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Economie de l’Equité
Édition électronique
URL:http://revues.imist.ma/index.php?journal=rpe&page=article&op=view&pat
h%5B%5D=8625&path%5B%5D=4913
ISSN : 2509-0399
Date de mise en ligne : 28 avril 2017
Pagination : 46-61
Référence électronique
Kartobi, S.E et Aba Oubida, M.A. «Réaction du marché boursier aux décisions de
financement des entreprises marocaines», Revue "Repères et Perspectives Economiques"
[En ligne], 01 / 1er semestre 2017, mis en ligne le 28 avril 2017.
URL:http://revues.imist.ma/index.php?journal=rpe&page=article&op=view&pat
h%5B%5D=8625&path%5B%5D=4913
Réaction du marché boursier aux décisions de financement des entreprises marocaines
L’objectif de cet article est d’évaluer la réaction du marché boursier aux décisions de
financement des entreprises marocaines. Pour ce faire, nous avons mené une étude
d’événement qui a portée sur un échantillon composé de 23 opérations de financement
réalisées, de Janvier 2003 à Décembre 2015, par des entreprises non financières
marocaines cotées à la Bourse de Casablanca (BC). Les résultats obtenus indiquent
que le marché boursier marocain ne réagit pas aux annonces d’augmentations de
capital et d’émissions obligataires et montrent que les informations transmises par les
décisions de financement n’avaient pas de valeur pour les investisseurs marocains.
Abstract
The purpose of this paper is to evaluate the response of the stock market to the
financing decisions of Moroccan companies. To this end, we conducted an event study
that focused on a sample of 23 financing transactions between January 2003 and
December 2015 by non-financial Moroccan companies listed on the Casablanca Stock
Exchange. The results indicate that the Moroccan stock market is not reacting to the
announcements of capital increases and bond issues and show that the information
provided by the financing decisions has no value for Moroccan investors.
Introduction
L’objectif de cet article est d’évaluer la réaction du marché boursier aux décisions de
financement des entreprises marocaines. Notre étude vient enrichir la littérature
existant sur les effets des décisions de financement sur la valeur des firmes des pays en
Cet article est organisé en 4 sections. La première section présente une revue de
littérature empirique sur la relation entre les décisions de financement et la valeur de la
firme, la deuxième section expose la méthodologie adoptée, la troisième section
présente les résultats obtenus et la quatrième section conclut.
Plusieurs études récentes ont vérifié empiriquement la capacité des théories d’agence
et du signal à expliquer la relation entre les décisions de financement et la valeur de la
firme.
Ainsi, Harvey et Al (2004) indiquent, sur la base d’un échantillon de 1014 firmes non
financières cotées en bourse1, que la dette crée de la valeur aux actionnaires des firmes
qui font face à des coûts d’agence élevés. Ainsi, la dette permet d’atténuer la réduction
de la valeur de la firme due au détournement par les dirigeants du free cash flow. Cet
avantage supplémentaire de la dette est plus remarqué dans le cas des entreprises
susceptibles d’avoir des problèmes de surinvestissement liés à des opportunités de
croissance limitées. Ces résultats corroborent les hypothèses de la théorie d’agence. De
même, en utilisant un échantillon d’entreprises françaises appartenant à deux
catégories d’industries2, Margarits et Psillaki (2010) trouvent qu’un endettement élevé
est associé à une meilleure efficacité dans la gestion de la firme, car il permet de
réduire les coûts d’agence. Ils affirment ainsi que les entreprises familiales sont plus
performantes que les entreprises non familiales et que la concentration de la propriété
est généralement associée à un endettement élevé.
1
L’étude a porté sur les firmes de 18 pays émergeants, à savoir l’Argentine, le Brésil, le Chili,
la République Tchèque, Hong Kong, l’Indonésie, Israël, la Malaisie, le Pérou, les Philippines,
le Portugal, Singapore, l’Afrique du sud, la Corée du sud, le Sri Lanka, Taiwan, Thaïlande et
la Turquie.
2
Les industries à forte croissance et celles à faible croissance.
Par ailleurs, plusieurs études récentes ont vérifié empiriquement les prédictions du
modèle de Ross (1977). Ainsi, Eldomiaty (2004) vérifie la théorie du signal dans le
contexte égyptien. Il examine les relations dynamiques entre les changements de la
structure financière et la valeur de marché des firmes en tenant compte des différents
niveaux de risque systématique. Ainsi, il classe les entreprises en trois catégories
suivant leur coefficient de risque systématique. Il trouve que la théorie du signale
explique les variations observées des cours des titres, notamment celles des entreprises
ayant un coefficient de risque systématique élevé. Johnson (1988) obtient le même
résultat et montre que les rendements excessifs des actions ordinaires sont
négativement corrélés avec les réductions d’emprunt. Markopoulou et Papadopoulous
(2009) vérifient empiriquement la théorie du signal en examinant la réaction des cours
boursiers aux annonces de 13 augmentations de capital en se basant sur un échantillon
d’entreprises cotées à la bourse d’Athènes et ayant émis des titres durant la période
2004-20063. Ils obtiennent des résultats contradictoires aux prédictions de Ross
(1977). En effet, souvent, l’augmentation de capital n’est pas perçue comme un signal
négatif par le marché et par conséquent le cours d’une action ne baisse pas suite à une
émission de fonds propres. Cependant, les auteurs soulignent que ce résultat peut
s’expliquer par le fait que l’échantillon d’entreprises contient des banques
caractérisées par une forte capitalisation boursière et ayant une bonne réputation
auprès des investisseurs4.
D’autres études se sont basées sur le modèle de Ross (1977) pour mettre en évidence
l’importance des signaux dans les relations de financement des firmes avec leurs
différents partenaires. Ainsi, Campbell (1979) propose aux entreprises qui disposent
d’informations internes difficiles à diffuser au marché, de révéler ces informations aux
banques sans les révéler aux concurrents grâce à des relations de clientèle privilégiées.
Dans ce cas, Campbell et Kracaw (1980) avancent que les banques financent les
projets à terme, ce qui est profitable aux anciens actionnaires. Poitevin (1989)
3
Cette période est marquée par des conditions économiques favorables à l’investissement, en
raison des jeux olympiques en 2004.
4
Une augmentation de capital ne transmet pas un signal négatif car les investisseurs estiment
que les banques émettrices de titres de propriété sont des firmes de bonne qualité.
2. Méthodologie
2.1 Echantillon
Les annonces de décisions de financement traitées dans cet article sont les
augmentations de capital par apport en numéraire et les émissions d’emprunts
obligataires. Nous n’avons pas traité les annonces d’emprunts bancaires car ils ne font
pas l’objet d’une note d’information obligatoire et par conséquent il existe une
incertitude sur leurs dates d’annonce. Ainsi, les notes relatives à des augmentations de
capital à l’occasion des introductions en bourse ont été écartées car nous ne disposons
pas de l’historique des cours pour pouvoir estimer la rentabilité théorique des titres
lors de l’introduction en bourse. Aussi, nous avons éliminé les annonces des
entreprises financières ainsi que celles des sociétés de portefeuille pour retenir un
échantillon initial composé de 37 annonces, 14 relatives à des augmentations de capital
par apport en numéraire et 23 relatives à des emprunts obligataires. Les tableaux 1 et 2
décrivent le nombre et le volume de ces opérations de financement réalisées par des
sociétés non financières (SNF) marocaines.
5
Harris et Raviv (1991) soutiennent ce résultat même si la part du capital détenue par le
dirigeant reste le signal privilégié par les investisseurs.
2003 0 0 0,000
2004 0 0 0,000
2005 1 1034,7 1,000
2006 1 4,25 1,000
2007 2 2346,48 1,000
2008 0 0 0,000
2009 0 0 0,000
2010 1 2992,5 0,500
2011 4 1207,5 0,372
2012 0 0 0,000
2013 1 1950 0,015
2014 2 211,5 0,037
2015 2 21,3 0,196
Source : élaboré à partir des rapports de la BC
Nous remarquons que les entreprises non financières marocaines cotées en bourse ne
recourent que très rarement à des augmentations de capital par apport en numéraire. En
effet, sur la période 2003-2015, celles-ci n’ont procédé qu’à 14 opérations
d’augmentation de capital. Ainsi, parmi les opérations d’augmentation de capital
figure une opération réalisée en 2006pour se conformer à la réglementation et remplir
les conditions de séjour à la cote. Nous l’avons alors écarté de l’analyse. De même, les
cours boursiers relatifs à trois sociétés de l’échantillon n’étaient pas disponibles sur le
site de la BC au moment de la collecte des données. Nous avons alors éliminé les
opérations réalisées par celles-ci.
Tableau 2 : Les annonces de dettes obligataires par les SNF marocaines cotées de
Janvier 2003 à Décembre 2015
Nous remarquons que l’année 2010 a été marquée par un pic d’émissions obligataires
des sociétés non financières. Ainsi, parmi ces émissions figurent une opération réalisée
par une entreprise avant qu’elle soit cotée en bourse. Nous l’avons alors éliminé de
l’échantillon car nous ne disposons pas de l’historique des cours pour pouvoir estimer
les rentabilités théoriques durant la période d’événement. Ensuite, nous avons éliminé
deux autres annonces relatives à des opérations qui ont coïncidé avec l’annonce
d’autres événements. Enfin, nous avons écarté sept autres annonces en raison de la
non-disponibilité des données boursières relatives aux entreprises concernées par ces
émissions.
Afin de tester la réaction du marché boursier marocain aux annonces des décisions de
financement des entreprises non financières, nous utiliserons la méthodologie de
l’étude d’événements. La première étape consiste à définir les paramètres constitués
par l’événement, la période d’étude et la date d’annonce. Cette première étape est la
plus importante dans la mesure où toute erreur au niveau de l’identification des
paramètres conduit à une interprétation faussée des résultats6. La deuxième étape,
quant à elle, consiste à calculer les rentabilités anormales des actions des entreprises
ayant annoncé des décisions de financement. La dernière étape consiste à faire des
tests sur la « significativité » des rentabilités anormales.
L’impact d’une annonce sur le cours boursier est mesuré par la différence entre la
rentabilité du titre et une norme. Cette norme représente la rentabilité du titre sans
6
Par exemple, si l’annonce d’une décision de financement coïncide avec la divulgation d’une
autre information, les investisseurs pourront réagir à cette information et non pas à l’annonce
de la décision de financement. Dans ce cas, l’interprétation des résultats sera faussée.
7
Si la date d’événement retenue est ultérieure à la vraie date, le marché aura déjà incorporé
toute l’information et les résultats seront biaisés.
Où
RAit est la rentabilité anormale du titre i à la période t, ROit est la rentabilité observée
du titre i à la période t (log (ROit /ROit−1 ) – 1) et
RTit est la rentabilité normale (prédit par le modèle de marché) du titre i à la période 𝑡.
Notons à ce niveau que plusieurs autres modèles (le modèle d’équilibre des actifs
financiers, le modèle par arbitrage, le modèle ajusté au rendement de marché) peuvent
être utilisés pour l’estimation des rentabilités théoriques. Nous avons retenu le modèle
de marché car il permet d’aboutir aux mêmes résultats des autres modèles, notamment
sur une courte période. Ainsi, nous avons estimé les paramètres du modèle de marché
(la pente et la constante) sur une période de 120 jours, appelée « fenêtre
d’estimation ». Nous avons retenu le rendement de l’indice MASI comme variable
explicative de la rentabilité prévue d’un titre.
Après avoir calculé les rentabilités anormales pour chacun des titres composant
l’échantillon, nous calculons leur moyenne à chaque date de la période d’événement.
Ensuite, nous testons leur significativité à partir de deux méthodes différentes. La
première méthode est celle de l’écart type en série temporelle (M1) qui consiste à
𝑅𝐴𝑀𝑡
Tc = (2)
𝑆𝐸(𝑅𝐴𝑀𝑡 )
Où 𝑅𝐴𝑀𝑡 est la rentabilité anormale moyenne des titres composant l’échantillon à une
période 𝑡 de la fenêtre d’événement, 𝑆𝐸(𝑅𝐴𝑀𝑡 ) est l’écart type de la rentabilité
anormale moyenne à la période 𝑡. Le test de la « significativité » des rentabilités
anormales moyennes nous permettra d’évaluer l’impact des décisions de financement
pour un jour donné, à une distance de la date d’événement. En outre, afin d’évaluer
l’effet global de l’événement jusqu’à la date de sa fin, nous devons tester la
« significativité » des rentabilités anormales moyennes cumulées. Dans ce cas, la
statistique de Student se présente ainsi :
𝑅𝐴𝑀𝐶
M1 : Tc = (3)
𝑆𝐸(𝑅𝐴𝑀𝐶)
√𝑛∗𝑅𝐴𝑀𝐶
M2 : Tc = (4)
𝑆𝐸(𝑅𝐴𝑀𝐶)
3. Résultats
l’écart type en série temporelle seront présentés. La méthode de l’écart type en coupe
instantanée fournit presque les mêmes résultats.
j_0 j_1 j_2 j_3 j_4 j_5 j_6 j_7 j_8 j_9 j_10 j_11 j_12
0,01
0
-0,01
-0,02
-0,03
-0,04
-0,05
RAM RAMC
j_0 j_1 j_2 j_3 j_4 j_5 j_6 j_7 j_8 j_9 j_10 j_11 j_12
0,012000
0,010000
0,008000
0,006000
0,004000
0,002000
0,000000
-0,002000
-0,004000
-0,006000
-0,008000
-0,010000
RAM RAMC
Les résultats obtenus laissent penser sur l’ensemble de la période d’événement que les
cours boursiers des entreprises réagissent aux annonces d’émissions obligataires. Or,
comme on peut le constater au tableau n°5, cette réaction n’est pas due à l’annonce des
émissions obligataires car la rentabilité anormale moyenne cumulée n’est significative
sur aucune date de la période d’événement. Ce même résultat est obtenu par la
méthode de l’écart type en coupe instantané. Ceci peut s’expliquer par le fait que les
informations transmises par les décisions d’emprunts obligataires n’auraient pas de
valeur pour les investisseurs marocains. Il s’ensuit que les cours des titres n’intègrent
pas ces informations.
Ecart-
Périodes RAMC type Tc
-
j_0 -0,000138 0,105168 0,001310
j_1 0,008192 0,105168 0,077898
j_2 0,002158 0,105168 0,020522
j_3 0,007299 0,105168 0,069402
-
j_4 -0,000617 0,105168 0,005864
j_5 0,002711 0,105168 0,025774
j_6 0,006082 0,105168 0,057828
j_7 0,007019 0,105168 0,066743
j_8 0,005564 0,105168 0,052910
j_9 0,008814 0,105168 0,083808
j_10 0,010115 0,105168 0,096179
j_11 0,009618 0,105168 0,091452
j_12 0,004609 0,105168 0,043826
Source : élaboré par les auteurs
4. Conclusion
Pour évaluer la réaction du marché boursier aux décisions de financement, nous nous
sommes basés sur la méthodologie de l’étude d’événement appliquée à un échantillon
composé de 23 opérations de financement réalisées par les entreprises non financières
marocaines de Janvier 2003 à Décembre 2015. Les résultats de l’étude montrent que
quelle que soit la nature de la décision de financement, emprunt obligataire ou
augmentation de capital, les cours boursiers ne varient pas significativement suite aux
annonces de ces opérations de financement. Ceci montre que les investisseurs
BIBLIOGRAPHIE
JENSEN, M. 1986. “Agency costs of free cash flow, corporate finance and
takeovers”.American Economic Review. pp. 323-329.
JOHNSON, B W. 1988. “Debt refunding and shareholder wealth: The price effects of
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