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“Le Dormeur du val”, Rimbaud, Cahiers

de Douai

Introduction
Arthur Rimbaud est un poète français du XIXe siècle, connu pour sa carrière
poétique brève mais marquante. Il a vécu son enfance à Charleville, une enfance
marquée par l’abandon de son père et la sévérité de sa mère. Il grandit aussi dans le
contexte de la guerre franco-prussienne de 1870, année durant laquelle il écrit la
majeure partie de ses poèmes du recueil Cahiers de Douai. Ses expériences
douloureuses ont influencé son art : la poésie n’est pas uniquement un moyen pour
lui d’échapper à la cruauté de sa réalité, mais aussi un moyen de la dénoncer. Son
poème Le Dormeur du val en fait partie. C’est un sonnet en alexandrins écrit 3 mois
après la déclaration de la guerre de l’empereur Napoléon III au royaume de Prusse.

Alors nous nous demandons :

Problématique : Comment Rimbaud dans ce poème dénonce la cruauté de la


guerre à travers la description d’un paysage ?

Strophe 1
Le poème commence par décrire le cadre, qui est un lieu isolé empreint de paix et
entouré de nature.

● "Trou de verdure" : Cette périphrase est utilisée de manière détournée pour


décrire le val. On sent que le mot “trou” est dissonant, cela fait plus penser à
un trou d’obus qu’à un val.
● "Où chante une rivière" : Cependant, la personnification qui évoque le bruit
de la rivière, engage l'ouïe du lecteur, l'invitant à imaginer le bruit apaisant de
l'eau et à percevoir la tranquillité de l'endroit. La personnification permet
également de rendre le paysage plus vivant.
● "Où le soleil de la montagne fière luit" : La personnification est également
utilisée pour introduire d'autres éléments dans le paysage, tels que le soleil et
une montagne. La montagne est personnifiée par l'adjectif "fière".
● "Soleil" + "Luit" + "Rayons" : On observe un champ lexical de la lumière qui
donne une description visuelle. Le verbe "luire" souligne la luminosité de
l'endroit et une atmosphère douce et agréable.
Strophe 2
La strophe débute en introduisant la présence d'un personnage, un soldat.

● “Un soldat jeune, bouche ouverte, tête nue” : Rimbaud insiste sur des détails
qui mettent en avant la jeunesse du soldat. La mention de sa bouche ouverte
pourrait décrire une respiration, et le fait que sa tête soit nue indique
probablement la perte de son casque pendant la guerre.
● “La nuque baignant” : Le ton chaud et lumineux établi précédemment est
refroidi par la mention de la nuque du soldat baignant dans quelque chose de
frais. Cette description crée un contraste avec la chaleur évoquée
précédemment par les rayons du soleil.
● "Dort" + "Étendu" : Le champ lexical du sommeil décrit la position du soldat
et crée une atmosphère apaisante.
● “Lit vert” : La métaphore in abstentia compare l'herbe sur laquelle le soldat
repose à un lit.
● "Sous la nue" + "Pâle" : Cependant, des termes perturbateurs apparaissent,
et apportent une tonalité pathétique.
● “Où la lumière pleut” : La personnification indirecte de la lumière qui "pleut"
évoque une atmosphère mélancolique, on pourrait presque entendre “la
lumière pleure” préparant le terrain pour la dénonciation à venir dans le
poème.

⇒ CONTRASTE AVEC LA PREMIÈRE STROPHE

BILAN : Globalement, ces deux premières strophes décrivent un cadre idyllique


entouré par la nature. Au début, une sensation de détente se dégage du texte
lorsqu’on imagine le soldat endormi, loin de la guerre, dans un lieu paisible.
Cependant, notre lecture est progressivement perturbée, et un contraste apparaît
entre la description du paysage et celle du personnage qui s'y trouve.

Strophe 3
● "Les pieds dans les glaïeuls" : Rimbaud décrit spécifiquement ce type de
fleurs car elles symbolisent la mort
● “Souriant comme sourirait un enfant malade” : Cette comparaison surprend
par son étrangeté, elle représentant le soldat comme vulnérable et affaibli.
● "Nature, berce-le chaudement" : La personnification de la nature la
représente comme une figure maternelle. Nous avons l'idée d'une mère qui
s'occupe de son enfant malade.
● "Berce-le chaudement : il a froid". Cette antithèse illustre le contraste entre
la vie chaleureuse de la nature et la froideur du soldat, elle annonce
implicitement son absence de vie.

Strophe 4
● “Les parfums ne font pas frissonner sa narine” : La négation totale dans ce
vers confirme le décès du soldat, en indiquant qu'il n'a aucune interaction
avec le cadre environnant, malgré sa beauté.
● "Il dort dans le soleil" : On retrouve de nouveau le champ lexical de la
lumière qui renvoie à l'image paisible du soldat, déjà évoquée dans la
deuxième strophe.
● “La main sur sa poitrine" : On décrit le dernier geste du soldat. Un geste qui
pourrait symboliser sa bravoure et son ultime sacrifice.

⇒ On suggère ainsi que la mort du soldat est un acte héroïque, et qu'il repose
paisiblement

● "Tranquille" : Cet adjectif est mis en avant, en symbolisant probablement la


tranquillité de la mort après la vie mouvementée du soldat.
● "Deux trous rouges" : Cet euphémisme fait référence aux blessures mortelles
infligées au soldat. On remarque également que le poème commence et se
termine avec le mot "trou", créant ainsi un cycle. Cela pourrait signifier que ce
phénomène se répète, et qu’il y a plusieurs jeunes victimes innocentes
comme ce soldat.

Rimbaud conclut le poème avec cette chute atténuée pour maintenir une
atmosphère paisible, et donner une image de la mort comme un repos calme. La
mort est ainsi représentée comme une libération des souffrances de la vie,
notamment celles infligées pendant la guerre.

Conclusion
En conclusion, à travers ce poème, Rimbaud dénonce la cruauté de la guerre. Le
poème dépeint une nature vivante contrastée avec la présence du cadavre d’un
soldat. Le cadre paisible décrit tout au long du poème peut en fait avoir pour but de
faire comprendre au lecteur que la mort devient une libération pour ceux qui ont
vécu dans l’atrocité de la guerre. Rimbaud invite donc le lecteur à remettre en
question les conséquences de la violence, et à réfléchir sur la nécessité de
préserver la paix.

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