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1.1.

Typologie des cadres et des systèmes de mesure de performance

Nous tenterons, dans ce point, de dresser une typologie des cadres de mesure de
performance en s’attardant sur ceux qui sont les plus employés de nos jours.

 Le TABLEAU DE BORD [vers 1930]

Il a été introduit en France dans les années 30 et est utilisé par les managers pour
piloter les organisations vers leur but [Bessire, Baker, 2004]1. Il a été construit comme un
moyen d’amélioration des processus de production par une meilleure compréhension des
relations entre les actions et leur performance. C’est le principe qu’applique la haute direction
en donnant aux cadres supérieurs un ensemble d’indicateurs qui leur permettent de contrôler
et de surveiller la progression de l’entreprise par comparaison des buts fixés et des actions
correctives à décider.

Figure : Déclinaison de la stratégie dans le système de Tableau de bord

1
D. BESSIRE, BAKER -*The french tableau de bord and the American balanced scorecard : a critical analysis*- A
critical perspectives on accounting in press - 2004
Le TB ne peut pas être un document unique pour tout l’ensemble de l’entreprise car
chaque sous unité ou chaque manager a des responsabilités et des objectifs respectifs [Epstein
et Manzoni, 1998]2. Ainsi, il existe plusieurs TB intégrés suivant une structure inter reliée de
telle sorte que l’ensemble des TB devrait être traduit en une série de documents qui servent de
soutien aux prises de décision locales [Chiapello, Lebas, 2001] 3 (Figure 14).Il est conçu
comme une combinaison équilibrée d’indicateurs financiers et non financiers. L’élaboration
du TB implique la traduction de la mission et de la vision en un ensemble d’objectifs à partir
desquels l’unité identifie ses FCS qui seront traduits en une série d’indicateurs de
performance quantitatifs.

Ainsi, à chaque niveau hiérarchique, le tableau de bord comprend : des indicateurs de


résultat, correspondant aux objectifs à atteindre et des indicateurs d'action, représentant la
réalisation des actions décidées pour que le TB permet à la fois le reporting vers le niveau
hiérarchique supérieur par les indicateurs de résultat, et le pilotage de l'unité, par les
indicateurs d'action et les indicateurs de résultat [ANTIOR, 2004]4.

Par contre, il faut identifier l’interdépendance entre les unités de telle sorte qu’on
puisse choisir les indicateurs qui la matérialisent pour que les unités collaborent de manière
efficace.

C’est une méthode qui est encore utilisée aujourd’hui car plusieurs entreprises
considèrent la performance financière comme l’élément prépondérant de la viabilité. Pour [W.
Cheffi et A. Beldi, 2007]5, le TB reste encore plus axé sur l’aspect financier et dépourvu
d’indicateurs opérationnels, alors que pour [Chiapello, Lebas, 2001]6, il est conçu comme une
combinaison équilibrée d’indicateurs financiers et non-financiers.

 Performance Criteria System [Globerson, 1985]7

2
M.EPSTEIN, J.F.MANSONI -*Implementing Corporate Strategy: From Tableaux de bord to Balanced
scorecards*- European Management Journal-Vol.16-pp.190- 203, 1998
3
E. CHIAPPELLO, M. LEBAS -* The Tableau de Bord: a French Approach to Management Information*- H.E.C-
School of Management - France - 2001
4
ANTIOR, 2004. Piloter l’entreprise : Tableau de bord ou Balanced ScoreCard ? n. 591.
5
W. CHEFFI, A. BELDI -*Conception d’un système de mesure des performances : divergences entre contrôleurs
de gestion et managers : Cas d’un groupe industriel français*- 28ème congrès de l'AFC - Poitiers-France- 2007.
6
Chiapello, Lebas, Op Cit..
Globerson a été un des premiers auteurs qui ont fait des recommandations relatives
aux caractéristiques des mesures de performance et a introduit un système de critères de
performance. Dans ses études, il a conclu que les mesures doivent être dérivées de la stratégie,
bien définies, ayant un objectif clair, découlant d’un accord avec les différentes parties
prenantes et prodiguant de la rétroaction rapide et précise.

 C’est une des méthodes comportant de recommandations servant de base pour


l’obtention de méthode intégrée de l’évaluation de la performance. Elle reste toujours
d’actualité et valable comme tant d’autres.

 La pyramide de performance (Cross et Lynch, 1989)8

Un des CMP les plus importants est la pyramide de performance à quatre niveaux de
Cross et Lynch. Cette pyramide relie les niveaux hiérarchiques, à travers des objectifs
communiqués de haut en bas, et des mesures recueillies à tous les niveaux de la base de la
pyramide à son sommet.

Cross et Lynch ont cherché, au travers de la pyramide des performances, à apporter


une lecture utile dans un déploiement de la mesure de la performance. Pour cela, ils ont
combiné le champ opérationnel et le champ stratégique pour illustrer la mise en œuvre

7
Globerson, S. (1985). "Issues in developing a performance criteria system for an organisation." International
Journal of Production Research 23(4): 7.
8
Cross, K. F. et Lynch, R. L. (1989). "The SMART way to sustain and define success." National Productivity
Review 8(1): 11
d’indicateurs étroitement reliés au plus haut niveau de la structure (vision) jusqu’aux actions
quotidiennes développées par l’entreprise (opérations)

Avec la pyramide des performances, il est possible de proposer un ensemble


d’indicateurs qui couvre la nature multidimensionnelle du service à la clientèle. Il est évident,
dans cette optique, que la qualité de service offert au client est le résultat de la qualité de
service des acteurs intervenant tout au long de la chaîne logistique. Il est donc important que
les entreprises puissent mesurer la qualité de leur service au client mais, également, qu’elles
puissent trouver dans leur fonctionnement interne l’explication de leur performance.
Autrement dit, il s’agit d’opérer une lecture judicieuse de la réalisation des services, justifiée
par les interdépendances entre toutes les composantes de la chaîne logistique de l’entreprise.

Le principal reproche que nous pourrions faire à la pyramide des performances qu’elle
reste au niveau conceptuel et n’est pas facile à mettre en œuvre.

 La matrice de mesure la performance (Fitzgerald et al. 1991)9

C’est un modèle qui a été développé pour les entreprises industrielles et de service.
Fitzgerald et ses collaborateurs ont proposé une matrice de mesure de performance qui relie la
mesure des résultats (performance financière, niveau de compétitivité, etc.) à la mesure de
leurs déterminants (qualité, flexibilité, innovation, etc.). Pour eux, tous les facteurs de
performance sont divisés en deux catégories : les résultats et les déterminants. La
compétitivité et la performance financière qui reflètent la réussite au niveau de la stratégie
font parties des résultats et les quatre autres sont des déterminants. La structure met l’accent
sur le principe selon laquelle « les résultats obtenus sont fonctions de la performance passée
de l’entreprise en relation avec des déterminants spécifiques ». Il est nécessaire de déterminer
les générateurs de performance pour atteindre les résultats désirés.

9
Fitzgerald, L., Johnston, R., Brignall, T. J., Silvestro, R. et Voss, C. (1991). "Performance Measurement in Service
Industries." CIMA, London
Figure 19 - PPMSI [Fitzgerald et al, 1991]

 C’est une approche selon Laitinen10 qui encourage à se focaliser sur les résultats
plutôt que sur les mesures des déterminants pour voir les échanges entre les dimensions de
performance. De plus, Hudson et autres11 que cette approche ne tient pas compte des clients
ou ressources humaines comme dimensions de performance, donc l’approche ne peut pas
donner une vue équilibrée de la performance.

 Maskell 1992

Maskell12 a avancé un CMP procédural de mesures stratégiques pour les entreprises de


classe mondiale dont les mesures se basent sur les sept principes suivants; Elles doivent être
reliées à la stratégie de l’entreprise, elles sont principalement non financières, elles sont
uniques dans leur contexte, dynamiques et simples à utiliser, elles doivent garantir une

10
E. LAITINEN -*A dynamic performance measurement system: evidence from small Finnish technology
companies*- Scandinavian Journal of Management - Vol.18 (1)-pp.65-99, 2002
11
M. HUDSON, A. SMART, M. BOURNE -*Theory and practice in SME
performance measurement systems*- International Journal of Operations & Production Management - Vol 21 -
N° 8-pp.1096 - 1115, 2001 [IFIP–IFAC Task Force on Architectures for
12
Maskell, B. H. (1992). "Performance Measurement for World Class Manufacturing. A Model for American
Companies." Productivity Press, Cambridge, MA .
rétroaction et elles sont conçues pour stimuler l’amélioration et l’apprentissage et ne s’arrête
pas au suivi et contrôle de la performance.

Performance Measurement MATRIX [Keegan et al., 1989]

C’est un modèle qui regroupe quatre dimensions différentes de performance qui sont :
les dimensions internes et externes puis les mesures basées sur les générateurs de coûts et sur
ceux qui ne le sont pas. Il reflète le besoin d’un grand équilibre entre les mesures
correspondantes à ces dimensions.

Figure 16 - The performance Measurement MATRIX [Keegan et al., 1989]

 Il ressemble un peu au BSC avec la différence que le modèle ne fait pas le lien
explicite entre les différents axes de performance [Neely et al., 1995].

 le tableau de bord prospectif (Kaplan et Norton, 1996)

Le tableau de bord prospectif (TDBP) est le résultat d’une étude menée par Nolan Norton
Institute, l’unité de recherche de KPMG. Cette étude, menée dans plusieurs entreprises, sur le
thème « Mesurer la performance dans l’entreprise de futur » s’est étalée sur période de douze
mois était venue d’un constat que les systèmes traditionnels de mesure de la performance
fondés sur des indicateurs financiers, ne sont plus adaptés à l’entreprise moderne13.

13
Kaplan R. &Norton D. P. (2006). Le Tableau de Bord Prospectif. Editions d’organisation. Traduire de
l’américain the Balanced Scorecard, Harvard Business School par Monique SPERRY. Page 7.
Les résultats de cette étude conduisent à ce que nous appelons aujourd’hui le tableau de bord
prospectif, bâti autour de quatre axes :

L’axe financier 

Traduisant comment les actionnaires voient l’organisation et incluent des indicateurs de


rentabilité, de marge, de chiffre d’affaires et d’utilisation des actifs en fonction des phases du
cycle de vie des produits (développement, croissance, maturité, déclin).

L’axe processus internes :

Il mesure la performance de tous les processus contributifs (support, production,


commercialisation, recherche et développement, etc.) et incluant des indicateurs de
compétence de processus tels que les coûts, la qualité, la productivité, etc

L’axe apprentissage organisationnel

Il traite de la dimension humaine. Il s’intéresse principalement au potentiel d’implication des


salariés et des conditions de travail en traitant:

Le niveau de satisfaction des salariés ;

Le niveau de compétence des salariés ;

La qualité du management et de l’organisation ;

La capacité du système d’information à fournir les bonnes informations au bon


moment.

L’axe clients :

Il évalue l’appréciation des prestations par le client et la capacité des processus commerciaux
à satisfaire les attentes et besoins du client. Cet axe mesure également l’évolution de la
demande des clients et le comportement d’achat de ces derniers.
Au contraire du tableau de bord classique qui se limite seulement à des indicateurs de mesure
purement financiers, le tableau de bord prospectif est plus qu’un outil de mesure financière. Il
se trouve au cœur de système de pilotage moderne et les entreprises l’utilisent comme un
véritable système de management stratégique pour déployer leur stratégie à long terme.

L’enjeu est, d’une part de définir des indicateurs sur les quatre dimensions de la performance
et, d’autre part, de mettre à jour les liens de causalité qu’ils entretiennent
Figure n° : 7 les quatre axes du tableau de bord prospectif 
FINANCES
"Pour nous faire confiance, qu'attendent nos actionnaires ?"

Objectif Indicateur Valeur Initiatives

VUE CLIENT VUE PROCESSUS


Vision ans quel processus devons nous exceller pour satisfaire nos clients et actionnaires?"
Et stratégie
Objectif Indicateur Valeur Initiatives
"Qu'attendent de nous nos clients pour intensifier leurs relations ?"
Stratégie Objectif Indicateur Valeur Initiatives

VUE INNOVATION ET GESTION DES CONNAISSANCES


"Comment l'organisation doit elle innover et évoluer pour atteindre ses objectifs stratégiques"

Objectif Indicateur Valeur Initiatives

(Source: Robert S. Kaplan, David P. Norton, “Using the Balanced Scorecard as a Strategic Management System”, Harvard Business Review (Janvier-Février
1996), P: 76.
La force de ce modèle réside dans son intégration des différentes catégories de
performance organisationnelle du côté structurel et dans son jumelage à un cadre procédural
par lequel il devient un système (Folan et Browne, 2005). Le cadre procédural est en quatre
étapes (Kaplan et Norton, 1992):

• Traduction de la vision en ayant une version unique de la vision qui peut


s’opérationnaliser à tous les niveaux hiérarchiques;

• communication de la stratégie verticalement et horizontalement et la mettre en lien


avec les objectifs départementaux et individuels;

• planification d’activité;

• rétroaction et apprentissage suivi d’un ajustement selon la stratégie.

Dans la section qui suit, nous tenterons de synthétiser la littérature sur les cadres et
systèmes de mesure de performance en les classifiant selon leur approche de la question de
mesure.

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