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Autorité et respect

Yves Michaud
Université de tous les savoirs au lycée

Université de tous les savoirs juin 2010 ©Yves Michaud


Plan

1) le pouvoir
2) l’autorité
3) autorité et éducation
4) le respect
5) le respect des personnes et le
respect de soi

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1.1. Le pouvoir et ses médiations

 Trois moyens (médiations) du


“le pouvoir = capacité pouvoir
consciente d'exercer une
influence sur le
comportement d'autrui":  Le consensus sur l'autorité: on
est d'accord sur les valeurs,
les fins, les règles, les
 pour le faire agir, procédures, sur qui
commande, etc.
 pour le faire agir
 L'intérêt: on attend un
de telle manière avantage ou on craint un
 ou pour désavantage mais par ailleurs
pas nécessairement accord,
l'empêcher d'agir
 La crainte de la force

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1.2. Consensus, intérêt et contrainte
 Consensus = relation d'autorité (se méfier de l’idée que le
consensus peut fonctionner sans autorité: fantasme de
l’autogestion)
 Intérêt = relation d'incitation
 Contrainte = relation de contrainte

 Chaque relation est affaire de degré


 Chaque relation est présente dans toute situation humaine

Définition d'une situation par trois vecteurs: le vecteur


autorité, le vecteur incitation, le vecteur contrainte.
Exercice pratique: analyser une situation courante dans ses composantes

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1.3. Les faillites du pouvoir
(à titre de contre-épreuve)

 Dévaluation de l'autorité (impuissance)

 Prépondérance de l'incitation (vénalité)

 Gesticulation de la force (menace)

 Crainte d’exercer l’autorité (manque de courage ou de confiance


 en soi)

 Effondrement du pouvoir (an-archie, chaos, autogestion erratique)


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2.1. L'autorité: caractéristiques

 L'importance du groupe : pas de pouvoir sans adhésion d'un groupe.


Même quand un groupe se soumet à une autorité violente, il y a une part
de consentement (servitude volontaire)
 Importance du consensus: on ne rétablit pas l'autorité par la violence
 Importance de la dimension "éthique" de l'autorité
 L'autorité n'est pas la séduction
 L'autorité n'est pas le dialogue
 L'autorité n'est pas l'achat par des biens, faveurs, récompenses,
concessions
 Importance de la dimension hiérarchique de l'autorité: reconnaissance
qu'il faut un "ordre" et des règles. La synergie du groupe, la robustesse de
la communauté

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2.2. Variétés de l'autorité

 L'autorité politique : avoir le pouvoir légitime


 L'autorité religieuse : être dépositaire de la relation au sacré
 L'autorité parentale : avoir engendré et protéger la progéniture
 L'autorité de l'expert : avoir la compétence
 L'autorité du notable : être là depuis longtemps
 L'autorité des Anciens : avoir fondé, être à l'origine de…
 L'autorité du professeur : vouloir et pouvoir éduquer
 L'autorité des people et des marques: être connu et être connu pour
être connu

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2.3 Les sources de l'autorité: les sources
empiriques

Formes et sources de l'autorité Formes correspondantes de la défiance

L'autorité de la tradition et des Ne pas croire dans les usages


coutumes Avoir du soupçon sur la loi
L'autorité légale
L'autorité charismatique (vrai et Se méfier des personnes
faux charismes) Aveuglement à la compétence – ou
L'autorité de la compétence ne pas voir qu'elle est nécessaire dans
tel ou tel cas

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2.4. Les bases théoriques de l'autorité

 Échecs des anciens Grecs pour penser l'autorité (modèle technique, modèle
familial, modèle pastoral, modèle despotique)
 Réussite grecque pour penser l'autorité de la vertu et l'autorité du savoir
 Conception romaine de l'autorité politique: la force du passé et de la fondation.
L'auctoritas romaine: ce qui vient de la fondation et de la tradition et doit être
"augmenté » (augeo-augere) par ceux qui viennent ensuite
 Conception religieuse de l'autorité: l'autorité de Dieu transmise aux hommes et
notamment aux rois et aux papes. Mélange de l'autorité politique et de l'autorité
religieuse.
 Hésitation par la suite entre le sacré politique et une autorité purement humaine.
Locke versus Rousseau

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3.1. Autorité et éducation :
Revenir aux sources de l'autorité

 Sources :  Interrogations
 Le groupe  Le groupe - ses divisions
 La communauté  La communauté et ses
complexités
 La loi et ses critiques
 La loi
 La tradition: quelle tradition?
 La tradition
 La coutume et les usages
 La coutume et les usages
 La compétence
 La compétence
 Le charisme
 Le charisme
 L'organisation de l'action
 L'organisation de l'action

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3.2. L’autorité à l’école face à l’individualisme, à
l’égalité, au conformisme

Les jeunes, l’individualisme et le


conformisme L'égalité: des demandes ambiguës

 Égalité abstraite : les


 Moi et le groupe personnes. Le respect abstrait
 Le conformisme  Égalité différenciée : en
 Les appartenances plurielles tenant compte des
(diversité culturelle et appartenances. Le soin (care)
ethnique)  Égalité dans la liberté et la
conscience. Le respect
 La demande de éthique et exigeant
reconnaissance et la demande
de respect

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4.1. Le respect : une distinction de départ

 Le respect comme mode de comportement : je respecte


l’interdiction de fumer (je ne fume pas), au foot ou au
rugby, je respecte la ligne de touche (je ne passe pas en
touche)
 Le respect comme vécu, attitude et sentiment: j’éprouve
du respect pour mon grand père, pour les lieux de
religion, les lieux d’un terrible accident. Je ressens
quelque chose.

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4.2. Conséquences de la distinction pour les
conduites

 Je respecte des L’obéissance peut avoir


interdictions (code de la plusieurs raisons:
route), des règles (dans un  j’obéis par crainte (il est plus
jeu), des prescriptions fort que moi, je ne veux pas
(respecter la prescription d’amende)
d’un médicament), des  par habitude (j’ai toujours fait
normes (les normes de
ainsi)
bruit, les distances de
sécurité)  parce que ça m’arrange (je
veux continuer à jouer au
 Ça ne veut pas dire
foot)
forcément que j’éprouve le
sentiment de respect mais  parce que j’ai vraiment du
j’obéis, je me conforme. respect
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4.3. Le sentiment de respect

Le sentiment de respect:  Étymologie : verbe latin


Une émotion, un ressenti qui respicere = regarder de
nous fait avoir une attitude nouveau quelque chose,
envers quelqu’un ou quelque s’arrêter sur, regarder mieux
chose - le respect se traduit = prêter une attention forte et
dans le comportement. voir autrement.
 c’est un individu comme un
Quelle attitude? Ne pas traiter autre
par dessous la jambe, ne pas  mais c’est un être humain
rudoyer, faire attention, comme moi et il est vieux et
attacher de la valeur vulnérable
 je le respecte

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4.4. Analyse du sentiment ou de l’attitude de
respect
 Le respect comme sentiment est le propre d’un être humain. Mon chien ne me
respecte pas : il m’obéit. Je n’attends pas du respect de la montagne – elle est
comme elle est
 Ce sentiment suppose un objet « à respecter », parce qu’il le mérite, parce
qu’il a une valeur. Je laisse de côté mon égoïsme, pour me tourner vers l’objet
et me soumettre à lui. Exemples : si je respecte une personne, je vais adapter
mon comportement à elle, faire attention à elle, avoir du soin pour elle, arrêter
de penser à moi d’abord.
 Mais je mets aussi activement quelque chose de moi : je ne suis pas
entièrement dépendant ou passif – j’accorde mon attention à bon escient,
volontairement, parce que j’estime avoir des raisons – normalement je peux
expliquer mon respect. C’est une idiotie de dire : « je respecte mais je ne sais
pas pourquoi »

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4.5. Caractéristiques du respect

 Le respect ne se commande pas subjectivement : il faut que la chose respectée


dirige mon attitude – objectivité (je ne peux pas dire : « je respecte X mais je
ne sais pas pourquoi »)
 Le respect m’impose des contraintes – je dois me conduire « selon la règle du
respect ». Je ne peux dire « je respecte cette femme mais c’est une salope »
 Mes raisons de respecter ne valent pas seulement pour moi – je peux en partie
les expliquer et les faire partager aux autres, ou au moins leur faire
comprendre mon respect. Ex religion.
 Le respect a une certaine universalité : si je respecte une chose pour une
raison, il me sera difficile de ne pas respecter une chose comparable pour la
même raison – sauf si elle comporte des différences trop fortes à d’autres
égards. Je respecte toutes les mères comme ma mère mais qu’en est-il d’une
mère indigne?

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4.6. Pour quelles choses, pour qui a-t-on du
respect ?

 Certaines choses de valeur (les œuvres d’art, les souvenirs, les


monuments, l’espace public)
 La nature en tant qu’elle nous demande de l’attention plutôt que de la
dévastation, des détritus, de la pollution
 Les personnes
 Nous-mêmes comme personnes

NB tout le monde ne sera pas d’accord. Certains disent que seules les
personnes méritent le respect.

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5. 1. Le respect pour les personnes
deux thèses en présence
 Le respect est du à toute  Le respect est du aux
personne, à tout humain personnes en fonction de
parce qu’il est un humain – leur valeur morale et de
parce que c’est un être leurs mérites : il y a donc
rationnel libre, c’est-à-dire des degrés de respect et
une fin en soi qu’on ne doit tout le monde n’a pas le
jamais traiter comme un droit au même respect
moyen. Thèse de Kant

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5.2. Les deux thèses (suite)

 Kant : « Agis de telle manière que  Les personnes doivent être


tu traites l’humanité en toi ou en respectées quand elles sont
autrui toujours comme une fin et respectables
jamais comme un moyen »  selon leur moralité
(Fondements de la métaphysique
des mœurs 1785)  selon le respect qu’elles montrent
envers autrui
 Ici la relation est symétrique:
 selon leur rationalité
 A respecte B et B respecte A dès
lors que A et B sont des personnes  La relation peut être asymétrique et
 Et nécessaire : si A est une elle est contingente : A respecte B
personne, A est nécessairement si B est respectable…
respectable

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5.3. Le respect de soi

 Une personne qui se respecte ne se traite pas comme un moyen,


fait preuve de dignité, assume sa responsabilité.
 Quand une personne ne se respecte-t-elle pas ?
 quand elle s’utilise comme moyen (prostitution)
 Quand elle n’a pas souci de sa dignité (exhibitionnisme de soi)
 Quand elle se laisse aller au lieu de faire preuve de volonté
(faiblesse de la volonté – par rapport au travail, à la drogue, à la
sexualité)

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5.4. Le respect de soi (suite)

 Relation entre respect de soi et respect d’autrui pour soi : pour me


traiter comme une personne, il faut que les autres me traitent comme
une personne – notion de réciprocité et de réassurance en autrui. Celui
qui est méprisé risque de mépriser et surtout de se mépriser. Lien entre
estime, estime de soi et estime de l’autre. Lien entre vulnérabilité et
demande de reconnaissance.
 Le respect de soi n’est rien d’inné : c’est en grande partie un sentiment
auquel nous donne droit la reconnaissance d’autrui: les individus se
respectent d’autant plus que la relation avec autrui leur permet de se
respecter, c’est-à-dire s’ils se sentent respectés.

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Fin

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