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La procédure de sauvegarde pour

les entreprises en difficultés :


de l'application d'une procédure
collective à une réelle
opportunité pour le chef
d'entreprise et
l'expert-comptable

LORIAUX, Valentin

Novembre 2018
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Ref : 139802
-2-
Synthèse

En France chaque année, près de deux tiers des ouvertures de


procédures collectives correspondent à des liquidations judiciaires. Ce
constat relève principalement du manque d’anticipation notoire de la
détection des difficultés de l’entreprise et du manque de rapidité d’action
du traitement de ces dernières.

La loi de sauvegarde du 26 juillet 2005, améliorée respectivement par la


suite en 2008 et 2014 en vue d’augmenter l’attractivité de sa mesure
principale, à savoir la procédure de sauvegarde ; ne semble aujourd’hui
pas assez utilisée. L’objectif visé demeurant pourtant la poursuite de
l’activité économique, le maintien de l’emploi et l’apurement du passif.
Véritable procédure préventive, elle se veut protectrice du débiteur et
efficace dans les statistiques. L’histoire nous a démontré depuis l’ancien
droit romain, une tout autre approche appliquée envers le failli ; alliant
barbarie, primitivisme et peine de mort. La distinction entre les débiteurs
honnêtes et frauduleux apparue à la Renaissance. La faillite ne fût quant à
elle encadrée d’un système judiciaire qu’en 1807, avec le Code de
commerce. Un distinguo entre le sort de l’homme et celui de son
entreprise fût enfin érigé avant d’aboutir à la procédure de sauvegarde
elle-même, visant le redressement de l’entreprise.

La procédure de sauvegarde, de par son utilisation simplifiée, se veut être


préventive, parfois même curative. Permettant une réorganisation de
l’entreprise et offrant un encadrement judiciaire privilégié, elle s’applique
avant l’état de cessation des paiements. Le chef d’entreprise et son
expert-comptable, travaillant conjointement dès la mise en place de la
procédure, peuvent en retirer des opportunités respectives. Le dirigeant
reste en effet maître de son entreprise par la poursuite de son activité. Et
à l’appui des conseils avisés de son expert-comptable, opère les
réaménagements nécessaires à sa sauvegarde. Il bénéficie du gel du

-3-
0 Chapitre 1 - Le traitement des entreprises en difficulté : 2500 ans d’histoire

passif, du maintien des contrats en cours, d’un arrêt du cours des intérêts,
d’une interdiction des

-4-
inscriptions et de la non activation des cautions. Selon les statistiques, il
s’avère que les entreprises entrées en procédure de sauvegarde ont deux
fois plus de chance de tenir un plan de remboursement, 53% contre 27 %
pour celles en redressements judiciaires. Il est ainsi primordial de
considérer le rôle essentiel de prévention, d’alerte et de conseil que les
experts-comptables jouent auprès de leurs clients, à savoir les entreprises
en difficulté.

L’expert-comptable voit sa mission première d’établissement des comptes


annuels ainsi complétée par une nouvelle mission à part entière
d’accompagnement et de prévention des entreprises en difficulté,
valorisante par ses attributions. L’expert-comptable est un soutien
considérable de son client, tant par les différents travaux fournis que par
les conseils avisés apportés à son client tout au long de la procédure de
sauvegarde. Son aide est précieuse, et notre cas pratique illustre
l’importance notable de l’expert-comptable à l’étape des propositions de
plan. Il demeure l’interlocuteur privilégié de son client. Son rôle est
représenté par la détection, l’analyse et le traitement des difficultés
rencontrées par les entreprises. Pour agir au mieux dans l’intérêt du client,
une véritable synergie est formée entre l’expert-comptable, le Tribunal de
commerce, les organes adjacents et les avocats.
En 2017, nous dénombrons plus de 55 000 défaillances dont 53 000
concernent les entreprises de moins de 1.5 millions de chiffres d’affaires
et de moins de 20 salariés. C’est ainsi le cœur de clientèle des cabinets
d’expertise-comptable qui est concerné. Il incombe donc aux experts-
comptables et à leurs collaborateurs de se former, d’anticiper les
difficultés rencontrées par leurs clients dans le but de les aider à sauver
leurs entreprises et ce par la procédure de sauvegarde.
En retour, l’expert-comptable bénéficie d’une reconnaissance certaine de
son client et peut envisager une perspective de recommandation qualifiée.
Autant d’éléments qui valorisent et font tout l’intérêt du métier d’expert-
comptable.

-5-
SOMMAIRE

Introduction ........................................................................................ - 13 -

PARTIE I - L’HISTOIRE DE NOS COMPORTEMENTS FACE AUX


ENTREPRISES EN DIFFICULTE : D’UNE BARBARIE A LA MISE EN
PLACE DE LA LOI DE SAUVEGARDE .............................................. - 18 -

Chapitre 1 - Le traitement des entreprises en difficulté : 2500 ans


d’histoire - 18 -

A – De l’époque romaine à l’ordonnance de Colbert en 1673 :


primitivisme, affinement du droit et première codification du droit
commercial ................................................................................... - 18 -

1. La « manus injectio » ....................................................... - 18 -

2. La « missio in possessionem » ........................................ - 18 -

3. Au Moyen-Âge : début de l’affinement du droit ................ - 19 -

4. L’ordonnance de Colbert en 1673 : première règlementation


en droit de la faillite ................................................................... - 20 -

B – Du Code de commerce au décret du 20 Mai 1955 : sanctions,


répression du failli, et interdiction d’exercer le commerce ............ - 20 -

1. Le Code de commerce et le failli ...................................... - 20 -

2. L’adoucissement de la législation ..................................... - 21 -

3. La naissance de la liquidation judiciaire ........................... - 22 -

4. Le décret controversé du 20 Mai 1955 ............................. - 22 -

C – D’un constat de faillite à la volonté de protection : les prémices de


la loi de sauvegarde ...................................................................... - 23 -

1. Suppression de l’idée de faillite : distinguo entre le sort de


l’homme et celui de son entreprise ............................................ - 23 -

2. La Loi du 25 Janvier 1985 : naissance du mot « sauvegarde »


et protection de l’entreprise ....................................................... - 24 -

-6-
3. Loi du 10 Juin 1994 : moralisation des plans de cession . - 25 -

4. La Loi de Sauvegarde des entreprises du 26 juillet 2005 - 26 -

D – Evolution de la loi : nouvelles réformes depuis 2005 ............. - 27 -

1. Les améliorations de la loi ............................................... - 27 -

2. La sauvegarde financière accélérée ................................ - 29 -

3. La procédure de sauvegarde accélérée .......................... - 29 -

Chapitre 2 - La loi de sauvegarde et ses dispositions : environnement,


contexte d’application et cas pratique dans une société de négoce en
difficulté autour d’une procédure de sauvegarde ............................. - 31 -

A – La détection des difficultés et les points de vigilance ............. - 31 -

1. L’anticipation .................................................................... - 31 -

2. La détection et la nature des défaillances........................ - 32 -

3. Le diagnostic.................................................................... - 33 -

B – La justification de l’échec et/ou de l’impasse du mandat Ad Hoc et


de la conciliation ........................................................................... - 34 -

1. Le mandat Ad Hoc et son champ d’application ................ - 34 -

2. La conciliation .................................................................. - 35 -

3. Constat de ces deux mesures préventives ...................... - 36 -

C – La nécessité d’agir avant la cessation des paiements ........... - 37 -

1. Explication d’une limite à ne pas franchir ......................... - 37 -

2. Définition de l’état de cessation des paiements et la méthode


de calcul ................................................................................... - 38 -

3. Quand la conciliation mène à la Sauvegarde .................. - 39 -

D – Cas pratique d’une procédure de sauvegarde dans une société


de négoce en difficulté et mise en relief du rôle de l’expert-comptable .
..................................................................................................... - 40 -

-7-
1. Etape 1 : Les difficultés rencontrées et la situation avec
l’expert-comptable ..................................................................... - 40 -

2. Etape 2 : La négociation avec le fournisseur principal ..... - 41 -

3. Etape 3 : L’évidence du choix de la sauvegarde pour le


professionnel de l’expertise comptable et son client ................. - 42 -

Chapitre 3 - Mise en place de la procédure de sauvegarde .......... - 43 -

A – L’ouverture de la procédure.................................................... - 43 -

1. Les conditions requises .................................................... - 43 -

2. Le dépôt de la demande................................................... - 44 -

3. La direction de l’entreprise : les changements et les rôles


concrets du client et de son expert-comptable .......................... - 45 -

B – La période d’observation et ses objectifs................................ - 46 -

1. La durée de la période d’observation et les différentes étapes


......................................................................................... - 46 -

2. Les conséquences de la période ...................................... - 47 -

3. Les intervenants à la situation .......................................... - 48 -

4. Les éléments à fournir ...................................................... - 49 -

C – Le plan de sauvegarde et ses effets ...................................... - 49 -

1. Le projet de plan............................................................... - 49 -

2. L’adoption du plan et ses conséquences : le client et l’expert-


comptable en soutien mutuel .................................................... - 51 -

3. L’exécution du plan .......................................................... - 51 -

D – Les créanciers ........................................................................ - 52 -

1. Les différentes typologies de créances ............................ - 52 -

2. Les déclarations de créances ........................................... - 54 -

3. Les salariés ...................................................................... - 55 -

Conclusion ................................................................................... - 57 -

-8-
PARTIE II - COMMENT LA PROCEDURE DE SAUVEGARDE POUR
UNE ENTREPRISE EN DIFFICULTE PEUT REVELER OPPORTUNITES
ET AVANTAGES AU CHEF D’ENTREPRISE MIS A MAL ? ............ - 58 -

Chapitre 1 - Une véritable seconde chance pour le dirigeant et son


entreprise en difficulté ...................................................................... - 58 -

A – La réorganisation de l’entreprise ............................................ - 58 -

1. La restructuration de l’actif ............................................... - 58 -

2. Le réaménagement du passif .......................................... - 59 -

3. La nécessité de repenser le modèle économique............ - 60 -

4. La poursuite de l’activité .................................................. - 61 -

B – Les salariés............................................................................ - 62 -

1. L’importance de faire un bilan social................................ - 62 -

2. Le besoin d’une communication claire ............................. - 62 -

3. Un nouvel élan ................................................................. - 63 -

C – Le maintien des contrats en cours ......................................... - 63 -

1. Les contrats avec les partenaires financiers .................... - 63 -

2. Les engagements avec les fournisseurs.......................... - 64 -

3. L’entente avec le bailleur ................................................. - 65 -

Chapitre 2 - Le sort des créanciers et les avantages financiers de la


mesure .................................................................................. - 66 -

A – Le gel du passif et ses conséquences ................................... - 66 -

1. Les effets immédiats sur la trésorerie .............................. - 66 -

2. L’information des créanciers partenaires ......................... - 68 -

B – Les manquements des créanciers ......................................... - 68 -

1. Au niveau des déclarations des créances ....................... - 68 -

2. Vis-à-vis de la proposition du plan ................................... - 69 -

C – Le plan de sauvegarde .......................................................... - 72 -

-9-
1. L’adaptation du plan aux perspectives économiques ....... - 72 -

2. Les propositions de plan .................................................. - 74 -

D – La suspension des actions engagées contre l’entreprise ....... - 75 -

1. L’arrêt du cours des intérêts ............................................. - 75 -

2. Les cautions ..................................................................... - 76 -

3. L’Interdiction des inscriptions ........................................... - 77 -

4. L’interdiction des paiements ............................................. - 77 -

Chapitre 3 - Autre opportunité pour le chef d’entreprise : la cession


possible de l’entreprise en sauvegarde avec certains atouts ........... - 79 -

A – Les effets positifs de la restructuration ................................... - 79 -

1. Une entreprise réglée ....................................................... - 79 -

2. Une meilleure valorisation ................................................ - 80 -

B - Un repreneur averti ................................................................. - 81 -

1. La garantie de passif ........................................................ - 81 -

2. Un outil de production maîtrisé ......................................... - 81 -

3. Une rentabilité encadrée .................................................. - 81 -

Conclusion ................................................................................... - 83 -

PARTIE III - RÔLES ET OPPORTUNITES DE L’EXPERT-


COMPTABLE FACE AUX ENTREPRISES EN DIFFICULTE, DANS LE
CADRE DE LA PROCEDURE DE SAUVEGARDE ............................ - 84 -

Chapitre 1 - Devoir de conseil, missions de prévention et


d’accompagnement de l’entreprise en difficulté................................ - 84 -

A – L’expert-comptable et son obligation d’information ................ - 84 -

1. Les enjeux du devoir de conseil, pilier d’une relation client


protégée .................................................................................... - 84 -

2. Le suivi régulier de la situation économique de l’entreprise .....


......................................................................................... - 85 -

- 10
-
3. Une communication éclairée des incidences d’une procédure
collective ................................................................................... - 86 -

4. L’étude personnalisée des mesures préventives ............. - 87 -

B – Mission prévention : nouvelle fonction pour le professionnel de


l’expertise comptable.................................................................... - 88 -

1. L’anticipation et le suivi de l’entreprise ............................ - 88 -

2. Les points d’alertes et la détection des difficultés ............ - 89 -

3. Une analyse avertie des difficultés .................................. - 90 -

C – Mission complémentaire à la production des comptes annuels :


l’accompagnement de l’entreprise en difficulté par l’expert-comptable .
..................................................................................................... - 90 -

1. Présentation de la mission et ses limites ......................... - 90 -

2. Une préparation étayée de la procédure de sauvegarde . - 91 -

3. Accompagnement pendant la période d’observation ....... - 92 -

Chapitre 2 - L’expert-comptable : un partenaire de premier plan des


institutions .................................................................................. - 94 -

A – Une interprofessionnalité appréciée....................................... - 94 -

1. Avec le Tribunal de Commerce et les organes adjacents - 94 -

2. Synergie entre les métiers ............................................... - 95 -

B – Interviews des partenaires du droit : Que pensent-ils de la


procédure de sauvegarde ? Comment perçoivent-ils l’expert-
comptable face à une entreprise en difficulté ? ............................ - 96 -

1. Le greffier du Tribunal de commerce ............................... - 96 -

2. Le juge commissaire ........................................................ - 98 -

3. L’avocat ........................................................................... - 99 -

C – Reportage au sein de la profession d’expertise-comptable . - 100 -

1. La position de l’Ordre des Experts-Comptables............. - 100 -

- 11
-
2. Les expériences du professionnel de l’expertise-comptable ....
....................................................................................... - 101 -

Chapitre 3 - Elargissement du spectre de facturation .................. - 103 -

A – Une mission à part entière dès les travaux préparatifs ......... - 103 -

1. Les outils de la prévention.............................................. - 103 -

2. Être partenaire de la négociation avec les créanciers .... - 104 -

3. L’élaboration de la demande d’ouverture de la procédure


collective ................................................................................. - 105 -

B – Des honoraires encadrés pour les travaux fournis au cours de la


procédure de sauvegarde ........................................................... - 106 -

1. L’étape des prévisionnels ............................................... - 106 -

2. Les situations intermédiaires .......................................... - 107 -

3. Le projet de plan............................................................. - 107 -

C – Comment instaurer cette mission au sein d’un cabinet d’expertise


comptable ................................................................................... - 108 -

1. En développant les outils ............................................... - 108 -

2. En informant et formant les collaborateurs ..................... - 112 -

3. L’objectif « recommandation clients » de la démarche ... - 113 -

4. Un marché potentiel : quelques chiffres clés .................. - 114 -

Conclusion ................................................................................. - 118 -

CONCLUSION GENERALE .............................................................. - 119 -

BIBLIOGRAPHIE .............................................................................. - 121 -

ANNEXES.......................................................................................... - 125 -

- 12
-
Introduction

« La mesure ultime d’un homme n’est pas où il se situe dans les moments
de confort, mais où il se situe dans les moments de challenge et de
controverse » Martin Luther King. Dans une économie en constante
mouvance, nous pouvons transposer cette citation et l’illustrer par une
entreprise en difficulté, qui doit être pilotée par un dirigeant courageux,
afin d’anticiper et de surmonter les éventuelles défaillances à venir. Le
mémoire présente le sujet suivant : La procédure de sauvegarde pour les
entreprises en difficulté : de l’application d’une procédure collective à une
réelle opportunité pour le chef d’entreprise et l’expert-comptable.

L’entreprise en difficulté fait partie intégrante de la clientèle des cabinets


d’expertise-comptable. En effet chaque année en France, nous
dénombrons près de 60 000 défaillances d’entreprises. Plus de 90%
d’entre elles concernent de Très Petites Entreprises (TPE), cœur de
clientèle des professionnels de l’expertise comptable. Il devient ainsi
légitime de se questionner. Comment à notre niveau les accompagner ?
Comment les aider ? Pouvons-nous anticiper ces difficultés ? L’expert-
comptable, bénéficiant du statut de premier partenaire de confiance de
son client ; et ce parfois même depuis plusieurs générations au sein d’une
même famille ; semble le mieux placé pour analyser, décrypter et détecter
en amont les difficultés qui pourraient survenir. Souvent économiques, ces
dernières peuvent également aujourd’hui résulter de bien d’autres
facteurs ; tels que la perte d’un marché conséquent, un climat social
difficile, le secteur d’activité en déclin, une politique fiscale changeante, ou
encore un contexte environnemental bouleversé etc...

L’expert-comptable est ainsi présent pour accompagner et guider son


client, en tout état de cause de la conjoncture. Constat d’autant plus
important quand nous observons en parallèle l’évolution et la
recrudescence des ouvertures de procédures collectives depuis 1998.

- 13
-
Les procédures collectives sont les solutions, ou parfois les
conséquences, qui son
sont à la disposition du chef d’entreprise pour faire
face à ses difficultés. Nous avons ici choisi d’expliquer les caractéristiques
et les divers attraits de la procédure de sauvegarde instaurée par la loi du
26 juillet 2005. Outre les procédures amiables que sont le mandat Ad Hoc
et la conciliation ; la procédure de sauvegarde se révèle être une
procédure collective préventive, parfois même curative pour l’entreprise.
Partie intégrante de la loi de sauvegarde de juillet 2005 dans le traitement
des difficultés d’entreprise ; elle fût à plusieurs reprises retouchée en
2008, 2014 et 2015 dans un objectif de plus grande attractivité pour les
chefs d’entreprise en difficulté. Véritable second souffle pour
l’entrepreneur malchanceux, cette procédure va en effet lui octroyer
certains avantages. Agir avant la cessation de
des paiements reste la
condition indispensable à sa mise en place.
Ce sujet démontrera la faculté de pouvoir sortir d’une situation négative et
difficile, par la volonté d’œuvrer ensemble, dans le respect des règles et
contraintes imposées par la loi de sauvegarde,
auvegarde, avec l’appui des instances
et de l’expert-comptable.
comptable.
Le premier axe de ce mémoire s’appuie sur l’histoire des entreprises en
difficulté et nos comportements face à celles
celles-ci.
ci. L’expression « être clouer
au pilori » n’est aujourd’hui plus d’actualité ; nos comportements face aux
dirigeants et aux entreprises e
enn difficulté ont changé. La législation a

- 14
-
fortement évolué. Il est donc important de comprendre cette évolution et
ce nouvel équilibre entre les différents acteurs dénommés : débiteur,
créanciers et intervenants de la procédure. Ce premier axe aboutira à la
notion de protection du dirigeant et de son entreprise avec la procédure de
sauvegarde. Il sera appuyé par un cas client, vécu par le cabinet, dans
une société de négoce de pièces automobiles en difficulté. Ce cas
pratique exposera les étapes préalables au choix de l’ouverture d’une
procédure de sauvegarde, ainsi que son contexte de mise en place et
l’accompagnement de l’expert-comptable.
A l’issue de cette partie, le lecteur aura appréhendé les enjeux et les défis
de cette loi auxquels les professionnels de l’expertise comptable sont
confrontés.

La seconde orientation de ce mémoire consistera à révéler les


opportunités et les avantages de la procédure de sauvegarde pour le
dirigeant d’une entreprise en difficulté. Que permet concrètement ce
dispositif ? Comment un contexte financier perturbé et la sollicitation
publique d’organes de justice peuvent laisser présager une opportunité
pour le chef d’entreprise ? Cette deuxième partie se concentrera sur une
vision « débiteur » des points clés de la procédure, et des différents
avantages étayés de la sauvegarde pour le dirigeant et son entreprise. Le
cas client de la société de négoce en difficulté mettra notamment en
lumière l’importance à attacher à la préparation des propositions de plan,
avec l’aide des différents conseils dont il dispose. A savoir l’expert-
comptable, l’administrateur si désigné et l’avocat. Sous la protection du
Tribunal de Commerce, le chef d’entreprise va tenter de sauver et de
sauvegarder son entreprise, donc ses emplois. La vigilance du dirigeant
de l’entreprise et à la fois celle de l’expert-comptable sont donc cruciales.
La seule issue possible, une fois la cessation des paiements avérée, est la
procédure de redressement. Cette dernière implique une différence
notable : la mise en exécution des cautions. Le dirigeant d’une entreprise
en difficulté et endettée pourrait être financièrement impacté et mis à mal.
Enfin, au regard du pourcentage de liquidations judiciaires sur la totalité
des défaillances d’entreprises, près de

- 15
-
67,6% ; l’état de cessation des paiements n’est-il pas à lui seul l’indicateur
principal de la liquidation future de l’entreprise ?
Nous ne développerons pas dans ce mémoire les deux autres procédures
collectives que sont le redressement et la liquidation. Afin de pouvoir
mettre en avant les caractéristiques de la procédure de sauvegarde, nous
serons cependant amenés à comparer certains aspects.

Enfin, la troisième partie de ce mémoire permettra de mettre en lumière le


rôle clé du professionnel de l’expertise comptable face aux entreprises en
difficulté, et notamment dans le cadre d’une procédure de sauvegarde.
Nous présenterons également les opportunités qu’il pourra faire ressortir
dans ce contexte. En tant que partenaire de proximité du chef d’entreprise
et par l’étroite relation de confiance qui les lie, l’expert-comptable est sans
nul doute le professionnel le mieux placé pour déceler et détecter en
amont la survenance de difficultés ou les difficultés avérées de son client.
Pour cela, il lui incombe de mettre en place des indicateurs dédiés à
l’environnement de l’entreprise qu’il suit. Son rôle majeur et son
accompagnement dans ce contexte constituent désormais une réelle
mission à part entière, valorisante et originale par ses attributions.
L’expert-comptable, amené à fournir de nombreux travaux spécifiques,
voit sa mission première de présentation des comptes annuels ainsi
dépassée par une mission complémentaire et facturable, source
d’honoraires supplémentaires pour la profession. La transposition de cette
mission à travers l’ensemble des collaborateurs des cabinets d’expertise
comptable par la formation et la mise en place d’outils dédiés sera
démontrée, tout comme l’effet cliquet de la recommandation client. Notre
cas pratique illustrera cette démarche. Enfin, l’interprofessionnalité de
l’expert-comptable avec le Tribunal de commerce, les organes adjacents
et les avocats sera mise en valeur par le travail d’équipe qui s’opère
autour du dirigeant et de son entreprise en difficulté.

Par ce mémoire, nous souhaitons donc mettre l’accent sur l’anticipation et


la prévention des difficultés d’entreprise et ainsi aider à inverser une
tendance avérée : seulement 3% en moyenne des entreprises défaillantes

- 16
-
entrent en procédure de sauvegarde, contre 67% en liquidation judiciaire
directe.

- 17
-
PARTIE I - Chapitre 1 - Le traitement des entreprises en difficulté : 2500 ans d’histoire

PARTIE I - L’HISTOIRE DE NOS COMPORTEMENTS FACE AUX


ENTREPRISES EN DIFFICULTE : D’UNE BARBARIE A LA MISE EN
PLACE DE LA LOI DE SAUVEGARDE

Chapitre 1 - Le traitement des entreprises en difficulté : 2500 ans


d’histoire

A – De l’époque romaine à l’ordonnance de Colbert en 1673 : primitivisme,


affinement du droit et première codification du droit commercial

1. La « manus injectio »
Sous l’ancien droit romain (450 av. J.C.), le traitement d’un débiteur
défaillant relevait d’une procédure expéditive appelée la « manus
injectio ». Véritable voie d’exécution collective contre un débiteur qui
n’avait pas exécuté son engagement, elle autorisait de plein droit le
créancier à saisir la personne même du débiteur. Le créancier pouvait
ainsi en disposer, le forcer à comparaître devant un prêteur, ou en toute
légalité, le réduire à l’esclavage, le vendre ou encore le tuer.
Cette procédure, issue de la loi des XII Tables, entrainait la saisie du
patrimoine du débiteur en son ensemble, et ce publiquement. La notion de
démonstration avec ostentation était de rigueur.

2. La « missio in possessionem »
Dans une deuxième étape du droit romain s’inscrit la « missio in
possessionem » ; signifiant littéralement « l’envoi en possession ». Dans
sa notion simple, la « possessio » équivalait à une détention purement
matérielle. Les créanciers n’étaient plus tenus de saisir la personne du
débiteur, ils s’attaquaient désormais à sa fortune et ses biens. C’était
l’apparition de la notion de dessaisissement. A un second degré, la mise
en possession apparaît également comme un moyen de pression contre
celui qui refusait de se soumettre à l’injonction du magistrat.

- 18 -
PARTIE I - Chapitre 1 - Le traitement des entreprises en difficulté : 2500 ans d’histoire

L’appréhension des biens du débiteur était immédiate. Le caractère


collectif de la démarche était avéré. Même s’il était prononcé à la
demande d’un seul créancier, l’envoi en possession profitait à tous ceux
qui se joignaient à la poursuite.
Avec le temps, l’envoi en possession se perfectionna. Il fît naître des
« magister bonorum », ancêtres du syndic pouvant adjuger en bloc les
biens du débiteur. Le prix était réparti entre les créanciers au marc le
franc. Ce fût également la naissance des « bonorum distractio » ; qui
représentaient des ventes au détail organisées par un curateur nommé.
C’était la genèse de l’organisation collective des créanciers face à un
débiteur défaillant.

3. Au Moyen-Âge : début de l’affinement du droit


Deux techniques coexistaient au Moyen-Âge. La première consistait pour
les créanciers à se faire payer par une saisie individuelle. La seconde
permettait à l’insolvable de proposer un abandon de ses biens, les
créanciers étant alors payés proportionnellement. Dans le temps, ce fut
finalement la règle classique qui subsista, en permettant aux créanciers
d’être payés dans l’ordre de leur saisie. Il faudra patienter jusqu’à la
Renaissance pour qu’apparaissent les règles dîtes de faillite moderne,
découvertes dans le statut des villes marchandes du nord de l’Italie. Dès
la fin du XVème siècle, des règles classiques du droit de la faillite étaient
posées.

La distinction entre les débiteurs honnêtes et malhonnêtes était déjà


connue. Les premiers pouvaient proposer une cession de leurs biens pour
éviter les sanctions. Pour les seconds, étaient prévues des peines
proportionnelles à la gravité des fautes commises. C’était également la
première utilisation du mot « banqueroute », sanctionnée elle-même par la
peine de mort, comme le prévoyait une bulle pontificale. Le terme « Banca
rotta » signifiait en italien le banc rompu. Le banqueroutier était interdit de

- 19 -
PARTIE I - Chapitre 1 - Le traitement des entreprises en difficulté : 2500 ans d’histoire

siéger dans les assemblées de marchands, son banc étant publiquement


rompu.

4. L’ordonnance de Colbert en 1673 : première règlementation en droit


de la faillite
Colbert, grand ministre du roi Louis XIV au XVIIème siècle, avait la volonté
d’ordre, et tentait de répondre à la colère du roi après les faillites répétées
des fournisseurs aux armées. Six ans après le règlement de la place des
changes à Lyon, il édicta, avec l’aide d’un commerçant nommé Jacques
Savary, un texte contenant pour la première fois une règlementation en
droit de la faillite, applicable sur tout le territoire de la France. Seul le roi,
par lettre de répit, pouvait ordonner la suspension des poursuites contre le
débiteur, et ce pour six mois. Il appartenait ensuite aux créanciers de voter
pour accorder des délais plus longs, voire des remises. Une majorité des
trois quarts devait être dégagée. En cas de refus, le juge pouvait suivre la
position des créanciers pour accorder aux débiteurs des délais de cinq
ans au plus. Cette technique relevait des premiers pas de prévention de
faillite, et d’un processus d’expertise autour de cette même faillite.

L’ordonnance de Colbert maintenait toutefois le peine de mort contre le


banqueroutier frauduleux et donnait compétence au juge consul dès le
mois de juin 1715. Un projet de révision de l’ordonnance fût érigé en 1778,
puis bloqué au Parlement. La mise en place d’un système judiciaire autour
de la faillite apparue dans le texte de 1807 du Code de commerce.

B – Du Code de commerce au décret du 20 Mai 1955 : sanctions, répression du


failli, et interdiction d’exercer le commerce

1. Le Code de commerce et le failli


Au-delà des pratiques propres étudiées ci-dessus à différentes périodes
de l’histoire, il ressort une certaine constance dans la législation : la

- 20 -
PARTIE I - Chapitre 1 - Le traitement des entreprises en difficulté : 2500 ans d’histoire

volonté de favoriser la cohérence et l’unité du droit des faillites, tout en


moralisant les affaires. Le Code de commerce conçu comme une mise à
jour de l’ordonnance de Colbert ou du « Code Savary » pour certains, fût
dicté par Napoléon lui-même. Sa volonté était claire, il souhaitait punir
gravement les commerçants faillis.
En accordant définitivement aux Tribunaux de commerce la compétence
de juger des faillites, le pouvoir politique imposait en même temps que la
procédure se déroule au grand jour. Plus d’arrangements amiables en
dehors du système judiciaire, l’intention était de réduire l’objectif les
risques de connivence entre les créanciers et le failli. A l’issue de la
procédure, les créanciers pouvaient décider d’un concordat, c’est-à-dire
une remise de dettes provisoire ou définitive, partielle ou totale, ou former
un contrat d’union. Dans le cas d’un refus du Tribunal d’agréer l’une de
ces deux solutions, le failli se trouvait placé en prévention de banqueroute,
pouvant être simple ou frauduleuse. La procédure se voulait également
répressive : le failli était déchu de ses droits civils et perdait le droit de
commercer.
Cette législation augmenta considérablement la durée et les frais de la
faillite. La rigidité de sa conception se heurta aux pratiques amiables de
l’Ancien Régime : certains commerçants préféraient la signature d’un
concordat avec les créanciers en marge de la juridiction consulaire.

2. L’adoucissement de la législation
Sous la pression de la bourgeoisie commerçante, des assouplissements
furent introduits dans plusieurs aspects de la procédure avec la loi du 28
mai 1838. Cette loi instaura la nomination d’un syndic par le Tribunal, et
non plus son choix par les créanciers.
En outre, la nouveauté essentielle était l’introduction de la possibilité d’une
clôture pour insuffisance d’actif, qui visait à accélérer la procédure. Par
suite logique, la loi entraîna le retour aux poursuites individuelles des
créanciers et à la contrainte par corps. Cette loi fût amendée ensuite à

- 21 -
PARTIE I - Chapitre 1 - Le traitement des entreprises en difficulté : 2500 ans d’histoire

plusieurs reprises, le 17 juillet 1856 avec l’introduction du concordat par


abandon d’actif, le 22 juillet 1867 avec la suppression de la contrainte par
corps, et enfin le 12 février 1872 avec l’introduction du privilège du
bailleur. Mais elle conserva tout de même ses fondements.

3. La naissance de la liquidation judiciaire


Une forme adoucie de la procédure de faillite apparue avec la loi du 4
mars 1889. Elle était en effet réservée au débiteur malheureux et de
bonne foi, qui prenait le soin de déposer son bilan dans les trois jours de
la cessation des paiements. De nos jours, ce délai a été porté à 45 jours.

Cette loi tissait véritablement un lien entre le sort de l’homme et celui de


son entreprise. Selon l’expression, « un bon débiteur » la liquidation
judiciaire, « un mauvais », la faillite qui empêchera le sauvetage de
l’entreprise. Pour la première fois, l’idée de faillite était associée à un
contexte économique. C’était la naissance de la liquidation judiciaire. La
sanction primait avec une grande importance attachée au paiement des
créanciers.

4. Le décret controversé du 20 Mai 1955


Dans le décret n°55-603 du 20 Mai 1955, seuls les commerçants qui
n’étaient pas nécessaire d’éliminer de la vie des affaires (les non-faillis)
pouvaient, dans le cadre de la procédure de liquidation judiciaire,
rebaptisée règlement judiciaire, présenter un concordat.
A cette époque, le règlement judiciaire s’appliquait de fait. L’autre
procédure, appelée faillite, restait réservée aux commerçants indignes.
Elle entraînait ainsi obligatoirement l’interdiction d’exercer le commerce.
Elle emportait aussi la vente forcée de tous les biens du débiteur, appelée
l’union.
Les syndics devinrent statutairement des organes professionnels appelés
mandataires de justice. Pour la première fois encore, des mesures

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PARTIE I - Chapitre 1 - Le traitement des entreprises en difficulté : 2500 ans d’histoire

d’information des créanciers étaient prévues. Plusieurs catégories de


créanciers apparaissaient : d’un côté les créanciers chirographaires,
soumis à produire leurs créances et à participer aux assemblées. De
l’autre les créanciers privilégiés : restant en dehors de la procédure, sans
obligation de produire des justificatifs et conservant leur droit de poursuite
individuelle.
Le décret du 20 mai 1955 fût qualifié par certains d’anti économique, car
condamnait certaines entreprises saines qui ne pouvaient accéder au
concordat avec un dirigeant malhonnête.

C – D’un constat de faillite à la volonté de protection : les prémices de la loi de


sauvegarde

1. Suppression de l’idée de faillite : distinguo entre le sort de l’homme et


celui de son entreprise
La procédure de faillite fût supprimée par la loi du 13 juillet 1967, ladite loi
qui laissa en vigueur deux procédures distinctes que sont le règlement
judiciaire et la liquidation des biens. Un distinguo clair s’établit entre
l’homme et son entreprise. Les entreprises susceptibles de se redresser
pouvaient bénéficier du règlement judiciaire. A contrario, les autres
entreprises restaient vouées à la liquidation des biens. Cette dernière
procédure entraînait la cessation d’activité et la disparition de l’entreprise.
L’appréciation de la procédure à appliquer s’effectuait désormais en
fonction des perspectives économiques de l’entreprise, et non plus en
mesurant la moralité du débiteur. Pour la première fois, le droit des
entreprises en difficulté s’appliquait également aux personnes morales de
droit privé, et ce sous la compétence du Tribunal de grande instance. Une
fois le distinguo de l’homme et son l’entreprise posé, le sort des créanciers
antérieurs se trouvait lui aussi modifié.

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PARTIE I - Chapitre 1 - Le traitement des entreprises en difficulté : 2500 ans d’histoire

Avec la législation de 1967, les créanciers chirographaires étaient


cantonnés au vote du concordat. Les créanciers privilégiés étaient soumis
à la suspension des poursuites individuelles. Ils étaient contraints, comme
le Trésor Public, de produire leurs créances au passif. Ce n’était qu’après
l’admission de leurs créances que les créanciers titulaires d’un privilège
spécial pouvaient toutefois reprendre l’exercice de leur droit de poursuites
individuelles.

La loi du 27 décembre 1973, créa une association pour la gestion du


régime d’Assurance des créances salariales de Garantie des Salaires
(AGS), qui permettait de faire les avances salariales lorsque le chef
d’entreprise était défaillant.

En 1981, la loi « Dailly » représenta également une arme de destruction


de l’actif du débiteur ; en permettant notamment de faire sortir facilement
de son patrimoine des créances. Ainsi, les lois qui appuyaient jadis la
prédominance de l’entreprise sur le sort des créanciers autorisaient
désormais dans le même temps certains d’entre eux à sortir de la loi du
concours par des techniques jouant sur l’actif du débiteur.

2. La Loi du 25 Janvier 1985 : naissance du mot « sauvegarde » et


protection de l’entreprise
La loi du 25 janvier 1985 institua une procédure de redressement
judiciaire destinée à permettre la sauvegarde de l’entreprise, le maintien
de l’activité et de l’emploi, et l’apurement du passif. Au sens étymologique
du terme, le mot « sauvegarde » découle du latin « salve », signifiant le
salut, l’assurance, et du mot « garder » exprimant la protection. La
distinction de l’homme et de l’entreprise fût poussée à son paroxysme, en
permettant la cession de l’entreprise du débiteur par un plan. L’activité
n’était plus poursuivie s’il y avait lieu dans l’intérêt des créanciers. Cette
procédure n’était plus une procédure collective de paiement, mais une

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PARTIE I - Chapitre 1 - Le traitement des entreprises en difficulté : 2500 ans d’histoire

véritable technique collective d’apurement du passif, avec comme objectif


prioritaire le redressement de l’entreprise.

En émettant pourtant un bilan, cette procédure n’avait de redressement


judiciaire que le nom. En effet, près de 90 % des entreprises étaient à
terme liquidées. Les établissements de crédit ont eux aussi perdu
considérablement. Deux raisons explicatives à ce contexte. La première
par le fait que la loi du 25 janvier 1985 donnait priorité aux créanciers dont
la créance était née après l’ouverture de la procédure et non sur les
créanciers antérieurs. La seconde de caractère jurisprudentiel, émanant
de l’interprétation de l’article 115 de la loi, qui demandait une
revendication obligatoire des créances, et faisait ainsi perdre beaucoup à
ceux qui ne respectaient pas le formalisme.

Une refonte de la loi du 25 janvier 1985 fût donc établie, sous la pression
des établissements de crédit. L’idée majeure de la loi, consistant à placer
l’entreprise sous la sauvegarde de la justice, pour permettre de traiter les
difficultés dès leur apparition, était conservée.

3. Loi du 10 Juin 1994 : moralisation des plans de cession


La loi du 10 juin 1994, relative à la prévention et au traitement des
difficultés des entreprises modifia certains aspects des lois de mars 1984
et janvier 1985. Le texte ajusta en effet le droit du redressement de
l’entreprise et le droit des créanciers privilégiés, tels les établissements de
crédit. Au-delà de la protection de l’entreprise, la loi du 10 juin 1994 avait
pour but la restauration des droits des créanciers titulaires de sûretés
spéciales et prioritaires. Fût autorisé le paiement provisionnel des
créanciers, en période d’observation ou en liquidation. La loi redonna
également le droit à la parole aux créanciers, en accroissant sensiblement
les pouvoirs des contrôleurs.

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PARTIE I - Chapitre 1 - Le traitement des entreprises en difficulté : 2500 ans d’histoire

Ainsi, cette moralisation des plans de continuation et de cession protégea


davantage les créanciers contre la fraude de leurs débiteurs, qui
continuaient parfois l’activité cédée tout en créant de nouvelles structures,
et ce sans payer le passif.
Enfin par cette loi, la liquidation judiciaire était maintenant prononçable
immédiatement, évitant la création d’un important passif qui lui-même
absorbait l’actif du débiteur. La sauvegarde de l’entreprise et de l’emploi
tout en apurant le passif s’avérait être un réel défi.

4. La Loi de Sauvegarde des entreprises du 26 juillet 2005


La loi du 26 juillet 2005, constitue à elle seule une évolution importante de
la législation, sous l’inspiration du droit fédéral américain et de la
procédure présente aux Etats-Unis, connue sous le nom de « Chapter
11 ». Suivant les mêmes idées fondamentales que sont le sauvetage de
l’entreprise et ses emplois, la loi du 26 juillet 2005 apporte notamment une
nouvelle méthode d’application. La priorité étant maintenant donnée à
l’anticipation des difficultés et à la capacité de chaque acteur d’agir vite.
Plusieurs questionnements jaillissent. Par quels moyens techniques ? Par
l’ouverture au besoin d’une véritable procédure collective appelée
procédure de sauvegarde ; sans attendre l’état de cessation des
paiements. Véritable procédure de prévention, elle encadre le débiteur qui
connaît des difficultés trop importantes pour que les procédures de
préventions classiques puissent être adoptées. La volonté étant
d’intervenir en amont, lorsqu’il existe encore des perspectives de
redressement.

Idées nouvelles et majeures de la réforme :


 Etendre les procédures collectives aux professionnels libéraux, qui
représentent près de 25% des entreprises françaises ;
 Associer les créanciers publics, fiscaux et sociaux aux efforts
consentis pour tenter de sauver l’entreprise ;

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PARTIE I - Chapitre 1 - Le traitement des entreprises en difficulté : 2500 ans d’histoire

 Informer davantage sur l’ensemble des procédures judiciaires de


traitement des difficultés des entreprises via le Ministère Public.

Le mandat Ad Hoc se légalise, le règlement amiable est rénové. Le cœur


de la réforme reste indéniablement la procédure de sauvegarde qui se
veut plus contractuelle que judiciaire, avec l’instauration de deux comités
de créanciers qui votent le plan de sauvegarde à la majorité.

D – Evolution de la loi : nouvelles réformes depuis 2005

1. Les améliorations de la loi


La loi de sauvegarde du 26 juillet 2005 a été retouchée suite à un rapport
d’évaluation de la commission des lois de l’Assemblée Nationale, qui
faisait apparaître certaines difficultés rencontrées en pratique. L’affaire
Eurotunnel a également contribué à mettre en exergue les insuffisances
du dispositif. C’est ainsi que le Président de la République a demandé
publiquement à réformer la loi de sauvegarde des entreprises, afin d’en
faciliter son accès et d’améliorer les outils prévention et traitement des
difficultés. C’est en suivant ce principe que l’ordonnance du 18 décembre
2008 parut, rendant la procédure de sauvegarde plus attractive. Les chefs
d’entreprises étaient incités à se placer sous la sauvegarde, par un certain
nombre de dispositions incitatives, notamment par l’assouplissement des
conditions d’ouverture. Et ce au détriment d’une situation plus dégradée,
aboutie par le redressement judiciaire.

La sauvegarde bénéficiait désormais d’un regard nouveau et positif. Une


certaine discrimination positive était mise en place en faveur de ceux qui
optaient pour la procédure de sauvegarde. En parallèle étaient pénalisés
fortement le débiteur, ses proches et ses garants qui attendaient la
cessation des paiements et le placement en redressement judiciaire. Cette
ordonnance de réforme visait l’adoption du plan de sauvegarde de

- 27 -
PARTIE I - Chapitre 1 - Le traitement des entreprises en difficulté : 2500 ans d’histoire

manière facilitée, en modifiant notamment les règles relatives aux comités


des créanciers.

La loi du 15 juin 2010 a créé l’EIRL, statut d’entrepreneur individuel à


responsabilité limitée. L’objectif poursuivi était de permettre à un
entrepreneur d’isoler une masse de biens et de droits, dans un patrimoine
affecté, obligatoirement composé de ceux résultant de l’activité. Le décret
n°2012-122 du 30 janvier 2012 les définit comme « ceux qui, par nature,
ne peuvent être utilisés que dans le cadre de cette activité ». L’EIRL se
retrouve désormais à la tête d’au moins deux patrimoines, celui affecté à
l’entreprise, et le patrimoine non affecté. Nous renonçons ainsi au
caractère personnel de la procédure collective.

L’ordonnance du 12 mars 2014 vise à augmenter l’attractivité des


procédures de prévention. La conciliation est sécurisée, la procédure de
sauvegarde anticipée est créée, ce qui facilite nettement le passage entre
ces dernières. Notons également une simplification de la procédure de
déclaration des créances. Ce même texte fût retouché le 26 septembre
2014 pour apporter deux suppressions notables :

 Celle de la saisine d’office aux fins de conversion d’une sauvegarde


en redressement judiciaire dès apparition de l’état de cessation des
paiements.
 Celle de la saisine d’office aux fins de reprise de la liquidation
judiciaire clôturée pour insuffisance d’actifs.

Enfin, la possibilité pour le Tribunal de commerce d’ouvrir une liquidation


judiciaire, si manifestement il n’existe plus de chance de redressement1.

1
Code de commerce, article L631-7

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PARTIE I - Chapitre 1 - Le traitement des entreprises en difficulté : 2500 ans d’histoire

La loi du 6 août 2015, dite loi Macron aboutit les améliorations de la loi. Le
décret d’application permet désormais de constituer des sociétés
pluriprofessionnelles entre administrateurs et mandataires judiciaires.
Cette loi crée l’insaisissabilité légale de la résidence principale du
débiteur, et prolonge ainsi la protection de l’entrepreneur individuel.

2. La sauvegarde financière accélérée


La loi du 22 octobre 2010 et son article 57 dît de régulation, a institué une
procédure de sauvegarde financière accélérée. Soumise aux règles de la
sauvegarde, elle représente une sous-catégorie de procédure de
sauvegarde accélérée et peut faire le lien entre les procédures de
prévention et les procédures de traitement des difficultés. Elle intervient
entre la conciliation et la procédure de sauvegarde classique. Cette
procédure de sauvegarde financière accélérée, destinée à anticiper les
difficultés, doit permettre à une entreprise engagée dans une procédure
de conciliation d’élaborer très rapidement, entre un et trois mois, un projet
de plan devant assurer sa pérennité. Ce plan doit ensuite recueillir un
soutien suffisamment large de la part des créanciers.

La sauvegarde financière accélérée est une variante qui concerne


exclusivement les créanciers financiers de l’entreprise. Elle trouve sa
pleine utilité dans les entreprises ayant levé des fonds importants. En
effet, cette sauvegarde permet une restructuration des dettes financières
sans incidence sur les relations avec les acteurs de l’activité
opérationnelle.

3. La procédure de sauvegarde accélérée


Suite à l’ordonnance du 12 mars 2014, une nouvelle procédure
intercalaire a été mise en place, appelée procédure de sauvegarde
accélérée. L’objectif recherché est une nouvelle fois la réactivité à avoir
face aux difficultés d’entreprises afin d’éviter l’accroissement des dettes.

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PARTIE I - Chapitre 1 - Le traitement des entreprises en difficulté : 2500 ans d’histoire

Cette procédure peut bénéficier au débiteur ayant lancé un dossier de


conciliation et qui « justifie avoir élaboré un projet de plan tendant à
assurer la pérennité de l’entreprise ». (Article L628-1 du Code de
Commerce).

Des seuils d’éligibilité sont toutefois à respecter, à savoir la validation d’au


moins deux des trois seuils suivants :
 20 salariés à la date de la demande
 3 000 000 € de chiffre d’affaires
 1 500 000 € de total du bilan

Cette procédure, en parallèle d’un dossier de conciliation, est ouverte à


l’égard de tous les créanciers, financiers ou non, faisant partie du projet de
plan. L’ensemble des créanciers, acteurs du plan uniquement, bénéficient
donc de ses effets. Le projet de plan représente l’élément clé de la
procédure de sauvegarde accélérée. Nouvelle procédure intercalaire mise
en place par le législateur, nous pouvons cependant regretter les seuils
d’éligibilité élevés, qui privent les entreprises de petites tailles de ses
dispositions.

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PARTIE I - Chapitre 2 - La loi de sauvegarde et ses dispositions : environnement,
contexte d’application et cas pratique dans une société de négoce en difficulté autour
d’une procédure de sauvegarde

Chapitre 2 - La loi de sauvegarde et ses dispositions : environnement,


contexte d’application et cas pratique dans une société de négoce
en difficulté autour d’une procédure de sauvegarde

A – La détection des difficultés et les points de vigilance

1. L’anticipation
La loi du 26 juillet 2005 sur la sauvegarde des entreprises en difficulté fait
intervenir la procédure de sauvegarde en amont de la constatation de
l’état de cessation des paiements par l’entreprise. Elle met en œuvre des
instruments augmentant les chances de survie des entreprises en
difficulté. Le maître mot à retenir de la loi de sauvegarde est celui
d’anticipation. Comment anticiper les difficultés éventuelles d’une
entreprise ? A partir de quel moment devient-il opportun de s’interroger ?
Pourquoi prévenir de difficultés inconnues à ce jour ? L’énergie d’un chef
d’entreprise est déjà mise à contribution par le quotidien même de
l’entreprise. Dans les faits pourtant, il s’avère que des situations de non
détection de difficultés, de prises de conscience tardives, impactent
ensuite les mesures de rééquilibrage et de sauvetage ou non de
l’entreprise en question.

L’anticipation reste la clé pour sauvegarder l’entreprise. Les statistiques le


démontrent, les deux tiers des entreprises qui entrent en procédure
collective le font directement par le biais de liquidation judiciaire, c’est-à-
dire avec un arrêt de l’activité. La quasi-totalité du dernier tiers concerne
les redressements judiciaires, c’est-à-dire après état de cessation des
paiements. Seulement une procédure collective sur quarante2 correspond
à une procédure de sauvegarde.

Après analyse du sort des entreprises placées en redressement par


rapport à celles entrées en procédure de sauvegarde, nous comprenons

2
Ministère de la Justice 2016 et 2017.

- 31 -
PARTIE I - Chapitre 2 - La loi de sauvegarde et ses dispositions : environnement,
contexte d’application et cas pratique dans une société de négoce en difficulté autour
d’une procédure de sauvegarde

que ce manque d’anticipation est majoritairement responsable de


l’impossibilité de sauvetage de l’entreprise. « Les entreprises en
sauvegarde ont deux fois plus de chance d’obtenir un plan de continuation
que les entreprises en redressement judiciaire ».3

2. La détection et la nature des défaillances


Au cours de la vie d’une entreprise, plusieurs situations et points
économiques peuvent être analysés, et constituer des points d’alerte pour
l’entreprise. Les tableaux de bord sur les suivis commerciaux, les encours
clients, les factures encaissées et à venir, le carnet de commandes, les
relances clients débiteurs, les factures fournisseurs…etc ; sont autant
d’éléments qui doivent être suivis au quotidien par le chef d’entreprise.

En parallèle, le travail de suivi et de détection des défaillances incombe à


la charge de l’expert-comptable, partenaire de confiance du chef
d’entreprise. Sa mission, au-delà de l’établissement des comptes annuels,
permet de porter un regard sur le passé, via également une situation
semestrielle, un tableau de financement établi après la clôture ou encore
l’établissement d’un document relatif à la situation de l’actif réalisable et
disponible par rapport au passif exigible.

Une fois le passé analysé, il est à charge de l’expert-comptable de


présenter l’avenir comptable de l’entreprise au moyen du compte de
résultat prévisionnel, et du plan de financement prévisionnel. Et ce dans
les 4 mois de la clôture de l’exercice afin que ces documents soient les
plus pertinents possibles. La surveillance de la publication des privilèges
fiscaux et sociaux est également essentielle. Les organismes de sécurité
sociale, tout comme le Trésor Public, ont l’obligation à partir de certains
seuils de publier leurs privilèges, aux fins d’opposabilité à la procédure
collective. Le but de cette démarche est d’inciter le Trésor Public et les
3
www.strategie.gouv.fr : dossier « Entreprises en difficulté financière : procédure de
sauvegarde ou redressement judiciaire ».

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PARTIE I - Chapitre 2 - La loi de sauvegarde et ses dispositions : environnement,
contexte d’application et cas pratique dans une société de négoce en difficulté autour
d’une procédure de sauvegarde

organismes de protection et de prévoyance sociale à publier leur privilège


dans les meilleurs délais. L’objectif étant de fournir aux tiers une
information d’actualité et utile sur les incidents de paiement dont les
sommes garanties font l’objet.

La nature des défaillances est elle aussi à apprécier. De nature


économiques de prime abord, pouvant provenir d’impayés, d’encours
facturables non encaissés, elles peuvent aussi résulter de délais de
paiement jugés trop longs, tels les contrats chez les institutions publiques.
D’autres facteurs peuvent également venir bouleverser la vie d’une
entreprise. Nous pouvons citer une modification de la politique fiscale et
environnementale, une mise en place d’une règlementation plus stricte,
etc…
Le commissaire aux comptes d’une entreprise doit également jouer
pleinement son rôle et alerter les dirigeants de l’entreprise dès qu’il relève
des faits susceptibles de compromettre la continuité de l’activité. S’il
constate que les décisions prises ne permettent pas d’améliorer la
situation, il doit en informer le président du Tribunal de commerce. Il peut
également demander à être entendu par ce dernier. Enfin, le président du
Tribunal de commerce compétent géographiquement peut, lorsqu’il a
connaissance des difficultés d’une entreprise, convoquer son dirigeant
pour un entretien. Des mesures propres à redresser la situation de
l’entreprise concernée peuvent être évoquées. Cet entretien est parfois
mal apprécié en amont par le dirigeant. Cependant, il peut être
d’importance capitale lorsque le chef d’entreprise ne bénéficie pas du
soutien avisé de ses différents conseils.

3. Le diagnostic
Une fois les points d’alerte décryptés et la situation comptable jugée assez
étayée pour statuer temporairement sur le sort de l’entreprise, le chef

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PARTIE I - Chapitre 2 - La loi de sauvegarde et ses dispositions : environnement,
contexte d’application et cas pratique dans une société de négoce en difficulté autour
d’une procédure de sauvegarde

d’entreprise dispose de plusieurs relais pour l’orienter sur les démarches à


mettre en place.

L’expert-comptable demeure l’interlocuteur privilégié qui informera le chef


d’entreprise des différentes procédures en vigueur pour aider les
entreprises en difficulté. Il existe deux grandes catégories de procédures,
à savoir :
 Les procédures amiables : que sont le mandat Ad Hoc et la
conciliation
 Les procédures collectives via un traitement judiciaire des
difficultés : la procédure de sauvegarde, le redressement judiciaire,
la liquidation judiciaire et le rétablissement professionnel.

Ce diagnostic est essentiel. Il permettra au chef d’entreprise d’apprécier si


son entreprise est réellement en difficulté et surtout de comprendre les
solutions qui s’offrent à lui.

B – La justification de l’échec et/ou de l’impasse du mandat Ad Hoc et de la


conciliation

1. Le mandat Ad Hoc et son champ d’application


Le traitement amiable et conventionnel des difficultés des entreprises
résulte d’une négociation. Le mandat Ad Hoc permet au président du
Tribunal de commerce ou du Tribunal de Grande Instance, sur demande
du chef d’entreprise, de désigner une personne chargée de trouver un
accord entre l’entreprise et ses créanciers. Le mandat Ad Hoc peut être
décidé pour toute personne morale de droit privé, commerçante ou non,
ainsi que pour les entreprises commerciales, artisanales et les
professionnels indépendants exploitants sous forme individuelle.

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PARTIE I - Chapitre 2 - La loi de sauvegarde et ses dispositions : environnement,
contexte d’application et cas pratique dans une société de négoce en difficulté autour
d’une procédure de sauvegarde

La détermination de la mission même du mandataire Ad Hoc et sa durée


sont librement fixées par le président du Tribunal de commerce. Elle
pourra être, le cas échéant, prorogée. Le mandataire Ad Hoc devra rendre
un rapport de mission au président du Tribunal, et informer le chef
d’entreprise de ses constatations et conclusions sur les difficultés de
l’entreprise. Il pourra informer le Tribunal de Commerce d’éventuelles
fraudes commises, et surtout de mener à bien une négociation avec un ou
plusieurs créanciers afin d’obtenir un moratoire. Un mandat Ad Hoc peut
être poursuivi par une procédure de conciliation, voire une procédure de
sauvegarde.

2. La conciliation
La conciliation est elle aussi une procédure amiable, s'appliquant à la fois
aux commerçants, artisans, qu’aux professionnels indépendants et
personnes morales de droit privé qui en font la demande. Elle est
également applicable à l'entrepreneur individuel à responsabilité limitée
pour lui permettre de traiter les difficultés de son entreprise à patrimoine
affecté, indépendamment de son patrimoine non affecté.

Le chef d'entreprise saisit seul le président du Tribunal. Il ne doit pas être


en état de cessation des paiements depuis plus de 45 jours ; et doit
éprouver une difficulté juridique, économique, financière avérée ou
prévisible. Le président du Tribunal compétent désignera un conciliateur
chargé de mettre en œuvre un accord amiable entre la personne ou
l'entreprise en difficulté et ses créanciers. L'accord sera selon les cas
soumis à homologation du Tribunal ou à la constatation de son président.
La procédure sera confidentielle s'il ne s'agit pas d'un accord homologué.
Dans le cas contraire, elle ne le sera pas.

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PARTIE I - Chapitre 2 - La loi de sauvegarde et ses dispositions : environnement,
contexte d’application et cas pratique dans une société de négoce en difficulté autour
d’une procédure de sauvegarde

3. Constat de ces deux mesures préventives


La mission de mandat Ad Hoc, encadrée par une durée librement fixée
par le président du Tribunal peut être facilement prorogée. Ainsi, les délais
de négociation sont allongés, et il est fréquent en pratique de poursuivre
un mandat Ad Hoc par une procédure de conciliation, voire plus tard une
procédure de sauvegarde.

Le mandat Ad Hoc est utile en présence de créanciers peu nombreux, la


mission pouvant être longue à contrario et entraîner par la suite un état de
cessation des paiements. C’est un outil efficace pour certaines
entreprises, d’autant qu’il demeure confidentiel.

La procédure de conciliation n'est pas une procédure collective de


paiement. En ce sens, elle représente le dernier recours pour tenter
d'obtenir le règlement amiable avant d'engager une procédure judiciaire.
Les poursuites individuelles et les voies d'exécution sont toujours
possibles à l'encontre du chef d'entreprise en difficulté. Si le conciliateur
parvient à obtenir des principaux créanciers un accord sur les délais, des
remises, des abandons de sûretés, celui-ci sera consigné par écrit et
s'appliquera. En cas d'échec, résultant de l'absence d'accord avec les
principaux créanciers, le débiteur pourra à nouveau solliciter l'ouverture
d'une autre conciliation, en respectant un délai d'expiration de 3 mois à
compter de la fin de la précédente procédure de conciliation.

Au niveau de la conciliation, l’état de cessation des paiements est à


considérer. En effet, soit l’entreprise n’est pas en cessation des
paiements, et tout comme le mandat Ad Hoc, cette procédure peut
s’avérer être longue et engendrer la survenance du défaut des paiements.
Soit la cessation des paiements est déjà avérée, de ce fait la procédure de
sauvegarde est impossible. La conciliation représente donc la solution
pour éviter le redressement. Elle pourrait dans ce cas être intéressante

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PARTIE I - Chapitre 2 - La loi de sauvegarde et ses dispositions : environnement,
contexte d’application et cas pratique dans une société de négoce en difficulté autour
d’une procédure de sauvegarde

pour le chef d’entreprise car en cas d’accord homologué, l’état de


cessation des paiements disparaît. Ainsi à posteriori, une procédure de
sauvegarde est possible.

C – La nécessité d’agir avant la cessation des paiements

1. Explication d’une limite à ne pas franchir


La nécessité d'agir avant l’état de cessation des paiements est capitale.
Au sein des deux procédures amiables précédemment évoquées, cette
notion est également importante. Nous verrons par la suite que c'est
également le cas pour la procédure collective de sauvegarde. Pourquoi
une telle importance ? Cela s'explique par le fait que l'ouverture d'une
procédure visant au sauvetage d’une entreprise demande inévitablement
l'existence de conditions de fond devant être remplies par l'entreprise
concernée.

En amont d'un état de cessation des paiements avéré, de nombreuses


difficultés d'entreprise peuvent être surmontées. Une réorganisation de
l'activité est alors possible, des emplois peuvent encore être sauvés, et ce
par des procédures plus simples et plus souples qu'une procédure de
redressement judiciaire par exemple.

Agir avant la cessation des paiements permet concrètement au chef


d’entreprise d’être libre dans les choix des solutions qui s’offrent à lui.
L’état de cessation des paiements est un véritable obstacle à son
indépendance de gestion car il sera placé sous la tutelle du Tribunal de
commerce.

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PARTIE I - Chapitre 2 - La loi de sauvegarde et ses dispositions : environnement,
contexte d’application et cas pratique dans une société de négoce en difficulté autour
d’une procédure de sauvegarde

2. Définition de l’état de cessation des paiements et la méthode de calcul


Le Code de Commerce (article L. 631-1, alinéa 1) définit l'état de
cessation des paiements comme « l'impossibilité de faire face au passif
exigible avec son actif disponible. »

L’actif disponible correspond aux sommes immédiatement mobilisables


dont l'entreprise peut disposer sans délai. La notion temporelle du très
court terme est présente ici.

Cet ensemble comprend notamment :


 Les soldes créditeurs des comptes bancaires,
 Les espèces contenues en caisse,
 Les effets de commerce à vue,
 La réserve de crédit.

Sont donc exclus du calcul tous les biens immobilisés ainsi que les biens
nécessitant un important délai de réalisation. Les immeubles, les stocks
ou les créances n'arrivant pas immédiatement à terme ne font pas partie
de l'actif disponible.

Le passif exigible équivaut quant à lui à la somme des dettes, de nature


civile ou commerciale, arrivées à échéance, et dont le paiement peut être
exigé immédiatement par les créanciers. Ces dettes doivent également
être certaines, sans contestation ou litige.

L'ordonnance du 18 décembre 2008 (n° 2008-1345) est venue compléter


la définition de l'état de cessation des paiements en énonçant une
précision : « le débiteur qui établit que les réserves de crédit ou les
moratoires dont il bénéficie de la part de ses créanciers lui permettent de

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PARTIE I - Chapitre 2 - La loi de sauvegarde et ses dispositions : environnement,
contexte d’application et cas pratique dans une société de négoce en difficulté autour
d’une procédure de sauvegarde

faire face au passif exigible avec son actif disponible n’est pas en état de
cessation des paiements. »
L’état de cessation des paiements se distingue notablement de
l'insolvabilité, caractérisée elle-même par l'insuffisance des actifs pour
couvrir le passif.

3. Quand la conciliation mène à la Sauvegarde


Une conciliation aboutie est une négociation menée à bien jusqu'à
obtention d'un accord entre les créanciers et le débiteur. Accord lui-même
signé entre les parties.
Quand une conciliation ne mène à aucun accord et qu'ainsi l'échec de
cette mesure est avéré, le débiteur peut solliciter de nouveau l'ouverture
d'un dossier de conciliation ou envisager l'ouverture d'autres procédures.
Deux options font ainsi face au débiteur.

 En situation de cessation des paiements, le président du Tribunal


de commerce assignera une ouverture de redressement ou selon
les conditions, d’une liquidation judiciaire.
 A défaut d'un état de cessation des paiements, une procédure de
sauvegarde pourra être ouverte, véritable étape supérieure dans
l'accompagnement et le traitement des entreprises en difficulté.

La conciliation peut donc également devenir un outil d’accès à la


procédure de sauvegarde. En effet, le dirigeant d’une entreprise en
difficulté dont un état de cessation des paiements depuis moins de 45
jours est avéré pourra sélectionner les principaux créanciers qui créent cet
état, ou plutôt qui pourraient lui en faire sortir en cas d’accord. Si un
accord est trouvé et homologué par le Tribunal, l’état de cessation des
paiements est effacé. De ce fait, la procédure de sauvegarde devient
possible.

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PARTIE I - Chapitre 2 - La loi de sauvegarde et ses dispositions : environnement,
contexte d’application et cas pratique dans une société de négoce en difficulté autour
d’une procédure de sauvegarde

Il est à noter que les créanciers ont intérêt à trouver un accord pour deux
raisons. La première, parce qu’ils deviendraient des créanciers privilégiés
en cas de procédure collective postérieure. La deuxième, parce qu’ils
pourraient éviter le redressement judiciaire de leur débiteur.
Redressement qui aboutit en majorité en liquidation judiciaire.

D – Cas pratique d’une procédure de sauvegarde dans une société de négoce en


difficulté et mise en relief du rôle de l’expert-comptable

Notre cas pratique s’appuie sur un dossier client du cabinet pour lequel
nous avons suivi, participé et vécu les différentes étapes de la procédure
de sauvegarde. Et ce de l’origine des difficultés à l’adoption du plan,
jusqu’aux jugements du Tribunal de commerce d’Avignon et celui de la
Cour d’appel de Nîmes. La procédure de sauvegarde, ouverte au cours du
mois de juin 2013, nous avons travaillé communément avec le chef
d’entreprise. Ce cas client nous permet d’illustrer les différents aspects de
la procédure que nous avons évoqués précédemment. Client fidèle de
longue date du cabinet depuis 2001, Monsieur X est gérant d’une société
de négoce de pièces de carrosserie automobile depuis 2001 sur Avignon.

1. Etape 1 : Les difficultés rencontrées et la situation avec l’expert-


comptable
Les difficultés de notre client sont survenues en 2010, à la suite de
travaux de voirie empêchant l’accès routier à la boutique. Aucune difficulté
financière n’était jusqu’alors rencontrée. D’origine donc externe et
environnementale, pour une durée conséquente de douze mois, elles sont
le point de départ d’une importante baisse du chiffre d’affaires de
l’entreprise de notre client. Près de 40% du chiffre d’affaires ont été
perdus durant cette même période.

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PARTIE I - Chapitre 2 - La loi de sauvegarde et ses dispositions : environnement,
contexte d’application et cas pratique dans une société de négoce en difficulté autour
d’une procédure de sauvegarde

Notre client, expérimenté dans le domaine de la gestion, a décidé de


compenser cette baisse du volume d’activité par l’ouverture d’un
deuxième magasin sur Avignon, de l’autre côté de la ville. Mais la nouvelle
activité n’a pas eu le démarrage escompté. La clientèle était difficile à
capter, et les charges fixes supplémentaires du nouveau magasin sont
venues alourdir les difficultés existantes. « C’était le début de la spirale
négative ». Notre client rencontra des problèmes de trésorerie qui eux-
mêmes décalèrent les paiements au fournisseur principal, représenté par
la centrale d’achat. Cette dernière était une coopérative dont notre client
était adhérent. Un échéancier a donc été mis en place, à l’appui de nos
conseils. Nous avons ici joué pleinement notre rôle de conseil quant à la
sécurisation du paiement par échelonnement de la dette de notre client.
Cette coopérative a été par la suite cédée. Le repreneur n’a pas accepté
les encours de notre client. Remettant en question l’échéancier déjà mis
en place, il est à l’origine de la forte dégradation des relations
commerciales.

2. Etape 2 : La négociation avec le fournisseur principal


Notre client fût convoqué par le directeur financier de la centrale d’achat.
Un point sur la situation financière de notre client était demandé, au même
titre que notre présence en tant qu’expert-comptable, et conseil de notre
client. Un rendez-vous sur Paris a donc été fixé. Nous avions avec l’aide
de notre client, préparé en amont une nouvelle proposition de paiement de
la dette.

Le jour du rendez-vous, l’interlocuteur attendu, à savoir le directeur


financier de la centrale d’achat était absent. Nous avons été reçus par un
contrôleur de gestion de l’entreprise. Aucune nouvelle proposition n’a été
ce jour-là acceptée ; nous avons essuyé le refus d’un nouvel étalement de
la dette. Le rendez-vous fût écourté. Une détérioration notable des

- 41 -
PARTIE I - Chapitre 2 - La loi de sauvegarde et ses dispositions : environnement,
contexte d’application et cas pratique dans une société de négoce en difficulté autour
d’une procédure de sauvegarde

relations commerciales était désormais avérée. La crainte principale de


notre client résidait désormais dans l’arrêt des approvisionnements.

3. Etape 3 : L’évidence du choix de la sauvegarde pour le professionnel de


l’expertise comptable et son client
A ce stade, notre client était totalement bouleversé et inquiet pour le
devenir de son entreprise. Sa trésorerie en baisse depuis quelques mois
ainsi que le haut niveau de ses dettes avaient amené l’organisme
COFACE (Compagnie Française d’Assurance spécialisée dans
l’Assurance-Crédit à l’Exportation) à ne plus garantir son stock. Aucun
changement de fournisseur n’était donc possible pour lui.

A la suite de cette détérioration de la relation commerciale, les procédures


amiables que sont le mandat Ad Hoc et la conciliation étaient fortement
compromises. L’état de cessation des paiements n’étant pas constaté à
cette période ; grâce notamment à l’échéancier en cours, nous avons
proposé à notre client d’entrer en procédure de sauvegarde.

Notre client ne disposait d’aucune connaissance sur cette procédure.


Nous avons donc joué pleinement notre rôle de conseil en lui détaillant les
caractéristiques de la procédure de sauvegarde, les différentes étapes et
les opportunités qu’il pouvait en retirer. Nous avions un objectif était
commun : sauver son entreprise.

- 42 -
PARTIE I - Chapitre 3 - Mise en place de la procédure de sauvegarde

Chapitre 3 - Mise en place de la procédure de sauvegarde

A – L’ouverture de la procédure

1. Les conditions requises


La procédure de sauvegarde a été créée en vue de traiter judiciairement
les difficultés de l'entreprise, avant que cette dernière ne se retrouve en
état de cessation des paiements. Véritable procédure préventive car se
plaçant en amont d'une situation bien plus délicate pour le débiteur, elle
demande une justification des difficultés par le débiteur même. Il se doit
en effet de prouver qu'il ne peut les surmonter seul. C’est l’article L.620-1
du Code de commerce qui régit la procédure de sauvegarde : « Il est
institué une procédure de sauvegarde ouverte sur demande du débiteur
mentionné à l’article L.620-2 qui, sans être en état de cessation des
paiements, qui justifie de difficultés qu’il n’est pas en mesure de
surmonter… ».
L'appréciation in concreto est ici requise, c’est à dire la prise en compte
des seules circonstances de la cause afin d'apprécier la faute de l'auteur
du dommage. Il est important de préciser également, comme le rappelle la
Cour d’appel de Versailles4, que la demande d’ouverture de la procédure
de sauvegarde n’est pas subordonnée à l’existence de difficultés relatives
à l’activité en elle-même. Elle a pour but de poursuivre l’activité mais les
difficultés peuvent subvenir de plusieurs horizons.

Qui est concerné par cette mesure ?


 Toute entreprise commerciale, artisanale, agricole ou libérale
(personne physique ou morale) ;
 Les micro-entrepreneurs ;
 Toute association qui rencontre des difficultés qu'elle n'est pas en
mesure de surmonter seule.

4
19 Janvier 2012, N°11/03519

- 43 -
PARTIE I - Chapitre 3 - Mise en place de la procédure de sauvegarde

Il est à noter que les entrepreneurs individuels à responsabilité limitée


(EIRL) peuvent y recourir uniquement sur leur patrimoine affecté à
l'activité professionnelle.

2. Le dépôt de la demande
Le dirigeant de l'entreprise en difficulté reste la seule personne habilitée à
demander l'ouverture de la procédure de sauvegarde. Après avoir précisé
la nature des difficultés rencontrées, il indique les motivations qui lui font
solliciter cette procédure. Il précise donc les raisons pour lesquelles il ne
sera pas en mesure de surmonter ses difficultés. Il mentionne notamment
sur la demande d’ouverture de la procédure (Annexe I), avec l’appui de
son expert-comptable, l’état du passif en détaillant les dettes échues et à
échoir, l’état des actifs ainsi que la situation de la trésorerie.

Le chef d'entreprise joint alors à sa demande un certain nombre de


documents comptables5 tels que les comptes annuels de l'entreprise, une
situation de trésorerie de moins 7 jours, un compte de résultat prévisionnel
ainsi que l'effectif de l'entreprise.

Quelles juridictions sont compétentes pour le dossier ?


 Le président du Tribunal de commerce pour les entreprises
individuelles ou les sociétés exerçant une activité commerciale,
artisanale
 Le Tribunal de Grande Instance pour les entreprises individuelles
ou les sociétés exerçant une activité agricole ou libérale

Le Tribunal territorialement compétent dépend du siège social de


l'entreprise du débiteur. Dès que la demande du débiteur est jugée
recevable, le Tribunal saisi ouvre la procédure de sauvegarde et nomme
les différents organes de la procédure. Nous dénombrons ainsi :

5
Article R.621-1 du Code de Commerce

- 44 -
PARTIE I - Chapitre 3 - Mise en place de la procédure de sauvegarde

 Le juge-commissaire, veillant tant au bon déroulement rapide de la


procédure qu'à la protection des intérêts en présence ;
 Le représentant des créanciers, défendant l'intérêt collectif des
créanciers et vérifiant les créances, nommé mandataire judicaire ;
 Le représentant des salariés, en appui dans la vérification des
créances salariales et dans la représentation d'un salarié devant les
prud'hommes ;
 Les contrôleurs, assistant le représentant des créanciers dans ses
fonctions et le juge-commissaire dans sa mission de surveillance de
l'administration de l'entreprise. Ils sont choisis parmi les créanciers
du débiteur par le juge-commissaire.
 Un administrateur judiciaire, non obligatoire pour les entreprises
dont le nombre de salariés est inférieur à 20 ou le chiffre d'affaires
inférieur à trois millions d'euros, surveillant le débiteur dans sa
gestion et l'assistant dans ses actes de gestion.

A noter que le débiteur peut lui-même proposer un administrateur


judiciaire. Le jugement d'ouverture est ensuite inscrit sur le registre du
commerce et des sociétés, ou encore sur le répertoire des métiers. Il est
également publié au BODACC (Bulletin Officiel Des Annonces Civiles et
Commerciales) ou dans un journal d'annonces légales.

3. La direction de l’entreprise : les changements et les rôles concrets du


client et de son expert-comptable
Pendant la durée de la procédure, l'activité de l'entreprise est poursuivie,
sauf si l'entreprise en est incapable ou est déclarée en état de cessation
des paiements. Le débiteur reste pleinement maître de ses droits, en
l'absence d'administrateur judiciaire. A contrario, en présence de ce
dernier, les tâches sont réparties par le législateur entre le chef
d'entreprise et l’administrateur. Cette répartition est dénommée
« administration contrôlée ».

- 45 -
PARTIE I - Chapitre 3 - Mise en place de la procédure de sauvegarde

L’administrateur se voit confier des missions de surveillance et


d'assistance, en élaborant un bilan économique et social, en optant sur la
continuation des contrats en cours et en suivant le fonctionnement des
comptes bancaires du débiteur. Ces missions sont poursuivies par le chef
d’entreprise et son expert-comptable pour les sociétés sans administrateur
judiciaire, majorité des clients des cabinets d’expertise comptable.

L’élaboration du projet de plan incombe au débiteur. Il peut être assisté


par l'administrateur ou l’expert-comptable. Le professionnel de l’expertise
comptable est un soutien moral et un soutien professionnel du chef
d'entreprise. Il informe son client et le guide sur la procédure ouverte et
ses modalités futures. Il fournit les documents comptables demandés par
le Tribunal ou l'administrateur judiciaire, et étaye le dossier de ses
connaissances techniques et montages financiers. Il est également un
acteur de premier rang quant à l'élaboration du prévisionnel attendu.

B – La période d’observation et ses objectifs

1. La durée de la période d’observation et les différentes étapes


Le début de la procédure de sauvegarde est représenté par une période
dite d'observation, de six mois maximum renouvelable, sans excéder 18
mois. Nous spécifions que la durée peut être allongée pour un agriculteur
jusqu'à la fin de l'année agricole. La période d'observation se veut
répondre à plusieurs nécessités.

 Elle permet d'effectuer un bilan détaillé de l'entreprise, à la fois


économique et social. Sont ainsi revus les grands domaines de
l'entreprise tels que la trésorerie, la comptabilité, le social, le
commercial, le juridique, et l'exploitation. L'état actuel de
l'entreprise est établi.

- 46 -
PARTIE I - Chapitre 3 - Mise en place de la procédure de sauvegarde

 La période d'observation recherche également à mettre en place,


dans la mesure du possible, les mesures de restructuration qui
s'imposent, et ce dans les différents domaines cités ci-dessus.
L'objectif étant, avec l'appui de l’expert-comptable, de préparer
l'avenir de l'entreprise, avec des documents comptables
prévisionnels améliorés. Documents qui attestent une trésorerie
future qui pourra rembourser les créanciers, selon un plan de
remboursement arrêté à la fin de la procédure.
 De plus, cette période va permettre de connaître précisément le
montant des dettes à rembourser dès que la restructuration sera
lancée et que cette même période d'observation sera finie.
 Enfin par l'ouverture de la procédure de la sauvegarde, l'antériorité
et le passé de l'entreprise sont totalement occultés.

La reconstitution de l'entreprise à cette étape est donc fortement attendue.

2. Les conséquences de la période


Dès le jugement d'ouverture de la procédure, les poursuites individuelles à
l'encontre du débiteur sont suspendues. Le cours des intérêts légaux et
conventionnels ainsi que leur majorations ou intérêts de retard sont
arrêtés pour les prêts d'une durée inférieure à un an. Dans certains cas, le
Tribunal peut également suspendre une procédure d'interdiction d'émettre
des chèques, dès lors que celle-ci a été engagée pour des faits antérieurs
au jugement d'ouverture de la procédure de sauvegarde. Le débiteur doit
lui aussi respecter de nouvelles règles. Il lui est notamment interdit :

 de payer toute créance née antérieurement au jugement


d'ouverture, c’est le gel du passif ;
 de payer toutes les créances postérieures au jugement d'ouverture
sauf si elles sont en lien avec les besoins du déroulement de la
procédure.

- 47 -
PARTIE I - Chapitre 3 - Mise en place de la procédure de sauvegarde

Le jugement d'ouverture suspend également toute action contre les


personnes physiques qui ont consenti un cautionnement ou une garantie
réelle en faveur de l'entreprise en difficulté.

3. Les intervenants à la situation


Le débiteur reste le chef de son entreprise. Il poursuit les relations
commerciales, ainsi que son travail de suivi. Il est appuyé par son expert-
comptable pour certaines tâches, par le président du Tribunal et par
l’administrateur judiciaire selon les seuils.

L'administrateur judiciaire et le mandataire judiciaire vont établir divers


rapports pour renseigner à la fois le Tribunal et son président, le juge-
commissaire et le procureur de la République. Le mandataire judiciaire va
procéder, avec l'aide du chef d'entreprise et de son expert-comptable, à la
vérification des créances qui permettra d'établir un état des créances à
jour.
L'administrateur judiciaire, quand il est nommé, se voit confier des
missions de surveillance et de contrôle quant à la gestion du débiteur, et
des missions d'assistance, pour les grands choix économiques et
stratégiques à prendre pour l'entreprise en difficulté.

Le président du Tribunal peut en outre ordonner certaines mesures


conservatoires à l’égard des patrimoines autres que celui affecté à
l'activité professionnelle d'un entrepreneur individuel à responsabilité
limitée. Ou encore des mesures conservatoires à l'égard des biens de
tiers en cas de confusion des patrimoines ou de fictivité de la personne
morale.

Enfin, l’avocat, en tant que conseil du chef d’entreprise pourra également,


en partenariat avec l’expert-comptable, l’assister et le conseiller tout au

- 48 -
PARTIE I - Chapitre 3 - Mise en place de la procédure de sauvegarde

long de la procédure. Il peut être un soutien supplémentaire pour le


dirigeant en difficulté.

4. Les éléments à fournir


Pendant la période d’observation plusieurs éléments sont attendues par le
Tribunal de commerce. Voici les éléments :

 Un inventaire réalisé par le dirigeant seul s'il obtient la certification


d'un expert-comptable ou par un huissier de justice, notaire, ou
encore commissaire-priseur judiciaire c'est l'article L. 622-6-1 du
Code de commerce qui spécifie les modalités.
 Une déclaration vérification et admission des créances par le
mandataire judiciaire, encadrée par l'article L. 624-1 du Code de
commerce.
 Des comptes de résultat prévisionnels améliorés permettant de
mettre en avant les évolutions positives de la trésorerie requise
pour le paiement des créanciers.
 Enfin des situations comptables intermédiaires peuvent être
réclamées pour démontrer les incidences de la période
d’observation sur la trésorerie et vérifier que le débiteur n’accumule
pas de nouvelles dettes.

C – Le plan de sauvegarde et ses effets

1. Le projet de plan
Après l'élaboration du bilan économique et social, il convient désormais de
déterminer l'origine et l'importance des difficultés. À la suite, un voire
plusieurs projets de plans sont élaborés.

Qui rédige le projet de plan ?

- 49 -
PARTIE I - Chapitre 3 - Mise en place de la procédure de sauvegarde

Le projet de plan est élaboré par le débiteur, avec l'assistance de


l'administrateur si sa présence est statuée, et de ses conseils, expert-
comptable et avocat. Les créanciers, dans le cadre de la procédure avec
comité, peuvent aussi présenter des projets de plan, en concurrence ou
non avec le projet de plan du débiteur, et ce depuis l'ordonnance du 12
mars 2014.

Que contient le plan ?


Le projet de plan contient trois grands volets, en corrélation avec les trois
finalités de la procédure de sauvegarde. Nous retrouvons ainsi un volet
économique, qui va déterminer les perspectives possibles de
redressement en fonction du marché, des financements réalisables et de
l'activité.

Le deuxième volet social a à charge l'exposition et la justification, le


niveau et les perspectives d'emploi afin d'assurer les conditions sociales
pour la poursuite de l’activité. Toutefois, il est à noter qu'un projet de plan
peut prévoir des licenciements et prévoir ainsi les actions à entreprendre
pour l'indemnisation des salariés concernés ou leur reclassement.

En dernier lieu le volet financier s'attache à prévoir les modalités de


règlement du passif et les garanties éventuelles à suivre par le chef
d'entreprise pour assurer l'exécution du plan. Le cas du groupe Vivarte
(Annexe II) est un exemple concret. Cas étudié de façon détaillé dans la
partie II. Le chef d’entreprise et son expert-comptable, en compagnie de
l’administrateur judiciaire s’il est nommé, élaborent les propositions de
délai et de remise de dettes. Transmises par la suite aux créanciers,
représentant du personnel et au mandataire judiciaire. Il recueille ensuite
par écrit ou oral l'accord de chaque créancier.

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PARTIE I - Chapitre 3 - Mise en place de la procédure de sauvegarde

La constitution de comités de créanciers est obligatoire pour les


entreprises de grande taille, de plus de 150 salariés ou de plus de 20
millions de chiffre d’affaires. Deux comités, véritables groupements de
créanciers se réunissent en fonction de leur nature ; à savoir un comité
pour les établissements de crédits et un comité pour les principaux
fournisseurs. L’article L.626-29 du Code de commerce précise les
conditions de constitution de ces comités. Ces derniers ont pour rôle de
prendre une décision commune et à la majorité des deux tiers du montant
des créances au regard des propositions de plan du débiteur.

2. L’adoption du plan et ses conséquences : le client et l’expert-


comptable en soutien mutuel
Si le projet de plan n'est pas recevable, ne respectant pas les droits des
créanciers et des salariés, le Tribunal modifiera la procédure en
redressement ou liquidation judiciaire, selon les conditions.

En présence de plusieurs projets, c'est le Tribunal qui sélectionne le projet


de son choix. La fin de la période d'observation est marquée par l'adoption
du plan de sauvegarde. Réside alors l'obligation de respecter les
dispositions du plan et de payer les créanciers.

Le client débiteur, peut solliciter la radiation des mentions liées à sa


procédure de sauvegarde, retrouver ses pouvoirs normaux et dispose à
nouveau de ses biens. L’expert-comptable détaille à son client les
conséquences financières directes liées à l’adoption du plan final. C’est lui
qui répond aux interrogations du chef d’entreprise et qui peut rencontrer
au besoin le Président du Tribunal de Commerce pour appuyer un plan
par rapport à un autre.

3. L’exécution du plan
La phase d'exécution du plan s'ouvre, sous la surveillance du
commissaire. Voici les effets sur les différents acteurs concernés.

- 51 -
PARTIE I - Chapitre 3 - Mise en place de la procédure de sauvegarde

Pour les cautions et les garants :


Les cautions, les personnes coobligées ou encore les personnes ayant
cédé ou affecté un bien en garantie peuvent demander les remises de
dette et délai de paiement décidés par le plan. Le Tribunal peut également
leur octroyer un délai ou différé de paiement de deux ans maximum.

Pour les salariés :


Un licenciement économique est peut-être envisagé dans le plan de
sauvegarde. Le droit commun du licenciement s'applique alors.

Pour les dirigeants de la personne morale :


Le débiteur dispose de ses biens. Il peut vendre un bien non mentionné
dans le plan et récupérer, sans accord préalable du juge-commissaire ou
du Tribunal, le produit de la vente. Il poursuit l’activité de l’entreprise et
doit respecter les termes du plan, notamment les règlements des dettes.

D – Les créanciers

1. Les différentes typologies de créances


Suite à l’ouverture de la procédure de sauvegarde, le période
d’observation débute. Le gel du passif est de droit. Les créances
antérieures vont donc subir les errements de la procédure et seront
englobées dans le plan. En cas d’exécution du plan, elles seront soldées
selon les dispositions prévues de ce dernier.

L’objectif étant la poursuite de l’activité, de nouvelles créances vont


apparaitre après le début de la procédure. Il s’agit des « créances nées
régulièrement après le jugement d’ouverture pour les besoins du
déroulement de la procédure ou de la période d’observation, ou en

- 52 -
PARTIE I - Chapitre 3 - Mise en place de la procédure de sauvegarde

contrepartie d’une prestation fournie au débiteur pendant cette période »6.


A l’origine, ces créances devaient être payées au comptant. Cette règle,
en défaveur du débiteur, constituait un frein à l’ouverture de la procédure
de sauvegarde. L’ordonnance du 12 mars 2014 a supprimé cette règle
afin que le débiteur conserve les délais de paiement négociés avant
l’ouverture de la procédure. Ces créances doivent ainsi être réglées à leur
échéance. Ce délai n’est parfois pas respecté. Dans ce cas, l’article L
622-17 du Code de commerce stipule : « Lorsqu’elles ne sont pas payées
à l’échéance, ces créances sont payées par privilège avant toutes les
autres créances… ». Par conséquent en cas de défaut de paiement, elles
bénéficieront d’un rang prioritaire. Cela constitue une réelle sécurité pour
le nouveau créancier. En effet, en cas de défaillance, ce privilège lui
apportera une forte chance de paiement. L’ordre des rangs de paiement à
respecter en fonction des créances est le suivant :

1. Les frais de justice


2. Les créances superprivilégiés des salaires
3. Les prêteurs de la procédure de conciliation
4. Les créances postérieures

L’article cité en référence n’a vocation à s’appliquer que dans deux cas.
Le premier à l’exécution du plan de sauvegarde. Les créances
postérieures non payées seront soldées avant les créances antérieures.
Le deuxième, en cas de liquidation judiciaire. Nous notons bien entendu,
qu’un défaut de paiement des créances postérieures entraînera
généralement la liquidation judiciaire, l’entreprise n’étant pas en mesure
de subvenir aux besoins de son activité.

6
Article L 622-17 du Code de commerce

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PARTIE I - Chapitre 3 - Mise en place de la procédure de sauvegarde

2. Les déclarations de créances


Les déclarations de créances correspondent à une étape cruciale de la
procédure collective. En effet, cette démarche va permettre aux organes
de la procédure de déterminer l’étendue du passif et donc d’apprécier les
perspectives réelles de sauvegarde et d’apurement du passif. Plus la dette
totale sera faible, plus l’entreprise aura de chance de présenter un plan de
sauvegarde réalisable. Cette déclaration est donc un point sensible qui a
suscité de nombreux contentieux.

C’est l’article L 622-24 du Code de commerce qui régit les déclarations


des créances : "A partir de la publication du jugement, tous les créanciers
dont la créance est née antérieurement au jugement d'ouverture, à
l'exception des salariés, adressent la déclaration de leurs créances au
représentant des créanciers."

Les créances nées après le jugement d'ouverture et ne bénéficiant pas du


privilège de procédure doivent elles aussi faire l'objet d'une déclaration.
L'article 99 du décret en Conseil d'État fixe à 2 mois le délai de déclaration
des créances à compter de la publication au Bodacc du jugement
d’ouverture de la procédure. Cette déclaration spécifie le montant de la
créance due au jour du jugement d'ouverture, et peut spécifier une
évaluation si le montant n'est pas encore fixé.

Une nouvelle action a été mise en place pour compléter cette déclaration
de créances. Il s'agit de l'action en relevé de forclusion, qui allonge le délai
de déclaration de 6 mois à compter de la publication du jugement
d'ouverture pour les créanciers qui auraient été dans l'impossibilité de
déclarer dans les temps. Notons de plus que la sanction d'absence de
déclaration n'est plus l'extinction de la créance mais le défaut de

- 54 -
PARTIE I - Chapitre 3 - Mise en place de la procédure de sauvegarde

participation aux répartitions et dividendes (sauf action en relevé de


forclusion par le juge-commissaire).

L’ordonnance n° 326 du 12 mars 2014 a également apporté une


modification importante dans le principe des déclarations de créances.
En effet, « lorsque le débiteur a porté une créance à la connaissance du
mandataire judiciaire, il est présumé avoir agi pour le compte du créancier
tant que celui n’a pas adressé la déclaration de créance… ». Cette
réforme sécurise donc les créanciers.

3. Les salariés
La procédure de sauvegarde ne prévoit pas la procédure simplifiée des
licenciements, comme cela peut être le cas au sein d'une procédure de
redressement.

L'AGS, Association pour la gestion du régime de Garantie des créances


des Salariés est l'organisme patronal fondé sur le principe de solidarité
interprofessionnelle des employeurs. Cette association est financée par
leurs cotisations. Intervenant davantage en cas de redressement ou de
liquidation judiciaire de l'entreprise, elle agit de façon limitée et encadrée
dans le cadre d'une procédure de sauvegarde. En effet, cette entité ne
couvre pas les sommes dues aux salariés à la date du jugement
d'ouverture, n'intervient pas devant la juridiction prud'homale et ne
supporte pas les indemnités compensatrices versées en cas de rupture du
contrat de travail consécutive à un sinistre.
L’AGS peut néanmoins être appelée durant la période d'observation, en
cas d'insuffisance des fonds disponibles caractérisée, pour financer les
ruptures de contrat et les autres créances salariales. L’Association de
Garantie des créances des Salariés est subrogée dans les droits des
salariés pour lesquels elle a avancé des créances. Et depuis l'ordonnance
du 12 mars 2014 et son décret d'application du 30 juillet 2014, elle est

- 55 -
PARTIE I - Chapitre 3 - Mise en place de la procédure de sauvegarde

présente à l'audience d'ouverture si la structure salariale est au moins


égale à 50.

- 56 -
PARTIE I - 0 Conclusion

Conclusion

La loi de sauvegarde demeure une avancée significative pour le traitement


des entreprises en difficulté. L'histoire a démontré que les traitements et
punitions réservés au failli d'autrefois, alliant primitivisme, rejet de la
société et exposition publique ont bien changés. Le débiteur est
aujourd'hui accompagné et aidé. La loi de sauvegarde et notamment la
procédure de sauvegarde, détaillée puis mise en pratique dans notre cas
client démontre les nouvelles intentions du législateur. Il s'agit d'anticiper,
d'aider, de prévenir et de traiter au plus tôt les difficultés rencontrées par
les entreprises. L'état de cessation des paiements est ainsi évité, et les
chances de survie de l'entreprise et de maintien des emplois sont
aujourd'hui prouvés.

Autant d'éléments qui nous conduisent à notre deuxième partie, se voulant


démonstratrice d'une procédure de sauvegarde préventive et salvatrice
pour le chef d'entreprise, offrant un certain nombre d’avantages.

- 57 -
PARTIE II - Chapitre 1 - Une véritable seconde chance pour le dirigeant et son entreprise
en difficulté

PARTIE II - COMMENT LA PROCEDURE DE SAUVEGARDE POUR UNE


ENTREPRISE EN DIFFICULTE PEUT REVELER OPPORTUNITES ET
AVANTAGES AU CHEF D’ENTREPRISE MIS A MAL ?

A ce stade, le diagnostic est clair. L’entreprise est en difficulté et la seule


issue à la fois préventive et curative est la procédure de sauvegarde. Le
chef d’entreprise a été informé du processus complet, des intervenants et
des différentes étapes. Il reste maintenant à agir vite.

La procédure de sauvegarde va amener le dirigeant à réorganiser son


entreprise. Le but recherché étant de la sauver, maintenir ses emplois,
pérenniser son activité et conserver les acteurs opérationnels ainsi que les
partenaires. La période pendant laquelle le dirigeant va pouvoir agir,
mettre en place son nouveau modèle, réorganiser l’entreprise est nommée
la « période d’observation ». Nous allons mettre en avant dans cette
deuxième partie les différents avantages de cette procédure, les divers
effets positifs et opportunités pour l’entreprise qui est en état de crise ou
s’apprête à y entrer.

Chapitre 1 - Une véritable seconde chance pour le dirigeant et son


entreprise en difficulté

A – La réorganisation de l’entreprise

La période d’observation va permettre au chef d’entreprise de travailler


son modèle économique, lui donner l’opportunité de rebondir et
d’améliorer sa situation économique.

1. La restructuration de l’actif
L’actif demeure le premier élément à restructurer. Plusieurs secteurs
peuvent être ainsi étudiés.

- 58 -
PARTIE II - Chapitre 1 - Une véritable seconde chance pour le dirigeant et son entreprise
en difficulté

En premier lieu, l’attention est portée sur le poste « clients ». Il faut en


effet établir un point complet sur l’état des créances clients. Cet état
permettra ensuite de mettre en avant les créances classiques et d’isoler
les créances douteuses. En fonction des délais de paiement, des relances
devront être mises en place. A défaut de paiement, le chef d’entreprise
pourra utiliser les compétences de son avocat pour intervenir sur le
recouvrement.

Dans un deuxième temps, il convient d’analyser la liste des


immobilisations. Sont à conserver toutes les immobilisations nécessaires à
l’activité et à la cession des autres est à envisager.

Enfin, un inventaire complet des stocks s’impose. Cela permettra de


mettre à jour l’état qui devra être fourni au début de la période
d’observation. C’est également un élément important pour le calcul des
marges afin de pouvoir contrôler le modèle économique. Ces différentes
actions sur la restructuration de l’actif n’ont qu’un seul but : dégager de la
trésorerie. Il est donc primordial en période d’observation d’améliorer ce
poste pour maintenir une certaine condition de fond au dossier de
sauvegarde.

2. Le réaménagement du passif
Un réaménagement du passif est tout autant nécessaire. En effet pendant
la procédure, les dettes antérieures ne peuvent être payées. Elles vont
ainsi rester stables jusqu’à l’adoption du plan. Afin d’assurer un suivi
régulier et de dissocier les dettes antérieures des encours survenus
pendant la période d’observation, il convient de faire une séparation
comptable des comptes. Ce réaménagement comptable sera très utile
pour étayer les documents à fournir au cours de la procédure. Il permettra
également au chef d’entreprise d’être au plus près de sa gestion

- 59 -
PARTIE II - Chapitre 1 - Une véritable seconde chance pour le dirigeant et son entreprise
en difficulté

comptable. L’expert-comptable jouera un rôle essentiel dans ces


aménagements.

3. La nécessité de repenser le modèle économique


Lorsqu’un dirigeant demande à entrer en procédure de sauvegarde, cela
signifie qu’il n’est pas en mesure de surmonter seul des difficultés avérées
de diverses natures. Comme nous l’avons évoqué précédemment, ces
difficultés peuvent être de plusieurs natures : économiques, sociales,
fiscales ou encore environnementales…etc. De ce constat, le chef
d’entreprise doit opérer les changements nécessaires afin de démontrer
que suite à la période d’observation, il sera en mesure de poursuivre
l’activité et de régler le plan de sauvegarde.

En fonction des difficultés, les actions du dirigeant seront diverses. Le


modèle économique est très souvent impacté. A titre d’exemple, voici
quelques actions que le dirigeant peut être amené à effectuer. La cession
d’un outil de production dédié, un effort commercial afin de compenser
une perte de chiffre d’affaires. Il incombe au dirigeant de trouver la
solution adéquate à chaque dysfonctionnement dans le but de sauver
l’entreprise.

Analyses de situations pratiques :


Les difficultés peuvent également relever de l’organisation même de
l’entreprise. Pour modèle, citons le départ d’un salarié « homme clé ».
Celui-ci risque rapidement d’engendrer des difficultés à l’entreprise. Le
remplacement d’un tel salarié clé peut être long voire impossible selon les
postes. Dans ce cas, une réorganisation de l’activité est fortement
conseillée.
-Certaines entreprises et leurs fonctionnements restent liés à la politique
économique et fiscale de l’Etat. Le secteur du photovoltaïque en est
l’illustration. Le changement de l’Etat en termes d’avantages fiscaux pour

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PARTIE II - Chapitre 1 - Une véritable seconde chance pour le dirigeant et son entreprise
en difficulté

les particuliers et au niveau du prix d’achat de l’électricité ont engendré de


forts bouleversements pour les entreprises de ce secteur. Pour survivre à
cela, il devient nécessaire de revoir en profondeur le modèle économique.

-Nous pouvons également citer le cas des sociétés de services à la


personne qui dépendent totalement du crédit d’impôt accordé aux
prestations fournies. Une annulation de ce dernier par le législateur serait
la source de nombreuses défaillances d’entreprises. Encore une fois, pour
maintenir l’activité et sauver l’entreprise, le dirigeant devra revoir son
modèle économique.
-Par ailleurs, sur le plan environnemental, les modifications de normes
engendrent elles aussi des risques pour les entreprises. Autant de
situations données qui peuvent fragiliser des entreprises si le modèle
économique n’est pas remis en question et restructuré pour pérenniser les
emplois. Dans ces différents cas, le point commun reste le facteur temps.
La réorganisation de l’activité ou encore la modification du modèle
économique ne peuvent s’opérer au terme de délais très courts. Ainsi, la
procédure de sauvegarde grâce à sa période d’observation, permet au
dirigeant d’obtenir des délais supplémentaires fondamentaux pour la
refonte de son modèle. Ces délais correspondent également à un réel
avantage économique par rapport à un concurrent ne bénéficiant pas de
délais spécifiques.

4. La poursuite de l’activité
La poursuite de l’activité est un point essentiel de la période d’observation.
En effet, le dirigeant pourra librement continuer à commercer et maintenir
ses relations professionnelles. Il a à charge de prouver pendant cette
période d’observation que son activité est viable ou le sera suite aux
changements opérés. Sur le plan productif pendant les premières
semaines, aucun changement n’est effectué. C’est le maintien en action
de l’entreprise. Le chef d’entreprise, accompagné de ses conseils et

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PARTIE II - Chapitre 1 - Une véritable seconde chance pour le dirigeant et son entreprise
en difficulté

notamment de son expert-comptable, envisagent les différents


changements à opérer pour la continuité de la vie de la société.

B – Les salariés

1. L’importance de faire un bilan social


Le bilan social est une étape très importante au cours de la période
d’observation. En effet, les premiers impactés par une procédure
collective sont très souvent les salariés. Dans le cadre d’une procédure de
sauvegarde, il est d’autant plus important de soigner sa réflexion sur ce
poste, car le but recherché demeure toujours la sauvegarde de l’entreprise
et le maintien de l’emploi. Autant d’interrogations primordiales. La masse
salariale est-elle trop importante par rapport au volume d’activité ?
L’organisation interne est-elle adéquate ? Le personnel est-il assez
qualifié ? Voici à titre d’exemple les diverses questions posées par le chef
d’entreprise, et pour lesquelles des réponses sont attendues.

L’appui des différents conseils du chef d’entreprise sera très important


pour le bilan social. La nouvelle stratégie doit permettre de sauver
l’entreprise, mais la réflexion doit surtout aboutir à un nouveau modèle
applicable à moyen terme, et durable jusqu’à la fin du plan de sauvegarde.
Le bilan social est donc une étape très importante.

2. Le besoin d’une communication claire


« Les deux choses les plus importantes n’apparaissent pas au bilan de
l’entreprise : sa réputation et ses hommes. » Henry Ford. A ce stade, le
besoin d’une communication claire est donc capital, tant pour la réputation
à venir de l’entreprise que pour l’ensemble du personnel affecté. Il
convient donc d’informer le plus rapidement possible l’ensemble des
salariés de l’entreprise. La procédure de sauvegarde est une procédure
publique, il revient au chef d’entreprise la responsabilité de communication
et d’information de l’ouverture du dossier de sauvegarde de l’entreprise. Il

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PARTIE II - Chapitre 1 - Une véritable seconde chance pour le dirigeant et son entreprise
en difficulté

est nécessaire d’informer également des raisons qui justifient l’ouverture


de cette procédure. En effet, chaque acteur de l’entreprise doit connaître
les divers objectifs attendus et fixés d’une telle mesure. C’est par une
communication claire que l’entreprise en son ensemble en sera
responsabilisée, et surtout partie prenante de ce nouveau projet
économique. Ce second souffle représente une opportunité générale pour
le chef d’entreprise et l’entreprise elle-même. La notion de protection,
insufflée par la loi de sauvegarde est une valeur à communiquer à tous.

3. Un nouvel élan
Une nouvelle organisation a été trouvée sur le plan social, peut-être même
proposée par certains salariés. Un nouveau processus de formation a
peut-être été mis en place. Certains salariés ont changé de poste, d’outils
de travail ou ont tout simplement quitté l’entreprise. Autant d’éléments qui
permettent à l’équipe en place de travailler autour d’un nouvel
engouement qu’il faut exposé comme étant positif.
Si par la suite la procédure est réussie, un sentiment de réussite règnera
au sein de l’équipe. C’est tout l’outil de production qui sera remobilisé pour
pérenniser l’entreprise.

C – Le maintien des contrats en cours

1. Les contrats avec les partenaires financiers


Sauvegarder son entreprise représente pour le débiteur la sauvegarde de
ses relations contractuelles antérieures. Ainsi, l'ouverture de la procédure
n'entraîne aucunement à elle seule la rupture d'un contrat en cours. La loi
autorise l'administrateur à exiger l'exécution des contrats en cours, pour
fournir la prestation attendue au débiteur.

Un contrat peut être résilié de plein droit qu'après une mise en demeure,
adressée elle-même à l'administrateur, et restée plus d'un mois sans

- 63 -
PARTIE II - Chapitre 1 - Une véritable seconde chance pour le dirigeant et son entreprise
en difficulté

réponse. Sinon, malgré le défaut d'exécution par le débiteur


d'engagements antérieurs au jugement d'ouverture, le cocontractant est
tenu de remplir ses obligations.

Le débiteur est protégé par la loi pour la continuité de ses contrats. Sont
concernés par cette règle les contrats seuls, et non les statuts. Depuis
l'ordonnance du 18 décembre 2008, sont éligibles au traitement
préférentiel, toutes créances nées en contrepartie d'une prestation fournie
au débiteur.

2. Les engagements avec les fournisseurs


Nous avons vu précédemment que les créanciers ont l'obligation de
déclarer leurs créances selon les articles L 622-24 et L 622-25. En
l'absence de bonne déclaration dans les délais, le créancier se voit absent
de participation aux répartitions et dividendes. Ces créances deviennent
inopposables au débiteur pendant l'exécution du plan de sauvegarde, et
peuvent l'être après si les engagements énoncés dans le plan ont été
tenus.
L'inopposabilité s'applique au débiteur, aux coobligés, et ce durant toute la
durée du plan.

La réforme de 2014 a également apporté un avantage considérable


concernant les contrats en cours pour la procédure de sauvegarde face à
au redressement : la fin du paiement comptant des contrats maintenus. En
effet, lorsque le débiteur bénéficiait de délais de paiement, il se trouvait
défavorisé par la procédure de sauvegarde dans la poursuite de son
activité. L’article L622-13 du Code de commerce mis à jour le 12 mars
2014 met donc fin à cette règle. Nous comprenons ici la volonté du
législateur de maintenir le chef d’entreprise dans les mêmes conditions
antérieures à l’ouverture de la procédure, et ce afin d’optimiser ses
chances de sauvetage.

- 64 -
PARTIE II - Chapitre 1 - Une véritable seconde chance pour le dirigeant et son entreprise
en difficulté

Enfin, le débiteur peut trouver lui-même un intérêt dans la résiliation de


certains contrats en cours. Depuis 2008, si cette résiliation est nécessaire
à la sauvegarde de l’entreprise et ne porte pas une atteinte excessive aux
intérêts du cocontractant, le débiteur peut demander la résiliation du
contrat en sollicitant le juge commissaire.

3. L’entente avec le bailleur


Le bailleur est un acteur non commercial de la vie de l’entreprise. Dans
l’objectif de sauvetage de l’entreprise, une communication efficace avec
ce dernier est utile. L’ouverture d’une procédure de sauvegarde n’entraine
aucunement la résiliation de plein droit du bail. Cela contribue à la
poursuite de l’activité. De ce fait, les termes du contrat doivent également
être respectés, notamment concernant le paiement des loyers.

Dans le cadre de la restructuration de l’entreprise, le dirigeant peut trouver


un intérêt à la résiliation du bail. A ce titre, l’article L.622-14 du Code de
commerce relatif au bail des immeubles affectés à l’activité de l’entreprise,
prévoit la possibilité pour l’administrateur de demander la résiliation du bail
à tout moment dès l’ouverture de la procédure. Cette décision sera valable
après information au bailleur. En l’absence d’administrateur judiciaire,
c’est au débiteur lui-même de faire la demande de résiliation après avis
confirme du mandataire judiciaire.

A contrario, la poursuite de l’activité étant la clé de la sauvegarde de


l’entreprise, l’intérêt ici est de maintenir le bail. Dans ce cadre, le dirigeant
doit être à jour du règlement des loyers. En cas de défaut, il dispose tout
de même d’une carence de trois mois avant de recevoir la demande de
résiliation du bail de la part du bailleur. Si toutefois le règlement des
sommes dues concernant l’utilisation des locaux postérieure à l’ouverture

- 65 -
PARTIE II - Chapitre 2 - Le sort des créanciers et les avantages financiers de la mesure

de la procédure était effectué, avant l’expiration de ce délai, la résiliation


serait irrecevable.

Chapitre 2 - Le sort des créanciers et les avantages financiers de la


mesure

A – Le gel du passif et ses conséquences

1. Les effets immédiats sur la trésorerie


L’ouverture d’une procédure de sauvegarde entraîne de plein droit,
l’interdiction de payer toute créance née avant la date du jugement. C’est
le gel du passif. C’est l’un des attraits principaux, et peut-être même l’une
des conditions premières du sauvetage. Le gel du passif aura pour effet
immédiat une augmentation de la trésorerie. En effet, l’entreprise continue
d’encaisser ses créances en cours et stoppe dans le même temps le
paiement de ses dettes, notamment des dettes financières. L’impact en
devient considérable sur la trésorerie. Cela va donc générer un véritable
second souffle pour le dirigeant fragilisé par un pilotage de trésorerie
difficile depuis plusieurs mois.

Cette évolution positive de la trésorerie sera également une preuve


supplémentaire face au Tribunal, qui appuiera une activité pérenne. En
effet, les situations intermédiaires fournies au Tribunal de commerce
démontreront les effets positifs de l’ouverture procédure mais également
laisseront apparaître les prémices du sauvetage et la possibilité de
règlement de la dette gelée. Par ailleurs, un état positif de trésorerie
permettra de rassurer les partenaires financiers dans le choix de cette
procédure de sauvegarde. Les fournisseurs, parfois inquiets par la
procédure judiciaire de leur débiteur et client, vont être rassurés eux aussi
par les paiements sans difficulté des nouvelles commandes.

- 66 -
PARTIE II - Chapitre 2 - Le sort des créanciers et les avantages financiers de la mesure

L’amélioration du poste de trésorerie est donc l’une des conditions


condition du
nouvel élan apporté par la procédure à l’entreprise. Cet élan est par
ailleurs visible dès les premières semaines de la péri
période
ode d’observation. Le
graphique ci-dessous
dessous illustre les effets positifs du gel du passif selon sa
durée, sur l’issue de la procédure de sauvegarde.

Issue de la procédure de sauvegarde selon la durée d’observation

Par ce graphique, nous constatons qu’i


qu’ill existe un lien de cause à effet
entre la période d’observation et l’adoption d’un plan de sauvegarde. En
effet, le graphique prouve que plus la durée de la période d’observation
est longue, plus les chances d’aboutir à un plan de sauvegarde sont
élevées. D’autre part nous relevons que pour plus de 40% des cas
cas, la
période d’observation est supérieure à 12 mois. Dans ce contexte, nous
observons que la grande majorité des entreprises obtiennent un plan de
sauvegarde. En complément, il s’avère que lorsque la durée d’observation
est inférieure à 12 mois
mois, les chances de validation d’un plan de
sauvegarde sont réduites.

7
Source France Stratégie : Entreprise en difficulté financière : procédure de sauvegarde
ou redressement judiciaire.

- 67 -
PARTIE II - Chapitre 2 - Le sort des créanciers et les avantages financiers de la mesure

2. L’information des créanciers partenaires


Comme nous venons de l’évoquer, la période d’observation a pour effet
de geler les dettes antérieures au jour d’ouverture de la procédure. De ce
fait, les créanciers sont informés du non-paiement immédiat de leurs
créances, et de l’ouverture d’une procédure de sauvegarde. Les
fournisseurs font partie des créanciers. Certains d’entre eux peuvent être
les principaux apporteurs de matières premières ou de marchandises du
chef d’entreprise. Ils peuvent être également des prestataires de services
nécessaires à l’activité, ou des partenaires du dirigeant comme l’expert-
comptable par exemple.

Afin de pouvoir poursuivre l’activité dans des conditions optimales, il est


donc primordial de communiquer clairement avec certains fournisseurs.
Dans le cas contraire, ces derniers pourraient refuser, en l’absence de
contrat, de poursuivre une relation commerciale avec l’entreprise. Nous
pouvons conseiller au dirigeant de maintenir un niveau de dettes assez
faible avec les fournisseurs les plus importants pour l’activité afin d’éviter
des difficultés commerciales en cas de défaillance et de procédure
collective.

B – Les manquements des créanciers

1. Au niveau des déclarations des créances


La déclaration des créances est une étape importante dans le
déroulement de la procédure. Le nombre de contentieux recensés
illustrent également la fragilité de ce point. Si l’ordonnance du 12 mars
2014 sécurise davantage les créanciers, ces derniers doivent toujours être
attentifs à leurs créances. Dans les faits, ce n’est pas toujours le cas.

Depuis cette ordonnance, le débiteur doit non seulement fournir la liste


des créanciers mais également mentionner le montant de la créance.

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PARTIE II - Chapitre 2 - Le sort des créanciers et les avantages financiers de la mesure

Cette mention vaut agissement pour le compte du créancier. Nous sortons


donc des cas de forclusion de la dette dans cette situation. Pour autant, le
montant de la dette déclarée par le débiteur n’est pas forcément celui
attendu par le créancier. Avant la réforme de 2014, nous assistions à de
nombreuses créances surévaluées de la part des créanciers. Il
appartenait donc au débiteur de les contester auprès du mandataire
judiciaire. Depuis la réforme, la tendance s’est inversée. En effet le
débiteur, soit par manque de visibilité sur ses dettes, soit dans l’attente de
réaction de son créancier, pourrait déclarer des créances minorées. Dans
ce cas, c’est au créancier de la contester et d’en justifier le montant. Le
créancier semble protégé par sa déclaration de créance, mais ne demeure
pas exempté d’une action en relevé de forclusion. Le débiteur lui-même,
en cas de non déclaration de créance par son créancier, ne pourrait-il pas
revenir sur sa déclaration et contester la créance ? Rien à ce jour dans les
textes ne l’empêche de le faire.

Par ailleurs, en cas de non déclaration dans le délai de deux mois, les
créanciers seraient forclos sur l’éventuel surplus non déclaré par le
débiteur. Il est donc clair que le chef d’entreprise à tout intérêt à contester
les créances, afin d’inciter son créancier à les justifier dans les temps.
Pouvons-nous envisager dans cette optique une opportunité pour le
dirigeant ? Effectivement. Une opportunité n’est pas certaine par définition
mais fait allusion à une possible circonstance positive. C’est exactement le
cas ici. Les créanciers doivent justifier leurs créances en respectant des
délais. Les contentieux passés nous démontrent qu’il y a de nombreuses
lacunes sur ces principes.

2. Vis-à-vis de la proposition du plan


Le plan de sauvegarde représente la feuille de route. Si l’entreprise a
démontré ses possibilités de sauvegarde, qui va concrètement acter sa
réorganisation et l’apurement de son passif ? Concernant l’apurement, le

- 69 -
PARTIE II - Chapitre 2 - Le sort des créanciers et les avantages financiers de la mesure

débiteur va pouvoir proposer un choix à ses créanciers quant aux


modalités de règlements de leurs créances. Légalement sur cet aspect, le
défaut de réponse de leur part vaut acceptation. En pratique, nous notons
à de nombreuses reprises des propositions de règlement de la dette
menant à deux choix.
 Le premier choix stipulant un apurement total sur une durée
maximale de dix ans, par dividendes constants ou proratisés.
 Le deuxième choix demandant un paiement partiel, avec une
remise sur la dette ; mais immédiat à compter de la validation du
plan ou avec un délai très court.

En présence d’une seule proposition de plan, aucune difficulté. A


contrario, si les propositions sont multiples, leurs formulations sont
importantes et peuvent donc avoir des incidences sur les modalités de
règlement en cas de non réponse.

C’est l’objet principal de notre cas pratique client qui a notamment aboutit
à la jurisprudence de la Cour d’Appel de Nîmes, 15 sept. 2016, n°
15/02649. En effet, l’originalité de la proposition d’apurement de la dette
ne réside pas dans les deux choix évoqués ; soit un paiement de 25% de
la créance totale à la date anniversaire de l’adoption du plan ; soit un
paiement total sur une durée de 9 années. Elle repose sur la condition
énoncée en complément des deux options. Voici le détail de la proposition
établie par nos soins et notre client en novembre 2014. (Annexe III)

Option n° 1
Règlement des créances à hauteur de 25% pour solde de tout compte
dont le paiement interviendra à la date anniversaire de l’adoption du plan
par le Tribunal de Commerce.

Option n ° 2

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PARTIE II - Chapitre 2 - Le sort des créanciers et les avantages financiers de la mesure

Remboursement de la créance admise à hauteur de 100% sur 9 années


en neuf versements annuels, à concurrence de 5% la première année,
7,5% la deuxième année, 10% au titre des quatre années suivantes, 15%
pour la septième et huitième années et 17,50% la neuvième année.

Abstention ou refus des créanciers


« Le défaut de réponse à ces propositions amènerait l’entreprise à opter
pour la solution qui lui paraîtra la plus favorable, en l’espèce l’option 1, à
savoir paiement des créances définitivement admises à hauteur de 25 %
pour solde de tout compte conformément aux dispositions légales ».

Ce dernier paragraphe a fait l’objet dans un premier temps d’un refus de la


part du Tribunal de commerce d’Avignon. Le Tribunal invoquant le fait qu’il
ne pouvait imposer des remises aux créanciers. Notre client, dans un
second temps, a fait appel de cette décision. La Cour d’Appel de Nîmes a
rendu un arrêt positif sur la demande de notre client. La non réponse du
créancier valait acceptation de l’option 1. La Cour d’Appel considère que
les créanciers ont été explicitement prévenus des conséquences d’un
manquement de réponse. A ce titre, l’application de la proposition de plan
est avérée.

L’essence même du droit des entreprises en difficulté, à savoir la volonté


de préserver l’entreprise, ressort de cet arrêt. Les créanciers doivent être
actifs dans le cadre de la procédure de sauvegarde. A défaut, ils
s’exposent à de lourdes conséquences selon les propositions invoquées.
Nous noterons dans ce cas pratique l’avantage pécunier significatif pour
notre client, et le débiteur de façon générale. En effet, la proposition de
règlement des créances peut d’une part lui permettre d’étaler sa dette sur
une durée maximale de 10 ans, ou d’autre part de réduire
considérablement la créance. Nous pourrions ainsi conseiller à toute
entreprise en difficulté d’exprimer la proposition de règlement des dettes

- 71 -
PARTIE II - Chapitre 2 - Le sort des créanciers et les avantages financiers de la mesure

comme ci-dessus. En cas de défaut de réponse, le Tribunal de commerce


optera pour l’étalement de la dette sur la durée du plan. C’est donc une
opportunité de taille pour l’entreprise en difficulté.

Le cas du groupe Vivarte est également intéressant (Annexe II). En effet,


la dette de groupe était trop importante pour prévoir prétendre à un
apurement sur la durée maximale du plan de sauvegarde. La proposition
du dirigeant, appuyer de l’administrateur judiciaire a été de transformer la
dette des divers créanciers en capital. Les 172 créanciers ont donc
abandonné 864 millions d’euros en contrepartie d’actions du groupe. Ce
choix judicieux a permis non seulement de réduire considérablement la
dette à rembourser, passant de 1 438 millions d’euros à l’origine à 574
millions, mais également de reconstituer les capitaux propres de
l’entreprise redevenus positifs suite à l’opération. C’est une opération
importante exécutée par le groupe. Evidemment, au regard de la situation
économique au moment du dépôt de la demande d’ouverture de la
procédure de sauvegarde, la seule issue afin d’éviter la liquidation
judiciaire était peut-être celle-ci. Mais il n’en demeure pas moins qu’arriver
à convaincre un comité de 172 créanciers sur la rentabilité future de ce
groupe au regard d’un situation difficile n’était pas évident. En revanche,
c’est une solution possible au niveau des propositions de plan et qui
pourrait s’adapter à des sociétés plus petites que le groupe Vivarte.
Pourquoi pas au sein des Très Petites Entreprises ?

C – Le plan de sauvegarde

1. L’adaptation du plan aux perspectives économiques


Comme nous l’avons démontré précédemment, le plan de sauvegarde
correspond au guide de l’entreprise, qui démontrera par la suite la
sauvegarde de cette dernière ; par les actions énumérées dans ce plan.
Ces engagements sont de différentes natures et portent sur trois volets, à

- 72 -
PARTIE II - Chapitre 2 - Le sort des créanciers et les avantages financiers de la mesure

savoir la poursuite de l’activité, le maintien de l’emploi et l’apurement du


passif. De ce fait, le dirigeant de l’entreprise va adapter le plan aux
perspectives économiques réelles. La loi lui permet de lui « faciliter la
réorganisation de l’entreprise » 8.
C’est avec l’aide de ce plan de sauvegarde qu’il va devoir prouver la réelle
possibilité de sauvetage de son entreprise. Ainsi en fonction du marché,
du contexte économique, social, environnemental ou encore législatif, les
engagements devront tenir compte de toutes ces tendances. Si le but
recherché demeure le maintien de l’activité de l’entreprise, le plan pourra
prévoir également la suppression d’une branche d’activité ou encore la
cession partielle de l’entreprise.

Au niveau social, même idéologie. En effet, la réalité économique peut


amener le dirigeant à prévoir certains reclassements ou suppressions
d’emplois, sur la base du volontariat éventuellement. Le tout pour le
maintien des emplois restants. L’opportunité de réorganisation de sa
masse salariale est donc offerte au chef d’entreprise mis à mal, en cas de
défaillance sur ce poste.

Enfin, le volet financier du plan de sauvegarde va concerner l’apurement


du passif. C’est cet aspect qui permettra au Tribunal de commerce de
prendre position sur le plan, car il démontrera les performances de
l’entreprise, dans le but de régler les créanciers. Les deux premiers volets
représentent les moyens mis à disposition pour aboutir à cet apurement
du passif. Le chef d’entreprise devra mettre en corrélation ces moyens et
la dette totale de l’entreprise pour adapter le plan. C’est ainsi qu’il pourra
tenir ses engagements de remboursement, et éviter d’aggraver la situation
financière de son entreprise. Il conviendra tout d’abord d’élaborer les
différentes propositions de plan et d’en obtenir un accord de la part des

8
Article L 620-1 du Code de commerce

- 73 -
PARTIE II - Chapitre 2 - Le sort des créanciers et les avantages financiers de la mesure

créanciers et du Tribunal de commerce. Accord très important pour éviter


une situation similaire à celle explicitée dans notre cas pratique client.

2. Les propositions de plan


A l’étape des propositions de plan, le chef d’entreprise va devoir choisir
les solutions les plus adéquates et les plus avantageuses pour le
sauvetage de son entreprise.
Au niveau économique, il s’adaptera aux perspectives. L’opportunité pour
lui réside dans le temps précieux supplémentaire qui lui est offert pour
préparer les différentes actions. Il pourra ainsi, comme cela a été fait au
sein du groupe Vivarte, vendre une ou plusieurs branches d’activité.
Au niveau social, ici encore le dirigeant devra adapter ses ressources
humaines en fonction des perspectives d’avenir de son entreprise et de
ses propres ressources financières. Le tout sans fragiliser davantage
l’outil de production existant. L’opportunité pour le dirigeant réside dans
les effets notoires de la période d’observation ; qui vont permettre à ce
dernier d’envisager ses actions plus sereinement. L’ouverture de la
procédure de sauvegarde justifiera à elle seule les éventuels
licenciements économiques. Le Tribunal de commerce ne pourra en effet
passer outre en cas d’accord du plan, comme le rappelle la Cour de
cassation9.

Au niveau financier, l’opportunité réside sur plusieurs aspects. La finalité


de la proposition de règlement des dettes pourrait d’ailleurs avoir un
impact sur les aspects tant économiques que sociaux du plan. En effet,
une entreprise en difficulté dont la dette pourrait être réduite de 75 %
conserverait-elle son objectif de cession d’une branche d’activité ? Si sur
le plan économique cette branche n’a aucun intérêt pour l’entreprise, sa
cession restera évidente. Si en revanche l’objet de la vente est lié

9
Cour de cassation, chambre sociale, 12 septembre 2007, n°06-13667

- 74 -
PARTIE II - Chapitre 2 - Le sort des créanciers et les avantages financiers de la mesure

uniquement à un versement numéraire sur la trésorerie pour régler le


passif, la décision pourrait être différente.

Par ailleurs, même si le choix du chef d’entreprise ou si le plan adopté par


le Tribunal est celui de l’étalement de la dette globale, sa durée peut aller
jusqu’à 10 ans. C’est donc purement est simplement un prêt de trésorerie
sans intérêt qui est octroyé au chef d’entreprise. De nombreux dirigeants
cherchent de la trésorerie à court terme pour leur besoin de financement.
Ce prêt, quand il est accordé, est souvent coûteux et sur une durée plus
courte que 10 ans. La proposition de règlement des créanciers présente
donc bien plusieurs opportunités, les carences des créanciers comme
nous l’avons vu en partie II peuvent engendrer une réduction importante
de la dette, même si ces derniers étaient réactifs, la durée de l’étalement
de la dette serait un coup de pouce considérable pour l’entreprise.

D – La suspension des actions engagées contre l’entreprise

1. L’arrêt du cours des intérêts


Dès le jugement d'ouverture de la procédure de sauvegarde, l'arrêt du
cours des intérêts légaux et conventionnels est prononcé pour les
créanciers antérieurs au jugement. Au même titre que tous les intérêts de
retard et majorations.

L'article L 622-28 du Code de Commerce encadre cette règle. La mesure


a pour objectif de redresser si cela est possible l'entreprise, sans alourdir
la dette existante au détriment des autres créanciers. C'est un avantage
significatif qui va permettre au débiteur de rembourser les créanciers par
échelonnement. Les intérêts à échoir au jour du jugement d'ouverture de
sauvegarde ne sont pas admis au passif, et ne pourront être demandés
ultérieurement.

- 75 -
PARTIE II - Chapitre 2 - Le sort des créanciers et les avantages financiers de la mesure

Le texte indique "arrêt du cours des intérêts", et non "suspension du cours


des intérêts". Ce cours ne reprend donc pas même en phase d'exécution
du plan, comme l'indique la Cour de Cassation le 10 décembre 2002, arrêt
n 99 20478. Sauf exception pour les prêts et contrats comportant un
échelonnement d'un an ou supérieur à 1 an, où le cours est poursuivi au
taux contractuel. En pratique et par chance pour le chef d'entreprise, un
découvert bancaire ne donnera plus droit à intérêts, pénalités ou
majorations à compter du jugement d'ouverture, car il s'agit bien d'un
contrat de moins d'un an.

2. Les cautions
Il y a une distinction à faire pour le traitement des cautions.

La caution "personne morale" ne peut se prévaloir de l'arrêt du cours des


intérêts de la période d'observation. Elle ne bénéficie d'aucun
aménagement, et peut donc être exposée à des poursuites. Elle peut
demander des délais de grâce uniquement dans les conditions de droit
commun.

La caution "personne physique" bénéficie d'un traitement qui dépend de la


nature de la procédure collective du débiteur principal. En procédure de
sauvegarde, la caution et les coobligés personne physique ne peuvent
être poursuivis pendant la période d'observation. Elle peut se prévaloir de
l'arrêt du cours des intérêts pendant la période d'observation comme
l'indique l'article L 622- 28 AL 1er. Pendant le plan, ces cautions
personnes physiques bénéficient des mesures du plan, des remises ou
délais selon l'article L 626 AL 2.

Enfin, tant que le débiteur règle le plan, la caution « personne physique »


ne pourra être actionnée en paiement (Cassation Com 1er mars 2016

- 76 -
PARTIE II - Chapitre 2 - Le sort des créanciers et les avantages financiers de la mesure

n°14-16402). Dès la première échéance impayée, et au fil des autres


impayés s'ils ont lieu, le créancier pourra poursuivre la caution « personne
physique », sans avoir à attendre la résolution du plan (Cassation Com 2
juin 2015 n° 14-10673).

3. L’Interdiction des inscriptions


Dès l'ouverture de la procédure de sauvegarde, les créanciers ne peuvent
plus faire enregistrer une inscription.
Dans les faits, il leur est impossible :

 d’inscrire une hypothèque, un gage, un privilège sur l'un des biens


du débiteur, ou un nantissement
 d'effectuer des actes ou d'obtenir des décisions judiciaires de droits
réels (sauf si les décisions sont devenues exécutoires avant
l'ouverture de la procédure de sauvegarde)

Cette interdiction d'inscription ne s'applique pas à deux catégories de


créanciers, à savoir le Trésor Public et le vendeur de fonds de commerce.
Le Trésor Public pour les créances non inscrites à la date du jugement
d'ouverture, ou encore les créances en recouvrement après cette date.
Le vendeur de fonds de commerce qui conserve son droit d'inscrire un
privilège.

4. L’interdiction des paiements


L'article L 622 - 7 du Code de Commerce encadre cette règle d'interdiction
des paiements par le débiteur. Ce principe est subordonné à deux
éléments que sont la date de naissance de la créance, et l'auteur du
paiement.
Ainsi, pour les créances nées antérieurement au jugement d'ouverture de
la procédure de sauvegarde, s'applique la règle d'interdiction des
paiements.

- 77 -
PARTIE II - Chapitre 2 - Le sort des créanciers et les avantages financiers de la mesure

Trois exceptions s’appliquent.

 Les paiements par compensation de créances connexes, qui est un


mode de règlement entre deux personnes ayant entre elles des
créances et des dettes
 Les paiements des créances alimentaires
 Les créances antérieures au jugement mais ayant obtenu
l'autorisation du juge-commissaire d'être payées par le débiteur.

Les tiers peuvent agir librement pour payer directement un créancier, par
exemple par un membre de la famille du débiteur, ou par d'anciens
associés. Enfin, tout paiement passé en violation des dispositions de
l'ouverture de la procédure est annulé à la demande de tout intéressé ou
du ministère public, présentée dans un délai de 3 ans à compter de la
date du paiement de la créance.

- 78 -
PARTIE II - Chapitre 3 - Autre opportunité pour le chef d’entreprise : la cession possible
de l’entreprise en sauvegarde avec certains atouts

Chapitre 3 - Autre opportunité pour le chef d’entreprise : la cession


possible de l’entreprise en sauvegarde avec certains atouts

A – Les effets positifs de la restructuration

1. Une entreprise réglée


A l'image du groupe Vivarte que nous avons décidé de mettre en avant ;
recentré autour de six enseignes et réalisant un chiffre d'affaires consolidé
de 1, 8 milliards d'euros au 31 août 2017 ; l'expression "entreprise réglée"
semble appropriée.

En effet, ce groupe illustre parfaitement sa refonte et l'utilité d'une


procédure de sauvegarde. La restructuration programmée par le plan de
sauvegarde a totalement assaini la situation financière fortement fragilisée
de ce groupe dans sa globalité. Comme l'indique son président Patrick
Puy en janvier 2018 dans un communiqué de presse, "Vivarte a retrouvé
le chemin de la croissance et de la rentabilité grâce à une situation
financière plus saine. Tous les signaux sont au vert et permettent d'offrir à
l'entreprise et à ses enseignes de nouvelles perspectives à travers des
investissements conséquents dès l'année prochaine."

Ces résultats positifs, le groupe les doit précisément au plan de


sauvegarde et à sa nouvelle restructuration de la dette, finalisée en juin
2017, qui a vu 172 créanciers abandonner à l'unanimité 864 millions
d'euros. Le ratio dette nette/ EBITDA a atteint 4,7 fin 2007 contre 18,5 en
2016. Au total, près de 1800 postes ont été supprimés en 2015, 197
magasinsont été mis en vente, et quatre dirigeantsse sont succédés en
deux ans...

Une importante restructuration sociale et financière a été nécessaire pour


atteindre de tels résultats. Qui aurait pu imaginer un tel rebondissement
du groupe Vivarte il y a encore deux ans quand les difficultés étaient si

- 79 -
PARTIE II - Chapitre 3 - Autre opportunité pour le chef d’entreprise : la cession possible
de l’entreprise en sauvegarde avec certains atouts

colossales ? Aujourd'hui le groupe Vivarte est un des leaders du textile et


de la chaussure en France, qui se relance en 2018. Une entreprise réglée,
une stratégie de croissance et des chiffres à l'appui, autant d'atouts pour
une cession au meilleur prix.

2. Une meilleure valorisation


Être organisé, restructuré, en meilleure posture financière, et aidé par les
avantages économiques non négligeables de la procédure de
sauvegarde; autant d'éléments contribuant à une meilleure valorisation.
En effet, envisager une cession d'une entreprise en pleine crise,
rencontrant de multiples difficultés est totalement impossible, hors
situation de l'euro symbolique. En revanche, une entreprise qui a revu son
modèle économique, qui a assainit sa situation financière et ses comptes,
travaillé son mode de fonctionnement devient ainsi mieux valorisée. Elle
peut prétendre à être cédée dans des conditions honorables pour chaque
intervenant. Autre avantage, les acquisitions de droits sociaux des
sociétés en sauvegarde sont exonérées de droit d’enregistrement.

Dans les conditions que nous venons d’évoquer, n’y aurait-il pas un intérêt
pour le chef d’entreprise, lorsque l’entreprise est en difficulté, de placer
celle-ci en procédure de sauvegarde pour préparer la cession dans de
meilleures conditions ? La réponse semble évidente pour deux raisons. La
première, la valorisation pourrait être plus importante, nous en avons
évoqué les termes. En deuxième lieu, un repreneur serait peut-être plus
intéressé par une entreprise ayant déjà subi une procédure collective et
ses étapes plutôt que de devoir les traverser et les justifier lui-même.

- 80 -
PARTIE II - Chapitre 3 - Autre opportunité pour le chef d’entreprise : la cession possible
de l’entreprise en sauvegarde avec certains atouts

B - Un repreneur averti

1. La garantie de passif
Le rachat d’une entreprise en difficulté peut s’avérer intéressante pour un
repreneur. En effet, une fois le plan de sauvegarde en cours d’exécution,
la majorité des créanciers ont déjà déclaré leurs dettes au cours de la
période d’observation. Le passif hors passifs invisibles est donc connu et
validé d’avance. Cette circularisation générale représente donc une
garantie de choix sur le passif de l’entreprise à acquérir ; qui n’est pas
présente lors de négociations pour des cessions classiques.
Cette garantie vise à protéger le repreneur de dettes non identifiées. En
général, la garantie de passif constitue un point de discorde entre le
vendeur et le repreneur. Une fois le plan de sauvegarde validé, ce
protocole sera plus facilement négociable entre les différentes parties.

2. Un outil de production maîtrisé


Reprendre une entreprise en procédure de sauvegarde permet également
de reprendre un outil productif modelé et réorganisé au cours de la
période d’observation. En effet, cette dernière a permis au dirigeant de
revoir l’ensemble des postes tels que l’outil de production, ses ressources
humaines, et ce afin de rendre l’entreprise viable. Une réorganisation, un
gain en productivité et une restructuration sociale ; autant d’éléments
nécessitant une forte implication, du temps et des ressources qu’un
repreneur n’aura à apporter dès les premiers mois, dans le rachat de
l’entreprise. La reprise d’une société en procédure de sauvegarde
permettra ainsi au repreneur d’investir sur un outil de production de
nouveau maîtrisé ; en marche vers des résultats financiers améliorés.

3. Une rentabilité encadrée


La rentabilité demeure l’objectif principal d’une entreprise. En rachetant
une entreprise en procédure de sauvegarde, le repreneur est assuré que
le plan validé par le Tribunal de commerce suit le même objectif, le tout en

- 81 -
PARTIE II - Chapitre 3 - Autre opportunité pour le chef d’entreprise : la cession possible
de l’entreprise en sauvegarde avec certains atouts

corrélation avec les créanciers. Par conséquent, le repreneur obtient dès


son achat une information fiable sur la rentabilité de l’entreprise, et ses
perspectives d’évolution à court terme. A ce stade, les propositions de
plan viennent également appuyer la notion de rentabilité recherchée.
Enfin, le repreneur disposera d’une vision comptable complète et éclairée
par les différents travaux fournis par l’expert-comptable au cours de la
procédure. Les comptes de résultat prévisionnels et les situations
intermédiaires, indiquant les perspectives d’évolution améliorées à venir
viendront également étayer la rentabilité future de l’entreprise cédée.

- 82 -
PARTIE II - 0 Conclusion

Conclusion

La procédure de sauvegarde s'inscrit bien dans une démarche de


protection et d'accompagnement du chef d'entreprise en difficulté. La
mesure en elle-même, retouchée à plusieurs reprises depuis l'application
de la loi de sauvegarde de juillet 2005, octroie des avantages notables et
pécuniers au dirigeant. Le sens étymologique du mot "sauvegarde" à
savoir "garder" signifiant l'assurance est effectivement bien présente. Il est
donc important que le chef d'entreprise comprenne la finalité de cette
procédure qui est littéralement de sauver son entreprise, ses emplois et
de faire perdurer son activité. Notre cas pratique reflète l'état d'esprit de la
procédure et l'exemple de réorganisation opérationnelle du groupe Vivarte
démontre les opportunités possibles en cas de procédure de sauvegarde.

Enfin, il demeure essentiel que le chef d'entreprise s'appuie sur les


différentes instances et son expert-comptable pour atteindre dans les
meilleures conditions l'objectif de sauvegarde, et éviter ainsi la liquidation
de son entreprise. L’expert-comptable reste un allié de premier rang pour
le soutenir à chaque étape de la procédure de sauvegarde.

- 83 -
PARTIE III - Chapitre 1 - Devoir de conseil, missions de prévention et
d’accompagnement
ent de l’entreprise en difficulté

PARTIE III - RÔ
ÔLES ET OPPORTUNITES DE L’EXPERT-COMPTABLE
COMPTABLE FACE
AUX ENTREPRISES EN DIFFICULTE, DANS LE CADRE DE LA
PROCEDURE DE SAUVEGARDE

Chapitre 1 - Devoir d
dee conseil, missions de prévention et
d’accompagnement de l’entreprise en difficulté

A – L’expert-comptable
comptable et son obligation d’information

1. Les enjeux du devoir de conseil, pilier d’une relation client protégée


Le Code de déontologie
éontologie des professionnels de l'expertise comptable
prévoit par le décret n
n° 2007-1387
1387 du 27 septembre 2007, article 15 du
Chapitre 2 intitulé " Devoirs envers les clients",
", le devoir de conseil comme
une obligation. La charge d'information et de connaissances à appor
apporter
incombe à l'expert-comptable,
comptable, dans l'intérêt de son client. Le professionnel
de l'expertise comptable doit être en mesure d'évaluer les différentes
possibilités des situations rencontrées par son client, et doit sélectionner
les plus adéquates pour son client.

10

10
Source Revue SIC n° 347 de janvier 2016

- 84 -
PARTIE III - Chapitre 1 - Devoir de conseil, missions de prévention et
d’accompagnement de l’entreprise en difficulté

L'ensemble de la mission d'un expert-comptable est applicable au devoir


de conseil. Il porte à la connaissance de son client tant les obligations
légales que règlementaires générées par le fonctionnement de son
activité. Il fournit également les informations qui concernent sa situation
comptable, fiscale, juridique et sociale. L'expert-comptable, au-delà des
données chiffrées, étudie les opportunités, recherche les montages et
solutions les plus appropriés.

Un client informé et conseillé par son expert-comptable est un client plus


serein et plus fidèle. C'est par ce même devoir de conseil qu'une relation
de confiance entre le professionnel de l'expertise comptable et son client
demeure protégée et durable, à l'abri de mise en cause ou poursuites
judiciaires et civiles pour défaut de conseil.

2. Le suivi régulier de la situation économique de l’entreprise


L'expert-comptable est l’interlocuteur privilégié et régulier du chef
d'entreprise. Présent à chaque étape de la vie de l'entreprise, parfois
même depuis la création de cette dernière, c'est un pilier du système
organisationnel de l'entreprise cliente.

Il établit les comptes annuels, s’occupe parfois de la gestion sociale de la


structure pouvant établir les fiches de paie, les contrats de travail et les
déclarations sociales qui s'imposent. Il produit des situations
intermédiaires et prévisionnelles, optimise le volet fiscalité tant de la
personne morale que la personne privée du chef d'entreprise. Ses
activités sont larges et variées, et au fil des années, il devient aussi le
conseiller de référence dans les domaines fiscaux, sociaux, parfois
informatiques, pouvant conseiller même l'organisation de l'entreprise. Un
expert-comptable voit l'économie des entreprises évoluer. Du lancement
de l'entreprise avec la période de démarrage de trois ans difficiles, en

- 85 -
PARTIE III - Chapitre 1 - Devoir de conseil, missions de prévention et
d’accompagnement de l’entreprise en difficulté

passant par la stabilisation du chiffre d'affaires, l'expansion et les


investissements ; ou encore le chiffrage d'une éventuelle cession,
acquisition, transformation, il est toujours compétent et en appui.

Et ce durant aussi les périodes de crises que peut traverser une


entreprise, par le passage dans des procédures de règlement amiable ou
judiciaire. Un expert-comptable se veut pro-actif, de bons conseils, et être
le soutien incontestable du chef d'entreprise.

Au-delà de toutes les missions confiées, l’expert-comptable se doit d’être


au fait de la situation économique de son client, et ce quasiment en temps
réel. En établissant les comptes annuels, forcément à postériori, parfois
plusieurs mois après la clôture de l’exercice, l’expert-comptable détient
une vision globale à un instant donné de la situation financière. Ce
rendez-vous annuel demeure insuffisant en lui seul pour être réactif.
L’expert-comptable doit donc mettre en place un système qui lui permettra
d’avoir des informations utiles à plusieurs moments au cours de l’exercice
même. La mise en place d’indicateurs d’alerte s’impose. « L’anticipation
est la clé de la réussite de la restructuration qu’est la procédure de
sauvegarde. »11

3. Une communication éclairée des incidences d’une procédure collective


L'expert-comptable demeure l'interlocuteur de conseil du débiteur. Il
expose à son client les différentes procédures proposées ou possibles par
la loi, explique leurs conséquences respectives. L'expert-comptable étaye
les divers éléments par son expérience en cabinet, par les retours déjà
obtenus de ses clients et par les différents échanges qu'il a pu obtenir
avec les institutions. Le tout en croisant ces informations avec l'ensemble
des données chiffrées donc il dispose.

11
Interview Greffier honoraire du Tribunal de commerce Tarascon – Annexe VIII

- 86 -
PARTIE III - Chapitre 1 - Devoir de conseil, missions de prévention et
d’accompagnement de l’entreprise en difficulté

Cette communication est d'autant plus forte qu'elle permet au chef


d'entreprise de comprendre les textes de loi qui régissent les difficultés
des entreprises, évoluant eux-mêmes dans le temps et étant différents
d'un pays à l'autre au sein de la Communauté Européenne. La
sauvegarde de l'emploi prime en France, et la méconnaissance des textes
contribue à accroître voire engendrer de plus grandes difficultés à terme.
Le rôle de l'expert-comptable est capital pour l'information client.

4. L’étude personnalisée des mesures préventives


Chaque entreprise renferme sa propre histoire, requiert ses propres choix
et analyses, et dépend d'une certaine conjoncture, clientèle et enjeux
économiques. À ce titre, les différentes procédures mises en place par la
loi de sauvegarde pour aider les entreprises en difficulté s'appliquent au
cas par cas, en fonction des données chiffrées de l'entreprise, de ses
propres perspectives d'évolution et de son chef d'entreprise. L'expert-
comptable, au cœur de la relation de confiance professionnel/client
instaurée au fil de sa mission est en mesure d'opter et de faire adopter par
son client la meilleure procédure qui s'offre à lui.

Ainsi, les volets financiers, économiques et sociaux propres à son client


sont étudiés pour choisir la procédure de droit requise. Voici une liste non
exhaustive des éléments étudiés :
 Forme juridique
 Nombre de salariés
 Actif/passif
 Historique de l'entreprise
 Origine des difficultés
 Montant global des dettes
 Répartition des dettes
 Besoin de financement à court terme
 Relation commerciale avec les principaux fournisseurs

- 87 -
PARTIE III - Chapitre 1 - Devoir de conseil, missions de prévention et
d’accompagnement de l’entreprise en difficulté

 Typologie de clientèle.

B – Mission prévention : nouvelle fonction pour le professionnel de l’expertise


comptable

1. L’anticipation et le suivi de l’entreprise


Dès le suivi annuel ou trimestriel de la comptabilité de son client, l'expert-
comptable vérifie les chiffres clés de l'entreprise, croise les informations
données par le chef d'entreprise et ses projets avec les résultats chiffrés à
sa disposition.

Il est avéré qu'une prise de conscience trop tardive de la réalité et/ou de


l'importance des difficultés qui peuvent survenir, ajoute du stress et fera
perdre à terme en efficacité les mesures qui seront choisies. La réactivité
et la disponibilité du chef d'entreprise et de son expert-comptable sont les
atouts incontestés pour prévenir les crises, anticiper le pire, et surtout
surmonter ces situations.

L'expert-comptable, acteur majeur de la prévention des difficultés,


sensibilise le dirigeant. La lucidité consiste à parler des difficultés à venir
ou existantes. En complément, les Centres d'Information sur la Prévention
(CIP) ont été créés afin d’écouter les chefs d'entreprise dans un cadre
confidentiel. Ils ont pour mission d'orienter les dirigeants vers les sources
d'informations utiles à chaque situation. Le Centre d'Information sur la
Prévention ne tient aucun dossier, ne divulgue aucune information à des
tiers. Il tente de cerner les difficultés, au même titre que les experts-
comptables, pour informer le débiteur au mieux sur les solutions possibles
et nécessaires à apporter.

La prévention par l'anticipation s'applique dès la création de l'entreprise,


avec l'assistance de conseils et une étude de marché, des tableaux de
bord, une optimisation de la forme juridique à créer, un financement

- 88 -
PARTIE III - Chapitre 1 - Devoir de conseil, missions de prévention et
d’accompagnement de l’entreprise en difficulté

externe cohérent avec le projet, un seuil de rentabilité minimum. Elle


s’applique ensuite tout au long de la vie de l’entreprise, jusqu’à sa
cession.

2. Les points d’alertes et la détection des difficultés


Différentes procédures d'alerte sont à mettre en place pour détecter au
plus vite les difficultés avérées ou à venir. L'anticipation permet de
remédier plus facilement à une situation avant qu'elle ne s'aggrave.

Le chef d'entreprise peut solliciter lui-même son expert-comptable dès qu'il


éprouve des difficultés dans la gestion de son entreprise. Il peut engager
un autodiagnostic préventif pour lui permettre de déceler l'origine des
difficultés et de pouvoir y remédier. Dans la pratique, cet autodiagnostic
est en réalité souvent anticipé par l'expert-comptable du dirigeant, qui a
lui-même détecté des difficultés. Le professionnel de l'expertise comptable
adopte au quotidien une attitude active. Il lui incombe d'inciter son client à
entreprendre des mesures conformes à son intérêt. Dans le cas contraire,
il formulera des réserves.

- Prévention d'un état de cessation des paiements


L'entreprise concernée peut rencontrer des difficultés si l'actif circulant est
inférieur aux dettes à court terme. A ce titre, une grande importance doit
être portée aux délais de paiement clients et fournisseurs, afin d'équilibrer
les dépenses et les ressources.
Le niveau de la trésorerie est un indicateur important mais insuffisant à lui
seul pour prévenir d’un état de cessation des paiements.

- Prévention par détection


La méthode des scores, par l'utilisation simultanée de plusieurs ratios,
permet une appréciation globale de la situation financière de l'entreprise.
Voici quelques scores utilisés : le score sectoriel AFDCC3 (Annexe IV), le

- 89 -
PARTIE III - Chapitre 1 - Devoir de conseil, missions de prévention et
d’accompagnement
ement de l’entreprise en difficulté

score de CONAN et HOLDER pour les entreprises industrielles,


industrielles le score Z
de la Banque de France concernant l’endettement financier
financier,, ...etc.
..
Les flux de trésorerie par tableaux détectent certains dysfonctionnements.
Trois types de tableaux sont à recenser : celui de flux de trésorerie
"OEC97" (Annexe V
V), le "BDF 2000" (Annexe VI),, et "TPFF" Annexe VII).

3. Une analyse avertie des difficultés


L'expert-comptable,
comptable, tenu à l'établissement et au suivi des comptes
annuels, vérifie les principaux postes du bilan de son client. Il met en
exergue les différents critères permettant de déceler les difficultés. Ainsi,
voici un tableau non exhaustif et exemple
emple que le professionnel de
l'expertise comptable peut tenir.

12

C – Mission complémentaire à la production des comptes annuels :


l’accompagnement de l’entreprise en difficulté par l’expert
l’expert-comptable
comptable

1. Présentation de la mission et ses limites


L'expert-comptable
comptable se voit confier comme mission principale la
présentation des comptes annuels. Il atteste les comptes, en ne relevant

12
Source : Entreprise en difficulté : de la dét
détection
ection aux procédures préventives : mandat
ad Hoc, conciliation et sauvegarde

- 90 -
PARTIE III - Chapitre 1 - Devoir de conseil, missions de prévention et
d’accompagnement de l’entreprise en difficulté

aucune incohérence qui viendrait perturber la vraisemblance des comptes.


Le chef d'entreprise lui confie l'intégralité ou une partie de sa comptabilité.
L'expert-comptable établit les déclarations fiscales et sociales, en réponse
aux sollicitations de l'entreprise et de ses agents économiques tels que les
associés, les banquiers ou encore l'État. Mais l'expert-comptable
accompagne son client tout au long de sa vie d'entreprise.

Ainsi, dès l'apparition des premières difficultés, le professionnel de


l'expertise comptable figure comme un soutien moral et comptable de son
client. La dimension psychologique n'est pas à négliger dans ce contexte.
Les chefs d'entreprise, souvent dotés d'un solide optimisme pour
entreprendre, ont parfois des difficultés à appréhender la réalité. Le
manque d'anticipation de certaines d’entre elles peut s'avérer être néfaste
dans la réactivité à avoir en cas de problème. En France, nous noterons
également une perception de l'échec quasi honteuse et culpabilisante, a
contrario de ce qu'il peut se passer Outre-Atlantique, vécue véritablement
comme une expérience enrichissante. L'entreprise est un appui cartésien
considérable.

Enfin, l'accompagnement du client est très important, tant pour les rendez-
vous préparatoires, que ceux fixés avec le Tribunal, les avocats ; que pour
les différents documents fournis au dossier. L'expert-comptable
accompagne et conseille, mais ne se substitue pas aux organes
juridictionnels statuant sur le dossier.

2. Une préparation étayée de la procédure de sauvegarde


Même si le demandeur d'ouverture d'une procédure de sauvegarde reste
le débiteur lui-même, seul ; il n'en demeure pas moins qu'avant cette
demande, ce dernier a reçu au préalable les conseils avisés de son
expert-comptable, tant sur l'aspect technique de la procédure que sur les
moyens et la trame pratique qui vont suivre. Ainsi, le chef d'entreprise doit

- 91 -
PARTIE III - Chapitre 1 - Devoir de conseil, missions de prévention et
d’accompagnement de l’entreprise en difficulté

étoffer sa demande par la justification d'éléments financiers préparés en


amont par son expert-comptable, et attester qu'il ne peut surmonter seul
ses difficultés.

En ce sens, le Tribunal peut organiser des auditions facultatives,


interrogeant ainsi des personnes ayant une grande connaissance
reconnue de l'entreprise, tel que l'expert-comptable en charge du dossier.
Là encore, ce dernier est un allié fort pour aiguiller sur les chiffres clés
faisant défaut et surtout aider à trouver des solutions en vue d'une
situation et des prévisionnels améliorés.

3. Accompagnement pendant la période d’observation


Comme évoqué précédemment, la période d'observation désigne la
période qui se déroule entre le jugement d'ouverture de la procédure et le
jugement arrêtant ou non le plan de sauvegarde. Dans le jugement
d'ouverture, le Tribunal désigne plusieurs intervenants, tels que le juge-
commissaire, le mandataire judiciaire et l'administrateur judiciaire selon la
taille de la structure.

Dans les cabinets d'expertise-comptable détenant une typologie de clients


sous forme de Très Petites Entreprises (TPE), c'est l'expert-comptable qui
suit la mission générale d'assistance et de surveillance de la gestion du
débiteur. En effet dans ces structures, la nomination d’un administrateur
judiciaire n’est pas obligatoire. C'est lui également qui orientera
nécessairement de par ses choix et ses chiffres à l'appui le destin de
l'entreprise. Son accompagnement se formalisera par :

- l'établissement du bilan économique, social et environnemental


- les propositions de remises de dettes et de délais soumises aux
créanciers
- l'analyse des offres de cessions partielles d'activité

- 92 -
PARTIE III - Chapitre 1 - Devoir de conseil, missions de prévention et
d’accompagnement de l’entreprise en difficulté

- l'analyse des propositions de plan de sauvegarde.

- 93 -
PARTIE III - Chapitre 2 - L’expert-comptable : un partenaire de premier plan des
institutions

Chapitre 2 - L’expert-comptable : un partenaire de premier plan des


institutions

A – Une interprofessionnalité appréciée

1. Avec le Tribunal de Commerce et les organes adjacents


L'interprofessionnalité fait maintenant partie intégrante du paysage
professionnel de l'expert-comptable. Présente légalement depuis le
premier décret n° 2017-794 du 5 mai 2017 entré en vigueur le 8 mai, il est
désormais possible de constituer des sociétés pluriprofessionnelles
d'exercice (SPE) entre deux ou plusieurs professions du droit et du chiffre.
Ainsi experts-comptables, avocats, administrateurs ou mandataires
judiciaires peuvent unir leurs compétences et agir communément.

Dans le cadre des difficultés d'entreprise et plus précisément dans un


contexte de procédure de sauvegarde, l'expert-comptable intervient dès
les phases préparatoires de cette mesure. La juridiction nommée sur le
dossier de son client, souvent sur le même secteur géographique que la
zone professionnelle de l'expert-comptable crée déjà un lien entre les
deux parties. Ce lien est ensuite appuyé par la volonté commune de
sauver l'entreprise en difficulté, et d'aider le chef d'entreprise à surmonter
ses crises. Le Tribunal de commerce et les organes adjacents inscrivent le
client dans une procédure pour trouver une solution et ils encadrent les
évolutions de l'entreprise. Le greffier du Tribunal de commerce notamment
est un véritable acteur de la justice commerciale. Il participe activement
aux audiences concernant les procédures collectives et met en forme les
décisions rendues par les juges. Il est également l’interlocuteur privilégié
de l’avocat, du chef d’entreprise et de fait de l’expert-comptable. Ce
dernier en parallèle, veille à ce que les mesures et recommandations
soient respectées ; et met en avant par ses travaux les améliorations
obtenues.

- 94 -
PARTIE III - Chapitre 2 - L’expert-comptable : un partenaire de premier plan des
institutions

L'interprofessionnalité avec le Tribunal de Commerce, les organes


adjacents et l'expert-comptable se caractérise par ce travail d'équipe.

2. Synergie entre les métiers


Selon la Revue Française de Comptabilité13, près de 60 000 entreprises
disparaissent chaque année en France depuis 10 ans. L'expert-
comptable, au premier rang pour détecter les difficultés, comme expliqué
ci-dessus, peut dans certains cas être secondé par le chef d'entreprise lui-
même. Ce dernier peut en effet prétendre lui aussi à s'informer par
l'intermédiaire des Centres d'Informations sur la Prévention des difficultés
des entreprises. Leur rôle est de fournir des informations sur les
différentes difficultés d'entreprise, et d'aider l'orientation du chef
d'entreprise.

Créé il y a 20 ans par William Nahum, le Centre d'Information sur la


Prévention des difficultés des entreprises s'est vu grandir, au même titre
que son maillage territorial. Les membres fondateurs sont l'Ordre des
Experts-comptables et la Compagnie Nationale des Commissaires aux
Comptes représentant les professions du chiffre ; le Conseil National du
barreau représentant les avocats ; et la Conférence Générale des Juges
Consulaires de France représentant les juges consulaires et les juges
honoraires. D'autres organismes ont ensuite rejoint l'association, à savoir :

 la Chambre de Commerce et de l'Industrie France


 l’APCMA : Assemblée Permanente des Chambres de Métiers et de
l'Artisanat
 la FCGA : Fédération des Centres de Gestion Agréés
 le Conseil National des Greffiers des Tribunaux de Commerce
 le Conseil National des Administrateurs Judiciaires et Mandataires
Judiciaires (CNAJMJ)

13
N° 522 de Juillet/Aout 2018

- 95 -
PARTIE III - Chapitre 2 - L’expert-comptable : un partenaire de premier plan des
institutions

 les associations ECTI et EGEE représentant les consultants seniors


bénévoles
 la CCEF représentant les conseils et experts financiers.
Autant d'acteurs d'horizons différents regroupés autour de l'entreprise en
difficulté et de son dirigeant. Ils sont rassemblés pour viser des objectifs
communs à ceux de l'expert-comptable dans sa mission
d'accompagnement, tels que l'information, la prévention et l'établissement
de solutions pour le chef d'entreprise et sa structure. La synergie entre les
métiers est totalement mise en avant par les CIP et leurs fonctionnements.
Une nouvelle fois, l'expert-comptable reste l'allié de force de son client mis
à mal.

B – Interviews des partenaires du droit : Que pensent-ils de la procédure de


sauvegarde ? Comment perçoivent-ils l’expert-comptable face à une entreprise
en difficulté ?

1. Le greffier du Tribunal de commerce

Interview de Maître Alain VEROT, greffier honoraire du Tribunal de


commerce de Tarascon (Annexe VIII)

Dans le cadre d’une entreprise en difficulté, que pensez-vous de la


procédure de sauvegarde ?
La sauvegarde est une avancée significative dans l’esprit du législateur au
regard du droit des difficultés des entreprises ; en effet jusqu’à son entrée
en vigueur, soit le 1er janvier 2006, le droit de la « faillite » est gouverné
par la loi du 25 janvier 1985 qui elle-même avait profondément réformé ce
même droit issu de la loi du 13 juillet 1967 ;
On ne parlera plus d’un règlement judiciaire ( dans les faits antichambre
de la procédure de liquidation judiciaire ) mais d’une procédure de
redressement judiciaire qui comme son nom l’indique a pour vocation de
permettre le redressement des entreprises en difficulté ; l’expérience

- 96 -
PARTIE III - Chapitre 2 - L’expert-comptable : un partenaire de premier plan des
institutions

démontrera que le principal motif de l’échec des procédures de


redressement judiciaire est le retard apporté à l’ouverture de la
procédure par le tribunal de commerce qui doit constater l’état de
cessation des paiements de l’entreprise ; L’esprit de la procédure de
sauvegarde est totalement différent puisque la condition sine qua non de
l’ouverture de cette procédure est précisément l’absence d’état de
cessation des paiements ; il s’agit d’anticiper, de prévenir, de traiter en
amont les difficultés que rencontrent les entreprises, en bénéficiant de
l’arrêt des poursuites individuelles et de l’interdiction de payer les
créances nées antérieurement ouverture la procédure

Qu’apporte selon vous l’expert-comptable dans ce contexte ?


L’expert-comptable, est plus que le conseil de son client, il est très
souvent son confident. Le rôle de l’expert-comptable est donc déterminant
dans la décision que prendra le chef d’entreprise de demander au tribunal
d’ouvrir une procédure de sauvegarde si son expert-comptable le lui
conseille
En premier lieu, très souvent les tribunaux de commerce n’acceptent
d’ouvrir une procédure de sauvegarde que si l’expert-comptable de
l’entreprise en difficulté atteste l’absence d’un état de cessation des
paiements, Un climat de confiance va donc s’instaurer entre le tribunal et
l’expert-comptable du chef d’entreprise
Il n’est pas anecdotique de noter que l’inventaire des biens de l’entreprise
en sauvegarde, à la différence du redressement judiciaire, peut être
effectué par le débiteur lui-même à condition qu’il soit attesté par son
expert-comptable.
Par ailleurs tout au long du déroulement de la procédure de sauvegarde,
les mesures qui seront prises de nature à redresser, à sauver l’entreprise,
qui aboutiront à l’acceptation par le tribunal d’un plan de sauvegarde, le
seront d’une manière générale à l’initiative de l’expert-comptable

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PARTIE III - Chapitre 2 - L’expert-comptable : un partenaire de premier plan des
institutions

2. Le juge commissaire
Interview de Monsieur Daniel PERRIER, juge commissaire au Tribunal de
commerce de Tarascon (Annexe IX)

Dans le cadre d’une entreprise en difficulté, que pensez-vous de la


procédure de sauvegarde ?
La procédure de sauvegarde, si elle est ouverte à temps, est de nature
selon moi à sauver l’entreprise, c’est-à-dire maintenir l’activité et surtout
les emplois qui y sont attachés

En quoi consiste selon vous le travail de l’expert-comptable envers


son client en procédure de sauvegarde ?
Si par définition l’entreprise est en sauvegarde, c’est qu’elle a rencontré
des difficultés généralement d’ordre économique et financier et les
remèdes qu’il convient d’apporter seront d’autant plus crédibles aux yeux
du tribunal s’ils sont proposés par l’expert-comptable du chef d’entreprise
en difficulté

Selon vous, quelles sont les compétences et les qualités dont doit
disposer l’expert-comptable dans ce contexte ?
Dans les petites entreprises, le rôle de l’expert-comptable est déterminant
dans la gestion de l’entreprise ; son rôle est encore plus important lorsque
l’entreprise est mise en sauvegarde par le tribunal de commerce, en effet
dans ce contexte le chef d’entreprise est souvent désemparé et il aura
grand besoin, outre d’ avis techniques purement comptables, de conseils
pratiques émanant de son expert-comptable

- 98 -
PARTIE III - Chapitre 2 - L’expert-comptable : un partenaire de premier plan des
institutions

3. L’avocat

Interview de Maître Benoît DUVAUX (Annexe X)

Que pensez-vous de la procédure de sauvegarde pour les


entreprises en difficultés ?
Cette procédure a le mérite de permettre au chef d’entreprise de chercher
des solutions de rétablissement des difficultés avant que la cessation en
paiement ne soit constatée.
Cette dernière a pour objectif d’analyser les fondamentaux de l’entreprise
et de permettre la poursuite de l’activité, le maintien de l'emploi et
l'apurement du passif, en procédant à une réorganisation de l'entreprise
dans le cadre d'un plan arrêté par le Tribunal.
Au cours de cette procédure, les dirigeants ou personnes ayant donné
leur caution personnelle sont préservés.
Comme souvent en cas de difficultés, l’atout essentiel pour réussir le
sauvetage de l’entreprise est d’anticiper et ne pas attendre le dernier
moment pour réagir.
C’est bien le sens que le Législateur a souhaité donner à ce nouveau type
de procédure collective et ainsi permettre au chef d’entreprise de trouver
une solution de rétablissement avant que la cessation de paiement ne
survienne.

Qu’apporte selon vous l’expert-comptable dans ce contexte ?


En amont d’une ouverture de procédure, l’expert-comptable a
naturellement un rôle de prévention et d’alerte. L’expert-comptable, dont il
convient de rappeler que sa collaboration avec l’avocat est essentielle
pour l’optimisation du dossier de l’entreprise, apporte son expertise en
particulier dans le domaine du chiffre. C’est ainsi qu’il établira un
diagnostic précis de la situation bilancielle actuelle, ainsi qu’un

- 99 -
PARTIE III - Chapitre 2 - L’expert-comptable : un partenaire de premier plan des
institutions

prévisionnel en intégrant le dispositif prévu dans le cadre du plan de la


procédure collective.
Son rôle de conseil permettra au dirigeant de l’entreprise de mieux
appréhender la réalité, les solutions à retenir et par conséquent, les
perspectives de redressement.

C – Reportage au sein de la profession d’expertise-comptable

1. La position de l’Ordre des Experts-Comptables


L’Ordre des Experts-Comptables est au cœur de la prévention sur le
traitement des entreprises en difficulté. Créateur et membre à part entière
du Centre d’Information sur la Prévention des difficultés des entreprises et
fondateur du site internet www.entrepriseprevention.com, l’Ordre des
Experts-Comptables est conscient des enjeux et du rôle clé de l’expert-
comptable auprès de sa clientèle.
Le Conseil Supérieur de l’Ordre des Experts-Comptables et les instances
régionales fournissent de nombreuses informations, guides et outils
relatifs à la prévention des difficultés des entreprises et le traitement de
celles-ci.
La procédure de sauvegarde, préventive par nature, est donc mise en
avant. « Elle a ainsi offert un outil de prévention puissant au service des
dirigeants en difficulté ou qui anticipent ces difficultés sans pour autant
être en état de cessation de paiement »14.

Par ailleurs, la majorité des défaillances d’entreprise concernent de très


petites entreprises. La profession est donc indéniablement touchée par ce
domaine. Ainsi, il devient légitime de se demander pour quelle raison le
nombre de procédures de sauvegarde est bien plus faible que celui des
dossiers d’ouvertures de liquidations judiciaires ? « A l’analyse des
dossiers de Déclaration de Cessation des Paiements (DCP), il apparaît

14
Interview de Monsieur Bruno DUPLANTIER, expert-comptable, Annexe XI

- 100 -
PARTIE III - Chapitre 2 - L’expert-comptable : un partenaire de premier plan des
institutions

souvent un manque d’anticipation du chef d’entreprise qui aurait pu


recourir à une procédure préventive »15. Le manque d’anticipation du chef
d’entreprise est à mettre également en parallèle avec le manque de
réactivité de l’expert-comptable. C’est pour cela que l’Ordre des Experts-
Comptables consacre de nombreux travaux, formations et ouvrages à ce
sujet. L’expert-comptable est véritablement en responsabilité sur ce
domaine.

2. Les expériences du professionnel de l’expertise-comptable


La très grande majorité des défaillances d’entreprises concerne de très
petites entreprises, cœur de clientèle des cabinets d’expertise comptable.
Un point sur les expériences du professionnel de l’expertise comptable
s’impose.

Dans un premier temps, l’aspect pédagogique semble très important pour


le client. « Le dirigeant réfute le plus souvent l’idée de la procédure de
sauvegarde qu’il vit comme un échec personnel. »16 « L’expert-
comptable, est plus que le conseil de son client, il est très souvent son
confident. Le rôle de l’expert-comptable est donc déterminant dans la
décision que prendra le chef d’entreprise de demander au Tribunal
d’ouvrir une procédure de sauvegarde si son expert-comptable le lui
conseille. »17 Toute la difficulté réside donc dans cet aspect de la relation
avec le client. Même si l’expert-comptable a détecté les difficultés de
l’entreprise en amont d’un état de cessation des paiements, il reste
indéniablement à convaincre le chef d’entreprise d’ouvrir une procédure
de sauvegarde. Sur ce point, la majorité des chefs d’entreprises assimilent
le Tribunal de commerce à une institution répressive et non préventive.
Cette idéologie semble légitime après l’analyse de l’histoire des
entreprises en difficulté. Le rôle de l’expert-comptable est donc également
15
Revue Française de comptabilité n°481 : l’expert-comptable et l’entreprise en difficulté
16
Interview de Monsieur Bruno DUPLANTIER, expert-comptable, Annexe XI
17
Interview de Maître Alain VEROT, Greffier honoraire du Tribunal de commerce de
Tarascon, Annexe VIII

- 101 -
PARTIE III - Chapitre 2 - L’expert-comptable : un partenaire de premier plan des
institutions

de désacraliser cette vision du Tribunal de commerce. « Ne pas


considérer les juges du Tribunal de commerce comme des censeurs. »18

Une fois cette première étape franchie, l’ouverture de la procédure est


lancée. L’expert-comptable est en soutien constant de son client. Les
différents cas traités au sein du cabinet nous démontrent que
l’accompagnement de notre client au cours d’une telle procédure crée un
lien indéfectible et singulier. L’expert-comptable est un acteur du
sauvetage de l’entreprise. Outre l’aspect préventif de la procédure, la
période d’observation et la mise en place du plan de sauvegarde peuvent
s’avérer curatifs : « Le mérite principal d’une procédure de sauvegarde est
avant tout de permettre d’anticiper les difficultés d’une entreprise. En ce
sens, c’est le caractère préventif qui domine. Néanmoins la prévention
peut avoir pour effet de conduire le Chef d’entreprise à mettre à jour par
exemple des dysfonctionnements organisationnels ou des risques
concurrentiels. Dès lors les mesures qu’il va prendre ont bien un caractère
curatif ».19
Enfin, l’aboutissement de la procédure par un sauvetage avéré de
l’entreprise est un succès commun qui lie le chef d’entreprise et son
expert-comptable. « Mon expert-comptable a sauvé mon entreprise. C’est
lui qui a déclenché la sonnette d’alarme, qui m’a accompagné et
soutenu. »20 La finalité positive de la procédure aboutit à ce genre de
réaction et reconnaissance. C’est donc une pleine satisfaction partagée
qui rend la relation client/expert-comptable très précieuse.

18
Interview de Maître Alain VEROT, Greffier honoraire du Tribunal de commerce de
Tarascon, Annexe VIII
19
Interview de Monsieur Bruno DUPLANTIER, expert-comptable, Annexe XI
20
Interview client (Annexe XII)

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PARTIE III - Chapitre 3 - Elargissement du spectre de facturation

Chapitre 3 - Elargissement du spectre de facturation

Anticiper et détecter les difficultés des entreprises fait partie intégrante du


travail et du quotidien de l'expert-comptable et de ses collaborateurs.
Inscrire cette mission comme une mission à part entière, facturable et en
suivant une trame méthodique est plus novateur. Un encadrement des
honoraires pour l'ensemble des travaux fournis au cours de la procédure
de sauvegarde est de plus à prévoir pour optimiser cette action.

A – Une mission à part entière dès les travaux préparatifs

1. Les outils de la prévention


Au-delà de sa mission de présentation des comptes annuels, l'expert-
comptable se dote d'une nouvelle mission d'accompagnement et
d'assistance auprès du chef d'entreprise, par son suivi de l'entreprise.
Cette mission complémentaire débute par la prévention des difficultés et
par les outils mis en place par l'expert-comptable pour guider son client.
C'est également lui qui va aider le dirigeant à instaurer :

 des procédures de contrôle interne


 des outils de détection

Il peut de plus assister le comité d'entreprise dans sa procédure d'alerte.


Les alertes professionnelles puisent leurs informations au sein de trois
sources distinctes :

 le plan de compte
 les balances de l'entreprise sur les trois dernières années
 le dossier permanent

- 103 -
PARTIE III - Chapitre 3 - Elargissement du spectre de facturation

À ce stade, l'aide et le travail de l'expert-comptable constituent une réelle


mission à part entière ; duplicable auprès d'autres clients concernés du
cabinet d'expertise comptable, et facturable car profondément travaillée.

2. Être partenaire de la négociation avec les créanciers


L'expert-comptable, représentant du chiffre sur le dossier de son client,
intervient lors de la négociation avec les créanciers. Pourquoi son appui
est-il si important pour le débiteur ?
En premier lieu, son concours crédibilise le débiteur auprès de son
créancier, qui constatera que plusieurs acteurs œuvrent au bon paiement
des créances et suivent la gestion du chef d'entreprise. Deuxièmement,
toute entreprise en difficulté a tout intérêt à rechercher des accords avec
ses principaux fournisseurs. Le passif antérieur du débiteur n'en demeure
plus exigible mais apuré de façon échelonnée. C'est une technique qui
peut éviter les cas de cessation des paiements ; état compromettant le
bon déroulement de la procédure de sauvegarde.

- La présence et l'intervention de l'expert-comptable augmentent les


chances de recueillir une écoute favorable des créanciers et de préserver
la poursuite des relations professionnelles entre débiteur et créanciers.
Elément fondamental pour la poursuite de l’activité.

- L'expert-comptable participe à l'élaboration du calendrier de paiement du


débiteur, par le biais d'un moratoire amiable, quand fournisseurs et
débiteur acceptent communément le calendrier de paiement. Ou encore
par le biais d'un moratoire judiciaire, que le débiteur sollicite sur le
fondement de l'article 1244-1 du Code Civil : "Compte tenu de la situation
du débiteur et en considération des besoins du créancier, le juge peut,
dans la limite de deux années, reporter ou échelonner le paiement des
sommes dues."

- 104 -
PARTIE III - Chapitre 3 - Elargissement du spectre de facturation

- L'expert-comptable peut aider son client à obtenir de son fournisseur, en


complément de la demande de délais, un abandon partiel de créances. La
diminution de la dette représente un facteur d'accélération du paiement du
solde.

- Le professionnel de l'expertise comptable formalise également l'obtention


de délais de paiement et/ou les abandons de créances obtenus, en
rédigeant un protocole, en cas de négociation amiable. Il veille à indiquer
la nature de l'accord, les modalités de mise en œuvre, ainsi que les
éventuelles sanctions contractuelles ou garanties souhaitées par le
fournisseur.

- La négociation avec le Trésor public et l'URSSAF peut elle aussi être à


l'initiative de l'expert-comptable. Ce dernier pourra demander des délais
de paiement de 6 à 12 mois, mais ne pourra prétendre à des remises,
même partielles, des cotisations.

Le débiteur s'appuie donc sur son expert-comptable, véritable partenaire


de confiance, ce qui lui permet de gagner du temps. C'est ce même temps
qu'il peut allouer à son entreprise et à sa poursuite d'activité. L'expert-
comptable lui évite la cessation des paiements selon les accords obtenus.
Son aide est précieuse pour pérenniser l'entreprise et surmonter ses
difficultés.

3. L’élaboration de la demande d’ouverture de la procédure collective


L'expert-comptable continue sa mission d'accompagnement et de suivi de
son client en élaborant la demande renseignée d'ouverture de la
procédure collective de sauvegarde. Après avoir complété les éléments
relatifs à la personne physique et à l'entreprise en difficulté, l'expert-
comptable fournit les chiffres d'affaire hors-taxe et résultats nets des
années N à N - 3. Il explique les différentes difficultés rencontrées par

- 105 -
PARTIE III - Chapitre 3 - Elargissement du spectre de facturation

l'entreprise, et les raisons pour lesquelles son client n'est pas en mesure
de les surmonter seul. Un état du passif, de l'actif et des salariés est
avancé.

L'expert-comptable joint au dossier d’ouverture :


 Extrait d'immatriculation au Registre du Commerce et des Sociétés
Kbis ou au Répertoire des Métiers de moins de 7 jours
 État de l'actif et passif et engagements hors bilan de moins de 7
jours
 Comptes annuels du dernier exercice
 Situation de trésorerie de moins de 7 jours
 Compte de résultat prévisionnel de moins de 7 jours copie de la
pièce d'identité du chef d'entreprise ou du représentant légal.

Enfin, il atteste l'absence de mandat Ad Hoc ou de procédure de


conciliation relatifs à l'entreprise. En annexe, vous trouverez une demande
au format type d'ouverture de sauvegarde.

B – Des honoraires encadrés pour les travaux fournis au cours de la procédure de


sauvegarde

1. L’étape des prévisionnels


La première étape est celle des prévisionnels. En effet, l'expert-comptable
est amené à établir ce document incontournable qui permet de traduire de
manière chiffrée le projet d'entreprise suite aux aménagements demandés
par la procédure et souhaités par le Tribunal de commerce.
Des chiffres et résultats améliorés sont attendus par le chef d'entreprise
lui-même, par son expert-comptable, par l'administrateur judiciaire et par
le Tribunal de Commerce. Le prévisionnel financier à ce stade est capital
pour identifier les besoins de financement à venir, assurer un certain
équilibre financier, et mettre en évidence la rentabilité attendue. Au stade

- 106 -
PARTIE III - Chapitre 3 - Elargissement du spectre de facturation

de la procédure de sauvegarde, c'est un véritable outil de structuration du


projet de sauvegarde en lui-même.

Pour élaborer ces prévisionnels, l’expert-comptable va s’appuyer des


comptes de la société en intégrant les restructurations prévues. C’est un
travail effectué en partenariat avec le dirigeant.

2. Les situations intermédiaires


Sans attendre la clôture de l'exercice comptable, le chef d'entreprise
demande à son expert-comptable des situations intermédiaires souhaitées
pour son dossier de sauvegarde. Véritable outil de gestion, elles
présentent de nombreux intérêts, notamment celui d'anticiper au mieux les
difficultés ou dérapages de toute nature. Ces situations intermédiaires
vont mettre en lumière la situation de l'actif réalisable et disponible, et le
passif exigible. En parallèle, elles permettent d'ajuster le compte de
résultat prévisionnel.

Comme évoqué précédemment, l'expert-comptable peut être amené à


fournir ces situations intermédiaires afin de justifier un projet de cession
d'entreprise. Travail de fond sur le dossier du client, et respectant les
délais imposés par la loi, l'expert-comptable est une nouvelle fois au
service de son client. Il rend ses travaux dans les meilleurs délais pour
accompagner au mieux son client.

3. Le projet de plan
Le professionnel de l'expertise comptable participe activement en
adéquation avec la volonté de son client, à l'élaboration du projet de plan
de sauvegarde. Son travail démarre dès l'élaboration du projet.

Ainsi, à l'aide du bilan économique et social préparé en amont, avec


l'appui des prévisionnels et des situations intermédiaires fournis, il gère au

- 107 -
PARTIE III - Chapitre 3 - Elargissement du spectre de facturation

mieux les intérêts de son client. Il lui incombe de justifier les éléments
passés chiffrés de l'entreprise en difficulté, et de mettre en évidence l'état
de l'entreprise au cours de la période d'observation. L'expert-comptable
aide dans la négociation des propositions de délai et de remises de
dettes. Ces propositions, transmises ensuite aux créanciers contrôleurs,
aux représentants du personnel et au mandataire judiciaire sont très
importantes pour l'avenir de l'entreprise en difficulté et son chef
d'entreprise.

Véritable acteur économique de l'entreprise, l'expert-comptable va prévoir


avec son client des mesures permettant de sortir ce dernier durablement
de sa situation. Il prend en responsabilité, en corrélation avec le chef
d'entreprise, la cessation ou l'adjonction d'une branche d'activité, la
modification du capital, ou encore des licenciements ou réorientation
commerciale. En somme, les solutions qui permettront à l’entreprise d’être
sauvée.

L'expert-comptable intervient également au niveau de l'arrêté du projet de


plan de sauvegarde, en deuxième phase. Le Tribunal arrête le projet qui
lui semble le plus opportun pour le débiteur, et peut demander à entendre
l'expert-comptable de ce dernier pour statuer. L'aide de l'expert-comptable
pour la rédaction du projet de plan est considérable, et permet d'éviter une
prononciation de redressement ou liquidation judiciaire par le Tribunal en
cas d'absence de projet ou de projet non conforme.

C – Comment instaurer cette mission au sein d’un cabinet d’expertise comptable

1. En développant les outils


Par ce suivi et cet accompagnement de l'entreprise en difficulté, l'expert-
comptable élargit son spectre de facturation possible. Instaurer cette
mission au sein de cabinets d'expertise-comptable passe obligatoirement

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PARTIE III - Chapitre 3 - Elargissement du spectre de facturation

par le développement ou l’utilisation d’outils, eux-mêmes adaptés à


chaque client et situations rencontrées.

Outils de prévention
Par la mise en place sur l'ensemble des dossiers clients de :
- seuils de rentabilité
- tableaux de bord
- contrôle budgétaire
- manuel de contrôle interne
- veille par l'expert-comptable sur le bilan et le compte de résultat
Pour améliorer la compétitivité et le pilotage des PME françaises, le
Conseil Supérieur de l'Ordre des Experts-Comptables a créé les Alertes
Professionnelles. Elles permettent d'anticiper les opportunités et les
risques à venir de l'entreprise. C'est un outil offrant la possibilité à l'expert-
comptable de proposer une mission d'assistance à part entière du chef
d'entreprise, et une mission d'expertise pour la mise en œuvre des
préconisations et plans d'action requis.

Par ailleurs, la digitalisation va peu à peu s’installer dans le monde de


l’expertise comptable. Cela doit permettre aux utilisateurs de gagner en
réactivité. Les experts-comptables obtiendront les pièces comptables de
leurs clients de façon automatique et surtout quasiment en temps réel.
Cela permettra donc d’en retirer des informations plus rapidement mais
surtout de pouvoir développer des outils d’alerte. Prenons l’exemple des
banques. Chaque jour l’état des soldes bancaires de leurs clients est
vérifié automatiquement. Lorsque le compte passe débiteur, une alerte est
envoyée instantanément au conseiller. Pourquoi ainsi ne pas appliquer la
même méthode aux dossiers clients suivis en cabinet ? Si les données
comptables étaient intégrées plus régulièrement et surtout utilisées

- 109 -
PARTIE III - Chapitre 3 - Elargissement du spectre de facturation

automatiquement par un outil d’alerte, nous pourrions mettre en place des


indicateurs intéressants, comme notamment :

 Baisse du chiffre d’affaires avec comparaisons mensuelles,


trimestrielles et annuelles ;
 Baisse de la trésorerie avec mise en place d’un point d’alerte ;
 Baisse de la marge ;
 Augmentation de certains postes de charge

Les exemples peuvent être très nombreux et surtout peuvent être


appliqués au cas par cas en fonction des spécificités des dossiers.
Le risque dans l’utilisation d’un tel produit serait la non détection de la
défaillance, avec pour conséquence l’état de cessation des paiements.
L’expert-comptable serait ainsi le garant de l’information auprès de son
client, et donc responsable d’une faille dans le processus. Les termes
de la lettre de mission signée de la part du client seront donc très
importants sur ce point.

Outils d'autodiagnostic
Le chef d'entreprise s'appuie sur les compétences et les conseils avisés
de son expert-comptable. Sa connaissance des différentes procédures
dépend de l'information fournie par son expert-comptable lui-même. Il
nous incombe donc d'utiliser les formulaires et moyens existants pour
aider notre client.
Il s'agit de lui faire connaître la possibilité de demander un rendez-vous
avec le Président du Tribunal de commerce, en toute confidentialité, en
utilisant un formulaire de saisine. Téléchargeable directement sur le site
infogreffe.fr, il convient de transmettre cet imprimé dûment rempli à
l'adresse email suivante : prevention@tribunauxdecommerce.fr

- 110 -
PARTIE III - Chapitre 3 - Elargissement du spectre de facturation

Le chef d'entreprise aura ainsi la possibilité d'exposer les difficultés qu'il


rencontre auprès du Président du Tribunal de Commerce territorialement
compétent les CIP Centres d'Informations de Prévention des entreprises
en difficultés, pouvant l'aider à effectuer un autodiagnostic du niveau de
ses difficultés, à l'aide d'un tableau d'évaluation.

L’expert-comptable doit accompagner son client dans ces différentes


solutions lui permettant de diagnostiquer les défaillances. Cela peut même
être un appui pour le professionnel de l’expertise comptable. En effet, si
ce dernier a décelé des défaillances, sa réaction peut parfois être
négative. Le déni est malheureusement trop souvent la source d’un
manque de réactivité. Ainsi, l’expert-comptable pourra s’appuyer sur le
Tribunal de commerce et les CIP pour permettre à son client de prendre
conscience de sa situation et également de le conforter dans les solutions
envisagées.
Par ailleurs, avec l'ensemble de ces documentations sur le sujet des
entreprises en difficulté et de la procédure de sauvegarde mis à sa
disposition par l'expert-comptable ; le client pourra davantage apprécier le
travail de fond, de qualité et de soutien de son conseil ; qui l'orientera au
mieux vers la solution la plus adaptée.

Au niveau des outils de prévention et de diagnostic, le même indicateur de


défaillance pourrait être mis en place directement chez le client. Certaines
entreprises tiennent elles-mêmes leur comptabilité. Dans ce cas l’expert-
comptable détient peu d’informations comptables et financières en cours
d’année. Le chef d’entreprise est donc le seul à pouvoir détecter les
défaillances. Dans ce cas, l’outil évoqué précédemment pourrait être mis
en place au sein du système comptable avec l’appui de l’expert-
comptable. Le professionnel pourrait recevoir les rapports en temps réel
afin d’alerter son client. Dans ce cas, la lettre de mission aura également

- 111 -
PARTIE III - Chapitre 3 - Elargissement du spectre de facturation

toute son importance au niveau de la responsabilité du professionnel de


l’expertise comptable.

2. En informant et formant les collaborateurs


Qui doit être informé et formé sur cette nouvelle mission à part entière ?
L'ensemble des collaborateurs du cabinet. En effet, chacun peut, de par
son expérience professionnelle être amené à rencontrer des clients en
difficulté. Chaque maillon de la sphère "conseil" du client doit être en
mesure d'orienter et de conseiller le chef d'entreprise. Cela conduira à la
fois à plus d'anticipation et très certainement à une meilleure prise de
conscience de la situation en amont de plus grandes difficultés.

Voici un tableau exemple qui peut être utilisé par l'ensemble des
collaborateurs au quotidien, en complément de sessions de formations
annuelles sur le thème des entreprises en difficulté, de la loi de
sauvegarde elle-même et ses évolutions ; et de ses différentes
procédures.

- 112 -
PARTIE III - Chapitre 3 - Elargissement du spectre de facturation

21

3. L’objectif « recommandation clients » de la démarche


A l'heure où la clientèle est devenue volatile, plus expérimentée car mieux
informée par les différents médias, il devient intéressant de s'interroger sur
les différents moyens à n
notre
otre portée pour capter de nouveaux prospects.
Prospects qui deviendront eux
eux-mêmes
mêmes de nouveaux clients, et qui
assureront notre pérennité et notre profession. Un client suivi et satisfait
des services et du travail fourni par son expert
expert-comptable
comptable représente
représent un
des meilleurs outils de prospection de clientèle.

La recommandation clients, beaucoup moins onéreuse qu'une prospection


dite sèche "dans le dur", demeure efficace. Ainsi, un client d
du cabinet
ayant connu différentes étapes de croissance et d'expérien
d'expériences
ces en tant que
chef d’entreprise ; ressorti mieux expérimenté d’une situation difficile et de

21
CFPC « Entreprise en difficulté : de la détection aux procédures préventives : Mandat
Ad Hoc, Conciliation et Sauvegar
Sauvegarde »

- 113 -
PARTIE III - Chapitre 3 - Elargissement du spectre de facturation

sa procédure de sauvegarde ; est en mesure de recommander son expert-


comptable. Qui peut prétendre autant de son conseil habituel ou autre
expert-comptable ? Une situation améliorée et aboutie après une
procédure de sauvegarde est un moment clé pour enclencher une
situation de recommandation et en obtenir en retour de réels prospects à
contacter. La relation avec son expert
expert-comptable
comptable ne s'apprécie pas
uniquement sur
ur son tarif de mission mais bel et bien sur son travail
personnalisé et son implication auprès de son client. Et ce en situation de
crise également.
Qui ne recommanderait pas son expert
expert-comptable
comptable qui a su contribuer à la
pérennité de l'entreprise de son cclient ? Alors osons franchir le pas et
mettons en place cet automatisme de recommandation.

4. Un marché potentiel : quelques chiffres clés


Selon les statistiques du Conseil National des Greffiers des Tribunaux de
Commerce, près de 12 436 procédures collectives ont été ouvertes durant
les mois de janvier, février et mars 2018. Le bilan des statistiques 2017
est également alarmant
alarmant. Les tableaux suivant relatifs aux statistiques des
défaillances par tranche de chiffre d’affaires et par ca
catégorie
tégorie de procédure
démontrent que la grande majorité des entreprises en difficulté sont de
Très Petites Entreprises
ntreprises. En effet, sur 55 175 défaillances en 2017, plus
de 53 000 concernent les entreprises de moins de 1.5 millions de chiffre
d’affaires et de moins de 20 salariés. De fait, l’expert
l’expert-comptable
comptable sera au
cœur de la procédure collective.

- 114 -
PARTIE III - Chapitre 3 - Elargissement du spectre de facturation

22

L'entreprise en difficulté fait donc partie intégrante de la clientèle des


cabinets d'expertise-comptable.
comptable. Détecter en amont les difficultés, mettre
en place les outils de prévention et de suivi de leurs entreprises, les
accompagner et les conseiller au mieux dans leurs démarches sont autant
de missions pour l'expert
l'expert-comptable.

France Stratégie de www.stratégie.gouv.fr du mois d'avril 2018 ; ayant


suivi depuis 2008 le parcours des entreprises françaises entrées dans une
procédure collective, affiche des statistiques importantes. En effet, bien
que les procédures de redressement judiciaire et celle de sauvegarde
soient assez proches, le deveni
devenirr des entreprises entrées en procédure de
sauvegarde semble meilleur au final. Plusieurs raisons explicatives à ce
constat.

 Les
es plans de sauvegarde sont plus robustes ; 75 % se poursuivent
au bout de 5 ans, contre 40 % pour les plans de redressement sur
la même durée.
 Les
es entreprises en sauvegarde sont deux fois plus susceptibles de
tenir un plan de remboursement, 53 % contre 27%
27%.

Malgré ces réussites,, deux tiers des ouvertures de procédures collectives


correspondent à des liquidations judiciaires directe
directes,
s, traduisant un arrêt de
l'activité de l'entreprise, des licenciements. Il est donc nécessaire de se

22
Source Altares : « Défaillances et sauvegardes d’entreprises en France, Bilan 2017

- 115 -
PARTIE III - Chapitre 3 - Elargissement du spectre de facturation

former, d'informer et d'anticiper les difficultés des entreprises pour assurer


la pérennité de nos entreprises clientes, qui une fois aidées et traitées
peuvent
euvent surmonter leurs crises. Autant d'emplois sauvés, d'économie
stabilisée, et de clients conservés dans nos propres cabinets d'expertise
comptable.

Ouvertures des procédures collectives entre 2008 et 2016, par type de


procédure.

23

L’objectif est donc, par les outils et les actions mis en avant
précédemment d’inverser la tendance. Il y a un manque de réaction
évident de la part des différents acteurs, chef
chefs d’entreprises
d’entreprise et experts-
comptables en première ligne. 60 000 défaillances d’entreprises en
moyenne par an, cela représente environ trois entreprises par expert-
expert
comptable. Ce chiffre peut para
paraître
tre marginal, mais statistiquement ces
trois entreprises finiront majoritairement en liquidation judiciaire. Il s’agit
donc de trois dossiers perdus par an
an. Sur dix ans, c’est un portefeuille

23
Source : France Stratégie Avril 2018

- 116 -
PARTIE III - Chapitre 3 - Elargissement du spectre de facturation

complet qui peut disparaître. L’objectif est donc d’éviter la liquidation.


Nous l’avons citée, la première cause demeure le manque de réactivité.
L’expert-comptable peut donc agir.

- 117 -
PARTIE III - 0 Conclusion

Conclusion

A la lecture de cette troisième partie, nous sommes totalement conscients


du rôle de prévention, d'alerte et d'aide que les experts-comptables
doivent jouer auprès de leurs clients, à savoir les entreprises en difficulté.
Le travail de l'expert-comptable s'élargit par une nouvelle mission
d'accompagnement du chef d'entreprise mis à mal, ce qui valorise d'autant
plus ses attributions. À l'appui des chiffres annuels conséquents sur les
dossiers d'ouvertures de procédures collectives et notamment
d'ouvertures de procédures de sauvegarde, il s'avère qu'une grande
importance doit être attachée à la formation des collaborateurs et experts-
comptables. Et ce pour lutter véritablement contre les dossiers de
redressements et de liquidations trop importants.
La procédure de sauvegarde dispose de nombreux atouts pour le chef
d'entreprise, il est indispensable de le faire savoir et de participer à notre
échelle au traitement des difficultés d'entreprises dans les meilleures
conditions de fond possibles.

- 118 -
0 0 Conclusion

CONCLUSION GENERALE

La loi de sauvegarde du 26 juillet 2005 a permis une avancée notable


dans le traitement des difficultés d'entreprise. L'accent a été porté sur
l'accessibilité des différentes mesures amiables ou judiciaires, et
notamment celle de la procédure de sauvegarde. Le sort réservé au failli à
l'époque romaine, au Moyen-âge ou encore sous l'Ancien Régime a
radicalement changé. Passant de la peine de mort, à l'élimination publique
du monde des affaires et au dépouillement personnel ; à une réelle
protection et aura de bienveillance. L’histoire a fait véritablement évoluer
les mœurs.

L'idée pour un chef d'entreprise de rencontrer des difficultés économiques,


environnementales ou encore fiscales est aujourd'hui entendue. L'Etat, la
loi de sauvegarde et les différents organes de justice et de conseil en
corrélation avec les entreprises du marché ont une volonté forte de
prévention, d'information préalable, d'alerte et de traitement des difficultés.
Le chef d'entreprise peut être accompagné et littéralement sauvé par une
procédure collective, à savoir ici une procédure de sauvegarde, comme
démontré dans notre cas client. Des dispositions concrètes telles que le
gel du passif, le maintien des contrats en cours ou encore l’interdiction des
inscriptions sont autant d’éléments qui lui permettent de réorganiser son
entreprise dans des conditions optimales, et ainsi d’aboutir à son
sauvetage. La procédure de sauvegarde représente un second souffle
pour le dirigeant, lui octroyant la poursuite de son activité dans un cadre
légal privilégié. Le tout en pouvant bénéficier d’opportunités tant sur les
déclarations de créances que sur les propositions de plan ; notre cas
pratique en étant la parfaite illustration.

L'expert-comptable est quant à lui nourri d'une nouvelle mission, valorisé


par son rôle capital d'information, de détection et d'accompagnement de

- 119 -
0 0 Conclusion

son client ; et se veut premier acteur de confiance de ce dernier. Dans ce


contexte, reconnu comme l’élément clé du sauvetage de l’entreprise,
élargit d’une part son spectre de facturation, et d’autre part enclenche une
situation propice à une démarche de recommandation qualifiée.

Il est essentiel de prendre en considération la hauteur de ce grand rôle à


jouer par les experts-comptables dans le renversement de tendance du
nombre trop élevé de dossiers de liquidations d'entreprises chaque année.
L'anticipation, la prévention et la formation sont les maîtres mots. Le
dirigeant et l'expert-comptable ont chacun des opportunités concrètes à
retenir de la mise en place d'une procédure de sauvegarde.

- 120 -
0 0 BIBLIOGRAPHIE

BIBLIOGRAPHIE

I. Textes officiels

 Loi n° 2005-845 du 26 Juillet 2005 de sauvegarde des entreprises


 Ordonnance n° 2008-1345 du 18 décembre 2008 portant réforme du
droit des entreprises en difficulté
 Ordonnance n° 2014-326 du 12 mars 2014 portant réforme de la
prévention des difficultés des entreprises et des procédures collectives
 LOI n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité
des chances économiques - Section 3 : Efficacité renforcée des
procédures de sauvegarde, de redressement judiciaire, de rétablissement
professionnel et de liquidation judiciaire

II. Ouvrages spécialisés

 LE CORRE Pierre-Michel « Droit et pratique des procédures collectives »


9ème édition – éditions DALLOZ - 2986 p
 LE CORRE Pierre-Michel et LE CORRE – BROLY Emmanuelle
« Droit des entreprises en difficulté » 8ème édition - Mémentos
Editions DALLOZ - 254 p.
 « Guide de l’accompagnement des entreprises en difficultés » édition
2017, Ordre des Experts-Comptables – Collection des études – 241 p.
 LIENHARD Alain et PISONI Pascal « Code des procédures
collectives 2018 » 16ème édition – Editions DALLOZ – 1614 p.
 RONTCHEVSKY Nicolas, CHEVRIER Eric et PISONI Pascal « Code de
commerce » 113ème édition, Editions DALLOZ 3836 p.
 « Prévention des difficultés et procédures collectives » Dictionnaire
permanent – Juin 2017 – Editions législatives 241 p.

- 121 -
0 0 BIBLIOGRAPHIE

 « Le lettre de mission en pratique » édition 2016, Ordre des Experts-


Comptables – Collection Pratique Professionnelle
 LAGARDE Bernard « Entreprises en difficulté : Traité économique et
fiscal » édition 2018 –éditions LAGARDE – 920 p.

III. Mémoires

 « La procédure de sauvegarde » Emmanuel ROTOL – 11/2011


 « Place et missions des professionnels de la comptabilité dans le cadre
des procédures appliquées aux entreprises en difficulté » Muriel
DAUDIGNON 05/2011

IV. Revues professionnelles

 La revue fiduciaire n° 44 Mars 2017 page 21 à 24 – « Entreprise en


difficulté : modification du dispositif légal »
 SIC n° 347 Janvier 2016 page 22 et 23 – « L’obligation de conseil à la
charge de l’expert-comptable : comment éviter les contentieux »
 La Revue Française de Comptabilité n° 481 Novembre 2014 – Dossier
spécial « Entreprises en difficultés »
 La Revue Française de Comptabilité n° 504 Décembre 2016 page
6 – « La levée de l’interdiction bancaire dans les procédures
amiables et collectives »
 La Revue Fiduciaire comptable n° 438 Mai 2016 page 29 à 64 –
« Entreprises en difficulté : quels outils juridiques face à la crise »

- 122 -
0 0 BIBLIOGRAPHIE

V. Sites internet

 https://www.entreprises.cci-paris-
idf.fr/web/reglementation/entreprises-en-difficulte/sauvegarde

 http://www.greffe-tc-paris.fr/fr/difficultes-des-
entreprises/procedure_sauvegarde.html

 http://www.justice.gouv.fr/art_pix/Stat_Annuaire_ministere-
justice_chapitre5.pdf

 https://www.insee.fr/fr/statistiques/1377556?sommaire=1377558

 https://www.banque-france.fr/statistiques/chiffres-cles-france-et-
etranger/defaillances-dentreprises

 http://www.coface.fr/Actualites-Publications/Actualites/Defaillantes-ou-
zombies-les-entreprises-en-difficulte-representent-pres-de-6-du-total-en-
France

 https://www.infogreffe.fr/informations-et-dossiers-
entreprises/actualites/devoir-de-conseil-le-gerant-qui-ne-respecte-pas-
ses-obligations-legales-peut-il-le-reprocher-a-son-expert-comptable.html

 http://www.cip-national.fr/

 http://www.entrepriseprevention.com/

 http://www.ccef.net/

 https://www.pernaud.fr/info/glossaire/9206881/resiliation-et-poursuite-
et-mise-en-demeure-

 https://www.pernaud.fr/info/glossaire/9206902/sauvegarde

 http://www.strategie.gouv.fr/

- 123 -
0 0 BIBLIOGRAPHIE

VI. Sources complémentaires

 « Entreprise en difficulté : de la détection aux procédures préventives :


mandat ad hoc, conciliation et sauvegarde » CPFC support de formation
20/05/2016
 « L’entreprise en difficulté : gagner plus de visibilité pour aller de l’avant »
étude Deloitte – Altares Mars 2016
 « Les procédures collectives de traitement des difficultés des entreprises
en France » - Document de travail – France Stratégie 2018 – 04 Avril
 « Entreprises en difficulté : l’arbitrage des Tribunaux entre maintien de
l’emploi et apurement du passif » - INSEE – Economie et statistiques n°
443, 2011

- 124 -
0 0 ANNEXES

ANNEXES

Annexe I - Demande d’ouverture de Sauvegarde ......................... - 126 -

Annexe II – Cas Vivarte ................................................................... - 134 -

Annexe III – Rapport de l’administrateur judiciaire ...................... - 136 -

Annexe IV – AFDCC 3 ..................................................................... - 138 -

Annexe V – Tableau OEC 97 ........................................................... - 142 -

Annexe VI – Tableau BDF 2000 ...................................................... - 143 -

Annexe VII – Tableau TPFF............................................................. - 144 -

Annexe VIII – Interview Greffier Honoraire .................................... - 145 -

Annexe IX – Juge-Commissaire ..................................................... - 147 -

Annexe X - Avocat ........................................................................... - 148 -

Annexe XI – Expert-Comptable ...................................................... - 150 -

Annexe XII – Chef d’entreprise en procédure de sauvegarde ..... - 153 -

- 125 -
0 0 ANNEXES

Annexe I - Demande d’ouverture de Sauvegarde


Demande d'ouverture de sauvegarde
(R. 621-1 du code de commerce)

Identification de la personne déposant la demande

Nom de naissance : Nom d’usage :


Prénoms :
Né(e) le à Nationalité :
Situation matrimoniale (en cas de mariage, préciser le régime) :
Domicile :

Nom de naissance et prénoms du père :


Nom de naissance et prénoms de la mère :
Qualité1 : Dirigeant d’une société Entrepreneur individuel (personne physique)
2
Assisté(e) ou représenté(e) par :

Identification de l’entreprise en difficulté N° SIREN :

Forme juridique (si société) :


Dénomination (si société ou EIRL) :
Enseigne :

Immatriculation au : RCS et/ou Répertoire des métiers ou Non inscrit


Régime particulier : EIRL Auto-entrepreneur Néant

Adresse du siège social (si société) :

Adresse de l’établissement principal :

Activité : Code APE/NAF :


Date de début d'activité : Date de cessation d'activité (le cas échéant) :
Capital social (si société) : Libération totale Libération partielle

Coordonnées Informations importantes

Téléphone : Nombre de salariés (à ce jour) :


Portable : Nombre de salariés (dans les 6 derniers mois) :
Fax : Chiffre d’affaires du dernier exercice :
Email : Date de clôture du dernier exercice :

1 Pour une EURL, cocher « dirigeant d’une société ». Pour une EIRL, cocher « entrepreneur individuel (personne physique) ».
2 La demande d’ouverture, lorsqu'elle n'émane pas du débiteur lui-même, ne peut être reçue qu'en vertu d'un pouvoir spécial qui n'est pas
inclus dans la mission de représentation et d'assistance des avocats (Com., 19/07/1988, n°86-15389).

- 126 -
0 0 ANNEXES

Date de clôture Chiffre d’affaires HT Résultat net


Année N-1
Année N-2
Année N-3

Lieux d'exploitation en dehors de l'établissement principal


Greffe dans lequel
n° SIRET Adresse l'établissement est
immatriculé

Avez-vous fait l’objet personnellement d’une procédure de sauvegarde, redressement ou liquidation ou


avez-vous été dirigeant d’une société ayant connu l’une de ces procédures ? oui non
Si oui, date d’ouverture, tribunal et s’il y a lieu, dénomination de la société :

Exposez succinctement la nature des difficultés de l’entreprise et les raisons pour lesquelles vous
n’êtes pas en mesure de les surmonter

- 127 -
0 0 ANNEXES

ETAT DU PASSIF (dettes) de l’entreprise ou du patrimoine affecté (EIRL)1


Créanciers (Nom, prénom et adresse /dénomination et siège) Échu et exigible 2 A échoir4
Salariés :

Établissements financiers (prêts, découverts, mobilisation de créances…) :

Dettes fiscales et/ou sociales :

Autres dettes (fournisseurs, crédits-bails, bailleur, divers…) :

TOTAL DU PASSIF (échu et à échoir) :

1 L’état du passif (dettes) doit être établi à la date de la demande ou dans les sept jours qui précèdent
2 Dettes exigibles = dettes arrivées à échéance et pouvant être immédiatement réclamées par le créancier
Dettes à échoir = dettes non encore arrivées à échéance

- 128 -
0 0 ANNEXES

ETAT DES ACTIFS de l’entreprise ou du patrimoine affecté (EIRL)1


Description Montant
Immobiliers (murs du fonds, maison, terrain… appartenant à la personne exerçant l’activité) :

Éléments corporels (matériels, mobiliers d’exploitation, véhicules, stocks…) :

Éléments ou immobilisations incorporels (fonds de commerce, droit au bail, brevets, marques…) :

Dû par les clients (estimation globale du compte client, net de mobilisation)


(Détail à donner dans annexe 2) :

Titres et participations dans d'autres personnes morales :

Crédits de TVA, crédit d’impôts sur les sociétés (carry-back), dégrèvements divers… :

1
L’état des actifs doit être établi à la date de la demande ou dans les sept jours qui précèdent

- 129 -
0 0 ANNEXES

Situation de trésorerie datant de moins d'un mois


Disponible Découvert
Banques
(seulement si solde positif) Autorisé Utilisé

Caisse : Solde :

SALARIÉS
Nom et prénom Adresse
Présents dans l'entreprise, ou en congé (maternité, parental, maladie) - ou compléter l’annexe 1

Dont contrats rompus ou démissions :

Instances en cours au conseil des prud'hommes :

En cas d’instances aux Prud’hommes en cours, nom de l’avocat de l’employeur :

- Existe-t-il un comité d'entreprise : oui non

- À défaut, des délégués du personnel : oui non

Prénom, nom et adresse des membres du comité d'entreprise ou à défaut, des délégués du
personnel habilités à être entendus par le tribunal (si déjà désignés, annexer une copie du PV
d’élection) – Précisez la date de fin du mandat :

L’entreprise est-elle en mesure de faire face au paiement des prochains salaires ? oui non

- 130 -
0 0 ANNEXES

Cas particuliers

Personnes responsables solidairement des dettes sociales


(associés de SNC, associés commandités, membres de GIE)
Nom et prénom / dénomination Domicile / Siège

L’entreprise exerce-t-elle une profession libérale soumise à un statut législatif ou réglementaire ou dont le
titre est protégé ? oui non (Si oui, désignation de l’ordre professionnel ou de l’autorité)

L’entreprise exploite-t-elle une ou des installations classées au sens du titre Ier du livre V du code de
l'environnement ? oui non (Si oui, fournir la copie de l'autorisation ou la déclaration)

L’entreprise exploite -t-elle un établissement de crédit, un établissement de monnaie électronique, un


établissement de paiement ou est une entreprise d'investissement (R.613-14 s. du code monétaire et
financier) ? oui non

Affiliations
N° URSSAF : N° affiliation Pôle emploi :
Convention collective applicable :
N°TVA intracommunautaire :

Personnes s’étant portées caution de l’entrepreneur individuel ou de la société (dirigeants, associés,


conjoint…)

Nom des cautions Bénéficiaire (banque) Montant de la


caution

- 131 -
0 0 ANNEXES

Documents joints à la demande (article R.621-1 du code de commerce) Oui Non


Extrait d’immatriculation au RCS (Kbis) ou au Répertoire des Métiers de moins de 7
jours (joindre un avis INSEE pour les non-inscrits)
État actif et passif des sûretés et engagement hors bilan de moins de 7 jours (état
complet disponible au greffe, service privilèges et nantissements ou sur www.infogreffe.fr)
Comptes annuels du dernier exercice
Situation de trésorerie de moins de 7 jours (relevé bancaire de tous les comptes de
l’entreprise et les comptes personnels des entrepreneurs individuels)
Compte de résultat prévisionnel de moins de 7 jours
Copie de la pièce d’identité du chef d ’entreprise ou du représentant légal (en cours
de validité)
Dans le cas où l'un ou l'autre de ces documents ne peut être fourni ou ne peut l'être
qu'incomplètement, indiquer les motifs qui empêchent cette production :

Je soussigné(e) demande l’ouverture d’une procédure de sauvegarde

Et
Atteste sur l'honneur l'absence de mandat ad hoc ou de procédure de conciliation relatives
à l’entreprise (au patrimoine) en difficulté dans les 18 mois précédant la présente demande

En cas de désignation d'un mandataire ad hoc :


 Date de la désignation :
 Autorité qui y a procédé :
 Nom du mandataire ad hoc :

En cas d'ouverture d'une procédure de conciliation :


 Date de la désignation :
 Autorité qui y a procédé :
 Nom du conciliateur :

Et s’agissant de la désignation (souhaitée, possible ou obligatoire) d’un administrateur judiciaire :


N’a pas d’administrateur judiciaire à proposer au tribunal.
ou
Souhaite proposer un administrateur judiciaire à la désignation du tribunal en la personne de
(nom et adresse) :

Et s’agissant de l’inventaire :
Demande la désignation par le tribunal d’une personne chargée de réaliser l’inventaire en
application de l’article L.621-4 al.6 du code de commerce
ou
S’engage à réaliser l’inventaire dans les conditions1 prévues à l’article L.622-6-1 du code de
commerce dans le délai de ……………………jours.

Fait à le

1
Engager les opérations d’inventaire dans le délai de 8 jours suivant le jugement d’ouverture et les achever dans le délai fixé par le tribunal ; faire
certifier l’inventaire établi par un commissaire aux comptes ou le faire attester par un expert-comptable.

- 132 -
0 0 ANNEXES

Annexe 2 – Renseignements divers

Noms et coordonnées des partenaires de l’entreprise

Avocat(s) : Notaire :

Expert-comptable : Commissaire aux comptes :

Banques :

Nom de la banque Adresse de l’agence Nom de l’interlocuteur Numéro de compte

Assurances :

Nom de
Compagnie Nom et adresse de l’agence N° et objet du contrat
l’interlocuteur

Cotisations sociales du chef d’entreprise

majoritaire
Au regard de son statut social, le dirigeant est :
minoritaire

Montant des
Nom de la caisse Adresse Périodicité
cotisations

Créances sur clients

Montant des
Nom prénom/Dénomination Adresse Echéance
créances

Pour les sociétés, répartition du capital

Nom et prénom / Dénomination des associés ou actionnaires Nb de titres ou %

- 133 -
0 0 ANNEXES

Annexe II – Cas Vivarte

- 134 -
0 0 ANNEXES

- 135 -
0 0 ANNEXES

Annexe III – Rapport de l’administrateur judiciaire

- 136 -
0 0 ANNEXES

- 137 -
0 0 ANNEXES

Annexe IV – AFDCC 3

- 138 -
0 0 ANNEXES

- 139 -
0 0 ANNEXES

- 140 -
0 0 ANNEXES

- 141 -
0 0 ANNEXES

Annexe V – Tableau OEC 97

- 142 -
0 0 ANNEXES

Annexe VI – Tableau BDF 2000

- 143 -
0 0 ANNEXES

Annexe VII – Tableau TPFF

- 144 -
0 0 ANNEXES

Annexe VIII – Interview Greffier Honoraire


Interview de Maître Alain VÉROT. greffier honoraire du Tribunal de
Commerce de TARASCON

1) Pourriez-vous nous retracer votre parcours professionnel ?


Après un stage effectué au greffe du Tribunal de commerce de Saint-Etienne,
j’ai été nommé greffier suppléant du tribunal de commerce de Tarascon le 1er
juillet 1975, puis Greffier titulaire de charge du même tribunal de commerce
de Tarascon début janvier 1976 et après avoir été admis à faire valoir mon
droit de présentation d’un successeur ( Walter CENCIG ) par arrêté du Garde
des Sceaux le 16 septembre 2014, le Procureur Général près la cour d’appel
d’Aix-en-Provence m’a conféré en janvier 2016 le titre de Greffier honoraire

2) Dans le cadre d’une entreprise en difficulté, que pensez-vous de la procédure


de sauvegarde ?
La sauvegarde est une avancée significative dans l’esprit du législateur au regard
du droit des difficultés des entreprises ; en effet jusqu’à son entrée en vigueur, soit
le 1er janvier 2006, le droit de la « faillite » est gouverné par la loi du 25 janvier
1985 qui elle-même avait profondément réformé ce même droit issu de la loi du 13
juillet 1967 ;
On ne parlera plus d’un règlement judiciaire ( dans les faits antichambre de la
procédure de liquidation judiciaire ) mais d’une procédure de redressement
judiciaire qui comme son nom l’indique a pour vocation de permettre le
redressement des entreprises en difficulté ; l’expérience démontrera que le
principal motif de l’échec des procédures de redressement judiciaire est le retard
apporté à l’ouverture de la procédure par le tribunal de commerce qui doit
constater l’état de cessation des paiements de l’entreprise ; L’esprit de la procédure
de sauvegarde est totalement différent puisque la condition sine qua non de
l’ouverture de cette procédure est précisément l’absence d’état de cessation des
paiements ; il s’agit d’anticiper, de prévenir, de traiter en amont les difficultés que
rencontrent les entreprises, en bénéficiant de l’arrêt des poursuites individuelles et
de l’interdiction de payer les créances nées antérieurement ouverture la procédure

3) Côtoyant, de par votre métier, des chefs d’entreprises en difficulté,


pouvez-vous nous expliquer le caractère salvateur de la procédure de
sauvegarde pour certains d’entre eux ?

En premier lieu la terminologie de sauvegarde est pour le chef d’entreprise


qui rencontre des difficultés plus acceptable que celle de redressement
judiciaire, synonyme dans son esprit de liquidation judiciaire ; sauf exception
rarissime, les chefs d’entreprise rechignent à pousser la porte d’entrée des
tribunaux de commerce ; Conscients de cet état de fait les présidents les
tribunaux de commerce ont instauré une politique de prévention des
entreprises en tentant de leur expliquer que les tribunaux de commerce ne
sont pas là pour les condamner mais au contraire pour les aider à surmonter

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leurs difficultés ; le mot d’ordre est le suivant : « ne perdez pas de temps ;


demandez avant qu’il ne soit trop tard l’ouverture d’une procédure de
sauvegarde de votre entreprise »

4) Qu’apporte selon vous l’expert-comptable dans ce contexte ?


L’expert-comptable, est plus que le conseil de son client, il est très souvent son
confident. Le rôle de l’expert-comptable est donc déterminant dans la décision que
prendra le chef d’entreprise de demander au tribunal d’ouvrir une procédure de
sauvegarde si son expert-comptable le lui conseille.
En premier lieu, très souvent les tribunaux de commerce n’acceptent d’ouvrir une
procédure de sauvegarde que si l’expert-comptable de l’entreprise en difficulté
atteste l’absence d’un état de cessation des paiements, Un climat de confiance va
donc s’instaurer entre le tribunal et l’expert-comptable du chef d’entreprise
Il n’est pas anecdotique de noter que l’inventaire des biens de l’entreprise en
sauvegarde, à la différence du redressement judiciaire, peut être effectué par le
débiteur lui-même à condition qu’il soit attesté par son expert-comptable
Par ailleurs tout au long du déroulement de la procédure de sauvegarde, les
mesures qui seront prises de nature à redresser, à sauver l’entreprise, qui
aboutiront à l’acceptation par le tribunal d’un plan de sauvegarde, le seront d’une
manière générale à l’initiative de l’expert-comptable

5) Pensez-vous que le lien entre l’expert-comptable et le chef d’entreprise soit


consolidé par une procédure de sauvegarde ?

Comme je l’ai indiqué au paragraphe précédent, un climat de confiance


mutuelle va régner entre le tribunal, le débiteur et son expert-comptable ;
lorsque la procédure de sauvegarde aboutira à l’acceptation par le tribunal
d’un plan de sauvegarde, il est bien évident pour le chef d’entreprise que le
rôle joué par son expert-comptable aura été déterminant et qu’il ne peut que
lui en être reconnaissant

6) Enfin, quels conseils donneriez-vous à un chef d’entreprise en procédure de


sauvegarde ?

Ne pas considérer les juges du tribunal de commerce comme des censeurs ;


accepter sa condition de mise sous sauvegarde et retirer tous les bénéfices que
cette procédure peut lui procurer à condition qu’il écoute les bonnes personnes,
dont bien évidemment son expert-comptable.

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Annexe IX – Juge-Commissaire
Interview d’un Juge-Commissaire (Daniel PERRIER)

1) Pourriez-vous nous retracer votre parcours professionnel ?


Je suis chef d’ entreprise « plomberie sanitaire »
J’ai été élu juge consulaire il y a 12 ans au tribunal de commerce de TARASCON
J'exerce actuellement les fonctions de vice-président ce tribunal
Je tiens, par délégation du président, les audience de référé et suis
régulièrement désigné en qualité de Juge-Commissaire dans les procédures
collectives ouvertes par ce tribunal

2) Dans le cadre d’une entreprise en difficulté, que pensez-vous de la procédure


de sauvegarde ?
La procédure de sauvegarde, si elle est ouverte à temps, est de nature selon moi
à sauver l’entreprise, c’est-à-dire maintenir l’activité et surtout les emplois qui y
sont attachés

3) Pouvez-vous nous indiquer votre rôle et la relation entretenue avec le chef


d’entreprise en procédure de sauvegarde ?
Le rôle du juge commissaire est important, puisque toutes les décisions du
tribunal qui seront prises au cours de la procédure de sauvegarde ne le seront
qu’au vu d’un rapport établi par ce dernier
Le juge commissaire, sans bien entendu être le conseil du chef d’entreprise,
doit être à l’écoute de ce dernier
Il peut le recevoir, dans son cabinet, s’il en fait la demande, assisté par
toute personne de son choix, dont notamment son expert-comptable

4) En quoi consiste selon vous le travail de l’expert-comptable envers son


client en procédure de sauvegarde ?
Si par définition l’entreprise est en sauvegarde, c’est qu’elle a rencontré des
difficultés généralement d’ordre économique et financier et les remèdes qu’il
convient d’apporter seront d’autant plus crédibles aux yeux du tribunal s’ils sont
proposés par l’expert-comptable du chef d’entreprise en difficulté

5) Selon vous, quelles sont les compétences et les qualités dont doit disposer
l’expert-comptable dans ce contexte ?
Dans les petites entreprises, le rôle de l’expert-comptable est déterminant dans
la gestion de l’entreprise ; son rôle est encore plus important lorsque
l’entreprise est mise en sauvegarde par le tribunal de commerce, en effet dans
ce contexte le chef d’entreprise est souvent désemparé et il aura grand besoin,

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outre d’ avis techniques purement comptables, de conseils pratiques émanant


de son expert-comptable .
Annexe X - Avocat

Interview de Maître Benoît DUVAUX

1) Pourriez-vous nous retracer votre parcours professionnel ?


Après avoir commencé mon parcours professionnel au sein du Cabinet
d’Avocats Jacques BARTHELEMY ET ASSOCIES à Lyon, j’ai été
collaborateur d’une Etude de notaire pendant quatre années (service
droit des affaires), puis inscrit au Barreau de Tarascon en 1991.
2) Que pensez-vous de la procédure de sauvegarde pour les entreprises en
difficultés ?
Cette procédure a le mérite de permettre au chef d’entreprise de
chercher des solutions de rétablissement des difficultés avant que la
cessation en paiement ne soit constatée.
Cette dernière a pour objectif d’analyser les fondamentaux de
l’entreprise et de permettre la poursuite de l’activité, le maintien de
l'emploi et l'apurement du passif, en procédant à une réorganisation de
l'entreprise dans le cadre d'un plan arrêté par le Tribunal.
Au cours de cette procédure, les dirigeants ou personnes ayant donné
leur caution personnelle sont préservés.
Comme souvent en cas de difficultés, l’atout essentiel pour réussir le
sauvetage de l’entreprise est d’anticiper et ne pas attendre le dernier
moment pour réagir.
C’est bien le sens que le Législateur a souhaité donner à ce nouveau type
de procédure collective et ainsi permettre au chef d’entreprise de trouver
une solution de rétablissement avant que la cessation de paiement ne
survienne.

3) Quels rôles devez-vous assurer auprès de votre client en difficulté ?

Comme dans toutes situations de crise, l’avocat, en sa qualité de conseil,


doit tout d’abord être à l’écoute de son client et apporter, en
collaboration avec l’expert-comptable, un regard objectif sur la situation
réelle de l’entreprise.

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Il apportera à la fois son expertise et ses compétences techniques, mais


aussi son soutien vis-à-vis d’un ou plusieurs dirigeants souvent en
situation de stress.

Après ce premier travail « d’audit », un rapport intégrant les diverses


solutions possibles sera étudié avec le Dirigeant et l’avocat afin de pallier
les difficultés, permettre la poursuite de l’activité commerciale, maintenir
les emplois et enfin, apurer le passif.

Pour bénéficier de la procédure de sauvegarde, l’avocat saisira le Tribunal


de Commerce ou le Tribunal de Grande Instance, et le Juge décidera la
mise en œuvre de la procédure.

4) Qu’apporte selon vous l’expert-comptable dans ce contexte ?


En amont d’une ouverture de procédure, l’expert-comptable a
naturellement un rôle de prévention et d’alerte.
L’expert-comptable, dont il convient de rappeler que sa collaboration
avec l’avocat est essentielle pour l’optimisation du dossier de l’entreprise,
apporte son expertise en particulier dans le domaine du chiffre.
C’est ainsi qu’il établira un diagnostic précis de la situation bilancielle
actuelle, ainsi qu’un prévisionnel en intégrant le dispositif prévu dans le
cadre du plan de la procédure collective.
Son rôle de conseil permettra au Dirigeant de l’entreprise de mieux
appréhender la réalité, les solutions à retenir et par conséquent, les
perspectives de redressement.

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Annexe XI – Expert-Comptable

Interview de Bruno DUPLANTIER, expert-comptable

1) Pourriez-vous nous retracer votre parcours professionnel ?

Après avoir effectué mon stage d’Expert-comptable stagiaire durant trois


années et prolongé trois années supplémentaires en tant que Chef de
groupe, j’ai rejoint en tant que Directeur Administratif et Financier et
durant près de 20 ans, le Groupe Agro-alimentaire Euralis (Chiffre
d’affaire supérieur au milliard d’euros et près de 2 000 salariés).
Après cette expérience, nous avons repris début 2009 avec mon épouse,
également Expert-comptable deux cabinets d’expertise comptable à Six
Fours les plages et à Tarascon.

2) Que pensez-vous de la procédure de sauvegarde pour les entreprises en


difficultés ?

La Loi de 2005 a intercalé la procédure de sauvegarde entre d’une part le


mandat ad’ hoc et la conciliation et d’autre part le redressement
judiciaire et la liquidation judiciaire.
Elle a ainsi offert un outil de prévention puissant au service des dirigeants
en difficulté ou qui anticipent ces difficultés sans pour autant être en état
de cessation de paiement.
Le gel, pendant 6 mois pouvant être porté à 12 mois par le Tribunal de
commerce voir à 18 mois à la demande du Procureur de la République,
offre aux dirigeants un sursis dans le règlement de leur passif né avant la
date de la mise en sauvegarde.
Au-delà de cette période d’observation, si le Tribunal valide la proposition
de Plan de sauvegarde et dans la mesure où celui-ci est respecté, les
cautions personnelles données par les dirigeants ne seront pas appelées.
C’est une grande différence avec la procédure de redressement judiciaire
qui permet aux créanciers dès l’adoption du Plan de redressement
d’actionner les garanties dont ils disposent.
Cette bouffée d’oxygène permet aux Dirigeants de consacrer leur énergie
à leur redressement en étant libérés des actions des créanciers.
Mais surtout de conserver la maîtrise de la gestion de leur entreprise.

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3) Quels rôles incombent à l’expert-comptable en charge d’un dossier en


procédure de sauvegarde ?

En amont de la procédure l’Expert-comptable qui décèle des difficultés ou


des risques pour l’avenir, doit entamer une mission pédagogique auprès
de son client.
S’il est probable que celui-ci a conscience de celles-ci, l’expérience nous
montre que le plus souvent il refuse dans un premier temps d’admettre
ces difficultés.
Cette absence de réactivité risque de conduire l’entreprise à sa perte.
L’Expert-comptable doit donc contribuer à faire partager à son client le
diagnostic de ces difficultés mais également celui de la procédure la plus
appropriée pour redresser la société.
Cette mission est complexe car dans un premier temps, le dirigeant
réfute le plus souvent l’idée de la procédure de sauvegarde qu’il vit
comme un échec personnel.
L’Expert-comptable doit donc prendre le temps d’expliquer les
conséquences de la procédure et l’avantage d’anticiper une éventuelle
cessation de paiement pour éviter la mise en redressement ou la
liquidation.
Il doit faire comprendre que cette procédure est une procédure légale et
que les créanciers seront en cas de succès les premiers gagnants.
Une fois cette première phase comprise et validée par le dirigeant,
L’Expert-comptable doit accompagner celui-ci tout au long du chemin qui
aboutira à l’adoption du Plan de sauvegarde puis à la mise en œuvre de
celui-ci.
L’accompagnement tout au long de la procédure crée souvent des liens
très forts entre l’Expert et son client et participe ainsi au redressement de
l’entreprise.

4) De part votre expérience, pensez-vous qu’une procédure de sauvegarde


peut parfois être curative ?

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Le mérite principal d’une procédure de sauvegarde est avant tout de


permettre d’anticiper les difficultés d’une entreprise.
En ce sens, c’est le caractère préventif qui domine.
Néanmoins la prévention peut avoir pour effet de conduire le Chef
d’entreprise à mettre à jour par exemple des dysfonctionnements
organisationnels ou des risques concurrentiels. C’est d’ailleurs parce qu’il
soupçonnait ceux-ci, qu’il s’est placé sous la protection du Tribunal de
commerce.
Dès lors les mesures qu’il va prendre ont bien un caractère curatif.
La procédure de sauvegarde aura permis d’anticiper ces mesures et peut-
être permis de sauver l’entreprise.

5) L’accompagnement des entreprises en difficultés est-elle ou pourrait-


elle être une missions complémentaire facturable selon vous ?
L’accompagnement des entreprises en difficulté est une mission à part
entière totalement différente d’une mission classique de présentation
des comptes.
Cette mission nécessite des moyens et une implication importante de
L’Expert-comptable en amont et tout au long de la procédure, tant vis-à-
vis du dirigeant, que du Tribunal de commerce, du mandataire ou même
des banquiers ou autres tiers.
Cette mission justifie donc pleinement une facturation complémentaire.
A mon sens l’Expert-comptable doit même s’interdire de galvauder
l’importance de son rôle dans une procédure de sauvegarde en ne
facturant pas sa mission.

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Annexe XII – Chef d’entreprise en procédure de sauvegarde

Interview de Monsieur Salvador RODRIGUEZ, Gérant de la


SARL GROUPE N.P.A. mise en procédure de sauvegarde

1) Pourriez-vous nous retracer votre parcours professionnel ?


A l’âge de 20 ans j’ai ouvert mon premier magasin de vente de pièces
automobiles en association avec mon frère.
Après 11 années passées ensemble nous avons décidé de ne plus collaborer, et la
séparation fut amiable.
En 2001, j’ai donc ouvert seul un nouveau point de vente sur Avignon.
Puis en 2010, j’ai créé mon deuxième magasin, également sur Avignon.

2) Pouvez-vous nous décrire le contexte des difficultés rencontrées avec


votre entreprise ?
En 2010, des travaux sur l’accès principal menant au magasin et des délais
d’aménagement non respectés m’ont fait perdre plus de 40 % de mon chiffre
d’affaires. Ma réaction première a été d’ouvrir un autre point de vente pour
combler ce manque à gagner. Malheureusement, le démarrage de ce nouveau
magasin a été compliqué et les nouvelles charges liées sont venues détériorer
davantage ma situation financière.
J’ai donc été contraint d’augmenter mes échéances de paiement auprès de ma
centrale d’achat. C’était le début de la spirale négative.
A l’époque c’était une coopérative, et en tant que coopérateur j’ai pu négocier
un échéancier pour le paiement de ma dette.

3) Comment le choix de la procédure de sauvegarde a-t-il été fait ? Et que


pensez-vous de cette procédure ?
Peu de temps après, la coopérative d’achat a été rachetée et le nouvel acquéreur
n’a pas accepté cet échéancier.

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Il m’a convoqué sur Paris accompagné de mon expert-comptable, dans le but je


pense, de connaître mes difficultés et d’analyser ma capacité à le rembourser.
Etant conscient de l’importance de cette relation commerciale j’ai accepté ce
rendez-vous. Avec l’aide précieuse de mon expert-comptable j’ai pu préparer
une nouvelle proposition de paiement de la dette.
Malheureusement le directeur financier n’a pu se rendre au rendez-vous pour
raisons médicales.
Il était remplacé par une contrôleuse de gestion de l’entreprise qui n’avait pas
l’intention de négocier. Elle a rejeté catégoriquement notre proposition.
J’étais perdu, je ne voyais pas d’issue.
Mon expert-comptable m’a dit « vous devez vous mettre en procédure de
sauvegarde ».
Je ne connaissais pas cette procédure. J’imaginais un dépôt de bilan.
Après plusieurs rendez-vous avec mon expert-comptable et ses conseils avisés
sur cette procédure, j’ai compris les enjeux, les avantages et les inconvénients.
J’ai donc accepté.

Je dois avouer que cette procédure a véritablement sauvé mon entreprise, sauvé
les emplois que j’avais créés ainsi que mon patrimoine personnel. L’objectif a été
atteint, avec difficultés parfois, mais au final j’ai pu sauver l’entreprise.
Ce qui est flagrant par contre c’est le bol d’air les premiers mois, pendant la
période d’observation. Le gel des dettes est formidable. Le point négatif est la
perte des délais de paiement, surtout avec mon fournisseur principal.

4) Quelle a été la place de votre expert-comptable au cours de cette


période difficile et pendant la procédure ?
C’est la clé de voûte. Impossible pour moi d’aller en procédure de sauvegarde
sans sa proposition. Je ne connaissais pas l’existence de cette procédure. Il m’a
tout expliqué et dirigé vers les interlocuteurs dont j’avais besoin.
Mon expert-comptable a sauvé mon entreprise.
C’est lui qui a déclenché la sonnette d’alarme, qui m’a accompagné et soutenu.
Depuis je dis toujours : « il faut être bien conseillé, chacun son métier. Il faut
prendre le traitement quand l’expert-comptable dit de le prendre. »

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5) Depuis, que pensez-vous du lien entre l’expert-comptable et son client ?


Il est forcément renforcé. Nous avons vécu cette procédure ensemble. Il a sauvé
mon entreprise autant que moi. Il y a même naissance d’un sentiment d’amitié.
Quand vous sortez d’une situation financière très compliquée, vous êtes
obligatoirement attaché aux personnes qui vous ont aidés.

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