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DROIT DE LA FONCTION PUBLIQUE

CAMEROUNAISE
Droits africains et malgache
Collection dirigée par Magloire ONDOA

La collection « Droits africains et malgache » accueille les travaux de


chercheurs, enseignants et étudiants, ou praticiens, soucieux de contribuer à
cette œuvre de réconciliation du droit en vigueur avec le droit étudié, d’une
part ; de l’autre, d’élimination de la distance séparant les citoyens africains de
leurs droits vivants, c’est-à-dire, ceux qui leur sont effectivement appliqués.

Déjà parus

Anicet ABAN ATANGANA, Administration fiscale et contribuable au


Cameroun, 2010.
Joseph Owona

DROIT DE LA FONCTION PUBLIQUE


CAMEROUNAISE
Du même auteur

Encyclopédie de la République unie du Cameroun (4 tomes), (avec


NJOH MOUELLE Ebénézer), Nouvelles Éditions Africaines, Dakar,
Abidjan 1981
Encyclopédie Juridique de l’Afrique (avec SIKHE Camara, sous-
direction GONIDEC PF), tome II, Droit international et relations
internationales, Nouvelles Éditions Africains, Dakar, Abidjan, 1982
Droit constitutionnel et régimes politiques africains, Manuels B.L., 3
mondes en devenir, Berger Levrault, Paris, 1985
La Nouvelle Voie chinoise ou l’air pur du soir, Mondes en devenir
XXIX, Points chauds 14, Berger Levrault, Paris, 1986
La République populaire démocratique de Corée, Mondes en devenir
LIV, Points chauds 14, Berger Levrault, Paris, 1987
Droit administratif spécial de la République du Cameroun, EDICEF,
Série Manuels et Travaux de l’Université de Yaoundé 1985.
Aperçu sur les principes élémentaires du droit international
contemporain, Travaux de recherches de l’université de Yaoundé, 1986
Droits constitutionnels et institutions politiques du monde
contemporain : étude comparative, L’Harmattan, Paris, 2010

© L’Harmattan, 2011
5-7, rue de l’Ecole-Polytechnique, 75005 Paris

http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr

ISBN : 978-2-296-55413-9
EAN : 9782296554139
REMERCIEMENTS

Mes remerciements vont à une génération particulière d’artisans de


l’ombre dont les travaux de saisie, relectures et autres mises en forme ont
su faire rejaillir l’essence didactique du présent travail. Je pense tout
particulièrement à monsieur Sylvestre GWET MATIP,
environnementaliste, fondamentaliste de Biologie et Mlle Berthine
NSEOUGMOE du Cabinet J. O. International Consulting.
INTRODUCTION GÉNÉRALE

I. LA NOTION DE FONCTION PUBLIQUE


Qu’est-ce que la Fonction publique ?
Cette notion récente, peu utilisée il y a trente (30) ans1, est susceptible
de revêtir au moins trois sens différents : un sens organique, un sens
formel et un sens matériel.
I.1- LE SENS ORGANIQUE
Le terme fonction publique désignerait de façon prosaïque, l’ensemble
du personnel, c’est-à-dire la totalité des personnes travaillant pour l’État,
et dans certains cas et conditions2, pour les collectivités territoriales
décentralisées.
À cet égard, le rappel des dispositions réglementaires semble
éloquent :
« La fonction publique de l’État est constituée par l’ensemble des postes de
travail correspondant à des niveaux de classification différents. Elle est
organisée en corps, cadres, grades et catégories »3.
« Les collectivités territoriales recrutent et gèrent librement le personnel
nécessaire à l’accomplissement de leurs missions conformément à la législation
et à la réglementation en vigueur et le statut du personnel visé est fixé par
décret du Président ».
Ces dispositions présagent en plus de la Fonction publique de l’État,
l’existence de celle nouvelle des collectivités territoriales décentralisées
qui reste à constituer. Il y a donc des fonctionnaires d’État et des
fonctionnaires locaux.
Il conviendrait toutefois de retenir que « les fonctionnaires et agents
mis à la disposition des collectivités territoriales demeurent régis par le
Statut général et le Code du travail ».

1
GAZIER (F).), La fonction publique dans le monde, Edition Cujas, P.13.
TEKAM (G.J.), Fonction publique camerounaise, Statut général et textes d’application
– Recueil des textes commentés, 311 pages, secrétariat général des services du Premier
ministre.
2
Voir article 19 de la loi n°2004-17 du 22 juillet portant orientation de la
décentralisation.
3
Article 3 du statut général de la Fonction publique, décret n°94/199 du 07 octobre
1994 modifié et complété par le décret n°2004/287 du 12 octobre 2000.

7
Il pourrait exister un résumé dans ce sens organique :
- une fonction publique de l’État régie par le statut général ;
- et une fonction publique parallèle, à créer dans le cadre de la
décentralisation et régie par un décret du président,
- les agents de l’État relevant du Code du travail et recrutés par
décision, c’est-à-dire un acte unilatéral de l’administration (de la 6e
catégorie à la 12e catégorie), ne sont plus aujourd’hui réputés comme
fonctionnaires1.
I.2- LE SENS FORMEL
Dans une perspective formelle, la Fonction publique désigne un
régime juridique applicable à une catégorie d’agents publics.
« Le fonctionnaire est une personne titularisée dans un cadre de la
hiérarchie des Administrations de l’État ».
Le fonctionnaire est, vis-à-vis de l’Administration, dans une
« situation statutaire et réglementaire ». Alors que les agents de l’État
relèvent du Code du travail, donc d’un régime juridique essentiel du droit
social commun, ils ne sont pas fonctionnaires et sont généralement liés à
l’Administration comme contractuels.
I.3- LE SENS MATÉRIEL
Enfin, la Fonction publique peut tout simplement vouloir dire
participation permanente et à titre professionnel à l’action des personnes
morales publiques de l’État et des collectivités décentralisées.
« Est considérée comme fonctionnaire toute personne qui occupe un
poste de travail permanent »2 dans un cadre de la hiérarchie des
administrations de l’État.
Le poste de travail doit être prévu au budget de l’État. Il correspond à
l’ensemble des tâches, attributions et responsabilités exigeant des
connaissances et aptitudes particulières. Le changement de poste de
travail est admis sous la condition que ce poste corresponde à des
connaissances et aptitudes particulières.
Le corps est l’ensemble des fonctionnaires exerçant une fonction
spécifique dans un secteur d’activité déterminé et régi par les mêmes
dispositions réglementaires.

1
Voir TEKAM, Fonction publique camerounaise, op.cit., p. 7.
2
Voir article 3 du statut général de la Fonction publique.

8
Le cadre regroupe l’ensemble des postes de travail réservés aux
fonctionnaires recrutés à un même niveau d’études ou de qualification
professionnelle. Ils sont soumis aux mêmes conditions de carrière.
Le grade définit la position du fonctionnaire dans la hiérarchie de son
cadre.
La « Fonction publique » désigne donc plusieurs choses : l’ensemble
constitué par les fonctionnaires de l’État et des collectivités
décentralisées ainsi que les contractuels de l’Administration ou agents de
l’État, le régime juridique de droit public qui leur est applicable ou la
hiérarchie des corps titulaires à titre permanent dans les postes de travail
de l’État.

II. LE PERSONNEL DE L’ÉTAT AU CAMEROUN :


Données et évolution
Le développement du personnel administratif a pris un essor rapide au
Cameroun. Trois périodes majeures ponctuent cette évolution,
notamment celle allant de la colonisation à l’indépendance, la période
marquée par l’ajustement structurel et la période actuelle.
II.1- LA MISE EN PLACE D’UNE FONCTION PUBLIQUE
CAMEROUNAISE : des années coloniales à 1982
Le colonisateur allemand mit l’accent sur la formation des
Camerounais destinés à le seconder activement. En 1913, il existait
plusieurs écoles spécialisées dont les Écoles d’infirmiers de Buea et
Victoria. La première école d’agriculture du pays s’ouvre en 1910. Au
début de la colonisation française, le personnel africain, auxiliaire
précieux pour l’Administration et les entreprises privées coloniales, était
formé à l’École primaire supérieure de Yaoundé comportant trois ans
d’études et préparant aux carrières de moniteurs de l’enseignement, de
fonctionnaires des services centraux, de postiers, d’infirmiers et de
moniteurs agricoles. L’École normale de Foulassi, le petit séminaire
d’Akono et deux écoles missionnaires jouaient un rôle similaire1.
Deux actes du commissaire de la République française au Cameroun,
organisèrent dès 1921 les cadres locaux européens et les cadres locaux
indigènes au Cameroun2.
1
Voir YOUBI (J. F.), « La Camerounisation des cadres », Mémoire de licence en droit,
Faculté de Droit et des Sciences économiques, UY, 1974, p.11-12.
2
Ibid.

9
Cet embryon de Fonction publique coloniale va connaître un essor
rapide avec l’accession du pays à l’autonomie et à l’indépendance. Les
statistiques officielles au 30 juin 1974 arrêtaient 18 101 fonctionnaires
pour la République entière dont 13 494 agents de l’État pour le seul ex
Cameroun Oriental. Au 31 mars 1976, les chiffres s’élevaient déjà à 22
342 et, au 31 décembre 1982, la Fonction publique camerounaise
comptait 40 200 fonctionnaires intégrés (Tableau n°1).
Tableau n°1 : Évolution par catégorie et par année des effectifs de
fonctionnaires camerounais (1962-1982)
Nos Année Nombre de fonctionnaires par catégorie Accroissement Taux
A2 A1 B2 B1 C D TOTAL absolu %
1 1962 76 185 _ 571 2 510 3 624 6 966 717 11,47
2 1963 104 195 9 747 2 713 3 884 7 652 686 9,85
3 1964 104 303 11 984 2 814 3 986 8 206 554 7,24
4 1965 155 351 17 1 12 3 050 4 089 8 774 568 6,92
5 1966 223 415 83 1 277 3 311 4 621 9 929 1 155 13,16
6 1967 259 487 113 1 552 3 581 5 106 11 098 1 169 1177
7 1968 270 573 141 1 672 3 863 5 402 11 921 823 7,42
8 1969 298 741 159 1 808 3 402* 4 875* 11 283* -638 -5,35
9 1970 559 913 76 1 968 3 620 4 325* 11 461* 178 1,58
10 1971 568 1 041 88 2 261 3 800 4 655 12 412 952 8,31
11 1972 667 1 110 149 2 445 3 920 5 203 13 494 1 081 8,71
12 1973 783 1 362 209 3 029 4 736 6 091 16 210** 2 716 20,13
13 1974 801 1 381 298 3 574 5 351 6 696 18 101** 1 891 11,67
14 1975 855 1 417 385 3 977 6 124 6 914 19 672 1 517 8,68
15 1976 981 1 701 409 4 204 7 258 7 789 22 342 2 670 13,57
16 1977 1 163 2 009 453 4 530 8 047 8 008 24 193 1 851 8,2
17 1978 1 343 2 311 569 5 200 9 669 8 308 27 400 3 207 13,26
18 1979 1 452 2 432 726 5 576 10 770 9 108 30 064 2 664 9,72
19 1980 1 665 2 783 875 6 222 12 187 9 659 33 391 3 327 11,07
20 1981 2 030 3 249 1 024 6 949 13 324 10 343 36 919 3 528 10,56
21 1982 2 398 3 604 1 182 7 943 14 403 10 670 40 200 3 281 8,89
Source : Service du contrôle des effectifs de la Fonction publique.
* Déduction faite du personnel de la Police devenue autonome. Ce qui explique la
régression brutale des effectifs qui se traduit ici par un taux négatif de -5,35%.
** Y compris les effectifs de l’ex-Cameroun Occidental pris en compte
après la fusion des trois fonctions publiques. Ceci se traduit par le
passage du taux de 8,71% à 20,13%.

10
Il est à noter que, pour cette année 1982, les agents de l’Etat relevant
du secteur éducatif représentaient 38,42%, soit 15 446 agents. Venant
ainsi avant les secteurs techniques (21,25%), le secteur médico-social
(17,13%) et le secteur administratif et judiciaire (16,86%) …
Tableau n°2 : Répartition des fonctionnaires par secteurs
d’activités (1981-1982)

Rang et secteur Effectifs au Effectifs Accroissement Accroissement Fraction par


31 déc. 1981 au 31 déc. absolu Relatif (%) rapport à
1982 l’ensemble
1er : Éducatif 14 146 15 446 1 300 9,19 38,42
2e : Technique 7 863 8 543 680 8,65 21,25
3e : Médical 6 326 6 887 561 8,87 17,13
4e : Administratif 6 133 6 775 642 10,47 16,86
et juridique
5e : Financier 2 451 2 549 98 4,00 6,34
Ensemble 36 919 40 200 3 281 8,89 100,000
Source : Bureau des statistiques du Service du contrôle des effectifs de la Fonction
publique
II.2- ÉVOLUTION DES EFFECTIFS DE LA FONCTION
PUBLIQUE : de l’ajustement structurel à nos jours
(1982 – 2008)
La multiplication du nombre des fonctionnaires de chaque catégorie
reste une tendance constante. Toutefois, la crise économique survenue
dans les années 80 et suivie par un nécessaire ajustement structurel des
effectifs a abouti en 1990 à une véritable réduction de ceux-ci.
De 1990 à 1994, les effectifs de fonctionnaires restent modestes. Ils
sont marqués par une réduction (74 018 à 71 699) compensés par le
recours aux agents décisionnaires et aux contractuels. En effet, durant
cette période, les valeurs quantitatives de ces deux catégories d’agents
publics augmentent progressivement. Allant de 5921 à 6375 pour les
contractuels et de 15 544 à 16 735 pour les agents décisionnaires
(Tableau n° 2).
L’année 1998 reste une pointe significative dans la diminution des
effectifs totaux des agents de l’État dont le nombre total (83 788) passe
en dessous de celui de 1990 (95 483) ; marquant ainsi une réduction
d’environ 12 000 agents publics dont 4 294 fonctionnaires et 6 282
agents décisionnaires (Tableau n°2).

11
La tendance redevient ascendante en 1999, année à partir de laquelle
les effectifs totaux dépassent le seuil de 100 000. Avec 74 344
fonctionnaires, 7 548 contractuels et 19 618 décisionnaires soit un total
de 121 704 personnels, 2001 représentent le premier véritable pic
d’explosion des effectifs d’agents publics. Ces chiffres atteignent
124 085 et 126 482 respectivement en 2004 et 2008 (Tableau n°2).
Les sous-secteurs de l’éducation occupent des places de choix dans la
répartition des effectifs :
- 23 837, enseignement général ;
- 26 514, enseignement primaire et maternel ;
- 1 686, enseignement supérieur ;
- 6 087, enseignement technique ;
- 5 722 ; infirmiers ;
Tableau n°3 : Évolution des effectifs des personnels de l’État
Année Fonctionnaires Contractuels Décisionnaires TOTAL
1990 74 018 5 921 15 544 95 483
1991 71 294 5 704 14 972 91 969
1992 72 949 5 836 15 319 94 104
1993 71 269 5 702 14 966 91 937
1994 79 692 6 375 16 735 102 803
1995 80 071 6 406 16 815 103 292
1996 90 822 7 266 19 073 117 160
1997 90 762 7 261 19 060 117 083
1998 69 541 5 563 8 684 83 788
1999 79 344 6 348 16 662 102 354
2000 84 034 6 723 17 647 108 404
2001 94 344 7 548 19 812 121 704
2002 85 907 6 873 18 041 110 820
2003 88 095 7 048 18 500 113 643
2004 96 190 7 695 20 200 124 085
2005 90 064 7 205 18 913 116 183
2006 91 450 7 316 19 204 117 970
2007 92 568 7 405 19 439 119 413
2008 90 901 26 773 8 808 126 482
Cette reprise d’ascendance des effectifs pourtant contingents par
l’ajustement, a entraîné la création d’un organisme de rationalisation de
la gestion auprès de certains ministères (Éducation, Fonction publique,
etc.).

12
L’effet de l’ajustement sur l’évolution des effectifs aura été de courte
durée, les vieilles causes évoquées suscitant les mêmes effets de
multiplication des personnels de l’État. La décentralisation en projet
pourra-t-elle accélérer le processus d’ascendance en accroissant les
fonctionnaires locaux ?
II.3- LES CAUSES DU DÉVELOPPEMENT DU PERSONNEL
DE L’ADMINISTRATION (1910 – 1982)
Les causes du développement pléthorique du personnel de
l’administration camerounaise sont multiples et ont varié avec les
régimes politiques :
i) Les colonisateurs divers étaient essentiellement à la recherche
d’auxiliaires efficaces pour leur domination politique et économique du
pays ;
ii) Les autorités politiques post coloniales ont cherché à rapprocher
l’Administration de l’administré afin d’assurer un meilleur encadrement
des citoyens et un meilleur quadrillage du pays, obéissant parfois à une
priorité de sécurité nationale1 ;
iii) La camerounisation à outrance des secteurs publics et parapublics
est un facteur important2 du développement des effectifs de la Fonction
publique ;
iv) Et enfin, le renforcement en effectif des services très rentables de
l’État (Douanes, Agriculture, P et T), sans oublier les nécessités de suivre
le progrès technique ou d’assurer une formation des cadres de l’avenir
(Éducation nationale), ont également contribué à ce mouvement (annexes
1).

1
Voir NYOGOK MPEK Germain, « La création de nouvelles circonscriptions
administratives au Cameroun. Approche problématique », Mémoire Licence en Droit
1976-1977, p. 68-73.
2
Voir YOUBI, « La camerounisation des cadres », op.cit.

13
CHAPITRE I

PROBLÈMES GÉNÉRAUX DE LA FONCTION PUBLIQUE

• L’étude des problèmes généraux de gestion et des principes


gouvernant ce domaine ;
• La détermination de la composition du personnel hétéroclite de
l’Administration ;
• L’analyse de la carrière du fonctionnaire ;
• Et l’énumération des avantages matériels du fonctionnaire
complétée par celle de ses droits et obligations.

I. LES SOURCES DU DROIT DE LA FONCTION PUBLIQUE


Comme les autres secteurs du droit administratif d’inspiration
juridique français, le droit de la Fonction publique camerounaise
comporte une dualité de sources :
- d’abord un corps de règles écrites, hiérarchiquement hétéroclites,
constitutionnelles, légales ou réglementaires ;
- puis, un système jurisprudentiel de garanties fondamentales
dégagées par imitation prétorienne du conseil d’État et des tribunaux
administratifs français par les juridictions administratives successives du
Cameroun indépendant, du Conseil du contentieux à la chambre
administrative de la Cour suprême.
I.1- LES SOURCES ÉCRITES DU DROIT DE LA FONCTION
PUBLIQUE
Au Cameroun, la Constitution, la loi, les textes à valeur législative et
les textes réglementaires constituent les principales sources du droit de la
Fonction publique.
I.1.1- Les règles constitutionnelles du droit de la Fonction
publique
Le constituant camerounais ne dédaigne pas de prescrire des règles
applicables à la Fonction publique. Ainsi, l’article 25 du statut de 1957
disposait que : « dans la limite des crédits budgétaires, le Premier
ministre organise les services publics de l’État sous tutelle et définit la
compétence et l’orientation générale de l’action de chacun d’eux ».
L’article 16 du statut de 1958 reprenait des dispositions semblables :

15
« Le Premier ministre, chef du gouvernement camerounais, préside le
Conseil des ministres, organise les services publics, nomme à tous les
emplois de l’État du Cameroun et veille à la bonne administration de la
justice ».
La loi n°59-2 du 18 février 1959 tendant à fixer le fonctionnement des
pouvoirs publics, dit également que le Premier ministre nomme à tous les
emplois publics dans la limite des autorisations budgétaires et que : « le
Premier ministre ou les ministres peuvent déléguer par arrêté nominatif
leurs pouvoirs à des fonctionnaires de leurs départements respectifs, à
l’exception de celui de signer ou de contresigner les lois et les décrets »
(articles 28 et 29).
Avec l’indépendance, va se développer un système plus complet de
fonction publique. Le président de la République, chef de l’État, apparaît
alors comme étant le pivot central. Dans la constitution du 4 mars 1960,
« il préside le Conseil des ministres », (article 15), « préside les conseils
et comités supérieurs de la Défense nationale », « il est chef des Forces
armées », « accrédite les ambassadeurs », (article 16). « Il nomme aux
emplois civils et militaires » (article 17). Le conseil des ministres « est
obligatoirement saisi des nominations aux emplois supérieurs de l’État
dont la liste sera établie par une loi organique » (article 21). Le statut
des magistrats et le statut de la Fonction publique sont du « domaine de
la loi » (article 23). La constitution fédérale de 1961 confirmera la
plupart de ces règles. Toutefois, le statut de la Fonction publique cesse
d’appartenir au domaine de la loi (article 24).
La constitution actuelle, celle de 1972, norme fondamentale de l’État,
a conservé cet héritage de règles relatives à la gestion et à l’organisation
de la Fonction publique. Il arrive qu’elle énonce à l’instar de la
constitution française du 4 octobre 1958, des règles relatives à la
Fonction publique. Les dispositions à retenir sont nombreuses :
- celle de l’article 5 nouveau, qui dit que le président de la République
peut déléguer certains de ses pouvoirs aux membres du gouvernement et
à certains hauts fonctionnaires de l’administration de l’État, dans le cadre
de leurs attributions respectives ;
- celle de l’article 8 nouveau, relative à la nomination des membres du
gouvernement et à la détermination de leurs attributions ;
- et enfin, celles de l’article 9 qui font du chef de l’État, le chef des
forces armées, qui accrédite les ambassadeurs et le titulaire principal du

16
pouvoir de nomination aux emplois civils et militaires. Il crée, organise,
et dirige tous les services administratifs nécessaires à l’accomplissement
de sa mission, dit expressément la Constitution1.
Bref, la constitution camerounaise, norme fondamentale de l’État, est
aussi la charte administrative suprême du pays.
Le texte initial plusieurs fois révisé2, a maintenu des dispositions
semblables qui font du président de la République le pivot central de
l’Administration camerounaise, quelquefois secondé par le Premier
ministre chef du gouvernement.
Le président de la République assure par son arbitrage, le
fonctionnement régulier des pouvoirs publics (article 5).
Il peut déléguer certains de ses pouvoirs au Premier ministre, aux
autres membres du gouvernement et à certains hauts responsables de
l’administration de l’État dans le cadre de leurs attributions respectives.
Dans le cadre d’une délégation expresse et en cas d’empêchement
temporaire, le président de la République charge le Premier ministre
d’assurer certaines de ses fonctions.
Le Premier ministre est le chef du gouvernement dont il dirige
l’action. Il est chargé de l’exécution des lois. Il exerce le pouvoir
réglementaire et nomme aux emplois civils sous réserve des prérogatives
reconnues au président de la République. Il dirige les services
administratifs nécessaires à l’accomplissement de sa mission.
Il est à noter in fine que le président de la République peut, pour un
délai limité et sur habilitation du Parlement, prendre des ordonnances
ayant un caractère réglementaire avant leur notification.
I.1.2- Les règles législatives et les actes réglementaires du droit de
la Fonction publique
Les autres règles écrites constituent l’essentiel des dispositions
juridiques régissant la Fonction publique.

1
Voir les articles 13, 20, 21 et 34 de la constitution française du 4 octobre 1958.
2
Voir constitution de la République Unie du Cameroun, Imprimerie nationale, 2 juin
1972 ;
Loi n° 2008/001 du 14 avril 2008 modifiant et complétant certaines dispositions de la
loi n° 96/06 du 18 janvier 1996 portant révision de la constitution du 2 juin 1972.

17
a. La primauté matérielle des sources réglementaires dans le droit
de la fonction publique camerounaise
L’idée d’un corpus de règles prédéterminées écrites relatives à la
Fonction publique entière ne s’est imposée que progressivement en
France. L’Empire ne donna des « statuts » qu’à certains corps de l’État :
les Affaires étrangères. La monarchie de juillet conféra un statut assorti
de précieuses garanties aux officiers grâce à la loi du 19 mai 1834. Les
seules dispositions d’ensemble s’appliquant à tous les agents portaient
sur des points limités : loi du 8 juin 1953 instituant un régime général de
retraite et article 65 de la loi du 22 avril 1905 instituant la règle de la
communication du dossier en matière disciplinaire. Le Premier statut
général, apparu avec le régime de Vichy en 1941, disparut avec le
rétablissement de la « légalité républicaine » à la Libération. Le statut
d’octobre, voté par l’Assemblée constituante, resta en vigueur durant
toute la IVe République. L’ordonnance du 4 février 1959, prise en vertu
d’une habilitation constitutionnelle de l’article 92 de la constitution de
1958, lui fut substituée. Il n’en demeure pas moins que les garanties
fondamentales accordées aux fonctionnaires, à la différence des
dispositions de l’article 20 de la constitution camerounaise, font partie du
domaine de la loi en France. En droit camerounais, seules les règles
relatives à l’organisation générale de la défense nationale demeurent du
domaine des interventions du législateur.
La compétence du Parlement, quant à la gestion de la Fonction
publique, reste très restreinte matériellement. Le Parlement vote le
budget, dont les budgets des divers départements ministériels et ce vote
donne lieu à contrôle.
Le Parlement contrôle l’action gouvernementale par voie des
questions orales ou écrites et par la constitution de commissions
d’enquête sur des objets déterminés qui peuvent bien concerner les
activités des départements ministériels donc de l’administration de l’État
ou des collectivités décentralisées1.
Cette différence fondamentale consacre en ce qui concerne leur
importance matérielle, la primauté des sources réglementaires dans le
corpus des normes de la fonction publique camerounaise. Cette
importance est confirmée par le droit positif national.

1
Article 35 de la constitution après révision 2008, article 26.

18
b. L’évolution des sources réglementaires du droit de la Fonction
publique
L’article 51 du statut du 16 avril 1957 multipliait les statuts des
fonctionnaires à l’excès : cadres de fonctionnaires de l’État servant
Outre-mer, cadres de compléments organisés localement par le Haut-
commissaire, fonctionnaire des cadres camerounais, fonctionnaires et
agents des cadres métropolitains, etc.
Les sources réglementaires du droit de la Fonction publique sont
étroitement redevables des formes politiques de l’État unitaire
jusqu’aujourd’hui.
b.1- La pluralité des statuts durant le régime fédéral
La loi d’autonomie caractéristique du régime fédéral présuppose une
distinction des statuts des fonctionnaires de l’État fédéral et des États
fédérés. Trois statuts réglementaires régissaient les fonctions publiques
de la brève fédération camerounaise de 1961 à 1971. L’ordonnance
n°59/70 du 27 novembre 19591 essentiellement inspirée du statut général
français de l’époque, régissait la Fonction publique du Cameroun
Oriental. Au Cameroun Occidental, les « civil servants » placés jusque-là
dans des conditions proches du « Droit Contractuel privé »2, seront dotés
d’un statut le 1er juillet 1969 complété par une réglementation en matière
de pensions3. Ce dernier texte, par commodité facile, reprend les
dispositions en vigueur au Cameroun Oriental. Et au niveau fédéral
s’appliquait le décret n° 66/DF/53 du 13 février 1966 portant statut
général de la fonction publique fédérale, d’originalité insignifiante par
rapport au texte ancien de 1959.
L’harmonisation de fait découlant de la similitude des dispositions des
trois statuts formellement distincts cessa avec l’avènement de la
République Unie du Cameroun en 1972.
b.2- Le statut unique du 18 février 1974
Le statut fédéral ancien fut appliqué de façon transitoire à toute la
fonction publique camerounaise unifiée.

1
Voir JOC n° 1339 du 12-12-1959, p.1701.
2
Voir conférence de presse du ministre chargé de la Fonction publique 11 mars 1966.
3
Voir West Cameroon Official Gazette Supplement, 1969, n°26, volume 9, 21st June
1969, Part B B 57.

19
Deux textes jetant les prémices d’un droit spécifiquement camerounais
dans plusieurs de ses dispositions interviennent en 1974 :
- le 18 février 1974 est publié le décret n°74/138, portant statut
général de la Fonction publique, articulé en une longue série de 202
articles extrêmement divers ;
- et le 26 août 1974, le décret n°74/759, uniformisant dans un texte de
synthèse, le régime juridique des pensions civiles des fonctionnaires.
De nombreux autres textes d’application réglementaires sont venus
préciser ce statut unique en ce qui concerne les fonctionnaires de
l’Administration générale, le corps des fonctionnaires de la diplomatie,
etc.
Le statut est resté jusqu’ici unique. Il est complété par d’autres textes
de nature réglementaire1. Le décret n°94/199 du 7 octobre 1994 portant
statut général de la fonction publique de l’État, modifié et complété par le
décret n°2000/287 du 12 octobre 2000, demeure le texte essentiel avec le
Code du travail qui s’applique aux contractuels de l’Administration.
Ledit statut général de la Fonction publique ne s’applique pas2 sauf
cas de silence ou de vide juridique :
- aux personnels recrutés et gérés directement par l’Assemblée
nationale ;

1
Voir TEKAM, Statut général et textes d’application. Recueil des textes commentés,
Yaoundé, février 2006, 290 pages. Et plus particulièrement voir :
- loi n°92/007 du 14 avril 1992 et le décret n°78/484 du 9 novembre 1978 ;
- décret n°2000/684/PM du 13 septembre 2000 fixant les conditions et modalités
d’attribution du capital décès ;
- décret n°2000/685/PM du 13 septembre 2000 portant organisation et fonctionnement
du Conseil permanent de discipline de la Fonction publique et fixant les règles de la
procédure disciplinaire ;
- décret n°2000/686/PM du 13 septembre 2000 portant organisation et fonctionnement
des conseils de santé ;
- décret n°2000/696 PM du 13 septembre 2000 fixant le régime général des concours
administratifs ;
- décret n°2000/698/PM du 13 septembre 2000 fixant les modalités d’organisation et
de fonctionnement du Conseil supérieur de la fonction publique, etc.
2
Voir article 10 du statut général de la Fonction publique, TEKAM précité…;
- statut spécial du corps des fonctionnaires de l’administration pénitentiaire, décret
n°92/054 du 17 mars 1992 modifié par le décret n°93/846 du 22 décembre 1993 ;
- décret n°2001/055 du 12 mars 2001, décret n°2001/066 du 12 mars 20014 fixant
échelonnement indiciaire des cadres de la Sûreté nationale ;
- décret n°95/048 du 8 mars 1995, modifié et complété par le décret n° 2004/0802 du
13 avril 2004.

20
- aux auxiliaires de l’Administration, catégorie en voie d’extinction ;
- aux magistrats ;
- aux militaires ;
- aux fonctionnaires de la Sûreté nationale.
Des statuts spéciaux ou particuliers interviennent pour ces corps. Les
fonctionnaires de l’Éducation nationale sont assujettis ainsi à un statut
dérogatoire du droit commun de la Fonction publique.
La loi n°2004/17 du 22 juillet 2004 d’orientation de la décentralisation
prévoit un statut du personnel des collectivités à intervenir1, décret du
président de la République.
Toutes ces règles écrites ne dérogent en rien au « véritable statut
jurisprudentiel » de la Fonction publique2, la place de la troisième source
de droit qu’est la coutume étant à peu près absente en droit administratif.
Tout au plus, existe-t-il des usages sans valeur obligatoire ?
I.2- LES SOURCES JURISPRUDENTIELLES DU DROIT DE
LA FONCTION PUBLIQUE CAMEROUNAISE
La codification prétorienne des règles relatives à la Fonction publique
camerounaise se nourrit de la riche expérience des juridictions
administratives françaises et particulièrement du conseil d’État. La haute
juridiction camerounaise statuant au contentieux s’essaie quelquefois à
forger des solutions spécifiques et nationales.
I.2.1- Le recours aux solutions jurisprudentielles françaises
Le Droit administratif français de la Fonction publique comporte un
droit jurisprudentiel développé, partiellement confirmé par le législateur
dans une codification presque exclusive, le droit de grève des
fonctionnaires jusqu’à la loi française de 1963. Elles continuent
d’inspirer la jouissance de la liberté d’opinion du fonctionnaire et de
déterminer la partie du devoir de loyalisme et de l’obligation de réserve
du fonctionnaire. Elles ont pu instituer de façon globale, à partir de
l’article 65 de la loi du 22 avril 1905, la règle de la communication du
dossier et, généraliser en matière de Fonction publique le principe des
droits de la défense sans oublier le recours aux principes généraux du
1
Article 19 de la loin°2004/17 du 22 juillet 2004 d’orientation de la décentralisation,
JORC, juillet 2004, p.17.
2
Voir SILVERA (S.), « Réflexions sur l’évolution de la jurisprudence du Conseil d’État
dans le domaine de la Fonction publique », AJDA, 1959 I. 181.

21
droit pour le plus grand bénéfice des fonctionnaires1 et le triomphe du
principe de légalité.
Le droit administratif camerounais de la Fonction publique n’hésite
pas à s’inspirer de ces solutions jurisprudentielles françaises sur plusieurs
points importants :
- détermination de la qualité de fonctionnaire (CFJ-A6, arrêt n° 9 du
16 octobre 1968 Baba Youssoufa) ;
- juridictionnalisation de la procédure disciplinaire des fonctionnaires
(CFJ-AG, arrêt n°21 Makoube Epée Albert C/ État du Cameroun) ; etc.
- irresponsabilité des services judiciaires (CFJ, arrêt Awa Hadja).
Mais il n’hésite pas non plus à innover.
I.2.2- L’esquisse de solutions jurisprudentielles camerounaises
inédites
Bien que les solutions soient encore exceptionnelles, le droit statutaire
de la fonction publique camerounaise pourra être de plus en plus précisé
par l’esquisse de solutions jurisprudentielles inédites, nouvelles et
spécifiques.
L’arrêt de la chambre administrative de Yaoundé de la Cour fédérale
de Justice du 29 mars 1972, Mbedey Norbert C/République Fédérale du
Cameroun2, constitue un exemple d’effort original du juge camerounais
pour forger ses propres solutions en dehors des sentiers tracés par la
jurisprudence française.
Les faits de l’espèce sont simples. L’administration avait mis à la
disposition du sieur Mbedey Norbert un véhicule administratif et celui-ci
se l’était fait voler. Le ministre des Finances émit à son encontre un ordre
de recette de 518 000 francs représentant le montant du préjudice subi
par l’État. M. Mbedey ne l’entendit pas de cette oreille et il déferra pour
annulation cet ordre de recette devant le juge administratif. Celui-ci se
reconnut compétent au motif essentiel que les ordres de recette contestés
par l’intéressé constituaient des actes administratifs ; mais il décida
curieusement d’appliquer en ce qui concerne ce cas particulier de
responsabilité de l’agent envers l’Administration, les règles du droit privé

1
Revue Française d’Administration Publique, n° mars 1977, « La protection due par
l’Administration à ses agents », par Joël Yves PLOUVIN, p. 68.
2
Voir Revue Camerounaise de Droit, n°3, p. 64. Observations Henri JACQUOT.

22
et plus précisément celles de l’article 1384 du Code civil qui établit la
responsabilité de tout un chacun pour des choses confiées à sa garde sans
besoin d’établir au préalable une faute. L’arrêt Mbedey Norbert constitue
non seulement un arrêt de principe mais aussi un arrêt de démarcation par
rapport au droit et à la jurisprudence française et de création véritable
d’une règle de droit en l’absence d’un texte précis établissant
l’automatisme de la responsabilité. L’article 21 de la loi de Finances du
14 juin 1961 de la République du Cameroun ne peut être invoqué car
l’arrêt en question se contente de retenir comme fait déterminant, le fait
que « c’est Mbedey qui s’est vu confier la garde du véhicule et qu’il ne
prouve pas et n’offre pas de rapporter la preuve que ledit véhicule était
muni d’une clé de contact et avait été forcé au moment du vol ».
La jurisprudence, celle du conseil d’État comme celle de la chambre
administrative camerounaise, a eu et a un rôle essentiel dans le
développement du droit camerounais de la Fonction publique. M. Lekene
Donfack note avec intérêt les domaines traditionnels de son influence et
de son intervention1 :
- respect du statut général par les statuts particuliers (arrêt n°J/A Baba
Youssoufa contre État fédéré 31 mars 1971) ;
- règles supplétives à la réglementation des concours professionnels
(arrêt n° 254/TE, Syndicat des administrateurs civils contre État du
Cameroun, 12 avril 1963 : toute nomination dans un cadre doit avoir lieu
au grade de début de ce cadre) ;
- violation des droits de la défense ;
- communication du dossier personnel ;
- promotion du fonctionnaire au choix ;
- reconstitution de carrière ;
- retraite et régime du fonctionnaire retraité ;
- affectation ;
- faute professionnelle commise en dehors du service ;
- absence irrégulière du service ;
- suspension de solde ;
- licenciement d’une stagiaire ;
- compétence du ministre de la Fonction publique.
1
LEKENE DONFACK Etienne Charles, Droit administratif spécial, 1979-80, 2e année
capacité, Faculté de Droit et des Sciences Economiques, Yaoundé, p. 23-24.

23
La jurisprudence administrative camerounaise a construit une série de
solutions inédites qui méritent examen1 et regard :
- recevabilité et irrecevabilité des recours par des fonctionnaires (arrêt
n°6 du 23 juin 1964 du tribunal d’État, Association des anciens
combattants et arrêt Bidzanga Joseph, arrêt n°3 du 16 mai 1967) ;
- incompétence du juge administratif pour connaître des dommages
causés par le fonctionnement de la justice (arrêt n°17 du 16 mars 1967,
Mfomou Jean Baptiste) et des actes intervenus dans une procédure
judiciaire (arrêt n°19 du 16 mars 1967 janvier) ;
- régime des concours administratifs (arrêt n°13 du 8 novembre 1973 -
Yombi contre République Fédérale du Cameroun et arrêt n°12 du 13
décembre 1973, Tchatchouang David et Tchatat contre État du
Cameroun) ;
- procédures devant le conseil de discipline (arrêt n°6 du 31 mai 1966
du Tribunal d’État, Melingui Benoît contre État du Cameroun oriental ;
Arrêt n° 9 du 16 octobre 1968, Baba Youssoufa contre État Fédéral du
Cameroun arrêt n°14 du 16 mars 1969, Moukoko James contre État
fédéré du Cameroun Oriental ; arrêt n° 3 du 28 octobre 1970, Onana Jean
Pierre contre l’arrêt n°34/CFJ/SCAY rendu le 30 avril 1968, etc) ;
- privation des droits civiques et détachement pour exercice d’un
mandat électif (arrêt n°3 du 21 mai 1965 Tchoungui Zibi Elie contre État
fédéré du Cameroun Oriental) ;
- Droit de la défense (arrêt n°13 du 30 avril 1963, Nguele Jérôme
contre État du Cameroun) ;
- fraude avec introduction de documents dans les salles d’examen
(arrêt n°1 du 4 janvier 1966, État du Cameroun contre Biba Théophile,
CFJ) ;
- défaut de communication du dossier et droit à la défense (arrêt n°11
du 16 mars 1967, Makome Epée Albert contre État du Cameroun) ;
- intégration d’un fonctionnaire (arrêt du 18 mars 1967 Mvogoh
Elumat Théophile) ;
- annulation de la délibération du jury et refus de classer un
fonctionnaire (arrêt n°12 du 26 mai 1977, État du Cameroun contre
Biakolo Max) ;

1
DIPANDA MOUELLE Alexis, « Cour suprême du Cameroun. Répertoire
chronologique de la Jurisprudence de la Cour Suprême 1re Partie Année 1960-1980 »,
tome V, Droit administratif, Imprimerie nationale,118 p.

24
- décès d’un fonctionnaire en service commandé et condamnation de
l’État au paiement des dommages et intérêts aux ayants droit (arrêt n°4
du 16 février 1978, État du Cameroun et procureur général de la Cour
suprême contre Dame Elom née Perrier Danièle) ;
- pouvoir souverain de l’Administration pour licencier le titulaire ou
intégrer un stagiaire (arrêt n°15 du 25 avril 1974, Ekwalla Edoubey
Eyango Stéphane contre État fédéré du Cameroun Oriental) ;
- révocation à tout moment du détachement d’un fonctionnaire (arrêt
n°14 du 16 mars 1967, Kolle Mouange Honis contre État du Cameroun).
Ce statut jurisprudentiel esquissé par le juge administratif peut aider à
interpréter les principes de base de gestion de la fonction publique,
connaître de nouveaux développements.

II. LES PRINCIPES DE GESTION DE LA FONCTION


PUBLIQUE
L’autorité demeure le principe fondamental de la gestion de la
fonction publique camerounaise, tempéré dialectiquement et
progressivement par des principes démocratiques d’affirmation récente,
et en dernier lieu par l’esprit de bonne gouvernance et
« d’accountability ».
II.1- LE PRINCIPE D’AUTORITÉ DANS LA FONCTION
PUBLIQUE
Ce premier principe domine la conception traditionnelle de la
Fonction publique. Il a des effets tous azimuts tant sur l’organisation que
sur le fonctionnement de celle-ci.
II.1.1- L’organisation hiérarchisée de la Fonction publique
La fonction publique camerounaise apparaît avant tout comme un
ordre « hiérarchisé » et inégalitaire dans son organisation globale comme
dans ses structures internes et son fonctionnement.
Trois types de hiérarchie coexistent ici : celle globale de la Fonction
publique tout entière axée sur le chef de l’État, celle des corps de
fonctionnaires et celle des structures administratives d’action du
gouvernement.
Le statut général de la Fonction publique désigne le président de la
République, titulaire du pouvoir de nomination et de gestion des
fonctionnaires, comme l’organe directeur suprême de la Fonction

25
publique1. Il peut toutefois déléguer une partie de ses pouvoirs à toute
autorité gouvernementale, principalement au ministre chargé de la
Fonction publique.
La structure générale des départements ministériels, cadres de travail
par excellence des fonctionnaires obéit au même principe d’organisation
hiérarchique. Le ministre, aidé éventuellement par un vice-ministre, est le
chef du département ministériel. Le secrétaire général, chargé de suivre
l’instruction des affaires du département sous la « haute autorité du
Ministre », dirige une cohorte de directeurs assistés de directeurs adjoints
qui orientent l’action des chefs de services ayant à leur disposition des
chefs de bureau chargés eux-mêmes de suivre le commun des agents de
l’État et des fonctionnaires.
La Fonction publique apparaît également organiquement comme un
conglomérat hiérarchisé de corps de fonctionnaires. Elle ne constitue pas
une confrérie égalitaire de pairs semblables. Les fonctionnaires sont
classés en catégories correspondant à des niveaux prédéterminés de
recrutement et d’exercice de fonction. La limite d’âge ci-dessous
prescrite peut être reculée exceptionnellement et à titre individuel par le
Premier ministre sur proposition motivée du ministre chargé de la
Fonction publique et pour les postes de travail de la catégorie A.
Le Conseil supérieur de la fonction publique émet un avis pour les
recrutements distincts lorsque la situation du postulant est une condition
déterminante pour l’accès à la Fonction publique. Les distinctions
doivent tenir compte d’éventuelles inaptitudes à occuper certains postes
de travail.
En conséquence, il est à retenir que le fonctionnaire ne doit être ni trop
jeune de façon à respecter les conventions internationales de protection
de l’enfant, ni trop vieux pour pouvoir passer le temps réglementaire de
vingt ans de service avant l’accession à la retraite.
Le postulant à la qualité de fonctionnaire doit pouvoir présenter un
profil de probité irréprochable présumant une façon de servir
désintéressée et au service de l’intérêt général. Dans le passé, les
enquêtes de moralité et un « casier judiciaire » vierge attestaient de cette
présomption.
Quant à la dérogation à la limite supérieure d’âge d’accès, elle a été
parcimonieusement levée dans le passé. Cela a été le cas pour certains

1
Voir article 14 du statut général de 1974 (décret 74/38).

26

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