiques dérivent des modèles
utilisés pour décrire des systèmes intégrables (utilisant des équations différen-
tielles), c’est-à-dire linéaires. On suppose, dans ceux-ci, que le déterminisme
des équations mathématiques décrivant les modèles conduit à la prédictibilité
du devenir des objets ainsi modélisés.
16 Les différents aspects de l’électroencéphalographie

En réalité, cette hypothèse est largement invalide et le signal EEG apparaît


essentiellement comme un signal globalement non linaire, c’est-à-dire chao-
tique mais comprenant des processus linéaires au sein de cette non-linéarité
générale. Un phénomène chaotique est un phénomène dont l’évolution tempo-
relle dépend de manière critique 1 des conditions initiales. Si celles-ci ne sont
pas rigoureusement identiques entre deux situations d’observation, le devenir
du système va différer au bout d’un certain temps, dit temps de Liapounov. La
divergence d’un tel phénomène est représentée dans l’espace des phases2 par
un attracteur 3 chaotique dans lequel les trajectoires ne se recoupent jamais. Ce
type d’attracteur est dit attracteur étrange. C’est un objet mathématique de
dimension non entière 4 : un fractal. Ainsi, bien que régi fondamentalement par
des lois déterministes (équations mathématiques), le système chaotique
devient imprédictible au bout d’un certain temps. En réalité, ce qui importe est
l’échelle des temps d’observation. Dans un système chaotique, les mêmes
causes ne produisent jamais les mêmes effets. La constante qui pour une
certaine valeur conduira le système d’une évolution régulière vers une évolu-
tion chaotique est dite constante de bifurcation. La naissance de chaos se
traduit donc par des bifurcations successives entre deux évolutions possibles.
Le « choix » d’une branche ou d’une autre de la bifurcation relève de
processus stochastiques (liés au hasard).
Pour que surgisse un phénomène chaotique dans un système physique quel-
conque, il suffit qu’il y ait dans le système trois oscillateurs couplés. Plus on
aura d’oscillateurs couplés et plus la probabilité d’observer la présence de
chaos sera grande. Ainsi, dans la genèse des rythmes cérébraux, qui sont
produits par des réseaux de neurones dont l’activité est fondamentalement
oscillante (voir chap. 2), il est extrêmement probable que des processus chao-
tiques soient présents. C’est ce qui a été démontré dans les années 1990.
Le paramètre chaotique le plus étudié en EEG est la dimension de complexité,
c’est-à-dire la mesure de la complexité de l’information non aléatoire, c’est-à-
dire corrélée dans le signal EEG. Les variations de la dimension de complexité
(très robustes) entre différents états ou lors de différentes tâches peuvent être
interprétées sur la base de la synchronisation ou de la désynchronisation des
activités neuronales. Ainsi, la dimension de complexité du sommeil lent est
plus faible que celle de la veille (l’activité électrique du sommeil lent est
moins complexe) avec une chute progressive lors des stades de sommeil
successifs. La dimension de complexité a été également étudiée au cours des
crises épileptiques dans lesquelles elle est très variable. Des diminutions de la
dimension de complexité ont été observées dans la dépression ou bien les
démences. Pour l’heure, les applications cliniques de l’analyse chaotique de

1. Au sens de « qui décide de l’issue » et non de crise épileptique.


2. C’est l’espace constitué par tous les états possibles du système compte tenu de toutes les varia-
bles qui le décrivent : par exemple pour un pendule, angle par rapport à la verticale et vitesse
angulaire.
3. Un objet mathématique correspondant à un état vers lequel les trajectoires convergent.
4. Ont une dimension entière : une ligne (dimension 1), un plan (dimension 2) et un volume
(dimension 3). Un fractal est entre un plan et un volume ou entre une ligne et un plan.
Analyse du signal EEG 17

l’EEG restent par trop fragmentaires. Elles se heurtent notamment aux


conceptions classiques de l’analyse du signal et, il faut l’avouer, au caractère
abstrait et austère de ce type de méthodes.

ANALYSE DU SIGNAL EEG


Les principales méthodes d’analyse de l’électroencéphalogramme, dévelop-
pées grâce à la numérisation et donc en utilisant des ordinateurs, se fondent
sur une approche qui fait en gros trois hypothèses acceptables sur le signal
EEG :
– son caractère sinusoïdal;
– son caractère stationnaire pendant le temps de l’analyse;
– sa linéarité (c’est-à-dire sa description possible sous la forme d’équations
différentielles).

Analyse des fréquences :


analyse spectrale de l’EEG et cartographies EEG
La théorie de l’analyse d’un signal complexe, somme de sinusoïdes simples de
fréquence et d’amplitude différentes et présentant un déphasage les unes par
rapport aux autres, a été établie par Joseph Fourier qui a décrit les équations
qui permettent sa décomposition en fréquences simples. Cette décomposition
est la transformée de Fourier (TF). La transformée de Fourier fait passer de
manière réversible du domaine des temps (dans lequel on dispose de l’ampli-
tude du signal en fonction du temps) à celui des fréquences (dans lequel
l’amplitude du signal est donnée cette fois en fonction des fréquences)
(figure 1.9). La transformée de Fourier rapide (FFT) est l’algorithme qui
permet de réduire le temps de calcul de la TF.
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

L’analyse par décomposition spectrale d’un tracé EEG (quelques dizaines de


secondes) s’effectue par le calcul successif de spectres sur 2 à 5 secondes (les
époques) puis par moyennage de ces spectres. Il est préférable alors d’utiliser
un montage référentiel avec une référence commune inactive et non un
montage bipolaire (voir supra). Le résultat est donné en puissance spectrale
(pour chaque fréquence) en µV 2/Hz.
Il existe deux manières de présenter l’EEG ainsi analysé par décomposition de
Fourier : a) soit la présentation des spectres de l’activité présente sous chaque
électrode (figure 1.9A), b) soit une cartographie de la puissance spectrale pour
une fréquence ou une bande de fréquences données (alpha, delta…) sous chaque
électrode (figure 1.9B). Si les deux modes de présentation sont liés, ils ne signi-
fient pas la même chose. Les cartographies, bien que plus agréables à l’œil, ne
peuvent être interprétées qu’après analyse de la carte des spectres puisque c’est
cette carte qui contient l’information fréquentielle et spectrale proprement dite.
De plus, seule l’analyse soigneuse des spectres et des tracés les ayant générés
permet d’éliminer des artéfacts ou des anomalies qui n’apparaissent pas sur les
cartographies de puissance spectrale et qui peuvent conduire à des erreurs
18 Les différents aspects de l’électroencéphalographie

A
Puissance : 0 - 8,36 µV?

Durée de la période : 2 secs


# périodes : 32
Artéfact
de mouvement oculaire
Puissance spectrale

Fp1-ref Fp2-ref

30 Hz

F7-ref F3-ref Fz-ref F4-ref F8-ref

T3-ref C3-ref Cz-ref C4-ref T4-ref

T5-ref P3-ref Pz-ref P4-ref T6-ref

Rythme alpha

O1-ref O2-ref

Fig. 1.9. Présentation d’une analyse spectrale sous la forme d’une carte de spectres
(un spectre sous chaque électrode).
Ici, le montage utilisé est référentiel. On note un pic de fréquence vers 10 Hz
prédominant dans les régions postérieures : il s’agit du rythme alpha. La bande
de fréquence analysée est ici de 30 Hz. En bas, cartographie illustrant la puis-
sance spectrale sous chaque électrode pour les quatre bandes de fréquences de
l’EEG (voir tableau 2.I, p. 25).
Analyse du signal EEG 19

diagnostiques. On voit que l’analyse spectrale, désormais de réalisation facile


grâce aux ordinateurs actuels, demande de nombreuses précautions d’interpréta-
tion et ne peut que venir en complément d’une analyse visuelle du tracé source.
Si l’analyse spectrale de l’EEG constitue un puissant outil, en particulier en
pharmacologie, elle ne peut cependant pas remplacer l’analyse visuelle,
notamment parce qu’elle ne donne pas de vision dynamique de l’activité céré-
brale en raison de son hypothèse de stationnarité et des modalités de sa
réalisation.

CSA (Compressed Spectral Array, rangée spectrale comprimée)


Cette technique fournit une mesure de la distribution de la puissance spectrale
de l’EEG dans une bande de fréquences entre 0 et 16 Hz et permet ainsi de
résumer des données EEG sous une forme comprimée. Des périodes discrètes
d’enregistrement d’EEG allant de 2 secondes à plusieurs minutes sont
soumises à une transformée de Fourier rapide. Cette méthode permet de
détecter des modifications brutales ou graduelles du contenu spectral en EEG.
En revanche, des modifications subtiles du tracé peuvent échapper à cette
compression des données.
C’est une technique de surveillance opératoire qui s’effectue en général sur
deux ou quatre canaux. On peut mesurer des amplitudes, des fréquences
moyennes. Le CSA a été proposé en anesthésie pour évaluer le degré de
profondeur de l’anesthésie.

Détection de pointes
Les pointes et les autres éléments angulaires sont définis par leur morpho-
logie. Les méthodes automatiques de détection de pointes utilisent des
logiciels de reconnaissance de formes mimant les modalités de reconnaissance
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

des pointes par le médecin sur la base de paramètres spécifiques : durée du


grapho-élément, amplitude, caractère aigu, pente (raideur). Les logiciels
actuels peuvent aisément, sur la base de ces critères, extraire les pointes de
l’activité de fond. Ceci suppose cependant que le tracé soit relativement
dépourvu d’artéfacts.

Analyse automatique du sommeil


Les enregistrements du sommeil sont des polygraphies qui comprennent, outre
l’EEG, des variables fondamentales pour définir les différents stades de
sommeil : EOG, EMG, pneumogramme, ECG, température corporelle et
tumescence pénienne sans oublier éventuellement un enregistrement vidéo.
Si l’analyse visuelle du sommeil est la méthode la plus fiable pour évaluer les
critères de Rechtschaffen et Kale, son caractère fastidieux a suscité le déve-
loppement de logiciels d’analyse automatique. Ces méthodes d’analyse
automatique des stades de sommeil sont considérées cependant comme moins
performantes que les méthodes visuelles.
20 Les différents aspects de l’électroencéphalographie

Analyse des phases et étude des cohérences


La transformée de Fourier donne une idée de l’amplitude de chaque fréquence
sous chaque électrode, c’est-à-dire de l’énergie ainsi mise en jeu mais elle ne
donne aucune indication sur la phase ou le déphasage du signal entre deux
électrodes. Cette analyse des phases entre deux électrodes peut être réalisée
par l’étude du spectre croisé, c’est-à-dire par l’analyse des cohérences.
En pratique, l’étude des cohérences peut être réalisée, soit sur l’activité de
base, soit lors de stimulations lumineuses ou cognitives. Les cohérences EEG
permettent d’évaluer la connectivité fonctionnelle corticale. Un fort taux de
cohérence entre deux signaux EEG constitue une indication de populations
neuronales co-activées, sans cependant révéler la source de cette synchronisa-
tion. Les facteurs qui affectent la cohérence EEG sont multiples et la
connectivité corticale semble l’un des plus importants, notamment la connec-
tivité interhémisphérique. Quelques études cliniques ont été menées,
particulièrement dans des cas d’agnosie visuelle, d’épilepsie, de pathologie
d’Alzheimer. Ces études montrent des perturbations des cohérences interhé-
misphériques. Cependant, cette analyse du signal EEG n’a pas à ce jour trouvé
d’application clinique suffisamment validée pour sortir du domaine de la
recherche fondamentale ou clinique.

Problème inverse et localisation de sources


En EEG, on considère que des sources d’activité électrique génèrent une
distribution de potentiel électrique dans la tête mesurée par un réseau d’élec-
trodes adapté sur le scalp. Le calcul (la modélisation) de la distribution du
potentiel électrique généré par des sources de courant dont les paramètres sont
connus (intensité de la source, orientation, et localisation) est appelé problème
direct ou forward problem. Le problème direct peut être résumé de la manière
suivante : c’est faire de l’EEG artificiel à partir de modèles pour comprendre
la constitution de l’EEG naturel (figure 1.10.A).
Inversement, l’estimation des mêmes paramètres de la source à partir des
mesures du potentiel électrique est appelée problème inverse ou inverse
problem (localisation et orientation des sources à partir du signal EEG).
La détermination de la localisation des sources (problème inverse) nécessite
en EEG des analyses sophistiquées du signal EEG tenant compte des modèles
de conduction de la tête (modèles à trois ou quatre sphères concentriques :
cerveau, crâne, scalp et LCR). Plusieurs méthodes sont utilisées dont le calcul
des laplaciens de potentiels.
Le signal du magnétoencéphalogramme, en raison de ses propriétés, permet
une simplification considérable des calculs de localisation, d’où le développe-
ment récent de la MEG.

MAGNÉTOENCÉPHALOGRAPHIE
La magnétoencéphalographie (MEG) analyse les variations du champ magnétique
cérébral associées aux champs électriques produits par les cellules cérébrales.
Magnétoencéphalographie 21

Une structure cérébrale QUESTION :


A (cortex) génère des courants Quelle sera la distribution
des courants enregistrés
sur le scalp ?

« FORWARD PROBLEM »

QUESTION On enregistre
Où est la structure cérébrale une distribution de courants
qui génère cette activité ? sur le scalp
(grapho-élément :
pointe PE…)

« INVERSE PROBLEM »

B EEG MEG

Organisation
du champ électrique Organisation
pour un dipôle tangentiel du champ électrique
+ provenant de la partie pour le même dipôle
supérieure de
- la scissure de Sylvius

Dipôles radiaux, Champs magnétiques


très faibles et potentiels
C émis par les gyri
électriques élevés
EEG
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

V 0,
B=0

Dipôles tangentiels
émis par la profondeur MEG
V 0, (flancs) des sillons
B 0

Fig. 1.10. Problème direct et problème inverse. Comparaison entre EEG et MEG.
A) Problème direct et problème inverse. B) Modélisation des champs électri-
ques et magnétiques en EEG et MEG avec un modèle de sphère à quatre
couches concentriques. C) Origine des champs électrique et magnétique en
provenance d’un sillon cortical.

Tout courant électrique variable (c’est le cas de l’EEG) génère un champ


magnétique perpendiculaire (selon les lois de Maxwell) (figure 1.10.B). C’est
dans les années 1960, soit 40 ans après la découverte de l’EEG, qu’apparut
22 Les différents aspects de l’électroencéphalographie

l’idée de mesurer le champ magnétique extracrânien, le magné-


toencéphalogramme (MEG 1).
Les champs magnétiques cérébraux sont de très faible amplitude (celle-ci est
de l’ordre de 10–8 Gauss alors que celle du champ magnétique terrestre est de
0,5 G). Seule, la récente technologie des SQUID (Superconducting Quantum
Interference Device ou détecteur supraconducteur à interférence quantique)
dont la sensibilité peut atteindre 10–10 Gauss a permis de concevoir un appa-
reillage détectant couramment les champs magnétiques en relation avec
l’activité électrique cérébrale : il s’agit de la magnétoencéphalographie.
Alors que les tissus extracérébraux altèrent les flux de courants en EEG, ils
sont quasi transparents vis-à-vis du champ magnétique, ce qui fait que la
distorsion du champ magnétique (MEG) est moins prononcée que celle des
potentiels électriques (EEG) et la localisation des sources plus aisée. La sélec-
tivité particulière de la MEG pour les courants tangentiels en présence de
plusieurs sources simultanées est un avantage certain de cette méthode qui
enregistre les activités du flanc des sillons corticaux (figure 1.10.C). On admet
que le MEG contient les composantes intracellulaires et l’EEG les compo-
santes extracellulaires des générateurs de courant. Idéalement, MEG et EEG
doivent être combinés pour obtenir un maximum d’informations.
L’enregistrement du MEG ne nécessite ni électrodes ni point de référence
mais seulement des transducteurs qui ne doivent pas toucher le crâne. Actuel-
lement, des magnétomètres en forme de heaume permettent la couverture de
tout le scalp. Les instruments les plus récents sont équipés de 200 à 300 voies
correspondant au même nombre de capteurs (de 3 cm de diamètre). Certains
dispositifs permettent des enregistrements simultanés MEG-EEG.
La mise en place d’un appareillage MEG est nettement plus complexe et
coûteuse que celle d’un appareillage EEG. Outre le blindage de la pièce (avec
éventuellement des méthodes de compensation de distorsion de champ
magnétique), l’appareillage (le magnétomètre) est de loin plus sophistiqué
qu’un appareil d’EEG. Il est donc inenvisageable d’équiper actuellement de
nombreux sites de neurophysiologie clinique.
Les contraintes d’un enregistrement du MEG sont nombreuses (à commencer
par l’élimination des champs magnétiques propres au sujet : prothèses
d’orthodontie; immobilité stricte de la tête) et les stimuli délivrés lors de
l’enregistrement génèrent de nombreux artéfacts. Cependant les applications
de la MEG se développent dans le domaine de la neurophysiologie (compré-
hension des rythmes EEG), des sciences cognitives (localisation des sources
de courants des potentiels évoqués cognitifs) ou de la neurophysiologie
clinique (détection des sources des grapho-éléments paroxystiques dans
l’épilepsie).

1. Pour différencier magnétoencéphalogramme (MEG) et magnétoencéphalographie (MEG), le


premier sera précédé d’un article au masculin et le second d’un article au féminin.
Magnétoencéphalographie 23

CE QU’IL FAUT RETENIR

• L’électroencéphalographie est le seul examen paraclinique, accessible et


économique, qui donne accès à la fonctionnalité cérébrale. Celle-ci peut
être anormale, alors que tous les résultats de l’imagerie sont par ailleurs
normaux. Il n’est en aucun cas invalidé ou remplacé par les méthodes
d’imagerie contemporaine, dans la mesure où il donne des informations
spécifiques qu’elles ne peuvent fournir.
• L’électroencéphalographie ne concerne pas un examen paraclinique
particulier mais un ensemble de modalités d’enregistrement et d’analyse
de l’activité électrique cérébrale (électroencéphalogramme de routine,
potentiels évoqués, enregistrements de sommeil…).
• Désormais, l’enregistrement de l’EEG est réalisé sur des appareils numé-
riques qui permettent une plus grande souplesse dans l’acquisition et la
lecture du signal en routine clinique.
• La numérisation donne facilement accès à des méthodes de traitement
du signal EEG qui permettent de disposer d’informations particulièrement
utiles (analyse spectrale, détection de pointes…).
• La complexité du signal EEG, la reconnaissance récente de son caractère
non linéaire (chaotique) et l’analyse plus fine des modifications de celui-ci
en relation avec des événements, le tout associé au développement
d’appareillages de plus en plus performants, conduisent à repenser l’élec-
troencéphalographie sur de nouvelles bases.
• La magnétoencéphalographie, méthode encore rare et coûteuse, est
particulièrement performante pour la détection des origines d’un signal
EEG (anomalies paroxystiques).
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.
2 DYNAMIQUE NEURONALE
ET GENÈSE DE L’EEG

Dans ce chapitre, nous analyserons les différentes activités rythmiques de


l’EEG telles qu’elles se présentent dans un tracé standard puis nous décrirons
les structures impliquées dans la genèse de l’EEG. Enfin, nous tenterons de
comprendre quels sont les processus physiologiques sous-jacents à la genèse
de ces activités rythmiques, tant au niveau macroscopique que microscopique.
Nous avons fait le choix de détailler les processus neurophysiologiques plus
que ne le font habituellement les ouvrages d’EEG, parce que leur connais-
sance nous semble fondamentale pour comprendre de manière synthétique
l’organisation physiologique et la désorganisation pathologique des activités
électriques cérébrales (décrites dans le chapitre 4).

PHÉNOMÉNOLOGIE DES ACTIVITÉS


PHYSIOLOGIQUES D’ORIGINE CÉRÉBRALE
ENREGISTRABLES À PARTIR DU SCALP
Une fois le système d’enregistrement de l’EEG mis en place, apparaît à
l’écran un signal complexe et variable (voir supra, p. 14-17) duquel émerge un
certain nombre de régularités en relation avec le comportement général du
sujet. Si l’on enregistre cette activité cérébrale pendant plusieurs jours, on
constate que l’on peut décrire deux sortes de régularités :
– des rythmes (dits de base) caractérisant l’état cérébral sur des périodes
temporelles variables allant de quelques secondes à quelques minutes voire
une heure;
– une cyclicité approximativement circadienne (sur 24 heures) d’événements
comportementaux et électriques qui ont été regroupés sous le nom générique
d’états de vigilance.

Rythmes et activités de fond


L’activité de fond constitue l’activité EEG telle qu’elle peut être obtenue,
spontanément, chez le sujet conscient, dans une situation d’éveil calme, sans
mouvements volontaires. Si le sujet n’est pas conscient, ou présente une
confusion mentale, c’est l’activité qui est enregistrée dans ces conditions qui
est dénommée activité de fond.
L’activité de fond se différencie, d’une part, de ses modifications brutales et
transitoires et, d’autre part, des activités dites paroxystiques. C’est ainsi que
dans l’interprétation on parlera d’une activité de fond entrecoupée de phéno-
mènes de survenue brutale, transitoire, de nature paroxystique ou non.
Phénoménologie des activités physiologiques d’origine cérébrale 25

Dans de nombreux cas pathologiques, l’activité de fond peut être, en outre,


complexifiée. Elle pourra comprendre, par exemple, plusieurs activités différentes
(dans des proportions éventuellement variables avec le temps ou la topographie)
ou encore des rythmes anormaux en référence au comportement du sujet.
L’analyse visuelle a conduit à l’observation et à la classification de l’activité
de fond sous la forme de rythmes (alpha, bêta, thêta, delta) normaux ou patho-
logiques (tableau 2.I).

Tableau 2.I. Les différents rythmes physiologiques de base en EEG.

Bande de Corrélats
Rythme Localisation Amplitude
fréquences comportementaux
α 8-13 Hz Amplitude maximale 25 à 75 μV Veille calme
(8 = sub-α) postérieure (autour de
+ réactif OY 50 μV)
β > 13 Hz Antérieur et moyen < 20 μV Veille active
(14-30 Hz) Sommeil paradoxal
γ > 30 Hz Antérieur et moyen < 20 μV Veille active
Sommeil paradoxal
θ 4-7 (7,5) Hz Centrotemporal 20 μV Veille
Sommeil paradoxal
δ < 4 Hz Diffus > 30 μV Sommeil lent
(0,1 à 3,5)

Un rythme est défini par a) la bande de fréquence à laquelle il appartient, b) sa


répartition, c) sa morphologie et son amplitude, d) sa réactivité. En effet :
– les rythmes EEG doivent être compris dans le contexte de réseaux cérébraux
interconnectés (ce qui suggère déjà la superposition complexe des activités de
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

plusieurs réseaux en relation); ces réseaux permettent la synchronisation des


activités des ensembles neuronaux;
– la synchronisation des activités cérébrales est la condition nécessaire à leur
détection au niveau du scalp, c’est-à-dire dans des conditions d’atténuation
considérable du signal par les tissus interposés; de ce fait, quand on parle
d’activité synchronisée ou désynchronisée, cette synchronisation ou cette
désynchronisation sont relatives, notamment à l’échelle de l’EEG de surface
(voir infra, p. 43);
– chaque rythme ne peut être interprété que dans un contexte comportemental;
l’EEG est fondamentalement un examen électroclinique;
– chaque rythme et ses variations ne peuvent être compris que par la connais-
sance des mécanismes cellulaires qui sous-tendent ces oscillations.

États de vigilance physiologiques


Pendant toute la durée de la vie humaine et en dehors de la mort cérébrale,
l’activité du cerveau ne cesse jamais, même si elle est infiniment réduite dans
26 Dynamique neuronale et genèse de l’EEG

les comas profonds, naturels ou artificiels. L’expérience fondamentale quoti-


dienne de la présence au monde est, soit la conscience de ce monde et de soi-
même inséré dans celui-ci, soit la disparition de cette conscience (à l’occasion
du sommeil, d’un malaise avec perte de connaissance, d’un état de conscience
modifiée comme l’hypnose ou d’une anesthésie) qui revient ultérieurement
dans l’expérience du réveil. Quel que soit ce mode de relation au monde, en
quelque sorte binaire (même si on peut décrire des états de transition comme
la somnolence), le cerveau reste actif, de manière continue, mais éminemment
variable.
L’activité cérébrale s’organise ainsi en divers états de vigilance qui sont carac-
térisés par la conjonction d’une certaine configuration d’activités électriques
corticales (en EEG de surface) et d’un comportement sensori-moteur, cognitif
et affectif. L’analyse détaillée des états de vigilance montre la très grande
complexité de leur organisation et de leurs variations (tableau 2.II). L’analyse
des structures cérébrales impliquées dans leur établissement ou leur dispari-
tion fournira de très nombreuses indications concernant la genèse de l’EEG et
de ses variations.

Veilles et sommeils
Ces états neurophysiologiques et comportementaux ont été regroupés en trois
états dits états de vigilance : la veille, le sommeil lent (avec ses différents
stades) et le sommeil paradoxal. Ces états de vigilance sont eux-mêmes, en
fonction de leurs caractéristiques principalement électrophysiologiques et
comportementales, divisés en stades qui en permettent une analyse clinique et
physiologique acceptable même s’ils traduisent assez mal le double conti-
nuum des processus sous-jacents. En effet, il existe un premier continuum de
la veille active au stade du sommeil 1B inclus 1. L’apparition des fuseaux cons-
titue une rupture à la fois ontogénique (voir figure 3.5) et neurophysiologique
(voir p. 69-71) dans le fonctionnement cérébral avant le second continuum
incluant les stades III et IV du sommeil lent. Le passage en sommeil paradoxal
constitue à nouveau une rupture fonctionnelle.
L’état de veille est en général associé à l’existence d’un état conscient, même
si les deux notions ne peuvent être juxtaposées de manière simple. D’ailleurs,
il existe plusieurs états de veille, de la veille calme à l’agitation.
Le sommeil est corrélé à la disparition physiologique de la conscience. C’est
un comportement instinctif et appétitif 2 et son caractère incontournable appa-
raît dans l’impossibilité de rester éveillé plus de 2 ou 3 jours. Il s’agit d’un
processus physiologique aussi fondamental à réguler que les grandes cons-
tantes physiologiques. En outre, il est généralement caractérisé par des
comportements pauvres et très stéréotypés propres à chaque espèce, alors que
la richesse comportementale de la veille fait contraste, particulièrement chez

1. Nous verrons plus loin que ce continuum peut se comprendre comme une perméabilité plus ou
moins grande du cerveau aux stimulations extérieures.
2. Qui crée un désir (du latin appetitus, désir).
Phénoménologie des activités physiologiques d’origine cérébrale 27

Tableau 2.II. Caractéristiques des états de vigilance. On rappelle que le K


complexe est l’association d’une pointe vertex et d’un fuseau.

Subdivision
État de
(%du temps de EEG Corrélats physiologiques
vigilance
sommeil)
Active Rythme bêta Tonus de base,
mouvements, pensée
Veille consciente et active.
Calme Rythme alpha Tonus de base. Pensée non
attentive, méditation.
Stade 1A Alpha qui diffuse dans les Baisse du tonus +.
Assoupissement régions temporales et La conscience disparaît.
Somnolence centrofrontales
Stade 1B Fragmentation de l’alpha Baisse du tonus +.
Somnolence Rythme thêta Mouvements lents des yeux
profonde Bouffées lentes diffuses Clonies d’endormissement.
(16 % avec stade Apparition des pointes Baisse de température.
1A) vertex (alpha < 20 %)
Stade 2 Fuseaux (11,5-15 Hz) > 0,5 s, Baisse du tonus ++.
Sommeil léger en bouffées centrales, Augmentation de l’activité
Sommeil (55 % environ) K complexes du système
lent Activité delta diffuse parasympathique.
(non REM) (< 20 %) Baisse de température ++.
Stade 3 20 à 50 % du tracé ondes Baisse du tonus +++
Sommeil delta (0,5-2,5 Hz) Augmentation de l’activité
profond Quelques fuseaux du système
K complexes parasympathique.
Baisse de température ++.
Stade 4 Plus de 50 % en ondes Baisse du tonus +++.
Sommeil très delta Libération de GH.
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

profond Quelques K complexes Les terreurs nocturnes, le


(16 % avec somnambulisme, l’énurésie
stade 3) ont lieu pendant ce stade.
Activités rapides + Mouvements oculaires
activités thêta et delta peu rapides (ondes PGO).
amples Perte du tonus musculaire
(atonie). Aréflexie.
Sommeil Variations brutales de
paradoxal (20 % environ) température. Activités
(REM) respiratoires et cardiaques
irrégulières, clonies,
érection traduisant une
activité sympathique.
Vasodilatation, baisse de TA.

l’homme. Sous l’apparente simplicité comportementale du sommeil (position


couchée, fermeture des yeux et quelques mouvements), on observe un nombre
important d’états physiologiques différents regroupés en sommeil lent (ou
sommeil sans mouvements oculaires rapides ou sommeil non REM; en
28 Dynamique neuronale et genèse de l’EEG

anglais Rapid Eye Movements ou REM) et en sommeil paradoxal (ou sommeil


avec mouvements oculaires rapides, sommeil REM).
Chez l’homme, le sommeil quotidien est constitué de 3 à 6 cycles de 90 à
120 minutes de sommeil (non REM et REM), survenant pendant une nuit. La
latence d’endormissement est variable mais de l’ordre de 17 minutes. La veille
plus ou moins active occupe le reste de la journée. L’ontogenèse de ces états
de vigilance est d’une grande complexité (voir infra, p. 69, 73) et leur organi-
sation sera perpétuellement remaniée au cours de la vie y compris pendant la
vieillesse. Dans l’enfance, on observe une évolution de la prédominance du
sommeil REM (ou sommeil actif ou irrégulier) vers l’équilibre puis vers la
prédominance du sommeil lent (ou calme, non-actif, régulier) en rapport avec
la maturation cérébrale (du tronc cérébral vers le cortex). Chez l’adulte, on
observera une diminution du sommeil lent (stades III et IV) et de la durée de
sommeil effectif avec l’âge ainsi qu’une augmentation de la fragmentation du
sommeil et de la durée du stade I.

EEG des états de vigilance


La variation des états de vigilance est corrélée à des modifications considéra-
bles des activités électriques cérébrales qui se traduisent en EEG par des
variations des activités de fond et des rythmes physiologiques. C’est en ce
sens que l’EEG, d’une part, reflète les variations des états de vigilance, c’est-
à-dire de la manière dont le cerveau est en contact avec le monde extérieur et
intérieur du sujet et, d’autre part, constitue une image des états ou des patholo-
gies qui affectent ces états de vigilance et leur organisation. C’est pourquoi,
l’ontogenèse des états de vigilance et de leur traduction EEG est un indice
fondamental de la qualité de la maturation cérébrale (voir chap. 3). De même,
toute confusion mentale nécessitera un EEG parce que cette altération du
rapport au monde est souvent très fortement corrélée avec des modifications
importantes des activités électriques cérébrales et de la réactivité du cerveau
aux stimulations.
Lors de l’enregistrement du tracé EEG standard, en laboratoire et chez le sujet
non comateux ou ne présentant pas de troubles de la conscience, c’est l’état de
veille calme qui prédomine. La veille calme est caractérisée par le rythme
alpha (voir tableau 2.I). L’état de veille attentive apparaît lors de l’ouverture
des yeux ou lors d’autres stimulations (interrogatoire, ordres…). Le critère le
plus fidèle de l’éveil est la présence, au niveau du cortex, d’une activité élec-
trique rapide et de bas voltage dite désynchronisée : c’est la réaction d’éveil
(ou arousal reaction). Cette réaction d’arrêt peut être aussi endogène (quand
le sujet en veille calme se met à réfléchir).
L’apparition du sommeil se traduit par un ralentissement global de l’activité
électrique cérébrale (tracé n° 13 et 14) avec apparition de « fuseaux » (tracé
n° 5), suivis d’ondes lentes de haut voltage à 2 ou 3 Hz. C’est à cause de cette
activité lente que l’on donne parfois le nom de sommeil lent au sommeil
proprement dit. Le seuil d’éveil, testé par des stimulations acoustiques par
exemple, tend à augmenter au fur et à mesure que le ralentissement de l’acti-
Phénoménologie des activités physiologiques d’origine cérébrale 29

vité électrique cérébrale devient plus marqué. Périodiquement, le sommeil


lent est interrompu par un autre état, appelé sommeil paradoxal.
Dans le sommeil physiologique, la transition entre les différents stades est
parfois imprécise mais la différenciation EEG se fait finalement assez facile-
ment. En dehors des variations de fréquence de l’activité cérébrale, il existe
quelques grapho-éléments plus spécifiques du sommeil : les pointes vertex, les
Positive Occipital Sharp Transients of Sleep (POSTS) et les fuseaux du
sommeil. Les pointes vertex, pouvant être considérées comme des événements
isolés, sont constituées d’une polarité positive suivie d’une grande négativité
et auraient la signification d’un potentiel évoqué auditif tardif sur le vertex 1.
Lors de l’endormissement profond, un autre grapho-élément caractéristique
survient chez 50 à 80 % de la population adulte saine : ce sont les activités
aiguës occipitales transitoires du sommeil ou POSTS, assez similaires à des
ondes lamba (voir tableau 4.I, p. 83) et dont la signification est inconnue. Les
fuseaux du sommeil sont constitués de trains d’activités à la fréquence de
14 Hz environ, enregistrables essentiellement dans les régions centrales et
d’amplitude maximale au vertex et plus particulièrement au niveau du lobe
frontal, dans les zones de l’aire motrice supplémentaire. Les k-complexes,
association d’un fuseau et d’une pointe vertex, sont maximum sur le vertex et
la zone frontale de la ligne médiane; ils seraient peut-être générés au niveau
des aires 6 et 9. Ils sont favorisés par les stimulations.
Le sommeil n’est pas seulement caractérisé par des transitions macroscopi-
ques entre les différents états présentés dans le tableau 2.II. Il existe également
des « microstructures » dans le sommeil ou « phases transitoires » ou patterns
cycliques alternants 2 (Cyclic Alternating Patterns ou CAP), survenant dans le
sommeil non REM et caractérisés par un allégement transitoire de la profon-
deur du sommeil (microéveils) : ils sont indépendants des stimuli afférents.
D’autres variations périodiques du sommeil léger ont été décrites avec des
alternances d’activité alpha et thêta avec un intervalle de 16 secondes environ.
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

L’activité onirique dont on se souvient survient plutôt lors du sommeil


paradoxal.
Lors de l’enregistrement EEG à l’hôpital, beaucoup de patients tendent à
présenter des épisodes de somnolence légère ou profonde (stades 1A et 1B) en
raison des conditions d’enregistrement (silence dans l’environnement,
nursing, yeux fermés, etc.).
L’analyse plus approfondie du sommeil nécessite des installations spéciali-
sées, avec un lit et une ambiance calme et obscure dans laquelle le sujet peut
s’endormir. Selon le cas, on procédera à des enregistrements de sieste ou des
enregistrements de sommeil pendant une nuit entière. Il s’agit de polygraphies
(polysomnographies) qui nécessitent également l’enregistrement de l’ECG,

1. Le vertex est le sommet du crâne.


2. Les CAP présentent une phase d’augmentation de l’activité électrique (phase A) suivie d’une
phase avec atténuation de l’activité EEG (phase B). Chaque phase dure entre 2 et 60 secondes.
30 Dynamique neuronale et genèse de l’EEG

l’EMG, l’EOG et du pneumogramme. L’enregistrement du déroulement du


sommeil selon ses différentes phases est dénommé hypnogramme.
Les enregistrements d’EEG de sieste ou de sommeil du sommeil présentent un
grand intérêt dans deux groupes de situations cliniques :
– les pathologies du sommeil (hypersomnie, insomnies, syndrome de
Pickwick, narcolepsie, catalepsie, syndrome d’apnée du sommeil…) souvent
invalidantes et assez fréquentes (voir p. 157-159);
– la recherche d’une comitialité chez des patients chez qui l’EEG standard
avec double hyperpnée et SLI s’avère insuffisamment contributif pour affirmer
ou caractériser cette comitialité : la raison pour laquelle on réalise un EEG de
sieste (ou de sommeil) est que le sommeil facilite la survenue des activités
paroxystiques (voir figure 5.6).

LE CORTEX CÉRÉBRAL :
LA STRUCTURE D’OÙ PROVIENT L’EEG
L’EEG est le reflet de l’activité électrique neuronale d’origine essentiellement
néocorticale. Pour cette raison, la diffusion des activités électriques normales
ou pathologiques est en relation directe avec les propriétés de l’architecture et
des connexions corticales.
Le cerveau humain est l’un des organes les plus complexes qui soit. Le volume
du cortex cérébral est de l’ordre de 300 cm3, la surface corticale atteignant
2 200 cm2 ; en raison de sa structure plissée, la surface corticale apparente ne
représente que 25 à 30 % de la surface totale. L’épaisseur du cortex varie de 1,5
à 4,5 mm selon les zones. La densité cellulaire varie selon le type de cortex : de
14 000 à 18 000 neurones par mm3 dans le cortex agranulaire, de 40 000 à
100 000 neurones par mm3 dans le cortex visuel. Selon les auteurs, le nombre
de neurones dans le cortex cérébral est de l’ordre de 109 à 1011. Chaque cellule
pyramidale peut recevoir entre 104 et 105 synapses. Le nombre total de
connexions dans le cortex pourrait ainsi atteindre 1 million de milliards.
Le cortex des primates possède d’une part une organisation anatomique lami-
naire (en couches) et, d’autre part, une organisation fonctionnelle columnaire
(cortex sensoriels et moteurs). Les cortex associatifs sont organisés en réseaux
parallèles distribués.

Lamination et cytoarchitectonie corticale


Les couches cellulaires du cortex comprennent de nombreux types cellulaires
(cytoarchitectonie) (figure 2.1). Classiquement la couche I (couche molécu-
laire) assure les connexions corticocorticales de voisinage, les couches III
(couche pyramidale externe), V (couche pyramidale interne) et VI (couche
multiforme) sont les couches effectrices. Les couches II et IV (couches granu-
laires externe et interne) constituent les couches réceptrices, la couche interne
recevant les connexions thalamocorticales et la couche externe les afférences
corticocorticales.
Le cortex cérébral : la structure d’où provient l’EEG 31

Efférences des cellules pyramidales


Afférences des cellules du cortex et cellules étoilées épineuses du cortex

ng
py II
da Cortex
db
bp III
pa py Cortex

ee IV

V
ch

VI

Afférences Afférences
d’origine thalamique d’origine thalamique
Thalamus
(action sur les interneurones ; (afférences
afférences polysynaptiques) monosynaptiques)
Thalamus,
noyau rouge, pont, bulbe,
striatum

Synapse excitatrice

Synapse inhibitrice

Fig. 2.1. Lamination corticale et distribution simplifiée des afférences et effé-


rences des cellules pyramidales du cortex (py), des cellules étoilées
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

épineuses (ee) et des divers interneurones inhibiteurs [cellules bipolaires


(bp), en chandelier (ch), à double arborisation (da), à double bouquet (db),
neurogliaforme (ng)].
À droite, efférences des cellules pyramidales et des cellules étoilées
épineuses. À gauche, afférences thalamiques des cellules corticales. Les
flèches grises correspondent aux afférences thalamiques. Dans les zones
grisées, les afférences thalamiques sont monosynaptiques et spécifiques et
correspondent aux hypercolonnes. Il existe également une hiérarchie des
interneurones inhibiteurs dans les couches corticales, certains agissant au
niveau des dendrites, d’autres du soma et certains au niveau des axones.

La structure architectonique du cortex est variable selon les localisations et les


fonctions prédominantes de chaque zone corticale. Le cortex peut être classé
en aires dont la cytoarchitectonie correspond à des zones fonctionnellement
plus spécifiques, recevant des afférences de zones thalamiques ou corticales
précises et assurant une fonction particulière. Cette nomenclature correspond
aux aires de Brodmann.
32 Dynamique neuronale et genèse de l’EEG

Le cortex contient principalement deux types de cellules excitatrices : les


cellules pyramidales et les cellules étoilées épineuses. Les cellules pyrami-
dales, triangulaires, sont présentes dans presque toutes les couches (sauf I et
VI profonde). Elles donnent la quasi-totalité des fibres efférentes ipsi et
controlatérales du cortex et émettent par ailleurs de nombreuses collatérales
d’axones organisés en plexus horizontaux. Leurs dendrites sont le plus
souvent arborisées dans la couche I et leur axe ainsi que celui de l’axone sont
perpendiculaires à la surface corticale (figure 2.2). Le neuromédiateur (excita-
teur) des cellules pyramidales est en général un acide aminé (glutamate,
aspartate). Les cellules étoilées épineuses constituent le second type de
cellules excitatrices, probablement plutôt glutamatergiques, présentes dans la
couche IV des cortex sensoriels et connectées aux afférences spécifiques
thalamocorticales.
Les autres neurones corticaux, de formes variables, sont des interneurones
GABAergiques, donc inhibiteurs, répartis entre différentes couches. De
nombreux interneurones GABAergiques contiennent également des neuropep-
tides (enképhalines, neuropeptide Y, VIP…) colocalisés avec le GABA et
agissant comme neuromédiateurs ou neuromodulateurs. Ces peptides pour-
raient jouer également un rôle dans l’homéostasie métabolique locale et la
régulation du débit sanguin cérébral. Une propriété remarquable de ces inter-
neurones a été récemment découverte (chez l’animal). Il s’agit de la présence
de synapses électriques (ou éphapses 1), permettant un couplage électrique
sélectif et extensif de neurones GABAergiques de même classe. Ces neurones
réalisent une synchronisation extrêmement efficace dans des réseaux pouvant
s’étendre au-delà de 100 µm.
Les caractéristiques neurochimiques des cellules corticales permettent de
mieux comprendre, d’une part, l’impact massif des processus inhibiteurs dans
le fonctionnement cortical (et donc les conséquences pathologiques sévères
d’une altération de ces processus inhibiteurs, notamment dans les phénomènes
paroxystiques) et, d’autre part, l’importance des processus excitotoxiques
pouvant être en relation avec une hyperactivation des cellules pyramidales ou
épineuses (épilepsie, ischémie).
Les neurones corticaux sont classiquement répartis en quatre classes définies
en fonction de leur type d’activité électrique (figure 2.3). En réalité, les
neurones semblent pouvoir se transformer en un type ou un autre et présenter
différents modes de décharge en fonction des états de vigilance, de la plasti-
cité synaptique, des processus de conscience et lors des décharges
paroxystiques.
Les connexions du cortex cérébral se répartissent en quatre types :
– les fibres corticofuges (vers les régions sous corticales);

1. Les éphapses sont des synapses électriques caractérisées par des jonctions serrées (gap junc-
tions) formées de la réunion de deux héxamères de connexines – un par membrane, constituant un
canal entre deux neurones. La transmission de l’influx ne se fait pas dans ces conditions via un
transmetteur chimique mais directement par le passage des ions au travers de ces jonctions
serrées. Cette transmission de l’influx est alors très rapide.
Le cortex cérébral : la structure d’où provient l’EEG 33

Colonne corticocorticale (module) : Macrocolonne


A volume de neurones dans lequel (collatérales récurrentes d’axone
des branches corticocorticales d'une cellule pyramidale)
créent une réponse identique 3000 μm
à un stimulus spécifique

dendrite

Fibres corticocorticales
axone associatives
Cellule pyramidale

Stimulus commun

Colonnes corticocorticales
(modules) :
B
Macrocolonne
(arborisation axonale récurrente
d’une cellule pyramidale)
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

III

IV

Hypercolonne
(réunion de modules)

Neurone thalamique
spécifique

Fig. 2.2. Colonnes corticocorticales (modules), hypercolonnes et macrocolonnes.


34 Dynamique neuronale et genèse de l’EEG

RS FRB FS IB

Les neurones corticaux


présentent 4 types d’activités rythmiques.
Ils peuvent passer d’un type à l’autre
en fonction des états de vigilance
ou de certaines conditions pathologiques.

Les neurones relais


thalamique (NRT)
présentent deux modes
d’activité : Mode relais

Les neurones réticulaires thalamiques


Mode oscillant
(RE) présentent deux modes d’activité :

Décharge En fonction du jeu complexe


Décharge des conductances ioniques
en bouffées tonique
et des afférences, le NRT,
en mode oscillant,
oscille à 6 ou10 Hz.
10Hz 6 Hz

Afférences
GABA (inhibition) spécifiques

Fig. 2.3. Activités rythmiques intrinsèques des neurones corticaux et thalami-


ques (d’après Stériade, Nature Reviews, Neurosciences, 2004; (5) : 121-134).
RS = neurones à décharge régulière (Regular Spiking), FRB = neurones à
bouffées rythmiques rapides (Fast Rythmic Busrting), FS = neurones à
décharges rapides (Fast Spiking), IB = neurones à décharge intrinsèque en
bouffées (Intrinsically Bursting).

– les fibres corticopètes venant principalement du thalamus et des noyaux du


tronc cérébral et du télencéphale basal;
– les fibres associatives, corticocorticales ipsilatérales;
– les fibres commissurales (corps calleux) corticocorticales controlatérales.
Le cortex cérébral : la structure d’où provient l’EEG 35

Une caractéristique majeure du néocortex humain est qu’il est très densément
interconnecté aussi bien à courte distance (supérieure à 1 mm dans des fibres
intracorticales, fibres en « U » entre deux circonvolutions) qu’à très longue
distance (20 cm) dans des connexions corticocorticales.

Organisation columnaire des cortex sensoriels et moteurs


Parallèlement à la lamination corticale, les cortex sensoriels et moteurs sont
organisés anatomiquement et fonctionnellement en colonnes corticocorticales
qui constituent les modules de base du fonctionnement cortical.
Anatomiquement, une colonne corticocorticale est le volume au sein duquel
un groupe de branches terminales de fibres corticocorticales associatives crée
des contacts synaptiques avec des neurones corticaux (dans toutes les couches
sauf la I) 1. Sur le plan fonctionnel (électrophysiologie), les neurones d’une
colonne sont activés par le même stimulus, ont des champs récepteurs compa-
rables et répondent de manière identique (modalité et topographie) à ce
stimulus (voir figure 2.2). Les caractéristiques des colonnes sont présentées
dans le tableau 2.III. Cette organisation columnaire varie d’une aire cytoarchi-
tectonique (aires de Brodmann) à une autre.
Dans les cortex sensoriels (cortex visuel), les afférences thalamocorticales
spécifiques se distribuent dans les colonnes de manière plus large que les affé-
rences corticocorticales. Les modules corticaux (colonnes corticocorticales)
peuvent alors être regroupés pour former des hypercolonnes.
Quand des influx thalamiques parviennent à une colonne corticale, ils activent
simultanément :
– les cellules de projection de la colonne;
– les neurones (en réseau) impliqués dans l’analyse spécifique de cette
information;
– des circuits de contrôle de la transmission intracolumnaire;
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

– des circuits assurant la synchronisation de plusieurs colonnes et la cohérence


fonctionnelle columnaire.
Les macrocolonnes correspondent au volume de l’arborisation axonale récur-
rente (qui revient dans le cortex) d’une cellule pyramidale. Elles sont de
beaucoup plus grande taille que les modules corticaux et correspondent à
l’échelle spatiale de l’action efférente corticocorticale à courte distance d’une
cellule pyramidale (voir figure 2.2).
Les afférences thalamocorticales non spécifiques ou les afférences monoami-
nergiques (couche I; voir p. 30-32, 42) ne se distribuent pas en colonnes.

1. Une même fibre corticocorticale peut donner des terminaisons à plusieurs colonnes et une
même colonne reçoit les influx convergents de multiples colonnes qui peuvent appartenir à des
aires architectoniques différentes.
36 Dynamique neuronale et genèse de l’EEG

Tableau 2.III. Échelles spatiales d’organisation du néocortex humain.

Structure Caractéristiques Équivalent physiologique


Minicolonne Diamètre : 20-50 µm, Extension spatiale des axones
soit environ 110 neurones à 260 des interneurones inhibiteurs
selon le cortex
Colonne Diamètre : 300 µm, soit environ Largeur de l’arborisation
corticocorticale 1 000 à 10 000 neurones. des afférences corticocorticales
Épaisseur : 2 à 3 mm. (connexions spécifiques à longue
Elle comprend environ distance)
100 minicolonnes.
Il en existerait 2 millions. « Module » cortical
Macrocolonne Diamètre : 0,5 à 3 mm, Extension des collatérales d’axones
soit environ 105 à 106 neurones. récurrentes d’un seul neurone
pyramidal.
Échelle spatiale d’une efférence
excitatrice intracorticale
(à courte distance).
EEG enregistré avec électrode
corticale
Échelle Diamètre : 50 mm, Longueur moyenne des fibres
régionale soit environ 108 neurones. corticocorticales.
(aires de L’échelle spatiale d’une efférence
Brodmann)* excitatrice intracorticale à longue
distance (collatérale d’axone non
récurrente).
EEG à haute résolution
Échelle lobaire* Diamètre : 170 mm, 10 lobes définis en relation avec les
soit environ 109 neurones. principaux sillons et circonvolutions.
EEG conventionnel
Échelle Diamètre : 400 mm, Fibres corticocorticales les plus
hémisphérique* soit environ 1010 neurones. longues.
* = le calcul des diamètres pour les échelles régionale, lobaire et hémisphérique est basé sur une
surface corticale globale de 3 000 cm2, en incluant les sillons et les scissures, et sur l’utilisation
d’une échelle linéaire (d’après Nunez, Towards of Physics Neocortex, Neocortical Dynamics and
Human EEG Rythms, Oxford University Press, New York, 1995 : 111).

Organisation en réseaux distribués du cortex associatif


Les connexions des aires associatives sont organisées de manière assez diffé-
rente de celles des aires sensorielles et motrices. Les projections
thalamocorticales dans le cortex associatif se font sur le double mode de la
convergence et de la divergence (figure 2.4) et, dans le cortex associatif, la
spécificité fonctionnelle (topographique ou de modalité) des colonnes
s’estompe. Le néocortex associatif est en fait organisé en réseaux parallèles et
distribués assurant les intégrations des signaux nécessaires à la mémoire, la
perception et l’organisation du mouvement.
Le cortex cérébral : la structure d’où provient l’EEG 37

Aires architectoniques Aires architectoniques


du cortex associatif (Brodmann) du cortex associatif (Brodmann)

Noyaux thalamiques Noyaux thalamiques

Convergence. Chaque aire cytoarchitectonique Divergence. Chaque noyau thalamique


corticale reçoit des projections provenant envoie des projections à plusieurs aires
de plusieurs noyaux thalamiques cytoarchitectoniques différentes

Fig. 2.4. Convergence et divergence dans les connexions thalamocorticales dans


les aires associatives.

C’est d’ailleurs une caractéristique remarquable du cerveau humain que cette


prédominance extrême des connexions corticocorticales sur les connexions
thalamocorticales, comparativement aux autres mammifères. Cette différence
est telle que l’on estime même que les relations entre un noyau thalamique
donné et une région corticale donnée sont relativement pauvres, les fibres
thalamocorticales ne constituant pas plus de 1 % des afférences totales entrant
dans une région étendue du cortex. Les autres afférences sont surtout cortico-
corticales. Cette conception bouleverse nombre de notions classiques dérivées
des travaux menés chez des mammifères inférieurs. Les études récentes
montrent l’extrême connectivité du cortex humain et le manque de spécificité
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

des connexions intracorticales par comparaison à leurs homologues sous-


corticales.
Plus encore, selon des travaux récents, les noyaux thalamiques projettent en
fait plutôt de manière diffuse dans le cortex. La séparation (classique) entre
cortex sensoriel spécifique d’une modalité et cortex associatif tend à
s’estomper. Non seulement un cortex spécifique d’une modalité reçoit des
afférences d’autres modalités qui sont intégrées dans une analyse multisenso-
rielle mais les cortex associatifs sont eux-mêmes afférentés de manière
multisensorielle, assurant ainsi une représentation complète du monde exté-
rieur. Ainsi, on admet désormais que l’ensemble du néocortex est
fondamentalement multisensoriel, la séparation se faisant entre un bas niveau
(aires primaires) et un haut niveau d’intégration des informations sensorielles
correspondant aux aires associatives.
Ces deux dernières propriétés (distribution massive des connexions cortico-
corticales et le caractère fondamentalement multisensoriel des cortex
associatifs) questionnent la validité des interprétations de nombreuses expé-
riences d’IRM fonctionnelle, voire même les assertions sous-tendant les
conceptions modularistes et localistes du fonctionnement cérébral.
38 Dynamique neuronale et genèse de l’EEG

Comment l’activité cellulaire du cortex produit-elle l’EEG


de surface?
C’est l’activité synaptique (potentiels postsynaptiques excitateurs et inhibi-
teurs) générée dans les grandes cellules pyramidales orientées verticalement et
situées dans les couches III, V et VI qui est la source principale de l’EEG de
surface. La sommation de ces PPSE et PPSI est assez lente pour générer les
variations de potentiels de l’EEG. Des activités non synaptiques (activités
intrinsèques rapides des neurones, potentiels gliaux) participent plus margina-
lement à la genèse de l’EEG. Les variations de potentiels enregistrées à l’EEG
résultent de la sommation algébrique des courants ioniques produits dans
l’espace extracellulaire par l’activité des neurones sous-jacents. Les dimen-
sions des cellules pyramidales et l’organisation radiaire de leur arbre
dendritique font que c’est leur dépolarisation ou leur hyperpolarisation sous
l’effet des volées afférentes excitatrices et inhibitrices qui vont produire ces
courants ioniques se bouclant dans le volume cellulaire et extracellulaire selon
les principes de la figure 2.5. Les courants qui s’écoulent dans le milieu extra-
cellulaire lors de l’activation cellulaire sont responsables de la génération de
champs de potentiels qui, sommés, conduiront au potentiel enregistré sous
l’électrode. Les potentiels postsynaptiques des interneurones corticaux, dont
les prolongements ne sont pas orientés de manière préférentielle, génèrent des
dipôles élémentaires à résultante nulle.
La détection des oscillations neuronales sur l’EEG de surface dépend :
– de l’étendue de l’aire corticale dans laquelle ces oscillations sont présentes;
– de sa topographie (profonde ou superficielle) et de l’éloignement du dipôle
générateur;
– de l’angle solide entre cette zone et le détecteur (électrode);
– de la résistance des tissus.
Dans ces conditions, l’activité d’une macrocolonne de 3 mm2 de diamètre
générerait un potentiel de 116 microvolts compatible avec le potentiel trans-
cortical. Pour obtenir sur le scalp une activité électrique de type alpha
d’amplitude comprise entre 20 et 60 microvolts, il faudrait au minimum qu’il
y ait l’activité synchrone de 30 à 40 macrocolonnes soit au moins 100 mm2 de
surface corticale. Le tableau 2.III montre que l’échelle spatiale de l’enregistre-
ment de l’EEG standard dépasse très nettement le niveau des macrocolonnes,
puisque, au mieux, il est celui des aires de Brodmann.
Les enregistrements des champs de potentiels dans l’EEG de surface, contre
une électrode de référence, sont limités à une fréquence de 100 Hz et utilisent
une constante de temps d’une seconde ou moins. Si la constante de temps est
infinie, on obtient des courants DC ou direct currents qui contiennent aussi
bien des potentiels rapides que des potentiels très lents. La composante rapide
correspond aux fluctuations de l’EEG. La composante lente correspond à une
dérive lente du potentiel cérébral, soit négative (lors de crises épileptiques ou
lors d’une dépolarisation prolongée des structures superficielles), soit positive
(lors de l’asphyxie ou de l’hypercapnie). Il existe une corrélation entre
l’amplitude de la dérive du courant DC et la fréquence de décharge moyenne
dans les systèmes de fibres afférentes. Leur origine neuronale ou gliale n’est
Le cortex cérébral : la structure d’où provient l’EEG 39

-
-
Électrode +
externe +

Cuir chevelu
Cortex
puits couche I
source

+
+ +
+

+ +
source puits

Excitation de la partie superficielle Excitation de la partie profonde


du dendrite du dendrite
L’électrode externe voit fuir L’électrode externe voit s’approcher
les charges positives => potentiel négatif les charges positives => potentiel positif

- Synapse excitatrice

Synapse inhibitrice -
+
+

puits puits

+
+ +
+
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

+
+
source source

Inhibition de la partie superficielle Inhibition de la partie profonde


du dendrite du dendrite
L’électrode externe voit s’approcher L’électrode externe voit s’éloigner
les charges positives => potentiel positif les charges positives => potentiel négatif

Fig. 2.5. Schéma de principe montrant le lien entre les dépolarisations des
dendrites des cellules pyramidales (champs de potentiels) et la morphologie
des déflexions des électrodes. Puits = site d’entrée du courant dans la
cellule; source = site de sortie du courant de la cellule.

pas certaine et ils pourraient être également en rapport avec des variations de
l’hémodynamique cérébrale. Ces courants DC ne sont pas enregistrés en
pratique clinique.
40 Dynamique neuronale et genèse de l’EEG

La structure du cortex et des collatérales d’axones des cellules pyramidales


fait qu’une activation de ces cellules provoque un feed-back positif massif lors
de l’excitation d’un module cortical puis de modules secondaires et tertiaires
avec excitation séquentielle de colonnes. Les interactions corticocorticales
sont ainsi susceptibles d’engendrer des ondes se déplaçant sur une large
échelle (1 cm). Cette organisation massivement distribuée du cortex et des
connexions intracorticales n’est pas sans conséquences dans la compréhension
des processus de diffusion des activités électriques sous-jacentes à l’EEG
(rythme alpha, ondes lentes, processus paroxystiques) et justifie des techni-
ques comme l’analyse des cohérences dont on a vu qu’elles permettaient
d’analyser la connectivité fonctionnelle corticale (voir p. 20).

STRUCTURES SOUS-CORTICALES
IMPLIQUÉES DANS LA RÉGULATION
DE L’ACTIVITÉ ÉLECTRIQUE CORTICALE
Si le cortex est la structure d’où proviennent les signaux EEG enregistrés, la
modulation de ces activités ainsi que la configuration électrophysiologique
globale sont sous la dépendance principalement de plusieurs structures sous-
corticales : le thalamus et la formation réticulée du tronc cérébral. La régula-
tion des états de vigilance implique deux structures supplémentaires : le
télencéphale basal 1 et l’hypothalamus. À cette organisation anatomique se
superpose une organisation neurochimique complexe dans laquelle les
diverses amines jouent un rôle spécifique. Ces régulations mettent en réalité
plus en jeu des réseaux neuronaux que des structures anatomiques spécifiques.

Thalamus
Le thalamus est un complexe nucléaire formé de deux groupes de noyaux, le
thalamus dorsal et le thalamus ventral.
Le thalamus dorsal comprend sur le plan fonctionnel, classiquement, trois
grands groupes de noyaux (figure 2.6) : les noyaux relais (ou noyaux spécifi-
ques), les noyaux associatifs et les noyaux non spécifiques (noyaux de la ligne
médiane et noyaux intralaminaires).
Les noyaux du thalamus dorsal sont organisés selon trois principes :
– les afférences viennent de voies et de systèmes sous-corticaux;
– les efférences sont destinées au cortex cérébral et abandonnent des collaté-
rales au noyau réticulaire;

1. Le télencéphale basal est un groupe de structures situées dans la zone inférieure du cerveau
antérieur et qui inclut le noyau basal, la bandelette diagonale, le septum médian et la substantia
innominata de Meynert.
Structures sous-corticales impliquées dans la régulation de l’EEG 41

avant
Noyau réticulaire thalamique (RT)
dedans dehors
A
arrière
VA
DM
LD
LMI
VL Neurone réticulaire
(RE)
LP VPM
PU VPL

CGE
CGI Neurone relais
(NRT)

• spécificité de leurs connexions et fonctions de transmission


N relais • afférences précises d’origine sensorielle
• projections sur une aire corticale bien définie : couches III et IV (I-VI)

• connexions moins spécifiques ; transmission d’informations déjà intégrées


N associatifs • afférences du tronc cérébral et du système limbique
• projections divergentes vers diverses zones du cortex

• connexions diffuses, régulation des activités corticales


N non spécifiques • afférences provenant de la substance réticulée du tronc cérébral
• projections diffuses vers le cortex cérébral

Fig. 2.6. Noyaux thalamiques.


Parmi les noyaux intralaminaires, seule la lame médullaire interne (LMI) est
visible. Le noyau centromédian (CM), les noyaux sous-thalamiques et le ganglion
géniculé du thalamus ventral ne sont pas visibles. À droite, aspects intracellu-
laires des activités oscillantes dans les noyaux thalamiques réticulaires et relais.
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

A : Noyaux antérieurs, CGE : Corps genouillé externe, CGI : Corps genouillé


interne, DM : Noyau dorsomédian, LP : Noyau postérolatéral, PU : Noyau
pulvinar, VA : Noyau ventro-antérieur, VL : Noyau ventrolatéral, VPL : Noyau
ventro-postérolatéral, VPM : Noyau ventro-postéromédian,

– les projections thalamocorticales sont doublées de connexions corticothala-


miques réciproques qui, elles-mêmes, donnent des collatérales au noyau
réticulaire (voir figures 2.3 et 2.10).
Les noyaux du thalamus dorsal comprennent deux types de neurones :
– des neurones thalamocorticaux ou neurones relais, de grande taille, dont les
axones projettent dans les cortex spécifiques;
– des interneurones, de petite taille, tous GABAergiques et dont les ramifica-
tions sont intrathalamiques.
Le thalamus ventral est formé du noyau réticulaire, du ganglion géniculé ainsi
que de structures sous-thalamiques (corps de Luys…).
42 Dynamique neuronale et genèse de l’EEG

Le noyau réticulaire est une fine enveloppe cellulaire autour des faces latérale,
antérodorsale et antéroventrale du thalamus dorsal et il est constitué de
neurones GABAergiques. Ses afférences viennent du cortex cérébral et du
thalamus dorsal. La quasi-totalité de ses efférences sont destinées au thalamus
dorsal (et un peu au tronc cérébral), ce qui signifie que le noyau réticulaire
exerce un rétrocontrôle inhibiteur sur les activités thalamiques.
Loin d’être un simple relais ou un lieu de passage entre structures sous-corti-
cales et cortex cérébral, le thalamus possède une fonction fondamentale dans
la régulation de la résolution temporelle et spatiale des influx afférents.

Systèmes réticulaires
La formation réticulée (FR) désigne la substance grise du tronc cérébral, en
position centrale, péri-acqueducale. La formation réticulée est un système multi-
synaptique local divisé en trois colonnes longitudinales formées chacune de
plusieurs noyaux : une zone centrale (le raphé), une zone médiane à prédomi-
nance magnocellulaire et une zone latérale à prédominance parvocellulaire1.
À cette anatomie nucléaire se superpose une anatomie neurochimique avec
des groupes neuronaux sérotoninergiques (Bx), adrénergiques (Cx), noradré-
nergiques (Ax) et cholinergiques (Chx) (tableau 2.IV).

Tableau 2.IV. Innervation aminergique du cortex.


Neurotransmetteur Dopamine Noradrénaline Sérotonine Acétylcholine
Noyau d’origine Aire tegmentale Locus coeruleus Noyaux du raphé Noyau de Meynert
ventrale (A10) et (faisceau NA dorsal) rostral (B6-B8) ++++
locus niger médian (faisceau médian du Tegmentum
(A9) télencéphale) mesencéphalique +
Afférences sur le Système limbique
noyau d’origine
Couche corticale Toutes les couches Toutes les couches, Toutes les couches Toutes les couches,
d’innervation mais surtout I, III mais plus nombreuses mais surtout I mais surtout I, III
et V, VI dans les couches III et et IV, V (et IV)
IV et moins
nombreuses dans la
couche I
Importance respective des projections dans le cortex
préfrontal ++ + ++ +
prémoteur +++ ++ ++ +
moteur +++ +++ +++ ++
pariétal ++ +++ + ++
occipital + + +++ +
temporal + + + +++

1. Parvocellulaire : formé de petites cellules. Magnocellulaire : formé de grosses cellules.


Genèse des rythmes EEG 43

Les noyaux du raphé contiennent en grande partie des neurones sérotoninergi-


ques (groupes B1 à B9). Les noyaux du raphé rostral donnent des projections
ascendantes riches en collatérales et très extensives. Les noyaux caudaux ont
des projections médullaires.
La FR médiane reçoit de nombreuses afférences de la moelle, des noyaux
sensitifs des nerfs crâniens, du cortex cérébral et du cervelet. Un des deux fais-
ceaux ascendants de la FR médiane se termine dans les noyaux intralaminaire
et réticulaire du thalamus.
La FR latérale comprend des groupes A1-A7, C1-C2, et Ch5-Ch6. Parmi les
noyaux de la FR latérale, on trouve le complexe du locus coeruleus (LC) avec
des neurones noradrénergiques. Le locus coeruleus innerve la quasi-totalité du
SNC, et assure la totalité de l’innervation noradrénergique du néocortex
cérébral.
L’innervation aminergique du cortex est assurée par des groupes cellulaires de
faible importance numérique et dont les axones, très riches en collatérales, se
distribuent de manière différente dans les diverses couches et régions corti-
cales (voir tableau 2.IV).
Une synthèse de l’organisation fonctionnelle du cortex et de sa régulation par
les systèmes sous corticaux thalamiques et réticulaires est proposée dans la
figure 2.7.

GENÈSE DES RYTHMES EEG


Les travaux récents portant sur la genèse des activités EEG ont conduit à trois
acquis majeurs :
– certains neurones (ou groupes de neurones) du cortex ou du thalamus
présentent des propriétés rythmiques oscillatoires intrinsèques;
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

– il existe, au niveau des réseaux neuronaux, une dynamique complexe de ces


activités rythmiques intrinsèques qui conduit aux différentes configurations
rythmiques de l’EEG de surface;
– ces comportements dynamiques possèdent des propriétés de chaos détermi-
niste qui modifient complètement notre conception de l’interprétation de
l’EEG.

Synchronisation, désynchronisation
Classiquement, en EEG de surface, la morphologie des rythmes EEG, quel
que soit l’état de vigilance, peut être classée en deux configurations : des acti-
vités dites synchronisées, qui constituent des oscillations de grande amplitude
et de fréquence assez basse et des activités dites désynchronisées, de plus
faible amplitude et de fréquence plus élevée. Cette simplification, bien
qu’extrême, possède une grande valeur explicative (figure 2.8).
La synchronisation suppose la coactivation d’un grand nombre de neurones, la
somme des événements synaptiques devenant suffisamment grande pour
générer des variations de potentiels amples au niveau des grosses électrodes
44 Dynamique neuronale et genèse de l’EEG

Mode oscillant YO YF

Réactivité

Mode relais
Colonne corticale
Cortex :
• organisé en colonnes fonctionnelles
autour de la cellule pyramidale ;
• organisé en réseaux parallèles
par des connexions corticocorticales
massives ;
• à l’origine des signaux EEG :
les dendrites des cellules pyramidales
formant des dipôles radiaires.

Thalamus relais :
• transmission des influx plutôt spécifiques
d’une modalité ;
• double mode de décharge : mode relais
et mode oscillant.
Thalamus réticulaire :
• non spécifique. Projections diffuses ;
• pacemaker de l’activité thalamique
et donc corticale.

Télencéphale basal (nx septaux, n Meynert) :


• projections cholinergiques et GABAergiques
vers le cortex, notamment limbique ;
• déclenche l’apparition du sommeil lent.

Formation réticulaire du tronc cérébral :


• petits groupes de neurones à projections diffuses,
différents sur le plan neurochimique (amines) ;
• organise les états de vigilance ;
• module la perméabilité du cortex et du thalamus
envers les informations périphériques ;
• organise la régulation du thalamus relais par
le thalamus réticulaire ;
• contrôle les structures spinales ;
• contrôle les phénomènes végétatifs.

Fig. 2.7. Synthèse sur l’organisation fonctionnelle des structures engendrant et


régulant l’activité électrique cérébrale.

posées sur le scalp. Les systèmes synchronisateurs sont des réseaux de


groupes neuronaux dotés de propriétés de rythmicité s’influençant mutuelle-
ment. Ces systèmes synchronisateurs sont, soit construits comme un pace
maker unique (le noyau réticulaire thalamique), soit formés de structures
interconnectées (comme les zones du système limbique générant les activités
thêta).
Les processus de désynchronisation observés dans la veille et le sommeil
REM concernent des territoires thalamiques et corticaux étendus : dans ce cas,
les activités synchronisées sont remplacées par des activités de bas voltage et
rapides. L’état désynchronisé est considéré comme un état d’activation des
neurones corticaux.
Genèse des rythmes EEG 45

ACTIVITÉS LENTES ACTIVITÉS RAPIDES


SYNCHRONES DÉSYNCHRONISÉES

EEG
de surface

Acétylcholine

Activités NA
unitaires

Fort couplage fonctionnel des neurones Faible couplage fonctionnel des neurones
Convergence des influx afférents Divergence des afflux afférents

Systèmes synchronisateurs : Systèmes désynchronisateurs :


noyau réticulaire thalamique, noyau de Meynert
synchronisateur limbique systèmes cholinergiques
systèmes noradrénergiques

Analyse
spectrale
de l’EEG
de surface

Fig. 2.8. Synchronisation et désynchronisation. Leurs rapports avec les activités


de surface (voir aussi la figure 2.12).
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

L’Ach joue un rôle fondamental dans les processus de désynchronisation de la


veille et du sommeil REM. La NA, en revanche, agit en conjonction avec
l’Ach pendant la veille mais pas pendant le sommeil REM.

Propriétés oscillatoires des neurones thalamiques


Les neurones relais thalamocorticaux (TCR) comme les neurones du noyau
thalamique réticulaire (RE), lesquels sont inhibiteurs des neurones TCR,
possèdent une activité rythmique propre.
Les neurones TCR peuvent fonctionner selon deux modes en relation avec
leur potentiel de membrane (qui dépend des diverses conductances ioniques) :
– le mode relais avec des réponses toniques répétitives en réponse à une volée
afférente (si le potentiel de repos est de – 60 mV);
– le mode oscillatoire avec des bouffées répétées de manière rythmique (si le
potentiel de repos est de – 70 mV) (voir figure 2.3).
46 Dynamique neuronale et genèse de l’EEG

Les oscillations rythmiques s’organisent la plupart du temps autour de deux


pics de fréquences : 6 et 10 Hz. Ces deux fréquences caractéristiques sont une
conséquence du jeu complexe des conductances ioniques calciques, potassi-
ques et sodiques. Les neurones TCR oscillent (ou résonnent) dans des boucles
réciproques thalamocorticales à ces deux fréquences principales en fonction
des interactions neuronales dans le réseau (c’est-à-dire les PPSE et PPSI arri-
vant sur les neurones).
Les neurones RE (GABAergiques), qui présentent également un mode de
décharge rythmique assez similaire à celui des neurones TCR, oscillent plus
facilement, notamment dans les états de sommeil léger. Ils présentent égale-
ment un double mode de décharge variable selon la valeur du potentiel de
repos : décharges toniques ou bouffées de potentiels d’action.
Les neurones RE engendrent des PPSI puissants dans les neurones relais.
Ceux-ci produisent des excitations en rebond qui reviennent aux neurones RE.
De plus, une boucle thalamocorticale module les oscillations (figures 2.3 et
2.9). Elle fait intervenir les collatérales des axones thalamocorticaux en direc-
tion du noyau réticulaire et les collatérales des axones des neurones
pyramidaux.
Les activités rythmiques de 6 à 10 Hz (dues aux neurones TCR ou RE) ne
surviennent pas indépendamment d’influx entrants en provenance de
l’ensemble du réseau impliquant le cortex, les différents noyaux thalamiques
et les systèmes réticulaires du tronc cérébral. Les conditions basales des deux
activités rythmiques thalamiques requièrent donc à la fois les propriétés intrin-
sèques des membranes des neurones thalamiques et la conjonction des
interactions synaptiques entre les populations neuronales excitatrices et inhi-
bitrices et des différents influx entrants (corticaux, sous-corticaux).
Deux types d’activités enregistrées dans l’EEG de surface sont compatibles
avec les oscillations thalamiques : les fuseaux du sommeil (activités de 7 à
14 Hz avec une morphologie croissante puis décroissante) et le rythme alpha
(8-13 Hz).

Pacemaker thalamique et genèse des fuseaux du sommeil


Nous avons souligné (supra, p. 28, 29) l’importance des fuseaux dans la tran-
sition vers le sommeil profond. Les caractéristiques fréquentielles des
oscillations des fuseaux sont proches de celles des oscillations présentes dans
les neurones RE. Les neurones RE sont les pacemaker des fuseaux du
sommeil. Mais cette notion de pace maker n’est pas équivalente à celle du
pacemaker cardiaque, dans la mesure où, sous des influences extérieures, ils
peuvent passer d’un comportement oscillatoire à un comportement non
oscillatoire (figure 2.9).
Lors de la veille, les afférences cholinergiques du tronc cérébral, par leur
action inhibitrice sur les neurones RE et excitatrice sur les neurones TCR,
facilitent le passage du thalamus en mode relais (figure 2.9). Toute activation
du télencéphale basal conduit également à une inhibition des fuseaux via ses
efférences cholinergiques et GABAergiques en direction du thalamus. Les
afférences noradrénergiques du tronc cérébral provoquent une augmentation
Genèse des rythmes EEG 47

Leur morphologie croissante


et décroissante semble générée
FUSEAUX à la fois dans le cortex (couche V)
et dans le réseau RE-TCR

GABA (inhibition)
Le cortex module
la génération et Vers le cortex Ach nicotinique
la synchronisation Ach muscarinique
des fuseaux

Neurone relais thalamique


(TCR)
Le PA généré dans
le neurone TCR
active le neurone
RE => Rythme
Les interactions entre
TCR et RE sont
à la base des oscillations
Neurone réticulaire des fuseaux (de 7 à 14 Hz)
thalamique (RE)

La stimulation cholinergique
(récepteur nicotinique) dépolarise
le TCR => facilitation du mode relais
La stimulation cholinergique
(récepteur muscarinique)
hyperpolarise le neurone réticulaire
thalamique => arrêt du mode
oscillatoire => inhibition des fuseaux
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

Afférences sensorielles
Afférences cholinergiques spécifiques relayées
(groupe Ch5) régulatrices par les neurones
des activités rythmiques thalamo-corticaux
facilitant le mode relais

Fig. 2.9. Rythmes thalamiques et génération des fuseaux.

de la décharge des cellules TCR, améliorant le transfert des informations dans


les structures corticales. Les afférences adrénergiques et sérotoninergiques
limiteraient également les décharges rythmiques des cellules thalamiques.
Inversement, la diminution de l’activité cholinergique facilite la génération
des fuseaux et le passage de la veille au sommeil. Pendant la présence des
fuseaux, les influx sensoriels ne peuvent être relayés vers le cortex car les
neurones TCR sont hyperpolarisés et la probabilité qu’ils répondent à des
influx synaptiques provenant de la périphérie baisse. Ainsi, les processus
oscillatoires ont une fonction « porte » en ce qui concerne le flux d’informa-
tions spécifiques passant du thalamus au cortex.
48 Dynamique neuronale et genèse de l’EEG

Rythme alpha : une genèse corticale


Le mécanisme précis de génération du rythme alpha au niveau cellulaire est
inconnu. Il est généré dans des petites zones corticales (ou épicentres). Il diffuse
par les voies corticocorticales plutôt que par le biais de neurones thalamiques1
(alors que les fuseaux, générés dans le thalamus, sont exclusivement distribués
dans les voies thalamocorticales). Cette diffusion se fait à des distances de plus
de 4 mm avec une vélocité de propagation de plus de 0,33 m/s. Les unités
formant ces chaînes neuronales correspondraient aux colonnes corticocorticales
(modules) interconnectées. Grâce aux connexions intracorticales à longue
portée, la transmission entre colonnes des activités alpha permettrait de former
les configurations macroscopiques enregistrées à la surface corticale.
Si le rythme alpha est proche des fuseaux en termes de fréquences (8-13 Hz)
et de morphologie, ses caractéristiques générales (topographie occipitale,
veille calme) n’ont rien à voir avec celles des fuseaux (vertex, sommeil léger).
Le rythme alpha est enregistré dans le cortex visuel et dans les noyaux thala-
miques impliqués dans la vision (corps genouillé latéral, pulvinar) avec les
mêmes caractéristiques fréquentielles et de réactivité. Le pulvinar semble
intervenir de manière prépondérante dans la régulation du rythme alpha.
Dans la génération des fuseaux et du rythme alpha, les rythmicités thalamique
et corticale ne semblent pas avoir le même rôle, même si la survenue de ces
activités rythmiques nécessite que les systèmes thalamocorticaux et cortico-
corticaux interagissent. On ne sait pas encore si, de manière plus générale, la
rythmicité corticale dépend plus du thalamus ou plus de la rythmicité propre
des cellules pyramidales (et éventuellement à quel moment elle dépend de
l’une ou de l’autre).

Activités delta : la rythmicité corticale intrinsèque


Le cortex privé de ses afférences est le siège d’une activité intrinsèque lente de
type delta. Il semble désormais établi que les ondes dont la fréquence est
autour de 4 Hz sont générées dans les couches II et III (et sans doute aussi
dans la couche V). Elles seraient produites verticalement, dans des généra-
teurs dipolaires parallèles les uns aux autres (probablement les neurones
pyramidaux), par une séquence des processus synaptiques inhibiteurs et exci-
tateurs et par des activités rythmiques propres des neurones corticaux.
Les activités delta durant le sommeil (correspondant à une déafférentation
fonctionnelle du cortex) proviendraient de la conjugaison de plusieurs types
d’oscillations :
– des oscillations générées dans les cellules corticales, continues, de fréquence
inférieure à 1 Hz, selon des cycles de dépolarisation-hyperpolarisation; ces
oscillations ne sont générées que lors des phases de sommeil lent et sont
absentes des phases d’activation cérébrale; bloquées par l’activation choliner-

1. Ainsi que le montre l’analyse des cohérences alpha (voir p. 20) qui sont plus grandes entre
deux zones de cortex qu’entre le thalamus et le cortex.
Genèse des rythmes EEG 49

gique, elles sont peu dépendantes de l’activité thalamique et utilisent les voies
corticocorticales; elles sont cependant transmises par les neurones thalami-
ques (réticulaires et spécifiques); les pointes vertex seraient l’expression de
ces oscillations lentes spontanées corticales;
– des oscillations contrôlées par le thalamus (de 1 à 4 Hz), dues à des décharges
spontanées de neurones thalamocorticaux principalement du corps genouillé
dorsolatéral; ces oscillations sont intrinsèques et ne dépendent pas des influx
des neurones RE;
– des oscillations corticales de fréquence 1 à 4 Hz; ce sont des activités lentes
produites par des neurones de type pyramidal de grande taille appelés IB (voir
p. 34);
– des oscillations gliales, inférieures à 1 Hz, en relation avec les concentra-
tions extracellulaires de potassium (tampon potassique), les phases de
dépolarisation neuronales étant associées à une augmentation continue et lente
du potentiel des cellules gliales.
La suppression des activités delta lors de l’éveil résulterait de l’action des
neurones cholinergiques du cerveau basal antérieur. Inversement, les déaffé-
rentations cholinergiques pourraient expliquer alors la production d’activités
delta corticales.
Les figures 2.10 et 2.11 schématisent l’apparition et l’évolution des ondes
lentes au cours des différents stades du sommeil lent.

Rythme thêta et générateur limbique


Le rythme thêta (de 4 à 7 Hz) (appelé plus généralement chez les mammifères
inférieurs Rythmic Slow Activity ou RSA, de 3-4 à 10 Hz) est d’origine hippo-
campique. Il a été enregistré chez l’homme dans de nombreuses aires
cérébrales.
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

Le RSA provient de l’hippocampe et des aires limbiques corticales (cortex


entorhinal et cingulaire). Il dépend d’un pacemaker septal modulé par les
fibres ascendantes du tronc cérébral ainsi que d’oscillations produites dans les
cellules pyramidales du champ CA1 et dans l’hippocampe. Deux influences
synaptiques majeures contribuent à la genèse des RSA : une dépolarisation
soutenue cholinergique d’origine septale et des PPSE glutamatergiques. C’est
en fait l’ensemble du réseau impliquant ces structures limbiques qui génère les
RSA.
Les RSA seraient en relation, d’une part, avec les mouvements volontaires, et
d’autre part, avec la potentialisation à long terme (LTP) qui serait optimale
pour des fréquences de la RSA spontanée. Les RSA faciliteraient l’établisse-
ment de la LTP, via peut-être les récepteurs glutamatergiques NMDA. Le
rythme thêta est donc probablement impliqué de cette manière dans les phéno-
mènes de mémorisation. Il aurait aussi une fonction « porte » pour les
transmissions du signal provenant des aires limbiques. L’activité thêta corti-
cale serait induite par des décharges synchronisées de petites populations de
cellules pyramidales du champ CA1, contrôlées par le septum médian et
latéral et régulées par les boucles hippocampocorticales.
50 Dynamique neuronale et genèse de l’EEG

Activités désynchronisées
V de veille.

Rythmes lents corticaux


Neurone cortical
de désafférentation
fonctionnelle.
SL

Neurones thalamo
corticaux Mode relais
V
Potentiel de
membrane

Mode oscillant

Interneurone
Neurone RE
Potentiel de SL
membrane

Décharge Décharge Afférences


en bouffées tonique spécifiques

Diminution d’activité des afférences


SL V SL V cholinergiques du tronc cérébral
qui favorise ainsi l’apparition des fuseaux
puis du sommeil lent.
Diminution de l’activité
des afférences cholinergiques
et GABAergiques du cerveau basal
antérieur inhibitrices de neurones La baisse de l’activité cholinergique
RE. bloque le mode relais
des voies thalamo-corticales.

La baisse de l’activité cholinergique favorise


le mode oscillant et donc l’apparition
des fuseaux du sommeil.
GABA
Ach nicotinique
Ach muscarinique

Fig. 2.10. Génération du sommeil lent. La flèche blanche montre le passage de


la veille (V) au sommeil lent (SL).

L’implication du rythme thêta hippocampique dans le ralentissement de l’acti-


vité cérébrale lors de l’apparition du stade 1 du sommeil ou lors de
pathologies est peu documentée. On ne peut éliminer que ce type d’activité
soit en rapport avec des oscillations plus lentes des systèmes thalamiques
(6 Hz) plutôt que liée à une diffusion du thêta hippocampique dans un
néocortex plus « perméable ».
Genèse des rythmes EEG 51

PROCESSUS PHYSIOLOGIQUES COMPORTEMENT EEG DE SURFACE

La réticulée du mésencéphale
et les noyaux cholinergiques mésopontins Déclenchement
diminuent leurs décharges. du sommeil
Les activités alpha diffusent
vers les régions antérieures

Réduction de l’excitation des neurones


corticaux et TCR (hyperpolarisation). Assoupissement
(stade 1A)

Diminution du transfert des informations


Fragmentation de l’alpha,
dans le cortex
apparition d’activités thêta
(augmentation du seuil).
Somnolence
(stade 1B)
Hyperpolarisation supplémentaire Apparition de pointes vertex
des neurones TCR (< – 65mV).

Cette hyperpolarisation est suivie


de bouffées de décharges dans les neurones
TCR et RE.

Apparition des séquences de fuseaux


dans les neurones TCR. Sommeil stade 2 Fuseaux
K complexes :
pointe vertex + fuseau

Le cortex est partiellement déafférenté Fuseaux +


par le blocage des neurones TCR. K complexes +
Début d’oscillations lentes corticales < 1Hz. ondes lentes

Le cortex est complètement désafférenté.


Synchronisation corticale.
Ondes lentes de grande amplitude,
Ondes lentes corticales intrinsèques. Sommeil stade 3 < 1Hz + fuseaux
Oscillations corticales lentes se reflétant et quelques ondes delta
dans les neurones TCR et RE. (1-4 Hz superposées)
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

Apparition d’oscillations delta


intrinsèques dans les neurones TCR,
modulées par les oscillations corticales
lentes. Ondes delta majoritaires
Sommeil stade 4 + quelques K complexes

Ondes delta directement déclenchées


par des volées directes thalamo-corticales
donc plus synchronisées.

Fig. 2.11. Génération et modification des ondes lentes corticales au cours du


sommeil.

Activités à hautes fréquences bêta et gamma :


synchronie et liage
D’une manière générale, les activités rythmiques peuvent être décrites comme
des oscillations conduisant à des phénomènes de résonance dans des réseaux
52 Dynamique neuronale et genèse de l’EEG

neuronaux selon des régimes linéaires (s’il y a peu d’influx afférents ou s’ils
sont aléatoires) ou, le plus souvent, selon des modes non linéaires.
Les oscillations à basse fréquence (fuseaux, rythme alpha ou thêta) recrutent
des neurones sur des zones corticales de grande dimension. Ce sont des
oscillations de diffusion régionale dans lesquelles les neurones thalamocorti-
caux et corticocorticaux sont impliqués. Les oscillations à haute fréquence
(bêta, gamma) recrutent des neurones sur des zones de dimensions plus
réduites. Ce sont des oscillations de diffusion locale impliquant uniquement
des neurones corticocorticaux.

Rythmes rapides de l’EEG


Les activités rapides (bêta, gamma) apparaissent, en EEG de surface, lors de la
veille attentive ou d’une tâche motrice et ce, dans la majorité des aires céré-
brales. Dans les processus d’attention focalisée, des oscillations focales
synchronisées à haute fréquence se développent dans des aires néocorticales
circonscrites 1. Ces activités rapides ne correspondent pas à une simple désyn-
chronisation des neurones générant le rythme alpha (selon le processus décrit
dans la figure 2.8) mais plutôt à l’apparition d’un autre mode d’activité ryth-
mique (figure 2.12).
Les oscillations corticales rapides, qui sont l’objet d’études récentes, sont en
relation avec des propriétés rythmiques particulières identifiées dans certains
neurones du cortex. Certains interneurones inhibiteurs corticaux (GABAergi-
ques, couche IV) présentent une large gamme de fréquences (10-40 Hz)
d’oscillations rapides et irrégulières dépendant de la valeur du potentiel de
membrane, d’autres présentent une gamme étroite de fréquences d’oscillations
sous le seuil, à une fréquence moyenne de 44 Hz. Enfin, des neurones pyrami-
daux superficiels présentent des oscillations allant de 20 à 70 Hz (chattering
neurons = neurones bavards) le plus souvent limitées à de petites zones de
cortex. Des activités rapides à 40 Hz ont été retrouvées dans le thalamus
(neurones TCR) comme dans le cortex, non seulement dans l’état de veille
mais aussi dans le sommeil lent et l’anesthésie.
Les comportements oscillatoires dans ces bandes de fréquences (de 20 à
70 Hz) mettent des neurones en synchronie (couplage) relativement locale.
Cette synchronisation peut s’effectuer avec une précision de l’ordre de la
milliseconde (même entre des neurones éventuellement situés dans des aires
différentes). Il semble également, que, dans certaines conditions, les processus
de synchronisation soient facilités par la présence de synapses électriques
(voir p. 32) et que les couplages électriques directs ainsi réalisés participent à
la génération des rythmes cérébraux. L’activation cholinergique du tronc céré-
bral facilite les activités rapides dans le thalamus et le cortex.

1. À noter que lorsque le néocortex est désynchonisé, le système limbique (hippocampe et cortex
entorhinal) génère des activités thêta synchronisées.
Genèse des rythmes EEG 53

Mode de décharges (bursts) Mode relais :


à basse fréquence potentiel d’action unique
Activité Afférences thalamocorticales Afférences thalamocorticales
thalamique non spécifiques spécifiques

Projections vers la couche I Projections vers la couche IV


du néocortex du néocortex

EEG de DELTA FUSEAUX ALPHA MU BETA GAMMA


surface

Synchronisation
corticocorticale Activités synchrones : Activités Activités
(niveau global) mode résonants adulte éveillé désynchronisées
globaux ou régionaux avec résonances locales

Synchronisations
corticocorticales ERD, ERS (couplages, liages…)
locales

5 HT
Neuromédiateurs

ACh NA DA

Fig. 2.12. Signification des changements d’activités EEG chez le sujet normal
(voir aussi figure 2.8).
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

Synchronisations et désynchronisations liées à l’événement, liage


et activités rapides
L’activité locale du cortex peut changer sous l’effet d’une stimulation senso-
rielle. Soit ce changement est lié en temps et en phase avec le stimulus (time-
locked et phase-locked) et il s’agit d’une réponse évoquée qui peut être
analysée par des méthodes linéaires (moyennage) (voir chap. 7). Soit ce chan-
gement est lié en temps mais pas en phase avec le stimulus (time-locked mais
pas phase-locked) et c’est une réponse induite qui ne peut être analysée par
des méthodes linéaires. Alors que la réponse évoquée peut être comprise
comme la réponse d’un système stable à des activités extérieures, la réponse
induite doit être comprise comme un changement de l’activité en cours (chan-
gement d’état) correspondant à un changement de la connectivité
fonctionnelle. Les activités induites se déclinent en désynchronisations liées à
l’événement (Event Related Desynchronization ou ERD) et synchronisations
liées à l’événement (Event Related Synchronization ou ERS).
Des méthodes moins grossières que l’EEG de surface 10/20, comme les EEG
enregistrés avec plus d’électrodes, la MEG ou la corticographie, permettent
54 Dynamique neuronale et genèse de l’EEG

d’analyser de manière plus focale des changements induits des processus


oscillatoires se produisant à l’intérieur d’une même bande de fréquences (bêta,
alpha…) 1 et qui correspondent à une modification des synchronies neuronales.
Dans un réseau neuronal, le degré de synchronie est évalué à partir de la puis-
sance spectrale dans cette bande de fréquences donnée, c’est-à-dire à partir de
l’amplitude d’un pic de fréquence et de sa bande passante. Ainsi, à l’intérieur
d’un type d’oscillation donné (rythme alpha, rythmes bêta, ou gamma) une
augmentation de synchronie entre des neurones (ERS) se traduit par une
augmentation de l’amplitude et une diminution de la largeur de la bande de
fréquences du pic de fréquence. Si l’activité rythmique est désynchronisée
(ERD), on observe une diminution de l’amplitude et une augmentation de la
largeur de la bande passante du pic de fréquences (figure 2.13).
Font ainsi partie de ces différentes activités induites, liées à l’événement (ERD
et ERS) : la réduction de l’alpha sous l’effet de l’ouverture des yeux, la
suppression du rythme mu lors du serrage des poings, la modification de
l’apparence du rythme alpha quand l’attention est portée sur l’écoute plutôt
que sur la vue, l’augmentation du même rythme sous l’effet de la SLI dans
certaines conditions, l’activité alpha induite par un stimulus, les réponses dans
la bande gamma, les réponses oscillatoires bêta liées aux mouvements, la
synchronisation post-renforcement etc.
Cependant, selon la fréquence (alpha, bêta, gamma), la signification d’une
ERD ou d’une ERS ne sera pas la même (figure 2.13). On doit noter égale-
ment que des ERS et des ERD peuvent être observés en même temps à
différents niveaux du scalp pour un type de tâche donné : par exemple le
mouvement d’un doigt produit une ERD dans la bande alpha au niveau central
(face à l’aire S1) traduisant une activation des neurones dans cette zone et une
ERS dans une zone postérieure pariétale (déactivation). D’une manière géné-
rale, les activités de type augmentation de l’alpha (ERS) apparaissent plutôt
dans des zones corticales qui « n’ont rien à faire » ou qui sont « inoccupées ».
Ce sera l’inverse pour une ERS dans la bande bêta. Une désynchronisation des
rythmes EEG dans une zone corticale constitue un précurseur d’une synchro-
nisation dans d’autres zones corticales. Ces interactions entre zones corticales
(sous la forme de diminution ou d’augmentation des activités alpha ou bêta)
peuvent avoir lieu dans une même modalité sensorielle ou dans des modalités
différentes.
En dehors des oscillations bêta ou alpha, des oscillations induites liées aux
événements peuvent être observées dans la bande de fréquences autour de
40 Hz (oscillations gamma). Elles sont généralement considérées comme le
témoin d’une liaison (ou liage; binding) entre des informations sensorielles
différentes ou d’un processus d’intégration ou d’un acte moteur. On a récem-
ment montré que la communication neuronale lors de l’événement ne repose
pas seulement sur des synchronisations oscillatoires (binding) entre un groupe
de neurones envoyant un message mais très probablement aussi sur une mise

1. Alors que quand on parle de rythmes synchronisés (delta) ou désynchronisés (bêta), il se


produit un changement de la bande de fréquences.
Genèse des rythmes EEG 55

ERS ERD
(augmentation de l’amplitude) (diminution de l’amplitude)

Analyse spectrale
(seule la bande
de fréquences bêta
est prise en compte)

Événement

Modifications locales Blocage de l’activité :


ERS État dé-activé
possibles des activités des neurones fonction « porte »
(fuseaux)
Augmentation de l’alpha
Bande alpha
État activé Transferts des influx
ERD
des neurones
Diminution de l’alpha

ERS État activé Mise en cohérence


des neurones
Bande bêta lent
ERD État dé-activé Pas de cohérences
des neurones dans le réseau

Liage (« binding ») Synchronies


Oscillations bêta
entre des assemblées à longue distance
rapides
de neurones

Liage (« binding ») Synchronies


Oscillations gamma entre des assemblées locales
de neurones

Fig. 2.13. Synchronisations et désynchronisations liées à l’événement.


Comparer l’analyse spectrale avec celle de la figure 2.8. Noter que selon
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

l’activité dans laquelle elles se produisent, les ERD et les ERS n’ont pas la
même signification fonctionnelle.

en cohérence de la phase (phase locking) des oscillations dans les groupes de


neurones envoyant le message et de ceux qui le reçoivent. On doit donc parler
de « cohérences liées à l’événement », des configurations variables de cohé-
rences définissant alors les conditions d’une communication interneuronale
flexible sous-tendant la flexibilité cognitive. La sélection et le mécanisme de
liaison des neurones en groupe (binding) et de marquage de leurs réponses
comme liées proviennent de la synchronisation transitoire des décharges avec
une précision de l’ordre de la milliseconde.
Actuellement, ces différentes activités oscillatoires rapides, ERD et ERS, ne
sont pas intégrées dans le diagnostic clinique. Mais, outre le fait qu’elles parti-
cipent aux activités dites désynchronisées de l’EEG de surface, elles sont d’un
grand intérêt théorique parce qu’elles soulignent à la fois la complexité
spatiale, rythmique et temporelle des activités électriques enregistrées sur le
56 Dynamique neuronale et genèse de l’EEG

SOMMEIL REM
Noyau reticularis pontis oralis
(partie ventrale)
(Glu, GABA,5HT)

VEILLE SOMMEIL NON-REM


Réticulée Réticulée et noyaux thalamiques
médiodorsaux. Cortex cérébral.
ponto-mésencéphalo-diencéphalique
Télencéphale basal.
et noyaux du cerveau basal antérieur.
Tronc cérébral (partie caudale)
(Ach, NA, 5HT, His, Glu)
(GABA,Glu)

HOMÉOSTASIE :
RYTHMES Cycle veille sommeil régulé
CIRCADIENS par les alternances de veille
et de sommeil des 24 heures précédentes

NOYAU SUPRA FACTEURS


CHIASMATIQUE ENVIRONNEMENTAUX :
Première nuit, bruit, surface de
RÉTINE sommeil, position, médicaments

GLANDE PINÉALE
(ÉPIPHYSE) HYPOTHALAMUS
LATÉRAL
Active la nuit,
production de mélatonine, (neurones à orexine)
modulation des rythmes circadiens

Fig. 2.14. Réseau de structures cérébrales intervenant dans la régulation du


cycle veille-sommeil.

scalp et ouvrent une fenêtre sur les modalités des interactions entre les
groupes de neurones lors de divers processus sensoriels, moteurs ou cognitifs.
Elles sont peut-être impliquées dans la genèse des processus conscients.

Activations et changement d’états


L’EEG clinique utilise différents moyens de tester les réponses du cerveau. Ils
conduisent à des changements d’états des systèmes oscillants.

Ouverture des yeux, serrage des poings, douleur


L’évaluation de la réactivité de l’ensemble des systèmes réticulo-thalamocorti-
caux est réalisée par un moyen extrêmement simple : le blocage de l’alpha par
la simple ouverture des yeux (tracé n° 8) ou le blocage du rythme mu par le
serrage des poings (voir tableau 4.I). Ces événements mettent en jeu l’activa-
tion des systèmes cholinergiques et adrénergiques du tronc cérébral ainsi que
la transition des neurones TCR du mode oscillant au mode relais. Dans les
troubles de la conscience (confusion, coma), la réactivité est testée, soit par
Régulation des états de vigilance 57

l’appel du malade par son nom (stimulation auditive et cognitive), soit par des
stimulations nociceptives (pincements) permettant de déclencher éventuelle-
ment une réaction d’orientation ou de retrait. Dans ces conditions, l’absence
de modification de l’électrogenèse en présence d’une réaction réflexe de retrait
(médullaire) est un signe de gravité du trouble de la conscience.

Stimulation lumineuse intermittente (SLI)


En dehors de la possibilité de déclencher des réponses paroxystiques (voir
tableau 4.II), la SLI peut provoquer chez les sujets normaux un entraînement,
variable, qui correspond à une activité rythmique évoquée à la fréquence du
stimulus (ce sont des potentiels évoqués) ou à une harmonique de celle-ci
(tracés n° 10 et 11). La SLI, par ailleurs, diminue l’amplitude de l’activité
alpha. L’analyse spectrale de la réponse à la SLI peut mettre en évidence les
modifications anormales des réponses oscillatoires corticales, soit sous l’effet
d’une lésion (apparition de fréquences particulières dans la zone lésée), soit
sous l’effet d’un neurotrope.

RÉGULATION DES ÉTATS DE VIGILANCE


Dans les paragraphes précédents, nous avons mis en place les principaux
éléments du puzzle qui nous permettent de comprendre les origines (histologi-
ques, anatomiques, électrophysiologiques) de la complexité et de la flexibilité
de l’activité électrique cérébrale. Nous avons vu que la variabilité des états de
vigilance était sous-tendue par des changements d’états dans de multiples
réseaux neuronaux, sous la dépendance de multiples systèmes de régulation.
Bien que la régulation des états de vigilance soit imparfaitement comprise, ces
différents éléments peuvent être réunis pour tenter de disposer provisoirement
d’une description schématique des processus impliqués dans cette régulation.
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

(tableau 2.V; voir figures 2.8, 2.14 et 2.15).

Des neurones bien particuliers


Avant de décrire comment le cerveau passe de la veille aux sommeils et réci-
proquement, il est nécessaire de décrire deux populations de neurones situés
dans le pont et dans le bulbe, intriquées anatomiquement, et qui interviennent
dans la régulation du sommeil REM selon un mécanisme de « flip-flop ». Il
s’agit :
– des neurones exécutifs, responsables du sommeil REM et actifs pendant
toute sa durée (neurones REM-on); ce sont des neurones cholinergiques,
GABAergiques et glutamatergiques; les cellules REM-on sont
autoexcitatrices : elles augmentent leurs décharges en bouffées. Elles sont
inhibitrices des neurones REM-off; les neurones REM-on sont contrôlés par
des neurones de l’hypothalamus;
– des neurones permissifs qui cessent leur activité pendant la durée du
sommeil REM (REM-off); ce sont des neurones noradrénergiques, sérotoni-
58 Dynamique neuronale et genèse de l’EEG

Tableau 2.V. Régulation des états de vigilance .

En sommeil lent
Les neurones Lors de l’éveil En sommeil REM
non REM
Les neurones des maintiennent un présentent une activent les neurones
noyaux mésopontins niveau d’activation activité réduite… du cortex. Très actifs
cholinergiques élevé dans tout le en sommeil REM.
(ACho) cerveau, bloquent les
neurones
thalamiques
réticulaires…
Les neurones du // // sont responsables de
locus subcoeruleus l’inhibition motrice
(ACho) en REM (via le noyau
magnocellulaire qui
active les
interneurones
inhibiteurs spinaux
par transmission
glycinergique).
Les neurones de la se projettent
formation réticulée massivement sur les
mésencéphalique noyaux thalamiques,
(Asp/Glu) favorisent l’éveil.
Les neurones du activent les neurones présentent une présentent une
locus coeruleus (NA) du néocortex, du activité de plus en activité abolie en
thalamus, du plus réduite au fur et sommeil REM.
cervelet, du pont et à mesure que le
du bulbe, présentent sommeil lent
une activité réduite s’approfondit…
en éveil calme, ont
un rôle de
modulation…
Les neurones du sont actifs et leur activité leur activité est très
raphé dorsal favorisent l’éveil… diminue… réduite.
(5HT)
Les neurones de se projettent dans leur activité tonique
l’hypothalamus tout le cerveau (en diminue.
postérieur : noyau particulier au niveau
tubéromammilaire des autres systèmes
(histamine) d’éveil), favorisent
l’éveil (récepteurs
H3) par une activité
tonique…

Régulation des états de vigilance 59

 Tableau 2.V. Régulation des états de vigilance (suite).

En sommeil lent
Les neurones Lors de l’éveil En sommeil REM
non REM
Les neurones du Actifs. Inhibition
télencéphale basal Ils sont nécessaires descendante pour
(basal forebrain) au sommeil lent bloquer les activités.
(GABA avec (projections
récepteurs α2 corticales). Inhibition
adrénergiques) descendante.
Les neurones du maintiennent un présentent une activent les neurones
télencéphale basal niveau d’activation activité réduite… du cortex.
(basal forebrain) élevé dans tout le
(Acho, GABA, Glu) cerveau, bloquent les
neurones
thalamiques
réticulaires…
Les neurones du Actifs. Ils sont
thalamus antérieur nécessaires au
(réticulaire) sommeil lent
(génération des
fuseaux et ondes
lentes du sommeil).

nergiques et GABAergiques; les cellules REM-off ont une action auto-


inhibitrice; l’auto-inhibition des neurones REM-off réduit la régularité du
rythme de décharge REM-off et favorise la décharge des cellules REM-on.
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

Éveil
Pendant l’éveil, les systèmes histaminergiques, noradrénergiques et choliner-
giques facilitent l’activité du cortex et le fonctionnement en mode relais du
thalamus. Ils conduisent également à une inhibition des neurones réticulaires
thalamiques. La décharge régulière des neurones REM-off (activité inhibi-
trice) empêche l’activation des neurones REM-on.
Selon certaines hypothèses, l’éveil provoquerait sa propre inhibition selon une
régulation de type homéostasique, dépendant de la sérotonine (5HT). Les
neurones à 5HT du système du raphé rostral présentent des décharges régu-
lières (de 1 à 2 Hz), comme une horloge. Tout se passe comme si ce système
(qui innerve également l’horloge circadienne endogène) mesurait la durée et
l’intensité de l’éveil. La libération de 5HT au niveau de la région préoptique
(noyau suprachiasmatique) entraînerait la mise en jeu d’un système descen-
dant GABAergique agissant sur l’hypothalamus postérieur et la FR médiane
cholinergique et noradrénergique, conduisant à leur inhibition et initiant ainsi
le sommeil lent.
60 Dynamique neuronale et genèse de l’EEG

Des travaux récents soulignent l’importance du noyau préoptique ventrolatéral


(VPLO) qui contient des neurones inhibiteurs à GABA et à galanine dans
l’initiation du sommeil lent. Une inhibition réciproque des neurones du VPLO
et des neurones du système monoaminergique (locus coeruleus, raphé, noyau
tubéromammilaire hypothalamique) constituerait un système de commutation
(type « flip-flop » avec des états discrets et des transitions rapides) pouvant
expliquer les endormissements et les réveils rapides. Ce système de commuta-
tion serait régulé par les neurones à oréxine (en provenance de l’hypothalamus
latéral) qui, en renforçant l’activité des systèmes monoaminergiques, stabilise-
rait la commutation dans le sens de la veille, empêchant des transitions
brutales en sommeil lent. Les patients narcoleptiques, qui présentent des
mutations sur les ligands et/ou sur les gènes à orexines, sont caractérisés par
des transitions aiguës en sommeil lent.

Sommeil lent
La diminution de l’influence cholinergique provenant du tronc cérébral
provoque l’hyperpolarisation des neurones relais thalamiques et l’activation
(libération) du générateur thalamique (le noyau réticulaire thalamique) qui
entraîne à son rythme les neurones thalamocorticaux et les cellules pyramidales
du cortex et conduit aux fuseaux puis à l’activité synchronisée du sommeil lent.
En sommeil lent, on observe aussi une diminution de l’activité du système
bulbaire adrénergique sympatho-excitateur, expliquant la baisse de tempéra-
ture centrale et de tension artérielle, et la diminution du métabolisme basal (et
de la demande énergétique globale), avec réduction de la consommation
d’oxygène et de glucose.
Au cours du sommeil lent, la diminution de l’activité du système bulbaire
adrénergique entraîne une baisse de l’activité des neurones REM-off : leur
action inhibitrice sur les neurones REM-on est levée, et le sommeil REM peut
apparaître.

Initiation et maintien du sommeil REM


Le sommeil REM ne peut apparaître que si l’activité des neurones 5-HT du
raphé et NA du locus coeruleus a cessé et après avoir été préparé par le
sommeil lent.
L’activité cholinergique domine en sommeil REM et provient de régions du
tronc cérébral (tegmentum pontopédonculaire, tegmentum latérodorsal et
locus subcoeruleus) qui projettent sur le télencéphale basal, le thalamus, les
ganglions de la base, l’hippocampe, l’hypothalamus, le cortex cingulaire et les
régions corticales visuelles.
Le sommeil REM apparaît quand les neurones REM-off voient leur activité
suffisamment diminuer. Mais, au fur et à mesure que se déroule le sommeil-
REM, l’activité des cellules REM-on active de plus en plus les cellules REM-
off. Quand la population de REM-off est suffisamment active, elle inhibe alors
les cellules REM-on et le sommeil-REM se termine. Les cellules REM-off
ayant une action auto-inhibitrice, le cycle reprend.
États fonctionnels cérébraux et EEG : une nouvelle conception 61

Les projections glutamatergiques spinales des neurones REM-on activeraient


des neurones GABAergiques et glycinergiques inhibiteurs de la moelle
épinière, produisant ainsi l’atonie du sommeil paradoxal.
La survenue d’ondes pontogéniculo-occipitales (PGO) a été décrite pendant le
sommeil REM chez les animaux et les primates non humains et récemment
chez l’homme (elles ne sont pas enregistrables lors d’un EEG de surface). Ce
sont des potentiels phasiques (spikes) observés dans le pont, le noyau géniculé
latéral et le cortex occipital. En sommeil REM, les neurones cholinoceptifs
responsables des PGO dans le pont sont très actifs et déchargent par bouffées.
Ils envoient l’information aux neurones du thalamus et du cortex qui engen-
drent à leur tour l’activité PGO enregistrée. Cette activité PGO est transmise
aux noyaux oculomoteurs conduisant à la génération des mouvements
oculaires rapides du sommeil REM.

ÉTATS FONCTIONNELS CÉRÉBRAUX ET EEG :


UNE NOUVELLE CONCEPTION
Alors que le tableau 2.I, assez classique, peut donner à penser à une relative
simplicité des rythmes EEG, il apparaît, à l’issue de ce chapitre, d’une part,
que l’activité EEG est d’une extrême complexité phénoménologique comme
de régulation, et d’autre part, que l’EEG de surface est une image très simpli-
fiée de l’activité corticale réelle.
En fait, l’état d’activité des aires corticales doit être envisagé sous la forme de
multiples micro-états fonctionnels qui seraient des états stationnaires presque
stables de courte durée, dans une zone corticale plus ou moins restreinte. La
compréhension (provisoire) que l’on a de ces phénomènes est que le cerveau
opère, notamment dans l’état de veille, l’intégration d’activités neuronales
distribuées dans des réseaux neuronaux s’étendant sur plusieurs aires corti-
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

cales pour conduire à une représentation cohérente d’une configuration de


stimulation. Des transitions plus ou moins rapides ou massives de l’état des
réseaux sous-jacents sont illustrées par les changements de la veille au
sommeil ou à une échelle différente par les changements induits ou évoqués.
Cette conception générale se construit dans le cadre des modèles connexion-
nistes et la théorie de sélection des groupes neuronaux d’Edelman.
L’emphase est ainsi mise sur la présence de réseaux de neurones (pas forcé-
ment contigus) assurant l’analyse des informations par le biais de
configurations spatio-temporelles très complexes, à de nombreux degrés de
liberté. Une des avancées récentes les plus novatrices est la compréhension
que les oscillations EEG possèdent le plus souvent une structure non linéaire
avec des attracteurs étranges (chaotiques), décrits dans des espaces de phases
de dimensions élevées (voir p. 15). Ainsi, le rythme bêta peut être décrit avec
10 degrés de liberté (indice de complexité), alors le nombre de degrés de
liberté baisse pour l’alpha (à 6 ou 8) puis pour les ondes lentes du sommeil.
Les états EEG semblent présenter des transitions ou des bifurcations très
caractéristiques des états chaotiques, permettant ainsi de réaliser les fonctions
« porte » dans des conditions optimales. Ces bifurcations conduisent à des
62 Dynamique neuronale et genèse de l’EEG

Système histaminergique
(locus coeruleus)

Activations neuronales
Système noradrénergique (corticales et sous corticales)
(locus coeruleus)
Veille
Système cholinergique
mésopontin Facilitation du mode relais
dans neurones Rythmes
Les neurones thalamocorticaux circadiens
REM-off
bloquent Inhibition des neurones
réticulaires thalamiques Hypothalamus
le sommeil REM
Neurones Régulation du flip-flop
à orexine
Neurones 5HT
du raphé homéostasie
Inhibition
réciproque Cerveau basal antérieur L’inhibition du système
(flip-flop) GABA-ergique cholinergique libère
(VLPO) les neurones thalamiques
réticulaires et bloque le mode Sommeil
Inhibition du système bulbaire relais des neurones TCR lent
adrénergique et sympathicomimétique. (non REM)
Aspects végétatifs du sommeil lent
Apparition des fuseaux
puis des activités synchronisées
du sommeil lent

Les neurones (sérotoninergiques


Levée ou noradrénergiques) REM-off,
d’activation inhibiteursdu sommeil REM,
deviennent progressivement inactifs
par arrêt de l’activation adrénergique
et auto-inhibition.

Les neurones exécutifs


cholinergiques du sommeil REM
Ondes PGO,
(REM-on) sont activés
mouvements
oculaires
Sommeil
REM
Leur auto-activation
Noyau
accroît le sommeil REM
magnocellulaire

Leur activation, lors du sommeil REM,


active les neurones REM-off qui, en retour,
inhibent les neurones REM-on
Inhibition
motrice Abolition
descendante du tonus

Fig. 2.15. Schéma de synthèse des régulations veille-sommeil. En pointillés, rôle


du « flip-flop » (voir p. 60) entre les activités du VPLO et les systèmes
monoaminergiques.

changements spectaculaires des états membranaires de grandes populations de


neurones et subséquemment à des modulations très efficaces du transfert des
informations entrantes ou sortantes dans le réseau neuronal. Des analyses des
États fonctionnels cérébraux et EEG : une nouvelle conception 63

états de complexité tendent à montrer qu’il existe des altérations cycliques (de
l’ordre de 1 minute) de la complexité de l’activité alpha, entre un mode de
traitement parallèle (désynchronisé, à haut degré de complexité) analysant
rapidement les informations de manière distribuée et un mode de traitement
central (synchronisé, de faible complexité) facilitant le transfert et la récupéra-
tion des informations dans les aires associatives de haut niveau. La capacité de
stabilisation et la présence de variations ordonnées et réversibles des dimen-
sions de complexité (d’un quasi-équilibre à un cycle limite) semblent
constituer des propriétés intrinsèques du cerveau lui permettant d’organiser
une stratégie d’appréhension des informations. La régulation de ces transitions
serait effectuée par un système situé dans la réticulée du tronc cérébral et
commun au système nerveux central et au système nerveux autonome.
Il est apparu également, dans le paragraphe précédent, que, sous-jacent à
l’EEG de surface, des oscillations à fréquences et localisations multiples cons-
tituent le mode de fonctionnement fondamental du cortex et des systèmes
thalamocorticaux. Ainsi, l’EEG de surface n’est pas limité à la simple somme
aléatoire de multiples dépolarisations mais il est le reflet du caractère fonda-
mentalement oscillant de l’activité cérébrale. On comprend ainsi qu’en raison
de la simultanéité de très nombreuses oscillations, des processus chaotiques
apparaissent dans l’activité cérébrale puisque l’on a vu que, pour que surgisse
un phénomène chaotique dans un système physique quelconque, il suffit qu’il
y ait dans le système trois oscillateurs couplés. Les processus chaotiques sous-
tendent la capacité du cerveau à répondre de manière flexible au monde exté-
rieur et à générer des nouvelles configurations d’activité.
La question de la raison du caractère oscillant des systèmes neuronaux se pose
alors. Il est possible que les modalités les plus adéquates pour accomplir un
changement d’état d’un réseau neuronal soient le passage d’une activité de
type randomisée au type oscillatoire. Les oscillations peuvent ainsi survenir
dans de larges populations neuronales plutôt synchronisées (formation
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

d’assemblées de neurones) et elles pourraient sous-tendre des changements


d’une certaine durée des potentiels de membrane. Il semble que les fonctions
des oscillations corticales soient multiples :
– la fonction « porte » (cas du rythme alpha ou des fuseaux) supprimant ou
rétablissant l’attention;
– des fonctions de liaison (binding) créant des synchronies entre les neurones
(oscillations gamma ou bêta) lors des processus attentionnels;
– des fonctions de matching (adaptation) permettant la réalisation d’un
couplage optimal entre deux aires cérébrales présentant une sélectivité en
fréquence;
– des fonctions de promotion de la plasticité, de mémoire et de récupération
des informations (rythme thêta de l’hippocampe).
Ainsi, par les oscillations peut émerger le « choix » des masses neuronales
permettant la commutation entre différents états comportementaux. On a vu
que les systèmes cholinergiques du cerveau basal antérieur et du tronc cérébral
sont fondamentaux dans ces commutations.
64 Dynamique neuronale et genèse de l’EEG

CE QU’IL FAUT RETENIR

• L’analyse des enregistrements EEG a conduit à classer les activités électri-


ques cérébrales en rythmes définis par leur fréquence, leur répartition,
leur morphologie, leur amplitude et leur réactivité.
• L’activité cérébrale s’organise en divers états dits de vigilance (veille,
sommeil lent, sommeil paradoxal) qui sont caractérisés par la conjonction
d’une certaine configuration d’activités électriques et d’un comportement
sensori-moteur.
• L’EEG est une image déformée de l’activité électrique du néocortex et
plus particulièrement des variations de potentiels (PPSE et PPSI) des
dendrites des cellules pyramidales orientées verticalement et situées dans
les couches III, V et VI du cortex. Les cellules corticales sont le siège de
diverses activités rythmiques probablement flexibles. Des réseaux très
denses permettent les processus de synchronisation des activités entre
neurones.
• Les caractéristiques structurales et fonctionnelles du cortex permettent
de définir deux unités fonctionnelles : les colonnes corticocorticales
(modules corticaux) et les macrocolonnes. Les connexions corticocorticales
prédominent dans le cortex humain et elles sont massivement distribuées.
• Le thalamus joue un rôle central dans l’organisation de l’activité élec-
trique cérébrale enregistrée par l’EEG. Cet ensemble d’unités
fonctionnelles module qualitativement et quantitativement les flux
d’informations destinés au cortex en fonction des états de vigilance.
• La régulation des états de vigilance est sous la dépendance de réseaux
neuronaux impliquant le thalamus et la formation réticulée du tronc céré-
bral, le télencéphale basal et l’hypothalamus. À cette organisation
anatomique se superpose par ailleurs une organisation neurochimique
complexe, dans laquelle les diverses amines jouent un rôle spécifique.
• Les fuseaux du sommeil sont produits par l’inhibition cyclique des
neurones du thalamus relais et par ceux du thalamus réticulaire. Le
rythme alpha est produit dans le cortex sous la dépendance d’oscillations
thalamiques. Le rythme thêta est d’origine limbique. Les activités lentes
du sommeil (delta) correspondent à une déafférentation cholinergique et
sensorielle du cortex. Puis, des rythmes lents proprement thalamiques se
superposent à ceux du cortex dans les stades de sommeil très profond.
• Les activités rapides bêta et gamma sont des activités dans lesquelles de
grandes populations de neurones sont désynchronisées. Elles correspon-
dent à la veille active et au traitement optimal des informations
sensorielles. Au sein de ces activités et pour des zones de cortex réduites,
on observe des phénomènes de mise en synchronie (ou en non-synchronie)
de neurones sous l’effet des événements. Ces rythmes rapides servent
notamment au « liage » des activités neuronales nécessitées par l’analyse
diffuse et massivement parallèle d’informations réparties sur le cortex.
• Les activités électriques (oscillations) des neurones ou assemblées de
neurones qui sont à la base de l’EEG de surface possèdent fondamentale-
ment une structure non linéaire et chaotique. La dimension de complexité
qui mesure le caractère chaotique de l’EEG est variable en fonction des
états et aux différentes échelles analysées.
3 EEG DU CERVEAU
EN DÉVELOPPEMENT

Ce chapitre a pour but de décrire l’évolution de l’électrogenèse du cerveau de


la naissance à 20 ans, y compris quand cette naissance a lieu avant le terme,
c’est-à-dire chez le prématuré. Bien que placé de manière chronologique avant
l’analyse des tracés de l’adulte, nous suggérons au néophyte d’en différer la
lecture de manière à ne pas se perdre dans la déroutante complexité qui carac-
térise l’EEG du prématuré, du nouveau-né et du nourrisson.
Ce domaine reste en pleine évolution et des discussions sur les dates d’appari-
tion de tel stade de sommeil ou de tel grapho-élément sont encore vives. L’EEG
du cerveau en développement est lui-même en développement. Il a bénéficié
depuis peu des résultats de l’IRM du prématuré et de l’IRM néonatale.
La question centrale posée au médecin qui interprète un EEG, en tout cas
jusqu’à la petite enfance, et en dehors des anomalies plus classiques que l’on
peut observer sur l’EEG (activités paroxystiques, dépressions de l’électroge-
nèse, asymétries, souffrance cérébrale) est la suivante : la maturation cérébrale
du bébé (prématuré ou non) ou de l’enfant est-elle harmonieuse et normale?
En d’autres termes existe-t-il un retard de maturation cérébrale en relation
avec une grossesse pathologique, une maladie métabolique, une infection
fœtomaternelle (voir figure 5.1).

LE CERVEAU EN DÉVELOPPEMENT
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

Le cerveau des mammifères supérieurs, très complexe, est appelé à organiser


des comportements très sophistiqués et à disposer d’une adaptabilité excep-
tionnelle aux situations environnementales. Il mature lentement. Mais, en
réalité, sa maturation est double : une maturation anatomique et histologique
et une maturation électrophysiologique beaucoup plus lente. La maturation
psychologique, qui relève d’autres disciplines, doit être également ajoutée à
ces deux processus.

Maturations cérébrales
Maturation anatomique et histologique
Lente et progressive complexification des structures cérébrales in utero, elle se
traduit en IRM1 par une évolution des caractéristiques de contraste entre les tissus.

1. Les IRM fœtales ont permis de faire des progrès considérables dans la connaissance du déve-
loppement du fœtus.
66 EEG du cerveau en développement

Cette évolution reflète, d’une part, des modifications profondes du contenu en eau,
en lipides et en protéines de ceux-ci et, d’autre part, une réorganisation et une
évolution structurale des macromolécules cellulaires et extracellulaires.
Cette maturation est un processus très complexe duquel on peut extraire trois
étapes fondamentales :
– après la formation des vésicules cérébrales, se produit la formation très
précoce (à partir de 7 semaines in utero) de la zone germinative, dans la région
périventriculaire; dans cette zone vont s’opérer les multiplications des cellules
qui formeront les futures structures corticales et sous-corticales; la zone
germinative va disparaître vers S34 1 ;
– la migration cellulaire (histogenèse) commence à partir de S12; elle va
permettre l’organisation histologique des différentes structures cérébrales, et
notamment, chez les mammifères supérieurs, du cortex avec son organisation
en six couches;
– la myélinisation, qui permet l’optimalisation des relations entre les diffé-
rentes cellules et accroît leur efficacité fonctionnelle, débute vers S25 dans le
tegmentum; elle se déroulera encore plusieurs années après la naissance; en
IRM, elle sera radiologiquement complète vers l’âge de 2 ans.
Ainsi, grossièrement, à l’âge de 2 ans le cerveau de l’enfant a acquis sensible-
ment les mêmes caractéristiques de structure, de morphologie et de contraste
IRM que le cerveau adulte.

Maturation électrophysiologique cérébrale


Si la maturation anatomique (macroscopique) est achevée quand le langage
apparaît, il n’en est pas de même avec l’électrogenèse cérébrale qui est le
siège d’une maturation qui s’étale sur les vingt premières années de la vie
humaine, pour se stabiliser vers 20 ou 25 ans. Plus encore, avant la naissance,
l’électrogenèse cérébrale montre une extrême variabilité dans le temps, de
semaine en semaine.
La maturation électrophysiologique ne semble pas suivre de manière simple et
claire le développement anatomique et histologique. On voit, dans le
tableau 3.I, comment s’interpénètrent les deux niveaux de maturation (structu-
rale et électrophysiologique) du cerveau.
On doit noter que de nombreuses incertitudes sont présentes et les discussions sont
encore vives sur ce sujet très jeune, d’autant plus que les IRM fœtales sont une
technique de réalisation récente et d’ailleurs difficile. En outre, les juxtapositions
temporelles entre les caractéristiques IRM et les observations électrophysiologi-
ques ne peuvent être, en aucun cas, considérées comme des relations causales.
Cependant on notera quelques éléments significatifs :
– l’activité neuronale semble débuter vers la 12e semaine; elle précède logi-
quement la synaptogenèse;

1. S correspond ici à semaines de vie in utero.


Le cerveau en développement 67

Tableau 3.I. Évaluation comparée des caractéristiques EEG et IRM au cours de


la vie anténatale .
Période Anatomie/IRM Activité EEG
S4 Fermeture du tube neural Non documenté
S 5-6 Formation des vésicules primitives et Non documenté
différenciation
diencéphale/télencéphale
S7 Début de la multiplication cellulaire : les Non documenté
cellules quittent la paroi du tube neural;
formation de la zone germinative
S 8-10 Multiplications cellulaires (neurones, Non documenté
glie)
S 12 Début de la migration vers le Début de l’activité neuronale
manteau cortical Activité lente delta entre 0,5 et 2 Hz*
S 15 Début de la synaptogenèse
S 17 Multiplication très active (S 17 à 20) Activités dans le tronc cérébral et
l’hippocampe
S 19 Activités amples et rapides
S 20 Le cerveau est encore lisse. Le nombre Non documenté
de neurones est définitif**
S 22 Début de la gyration Non documenté
Début de la myélinisation (T1 en IRM)
S 23 Le tegmentum est myélinisé Peu ou pas documenté
S 24 et 25 Myélinisation du pallidum et de la Discontinuité du tracé
(prématurité capsule interne Ondes delta à très basse fréquence,
extrême) Sillons frontaux visibles antérieures et temporales
Formation des couches corticales V et VI
S 26 et 27 Début d’involution de la zone Plutôt moins de silences électriques,
(prématurité germinative accélération du tracé
extrême) Formation des noyaux gris centraux
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

Myélinisation du pédoncule et du
vermis
S 28 et 29 Différenciation des types cellulaires Début des delta brushes et apparition
(grande Vermis et pédoncules cérébelleux d’ondes thêta
prématurité) moyens myélinisés Ébauche d’une différenciation du
Couches corticales V, VI et IV constituées sommeil
S 30 et 31 À S 31, le bras postérieur des capsules Delta brushes
(grande internes et le noyau ventrolatéral du Différenciation de deux stades de
Prématurité) thalamus sont myélinisés sommeil
Apparition de la réactivité
Hypersynchronies thêta
S 32 et 33 Sillon insulaire visible à S 32 Distinction de deux stades de veille :
(prématurité) Branchement horizontal des neurones calme et agité
Tracé continu
S 34 Disparition de la zone germinative Préencoches frontales
(prématurité) Organisation en couches et colonnes Delta brushes occipitales
du cortex
Début de l’arborisation axonale et
dendritique
S 35 Le striatum et les gyri pré- et Encoches frontales
(prématurité) postcentraux myélinisés 
68 EEG du cerveau en développement

 Tableau 3.I. Évaluation comparée des caractéristiques EEG et IRM au cours de


la vie anténatale (suite).
Période Anatomie/IRM Activité EEG
Pallidum et bras postérieur de la Activités moyennes, accélération de
S 36 capsule interne myélinisés l’électrogenèse et augmentation de la
Début de la myélinisation du faisceau diversité des grapho-éléments
pyramidal et de la protubérance
S 37 et 38 Le bras antérieur des capsules internes Apparition de la dysrythmie lente
et les radiations optiques myélinisés antérieure
À S38, le centre semi-ovale et le noyau
VL du thalamus sont myélinisés
S 39, 40 et 41 Couches corticales V, VI, IV et III Tracé continu et activité moyenne
(terme) constituées Deux stades de sommeil lent
Deux stades de sommeil REM

* Résultats d’enregistrements effectués chez des fœtus lors d’interruptions de grossesses ou de césariennes et
ne pouvant être considérés qu’avec précautions.
** Supérieur à 30 milliards.

– les premières activités électriques organisées (rythmes) se produisent initia-


lement au niveau du tronc cérébral et des structures limbiques primitives;
– la limite actuelle de la viabilité (S24) correspond à la date d’apparition des
premières couches corticales;
– la réactivité et la mise en place des stades de sommeil s’effectuent quand la
myélinisation du thalamus commence;
– le caractère continu du tracé est acquis à la période où les branchements
horizontaux des neurones ont lieu (S32-33);
– l’apparition des rythmes rapides sur les ondes lentes constituant l’activité de
base (ce que l’on appelle les delta brushes) se produit quand, d’une part,
l’organisation en couches et colonnes du cortex, et d’autre part, lorsque l’arbo-
risation axonale et dendritique prennent place;
– le tracé continu, formé de nombreux rythmes différents, avec des états de
vigilance structurés survient lorsque le centre ovale est myélinisé et que les
couches corticales sont constituées;
– on peut, par ailleurs, penser que l’évolution des tracés pendant toute
l’enfance, avec des structures cérébrales macroscopiquement stables, est en
relation avec la plasticité cérébrale et le développement continu des
connexions neuronales;
– le cerveau immature contient un nombre considérable de gap junctions
(desmosomes; voir p. 32) assurant la coordination de l’activité électrique et
biochimique; dans le cerveau immature, l’activité épileptiforme non synap-
tique est majoritaire, conduisant à un couplage neuronal étendu (qui pourrait
sous-tendre les aspects très particuliers de l’EEG du prématuré, comme les
encoches frontales); la maturation cérébrale s’accompagne d’une réduction
considérable de ces gap junctions;
– la croissance extrêmement rapide du cerveau dans la période prénatale et
dans la petite enfance fait que les besoins métaboliques du cerveau sont consi-
dérables et atteignent 60 % du métabolisme basal; ils décroissent lentement
jusqu’à l’âge de 7 ans où ils atteignent les valeurs de l’adulte (20 %).
Le cerveau en développement 69

La maturation électrophysiologique peut être comprise comme la survenue


simultanée de deux types de phénomènes concomitants :
– une ontogenèse des grapho-éléments;
– une ontogenèse des états de vigilance.

Ontogenèse des grapho-éléments


L’ontogenèse des grapho-éléments présente trois caractéristiques (figures 3.1
et 3.2).
– une accélération progressive des fréquences constitutives du tracé;
– une complexification et un enrichissement croissant de l’EEG; initialement
discontinu, il devient continu et acquiert lentement une organisation topogra-
phique et réactionnelle représentative de l’âge adulte (après l’adolescence);
– une complexification qui s’organise selon un gradient occipitofrontal; initia-
lement, les activités électriques lentes prédominent dans les régions
postérieures (activités delta et thêta) et les éléments les plus lents et les plus
angulaires prédominent dans les régions antérieures; à 27-28 SA, l’activité
EEG prédomine nettement dans les régions postérieures. Les IRM faites à cet
âge montrent que le cerveau présente un développement très peu important
des structures frontales et qu’il est essentiellement un « cerveau pariéto-
occipitotemporal »; puis la croissance et la maturation vont conduire à une
complexification et une évolution antérieure de ces activités; à 35 SA, l’appa-
rition des encoches frontales est corrélative à la fois de la présence de lobes
frontaux nettement plus développés, avec des circonvolutions, et du début de
la myélinisation des gyri pré- et postfrontaux.

Ontogenèse des états de vigilance et du sommeil


Ontogenèse des états de vigilance
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

L’ontogenèse des états de vigilance s’effectue par une structuration de l’orga-


nisation progressive de la veille et du sommeil et, au cours du sommeil, par
l’organisation progressive du sommeil sans mouvements oculaires (sommeil
lent) en stades, avec réduction simultanée de la proportion du sommeil REM
(sommeil paradoxal).
La maturation de la différenciation et de l’organisation des états de veille et de
sommeil constitue un marqueur de développement tout aussi important que la
modification de la morphologie et de l’organisation topographique des tracés.
Trois étapes majeures marquent cette évolution (figures 3.3, 3.4 et 3.5) :
– l’apparition d’une différenciation veille-sommeil (en fait de deux types de
sommeil) autour de 30 SA; lors de cette étape et jusqu’à la seconde étape, le
sommeil agité (avec mouvements oculaires) précédera toujours l’installation
du sommeil lent;
– l’installation des fuseaux du sommeil qui a lieu vers 4 à 6 semaines après la
naissance et qui traduit très probablement une maturation de certains systèmes
thalamiques réticulaires à projection corticale; un bouleversement de la
séquence d’installation du sommeil se produit également à cette période;
70 EEG du cerveau en développement

Discontinuité
Prématurité Asynchronie hémisphérique
extrême Activité de base : delta postérieur (lent)
(24-27 semaines) alternant avec du thêta
Pas de différenciation entre veille et sommeil
Pas de réactivité

Discontinuité
Asynchronie hémisphérique
Activité de base : delta diffus (lent)
Grande avec du thêta en bouffées plus abondant
prématurité Delta brushes
(28-31 semaines) (delta avec ondes à 13-16 Hz superposées)
Réactivité apparaissant à S 31
Différenciation veille / sommeil
(très discontinu)
Continuité
Début de synchronie
Activité de base : delta diffus (moins lent)
Prématurité et thêta
(32-35 semaines) Différenciation entre veille calme et agitée
et sommeil calme et agité
Encoches frontales

Fig. 3.1. Ontogenèse des grapho-éléments au cours de la prématurité.


SL = sommeil lent; SC = sommeil calme; SA = sommeil agité.

Continuité et synchronie
Activité de base : thêta.
Activité moyenne de veille (activités mêlées)
Terme Raréfaction des delta brushes
(36-41 semaines) Rares encoches frontales
Dysrythmie lente antérieure en veille
et en sommeil agité
Deux stades de SC et deux stades de SA

Naissance à 3 mois Apparition des fuseaux du sommeil

Rythme thêta de base


Hypersynchronie hypnagogique
3 mois à 1 an
Apparition des K complexes
et des pointes vertex

1 à 3 ans Rythme de base : alpha lent.


Apparition du rythme mu

Le rythme alpha de base est installé


3 à 5 ans Apparition des OLP

Fig. 3.2. Ontogenèse des grapho-éléments au terme et à partir de la naissance.


SL = sommeil lent; SC = sommeil calme; SA = sommeil agité; OLP = ondes
lentes postérieures.
Le cerveau en développement 71

Organisation Veille-Sommeil Structuration du Sommeil

AVANT LA
NAISSANCE
S 24-25 Pas de cycles veille-sommeil Pas de structuration du sommeil

S 28-29 Ébauche d’une différenciation V/S Pas de structuration du sommeil

S 30-31 Le sommeil se différencie en Sommeil REM = 40 à 50 %


• sommeil calme ( -> non REM) du temps total de sommeil,
• sommeil agité (-> REM) en périodes de 40 à 45 minutes

S 32-33 La veille se différencie en


• veille calme
• veille agitée
NAISSANCE

Fig. 3.3. Ontogenèse de l’organisation veille-sommeil avant la naissance.

– l’hypersynchronie hypnagogique (voir chap. 2, p. 28-29 : organisation des


fuseaux du sommeil et processus de synchronisation) devient le mode d’entrée
dans le sommeil lent, qui désormais précédera toujours le sommeil REM
(paradoxal).

Ontogenèse du sommeil
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

Les caractéristiques de la maturation du sommeil peuvent être résumées de la


manière suivante (figures 3.3 et 3.4) :
– l’apparition d’un sommeil REM, futur sommeil paradoxal s’effectue in
utero;
– la proportion de ce sommeil REM dans le temps de sommeil total va
décroître jusqu’à la fin de la première année de la vie;
– la structuration du sommeil lent en quatre stades sera terminée à la fin de la
première année, même si, initialement les stades 3 et 4 sont proportionnelle-
ment plus représentés;
– l’apparition à 5 mois de l’hypersynchronie hypnagogique fera rentrer
l’enfant dans le type d’organisation veille/sommeil de l’adulte (figure 3.5);
– entre la naissance et l’âge de 4 ans on observe une diminution du nombre
des alternances veille-sommeil, pour atteindre vers 4 ans la configuration
adulte;
– la diminution de la durée totale du sommeil lent et l’augmentation de la
durée totale de la veille continueront tout au long de la vie après l’âge de 1 an.
72 EEG du cerveau en développement

Organisation Veille-Sommeil Structuration du Sommeil

NAISSANCE 7 périodes de sommeil (total 17 h 30) Pas d’organisation du sommeil lent


équitablement réparties entre nuit en stades.
et jour et séparées par des périodes Le pourcentage de REM décroît
de 40 à 60 minutes de veille. (maximum 45 %).

2/3 mois Apparition des fuseaux du sommeil.

5/6 mois Apparition des K complexes.


Hypersynchronie hypnagogique.

12 mois 2 périodes de sommeil diurne Différence entre endormissement


(fin de matinée, et milieu d’après midi) et sommeil.
séparées par 2 heures de veille. Sommeil non REM en 4 stades dont 30 à 45
Sommeil nocturne de 19 à 5 h (10 h). en stades 3 et 4 (idem adulte).
Sommeil REM (30 à 45 % du temps
de sommeil total, en périodes
de 50 à 60 minutes).
Un seul réveil nocturne.

Après 12 mois Fragmentation du sommeil


avec accroissement du nombre d’éveils
et diminution du temps en sommeil lent
4 ans 1 seule période de sommeil diurne (stades 3 et 4).
(milieu d’après midi = sieste).
Sommeil nocturne de 18 à 6 h (12 h).

Adolescents,
adultes jeunes Périodes des stades 3 et 4 moins nombreuses
et prédominant au milieu de la nuit.
Sommeil lent léger mieux représenté.
Éveils nocturnes entre 3e et 6e heure,
qui sont un allègement du sommeil.

Fig. 3.4. Ontogenèse de l’organisation veille-sommeil après la naissance.

PROBLÈMES TECHNIQUES SPÉCIFIQUES


DE L’ENREGISTREMENT CHEZ L’ENFANT
Les conditions d’enregistrement des EEG chez l’enfant diffèrent beaucoup de
celles de l’adulte en raison de la taille des sujets, de la fragilité de leur peau et
du type de tracé que l’on veut obtenir. L’importance de la structure du cycle
veille-sommeil pour la détermination de la normalité du tracé impose que les
paramètres physiologiques nécessaires à la différenciation des différents états
de vigilance soient disponibles. Ce sont donc des polygraphies qui sont réali-
sées jusqu’à l’âge de 12 mois.
De plus, le nombre d’électrodes dépend de la taille du crâne. Il est inférieur à
celui de l’adulte. Les électrodes sont des cupules avec un gel collées par de la
pâte et maintenues par un filet ou Surgifix®.
EEG normal du prématuré 73

S 24-25 Pas de structuration du sommeil

S 30-31 V SA SC

S 30-31 VA VC SA SC

VA VC SA M SA L SC alternant SC ample
S 38 Terme

6 semaines VA VC SA M SA L SC alternant + fuseaux SC ample sans fuseaux

5 mois VA VC HSH SL fuseaux SC profond SP

Adulte Stade I Stade II Stade IV

Fig. 3.5. Ontogenèse des transitions entre états de vigilance. HSH : hypersyn-
chronie hypnagogique. L’apparition de cette dernière, comme celle des
fuseaux, constituent des indices majeurs de la maturation des états de vigi-
lance et du système thalamocortical.

Ce n’est que vers l’âge de 5 ans que l’on pourra faire des enregistrements EEG
avec un protocole proche de celui de l’adulte.
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

EEG NORMAL DU PRÉMATURÉ


La lecture d’un tracé de nouveau-né exige, d’une part, de bien connaître l’âge
gestationnel ou de déterminer l’âge conceptionnel (figure 3.6) et nécessite,
d’autre part, d’établir une bonne différenciation des différents états de veille et
de sommeil. On distingue chez l’enfant deux types de veille : la veille calme et
la veille agitée avec pleurs et mouvements. On distingue également deux types
de sommeil : le sommeil agité et le sommeil calme. L’étude des mouvements
respiratoires est utile pour faire cette différenciation.
L’évolution des tracés se fait en quatre étapes, selon le degré de prématurité
(voir figures 3.1 et 3.2). Ces quatre étapes sont elles-mêmes séparées en
semaines ou groupes de semaines qui correspondent aux véritables stades de
l’évolution morphologique du tracé.
D’une certaine manière, les enregistrements réalisés chez les prématurés
normaux nous indiquent comment s’effectue la maturation neurophysiologique
normale in utero. Cette information ne serait pas disponible sans les accouche-
ments avant le terme et les progrès récents de la réanimation néonatale.
74 EEG du cerveau en développement

Dernier stade
(terme)
(36-41 semaines)
Prématurité
(32-35 semaines)
Grande
prématurité
(28-31 semaines)
Dernières Naissance
Prématurité
règles (41 semaines)
extrême
Conception (24-27 semaines)

Âge gestationnel (AG)

Âge conceptionnel (AC)

Semaines de vie
après naissance

Fig. 3.6. L’âge gestationnel (AG) correspond à l’âge calculé à partir du premier
jour des dernières règles.
L’âge conceptionnel (AC), souvent appelé âge corrigé, correspond à l’âge
gestationnel (AG) auquel on ajoute le nombre de jours ou de semaines de
vie après la naissance.

Prématurité extrême : 24 à 27 semaines


Chez ces prématurés, le cerveau est particulièrement immature. C’est à cette
période qu’apparaissent les sillons frontaux et cingulaires, ainsi que les
premières couches corticales V et VI (couche pyramidale et multiforme des
cellules effectrices corticales se projetant sur les structures sous-corticales).
Le tracé à cet âge, relativement pauvre, est caractérisé par (tracé n° 1) :
– une électrogenèse discontinue faite de bouffées delta surchargées ou alter-
nant avec du thêta entrecoupées par des dépressions dont la durée maximale
est de 30 secondes;
– une absence totale de différenciation de stades de veille ou de sommeil;
– une aréactivité aux stimulations.

Grande prématurité : 28 à 31 semaines


À ce stade, dans lequel, notamment, le thalamus ainsi que le cervelet se myéli-
nisent et où la couche IV (couche granulaire interne recevant les afférences
thalamocorticales) apparaît, le tracé est caractérisé par (tracé n° 2) :
EEG normal du prématuré 75

– une discontinuité moins marquée; l’activité de fond, encore discontinue, est


constituée de bouffées delta surchargées en rythmes rapides correspondant au
delta brush et associée à des activités thêta au niveau temporal moyen qui
constituent un bon marqueur de la maturation; les périodes de dépression
n’excèdent pas les 20 secondes;
– des bouffées d’activités thêta occipitales (Short Thêta on the Occipitals in
Premature ou STOPS);
– autour de 31 SA apparition d’une réactivité et d’une différenciation veille-
sommeil liée à l’installation du sommeil REM.

Prématurité simple : 32 à 35 semaines


À cette période, l’organisation en couches et colonnes du cortex s’établit et
l’arborisation axonale et dendritique permet le branchement horizontal des
neurones. C’est un moment de la maturation cérébrale pendant lequel s’instal-
lent des modifications importantes essentiellement représentées par :
– l’électrogenèse, continue en veille et en sommeil agité, est plus rapide et
réactive; elle conserve une discontinuité en sommeil calme;
– les delta brushes surviennent en bouffées synchrones sur les régions occipi-
tales à 32 SA.
– autour de 35 SA, apparaît une nouvelle figure de maturation : la pré-encoche
et l’encoche frontale.

Dernier stade 36 à 41 semaines (terme)


Le terme de la grossesse survient en général entre la 38e et la 41e semaine
d’âge gestationnel. Cette dernière période de maturation est caractérisée par
les points suivants (tracés n° 3 et 4) :
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

– jusqu’à 38 SA, l’électrogenèse est continue, réactive, de fréquence thêta


prédominante en veille et en sommeil agité (SA) avec discontinuité en
sommeil calme (SC); les encoches frontales sont plus nombreuses;
– à partir de 40 SA, on différencie deux types de sommeil agité : 1) un
sommeil agité de type M (mean, moyenné, mélangé) en raison de la présence
d’un mélange d’activités alpha, thêta, delta et bêta; 2) un sommeil agité de
type LVI (Low Voltage Intensity); on différencie également deux types de
sommeil calme : le sommeil calme dit alternant (TA) 1 et un sommeil calme dit
HVI (Hight Voltage Intensity) caractérisé par une activité très ample;
– les encoches frontales perdent leur aspect diphasique et il apparaît des bouf-
fées de dysrythmie lente antérieure (DLA).

1. La différence entre tracé discontinu et tracé alternant est la suivante : le tracé discontinu est
formé de bouffées séparées de silences électriques (« aspect montagne-plaine »), alors que dans le
tracé alternant, les bouffées lentes sont séparées par des périodes d’activité de moindre amplitude,
ne correspondant pas à des silences électriques (« aspect montagne-colline »).
76 EEG du cerveau en développement

Datation de l’âge électrophysiologique, EEG


et retard de maturation
Nous avons signalé, dans l’introduction, que l’un des buts de l’EEG en néona-
tologie était de préciser si l’enfant présentait ou non un retard de maturation
cérébrale. En raison des variations très rapides de l’électrogenèse (d’une
semaine à l’autre), l’EEG est le moyen le moins invasif et le moins coûteux
pour déterminer la complétion de cette maturation, en fonction de l’âge du
bébé prématuré.
Dans un contexte de réanimation, chez le très grand prématuré, l’EEG permet
également de surveiller (à moindres frais) l’évolution neurologique de l’enfant
et en fin de compte de disposer d’éléments pronostiques pour son devenir.
Les éléments neurophysiologiques caractéristiques de l’évolution de la matu-
ration sont présentés dans le tableau 3.II. Cette évolution, on l’a vu, permet

Tableau 3.II. Modifications et configurations significatives


des tracés EEG permettant la datation de la maturation cérébrale
chez l’enfant prématuré jusqu’au terme.

Période Marqueur EEG de maturation


S 24 et 25 Pas de stades de veille ou de sommeil. Pas de
réactivité. Discontinuité du tracé (silences
Prématurité électriques < 30 s)
extrême S 26 et 27 Silences électriques plus courts (< 20 s)
Ondes thêta temporales plus nombreuses et
diffuses
S 28 et 29 Ondes delta de grande amplitude avec rythmes
rapides
Ébauche d’apparition d’une différenciation du
Grande sommeil
prématurité S 30 et 31 Apparition des delta brushes, occipitales et
pariétales
Apparition de la réactivité
Différenciation du sommeil (calme et agité)
S 32 et 33 Deux types de veille : calme et agitée
Prématurité S 34 Pré-encoches frontales
S 35 Encoches frontales
S 36 Activité moyenne (fréquences mélangées)
S 37 et 38 Dysrythmie lente antérieure
Terme S 39, 40 et 41 Raréfaction des delta brushes
Bouffées thêta rolandiques
Deux types de sommeil calme (SA1, SA2) et
agité (TA, LVI)
Évolution du tracé de la naissance à l’âge adulte 77

une datation de l’état de maturation cérébrale, un retard de maturation se


traduisant par :
– la persistance de grapho-éléments d’un stade précédant et qui devraient
avoir disparu;
– et/ou par l’absence de figures EEG normales attendues pour l’âge
gestationnel;
– et par une mauvaise organisation des états de vigilance (veille-sommeil), par
rapport à ce qui est attendu pour l’âge.

ÉVOLUTION DU TRACÉ DE LA NAISSANCE


À L’ÂGE ADULTE
Après la naissance, les activités électriques cérébrales de base vont évoluer
vers une accélération progressive qui culminera en l’apparition du rythme
alpha. Par ailleurs, c’est entre 2 et 6 mois que l’organisation des états de vigi-
lance va subir une réorganisation considérable.

EEG normal du nouveau-né, avant 3 mois


Chez les enfants âgés de moins de 3 mois, l’activité de base qui prédomine
pendant la veille est une activité peu différente de celle du terme. L’élément
principal de cette maturation est l’apparition dès la 6e semaine de vie des
fuseaux qui va annoncer une modification considérable de l’organisation du
sommeil. Leur absence, après 3 mois, indique une grave anomalie de la
maturation.
À cette période, l’EEG présente les caractéristiques suivantes (tracé n° 4) :
– l’activité de fond appartient à la bande thêta, d’aspect irrégulier, mélangée à
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

des activités delta; elle est également intriquée avec des activités plus rapides,
le tout constituant l’activité moyenne;
– en sommeil calme, le tracé peut être alternant ou constitué par une activité
très ample et diffuse; cet aspect alternant ne persiste pas en général au-delà de
21 jours de vie, même s’il peut parfois se voir jusqu’à 1 mois et demi; l’EEG
de sommeil calme d’un nouveau-né à terme présente une discontinuité transi-
toire physiologique qui n’existe que dans ce type de sommeil et qu’il faut
différencier d’une discontinuité qui serait présente tout au long du tracé et qui
traduirait alors une souffrance cérébrale;
– entre 6 et 8 semaines de vie, les fuseaux du sommeil apparaissent (tracé
n° 5); leur absence ou leur asymétrie constitue un élément très péjoratif.

Évolution de l’EEG normal entre 3 et 12 mois


La transition entre la période néonatale immédiate et la petite enfance est
caractérisée également :
– par l’accélération progressive de l’activité de base pendant la veille calme;
78 EEG du cerveau en développement

– et par l’apparition de l’hypersynchronie hypnagogique qui témoigne de la


réorganisation des cycles de sommeil.
Les caractéristiques de cette période sont les suivantes :
– dès l’âge de 3 à 4 mois, le rythme de base, plus rapide, est une activité thêta
à 5-6 Hz que l’on retrouve au niveau des régions postérieures; il est renforcé
par la fermeture passive des yeux;
– l’hypersynchronie hypnagogique, caractéristique de l’endormissement de
ces enfants, apparaît aux environs de 5 mois (tracé n° 5);
– entre 6 et 12 mois de vie, l’amplitude des fuseaux du sommeil et la durée
des salves diminuent mais leur nombre augmente; l’absence de fuseaux au-
delà de 3 mois de vie correspond à une anomalie importante de la maturation
cérébrale;
– les pointes vertex ainsi que les K-complexes (fuseau associé à une pointe
vertex) apparaissent aux environs du 5e mois de vie; ils sont facilités par les
bruits;
– pendant les douze premiers mois de vie, le délai d’apparition de la première
période du sommeil REM augmente progressivement.

Évolution de l’EEG normal entre 1 et 3 ans


Durant cette période, l’accélération de la fréquence du rythme de base se
poursuit. Le tracé possède alors les caractéristiques suivantes (tracé n° 5) :
– l’activité de base varie d’un thêta rapide à 6-7 Hz autour de 2 ans à un
subalpha et un alpha lent à 7-8 Hz aux environs de 3 ans; elle conserve sa
prédominance postérieure et la réactivité à l’ouverture des yeux est de plus en
plus marquée;
– l’hypersynchronie hypnagogique d’endormissement demeure;
– le sommeil lent est caractérisé par l’apparition d’une activité lente posté-
rieure diffuse.

Évolution de l’EEG normal entre 3 et 5 ans


Durant cette période l’évolution des tracés est la suivante :
– le rythme de fond est un rythme alpha de 8 Hz qui se renforce lorsque
l’enfant ferme les yeux;
– l’activité de fond est entrecoupée par la survenue d’ondes lentes physiologi-
ques (parfois d’un mélange pointes-ondes lentes); ces ondes lentes sont
dénommées ondes lentes postérieures (OLP) ou ondes pi; il ne faut pas les
confondre avec une activité lente de très grande amplitude ou d’aspect ryth-
mique trop marqué constituant un pattern anormal; la coexistence d’un rythme
de fond alpha postérieur ample et d’une activité lente (OLP) constitue la
caractéristique d’un enregistrement réalisé chez un enfant de cet âge (tracé
n° 6);
– le rythme mu rolandique apparaît; sa réactivité peut être testée en deman-
dant à l’enfant de serrer les poings ou de bouger les orteils;
Évolution du tracé de la naissance à l’âge adulte 79

– l’hyperpnée entraîne l’apparition caractéristique d’une hypersynchronie


neuronale (voir tracé n° 7); cet important ralentissement avec hypersyn-
chronie n’est pas pathologique dans la mesure où il disparaît à l’arrêt de
l’épreuve et où il n’apparaît aucune anomalie de la série comitiale ni aucune
asymétrie à son décours;
– l’hypersynchronie hypnagogique disparaît le plus souvent au-delà de l’âge
de 3 ans.

Évolution de l’EEG normal entre 6 et 12 ans


Les caractéristiques à cet âge sont les suivantes (tracés n° 6 et 7) :
– l’électrogenèse de base est constituée par un rythme alpha localisé au niveau
des régions postérieures, réactif à l’ouverture des yeux et dont la fréquence de
survenue varie en fonction de l’âge entre 9 Hz à 7 ans, 10 Hz présente à
10 ans;
– les OLP présentes à 6 ans disparaissent progressivement à partir de 10 ans;
elles peuvent prendre un aspect plus rythmique, non pathologique;
– il existe au niveau des régions antérieures chez les enfants de 6 à 12 ans une
activité thêta peu abondante qui revêt parfois un aspect rythmique.
On doit noter cependant, que même si quelques différences ont pu être obser-
vées entre filles et garçons, ou entre sujets anxieux et sujets plus calmes,
l’EEG ne prédit en aucune manière, chez l’enfant sans pathologie, les capa-
cités intellectuelles du futur adulte.

Évolution de l’EEG normal entre 12 et 20 ans


Cette tranche d’âge se caractérise par la survenue d’événements importants
qui sont liés au passage de l’enfance à l’adolescence, période pendant laquelle
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

surviennent les bouleversements biologiques marqués de la puberté, en même


temps que s’accélère le développement intellectuel. Étonnamment, cette très
profonde évolution endocrinienne et morphologique ne s’accompagne pas, au
niveau neurophysiologique, de modifications très remarquables.
Les caractéristiques de cette période sont les suivantes :
– le tracé de repos est constitué d’un rythme de base appartenant à la bande
alpha à 10 Hz, assez ample et parfois aigu et d’amplitude asymétrique aux
dépens de l’hémisphère gauche; des ondes lentes de fréquence thêta et delta
bien représentées persistent, mélangées au rythme alpha (OLP) dont la prédo-
minance postérieure et l’abondance sont moindres;
– on voit apparaître à cette période des ondes lentes occipitales (delta) angu-
laires survenant lors de l’ouverture des yeux, en fonction de l’éclairage; ce
sont les ondes lambda (tableau 4.I);
– une activité rythmique à 4 Hz enregistrée sur le vertex se voit surtout au
décours d’un enregistrement de veille chez des sujets neurotoniques.
À 20 ans, en général, le tracé est un tracé d’adulte, en dehors d’une plus
grande sensibilité à l’hyperpnée que chez la personne plus âgée.
80 EEG du cerveau en développement

CE QU’IL FAUT RETENIR

• La maturation du cerveau humain est un processus long et complexe. La


maturation de l’activité électrique cérébrale est plus longue que la matu-
ration anatomique macroscopique (IRM), puisque les caractéristiques
neurophysiologiques du cerveau adulte ne sont pas présentes avant
20 ans.
• La maturation neurophysiologique procède à la fois de la maturation de
la forme et de l’organisation des grapho-éléments eux-mêmes (qui se
complexifient et se développent selon un gradient postéro-antérieur)
mais également de la maturation des états de vigilance et de leur
organisation.
• En raison de l’évolution très rapide des caractéristiques de l’EEG entre la
24e semaine in utero et la naissance, une véritable datation de la matura-
tion peut être réalisée sur la base de marqueurs électrophysiologiques
spécifiques de chaque quinzaine de vie fœtale.
• Un moment critique de la maturation cérébrale du nourrisson est l’appa-
rition des fuseaux du sommeil (de 6 semaines à 3 mois) et des pointes
vertex ainsi que celle de l’hypersynchronie hypnagogique (5-6 mois). À ce
moment-là, les transitions entre les états de vigilance atteignent une
configuration qui sera celle de l’adulte, même si la durée de chaque état
de vigilance ou des divers stades du sommeil évoluera ultérieurement.
• Après la naissance et pendant l’enfance, le tracé EEG montre une évolu-
tion significative, puisque le rythme alpha n’est installé que vers 5 ans et
que des caractéristiques propres à l’enfance ne sont plus retrouvées chez
l’adulte (comme les ondes lentes postérieures).
4 BASES DE LA SÉMIOLOGIE
ET DE L’INTERPRÉTATION
DE L’EEG

Comme nous l’avons vu dans le chapitre 2, l’EEG est une image (dynamique)
de l’état global des générateurs oscillants corticaux et de leur réactivité aux
stimulations de l’environnement, sous l’effet des systèmes sous-corticaux. De
ces variations dynamiques, émergent des rythmes de fond (activité dite basale)
modifiés par les variations des états de vigilance. La non-stationnarité de
l’EEG en est l’une des caractéristiques fondamentales et l’on n’insistera
jamais assez sur le caractère complexe, fluctuant et chaotique de l’activité
électrique cérébrale (voir p. 14-17). C’est d’ailleurs pour cette raison que l’on
réalise des enregistrements d’une durée minimale de 20 minutes.
La majorité des ouvrages d’EEG décrivent les activités EEG normales ou
pathologiques puis analysent chaque pathologie et ses conséquences sur
l’EEG. Nous nous éloignerons de cette démarche pour tenter de trouver une
logique interne à la genèse des grapho-éléments. Cette position nous conduira
à souligner certains aspects de la sémiologie de l’EEG et plus particulièrement
la notion de souffrance cérébrale (et d’encéphalopathie).

QU’EST-CE QU’UN TRACÉ EEG ANORMAL?


Avant d’affirmer une anomalie de l’électrogenèse, il convient d’éliminer les
artéfacts et les activités inhabituelles.
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

Artéfacts
L’interprétation de l’EEG est rendue parfois très difficile par la présence
d’artéfacts dont certains persistent malgré l’utilisation de différents filtres
(qui, par ailleurs, modifient le tracé lui-même). Nous ne décrirons pas ici en
détail les différents artéfacts mais l’on doit être attentif à cette particularité de
la méthode 1 : l’EEG est un examen d’interprétation délicate et, parfois, on ne
peut aisément trancher entre artéfact et grapho-élément pathologique.
Les artéfacts musculaires, les grandes déviations de la ligne de base dues aux
mouvements des patients, les artéfacts dus à la présence d’une fréquence de
50 Hz (courant électrique alternatif d’alimentation ou « secteur ») sont
d’élimination facile (souvent, il suffit de regarder l’ECG qui est également
contaminé par les variations artéfactuelles). Il faut savoir, par exemple, que

1. Les principaux artéfacts sont mentionnés dans les tracés présentés à la fin du livre.
82 Bases de la sémiologie et de l’interprétation de l’EEG

dans certaines ambiances avec de nombreux matériels électriques (réanima-


tions), les appareillages captent des fréquences du courant EDF qui dégradent
systématiquement les tracés.
Plus difficiles à détecter sont certains artéfacts de mouvements oculaires,
particulièrement des petites saccades rapides, des battements d’artère (ici
l’ECG est utile) ou bien des mâchonnements (ou la succion chez les enfants)
qui ressemblent à des ondes lentes angulaires rythmiques et sont susceptibles
d’être pris pour des activités paroxystiques.
Il existe enfin des artéfacts qui ressemblent beaucoup à des activités paroxysti-
ques (pointes, pointes-ondes) et dont parfois la différence avec une vraie
activité est ténue. La technologie numérique, très sensible en raison des ampli-
ficateurs qui l’équipent, semble multiplier les artéfacts de ce type. Ils sont
d’autant plus nombreux que le signal provenant du cerveau est faible (comas
profonds…).
On aura une idée de l’importance que peuvent prendre certains artéfacts quand
on saura que les auteurs de cet ouvrage connaissent le cas d’un médecin
normalement compétent qui a interprété un « enregistrement » sur un appareil
qui n’avait jamais été branché au malade!

Grapho-éléments inhabituels, mais non anormaux


On peut dire qu’il n’y a pas d’EEG normal type. Il existe seulement des
aspects normaux de l’EEG. Les rythmes physiologiques ne sont pas toujours
présents dans les tracés et de grandes variations morphologiques peuvent être
observées. Ces variations morphologiques des tracés constituent les rythmes
inhabituels, mais non anormaux (tableau 4.I).
Il existe même des activités paroxystiques normales comme par exemple les
SREDA (Sub Clinical Rythm Electroencephalographic Discharges of Adult)
présentes après 50 ans, décharges de pointes lentes centropariétales (à 1 Hz),
d’amplitude d’emblée maximale et se rapprochant progressivement pour
former un rythme thêta. Ces activités paroxystiques normales inhabituelles
réagissent parfaitement à l’ouverture des yeux, sont peu ou pas renforcées par
l’HPN et sont atténuées en général par la SLI. Elles ne doivent pas être inter-
prétées comme des activités paroxystiques qui n’ont pas en général ces
caractéristiques. Leur origine physiologique est inconnue.

Variations physiologiques de la vigilance


Les états de vigilance lors de l’enregistrement du tracé sont susceptibles de
fluctuer pendant le tracé EEG, ainsi que nous l’avons noté p. 28. Cependant,
ces fluctuations sont très informatives sur l’état physiologique du patient.
Deux situations se présentent. Dans la première, au cours de la veille calme,
yeux fermés, l’activité alpha se fragmente, disparaît et se trouve remplacée par
une activité thêta. Le patient somnole, il est en stade 1 de sommeil. Une stimu-
lation externe fait réapparaître immédiatement l’activité alpha et ceci est
reproductible. Si l’on voit apparaître des pointes vertex ou des fuseaux du
sommeil, le patient entre en stade 2 du sommeil. Il est très rare qu’il atteigne
Qu’est-ce qu’un tracé EEG anormal ? 83

Tableau 4.I. Activités EEG inhabituelles, non paroxystiques.

Type d’anomalie Ne pas confondre


Caractéristiques
(fréquence) avec

Tracé « plat » ou Identique à l’activité bêta. L’HPN Le tracé nul de la


« microvolté » synchronise souvent le tracé et fait mort cérébrale
(10 % des sujets) apparaître un rythme alpha.

Rythme rapide Fréquences plus élevées (> 20 Hz) et Le rythme bêta


physiologique amplitude supérieure au rythme (régions moyennes)
(Exceptionnel) bêta (25 µV). Non associé à un ou rythmes rapides
rythme alpha. médicamenteux
Variante lente du Le rythme alpha est dédoublé en Le rythme thêta
rythme alpha sous-harmoniques de fréquence de (angulaire)
la bande thêta. Aspect faussement
angulaire. Possède les
caractéristiques topographiques et
la réactivité du rythme alpha.
Variante rapide du Rythme alpha à 11-13 Hz. Possède Un rythme bêta
rythme alpha les caractéristiques topographiques
et la réactivité du rythme alpha.
Rythme mu ou Fréquence entre 7 et 11 Hz, Un rythme alpha
rolandique en centropariétal, arciforme et bloqué antérieur
arceau par le serrage des poings mais non
(10 % des sujets) voir par l’ouverture des yeux.
tracé n° 9
Ondes lentes Ondes lentes type delta (50 à Les ondes lentes
postérieures (OLP) 200 µV), bilatérales, de même pathologiques,
ou ondes Pi. topographie que l’activité alpha pointes lentes et
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

(20 % chez l’adulte (occipitale) mais asymétriques. Elles pointes-ondes lentes


jeune) voir tracé n° 6 se superposent à l’activité de fond qui ne sont jamais
et sont bloquées à l’ouverture des associés à un rythme
yeux (+++). Peuvent prendre un alpha ample et
aspect de pointe lente ou de pointe- abondant.
onde. Elles sont accentuées par
l’HPN et disparaissent lors de la SLI.
Ondes lambda (70 % Pointes occipitales survenant lors de Les pointes
des sujets entre 18 et l’ouverture des yeux, seulement à épileptiques
30 ans) l’occasion des saccades oculaires
d’investigation, sur des objets bien
contrastés. Faible amplitude.
Rythme du volet ou Apparaissent chez des malades Les figures
de brèche ayant eu un « volet » crânien. C’est paroxystiques
un rythme mu avec des
composantes plus rapides et des
aspects angulaires, en regard de la
zone opérée.
84 Bases de la sémiologie et de l’interprétation de l’EEG

des stades de sommeil plus profond. Ce n’est en aucun cas un ralentissement


pathologique de l’électrogenèse.
Dans le second cas (assez fréquent), on observe un comportement de somno-
lence accompagnée parfois de bouffées diffuses d’ondes delta de brève durée
sans focalisation ou asymétrie. Ceci correspond à un sommeil pathologique
(stades > 2), notamment parce que des activités lentes de sommeil n’ont pas
été introduites par des fuseaux.
Ceci souligne le rôle central des fuseaux dans la définition d’une variation de
vigilance physiologique ou pathologique. On verra que, dans les comas, la
persistance de ces fuseaux (qui traduisent un bon fonctionnement thalamique)
est un élément de bon pronostic. Plus généralement, les fuseaux du sommeil
sont un témoin de bon fonctionnement de la régulation thalamique des acti-
vités corticales.

EEG anormal
Une fois les artéfacts et les grapho-éléments inhabituels, mais non anormaux
reconnus, et à la condition de la réalisation d’un examen complet avec toutes
les activations (voir p. 13-14), sur la base des activités physiologiques décrites
p. 24-28, on peut considérer que l’EEG pathologique est caractérisé par
plusieurs phénomènes pouvant survenir en même temps, pour un état de vigi-
lance donné :
– la disparition d’un rythme physiologique;
– la modification en fréquence (ralentissement ou accélération) des activités
rythmiques de base;
– la modification ou l’asymétrie de l’intensité des activités rythmiques (en
absence d’artéfact d’origine technique);
– la modification des caractéristiques topographiques physiologiques des acti-
vités rythmiques (désorganisation des activités);
– l’apparition de nouveaux grapho-éléments, soit de type paroxystique, soit de
type onde lente, dont la présence est anormale compte tenu de l’état de vigi-
lance ou dont la morphologie et/ou la configuration de survenue sont
anormales;
– la modification de la réactivité, signant une altération des systèmes assurant
la régulation de la vigilance;
– des réponses anormales ou excessives aux épreuves d’activation.
Ainsi, une électrogenèse anormale peut être désorganisée; elle peut être non
réactive; elle peut être asymétrique; elle peut être ralentie; elle peut être
déprimée; elle peut enfin inclure des grapho-éléments paroxystiques. Ces
différentes situations peuvent être observées de manière non exclusive et
n’épuisent pas toutes les configurations (figure 4.1). Ceci constitue une sémio-
logie complexe, d’autant plus déroutante que l’on a l’habitude d’interpréter
des variations d’amplitude d’un signal plutôt que ses variations fréquentielles
(temporelles).
Quelques points supplémentaires doivent être signalés : 
Qu’est-ce qu’un tracé EEG anormal ? 85

ACTIVITÉ ÉLECTRIQUE

RÉACTIVE

NON REACTIVE
NON RALENTIE
(rythme alpha)

ORGANISÉE AVEC PROCESSUS


RALENTIE
SLI ± DÉSORGANISATION PAROXYSTIQUES
HPN

Aggravée par Aggravés


DÉSYNCHRONISÉE HPN et SLI par HPN et SLI (++)
(attention +++ , stress) DÉPRIMÉE
DÉSORGANISÉE (faible amplitude)

DÉSORGANISÉE Diminution Synchronisation anormale « Hypersynchronie »


des neurones actifs de l’activité neuronale, pathologique
déafférentation corticale

ÉLECTROGÉNÈSE
REMANIÉE :
Changement de l’organisation SOUFFRANCE
fonctionnelle : alcoolisme, CÉRÉBRALE
épilepsie ancienne,
thérapeutique psychotrope
au long cours

Fig. 4.1. Principales classes de variations de l’activité électrique cérébrale. En


© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

italique, dans les cercles gris, activité normale.

– il est utile, en analysant l’électrogenèse, d’avoir à l’esprit le schéma anato-


mique simplifié de la figure 2.7, p. 44;
– on comprend alors immédiatement l’importance de l’évaluation de la réacti-
vité indépendamment de la structure et de la topographie des rythmes
cérébraux; la réactivité donne une idée de la fonctionnalité de l’axe réticulo-
thalamique et des systèmes thalamocorticaux spécifiques;
– une électrogenèse au début d’un EEG peut sembler pathologique
(désynchronisation…); c’est seulement le déroulement complet de l’examen
qui permet de conclure; par exemple, les épreuves d’activation comme
l’hyperpnée ou la SLI (tableau 4.II) peuvent permettre d’observer la réorgani-
sation tardive d’une activité qui apparaissait au départ complètement
désorganisée (ou désynchronisée) comme c’est souvent le cas chez les
personnes anxieuses (figure 4.1).
Tableau 4.II. Les épreuves d’activation en EEG .
86
Épreuve d’activation Mécanisme But
Hyperpnée La vasoconstriction Révèle éventuellement un terrain vasculaire.
(accélération et (hypocapnie) ralentit Révèle des anomalies paroxystiques.
augmentation de la l’EEG : apparition
respiration pendant d’ondes lentes thêta Chez l’enfant, elle provoque une hypersynchronie physiologique (jusqu’à l’âge de 20 ans
3 minutes) ou delta. L’alcalose environ).
favorise les gap
junctions et donc
Gastaut a décrit quatre stades de ralentissement.
l’hypersynchronie.
(voir p. 32)
L’HPN est pathologique si a) elle entraîne l’apparition d’éléments paroxystiques et b) si le
ralentissement dure après son arrêt plus de 20 secondes.
Trois types de réponse
Photoentraînement : la fréquence des activités cérébrales (potentiels évoqués) variant
avec celle des éclairs (voir tracés n° 10 et 11). Son asymétrie ou son intensité peuvent être
pathologiques (terrain vasculaire).
Stimulation Réponse photomyogénique : réponse provenant du tronc cérébral. C’est une réponse
lumineuse musculaire des muscles palpébraux et de la face, synchrone avec les éclairs. S’arrête à
Bases de la sémiologie et de l’interprétation de l’EEG

Synchronisation des
intermittente l’arrêt de la stimulation (+++) (voir tracé n° 12). Plus fréquente chez les patients
activités cérébrales
(projection d’éclairs psychiatriques, le sujet âgé, les sujets alcooliques et les patients en condition de sevrage,
(visuelles)
lumineux de atteints d’insuffisance rénale et de phénylcétonurie.
fréquence variable) Réponse photoparoxystique (photoconvulsive) : apparition de grapho-éléments
paroxystiques et parfois déclenchement d’une crise qui dure après l’arrêt de la stimulation
(voir tracé n° 33). Argument en faveur d’un processus paroxystique ou d’une épilepsie.
Trois applications particulières où l’on réalise une SLI longue à 1 Hz (> 30 s) : dans la
cystinose, la céroïde lipofuscinose, la maladie de Creutzfeld-Jakob.
Tableau 4.II. Les épreuves d’activation en EEG (suite).


Épreuve d’activation Mécanisme But


Compression des Activation du réflexe Révèle une hyperactivité vagale. Le ROC provoque une bradycardie, un ralentissement de
globes oculaires (ou parasympathique l’EEG (ondes delta) et si la compression dure, une syncope avec tracé nul.
massage du sinus oculocardiaque On arrête la compression dès l’apparition des signes EEG.
carotidien) (ROC) (pour une
compression de
10 secondes)
Épreuve de Valsalva Activation du Révèle une hyperactivité vagale. L’augmentation de la PA par augmentation de la
(brève hyperpnée, système pression intrathoracique déclenche l’activité vagale.
expiration forcée parasympathique
puis inspiration
profonde, puis
blocage de la
respiration)
Qu’est-ce qu’un tracé EEG anormal ?
87
88 Bases de la sémiologie et de l’interprétation de l’EEG

Une recommandation pratique importante est d’éviter d’effectuer un enregis-


trement EEG dans les 24 heures suivant une ponction lombaire (PL). Celle-ci
induit en effet l’apparition d’ondes lentes à prédominance antérieure qui
peuvent être confondues avec des ondes lentes pathologiques (de souffrance
cérébrale bilatérale). De la même manière, la présence d’un état fébrile chez
l’enfant entraîne des ondes lentes, similaires à celles induites par la PL.

PHÉNOMÉNOLOGIE DES ALTÉRATIONS


DE L’ÉLECTROGENÈSE
LORS DE LA SOUFFRANCE CÉRÉBRALE
Notion de souffrance cérébrale
Le parenchyme cérébral est fragile. Sa réponse à l’agression est polymorphe,
souvent complexe et l’EEG traduit indirectement les conséquences neurochi-
miques et neurophysiologiques de cette agression sur le fonctionnement des
neurones et des cellules gliales ou plus exactement sur l’harmonie fonction-
nelle de ces innombrables couples neurogliaux qui constituent la base
cellulaire des fonctions mentales les plus évoluées.
L’imagerie actuelle (TDM, IRM), très précise, nous montre éventuellement
l’étendue de lésions intracérébrales et de l’œdème associé. Dans un contexte
clinique, elle ne donne aucune information sur les caractéristiques fonction-
nelles du cerveau lésé. Seul l’EEG donne accès, rapidement et à peu de frais, à
l’altération fonctionnelle du parenchyme cérébral dans sa globalité. Bien
qu’imparfait et insuffisant, l’EEG permet d’évaluer une souffrance cérébrale,
par opposition à la description de la lésion (éventuellement sous-jacente)
réalisée par l’imagerie.
La modification pathologique de l’électrogenèse dans un contexte de troubles
neurologiques traduit donc une souffrance du parenchyme cérébral qui peut
être (figure 4.2) :
– unilatérale, le plus souvent en lien avec une atteinte focale (AVC, tumeur,
malformation artérioveineuse, autres malformations, abcès, foyer épileptique…);
– bilatérale ou généralisée : l’origine de cette souffrance (symétrique ou
asymétrique), que l’on qualifiera de diffuse, peut être très variée (anoxie,
anoxo-ischémie, encéphalites, troubles dégénératifs, atteintes métaboliques ou
toxiques); elle est associée ou non à une atteinte grave de la formation réti-
culée du tronc cérébral (traumatisme, accident vasculaire du tronc, atteinte
pharmacologique, trouble métabolique majeur). Dans ce dernier cas, la qualité
de la réactivité (qui peut être paradoxale) constitue un élément précieux
d’évaluation de cette souffrance; dans ces contextes, la clinique est générale-
ment bruyante et la sémiologie assez nette.
A minima, dans des processus plus chroniques (intoxications chroniques,
insuffisances vasculaires chroniques, troubles métaboliques modérés, traite-
ments neurotropes ou psychotropes au long cours…) l’électrogenèse est
modifiée avec des grapho-éléments variés; elle perd son organisation ryth-
Phénoménologie des altérations de l’électrogenèse lors de la souffrance cérébrale 89

YO YF YO YF
Réactivité Réactivité

Anoxie
Mort cérébrale
Encéphalite
Dégénérescence
Atteinte
métabolique

AVC,
lésion tumorale
lésion focale,
abcès…

Réactivité Réactivité Analyse


Atteinte de la formation réticulée :
de la non-réactivité
traumatisme crânien,
atteinte d’origine pharmacologique,
toxique ou métabolique
SOUFFRANCE Anexate
CÉRÉBRALE SOUFFRANCE Narcan
UNILATÉRALE CÉRÉBRALE
OU FOCALE DIFFUSE

ENCÉPHALOPATHIE
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Fig. 4.2. Les modalités de la souffrance cérébrale.

mique et topographique. On dit alors qu’elle est désorganisée ou remaniée.


Ces modifications de l’électrogenèse sont souvent associées à une symptoma-
tologie plus discrète avec troubles cognitifs et anomalies comportementales.
De nombreuses classifications d’ondes EEG ont été proposées, soulignant la
complexité de sa sémiologie. Mais, en pratique, dans le contexte d’une intro-
duction à l’EEG, on peut résumer la sémiologie de l’EEG selon deux grandes
modes de catégorisation : soit en fonction de la structure et de la topologie des
rythmes normaux ou anormaux et de leur réactivité, les deux n’étant pas disso-
ciables, soit en utilisant les trois concepts centraux d’ondes lentes
(ralentissement de l’électrogenèse), de processus paroxystiques (plus ou
moins massifs ou diffus) et de dépression (jusqu’au tracé plat) qui constituent
en quelque sorte trois « bornes » de la sémiologie de l’EEG (figure 4.1 et 4.3).
Nous verrons qu’en réalité la sémiologie de l’EEG est toute en nuances, et
90

PAROXYSMES
ANOMALIES Grapho-éléments transitoires, de début et de fin brutaux,
LENTES, (amplitude > 2 fois bruit de fond)
NON PAROXYSTIQUES

PAROXYSMES NON PAROXYSMES


Ondes Lentes PÉRIODIQUES
PÉRIODIQUES
Angulaires
Hypoxie (ÉPILEPTIQUES)
Encéphalopathie Équivalent à Maladie de
métabolique Polymorphes des anomalies paroxystiques Creutzfeld-Jakob
continues ± dégradées ou CRITIQUES (généralisées,
Déafférentations non encore formées ACTIVITÉS période courte < 4 sec)
du cortex, PSEUDO
Lésions
atteintes thalamiques INTERCRITIQUES PÉRIODIQUES Encéphalites nécrosantes
profondes
médianes ou réticulaires (focalisées,
période courte < 4 sec)
Ondes lentes Pointes Caractéristiques
monomorphes Peu Panencéphalite
Pointes lentes caractéristiques
(sinusoïdales) sclérosante sub-aigüe
Polypointes
(généralisées,
Pointes-ondes
période longue > 4 sec)
(survenue aléatoire, Grand Mal
Complexes lents Pointes
HIC, œdème, contexte épileptique) Petit Mal Abcès, tumeur, anoxie
Bases de la sémiologie et de l’interprétation de l’EEG

monomorphes Pointes lentes


discontinues encéphalites biphasiques (recrutement, (focalisées,
Polypointes
(FIRDA…) crises cliniques) période longue > 4 sec)
Pointe-ondes
Complexes lents PLEDS
Crise électrique
Lésions polyphasiques PLEDS
± clinique
profondes (triphasiques)
médianes Atteintes
de la SB
Inflammations ÉTAT DE MAL
Dépression post-critique
(crises subintrantes sans retour
Atteintes
à l’état initial de l’électrogénèse)
métaboliques

Fig. 4.3. Proposition de classification physiopathologique des grapho-éléments.


Phénoménologie des altérations de l’électrogenèse lors de la souffrance cérébrale 91

que, contrairement à la neurologie qui arrive à isoler des syndromes assez bien
définis, l’EEG décrit le plus souvent plutôt « l’ambiance » (neurophysiolo-
gique) générale dans laquelle ces syndromes apparaissent. Ceci peut se
comprendre si l’on se réfère au schéma 2.7 et au caractère remarquablement
distribué des activités cérébrales.

Ralentissement de l’électrogenèse
Le signe le plus fréquent de la souffrance cérébrale est le « ralentissement »
(baisse de la fréquence majoritaire de l’activité de fond) de l’électrogenèse.
On peut distinguer :

Ondes lentes pathologiques de la bande thêta


Il y en a trois types :
– un rythme thêta correspondant à un ralentissement de l’activité alpha, en
relation avec une diminution du flux sanguin cérébral et de la disponibilité de
l’oxygène dans la substance grise : hypoxie modérée, démences, encéphalopa-
thies métaboliques;
– un rythme thêta à prédominance frontotemporale, bilatéral, en relation avec
des anomalies de la ligne médiane;
– les activités thêta localisées comme forme mineure des activités delta
polymorphes.

Activités delta polymorphes et continues


Elles surviennent en longs trains d’ondes, avec une fréquence prédominante et
peuvent être localisées, unilatérales ou généralisées. Elles apparaissent dans
un cortex sous lequel se produit une lésion de la substance blanche (patholo-
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

gies métaboliques ou structurales, ou encéphalopathies). On en voit aussi de


manière focale chez les patients avec épilepsie partielle, en période
postcritique.
Le dénominateur commun des activités delta polymorphes serait la déafférenta-
tion partielle du cortex. C’est le cas aussi de l’œdème vasogénique modéré qui
produit cette même configuration d’activité en relation avec cette déafférenta-
tion. Quand il est massif, son effet serait plutôt en relation avec un effet de
masse et le déplacement consécutif des structures de la ligne médiane; les
ondes delta seraient alors dues à des atteintes des systèmes thalamiques ou de
la formation réticulée (ou à un dysfonctionnement des voies réticulocorticales
ou réticulothalamiques). Dans les tumeurs, le dommage neuronal associé à
l’œdème entraîne à la périphérie de la lésion une probable déafférentation,
éventuellement réversible (ondes lentes fonctionnelles, voir tracés n° 31 et 32).
Si la substance blanche sous-corticale joue un grand rôle dans la genèse de ces
anomalies lentes, des lésions du thalamus ou du tronc cérébral peuvent être
aussi à leur origine. Dans ce cas, unilatérales, ces activités delta polymorphes
apparaissent du côté de la lésion thalamique ou hypothalamique. Bilatérales,
92 Bases de la sémiologie et de l’interprétation de l’EEG

elles sont plutôt en faveur de lésions bilatérales du mésencéphale ou du


tegmentum.
Les lésions localisées du cortex ou unilatérales du mésencéphale ou du
tegmentum ne produisent pas d’activités delta polymorphes.

Activités delta monomorphes discontinues


Souvent bilatérales, synchrones et à prédominance frontale ces FIRDA (Fron-
tally Predominent Intermittent Rythmic Delta Activities) ont été attribuées à
des lésions des structures profondes de la ligne médiane (3e ventricule et
mésencéphale) mais il existe des FIRDA dans d’autres situations (anomalies
métaboliques).
Le dénominateur commun des activités delta est la présence d’une pathologie
diffuse de la substance grise impliquant les structures corticales et sous-corti-
cales. Rien n’est connu quant au mécanisme cellulaire de ces anomalies.

Grapho-éléments paroxystiques épileptiques et périodiques


Il est souvent difficile de se retrouver dans la terminologie des grapho-
éléments paroxystiques (figure 4.3). Le mot paroxysme vient du mot grec
paroxusmos qui signifie irritation. C’est pourquoi on a très longtemps parlé
des activités irritatives. Le mot paroxysme, actuellement préféré, possède
l’avantage d’être plus descriptif et de ne pas comporter d’hypothèses impli-
cites sur la notion d’irritabilité, mal définie.

Notion de paroxysme
Un grapho-élément est dit paroxystique quand son début et sa fin sont brutaux
(ce qui le distingue de l’onde lente) et qu’il atteint très rapidement son
maximum d’amplitude, se détachant très nettement de l’activité de fond (en
pratique quand son amplitude est le double au minimum de celle de l’activité
de fond). On distingue les paroxysmes simples (pointes, ondes à front raide1)
et des paroxysmes complexes (pointes-ondes, polypointes, polypointes-
ondes).
Une activité (et non plus seulement le grapho-élément) est dite paroxystique
quand elle est composée d’ondes de début et de fin brutaux. Toute activité
paroxystique n’est pas une activité épileptique. Mais une activité épileptique
est une activité paroxystique.
Les activités lentes persistantes ou intermittentes décrites p. 91, 92 sont dites
non spécifiques parce que non associées à une condition pathologique particu-

1. Il s’agit d’activités dont la partie initiale atteint très rapidement sa valeur maximale (en faisant
un angle proche de 90° par rapport à l’horizontale, correspondant à la ligne de base théorique).
Cette partie initiale est appelée « front » de l’onde. La seconde partie de l’onde, qui la fait
retourner de la valeur maximale à la ligne de base est dite « dos » de l’onde. Les angles que font le
front et le dos de l’onde avec la ligne de base (idéale) ne sont pas forcément égaux.
Phénoménologie des altérations de l’électrogenèse lors de la souffrance cérébrale 93

lière ou une étiologie. En revanche, certains grapho-éléments qui surviennent


de manière paroxystique (pointes, pointes-ondes, crises ou complexes périodi-
ques) sont dits « spécifiques » en ce sens qu’ils sont associés avec des
réactions physiopathologiques spécifiques (épilepsie) ou avec des pathologies
particulières (panencéphalite sclérosante subaiguë, ou maladie de Creutzfeldt-
Jakob) 1.

Activités intercritiques
Les activités paroxystiques se distinguent selon qu’elles surviennent au cours
d’une crise ou en dehors d’une crise, bien que dans certains cas, la différence
entre critique et intercritique puisse être discutée et n’est pas toujours aussi
franche.
Les principaux grapho-éléments paroxystiques intercritiques sont présentés au
tableau 4.III. De très nombreuses configurations ont été décrites dont la
description et les conditions de survenue ne seront pas abordées dans ce
chapitre. Les activités intercritiques peuvent être :
– généralisées et dans ce cas elles sont souvent formées de pointes-ondes ou
polypointes-ondes bilatérales synchrones et symétriques ou focales, survenant
isolément ou en brèves bouffées;
– focales, formées de pointes, pointes-ondes, ou pointes lentes répétées de
manière irrégulière (et non rythmique) dans une zone cérébrale.

Activités critiques
Une crise épileptique est une décharge plus ou moins longue de grapho-
éléments paroxystiques avec une traduction clinique. La crise épileptique est
donc électroclinique. En réalité, en pratique, on parle fréquemment et par abus
de langage, de crises électriques quand on observe des décharges de grapho-
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

éléments paroxystiques sur une certaine durée, sans traduction clinique


franche, bien que souvent des troubles subtils de la conscience soient présents
et mal évalués.
Quand les activités paroxystiques surviennent de manière critique, elles
peuvent être la prolongation d’un état intercritique. Les crises épileptiques se
présentent sous de nombreuses formes cliniques : crises grand mal, petit mal,
crises psychomotrices, crises focales partielles, crises myocloniques, crises
toniques, atoniques, akinétiques. Les activités critiques sont caractérisées par
l’organisation rythmique des anomalies paroxystiques élémentaires et d’ondes
lentes. Outre les grapho-éléments paroxystiques, les modifications comporte-
mentales dues à la crise ajoutent des artéfacts, notamment d’origine
musculaire. On décrit :
– les décharges généralisées de pointes-ondes ou polypointes-ondes : elles
peuvent être bilatérales et symétriques (crises absences, ou myoclonies

1. En fait, à l’usage, la notion classique de spécificité est ambiguë et peu satisfaisante.


94 Bases de la sémiologie et de l’interprétation de l’EEG

Tableau 4.III. Grapho-éléments paroxystiques critiques


ou intercritiques.

Type Grapho-élément Caractéristiques


Pointes Transitoires, de 20 à 70 ms de durée,
généralement négatives, très
variables chez un sujet, parfois
multiphasiques.
Ondes angulaires Durée de 70 à 200 ms. La partie
(ou ondes aiguës, ascendante est comme une pointe
ondes à front raide) mais la partie descendante allongée.
Même signification que les pointes.
Polypointes Complexe de pointes.
Pointe-onde Complexe pointe-onde lente.
classique à 3 Hz Présent dans les absences Petit Mal
Activités en lien avec (en fait entre 2,5 et mais aussi dans d’autres conditions.
une altération 3,5 Hz) L’onde est en rapport avec des
transitoire des processus inhibiteurs. Les bouffées
systèmes sont généralement bilatérales.
thalamocorticaux Pointe-onde lente Nommée aussi décharge Petit Mal
(1-2,5 Hz) variant. Complexe formé d’une
pointe lente et d’une onde lente.
Presque toujours associée à un
syndrome de Lennox-Gastaut.
Pointe-onde rapide Reliée à la décharge de pointe-onde
(4-4,5 Hz) classique. Les bouffées de ces
pointes-ondes rapides sont plus
courtes que celles des pointes-ondes
classiques et toujours infracliniques.
Polypointes-ondes Plus volontiers associées à des
épilepsies myocloniques.
Activités rythmiques Bouffées de décharges de 10 à
rapides généralisées 20 Hz, mieux définies dans les
régions frontales. Ces bouffées
Activités rythmiques durent entre 2 et 10 secondes
développées dans Correspondent à une crise tonique
une région restreinte ou tonicoclonique.
ou plusieurs régions Activités rythmiques Si deux régions homologues, crise
centrales rapides focales tonique.
homologues unilatérales ou La fragmentation de la phase
bilatérales tonique correspond à la phase
synchrones ou clonique.
asynchrones
Activité en lien avec Activités rythmiques Elles se ralentissent progressivement
un foyer enfoui lentes avec augmentation d’amplitude.
(paléocortex,
amygdale)
Phénoménologie des altérations de l’électrogenèse lors de la souffrance cérébrale 95

massives bilatérales); elles peuvent être généralisées asymétriques (crises


absences atypiques); elles peuvent enfin constituer la généralisation secon-
daire d’une activité focale;
– les décharges recrutantes qui se caractérisent par la séquence suivante :
blocage de l’activité de fond, puis aplatissement de l’activité EEG (activité
critique à haute fréquence et faible amplitude : rythme recrutant), puis appari-
tion d’une activité rapide rythmique de pointes ou polypointes d’amplitude
progressivement croissante et de fréquence progressivement décroissante
(crises tonicocloniques, crises toniques du syndrome de Lennox-Gastaut,
certaines crises partielles);
– les activités lentes focales (thêta ou delta) dont l’apparition suit la dispari-
tion de l’activité de fond; ces activités lentes s’organisent rythmiquement et
voient leur amplitude croître au cours de la crise.

Activités périodiques
Une activité périodique est une activité EEG paroxystique pathologique se
répétant de manière périodique pendant une longue durée et dont l’élément
spécifique est stéréotypé. Ce qui caractérise une activité périodique est :
– la période de survenue des éléments paroxystiques (temps séparant ces deux
éléments);
– la durée de l’activité périodique elle-même (elle doit être enregistrée de
manière constante, dans les mêmes conditions de vigilance, pendant toute la
durée du tracé);
– la morphologie de l’événement spécifique.
Les activités pseudo-périodiques sont des activités répétitives complexes
moins stéréotypées et moins stables que les activités périodiques.
Le caractère rythmique des activités périodiques contraste avec le caractère
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

aléatoire de survenue des activités paroxystiques intercritiques. Ces activités


sont d’amplitude élevée (100 à 300 µV). Le tableau 4.IV présente les princi-
pales activités périodiques ou pseudo-périodiques rencontrées (tracés n° 17,
20, 21 et 26-29).

Hyperexcitabilité cérébrale
Dans un contexte clinique, on observe souvent des activités de type thêta,
parfois delta, angulaires mais non paroxystiques (deux fois l’amplitude du
tracé) et qui semblent traduire une forme de grapho-élément entre l’onde lente
et la pointe dégradée. Différents auteurs parlent de sharp slow wave que l’on
peut traduire par ondes lentes angulaires. Le statut physiopathologique de ces
ondes lentes angulaires n’est pas clair. Elles pourraient traduire la présence
d’une « hyperexcitabilité neuronale » dont la définition scientifique n’est pas
construite mais qui correspond à une réalité clinique comme on peut le voir
dans certaines céphalées, dans le contexte de terrains d’insuffisance vasculaire
ou de processus iatrogènes (différents des rythmes rapides dus aux
benzodiazépines).
96 Bases de la sémiologie et de l’interprétation de l’EEG

Tableau 4.IV. Activités périodiques ou pseudo-périodiques.

Pathologie Caractéristiques
AVC ou tumeurs Periodic Lateralized Epileptiform Discharges (PLED)
Focales. La périodicité est variable : 3 par seconde
jusqu’à 12 par minute (toutes les 5 secondes environ).
Encéphalite Ondes lentes angulaires temporales (focales) avec un
herpétique intervalle de 2 à 4 secondes, jamais > 4 secondes.
Maladie de Ondes aiguës ou complexes triphasiques aigus durant
Creutzfeldt-Jakob 100 à 300 ms généralisés (parfois unilatéraux)
survenant avec une période courte (0,5 à 2 secondes),
tendant à disparaître dans le sommeil. Les activités
périodiques triphasées sont initialement localisées puis
plus diffuses et se transforment ensuite en pointes
lentes. Présence fréquente de myoclonies lors des
activités périodiques.
Décharge périodique Pourrait parfois correspondre à des bouffées avortées
de l’anoxie aiguë dans un contexte de figures de burst suppression.
Panencéphalite Complexes périodiques (de Radermecker) généralisés
sclérosante subaiguë de 0,4 à 3 secondes formés de pointes et d’ondes de
très grande amplitude (500 µV) accompagnées de
myoclonies. Périodicité de 4 à 15 secondes.

Dépression de l’électrogenèse
La disparition des neurones ou le blocage de leur activité électrique conduit à
une dépression de l’électrogenèse cérébrale. Pour autant, toute diminution
d’amplitude du tracé n’est pas synonyme de dépression de l’électrogenèse.
Parmi les nombreuses causes d’erreur faisant prendre une diminution d’ampli-
tude pour une dépression, les plus fréquentes sont de mauvaises impédances
ou un œdème sous-cutané. On ne pourra affirmer une dépression de l’électro-
genèse que si la technique d’acquisition est parfaite.
Toute dépression de l’électrogenèse n’est pas pathologique : un certain
nombre de sujets normaux (10 % environ) présentent des tracés de très faible
amplitude, très désynchronisés; il en est de même des sujets anxieux.
Toute dépression de l’électrogenèse n’est pas non plus synonyme de mort
neuronale. La disparition des potentiels d’action peut se voir comme au
cours des « lyses médicamenteuses » aux barbituriques (Nesdonal®,
Hypnovel®, Fentanyl®) : ces « lyses » provoquent une diminution de 25 à
30 % de la consommation d’oxygène réalisant ainsi une protection métabo-
lique du parenchyme cérébral. Pour autant, dans de nombreux cas
pathologiques, la mort cellulaire peut-être prise pour l’effet de dépression
d’une lyse médicamenteuse.
Une dépression généralisée de l’activité cérébrale avec apparition d’un tracé
isoélectrique peut se voir dans les comas dépassés (avec mort cérébrale) ou
bien dans les comas barbituriques profonds (tracé n° 23).
Souffrance cérébrale et encéphalopathies 97

Une dépression unilatérale de l’électrogenèse qui s’accompagne d’une dispa-


rition de l’activité alpha généralement associée à un ralentissement de
l’électrogenèse doit faire évoquer la présence d’un hématome sous-dural ou
extradural. Dans ce cas, l’effet de masse retentit sur le ralentissement de l’acti-
vité homolatérale, mais aussi sur celle de l’hémisphère controlatéral
(souffrance « transmise »). Des dépressions sur un seul hémisphère peuvent se
voir dans des AVC massifs (hémorragie capsulolenticulaire gravissime). Elles
sont de mauvais pronostic.
Une dépression localisée peut être un signe en faveur de lésions focales élec-
triquement silencieuses (méningiomes, tumeurs, kystes). Souvent des
paroxysmes sont présents à la périphérie de la lésion.

Suppression : Bouffée :
silence électrique activité périodique
Burst (bouffée) + suppression
ou pseudo-rythmique
(différent du tracé alternant,
note p. 75)

Durée de la Suppression Burst


Coma très grave Dosage de barbituriques correct si < 6 sec
Si > 6 sec, risque de surdosage
Anoxie/ ischémie

Anesthésie très profonde


(protection barbiturique)

Fig. 4.4. Suppression bursts ou bouffées suppressives.

Des dépressions transitoires peuvent apparaître dans la suite immédiate des


crises tonicocloniques, dans des souffrances très graves avec coma (souffrances
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

anoxo-ischémiques graves avec état de mal épileptique, dans les traumatismes


crâniens graves). Elles s’organisent alors avec un aspect de suppression burst
ou bouffées suppressives (figure 4.4, tracé n° 21), périodes de tracé isoélec-
trique de plusieurs secondes, survenant entre des bouffées d’ondes lentes
angulaires ou de pointes lentes. Dans les cas de « lyses médicamenteuses » la
durée des silences isoélectriques permet d’ajuster les doses de barbituriques.
Elle permet également d’évaluer l’évolution du réveil pendant le sevrage.

SOUFFRANCE CÉRÉBRALE ET ENCÉPHALOPATHIES


À plusieurs reprises, nous avons insisté sur la structure fondamentale du
couple neuroglial. Très souvent, la souffrance cérébrale diffuse ou plus focale
est en rapport avec une encéphalopathie dans laquelle les processus métaboli-
ques (au sens large, incluant les anomalies ioniques, toxiques) sont souvent au
premier plan mais aussi dans laquelle les dysfonctionnements vont obligatoi-
rement impliquer les interactions entre les nombreuses cellules (et pas
seulement entre les neurones) du SNC.
98 Bases de la sémiologie et de l’interprétation de l’EEG

Notion d’encéphalopathie
Un très grand nombre d’affections du parenchyme cérébral peuvent être
placées sous le terme commun d’encéphalopathie qui est étymologiquement la
« souffrance (pathos) de ce qui est dans la tête (en- kephalon) ». La définition
(large) de l’encéphalopathie est la suivante : « toute affection encéphalique
diffuse d’étiologie généralement toxique ou métabolique dont la traduction
habituelle est une confusion mentale, un coma ou une comitialité » 1. Un carac-
tère important de nombreuses encéphalopathies est leur réversibilité
potentielle lors du traitement ou de la disparition de la cause, ainsi qu’on peut
le voir cliniquement en EEG et en spectroscopie cérébrale par RMN.
Les différents types d’encéphalopathies sont présentés dans le tableau 4.V.
La notion d’encéphalopathie, bien que large et parfois ambiguë, permet de
comprendre que tout processus atteignant le cerveau déclenchera, localement
ou de manière plus diffuse, une cascade de processus qui aboutiront à un désé-
quilibre ionique neuronoglial et à une levée des processus inhibiteurs
régulateurs des activités neuronales. Dans toute souffrance cérébrale (focale,
hémisphérique ou généralisée), se produit l’intrication, à des degrés variés, de
facteurs métaboliques (modification des voies de dégradation des substrats,
perturbation de la fourniture énergétique), ioniques (modifications des concen-
trations ioniques intra- et extracellulaires, dysfonctionnement des pompes
ioniques), synaptiques (libérations anormales de neuromédiateurs), trophiques
avec production ou libération anormale de facteurs de croissance type BDNF
(Brain Derived Neurotrophic Factor) ou NGF (Nerve Growth Factor…),
membranaires (altération de la structure des membranes), inflammatoires
(interleukines) et électriques (anomalies de décharges des neurones), etc., ainsi
que le synthétise la figure 4.5. Les anomalies EEG ne sont qu’une grossière
image à l’échelle macroscopique de l’ensemble de ces altérations.

Encéphalopathie hépatique :
GABA, glutamate, glutamine et métabolisme cellulaire
Le cerveau produit directement, à partir du cycle de Krebs et dans un contexte
d’interactions très fortes entre les neurones et les cellules gliales, deux neuromé-
diateurs majeurs, le glutamate (excitateur) et le GABA (inhibiteur) (figure 4.6).
Environ 15 % de l’énergie cérébrale basale serait en relation avec la transmis-
sion GABAergique. Dans un neurone GABAergique, le flux partant dans le
shunt GABA correspondrait à près de 20 % du flux dans le cycle de Krebs et
85 % de l’énergie des neurones glutamatergiques seraient associés avec la
neurotransmission (synthèse de glutamate, activités de dépolarisation). Le
GABA est produit à partir du glutamate dans les neurones GABAergiques et
dégradé après libération synaptique et recapture dans les mitochondries des
cellules gliales (figure 4.6B). Le glutamate produit dans les neurones glutama-
tergiques est inactivé dans les cellules gliales en glutamine par adjonction de
NH4 (figure 4.6C).

1. S. Kerbaum, Dictionnaire de médecine. Flammarion, Paris, 1994.


Souffrance cérébrale et encéphalopathies 99

Rappelons trois éléments : 1) le glutamate possède des récepteurs métabotro-


phiques (permettant l’activation métabolique de la cellule cible), 2) sa
libération anormale (en excès) provoque une excitotoxicité responsable de
décharges anormales et de morts neuronales (figure 4.5) et 3) le couplage
neuroglial ne se limite pas au cycle glutamate-glutamine mais s’étend notam-
ment à la fourniture énergétique des neurones par la glie, à la régulation
extracellulaire du potassium et à des interactions trophiques. Ainsi, toute altéra-
tion de la fourniture de substrat conduisant à un dysfonctionnement du cycle de
Krebs, outre le dysfonctionnement des pompes ioniques membranaires et
l’excitotoxicité glutamatergique par excès de libération, est susceptible d’avoir
des conséquences considérables sur les taux de GABA et de glutamate.
Le cycle glutamate/GABA/glutamine est altéré dans de nombreuses situa-
tions, notamment dans l’épilepsie où son activité est diminuée.

Tableau 4.V. Encéphalopathies : principales étiologies.


Étiologie Type d’encéphalopathie
Altération Encéphalopathies anoxiques* (anémie, intoxication CO)
sévère Encéphalopathies ischémiques**
de la fourniture Œdème cérébral**
des substrats Troubles de l’osmolarité ou hydroélectrolytiques
(hypercalcémie…)*
Encéphalopathies carentielles (vitamine B12)*
Hypoglycémie*
Anomalies Erreurs innées du métabolisme par défaut enzymatique
enzymatiques (mitochondriopathies, maladies lysosomales,
peroxysomales, amino-acidopathies, etc.)
Facteur toxique Encéphalopathie hépatique (NH4)
endogène Encéphalopathie urémique (insuffisance rénale)*
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

Surcharges (cuivre, fer)


Anomalies endocriniennes (acidocétose diabétique,
hyperthyroïdie, Addison et Cushing)
Éclampsie
Facteur toxique Alcool
exogène Chimiothérapies
Radiothérapie, rayonnements ionisants
Métaux
Organochlorés et organophosphorés
Inflammations Encéphalites virales (VIH, herpès, CMV, rougeole)***
ou infections Méningites***
Encéphalopathie spongiforme***
Maladies de système (lupus, sarcoïdose),
Encéphalopathie postchirurgicale***
(*) : débit sanguin cérébral normal mais privation d’oxygène de substrats ou de cofacteurs
métaboliques; (**) arrêt ou diminution de la fourniture de sang; (***) production de
toxines ou inhibition d’enzymes dans le SNC associées à un stress oxydatif et à la produc-
tion d’oxygène réactif et de composés nitrés (NO).
100 Bases de la sémiologie et de l’interprétation de l’EEG

INFLAMMATIONS
ISCHÉMIE DÉMYÉLINISATIONS
HYPOXIE, + ANOXIE INFECTIONS TRAUMATISME
ANOXIE

Cytokines, libération
de facteurs trophiques

Compression Saignements
des vaisseaux
INTOXICATION
Arrêt de fourniture Libération de
des substrats (O2, glucose…) oedème Fe+++

Arrêt de la production Production Gonflement des cellules


d’énergie cellulaire de lactate (œdème intracellulaire)

Acidose

Ruptures
Libération d’acide Dysfonctionnement membranaires
arachidonique des pompes ioniques
et d’acides gras libres

Production
de radicaux libres
NO

Peroxydes
Excitotoxicité nitriques
Augmentation
Activation
de calcium
intracellulaire des phospholipases
Libération
d’acides aminés Dépolarisations
excitateurs
Altération Processus Déclenchement
des métabolismes Défaut paroxystiques d’apoptoses
neuronogliaux de synthèse
du glutamate et du GABA de GABA

MORTS
CELLULAIRES

Fig. 4.5. Physiopathologie des atteintes du parenchyme cérébral mettant en


évidence le cercle vicieux. NO = monoxyde d’azote.

Mais l’exemple paradigmatique de la désorganisation du cycle gluta-


mate/GABA/glutamine est l’encéphalopathie hépatique (HE). Dans
l’insuffisance hépatique, qui conduit à une hyperammoniémie, il existe une
altération du métabolisme du glutamate selon plusieurs composantes :
synthèse (diminuée), taux intracellulaire (diminué pour réaliser de la gluta-
mine), transport (capture diminuée dans les astrocytes), libération
(augmentée) et activation directe des récepteurs NMDA du glutamate par le
NH4. Les taux de GABA ne semblent pas être modifiés mais des substances
Souffrance cérébrale et encéphalopathies 101

glutamine
A Glucose
PAG GS
Pyruvate
isocitrate GDH NH4
alpha glutamate
AcétylCoA cetoglutarate

citrate GAD

succinyl CoA
oxaloacétate alpha
GABA cetoglutarate

malate GABA T
succinate
fumarate
Semialdéhyde glutamate
B Glucose succinique (SSA)

KC
Neurone Cellule gliale
GABAergique NH4
pré-synaptique
Glu Gln Gln KC
GAD
GS NH4
GABA Glu -KG

recapture GABA GABA Succinate

C
Glucose

Neurone
glutamatergique Cellule gliale
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

pré-synaptique KC
KC
NH4

Glu Gln Gln

GS NH4
recapture
Glu Glu

Fig. 4.6. Shunt GABA. En A, place du shunt GABA (fond gris tacheté) par
rapport au cycle de Krebs. Coopération neurogliale pour le métabolisme du
GABA (B) et du glutamate (C).
Glu = glutamate; Gln = glutamine; KG = alpha kétoglutarate; GAD =
glutamic acid décarboxylase; GABA-T = GABA transaminase; GS = gluta-
mine synthétase; PAG = glutaminase phosphoactivée; GDH = glutamate
déshydrogénase; KC = cycle de Krebs.
102 Bases de la sémiologie et de l’interprétation de l’EEG

stéroïdes moduleraient les récepteurs GABA-A. L’augmentation de la gluta-


mine gliale (neutralisant le NH4) provoque un changement de l’équilibre
osmotique et un gonflement des astrocytes avec œdème cérébral, accompagné
d’une dégradation du métabolisme énergétique astrocytaire. L’apparition de
crises convulsives pourrait être en relation avec la diminution de la capture du
glutamate par les cellules gliales au métabolisme perturbé.
L’encéphalopathie hyperammoniémique induite par le valproate de sodium
(VPA) est encore plus démonstrative de la complexité métabolique de certains
processus encéphalopathiques. Dans ce cas, les conséquences de l’hyperam-
moniémie (comme dans l’HE) s’ajoutent à l’augmentation de l’activité
GABAergique induite par le VPA.
Très logiquement, les caractéristiques EEG d’une telle souffrance métabolique
cérébrale dépendent de la gravité de l’insuffisance hépatique (tableau 4.VI).

Tableau 4.VI. Encéphalopathies hépatiques : les différents stades.

Stade Clinique EEG


I Fluctuation du niveau de Ralentissement des activités (7-8 Hz)
vigilance Apparition de thêta temporal
Troubles du comportement Baisse de la réactivité (médiocre ou nulle)
(euphorie ou indifférence) corrélée à la gravité de l’encéphalopathie
II Désorientation temporo- Activité thêta ou delta majoritaire diffuse
spatiale Ondes lentes à front raide répétitives
Baisse du niveau de vigilance toutes les 1 à 3 secondes, à
réversible aux stimulations prédominance le plus souvent frontale
Signes pyramidaux (FIRDA) parfois occipitales (OIRDA), de
morphologie triphasique
III Coma calme Ondes lentes triphasiques diffuses
Perte progressive de Sévère désorganisation de l’EEG
réactivité Ondes lentes asynchrones sur les deux
Hypotonie hémisphères
IV Coma avec perturbations Ondes lentes triphasiques, activité delta
végétatives arythmique
Tracé de faible amplitude, allant vers le
tracé nul

Dans les encéphalopathies hépatiques, la présence d’ondes lentes triphasiques


sur l’EEG est très évocatrice mais sans en être spécifique (tracé n° 16). L’acti-
vité delta est corrélée aux changements des activités dans les cellules. La
partie positive de l’onde triphasique correspond à une négativité extracellu-
laire profonde enregistrée près des neurones. Souvent, dans les insuffisances
hépatiques sévères, ces ondes triphasiques prennent un caractère franchement
angulaire voire un aspect de pointes lentes qui soulignent l’apparition de
phénomènes paroxystiques au sein du ralentissement de l’activité cérébrale.
Dans les encéphalopathies de l’insuffisance rénale, les troubles hydroélectro-
lytiques conduisent à des altérations très complexes : on voit non seulement
Souffrance cérébrale et encéphalopathies 103

des ondes triphasiques, mais aussi fréquemment des activités paroxystiques en


lien avec les déséquilibres ioniques.
L’encéphalopathie postchirurgicale (ou léthargie morbide), avec des ralentis-
sements et des altérations de la vigilance, serait en rapport avec des embolies
cérébrales mineures et/ou des libérations de métabolites (ou de peptides) par
les tissus mobilisés. Il s’agit alors d’encéphalopathie mixte : métabolique et
circulatoire.
Ainsi se dessine une première facette de la souffrance cérébrale, dans laquelle
des anomalies des métabolismes affectent directement le fonctionnement des
activités électriques cérébrales via des déséquilibres ioniques, des modifica-
tions des taux synaptiques de transmetteurs et probablement des altérations
des métabolismes protéique et lipidique. La présence d’ondes triphasiques sur
un tracé évoque ce type de souffrance d’origine métabolique.

Encéphalopathies par arrêt de la fourniture de substrat :


ischémie, anoxie, hypoglycémie, etc.
L’arrêt de la fourniture des substrats (anoxo-ischémie, accident vasculaire
cérébral, compression vasculaire) a des conséquences dramatiques sur le fonc-
tionnement cérébral (voir figure 4.5). La connaissance des phénomènes
impliqués permet de mieux comprendre à la fois les conséquences d’un arrêt
cardiocirculatoire et les processus se produisant lors d’un accident vasculaire
cérébral et sa zone de pénombre.
Dans les conditions physiologiques, le débit sanguin cérébral est de 55 à
100 mL/100 g/minute de tissu cérébral. La figure 4.7 montre la cinétique
d’apparition des anomalies se produisant en fonction de la baisse du débit
sanguin cérébral. On observe que les altérations électrophysiologiques
surviennent quand la valeur du débit sanguin cérébral est de l’ordre de la
moitié de la valeur normale. La disparition des potentiels évoqués (voir
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

chap. 7) lors de ces baisses de perfusion constitue la justification de leur réali-


sation lors d’interventions sur le tronc cérébral, la fosse postérieure ou la
colonne vertébrale : les augmentations de latence des réponses évoquées
(auditives, somesthésiques) traduisent alors une souffrance ischémique néces-
sitant la suspension de l’acte opératoire. On note, par ailleurs, que les
altérations neurophysiologiques prennent place après qu’ait eu lieu la mise en
œuvre des processus métaboliques de régulation (glycolyse anaérobie,
consommation des cétones) quand le fonctionnement des pompes ioniques est
altéré en raison du déficit d’ATP et des modifications du pH intracellulaire.
Les processus ischémiques (arrêt de la fourniture de l’oxygène et du glucose)
conduisent très rapidement à un ralentissement marqué de l’électrogenèse
(ondes delta) avec une dépression de l’activité. Puis des activités thêta appa-
raissent. Si l’ischémie continue, une perte de l’activité peut apparaître. La
reprise d’une activité électrique pendant la récupération est corrélée à la
qualité de la récupération neurologique.
Les modifications EEG lors de l’accident vasculaire ischémique sont considé-
rables (tracés 17-20), on peut rencontrer :
104 Bases de la sémiologie et de l’interprétation de l’EEG

PERFUSION
PHYSIOLOGIQUE
(55-100 ml/100g/min)

RÉVERSIBILITÉ 50
CLINIQUE

Synthèse protéique atteinte 45 Pertes neuronales


sélectives
Altération de l’expression de
certains gènes 40

Stimulation de la glycolyse
anaérobie 35 Libération des acides aminés
(Glutamate, GABA,
Production de lactate,
glycine, adénosine…)
consommation des cétones
30
Disparition des
Chute du pH potentiels évoqués
25

Œdème intra-cellulaire,
L’osmolarité augmente 20 DÉFAILLANCE
ÉNERGÉTIQUE
NÉCROSE
DÉPOLARISATION
15 ANOXIQUE

10
Disparition de
K+, Ca++
ATP
Disparition de libérés
l’EEG 5

Disparition de la
phosphocréatine 0

IRRÉVERSIBILITÉ
CLINIQUE

DSC
ml/100g/min

Fig. 4.7. Seuils de viabilité du tissu cérébral.


Ce schéma donne une idée de l’évolution des seuils à partir desquels se
produisent les événements notamment électrophysiologiques. DSC = débit
sanguin cérébral; PCr : phosphocréatine.

– des activités delta rythmiques frontales intermittentes (FIRDA), plus carac-


téristiques d’une ischémie chronique diffuse;
– des activités delta polymorphes des régions antérieures ou une bradyrythmie
antérieure (peut-être plus bénignes);
– une activité paroxystique continue (pointes ou ondes angulaires lentes),
parfois asymétrique;
– chez les patients en coma des activités de pointes périodiques; ce sont les
PLEDs (Periodic Lateralized Epileptiform Discharges) (voir tableau 4.IV,
p. 96); ces processus paroxystiques sont parfois accompagnés de crises
convulsives tonicocloniques, de myoclonies;
Souffrance cérébrale et encéphalopathies 105

– dans les cas les plus sévères, une dépression de l’électrogenèse avec des
activités de bouffées suppressives (suppression burst) (voir figure 4.4, tracé
n° 21) attestant l’atteinte des fonctions mésencéphaliques, voire un silence
électrique.
À la périphérie d’une lésion tumorale (ou d’un processus expansif intracrâ-
nien) se produit une ischémie localisée due à l’œdème qui comprime les
vaisseaux et le parenchyme. À l’effet de l’œdème se rajoute l’effet de masse et
de la compression du parenchyme contre une paroi inextensible. Très souvent
des activités lentes apparaissent. Elles sont la plupart du temps en partie fonc-
tionnelles, c’est-à-dire bloquées par les stimulations (tracé n° 31). La
disparition de l’œdème fera disparaître cette souffrance périlésionnelle.
Lors de l’anoxie (intoxication par CO, asphyxie, hypoxie, encéphalopathie
respiratoire), le cerveau continue à utiliser le glucose mais la diminution de la
concentration d’ATP survient rapidement. Un ralentissement diffus plus ou
moins marqué caractérise les formes les moins sévères avec présence d’une
activité en forme de fuseaux. Dans les formes plus sévères on retrouve les
anomalies des lésions ischémiques, notamment les FIRDA.
L’hypoglycémie constitue également une altération de la fourniture du subs-
trat aux neurones. On a pu montrer que le paramètre critique dans les
modifications électrophysiologiques n’était pas tant la valeur de la glycémie
que la décroissance rapide de celle-ci, très probablement en rapport avec le
temps nécessaire au cerveau pour activer les voies métaboliques alternatives.
L’hypoglycémie entraîne un ralentissement impressionnant de l’EEG ainsi
que des crises d’épilepsie partielles ou généralisées.
Il existe dans le cerveau des zones présentant une vulnérabilité sélective aux
réductions de substrats, soit en raison d’une vascularisation plus pauvre, soit
en raison de particularités métaboliques. C’est le cas de l’hippocampe, du
cortex pariéto-occipital, du noyau dentelé et des territoires jonctionnels (entre
les champs irrigués par deux artères cérébrales). Certaines zones sont plus
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

sensibles à l’hypoxémie (couches 3 et 4 du cortex, pallidum), d’autres à


l’hypoglycémie.
Ce qui vient d’être décrit concerne les processus ischémiques (anoxiques)
aigus. Mais, bien souvent, chez le sujet vieillissant et présentant des facteurs
de risques (alcool, tabac, hyperlipidémie), il existe une insuffisance circula-
toire globale, plus ou moins sévère, caractérisée par des remaniements assez
caractéristiques de l’électrogenèse : diffusion vers les régions antérieures de
l’activité alpha qui devient parfois monomorphe ou bien un ralentissement
global discret de l’électrogenèse (thêta rapide) avec des réponses caractéristi-
ques à la SLI (fréquences lentes).
Progressivement cette insuffisance vasculaire va entraîner la survenue de
multiples infarctus conduisant à la raréfaction du tissu cérébral et à une dégra-
dation des fonctions cognitives. Très souvent, on observe sur l’IRM des
patients à terrain vasculaire marqué la présence d’un état lacunaire. Les
lacunes du tissu cérébral proviennent soit d’infarctus de petite taille vieillis,
soit sont les cavités séquellaires de petites hémorragies (dans un contexte
d’hypertension artérielle), soit enfin correspondent à des dilatations des
106 Bases de la sémiologie et de l’interprétation de l’EEG

espaces périvasculaires (de Wirchow-Robin). Des remaniements histologiques


avec gliose, nécrose fibrinoïde, œdèmes périvasculaires apparaissent comme
conséquences d’une souffrance hypertensive. Si les accès hypertensifs modi-
fient peu le tracé à EEG, l’artériosclérose chronique conduit à une véritable
encéphalopathie vasculaire. Le ralentissement de l’alpha (qui tend à diffuser
vers les régions antérieures), des activités lentes ou de moyenne fréquence et
des éléments angulaires lents, des altérations du sommeil et de l’éveil (avec des
épisodes courts de sommeil stade 2) puis une bradyrythmie antérieure caracté-
risent cette encéphalopathie vasculaire par ailleurs souvent corrélée à une
leucoaraiose à l’IRM.

Encéphalopathies neurodégénératives
Le fait que puisse se produire une encéphalopathie non réversible, c’est-à-dire
accompagnée de modifications histologiques, ouvre la possibilité de consi-
dérer un nouveau type d’encéphalopathies dans lesquelles le tissu nerveux se
désorganise et dégénère, avec des dépôts de diverses substances protéiques
anormales et des phénomènes marqués d’excitotoxicité. Il s’agit des
encéphalopathies neurodégénératives qui sous-tendent de nombreux processus
démentiels.
L’altération tissulaire est histologiquement significative. Dans la maladie
d’Alzheimer (MA), les lésions dégénératives (les plaques séniles) sont consti-
tuées de dépôts sphériques (de 20 à 200 µm) de substance amyloïde. Les
dépôts se font dans le neuropile et dans le milieu extracellulaire. Autour des
plaques amyloïdes, se trouvent des neurites en voie de dégénérescence, des
cellules microgliales et des prolongements astrocytaires; c’est l’ensemble de
ces formations qui constitue la plaque sénile encore appelée plaque neuritique.
Dans la démence à corps de Lewy (CDL), des inclusions intracytoplasmiques
de 15 à 30 nm de diamètre sont associées à une perte de neurones dopaminer-
giques mais aussi de neurones cholinergiques de la substantia nigra, du locus
coeruleus et des noyaux du tronc cérébral. En fonction de la localisation des
CDL, on peut décrire trois formes anatomocliniques : la forme du tronc céré-
bral (maladie de Parkinson), la forme intermédiaire (les CDL sont nombreux
dans le cortex limbique et notamment l’amygdale) et la forme néocorticale où
les CDL occupent tout le néocortex souvent associés aux lésions de type
Alzheimer. Dans l’atrophie multisystémique, on retrouve des inclusions argy-
rophiles oligodendrocytaires intracytoplasmiques et intranucléaires.
Si, au début du processus démentiel (dans les Mild Cognitive Impairment ou
MCI) l’EEG reste souvent normal, on comprend que dans la progression du
processus neurodégénératif, on retrouve à la fois les signes d’une altération
des rythmes cérébraux avec un ralentissement variable selon le type de
démence, une prédominance des activités thêta voire delta et des signes de
modifications « préparoxystiques » avec parfois des activités lentes très angu-
laires (tracé n° 24). L’EEG est souvent très désorganisé. On peut voir aussi
dans les démences à corps de Lewy, des décharges périodiques. Il semble
exister une bonne corrélation entre la gravité de la dégradation cognitive et les
altérations de l’EEG, notamment son ralentissement et son caractère angulaire
Souffrance cérébrale et encéphalopathies 107

voire périodique Les modifications de l’EEG sont principalement rapportées


aux anomalies de la transmission cholinergique (notamment en raison des
effets des anticholinestérasiques sur l’électrogenèse), bien que l’on puisse
penser que la désorganisation de la neurotransmission, notamment glutamater-
gique et GABAergique, puisse être impliquée. Dans les démences focales
(dégénérescence corticobasale), des études récentes ont montré que les
anomalies EEG étaient corrélées à la fois à la baisse du métabolisme cérébral
(en SPECT) et à la diminution du marqueur de viabilité neuronale (en spec-
troscopie cérébrale, MRS). L’analyse spectrale du tracé EEG lors des épreuves
d’activation souligne le caractère focal de la neurodégénérescence. Les
réponses électriques anormales (ondes lentes) des régions lésées lors des acti-
vations apparaissent ainsi très clairement liées à des processus
dysmétaboliques marqués.
Des processus dégénératifs extrêmement graves peuvent être également
observés au cours des erreurs innées du métabolisme qui conduisent égale-
ment plus ou moins rapidement à des modifications importantes de la
composition et de l’organisation du parenchyme cérébral.

Encéphalopathies et encéphalites liées


à un agent infectieux
Il s’agit des atteintes bactériennes (méningocoque, pneumocoque) ou par des
virus comme le VIH, l’herpès et, plus rarement, les virus de la variole, de la
rougeole et de la rubéole. Dans les méningites, les encéphalites et les
méningo-encéphalites, le ralentissement plus ou moins marqué de l’électroge-
nèse est le témoin de la souffrance neuronale (et/ou gliale).
L’utilisation préférentielle du terme encéphalites pour les atteintes infectieuses
souligne la spécificité de la participation des processus immunologiques et
inflammatoires dans ces atteintes. Cependant, on peut aussi considérer qu’en
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

raison de facteurs neurotoxiques une composante métabolique importante


s’ajoute le plus souvent à la composante inflammatoire, ainsi qu’il l’a été
démontré dans l’atteinte cérébrale par le VIH (tracé n° 25).
Dans ce dernier cas, l’atteinte de la substance blanche provoque des
leucoencéphalopathies conduisant à un ralentissement plus sévère de l’électroge-
nèse par déafférentation corticale (voir p. 48 et 91-92). Enfin, dans ces processus
complexes liant les facteurs inflammatoires aux facteurs métaboliques, la mort
neuronale massive et rapide qui en résulte rend compte de la symptomatologie
neurologique et électroencéphalographique extrêmement bruyante, souvent en
rapport avec des processus nécrotiques (encéphalites herpétiques, maladie de
Creutzfeld-Jakob, pan-encéphalites sclérosante subaiguës) (tracés n° 26-29).
Dans ce cas, le pronostic est extrêmement défavorable.
Dans la maladie de Creutzfeld-Jakob (produit par un agent infectieux non
conventionnel) et constituant le diagnostic différentiel de trouble neurodégé-
nératif d’évolution rapide, l’atteinte encéphalopathique (ou encéphalitique) est
caricaturale par sa rapidité d’évolution et la juxtaposition d’abord d’un ralen-
tissement de l’activité fondamentale puis de l’apparition de bouffées
d’activités delta qui deviennent de plus en plus périodiques pour aboutir à
108 Bases de la sémiologie et de l’interprétation de l’EEG

l’apparition d’ondes bi- ou triphasiques, périodiques, plus ou moins symétri-


ques traduisant la gravité de la lésion encéphalique et non systématiquement
reliées aux processus cloniques (tracé n° 29). Dans ce cas, la dégradation rapi-
dement progressive du parenchyme cérébral est corrélée à l’aggravation de
l’encéphalopathie qui correspond à la dégénérescence spongiforme des neuro-
piles avec perte neuronale, gliose astrocytaire et dépôts amyloïdes (plaques
kuru).

Encéphalopathies systémiques
Les pathologies de système (syndrome des antiphospholipides, lupus érythé-
mateux disséminé, maladie de Behcet, vascularites, sclérodermies, etc.)
induisent fréquemment des souffrances cérébrales très variables allant du
simple ralentissement diffus ou focal à des manifestations paroxystiques à
type de pointes focales, multifocales ou diffuses. On observe également des
phénomènes dysrythmiques. Ces phénomènes sont généralement liés à des
vascularites (ischémies locales associées aux processus inflammatoires).

Encéphalopathies combinées
Si, dans certaines encéphalopathies, la présentation EEG est très évocatrice
(encéphalopathies herpétiques, hépatiques) on ne peut oublier que, chez
certains patients, plusieurs causes de souffrance cérébrale peuvent se sura-
jouter et créer des tableaux très complexes pouvant gêner l’identification de
pathologies très sévères. C’est ainsi qu’on peut voir des encéphalites herpéti-
ques avec des éléments périodiques à période longue (8 secondes) chez des
sujets en chimiothérapie et ayant présenté des AVC.

PHÉNOMÈNES PAROXYSTIQUES : VERS L’ÉPILEPSIE


Le cerveau est un organe excitable et cette excitabilité est en permanence
contrôlée par de multiples processus afin de permettre chez l’animal une adap-
tation optimale à l’environnement et, chez l’homme, la genèse des processus
de pensée. De ce contrôle au sein d’un organe d’une extrême complexité,
résulte un subtil équilibre qui peut être rompu dans les situations pathologi-
ques les plus variées. Cette rupture conduit soit à la dépression de
l’électrogenèse et/ou la déafférentation des neurones conduisant à une
hypoexcitabilité (voir p. 91-97), soit (et parfois en même temps) à une hype-
rexcitabilité qui conduit à une hypersynchronie anormale des décharges
neuronales et à des paroxysmes.
Classiquement, pour décrire les processus paroxystiques et leurs multiples
visages, on part de la symptomatologie clinique des crises épileptiques. Pour
rester plus proche de la neurophysiologie et de la physiopathologie, nous
avons choisi une démarche différente, centrée sur les mécanismes d’appari-
tion, de propagation et d’organisation des paroxysmes afin de mieux
comprendre, quand cela est possible, le lien entre, d’une part, les phénomènes
Phénomènes paroxystiques : vers l’épilepsie 109

à l’échelon cellulaire ou des réseaux et, d’autre part, la structure et l’organisa-


tion du ou des grapho-éléments paroxystiques. L’autre avantage de cette
approche est de permettre de mieux comprendre le continuum entre la
présence d’anomalies lentes angulaires (sharp slow waves) ou de pointes
sporadiques (états paroxystiques minimaux) et l’état de mal focal ou généra-
lisé (états paroxystiques maximaux), en passant par les crises épileptiques ou
les activités périodiques.
Une brève activité hypersynchrone d’un groupe de neurones se traduit sur
l’EEG (macroscopique) par une pointe (paroxysme intercritique) en général
de polarité négative dont la durée est inférieure à 70 ms. La pointe est le
phénomène EEG paroxystique élémentaire.
La crise épileptique possède une définition électroclinique. C’est « la survenue
transitoire de signes ou de symptômes ou les deux, dus à une activité neuro-
nale anormale excessive ou synchrone, dans le cerveau » 1. La
symptomatologie de la crise, très variable (de la crise tonicoclonique à de très
légères modifications de la conscience ou à de subtiles modifications compor-
tementales), est associée à des décharges de grapho-éléments paroxystiques.

Genèse de la pointe intercritique


Le corrélat intracellulaire de la pointe intercritique est une dépolarisation de
grande amplitude (Paroxysmal Depolarisation Shift ou PDS) pouvant durer
10 ms, accompagnée de bouffées rapides de décharges neuronales (figure 4.8)
et survenant dans les réseaux de neurones néocorticaux ou hippocampiques.
Ce phénomène implique à la fois les neurones et les cellules gliales.

Hyperexcitabilité et hypersynchronie, le point de vue neuronal


Au niveau neuronal, diverses anomalies concourent à l’établissement d’une
PDS :
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

– Des anomalies de fonctionnement de divers canaux ioniques conduisant à


des flux ioniques qui génèrent des dépolarisations.
– Une rupture de l’équilibre entre activités synaptiques des neurotransmet-
teurs excitateurs (aspartate, glutamate) et inhibiteurs (GABA); cette rupture
contribue à la fois à l’épileptogenèse (établissement de l’état épileptique), à
l’initiation des crises, à la modification de l’étendue et de la durée des
décharges et à la modalité de fin des crises. Classiquement, on considère que
les neurotransmetteurs inhibiteurs ou les drogues GABA mimétiques bloquent
les crises. Or, des études récentes montrent que la situation est plus complexe
puisque les effets de l’activation des récepteurs GABA A dépendent du
contexte et peuvent engendrer, selon les cas, non pas des hyperpolarisations
mais des dépolarisations (par exemple, lors d’une modification des sous-unités
de ce récepteur). En fait, dans le tissu épileptique, il existe une profonde réor-

1. Définition de consensus donnée par la Ligue internationale contre l’épilepsie et le Bureau pour
l’épilepsie (Epilepsia 2005; 46 (4) : 470-472).
110 Bases de la sémiologie et de l’interprétation de l’EEG

Altération de l’inhibition
Augmentation du K+ libéré GABA-ergique : Bouffée de décharges rapides
par les neurones dans la fente anomalies de récepteurs,
synaptique et insuffisamment libération de GABA Paroxysmal
éliminé dans le syncitium glial diminuée
(fonction de tampon potassique dépolarisation
shift (PDS)
glial altérée)

GABA

Hyperpolarisation
(rôle dans la genèse des crises)

Libération de glutamate
par les cellules gliales Afférences
sous l’effet de l’augmentation excitatrices
de Ca++ intra glial (glutamate)

Vagues calciques gliales,


(dépolarisations gliales)
sous l’effet de la PDS

Cellule 1

Dépolarisation astrocytaire Cellule 2

Gap junctions labiles


entre neurones et entre cellules gliales
susceptibles de s’ouvrir ou se fermer

Fig. 4.8. Phénomènes paroxystiques à l’échelon neuroglial.

ganisation des nombreux types neurones GABAergiques et de leurs fonctions


rendant obsolète l’interprétation de l’apparition d’un processus paroxystique
comme conséquence de la simple défaillance des systèmes inhibiteurs.
– Une activation de multiples systèmes de neurotransmetteurs : l’épilepsie
implique des réseaux de neurones fonctionnant avec divers neurotransmet-
teurs (systèmes noradrénergiques inhibiteurs des crises, systèmes
cholinergiques plutôt convulsivants). Interviennent également les neuromodu-
lateurs (protéines), les seconds messagers (notamment calmoduline) et les
opioïdes endogènes; ces derniers joueraient un rôle dans la dépression postcri-
tique et l’état réfractaire des neurones après la crise.
– Des processus d’hypersynchronie neuronale qui ne sont pas seulement liés à
la synchronisation d’activités synaptiques. De plus en plus d’études font état
Phénomènes paroxystiques : vers l’épilepsie 111

de l’importance des gap junctions ou desmosomes dans les processus d’hyper-


synchronie pathologique (voir p. 32 et 110, figure 4.8); ces gap junctions
existent au niveau des cellules gliales mais également au niveau des prolonge-
ments d’interneurones inhibiteurs dénommés neurones LTS (Low Threshold
Spiking : neurones à bas seuil de décharge). Dans un tissu épileptique ou une
lésion dans laquelle s’établit une neurogenèse (sprouting), l’apparition de gap
junctions ou leur ouverture anormale semble impliquée dans l’apparition
d’une hypersynchronie pathologique. Si dans de nombreuses zones cérébrales
ces gap junctions sont relativement quiescentes, elles peuvent être réactivées
très rapidement sous l’effet de certains seconds messagers ou par des change-
ments de pH (lors d’une alcalose déclenchée par une décharge neuronale);
c’est ainsi que l’hyperpnée pratiquée de l’EEG, par l’alcalose qu’elle induit,
entraînerait une ouverture des gap junctions expliquant l’apparition de
paroxysmes au cours de cette épreuve d’activation.
– Compte tenu de la richesse en connexion des neurones et de leur caractère
massivement récurrent, les circuits neuronaux peuvent être l’objet de phéno-
mènes d’embrasement des activités neuronales synchrones dans le réseau avec
des phénomènes de feed-back positif et d’interaction en « ping-pong » entre
soma et dendrites.

Hyperexcitabilité et hypersynchronie, la participation gliale


Nous avons vu l’importance du couplage métabolique entre neurones et glie
(voir p. 101). Les astrocytes, que l’on pensait électriquement inexcitables,
présentent une excitabilité calcique de telle sorte que les neurones et les
cellules gliales « dialoguent » selon différents modes. L’activation des cellules
gliales entraîne une augmentation de calcium intraglial (vagues calciques
gliales) qui favorise la libération par la glie de neuromédiateurs (glutamate,
ATP, sérine) à proximité des terminaisons pré- et postsynaptiques (notion de
gliotransmission). Le caractère syncitial des cellules gliales facilite en outre
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

les synchronies neuronales.


Les PDS neuronales sont associées à des dépolarisations gliales longues et
prolongées reflétant une augmentation intragliale de potassium (fonction
gliale de tampon spatial potassique) provenant de l’excitation synchrone de
larges populations de neurones.
Les astrocytes interviendraient ainsi dans la genèse et/ou la propagation ou
l’amplification des crises épileptiques :
– par la libération de glutamate dans un espace de 100 microns intéressant
plusieurs neurones (hypersynchronie);
– par un défaut de recapture du potassium entraînant une hyperexcitabilité
neuronale;
– en facilitant la PDS ou étant à son origine comme le suggèrent les toutes
dernières études.
Dans des lésions cérébrales, la modification du métabolisme glial (glie réactive)
conduit probablement à une épileptogenèse. Il semble que la présence d’une glie
pathologique soit une caractéristique universelle de l’épilepsie focale : les astro-
cytes sont hypertrophiés, leur nombre croît et leurs caractéristiques fonctionnelles
112 Bases de la sémiologie et de l’interprétation de l’EEG

sont modifiées. Les astrocytes réactifs « irriteraient » les neurones en déformant


l’arbre dendritique et en réduisant l’élimination du potassium extracellulaire.

Canalopathies : de l’inné à l’acquis


Les propriétés excitables des neurones et des cellules gliales relèvent de récep-
teurs de neurotransmetteurs couplés à des canaux ioniques (récepteurs AMPA
du glutamate, GABA A ou B, nicotiniques de l’acétylcholine…). Pour de
nombreux auteurs, ces canaux ioniques sont le facteur clé, la voie finale
commune des processus épileptiques, la survenue de paroxysmes étant liée à
une pathologie de ces canaux (canalopathie) innée et/ou acquise.
Ainsi, des canalopathies affectant la stabilité des potentiels de membrane (par
exemple des anomalies de sous-unités de récepteur GABA A) ont été retrou-
vées dans certaines formes familiales d’épilepsie. Des défauts de maturation
des récepteurs GABA A (canal chlore) sont ainsi évoqués pour expliquer le
maintien chez l’adulte des propriétés des canaux embryonnaires. Chez
l’embryon, ce récepteur est normalement excitateur. Il devient inhibiteur chez
l’adulte. Le retard de maturation de ce canal provoque une sortie de Cl– lors de
l’activation du récepteur GABA A et donc une dépolarisation (et non une
hyperpolarisation) facilitant la survenue de décharges (épilepsies généralisées
primaires). Une maturation ultérieure pourrait expliquer la tendance de ces
épilepsies à s’améliorer après l’enfance et à disparaître après 40 ans.
La multiplicité des facteurs impliqués, les liens entre les facteurs génétiques et
acquis, la distinction parfois floue entre épilepsie focale ou généralisée, font
que les cadres anciens d’épilepsie primaire ou secondaire sont devenus obso-
lètes. En réalité, il semble que dans la majorité des épilepsies, y compris les
épilepsies acquises (dites symptomatiques), il existe une interaction plus ou
moins intense entre les facteurs génétiques (susceptibilité à l’épilepsie) et les
facteurs acquis (figure 4.9).
Dans les épilepsies purement génétiques dites idiopathiques (30 % des épilep-
sies), celles qui présentent une transmission mendélienne monogénique sont
rares (en dehors des épilepsies survenant sur des aberrations chromosomiques
ou des erreurs innées du métabolisme) et sont le plus souvent liées à une
anomalie d’un canal ionique (sodium, potassium) ou d’une sous-unité de
récepteur GABA ou glutamate. Le plus souvent, les épilepsies idiopathiques
sont oligogéniques ou plurigéniques avec une composante environnementale
(au sens large) plus ou moins marquée.
Plus étonnant est le fait que dans les épilepsies acquises, il existe une canalopa-
thie acquise en relation, par exemple, avec des modifications de transcription
(canalopathies transcriptionnelles), des anomalies de conformation, de densité
ou de stœchiométrie pouvant être à la base des phénomènes paroxystiques et
pouvant survenir au cours même du développement des crises.

Les divers visages des paroxysmes cérébraux


L’apparition d’hypersynchronies pathologiques dans un cerveau peut prendre
de nombreuses configurations, à la fois structurelles, évolutives et cliniques. La
Phénomènes paroxystiques : vers l’épilepsie 113

Un seul gène (rare) : épilepsies monogéniques


Canal potassique : KCNQ2, KCNQ3, LGI1
Canal sodique : SCN2A, SCN1B, SCN1A,
Récepteur nicotinique : CHRNA4, CHRNB2
Récepteur GABA A : GABRD, GABRG2, BABRA1
Plusieurs gènes :
épilepsies oligo ou Traumatisme
plurigéniques complexes Hypoxie
(fréquent) Ischémie

Interactions entre
les facteurs génétiques et acquis,
par le biais des canaux ioniques

Épilepsies Épilepsies
idiopathiques symptomatiques

Canalopathies Canalopathies
héréditaires acquises
Altération
Anomalies de la fonction Modification
de structure des canaux de densité
ioniques
Anomalies Facteurs chimiques
de transcription
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

exogènes (alcool, toxiques)

Anomalies
Crises antérieures
de maturation
Processus auto-immuns

Hyperthermies Facteurs endocriniens


Plasticité des canaux

Fig. 4.9. Rôle des canalopathies innées ou acquises.


L’ordonnée de la courbe reflète la proportion de survenue des épilepsies en
fonction du type d’étiologies dans ce continuum (d’après Berkovic et al.,
Human Epilepsies : Interaction of genetic and acquired factors. Trends
Neurosci., Elsevier, 2006; 29 (7) : 391-397, schéma modifié. Avec la permis-
sion d’Elsevier Masson SAS).

crise épileptique est un mode de présentation de ce type de phénomènes. La


répétition des crises produit la maladie épileptique ainsi définie : « L’épilepsie
est un désordre du cerveau caractérisé par une prédisposition durable à générer
des crises épileptiques et par les conséquences neurobiologiques, cognitives,
114 Bases de la sémiologie et de l’interprétation de l’EEG

psychologiques et sociales de cette condition. La définition de l’épilepsie


requiert la survenue d’au moins une crise épileptique. » 1
D’une manière générale, une caractéristique des activités paroxystiques
épileptiques ou périodiques est d’être renforcée ou déclenchée par les
activations : hyperpnée (dont on a vu l’effet sur les gap junctions) ou SLI (qui
démasque fréquemment la présence d’une prédisposition épileptique d’origine
génétique) (voir tableau 4.II).

Ondes lentes angulaires, pointes dégradées


et bouffées de pointes
Tous les paroxysmes ne se dévoilent pas dans la symptomatologie bruyante
d’une crise Grand Mal. Très souvent, dans le décours d’EEG, notamment chez
des patients âgés ou présentant des pathologies hypoxiques, métaboliques,
neurodégénératives ou infectieuses l’on n’observe pas de pointes, pointes-
ondes ou polypointes parfaitement constituées.
L’« irritation cérébrale » se traduit simplement par des ondes lentes angulaires
(sharp slow waves) souvent infracliniques ou en tout cas dont le lien avec une
symptomatologie n’est pas clair et qui signalent la survenue de processus
d’hypersynchronie. Dans d’autres cas, des pointes lentes ou dégradées parsè-
ment le tracé. Enfin, parfois, des bouffées sporadiques de pointes et/ou des
aspects de pointes présentant une rythmicité plus ou moins avérée sont
observés.
Pour le moins, ces grapho-éléments ne sont pas normaux. Ils traduisent des
états de souffrance cérébrale modérée dans lesquels des dysrégulations de
l’activité neuronale sont présentes mais qui ne constituent pas forcément des
états précritiques, en raison notamment de leur absence d’organisation tempo-
relle (caractère aléatoire). Ils traduisent un état d’hyperexcitabilité neuronale
pathologique, souvent peu péjoratif.

De la pointe à la crise
La transition entre la génération d’une seule PDS focale pendant la période
intercritique et la crise est un processus complexe et assez mal connu mais
semble associé à une perte progressive de l’hyperpolarisation suivant la
décharge et à l’apparition de bouffées de plus en plus prolongées et répétées
au cours de cette hyperpolarisation.
Les théories classiques de la genèse des processus paroxystiques faisant inter-
venir la seule notion de déséquilibre entre les processus inhibiteurs et
excitateurs semblent insuffisamment opératoires, même si la place des neuro-
transmetteurs inhibiteurs (GABA) ou excitateurs (glutamate, aspartate) reste
d’actualité, notamment comme fondements du traitement antiépileptique.
Nous avons vu dans le chapitre 2 que les fonctions cérébrales dépendent de

1. Définition de consensus donnée par la Ligue internationale contre l’épilepsie et le Bureau pour
l’épilepsie (Epilepsia 2005; 46 (4) : 470-472).
Phénomènes paroxystiques : vers l’épilepsie 115

réseaux de neurones qui sont en interaction et sont le siège d’oscillations


complexes qui dépendent notamment des interneurones inhibiteurs, des inter-
actions entre réseaux, de l’efficacité des synapses et des propriétés
intrinsèques des neurones du réseau. L’apparition d’un processus épileptique
peut être pensée comme une propriété émergente de tels réseaux neuronaux.
Les analyses de l’EEG par les mathématiques du chaos ont montré :
– que la crise épileptique présente une structure hautement non linéaire;
– que la dimension de complexité de l’EEG baisse lors de l’apparition de la
crise traduisant la généralisation progressive des synchronisations neuronales
dans les réseaux oscillants;
– que la crise apparaît alors comme une modification des attracteurs chaoti-
ques de l’activité cérébrale (une catastrophe au sens de mathématique de
Thom avec des discontinuités phénoménologiques et des conflits entre attrac-
teurs) (voir p. 16).
Selon cette approche, la crise peut être décrite comme une transition entre
états de systèmes dynamiques non linéaires avec des bifurcations dues à des
changements (simultanés) d’un ou de multiples paramètres de contrôle
comme :
– l’extension plus grande de l’activité neuronale;
– un recrutement neuronal;
– une augmentation de la transmission excitatrice;
– une défaillance des systèmes inhibiteurs;
– un changement des propriétés intrinsèques des neurones (par exemple une
modification des conductances des différents canaux ioniques ou bien une
modification des taux de certains ions, voire des anomalies de la stabilité
membranaire).
La multiplicité des paramètres rend alors compte de la haute dimensionnalité
des attracteurs de l’activité cérébrale. Ainsi on comprend mieux le caractère
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

dynamique et variable de l’activité paroxystique : extrêmement régulière dans


les paroxysmes périodiques qui témoignent de la gravité de l’agression (isché-
mique, infectieuse), plus aléatoire dans les pointes, pointes-ondes ou
polypointes intercritiques.
Les modifications de la dimension de complexité précèdent la crise de
plusieurs minutes, permettant ainsi d’envisager de réaliser la prédiction de la
survenue de crises épileptiques.

Épilepsies focales et leur généralisation secondaire


Dans les épilepsies focales, l’altération localisée des fonctions cérébrales
– souvent due à des changements pathologiques (tumeur, AVC) ou plus rare-
ment à une diathèse 1 génétique (épilepsie du lobe frontal autosomique

1. Ensemble de symptômes et de troubles, de nature et de localisation diverses, atteignant un indi-


vidu simultanément ou successivement, supposés avoir une origine commune.
116 Bases de la sémiologie et de l’interprétation de l’EEG

dominante) – s’accompagne de crises commençant de manière localisée et


pouvant diffuser par le recrutement d’autres aires ou réseaux (tracés n° 36-38).
On doit conserver à l’esprit que tous les réseaux neuronaux ne sont pas égaux
face aux processus de synchronisation, les structures temporales (notamment
l’hippocampe) étant les plus fragiles de ce point de vue car elles présentent à
la fois de nombreuses connexions excitatrices récurrentes, de nombreux
neurones déchargeant en bouffées et une forte plasticité synaptique (avec des
connexions excitatrices entre neurones déchargeant simultanément et de
manière répétée).
Dans les lésions cérébrales, différents mécanismes peuvent générer des
processus d’hypersynchronie : l’activation gliale dans des zones de cicatrisa-
tion (figure 4.10), des processus hypoxiques dont on pense qu’ils induiraient
des canalopathies acquises, des anomalies métaboliques conduisant à des alca-
loses et à l’augmentation des gap junctions.
Dans les tumeurs primitives du SNC, très épileptogènes, de nombreux phéno-
mènes concourent à la génération de processus paroxystiques : augmentation
considérable du nombre d’astrocytes avec libération de glutamate et anomalie
de la régulation du K+ extracellulaire, perte des synapses inhibitrices, alcalose
métabolique, changement des concentrations ioniques, modifications des
concentrations d’acides aminés et des facteurs de croissance dans la tumeur et
la zone péritumorale (tracé n° 32).
La propagation de la crise dans le néocortex ou le cortex hippocampique
s’effectue à une vitesse de 70 à 200 mm/s. Lors de la généralisation, le plus
souvent, les décharges anormales diffusent dans de multiples zones corticales
et sous-corticales.
La transition vers une crise généralisée se fait en plusieurs étapes : a) une
disparition du rythme de fond, b) une période (courte, parfois peu visible)
d’activités recrutantes puis c) une période de rythmes à 10 Hz augmentant en
amplitude et diminuant en fréquence (phase tonique de 10 à 20 secondes) et
correspondant au niveau neuronal à une période de dépolarisation tonique du
potentiel de membrane surchargée de potentiels d’action répétés à 10 Hz, d)
l’apparition d’une phase avec des pointes-ondes correspondant à une fragmen-
tation de cette activité tonique (phase clonique) avec au niveau cellulaire des
bouffées irrégulières de PA et des hyperpolarisations. La période clonique
prend fin avec un potentiel de membrane hyperpolarisé correspondant à la
dépression postcritique qui se traduit à l’EEG par un silence électrique suivi
d’activités lentes delta, puis thêta.

Épilepsies généralisées primaires


Les épilepsies généralisées primaires sont caractérisées par des crises surve-
nant dans le cortex en raison d’un abaissement généralisé du seuil épileptique
Ce sont des pathologies dans lesquelles le facteur génétique (autosomique
dominant) prend une grande importance avec des gènes dont la pénétrance est
variable et décline vers l’âge de 40 ans. Il s’agit des épilepsies avec crises
tonicocloniques de type Grand Mal (GM), le Petit Mal absence (PM) (tracé
n° 35) et les épilepsies myocloniques. Ces épilepsies sont caractérisées par des
Phénomènes paroxystiques : vers l’épilepsie 117

Processus d’épileptogénèse :
• Changement dans les réseaux neuronaux
• Phénomènes de dépolarisation
• Anomalies des systèmes inhibiteurs
• Anomalies de la recapture gliale du K+
• Processus éphaptiques (hypoxie , alcalose)
• Cicatrices gliales
• Canalopathies innées, acquises
• Excitants centraux, sevrages psychotropes

CRISE

PA ectopiques ↑
(antidromiques)

Seuil de décharge
des pointes ↓

Activation des Augmentation


Dépolarisation récepteurs NMDA ↑ de la décharge
Augmentation de paroxystique
=> dépolarisations
[K+]e
prolongées
Inhibition GABA A ↓
PPSI ↓
Gonflement Espace extra- Couplage
cellulaire cellulaire ↓ éphaptique ↑

ARRET DE LA
CRISE

Transmission synaptique ↓
Courants Na+/ Ca++ ↓
Dépression
Courants potassiques ↑ post-critique
Activité des pompes Na+/K+↑

Fig. 4.10. Génération de la crise.


© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

[K+]e = concentration de potassium extracellulaire. PA : potentiel d’action;


PPSI : potentiel postsynaptique d’inhibition.

décharges de pointes-ondes à 3-4 Hz. Les épilepsies myocloniques sont carac-


térisées par des décharges de polypointes. Ces crises d’épilepsies peuvent être
déclenchées par la SLI et les périodes intercritiques sont souvent normales (en
dehors d’un rythme postérieur de 2 à 4 Hz dans le PM, rythme activé invaria-
blement par l’HPN). Les tracés de sommeil de ces épilepsies primaires sont
anormaux. Dans ces épilepsies, les pointes-ondes sont fréquemment intriquées
avec les K-complexes et soulignent la possibilité d’anomalies de l’éveil
(« dyshormia ») (figure 4.11). Les stimuli éveillants jouent un rôle très impor-
tant dans la genèse des bouffées de pointes-ondes qui sont précédées d’une
variation négative ultralente de potentiel traduisant l’implication des affé-
rences thalamiques. De très brèves périodes d’éveil précèdent les absences
PM chez les sujets éveillés.
Les crises Grand Mal primaires (idiopathiques) se présentent sous la forme
d’une crise tonicoclonique telle qu’elle a été décrite lors de la généralisation
118 Bases de la sémiologie et de l’interprétation de l’EEG

Hyperpnée
Age
Facteurs Lésion cérébrale
génétiques possible
ETAT
INTERCRITIQUE CRISES

• Bouffées de Pointes DYSHORMIA


ondes à 3-3,5 Hz (mécanismes
• Sommeil anormal anormaux de l’éveil)
• Pointes associés à Petit Mal
des K-complexes
Grand Mal
• Bouffées de Pointes PHOTOSENSIBILITE
ondes à 4Hz Epilepsies
• Sommeil pouvant myocloniques
être normal

Facteurs Lésion cérébrale


génétiques Age possible
Hyperpnée

Fig. 4.11. Liens entre anomalies du sommeil et photosensibilité dans les épilep-
sies généralisées primaires (d’après Niedermeyer et Lopes da Silva,
Electroencephalography : Basic Principles, Clinical Applications and Related
Fields. Lippincott, Williams and Wilkins. 1999, 4e éd., p. 528).

des crises focales. Elles peuvent être déclenchées chez le patient possédant le
trait épileptique par un stimulus lumineux périodique (boîte de nuit, écrans de
télévision…), un stimulus auditif, un arrêt brutal du traitement antiépileptique,
la prise d’un toxique (alcool…), des modifications endocriniennes (épilepsie
cataméniale…) ou par une hyperthermie (convulsions fébriles), illustrant ainsi
le recouvrement entre la prédisposition épileptique d’origine génétique et les
conditions environnementales (au sens large du terme).
Les épilepsies Petit Mal absences sont en relation avec des anomalies des
oscillations des neurones des boucles thalamocorticales, bien qu’il existe aussi
de subtiles altérations corticales chez les patients atteints d’absences. Selon
certaines hypothèses, le déclenchement de ces crises serait cortical et se
propagerait rapidement. Une caractéristique du Petit Mal absence est que,
dans la suite immédiate de l’épisode critique, il n’existe aucune interruption
des capacités cognitives (tracé n° 35), contrastant ainsi avec le coma ou les
troubles de la conscience qui suivent l’épisode tonicoclonique d’une crise
Grand Mal.
Le grapho-élément caractéristique du Petit Mal est la PO à 3 Hz, correspon-
dant à une modification (ralentissement) de l’activité oscillatoire des systèmes
thalamiques et thalamocorticaux responsables de la génération des fuseaux.
Lors de la génération de ceux-ci, les oscillations impliquant les neurones thala-
mocorticaux et réticulaires durent de 70 à 150 ms, autorisant une fréquence des
activités entre 6 et 15 Hz. Dans le Petit Mal, ces mêmes oscillations durent
Phénomènes paroxystiques : vers l’épilepsie 119

300 ms, en raison d’une activation anormale des récepteurs GABA B (liées à
un canal calcique) et des canaux calciques régulant les décharges des oscilla-
tions corticales. On comprend alors que l’éthosuccimide, en bloquant les
courants calciques à bas seuil, agisse sur les crises Petit Mal.

Paroxysmes périodiques
Les décharges périodiques ou quasi périodiques sont des décharges récur-
rentes ou des patterns de caractère paroxystique mais qui ne sont pas
habituellement associés avec des processus épileptiques caractérisés par des
crises récurrentes de manière chronique. Ces activités périodiques ou pseudo-
périodiques sont les marques de pathologies sévères du SNC avec des
propriétés paroxysmales ou même épileptogènes. On ne sait pas ce qui préside
à la survenue de ces processus périodiques et leur physiopathologie est mal
connue. Il a été récemment proposé que la périodicité des grapho-éléments
serait plutôt en relation avec des atteintes combinées de la substance blanche
et de la substance grise corticale et sous-corticale, expliquant ainsi leur carac-
tère péjoratif et leur apparition dans des AVC ou des tumeurs.
Les PLEDS (Periodic Lateralized Epileptiform Discharges) qui surviennent
lors de lésions du cerveau antérieur sont hautement associées à des crises
épileptiques et des états confusionnels. Pour certains auteurs, les PLEDS
constituent la signature EEG d’un état physiopathologique dynamique dans
lequel un processus neurobiologique instable crée un continuum critique-
intercritique en lien avec la nature du dommage neuronal sous-jacent, la capa-
cité préexistante du patient à développer des crises épileptiques et la
coexistence de désordres métaboliques. Les PLEDS seraient directement en
rapport avec les processus d’hyperexcitabilité localisée, due à l’augmentation
des aminoacides excitateurs (glutamate) au sein d’une zone de pénombre d’un
AVC. Plus récemment, il a été suggéré que les décharges périodiques épilepti-
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

formes latéralisées ou bilatérales ne constituaient pas des décharges


intercritiques mais plutôt un état de crise constituant souvent la prolongation
d’un état de mal. Les BIPLEDS (ou Bilateral Independent PLEDS) sont des
activités périodiques bilatérales mais indépendantes et asynchrones (tracés
n° 17, 18, 20, 21, 26-29).

Ondes lentes corticales et syndrome de Lennox-Gastaut


Au cours du syndrome de Lennox-Gastaut, des crises généralisées toniques
(éventuellement précédées d’une décharge de pointes-ondes) sont souvent
associées à des absences complexes, des crises atoniques ou des myoclonies.
Dans ce syndrome, les crises sont aggravées lors du sommeil et apparaissent
sous la forme d’activités diffuses de pointes-ondes lentes et de rythmes
rapides à 10-12 Hz qui seraient en relation avec la transformation patholo-
gique des ondes lentes corticales (voir p. 48-49) en pointes-ondes lentes avec
des phénomènes d’hypersynchronie entre des zones corticales et ou entre le
cortex et le thalamus.
120 Bases de la sémiologie et de l’interprétation de l’EEG

Hypsarythmie
La désorganisation totale du tracé, le mélange anarchique de pointes, d’ondes
lentes, diffuses et en totale désorganisation de phase avec disparition de la
synchronie constitue le processus d’hypsarythmie (étymologiquement :
« hauts rythmes ») que l’on retrouve dans le syndrome de West (syndrome des
spasmes en flexion). Il s’agit d’une encéphalopathie épileptogène accompa-
gnée de détérioration mentale, d’étiologie multiple. Dans ce syndrome, on
retrouve également une soudaine désynchronisation de l’EEG constituant une
crise dite électrodécrémentielle (tracé n° 40).

Aspects métaboliques des crises épileptiques


La crise épileptique est à l’origine de la plus grande demande métabolique
cérébrale et elle met en cause les capacités homéostatiques du cerveau.
L’autorégulation du débit sanguin cérébral est abolie au cours des crises avec
une augmentation de celui-ci, indépendamment de la pression sanguine. Dans
les crises généralisées, l’augmentation du débit sanguin cérébral ne compense
pas l’hypoxémie due à la réduction de la ventilation. Dans l’état de mal, se
produisent invariablement une acidose lactique, une chute de la pression arté-
rielle et une diminution du débit sanguin cérébral.
Lors de la crise, on observe une très forte augmentation de consommation de
glucose et d’oxygène avec une augmentation du métabolisme d’un facteur 1,5
à 5. La glycolyse est activée avec décroissance des taux de glucose et de
glycogène et production accrue de lactate, chute des taux d’ATP et de phos-
phocréatine dépendant du maintien de l’oxygénation. On observe une
augmentation du calcium intraneuronal et glial. Lors de la crise, les lipides de
membrane sont métabolisés avec augmentation des acides gras libres, activa-
tion des phospholipases, libération d’acide arachidonique et génération de
radicaux libres (voir figure 4.5). La fonction des canaux ioniques est altérée.
Une inhibition de la synthèse protéique et des acides nucléiques, indépendante
de l’hypoxie ou des complications systémiques de la crise, est observée au
bout de 30 minutes. Entre 30 et 120 minutes, progressivement, les prolonge-
ments cellulaires gonflent et les mitochondries sont surchargées en calcium.
Des processus de croissance axonale et de neurogenèse anormales surviennent
avec des altérations de la connectivité. Des nécroses et des apoptoses se
produisent.

Contrôle physiologique des crises et son échec : état de mal


Comment s’effectue l’arrêt de la crise?
Une des questions fondamentales de l’épileptologie est comment les crises
commencent, comment elles se développent et comment elles se terminent.
Ces questions n’ont reçu à ce jour que des réponses partielles.
Après une crise tonicoclonique de type Grand Mal, la dernière contraction
clonique est suivie par un aplatissement du tracé de quelques secondes puis
d’une activité très lente de type delta irrégulière (la stupeur postcritique).
Phénomènes paroxystiques : vers l’épilepsie 121

Progressivement, on observe une augmentation de la fréquence de l’EEG de la


bande thêta à la bande alpha. L’organisation d’une activité alpha postérieure
correspond à la réapparition de l’activité de veille.
Deux processus, non exclusifs, sont de nature à expliquer l’arrêt de la crise : a)
l’activation de systèmes inhibiteurs (GABAergiques et peptidergiques) asso-
ciée à l’inactivation des systèmes excitateurs (glutamatergiques et
peptidergiques) et b) l’épuisement métabolique des neurones et cellules
gliales.
Des études récentes suggèrent que la fin de la crise est caractérisée par une
forte dépolarisation (block de dépolarisation) dont les mécanismes seraient
différents (et indépendants) de l’initiation ou de la propagation. Cette dépola-
risation serait modulée à la fois par une inhibition et par une excitation
synaptique et pourrait être un processus très complexe, impliquant notamment
la glie.
L’état postcritique est en général associé à un hypométabolisme cérébral qui
correspond à un épuisement des réserves énergétiques neuronales. Une dimi-
nution du rapport ATP/ADP provoque l’ouverture de canaux potassiques
sensibles à l’ATP qui régulent l’activité neuronale dans les cas de détresse
métabolique. L’ouverture de ces canaux potassiques produit une hyperpolari-
sation bloquant l’activité neuronale.
Le striatum et le locus niger semblent également impliqués dans le contrôle
des crises par le biais des systèmes GABAergiques du locus niger et des
boucles cortico-nigrostriatales. D’autres systèmes sous-corticaux comme le
thalamus, les noyaux sous-thalamiques, le cervelet mais aussi le nerf vague
(Xe paire crânienne) semblent également concourir au contrôle de la diffusion
des crises.
Les actions de ces structures sur les crises sont à la base d’un courant théra-
peutique qui a bénéficié d’un développement récent et qui consiste en la
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

stimulation de ces structures. L’application la plus récente et la plus réussie est


la stimulation du nerf vague qui entraîne la diminution de 50 % des crises dans
les épilepsies réfractaires avec des effets secondaires réduits. Cette efficacité
est similaire à celle des thérapeutiques pharmacologiques. Son action, mal
connue, pourrait passer par l’activation des neurones thalamocorticaux, limbi-
ques et/ou du locus coeruleus (neurones noradrénergiques).
Les crises peuvent être également contrôlées (dans un petit nombre de cas et
particulièrement chez des enfants avec un syndrome de Lennox-Gastaut) par
des modifications du régime alimentaire, notamment un régime cétogène,
riche en lipides, pauvre en protéines et très pauvre en sucre. Le mécanisme par
lequel l’augmentation des corps cétoniques cérébraux réduit la survenue des
crises est mal connu mais il souligne l’importance des processus métaboliques
dans les altérations pathologiques de l’électrogenèse.

États de mal épileptiques : urgence EEG par excellence


L’état de mal représente l’échec du mécanisme homéostatique de suppression
de crises. Classiquement, la prolongation de la crise au-delà de 30 minutes
122 Bases de la sémiologie et de l’interprétation de l’EEG

constitue un état de mal mais la définition évolue. Un état de mal peut survenir
à la suite de n’importe quel type de crise (généralisée ou focale).
De nombreux auteurs en proposent trois phases :
– l’état de mal imminent, défini comme la survenue de crises intermittentes ou
continues pendant au moins 5 minutes sans retour à la conscience et dans
lequel l’augmentation inhabituelle de la longueur des crises (habituellement
les crises durent environ 60 secondes) suggère qu’un phénomène plus sévère
survient;
– l’état de mal constitué, pendant lequel les crises (cliniques et/ou les
décharges paroxystiques) durent plus de 30 minutes sans reprise de la
conscience; au cours de cette phase, les résistances pharmacologiques
surviennent de même que les altérations neuronales;
– l’état de mal larvé (« subtil » status) correspondant à la prolongation d’un
état de mal constitué dans lequel les signes cliniques et l’EEG sont moins
florides (tracé n° 39).
La reconnaissance et le traitement de l’état de mal sont essentiels en raison :
– de la mortalité élevée (notamment chez les sujets âgés);
– des dégâts occasionnés sur le parenchyme cérébral et de la présence de
paroxysmes dans leurs suites chez près de 50 % des patients;
– de l’apparition d’une pharmacorésistance qui s’aggrave avec le temps;
– de la faible efficacité des barbituriques et autres drogues GABAergiques
(qui demandent des doses proches de leurs doses toxiques);
– du faible nombre de drogues efficaces (essentiellement antiglutamatergi-
ques, directes ou indirectes).
La transition entre la crise épileptique et l’état de mal proviendrait de
plusieurs processus principaux survenant lors de la répétition des crises qui
deviennent auto-entretenues :
– une endocytose d’une partie des récepteurs GABA A expliquant la
défaillance de l’inhibition et la pharmacorésistance aux barbituriques;
– une augmentation des récepteurs au glutamate (AMPA ionique et NMDA
métabolotrophique) dans la membrane synaptique;
– des anomalies de fonctions des enzymes synaptiques avec autophosphoryla-
tion des calmoduline-kinases II;
– des changements inadaptés de l’expression des neuropeptides avec augmen-
tation des neuropeptides proconvulsivants (tachynines, substance P,
neurokinine B) et déplétion des neuropeptides inhibiteurs (dynorphine, gala-
nine, somatostatine, neuropeptide Y).
Les décharges considérables et excessives des neurones dans l’état de mal sont
à l’origine de processus excitotoxiques et de dysfonctions mitochondriales
pouvant conduire à des morts neuronales avec nécroses ou bien à des
processus d’apoptose. Un œdème cérébral peut survenir et des atrophies sont
souvent notées. De plus, les états de mal induisent une épileptogenèse puisque
le risque de crise spontanée après un état de mal est trois fois plus important
qu’après une crise normale.
Phénomènes paroxystiques : vers l’épilepsie 123

On comprend alors mieux que la suspicion d’état de mal soit une véritable
urgence EEG et qu’un traitement adapté doive être conduit rapidement : dans
l’état de mal time is brain.

Contrôle pharmacologique des processus paroxystiques


De très nombreux articles, livres et enseignements sont consacrés aux médica-
tions antiépileptiques. Nous ne détaillerons pas ici ce sujet mais présentons à
la figure 4.12 les principaux modes d’action de ces médicaments. On note
qu’ils se répartissent entre une facilitation des processus inhibiteurs GABAer-
giques et une inhibition de la neurotransmission et de l’activité des récepteurs
glutamatergiques. En fait, ces molécules ont souvent plusieurs modes d’action
simultanés. On notera également qu’aucune molécule n’agit sur les transmis-
sions peptidergiques inhibitrices de la crise. Enfin, on entrevoit la possibilité à
terme de jouer sur la fermeture des gap junctions pour bloquer l’hypersyn-
chronie. Certaines drogues peuvent enfin aggraver les processus paroxystiques
(Vigabatrin dans les crises généralisées tonicocloniques…).
Dans tous les cas, les drogues antiépileptiques doivent être introduites avec
précaution mais surtout arrêtées progressivement. Il est fréquent, en effet, de
voir des patients présenter des crises par arrêt brutal de leur traitement antiépi-
leptique (syndrome de sevrage). Par ailleurs, dans le cas des benzodiazépines,
la présence du traitement antiépileptique est attestée par les rythmes rapides à
prédominance antérieure. Un surdosage est suspecté lorsqu’en présence de
tels rythmes (éventuellement très diffus) (tracés n° 15 et 30) un ralentissement
de l’électrogenèse a lieu, réactif, avec des fluctuations de la vigilance.

L’introuvable classification des crises épileptiques


La complexité des épilepsies et des processus paroxystiques, comme le nombre
croissant de nouvelles données scientifiques, font que la classification des
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

épilepsies de la ligue internationale contre l’épilepsie proposée en 1981 puis


révisée en 1989 est de nouveau en cours de révision. En effet, les dichotomies
primaire/secondaire, généralisée ou focale, simple/complexe ne font pas droit à
de nombreuses variétés intermédiaires. C’est pourquoi, des modifications
significatives du vocabulaire de l’épileptologie sont progressivement propo-
sées, témoignant de l’évolution des concepts. Le terme « partielle » a été
remplacé par « liée à une localisation ». Les mots « convulsions », « convulsifs »
sont remplacés par « crises ». « Idiopathique » et « symptomatique » ont été
conservés, malgré le chevauchement entre les deux concepts, alors que
« cryptogénique » est remplacé par « probablement symptomatique ». La
nouvelle classification propose une description standardisée adaptée à la spéci-
ficité des patients selon cinq axes (tableau 4.VII) Le schéma diagnostique est
alors construit selon des modules flexibles et dynamiques susceptibles d’être
révisés. L’ensemble est en cours de construction.
Ceci suffit à signifier que, même chez les spécialistes, les concepts restent
flous, et, en tout état de cause, évolutifs. C’est pourquoi, dans un abrégé
d’EEG, il ne nous a pas semblé nécessaire de détailler la totalité des épilepsies
et des syndromes épileptiques. Ceci relève de l’épileptologie et d’excellents
Neurones pré-synaptiques

Levetiracetam (Keppra) Phénitoïnes (Dihydan)


Carbamazépine (Tegretol)
Oxcarbazepine (Trileptal)
- Lamotrigine (Lamictal)
Topiramate (Epitomax)
Libération de GABA
transmetteur Glutamate

Glutamate - GABA

-
Récepteurs Canaux Na+ +
Canaux Ca++ Recapture de
NMDA Canal Cl-
GABA
- - Tiagabine (Gabitril)

Phénitoïnes (Dihydan)
124 Bases de la sémiologie et de l’interprétation de l’EEG

Ethosuximide (Zarontin) Phénobarbital (Alepsal, Gardénal) Dégradation du


Gabapentine (Neurontin) Acétazolamide (Diamox) Primidone (Mysoline) GABA
Pregabaline (Lyrica) Felbamate (Taloxa) Clonazepam (Rivotril) -
Topiramate (Epitomax) Topiramate (Epitomax) Diazepam (Valium)
Clobazam (Urbanyl)
Valproate (Dépakine)
Tiagabine (Gabitril)
Vigabatrin (Sabril)
Neurones post-synaptiques

Fig. 4.12. Modes d’action des principaux antiépileptiques. Les produits soulignés sont des drogues de nouvelle génération.
Phénomènes paroxystiques : vers l’épilepsie 125

Tableau 4.VII. Propositions pour la classification des crises


et des épilepsies par le groupe de travail de la Ligue internationale contre
l’épilepsie (d’après Epilepsia 2006; 47 (9) : 1558-1568).

Axes Principales catégories ou groupes


Axe 1 :
phénoménologie
des crises
Axe 2 : type de crise Crises s’arrêtant d’elles-mêmes
– Généralisées
– Focales
Crises continues (états de mal)
– Généralisées
– Focales
Stimuli générant des crises réflexes
Axe 3 : syndromes Épilepsies focales du nourrisson et de l’enfant
épileptiques Épilepsies focales familiales (dominantes)
Épilepsies focales symptomatiques
Épilepsies généralisées idiopathiques
Épilepsies réflexes
Encéphalopathies épileptiques
Épilepsies myocloniques progressives
Crises ne requérant pas forcément le diagnostic d’épilepsie
Axe 4 : maladies Épilepsies myocloniques progressives
fréquemment Désordres neurocutanés (neurofibromatoses)
associées avec Malformations corticales
des crises ou Autres malformations (corps calleux…)
syndromes Tumeurs
épileptiques
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

Anomalies chromosomiques (trisomie 21…)


Maladies monogéniques de type mendélien avec
mécanismes pathogéniques complexes (syndrome de
Rett…)
Erreurs innées du métabolisme
Lésions ischémiques ou anoxiques pré- ou périnatales ou
infections causant des encéphalopathies non progressives
(leucomalacies périventriculaires, VIH…)
Infections postnatales (encéphalites herpétiques)
Autres facteurs postnataux (traumatismes crâniens, AVC,
alcool, ingestion de drogues illégales)
Autres (par exemple, maladie cœliaque, maladie
d’Alzheimer…)
Axe 5 : infirmité Conséquences des épilepsies

documents sont disponibles pour qui veut mieux connaître ce monde fascinant
de l’épilepsie. Il nous semble plutôt pertinent de développer une approche
pragmatique telle que nous la proposerons au chapitre 5.
126 Bases de la sémiologie et de l’interprétation de l’EEG

DÉPRESSION DE L’ÉLECTROGENÈSE, COMA


ET MORT CÉRÉBRALE
Les altérations pathologiques (hors sommeil) de la conscience constituent une
constellation d’états qui vont de la simple obnubilation ou confusion au coma
le plus profond, aréactif.
En fait, la définition du coma repose sur celle de la conscience. D’un point de
vue médical, le sujet comateux est privé de toute conscience et il n’est pas
réactif (ni « éveillable »).
Trois types d’atteintes structurelles (agressions macroscopiques) peuvent
conduire aux différents troubles de la conscience puis au coma :
– des lésions étendues ischémiques, mécaniques et traumatiques concernant la
substance blanche et/ou grise des deux hémisphères avec altérations diffuses
des fonctions neuronales et gliales;
– des lésions du tronc cérébral qui endommagent la formation réticulée et altè-
rent les systèmes régulant les états de vigilance (et donc la réactivité);
– des lésions focales déconnectant la formation réticulée des segments
rostraux (processus d’engagement).
Trois types d’atteintes dites « non structurelles » (ou microscopiques) peuvent
conduire au coma :
– les atteintes métaboliques (hypoxie, ischémie, hypoglycémie);
– les atteintes impliquant le fonctionnement des membranes neuronales et
gliales et leur activité ionique (anesthésiques, médicaments, éthanol, épilep-
sies, anomalies ioniques osmotiques…);
– les intoxications par les toxines neurotropes.

Comas et sémiologie EEG


Différents signes EEG caractérisent les comas (ou les troubles de la vigi-
lance), en fonction de leur profondeur.

Ralentissement diffus
Dans les stades initiaux des comas, le rythme alpha disparaît plus ou moins
progressivement et est remplacé par une activité lente thêta ou delta continue
et diffuse. Puis l’activité delta devient intermittente, rythmique, synchrone et
réactive, survenant de façon répétitive sur l’ensemble du scalp. Cette activité
peut prédominer chez l’adulte au niveau frontal (Frontal Intermittent Rythmic
Thêta Activity ou FIRDA) ou occipital chez l’enfant (Occipital Intermittent
Rythmic Activity ou OIRDA).

Une modification des patterns au cours du sommeil


Chez certains sujets dans le coma, il persiste des figures habituelles du
sommeil (fuseaux et K-complexes). Ces figures apparaissent de manière
cyclique ce qui suggère une efficacité des systèmes inducteurs du sommeil.
Dépression de l’électrogenèse, coma et mort cérébrale 127

Lorsque le coma devient plus profond ces aspects disparaissent indiquant ainsi
un dysfonctionnement cortical ou une atteinte du tronc cérébral. La présence
de fuseaux sur un tracé de coma est un facteur de bon pronostic.

Modification de la réactivité
L’importance du ralentissement généralisé et la présence d’ondes delta de haut
voltage sont corrélées à l’absence de réactivité. Lors de l’aggravation de l’état
de conscience, progressivement, le coma devient aréactif même si les stimula-
tions sont répétées. Des réponses motrices non accompagnées de
modifications de l’EEG ne sont pas d’origine corticale mais proviennent de la
partie basse du tronc cérébral et de la moelle et constituent des réflexes
segmentaires.

Activités paroxystiques
Des activités paroxystiques, pointes, ondes lentes angulaires sont fréquentes
mais pas forcément associées à des crises.

Tracés alternants
Des tracés alternants comprennent des alternances d’activités rapides de bas
voltage avec des activités plus lentes de haut voltage (voir p. 75 note 1). Les
stimulations exogènes pendant les phases d’activités rapides déclenchent des
bouffées lentes delta (réactivité paradoxale). Il semblerait que ces caractéristi-
ques soient en rapport avec un dysfonctionnement des systèmes d’éveil,
temporairement libérés par la dépression des influences corticales inhibitrices.

Activités triphasiques
Des activités triphasiques de haut voltage peuvent être observées non seule-
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

ment dans les comas hépatiques, les états hypoxiques ou dysmétaboliques


mais également dans les états démentiels sévères (notamment la maladie de
Creutzfeld-Jakob).

La dépression de l’électrogenèse
La mort neuronale progressive ou en tout cas la souffrance cérébrale majeure
conduit à l’extinction progressive des activités électriques neuronales (voir
figures 4.5 et 4.7, tracé n° 23). Dans les comas très graves provenant de lésions
du tronc cérébral, on observe une diminution progressive d’amplitude des acti-
vités, un ralentissement majeur sans fréquences rapides ajoutées, des activités
paroxystiques périodiques (PLEDS) ou des bouffées suppressives (tracé n° 21).

Rythme alpha monorythmique aréactif


Un rythme alpha monorythmique aréactif (alpha coma) suit les figures de
bouffées suppressives (tracé n° 22). C’est le signe d’un état pré-mortem. il
traduit la disparition totale des régulations réticulothalamiques.
128 Bases de la sémiologie et de l’interprétation de l’EEG

Remarques générales sur l’EEG des comas


On notera que l’évolution de l’altération des états de conscience vers le coma
et la dépression de l’électrogenèse se fait dans un certain ordre, inverse de la
mise en place de l’électrogenèse chez l’enfant. Il est intéressant de noter en
effet que le tracé discontinu du prématuré extrême est proche de la figure de
bouffées suppressives du coma très grave. La désorganisation de l’activité
chez l’adulte constitue une figure quasi symétrique de l’ontogenèse des
grapho-éléments telle qu’elle est décrite p. 66-73, notamment avec la dispari-
tion des fuseaux. La progression dans la profondeur des comas traduit la
détérioration rostrocaudale des capacités cérébrales.
De nombreuses classifications des comas ont été proposées tentant de lier
l’état clinique et les résultats de l’EEG. Cependant, ces tentatives, pour inté-
ressantes qu’elles soient, butent sur la variété des signes EEG et sur la
présence de thérapeutiques qui modifient considérablement les tracés. Sur un
plan clinique, le score de Glasgow (ou sa variante Glasgow-Liège) est adapté
pour les réanimateurs. La fonction de la neurophysiologie est de fournir un
état des lieux, d’orienter vers une étiologie possible, d’évaluer (notamment par
les PE) l’état fonctionnel des structures nerveuses et de proposer un pronostic.
Il arrive parfois que l’origine du coma soit difficile à préciser. Dans de tels cas, il
est parfois nécessaire d’éliminer deux causes : une imprégnation benzodiazépi-
nique massive (qui génère un tracé de très bas voltage) et une intoxication aux
opiacés. Le test à l’Anexate® (flumazenil, antagoniste des benzodiazépines, anti-
GABA utilisé à la dose de 0,2 mg IV) permet de différencier le coma par impré-
gnation benzodiazépinique d’un coma relatif à une autre cause pharmacologique
ou neurologique. On observe une accélération du tracé et la conscience doit
réapparaître dans les 60 secondes (éventuellement, une seconde dose de 0,1 mg
peut être injectée jusqu’à la dose totale maximale = 1 mg).
Le test au Narcan® (naloxone, antidote des morphinomimétiques sans effet
morphinique, employé à la dose de 1 à 2 microgrammes/kg, IV, en plusieurs
fois, à 5 minutes d’intervalle) est basé également sur un retour à un état de
conscience et permet le diagnostic d’une intoxication aux opiacés.
Ces tests sont plus sensibles que les tests cliniques.

Autres altérations de la conscience


On doit mentionner d’autres altérations de la conscience et de la réactivité qui
doivent être différenciées des comas.
Un sommeil exagéré (différent d’un coma stade I) peut être vu lors de priva-
tions de sommeil, d’ingestion alcoolique (mais on est alors presque dans un
contexte d’encéphalopathie alcoolique) ou d’autres drogues neurotropes.
Le locked-in syndrome. Dans ce syndrome, la conscience n’est pas altérée. Le
patient, complètement paralysé ne peut que réaliser des mouvements verticaux
des yeux et des clignements des paupières. Il s’agit d’un état déafférenté en
raison de lésions de la partie ventrale du pont ou plus rarement du
télencéphale.
Interpréter un EEG 129

Le mutisme akinétique dans lequel le patient ne peut parler ou bouger sponta-


nément et chez lequel on retrouve des lésions étendues corticales,
thalamiques, striatales; c’est un locked-in syndrome extrapyramidal. Il existe
une pauvreté extrême des pensées. Il existe des mouvements de poursuite des
yeux et des tentatives occasionnelles de mouvements ou paroles.
L’état végétatif avec un syndrome apallique : les yeux sont ouverts mais il
n’existe pas de signe de fonction corticale. C’est un état d’éveil sans état
d’interaction dans lequel il y a altération de conscience sans altération de la
capacité d’éveil.

Mort cérébrale
La mort cérébrale pose des problèmes de définitions puisqu’elle est attestée
par des moyens de diagnostic, limités par eux-mêmes.
Le mécanisme crucial de la mort cérébrale est l’hypertension intracrânienne,
par exemple sous l’effet d’un œdème massif. Si la pression intracrânienne est
proche de la pression systémique artérielle, la circulation cérébrale s’arrête et
il n’y a plus d’activité EEG. La nécrose cérébrale conduit à une totale liqué-
faction du cerveau.
Du point de vue de l’EEG, c’est le silence électrique cérébral qui est le signe
majeur de la mort cérébrale. Le plus souvent, seuls les potentiels cardiaques
(ECG) sont enregistrés (avec également des artéfacts dus aux mouvements du
dispositif d’assistance respiratoire) (tracé n° 23). Des activités musculaires
peuvent être également enregistrées lors des réponses aux stimulations noci-
ceptives (réflexes segmentaires qui restent conservés). Les conditions
d’enregistrement très sévères requises, pour affirmer la mort cérébrale avec
une amplification maximale, provoquent la présence de très nombreux arté-
facts sur le tracé.
Les recommandations françaises sur le plan technique sont présentées dans le
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

tableau 4.VIII. On notera que l’EEG n’évalue pas le tronc cérébral. Le


diagnostic de mort encéphalique ne peut être posé que si la destruction du
tronc cérébral est prouvée. C’est pourquoi il est proposé de réaliser soit des
PEATC ou des PES (voir chap. 7). En pratique, le plus souvent, dans le
contexte clinique seul l’EEG est pratiqué.

INTERPRÉTER UN EEG
Interpréter un EEG, c’est en quelque sorte rechercher les indices, souvent
subtils, d’une modification de « l’ambiance » dans laquelle fonctionne le
cerveau d’un patient. Quelques règles simples sont à respecter.
Il y a deux moments dans la lecture d’un EEG : a) une lecture initiale qu’il
faut complète pour détecter les caractéristiques saillantes du tracé, évaluer ce
qui est un artéfact (souvent il est nécessaire de lire une bonne partie du tracé
pour se faire une idée), tenir compte de l’habituation du patient au dispositif
d’enregistrement et b) la lecture « interprétative » qui constitue le temps de
130 Bases de la sémiologie et de l’interprétation de l’EEG

Tableau 4.VIII. Conditions d’affirmation d’une mort cérébrale


en France (voir chap. 7).

Moyen Conditions ou modalités Résultats


Conditions requises • Absence totale de conscience et
d’activité motrice spontanée
• Abolition de tous les réflexes
cérébraux
• Absence totale de ventilation
Clinique spontanée
Conditions d’exclusion • Intoxication médicamenteuse
• Hypothermie
• Désordres métaboliques ou
endocriniens
• Hypotension sévère, encéphalite
PEATC Nuls ou limités à l’onde I.
Confirme la mort du tronc
Potentiels cérébral
évoqués
PES Onde N13 seule persiste, ainsi que
(voir chap. 7)
la réponse tronculaire (point d’Erb)
PEV Persistance du seul pic I (rétinien)
• 8 électrodes minimum, 10 recommandés, Absence d’activité cérébrale dans
plus terre, de même type les conditions suivantes (tracé
Distance interélectrodes minimale de 10 cm stable, isoélectrique pendant
• Sensibilité de 2 µV/mm (au lieu de 10) 30 minutes)
• Constante de temps de 0,3 seconde
• Impédances interélectrodes
< 10 000 Ohms, mais > 100 Ohms.
• Création délibérée d’artéfacts d’électrodes
• Montages classiques puis montages grandes
distances homolatéral et hétérolatéral
• Enregistrement simultané de l’ECG
EEG et du pneumogramme
• Stimulations auditives somesthésiques
(tactiles et douloureuses) répétées
et indiquées sur le tracé
• 30 minutes d’enregistrement
• Enregistrement par un technicien
confirmé
• Si EMG, élimination de celui-ci par
curarisation
Si doute sur l’absence d’activité cérébrale,
le test est répété après un intervalle de
6 heures
Deux carotides internes, Absence de circulation cérébrale
Angiographie
deux cérébrales
Interpréter un EEG 131

description (comptage du rythme de base, analyse plus précise des événe-


ments…) qui va servir de base à l’interprétation.
Un EEG s’interprète toujours plus dans une logique de fréquences que dans
une logique d’amplitude.
L’interprétation d’un EEG sans contexte clinique n’a pas de sens. Très
souvent même, le contexte clinique est mal décrit ou bien a évolué entre la
demande d’examen et le moment de la réalisation de l’enregistrement. Il ne
faut pas hésiter à parler, quand c’est possible, avec le malade et/ou avec le
médecin. L’événement EEG est avant tout un événement électroclinique : un
EEG n’est pas un comptage de globules.
Il faut oser faire des hypothèses. Répondre : « souffrance cérébrale diffuse »
n’amène pas grand-chose; le clinicien s’en doute. Il est plus honnête de
l’aiguiller vers la nature ou l’origine de cette souffrance.
L’interprétation de l’EEG, assez codifiée, contient un nombre important
d’informations implicites que doit décoder le clinicien sur l’état cérébral de
son patient (ainsi que nous le proposons au tableau 4.IX). Le plus souvent, le
clinicien ne possède pas les codes et se contente de lire de manière rapide la
conclusion, souvent trop courte. C’est pourquoi, il nous semble que l’interpré-
tation de l’EEG doit comprendre deux parties :
– la partie classique descriptive (rythme de fond, réactivité…);
– la partie interprétative qui ne doit pas répéter la première mais informer le
clinicien :
- sur ce que l’état du cerveau n’est probablement pas (paroxystique, atteinte
métabolique),
- sur ce qu’est l’état cérébral,
- sur la conduite à tenir.
En effet, il ne faut pas oublier que désormais les jeunes médecins sont attirés
(polarisés) par les images d’IRM et doutent souvent de l’intérêt de l’EEG. Il
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

est donc essentiel que cet examen les aide à comprendre l’état neurologique de
leur patient et à choisir une stratégie diagnostique.

Tableau 4.IX. Décodage d’une interprétation


d’électroencéphalogramme.
Ce qui est écrit dans le compte Ce qu’il faut comprendre
rendu
Le tracé est caractérisé par :

– une activité de fond L’état basal du cerveau est analysé, spontanément, en


absence de stimulation et en état de veille calme.

– de type alpha, bilatérale Ceci sous-entend qu’elle est organisée, c’est-à-dire que le
synchrone, rythme alpha est postérieur, qu’il existe un rythme thêta
centrotemporal et un bêta antérieur.
Ceci sous-entend que les oscillateurs thalamiques
réticulaires fonctionnent normalement de manière
symétrique.

– symétrique La symétrie en rythme et en amplitude est affirmée. Il n’y a


donc pas de souffrance hémisphérique ni de dépression
d’amplitude pouvant correspondre à une perte de neurones. 
132 Bases de la sémiologie et de l’interprétation de l’EEG

 Tableau 4.IX. Décodage d’une interprétation


d’électroencéphalogramme. (suite)
Ce qui est écrit dans le compte Ce qu’il faut comprendre
rendu
– réagissant à l’ouverture des L’activité de base est bloquée à l’ouverture des yeux ce qui
yeux (à l’appel du nom) signifie que la réaction d’arrêt (d’origine réticulaire)
fonctionne bien. Ceci suppose aussi que les voies
thalamocorticales visuelles (auditives) sont perméables. La
conscience est conservée (tracé n° 8).

– mal organisée La topographie des rythmes (item ci-dessus) est désorganisée :


par exemple activité alpha dans les régions antérieures.

– remaniée Souvent (par exemple chez des anciens épileptiques, chez


des alcooliques…), le tracé comprend un rythme de fond
objectivable et réactif mais il est surchargé d’activités mal
organisées, rapides, parfois angulaires, parfois plus lentes.
On dit que le tracé est « moche », l’électrogenèse mal
organisée, sans pour autant trouver d’éléments
pathologiques individualisables ou dont la récurrence
souligne un dysfonctionnement organisé.

– ne réagissant pas à l’ouverture L’intégrité réticulaire des voies thalamoréticulo-corticales


des yeux ou la réactivité des neurones aux potentiels
postsynaptiques excitateurs (PPSE) (barbituriques,
anesthésiques) est sans doute altérée. La non-réactivité est
un signe très important surtout dans les comas.

Le tracé est microvolté et Il s’agit d’activités rapides de faible amplitude ne


désynchronisé permettant pas d’observer la présence ou l’absence de
réactivité, sans fréquence prépondérante caractérisant un
rythme EEG. Ces aspects sont retrouvés dans les surcharges
en benzodiazépines, les patients très anxieux (l’HPN
souvent organise le tracé) et les alcooliques chroniques
(dans ce cas l’HPN n’organise pas le tracé).
On observe la présence :

– d’un rythme en arceaux Rythme physiologique (tableau 4.I, tracé n° 9).

– d’ondes lentes postérieures Rythme physiologique (tableau 4.I, tracé n° 6).

– de rythmes rapides prédominant Il s’agit de rythmes probablement iatrogènes (benzodiazé-


dans les régions antérieures pines), différents de l’électromyogramme (tracés n° 15 et 30).

– de nombreux artéfacts Le tracé contient du signal électrique musculaire. Ce signal


électromyographiques est parfois irréductible. L’interprétation du tracé en est
souvent gênée et elle perd de sa fiabilité. Ce n’est pas
forcément un tracé mal réalisé (tracé n° 9).

– d’épisodes de somnolence Le rythme alpha se fragmente puis est remplacé par du


thêta. Lors d’un bruit ou d’un appel, le rythme alpha
réapparaît. Le patient somnole. En général les fuseaux ne
sont pas présents (tracé n° 13).

– de bouffées delta diffuses de Le sujet s’endort mais présente les rythmes de type sommeil
quelques secondes lent sans que les fuseaux aient été présents. Ceci traduit un
trouble de la régulation de la vigilance (tracé n° 24).

– d’activités plus lentes de type On observe un ralentissement de l’activité de fond qui voit
thêta delta modulant l’activité le remplacement du rythme alpha par des rythmes plus
de fond lents. Ceci traduit une souffrance cérébrale localisée ou
non localisée, plus ou moins marquée (tracé n° 19). 
Interpréter un EEG 133

 Tableau 4.IX. Décodage d’une interprétation


d’électroencéphalogramme. (suite)
Ce qui est écrit dans le compte Ce qu’il faut comprendre
rendu
– diffusant (dans les régions Ce ralentissement, par sa diffusion signe sa gravité
antérieures, dans l’hémisphère (tracé n° 31).
contra latéral)

– d’ondes lentes de morphologie On observe un certain degré d’hyperexcitabilité neuronale,


triphasique traduisant soit une instabilité membranaire par défaut de
substrats (ischémie) soit un défaut d’inhibition (tracé n° 25).

– d’ondes lentes angulaires (ou Ceci est plutôt en faveur d’un processus dysmétabolique
prenant un caractère angulaire) (tracé n° 16).

– de grapho-éléments Il s’agit de la rupture brusque de l’état basal. C’est le


paroxystiques à type de… grapho-élément du processus épileptogène, ce qui ne veut
(suit une description, pas dire que c’est une maladie épileptique ni qu’il s’agit
voir tableau 4.III), isolées, d’une crise. Ce grapho-élément témoigne de
en bouffées l’hypersynchronie neuronale sans préjuger du devenir
épileptique (tracés n° 18, 32 et 38).

– d’activités à caractère Des grapho-éléments très angulaires surviennent à une


rythmique fréquence régulière. Ceci suggère un certain degré
d’organisation de la décharge et correspond à un processus
paroxystique.

– d’une décharge de grapho- Le foyer décharge de manière importante (tracé n° 33).


éléments paroxystiques

– d’une activité paroxystique On ne voit pas de modifications cliniques


infraclinique « macroscopiques ». En fait, il s’agit d’une crise sans clonies,
ou phase tonique, ou déviation du regard. Des signes
d’altérations cognitives seraient détectés avec un examen
clinique fin.

– d’une activité paroxystique se C’est un état de mal, c’est-à-dire une décharge d’activités
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

produisant de façon continue paroxystiques sans retour à l’état basal, pendant toute la
durée de l’enregistrement (tracé n° 39).

– de grapho-éléments prenant Ces éléments surviennent à une fréquence moins régulière


un caractère pseudo-rythmique traduisant un échappement à l’organisation de la
rythmicité.

– de PLEDS, de BI-PLEDS Il s’agit de décharges périodiques latéralisées ou


(quand elles sont bilatérales), généralisées signant la gravité de l’atteinte
ou de grapho-éléments à (voir tableau 4.IV et p. 95, 96, 199, tracés n° 17, 19-21).
caractère périodique

– de bouffées suppressives (avec Il s’agit d’une souffrance cérébrale majeure ou bien


des suppressions de x secondes) d’une lyse médicamenteuse. Dans ce dernier cas, la durée
des suppressions permet d’ajuster les doses (voir figure 4.4,
tracé n° 21).

L’hyperpnée est sans effet : C’est une des deux épreuves d’activation (HPN)
(voir tableau 4.II).

– deux HPN ont été pratiquées Il n’existe pas de sensibilité particulière à l’HPN.
C’est une réaction normale. Ceci sous-entend qu’elle est
bien tolérée, voir figure 5.6. 
134 Bases de la sémiologie et de l’interprétation de l’EEG

 Tableau 4.IX. Décodage d’une interprétation


d’électroencéphalogramme. (suite)
Ce qui est écrit dans le compte Ce qu’il faut comprendre
rendu
– provoque un ralentissement Il existe une sensibilité à cette épreuve. Cette sensibilité
significatif de l’électrogenèse n’est pas péjorative en soi (notamment chez le sujet jeune :
hypersynchronie physiologique). On peut voir des ralentisse-
ments très importants sans contexte particulier. Cependant,
l’arbre vasculaire est très contractile. On peut voir ces ralen-
tissements chez les patients atteints d’insuffisance
circulatoire cérébrale (dans ce cas, les ondes lentes prennent
un caractère angulaire), de diabète, de désordres métaboli-
ques (dans ces cas l’aspect est plus monomorphe, arrondi) ou
dans l’hypoglycémie (souvent fréquente en fin de matinée).

– provoque l’apparition Dans ce cas une hyperexcitabilité cérébrale apparaît,


d’activités lentes angulaires (ou pouvant expliquer un processus critique antérieur.
de pointes lentes)

– sans rétrocession après l’arrêt Les anomalies (ondes lentes plus ou moins angulaires)
de l’épreuve disparaissent normalement à l’arrêt de l’HPN. Dans le cas
contraire, l’hyperexcitabilité cérébrale est franchement
pathologique.

La SLI : Il s’agit de la seconde épreuve d’activation (voir tableau 4.I).


Cette activation a pour but de favoriser le déclenchement
de grapho-éléments paroxystiques. On rappelle que la
fréquence lumineuse la plus favorable au déclenchement de
paroxysmes est de 15-17 Hz.

– est sans effets On n’en tire aucune conclusion.

– provoque un entraînement bi- Des potentiels évoqués visuels de grande amplitude sont
occipital déclenchés par la stimulation lumineuse. Sous-entend par
définition que cet entraînement est symétrique (et donc
qu’il n’y a pas de cortex occipital lésé) (voir tracé n° 10).

– prédominant pour les Parfois vu dans les terrains vasculaires ou certaines


fréquences lentes démences. Dans ce dernier cas des potentiels évoqués
visuels de très grande amplitude ou géants peuvent
apparaître lors des éclairs isolés.

– provoque un entraînement Dans ce cas, les réponses asymétriques témoignent d’une


asymétrique souffrance hémisphérique postérieure. On le voit surtout
dans les AVC.

– provoque une réponse C’est une contraction clonique des muscles de l’orbite
oculoclonique d’origine mésencéphalique et qui témoigne plus d’une
hyperexcitabilité périphérique (réflexe) que d’une
susceptibilité aux convulsions.

– provoque une réponse Le but de la SLI est atteint. Il y a soit déclenchement d’une
photoparoxystique réponse paroxystique électroclinique qui cède
spontanément à l’arrêt ou peu de temps après l’arrêt de la
SLI, soit déclenchement d’une véritable crise épileptique
qui dure après l’arrêt de la SLI (tracé n° 33).

– il existe une activité Ce terme n’est pas conventionnellement admis mais il est
subcritique. opératoire. Ceci signifie qu’il existe une hyperexcitabilité
cérébrale (pointes dégradées, PLEDS…) mais que cette activité
paroxystique est trop peu organisée ou fréquente pour
engager la mise en place d’un traitement antiépileptique.
Interpréter un EEG 135

CE QU’IL FAUT RETENIR

• L’interprétation d’un EEG comme étant normal ou anormal est un


processus difficile, notamment en raison, à la fois, du nombre considé-
rable d’artéfacts susceptibles de créer des modifications ambiguës du
tracé et du nombre important de grapho-éléments inhabituels mais non
pathologiques.
• Une électrogenèse anormale peut être désorganisée (avec une modifica-
tion des caractéristiques topographiques physiologiques des activités
rythmiques); elle peut être non réactive; elle peut être asymétrique; elle
peut être ralentie; elle peut être déprimée; elle peut enfin présenter des
grapho-éléments paroxystiques.
• La sémiologie EEG s’organise autour de trois principaux « attracteurs » :
le ralentissement de l’électrogenèse, l’apparition de grapho-éléments
paroxystiques et la dépression de l’électrogenèse. Ces trois « attracteurs »
sont les témoins de différentes formes de souffrance du parenchyme
cérébral.
• La notion de souffrance cérébrale peut être en grande partie comprise à
partir de la notion d’encéphalopathie que celle-ci soit métabolique, isché-
mique, toxique ou infectieuse. Ce cadre regroupe une très grande
majorité des pathologies cérébrales et s’avère, concernant l’EEG, assez
adapté.
• La présence de grapho-éléments paroxystiques sur le tracé (de la pointe
à l’état de mal épileptique) traduit une souffrance paroxystique dans
laquelle les processus d’hypersynchronie des neurones sont au premier
plan. Parmi ces souffrances paroxystiques, les phénomènes périodiques et
les états de mal épileptiques constituent les formes les plus graves, à la
fois conséquences et causes d’altérations majeures du parenchyme
cérébral.
• Les épilepsies, dont la genèse est particulièrement multifactorielle,
doivent être comprises comme l’intrication d’anomalies métaboliques et
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

de la neurotransmission mais aussi comme des pathologies (innées et


acquises) des canaux ioniques (canalopathies). Il semble désormais que
l’on puisse affirmer un continuum entre les canalopathies génétiques et
les canalopathies dues à des lésions cérébrales (tumeurs, ischémies…),
soulignant la coprésence, à des degrés variables, de facteurs génétiques et
environnementaux.
• L’EEG est un examen particulièrement important dans l’évaluation des
troubles de la conscience (obnubilations, comas) et de la mort cérébrale.
L’encadrement légal de l’affirmation de celle-ci sur la base de critères
neurophysiologiques est assez strict et les examens réalisés à cet effet
doivent l’être dans des conditions spécifiques.
5 INDICATIONS MAJEURES
DE L’EEG DE L’ADULTE
ET DE L’ENFANT

Il est fréquent d’entendre dire que l’EEG est une technique obsolète, qu’il ne
sert à rien, et que, finalement, on pourrait s’en passer. Il est facile de répondre
à la première critique : la numération formule sanguine, la radiographie du
thorax ne sont pas des examens diagnostiques de première jeunesse : personne
ne songe à les retirer de l’arsenal diagnostique au prétexte fallacieux de leur
ancienneté.
L’autre argument soulève le problème de la place considérable qu’a prise
l’imagerie et notamment l’IRM dans le diagnostic neurologique. Il est plus
facile, plus immédiat et plus séduisant de regarder une image que de tenter de
comprendre la complexité des processus neurologiques sous-tendant l’activité
électrique cérébrale. De plus, il pourrait sembler que le caractère fonctionnel
de certaines imageries (imagerie de diffusion…) soit équivalent au caractère
fonctionnel de l’EEG et donc que ces méthodes puissent le remplacer. Mais, à
notre connaissance, aucune imagerie clinique autre que l’EEG n’aborde (par
essence) le problème des configurations des états électriques cérébraux, n’est
capable d’analyser dans sa globalité la réactivité et l’état de vigilance d’un
patient ou ne peut mettre en évidence une souffrance métabolique ou paroxys-
tique, lorsque l’IRM est normale.
Dans ce chapitre, notre démarche ne va pas consister à prendre chaque
pathologie cérébrale et à en décrire les caractéristiques EEG. Nous procéde-
rons plutôt de manière pratique, en tentant de répondre aux questions
suivantes :
– Quand et pourquoi demande-t-on en pratique clinique de ville ou de méde-
cine d’urgence un EEG?
– Pourquoi est-il indispensable de réaliser cet EEG, c’est-à-dire quels sont les
diagnostics différentiels que l’EEG permet d’éliminer?
– Quelle va être la stratégie d’analyse et de réponse du médecin qui interprète
l’EEG pour aider le neurologue ou l’urgentiste à débrouiller le problème?

QUAND DEMANDE-T-ON UN EEG


CHEZ LE NOUVEAU-NÉ, LE NOURRISSON
ET L’ENFANT?
Le nouveau-né (prématuré ou non) et le nourrisson posent des problèmes très
spécifiques en EEG, ainsi que le montre la figure 5.1. Après la myélinisation et
Quand demande-t-on un EEG chez le nouveau-né, le nourrisson et l’enfant ? 137

la fin de l’installation de l’activité alpha (vers 3 ans, voir p. 77-79), les


problèmes posés chez l’enfant se rapprocheront plus, à la fois du point de vue
sémiologique et pathologique, de ceux de l’adulte.

Anomalies
Pathologie foeto-
génétiques,
Grossesse maternelle
malformations
pathologique Accouchement
dystocique

Hypoxie
chronique
Anomalies Souffrance
neurologiques fœtale aiguë

Cet enfant a-t-il un retard de Cet enfant présente-t-il une


maturation neurophysiologique ? souffrance cérébrale ?

Absence d’apparition des Structuration anormale Paroxystique Autre


grapho-éléments de l’âge des états de vigilance (crises comitiales, épilepsie,
état de mal…)

Fig. 5.1. Principales étiologies des pathologies de la période néonatale et des


anomalies EEG rencontrées.
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

Nouveau-né et nourrisson : à la recherche du retard


de maturation et des conséquences de pathologies fœtales
Les pathologies du fœtus ou de la mère sont susceptibles d’affecter très préco-
cement le développement cérébral de l’enfant. La pathologie néonatale
présente des spécificités bien particulières avec notamment des pathologies
ischémiques et hémorragiques dont la gravité est due au fait qu’elles survien-
nent dans des tissus en intense activité mitotique et pénalisent le
développement ultérieur des structures cérébrales, notamment corticales.

Retard de maturation
Lors d’atteintes pathologiques, même sans atteinte irréversible, l’un des signes
EEG les plus importants est la présence d’un retard de la maturation cérébrale
électrophysiologique qui, dans une période donnée, se traduit par la persistance
de figures de la période antérieure ou la non-apparition des grapho-éléments
138 Indications majeures de l’EEG de l’adulte et de l’enfant

attendus. C’est pour cette raison que nous avons longuement insisté au chapitre 3
sur les grapho-éléments caractéristiques de chaque semaine d’âge gestationnel.
La présence du retard de maturation électrophysiologique s’évalue selon deux
axes : 1) l’absence des grapho-éléments normaux pour cet âge gestationnel, 2)
une structuration anormale des états de vigilance (absence de veille calme par
exemple) et de leur alternance physiologique.
On doit noter que seul l’EEG peut donner cette information sur le développe-
ment et la maturation de l’enfant, même si les autres examens
complémentaires précisent la présence d’une lésion.
À ce retard de maturation, peuvent s’ajouter la présence de pointes ou de
dépression de l’électrogenèse ou un ralentissement diffus ou localisé qui ne
sont pas caractéristiques mais attestent le retentissement sur l’électrogenèse
d’une souffrance cérébrale.
On notera que, chez les prématurés ou les enfants nouveau-nés, les grapho-
éléments paroxystiques n’ont pas la richesse morphologique de ceux de
l’adulte ou de l’enfant plus âgé. Le plus souvent, on ne retrouve que des
pointes ou pointes lentes, mais pas de pointes-ondes ou polypointes-ondes. De
la même manière, les rythmes recrutants sont rares.

Pathologies d’origine ischémique


Chez le très jeune enfant, trois grandes pathologies hypoxo-ischémiques
peuvent être décrites (figure 5.2) :
– la souffrance fœtale chronique hypoxique, en relation avec des anomalies de
la vascularisation au niveau de l’utérus et du placenta;
– la souffrance fœtale aiguë périnatale (SFA) dans laquelle des anomalies des
gaz respiratoires qui sont échangés entre la mère et l’enfant sont à l’origine de
l’asphyxie; les atteintes cérébrales sont celles de l’encéphalopathie anoxo-
ischémique au cours de laquelle le nouveau-né à terme peut être simplement
hyperexcitable ou hypotonique avec troubles de la conscience ou dans la
forme la plus grave présenter des convulsions et parfois un état de mal; des
séquelles de degré variable apparaîtront ultérieurement;
– les leucomalacies périventriculaires : de nature probablement ischémique, la
leucomalacie périventriculaire (LPV) est très fréquente; il s’agit d’une atteinte
nécrotique des axones déjà myélinisés ou en cours de myélinisation selon
l’âge gestationnel ainsi que des cellules gliales.
Chez le prématuré, la souffrance neurologique d’origine ischémique se traduit
par la non-représentation des éléments physiologiques propres pour l’âge
gestationnel, par une dépression de l’électrogenèse, si le processus est massif
et par la présence sur le tracé EEG de pointes positives rolandiques (PPR) qui
sont un bon marqueur pour les LPV alors que les décharges critiques sont
rares (souvent brèves, monorythmiques et relativement lentes : 1 à 4 Hz).
Chez le nouveau-né à terme, entre la 12e et la 72e heure de vie, les pathologies
cérébrales d’origine ischémique entraînent la survenue de manifestations élec-
trocliniques avec des crises très reproductibles ou même des états de mal
intéressant principalement l’hémisphère droit avec clonies de la face et du
membre supérieur gauche, voire même de l’hémicorps gauche.
Quand demande-t-on un EEG chez le nouveau-né, le nourrisson et l’enfant ? 139

Placenta praevia
Hématome rétro-placentaire
Anomalies du cordon
Dystocies Baisse de perfusion
Anomalies de la vascularisation utérine Malformations Infections du liquide amniotique
Pré-éclampsie Anémie aiguës Rupture prématurée des membranes
Toxémie gravidique Infections Ischémie
Oligo-amnios

Souffrance foetale Leucomalacie


aiguë (SFA) périventriculaire
Hypoxie foetale Hémorragies (encéphalopathie (nécrose, atrophie, cavités,
chronique anoxo-ischémique) hémorragie)

RCIU

Activités Dépression
Retard de maturation hémisphérique
paroxystiques
électrophysiologique

Pointes positives
rolandiques
Pointes > Gauche (prématuré)
(localisation) État de mal
dans la SFA

Retard psychomoteur

Fig. 5.2. Pathologies ischémiques survenant avant la naissance (RCIU : retard de


croissance in utero).
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

L’EEG joue un rôle majeur pour confirmer ou, au contraire, infirmer l’exis-
tence de convulsions. Il est généralement admis que chez un nouveau-né à
terme, la survenue de crises précoces au cours des douze premières heures de
vie et qui persistent pendant 2 jours ou l’apparition d’un état de mal sont de
mauvais pronostic.

Hémorragies cérébrales du nouveau-né prématuré


Elles peuvent être de localisation :
– sous-épendymaire, d’autant plus fréquentes et plus graves que la prématurité
est plus grande : elles impliquent la zone germinale, très richement vascula-
risée et donc plus fragile;
– intraventriculaire, avec rupture de l’épendyme et pression au niveau de la zone
germinale; elles peuvent alors entraîner des hydrocéphalies par phénomène
inflammatoire comme c’est le cas dans la sténose de l’aqueduc de Sylvius;
140 Indications majeures de l’EEG de l’adulte et de l’enfant

– dans la substance blanche; il s’agit alors de la diffusion du saignement depuis


la substance blanche périventriculaire jusqu’au niveau parenchymateux; la
congestion des veines médullaires entraîne un ramollissement ischémique.
Seules des hémorragies importantes ou qui s’accompagnent de lésions au
niveau du parenchyme cérébral se caractérisent à l’EEG par la présence
d’anomalies durables sous la forme de pointes positives rolandiques (PPR)
chez le prématuré et de pointes rapides qui peuvent être de polarité différente.

Atteintes infectieuses et toxiques


Les atteintes infectieuses provoquent, particulièrement si elles prennent place
in utero pendant la période de migration neuronale, des malformations céré-
brales telles que porencéphalie, lissencéphalie, micropolygyrie, etc. Ces
malformations s’accompagnent de retards de maturation cérébrale et très
fréquemment de processus comitiaux.
Les atteintes toxiques, consécutives à l’intoxication de la mère, sont
fréquentes. La cocaïne et l’héroïne perturbent la migration neuronale et sont à
l’origine de malformations et de pathologies comitiales. Les enfants de mères
héroïnomanes présentent le syndrome de sevrage du nouveau-né (SSNN) qui
survient entre 24 et 48 heures de vie, au cours duquel on note des troubles
neurologiques avec hyperexcitabilité, hyper-réflexie, trémulations, des trou-
bles de la coordination déglutition-succion et dans 2 à 11 % des cas des
convulsions. L’EEG de sommeil est généralement perturbé.
L’alcoolisme maternel conduit le plus souvent la naissance d’un enfant à
terme mais hypotrophique avec ultérieurement l’apparition d’un retard intel-
lectuel. Il peut aussi entraîner des troubles de la migration neuronale ou une
agénésie du corps calleux. Les nouveau-nés de mères alcooliques présentent
des troubles du sommeil clairement identifiables notamment par analyse spec-
trale de l’EEG.

EEG chez l’enfant : épilepsies et retards d’acquisition


Chez l’enfant, outre les conséquences de pathologies fœtales ou néonatales,
quelques pathologies plus particulières vont retenir l’attention, comparative-
ment à l’adulte : 1) la pathologie épileptique qui se dévoile dans l’enfance ou
l’adolescence (convulsions fébriles, épilepsies généralisées primaires, épilep-
sies secondaires sur malformations ou pathologies métaboliques) et 2) les
retards (ou arrêts) des acquisitions qui peuvent être dus à des pathologies
métaboliques, à des séquelles de pathologies néonatales ou à d’autres
encéphalopathies qui entraînent une souffrance cérébrale et une dégradation
cognitive se traduisant par un arrêt des acquisitions.

Anomalies paroxystiques et épilepsies


Les épilepsies qui surviennent au cours de la période néonatale, chez le nour-
risson, l’enfant et l’adolescent sont résumées dans la figure 5.3 et le
Quand demande-t-on un EEG chez le nouveau-né, le nourrisson et l’enfant ? 141

tableau 5.I. On trouvera dans les livres d’épileptologie des précisions que nous
avons choisi de ne pas faire figurer dans cet ouvrage.
Bien évidemment, l’EEG trouve ici une place incontournable dans la caracté-
risation des crises et le suivi évolutif de la maladie. Il est très important dans le
diagnostic des anomalies paroxystiques de disposer également d’un enregis-
trement de sommeil qui souvent dévoile le processus paroxystique, comme
chez l’adulte.

Tableau 5.I. Principales épilepsies du cerveau en développement,


en fonction de l’âge.

Types d’épilepsie

Convulsions néonatales familiales bénignes (CNFB)

Convulsions néonatales bénignes idiopathiques


Période (CNBI) (ex convulsions du cinquième jour)
néonatale Encéphalopathie myoclonique précoce (EMP)

Encéphalopathie infantile précoce avec épilepsie (EIPE) et


« bouffées suppressives » (syndrome d’Ohtahara)

Spasmes infantiles ou syndrome de West (première année de vie)

Épilepsie myoclonique bénigne du nourrisson (avant 3 ans)

Épilepsie myoclonique sévère du nourrisson (avant 1 an).


Nourrisson Convulsions infantiles familiales bénignes (CIFB) (entre 3 et 7 mois)

Épilepsie infantile bénigne avec crises partielles complexes*


(avant 1 an)
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

Convulsions fébriles

Épilepsie absence de l’enfant (EAE, avant 10 ans) et de l’adolescent


(EAA)

Épilepsie myoclonique astatique (garçons avant 5 ans)

Syndrome de Lennox-Gastaut (entre 2 et 10 ans) : encéphalopathie


et épilepsie sévère
Enfant
Épilepsie partielle bénigne à pointes centrotemporales (EPCT)
(entre 5 et 10 ans)

Épilepsie bénigne à paroxysmes occipitaux (EBPO) (entre 2 et 17 ans)

Épilepsie avec pointes-ondes continues du sommeil lent (POCS)

Syndrome de Landau-Kleffner avec aphasie acquise, P et PO

Adolescence Épilepsie myoclonique juvénile (entre 6 et 22 ans) au réveil ou


si manque de sommeil

* Non reconnue par la classification internationale.


142 Indications majeures de l’EEG de l’adulte et de l’enfant

ANOMALIE PAROXYSTIQUES
(CLINIQUES OU INFRA-CLINIQUES)

Chez le tout petit enfant Chez l’enfant plus âgé


(prématuré, nouveau-né)

Autres
Pathologie fœtale Pathologie (traumas, tumeurs…)
ischémique ou métabolique par
hémorragique erreur innée du
métabolisme Encéphalite
Malformations
infectieuse
(d’origine infectieuse ou
(herpès, rougeole,
toxique) SIDA)
Séquelles d’une Épilepsies
pathologie intra utérine (tableau V.1)
(IMC, poly-handicap…)
Syndromes épileptiques
(neuroectodermoses,
anomalies génétiques…)

Fig. 5.3. Principaux groupes d’étiologie des processus paroxystiques élec-


troencéphalographiques ou électrocliniques chez le nouveau-né et l’enfant.

Encéphalopathies par erreurs innées du métabolisme


Les erreurs innées du métabolisme, bien que relativement rares, sont des
pathologies très complexes, généralement dramatiques. Soit elles empêchent
le cerveau de se développer normalement (et sont génératrices d’un retard
psychomoteur qui se traduit par des défauts d’apprentissage), soit elles
conduisent à une dégénérescence des fonctions cérébrales et une évolution
vers un handicap considérable ou la mort (d’où leur classement dans les
pathologies dégénératives). On remarque que, même si beaucoup de ces
erreurs innées du métabolisme s’accompagnent de convulsions et d’atteintes
EEG très sévères, certaines montrent une dissociation étonnante entre
l’atteinte métabolique cérébrale et ses conséquences cognitives dramatiques,
d’une part, et une relative préservation, voire une absence d’atteinte de l’élec-
trogenèse, d’autre part. Cette observation pose de nombreuses questions, non
résolues, sur le point d’impact neuronal, glial ou même sur les structures céré-
brales préférentiellement atteintes.

Autres
Pendant l’enfance, les atteintes infectieuses provoquent des encéphalites caracté-
risées fréquemment par une souffrance cérébrale plus ou moins diffuse avec une
composante paroxystique variable mais souvent présente. Les rares encéphalites
dues au virus de la rougeole forment le tableau de panencéphalite sclérosante
subaiguë (PESS ou LESS, tracé n° 28), très grave et caractérisée à l’EEG par des
complexes périodiques stéréotypés généralisés et permanents (y compris dans le
sommeil), associés de manière synchrone ou non à des secousses.
Bilan d’un malaise avec ou sans perte de connaissance 143

Par ailleurs, les malformations peuvent entraîner des anomalies EEG, parfois
évocatrices comme des activités rapides de grande amplitude associées à des
décharges de pointes, de pointes-ondes ou de polypointes-ondes.
Les phacomatoses conduisent également à des perturbations de l’EEG parfois
importantes comme l’hypsarythmie (tracé n° 40) dans la sclérose tubéreuse de
Bourneville ou des processus paroxystiques avec épilepsie.

BILAN D’UN MALAISE AVEC OU SANS PERTE


DE CONNAISSANCE
La perte de connaissance implique nécessairement l’atteinte organique, fonc-
tionnelle ou métabolique du système nerveux central (cortex cérébral et
mésencéphale). La perte de connaissance peut s’expliquer selon quatre méca-
nismes principaux :
– une chute du débit sanguin cérébral générale ou localisée (occlusion d’un
gros tronc artériel ou d’une artère d’importance plus locale);
– une perturbation métabolique du fonctionnement de la cellule cérébrale (anoxie,
hypoglycémie, hypocalcémie, alcool, toxiques, surdosage médicamenteux);
– une lésion organique brutale de l’encéphale (hématome intracérébral;
œdème cérébral aigu, HTA…);
– une perturbation de l’électrogenèse cérébrale (épilepsie primaire ou secondaire).
Toute anoxie cérébrale de plus de 10 secondes conduit à une perte de connais-
sance. Si elle dure plus de 20 à 30 secondes, elle provoque une crise
convulsive indépendamment de l’étiologie (syncope vagale, bas débit cérébral
d’origine cardiaque ou hypotensif, poison métabolique). La perte de connais-
sance a pour origine une souffrance cérébrale, quelle qu’en soit la cause.
Dans le quotidien du médecin généraliste, de l’urgentiste ou du neurologue, le
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

malaise ou la perte de connaissance est l’une des raisons qui conduisent très
souvent à la réalisation d’un EEG. L’EEG est alors demandé pour apporter des
arguments positifs au diagnostic d’épilepsie. Si certains centres font peu
d’EEG dans le contexte des malaises ou des pertes de connaissance, en dehors
de la recherche d’épilepsie, il est fréquent de recevoir des demandes d’EEG
dans le cadre du bilan plus général d’un ou de plusieurs malaises. En effet, le
plus souvent, le médecin n’est pas là et les témoignages de l’entourage sont
excessifs ou imprécis. L’EEG est demandé alors que l’anamnèse s’avère fina-
lement assez incomplète, notamment, comme on l’a vu, pour éliminer une
crise épileptique.
Bien que la clinique soit souvent suffisante du diagnostic, la logique de l’utili-
sation de l’EEG est (figure 5.4) :
– d’éliminer ce qui pourrait être un processus paroxystique; il n’est pas fréquent
d’observer au décours d’un malaise des grapho-éléments paroxystiques
caractérisés; la dépression postcritique est parfois présente mais elle est rare-
ment observée lors de l’examen EEG, sauf en cas de récidive récente de la crise;
le plus souvent, soit l’enregistrement de repos est indemne de grapho-éléments
144 Indications majeures de l’EEG de l’adulte et de l’enfant

Pertes de connaissance On élimine


et chutes d’origine neurologique • Une origine cardiaque
chez l’adulte • Une hypoglycémie ou
un coma diabétique

EEG
(cf. description dans le texte)

Après 50 ans
Avant 50 ans Syncope
convulsivante Atteinte
(vagale) métabolique

Processus paroxystique
Épilepsie
Défaillance
Épilepsie du sujet âgé Tumeur polyviscérale
Toxiques (alcoolo tabagique) Altération de
(drogues, l’état général
alcool)
Surdosage Lacune vasculaire
médicamenteux
(hypnotiques) Encéphalopathie
Non connue
vasculaire

Épilepsie Lésionnelle
primaire (tumeur)

Connue mais rupture du traitement


ou ingestion de toxique (alcool)

Fig. 5.4. Arbre décisionnel pour le diagnostic des principales pertes de connais-
sance d’origine neurologique chez l’adulte.

paroxystiques et les épreuves d’activation permettront de faire apparaître éven-


tuellement des pointes ou polypointes (attention à l’hypersynchronie du sujet
jeune lors de l’HPN) ou une photosensibilité, soit on observe des éléments de la
série paroxystique et dans ce cas on rentrera dans la procédure diagnostique
décrite p. 153; dans tous les cas, le tracé normal n’élimine pas définitivement
une crise épileptique à l’origine de la perte de connaissance;
– si on ne dispose d’aucun argument en faveur d’un processus paroxystique, il
faut éliminer une syncope convulsivante (parfois ignorée); le (la) patient(e) est
souvent vagotonique et déclare avoir fréquemment des syncopes avec sensa-
tion de mort imminente dans des circonstances stressantes de la vie; le plus
souvent, le tracé ne montre pas d’anomalies particulières; un réflexe oculocar-
diaque (tableau 4.II), pratiqué par le médecin au cours de l’enregistrement
EEG montre : a) une bradycardie lors de la compression des globes oculaires,
et b) un aplatissement du tracé avec parfois perte de connaissance; l’associa-
tion bradycardie + aplatissement du tracé est très évocatrice;
Bilan d’un malaise avec ou sans perte de connaissance 145

Tableau 5.II. Effets de différents toxiques sur l’EEG.

Type
Substance Effet neurophysiologique
de toxique
Anesthésiques Ralentissement, ondes delta,
diminution des activités alpha et bêta
Kétamine Ralentissement avec augmentation des
ondes delta et thêta dépendant de la
dose
Benzodiazépines Activités rapides (présence d’activités
bêta) y compris en sommeil lent
Médicaments Neuroleptiques Myoclonies, ondes lentes angulaires,
pointes lentes
Barbituriques Coma avec dépression de
(GABA-mimétiques) l’électrogenèse
Antidépresseurs tricycliques Ondes lentes, pointes et polypointes.
Crises convulsives
Cortisone Tracé accéléré (rythmes bêta) si >
10 mg/kg ou ralentissement diffus
Solvants Toluène (agresseurs olfactifs) Décharges bêta (20 Hz)
organiques Anomalies non spécifiques
Alcool Augmentation des activités delta au
détriment des activités thêta et alpha.
Microvoltage et aspect remanié du
tracé. Resynchronisation lors des
Autotoxicité épreuves d’activation
sociale LSD, mescaline Diminution d’amplitude des ondes
lentes ou accélération de la fréquence
dominante dans l’état psychotique
Cocaïne Augmentation des activités rapides
Opiacés Léger ralentissement (+ myosis)
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

Organophosphorés Éléments angulaires bitemporaux


Pesticides Organochlorés Ralentissement de l’électrogenèse,
activités paroxystiques
Plomb EEG très lent, pointes et pointes-ondes
multifocales puis diffuses
Mercure Ralentissement, décharges
épileptiformes
Bismuth Ralentissement, myoclonies non
épileptiques
Sels d’aluminium Ralentissement avec polypointes
Minéraux
Bromure Dysrythmie lente ou très lente, parfois
asymétrie
Lithium Myoclonies avec tracé anormal,
ralentissement avec pointes. Si doses
élevées, tracé d’encéphalopathie
hépatique
Thallium Tracé lent sans signes spécifiques
146 Indications majeures de l’EEG de l’adulte et de l’enfant

– chez le très jeune enfant, le spasme du sanglot (avec spasmes, révulsion des
globes oculaires, hypotonie, cyanose survenant au cours des pleurs) est proche
d’une syncope convulsivante de type vagal; le tracé EEG enregistré pendant
les pleurs ne montre pas d’activités paroxystiques, mais surtout, le spasme est
stoppé net si on stimule l’enfant (en lui jetant un verre d’eau à la tête, par
exemple);
– les troubles ioniques ou métaboliques sont également des pourvoyeurs de
malaises ou de syncopes; l’hypocalcémie (dans un contexte parfois peu diffé-
rent de la spasmophilie) ne modifie pas le tracé de repos; l’HPN peut entraîner
l’apparition d’une main d’accoucheur; dans l’hypoglycémie, le ralentissement
dû à l’HPN est majoré; l’importance de ce ralentissement diminue quand on
donne du glucose au patient et que l’on refait l’HPN;
– de nombreuses syncopes sont en relation également avec la prise d’un
toxique; les patients prenant des toxiques (cannabis, héroïne) présentent des
tracés mal organisés, remaniés avec des rythmes rapides, parfois des éléments
paroxystiques (tableau 5.II); la présence de très nombreux rythmes rapides
diffus peut faire aussi suspecter une prise excessive de benzodiazépines
(tracés 30 et 15); ces rythmes rapides masquent la réactivité mais il existe
parfois des bouffées d’ondes lentes diffuses réactives qui signalent la diminu-
tion de la vigilance; ces rythmes sont augmentés par l’hyperpnée; de telles
situations peuvent se retrouver dans le début d’autolyses; l’imprégnation
benzodiazépinique chronique ne s’accompagne pas en général de ces bouffées
d’ondes lentes; chez l’enfant, l’intoxication benzodiazépinique induit une
somnolence et des rythmes rapides; il faut penser au tiroir de la grand-mère ou
de la pharmacie;
– il existe également des syncopes dues à une intoxication éthylique aiguë
et/ou un sevrage, souvent dans un contexte d’addiction chronique; dans ce cas
l’EEG, mal organisé, microvolté, non modifié par les activations est évocateur
de l’éthylisme chronique; il existe souvent des signes paroxystiques, surtout
48 heures après le sevrage; on peut parler d’une véritable encéphalopathie
alcoolique avec parfois, lors des sevrages, apparition de PLEDS, même si le
lien entre alcool et épilepsie reste controversé quand au rôle causal du toxique.
Les mêmes causes de syncopes neurologiques se retrouvent à un âge plus
avancé mais il faut y rajouter :
– l’épilepsie du sujet âgé, plus fréquente s’il existe un terrain alcoolotaba-
gique, relève du diagnostic de l’épilepsie; il faut signaler que le taux
d’incidence, comme le taux de prévalence des crises épileptiques et de
l’épilepsie, remonte d’une manière très nette à partir de l’âge de 60 ans en
raison de la fréquence des pathologies épileptogènes (accidents vasculaires
cérébraux, affections métaboliques, tumeurs);
– l’encéphalopathie vasculaire (ou hypertensive) est également génératrice de
syncopes; l’EEG sera fréquemment mal organisé avec une diffusion d’une
activité alpha monotone vers les régions antérieures de l’encéphale, un entraî-
nement plus marqué à la SLI à basse fréquence et des ondes thêta plus ou
moins angulaires prédominant dans les régions sylviennes; très souvent, ce
type de tracé est associé à des lésions diffuses de la substance blanche en IRM
(leucoaraiose);
Diagnostic d’un état confusionnel ou d’un trouble du niveau de conscience 147

– on doit aussi noter la fréquence des surdosages médicamenteux chez le sujet


âgé (prises multiples d’un hypnotique dans un contexte de troubles de la
mémoire, insuffisance rénale, démence…); on retrouvera les caractéristiques
évoquées plus haut lors de prises de benzodiazépines;
– les pathologies métaboliques du sujet âgé entraînent également des
syncopes; les insuffisances rénales provoquent fréquemment des crises épilep-
tiques et le tracé met en évidence à la fois des ondes triphasiques métaboliques
et des pointes lentes ou dégradées, chez ces patients, présentant souvent une
épilepsie connue, les crises peuvent survenir quand le traitement antiépilep-
tique est pris avant la dialyse et est éliminé dans le dialysat; les insuffisances
hépatiques du sujet âgé (avec un tracé d’encéphalopathie hépatique avec
ondes triphasiques) ou les atteintes viscérales multiples (défaillances polyvis-
cérales) sont également génératrices de syncopes.

DIAGNOSTIC D’UN ÉTAT CONFUSIONNEL


OU D’UN TROUBLE DU NIVEAU DE CONSCIENCE
Il convient de distinguer le syndrome confusionnel d’un trouble du niveau de
la conscience. Au cours d’un syndrome confusionnel, s’associent des troubles
de la conscience d’apparition brutale avec alternance d’agitation et d’hypoac-
tivité, troubles cognitifs (troubles de la mémoire) et désorientation temporo-
spatiale.
Dans le cas d’un trouble du niveau de conscience, le niveau de conscience doit
être déterminé :
– Existe-t-il une difficulté de concentration? On est en présence d’une trop
grande distractibilité;
– Le patient obéit-il aux ordres mais lentement? Il s’agit d’une obnubilation;
– Est-il incapable de répondre aux stimulations externes? C’est un état
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

stuporeux;
– N’est-il réactif qu’aux stimulations nociceptives? Il s’agit alors d’un coma.
Le diagnostic d’un syndrome confusionnel dépend évidemment beaucoup de
l’âge du patient et le vieillissement de la population est une raison significative
pour réaliser des EEG pour des troubles confusionnels. De nombreuses patho-
logies neurologiques très graves sont susceptibles de générer un syndrome
confusionnel et il faut absolument penser à ces pathologies (figure 5.5).
Certaines d’entre elles requièrent un traitement en urgence.

États confusionnels survenant dans un contexte clinique


défini (fébrile, comportemental, thérapeutique)
Parmi les syndromes confusionnels les plus inquiétants, ceux qui surviennent
dans un contexte fébrile, en relation avec une méningoencéphalite ou une
encéphalite (notamment herpétique) sont de diagnostic souvent difficile.
L’encéphalite herpétique (tracés n° 26 et 27), fréquente, est caractérisée par la
présence de grapho-éléments évocateurs dans un contexte d’évolution tempo-
Confusion mentale,
sans convulsion clinique

Présence d’un contexte clinique associé Pas contexte clinique associé

Contexte Activités paroxystiques


Contexte fébrile Contexte démentiel Ondes triphasiques Activités rapides
traumatique fronto-temporales
(troubles antérieures
comportementaux)
+ évolutivité
Anomalies lentes
+ historicité Intoxication État de mal
localisées, Anomalies lentes,
asymétriques ou surdosage non convulsivant
parfois anomalies Pathologie
Troubles benzodiazépines (sujet âgé)
paroxystiques et/ou métabolique
comportementaux

Hématome Ondes lentes


sous-dural Encéphalite aspécifiques Pointes, activités très Tracé angulaire
Anomalies périodiques non herpétique
ou extradural angulaires, sensibilité ± pointes
fronto-temporales
SLI
localisées
à période courte Si Zovirax, Anomalies Intoxication,
anomalies frustes Lésion viscérale ioniques troubles iatrogène,
Anomalies
(tumeur) addiction
plus diffuses, Encéphalopathie
Encéphalite herpétique Défaillance
aréactivité polyviscérale rénale
si coma grave Altération de
Encéphalopathie Tracé
l’état général microvolté
(sujet âgé) hépatique
148 Indications majeures de l’EEG de l’adulte et de l’enfant

Pointes lentes généralisées, remanié


Hématome continues bisynchrones Électrogénèse remaniée Anomalies
intracérébral et périodiques (période courte) avec des ondes lentes endocriniennes
Commotion survenant à un intervalle (thêta) diffuses Alcoolisme,
angulaires Carence ± contexte de sevrage
de 0,5 à 1 seconde
vitaminique

Maladie de Creutzfeld-Jakob Démence vasculaire


Maladie d’Alzheimer

Fig. 5.5. Démarche diagnostique intégrant l’EEG dans un syndrome confusionnel. L’épaisseur des traits est indicative de la fréquence
des étiologies.
Diagnostic d’un état confusionnel ou d’un trouble du niveau de conscience 149

relle caractéristique. Elle doit être évoquée quand, chez un enfant ou un adulte
fébrile, un changement brutal et incompréhensible de comportement est
observé. Durant les phases précoces, le tracé est désorganisé avec des activités
delta diffuses polymorphes se développant de manière latéralisée et impliquant
de manière prédominante les lobes temporaux. Puis des complexes lents bipha-
siques très angulaires (de durée 1,1 à 1,4 s) apparaissent dans une région
temporale puis gagnent l’autre région temporale, évoluant dans une configura-
tion périodique d’apparence stéréotypée survenant avec une période courte de 1
à 3 secondes. Ces configurations sont visibles entre 2 et 5 jours après le début de
la maladie. Des crises apparaissent, focales ou généralisées. Si une nécrose
survient, l’EEG s’aplatit progressivement.
Il arrive fréquemment que les caractéristiques EEG de l’encéphalite herpé-
tique soient moins patentes, le malade ayant été précocement mis sous
Zovirax®.
Les caractéristiques des autres encéphalites infectieuses ou bactériennes sont
présentées dans le tableau 5.III. Dans celles-ci, l’EEG est utile mais n’a pas le
même caractère d’orientation que dans l’encéphalite herpétique ou la maladie
de Creuztfeld-Jakob.

Tableau 5.III. Caractéristiques EEG


des principales encéphalites infectieuses chez l’adulte.

Infection Principales caractéristiques


Méningites Tracé souvent normal dans les méningites
virales
Dans les méningites bactériennes sévères,
ondes lentes diffuses
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

Encéphalites aiguës Anomalies lentes modérées ou sévères. Parfois


(non herpétiques) anomalies paroxystiques
Encéphalites herpétiques Décharges périodiques épileptiformes
latéralisées à période courte < 4 secondes
(tracés n° 26 et 27)
Encéphalites fongiques Ralentissement diffus parfois plus local
Maladie de Creutzfeld-Jakob Pointes généralisées périodiques à période
courte < 4 secondes (tracé n° 29)
Panencéphalite sclérosante Complexes lents périodiques généralisés
subaiguë (rougeole) stéréotypés à période longue > 4 secondes
(tracé n° 28)
Parasitoses Activités lentes ou paroxystiques plutôt focales
Encéphalopathies VIH Anomalies lentes focales ou généralisées,
(encéphalite subaiguë) anomalies paroxystiques, asymétriques ou non
Anomalies plus focales dans les affections
opportunistes (tracé n° 25)
150 Indications majeures de l’EEG de l’adulte et de l’enfant

Bien que, parfois, la maladie commence par un état paroxystique, le second


état confusionnel (non fébrile) dont il faut faire un diagnostic rapide est
l’encéphalite spongiforme subaigüe ou maladie de Creuztfeld-Jakob, tracé
n° 29. La maladie de Creuztfeld-Jakob débute par une désorganisation du
tracé et l’apparition d’activités lentes généralisées. Puis des activités périodi-
ques diphasiques ou triphasiques apparaissent, initialement intermittentes et
asymétriques. Ces activités évoluent vers le pattern caractéristique de pointes
lentes généralisées, continues bisynchrones survenant à un intervalle de 0,5 à
1 seconde et dont la durée est de l’ordre de 200 à 400 ms. Ce pattern se déve-
loppe dans les 12 semaines initiales de la maladie. Il est parfois associé aux
myoclonies, d’apparition tardive dans la maladie. Il est réactif aux stimuli. Au
cours de l’évolution de la maladie, l’intervalle entre les décharges augmente et
le tracé devient presque isoélectrique.
Un piège diagnostique peu fréquent mais important à connaître est un état
confusionnel d’apparition récente chez un patient traité par valproate. L’EEG
est caractérisé par des ondes triphasiques de grande amplitude souvent très
angulaires et ressemblant à des pointes lentes de la maladie de Creuztfeld-
Jakob. Il s’agit de l’encéphalopathie au valproate évoquée p. 102. Le test
diagnostique et thérapeutique est ici de supprimer ou de réduire le valproate.
Une réponse au test à l’Anexate® est également évocatrice (voir p. 128).
Le syndrome confusionnel survenant chez un sujet âgé, avec une histoire de
désadaptation progressive à l’environnement, est très fréquent. Il s’agit parfois
d’un processus démentiel à son début et dont le mode de révélation est une
confusion mentale. Dans un tel contexte, il est évidemment capital de ne pas
oublier la possibilité d’une maladie de Creuztfeld-Jakob, même s’il s’agit
d’une pathologie très peu fréquente. S’il s’agit d’un processus neurodégéné-
ratif conventionnel, le tracé sera évocateur d’une encéphalopathie
neurodégénérative (voir p. 106 et 161). Même si l’EEG n’est pas indiqué dans
les démences caractéristiques, l’entrée dans le processus démentiel n’est pas
univoque et surtout on ne sait pas toujours s’il s’agit ou non d’une démence.
Son utilité reste donc grande au regard des diagnostics différentiels à éliminer
(voir figure 5.5).

États confusionnels isolés


Les encéphalopathies métaboliques (tracé n° 16) sont fréquemment la cause
de syndromes confusionnels, notamment dans le cadre d’une insuffisance
d’organe (rein, foie) inconnue et infraclinique en décompensation, particuliè-
rement chez les sujets âgés. Leur diagnostic doit être envisagé dès que des
ondes triphasiques sont présentes sur le tracé. Quand il s’agit d’anomalies
métaboliques avec troubles ioniques, des activités plus angulaires, voire
paroxystiques signalent les troubles de l’excitabilité cérébrale. Des patholo-
gies endocriniennes comme l’insuffisance surrénale aiguë (troubles ioniques)
ou des anomalies thyroïdiennes peuvent également entraîner des confusions
associées à une encéphalopathie métabolique.
Les carences vitaminiques entraînent aussi des troubles confusionnels, surtout si
elles sont associées à une dénutrition, un alcoolisme chronique (les tremblements
Diagnostic et surveillance de la maladie épileptique 151

sont évocateurs du sevrage alcoolique) ou une encéphalopathie de Gayet-


Wernicke (avec troubles oculomoteurs ou de la marche).
On peut aussi voir des syndromes confusionnels avec un EEG caractérisé par
des ondes lentes non spécifiques dans des lésions viscérales pour lesquelles le
cerveau « parle » en premier (tumeurs cancéreuses, abcès) (voir p. 88).
Une autre cause de confusion mentale, non exceptionnelle chez le sujet âgé
notamment, est la survenue d’un état de mal temporal ou frontal, non convul-
sivant appelé état de mal status généralisé du sujet âgé (tracé n° 39) dont la
seule expression clinique est cette confusion. Il s’agit d’une entité clinique,
diagnostic différentiel d’une démence. L’EEG fait immédiatement le
diagnostic (pointes bitemporales ou bifrontales) et le traitement antiépilep-
tique guérit la confusion.
Des intoxications multiples peuvent entraîner un syndrome confusionnel.
Nous avons vu l’importance et la fréquence des surdosages ou des intoxica-
tions aux benzodiazépines p. 146. Les effets des différents toxiques sur l’EEG
sont présentés au tableau 5.II.

DIAGNOSTIC ET SURVEILLANCE
DE LA MALADIE ÉPILEPTIQUE
On rappelle que l’épilepsie est le nom d’un désordre cérébral caractérisé de
manière prédominante par des interruptions récurrentes et imprédictibles de la
fonction cérébrale normale, nommées crises épileptiques. L’épilepsie n’est pas
une maladie singulière mais une variété de maladies reflétant une dysfonction
cérébrale résultant de nombreuses causes.
Tout le monde s’accorde à dire que l’EEG est l’examen de choix dans
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

l’évaluation de l’épilepsie, notamment dans le diagnostic de localisation et


bien sûr le suivi thérapeutique. L’importance de l’EEG est particulièrement
grande dans la chirurgie de l’épilepsie, les techniques d’analyse du signal
(localisation de sources, détection de pointes) prenant ici toute leur
importance.
Dans ce contexte de convulsions, en pratique, on se trouve devant trois princi-
paux cas de figure :
– il s’agit d’une épilepsie primaire généralisée répondant bien au traitement;
le plus souvent, le clinicien conduit le traitement et prescrit les EEG de
contrôle nécessaires;
– il s’agit d’une épilepsie secondaire à une lésion (tumeur, AVC, traumatisme
crânien…) et, une fois la lésion primaire diagnostiquée et éventuellement
traitée, un traitement symptomatique de l’épilepsie est proposé en général par
un neurologue ou le neurochirurgien;
– il s’agit d’une épilepsie grave et/ou réfractaire au traitement. Dans ce cas, la
prise en charge de la maladie épileptique est le plus souvent faite dans des
services ou des centres spécialisés en épileptologie.
152 Indications majeures de l’EEG de l’adulte et de l’enfant

Dans ce livre, nous nous situerons dans une approche résolument pragma-
tique, en ne considérant que le strict point de vue de ce qui est demandé à
l’EEGiste. En effet, si le malade est un épileptique connu, l’EEG sera fait à la
demande ou en coordination avec le médecin traitant (cas n° 1). Si le malade
n’a jamais fait de crise, le résultat de l’EEG sera intégré par le neurologue ou
le neuropédiatre dans une stratégie diagnostique (examen clinique, IRM,
TDM…) qui échappe le plus souvent au médecin qui interprète l’EEG (cas
n° 2 ou éventuellement 3). De ce fait, dans ce chapitre, nous ne traiterons pas
en détail des épilepsies qui relèvent de l’épileptologie, sous-discipline spéci-
fique de la neurologie, de la neuropédiatrie ou de la neurophysiologie. De très
nombreux livres et manuels, très souvent actualisés, abordables et pratiques
traitent des épilepsies. La question se réduit donc, dans ce paragraphe, à celle
de l’EEG pratiqué à l’occasion : a) d’une « crise » dont on suspecte qu’elle est
épileptique ou b) du suivi d’un patient épileptique connu, soit dont on a
récemment modifié le traitement, soit qui, pour une raison ou une autre, a
présenté une crise dans un contexte d’un bon contrôle a priori de sa maladie
épileptique.
On doit avoir présent à l’esprit que l’on voit rarement la crise qui a nécessité
l’hospitalisation du patient ou la consultation et très souvent l’entourage décrit
mal ce qui s’est passé. L’émission d’urines, des plaies au crâne et la morsure
de la langue sont de bons indices, inconstamment présents ou relevés.
Si l’EEG ne montre aucune activité intercritique, on demandera à l’infir-
mier(e) d’insister sur la SLI et surtout de réaliser deux hyperpnées, la seconde
prenant place après la SLI. Un résultat positif incite à pousser l’enquête
diagnostique, notamment en envisageant de mieux caractériser le phénomène
paroxystique. Un examen négatif, malgré les épreuves d’activation, ne permet
pas de conclure. Dans les deux cas, et selon le contexte clinique, on sera
amené à faire pratiquer un EEG de sieste ou de sommeil qui démasquera la
présence d’une sensibilité épileptique (figure 5.6).
Si l’EEG est caractéristique d’un état postcritique (activités lentes, présence
de pointes focales ou diffuses) ou si l’on met en évidence des activités
paroxystiques et/ou si l’on observe une augmentation des activités paroxysti-
ques à l’HPN et surtout à la SLI, la question est de savoir :
– si on est en présence d’une crise survenant dans une épilepsie généralisée
primaire qui se dévoile à l’occasion d’un événement de vie particulier : à
l’adolescence, lors des règles (épilepsie cataméniale), à l’occasion d’une fête
(avec absorption d’alcool, d’excitants centraux et en présence de lumières
stroboscopiques);
– s’il s’agit d’une crise en rapport avec un processus focal ou diffus. La crainte
principale dans ce contexte est la présence d’un processus expansif intra- ou
extracrânien; un méningiome de la convexité est parfois caractérisé par un
rythme thêta prenant l’aspect d’un rythme mu; dans les tumeurs infiltrantes
(astrocytomes), on observe des anomalies lentes thêta, delta, plus ou moins
réactives (en fonction de l’œdème) et associées à des pointes focales (tracés
n° 31, 32). Si l’on suspecte une telle lésion, l’IRM avec injection est l’examen
de choix qui doit être réalisé. L’interprétation de l’EEG doit suggérer cette
démarche diagnostique. Plus rarement, on aura une souffrance cérébrale
Diagnostic et surveillance de la maladie épileptique 153

Crise initiale ?
On ne la voit jamais Convulsions
néonatales

Famille
Anamnèse
Clinique
Point de départ Traitements

Alcool, drogues

Maladies métaboliques
Focal Pas de suspicion
d’un départ focal
Autre syncope

Autres signes Épilepsie


cliniques idiopathique ?
de focalisation

EEG : avec 2 hyperpnées et SLI

Tracé désorganisé,
Activités paroxystiques
lent, angulaire
focales, Absence d’anomalies
souffrance focale

Processus
EEG de sieste dégénératif
Bilan d’imagerie
(TDM, IRM++)
Pointes/ Crises Absence d’anomalies
AVC

Processus
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

EEG de sommeil
expansif
intra ou extra axial Crise
sur cicatrice
Cavernome, Pointes / Crises
vasculaire
malformation
vasculaire Épilepsie
primaire

Fig. 5.6. Démarche diagnostique face à une « crise » dont on peut suspecter le
caractère comitial. Dans d’autres cas, se reporter aux figures 5.3 et 5.4.

diffuse et asymétrique traduisant la probable présence d’un processus expansif


de grande taille révélé tardivement (et le plus souvent de croissance lente).
Chez une personne âgée, si le tracé est désorganisé, mal construit, très angu-
laire on sera amené à envisager la présence d’un processus neurodégénératif
dont le premier symptôme est de type paroxystique (accident vasculaire sur
démence vasculaire). On peut avoir également une crise à partir d’une cica-
trice d’accident vasculaire.
154 Indications majeures de l’EEG de l’adulte et de l’enfant

Chez l’enfant, l’EEG lors d’une première crise a la même valeur d’orientation
étiologique que chez l’adulte. Les tumeurs sont rares mais, dans un contexte
d’arrêt du développement psycho-intellectuel ou de dégradation des acquis, on
doit rechercher, soit une épilepsie primaire généralisée (Grand Mal), soit une
encéphalopathie par erreur innée du métabolisme.
Dans le cas d’un EEG fait chez un patient épileptique dont on contrôle le trai-
tement ou l’activité paroxystique, on observera, outre la présence des grapho-
éléments paroxystiques intercritiques plus ou moins nombreux, la possible
présence de rythmes rapides médicamenteux (dus aux traitements par benzo-
diazépines) et surtout le caractère dégradé du tracé (caractéristiques des
« vieux épileptiques ») mal organisé, remanié.
Enfin, dans l’hypothèse d’un patient épileptique confus, traité par valproate et
en surdosage, il arrive que l’on observe un tracé d’encéphalopathie au
valproate évoqué p. 102.
Comme l’indique la figure 5.6, les tracés de sieste ou de sommeil sont très
utiles pour faire un diagnostic d’épilepsie dans le cas où l’EEG standard a été
infructueux. En effet, entre 20 et 25 % des épileptiques font des crises la nuit
et 30 à 40 % en font en veille et sommeil. Les crises généralisées tonicocloni-
ques et les crises généralisées myocloniques sont renforcées par le sommeil
lent alors que, pour les absences Petit Mal, c’est en sommeil REM que le
renforcement des crises s’effectue. Non seulement les crises épileptiques sont
activées par le sommeil mais elles sont également favorisées par le manque de
sommeil (qui est à rechercher dans l’anamnèse). La survenue des crises
partielles au cours des différents stades de sommeil dépend de leur point de
départ.
Il est possible que dans le cadre d’une surveillance d’une maladie épileptique
ou d’un bilan de malaise, la SLI ou l’HPN déclenchent une crise soit partielle
soit généralisée. La conduite à tenir est la suivante. Chez l’enfant de moins de
6 ans, on pratique une injection intrarectale de Valium®, à la dose de 1 mg,
éventuellement répétée si la crise ne cède pas. Chez l’adulte, on préférera une
injection IV de Rivotril® (une ampoule 1 mg, éventuellement répétable). Dans
tous les cas, on disposera à proximité de canules de Guedel et d’oxygène
(obus ou oxygène mural). Si la crise se répète trop souvent ou s’il s’agit d’un
état de mal, il convient de faire prendre en charge le patient par des réanima-
teurs (Samu, ou transfert en réanimation). Un cas particulier est celui d’un
patient éthylique, présentant des crises en rapport avec un syndrome de
sevrage; dans ce cas, l’injection de benzodiazépines est à discuter.

DIAGNOSTIC, PRONOSTIC
ET SURVEILLANCE DES COMAS,
ET DIAGNOSTIC DE LA MORT CÉRÉBRALE
L’EEG est un examen particulièrement capital au stade aigu du coma et ce
parce qu’il permet d’en réaliser à la fois le diagnostic, le pronostic et le suivi.
L’apport diagnostique est en fait celui de l’évaluation de la gravité du coma
Diagnostic, pronostic et surveillance des comas et diagnostic de la mort cérébrale 155

initial et du retentissement du facteur étiologique sur le fonctionnement céré-


bral. Il permet d’évaluer la profondeur du coma, de reconnaître une épilepsie
inapparente cliniquement chez un patient non interrogeable, de reconnaître des
grapho-éléments inhabituels et d’orienter les diagnostics (PLEDS triphasi-
ques…). Le vidéo-EEG facilite la lecture et l’interprétation des grapho-
éléments douteux, permet de voir le patient et de mieux identifier les mouve-
ments anormaux qui sont trop facilement étiquetés comme des épilepsies. Chez
le comateux, sont essentiels le rythme, la continuité et la réactivité du tracé.
La physiopathologie et la sémiologie des comas sont décrites p. 89, 96, 126-
128.
La situation clinique est en général la suivante. L’EEG est demandé, assez
rapidement, dès l’admission en réanimation (figure 5.7) :
– chez un patient qui, en situation postopératoire immédiate, ne se réveille pas
malgré l’arrêt des anesthésiques et/ou de la lyse médicamenteuse;
– chez un patient présentant une pathologie métabolique grave, soit par
défaillance massive d’un organe (foie, rein) soit dans le cadre d’une
encéphalopathie par défaillance polyviscérale fréquente en raison de la possi-
bilité actuelle d’opérer des patients dans un état général dégradé; il s’agit de
l’encéphalopathie chirurgicale ou léthargie morbide qui rejoint souvent le cas
d’un non-réveil postopératoire (voir p. 103);
– chez un patient admis en réanimation pour des raisons diverses parmi
lesquelles un traumatisme craniocérébral grave ou bien dans les suites d’un
arrêt cardiorespiratoire; sont à prendre en considération, dans ce cas, les
processus graves que sont, d’une part, les PLEDS (parfois bilatérales ou
BIPLEDS) (tracé n° 21) et, d’autre part, la survenue d’un état de mal diffus ou
localisé sur une lésion plus focale (nécrose ischémique);
– chez un patient ayant ingéré un toxique notamment lors d’une tentative de
suicide médicamenteuse; l’EEG se traduit le plus souvent par une dépression
massive de type barbiturique, plutôt aréactive ou bien par la présence de très
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

nombreux rythmes rapides et d’activités lentes prédominantes (ingestion de


benzodiazépines); dans ces comas toxiques, les myoclonies sont fréquentes
notamment lors des intoxications par lithium, bismuth, alcool, neuroleptiques
et antidépresseurs.
Dans tous les cas, l’EEG est un examen de choix pour suivre l’évolution du
patient, parce qu’il est peu coûteux, peut être répété et qu’il ne nécessite pas la
mobilisation du patient dépendant de respirateurs, seringues électriques et
autres appareillages de réanimation.
Très souvent, les EEG sont demandés quotidiennement pour ces patients en
équilibre précaire. L’analyse de la réactivité est capitale avec une augmenta-
tion progressive de l’impact des stimuli devant entraîner cette réactivité :
ordres simples (ouvrir les yeux) puis appel par le nom puis effleurement,
bruits et enfin pincements. Dans ce dernier cas, le mouvement de retrait des
membres est segmentaire. S’il ne s’accompagne d’aucune modification du
tracé, la réactivité peut être considérée comme absente.
À noter qu’il est parfois nécessaire de curariser les patients si des mouvements
cloniques ou des tremblements conduisent à la production d’artéfacts qui
156 Indications majeures de l’EEG de l’adulte et de l’enfant

Arrêt cardiorespiratoire
(arrêt cardiaque,
pendaison, noyade)
Accidents vasculaires Traumatisme
Retard de réveil ischémiques ou hémorragiques crânio-cérébral / HIC
post-opératoire

PLEDS,
Activités lentes État de mal Souffrance diffuse généralisée
Dépression barbiturique Suppression bursts Activités paroxystiques
Rythmes rapides BZD Éventuellement asymétrie
(HSD, lésion)

Atteintes métaboliques COMA => Atteintes toxiques


EEG => analyse
• de l’amplitude
Activités lentes triphasiques • des rythmes Activités paroxystiques
± activités paroxystiques • de la continuité Rythmes rapides BZD
• des activités paroxystiques
• de la réactivité +++

Potentiels
évoqués

Amélioration Dégradation

• Reprise d’une activité plus ample


moins lente (delta, puis thêta,
puis alpha) PLEDS +++
• Réapparition d’une réactivité État de mal+++
Suppression bursts
Disparition de la réactivité

• Épilepsie résiduelle
• Asymétrie résiduelle Mort cérébrale État végétatif persistant

État pauci-relationnel
Tracé plat (nul)
Aréactif
Présence des seuls ECG et EMG

Fig. 5.7. EEG et comas.

rendent le tracé illisible. Cette curarisation est permise par la ventilation artifi-
cielle. À noter également que cette dernière génère également des artéfacts.
On doit également souligner que, dans ce cas, les potentiels évoqués sont très
complémentaires de l’EEG dans la mesure où ils permettent d’évaluer le
niveau lésionnel avant le cortex (PEATC, PES), la fonctionnalité des cortex
primaires (PES, PEALM et PEV flash) et même la présence de processus
cognitifs préconscients (MMN) ou conscients P300 (voir chap. 7). Souvent,
devant un patient sous lyse médicamenteuse, chez qui l’EEG sera peu contri-
butif, les PEA, PEV et PES permettent de faire le bilan de l’état des différentes
structures cérébrales et d’envisager un pronostic.
Les critères de gravité d’un coma sont présentés au tableau 5.IV.
Le diagnostic de la mort cérébrale doit satisfaire à des conditions d’enregistre-
ment très sévères qui ont été présentées au tableau 4.IX. Le médecin qui
Pathologies du sommeil 157

Tableau 5.IV. EEG et pronostic des comas.

Mauvais pronostic
(sauf dans les intoxications
Bon pronostic
où ces éléments ont un aspect
moins péjoratif)
La survenue d’une réactivité des Absence de réactivité
activités EEG aux stimulations Activités de haut voltage monotones
extérieures. delta à 0,5-3 Hz, sans modifications
La présence des éléments du sommeil. spontanées ou secondaires
L’existence de cycles de sommeil Présence de bouffées suppressives
normaux. Phénomènes périodiques latéralisés
Les fuseaux chez des patients (PLEDS) généralisés (ou BIPLEDS)
comateux qui traduisent une relative Dépressions intermittentes
intégrité des hémisphères et des (aplatissement) et bas voltage
systèmes thalamiques. Alpha monomorphe
Une amélioration de l’EEG : c’est la Activités paroxystiques
première indication d’une évolution
favorable.

interprète un tracé EEG dans ce contexte doit absolument s’assurer de


l’absence de thérapeutique neurosédative qui peut provoquer la disparition des
activités électriques. Il est conseillé d’aller voir le patient afin d’évaluer
l’origine probable des artéfacts mécaniques : dialyse, cœur artificiel, matelas.
En raison de son caractère médico-légal, la formulation de l’interprétation est
également très importante. Il faudra spécifier dans le compte rendu que
« l’examen réalisé dans les conditions requises pour les protocoles de la mort
cérébrale, à savoir : montage longues distances, en amplification maximale
d’une durée d‘au moins 30 minutes, avec des stimulations sensorielles et noci-
ceptives et en l’absence de toute thérapeutique à visée neurosédative, ne met
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

en évidence aucune activité électrique d’origine cérébrale décelable ».


Pour affirmer la mort cérébrale, il faut obtenir deux EEG plats ou nuls (isoé-
lectriques) à une heure d’intervalle chez l’enfant de moins de 1 an et à
4 heures d’intervalle dans les autres cas.

PATHOLOGIES DU SOMMEIL
S’il est un cadre nosologique dans lequel l’EEG est indispensable au
diagnostic, c’est bien celui qui regroupe les différents troubles du sommeil.
Les pathologies du sommeil sont fréquentes. Les répercussions psychologi-
ques et cognitives de ces troubles sont considérables et très souvent leur
exploration insuffisante.
Nous avons insisté par ailleurs au chapitre 2 sur l’importance de considérer
l’EEG en fonction des états de vigilance et des cycles veille-sommeil (voir
p. 25-30). Dans les troubles du sommeil, c’est l’EEG, l’enregistrement de
l’ECG, du peumogramme, des mouvements oculaires et de l’EMG (polysomno-
158 Indications majeures de l’EEG de l’adulte et de l’enfant

graphie) qui permettent d’étudier les stades de sommeil, leurs proportions et


leurs qualités respectives. Ces explorations des pathologies du sommeil
(incluant les troubles de rythmes circadiens) sont réalisées le plus souvent dans
des centres spécialisés, car ils demandent une infrastructure dans laquelle les
patients peuvent passer une nuit pour l’enregistrement des activités physiologi-
ques et des mouvements (caméra vidéo).

Insomnies
Les insomnies sont définies par un sommeil nocturne fragmenté ou de durée
diminuée, avec ou non plainte de mauvais sommeil. On considère que la
moitié des sujets souffriront dans leur vie d’une insomnie.
De très nombreuses insomnies sont, en réalité, en rapport avec un problème
émotionnel aigu (divorce, stress des examens, perte d’un travail). Ce sont des
insomnies transitoires psychophysiologiques qui sont caractérisées par une
difficulté d’endormissement et une diminution des pourcentages de stades III
et IV et du sommeil REM. Ces formes aiguës peuvent se transformer en
insomnies psychophysiologiques chroniques. La dépression est également
génératrice d’une insomnie avec difficulté d’endormissement et réduction des
stades III et IV, éveils fréquents et réveil précoce.
Parmi les autres causes d’insomnie, on retrouve :
– l’ingestion de drogues (neurostimulants, caféine et nicotine) entraînant une
fragmentation du sommeil de nuit et une diminution du sommeil REM et du
sommeil à ondes lentes;
– des anomalies motrices comme le syndrome des jambes sans repos (proba-
blement une déafférentation fonctionnelle de l’étage médullaire produisant les
mouvements anormaux) ou les mouvements périodiques du sommeil (PMS)
ou le rare myoclonus hypnagogique généralisé;
– les apnées du sommeil obstructives (éveils répétés) et surtout centrales
provoquent également des insomnies;
– des lésions cérébrales impliquant le tronc cérébral, le cerveau basal antérieur.

Hypersomnies
Il s’agit de l’augmentation de la durée et/ou de la profondeur du sommeil. Les
principales causes en sont :
– l’hypersomnie idiopathique dans laquelle la durée du sommeil est augmentée
(10, 16 voire 20 heures) mais l’organisation cyclique est conservée; les patients
sont difficilement « éveillables » et présentent parfois des endormissements
irrésistibles;
– la narcolepsie : la narcolepsie isolée ou narcolepsie non-REM se traduit par
des endormissements inappropriés (accès de sommeil) et plus ou moins irré-
sistibles dans la journée, avec une somnolence diurne excessive chronique;
dans la narcolepsie isolée ou monosymptomatique, ces endormissements
surviennent seuls et dans un sommeil non-REM; dans la narcolepsie-cata-
plexie, 50 % des attaques de sommeil surviennent en sommeil REM et sont
Pathologies du sommeil 159

associées avec des hallucinations hypnagogiques, une paralysie du sommeil et


une cataplexie (perte brutale de tonus musculaire); cette dernière pathologie
aurait une prévalence supérieure à celle de la sclérose en plaques;
– les apnées du sommeil peuvent être périphériques (obstructives), centrales
(avec blocage temporaire des centres respiratoires médullaires) ou mixtes; une
apnée est la suspension de la respiration de plus de 10 secondes; certains
patients peuvent faire une centaine d’apnées dans la nuit; l’hypoventilation
conduit à l’apparente hypersomnie et la somnolence diurne excessive;
– les anomalies motrices au cours du sommeil comme le myoclonus nocturne
ou les mouvements des jambes ne sont présents qu’en sommeil et entraînent
des microéveils et consécutivement une somnolence diurne excessive.

Parasomnies
On appelle parasomnies des désordres épisodiques dans le sommeil. On citera
notamment :
– les réveils en stades III et IV avec confusion, désorientation, automatismes
gestuels et amnésie de l’événement;
– les terreurs nocturnes avec cri, comportements anormaux lors des stades III
et IV durant 5 à 10 minutes;
– le somnambulisme, avec sortie du lit au cours des stades III et IV, déambula-
tion, comportements stéréotypés et amnésie des événements au réveil;
– des rêves terrifiants avec vocalisations (pas de cri), sans confusion ni déso-
rientation au cours du sommeil REM;
– l’énurésie nocturne au-delà de 3 ans, la perte des urines survenant dans tous
les stades et sans éveil total (vessie de petite taille et très réactive aux stimuli).
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.
160 Indications majeures de l’EEG de l’adulte et de l’enfant

CE QU’IL FAUT RETENIR

• Un enregistrement EEG chez le prématuré et le nouveau-né permet de


mettre en évidence un éventuel retard de maturation cérébrale en lien
avec une grossesse pathologique et/ou de mettre en évidence des anoma-
lies électrophysiologiques (processus paroxystique, dépression de
l’électrogenèse…) en lien avec une souffrance cérébrale focale ou
généralisée.
• Des pathologies ischémiques sont spécifiques de la période néonatale au
rang desquelles l’hypoxie chronique, la souffrance fœtale aiguë et les
leucomalacies périventriculaires. Ces lésions sont pourvoyeuses de graves
perturbations de la maturation et de l’électrogenèse.
• Les pathologies paroxystiques du nouveau-né et de l’enfant sont, soit
consécutives à des pathologies in utero, malformatives ou ischémiques,
soit consécutives à des erreurs innées du métabolisme, soit s’intègrent
dans une maladie épileptique primitive qui revêt selon l’âge de
nombreuses formes différentes.
• L’EEG est un examen indispensable dans la caractérisation d’une perte
de connaissance dont l’origine non neurologique a été éliminée, chez
l’adulte comme chez l’enfant. Il permet d’orienter le diagnostic et
d’éliminer des encéphalopathies métaboliques, des syncopes convulsi-
vantes et des crises épileptiques.
• Toute confusion mentale constitue une indication formelle de l’EEG. L’EEG
est fondamental pour faire le diagnostic et le suivi d’une encéphalopathie
herpétique, d’une maladie de Creuztfeld-Jakob, d’une encéphalopathie
métabolique, d’un état de mal non convulsivant temporal ou frontal.
• L’EEG est un examen absolument requis au diagnostic de toute « crise »
suspectée d’être épileptique. Il permet d’éliminer notamment un foyer
épileptique focal sur une cicatrice, une lésion vasculaire ou une tumeur. Il
permet de diagnostiquer une épilepsie primaire généralisée et d’en suivre
le traitement.
• L’EEG est indispensable au diagnostic de gravité des comas, à leur
pronostic et à leur suivi. Les grapho-éléments présents, leur évolution sont
des critères très importants pour avoir une idée de l’évolution future du
coma. La réactivité est également essentielle dans l’évaluation de la souf-
france cérébrale.
• L’EEG, dans sa version polysomnographique, est indispensable à l’analyse
des pathologies du sommeil (insomnies, hypersomnies, troubles des cycles
veille-sommeil et parasomnies). Ce type d’EEG est pratiqué dans des
centres spécialisés pour l’exploration du sommeil.
6 AUTRES INDICATIONS
DE L’EEG DE L’ADULTE
ET DE L’ENFANT

Dans le chapitre 5, nous avons détaillé les circonstances dans lesquelles l’EEG
est un examen absolument indispensable au diagnostic en neurologie.
Pourtant, il est des cas où l’EEG est prescrit, très souvent, pour faire le
diagnostic différentiel de pathologies paroxystiques, tumorales ou autres et où
il s’avère d’une grande utilité, même si, parfois, ses indications recouvrent
partiellement celles de l’IRM ou de la TDM.

EEG DES TROUBLES DÉMENTIELS


La démence est un état au cours duquel se produisent des altérations des fonc-
tions intellectuelles : troubles de la mémoire, du jugement, de la personnalité.
Le diagnostic de syndrome démentiel se pose fréquemment, comme nous
l’avons vu au chapitre 5, à partir d’une confusion ou d’une crise épileptique
qui imposent un EEG.
En réalité, de manière plus générale, une dégradation cognitive chez l’adulte
(troubles mnésiques, troubles de l’attention) est une indication logique d’un
EEG même si ces troubles sont discrets par comparaison avec une confusion.
Face à un tableau démentiel, l’EEG est utile pour apporter des arguments pour
ou contre une dépression sévère avec troubles cognitifs (pseudo-démence
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

dépressive qui s’accompagne de troubles cognitifs très importants). Enfin,


malgré sa plus grande rareté, se pose toujours l’hypothèse d’une maladie de
Creutzfeld-Jakob à son début.
Dans la maladie d’Alzheimer, l’EEG est subnormal au début. Plus tardive-
ment, on retrouve un ralentissement du rythme alpha postérieur, une
augmentation des activités lentes diffuses thêta et delta voire des bouffées
lentes généralisées. On observe plus rarement des anomalies épileptiformes et
plus rarement encore des anomalies triphasiques. Mais au début (au cours du
Mild Cognitive Impairment ou MCI), l’EEG est souvent normal. De plus, chez
le sujet vieillissant normal, on peut même parfois trouver un ralentissement
temporal gauche (activité thêta et delta) qui n’est pas finalement indicatif
d’une atteinte par la maladie d’Alzheimer (tracé n° 24).
En général, il existe une bonne corrélation entre les atteintes cognitives et la
sévérité des anomalies EEG. Des études récentes tendent à montrer que la modi-
fication de l’EEGq (avec analyse spectrale) prédit bien la réponse cognitive lors
d’une prise d’anticholinestérasique. Il a été également montré que le rapport des
puissances spectrales des bandes alpha et thêta, ainsi que la variation de puis-
sance spectrale totale de la région pariéto-occipitale gauche, constitueraient de
DÉMENCE

Démences mixtes
Démences corticales
Maladie
de Creutzfeldt-Jakob
Démence vasculaire

Démences à corps de Lewy


Anomalies focales
plus fréquentes que
Rythmes de fond à 6Hz,
MCI dans les autres démences
+ bouffées delta de grande amplitude Démences sous-corticales
sans périodicité et peu réactives

EEG Maladie de Pick,


normal démences frontales

EEG
très peu modifié
Maladie d’Alzheimer Maladie Dégénérescence Chorée Paralysie Hydrocéphalie Encéphalopathie
162 Autres indications de l’EEG de l’adulte et de l’enfant

de Parkinson corticobasale de Huntington supra-nucléaire à pression VIH


progressive normale
EEG altéré Diminution d’amplitude
(disparition du rythme de base Pas d’anomalies EEG normal EEG normal au début.
chez 40 % des patients Puis lors de l’aggravation,
et ralentissement, spécifiques dans 70 % des cas ; EEG non
perte de cohérence inter hémisphérique dans les 30 % des cas, modifié ralentissement important et global
Ondes lentes du côté atteint,
des réponses lors de la SLI) ralentissement du rythme de fond avec bouffées delta diffuses
particulièrement observées
+ FIRDA mais peu amples
lors des épreuves d'activation

Fig. 6.1. Caractéristiques de l’EEG dans les diverses démences.


L’EEG dans les troubles psychiatriques 163

bons arguments prédictifs de la progression de la maladie d’Alzheimer. Le


ralentissement précoce de l’EEG serait un signe d’évolution défavorable.
L’essentiel des modifications EEG dans les démences est présenté dans la
figure 6.1. Il existe peu de tracés spécifiques, bien que certains soient plutôt
évocateurs de la neurodégénérescence.

L’EEG DANS LES TROUBLES PSYCHIATRIQUES


D’une manière générale, l’EEG en psychiatrie a pour but d’apporter des argu-
ments en faveur d’une origine organique sous-jacente, en face de troubles
comportementaux, d’hallucinations ou de dépression. Ainsi, à l’entrée en
hôpital psychiatrique, chez un sujet n’ayant jamais présenté de troubles de ce
type, un EEG et une TDM sont les examens minimaux à réaliser.
Par ailleurs, les malades psychiatriques ne sont en aucun cas indemnes de patholo-
gies neurologiques. L’apparition de nouveaux troubles chez un patient psychotique
ou l’aggravation brutale d’une psychose doivent faire penser à éliminer notamment
une encéphalite, une tumeur cérébrale, une épilepsie, un AVC…
On doit noter que la dimension neurologique de la psychiatrie est plus impor-
tante chez le sujet âgé et que l’intrication des deux approches est souvent
nécessaire. Le cas des pseudo-démences dépressives est typique de cette intri-
cation, de même que la fréquence de la dépression chez les patients présentant
une maladie d’Alzheimer.
Le tableau 6.I regroupe les anomalies EEG dans quelques pathologies
psychiatriques.

Tableau 6.I. EEG dans certaines pathologies psychiatriques


(ADHD : Attention Deficit/Hyperactivity Disorder).
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

Pathologie EEG
Retard mental Incidence croissante des anomalies EEG et des troubles
épileptiques proportionnelle avec le degré d’infirmité.
L’EEG est caractéristique de la pathologie sous-jacente.
Dyslexie Environ 40 % des enfants présentent des anomalies EEG en
général en relation avec le bas niveau d’études.
Autisme 50 % des enfants autistes présentent des anomalies EEG en
relation avec des facteurs prédisposants (rubéole
maternelle, phénylcétonurie). Les pathologies sous-
jacentes sont à prendre en compte.
Syndrome EEG souvent perturbé avec des épisodes de ralentissement
d’hyperactivité avec de la fréquence moyenne du tracé compte tenu de l’âge
déficit attentionnel chronologique dans 30 à 60 % des cas.
(ADHD)
Maladie des tics de Dans 25 à 75 % des cas, activités paroxystiques bilatérales
Gilles de la Tourette ou unilatérales avec ralentissement généralisé ou focal de
l’électrogenèse.
164 Autres indications de l’EEG de l’adulte et de l’enfant

Dans les schizophrénies, les anomalies EEG sont très discutées. Du point de
vue de la routine clinique, on peut considérer que l’EEG est très peu infor-
matif dans le diagnostic positif et l’évolution de la maladie.
De la même manière, dans les épisodes dépressifs, l’EEG est normal ou
subnormal. On a vu plus haut qu’il pouvait faciliter le diagnostic entre
démence et pseudo-démence dépressive. L’EEG doit être pratiqué dans la
phase diagnostique du processus dépressif (ou maniaque) car de nombreuses
tumeurs présentent comme point d’appel une dépression ou un trouble
maniaque. L’EEG est intéressant dans l’évaluation de la réponse à la sismothé-
rapie (électrochocs). L’augmentation des activités lentes (thêta et delta), juste
après la crise induite par la sismothérapie, serait prédictive d’une bonne
réponse. Il est obligatoire avant l’instauration de toute sismothérapie.
Dans les traitements médicamenteux des troubles dépressifs, des anomalies
EEG peuvent apparaître. Le lithium entraîne l’apparition d’activités lentes
antérieures ou diffuses, de grande amplitude (type encéphalopathie hépatique)
et parfois des pointes-ondes lentes focales. Lors de l’intoxication aiguë, le
tracé peut être dysrythmique avec des activités lentes delta et des pointes
diffuses. Les tricycliques provoquent l’apparition d’activités lentes, de
pointes-ondes diffuses ou d’anomalies irritatives focales, voire de crises.
Dans l’anorexie mentale, on observe, chez près de 60 % des patients, des
anomalies de l’activité de base, chez 31 %, des anomalies à l’HPN (instabilité)
et, chez 12 %, des anomalies paroxystiques. Il est fréquent de retrouver des
anomalies métaboliques en raison des troubles ioniques ou de l’hypoglycémie
relative induits par le jeûne. On peut observer également des dysrythmies.
En réalité, il apparaît que l’électrogenèse cérébrale est peu modifiée par les
troubles psychiatriques dont l’étiologie n’est pas une pathologie neurologique.
C’est sans doute la raison pour laquelle les tentatives faites pour relier les acti-
vités EEG avec les performances mentales se sont toujours avérées vaines et
finalement sans intérêt. La question se déplace alors vers la forme la plus
évoluée des potentiels évoqués, les potentiels évoqués endogènes ou cognitifs.
C’est ainsi que la P300 (voir p. 172) présente une amplitude réduite chez les
schizophrènes ce qui pourrait constituer un trait prémorbide de cette patho-
logie. Des potentiels d’obtention plus difficile et mettant en jeu des
stimulations très complexes (phrases…) sont en cours d’évaluation.

EEG ET PRATIQUE DU SPORT


Quelques sports nécessitent un EEG afin d’en permettre légalement la
pratique.
Il s’agit tout d’abord de la plongée pour laquelle il faut éliminer, d’une part, la
présence d’une comitialité et, d’autre part, un terrain vagotonique. Chez les
plongeurs, la pression de l’eau peut entraîner la compression des globes
oculaires et de ce fait une syncope convulsivante (voir p. 144). Dans ce cas, on
réalise au cours de l’EEG une double hyperpnée, un ROC et éventuellement
Céphalées et migraines 165

une épreuve de Valsalva (voir tableau 4.II). Cette dernière épreuve est suscep-
tible de reproduire des situations d’apnée en plongée.
Le même type d’examen est réalisé également avant la pratique de la boxe afin
de dépister une hypertonie vagale (qui serait démasquée lors des chocs sur les
yeux ou sur le plexus solaire).
Enfin, l’EEG est régulièrement pratiqué dans le bilan médical des pilotes
d’avion.

CÉPHALÉES ET MIGRAINES
Les maux de tête sont symptomatiques de très nombreuses pathologies,
comme des infections, des tumeurs ou des lésions vasculaires intracérébrales.
Il est évident que la plupart du temps les céphalées ne nécessitent en aucune
manière un EEG en urgence. En effet, en dehors de quelques cas, une céphalée
brutale, subaiguë ou chronique, dans un contexte non migraineux, va d’abord
faire envisager la réalisation d’un examen d’imagerie pour éliminer une
tumeur ou un processus expansif intracrânien, voire une hémorragie méningée
ou une malformation artérioveineuse.
La question se pose différemment devant une céphalée d’apparition rapide 1,
avec anomalies neurologiques et dans laquelle l’imagerie est strictement
normale. Dans ce cas l’EEG est nécessaire :
– pour éliminer une encéphalite;
– pour éliminer, dans un contexte d’hémiplégie, une migraine accompagnée
qui serait à son origine (syndrome hémicrânie hémiplégie familiale chez
l’enfant);
– pour documenter une migraine dont l’aura est de nature épileptique (crise
partielle).
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

La migraine présente des caractéristiques très marquées lors de la crise


migraineuse et peu marquées lors des périodes entre les crises. Entre les
crises, on peut observer la présence de quelques anomalies discrètes, à type de
bouffées lentes, d’un ralentissement et de pointes lentes transitoires.
La réponse à la SLI est en général caractérisée par un entraînement massif,
aux basses fréquences et aux éclairs isolés (avec présence de potentiels géants
très évocateurs). Durant la crise, l’activité alpha peut être réduite. Dans les
migraines accompagnées, l’EEG montre souvent un ralentissement massif et
impressionnant sur un seul hémisphère éventuellement durable.

AUTRES INDICATIONS DE L’EEG


L’EEG est recommandé avant une greffe cardiaque chez l’adulte et l’enfant.

1. Elle est différente de la céphalée brutale de l’anévrisme qui n’est pas une indication d’EEG.
166 Autres indications de l’EEG de l’adulte et de l’enfant

L’EEG est recommandé chez l’adulte devant avoir une circulation extracorpo-
relle et présentant des facteurs de risque neurologique. Il est médico-légal
chez l’enfant devant avoir une circulation extracorporelle.
Il est intéressant de pratiquer un EEG aussi dans les périodes postopératoires
(encéphalopathie postopératoire, léthargie morbide, voir p. 103) ainsi que
dans les dissections aortiques.
Un EEG est également conseillé avant les chimiothérapies chez l’enfant en
raison de la neurotoxicité des drogues qui peuvent entraîner des convulsions.

RECHERCHE PHARMACEUTIQUE
La mise sur le marché de nouvelles molécules psychotropes ou neurotropes
est souvent accompagnée de nombreuses études sur les effets de celles-ci sur
l’électrogenèse et/ou les rythmes de sommeil. Certains centres sont même
spécialisés dans ce type d’enregistrement et d’analyse. Dans ce cas, le plus
souvent, les EEG sont pratiqués chez des sujets témoins et l’analyse du tracé
est essentiellement quantitative avec une analyse des puissances spectrales
dans les différentes bandes avant et après ingestion de la drogue. Ce type
d’essai peut éventuellement être conduit chez des patients recevant ces molé-
cules nouvelles. C’est là une application peu clinique de l’EEG mais qui
permet de connaître utilement les effets sur les tracés des médicaments intro-
duits dans la pharmacopée.

CE QU’IL FAUT RETENIR

• Dans les syndromes démentiels, l’EEG contribue principalement au


diagnostic différentiel de pseudodémence dépressive par rapport à une
démence vraie et pour éliminer le diagnostic d’une maladie de Creutzfeld-
Jakob. Il est intéressant également pour donner des arguments prédictifs
d’évolution d’une maladie d’Alzheimer.
• Dans les syndromes psychiatriques, le plus souvent, l’EEG permet
d’éliminer une cause organique et notamment une tumeur, une épilepsie
ou une encéphalopathie. En outre, les drogues psychotropes peuvent
modifier de manière spectaculaire l’EEG qui peut s’avérer très utile dans le
cas d’une intoxication médicamenteuse.
• Il existe quelques sports (plongée, boxe) dont la pratique requiert un
EEG préalable.
• L’EEG dans les migraines ou les céphalées n’est pas un examen absolu-
ment indispensable, sauf dans quelques cas particuliers assez rares.
7 POTENTIELS ÉVOQUÉS

Dans le chapitre 1, nous avons vu que l’EEG standard de routine analyse


l’activité de fond globale et spontanée du cerveau, en absence de stimulation
et lors d’activations très simples et peu spécifiques. Les potentiels évoqués, en
revanche, constituent l’enregistrement d’activités de petites populations de
neurones sélectivement stimulés.

PRINCIPE DES POTENTIELS ÉVOQUÉS :


MOYENNAGE DE SIGNAUX TRÈS FAIBLES
L’arrivée d’influx sensoriels en provenance de la périphérie provoque une
variation des activités cellulaires corticales et donc un potentiel (en fait une
variation de potentiel) dans l’aire corticale primaire (ou secondaire) corres-
pondante. Ce potentiel, dénommé potentiel évoqué (PE), apparaît au sein des
signaux de l’activité EEG. Mais son amplitude, très réduite, le rend le plus
souvent indétectable dans le flux des variations enregistrées dans un EEG
continu (d’amplitude de 50 microvolts environ).
Les potentiels évoqués ne peuvent être obtenus, dans un contexte clinique, que
grâce au processus de moyennage, technique introduite dans les années 1940.
Le moyennage (extraction d’un PE de l’activité de fond) permet l’annulation
de cette activité de fond et la sommation de l’activité spécifique. On montre
que dans ce cas, le rapport du signal (PE) au bruit (activité de fond), en termes
de puissance ou de variance, croît par un facteur de N quand on somme N
réponses. En termes d’amplitude, ce signal croit comme N . L’hypothèse
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

sous-jacente est que l’activité de fond, considérée comme aléatoire, n’est pas
modifiée par l’activité évoquée alors que celle-ci est constante d’une stimula-
tion à l’autre. Cette augmentation postule, en outre, que les valeurs de
l’activité de fond ne sont pas corrélées.
L’utilisation d’appareillages numériques simplifie considérablement les moda-
lités de moyennage dont, techniquement, la réalisation est assez simple. Au
moment où le stimulus est envoyé (éclair, son, stimulation électrique) dans le
système de stimulation, un petit signal (trigger, impulsion de synchronisation)
déclenche l’ouverture du convertisseur analogique digital et par conséquent la
numérisation du signal enregistré pendant le temps nécessaire à l’enregistre-
ment de ce signal. Quand l’ordinateur lui-même provoque à la fois le
déclenchement du stimulus et l’ouverture du CAD, on dit qu’il s’agit d’une
synchronisation interne. Quand un ordinateur extérieur présente le stimulus et
l’envoie à l’ordinateur qui enregistre le signal d’activation du CAD, on dit
qu’il s’agit d’une synchronisation externe, comme nous l’avons vu dans le
chapitre 1 (voir figure 1.4). Cette dernière est souvent employée dans l’obten-
tion de potentiels cognitifs.
168 Potentiels évoqués

Le nombre de points décrivant le signal (et donc venant constituer une ligne de
la matrice des signaux) dépend à la fois de la fréquence d’échantillonnage, du
signal et du temps nécessaire pour obtenir le décours complet du potentiel
analysé. Ainsi, pour des potentiels auditifs du tronc cérébral, une acquisition
de 10 millisecondes est en général suffisante, alors que pour des potentiels
cognitifs (type N400) le convertisseur analogique digital devra rester actif
environ 1 seconde. Lors de la seconde stimulation, les valeurs de signal
rempliront une deuxième ligne de la matrice. À l’issue des p enregistrements
correspondant à p stimulations, tous les points d’une même colonne seront
additionnés pour constituer le signal définitif (figure 7.1).
Il est également à noter que l’habituation, que l’on peut observer lors des
stimulations successives nécessaires à l’obtention d’un PE, contredit l’hypo-
thèse de la constance de l’activité évoquée. Ceci est particulièrement marqué,
par exemple, pour les potentiels évoqués cognitifs. De la même manière, une
variation de la latence entre deux stimulations crée une erreur sur la latence
réelle moyennée. Par ailleurs, il faut également vérifier que le potentiel enre-
gistré soit véritablement terminé avant que la stimulation ne déclenche l’autre
potentiel, sous peine de voir des composantes tardives se mélanger avec les
composantes précoces du potentiel suivant. Enfin, dans la procédure classique
d’enregistrement des PE, aucun compte n’est tenu de l’état de synchronisation
ou de désynchronisation de l’activité électroencéphalographique, c’est-à-dire
de l’état d’éveil ou d’attention. C’est ce qui fait l’intérêt du rétromoyennage
qui permet de classer les états d’activation dans lesquels surviennent les PE.

Signal évoqué

temps
S1 S2 Sn

Stimulus Points 1 2 3 4 5 … p 63 64
S1 Tension i1,1 i2,1 i3,1 i4,1 i5,1 Ip,1 i63,1 i64,1
S2 i1,2 i2, 2 i3, 2 i4, 2 i5, 2 Ip, 2 i63,2 i64,2

Sn i1,n i2, n i3, n i4, n i5, n Ip, n i63, n i64, n


Tension totale
(somme des n tensions I I1 I2 I3 I4 I5 In I63 I64
en chaque point)

Fig. 7.1. Principe du moyennage de signaux numérisés.


Chaque signal équivaut à une matrice de 1 ligne et de p colonnes, p corres-
pondant au nombre de points ayant permis d’échantillonner le signal (ici
64). Les valeurs numériques dans chaque case de la matrice correspondent à
l’intensité du signal. L’addition des n lignes, correspondant aux n stimuli
délivrés, donne le potentiel évoqué final.
Potentiels évoqués en clinique 169

POTENTIELS ÉVOQUÉS EN CLINIQUE


Le potentiel évoqué en clinique est analysé selon trois critères :
– la morphologie du potentiel (nombre de composantes, symétrie, étalement…);
– sa latence : il s’agit ici du délai après la stimulation auquel culmine une onde
du potentiel; en effet, toutes les fibres n’ayant pas le même diamètre et tous
les influx n’étant pas traités de la même manière dans les circuits neuronaux,
la volée afférente ne forme en général pas un pic aigu mais une onde; la
latence de l’onde est alors calculée au maximum d’amplitude de celle-ci; de
plus, la latence de culmination d’une onde peut varier d’un essai sur l’autre
(effet « jitter »); malgré ces limites, on admet que des allongements de latence
sont plutôt en faveur d’anomalies de la conduction le long des voies de la
modalité sensorielle;
– son amplitude (ou dans certains cas l’aire) en général proportionnelle au
nombre de neurones impliqués.
Alors que l’analyse de l’EEG est essentiellement qualitative, l’analyse de PE
est quantitative et même d’une grande précision. Par exemple, dans les
PEATC, il y a une onde toutes les millisecondes entre l’onde I (potentiel
cochléaire) et l’onde V (jonction pont-mésencéphale). Une asymétrie de
latence de l’onde V excédant 0,4 ms entre les deux cotés est pathologique. De
la même manière, une asymétrie de plus de 0,7 ms de l’onde N20 (potentiel
cortical des voies somesthésiques) est pathologique.

Potentiels sensoriels

Si l’enregistrement de potentiels évoqués gustatifs ou olfactifs relève des


procédures de recherche, les modalités auditive, visuelle et somatosensorielle
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

peuvent être explorées par les potentiels évoqués. L’essentiel des indications
cliniques est présenté dans le tableau 7.I.

Tableau 7.I. Indications cliniques des différents potentiels évoqués


sensoriels utilisés en clinique .

Type Intérêt clinique

PEV « flash » Étude de la rétine périphérique (diodes) et des systèmes


occipitopariétaux principalement.
Analyse des fonctions visuelles chez les patients comateux
ou chez les nouveau-nés et les enfants (flash).
PEV « échiquier » Étude de la macula et de la fovéa et du système
occipitotemporal.
Particulièrement sensibles et utiles dans les altérations de
la substance blanche : SEP, encéphalopathies VIH.
Exploration des fonctions rétiniennes et du nerf optique. 
170 Potentiels évoqués

 Tableau 7.I. Indications cliniques des différents potentiels évoqués


sensoriels utilisés en clinique (suite).

Type Intérêt clinique

PEA du tronc Étude des surdités périphériques (atteintes cochléaires,


cérébral (PEATC) atteintes du VIII). Exploration des acouphènes, des vertiges.
Étude des comas (fonctionnalité des noyaux du tronc) et des
traumatismes craniocérébraux. Exploration du tronc cérébral.
Complémentaires dans l’étude des SEP.
Surveillance de l’intégrité du tronc lors des interventions
sur la fosse postérieure.
PEA à latence Analyse des fonctions auditives. Étude des anomalies du
moyenne lobe temporal. Étude des comas et prédiction de
(PEALM) récupération.
PES des quatre Analyse de tous les troubles de la sensibilité et des lésions
membres de la substance blanche.
Mesure du temps de conduction centrale.
Surveillance des fonctions somesthésiques lors des
interventions sur le rachis. Pronostic des comas (en
complément avec les PEALM).

Potentiels évoqués auditifs


Trois types de potentiels auditifs (PEA) peuvent être enregistrés (figure 7.2) :
– les PEA du tronc cérébral (PEATC) : stimulation avec des clicks sonores
permettant d’évaluer les voies auditives périphériques et bulbopontiques;
– les PEA à latence moyenne (PEALM) : stimulation avec des tone-bursts
pour l’analyse des voies auditives au niveau mésencéphalo-diencéphalique et
cortical;
– les PEA tardifs : intéressent les réponses corticales mais sont peu utilisés en
clinique.

Potentiels évoqués visuels (PEV)


Deux types de PEV sont disponibles en dehors de l’électrorétinogramme
(figure 7.3) :
– les PEV « flash » obtenus par stimulation avec des éclairs ou des diodes; ils inté-
ressent surtout la rétine périphérique quand ce sont des diodes qui sont utilisées;
– les PEV « damier » obtenus par stimulation avec un damier dont le contraste
des carreaux alterne; les carreaux sont de tailles différentes permettant de
présenter des fréquences spatiales croissantes (de 13 à 52 minutes d’angle
solide) et d’analyser différentes parties de la rétine centrale (macula).

Potentiels évoqués somesthésiques (PES)


Les PES des membres supérieurs ou inférieurs permettent, avec une stimula-
tion électrique au seuil moteur, d’obtenir une évaluation des voies
Potentiels évoqués en clinique 171

Portion proximale du VIII Lemnisque latéral,


+ entrée dans le tronc cérébral complexe olivaire supérieur (pont)

Volée afférente dans Lemnisque latéral + colliculus


Noyau cochléaire (TQJ) inférieur ventrolatéral
la portion distale du VIII
+ corps trapézoïde
(extracranienne)

A IV V
III
I II
homolatéral

IV

II III
controlatéral

Cortex auditif primaire


(gyrus de Heschl)
Relais mésodiencéphalique
incluant le colliculus
Pa
B
Na
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

Fig. 7.2. Potentiels évoqués auditifs.


En A, potentiels évoqués auditifs du tronc cérébral (PEATC) : base de temps
de 10 ms, moyenne de 2 000 acquisitions, amplitude de l’ordre de 1 µV. En
B, potentiels évoqués auditifs à latence moyenne (PEALM) : base de temps
de 50 ms, moyenne de 2 000 acquisitions, amplitude de l’ordre de 1 µV.
Noter que, en France, pour les potentiels auditifs, la déflexion positive est
orientée vers le haut (ceci est dû à des raisons historiques).

somesthésiques au niveau tronculaire (nerf), segmentaire (moelle) et cortical


(aire S1) (figure 7.4).
On peut classer également dans ces potentiels les PES nociceptifs obtenus par
stimulation douloureuse par laser (stimulation des fibres C et myélinisées de
petit diamètre).

Potentiels évoqués cognitifs


Seulement deux types de potentiels évoqués cognitifs sont utilisés actuelle-
ment en clinique (figure 7.5).
172 Potentiels évoqués

N 75
P100 N 145

droit

médian

gauche

N2

N3
P1
P2
B N1

Fig. 7.3. Potentiels évoqués visuels (PEV).


En A, PEV obtenus avec une stimulation de type damier à inversion de
contraste (damiers avec des carreaux dont le contraste alterne) : base de
temps de 300 ms, moyenne de 100 acquisitions, amplitude de l’ordre de
15 µV. En B, PEV obtenus avec un flash. La positivité majeure est dénommée
P2 et correspond à l’onde IV ou VII (initialement décrite par Ciganek).
Mêmes caractéristiques générales d’acquisition.

Négativité de discordance
La négativité de discordance (ou mismatch negativity) est enregistrée à la suite
d’une stimulation dans laquelle un stimulus rare et déviant est présenté parmi
des stimuli fréquents, en l’absence de toute attention portée au stimulus par le
sujet. Cet examen est particulièrement utile dans l’étude de l’état du cortex
dans les comas (valeur pronostique). L’onde N100 surgit avant la prise de
conscience du stimulus, alors que l’onde N200 apparaît peu après. La
mismatch negativity est un potentiel apparaissant vers 130-150 ms pendant
l’analyse inconsciente par le cerveau d’une différence de quelques ms de la
durée d’un stimulus.

Potentiels P300
Ils sont obtenus en réponse à un stimulus déviant de survenue aléatoire (quelle
que soit la modalité sensorielle), au sein d’une série de stimuli (paradigme odd
Potentiels évoqués en clinique 173

Aire S1 contralatérale
N20 (aire 3)

Électrode pariétale
controlatérale

Aire S1 contralatérale
N18 (aire 3)

Électrode pariétale
ipsilatérale
N11 PA dans cordons postérieurs

N13 Réponse médullaire segmentaire,


Électrode cervicale couches III et IV

Potentiel dans
le plexus brachial
(point d’Erb)

Électrode au point
d’Erb

Début volée
afférente

Fig. 7.4. Potentiels évoqués somesthésiques (PES) du membre supérieur obtenus


par stimulation du nerf médian au poignet et enregistrés dans quatre déri-
vations. PA = potentiel d’action; base de temps de 50 ms, moyenne de
200 acquisitions, amplitude de l’ordre de 5 µV.

ball). Ils impliquent le plus souvent une attention consciente à cette variation
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

du stimulus et à la détection d’une nouveauté. L’amplitude considérable d’un


P300 (10 µV) et sa surface sont à comparer à celles d’une onde V d’un
PEATC (< 1 µV). Même si elle n’est pas linéaire, la relation entre l’aire du PE
(énergie électrique) et le nombre de cellules impliquées souligne la complexité
de tels potentiels cognitifs et le nombre considérable de neurones mis en jeu
dans ces derniers.
La P300 refléterait, selon la théorie la plus largement acceptée, la mise à jour
de l’information en mémoire de travail et la prise de décision quant au
stimulus. Les P300 sont utilisés dans l’exploration des troubles cognitifs
impliquant des déficits attentionnels (démences, troubles cognitifs de diverses
encéphalopathies)…

Potentiels évoqués moteurs


Plus rarement proposés, les PEM corticaux par stimulation magnétique trans-
crânienne réalisent une analyse des temps de conduction dans les voies
motrices (faisceau pyramidal). Ils constituent un complément intéressant de
l’EMG.
174 Potentiels évoqués

MMN :
Détection inconsciente
du stimulus déviant
A
Différence
entre
fréquents et rares

fréquents

rares

MMN N2:
N 100 : (dérivations centrales) :
Identification physique stimulus inattendu
du stimulus

N 100 :
Identification physique
du stimulus N 200 : stimulus inattendu

standard
B
B

déviant

P3B P 300 : analyse du stimulus incongru


P3A le sujet a perçu consciemment
le stimulus déviant

Fig. 7.5. Potentiels évoqués cognitifs.


En A, négativité de discordance (mismatch negativity) obtenue par une
variation de durée dans un stimulus sonore : base de temps de 500 ms,
moyenne de 140 acquisitions, amplitude de l’ordre de 1 µV; stimulus stan-
dard de 1 000 Hz, durée 75 ms; stimulus déviant (20 %) de 1 000 Hz, durée
30 ms. En B, potentiels de type P300 obtenus par la présence d’une incon-
gruité fréquentielle dans un stimulus sonore. Le stimulus déviant est à
l’octave (2 000 Hz) du stimulus fréquent (1 000 Hz) et il est présenté
environ une fois sur cinq, de manière aléatoire : base de temps de 1 000 ms,
moyennage de 3 à 15 acquisitions, amplitude de l’ordre de 10 µV.

Incidences physiologiques
Si les potentiels évoqués nous permettent d’explorer plus finement les patients
présentant des pathologies neurologiques, ils nous renseignent également sur
la structure temporelle et l’amplitude des phénomènes neurophysiologiques
impliqués dans la vie quotidienne. Ainsi :
– une transmission synaptique dure 1 ms : les PEATC, en quelque 6 ms, nous
donnent une idée de la rapidité avec laquelle, par exemple, des réflexes de
Rétromoyennage et cartographie de PE 175

rotation de la tête et des yeux peuvent être déclenchés au niveau du tronc


cérébral;
– la latence entre la stimulation du nerf médian au poignet et la réponse corti-
cale S1 controlatérale est de 20 ms environ; en général, à la vitesse de plus de
55 m/s, l’influx atteint le plexus brachial (point d’Erb) en 10 ms en moyenne
et le relais médullaire en 11 à 14 ms; le temps de conduction central de la
volée afférente somesthésique est inférieur à 10 ms (maximum 8 ms); pour les
membres inférieurs, la première composante du potentiel culmine vers 40 ms
(P39); les réponses EMG obtenues par stimulation des aires motrices dans les
potentiels évoqués moteurs sont respectivement de l’ordre de 20 et 30 ms pour
les membres supérieurs et inférieurs;
– les influx somesthésiques culminent plus rapidement sur l’aire S1 (20 ms)
que les influx auditifs sur l’aire auditive primaire (entre 22 et 36 ms);
– l’analyse corticale des influx visuels est plus tardive (potentiel culminant
vers 100 ms) et dure plus longtemps que l’analyse des informations
somesthésiques : environ 80 ms; la latence du potentiel augmente quand les
fréquences spatiales de l’objet à analyser sont élevées (augmentation de la
latence de l’ordre de 20 ms pour les influx venant de la fovéola, par rapport à
ceux venant de la fovéa);
– l’accès à la conscience chez le sujet normal semblerait s’effectuer entre 150
et 250 ms après le stimulus; la mismatch negativity est un potentiel cortical
indépendant de la conscience; l’onde N200 (composante N2b) est dépendante
de l’attention; le P300 implique une attention consciente; son amplitude (en
fait son aire) est significative de l’importance de l’activité neuronale sous-
jacente;
– on remarquera que plus les potentiels sont tardifs, plus leur amplitude est
grande et leur distribution sur le scalp étendue. Ceci est à mettre sur le compte
de l’implication d’un nombre croissant de neurones dans les processus tardifs.
Les potentiels cognitifs comme le P300 ou le N400 sont des ondes de grande
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

amplitude, très diffuses et qui font intervenir les réseaux corticaux massive-
ment distribués, ce que ne font pas les potentiels dans les aires somesthésiques
primaires (PES).

RÉTROMOYENNAGE ET CARTOGRAPHIE DE PE
L’origine commune de l’enregistrement de l’activité EEG et des potentiels
évoqués est soulignée dans les possibilités de la méthode de rétromoyennage.
Des potentiels évoqués sont obtenus au cours d’un enregistrement EEG
conventionnel avec, au moins, le système 10/20. Comme dans l’enregistre-
ment standard des potentiels évoqués, le système de synchronisation génère
l’émission d’une impulsion (un marqueur) qui est contemporain de la déli-
vrance du stimulus. Ce qui diffère d’avec les potentiels évoqués « classiques »
sont les éléments suivants :
– l’enregistrement du potentiel évoqué ne se fait pas pendant un temps donné
mais c’est toute l’activité EEG qui est enregistrée, activité au sein de laquelle
176 Potentiels évoqués

sont « noyés » les potentiels évoqués dont l’intensité est en général trop faible
pour se différencier de cette activité EEG;
– le potentiel évoqué est enregistré simultanément sur toutes les électrodes
actives pour l’enregistrement de l’EEG;
– le moyennage (et donc le remplissage de la matrice à n lignes correspondant
aux n stimulations) ne se fait pas pendant l’enregistrement mais à la fin de
l’acquisition de l’EEG; à ce moment-là, le programme informatique reconnaît les
marqueurs qui sont suivis du potentiel évoqué, après un délai convenu; il les
intègre dans la matrice de calcul (un potentiel pour chaque ligne) jusqu’au
remplissage de toutes les lignes de la matrice qui sont ensuite additionnées pour
obtenir le potentiel évoqué, identique à celui obtenu de manière conventionnelle;
– comme il est possible de récupérer le signal généré par la stimulation sur
chacune des dérivations utilisées pour l’EEG, on peut réaliser ainsi une carto-
graphie du potentiel évoqué, en fonction du temps. On doit noter que l’on peut
également obtenir une cartographie de potentiel évoqué sur un système conven-
tionnel si on utilise un grand nombre de dérivations. Cependant, ce qu’ajoute la
technique de rétromoyennage est la possibilité de trier rétrospectivement les
potentiels évoqués, par exemple en fonction du type d’activité EEG (par
exemple synchronisée/désynchronisée) dans laquelle ils apparaissent.
Bien que l’importance des potentiels évoqués en clinique soit particulièrement
grande, il n’est pas de notre propos de développer dans cet ouvrage les techni-
ques d’obtention et la sémiologie de ces examens paracliniques. Des ouvrages
ou articles en français, particulièrement utiles et complets, sont disponibles
notamment ceux de J.-M. Guérit (1998) et les articles de F. Mauguière et
C. Fischer dans l’Encyclopédie médico-chirurgicale.

CE QU’IL FAUT RETENIR

• L’électroencéphalographie n’est pas limitée au tracé EEG enregistré dans


le cadre de l’exploration de patients. La technique des potentiels évoqués
sensoriels, moteurs ou cognitifs, est une partie essentielle des examens
complémentaires de neurophysiologie clinique.
• Les plus utilisés en clinique sont les potentiels évoqués à partir de moda-
lités sensorielles. Les potentiels évoqués moteurs ou cognitifs relèvent plus
des hôpitaux universitaires.
• Les méthodes de rétromoyennage permettent de bien comprendre le
lien entre l’activité (stable) évoquée par une stimulation et l’activité
(éminemment variable) de l’électroencéphalogramme continu.
• Selon les potentiels, des variations de latence inférieures à 1 ms (durée du
délai synaptique) ou d’intensité de l’ordre du microvolt peuvent être signifi-
catives sur le plan pathologique. Les potentiels évoqués sensoriels et moteurs,
par leur finesse, représentent un examen paraclinique indispensable en
neurologie. Ils constituent « la balance de précision » du neurologue.
• Comme l’EEG, ils donnent une compréhension fonctionnelle et très
physiopathologique des pathologies cérébrales. Les mailles du « tamis »
des potentiels évoqués sont généralement plus fines que celles d’un
examen d’imagerie.
1 CONCLUSION

Au terme de ce voyage au sein de l’électrogenèse corticale, nous espérons


avoir fait comprendre que l’ancienneté d’une méthode ne l’invalide pas forcé-
ment. Tant que la perspective que propose l’EEG (à savoir la description des
phénomènes électriques comme « image » partielle des activités neuronales et
gliales) ne sera pas assurée par une méthode d’imagerie ou une autre qui
donnerait au moins les mêmes informations pour le même coût, ce vieil
examen apportera un nombre conséquent d’arguments dans le faisceau du
diagnostic clinique.
Plus généralement, il nous semble que si l’on réfléchit en profondeur à ce
qu’est un diagnostic, tout dogmatisme récusant telle ou telle méthode au
prétexte de son ancienneté (ce qui n’est pas synonyme d’obsolescence) est
porteur d’une faute intellectuelle. Et quelle que soit la méthode diagnostique,
il nous faut prendre en compte, à la fois ce qu’elle nous dit et ce qu’elle ne
nous dit pas. De ce point de vue, toutes les méthodes diagnostiques sont, en
droit, susceptibles d’un même type de critique ou d’interrogation sur la véra-
cité des données qu’elles produisent. Ou, autrement dit, le caractère esthétique
(de l’image) ne vaut pas vérité.
En médecine, nous sommes intrinsèquement localistes : le malade dit « j’ai
mal là ». Mais, comprendre l’EEG, c’est aussi mettre au sein de ce désir de
localiser la lésion (ce que fait avec excellence l’IRM) une interrogation sur ce
qui est en fait son extension fonctionnelle et ses répercussions diffuses. Car,
dans un organe comme le cerveau, il n’y a pas de zone isolée. Le système est,
nous l’avons vu, très richement connecté à lui-même, multimodal, construit
avec des circuits neuronaux massivement parallèles. Dès lors, on peut se poser
la question sur ce que veut dire localiser une lésion, sinon en décrire le centre
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

de gravité, l’origine souvent floue de la dysfonction qui, de toutes les


manières, ne se limite pas au seul signe déficitaire.
Il ne faut pas oublier non plus ce qui est en jeu. La complexité du cerveau, la
richesse de ses productions (au sens large) méritent de multiples méthodes
d’investigation et, dans les laboratoires de recherche, les méthodes d’électro-
physiologie analysent des paramètres et détectent des processus que seule la
puissance de l’informatique peut nous permettre de mettre en évidence. Sont
en germe, dans ces laboratoires, les futures méthodes de la neurophysiologie
clinique qui s’attacheront à explorer plus précisément les processus cognitifs.
Le lecteur aura également remarqué à quel point nous avons insisté dans cet
ouvrage sur la notion de souffrance cérébrale. Le point de vue du neurophy-
siologiste (au sens de physiologiste qui s’intéresse au fonctionnement
cérébral) est très différent de celui du neurologue qui explore des patients avec
des outils de l’électrophysiologie. Celui-ci aborde les tracés en fonction des
pathologies et se pose la question : « Quelles sont les anomalies EEG
produites par telle maladie? », et il les classe selon la nosographie
neurologique; celui-là se demande comment se met à fonctionner le cerveau
178 Conclusion

quand un processus pathologique survient, et très logiquement, il met au


premier plan la notion de souffrance cérébrale (l’encéphalopathie) et de ses
différents types. Dès lors, cette approche conduit le neurophysiologiste à
souligner que les processus dysmétaboliques (au sens large) sont très
fréquents, et que, dans les processus paroxystiques, les anomalies périodiques
(PLEDS) sont d’un intérêt théorique et pratique tout aussi grand que les
anomalies rentrant dans le cadre des épilepsies, même si un recouvrement
partiel entre les deux types d’anomalies existe. Enfin, on n’insistera jamais
assez sur l’importance de l’EEG dans la compréhension et l’exploration des
anomalies de la conscience et des états de vigilance.
Au bout du compte, on voit que l’EEG, dans sa forme clinique standard telle
que nous l’avons décrite, trace une frontière entre les pathologies neurologi-
ques et les pathologies psychiatriques. Ceci a une double conséquence :
– d’une part, cela pose le problème du niveau réel auquel les processus de
pensée et leurs pathologies doivent être analysés; rien n’indique, en fin de
compte, que les méthodes « macroscopiques » comme l’EEG et l’IRM se
situent au bon niveau de problématique y compris pour concevoir une éven-
tuelle participation organique aux troubles psychiatriques;
– d’autre part, si la neurophysiologie clinique peut avoir accès aux processus
incluant les problématiques de genèse de la pensée (et les processus psychia-
triques), elle doit développer des méthodes beaucoup plus sophistiquées dont
les potentiels cognitifs ainsi que l’étude des synchronisations/désynchronisa-
tions liées à l’événement sont une ébauche réaliste.
C’est un saut épistémique significatif qui se prépare en neurophysiologie
clinique. La préoccupation cognitive se superpose désormais à la préoccupa-
tion de la description du déficit dans le domaine de la neurologie (via la
neuropsychologie, la notion de plainte cognitive). Dès lors, la neurophysio-
logie tente de mettre en place des outils d’évaluation des grandes fonctions
cognitives et des processus cérébraux. Ce n’est pas le moindre défi auquel elle
est confrontée.
1 BIBLIOGRAPHIE

Ouvrages de référence
Les neurophysiologistes ont la chance de posséder un ouvrage remarquable
par la richesse de sa bibliographie et le niveau des informations apportées. Il
s’agit de :
NIEDERMEYER E. et LOPES DA SILVA F. (éd.), Electroencephalography : Basic
Principles, Clinical Applications and Related Fields, Lippincott William and
Wilkins, 5e éd., 2005.
Il peut être complété par :
NUNEZ P. L., Neocortical Dynamics and Human EEG Rythms, Oxford Univer-
sity Press, New York, 1995, qui concerne plus précisément la biophysique de
l’EEG.
Pour la neuroanatomie fonctionnelle, les livres édités par l’ANPP (Servier
International) sont particulièrement intéressants, et pour cet ouvrage nous
nous sommes inspirés de :
CESARO P., KERAVEL Y., OLLAT H., PESCHANSKI M. et SINDOU M., Neuroa-
natomie fonctionnelle, vol. 2 : Le Cerveau et la moelle épinière, 1999.
On trouve en français des ouvrages ou des articles assez récents allant de
l’atlas au manuel et souvent très pédagogiques :
CRESPEL A., GELISSE P. Atlas d’électroencéphalographie. John Libbey Euro-
text, Paris, t. I, 2005, t. II, 2006.
FISCHER C. La pratique de l’EEG dans le diagnostic de mort cérébrale en
France. Conférence de consensus. Neurophysiol Clin 1997; 27 : 373-382.
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

GASTAUT H., GASTAUT J.L. Les activités EEG spontanées. EMC, 1980,
Neurologie, 17031 A20.
GUÉRIT J.M. Les Potentiels évoqués. Masson, Paris, 3e éd., 1998.
GUÉRIT J.M. L’Évaluation neurophysiologique des comas, de la mort encépha-
lique et des états végétatifs. Solal, Paris, 2001.
HAUSSER-HAUW C. Manuel d’EEG de l’adulte. Veille et sommeil. Masson,
Paris, 2007.
LAMBLIN M.D., D’ALEST A.M., ANDRÉ M, CHALLAMEL M.J., CURZI-
DASCALOVA L., DE GIOVANI E., MOUSSALLI-SALEFRANQUE F., NAVELET Y.,
PLOUIN P., RADVANYI-BOUVET M.F., SAMSON-DOLLFUS D., VECCHIERINI-
BLINEAU EEG in premature and full-term infants : developmental features and
glossary. Neurophysiol Clin 1999; 29 : 123-219.
MAUGUIÈRE F., FISCHER C. Potentiels évoqués en neurologie : réponses
normales. EMC, 2007, Neurologie, 17-031-B-10.
MAUGUIÈRE F., FISCHER C., ANDRÉ-OBADIA N. Potentiels évoqués en
neurologie : réponses pathologiques et indication. EMC, 2007, Neurologie,
17-031-B-11.
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PLOUIN P., KAMINSKA A., MOUTARD M.L., SOUFFLET C. L’EEG en pédiatrie.


John Libbey Eurotext, Paris, 2005.
SAMSON-DOLLFUS D. Électroencéphalographie de l’enfant. Masson, Paris,
2001.
TIMSIT-BERTHIER M. Interêt de l’exploration neurophysiologique en psychia-
trie clinique. Neurophysiol Clin 2003; 33 : 67-77.
VESPIGNANI H. L’EEG, de la technique à la clinique. Novartis Pharma SA.
Pour des recherches plus précises, avec des synthèses de très haut niveau, des
revues comme Lancet Neurology, Nature Neurosciences ou Trends in Neuros-
ciences proposent d’excellentes mises au point sur des sujets intéressant la
neurophysiologie clinique.

Pour aller plus loin


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p. 91-107.
1 ICONOGRAPHIE

40 TRACÉS D’EEG
Cette iconographie n’a pas pour but de présenter toutes les situations des
tracés EEG. D’autres ouvrages le font de manière excellente.
Cette iconographie est un contrepoint du texte. Elle veut montrer en 40 plan-
ches l’essentiel de ce qu’il faut comprendre en EEG.
Sur chaque planche, le lecteur trouvera les informations suivantes :
– le montage utilisé qui varie selon les tracés et qui lui permettra de localiser
les événements qui surviennent au cours de l’enregistrement;
– les événements majeurs du tracé qu’il faut remarquer et qui constituent la
raison d’être de la planche;
– les artefacts, en italiques;
– une cartouche en bas du tracé qui correspond à un élément essentiel à ne pas
oublier, en relation directe ou indirecte avec le tracé;
– des indications, dans la légende, qui renvoient à d’autres tracés pour compa-
raison et aux différents paragraphes développant l’aspect théorique.
Les tracés 1 à 15 sont des tracés normaux.
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.
184 Iconographie

Hypoactivité

Tracé discontinu :
périodes d’hypoactivité alternant
avec les bouffées delta ou thêta

Thêta

Grandes activités
antérieures (delta) pointues Delta lisse, diffus
asynchrone Pas de réactivité
Pneumogramme (physiologiques)

Prématurité extrême (24-27 SA). Discontinuité et asynchronie. Activité de base : delta postérieur (lent)
alternant avec du thêta. Pas de différenciation veille / sommeil.

Tracé n° 1. Prématurité extrême (27 SA), montage longitudinal. Comparer avec


les tracés n° 2, 3, 4 (maturation) et 21 (discontinuité, hypoactivité). Partie
théorique : voir p. 74.

Delta

Petites Delta brushes


Asynchronie Thêta
discontinuités

Delta brushes

Grande Prématurité (28-31 SA). Discontinuité, asynchronie. Activité de base : delta diffus avec du thêta en
bouffées plus abondant. « Delta brushes ». Différenciation veille / sommeil. Réactivité apparaît à SA 31.

Tracé n° 2. Grande prématurité (31 SA), tracé de veille. Montage longitudinal.


Comparer avec les tracés n° 1, 3 et 4 (ontogenèse des grapho-éléments).
Partie théorique : voir p. 74-75.
40 tracés d’EEG 185

Encoche frontale

Thêta Delta
Encoches frontales Synchronie
(train de 3 ) Tracé continu

Delta brushes Delta diffus


résiduelles (asynchronie)

Prématurité (32-36 SA). Continuité, début de synchronie. Activité de base : thêta et delta (moins lent).
Différenciation entre veille calme et agitée et entre sommeil calme et agité. Présence d’encoches frontales.

Tracé n° 3. Prématurité (36 SA), tracé de veille. Montage longitudinal. Comparer


avec les tracés n° 2 et 4 (ontogenèse des grapho-éléments). Partie
théorique : voir p. 75.

Dysrythmie lente antérieure (delta antérieur rythmique)


Encoches résiduelles
et irrégulier se superposant à l’activité de fond

L’activité de fond est une activité moyenne Delta brushes résiduelles


(fréquences mélangées)

Terme : Continuité et synchronie. Activité de base : thêta. Activité moyenne de veille (activités mêlées).
Raréfaction des delta brushes. Dysrythmie lente antérieure en sommeil agité et veille. Deux stades de SC et
deux stades de SA.

Tracé n° 4. Tracé de veille d’enfant à terme. Montage longitudinal. Comparer


avec les tracés n° 4, 5 (évolution des rythmes) et 34 (thêta chez l’enfant
avant 6 ans). Partie théorique : voir p. 75 et 77.
186 Iconographie

Hypersynchronie hypnagogique

Pointe vertex K complexe Pointe vertex

Fuseau

Fuseaux
Fuseaux

Chez l’enfant, après 5 mois, l’endormissement se caractérise par l’hypersynchronie hypnagogique (à ne pas
confondre avec une hypsarythmie). Puis les fuseaux et pointes vertex apparaissent.

Tracé n° 5. Endormissement chez un enfant de 2 ans. Montage longitudinal.


Comparer avec les tracés n° 14, 24 (sommeil) et 40 (hypsarythmie). Partie
théorique : voir p. 26-30, 46, 47, 77, 78.

MOC

MOC Activité alpha OLP

MOC

Elles se superposent à l’alpha, on peut les dessiner au crayon

Les OLP sous-tendent l’activité alpha mais ne la remplacent pas (elles ne sont pas individualisées comme les
ondes lentes delta pathologiques). Elles réagissent parfaitement à l’ouverture des yeux.

Tracé n° 6. Ondes lentes postérieures chez l’enfant (6 ans). Montage longitu-


dinal. Comparer avec les tracés n° 31 (ondes lentes pathologiques). Partie
théorique : voir p. 78, 79, 83.
40 tracés d’EEG 187

Ondes lentes, angulaires diffuses de grande amplitude. Ce n’est pas une crise !

L’hypersynchronie physiologique de l’HPN chez l’enfant (les ondes lentes sont non cohérentes et de grande
amplitude) ne doit pas être confondue avec le ralentissement pathologique de l’activité lors de l’HPN chez
l’adulte.

Tracé n° 7. Hypersynchronie neuronique physiologique lors de l’HPN chez un


enfant de 6 ans. Montage standard zéro. Comparer avec les tracés n° 5
(hypersynchronie hypnagogique) et 35 (crise). Partie théorique : voir p. 78,
79, 86, 87.

Dans les régions antérieures, l’alpha est très MOC


peu ample. L’activité thêta est dominante.

Mouvements oculaires
Rythme alpha (MOC) : artéfacts positifs plutôt antérieurs
postérieur

Blocage du rythme alpha par


l’ouverture des yeux (YO)

L’analyse de la topographie des activités alpha est un élément essentiel. Si les activités alpha diffusent dans
les régions antérieures, cela suggère un terrain vasculaire ou une atteinte de la substance blanche.

Tracé n° 8. Tracé normal de l’adulte. Montage longitudinal. Comparer avec les


tracés n° 9 (arceau), 10-12 (SLI), 13 et 14 (endormissement). Partie
théorique : voir p. 24, 25, 48, 56.
188 Iconographie

MOC
EMG (froncement de sourcil)

MOC

Arceau, souvent unilatéral (ici à gauche)


reste à l’OY

EMG
MOC

L’arceau (ou rythme mu) est bloqué par une activité motrice, mais pas par l’ouverture des yeux. Noter la
morphologie des artéfacts d’EMG : aspect en « aigrette », plutôt qu’en « paquets ».

Tracé n° 9. Tracé normal de l’adulte : le rythme en arceau. Montage standard


zéro. Comparer avec le tracé n° 8 (alpha). Partie théorique : voir p. 81-83.

MOC + EMG

La fréquence de l’EEG suit celle des éclairs de la SLI

L’entraînement aux éclairs lents est souvent évocateur d'un terrain vasculaire (AVC). On le voit aussi dans le
Creutzfeld -Jakob (et parfois dans certaines démences). Dans les AVC, l’entraînement aux éclairs lents est
fréquemment asymétrique (présent du côté lésé).

Tracé n° 10. Entraînement à la SLI pour les fréquences lentes chez un adulte.
Montage longitudinal. Comparer avec les tracés n° 11, 12, 33 (photopa-
roxysme). Partie théorique : voir p. 56, 57, 85, 86.
40 tracés d’EEG 189

EDG EDG
Electrodermogramme (EDG) : fluctuations lentes de la ligne de base

EMG

Les potentiels sont évoqués 100 ms après Ce n’est pas de l’ECG


l’éclair (correspondent à l’onde P100).

ECG

En EEG, ne pas hésiter à prendre sa règle et un crayon pour analyser la concordance temporelle des
évènements du tracé.

Tracé n° 11. Potentiels géants à la SLI. Montage longitudinal. Comparer avec les
tracés n° 10, 34 (pointes), et n° 23 (ECG sur le tracé). Partie théorique : voir
p. 4, 57, 86, 170, 172 - potentiels visuels, onde P100.

MOC

EMG
MOC
D

C’est une réponse musculaire (clonique), non


paroxystique qui s’arrête à l’arrêt des éclairs

G EMG

Dans le phénomène photomyoclonique, les réponses musculaires sont directement liées aux éclairs ; il existe
parfois des myoclonies palpébrales. La réponse photo-paroxystique, en général plus complexe et diffuse,
continue après la SLI.

Tracé n° 12. Réponse photomyoclonique chez un adulte. Montage standard


zéro. Comparer avec les tracés n° 10 et 33 (réponse photoparoxystique).
Partie théorique : voir p. 86.
190 Iconographie

10 V/mm 3 V/mm

EMG alpha
Apparition d’activités thêta

Fragmentation de l’alpha Stade 1 du sommeil

La fragmentation de l’alpha signale une somnolence (stade 1 du sommeil). Il n’y a en général pas de fuseaux.
Le sujet est facilement éveillable au moindre bruit.

Tracé n° 13. Tracé d’endormissement chez l’adulte (avec deux amplitudes).


Comparer avec les tracés n° 5, 14 (vigilance normale) et 24 (troubles de vigi-
lance). Partie théorique : voir p. 28.

Artéfact de mouvement électrode ou de câble abîmé


(artéfact «de pince »)

Thêta d’endormissement Réveil : réapparition de


Fragmentation de l’alpha qui remplace l’alpha l’alpha à 12 Hz

La somnolence est caractérisée par la présence de bouffées thêta. Les bouffées d’activités delta de quelques
secondes, diffuses, généralisées, bloquées par le bruit et les stimulations, correspondent à un sommeil lent
léger.

Tracé n° 14. Fluctuations de la vigilance chez un adulte avec apparition de


phase d’endormissement. Montage standard zéro. Comparer avec les tracés
n° 5, 13 (vigilance normale) et 24 (troubles de vigilance). Partie théorique :
voir p. 28.
40 tracés d’EEG 191

EMG qui se superpose aux rythmes rapides

Réactivité non testable


Rythmes médicamenteux +++ = imprégnation benzodiazépinique

Pas d’activité alpha détectable

Ne pas confondre imprégnation et surcharge benzodiazépinique. Dans cette dernière, les rythmes rapides
sont moins généralisés (plutôt antérieurs) et moins amples (aspect de « paquets »).

Tracé n° 15. Rythmes rapides médicamenteux dus aux benzodiazépines dans un


contexte d’imprégnation chez l’adulte. Montage transverse. Comparer avec
les tracés n° 5 (fuseaux) et 30 (surcharge en BZD). Partie théorique : voir
p. 123, 146.

Ondes triphasiques diffuses


3 phases

Elles disparaissent lors des stimulations (OY)

Dans ces encéphalopathies, les ondes triphasiques prennent parfois un aspect biphasique ou de pointes lentes.
Elles diminuent ou s’arrêtent lors des stimulations. L’ouverture de yeux ne donne pas d’alpha (différent des
ondes lentes du sommeil comme dans le tracé n° 14).

Tracé n° 16. Tracé d’encéphalopathie hépatique chez un adulte. Montage stan-


dard zéro. Comparer avec les tracés n° 29 Creutzfeld-Jakob) et n° 31 (ondes
lentes biphasiques). Partie théorique : voir p. 90-92, 98-103, 150.
192 Iconographie

alpha

Théta + PLEDS

PLEDS à gauche (intermittentes)


Épisode d’hypoactivité PLEDS

Asymétrie (de fréquence et d’amplitude)

Dans ce type d’AVC avec PLEDS, les PLEDS sont peu amples, entrecoupées d’épisodes d’'hypoactivité
différentes des bouffées suppressives (qui correspondent plutôt à une sidération). Noter l’asymétrie des
fréquences inter-hémisphériques.

Tracé n° 17. Accident vasculaire ischémique Gauche avec PLEDS chez un homme
de 69 ans. Montage standard zéro. Comparer avec les tracés n° 18, 19
(AVC), 20, 21 et 26 (PLEDS). Partie théorique : voir p. 95, 104, 119.

delta

La somnolence n’induit pas de modification


Eléments lents très angulaires à droite de l’activité du coté lésé

alpha Fragmentation de l’alpha

Activité de fond alpha à gauche

AVC avec souffrance à composante paroxystique : pointes lentes sans périodicité. Les variations de la
vigilance sont moins marquées sur l’hémisphère atteint.

Tracé n° 18. AVC ischémique droit, chez un homme de 65 ans. Montage stan-
dard zéro. Comparer avec les tracés n° 17, 19 (AVC), 13 (somnolence) et 38
(pointes). Partie théorique : voir p. 104, 119.
40 tracés d’EEG 193

Rythmes médicamenteux antérieurs + EMG


MOC

Activité alpha à droite L’activité alpha diffuse vers les régions


antérieures => terrain vasculaire.
Artéfact

A gauche, activités lentes delta, légèrement


angulaires, ni rythmiques ni périodiques.

On note l’asymétrie. Il s’agit plutôt d’un AVC à la phase sub-aiguë, moins grave. Les anomalies occupent
les dérivations correspondant aux régions sylviennes (Fp1/C3, F3/C3, Fp1/F7, F7/T3).

Tracé n° 19. AVC Gauche sans PLEDS, chez un homme de 75 ans. Comparer avec
les tracés n° 17, 18 (AVC), 16 et 31 (ondes lentes). Partie théorique : voir
p. 91, 103-105.

Hypoactivité

PLEDS Bilatérales (Bi PLEDS). Noter le caractère périodique


(et de période irrégulière).
Réactivité au bruit
(mais ce n’est pas une
activité périodique
fonctionnelle).

Les pointes des PLEDS sont rythmiques, à décours lent, pseudo-périodiques, irrégulières. Les périodes
d’hypoactivité sont d’autant plus longues que la lésion est ancienne. Ce ne sont pas des décharges
suppressives.

Tracé n° 20. Bi PLEDS, après anoxie due à une fausse route (anoxie cérébrale
sévère) chez un homme de 65 ans. Montage standard zéro. Comparer avec
les tracés n° 17 (PLEDS) et 21 (hypoactivité). Partie théorique : voir p. 104,
119.
194 Iconographie

Patient non lysé

L’aspect des pointes varie.


Aspect périodique, très régulier généralisé (Bi PLEDS).

Pas de rythme de fond, pas de sommeil.


Bouffée suppressive.

Tracé typique d’anoxie cérébrale. Les ondes triphasiques n’ont pas l’aspect régulier des encéphalopathies
hépatiques. Si les signes de sommeil (fuseaux) sont absents en absence de lyse, le pronostic est mauvais.

Tracé n° 21. PLEDS avec des bouffées suppressives après un traumatisme crânien
chez un adolescent. Coma profond. Comparer avec le tracé n° 20 (BiPLEDS).
Partie théorique : voir p. 95, 97, 119, 127, 155.

Alpha diffus aréactif sur un coma profond aréactif

A ne pas confondre avec un rythma alpha (toujours chez un patient éveillé avec une réactivité). L’alpha dans
un coma ne veut pas dire que le patient se réveille. Les sorties de comas commencent par des activités delta
puis thêta qui précèdent l’apparition de rythmes alpha.

Tracé n° 22. Tracé d’alpha coma (tracé gracieusement fourni par le docteur
C. Fischer). Montage standard zéro. Comparer avec le tracé n° 8 (alpha
normal). Partie théorique : voir p. 127.
40 tracés d’EEG 195

10 V/mm 2 V/mm 0,5 V/mm

Artéfacts de toucher (pas


Artéfacts de passage de réflexe somatique)

ECG

Secteur (50Hz)

ECG

Pas d’activité cérébrale décelable

Tracé plat : se méfier des artéfacts; ne pas les prendre pour de l’activité cérébrale même minime. Vérifier
qu’il n’y a pas de lyse. Ne pas confondre la réactivité somatique (mouvements) avec la réactivité
EEG (apparition de rythmes cérébraux).

Tracé n° 23. Tracé plat. Montage grandes distances. Partie théorique : voir p. 97,
127, 129, 154.

Endormissement : activités moins


Tracé globalement lent (thêta) amples, moins régulières

Pas d’alpha, pas d’organisation Sommeil


topographique. (noter l’absence de fuseaux)

Dans les processus neurodégénératifs, les tracés montrent un ralentissement global, sans organisation
topographique, avec parfois des activités lentes angulaires diffuses, asymétriques.

Tracé n° 24. Tracé chez un patient présentant un processus neurodégénératif


(homme de 70 ans). Montage longitudinal. Comparer avec les tracés n° 8
(tracé normal) et 13 (endormissement normal). Partie théorique : voir
p. 106, 162.
196 Iconographie

EMG

EMG
Ondes lentes thêta, voire delta, angulaires. Tracé désorganisé.

Réactivité médiocre (courte, peu visible).

Activité lente angulaire.

Ralentissement du rythme de base, perte de la structure topographique des activités, absence de réactivité,
ondes lentes angulaires : tracé de souffrance diffuse.

Tracé n° 25. Encéphalopathie VIH chez une femme de 45 ans. Montage longitu-
dinal. Comparer avec les tracés n° 16 (encéphalopathie hépatique) et 17
(AVC). Partie théorique : voir p. 107, 149.

Décharges périodiques épileptiformes La période des décharges est irrégulière, ce qui


latéralisées (PLEDS) à période courte < 4 sec. les différencie de celles de l’état de mal temporal.

Absence de clonies.

On évoque l’encéphalite herpétique à partir du contexte de survenue de ces grapho-éléments : activités


périodiques (à période courte et variable) + latéralisation des activités périodiques + troubles
comportementaux dans un contexte fébrile + PL.

Tracé n° 26. Encéphalite herpétique chez un adulte. Montage standard zéro.


Comparer avec les tracés n° 25 (VIH), 21 (PLEDS) et 27 (herpès). Partie
théorique : voir p. 95, 107, 119, 147-149.
40 tracés d’EEG 197

La période est variable.

Décharges périodiques épileptiformes EMG


latéralisées (PLEDS) à période courte < 4 sec). Localisation frontale des PLEDS inhabituelle

Le tracé est irrégulier,


désorganisé.

EMG

L’apparition de complexes irréguliers fronto-temporaux avec un rythme de base encore présent entre les
complexes et le contexte fébrile n’évoquent pas un processus expansif malgré la localisation antérieure et
latéralisée.

Tracé n° 27. Encéphalite herpétique atypique à prédominance antérieure chez


une enfant de 11 ans, non traitée, évoluant depuis une semaine. Montage
standard zéro. Comparer avec les tracés n° 26 (herpès), 21 (PLEDS), 31 et 32
(gliomes). Partie théorique : voir p. 107, 119, 147-149.

Complexes stéréotypés généralisés, de grande amplitude, de morphologie


variable d’un jour à l’autre, de périodicité immuable 0.3 à 0.2 Hz et non
influencés par les stimulations.

Complexes très stéréotypés signant un atteinte grave. L’activité EEG est fondamentalement variable et
instable. Plus elle devient régulière et stéréotypée, plus l’atteinte est grave.

Tracé n° 28. LESS chez une jeune fille de 18 ans. Elle est décédée au bout de 2
années d’évolution (tracé gracieusement fourni par le docteur C. Fischer).
Comparer avec les tracés n° 26, 27 (herpès), 21 (PLEDS) et 39 (état de mal).
Partie théorique : voir p. 107, 142.
198 Iconographie

Forme évoluée

Rythme de fond désorganisé : encéphalopathie


complexe

Complexes généralisés périodiques (PLEDS)


à période courte < 4 sec Penser à la SLI à 1 Hz
Disparition de l’activité basale

Très différent de l’encéphalopathie herpétique. Dans la MCJ, l’entraînement des complexes périodiques à la
SLI à 0,5 - 1 Hz est évocateur. Les complexes ont souvent une forme triphasique comme dans les
encéphalopathies métaboliques.

Tracé n 29. Maladie de Creutzfeld-Jakob. Montage standard zéro (tracé gracieu-


sement fourni par le docteur C. Fischer). Comparer avec les tracés n° 16
(encéphalopathie hépatique), 26, 27 (herpès) et 31 (gliome). Partie
théorique : voir p. 107, 108, 119, 150.

Activités rapides médicamenteuses

groupées en « paquets »

Activités rapides médicamenteuses antérieures

Souffrance frontale gauche (ondes delta),


d’aspect arrondi, peu angulaire.

Les activités rapides de la surcharge aux benzodiazépines donnent l’impression de petits paquets très peu
amples. Les activités rapides de l’EMG sont plus amples, plus raides, avec un décours plus rapide
(« aigrettes »).

Tracé n° 30. Volumineux méningiome frontal G + souffrance frontale gauche +


rythmes rapides médicamenteux, chez une femme de 50 ans. Montage
longitudinal. Comparer avec les tracés n° 29 (Creutzfeld-Jakob) et 31
(gliome). Partie théorique : voir p. 98, 105, 146.
40 tracés d’EEG 199

MOC

Le blocage partiel des activités delta montre la présence d’une composante fonctionnelle (œdème).
MOC
G

Souffrance frontale gauche passant à droite

G EMG sur MOC

Les activités dites fonctionnelles (ondes lentes, pointes…) sont bloquées par l’ouverture des yeux. Si elles ne
sont pas bloquées, ces activités sont lésionnelles. Si elles sont diminuées, il existe un mélange de composantes
lésionnelles et fonctionnelles.

Tracé n° 31. Glioblastome frontal gauche chez un homme de 50 ans Comparer


avec le tracé n° 30 méningiome. Partie théorique : voir p. 91, 105, 152.

Ondes lentes très angulaires, voire pointes,


Opposition de phase dans les zones frontales droites

EMG Opposition de phase, pointe en T4

Certaines activités diffusent en partie à gauche, atténuées EMG

Quand les pointes sont en opposition de phase entre deux dérivations, ceci traduit la localisation de la lésion
sous l’électrode commune.

Tracé n 32. Gliome frontal droit chez un adulte. Montage longitudinal.


Comparer avec les tracés n° 31 (gliome sans pointes) et 36 (épilepsie focale).
Partie théorique : voir p. 91, 105, 116, 152.
200 Iconographie

MOC

EMG

Pointes-ondes déclenchées par la SLI.

Dans le photo-paroxysme, les activités sont des pointes-ondes ou des polypointes-ondes, sans limitation de
durée. Le plus souvent le paroxysme dure après l’arrêt de la SLI.

Tracé n° 33. Photoparoxysme de l’adulte. Montage longitudinal. Comparer avec


le tracé n° 12 (réponse photomyoclonique). Partie théorique : voir p. 86,
134.

EMG

Pointes très fines, à ne pas confondre avec des pointes vertex (fuseaux + ondes lentes)
EMG sur toute la dérivation. Pointes rolandiques

Activité de fond de type thêta physiologique

Ne pas oublier que l’activité alpha apparaît vers 4 ans et est organisée vers 6 ans. À 3 ans un tracé dont le
rythme de fond appartient à la bande thêta n’est pas pathologique.

Tracé n° 34. Épilepsie à paroxysmes rolandiques (EPR) typique chez un enfant de


5 ans. Montage standard zéro. Comparer avec les tracés n° 5 (K complexes),
6 (EEG à 6 ans) et 36 (pointes focales). Partie théorique : voir p. 141,
tableau 5.I.
40 tracés d’EEG 201

Pointes-ondes résiduelles

Phase critique Phase post-critique Activité alpha physiologique


(souffrance)

Décharge de 3 secondes à 3 Hz

Dans l’épilepsie Petit Mal, l’aspect typique est une décharge généralisée de pointes-ondes de quelques
secondes, régulière, à 3 Hz, qui, selon la durée, entraîne une rupture de contact ou l’arrêt de l’acte en cours
avec reprise de l’activité et du contact dès la fin de la décharge.

Tracé n° 35. Épilepsie de type absence Petit Mal typique chez un garçon de
16 ans. Comparer avec le tracé n° 37 (décharges de polypointes). Partie
théorique : voir p. 116, 118, 120.

Artéfacts de mâchonnement (temporal) Artéfacts de mouvement des mâchoires


(probable)

EMG

Pointes plus marquées à gauche qu’à droite => foyer gauche

Souffrance à gauche Foyer temporal médian (opposition de phase)


Ondes lentes : souffrance
Artéfacts de mouvements (sur l’ECG)

Les dérivations dans lesquelles les pointes sont le plus amples et en opposition de phase correspondent à la
localisation du foyer, ce qui n’exclut pas une diffusion controlatérale.

Tracé n° 36. Pointes temporales dans une épilepsie temporale chez une fillette
de 7 ans. Montage longitudinal. Comparer avec le tracé n° 37 (pointes
généralisées) : Partie théorique : voir p. 116, 120.
202 Iconographie

Artéfact

Décharge courte Blocage de l’alpha


alpha alpha
EMG

Artéfact

EMG
Dérive de ligne de base

C’est une décharge et non des artéfacts


de mouvement : ECG non artéfacté
Les polypointes-ondes sont amples, irrégulières. Les décharges de polypointes-ondes sont considérées comme
plus graves que les décharges de pointes-ondes.

Tracé n° 37. Décharges de polypointes-ondes généralisées. Comparer avec les


tracés n° 32 (pointes focales) et 35 (Petit Mal). Partie théorique : voir p. 116.

D
Foyer à droite Souffrance dans le foyer
G

Pointes ondes Polypointes-ondes

Les pointes diffusent du coté controlatéral. Souffrance dans le foyer

Toute activité paroxystique soutenue entraîne une souffrance plus ou moins diffuse caractérisée par des
activités lentes thêta, surtout delta, plus ou moins angulaires. A ne pas confondre avec la décharge
suppressive qui est une sidération.

Tracé n° 38. Épilepsie multifocale, pointes, polypointes Montage transverse.


Comparer avec les tracés n° 37 (décharge courte) et 21 (PLEDS). Partie
théorique : voir p. 116-120.
40 tracés d’EEG 203

EMG sur toute la dérivation.

Pointes généralisées continues Absence de réactivité au bruit


=> syndrome confusionnel.

Les pointes ne sont pas stéréotypées


mais remplissent le tracé

Un état de mal (dit « non convulsivant ») est à rechercher chez tout sujet âgé qui présente un syndrome
confusionnel important et d’apparition brutale. Le traitement antiépileptique fait disparaître le syndrome
confusionnel.

Tracé n° 39. État de mal infraclinique (uniquement révélé par une confusion)
chez un homme de 75 ans. Montage standard zéro. Comparer avec les
tracés : n° 37 (décharge courte) et 21 (PLEDS). Partie théorique : voir p. 120,
122, 151.

10 V/mm 50 V/mm
© ELSEVIER MASSON SAS. La photocopie non autorisée est un délit.

Complexe lent Brève dépression

Spasme accompagné d’une


dépression (réaction tonique)

Spasme
Aucune cohérence du tracé
(EMG)

Très grande amplitude des grapho-éléments très lents

L’hypsarythmie est formée de complexes lents de très grande amplitude, suivis d’un ou plusieurs spasmes
qui entraînent une dépression de l’électrogénèse. Régresse sous Vigabatrin (Sabril®) ± cortisone

Tracé n° 40. Hypsarythmie, avec deux amplifications chez une enfant de 6 mois.
Comparer avec les tracés n° 28 (PESS) et 5 (hypersynchronie hypnagogique).
Partie théorique : voir p. 120, 143.
1 INDEX

A Benzodiazépines (BZD), 123, 124, 146,


Abcès cérébral, 88, 90 147, 154, 191, 198
Accident vasculaire cérébral (AVC), 88, Bourneville (sclérose tubéreuse de), 143
91, 96, 97, 103, 106, 108
C
Activité de fond, 2-4, 23, 24, 26, 28, 30,
61, 64, 74, 77-79, 83-85, 88, 89, 91, 131, Canalopathie, 112, 113, 135
187 Cartographie EEG, 17-19
ADHD (syndrome d’hyperactivité avec Céphalée, 165
déficit attentionnel), 163 Céroïde lipofuscinose, 86
Âge Chaos, 3, 6, 15, 16, 23, 61, 63, 64, 115
– corrigé, 73, 74 Colonne corticale, 33, 35, 36, 64, 75
– effet de l’âge sur l’EEG, 77-79 Coma, 26, 96, 97, 102, 126-129, 135,
– gestationnel, 73, 74 147, 156
Alzheimer (maladie de), voir Confusion (syndrome confusionnel),
«Démence» 147-151
Analyse de l’EEG, 17-20 Convertisseur analogique digital (CAD),
– analyse spectrale, 3, 6, 7, 15, 17-19, 23, 6-8, 167
55, 107, 161 Convulsion, 141
– analyse visuelle de l’activité électrique Creutzfeldt-Jakob (maladie de), 86, 90,
cérébrale, 2, 3 93, 96, 107, 108, 127, 148-150, 160-162
– cohérences, 20, 40, 55 Cystinose, 86
– décomposition de Fourier, 17-20
– détection de pointes, 19 D
– localisation de sources, 20
– rangée spectrale comprimée, 19 Déafférentation corticale, 48-51, 64, 91,
– sommeil, 19 107, 108, 158
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

Anexate® (test à l’), 128 Démence, 161, 162, 166


Antiépileptiques, 124 – Alzheimer (maladie de), 20, 106, 125,
Antiphospholipides (syndrome des) 161-163
(SAPL), 108 – corps de Lewy (CDL), 106, 162
Apallique (syndrome), 129 – débutante (Mild Cognitive Impairment),
Apnée du sommeil (syndrome de), voir 106, 161
«Sommeil» – vasculaire, 162
Astrocytes, 100-102, 111, 112 Désynchronisation
Atteinte toxique fœtale, 140 – liée à l’événement, 53-55
Attracteur, 16, 61, 115 – principe général, 3-5, 7, 15, 16, 25, 43-
Autisme, 163 45, 63, 64, 85
Dimension de complexité, 16, voir
B «Chaos»
Behcet (maladie de), 108 Dyslexie, 163
206 Index

E Fuseaux de sommeil, voir «Sommeil»


Encéphalite G
– herpétique, 96, 107, 108, 125, 142, 148,
149 GABA, 32, 41, 42, 46, 50, 52, 57, 59-61,
– virale, 107, 142 98, 101, 102, 104, 107, 109, 110, 112-
Encéphalopathie, 98-100 114, 117, 119, 121-124
– anoxique, ischémique, 99, 103-106 Gap junctions, 68, voir «Éphapse»
– défaut de fourniture de substrats, 99, Germinative (zone), 66, 67
103-106 Gilles de la Tourette (maladie, tic), 163
– dégénérative, voir «Démence» et Glasgow (score de), 128
«Parkinson (maladie de)», 106, 107, 162 Glie (cellules gliales), 110-112, 116, voir
– erreur innée du métabolisme, 142 «Astrocytes»
– Gayet-Wernicke, 151 – activité électrique, 40, 49
– hépatique, 98-102, 108, 145, 147, 148, – couple neuroglial, 88, 97
150, 164 – métabolisme, 98-103
– herpétique, 108 Glutamate, 49, 57, 98, 101-104, 109-112,
– métabolique, 90, 150 114, 119, 121
– morbide, 99, 103, 155, 166 Grapho-élément paroxystique, voir
– toxique, 99 «Paroxysme»
– valproate, 102, 150
– VIH, 99, 107, 108, 125, 142, 149, 162, H
169 Hémorragie intraventriculaire (HIV) du
Enregistrement nouveau-né, 139, 140
– analogique, 5, 6, 8 Huntington (chorée de), 162
– numérique, 5, 6, 8, 14 Hyperexcitabilité, 109-112
Éphapse, 32, 68, 86, 110, 114, 116, 123
Hyperpnée, 4, 14, 30, 79, 82, 83, 85, 86,
Épilepsie, 108-118, voir «Paroxysme»
117, 118, 133, 134, 144, 146, 152-154,
– classification, 123-125
162, 164
– contrôle des crises, 120, 121
Hypersomnie, 30, 158
– diagnostic, 151-154
Hypersynchronie
– enfant, 139-142
– à l’hyperpnée, 86, 187
– état de mal épileptique (EDME), 121-
– anormale, 85, 109, 186
123, 138, 139
– état de mal focal, 109 – hypnagogique, 70, 71, 73, 78-80
– focale, 115, 116 Hypsarythmie, 120, 141, 143
– généralisée primaire, 116-119
I
– Grand Mal, 90, 114, 116-120, 154
– métabolisme, 120, 121 Indice de complexité, 61, voir «Non
– Petit Mal, 90, 116-120, 154 linéarité»
– stimulation du nerf vague, 121 Innervation aminergique du cortex, 42,
– surveillance, 151-154 56, 59, 64
État de vigilance, 25-30, 58-64, 82 Insomnie, 30, 158

F K
Formation réticulaire, 40-44, 58, 59, 64 K-complexe, 27, 78, 126
Forward problem (problème direct), 20, 21 Krebs (cycle de), 98-101
Index 207

L O
Lamination corticale, 30, 31, 35 Œdème cérébral, 91, 100, 102, 104, 105,
Landau-Kleffner (syndrome de), 141 122, 129
Lennox-Gastaut (syndrome de), 95, 119, Ohtahara (syndrome d’), 141
121, 141 Ondes
Leucoaraiose, 106, 146 – lambda, 83
Leucomalacie périventriculaire, 138 – lentes
Localisation de sources, 5, voir – – au cours du sommeil, 51
«Analyse» et – – corticales, 48
«Magnétoencéphalographie» – – pathologiques, 88-92, 102, 114, 119,
Locked-in (syndrome de), 128, 129 132, 133
Locus coeruleus, 58, 60, 62, 106, 121 – – postérieures (OLP), 78-80, 83, 132
Lupus érythémateux disséminé (LED), – pi, voir «Ondes lentes postérieures»
108
P
Lyse médicamenteuse, 96
P300, voir «Potentiels évoqués
M cognitifs»
Magnétoencéphalographie (MEG), 20-23, Panencéphalite sclérosante subaiguë
53 (PESS ou LESS), 96, 142, 149, 197
Malformation artérioveineuse, 88 Paralysie supra-nucléaire progressive
Maturation cérébrale, 65, 66, 69, 71, 73, (PSP), 162
75-77, 80, 137-139 Parasomnie, 159
Parkinson (maladie de), 106, 162
Migraine, 165
Paroxysme (ou anomalie paroxystique),
MMN (mismatch negativity), voir
21-23, 40, 82, 89, 92-95, 104, 108-119,
«Négativité de discordance»
133, 140-142, voir «Épilepsie»
Montage EEG, 11-13
Périodiques (activités), 95, 96, 119, 133
Mort cérébrale, 11, 25, 129, 130, 157
– dans l’anoxie, 104, 192, 193
Moyennage, 167, 168
– dans les comas, 127, 156
Mutisme akinétique, 129
– dans les encéphalites, 149, 196-198
Myélinisation, 67
– dans les traumatismes crâniens, 194
N Perte de connaissance, 143-147
© MASSON. La photocopie non autorisée est un délit.

Phénylcétonurie, 86
Narcan® (test au), 128 Photomyoclonique (réponse), 86, 134
Narcolepsie, 158 Photoparoxystique (réponse), 86, 134
Négativité de discordance, 172, 174 Pick (maladie de), 162
Neurones Pickwick (syndrome de), 30
– cellules pyramidales, 31-33, 35, 39, 40 Pointes vertex, 27, 29, 78, 82
– corticaux, 34 Polygraphie (sommeil), 19, 23, 29, 157,
– relais, 34 160
– relais thalamocorticaux (TCR), 45-47, Potentiels évoqués, 3, 4, 7, 9, 21, 23,
51, 56, 62 103, 104, 128, 130, 156, 167-170
– réticulaire (RE), 45-47, 50, 51 – auditifs, 170, 171
Neuropeptides, 122 – cognitifs, 4, 7, 9, 22, 156, 164, 171-174
Non linéarité, voir «Attracteur» et – liés à l’événement, 4
«Chaos» – moteurs (PM), 173
208 Index

– somesthésiques, 170, 173 Souffrance


– visuels, 170, 172 – cérébrale, 88-91
Problème inverse, 20, 21 – fœtale, 138, 139
Spasme
R – du sanglot, 146
Réflexe oculocardiaque (ROC), 87, 144 – en flexion, voir «Hypsasythmie»
Régime cétogène, 121 SQUID (Superconducting Quantum
Retard de croissance in utero (RCIU), 139 Interference Device), 22
Rett (syndrome de), 125 Stimulation lumineuse intermittente
Rythme (SLI), 4, 7, 9, 14, 30, 57, 82, 83, 85, 86,
– du volet, 83 105, 114, 117, 118, 134, 144, 146, 152,
– EEG, 25 153, 165
Rythmic Slow Activity (RSA), 49 Suppression bursts, 92, 97, 105, 133, 157
Synapse électrique, voir «Éphapse»
S Synaptogenèse, 66, 67
Sclérose en plaques (SEP), 169, 170 Synchronisation
Signal EEG, 14-17 – liée à l’événement, 53-55
– polarité, 9-11, 15 – principe général, 3-5, 15, 16, 25, 43-45,
– voir «Analyse» et «Chaos» 63, 64
SLI, 117, 154
T
Sommeil
– analyse, 19 Thalamus, 40, 41, 44, 59, 64, 67, 91
– fuseaux (génération des), 26-29, 46, 47, Toxiques (effets sur l’EEG), 145
60, 64, 69, 78, 80, 82, 84 Tracé plat, 195
– nouveau-né ou prématuré, 73-77 Tumeur cérébrale, 88, 91, 96, 116
– ontogenèse, 69-73
– pathologie, 157-159 W
– phénoménologie (stades), 26-30, 51 West (syndrome de), voir
– régulation, 56-62 «Hypsarythmie»
– syndrome des apnées du sommeil Wirchow-Robin (espaces
(SAS), 30, 158, 159 périvasculaires), 106

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