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Envoyé par Servane.

ANALYSE DES RECUEILS DE POESIES DE VERLAINE

(librement inspirée du profil sur Les Fêtes galantes,


très intéressant à mon goût)

Poèmes Saturniens (1866)

¾ des poèmes composés pendant ces années de lycée

 Le titre : Saturne est une planète du système solaire, célèbre pour sa


couleur jaune et ses anneaux satellites. Elle est réputée depuis la plus
haute antiquité pour avoir une influence néfaste sur la vie des hommes.
Saturne = aussi le dieu romain du Temps (=Cronos Grec). Donc recueil
placé d’emblée sous le signe du temps et de la fatalité. Dans le poème
introductif, Verlaine évoque la « Fauve planète, chère aux nécromanciens »
qui prédestine au malheur les humains nés son signe. Référence qui peut
expliquer l’atmosphère de mystère et d’inquiétude qui traverse l’œuvre.

 La composition du recueil : S’ouvre par un long poème, Prologue, qui est


une sorte de discours-programme en vers. S’achève par 3 poèmes groupés
sous le titre Epilogue. Entre ces introduction et conclusion, Verlaine a
groupé ses poèmes en 5 séries : Melancholia, qui ne comporte que des
sonnets, Eaux fortes et Paysages tristes ( qui rassemblent des pièces aux
rythmes divers). Un autre chapitre, plus souriant, est intitulé Caprices. Le
dernier groupe de poèmes ne comporte pas de titre.

 Les thèmes : Pas de thématique très unifiée. Verlaine semble chercher


sa voie.
Dans Melancholia, le 23ème sonnet « Nevermore » chante l’amour chaste du
poète pour sa sœur adoptive Elisa ; mais le 5ème, « Lassitude » évoque un
érotisme d’une toute autre nature. Et dans chapitre Caprices, on retrouve,
sur un ton badin, le thème baudelairien de la duplicité de la femme
(« Femme et chatte », « La chanson des ingénues »).
Dans les 2 sections suivantes, thème du paysage traité sur des modes
différents. Eaux fortes développe un pittoresque presque fantastique
(« Cauchemar », « Effet de nuit », « Grotesque »). Pour les poèmes de
Paysages tristes, mêlent intimement rêverie et perception, annonçant un
art nouveau, proche de celui des peintres impressionnistes.
Dans derniers poèmes, des compositions historiques d’inspiration
parnassienne (« La mort de Philippe II ») voisinent avec les caricatures et
les parodies de Caprices (« Monsieur Prudhomme », « Cavitrî »)

Fêtes Galantes (1869)

 Titre : Evoque un genre pictural inauguré par le peintre Watteau. Sous ce


nom, on désignait alors une variation sur le thème du théâtre : des
personnages élégants se livrant à des songes amoureux et à des
conversations tendres, dans des attitudes traduisant les nuances les plus
fines des sentiments, l’amour comme la dissimulation ou le dépit. OR
recueil caractérisé aussi par un décor de fêtes et un climat d’insouciance
et de mélancolie.

 Composition : Livre pas subdivisé en sections. Possibilité d’un


regroupement thématique, selon qu’ils évoquent :
- Un décor de parc (« Clair de lune », « Sur l’herbe », « L’allée »,
« Dans la grotte », « Le faune », « L’amour par terre »).
- Des personnages en groupe (« Les ingénus », « Fantoches », « Les
indolents »)
- La fête, la rencontre, le jeu (« A la promenade », « Cortège », « Les
coquillages », « En patinant », « Cythère », « En bateau », Lettre »,
Colloque sentimental »)
- La pratique du théâtre et de la musique (« Pantomime »,
« Colombine », « Mandoline », « En sourdine »)

 Les thèmes : Recueil composé des mêmes éléments que les tableaux de
Watteau. Cependant accents tout à fait personnels pour évoquer ces
« fêtes galantes ». Paysage apparaît toujours comme un reflet de l’âme et
tonalité foncièrement mélancolique. Dans poèmes comme « Clair de lune »,
tristesse et angoisse affleurent sous le masque de la gaieté. Dans
« Colloque sentimental », évocation de la mort s’accompagne de celle de la
fuite irrémédiable du temps. Les Fêtes Galantes s’ouvrent sous le signe de
la musique, des masques et du clair de lune, mais connaissent une fin
douloureuse. Sorte de transposition esthétique du thème du chagrin
d’amour. Recueil s’achève par un crescendo de désespoir, bien sensible
dans les 3 derniers poèmes. Pour Verlaine et ses héros :
- L’espoir a fui, vaincu, vers le ciel noir. (« Colloque sentimental »)
La Bonne Chanson (1872)

Poèmes écrits pendant ses fiançailles avec Mathilde Mauté.

 Titre : Description de la nouvelle existence paisible que Verlaine vient de


découvrir et la promesse d’y rester fidèle.

 Composition : Evoque presque chronologiquement évènements qui ont


inspiré ces 21 poèmes : de la rencontre avec Mathilde jusqu’au mariage.

 Thèmes : Nombreux portraits de la douce Mathilde et évocation des


épisodes la vie des fiancés. D’autres pièces expriment sous forme
symbolique les bonnes résolutions, le programme de vie de Verlaine. Les
meilleurs poèmes sont sans nul doute ceux où il décrit avec sensibilité les
paysages qui ont été le décor de son amour (I, V, VI, VII, XVI)

Romances sans paroles (1874)

Période de vagabondage avec Rimbaud.

 Titre : réfère à une œuvre pour piano du compositeur romantique


allemand Mendelssohn (1809-1847) et laisse entrevoir la nature
essentiellement musicale des poèmes. « Romances » évoque une chanson
sur un thème sentimental. Expression « sans paroles » désigne sans doute
le refus du « discours », la recherche d’une poésie presque « au-delà des
mots », qui soit seulement chant de l’âme, respiration, murmure.

 Composition : 3 sections : Ariette oubliée (9 poèmes), Paysages belges (7


pièces contenant le long poème « Birds in the night »), aquarelles (7
poèmes).
Dans 3 1ères sections, V suggère des états d’âme, des « paysages
intérieurs » ; mais ceux-ci se confondent parfois avec le décor ou
l’atmosphère qui entoure le poète (par exemple, dans « il pleure dans mon
cœur / comme il pleut sur la ville »). Dans 2ème section, s’agit
essentiellement de paysages extérieurs comme : « Bruxelles »,
« Charleroi »…

 Thèmes : 2 leitmotive : l’intériorité, la confidence amoureuse et


l’évocation des paysages. Evocation des décors selon une technique
impressionniste. V dépeint les images dans leur aspect instantané et aussi
en faisant partager au lecteur l’impression qu’elles ont faite sur sa
sensibilité.
Cette technique subtile fait toute la modernité de ce recueil. Modernité
dans le choix des spectacles évoqués (chemins de fer, usines, fêtes
foraines) et dans le réalisme audacieux des images. Par exemple, les
« aigres cris poitrinaires » d’une toute jeune fille (« Child Wife »).

Sagesse (1881)

Contient sept poèmes écrits pendant son séjour en prison.

 Titre : Fait allusion à la conversion religieuse du poète. Mais peut aussi


évoquer image traditionnelle du sage, léguée par Lucrèce : l’homme à qui
l’âge et l’expérience permettent de se retirer de l’agitation du monde et
de contempler, depuis le rivage où il a abordé, la tempête sur la mer. De
fait, cette image est reprise par Verlaine dans le 1 er poème de la 3ème
section du livre : sa conviction religieuse lui donne le sentiment d’être
désormais à l’abri des tentations du monde.

 Composition : Livre sans véritable unité, malgré une apparente harmonie.


Comprend des textes écrits entre 1873 et 1880 et classés sans ordre
chronologique. Poèmes regroupés en 3 sections inégales :
- La 1ère est composée de 24 poèmes et s’ouvre par une allégorie du
malheur, « Bon chevalier masqué qui chevauche en silence » ;
- La 2ème ne comporte que 4 poèmes, mais le dernier, qui prend la
forme d’un dialogue entre l’homme et Dieu, se subdivise lui-même en
9 parties ;
- La 3ème section comprend 21 poèmes très divers par les sujets
abordés et les rythmes.

 Thèmes : Recueil essentiellement composé de poèmes d’inspiration


religieuse ou patriotique : prières et dialogues mystiques avec Dieu,
description idéalisée de la vie nouvelle que Verlaine se promet de mener
désormais. Mais en fait, Verlaine semble hésiter entre son passé de
débauche et ses aspirations à une vie pieuse et paisible. Cela apparaît
clairement dans le poème « Les faux beaux jours ont lui tout le jour […] »
(I, 7).
Egalement dans le recueil quelques pièces plus anciennes, au rythme subtil
comme l’admirable « Je ne sais pourquoi… » (III, 7) ou l’émouvante
complainte de Gaspard Hauser :
Je suis venu, calme orphelin,
Riche de mes yeux tranquilles

Ailleurs certains poèmes simples et denses expriment à merveille la portée


suggestive des choses et l’émotion calme du poète :

Ecoutez la chanson bien douce


Qui ne pleure que pour vous plaire.
(I, 16)
Le ciel est, par-dessus le toit,
Si bleu, si calme !
(III, 6)

Jadis et naguère (1884)

 Titre : C’est à tort que ces 2 adverbes sont souvent considérés comme
synonymes. La nuance entre les 2 est sensible. « Jadis » (du latin jam,
déjà ; dies, diei, jour : il y a des jours) indique un passé beaucoup plus
éloigné que « naguère » (il n’y a guère de temps). C’est dire que le livre
rassemble des œuvres anciennes et d’autres plus anciennes.

 Composition : Les 2 adverbes servent également de titres aux deux


parties du recueil. La 1ère, Jadis, est subdivisé à son tour en 23 chapitres :
Sonnets et autres vers ; Vers jeunes, où le poète a groupé une dizaine de
poèmes de jeunesse et même une pièce de théâtre, Les uns et les autres.
Le dernier chapitre, A la manière de plusieurs, regroupe une dizaine de
pastiches dans lesquels Verlaine s’amuse à imiter le style de Théodore de
Banville, François Coppée et Alphonse Daudet.

 Thèmes : Recueil ayant été constitué à la hâte pour rembourser des


dettes, on devine que les thèmes sont quelque peu disparates. On a pu dire
que c‘est un album de souvenirs qui évoque toutes les expériences
marquantes de Verlaine : l’errance avec Rimbaud (« Vers pour être
calomnié »), la prison (« La grâce »), la commune de paris (« Les vaincus »),
la conversion morale et patriotique (« Le soldat laboureur », « la
pucelle »).
Style déroutant par sa diversité. L’ « Art poétique », la plus claire
expression des recherches musicales et rythmiques de Verlaine, y voisine
avec « Allégorie » qui est une rupture complète avec le style ainsi défini !
Ailleurs, on trouve des poèmes descriptifs assez réalistes (« L’auberge »)
et de longs récits envers, presque mélodramatiques (« L’impénitence
finale »). C’est donc un livre charnière qui amorce un certain
affadissement du génie verlainien tout en comportant encore des œuvres
admirables.

Parallèlement (1889)

 Titre : Peut être compris de plusieurs manières. Si l’on songe que ces
« vers durs et cruellement païens », comme dit Verlaine, paraissent en
même temps que les envolées religieuses du recueil Amour, on a le
sentiment que Verlaine est fasciné à la fois par Dieu et par ses propres
vices. En outre, certains poèmes du recueil faisant allusion à
l’homosexualité, alors que d’autres vantent les charmes féminins, on peut
comprendre que le poète sent en lui cette double attirance.

 Composition : Le 1er chapitre, Les Amies, évoque l’homosexualité féminine,


alors que le 2ème, Filles, est une célébration parfois précise du corps
féminin. Le 3ème, Révérence parler, groupe des poèmes d’inspiration et de
rythmes très divers mais qui ont en commune d’évoquer le séjour de
Verlaine en prison. Enfin, le dernier groupe, Lunes, est placé sous le signe
de la fantaisie : parodies, langage populaire et caricatures s’y donnent
libre cours.

 Thèmes : C’est sans nul doute l’érotisme qu fait l’unité d’inspiration du


recueil. Toutes les passions de Verlaine s’y donnent rendez-vous :
homosexualité (« Explication »), fascination du corps féminin
(« Séguidile »), attirance pour les jeunes garçons (« Pierrot gamin »),
liaison avec Rimbaud (« Laeti et errabundi »). Curieusement, le style est
souvent d’autant plus classique que les sujets abordés sont scabreux.

Les derniers recueils de Verlaine

 Amour (1888) : Suite du recueil Sagesse. Ouvrage très traditionnel, tant


par le style que par les thèmes abordés. ½ du livre consacré à l’évocation
de Lucien Létinois, un de ses élèves quand il était professeur dans un
collège catholique. En plusieurs poèmes, d’une facture très classique,
Verlaine égrène ses souvenirs et clame sa souffrance après la disparition
de « ce fils adoptif ».
 Dédicaces (1890) : Poèmes de circonstance, dédiés à des amis. Exercice
de style bien enlevé, malgré une certaine platitude d’inspiration.

 Bonheur (1891) : 3ème volet du cycle Sagesse et aussi le moins


convaincant, tant par la forme (le plus souvent très académique) que par
les idées. Verlaine ne semble plus croire en ce qu’il affirme, notamment en
matière religieuse.

 Chansons pour Elle (1891) – Odes en son honneur (1893) – Elégies


(1893) – Dans les limbes (1894) – Chair (posthume) : Derniers poèmes
d’amour. 5 recueils assez décevants, que le style pêche par vulgarité ou
par excès de classicisme.

 Epigrammes – Biblio-sonnets (1895) : Exercices de virtuosité sur


commande, amusants mais sans vrai génie.

 Invectives ( posthume) : Recueil de poèmes satiriques et polémiques.


Ardeur des convictions rend le style pesant.

 Poèmes divers (posthume) : Recueil constitué à la hâte par éditeur de


Verlaine en rassemblant tous les « fonds cde tiroir » du poète, peu après
le décès de celui-ci.

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