Vous êtes sur la page 1sur 11

Daniel Abécassis.

Année universitaire 2010/2011

L1 UE1

Chapitre V. La cinétique chimique.

VI 1. Introduction.
Dans le chapitre précédent, un modèle mathématique permettant de prévoir de façon plus ou
moins rigoureuse, l’évolution spontanée d’une réaction chimique. Ce modèle repose sur le second
principe de thermodynamique.
Nous allons nous intéresser dans ce chapitre à l’étude de la vitesse d’une réaction chimique, de sa
modélisation mathématique, ainsi q’aux différents facteurs qui peuvent influer directement sur un e
cinétique réactionnelle. Nous rappellerons, à ce titre, que les trois principaux facteurs cinétiques sont :
• les concentrations initiales des réactifs ;
• La température ;
• La présence d’un catalyseur.
L’étude de la cinétique d’une réaction a essentiellement pour but de savoir qu’elles sont les
conditions expérimentales optimales dans lesquelles doit se faire la réaction.
Un second intérêt majeur est la détermination d’un modèle mathématique permettant d’accéder,
lors des chapitres suivants aux mécanismes réactionnels.

V. 2 Définition.
On montre que la vitesse volumique d’une réaction chimique à pour expression générale :
1 dx
υ=
V dt

V est le volume de la solution . Il s’exprime en m 3


dx
est la dérivée de x(t) par rapport au temps. Elle s’exprime en mol/s
dt
υ est la vitesse volumique. Elle s’exprime en mol.m −3 .s −1

Rappel mathématique :

On dira qu’une fonction f définie en un point d’abscisse a est dérivable en a Si et Seulement Si il existe
un unique réel l tel que :
f ( x) − f ( a )
lim =l
x−a
x→a

Cette limite sera dite le nombre dérivée de f en a et sera noté : l=f’(a).

Notation différentielle :
f ( x) − f (a) ∆y dy
f’(a)= lim = lim = ( ) x =a
x−a ∆x dx
x→ a ∆x → 0

Remarque importante :
i/ pour les réactifs, la définition précédente montre que :
1 dx 1 d n0i − V [ Ai ] 1 d [ Ai ]
υ= = ( )=−
V dt V dt νi ν i dt
d [ Ai ]
Sachant que [ Ai ] diminue avec le temps. augmente alors avec le temps. Il est clair que la vitesse
dt
volumique de la réaction diminue.
ii/ Pour les produits, la définition précédente montre que :
1 dx 1 d V [ Bi ] 1 d [ Bi ]
υ= = ( )=
V dt V dt ν i ' ν i ' dt
d [ Bi ]
Sachant que [ Bi ] augmente avec le temps, diminue avec le temps. On retrouve bien le résultat
dt
précédent.

Finalement, pour une réaction qui peut s’écrire en toute généralité :

ν 1 A1 + ν 2 A2 ........... → ν '1 B1 + ν ' 2 B2 ............


Etat initial n10 n02
Etat intermédiaire n10 − ν 1 x n02 − ν 2 x ν1' x ν2'x
Etat final n10 − ν 1 x F n02 − ν 2 x F ν 1 ' xF ν 2 ' xF
1 d [ A1 ] 1 d [ A2 ] 1 d [ B1 ] 1 d [ B2 ]
v=− =− = =
ν 1 dt ν 2 dt ν '1 dt ν ' 2 dt

Cette vitesse est dite la vitesse globale de la réaction chimique. Néanmoins, nous pouvons définir vitesses
de disparition d’un réactif ou des vitesses d’apparition d’un produit.
d [ A]
Pour un réactif : v A = − est la vitesse de disparition du corps A.
dt
d [ B]
Pour un produit : v B = + est la vitesse d’apparition du cops B.
dt
La vitesse globale d’une réaction chimique sera alors telle que :
vA vB
v=− =+
νA νB

V. 3 Ordre d’une réaction chimique. Loi de Van’t Hoff


Contrairement à un cours de Terminale, nous allons mettre en place des modèles mathématiques
qui rendent compte de façon plus ou moins rigoureuse d’une cinétique réactionnelle. Pour cela, il est
nécessaire d’introduire ce que l’on nomme
• un ordre partiel d’une réaction par rapport à une espèce chimique donnée.
• L’ordre global d’une réaction chimique.
En considérant une réaction chimique d’équation
ν 1 A1 + ν 2 A2 ........... → ν '1 B1 + ν ' 2 B2 ............
On montre que la vitesse globale a pour expression
v = k[ A1 ]ν 1 [ A2 ]ν 2
Ou, en toute généralité :
v = k ∏ [ Ai ]ν i Loi de van’ t Hoff.
i

k est une constante. k est la constante de vitesse.


Les coefficients ν i sont les coefficients stoechiométriques relatifs à l’espèce chimique Ai .Cette relation
rend compte de l’agitation moléculaire. Pour qu’une réaction se fasse, il est nécessaire qu’il y ait
rencontre entre les divers réactifs du milieu réactionnel. La réaction se fera d’autant mieux que le
nombre de chocs entre les réactifs est important. C’est la raison pour laquelle, en première
approximation, on peut décrire ce comportement par la relation précédente.
Cette relation, ainsi que je l’ai souvent affirmé, n’est qu’un modèle. A ce titre, il s’inscrit dans le
cadre d’un cours académique qui ne reflète que très rarement les observations expérimentales. On peut,
en toute généralité, se rapprocher de la loi de Van’t Hoff précédente en montrant l’existence de réels
p i tels que :
v = k ∏ [ Ai ] pi
i

Le réel p i est dit l’ordre partiel de la réaction par rapport à l’espèce chimique Ai

Le réel p = ∑ pi est dit l’ordre global de la cinétique réactionnel.


i
Donnons les exemples suivants : CO + Cl 2 → COCl 2 v = k[CO ][Cl 2 ]1 / 2
S 2 O82− + 2 I − = 2 SO42− + I 2 v = k[ S 2 O82− ][ I − ]

V. 4 Etude théorique.
1. Cinétique d’ordre 0
Prenons l’exemple suivant : A→B
d [ A] d [ B ]
On aura alors, de façon simple : v = − = = k[ A]0 = k
dt dt
[ A] t
Ie : d [ A] = − kdt ⇔ ∫
[ A ]0
d [ A] = ∫ − kdt ⇔ [ A] − [ A]o = − kt
t =0

La concentration de l’espèce A évoluera en fonction du temps de façon affine :


[ A] = [ A]O − kt

Remarque : Il existe très peu de réaction chimique qui soient d’ordre global égal à 0. Citons, pour
1
mémoire : N 2 O 5 ( g ) = 2 NO2 + O2
2

2. Cinétique d’ordre 1
Prenons, là encore le modèle simplifié : A → B . Sachant que la cinétique est d’ordre global égal à un, on
peut écrire le modèle différentiel suivant :
d [ A] d [ B]
v=− =+ = k[ A]
dt dt

On obtient une équation différentielle dont la résolution est triviale :


d [ A] d [ A] [ A ] d [ A] t

dt
= k[ A] ⇔
[ A]
= − kdt d’où ∫[ A]O [ A] ∫t =kdt
= −
0
ln[ A] − ln[ A]O = − kt ie : [ A] = [ A]O e − kt

Pour ce qui concerne le produit B, on peut également mettre en évidence l’équation différentuielle
suivante :
d [ B] d [ A] d
=− = − ([ A]O e − kt ) = k[ A]O e − kt
dt dt dt
− kt
⇔ d [ B] = k[ A]O e dt
[B] t
Par intégration, on obtient alors : ∫ d [ B] = k[ A]0 ∫ e − kt dt
0 0
− kt t
Ie : [ B] = [−[ A]O e ] = −[ A]0 (e − kt − 1)
0

IN FINE : [ B] = [ A]O (1 − e − kt )

Temps de demi
réaction.
Ainsi que nous le savons déjà, on définit le temps de demi réaction t1 / 2 par la duréé au bout de
laquelle la concentration initiale du réactif A est divisé par deux
1
A t = t1 / 2 , alors [ A] = [ A]O
2
D’après l’étude théorique précédente, on obtient de façon triviale, la relation
ln 2
t1 / 2 =
k
La démonstration est laissée au lecteur.

2. Cinétique d’ordre 2.
Considérons la réaction suivante A+ B → C + D
a b 0 0
a-x b-x x x
a et b sont les concentrations initiales des réactifs A et B. x est la concentration, à un instant t de C (ou de
D ).
Si l’on considère, par exemple, la vitesse d’apparition de C, on a :
d [C ] dx dx
v= = k[ A][ B] ⇔ = k (a − x)(b − x) ⇔ = kdt
dt dt (a − x)(b − x)
Or Il est clair que :
1 1 1 1
= [ − ]
(a − x)(b − x) b − a a − x b − x
On obtient l’équation différentielle suivante :
1 1 1 1 t
∫ [
b−a 0 a−x b−x
− ]dx = ∫ kdt
0

1
⇔ [− ln(a − x) + ln(b − x)]0x = kt
b−a
1 b−x x
⇔ [ln ]0 = kt
b−a a−x
1 b−x b
⇔ [ln − ln ] = kt
b−a a−x a

IN FINE, on obtient la relation suivante :


1 a (b − x)
ln[ ] = kt
b − a b( a − x )

Remarque : La démonstration précédente n’est plus valable si a=b.


Dans ce cas plus simple, l’équation différentielle devient
dx
= k (a − x) 2
dt
dx x dx t 1 x 1 1
D’où
(a − x) 2
= kdt ⇔ ∫
0 (a − x ) 2
= ∫ kdt ⇔ [
0 a−x
]0 = kt ⇔ − = kt
a−x a

1 1
IN FINE : − = kt
a−x a
Remarque : cette relation traduit une cinétique du second ordre qui pourrait s’écrire
2A → C + D
Temps de demi-réaction :
1.Dans le cas général, le temps de demi réaction est la durée au bout de laquelle
1
x= x max
2
1. Dans le cas simplifié précédent
1
Le temps de demi réaction sera la durée au bout de laquelle x = a . Ceci met en évidence :
2
1 1 2 1
− = kt1 / 2 ⇔ − = kt1 / 2
a−a/2 a a a
1
Ie t1 / 2 =
ak

3. Réactions sans ordre simples.


Dans les cas précédents, on a modélisé les cinétiques réactionnelles dans les cas d’ordres simples. Il existe
d’autres cas, notamment ceux qui concernent les réactions réversibles, pour lesquels l’évolution d’un
système chimique est caractérisée par plusieurs réactions.

A. Cas des réactions réversibles.


a. A = B
Nous pouvons ici considérer que l’on a deux réactions du premier ordre chacune. L’expression de la
vitesse réactionnelle est alors telle que :
v = k1 [ A] − k 2 [ B]
En considérant le tableau d’avancement suivant
A= B
a 0
a-x x
On aura alors :
d (a − x) dx
v = k1 (a − x) − k 2 x = − =
dt dt
Pour résoudre cette équation différentielle, le chimiste Bodenstein a émit le principe dit de l’état
stationnaire
Principe de Bodenstein :
Au bout d’un temps infini, le système atteindra un état d’équilibre, pour lequel les concentrations
ne varieront plus au cours du temps.
dx
On obtiendra alors ve = ( )e = 0
dt

Lorsque cet état sera atteint, x = x f et k1 ( a − x f ) − k 2 x f = 0


Cette relation permet de déterminer une expression de la constante k 2
k1 ( a − x f )
k2 =
xf

dx a − xf a a a
On obtient v = = k1 (a − x) − k1 x = k1 a − k1 x − k1 x + k1 x = k1 a − k1 x = k1 ( x f − x)
dt xf xf xf xf
Conclusion : En posant
 a
k ' = k1
 xf
 a' = x f

On obtient
On retrouve le modèle d’une cinétique formelle du premier ordre alors que la réaction étudiée n’a pas
d’ordre.

Exemple d’une telle cinétique :


On montre que la réaction suivante suit une telle cinétique :
CH 3 − C − CH 3 = CH 3 − C = CH 2
O OH

b. A + B = C + D
Considérons pour étudier cette cinétique , le tableau d’avancement suivant :
A + B = C + D
a a O O
a-x a-x x x
En considérant la vitesse d’apparition du produit C, on obtient:
dx
v= = k1 [ A][ B] − k 2 [C ][ D]
dt
dx
v= = k1 (a − x) 2 − k 2 x 2
dt
En utilisant le même principe que précédemment :
dx
) e = 0 = k1 ( a − x f ) 2 − k 2 x f
2
(
dt
A l’équilibre :
(a − x f ) 2
k 2 = k1
x 2f

dx (a − x f ) 2 2

D’où v= = k1 (a − x) 2 − k1 x
dt x 2f
Après calcul on montre que l’on peut écrire
dx
v= = k ' (a '− x)(b'− x)
dt
Cette équation est formellement équivalente à celle caractérisant une cinétique du second ordre.
B. Cas des réactions successives.
Les réactions successives entrent dans le cadre des cinétiques sans ordres simples. Pour illustrer cela, on
peut considérer deux formes simples :
a. Cas de deux réactions d’ordre un.
Considérons le modèle suivant A → B → C
Etat initial a 0 0

On a alors A → B B→C
a 0 et x 0
a-x x x-y y

d [ A]
Pour ce qui concerne la vitesse de disparition de A : v = − = k1[ A]
dt
La solution d’une telle équation est alors : [ A] = ae − kt1

d [ B]
Pour ce qui concerne les apparitions de B et de C, on a également : v = = k1[ A] − k 2 [ B ]
dt
Cette équation différentielle peut encore s’écrire
d [ B]
+ k 2 [ B] = k1 [ A]
dt

Rappel mathématique.
L’ensemble des solutions de l’équation différentielle (E) ay ' ( x ) + by ( x) = g ( x ) est l’ensemble des fonctions
y(x) définies, continues et dérivables sur un intervalle I telles que :
y( x) = y1 ( x) + y 2 ( x)
 y1 ( x), solution, de, ( H )
Avec : 
 y 2 ( x), solution, particulière, de, ( E )
(H) est l’équation homogène : ay ' ( x) + by ( x) = 0
La solution particulière y 2 ( x) est, en toute généralité de la même forme que le second ordre g(x).
On peut également déterminer l’ensemble des solutions de l’équation différentielle initiale, en résolvant
l’équation homogène et en faisant varier la constante K ( qui n’est alors plus une constante).

L’équation homogène ( sans second membre ) est aisée à déterminer


d [ B] d [ B]
+ k 2 [ B] = 0 ⇔ = − k 2 dt ⇒ [ B ] = Ke −k 2t
dt [ B]
Utilisons la méthode de la variation de la constante K
dK − k 2t dK
e − Kk 2 e − k 2t + k 2 Ke − kt = k1[ A] ⇔ = k1 [ A] exp(k 2 t ) = k1 a exp(− k1t ) exp(k 2 t ) = k1a exp(k 2 − k1 )t Par
dt dt
intégration, on obtient
k1 a
K (t ) = exp(k 2 − k1 )t + C
k 2 − k1
IN FINE
k1 a
[ B] = [ exp(k 2 − k1 )t + C ] exp(− k 2 t )
k 2 − k1
A l’instant initial la concentration de B est nulle
D’où
k1 a
[ B] = [exp(k 2 − k1 )t − 1] exp(−k 2 t )
k 2 − k1
Ie

k1 a
[ B] = (e −k1t − e − k 2t )
k 2 − k1

Cette relation permet, de façon claire, de déterminer à tout instant la concentration du produit C.
En effet :
[ A] = a − x
En considérant un instant quelconque, on a [ B ] = x − y
[C ] = y
D’où [C ] = a − [ A] − [ B]
On obtient, IN FINE
k2 k1
[C ] = a[1 − e −k 1t + e − k 2t ]
k 2 − k1 k 2 − k1
La représentation graphique de ceci est alors :

Exemples de telles réactions


• les réactions nucléaires en chaîne
• les désintégrations radioactives.

Principe de Bodenstein.
Nous avons déjà mis en évidence une formulation simple de ce principe. Dans le cadre des réactions
successives, celui-ci prend une forme très importante.
En effet, on a constaté que
d [ B]
v= = k1[ A] − k 2 [ B ]
dt
Si k 2 a une valeur très importante par rapport à k1 , la réaction A → B est de façon claire l’étape
limitante de la cinétique réactionnelle.
Dans les relations précédentes, le terme e − k 2t est nettement négligeable. On montre que, IN FINE
d [ B]
v= = k1 [ A] − k 2 [ B ] = 0
dt
Ce principe ne s’appliquera que si B est très réactif. Ce sera le cas pour les intermédiaires réactionnels, par
exemple.

V. 5. Influence de la température. Loi D’Arrhénius.


Nous savons depuis la classe de Terminale, que la température est un paramètre cinétique. On montre
que l’influence de la température se fait par l’intermédiaire de la constante k de la réaction.
En 1889, le chimiste Arrhénius met en évidence la relation mathématique reliant k et la
température. Cette relation a pour modèle :
d E
ln k = a 2
dt RT
E a est une énergie : L’énergie d’activation. C’est une constante positive pour une réaction donnée, dont
la valeur peut être de l’ordre de quelques kJ à plusieurs dizaines de kJ.

Vous aimerez peut-être aussi