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Moussa Oumar Adouma

Master 1/ Droit Privé


TD/Droit commercial approfondi séance 1

Sujet : l’espace, l’objet, le sujet en droit commercial contemporain

Toutes les sociétés étaient construites et ont évolué sur la base des relations humaines. Ces
relations ne préjugent de leurs intérêts que quand elles sont encadrées par un corps des règles,
et c’est peu importe leur nature. Puisque les relations entre temps furent fondées plus sur les
principes d’amabilité que sur des intérêts, il n’était pas aisé de réfléchir sur une pluralité des
règles qui seront applicables en fonction de type de relations. Un seul corps des règles
juridiques était applicable à l’époque : c’est le droit civil. Ce fut l’âge d’or du droit commun
qui valait son importance jusqu’à ce que les tendances des relations seront inversées. Dès
l’instant où il était opportun de chercher dans les relations plus d’intérêts que d’amabilité, les
besoins de redéfinir un corps de règle approprié s’était alors très vite senti pour au moins deux
raisons. La première c’est par rapport à l’inefficacité de droit commun qui protège la relation
elle-même au lieu de protéger l’intérêt recherché à travers cette relation. Et la seconde c’est
par rapport à l’expansion d’un type d’activité dit activité commerciale qui commence à
prendre plus d’ampleur dans la société que les autres relations.

Le moyen âge fut une incontournable de l’histoire puisque c’est à partir de là qu’un Droit
commercial a vu le jour dans les grandes foires de l’Italie. La conséquence principale de
l’avènement de ce nouveau droit est la délimitation de frontière droit civil-droit commercial.
Désormais, pour des impératifs de rapidité et de sécurité dans les relations d’affaire, les règles
dérogatoires du droit commercial étaient plus efficaces et appropriées. Mais la question
fondamentale était de déterminer qui dans le cadre de ses activités, pourraient bénéficier de
l’applicabilité de ce droit dérogatoire. Classiquement, c’était le seul commerçant qui était
éligible, puisqu’il est regardé comme le seul à pouvoir accomplir des actes de commerce. Eu
égard de ces considérations, on peut alors dire que le droit commercial est un droit
d’exception et son champs d’application était strictement limité. Mais aujourd’hui, au regard
des évolutions constantes des activités économiques, ce droit a connu des mutations profondes
qui ont affecté aussi bien son objet que son espace, sachant que les non-commerçants n’y sont
plus exclus du droit commercial et que les règles du droit commercial les plus importantes se

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trouvent incorporer dans plusieurs branches. Tel pouvait être une raison du moins pour
revenir sur l’espace, l’objet, le sujet en droit commercial contemporain.

L’importance de ce sujet réside en partie dans sa compréhension, mais celle-ci ne saurait être
possible qu’à la suite d’une élucidation conceptuelle. Le mot espace est polysémique. Il peut
être défini dans un sens propre comme un cadre géographiquement circonscrit. C’est le cas de
l’espace aérien, espace terrestre, espace maritime etc…Dans un sens figuré et contextualisé
dans notre sujet, l’espace renvoie au cadre dans lequel est circonscrit le droit commercial.
C’est en d’autres termes l’environnement propre au droit commercial. La notion de l’objet
prend un sens variable en fonction de la matière. En droit commercial, l’objet renvoie au
domaine d’application du droit commercial. Le droit commercial a donc pour objet de régir
les activités commerciales et les commerçants. Son objet d’apprécie alors positivement et
négativement. Le droit commercial contemporain n’est autre que le droit commercial actuel.
Le mot sujet peut être entendu de deux manières. Il peut désigner un individu assujetti à un
corps de règle à l’exemple d’un sujet de droit ; mais le sujet hors de sa définition juridique
peut renvoyer à une question précise vers laquelle est orienté le débat pendant une période
déterminée. C’est ce deuxième sens qui est compatible avec notre sujet. Enfin, le droit
commercial contemporain est le droit commercial actuel, c’est le droit commercial de notre
jour. D’une manière encore claire, il s’agit de parler du sujet actuel en droit commercial qui
tourne autour de son espace et de son objet.

Partant de ce postulat, la logique voudrait que la démarche à adopter tout au long du travail
soit une démarche comparative mais aussi évolutive, sachant que toutes les mutations ayant
influencé l’objet et l’espace du droit commercial sont le fruit d’une évolution. C’est dire que
nous faisons une analyse par confrontation des différentes approches classiques et actuelles du
droit commercial avant d’envisager une perspective au regard de l’état actuel de la matière.

Plusieurs théories se sont divergées sur la recherche d’une approche suffisante et effective au
droit commercial contemporain. Mais une seule chose est à retenir et qui constitue l’intérêt
premier de notre étude, c’est le fait qu’il est aujourd’hui difficile voire impossible de trouver
une conception incontestable au droit commercial contemporain. Car aucune conception à elle
seule ne paraitrait vraie. Le second intérêt est à déterminer dans le résultat des différentes
analyses qui sont faites sur le droit commercial contemporain. Aucune théorie (classique ou
moderne) n’a pu envisager la proposition des solutions au risque de mutations profondes du
droit commercial mais elles se limitent toutes à analyser les enjeux qui y ont conduit. C’est

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dire donc que le sort du droit commercial est abandonné au gré de l’avenir. Quel serait alors
l’utilité de toutes ces divergences si ce n’est ne pas pour sauver l’avenir du droit commercial.

Il serait alors opportun de poser la question suivante : Quelle leçon retenir du débat actuel sur
l’espace, l’objet, le sujet en droit commercial contemporain ?

Deux leçons sont à retenir. Si le droit commercial actuel ne répond plus aux mêmes critères
classiques ayant occasionné son avènement, c’est parce qu’il a connu une déspécialisation
exponentielle. Du fait de l’élargissement de son objet et de son espace, ce droit commercial
d’aujourd’hui n’est plus celui d’hier. Il Est susceptible encore de se présenter sous une autre
forme dans l’avenir.

Nous verrons alors qu’il n’y a l’absence d’unanimité dans la recherche d’une nouvelle
approche au droit commercial contemporain (I) et il subsiste des incertitudes sur l’avenir du
droit commercial au regard de sa dynamique actuelle (II).

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I-L ’absence d’unanimité dans la recherche d’une nouvelle approche au droit
commercial contemporain

Cette absence d’unanimité en vue de réfléchir sur une nouvelle approche du droit commercial
est justifiée d’une part par la difficulté de trouver des nouveaux critères de définition du droit
commercial (A), et d’autre part par l’impossibilité de circonscrire ses frontières ou son espace
(B).

A-Une difficile définition du droit commercial contemporain par son objet

S’il est aujourd’hui d’actualité de mettre l’accent sur les critères de définition du droit
commercial, c’est parce que les critères classiques ne sont plus adaptés au regard du droit
commercial contemporain.

Traditionnellement, le droit commercial était définit comme une branche du droit privé qui
régis les commerçants et les activités commerciales. Il résulte de cette définition deux
critères : un critère objectif de définition, et un critère subjectif. La doctrine a tiré deux
conséquences de cette définition. La première conséquence c’est par rapport au régime de
droit commercial, qualifié de droit d’exception qui posent des règles favorables aux
commerçants.1La seconde conséquence c’est par rapport à la qualification de la commercialité
qui caractérise le droit commercial. Car la commercialité est déterminée soit par la qualité de
l’auteur de l’acte (le commerçant) soit par la nature de l’acte lui-même (les actes accomplis
pour le besoin de commerce).

Ainsi, s’il est avéré que le droit commercial est un droit d’exception qui a une vocation
cantonnée et résiduelle2, il n’en reste pas moins qu’au bout du temps, il connaitra des
évolutions majeures. On assistera à une déspécialisation subjective et objective des règles du
droit commercial.

Dans le premier cas, nous assistons à la multiplication des activités économiques


professionnelles. L’on voit apparaitre plusieurs acteurs de la vie économique qui ne sont pas
des commerçants dans le sens du droit commercial, mais qui accomplissent des activités qui
sont techniquement similaires. On peut citer : les entreprenants, les artisans, et tous les
professionnels qui exercent des activités libérales. Alors que le droit commercial devrait se
limiter aux commerçants, il sera appliqué également à ces acteurs quand bien même ils ne
1
Brigitte Hess-Fallon et Anne-Marie Simon, « droit commercial des affaires », 11e, Sirey.
2
Jean-Jacques Daigre, « de l’existence et de l’avenir du droit commercial », in Aspects
organisationnel du droit des affaires, Mélanges en l’honneur de Jean Paillusseau, Dalloz,2003, p270.

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relèveraient pas de cette catégorie. Plusieurs exemples peuvent être cités à titre d’élucidation :
le régime du bail à usage professionnel qui est étendu à tous les professionnels, l’application
des règles de preuve du droit commercial aux non commerçants (article 5 de l’AUDCG),
application de la procédure collective d’apurement du passif aux non commerçants, etc…

Dans le second cas, en plus de l’apparition des nouveaux acteurs économiques, nous assistons
à la déspécialisation objective du droit commercial. Celui-ci va s’intéresser progressivement
aux activités économiques professionnelles autre que le commerce. Aujourd’hui on peut
exploiter un fonds de commerce sans relever du statut du commerçant ; la liberté de preuve
est aussi admise à l’égard de non commerçant ; les juridictions commerciales peuvent
connaitre le contentieux non commercial etc…

Alors, au regard de toutes ces démonstrations, on ne peut plus dire le droit commercial est un
droit qui régit les commerçants et les activités commerciales. Car qu’il n’y a pas que les
commerçants qui sont acteurs de la vie économiques, de même il n’y a pas que le commerce
comme activité professionnelle indépendante. D’autant plus que L’anthropologie juridique a
démontré que le juriste n’accepte de modifier ses modes opératoires que s’il y ait contraint par
la nécessité3 ; la question est de savoir alors, s’il existe au regard de cette nécessité, d’autres
critères qui permettraient de définir le droit commercial. Plusieurs auteurs ont tenté d’aller
dans cette logique mais en vain. Car comme l’a rappelé Paul Didier « cette grande diversité
des théories et l’éclat de leurs auteurs manifestent l’intérêt tenace que la doctrine porte au
problème. Mais les nombres même de thèses soutenues prouvent qu’aucune n’a été
véritablement acceptée par la commune opinion des juristes et que toutes, après un temps de
succès, ont connu le sort qu’elles avaient d’abord infligé à leurs devancières »4 si la doctrine
s’accorde alors sur l’inadaptabilité de la conception classique du droit commerciale, elle se
trouve en difficulté de dégager des nouvelles conceptions qui tient en compte du dynamisme
actuel.

Bien vraie qu’elles soient inappropriées au contexte actuel, on retient toujours la définition
classique faute d’existence des nouveaux critères de définitions. L’inexistence de ces critères
de définitions est souvent due à l’impossibilité de circonscrire la frontière du droit
commercial.

B-Une difficile délimitation de la frontière du droit commercial contemporain


3
N. Rouland, l’anthropologie juridique, que sais-je? puf, paris, 1993, p68
4
Paul Didier, Remarques pour servir une définition du droit commercial, recueil Dalloz de doctrine, de
jurisprudence et de législation, 1962, p38

5
La particularité du droit commercial classique était déterminée par rapport au droit civil. Le
droit civil était considéré comme un droit commun applicable à tous. Il pose un corps des
règles à caractère général. Mais aujourd’hui, la tendance est inversée et le droit commercial
est devenu aussi large que possible. On assiste aujourd’hui à une diversification du droit
commercial dans les plus grands secteurs économiques. Deux remarques sont à dégager
alors pour montrer qu’il est réellement difficile de délimiter les frontières du droit commercial
contemporain.

La première remarque doit être faite par rapport à l’éclatement du droit commercial. Le droit
commercial contemporain est devenu un arbre avec plusieurs branches. Toutes les règles
classiques essentielles du droit commerciales se sont détachées pour constituer des disciplines
à part entière. Les actes de commerce, le fonds de commerce, le bail à usage commercial, la
faillite, les effets de commerce, les contrats commerciaux ; renaissent sous un autre avatar. On
parle aujourd’hui des activités économiques et professionnelles au lieu de parler des activités
commerciales ; de droit de crédit et moyen de paiement, de droit des entreprises en difficulté,
de contrat d’affaire au lieu des contrats commerciaux etc…Le droit commercial entretient
pourtant des relations continues avec toutes ces disciplines qui se sont détachées de son sein.

Face à une telle mutation, la doctrine s’accorde à trouver un qualificatif approprié qui permet
de prendre en compte cette expansion du droit commercial. Car un mouvement de
mercantilisation a tiré au droit commercial classique sa prépondérance. Certains auteurs
parlent du droit économique en valorisant le droit de la concurrence. 5 Une approche plus
générale fait état du droit de l’entreprise pour impliquer toutes les activités du secteur
économique. Mais parmi toutes les approches, c’est celle du droit des affaires qui a connu de
succès parce qu’elle est plus ouverte aux activités civile et que sa place dans la vie
économique est incontestable.6 Cette subdivision du droit commercial lui confère une
dimension large et pose en même temps une difficulté du point de vue de son espace. Car l’on
ne sait pas exactement où circonscrire le droit commercial après cette subdivision.

La deuxième remarque doit être faite par rapport à une dimension géographique. Car
l’évolution du droit commercial impactera sans doute sur son étendue d’application. Il est
utile de rappeler qu’« approprié par le pouvoir royal, il est devenu étatique, national et légal.
Alors qu’aujourd’hui, il est devenu moins législatif, moins étatique et plus professionnel…il

5
Cl.Champaud, contribution à la définition du droit économique, Dalloz, 1967, chron.p.215.
6
A.Sayag et Jean Hilaire, quel droit des affaires pour demain ?, édition litec,1984.

5
devient également international, en particulier au travers de la construction européenne »7.
Hier cantonné au royaume, aujourd’hui dans les Etats, demain sans nul doute, le droit
commercial sera internationalisé. Car s’il demeure un droit d’échange les échanges ont une
force d’expansion naturelle.

Alors, la dynamique actuelle du droit commercial, montre suffisamment les difficultés


auxquelles l’on serait confronté dès lors qu’on tentera de le délimiter dans un cadre spatial. Il
se trouve non seulement à la croisée de plusieurs disciplines mais il tend à unir les états dans
un espace commun en vue de définir un cercle harmonisé pour développer le secteur
d’activité économique.

Enfin, le débat sur la frontière du droit commercial ne se résume plus à l’interaction classique
droit civil-droit commercial. Du fait des évolutions constantes au cours de ces dernières
années, le débat a pris d’autres tournures : c’est celui de l’espace droit commercial. Est-il un
droit défini dans un cadre états ou un qui au-delà des frontières s’adaptent au besoin des
Professionnels ? toutes les deux réponses peuvent être défendables mais la seconde le sera
encore plus. Une première réponse peut être donnée positivement. Quel que soit la dimension
que prend le droit commercial, ce sont les Etats qui sont au rendez-vous pour choisir les règles
à définir. Quelque part c’est pour préserver leur souveraineté économique. Aussi
indépendante que l’activité puisse paraitre elle ne peut être exercée que dans un territoire
déterminé. La seconde réponse, plus raisonnable, consiste à dire que peu importe son espace,
le droit commercial évolue au rythme des professionnels. Il est adapté plus à leurs besoins et
cible l’espace où ils investissent le plus. Alors qu’aujourd’hui les plus grands investissements
et les plus grandes activités économiques ont traversé les frontières étatiques. Il n’est pas
alors inutile que le débat sur l’espace du droit commercial soit orienté vers son
internationalisation.

Le droit commercial dans sa dimension classique pouvait être délimité facilement. Il suffit
juste de voir sa frontière par rapport au droit civil. Or le droit commercial contemporain est
difficile à délimiter parce qu’il est partout dans les différentes nouvelles règles qui régissent
les activités professionnelles. Raison pour laquelle il est évident de conclure qu’il est difficile
de délimiter les frontières du droit commercial contemporain

S’il est difficile de trouver à présent un consensus sur une nouvelle approche au droit
commercial, sans nul doute il subsistera des incertitudes sur son avenir.

7
Op.cit., Jean Jacques Daigre, p271

5
II-les incertitudes sur l’avenir du droit commercial contemporain au regard de sa
dynamique actuelle

Le droit commercial contemporain présente des doutes sur son avenir. Pour certains, il
existera sans spécificité (A) pour d’autres il est probable qu’il disparaisse (B).

A-l ’avènement d’un droit commercial sans spécificité

L’état actuel du d droit commercial montre que toutes les règles qui lui étaient propres ne le
sont plus. Une raison de plus de s’interroger sur ce que sera le droit commercial du demain.

Le droit commercial même s’il existera, il n’aura aucune spécifié qui permettra de le
distinguer des règles civiles et de celles qui régissent les autres activités professionnelles. La
rapidité et la sécurité qui étaient les éléments les plus importants pour justifier la spécificité du
droit commercial sont aujourd’hui transposés partout en droit civil tout comme dans d’autres
domaines jugés plus spécifique que le droit commercial. Il suffit de prendre des exemples
pratiques pour montrer que la rapidité et sécurité ne sont plus originel au droit commercial.

Le premier exemple c’est par rapport aux techniques de circulation de la lettre de change en
droit cambiaire. L’on se rend compte que la question de célérité et de sécurité est très sérieuse
que quand on est en droit commercial. En effet, un système de rapport cambiaire est créé pour
permettre une circulation rapide de la lettre de change quel que soient les vices de fond qui
l’affectent. Les vices que l’on retrouve dans les rapports fondamentaux de base ne seront pas
transposés dans les rapports cambiaires afin d’éviter la lenteur dans la circulation de la lettre
de change. C’est dire donc que les techniques de célérités ont connu une évolution
considérable en droit cambiaire et tendent à ne plus devenir important en droit commercial
contemporain ; demain elles ne le seront non plus.

Le second exemple c’est par rapport à la transposition de ces techniques de rapidité et de de


sécurité en droit civil. Les législateurs aujourd’hui ont compris la nécessité du temps dans les
relations humaines. Le formalisme était très fréquent en droit de contrat classique. Mais
aujourd’hui, on assiste à une influence du droit commercial dans le cadre civil de sorte que le
formalisme est écarté du contrat dans la plupart du temps. Les contrats consensuels ont peu à
peu remplacer les contrats solennels et ceci pour des impératifs de rapidité. Aujourd’hui, on
peut donner l’exemple du bail à usage d’habitation qui peut être conclu verbalement, alors que
tel n’est pas le cas autre fois. Donc à travers ces deux exemples, il est judicieux de conclure
que rien ne restera comme spécifique au droit commercial d’autant plus que les raisons qui

5
ont favorisés sa création, commencent à devenir de plus en plus présentes dans les autres
branches.

Par ailleurs, certains auteurs ont considéré jusqu’à là que si le droit commercial conservera sa
spécificité c’est pour au moins deux raisons : d’une part c’est en raison de l’existence des
juridictions spéciales dévolues de la compétence pour connaitre leur litige et d’autre part
parce qu’il demeure toujours au sein du droit des affaires avec ses spécificités. Mais ces deux
raisons ne seront plus d’actualité dans l’avenir. Car aujourd’hui les juridictions spéciales du
droit commercial connaissent de plus en plus le contentieux non commercial. Une référence à
la loi de sénégalaise de 2017 sur les tribunaux de commerce permettra de comprendre que
même les non commerçants sont susceptible de bénéficier de la procédure devant les
juridictions commerciales. Cette thèse défendue par Dominique Legeais8 ne pourrait plus être
vraie au regard de la pratique actuelle en droit commercial.

Enfin, il est important de rappeler qu’un nombre d’institution qui paraissent propres au droit
commercial doivent leur régime au droit civil9. Quelques exemples suffissent à s’en
convaincre. Le compte courant bancaire emprunte l’essentiel de ses mécanismes à la
compensation. C’est le cas aussi de l’affacturage qui permet le transfert de créance du
commerçant envers la société d’affacturage par le mécanisme de la subrogation par
changement du créancier.

On peut accepter alors que le droit commercial conserve sa dimension objective et sa


dimension subjective. Chaque fois qu’il des commerçants parmi les professionnels, le droit
commercial existera tout de même à côté du droit des affaires. Mais les mutations profondes
du droit commercial emporte plein effet sur sa spécificité. Toutes les règles spécifiques du
droit commerciales tendent à s’spécialiser. Que restera-il du droit commercial alors ? il est
difficile de répondre positivement mais jusqu’ici, on peut retenir que la spécificité du droit
commercial disparaitra. Mais s’il sera sans spécificité ; il y a un risque de sa disparition
progressive.

B-le risque d’une disparition progressive du droit commercial

Des exigences du formalisme classique vers la recherche des règles souples et sécurisées, de
la séparation du droit civil et droit commercial, du dépassement des acteurs classiques du droit
commercial à l’avènement des nouveaux acteurs, du caractère résiduel du droit commercial à

8
Dominique Legeais, droit commercial et des affaires, 19 e, Sirey.
9
Www.pug.fr/stract/show/803

5
l’expansion du droit commercial, on est encore passé du droit commercial au droit des
affaires ; telles sont les évolutions exponentielles qui doivent inquiéter les juristes. Cette
inquiétude relève du seul fait qu’une telle évolution est susceptible de conduire droit à sa
disparition.

Un auteur a montré que le droit commercial est victime de son propre succès. Il part du
postulat que : « le droit commercial a pris du volume et d’intérêt : les commercialistes
forment ainsi des Chapelles dans la matière volontairement ou pas. Ce n’est pas pour les
renforcer…si tout le monde consent à y avoir désormais droit des affaires, droit économique,
il n’en reste pas moins que la dilatation du droit commercial ne s’est pas réaliser sans
affecter l’unité de la matière. Société, effets de commerce, faillite, transport, bancaire etc…
la poussée de branches dissimule les troncs et, surtout, le droit commercial y a perdu son
âme quand il n’avait que cela !  »10 à travers son article il ressort clairement, le débat actuel du
droit commercial est tourné vers sa disparition. Mais l’idée de disparition du droit commercial
ne veut pas dire que tout ce qui est originel au droit commercial disparaitra, plutôt le droit
commercial ne sera plus une discipline à part entière. Tout ce qui restera au droit commercial
serait peut-être la matière qui sera enseignée à l’université. Pour des nécessités pédagogiques
elle pourra exister pour au moins apprendre la notion des bases en droit commercial, son
historicité, son déclin etc… En claire, le même sort qui est arrivé à la dichotomie (droit privé
droit public) risque d’arrivé au droit commercial-droit des affaires.

Déjà en l’état du droit positif actuel, la Belgique a enterré définitivement son droit
commercial et son code de commerce par une loi du 15 avril 2018. Elle les a remplacés par un
code de droit économique et a substitué aux notions de commerçants et actes de commerce
celle de « l’entreprise ». Le tribunal de commerce devient le tribunal d’entreprise.11

Il résulte de dire alors que tout ce risque de disparition du droit commercial provient de
l’extension son objet et de l’élargissement de son espace. Cette évolution incontrôlable est
presque achevée, toute la doctrine a orienté sa réflexion vers la recherche d’une nouvelle
conception au droit commerciale mais aucune n’y ait parvenu. Même se droit commercial
apparait aujourd’hui sous un autre avatar, le risque de sa disparition n’est pas loin, il est juste

10
Hervé Causse, du déclin du droit commercial et des professeurs de droit commercial. Non mais !
professeur de droit commercial, économique et financier. Voilà désormais mon titre !. Article publié
sur le site : https:/hervecausse.info/Du-declin-du-droit-commercial-et-des-professeurs-du-droit-
commercial-Non-mais-Professeur-de-drot-commercial_a576.amp.html
11
Jean Paillusseau, le droit commercial va –t-il disparaitre ?, recueil dalloz,2019, p2129

5
progressif. Dans l’espace Ohada, toutes les récentes réformes apportées aux actes uniformes
n’ont fait qu’adapter le droit commercial aux évolutions constantes du monde des affaires.

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