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Textes d’appui sur : L’utilité de la philosophie 2023-2024

Texte 1 : Les critiques adressées à la philosophie

Assurément, la philosophie est, à notre époque attaquée de toutes parts. Elle l’est sur le plan de la connaissance par
les savants ou plutôt par les pseudo-philosophes qui, éblouis par les succès de la science voudraient réduire toute
activité intellectuelle à une activité de type scientifique. Elle l’est selon le souci de l’efficacité par les techniciens
qui constatent qu’elle n’augmente en rien notre pouvoir sur le monde. Elle l’est, politiquement par certains
réactionnaires qui lui reprochent de nous détacher des taches sociales, ou d’être une idéologie au service d’une
classe […]. Mais la philosophie se laisse maladroitement intimider. Elle sait que ses attaques ne datent pas
d’aujourd’hui, et que ce n’est pas à notre siècle que SOCRATE a été condamné à mort par la cité, toujours hostile.
En effet, elle est au mode de vie que la philosophie suppose, à la perpétuelle remise en question qu’elle exige, à la
recherche sans résultat utilisable qu’elle entreprend.

Ferdinand Alquier
Texte 2 : La philosophie, une activité évasive

L’exemple de Thalès le fera comprendre. Il observait les astres et, comme il avait les yeux au ciel, il tomba dans un
puits. Une servante de thrace, fine et spirituelle, le railla, dit-on, en disant qu’il s’évertuait à savoir ce qui se passait
dans le ciel, et qu’il ne prenait pas garde à ce qui était devant lui et à ses pieds. La même plaisanterie s’applique à
tous ceux qui passent leur vie à philosopher. Il est certain, en effet, qu’un tel homme ne connaît ni proche, ni voisin ;
il ne sait pas ce qu’ils font, sait à peine si ce sont des hommes ou des créatures d’une autre espèce ; mais qu’est-ce
que peut être l’homme et qu’est-ce qu’une telle nature doit faire ou supporter qui la distingue des autres êtres, voilà
ce qu’il cherche et prend peine à découvrir.

Platon

Texte 3 : La stérilité …

Pour quiconque croit à la science, le pire est que la philosophie ne fournit pas de résultats apodictiques, un savoir
que l’on puisse posséder. Les sciences ont conquis des connaissances certaines qui s’imposent à tous, la
philosophie, elle, malgré l’effort des millénaires n’y a pas réussi […]. En philosophie, il n’y a pas d’unanimité
établissant un savoir définitif. […] nous ne pouvons guère prétendre avoir dépassé Platon, c’est son bagage
scientifique qui est inférieur au nôtre. Pour ce qui est chez lui à proprement parler recherche philosophique, à peine
l’avons-nous peut-être rattrapé.

Karl Jaspers

Texte 4 : … et l’inefficacité du discours philosophique

Alors que nos questions appellent souvent une réponse urgente, précise et opérationnelle, la philosophie nous déçoit
car elle prend son temps et refuse souvent de se prononcer dans l’urgence, donne l’impression de noyer la question
dans des considérations bien plus générales et propose en guise de réponse soit d’autres questions soit des énoncés
subtils en théorie mais inapplicables en pratique.

Stéphane Robillard
Texte 5 : Les préjugés du sens commun sont infondés

La science, dans son achèvement comme dans son principe, s’oppose absolument à l’opinion. S’il lui arrive, sur un
point particulier, de légitimer l’opinion, c’est pour d’autres raisons que celles qui fondent l’opinion ; de sorte que
l’opinion a, en droit, toujours tort. L’opinion pense mal ; elle ne pense pas : elle traduit des besoins en
connaissances. En désignant les objets par leur utilité, elle s’interdit de les connaitre. On ne peut rien fonder sur
l’opinion : il faut d’abord la détruire. Elle est le premier obstacle à surmonter […]. L’esprit scientifique nous interdit
d’avoir une opinion sur des questions que nous ne comprenons pas, sur des questions que nous ne savons pas
formuler clairement.

Gaston Bachelard

Texte 6 : L’incomplétude de la science suscite le besoin de philosopher

La science répond à tant d’anciennes énigmes qu’on finit par attendre d’elle toutes les solutions. Pourtant, en son
état actuel, elle se défend elle-même de toucher à ce qui concerne les fins de l’homme. Elle ne se veut en aucun cas
le substitut de la religion ni de la métaphysique. Son domaine est autre, elle répond au « comment », mais non au
« pourquoi ». Or quelles que soient les connaissances dont il dispose sur le monde et sur sa propre vie, l’homme est
toujours tenté de se demander pourquoi il vit et se résigne difficilement à l’ignorer. Il s’ensuit un sentiment de vide,
générateur d’angoisse, qui semble faire partie de la condition de l’homme moderne. La science n’apporte aucun
élément qui aide l’homme à affronter la mort ou l’idée de la mort, et ce n’est pas son but. Il appartient à chacun de
trouver ce qui peut l’aider à supporter le caractère transitoire de son existence. L’action humaine n’a de sens que si
elle se rattache à des valeurs qui guident les comportements et orientent le choix.

Belloc

Texte 7 : La philosophie n’est donc pas une perte de temps…

Si nous ne voulons pas échouer dans notre tentative pour définir la valeur de la philosophie, il nous faut d’abord
libérer notre esprit des préjugés chers à ceux qu’on appelle à tort les gens « pratiques ». Les gens « pratiques » sont
ceux qui ne connaissent que les besoins matériels, qui savent que l’homme doit nourrir son corps, mais qui comptent
pour rien à la nécessité de nourrir l’esprit. Si tout le monde était riche, si la pauvreté et la maladie avaient pu être
réduites, autant qu’il est possible, il resterait encore beaucoup à faire pour former une société de valeurs : même
dans l’univers tel qu’il est, les biens de l’esprit sont au moins aussi importants que les biens matériels. C’est
exclusivement par les biens de l’esprit que se place la valeur de la philosophie et seuls ceux que ces biens ne laissent
pas indifférents peuvent comprendre que l’étude de la philosophie n’est pas une perte de temps.

Bertrand Russell

Texte 8 : … elle est plutôt une quête du sens de la vie

On ne pourrait demander au philosophe dans le contexte de la bataille du développement de combler les vides avec
des ponts, des machines, des routes bitumées, etc. comme on le demande aux divers ingénieurs. […] s’il y a un
besoin de philosophie, c’est qu’il y a un manque dans la réalité, de l’irréalité dans la réalité, de l’inhumain dans
l’humain […]. C’est à partir du manque que nous discernons dans le réel, que nous philosophons comme pour
résoudre, supprimer, l’insatisfaction née de la prise de conscience de ce manque ou de cette absence. Ebénézer
NJoh-Mouelle

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