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Qualité-Accréditation

Ann Biol Clin 2019 ; 77 (5) : 577-97

Recommandations pour la mise en place


et le suivi des contrôles de qualité
dans les laboratoires de biologie médicale
Recommendations for the application and the follow-up
of quality controls in medical biology laboratories
Copyright © 2019 John Libbey Eurotext. Téléchargé par Mme VALERIE VERNEAU le 22/10/2019.

Jean-Marc Giannoli1 Résumé. Les recommandations formulées dans ce document sont issues de tra-
Stéphanie Albarede2 vaux menés conjointement par LABAC, la SFBC et la FAEEQ. Les différentes
Thierry Avellan3 étapes de la mise en place des contrôles de qualité, basée sur l’analyse de risque,
sont décrites. Les changements de lots réactifs ou de lots de contrôle interne
Jean-Pierre Bouilloux4
de qualité (CIQ), la conduite à tenir en cas de CIQ non conforme, le choix des
Régine Cartier5 EEQ et leur interprétation sont abordés ainsi que la nouvelle problématique des
Richard Cohen6 analyses réalisées sur plusieurs automates dans le même laboratoire. Enfin le
Nathalie Colard7 concept d’incertitude de mesure, la robustesse des méthodes ainsi que la parti-
Luc Essemilaire8 cularité des EBMD et celle des tests unitaires simplifiés (TUS) sont traités. Ces
Jean-Louis Galinier9 recommandations ne prétendent pas répondre à tous les cas de figure envisa-
geables au sein d’un laboratoire. La mise en œuvre d’une stratégie alternative
Mathieu Kuentz10
argumentée et objective doit également pouvoir être envisagée.
Mickaël Paris11
Henri Portugal12 Mots clés : analyse de risques, contrôle interne de qualité, évaluation externe
de la qualité, incertitude de mesure
Florian Scherrer13
Jean-Pascal Siest14 Abstract. The recommendations that we formulate in this document come from
Anne Vassault15 LABAC, SFBC and FAEEQ. They describe the different steps from the initial
Jean-Michel Vialle16 application of quality controls, based on risk analysis: the changes of reagent
Association de biologie batches or internal quality controls (IQC) batches, the course when IQC are
praticienne, Asqualab, Biologie not in accordance with references, the choice of external quality evaluation
and the interpretation of its results, the comparability of results obtained in
Prospective, CTCB, LABAC,
several analysers used in the same laboratory. Lastly, measurement uncertainty,
Probioqual, SFBC robustness of methods and specificities of near-patient biology and rapid tests
1 Dyomédéa/Néolab, LABAC, Lyon,
are described. Note that these recommendations cannot develop all cases that
France we could find in laboratories. It remains necessary to carry out an objective
2 CTCB, Toulouse, France strategy, supported with documentary evidences.
3HIA Lavéran, LABAC, Marseille,
France Key words: risk analysis, internal quality control, external quality assessment,
4 LxBIO, LABAC, Rodez, France uncertainty
5 HCL, Probioqual, Lyon, France
6 Probioqual, Lyon, France
7Laboratoire Colard, LABAC,
Fresnes-sur-Escaut, France
8 Consultant, LABAC, Montauban,
doi:10.1684/abc.2019.1481

France

Correspondance : J.-M. Giannoli


<jm.giannoli@gmail.com>

Pour citer cet article : Recommandations pour la mise en place et le suivi des contrôles de qualité dans les laboratoires de biologie médicale. Ann Biol Clin 2019 ; 77(5) :
577-97 doi:10.1684/abc.2019.1481
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9 Laboratoire Clinique Pasteur, CTCB,


Toulouse, France
10 CH Aurillac, SFBC, Aurillac, France
11 Cerballiance Bourgogne, LABAC,
Dijon, France
12 APHM, Université Aix-Marseille,
LABAC, Marseille, France
13 Synlab Vallée du Rhône, LABAC,
Roussillon, France
14 Biologie Prospective,
Villers-lès-Nancy, France
15 Asqualab, Paris, France
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16Laboratoire Vialle, LABAC, Bastia,


France

Article reçu le 25 juillet 2019,


accepté le 28 juillet 2019

Les recommandations formulées dans ce document pro- – les pratiques acceptables : données reposant sur une
viennent essentiellement de la conférence organisée majorité d’articles ayant fait l’objet d’interprétations
conjointement par LABAC, la SFBC et la FAEEQ à Paris variables selon les publications ou, à défaut, un article pour
le 30 janvier 2019. Cette journée a permis de débattre des lequel les critères d’interprétation ne sont pas aussi solides
pratiques de contrôle interne de qualité (CIQ), d’évaluation que dans la catégorie recommandée (exemple : effectif plus
externe de la qualité (EEQ) et d’estimation des incertitudes faible, méthodologie statistique utilisée...) ;
de mesure (IM) pour des méthodes quantitatives de routine – les pratiques non recommandées (réputées non-
(biochimie, hématocytologie et hémostase). Les analyses de conformes aux exigences de la norme NF EN ISO
microbiologie (y compris les sérologies infectieuses) sont 15189:2012) : données non recommandées faisant l’objet
exclues du champ de ces recommandations, de même que d’un consensus après la lecture des différents articles ou
certains examens spécialisés dont l’approche en matière de aè défaut, reposant sur au moins un article pour lequel la
maîtrise des contrôles de qualité doit être adaptée. méthodologie et les critères d’interprétation sont solides et
Les différents contributeurs se sont efforcés d’établir des robustes (avis d’experts). Les pratiques non recommandées
positions explicites qui reflètent la littérature, leurs expé- représentent des pratiques qui peuvent remettre en cause la
riences et leurs connaissances en biologie médicale. Ces fiabilité des résultats.
recommandations sont à considérer comme une base de Concernant les CIQ, la norme NF EN ISO 15189:2012 [2]
réflexion et de travail pour l’ensemble des acteurs de la bio- définit les exigences suivantes :
logie médicale. Ces recommandations ne prétendent pas – concevoir des procédures de contrôle permettant de véri-
répondre à tous les cas de figure envisageables au sein fier que la qualité prévue des résultats est atteinte ;
d’un laboratoire. La mise en œuvre d’une stratégie alter- – utiliser des matériaux de contrôle qui se comportent
native argumentée et objective doit également pouvoir être le plus possible comme des échantillons provenant des
envisagée. Enfin, ces recommandations sont naturellement patients (notion de commutabilité) ;
susceptibles d’évoluer au fil du temps. – utiliser régulièrement ces matériaux de contrôle en fonc-
Trois niveaux de recommandations ont été retenus [1] : tion de la stabilité des méthodes ;
– les pratiques recommandées (réputées conformes aux – évaluer, en cas d’anomalie constatée, l’impact sur les
exigences de la norme NF EN ISO 15189:2012 [2]) : elles éventuels résultats déjà libérés depuis le dernier CIQ satis-
proviennent des documents de référence, données faisant faisant ;
l’objet d’un consensus après la lecture des différents articles – revoir les résultats des CIQ régulièrement afin de détecter
ou à défaut, reposant sur au moins un article pour lequel la les tendances.
méthodologie et les critères d’interprétation sont solides et Le SH REF 02 rev. 05 [3] ajoute les notions de stratégie
robustes (avis d’experts). Elles représentent les « règles de argumentée et documentée incluant les notions de série,
l’art ». Elles sont considérées comme des objectifs de bonne de fréquence de passage, de niveaux utilisés, d’exigences
pratique ; de performances, de règles de validation. Il aborde aussi

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la conduite à tenir en cas de résultat hors borne du CIQ Les risques maîtrisés par le passage de CIQ sont les
et l’estimation d’un éventuel impact sur les résultats déjà suivants : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9 (tableau 2).
rendus.
La norme ISO/CEI 17025:2017 [4] introduit la notion sui- Étude de la robustesse de la méthode
vante : « assurer la validité des résultats ».
La norme NF EN ISO 15189:2012 [3] (au § 5.6.2.1) précise
L’analyse de risques, la notion de série qu’il faut vérifier la qualité prévue des résultats. Dans un
premier temps, il est nécessaire de déterminer la robustesse
Analyse de risques de la méthode utilisée (tableau 3).
L’analyse de risques est la première étape essentielle dans L’approche 6 sigma (sigma = (Et-Biais)/CV), qui n’est pas
la mise en place d’une stratégie de CIQ. Elle consiste en un objectif en soi, est un outil qui permet d’évaluer la robus-
un inventaire des risques analytiques pouvant entraîner un tesse de la méthode [5]. Le niveau de sigma est calculé à
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résultat potentiellement erroné (tableau 1). partir de l’erreur totale admissible (Eta) que choisit le labo-
La liste présentée ci-dessous est non exhaustive et comporte ratoire, des CV et des biais qui sont des données objectives
les principaux risques identifiés : caractéristiques de chaque méthode. La difficulté réside
1- Détérioration du réactif au cours de l’expédition dans le choix de l’Eta qui peut conditionner grandement
2- Altération de l’étalonnage le résultat du niveau de sigma [6]. Actuellement un débat
3- Présence de micro-caillots obstruant totalement ou par- existe sur la formule de calcul du sigma avec la prise en
tiellement le système de pipetage compte ou non du biais [7].
4- Maintenances défaillantes ou insuffisantes D’autres moyens peuvent être utilisés pour évaluer la
5- Détérioration du réactif en cours de stockage dans le robustesse d’une méthode : suivi du rapport répéta-
laboratoire (défaut de stabilité du réactif) ou péremption du bilité/reproductibilité [4], fréquence des ré-étalonnages
réactif nécessaires, fréquence de reciblage des CIQ, etc.
6- Panne (bloquante et non bloquante) ou dérive du système Le LBM peut aussi exploiter les résultats du groupe de
analytique pairs (justesse), les résultats de sa technique au travers des
7- Conditions environnementales non maîtrisées (tempéra- comptes rendus des OCIL et éventuellement les résultats
ture et variation de cette température au cours du temps, des confrontations avec d’autres laboratoires en dehors du
humidité, etc.) cadre des OCIL.
8- Dérives au cours du temps de la méthode (dérive et Le résultat du calcul du niveau de sigma est surtout utilisé
tendance) pour définir la stratégie de passage des CIQ : voir infra
9- Erreur par effet opérateur (méthodes manuelles) (§2.5), site internet Westgard [8]. L’approche 6 sigma est
10- Erreur par effet opérateur (méthodes automatiques) adaptée pour les grandes séries.

Ces risques dépendent de chaque méthode et sont, pour la


Stratégie de passage des CIQ :
plupart, connus. Les fournisseurs de dispositifs médicaux
définition de la série et définition
de diagnostic in vitro mettent à disposition des moyens
des évènements critiques (tableau 4)
de maîtrise. Cependant, ces préconisations peuvent être
insuffisantes ou inadaptées et des actions complémentaires Le laboratoire doit mettre en évidence ce qui est suscep-
sont alors requises. Toutes ces actions devront être asso- tible de modifier la stabilité de la méthode. Le laboratoire
ciées à des indicateurs qui doivent permettre de suivre la identifie les évènements critiques ou points de contrôles cri-
maîtrise des risques en enregistrant les situations pendant tiques (critical control point quality control) : l’étalonnage,
lesquelles le risque n’est plus maîtrisé (suivi des non- une maintenance impactante (remplacement de pièces,
conformités par exemple). Dans le cadre d’une démarche réglages, etc.), certains types de panne, un changement de
d’amélioration continue, une réévaluation du risque (avec lot de réactifs ou d’étalons, etc. Le laboratoire peut ainsi
de nouvelles données d’entrée (non-conformité, audits définir les évènements qui vont clôturer la série [9].
internes et externes, réclamations, indicateurs, etc.)) est à La stratégie de passage des CIQ est basée sur :
réaliser avec mise en place d’éventuels nouveaux moyens – la définition de leur fréquence de passage : risques 2 et 5 ;
de maîtrise. Cette démarche « dynamique » permet d’avoir – les niveaux utilisés : risques 1 et 2 ;
un système pro-actif. – le positionnement dans la série (étalonnage, nombre de
D’autres risques peuvent être identifiés notamment selon dosages) : risques 2 et 7 ;
la technologie des analyseurs ou les méthodes utilisées – les évènements potentiellement impactants qui sur-
(ex. : qualité des consommables, qualité de l’eau, etc.). Il viennent : risques 2, 3, 4, 6 ;
appartient au laboratoire de mettre en place des moyens de – la définition des limites acceptables et le choix des règles
maîtrise adaptés. d’interprétation des cartes de contrôles : risques 1, 2, 8.
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Tableau 1. Inventaire des risques analytiques.

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Risque Identification du Recommandations Limite connue Efficacité Actions complémentaires Risque Indicateurs
N◦ risque (“danger”) fournisseur, de ces des (plan de maîtrise) résiduel
et effet (impact sur bonnes pratiques recommandations dispositions
le résultat ou exigences
(potentiellement normatives
erroné))
1 Détérioration du - Expédition séparée Si contrôles altérés, Partielle - Séparer réactifs et contrôles Acceptable - Nombre de
réactif au cours de réactifs la détection de lors des commandes non-conformités
l’expédition et contrôles l’anomalie n’est pas si possible à réception
- Essai d’acceptation toujours possible - Maîtriser la conservation - Nombre de
à réception des CIQ (température) non-conformités relatives
(§ 5.3.2.3 de la norme et connaître les données aux dépassements
NF EN ISO des fiches de stress si de température
15189:2012) disponibles ou des notices de conservation
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techniques - Non-conformités
- Maîtriser la péremption avant détectées au cours de
et après ouverture des flacons l’audit interne technique
de CIQ - Suivi des CV des CIQ
- Utiliser plusieurs niveaux - Conformité des EEQ
de contrôle (limite de
quantification (LQ), valeur
seuil, limite de linéarité)
- Adapter les limites
acceptables aux besoins
cliniques

2 Altération de - Limites Dérive possible Partielle - CIQ avant et après Acceptable - Nombre d’étalonnages
l’étalonnage d’acceptabilité du entre 2 passages réétalonnage échoués
signal de l’étalon de contrôle - Stratégie de fréquence de - Nombre d’étalonnages
(software) passage des CIQ en fonction supplémentaires par
- CIQ du nombre de dosages rapport à ce qui est
post-étalonnage et de la criticité du paramètre annoncé/préconisé
- Suivi des résultats - Participation à des EEQ par le fournisseur
des étalonnages - Maîtrise de la température - Suivi des CV des CIQ
avec des critères ambiante et des variations - Conformité des EEQ
d’acceptabilité de cette température
adaptés.
3 Microcaillots - Mesure de Microcaillots Partielle - Contrôle visuel Acceptable - Nombre de
obstruant pression dans la non détectés des échantillons non-conformités dues à un
totalement ou sonde de pipetage - Suivi de la fréquence bouchage total ou partiel
partiellement le (si elle existe et si des erreurs de bouchage
système alarme analyseur) - CIQ avant et après certains
- détection optique types de maintenance
pour qualifier le (changement d’aiguille,
volume d’échantillon décontamination...)
prélevé

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Tableau 1. (Suite)

Risque Identification du Recommandations Limite connue Efficacité Actions complémentaires Risque Indicateurs
N◦ risque (“danger”) fournisseur, de ces des (plan de maîtrise) résiduel
et effet (impact sur bonnes pratiques recommandations dispositions
le résultat ou exigences
(potentiellement normatives
erroné))
4 Maintenance - Ré-étalonnage Non-détection d’une Partielle - CIQ avant et après Acceptable - Nombre de CIQ rejetés
fournisseur après maintenance dérive du système, maintenance (changement après maintenances
ou utilisateur corrigée par un d’aiguille, décontamination...) impactantes
défaillante nouvel étalonnage - recherche des tests - Nombre de maintenances

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sentinelles précocement en erreur ou non réalisées
sensibles dans les délais
- maîtrise des différentes non-conformité détectées
maintenances en matière au cours de l’audit interne
de stabilité du système technique
5 Détérioration du - Gestion des dates - Pas de détection Partielle pour - Formation, qualification Acceptable - Non-conformités
réactif en cours de péremption par pour les réactifs réactifs des utilisateurs détectées au cours de
de stockage code à barres sur entamés (maîtrise entamés - Traçabilité ouvertures des l’audit interne technique
ou d’utilisation, analyseur de la durée entre conditionnements de réactifs sur la maîtrise de la
utilisation de - Software stockage dans (et dates limites d’utilisation) traçabilité de mise en
réactifs périmés permettant la l’analyseur et - CIQ pour chaque série service des réactifs
détection des stockage dans d’analyses et des contrôles
anomalies de signal enceinte - suivi des températures
(blanc réactif, DO appropriée) de stockage
étalonnage)
6 Panne ou dérive du - Maintenance - Pas de détection Partielle pour - CIQ après maintenance Acceptable - Nombre de comptes
système de mesure curative et passage des anomalies panne - Redosage d’échantillons rendus patients rappelés
(bloquante et non des CIQ avant la panne bloquante patients après intervention - Nombre de pannes
bloquante) bloquantes
7 Conditions - Limites Absence de suivi Partielle si - Traçabilité des variations Acceptable - Exploitation des données
environnementales température des variations variations de température en fonction de suivi de températures
non maîtrisées mini/maxi définies de température en des des opérations (étalonnage, au cours du processus
(dérive de la - Variation fonction d’un temps températures passage CIQ, passage analytique
température au température entre donné à l’intérieur patients) - Suivi des cartes de
cours du temps) étalonnage et des limites - Encadrement des séries par contrôle des graphes
phase analytique acceptables des contrôles ou des repasses de température
et au cours de la d’échantillons patients
phase analytique

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Tableau 1. (Suite)

Risque Identification du Recommandations Limite connue Efficacité Actions complémentaires Risque Indicateurs
N◦ risque (“danger”) fournisseur, de ces des (plan de maîtrise) résiduel
et effet (impact sur bonnes pratiques recommandations dispositions
le résultat ou exigences
(potentiellement normatives
erroné))
8 Dérives au cours - Stratégie de - Fréquence Partielle pour - CIQ avec limites acceptables Acceptable - Suivi des CV à long
du temps de la passage CIQ par insuffisante détection de adaptées aux performances terme par analyseur
méthode (dérive et réactif et par analyte - Limites la dérive réelles de l’analyseur et aux - Conformité des CV par
tendance) acceptables trop besoins cliniques rapport aux objectifs du
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larges - Suivi des CV selon des laboratoire


- Règles de spécifications pertinentes
Westgard utilisées - Calcul du sigma ou suivi
inadaptées de la robustesse
- suivi du biais par
comparaison au groupe
de pairs
- Suivi des moyennes
« patients »
- Si multi-analyseurs, suivi
de la comparabilité
9 Erreur par effet - Qualification - Dérive Partielle - Fréquence adaptée Acceptable - Suivi des CIQ et EEQ
opérateur habilitation des pratiques des habilitations par opérateur
(techniques (évaluation des - Audit avec observation
manuelles) compétences) des pratiques (variabilité
inter-opérateurs)
- vérification des saisies
manuelles
10 Erreur par effet - Mot de passe - Dérive Partielle - Sécurisation des mots Acceptable - Audit de sécurité
opérateur personnalisé des pratiques de passe informatique
(techniques changé - Fréquence adaptée - Traçabilité
automatisées) fréquemment des habilitations des modifications
- code d’accès de paramétrage
spécifique pour des analyses
la fonction et des contrôles
administrateur pour
modification du
paramétrage des
analyses et des
contrôles

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Contrôles de qualité dans les laboratoires

Tableau 2. Analyse de risques. Pour la définition de la série, il faudra prendre en compte


également :
Analyse de risques – la stabilité de l’échantillon (analyse de risques à réali-
Pratique Une analyse des risques qui définit des ser lorsque la stabilité de l’analyte ne permet pas toujours
recommandée moyens de maîtrise pour tous les risques
identifiés associée à une mise en un redosage de l’échantillon à distance, bicarbonates par
surveillance dynamique du risque, à exemple) ;
l’évaluation de la maîtrise du risque et son – la criticité du paramètre si résultat rendu dans le cadre de
suivi dynamique
l’urgence (troponine, D-dimères, NFP, etc.) avant passage
Pratique Risques maîtrisés mais non évalués (non
acceptable mis en surveillance et suivi dynamique d’un CIQ pour clôturer la série ;
incomplet) et sans impact pour le patient – la robustesse de la technique utilisée ;
Pratique non Absence d’évaluation des risques – les éventuelles recommandations du fournisseur.
recommandée formalisée et absence de maîtrise Le laboratoire encadre donc la série avec des CIQ ou
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des risques
d’autres moyens (voir §4.3 ci-dessous). Néanmoins, « en
fin de journée », après le passage d’un CIQ de fin de
série, il est acceptable de considérer que la méthode est
sous contrôle et stable pendant un temps relativement court
Tableau 3. Étude de robustesse de la méthode. qui reste à définir par le LBM (quelques heures selon le
retour d’expérience des auteurs), pour un nombre limité
Étude de la robustesse de la méthode de dosages (moins de 50, selon le retour d’expérience des
Pratique Calcul du sigma en argumentant le choix auteurs) en tenant compte de la robustesse de la méthode.
recommandée de l’erreur totale
Utilisation d’autres moyens permettant
d’évaluer la robustesse Place des maintenances préventives
Confronter à d’autres indicateurs (suivi des dans la stratégie de passage des CIQ
CIQ, EEQ, etc.)
Adaptation de la taille de la série, de la Voir risque n◦ 4
fréquence de passage des CIQ et des
règles de Westgard [3] utilisées par rapport Certaines maintenances préventives peuvent avoir un
au niveau de sigma impact sur la méthode (à documenter avec le fournisseur) :
Pratique Niveau de sigma ou autre moyen cette information est importante à prendre en compte afin
acceptable d’évaluation de la robustesse utilisé de maîtriser son équipement.
seulement comme indicateur
Absence d’évaluation spécifique de la Le moyen le plus simple pour maîtriser l’impact de ces
robustesse mais stratégie de gestion des maintenances sur la stabilité du système analytique est de
CIQ adaptée (absence d’impact patient en passer des CIQ avant et après ces maintenances mais le
particulier)
laboratoire peut aussi utiliser d’autres moyens (redosages
Pratique non Absence de prise en compte
recommandée de la robustesse de la méthode d’échantillons patients, etc.) (tableau 5).

Place de la maintenance curative


Voir risque n◦ 6
Tableau 4. Définition de la série et des évènements critiques. La maintenance curative est potentiellement impactante et
dans ce cas, elle « clôture » une série de manière inopinée :
Stratégie de passage des CIQ : définition de la série le laboratoire doit vérifier l’absence de dérive de la méthode
et définition des évènements critiques avant la panne (étude d’impact) (tableau 6).
Pratique Définition des évènements critiques par
recommandée analyseur et par analyse pour définir la série
et stratégie de passage des CIQ adaptée Nombre de tests dans la série et fréquence
Pratique Encadrement correct de la série mais des CIQ
acceptable sans identification des points critiques
Libération des résultats avant les résultats Voir risque n◦ 8
des CIQ de « fin de série » (ou autre moyen Le laboratoire devra déterminer la fréquence de passage
de maîtrise de la méthode) et conduite à des CIQ et la taille de la série (nombre de dosages pour un
tenir si CIQ de fin de série (ou autre moyen
de maîtrise) non conforme. Cette stratégie paramètre entre 2 résultats de CIQ) (tableau 7).
est définie en fonction de l’analyse Le calcul du niveau de sigma est un des moyens (voir §2.5
de risque de chaque analyse ci-dessous) d’évaluation de la robustesse de la méthode
Pratique non Absence de stratégie de passage des CIQ mais d’autres éléments sont à prendre en compte dans une
recommandée argumentée
analyse de risques :

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Tableau 5. Place des maintenances préventives. Tableau 7. Fréquence de passage des CIQ.

Place des maintenances préventives dans la stratégie Fréquence de passage des CIQ
de passage des CIQ Pratique Une analyse de risques complète est
Pratique Les opérations de maintenance recommandée réalisée et une stratégie pertinente est
recommandée impactantes sont identifiées définie en tenant compte du niveau de
Des CIQ (ou autres moyens appropriés) sigma (ou autre méthode pertinente
sont utilisés avant et après d’évaluation de la robustesse de la
les maintenances impactantes méthode) et des règles de Westgard
Des indicateurs qualité sont mis en place Cette stratégie est adaptée pour chaque
pour suivre la maîtrise du risque paramètre
Pratique Les notions sont connues, utilisées Pratique Pas de différenciation par paramètre mais
acceptable mais insuffisamment formalisées dans acceptable maîtrise satisfaisante du risque de dérive au
la documentation de routine (traces cours du temps de la méthode (pratique non
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retrouvées mais non reprises dans une individualisée par paramètre et basée sur
instruction de travail ou un mode opératoire) les paramètres les plus exigeants)
Risque maîtrisé par un passage de CIQ Pratique non La fréquence des CIQ ne prend pas en
ou autre moyen de maîtrise approprié recommandée compte les performances de la méthode,
Pratique non Pas de connaissance de la nature des notamment la robustesse, la criticité du
recommandée maintenances ni de leur impact sur la résultat et les délais d’utilisation clinique
stabilité du système analytique du paramètre
Pas de CIQ utilisé (ou autre moyen de
maîtrise) avant et après une maintenance
impactante.
Tableau 8. Choix des CIQ.

Choix des CIQ


Tableau 6. Place de la maintenance curative. Pratique Utiliser un contrôle de qualité indépendant
recommandée et/ou en complément de celui du fournisseur
Pratique Utilisation uniquement des CIQ du
Place de la maintenance curative
acceptable fournisseur de réactif et/ou de l’analyseur
Pratique Le laboratoire doit vérifier l’absence
Pratique non Absence de CIQ
recommandée de dérive de la méthode avant la panne
recommandée Utilisation de CIQ périmés
par un moyen de son choix : redosage
d’échantillons de patients (sous réserve de
la stabilité du mesurande), exploitation de la
moyenne des résultats de patient ou tout Des auteurs, dans des publications récentes, proposent
autre moyen argumenté
En cas de réanalyse d’échantillons, le d’adapter la taille de la série et le choix des règles de
nombre de ces réanalyses dépend de la Westgard en fonction du niveau de sigma [10, 11].
taille de la série (n) impactée (racine carrée
de n, 10 %, en « remontant la série » afin de
déterminer le moment où le
dysfonctionnement du système a entraîné Le choix des CIQ et des limites
un impact sur les résultats, etc.). L’étude acceptables
d’impact (voir §5 ci-dessous) et les actions
curatives mises en place sont tracées
Exigences normatives
Pratique Redosage de tous les échantillons des
acceptable patients (sous réserve de la stabilité du Voir risques n◦ 1 et 2
mesurande) depuis le dernier CIQ valide
(ou autre pratique pertinente) mais absence
Les contrôles internes de qualité (CIQ) doivent répondre
de réflexion et de stratégie aux exigences suivantes de la norme NF EN ISO
Pratique non Pas d’étude d’impact et donc 15189:2012 (§5.6.2.2) :
recommandée potentiellement diffusion de résultats – matériaux se comportant par rapport au système analy-
erronés
tique le plus fidèlement possible comme des échantillons
patients. La non-commutabilité des CIQ n’est pas rédhi-
bitoire s’ils sont plus sensibles aux problèmes analytiques
que les échantillons de patients (pour le suivi de la repro-
– la criticité clinique du paramètre ; ductibilité intra-laboratoire) ;
– le délai de diffusion et d’exploitation des résultats ; – revue régulière des résultats en fonction de la stabilité de
– la possibilité de ré-analyse des échantillons (délais la méthode et du risque d’impact sur le patient en cas de
pré-analytiques respectés), lorsque cela est réalisable résultat erroné ;
(impossible pour certaines analyses comme les gaz du sang – niveaux de concentrations des matériaux de contrôle
par exemple). proches des seuils de décision médicale.

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Contrôles de qualité dans les laboratoires

Tableau 9. Nombre et niveaux des contrôles. Limites acceptables


Voir risque n◦ 8
Nombres et niveaux des contrôles
L’objectif principal est de détecter des anomalies et des
Pratique Utiliser un CIQ proche des valeurs seuils
recommandée de décision médicale (ex : troponine, tendances (décalage et dérive) et de vérifier que la qualité
Hba1c, glucose, etc.) prévue des résultats est atteinte.
Couvrir la gamme physiologique et Les limites acceptables (le terme de « spécification de
pathologique (si les CIQ sont disponibles)
Utiliser plusieurs niveaux de CIQ et au performance analytique » est employé dans les der-
moins 2 niveaux après un étalonnage [12] nières recommandations européennes) doivent être les plus
Pratique Utilisation alternée des différents niveaux proches des performances réelles de la méthode afin de
acceptable de CIQ (hors vérification de l’étalonnage)
détecter des tendances, des décalages ou des dérives. Atten-
Pratique non Utiliser un seul niveau de CIQ après
recommandée étalonnage (sauf recommandation
tion à ne pas confondre dérive et décalage (drift et shift). Une
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fournisseur en ce sens) dérive est une augmentation (ou une diminution) régulière
Absence de vérification sur toute l’étendue des résultats. Un décalage correspond à un écart constant
de mesure sans justification argumentée
Absence de stratégie argumentée avec
par rapport à la moyenne.
risque de non-détection d’une dérive Le laboratoire choisira pour chaque analyse, un CV (cf.
de la méthode dans les zones de décision « qualité prévue » § 5.6.2.1. de la norme NF EN ISO
médicale
15189:2012) en fonction des performances des lots pré-
cédents. Ces CV sont les CV propres au laboratoire : CVLT
(CV long terme) prenant en compte toutes les sources de
Tableau 10. Limites acceptables.
variabilité de la méthode. Ils sont utilisés pour définir les
limites acceptables des cartes de contrôle.
Limites acceptables
Dans un second temps, pour le suivi des performances, le
Pratique CVLT utilisé par le laboratoire proche du CV
recommandée réel de la méthode : le CV à long terme
laboratoire comparera les CV qu’il a obtenus à des CV de
prendra en compte les changements de référence. Les référentiels des CV peuvent être :
lots, d’opérateurs, etc. [13] – CV issus des variations biologiques (par exemple : EuBI-
Pratique CVLT méthode élargie (jusqu’à 30 % sans VAS) ;
acceptable différence statistiquement significative selon
le test de Fisher Snedecor) mais permettant – CV issus des données fournisseur ;
de détecter les tendances et sans dépasser – CV issus des groupes de pairs (CIQ externalisés) ;
l’objectif analytique ou CV maximum retenu – CV issus des recommandations de sociétés savantes
par le laboratoire pour la fidélité
intermédiaire lors de la vérification françaises ou étrangères ;
de méthode – CV issus des organismes de contrôle inter-laboratoires
Pratique non CVLT ne permettant pas de détecter ou OCIL associatifs ou industriels (les principaux OCIL
recommandée les tendances associatifs français sont regroupés en France au sein de la
Carte de contrôle non construites à partir
des données du laboratoire. FAEEQ (voir §8 ci-dessous)).
En pratique et lorsque les règles de Westgard sont utilisées
(tableau 10)
CIQ indépendant du fournisseur ?
La perspective envisagée dans ce tableau permet au labora-
La norme NF EN ISO 15189:2012, §5.6.2.2 - note 2 toire de s’assurer que les performances analytiques restent
(non opposable) (2), recommande des CIQ indépendants stables et sous contrôle. Cette proposition ne prend pas en
du fournisseur pour maîtriser un risque de non-détection compte l’impact clinique potentiel (ou l’absence d’impact)
d’une dérive de la méthode par un défaut de commutabi- en cas de performance analytique non satisfaisante (voir §
lité ou de fausse alarme en cas de changement de réactif. 5, Étude d’impact post CIQ hors limites acceptables).
Néanmoins, en cas d’intervention du fournisseur, les CIQ Une interprétation complémentaire éventuelle (en fin de
fournisseur sont nécessaires pour une analyse critique per- série) peut être mise en œuvre afin de prendre en compte
tinente (tableau 8). l’impact clinique potentiel. Deux niveaux de lecture sont
alors mis en œuvre : des limites acceptables purement ana-
Nombres et niveaux des contrôles lytiques et des limites de tolérance en lien avec un risque
médical.
Le nombre et les niveaux des CIQ sont également à définir :
le CIQ doit explorer toute l’étendue de mesure mais aussi les
Cartes de contrôle
seuils décisionnels. Il doit également permettre de vérifier
l’étalonnage (tableau 9). Les objectifs des règles de Westgard sont :

Ann Biol Clin, vol. 77, n◦ 5, septembre-octobre 2019 585


Qualité-Accréditation

Tableau 11. Règles multiples empiriques pour la gestion les CIQ Certaines recommandations internationales peuvent per-
[11]. mettre de choisir a minima les règles de rejets applicables
sans tenir compte de la robustesse de la méthode (risque de
Règles Type de variabilité détectée surqualité) (tableau 11) [13].
13S Imprécision ou biais
D’autres auteurs adaptent les règles de Westgard à la taille
22.5S Biais
de la série en fonction du niveau de sigma [10] et des
R4S Imprécision
probabilités de détection des erreurs [14, 15] (figure 1).
81.5S Tendance du biais

EWMA
Afin d’améliorer les détections des faibles dérives, Roberts
– de détecter une erreur analytique systématique ou aléa- en 1959 [16] propose le procédé EWMA (exponentially
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toire ; weighted moving average) basé sur la statistique bayésienne


– de stopper la production des résultats en cas d’erreur [17]. Le principe de l’EWMA est simple : chaque nouvelle
avérée ; valeur de CIQ est pondérée par les valeurs précédentes.
– d’estimer le biais (l’erreur) induit sur les résultats déjà Il s’agit d’une méthode de lissage des nouveaux résultats
rendus afin d’évaluer l’impact sur les résultats des patients obtenus par une moyenne glissante à pondération exponen-
et en termes statistiques d’obtenir une : tielle, c’est-à-dire qui privilégie les points les plus récents
• probabilité de détection de l’erreur – Ped (probabi- aux dépens des anciens. En pratique, cela permet une détec-
lity of error detection) supérieure à 90 % : elle mesure tion plus précoce des faibles dérives [18] et une meilleure
le pourcentage de chance de détecter une erreur en pré- détection des erreurs systématiques [19].
sence d’un dérèglement de la méthode analytique ; cette
probabilité doit être la plus élevée possible ;
• probabilité de faux rejet – Pfr (probability of false
rejection) inférieure à 5 % : elle correspond au risque Les changements de lots réactifs
de rejeter une série en l’absence de tout dérèglement de et de lots de CIQ
la méthode analytique : cette probabilité doit être la plus
faible possible. Voir risques n◦ 1 et 2

Données
CIQ
Résultats conformes

Non Non Non Non Non


13S 22S R4S 41S 6×

Oui Oui Oui Oui Oui


N=2 N=2 N=4 N=6
Taille Taille Taille Taille
série série série série
1000 450 200 45

Nécessité d’actions curatives

6σ 5σ 4σ 3σ

(%TEa – %Biais)
Score sigma =
%CV

Figure 1. Règles de Westgard et taille des séries entre 2 CIQ successifs. Noter l’échelle sigma (score sigma) en bas du diagramme.
Pour l’application, localiser le sigma, identifier les règles de contrôle (données CIQ), la fréquence de passage des CIQ dans la série. CV :
coefficient de variation, TEa : erreur totale admissible.

586 Ann Biol Clin, vol. 77, n◦ 5, septembre-octobre 2019


Contrôles de qualité dans les laboratoires

Tableau 12. Cartes de contrôle. déterminés selon des essais probatoires définis par le labo-
ratoire en fonction de la spécificité de l’analyte et de la
Cartes de contrôle durée de validité du lot. Pendant cette période, la confor-
Pratique Le choix de règles, de la fréquence de mité de la technique est assurée par le lot de contrôle
recommandée dosage des CIQ et de la taille de la série
sont basés sur le calcul du niveau de sigma en cours.
ou tout autre moyen d’évaluation de la La moyenne des résultats obtenus permet de déterminer la
robustesse valeur cible initiale, les seuils d’interprétation des nouvelles
Pratique Activer les règles 1-3S, 2-2S (intra- et cartes de contrôle seront réajustés si nécessaire.
acceptable inter-série) et R4S permettant de détecter
les erreurs (aléatoires et systématiques) Le nombre de déterminations préliminaires sera adapté à la
En cas de suivi en utilisant des moyennes période d’utilisation du lot de CIQ (période très courte de 1
mobiles (des CIQ), activation des règles de à 2 jours pour l’hématologie par exemple à plus longue en
détection des dérives (7x, 10x, etc.)
cas de lot de CIQ utilisé pendant 1 an (certains CIQ utilisés
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Paramétrage argumenté des cartes de


contrôle permettant de détecter la dérive en hémostase ou biochimie par exemple).
ou le décalage de méthode Une autre approche consiste à utiliser des tests statistiques
Pratique non Absence de maîtrise des cartes de contrôle associés basés sur le théorème de Bayes [17].
recommandée qui ne permettent pas de détecter les
dérives et/ou décalages de la méthode
Essais d’acceptation
L’objectif des essais d’acceptation est de s’assurer que le
Tableau 13. Nouveau lot de CIQ. produit (réactif, CIQ, consommable. . .) est conforme aux
besoins du laboratoire avant d’autoriser son utilisation, suf-
Nouveau lot de CIQ fisamment tôt pour pouvoir commander un nouveau lot et
Pratique Période de chevauchement à chaque organiser une nouvelle expédition, (ou prévoir un back up
recommandée changement de lot de CIQ ou une sous-traitance, etc.) dans le but d’éviter toute rup-
Plusieurs jours si possible (selon durée ture de production qui peut entraîner une perte potentielle
d’utilisation du lot : par exemple 2 jours en
hématologie, 10 jours si le lot est utilisé sur de chance pour les patients en cas de paramètres critiques.
une longue période) La stratégie est à définir pour chaque analyte en fonction
Consultation des moyennes des groupes des données disponibles, de la durée de conservation du
de pairs si disponibles (CIQ externalisé)
produit (CIQ en hématologie par exemple) et des risques
Pratique Période de chevauchement minimale
acceptable de 1 jour et utilisation des CV antérieurs identifiés.
Pratique non Pas d’évaluation d’un nouveau lot de CIQ
recommandée avant utilisation avec risque d’impact patient Nouveau lot de CIQ
en cas de détérioration simultanée
du réactif et du CIQ Les recommandations de la littérature (CLSI [9] et Tietz
[12]) sont :
– la détermination de la valeur cible par le laboratoire (10
mesures sur 10 jours) ;
Exigences normatives NF EN ISO – la détermination de l’écart type par le laboratoire (20
15189:2012 (§5.3.2.3) mesures) ;
NF EN ISO 15189:2012 (§5.3.2.3) : Essai d’acceptation : – le calcul des limites à partir des moyenne et écart type
« Chaque nouvelle formulation de trousse de réactifs prêts du laboratoire (ou utilisation d’un écart type défini par le
à l’emploi résultant de modifications de réactifs ou de pro- laboratoire issu de son expérience).
cédure, un nouveau lot de fabrication ou une nouvelle Les données seront à affiner après quelques semaines pour
expédition doit être vérifiée en matière de performance obtenir des valeurs prenant en compte une plus grande
avant leur utilisation. » variabilité, comme les maintenances préventives, les éta-
Pour vérifier les performances des réactifs et des consom- lonnages, etc. (tableau 13).
mables, le laboratoire établit une stratégie d’acceptation
à partir d’une analyse de risques, basée par exemple sur Nouveau lot de réactif
les données issues des fiches fournisseurs, les certificats de L’analyse de risques initiale est à réaliser, classiquement
conformité et la stratégie de passage de contrôles de qualité lors de la vérification/validation de la méthode [20] : définir
(SH REF 2 [3]). l’impact du produit (diluant, réactif, étalon, etc.). Le produit
À chaque changement de lot d’échantillons de contrôle est-il critique et quelle est sa robustesse ?
(CIQ), le laboratoire veille à anticiper l’établissement des L’analyse d’échantillons « frais » provenant de patients est
valeurs cibles et des seuils d’interprétation. Ceux-ci sont la méthode de référence mais d’autres moyens peuvent être
Ann Biol Clin, vol. 77, n◦ 5, septembre-octobre 2019 587
Qualité-Accréditation

Tableau 14. Nouveau lot de réactif. Les détections de tendance,


les indicateurs qualité
Nouveau lot de réactif
Pratique Évaluation du nouveau lot de réactif avant
recommandée mise en production
Détection des tendances
Nouveau lot de réactif évalué à l’aide Voir risque n◦ 8
d’échantillons de patients (au moins 3)
[21] ou autre stratégie argumentée La norme NF EN ISO 15189:2012 § 5.6.2.3 recommande
Évaluation du nouveau lot de réactif avec que « Les données de contrôle qualité doivent être revues
des échantillons « frais » provenant de régulièrement pour détecter les tendances de réalisation
patients seulement pour les tests dont
la commutabilité des CIQ est incertaine d’analyses qui peuvent indiquer des problèmes dans le sys-
(marqueurs tumoraux surtout, tème d’analyse. Si de telles tendances sont observées, des
hormonologie) actions préventives doivent être prises et enregistrées. ».
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Pratique Évaluation du nouveau réactif au moment Rappel : Quelles sont les bonnes pratiques pour le calcul du
acceptable de la mise en production mais risque de
rupture d’activité et retard de rendu des
CV du laboratoire ? Le principe du contrôle de qualité par
résultats avec possibilité de perte de l’utilisation des cartes de Levey-Jennings revient à déter-
chances pour le patient (pour certains miner si une valeur appartient à la population « habituelle »
paramètres) et importance du back-up
pour maîtriser ce risque
ou à une population différente (moyenne décalée et/ou CV
Pratique non Pas de traçabilité des changements de lots plus élevé) apparue à la suite d’un dérèglement analytique.
recommandée réactifs L’estimation de paramètres statistiques (moyenne, écart
Pas d’évaluation d’un nouveau lot de réactif type ou CV) consiste à estimer les paramètres de la popu-
en cours de série entre 2 CIQ (étalonnage
validé sans passer tous les niveaux de CIQ) lation à partir d’un échantillon statistique issu de celle-ci.
Pas de solution de back-up pour les Si l’échantillon statistique contient des valeurs issues de
paramètres critiques (volumétrie, délai deux populations différentes, le calcul n’a plus de sens.
de conservation des échantillons)
La dispersion « habituelle » d’une méthode correspond aux
causes qualifiées de « communes », les valeurs de CIQ à
conserver sont celles qui reflètent les performances de la
utilisés (moyenne patients, pools, etc.) ; le passage isolé méthode.
d’un CIQ pour valider un nouveau lot de réactif n’est pas Si un dérèglement analytique est détecté par des valeurs
recommandé [10]. hors contrôle (violation des règles 1-3S, 2-2S, R-4S), c’est
Néanmoins pour les substrats (glycémie, cholestérol, etc.), qu’une cause « spéciale » est apparue et par conséquent, que
la commutabilité des CIQ semble suffisante. En hormonolo- les valeurs observées dans ces conditions n’appartiennent
gie, des effets lots sont fréquents et la confrontation externe pas à la population « habituelle ». Les résultats de patients
du CIQ n’est pas toujours pertinente. Pour les marqueurs ne sont pas rendus tant que le dérèglement n’est pas corrigé.
tumoraux, la commutabilité des CIQ étant fréquemment Et c’est pourquoi il semble logique et cohérent de ne pas
en défaut, le passage d’échantillons « frais » provenant de inclure ces valeurs dans le calcul d’un CV qui doit repré-
patients est vivement conseillé (tableau 14). senter le fonctionnement « habituel » du laboratoire.
En revanche, si le redosage des mêmes CIQ fournit des
Nouvelle formulation de réactif, nouvelle référence ? valeurs dans les limites acceptables, il est possible de
En cas de nouvelle formulation de réactif (et de nouvelle conclure que la valeur précédemment hors contrôle fait
référence chez le fournisseur), le laboratoire doit réaliser partie de la population « habituelle ». Il s’agit du risque
une étude d’impact, à partir de l’étude de la documentation de première espèce (3 pour mille dans le cas de la règle
du fournisseur : 1-3S) et il est alors recommandé d’inclure cette valeur dans
– simple étude bibliographique qui conclut à l’absence le calcul du CV. Les valeurs de CIQ à conserver pour cal-
d’impact ou impact documentaire simple : changement de culer le CV de fidélité intermédiaire du laboratoire sont
conditionnement, changement des modalités de stockage celles qui reflètent les performances réelles de la méthode
sans impact sur la méthode, etc. ; et qui correspondent au traitement des résultats patients. Si
– vérification uniquement des modifications : comparaison le biologiste choisit de rendre les résultats des patients, par
avec les résultats antérieurs en cas de nouveau raccordement exemple au regard de l’erreur totale acceptable, il conser-
de l’étalon. Étude de l’impact sur la justesse ou l’exactitude vera la valeur du CIQ et inversement, il exclura les valeurs
et éventuellement sur les valeurs de référence ; de CIQ en cas de rejet de la série associée. Cette attitude
– vérification de méthode complète en cas de changements présente une double cohérence : statistique et vis-à-vis des
majeurs (dans le cadre de gestion de la portée flexible). objectifs analytiques.

588 Ann Biol Clin, vol. 77, n◦ 5, septembre-octobre 2019


Contrôles de qualité dans les laboratoires

Les erreurs grossières (inversion de niveaux de CIQ, fin de Tableau 15. Détection des tendances.
flacon, etc.) qui ne représentent pas la dispersion réelle de
la méthode ne sont donc pas à prendre en compte. Détections des tendances
Si la méthode est modifiée (changement de flacon de CIQ, Pratique Calcul du CV à partir des valeurs de CIQ
recommandée correspondant à des résultats patients
re-étalonnage, etc.), il est logique d’exclure les points de rendus, et hors erreurs grossières (règles
CIQ non conformes du calcul du CV (données d’avant d’exploitation des CV définies par le
l’étalonnage ou du changement de flacon). laboratoire)
Suivi régulier du CV (mensuel, trimestriel)
En revanche, si rien n’est modifié dans la méthode (redosage selon les méthodes (et selon leur
du même CIQ), il n’y a pas de justification à exclure ces robustesse)
points. Définition argumentée des CV limites
(publications nationales ou internationales)
La principale des tendances à suivre est l’augmentation de Comparaison avec les CV des groupes de
la dispersion de la méthode qui est vérifiée grâce au CV. pairs dans le cadre de la confrontation
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Le suivi des CV et leur conformité par rapport aux spéci- externe du CIQ
fications du laboratoire sont recommandés. Ce suivi est à Pratique Suivi régulier des CV (trimestriel) mais
acceptable risque d’étude d’impact plus conséquente
réaliser régulièrement (en fonction de la robustesse de la en cas de dérive importante du CV
méthode et de la fréquence de réalisation de la technique), Pratique non Exclure les valeurs de CIQ hors limites sans
et au moins tous les trimestres. En cas d’utilisation de plu- recommandée investigation, argumentation, traçabilité, etc.
sieurs analyseurs pour la réalisation des mêmes analyses, Fréquence de suivi des CV (supérieure à un
suivi trimestriel) non argumentée
la comparaison des CV des différents systèmes analytiques Pas de définition des CV limites acceptables
est recommandée. Pas d’analyse d’impact en cas
Les analyses de tendance ont pour objectif de dépister au de dépassement des CV limites
plus tôt toute dérive du système analytique et de mettre en
œuvre des actions préventives si besoin (suivi de l’erreur
aléatoire et systématique) :
– une augmentation de la dispersion de la méthode (dérive Tableau 16. Reciblage des CIQ.
de l’erreur aléatoire) pourra être objectivée par un suivi
régulier de la méthode (fréquence à adapter pour chaque Reciblage des CIQ
Pratique Analyse des cartes de contrôle régulière
examen en fonction de la robustesse, de l’importance recommandée (hebdomadaire)
clinique, de la fréquence de réalisation, etc.). Pour les Si décalage, le laboratoire argumente le
examens courants, un suivi régulier du CV est recom- reciblage par comparaison aux résultats
du groupe de pairs ou des EEQ
mandé avec confrontation aux spécifications du laboratoire,
Pratique Décalage de la moyenne (plus d’un écart
selon une fréquence appropriée, le plus souvent men- acceptable type) pouvant entraîner un faux rejet si pas
suelle selon les examens afin de pouvoir agir rapidement de reciblage
si besoin ; Décalage pouvant entraîner une fausse
acceptation mais sans impact clinique
– une augmentation de l’erreur systématique (ou biais de argumenté
justesse) pourra être évaluée par la confrontation externe Cartes de contrôles avec moyenne mobile
des résultats de CIQ (suivi régulier du Z-score ou IET et suivi rigoureux d’un potentiel décalage
(activation des règles adaptées (ex : 10x,
(indice d’écart type) (tableau 15). etc.))
Pratique non Reciblage sans investigation ni
recommandée argumentation (sauf dans le cas des cartes
Reciblage des valeurs cibles des CIQ de contrôles avec moyenne mobile)
Chaque laboratoire détermine la valeur cible qui correspond
à la moyenne des valeurs obtenues pendant la période pro-
batoire. Cette valeur est retenue comme valeur moyenne
pour l’établissement de la carte de contrôle. Au cours de temps et retard de rendu) mais surtout de fausse acceptation
l’utilisation du lot d’échantillons de contrôle, la valeur cible (impact potentiel sur les résultats).
peut être réajustée si nécessaire. La valeur cible retenue est Tout « reciblage » est argumenté et précédé d’une étude
calculée sur une période suffisamment étendue pour être sur les sources potentielles de variations (étalonnage, chan-
significative [3]. gement de lot de réactifs, maintenance, etc.). De plus le
En cas de décalage de plus d’un écart type (unité de laboratoire devra s’assurer de l’absence d’erreur de justesse
mesure des cartes de contrôle), le laboratoire doit recibler (avec la moyenne du groupe de pairs) ou d’exactitude (avec
la moyenne pour éviter le risque de faux rejet (perte de des EEQ) (tableau 16).

Ann Biol Clin, vol. 77, n◦ 5, septembre-octobre 2019 589


Qualité-Accréditation

Tableau 17. Moyenne patient. Moyenne patient


Le suivi de la moyenne des patients (appelée X-barM en
Moyenne patient hématologie) peut être un moyen complémentaire pertinent
Pratique Suivi de la moyenne patient après écrêtage afin de détecter précocement une dérive ou un décalage d’un
recommandée des valeurs pathologiques et/ou exclusion
des patients/services non représentatifs système analytique [22, 23]. Ce moyen présente l’avantage
(réanimation, dialyse, etc.) d’évaluer le décalage de la méthode à partir d’une matrice
Définition statistique des limites acceptables humaine et permet de pallier un défaut de commutabilité ou
(écart-type des résultats/racine n (n est la
taille de la série sur laquelle est calculée une détérioration du CIQ. Le suivi de la moyenne patient
la moyenne)) n’est pas pertinent pour tous les paramètres (marqueurs
Pondération différente possible du ou tumoraux, etc.).
des dernier(s) point(s) pour augmenter
la sensibilité En cas d’utilisation de la moyenne patient, une attention
particulière devra être portée par le laboratoire :
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Pratique Les limites acceptables de la moyenne


acceptable patient sont de la même grandeur – à la taille de la population (qui permettra de calculer
que les limites acceptables des CIQ
la moyenne et définira la valeur à reporter sur la carte de
Pratique non Les limites acceptables des moyennes
recommandée patients sont très supérieures aux limites
contrôle) et à l’exclusion de certains services critiques (dia-
acceptables des CIQ dans le cas de lyse, réanimation) : indicateur applicable seulement pour
l’utilisation de la moyenne patient pour une population stable ;
déroger en cas de CIQ non valide (la
moyenne patient ne peut être utilisée dans
– aux limites acceptables définies par le laboratoire qui
ce seul but mais elle est l’un des éléments doivent être, a minima, comparables à celles des CIQ (même
à prendre en compte dans l’analyse des si statistiquement il ne s’agit pas des mêmes CV) ;
données en cas de CIQ non conforme)
– à la conduite à tenir en cas d’alarme (tableau 17).
Repasse d’échantillons de patients
L’analyse d’échantillons de patients plusieurs fois au cours
Tableau 18. Repasse d’échantillons de patients.
de la journée (dans la limite de la stabilité des analytes) peut
être utilisée par le laboratoire comme moyen de suivi des
Repasse d’échantillons de patients
performances (« patient trace » ou « QC patient » ou encore
Pratique Choix d’échantillons de patients à différents
recommandée niveaux de concentration « fil rouge ») avec un critère d’acceptabilité de 2,8 fois
Validation pertinente du re-dosage l’écart type de la méthode (Norme NF EN ISO 5725-6 (24)).
(2,8 fois l’écart-type avec écart-type réel Ce moyen permet de pallier la non commutabilité de cer-
de la méthode)
Suivi comme indicateur (pourcentage tains CIQ et peut aussi permettre de l’explorer (tableau 18).
de rejets)
Pool d’échantillons de patients
Pratique Utilisation uniquement d’échantillons
acceptable provenant de patients dont les niveaux La constitution d’un pool d’échantillons provenant de
de concentrations sont proches des valeurs patients peut être une solution retenue par le laboratoire.
normales
Utilisation uniquement dans les cas de
Ce choix peut être judicieux notamment en l’absence de
critères de repasse établis par le laboratoire CIQ et/ou en complément des CIQ pour explorer la com-
(suivi comme indicateur) mutabilité (marqueurs tumoraux, hormonologie, etc.). La
Pratique non Pas de critères de validation des stabilité de ce pool d’échantillons, souvent congelé, doit
recommandée re-dosages formalisés dans le cadre
du suivi des performances
être explorée et documentée (tableau 19).
Utilisation exclusive de ce système sans
passage des CIQ
Paramètres « sentinelles »
Sur un analyseur multiparamétrique, certains paramètres
sont plus sensibles que d’autres aux différents composants
de l’appareil (pipetage de faible volume, longueur d’onde
spécifique, temps réactionnel, etc.).
Moyens complémentaires Un passage adapté de CIQ ou d’échantillons provenant
de suivi des performances de patients pour ces paramètres permet d’explorer la maî-
Ces moyens peuvent compléter une stratégie de suivi de trise de toutes les autres méthodes (d’autant que celles-ci
méthode en plus du CIQ, des confrontations externes des sont robustes). La maîtrise du risque lié aux maintenances
CIQ et des EEQ. internes ou de celles du fournisseur (SAV) peut s’appuyer
Ils ne sont pas obligatoires mais peuvent apporter un sur un panel de « paramètres sentinelles » afin de véri-
complément d’informations à condition d’être correcte- fier rapidement l’absence d’impact de la maintenance sur
ment exploités. les différents composants de l’analyseur. La stratégie doit

590 Ann Biol Clin, vol. 77, n◦ 5, septembre-octobre 2019


Contrôles de qualité dans les laboratoires

Tableau 19. Pool de patients.


Étude d’impact post-CIQ fin
Pool de patients
de série hors limites acceptables
Pratique Test de stabilité du pool (maîtrise
recommandée démontrée de la conservation) Exigences normatives NF EN ISO 15189:2012
Cible et limites acceptables définies comme (§ 5.6.2.3)
pour un CIQ (voir supra)
Utilisation lors des changements de lots En cas de non-respect des règles de contrôle qualité et si
réactifs les résultats d’analyses sont susceptibles de contenir des
Pratique Stabilité non démontrée mais performances
acceptable suivies et comparables aux CIQ
erreurs cliniques significatives [12], les résultats doivent
Pratique non Pas de limites acceptables définies
être rejetés et les échantillons des patients concernés doivent
recommandée Utilisation d’un pool non stable par défaut être de nouveau analysés après avoir corrigé l’erreur et
de conservation vérifié la conformité de la performance avec les spécifi-
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cations. Le laboratoire doit également évaluer les résultats


des échantillons de patients qui ont été analysés après le
Tableau 20. Paramètres sentinelles. dernier CIQ conforme.
Le SH REF 02 [3] précise que des seuils d’alarme et d’action
Paramètres « sentinelles » sont à définir. Et qu’en cas de CIQ non conforme, le labo-
Pratique Définition des « paramètres sentinelles » ratoire s’attache à évaluer l’impact sur les résultats rendus
recommandée (basée sur la robustesse, la conception des
analyseurs, etc.) à partir des instructions du depuis le précédent CIQ conforme.
fabricant (source d’information la plus fiable
sur ce sujet) Les dispositions
Définition d’une stratégie de passage
de CIQ ou des échantillons provenant Le laboratoire doit avoir prévu l’étude d’impact potentiel
de patients pour ces paramètres sentinelles d’une anomalie sur les résultats des patients dans ses dis-
Suivi de ces indicateurs de performance
positions (tableau 21).
Pratique Mise en place mais absence de suivi
acceptable de l’indicateur
Pratique non Erreur dans la définition des « paramètres Cause de la dérive de la méthode
recommandée sentinelles » (non pertinents)
Le laboratoire doit vérifier que le résultat de CIQ non
conforme est le reflet d’un dysfonctionnement du sys-
tème analytique et tout d’abord exclure la responsabilité
Tableau 21. Étude d’impact post CIQ fin de série hors limites du CIQ en vérifiant qu’un contrôle fraichement préparé
acceptables.
est non-conforme ou qu’une ré-analyse d’échantillons frais
provenant de patients et passés juste après un CIQ conforme
Étude d’impact post CIQ fin de série hors limites
acceptables
conclut à des résultats non concordants (sinon risque de
Pratique Dispositions claires : compréhensibles faux rejets avec des conséquences dommageables pour le
recommandée pour le personnel chargé de les réaliser laboratoire (en temps et en coût)).
(adaptées au SMQ) Ensuite le laboratoire doit rechercher les causes du pro-
Dispositions complètes : tout type
de méthode (quantitative/qualitative, blème et déterminer l’étendue :
automatisée/manuelle. . .), de paramètre – quels analytes concernés et à quels niveaux de valeurs ?
(criticité variable), d’activité – analyse des CIQ (tous les niveaux) ou ré-analyses
(continue/discontinue)
Dispositions adaptables : à toutes d’échantillons provenant de patients ;
les situations rencontrées – quelle est la cause probable ? : alarme analyseur explicite
Pratique Pas de dispositions claires et précises mais ou non ;
acceptable pratiques correctes et étude d’impact – depuis quand le problème est-il survenu ? : revue des
si nécessaire
CIQ, alarmes analyseurs, moyenne mobile à la recherche
Pratique non Pas de dispositions et absence d’étude
recommandée d’impact en cas de CIQ non conforme d’une dérive.
Cette étude doit permettre de circonscrire l’étendue du pro-
blème et définir la liste des résultats de patients pouvant être
être argumentée, notamment sur la base de données four- impactés.
nies par le fabricant et sur l’évaluation de la robustesse des
La stratégie de l’étude d’impact
paramètres.
En cas de maintenance « lourde » imposant des étalonnages, Premier temps : Le choix des échantillons à ré-analyser
cette stratégie ne peut pas être retenue (tableau 20). dépend du nombre d’échantillons potentiellement impac-

Ann Biol Clin, vol. 77, n◦ 5, septembre-octobre 2019 591


Qualité-Accréditation

Tableau 22. Stratégie de l’étude d’impact. Second temps : En absence de concordance analytique, défi-
nition des limites de concordance cliniques :
Stratégie de l’étude d’impact – les objectifs analytiques du consensus de Milan [25]
Pratique Liste exhaustive des résultats impactés s’appliquent (mais données issues d’études cliniques rares).
recommandée Évaluation des discordances analytiques En pratique l’erreur totale Ricos souhaitable [26] peut être
Évaluation de l’impact clinique
(si discordance analytique) utilisée ;
Si justifié, transmission des comptes rendus – on peut aussi utiliser les limites acceptables des EEQ (qui
révisés aux prescripteurs et aux patients définissent un impact clinique) et qui sont habituellement
Traçabilité exhaustive de toutes les étapes
de l’étude d’impact dans le cadre pertinentes.
d’une non-conformité En cas de dépassement des limites de concordance clinique,
Pratique Non-distinction entre discordance un rappel du compte rendu d’examens en cas de diffusion
acceptable analytique et clinique et rappel patient (amendement aux rapports d’essai selon le § 5.9.3 de la
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en excès
Traçabilité non systématique de toutes les norme NF EN ISO15189:2012) est nécessaire. Cependant
étapes de l’étude d’impact mais a minima le SH REF 02 précise que les comptes rendus d’examens
traçabilité des calculs de reprise et des erronés sont remplacés, lorsque cela se justifie et en privi-
amendements aux compte rendus
légiant le dialogue avec le clinicien (tableau 22).
Pratique non Non-exhaustivité des dossiers
recommandée potentiellement impactés,
Non mise en évidence de discordances
analytiques et surtout de discordances
avec impact clinique La comparabilité multi-analyseurs
Non-transmission des comptes rendus
amendés sans argumentation Voir risque n◦ 8
En cas d’utilisation de plusieurs systèmes analytiques pour
la réalisation des mêmes analyses dans le laboratoire,
Tableau 23. Comparabilité multi-analyseurs : fréquence de la comparabilité des résultats fournis par les différents
surveillance.
systèmes doit être assurée. Les EBMD sont également
concernés par cette étude de comparabilité (entre différents
Comparabilité multi-analyseurs : fréquence de la
surveillance EBMD et par rapport aux automates du laboratoire).
Pratique Comparaison régulière en fonction de la
recommandée robustesse de la méthode et d’une analyse Fréquence de la surveillance
de risques
En cas de décalage de la moyenne d’un Le laboratoire doit définir une fréquence de surveillance :
CIQ (plusieurs points) d’un des analyseurs
par rapport à la moyenne des analyseurs
il n’y a pas de recommandation opposable pour cette fré-
de plus d’un écart-type (dans le cas où le quence mais le laboratoire devra argumenter à partir de son
laboratoire utilise une moyenne et un écart analyse de risques : il devra prendre en compte le nombre
type consolidés)
En cas de décalage de la moyenne des
de dosages, la robustesse de la méthode, les conséquences
patients d’un des analyseurs (plusieurs d’une dérive d’un des systèmes, les autres moyens mis en
alarmes) place (CIQ aux limites acceptables communes, moyennes
En cas de changement de lot d’un réactif
sensible
mobiles comparées, etc.) (tableau 23).
En cas d’écart isolé d’une EEQ d’un des
systèmes Matériel utilisable
En cas de maintenance curative importante
Pratique Comparaisons avec une fréquence définie Plusieurs possibilités s’offrent au laboratoire pour assu-
acceptable et acceptable (en fonction de la criticité et rer cette comparabilité analytique : CIQ, échantillons frais
de la robustesse du paramètre) avec
intervention si dérive mais sans issus de patients, pool d’échantillons de patients conser-
formalisation des critères d’action vés, échantillons d’EEQ, études statistiques des résultats
et sans analyse de risques spécifique (moyenne des résultats des patients par exemple), etc.
Pratique non Absence de comparaison (tableau 24).
recommandée Fréquence non adaptée à une détection
rapide de la dérive d’un système analytique
Indicateurs
tés. Les résultats des échantillons ré-analysés sont exploités Afin de détecter précocement une dérive d’un système,
afin de vérifier que les limites de concordance ana- le laboratoire peut aussi utiliser plusieurs indicateurs :
lytiques sont inférieures à 2,8 CV (ISO 5725-6:1994) pourcentage de CIQ rejetés par système, suivi des CV de
[24]. chaque système avec un rapport de CV < 2 (proposition

592 Ann Biol Clin, vol. 77, n◦ 5, septembre-octobre 2019


Contrôles de qualité dans les laboratoires

des auteurs) entre les différents systèmes, pourcentage de Les différentes formules et concepts que le laboratoire peut
rejets des moyennes des patients normaux, pourcentage utiliser sont résumés dans le tableau 25.
de rejets du « patient trace » (si utilisé), nombre d’EEQ Remarque : Les limites acceptables définies par les OCIL
non conformes, pourcentage de rejets des ré-analyses des sont définies selon le consensus de Milan [25] et dépendent
échantillons des patients (critères de validation de repasse de l’analyte concerné : elles peuvent être basées sur
non respectés), pourcentage d’alarmes qualitatives en l’expérience de l’OCIL, sur l’erreur totale Fraser, etc.
hématologie par analyseur. (tableau 26).
Ces indicateurs constituent des alertes précoces pouvant
entraîner une enquête.
La confrontation externe des CIQ
Évaluation de l’impact clinique
La confrontation externe des CIQ est un outil complémen-
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En cas de différence analytique, le laboratoire devra définir taire [27] qui permet de :
l’impact clinique. – assurer le suivi de la justesse de la méthode analytique
La décision finale de rappel de comptes rendus dépend de la par rapport à la moyenne des pairs (justesse) et de la fidélité
différence critique entre 2 résultats, c’est-à-dire la définition intermédiaire par rapport à l’écart-type ou au CV des pairs
de l’impact clinique. (à condition qu’il soit calculé comme un écart-type ou CV
Tableau 24. Comparabilité multi-analyseurs : matériel utilisable. intralaboratoire) ;
– assurer un reciblage en cas de décalage interne (ou
Comparabilité multi analyseurs : matériel utilisable de paramétrer une carte de contrôle en cas d’absence de
Pratique Ré-analyse d’échantillons frais provenant « période probatoire ») ;
recommandée de patients sur les différents systèmes – obtenir les caractéristiques de la méthode (CV, CV long
à fréquence définie par le laboratoire terme, Biais, IM, etc.) (tableau 27).
et validation statistique selon la norme
NF ISO 5725-6:1994 [24]
Pratique CIQ avec limites acceptables communes
acceptable aux différents analyseurs Les EEQ
EEQ testés sur TOUS les analyseurs avec
interprétation « intra-labo » (validation
statistique selon la norme NF ISO Choix d’une EEQ
5725-6:1994) ou par l’OCIL (à condition que
la fréquence de ces EEQ soit suffisante) Les critères de choix d’un EEQ sont présentés dans le
Pratique non Limites acceptables des analyseurs non tableau 28 (pratique recommandée). La commutabilité [29-
recommandée communes 31] est souhaitable mais l’information sur cette donnée est
Comparaison uniquement par l’étude de la
moyenne des patients normaux (ne
parcellaire. Le laboratoire pourra analyser les rapports des
permettant pas de détecter rapidement une OCIL afin d’estimer cette commutabilité (en comparant les
discordance ponctuelle d’un des systèmes) écarts entre les différentes méthodes selon la nature des
échantillons de contrôle par exemple).

Tableau 25. Comparabilité multi-analyseurs : formules et concepts pour évaluation de l’impact clinique.

Nom Sigle Formule Analytique : Analytique : Variation Variation Données


dispersion biais biologique biologique cliniques
CVA CVI CVB
Intra individuelle Inter individuelle
Biais (CLSI EP31) Biais 0,33 CVI Non Non Oui Non Non
Erreur totale Fraser ET (1,65*I) + Biais Non Non Oui Oui Non

Reference change RCV 2*2*(CVA 2 + CVI 2 )1/2 Oui Non Oui Non Non
value
Total change value TCL ((2,77*(CVA ) 2 ) + Oui Non Oui Non Non
(0,5*CVI )2) )1/2
Incertitude IM 2* (CVA 2 + Biais2 )1/2 Oui Oui Non Non Non
de mesure
Clinical outcomes CO Expérience cliniciens Non Non Non Non Oui
(données des
cliniciens)
Z-score ou IET Z-score Biais/CV Oui Oui Non Non Non

Ann Biol Clin, vol. 77, n◦ 5, septembre-octobre 2019 593


Qualité-Accréditation

Tableau 26. Comparabilité multi-analyseurs : évaluation de Tableau 28. Choix d’une EEQ.
l’impact clinique.
Choix d’une EEQ
Comparabilité multi-analyseurs : évaluation Pratique OCIL accrédité selon la norme ISO/CEI
de l’impact clinique recommandée 17043 (un OCIL accrédité est réputé
Pratique Utilisation du consensus de Milan (impact impartial et indépendant) ou pour les OCIL
recommandée clinique, variations biologiques, état de l’art non accrédités, indépendance vis-à-vis des
selon l’examen) fournisseurs et des laboratoires participants
Pratique Utilisation d’un des critères acceptables L’OCIL s’engage à procéder
acceptable mais sans réflexion et argumentation à des déclarations de réactovigilance
en cas d’anomalies constatées
Pratique non Non-distinction entre discordance
Disponibilité et coopération avec
recommandée analytique et clinique et absence de rappel
des experts biologistes médicaux
de résultats patients malgré un impact
Adéquation avec les besoins du laboratoire
clinique
(pertinence, fréquence et alternance des
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niveaux proposés)
Commutabilité attestée par l’OCIL (donnée
disponible a posteriori) ou indications
Tableau 27. Confrontation externe des CIQ. sur cette commutabilité
Pertinence de l’évaluation : nombre des
participants dans les groupes de pairs
Confrontation externe des CIQ ou toutes méthodes et de l’analyse
Pratique Estimation de la justesse à partir statistique
recommandée de la moyenne du groupe de pairs Clarté des rapports
Suivi des ratios de CV (indicateur) et IET Discussion de cas cliniques
régulièrement [28] (mensuel ou à chaque Pratique OCIL présents sur le rapport annuel
lot) : une valeur de ratio de CV supérieure acceptable des organismes d’évaluation externe
à 1 traduit une performance à surveiller de la qualité publié par l’ANSM
Utiliser les valeurs d’IET (Z-score) Si l’OCIL n’est pas accrédité, le laboratoire
supérieures à 2 comme valeur d’alarme : vérifiera que l’OCIL travaille selon la norme
un Z-score supérieur à 3 traduit une ISO/CEI 17043 (indépendance ou mise en
discordance avec les autres participants place de mesures assurant l’absence de
(mais attention le Z-score dépend de la conflits d’intérêt vis-à-vis des fournisseurs
dispersion des résultats et doit être des systèmes analytiques/réactifs,
interprétée en fonction de la dispersion non-divulgation de la valeur assignée avant
du groupe des participants) la date de clôture, pas de sous-traitance de
Suivi régulier mensuel l’évaluation et de la planification, conformité
Pratique Utilisation transitoire de la moyenne du contenu des rapports, etc.)
acceptable des pairs comme moyenne interne Pratique non Dépendance directe vis-à-vis
du laboratoire recommandée d’un fournisseur
Utilisation transitoire de l’écart-type des Fréquence et niveaux inadaptés
pairs pour calculer les limites acceptables Rapports inexploitables ou insuffisants
du laboratoire (barrière de la langue, contenu non
Pratique non Utilisation des CIQ avec moyenne conforme à la norme ISO/CEI 17043)
recommandée et écart-type des pairs sans évaluation
par le laboratoire
Interprétation erronée des données
(IET et ratio de CV)
Limites acceptables et interprétation des résultats
Absence de réaction en cas Trois types de valeurs cibles sont exploitables pour les
de dégradation durable des performances
sans argumentation évaluations : moyenne des valeurs toutes méthodes confon-
dues, par groupes de pairs et valeur obtenue avec la méthode
de référence (si existe et est accessible).
Pour chaque évaluation, les limites acceptables sont défi-
Passage des EEQ nies par les OCIL (besoins cliniques, état de l’art [33] ou
variations biologiques).
Les laboratoires soumettent à une évaluation externe de la
Chaque OCIL définit ses propres limites acceptables en
qualité chaque système analytique qu’ils utilisent [32].
s’appuyant sur les données de la littérature (tableau 29).
Le laboratoire doit analyser les matériaux de contrôle des
EEQ comme un patient (une seule fois) et ne doit pas répéter
En cas d’absence d’EEQ disponible
la mesure sauf si cela est prévu dans ses dispositions (règles
de redosage automatique). Dans les rares cas d’absence d’EEQ disponibles (situation
En cas de dosage des EEQ sur plusieurs analyseurs, il rare pour les analyses de pratique courante), le labora-
convient de rendre le résultat d’EEQ obtenu pour chaque toire doit démontrer l’exactitude des résultats fournis
analyseur sans correction du résultat. (tableau 30).

594 Ann Biol Clin, vol. 77, n◦ 5, septembre-octobre 2019


Contrôles de qualité dans les laboratoires

La comparaison de l’incertitude de mesure à des spécifica-


Tableau 29. Limites acceptables et interprétation des résultats. tions est une obligation normative (selon le § 5.5.1.4 de la
norme NF EN ISO15189:2012 [2]). Si les 2 composantes de
EEQ : limites acceptables et interprétation des résultats l’incertitude de mesure (dispersion et biais), suivies réguliè-
Pratique Connaissance des limites acceptables rement n’ont pas varié, le suivi peut être espacé. Néanmoins,
recommandée de l’OCIL et leur origine (confrontation
avec les limites acceptables choisies
les OCIL qui fournissent une estimation de l’incertitude de
par le laboratoire (voir supra)) mesure font un bilan annuel avec surtout une comparaison
Interprétation par rapport aux résultats de tous les laboratoires participants. Enfin, le choix des exi-
des autres participants (Z-score) :
attention aux limites du Z-score en
gences de performances est difficile : l’erreur totale n’est
l’absence de bornes (supérieures et
inférieures) appliquées à l’écart-type
pour l’évaluation d’aptitude : des Tableau 30. EEQ non disponible : conduite à tenir.
Copyright © 2019 John Libbey Eurotext. Téléchargé par Mme VALERIE VERNEAU le 22/10/2019.

résultats très dispersés pour la


méthode vont avoir pour conséquence
un Z-score faussement abaissé et EEQ non disponible : conduite à tenir
réciproquement Pratique Utilisation de MRC (matériau de référence
Interprétation par rapport aux limites recommandée certifié) s’ils existent et à un prix
acceptables (entraînant un impact raisonnablement accessible
clinique) Confrontation avec au moins
Réactivité en cas d’EEQ non un autre laboratoire
conforme : recherche des causes, d’un CIQ externalisé
impact patient, etc. (action tracée avec Pratique Utilisation d’échantillons conservés au
étude d’impact systématique) acceptable laboratoire (sous réserve de la stabilité
Pratique Exploitation du Z-score de l’échantillon conservé) et au moins
acceptable - étude d’impact systématique une confrontation inter-laboratoire
si Z-score > 3 Pratique non Aucune confrontation inter-laboratoire
- si CV de la méthode élevé (en l’absence recommandée
d’utilisation des limites acceptables par
l’OCIL), analyse de l’impact clinique même
si Z-score < 3
Exploitation de la notation selon
les recommandations de l’OCIL Tableau 31. Interprétation des IM et leur calcul.
Pratique non Pas d’étude d’impact en cas d’EEQ
recommandée non conforme Interprétation des IM et leur calcul
Si valeurs de référence indépendantes
Pratique Calcul de l’IM avec des composantes
de la méthode (HbA1c, glycémie, etc.),
recommandée reconnues (fidélité et justesse) et
interprétation uniquement pour les groupes
comparaison de cette IM avec des
de pairs (sous réserve de la commutabilité
spécifications calculées avec les mêmes
de l’échantillon de contrôle) sans vérifier la
formules ou avec les spécifications
conformité des résultats « toutes
de chacune des composantes
méthodes »
Définir ses exigences de performances
afin d’évaluer l’incertitude
de mesure
Comparer ses résultats d’incertitude
L’interprétation des IM et leur calcul de mesure avec d’autres laboratoires
Revue périodique (annuellement)
Attention à ne pas confondre erreur totale et incertitude : Utiliser l’IM autour du seuil de décision
médicale pour l’interprétation des résultats
l’erreur totale est la différence entre la valeur mesurée et Tous les biologistes interprétant des
la valeur vraie et l’incertitude est la quantification du doute résultats doivent savoir comment avoir
autour du résultat mesuré [34]. accès à cette information et la tenir
à disposition des prescripteurs
L’incertitude de mesure est particulièrement importante Pratique Un calcul réalisé par un OCIL est acceptable
en cas d’interprétation du résultat en fonction d’un seuil acceptable Dans le cadre d’une estimation
décisionnel entraînant une conséquence pour la conduite de l’incertitude de mesure, une comparaison
provisoire avec l’erreur totale est acceptable
médicale vis-à-vis du patient (taux d’hémoglobine et dans l’attente d’un calcul tenant compte
transfusion, dosages de médicaments et adaptation de la de la propagation quadratique
posologie, CDT et commission du permis de conduire, etc.). des composantes de justesse
et de reproductibilité
En pratique, classiquement, le calcul de l’incertitude
Pratique non Pas de calcul de l’estimation de l’IM
repose sur la combinaison quadratique de 2 termes : la recommandée et/ou formule de calcul erronée
dispersion et le biais. Pour le biais, le biais moyen (avec Pas de comparaison à des spécifications
l’écart-type du biais) ou le biais max peuvent être utilisés Pas de prise de connaissance des IM par
les biologistes qui interprètent les résultats
(SH GTA 14) [34].

Ann Biol Clin, vol. 77, n◦ 5, septembre-octobre 2019 595


Qualité-Accréditation

Tableau 32. TUS et EBMD : contrôles de qualité associés. d’amélioration issues de tout type de laboratoires (labora-
toire de biologie médicale de CHU, de CHG, de laboratoires
TUS et EBMD : contrôles de qualité associés de référence et laboratoires de biologie médicale privés).
Pratique Les contrôles inclus dans le coffret sont Ce document sera revu régulièrement afin de s’adapter aux
recommandée réalisés à fréquence définie à l’issue
d’une analyse de risques qui a permis
évolutions scientifiques et techniques.
de définir la stratégie du laboratoire : Ce document tente de définir la stratégie de contrôle de
si des contrôles positifs et négatifs qualité (interne et externe), basée sur une analyse de
sont fournis par le fabricant, il est
recommandé de les tester a minima
risques et constituant la validation/vérification continue de
à chaque nouvelle expédition et la méthode.
changement de lot. En cas d’absence Cette stratégie, utilisant des méthodes statistiques doit per-
de contrôle positif intra-coffret, il est
nécessaire de mettre en place un CIQ
mettre de produire des résultats validés afin de répondre aux
qui sera testé selon la même périodicité besoins des prescripteurs.
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Les CIQ « mimant » l’échantillon de


patient doivent être utilisés
préférentiellement
Liens d’intérêts : S. Albarede : coordonnateur des
Le LBM pourra inclure dans sa stratégie programmes EEQ du CTCB (salarié). J.-L. Galinier : diri-
d’autres éléments d’entrée : opérateur geant bénévole des associations CTCB et FAEEQ. M.
nouvellement habilité, lot arrivant en fin
de péremption, etc.
Kuentz : intervention ponctuelle auprès de Biomérieux.
Participation aux EEQ s’ils sont adaptés J.-P. Siest : président de Biologie Prospective. Les autres
et sinon, comparaison avec les résultats auteurs déclarent ne pas avoir de lien d’intérêts en rapport
des mêmes méthodes non TUS et non
EBMD
avec cet article.
Vérification, lors d’un changement de lot,
de la comparabilité des résultats
Pratique CIQ à chaque nouvelle expédition Références
acceptable et changement de lot
Pratique non Absence d’EEQ 1. Boissier E, Calmette L, Delahousse B, Flaujac C, Hurtaud-Roux MF,
recommandée Utilisation du témoin de migration Mauge L. Recommandations pré-analytiques en hémostase : Stabilité des
de l’échantillon (pour les TUS) paramètres d’hémostase générale. GFHT, texte long, mai 2017.
à des fins de CIQ
2. NF EN ISO 15189. Medical laboratories - Requirements for quality
and competence. Geneva : ISO, 2012.
pas rigoureusement statistiquement comparable et il existe 3. SH REF 02 : Exigences pour l’accréditation selon la norme NF en ISO
peu d’autres données récentes dans la littérature. 15189, rev-06, Cofrac, juin 2019.
Le suivi des incertitudes de mesure reste un outil interne
4. NF EN ISO/CEI 17025. General requirements for the competence of
basé sur le suivi des performances analytiques des para- testing and calibration laboratories. Geneva : ISO, 2017.
mètres.
En pratique [35, 36] : tableau 31 5. Mackay M, Hegedus G, Badrick T. Assay Stability, the missing com-
ponent of the Error Budget. Clin Biochem 2017 ; 50(18) : 1136-44.

6. Scherrer F, Bouilloux J-P, Calendini O, Chamard D, Cornu F. Interest


Tests unitaires simplifiés (TUS), and limits of the six sigma methodology in medical laboratory. Ann Biol
Clin (Paris) 2017 ; 75(1) : 107-13.
examens de biologie médicale
délocalisés (EBMD) et contrôles 7. Coskun A, Serteser M, Ünsal I. Sigma metric revisited: true known
mistakes. Biochem Medica 2019 Feb 15 ; 29 (1) : 010902.
de qualité
8. http://www.westgard.com, consulté le 19/04/19.
L’analyse de risques doit être réalisée spécifiquement pour 9. CLSI, Statistical quality control for quantitative measurements:
ces tests et doit prendre en compte notamment le volume principles and definitions; approved guideline C24-A4. Clinical and Labo-
de dosages réalisés et l’exploitation des résultats. ratory Standards Institute Wayne, Pa, 2015.
Si le CIQ est utilisable sur le TUS ou pour l’EBMD, les 10. Westgard JO, Bayat H, Westgard SA. Planning risk-based SQC sche-
recommandations sont comparables (tableau 32). dules for bracketed operation of continuous production analyzers. Clin
Chem 2018 ; 64(2) : 289-96.

11. Parvin CA. Planning statistical quality control to minimize patient


Conclusion risk: it’s about time. Clin Chem 2018 ; 64(2) : 249-50.

12. Burtis CA, Bruns DE, Sawyer BG, Tietz NW. Tietz fundamen-
Ce document a fait l’objet d’une version publique et tals of clinical chemistry and molecular diagnostics, 7th ed. St.
les auteurs ont reçu près d’une centaine de propositions Louis : Elsevier/Saunders, 2015.

596 Ann Biol Clin, vol. 77, n◦ 5, septembre-octobre 2019


Contrôles de qualité dans les laboratoires

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