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Faculté de pharmacie de Monastir

Biotechnologie pharmaceutique et thérapie


génique

Immunothérapie

5ème année pharmacie


16 mars 2023

AHU Sarah ZEREI


Pr Myriam KHROUF
Immunothérapie
Objectif du cours
- Comprendre le principe de l’immunothérapie
- Connaitre les différentes stratégies thérapeutiques en immuno-oncologie
- Définir les enjeux des thérapies innovantes

Plan
- Prétest
- Aperçu historique
- Le système immunitaire et l’immunothérapie
- Les différentes stratégies thérapeutiques en immuno-oncologie
- Les défis des thérapies innovantes
- Post test
Aperçu historique
1863: Virchow fait le premier lien entre immunologie et cancer
1891: Coley injecte le premier patient avec des streptocoques
1909: Ehrlich suggère que les cellules immunitaires patrouillent activement le
corps pour réprimer la croissance des cellules cancéreuses
1959: Lloyd J.Old utilise le vaccin de la tuberculose (Bacillus Calmette-Guérin;
BCG) et démontre la répression de la croissance tumorale dans des souris
1976: Alvaro Morales: vaccin BCG pour traiter des patients avec cancer de la
vessie
1986: Interferon alpha (IFN-α), premier traitement d’immunothérapie approuvé
par le FDA
1987: Rosenberg premières évidences sur l’utilisation des TILs sur des patients
1990: Bacillus Calmette-Guérin (BCG) est approuvé pour le cancer de la vessie
1992: IL-2 approuvé pour le cancer du rein
2008: premier vaccin approuvé pour le cancer du rein: Oncophage® (Russie)
2010: Sipuleucel-T Vaccin approuvé pour le cancer de la prostate
2011: Ipilimumab approuvé pour le mélanome
2014-2015: Nivolumab; Pembrolizumab approuvés pour le mélanome et NSCLC
2018 : TASUKU HONJO & JAMES P. ALLISON ont eu le prix Nobel pour leurs
études sur les cellules cancéreuses et les points de contrôle immunitaires

L’immunothérapie
Repose sur l'idée que le système immunitaire d'un patient peut être stimulé ou
amélioré pour attaquer les cellules tumorales.
L’immunothérapie ne vise pas directement la tumeur. Elle agit principalement
sur le système immunitaire du patient pour le rendre apte à attaquer les cellules
cancéreuses. L’immunothérapie spécifique consiste à stimuler certaines cellules
immunitaires pour les rendre plus efficaces ou à rendre les cellules tumorales
plus reconnaissables par le système immunitaire.
Elle repose sur les anticorps monoclonaux, notamment les inhibiteurs de points
de contrôle, les anticorps bispécifiques, le transfert adoptif de cellules ou encore
la vaccination antitumorale.
Rappel :
Comment nous protège notre système immunitaire ?
1-Les cellules «étrangères» ou tumorales expriment des protéines spécifiques =
antigènes Cellule dendritique Présentatrice d’Antigène 2 (CPA)
2- Le système immunitaire détecte les cellules «étrangères» =
immunosurveillance
3- deux signaux sont nécessaires pour activer les cellules T
4-Les cellules T vont à la rencontre des cellules qui expriment ces antigènes …et
les attaquent
Evasion tumorale
Parfois les cellules tumorales arrivent à échapper au contrôle du système
immunitaire = évasion tumorale - En perdant l’expression ou présentation des
antigènes
En régulant négativement les populations de cellules T: en activant des points de
contrôle immunitaire
Les mécanismes de défense de l’organisme sont alors incapables de cibler ces
cellules tumorales qui peuvent ainsi proliférer.
 Le but de l’immunothérapie est que les cellules T soient le plus efficace
possible pour tuer le cancer

Différentes stratégies de traitements en immuno-oncologie


• Une qui s’appuie sur les molécules
Points de contrôle immunitaire
Anticorps bi-spécifiques
• Une qui s’appuie sur les cellules
Vaccins à base de cellules tumorales ou dendritiques
Thérapies cellulaires adoptives à base de lymphocytes T (CAR-T et tils)
• Une qui s’appuie sur les virus
Virus oncolytiques
LES INHIBITEURS DE POINTS DE CONTRÔLE

DÉVERROUILLER LE SYSTÈME IMMUNITAIRE


Des traitements d’immunothérapie spécifique ont été développés pour rétablir
une réponse immunitaire adaptée. Les plus couramment utilisés aujourd’hui
sont les inhibiteurs de points de contrôle mais d’autres approches sont en cours
de développement.
Les cellules tumorales sont capables de détourner les dispositifs de contrôle du
système immunitaire pour éviter d’être attaquées et détruites. Pour cela, la
tumeur déclenche des mécanismes très précis qui inactivent les cellules
immunitaires et plus particulièrement les lymphocytes T. L’organisme ne peut
pas alors fournir une réponse adaptée de l’organisme pour lutter contre les
cellules cancéreuses.
On dit que la tumeur « freine » le système immunitaire (par liaison ligand
tumoral / récepteur du LT)

Objectif
₋ inhiber ce freinage immunitaire via des anticorps monoclonaux qui vont
bloquer le ligand ou le récepteur
₋ Réactivation du LT et de son activité anti-tumorale
Des éléments clefs de ces mécanismes, appelés « points de contrôle » (CTLA-4,
PD-1, PD-L1 entre autres) peuvent être bloqués par des traitements, appelés «
inhibiteurs de points de contrôle immunitaire ».
Mécanismes d’action et indication (1)

Mécanisme Anti-PD1 Anti-PDL1 Anti-CTLA4


Médicament Nivolumab Atezolizumab ipilimumab
Pembrolizumab Avelumab
Durvalumab
Indication Cancer du Mélanome
poumon
Mélanome
Carcinome rénal
(récemment)

Cinétiques différentes
- Temps auquel apparaissent les effets indésirables
Apparition des effets indésirables liés à l’immunité(2)

Toxicités de grade 3 – 4*
- ipilimumab : 22 – 24 %
- nivolumab / prembrolizumab : 5 – 10 %
- ipilimumab + nivolumab : 55 %
- principalement cutanées et digestives : Dysimmunité

Réponses
- Survie globale et sans progression augmentées
- modérément pour ipilimumab seul
- fortement pour les autres (jusqu’à 50 % selon les indications)
LES ANTICORPS BISPECIFIQUES

RAPPROCHER LES CELLULES IMMUNITAIRES DES CELLULES TUMORALES

Les anticorps bispécifiques agissent en activant le système immunitaire pour


détruire les cellules cancéreuses. Ils sont appelés bispécifiques car ils peuvent
se lier à deux cellules différentes, les cellules cancéreuses et les cellules
immunitaires, par exemple les lymphocytes T.
Mécanisme d’action :

En se liant à la cellule tumorale et à la cellule immunitaire ➔ permet un


rapprochement, « un pont », qui favorise l’action antitumorale du système
immunitaire
Blinatumomab
Effets indésirables
Fréquents à très fréquents
• perturbations de l'NFS ( leucopénie, leucocytose, lumphopénie,
neutropénie, anémie, thrompopénie...)
• perturbations du bilan hépatique ( augmentation des enzymes hépatiques
et hyperbilirubinémie)
• éruption cutanée- syndrome grippal (fièvre, frisson,..)
• syndrome de libération de cytokine
• infections (bactériennes, fongiques, virales, sepsis..)
• troubles digestifs (constipation, diarrhée, nausées,..)
• troubles psychiatriques ( confusion mentale, insomnies,...)
• troubles cardiaques et respiratoires
Surveillance du traitement
• fonctions hépatique et rénale
• formule sanguine
• ionogramme plasmatique
• Neurologique
• test de dépistage de l'expression CD19 avant la mise en route du
traitement

Associations déconseillées
anticorps monoclonaux (hors anti-TNF alpha) + vaccins vivants atténués
==> risque de maladie vaccinale généralisée
Contre-indications absolues
• hypersensibilité à l'un des composants
• allaitement
LA VACCINATION THERAPEUTIQUE

DRESSER LE SYSTÈME IMMUNITAIRE CONTRE UNE CIBLE PRÉCISE


La vaccination thérapeutique ne vise pas à prévenir la survenue d’un cancer
mais plutôt à stimuler et diriger le système immunitaire d’un patient
spécifiquement contre les cellules cancéreuses.
Différents types de vaccins thérapeutiques sont actuellement en
développement ou en cours d’essais cliniques.
Ces vaccins peuvent être conçus à partir de cellules cancéreuses, de fragments
de cellules, d’antigènes ou encore de cellules immunitaires.
Mécanisme d’action :
Certaines vaccinations thérapeutiques, par exemple, consistent à introduire des
antigènes tumoraux dans le corps du patient. La reconnaissance de cet
antigène entraîne une réponse immunitaire qui va activer des lymphocytes T
ou la production d’anticorps pour lutter contre les cellules tumorales porteuses
de ces antigènes.
Pour cela, une analyse génétique de la tumeur est réalisée. Cette analyse
permet d’identifier les mutations responsables de la présence de certaines
protéines sur les cellules tumorales.
Concevoir des vaccins thérapeutiques efficaces est difficile et les recherches
continuent. Les vaccins doivent en effet être en mesure de stimuler une
réponse immunitaire contre la bonne cible et de manière suffisamment
efficace pour surmonter les moyens utilisés par les cellules cancéreuses pour
échapper au système immunitaire
Sipuleucel-T (Provenge®) approuvé en 2012 pour le cancer de prostate.
Effets indésirables
• Habituellement légers
• Symptômes de type grippal: fièvre, frissons, fatigue douleurs au dos et
aux articulations, nausées et maux de tête
LE TRANSFERT ADOPTIF DE CELLULES

SÉLECTIONNER OU CRÉER DES CELLULES IMMUNITAIRES PLUS PUISSANTES

Ces traitements visent à stimuler le système immunitaire du patient en


donnant aux cellules immunitaires l'information dont elles ont besoin pour
mieux reconnaître les cellules tumorales comme anormales et ainsi pouvoir les
attaquer. Pour cela, des cellules immunitaires sont sélectionnées et/ou
modifiées en laboratoire puis réinjectées dans l'organisme du patient.

Une première approche, le transfert adoptif de lymphocytes T infiltrants (TIL


pour tumour infiltrating lymphocytes),
Une approche plus récente consiste non plus seulement à sélectionner des
cellules immunitaires mais à les modifier génétiquement. Il s’agit du transfert
adoptif de lymphocytes T génétiquement modifiés, appelés aussi CAR-T.
LYMPHOCYTES T INFILTRANTS (TIL)

Principe :
Cela consiste à prélever des lymphocytes T d’un patient à partir d'échantillons
de sa tumeur, sélectionner les plus efficaces, les cultiver en laboratoire en
grand nombre, puis les lui réinjecter.

Cette réinfusion est précédée d’une chimiothérapie de conditionnement


lympho-déplétive qui a pour but de créer un environnement favorable à
l’accueil et à la pérennisation de ces cellules dans l’organisme.

Elle vise à neutraliser des lymphocytes endogènes, notamment les T


régulateurs qui constituent un frein à l’implantation de ce nouveau « pool » de
cellules effectrices. Les lymphocytes infusés sont ensuite stimulés par
l’administration d’interleukine-2 (IL-2) à haute dose, une cytokine pro-
inflammatoire, l’objectif final étant la reconnaissance des cellules tumorales et
leur destruction via une cytotoxicité à médiation cellulaire.

Types de TIL

Différentes méthodes ont été décrites pour la production et la sélection des TIL.

-Utilisation de la masse brute des cellules expandues (méthode dite « Bulk »),
indépendamment de leur réactivité contre la tumeur et de leur spécificité
antigénique. Une méthode dite sélective repose sur la mesure de production
d’IFN par les TIL qui sont isolés sur cette base et donc supposés les plus réactifs

-Sélection de populations lymphocytaires dites jeunes ou « Young TIL » définies


par des cellules ayant un temps de culture court, donc en phase de maturation
et différenciation plus précoce.

-Une dernière méthode plus sophistiquée, basée sur l’identification de néo-


antigènes par séquençage de nouvelle génération, est de sélectionner les
lymphocytes spécifiques au moyen de cellules présentatrices d’antigènes
exprimant ces néo-antigènes.

La finalité de toutes ces méthodes est :


- Obtenir un « pool » de lymphocytes cytotoxiques (CD8+) aux propriétés
antitumorales et réplicatives les plus efficientes possibles.
- Générer une population de cellules mémoires.
- LA présence de lymphocytes T auxiliaires (CD4+) n’est pas délétère
- La présence de cellule CD4+ régulatrices (Tregs) n’est par contre pas
souhaitable

Déroulement de la thérapie ACT-TIL

Le déroulement de la thérapie ACT-TIL se déploie en six phases successives


détaillées ci-dessous.

• Résection chirurgicale
• Fragmentation, culture et expansion des TIL
• Chimiothérapie lympho-déplétive
• Réinfusion des TIL
• Soutien par interleukine-2
• Phase post-traitement
(3)

Indication
- Mélanome
- Le cancer pulmonaire non à petites cellules,
Présence d’un fort caractère immunogénique expliqué par leur importante
charge mutationnelle et la subséquente production de néo-antigènes (antigènes
propres d’une tumeur qui surviennent suite à une mutation). La reconnaissance
de ces néo-antigènes par le système immunitaire a été clairement démontrée et
explique le rationnel de l’ACT-TIL.
CHIMERIC ANTIGEN RECEPTORT-CELL : CAR-T

Principe :
Dans ce type de traitement, des cellules immunitaires, les lymphocytes T, sont
prélevées dans le sang du patient puis génétiquement modifiées en laboratoire
pour exprimer des récepteurs spécifiques à leur surface.
On parle de récepteur antigénique chimérique, CAR en anglais. Ces récepteurs
permettront aux cellules modifiées, alors appelées CAR-T, de repérer des
antigènes présents sur les cellules tumorales.
Ces cellules, une fois modifiées, sont cultivées en laboratoire jusqu’à ce qu’elles
prolifèrent par millions puis sont réinjectées dans le corps du patient où elles
continuent de se multiplier. Grâce à leurs récepteurs, elles vont alors pouvoir
reconnaître et détruire spécifiquement les cellules cancéreuses.
Les cellules T sont génétiquement modifiées afin de produire des récepteurs de
membrane spécifiques des cellules tumorales
Indication :
Axicabtagene ciloleucel (Yescarta®) pour les adultes avec lymphomes diffus à
grandes cellules B (LDGCB) récidivants ou réfractaires.
Tisagenlecleucel (Kymriah®) approuvé en 2017 par le FDA leucémies de cellules
B aigues réfractaires
Produits de lymphocytes T autologues dirigés contre les antigènes CD19,
exprimés à la surface des lymphocytes B et surexprimés dans les lymphocytes B
cancéreux.

Effets indésirables :
Syndrome de libération des cytokines(SLC)
 une toxicité courante, potentiellement mortelle, qui correspond à la lyse
massive de cellules tumorales, relargage massif de cytokines conduisant à un
syndrome inflammatoire systémique.
 apparait dans les quelques jours suivant le traitement.
 forte fièvre et d'autres symptômes possibles, dont la tachycardie, les
myalgies et la fatigue.
 le dysfonctionnement des organes est une conséquence clinique possible.
 la prise en charge comprend des soins de soutien et l'administration
d’anticorps monoclonaux, anti-cytokines (IL-6) ou de corticoïdes.
Syndrome neurologique
 Liée au SLC.
 maux de tête, confusion, délire, troubles du langage, convulsions et,
rarement, œdème cérébral aigu.
 perturbation de la barrière hémato-encéphalique, associée à des taux élevés
de cytokines dans le sang et le liquide céphalorachidien.

1. Exérèse chirurgicale d’une lésion métastatique, de 1-2 cm de


diamètre. 2. Fragmentation de la tumeur à des pièces de 1-3 mm3. 3. Mise en culture
des lymphocytes extraits et expansion en IL-2. 4.
LE VIRUS ONCOLYTIQUE

Le talimogène laherparepvec ( T-VEC, Imlygic )


Les virus oncolytiques peuvent infecter et détruire les cellules cancéreuses sans
nuire aux cellules normales. Le virus de l’herpès simple (VHS) est génétiquement
modifié pour inciter les cellules du mélanome à produire le facteur de
stimulation des colonies de macrophages et granulocytes (GM-CSF).
Cela aide le corps à reconnaître les cellules du mélanome et à agir contre elles.
Les effets secondaires
- la fatigue
- syndrome grippal: frissons, fièvre, douleurs articulaires et
musculaires, maux de tête
- Douleurs /rougeur au point d'injection
- symptômes d’infection par herpès: les douleurs dans les
extrémités, les vertiges, la douleur dans la bouche et la gorge, la
perte de poids.
Les défis des thérapies innovantes
• Le microenvironnement de la tumeur
• L’hétérogénéité de la tumeur et des patients
• Cellules souches cancéreuses dormantes
• Résistance aux thérapies
• Microbiome: certaines bactéries favorisent une réponse thérapeutique
• Génétique: mutations
• Épigénétique: processus moléculaires qui régulent l’expression de gènes
sans changements dans la séquence d’ADN
• Facteurs individuels des patients (mode de vie, environnement, etc)

Autres axes de recherche


• Combinaisons
• Temps et ordre d’administration
• Identifier les patients qui sont susceptibles de bénéficier de ces thérapies
• Biomarqueurs (efficacité et toxicité)

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