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UNIVERSITE HASSAN II CASABLANCA

FACULTE DES SCIENCES JURIDIQUES ECONOMIQUES


ET SOCIALES DE CASABLANCA
MASTER : AUDIT ET CONTRÔLE DE GESTION
2011/2012

Droit des affaires


Jamal RBII
Docteur en droit privé
Professeur à la Faculté de droit de Salé

Introduction
Section 1. Droit des affaires et notions voisines

§1. Du droit commercial au droit des affaires

Le droit des affaires remplace la dénomination traditionnelle du « droit commercial


».cette nouvelle appellation se veut moderne, dynamique et plus vaste. En effet, elle
regroupe plusieurs domaines. Le droit des affaires permet ainsi de rendre compte d'une
matière éclatée (apparition de disciplines nouvelles : droit fiscal des affaires, droit
pénal des affaires, droit social, droit de la concurrence, droit de la consommation...).
Le droit des affaires serait alors l’ensemble des règles de droit applicables aux
entreprises et à leurs relations de droit privé.

Si l’on veut trouver le point de différence entre le droit commercial classique et le


droit des affaires, on peut dire que le premier vise l’ensemble des règles applicables
aux commerçants dans l’exercice de leur activité professionnelle alors que le second
prend l’entreprise comme point central. Or, La notion d’entreprise est plus étendue
que celle de commerçant. On considère ainsi par exemple qu’une exploitation agricole
est une entreprise, bien qu’elle n’ait pas un caractère commercial techniquement
parlant.

L’expression de « droit des affaires » s’est beaucoup répandue mais est en compétition
avec d’autres notions, venues elles aussi concurrencer le droit commercial.

§2. Les appellations voisines au droit des affaires

Droit économique : Le droit économique est une appellation nouvelle qui veut
inclure le rôle des collectivités publiques dans la vie des affaires. Le droit économique
met l’accent sur les relations des agents économiques, privés et publics, et sur les
rapports de force qui fondent les activités commerciales. Par conséquent, ce droit
traite des thèmes nouveaux : les concentrations, le contrôle…Mais néglige un peu
certains aspects classiques du droit commercial comme le commerçant.

Droit des activités économiques de l'entreprise. L'entreprise est le principal


acteur de la vie économique. Le commerçant individuel a une entreprise. Il en va de
même de l'agriculteur, de l'artisan, du professionnel exerçant à titre libéral. La société
est également une entreprise. Mais, la doctrine reste hésitante par rapport à la notion
d’entreprise : concept juridique ou économique ? L’entreprise est-elle une chose ou
une personne ?

Droit des marchés. Le D. Com a toujours été un droit des marchés. Il s'est formé
sur les foires, lieu d'échanges par excellence. Il y a marché dès lors que les échanges
sont régulés par une autorité. Le marché joue un rôle important car il est lieu où se
rencontre l’offre et la demande. Il fait appel à la régulation, c’est-à-dire à
l’intervention de la règle de droit.

Droit des professionnels. Pendant très longtemps, l'opposition entre le


commerçant et les autres acteurs de la vie économique a été fondamentale. Elle
pouvait justifier le clivage entre le droit civil et le D. Com. Le professionnel peut être
un commerçant, mais le terme désigne également l'artisan, l'agriculteur, le
professionnel exerçant une profession libérale.

Section 2. Les exigences de la vie des affaires

L'exigence de rapidité. Si un D. Com s'est développé en marge du droit civil, c'est


d'abord dans le but de faciliter la conclusion et l'exécution des opérations
commerciales. Le droit civil est apparu trop formaliste. Par exemple, l’écrit qui est
obligatoire en droit civil pour chaque acte dont la valeur dépasse 10 000 dirhams,
n’est pas nécessaire en droit commercial puisque la preuve est libre entre
commerçants.

L'exigence de sécurité. Les transactions ne peuvent se développer que si elles ne


risquent pas d'être facilement contestées. Les paiements une fois effectués ne doivent
pas pouvoir être remis en cause (ex. théorie de l'apparence ; règles de publicité).

La nécessité du crédit. Tout entrepreneur a besoin de crédit, que celui-ci lui soit
consenti par son banquier ou par son fournisseur. Le droit commercial facilite
généralement l’accès au crédit. Mais, le crédit signifie également la confiance et
l’exécution scrupuleuse des engagements pris. Par conséquent, le droit commercial
présume la solidarité passive des commerçants codébiteurs. La confiance mutuelle
entre professionnels se traduit par le rôle de la bonne foi dans la conclusion et
l’exécution des contrats et dans le recours spontané aux procédures de transaction et
d’arbitrage.
Section 3. Sources du droit des affaires

§ 1. Le droit national

La loi

La Constitution. Dans ses articles 71 et 72, elle annonce les domaines respectifs
de la loi et du pouvoir règlementaire. L'article 35 garantit la liberté d'entreprendre.

 Le Code de commerce (loi n°15-95 formant Code de commerce, 3 octobre


1996).
 Loi n° 17.95 relative aux sociétés anonymes promulguée par le Dahir du 30
août 1996.
 Loi n° 5.96 relative aux SNC, SCS, SCA, SARL et la société en participation
promulguée par le Dahir du 13 février 1997.

La jurisprudence

Fonction créatrice. Les décisions judiciaires jouent le même rôle en droit commercial
qu'en droit civil : elles interprètent la loi, la complètent et parviennent même à la faire
évoluer au gré des besoins (principes généraux dégagés: loyauté contractuelle, fraus
omnia corrumpit (la fraude corrompt tout), transparence, sanction de l'abus de
droit...).

Les avis et recommandations

On assiste aujourd'hui à un véritable éclatement des sources du D. Com. C'est l'une des
conséquences majeures de l'autonomie progressivement acquise par chaque branche
du D. Com. Des autorités, des organismes, des commissions sont ainsi créés pour
donner leurs avis ou pour énoncer des recommandations applicables à un secteur
donné (conseil de la concurrence, conseil déontologique des valeurs mobilières
CDVM,…).

Les usages

En droit commercial, on distingue généralement deux types d’usages :

 L’usage de droit ou la coutume : il a un domaine et une portée plus étendue


que l'usage conventionnel. Cet usage a une autorité égale à la loi. Leur
existence est censée être connue par le juge. Cependant, sauf exceptions, il ne
peut s'opposer à une loi impérative. Les plus importants de ces usages ont été
consacrés par la jurisprudence.
 L’usage conventionnel : c’est l’usage auquel les parties se réfèrent. Il n’a pas
d’autorité que celle qui s’attache à la volonté des parties. Leur existence doit
être établie par la partie qui s’en prévaut.

La pratique
A la différence des usages, les pratiques professionnelles sont plus récentes. Il existe
ainsi des clauses types, des conditions générales de vente qui s'appliquent à un
ensemble de contrats donné. Des codifications privées peuvent aussi regrouper ces
règles.

Les codes de conduite ou codes d'éthique ou codes de déontologie répondent à une


autre ambition, celle de réintroduire plus d'éthique dans la vie des affaires, de déduire
les conséquences des principes de transparence et de loyauté (ex. code de déontologie
de l'assurance-vie, de la franchise,...).

La doctrine

Le Code de commerce étant incomplet, c'est la doctrine qui a énoncé les principes
dominant la discipline, qui a élaboré les théories importantes et qui a favorisé
l'émergence de matières nouvelles tels que le droit bancaire, le droit de la concurrence,
le droit de la distribution.

§ 2. Le droit international

Les Conventions relatives au commerce. Le commerce est mondial. Très tôt, les
commerçants ont donc recherché des mécanismes permettant de limiter les contraintes
résultant de droits nationaux. Des Conventions internationales ont pour but
d'uniformiser les législations de chaque pays. Le contenu de la Convention est alors
intégré dans la législation de chaque partie.

Les organismes internationaux : Des organismes œuvrent de leur côté à la recherche


des solutions communes (chambre de commerce internationale, Unidroit, commission
des Nations Unies pour le droit commercial international, OMC).

Usages internationaux : Il existe des usages internationaux qui ont pour but de
remédier à la diversité des droits nationaux. Par exemple, la chambre de commerce
internationale à Paris a codifié sous le nom d’Incoterms (International commercial
terms) le vocabulaire utilisé dans le droit de la vente internationale.

Section 4. Caractères fondamentaux du droit des affaires

Le D. Com n'est plus seulement soumis aux exigences traditionnelles de rapidité et de


sécurité de la vie des affaires. Des principes nouveaux qui inspirent les lois et la
jurisprudence sont progressivement apparus. Le D. Com a dû prendre également en
considération des impératifs nouveaux du commerce.

§ 1. Les principes directeurs du droit des affaires

L'exigence de l'équilibre. Classiquement, on ne se souciait pas d'assurer l'équilibre des


relations juridiques. Chacun devait négocier au mieux de ses intérêts. Aujourd'hui, le
législateur intervient pour protéger des catégories d'intervenants qui sont en situation
d'infériorité, par exemple des distributeurs face aux grands fournisseurs, des petits
producteurs face à la grande distribution. Le droit du marché est soumis à un principe
d'égalité. La loi sanctionne toutes les formes d'abus : l’abus de position dominante, les
clauses abusives…

L'exigence de transparence. Traditionnellement, le monde des affaires reposait sur un


principe de secret des affaires. Celle-ci a cependant montré ses limites. Tout d'abord, le
secret peut favoriser la fraude. Ensuite, le secret constitue une entrave au jeu de la libre
concurrence. Enfin, le secret se révèle être un instrument de domination au profit des
grandes entreprises, des centrales d'achat par exemple. Pour ces raisons, ce sont les
mérites de la transparence, instrument de moralité et d'équilibre des relations
contractuelles, qui sont soulignés.

L'exigence de loyauté. Ce principe tend aujourd'hui à devenir l'un des principes


directeurs de la vie des affaires. Son importance traduit la volonté du juge et du
législateur de restaurer une morale des affaires. Le principe de loyauté éclaire de
nombreuses solutions dans les principaux domaines du droit des affaires (contrat; droit
de la concurrence; droit des sociétés et celui des marchés financiers).

§ 2. La prise en compte d'impératifs nouveaux

Les nouveaux biens. Le D. Com a été le droit du fonds de commerce, de la clientèle.


Aujourd'hui, d'autres biens sont apparus dans le commerce juridique (les droits de la
propriété intellectuelle).

Les nouvelles technologies. Le droit des affaires a toujours dû s'adapter aux avancées
technologiques, industrielles et commerciales. Il existe aujourd'hui plusieurs facteurs
d'évolution importants. L'écrit est contesté en raison de la multiplication des
opérations dématérialisées, du développement du commerce électronique, des
opérations réalisées via Internet. La signature manuscrite ne peut plus être apposée. Il
faut donc trouver des substituts. Tout le droit de la preuve est affecté.

Internet et la nouvelle économie. Le développement de l'Internet a donné naissance à


une nouvelle économie fondée sur le commerce électronique. Celui-ci présente trois
caractéristiques : l'immatérialité des échanges, l'interactivité, l'internationalité des
relations. Ce commerce électronique a pu se développer dans un système de liberté,
même si aujourd'hui un encadrement juridique semble nécessaire.

Les nouveaux modes d'exercice de l'activité commerciale. Le D. Com classique a été


construit pour des commerçants et des sociétés isolés. Or, la vie économique connaît
deux évolutions majeures : disparition des petits commerces au profit des grandes
surfaces et l'apparition des groupes et le développement des opérations de
restructuration ou de développement par voie d'acquisition (Fusion des entreprises,
centrales d’achat…).

La prise en compte de nouveaux intérêts. Le D. Com a pendant longtemps été


construit dans l'intérêt des seuls commerçants. Aujourd'hui, il apparaît que le
législateur et le juge s'attachent à la protection de plusieurs groupes de personnes
identifiés : les consommateurs, les investisseurs, les actionnaires minoritaires dans les
sociétés, les fournisseurs indépendants en lutte contre les centrales d'achat. De même,
un rôle de plus en plus important est conféré aux salariés et à leurs représentants. Cela
montre la nécessité d’une approche globale, laquelle caractérise le droit des affaires .

Première partie. Les acteurs de la vie commerciale

Les acteurs de la vie des affaires peuvent être des personnes physiques ou des
personnes morales. Ces acteurs ne sont plus seulement des commerçants. D'autres
professionnels exercent aujourd'hui leur activité dans des conditions similaires. On va
voir dans un premier temps les commerçants et dans un second temps les activités
civiles participant dans la vie commerciale : l’agriculture et les professions libérales.

Titre 1. Les professionnels commerçants

Chapitre 1. Définition du commerçant

Acteur majeur de la vie des affaires, le commerçant a pourtant toujours été


difficile à définir. Le commerçant est en effet celui qui accomplit des actes de
commerce à titre de profession habituelle (art. 6 du C. Com).

La définition du commerçant se compose de trois éléments :

 L’accomplissement d’actes de commerce


 Le caractère habituel et professionnel de l’activité
 Le caractère indépendant de l’activité

Section 1. L'accomplissement d'actes de commerce

La théorie de l'acte de commerce. Le Code de commerce a procédé à une énumération


des actes de commerce sans pour autant en donner une définition générale. Malgré
l’absence de définition, les actes de commerce peuvent être regroupés selon trois idées
essentielles.

§1. Énumération des actes de commerce

Différentes catégories d'actes de commerce. Les articles 6, 7 et 8 du C. com donnent


une liste d'actes de commerce. Ils sont de nature différente.

A. Les actes de commerce par nature

L'acte de commerce par nature est commercial en raison de son objet.


L'énumération de l'article 6 montre que ces actes concernent les principales activités de
la vie des affaires.
1. Activités de négoce

L'achat pour revendre. Il est le principal acte de commerce par nature. Il peut avoir
pour objet les meubles et les immeubles. L'activité de promoteur immobilier demeure
donc civile. L'achat n'est un acte de commerce que s'il est fait pour revendre.

Entreprise de location de meubles. L'entreprise de location d'immeubles demeure donc


civile. Les locations de meubles (automobiles, machines, bâches, etc.) sont toujours des
actes de commerce même si elles n'ont pas été précédées d'un achat; mais il faut
qu'elles soient faites en entreprise, c'est-à-dire par un professionnel et non de façon
isolée.

Entreprise de fournitures. Le marché de fournitures consiste en des prestations


échelonnées de biens ou de services: pompes funèbres, enlèvement d'ordures
ménagères, distribution d'eau, de gaz, d'électricité, de journaux, etc.

2. Activités industrielles

Entreprise de manufacture. Ce sont toutes les industries de transformation qui


fournissent leur matériel et leur main-d'œuvre même si elles travaillent les matières
premières ou produits fournis par les clients: façonniers, teinturiers, blanchisseurs
industriels, réparateurs, etc. Il s'agit aussi des entreprises de bâtiments, de travaux
publics ou de terrassement, bien que se rapportant à des immeubles.

Entreprise de transports. Les transporteurs professionnels font des opérations


commerciales, que le transport soit effectué par terre, rail, eau ou air, qu'il concerne
des marchandises ou des voyageurs.

Etablissement de spectacles publics. Théâtre, cirque, cinéma, etc.

3. Activités financières

Opérations de change et de banque. La loi répute acte de commerce toute opération


de change, banque et courtage et toutes les opérations liées au crédit et aux
transactions financières. Par assimilation, les opérations de bourse sont aussi
commerciales pour les intermédiaires de bourse à savoir les prestataires de service
d'investissement.

Opérations d'assurances. Les compagnies d'assurances qui pratiquent ces assurances


dans un but de spéculation font des actes de commerce, au contraire, les sociétés
mutuelles d'assurances ne cherchent pas à réaliser des bénéfices, font donc des
opérations civiles.

4. Activités des intermédiaires du commerce

Il s'agit des agents d'affaires, de voyage, d'information et de publicité. Sont aussi des
actes de commerce, les actes accomplis par les courtiers et les commissionnaires.

5. Artisanat
Caractère commercial de l’artisanat : En principe, il devrait y avoir une différence
entre l'artisan et le commerçant. Le premier vit de son travail manuel alors que le
second trouve son profit dans l'accomplissement d'actes de commerce. A la différence
du commerçant, l’artisan ne spécule pas. Cependant, l’article 6 du code de commerce
énumère l’activité artisanale parmi les activités octroyant la qualité de commerçant. La
commercialité a été retenue par le nouveau code de commerce puisque l’artisan
poursuit un but lucratif.

B. Les actes de commerce par la forme

A la différence des précédents, ces actes sont soumis au D. Com, qu'ils soient faits
professionnellement par un commerçant ou qu'ils soient faits à titre isolé par un non
commerçant. Ils sont peu nombreux.

Lettre de change. C'est un ordre donné par un créancier (le tireur) à son débiteur (le
tiré) de payer une certaine somme à une certaine date à un tiers (le bénéficiaire). Le
tireur en tant que signataire est responsable de la création de la lettre et est tenu de la
payer si le tiré ne le fait pas.

Le billet à ordre. Titre par lequel une personne, le souscripteur, s'engage à payer à une
époque déterminée une somme d'argent à un bénéficiaire ou à son ordre. Il a une
nature commerciale même s’il est signé par un non-commerçant lorsqu’il résulte d’une
transaction commerciale.

Les sociétés commerciales : certaines sociétés sont commerciales par leur forme. Il s’agit
de la société en nom collectif, la société en commandite, la SARL et la SA.

C. Les actes de commerce par accessoire

La théorie de l'accessoire. Elle permet d'unifier le régime applicable à certaines


opérations. Conformément à un principe général, l'accessoire doit en effet suivre le
principal. En application de cette théorie, un acte en principe civil va devenir
commercial s'il est accompli par un commerçant ou s'il se rattache à une opération
commerciale. Selon l’article 10 du C. Com. sont réputés acte de commerce, les faits et
actes accomplis par le commerçant à l’occasion de son commerce. Par exemple, l’achat
d’un véhicule est un acte civil mais s’il est réalisé par un commerçant pour assurer le
fonctionnement de l’entreprise, il devient un acte de commerce. Plus
exceptionnellement, un acte de commerce va être qualifié d'acte civil s'il est accompli
par un non commerçant.

D. L'acte mixte

L'acte mixte est celui qui est commercial pour l'une des parties et civil pour l'autre. Par
exemple : la vente d’un bien par un commerçant à un consommateur. Tous les actes
de commerce par nature ou par accessoire peuvent ainsi être mixtes. En principe, le D.
Com s'applique à la partie qui est commerçante et le droit civil à la partie qui ne l'est
pas. La partie civile peut se prévaloir du droit commercial contre le commerçant alors
que ce dernier ne peut se prévaloir contre elle que du droit civil. Il en est ainsi exprimé
dans l’article 4 du code de commerce.

§2. Le critère général de l'acte de commerce

Trois critères ont été proposés par la doctrine classique :

Le critère de la spéculation. Celui qui exerce une activité commerciale cherche à faire
des profits. Ce premier critère est dépassé dans la mesure où d’autres activités non
commerçantes poursuivent un but lucratif : professions libérale, agriculture. Par
conséquent, la spéculation se présente comme une condition parmi d’autres de la
commercialité. Son intérêt est d’exclure les activités non lucratives : coopératives,
associations, mutuelles…

Le critère de l'entreprise. Ce critère est fondé sur l’analyse des méthodes de travail
dans le sens où l’entreprise se présente comme une répétition d’opérations
commerciales effectuées à titre professionnel et réalisées par une organisation
structurée. Delà, l'assimilation traditionnelle entre le droit commercial et le droit de
l'entreprise. Cependant, ce critère demeure inadapté car si l’exercice du commerce
suppose en principe l’existence d’une entreprise, cette dernière n’est pas
obligatoirement commerciale. L’entreprise peut avoir une nature civile.

Le critère de la circulation des richesses (l’entremise). L'acte de commerce est un acte


d'entremise dans la circulation des richesses (marchandises, services…). Cela permet
d’exclure d’une part les opérations de production (agriculture et industries extractives)
et d’autre part l’opération de consommation (achat final). Autrement dit, les actes de
production et de consommation seraient civils alors que les actes de circulation
d’argent seraient commerciaux. Malheureusement, ce critère aussi est insuffisant dans
le sens où certaines activités civiles participent à la circulation des richesses (promotion
immobilière par exemple).

Section 2. L'exercice à titre de profession habituelle

Le commerçant est celui qui exerce une activité à titre professionnel. Il doit accomplir
plusieurs actes de commerce. L'idée de répétition, d'habitude est donc essentielle. Les
actes de commerce doivent être accomplis dans le cadre d'une profession: il faut
entendre par là, une activité, un état présentant une continuité suffisante pour
permettre d'en tirer les moyens ou une partie des moyens nécessaires à l'existence.
Autrement dit, l’activité doit tendre à la recherche de lucre. Cette activité doit être
réelle et s'accompagne le plus souvent de l'organisation d'une entreprise et de
l'exploitation d'un fonds de commerce. Somme toute, il faut un rythme, une
organisation et un but lucratif.

Section 3. L'exercice à titre indépendant

Distinction entre le commerçant et le non commerçant. Pour être commerçant, il faut


agir pour son propre compte, à ses risques et périls et en toute indépendance. Les
personnes qui, bien que participant à une activité commerciale, ne jouissent pas d'une
indépendance suffisante ne sont donc pas des commerçants (salariés, mandataires,..).
En effet, les préposés et le conjoint du commerçant ne sont pas des commerçants
même s’ils participent à l’activité habituelle et professionnelle du commerçant. Il faut
donc que les actes de commerce soient réalisés au nom et pour le compte du
commerçant.

Chapitre 2. Conditions requises pour l’exercice de l’activité


commerciale

Principe de la liberté du commerce et de l'industrie. Le D. Com est dominé par ce


principe. Il a une valeur constitutionnelle (l’Etat garantit la liberté d'entreprendre et la
libre concurrence, art. 35 de la Constitution). Cependant, malgré ce principe de
liberté, il a toujours existé des limites voire des interdictions. Il est naturel que l’Etat
exerce un certain contrôle des activités commerciales : tantôt dans le but particulier
d’une personne (les incapacités), tantôt dans l’intérêt général (incompatibilités,
restrictions et interdictions)

Section 1. Les limites au droit de devenir commerçant

Toutes les personnes physiques ou morales ne peuvent pas exercer une activité
commerciale. Il faut en effet tenir compte des restrictions qui trouvent leur source dans
des règlementations d'origines diverses.

§1. Les incapables

Les incapacités ont pour but de protéger les mineurs et les personnes dont les
facultés mentales sont altérées. Les actes passés par les incapables sont sanctionnés par
la nullité puisqu’ils peuvent diminuer la valeur de son patrimoine. La capacité
juridique est régie par le code de la famille. Il est à souligner que depuis le nouveau
code de commerce, la femme mariée peut exercer le commerce sans autorisation du
mari (art. 17 du C. Com).

A. Mineurs

Malgré la minorité, il peut exceptionnellement bénéficier de la capacité commerciale


par une autorisation spéciale ou par émancipation judiciaire (16 ans). Ces deux
exceptions doivent être inscrites au registre du commerce (art. 13 du C. Com).

B. Majeurs aux facultés mentales altérées

Le code de commerce ne contient pas de dispositions relatives aux incapables majeurs.


Ce qui conduit à les assimiler aux mineurs non émancipés.

§2. Les personnes morales commerçantes

Principe de spécialité. Seules les sociétés commerciales, constituées dans les conditions
prévues pour ce genre de sociétés, peuvent se livrer à une telle activité. Ni les sociétés
civiles, ni les associations, ni les syndicats, ni les congrégations ne peuvent faire le
commerce. L'Etat et les collectivités publiques sont soumis à quelques conditions.

§3. Les étrangers

L'exercice par les étrangers d'une activité commerciale obéit à plusieurs formalités. Des
conditions sont prévues par la loi 02-03 du 11 novembre 2003 et par le C. com.

Cas de l'étranger majeur

Est réputé majeur pour exercer le commerce tout étranger ayant atteint vingt
ans révolus, même si sa loi nationale prévoit un âge de majorité supérieur à celui qui
est édicté par la loi marocaine (art. 15).

Cas de l'étranger mineur

Lorsqu'un étranger n'a pas l'âge de majorité requis par la loi marocaine et qu'il
est réputé majeur par sa loi nationale, il ne peut exercer le commerce qu'après
autorisation du président du tribunal du lieu où il entend exercer et inscription de
cette autorisation au registre du commerce.
Il est statué sans délai sur la demande d'autorisation (art. 16).

§4. Les incompatibilités

Personnes concernées. Certaines professions ou fonctions sont déclarées


incompatibles avec l'exercice du commerce parce qu'elles supposent soit un sens de
l'intérêt général, soit une impartialité, soit même un désintéressement qui
s'accommoderait mal avec l'esprit de spéculation (fonctionnaires, magistrats, militaires,
avocats, architectes, experts-comptables, etc.).

§5. Les déchéances

Personnes concernées. Le législateur interdit le commerce aux personnes dont le


défaut de moralité est déjà établi à la suite, par exemple de condamnations pénales ou
de mises en faillite. La déchéance commerciale peut être prononcée par exemple dans
le cas d’absence d’une comptabilité régulière, la dissimulation d’actif, l’augmentation
frauduleuse du passif, déclaration tardive de la cessation des paiements…

Force est de souligner que toute personne qui, en dépit d’une interdiction,
d’une déchéance ou d’une incompatibilité, exerce habituellement une activité
commerciale, est réputée commerçant (art. 11 C. Com.).

Section 2. Les activités interdites ou soumises à condition

Activités interdites. Certaines activités sont interdites, soit dans un but


d'hygiène, de morale ou de police (Exemple : fabrication de jouets dangereux,
maisons de tolérance, etc.), soit à raison d'un monopole fiscal, économique ou de
police de l'Etat et des collectivités publiques (Exemple : gaz et électricité, émission de
billets de banque, etc.).

Activités soumises à autorisation. D'autres activités sont subordonnées à une


autorisation, une licence ou un enregistrement qui sont délivrés après vérification de
certaines conditions de sécurité, de moralité et de compétence (Exemple :
établissements dangereux et insalubres, débits de boissons, fabrications d'armes,
entreprises de spectacles, agences de voyages, laboratoires d'analyse médicale, etc.).

Activités soumises à conditions. Pour d'autres activités, il faut l'inscription à un ordre


professionnel (Exemple : pharmaciens), ou la possession d'un diplôme (Exemple :
pharmaciens, opticiens lunetiers).

Titre 2. Les autres auteurs de la vie commerciale

Chapitre 1. Les agriculteurs


Caractère civil de l'activité agricole. L'activité agricole consiste dans la vente de denrées
que l’agriculteur produit et les animaux qu’il élève. Elle est traditionnellement une
activité civile. Pourtant elle ne s'éloigne pas du monde des affaires, bien au contraire.
En effet, si l’agriculture traditionnelle semble s’éloigner du commerce, l’agriculture
industrielle s’approche plus de l’industrie que de l’agriculture. Par conséquent, elle
devrait être commerciale à l’instar de l’activité industrielle. Par exemple, un
pépiniériste achète la majorité des plants pour les revendre ensuite. De même,
l’éleveur d’animaux achète pour revendre.

Chapitre 2. Les professionnels ayant une activité libérale


Par nature, leur activité est civile. Un principe veut également que les clientèles civiles
soient incessibles en tant que telles. Cette clientèle est hors du commerce à cause du
lien personnel qui lien le professionnel libéral à ses clients. Pourtant, ces professionnels
se groupent de plus en plus pour l'exercice de leur activité, ils créent des groupements.
Ils ont besoins de capitaux (ex. cliniques). Ils emploient de nombreux salariés. Au plan
économique, il existe de véritables entreprises libérales. Par ailleurs, il est fréquent que
l’activité libérale s’accompagne d’opérations commerciales. Dans ce cas, il faut
appliquer la théorie de l’accessoire. Par conséquent, l’acte accompli sera considéré
comme acte de commerce par accessoire.
Deuxième partie. Les droits et obligations des
commerçants

Titre 1. Les obligations des commerçants

Chapitre 1. L’inscription au registre de commerce

Le registre du commerce (R.C.) trouve sa raison d'être dans la nécessité de


mettre en place une publicité commerciale. Les tiers doivent pouvoir connaître un
minimum d'informations relatives au commerçant. Ils sont délivrés des copies ou des
extraits certifiés des inscriptions sur le registre du commerce. La publicité permet
également un certain contrôle de l'activité commerciale. Le RC se présente comme un
fichier alphabétique de toutes les personnes immatriculées indiquant les informations
déclarées par le commerçant, éventuellement les demandes d’inscriptions modificatives
et de radiation. L’immatriculation est un caractère personnel dans le sens où nul ne
peut être inscrit sur plusieurs registres locaux ou dans le même sur plusieurs numéros.

Section 1. Organisation du registre

§1. Tenue du registre

Registre local. Le registre local est tenu par le secrétariat-greffe du tribunal


compétent (situation de l’établissement principal du commerçant ou le siège de la
société). La tenue du registre du commerce et l'observation des formalités prescrites
pour les inscriptions qui doivent y être faites sont surveillées par le président du
tribunal ou par un juge qu'il désigne chaque année à cet effet (art. 28).
Registre central. Il est tenu par les soins de l’OMPIC (Office marocain de la
propriété industrielle et commerciale) (art.31). Il est public. Toutefois, sa consultation
ne peut avoir lieu qu'en présence du préposé à la tenue de ce registre.
Le registre central centralise, pour l'ensemble du Royaume, les renseignements
mentionnés dans les divers registres locaux. Il délivre des certificats et des copies des
inscriptions. Il publie annuellement un recueil donnant tous renseignements sur les
noms de commerçants, les dénominations commerciales et les enseignes qui lui sont
transmis.
§2. Inscriptions au registre
Personnes devant être immatriculées. Sont tenues de se faire immatriculer au
registre du commerce toutes les personnes physiques et morales, marocaines ou
étrangères exerçant une activité commerciale sur le territoire du Royaume dans les
trois mois de l’ouverture de l’établissement commercial ou d’ l’acquisition du fonds de
commerce pour les personnes physique et de la création ou la constitution pour les
personnes morales (art. 75).
L'obligation d'immatriculation s'impose en outre :

 à toute succursale ou agence d'entreprise marocaine ou étrangère;


 à toute représentation commerciale ou agence commerciale des Etats,
collectivités ou établissements publics étrangers;

 aux établissements publics marocains à caractère industriel ou commercial,


soumis par leurs lois à l'immatriculation au registre du commerce;

 à tout groupement d'intérêt économique (art. 37).


Procédure d'immatriculation. L'immatriculation du commerçant ne peut être
requise que sur demande écrite du commerçant lui-même ou de son mandataire muni
d'une procuration écrite qui doit être jointe à la demande.
Obtention d'un numéro d'immatriculation. Dans les cinq jours du dépôt de la
demande, le greffier doit immatriculer le commerçant, s'il estime le dossier conforme
aux prescriptions légales. Cela se traduit par l'obtention d'un numéro mentionné sur le
dossier conservé au greffe et sur l'exemplaire destiné au registre central.
Alimentation du registre. Le R.C doit être en permanence actualisé. Des
inscriptions modificatives peuvent être demandées pour rectifier ou compléter des
énonciations du registre. Par exemple : nantissement ou cession du fonds de
commerce, nullité ou dissolution d’une société, modification de la forme sociale,
nomination de nouveaux dirigeants…

Section 2. Les effets de l’inscription


Portée de la présomption de commercialité. Toute personne physique ou
morale immatriculée au registre du commerce est présumée, sauf preuve contraire,
avoir la qualité de commerçant avec toutes les conséquences qui découlent de cette
qualité (art. 58). La présomption de commercialité n'est pas opposable aux tiers et
administrations qui apportent la preuve contraire. Cette présomption ne joue pas pour
les sociétés. Mais c'est à partir de l'inscription au registre que la société acquiert la
personnalité morale.
Inopposabilité aux tiers des faits et actes non mentionnés. Les faits et actes non
inscrits régulièrement au registre du commerce ne sont pas opposables aux tiers sauf si
les assujettis à l’inscription établissent qu'au moment où ils ont traité, ces derniers en
avaient connaissance.

Communication des inscriptions et des actes. Le registre est une source


d'information essentielle pour tous les acteurs de la vie des affaires.

Signalisation des inscriptions. Pour faciliter l'accès à l'information des tiers et


assurer une meilleure publicité des informations contenues sur le registre, deux séries
de règles complètent le dispositif mis en place. D'une part, toute personne assujettie à
l'immatriculation au registre du commerce est tenue de mentionner dans ses factures,
lettres, bons de commande, tarifs, prospectus et autres papiers de commerce destinés
au tiers, le numéro et le lieu de son immatriculation au registre analytique.
D'autre part, toute immatriculation donne lieu à l'insertion d'un avis au bulletin
officiel.

Section 3. Les radiations


Cas de radiation : Il y a radiation dans les cas suivants : quand un commerçant
cesse d'exercer son commerce ou vient à décéder, sans qu'il y ait cession de fonds de
commerce ou quand une société est dissoute, en cas de déchéance commerciale, en cas
de clôture d’une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire, en cas
d'acquisition ou de location d'un fonds de commerce, il est procédé sur le registre du
commerce du précédent propriétaire ou du bailleur, à la radiation de l'inscription du
fonds cédé ou loué. La décision de radiation est prise sur demande de l’intéressé ou
d’office par ordonnance du président du tribunal.
L'assujetti ne peut être rayé des rôles d'imposition à l'impôt des patentes
afférents à l'activité pour laquelle il est immatriculé, qu'en justifiant au préalable de la
radiation du registre du commerce.
Respect des obligations légales. Les obligations relatives au R.C sont
impératives. Le non respect par le commerçant de ses obligations le rend passible de
sanctions civiles et pénales. La personne non immatriculée ne peut jamais se prévaloir
à l'égard des tiers du statut de commerçant mais il est soumis à toutes les obligations
découlant de cette qualité.

Section 4. Les sanctions


Défaut d’immatriculation est puni d’une amende de 1 000 à 5 000 dirhams.
Le fait de donner des indications inexactes de mauvaise fois en vue de
l’immatriculation au registre du commerce est puni d’un emprisonnement d’un mois à
un an et d’une amende de 1 000 à 50 000 dirhams ou de l’une de ces deux peines
seulement.

Chapitre 2. La tenue d’une comptabilité régulière

La comptabilité est devenue un moyen de contrôle nécessaire. Par conséquent,


l’évolution s’est traduite par un renforcement des sanctions pénales et par
l'organisation de contrôles permanents.

Le commerçant tient une comptabilité conformément aux dispositions de la loi


n° 9-88 relative aux obligations comptables des commerçants (25 décembre 1992). Ce
texte a récemment été modifié par la loi n°44.03 du 14 février 2006. Le code de
commerce ajoute des dispositions relatives à la force probatoire des documents
comptables.
Obligations comptables applicables à tous les commerçants : Les documents
comptables sont établis en monnaie nationale sans blanc ni altération. Le commerçant
doit conserver les documents comptables et toutes les pièces justificatives pendant dix
ans. Il doit établir une comptabilité régulière dans la mesure où l’administration fiscale
peut rejeter les comptabilités non conformes.
Exigences fiscales. La comptabilité des entreprises permet de contrôler les
déclarations des bénéfices ou du chiffre d'affaires qui servent de base à l'impôt sur le
revenu, à l'impôt des sociétés ou aux taxes sur le chiffre d'affaires.

Section 1. Les documents comptables


*Livres comptables. Tout commerçant doit en principe tenir au moins trois
livres qui sont obligatoires.
Le livre journal enregistre les mouvements affectant le patrimoine de
l'entreprise opération par opération et jour par jour. Cet enregistrement doit indiquer
l'origine, le contenu et l'imputation de chaque opération ainsi que les références de la
pièce justificative qui l'appuie.

Le grand livre regroupe l'ensemble des comptes de l'entreprise. Il enregistre


l'ouverture et le fonctionnement des comptes en liaison avec les écritures du livre
journal. Il consiste en une copie des différentes écritures du livre journal. Il est la base
de la comptabilité en double (comptes clients et comptes fournisseurs).
Le livre inventaire récapitule chaque année, après évaluation, tous les éléments
actifs et passifs de l'entreprise; il reproduit également ses comptes annuels.
* Tenue des livres. Le livre journal et le livre d'inventaire peuvent être cotés et
paraphés sans frais par le greffier du tribunal de commerce; ils sont tenus sans blanc ni
altération d'aucune sorte.

* Les comptes annuels Le commerçant est tenu d'établir des documents de


synthèse; ils comprennent nécessairement le bilan (un document d’ordre financier,
lequel est une photographie du patrimoine de l’entreprise dans un moment donné), le
compte de résultat (est un document qui permet de constater après un an de
fonctionnement le niveau de résultat dégagé par l’entreprise. Il dégage les bénéfices et
les pertes de l’entreprise) et l'annexe (un document qui complètent et commentent les
deux précédents. Il a contenu varié : règles et méthodes de comptabilité retenues,
filiales…). Les trois documents forment un tout indissociable. Ces documents et les
pièces justificatives doivent être conservés pendant dix ans.
* Sanctions de la tenue des comptes. Au plan civil, une comptabilité
irrégulièrement tenue ne peut faire preuve au profit de son auteur. Cependant,
comme en droit commercial, la preuve est libre, le juge peut tenir les mentions de
documents mal tenus à titre de présomption.
Les sanctions sont le plus souvent répressives. (Faillite, banqueroute).
Section 2. La preuve par les documents comptables
Principes. Les documents comptables font preuve contre les commerçants. Si elle est
régulièrement tenue, cette comptabilité est admise par le juge pour faire preuve entre
commerçants à raison des faits de commerce (art. 19 C. com). Mais comme toujours
en matière commerciale, la preuve contraire peut être faite par tous moyens.
Les documents comptables ne font pas preuve contre les non-commerçants. Les livres
peuvent valoir comme une présomption simple. Les tiers peuvent opposer au
commerçant le contenu de sa comptabilité même irrégulièrement tenue.
Production des documents comptables : Au cours d'une instance judiciaire, le
tribunal peut ordonner d'office ou à la requête de l'une des parties, la représentation
ou la communication des documents comptables (art. 22). Cette production se fait
selon deux modalités : En principe, la représentation consiste à extraire de la
comptabilité les seules écritures qui intéressent le litige soumis au tribunal (art. 23).
Mais exceptionnellement, la production peut être intégrale dans certains cas : les
affaires de succession, de redressement ou de liquidation judiciaire et dans les autres
cas où ces documents sont communs aux parties. Cette production intégrale a lieu de
la manière établie entre les parties et, si elles ne peuvent s'accorder, moyennant le
dépôt au secrétariat greffe de la juridiction saisie (art. 24). Si le commerçant refuse de
produire sa comptabilité ou déclare ne pas en avoir, le juge peut déférer le serment à
l’autre partie pour appuyer ses prétentions.
Les originaux des correspondances reçues et les copies des correspondances envoyées
doivent être classés et conservés 10 ans à compter de leur date (art. 26).

Titre 2. Les droits des commerçants

Chapitre 1. La juridiction commerciale

Compétence juridictionnelle : Le droit d'être jugé par un tribunal spécialisé à


savoir le tribunal de commerce constitue assurément le principal avantage attaché à la
qualité de commerçant. L’activité civile est de la compétence des juridictions civiles.
Les tribunaux de commerce ont été créés par loi du 6 janvier 1997 promulguée par le
dahir du 12 février 1997.

Composition du tribunal : le tribunal statue en formation collégiale (trois


magistrats dont un président). Il est composé d’un président, des vices présidents, des
magistrats, le ministère public représenté par un procureur du roi et un ou plusieurs
substituts, un greffe et un secrétariat du ministère public. Tous les magistrats sont des
magistrats professionnels. Le tribunal peut être divisé en chambres spécialisées.

Attributions des tribunaux de commerce : les tribunaux de commerce sont


compétents pour connaître : les actions relatives aux contrats de commerce et aux
effets de commerce, les litiges entre associés des sociétés commerciales et les litiges
relatifs au fonds de commerce, les litiges relatifs aux difficultés des entreprises, les litiges
relatifs à l’application du code de commerce.

Un commerçant et un non commerçant peuvent attribuer au tribunal de


commerce compétence pour connaître des litiges pouvant les opposer à l’occasion de
l’exercice de l’une des activités du commerçant. De même, les acteurs de la vie des
affaires peuvent recourir à l’arbitrage et se dispenser entièrement de la justice
commerciale publique.

Compétence territoriale : en principe, le tribunal commercial compétent est


celui dans le ressort duquel se trouve le domicile réel ou élu du défendeur ou sa
résidence. Mais ce principe connaît des dérogations dans la mesure où le tribunal
compétent serait celui où se trouve le siège social d’une société ; en cas de traitement
des difficultés de l’entreprise où se trouve l’établissement principal ou le siège social, et
en cas des mesures conservatoires, le lieu où se trouve l’objet desdites mesures. Dans
tous les cas, les parties peuvent convenir par écrit de désigner un tribunal de
commerce compétent.

Taux de ressort : le tribunal de commerce statue en premier et dernier ressort


pour les affaires dont la valeur ne dépasse pas 9 000 dirhams. Au-delà, il rend des
jugements en premier ressort susceptibles d’appel. Cela dit, dans les territoires où il n’y
a pas un tribunal de commerce, les litiges commerciaux dont la valeur ne dépasse pas
20 000 dirhams sont de la compétence du tribunal de première instance. Au-delà, il
faut saisir un tribunal de commerce.

Procédure : la procédure devant le tribunal de commerce est une procédure


écrite alors qu’il faut en réalité plus de célérité. Par conséquent, la constitution d’un
avocat est obligatoire. Comme en matière civile, la demande introductive peut être
faite par requête écrite ou déclaration verbale. Le président du tribunal désigne un
juge rapporteur pour instruire l’affaire. L’exécution des jugements est suivie par un
magistrat chargé de l’exécution : juge d’exécution. Le jugement rendu par le tribunal
commercial peut faire l’objet d’un appel (si la valeur de la demande est supérieure à
9 000 dirhams) dans un délai de 15 jours à compter de la notification du jugement à la
partie perdante.
Missions présidentielles : le président du tribunal a des missions spécifiques. Il
est juge des référés et il prend des ordonnances d’injonction de payer. Entre également
dans la compétence du président du tribunal de commerce la surveillance des
formalités du registre du commerce. A cet effet, il peut chaque année désigner un juge
responsable du registre de commerce.

Chapitre 2. Certaines règles spécifiques

Les commerçants bénéficient de certaines règles dont ne bénéficient pas les personnes
civiles. Cela marque l’intérêt de distinguer entre l’activité commerciale et l’activité
civile.

La preuve. Elle est libre entre commerçants (art. 334). Pour faciliter la rapidité
des transactions commerciales, le commerçant a toujours été dispensé de se
préconstituer une preuve par écrit. Le commerçant peut donc prouver à partir de sa
comptabilité et à partir de tous écrits ou témoignages.

La solidarité. En vertu de l’article 335, la solidarité se présume en matière


commerciale, alors qu'elle doit être expressément stipulée en droit civil. Dès lors,
lorsque deux commerçants sont tenus au paiement, le créancier peut à son choix
poursuivre l'un des deux. Il n'a pas à supporter le risque d'insolvabilité de l'un d'entre
eux.

La prescription. Le délai de prescription de droit commun est de 5 ans en


matière commerciale (art. 5) alors qu'il est de 15 ans en matière civile (art. 387 du
DOC). La règle se justifie par la volonté de renforcer la sécurité du commerce juridique
en évitant les contestations et remises en cause tardives.

Procédures collectives : Les procédures de traitement des difficultés de


l’entreprise s’appliquent seulement aux commerçants, artisans et aux sociétés
commerciales (art. 560 C. Com).
Troisième partie. Les biens affectés à l’entreprise
commerciale
Titre 1. Le fonds de commerce

Le fonds de commerce (FDC) est assurément l'une des pièces maîtresses du D.


com. Il est le principal bien du commerçant. Pourtant, il n’est pas défini par le code de
commerce. La notion de fonds de commerce est difficile à cerner dans son ensemble.
Le législateur s’est contenté d’énumérer les éléments composant le fonds de commerce
(Chapitre 1) et les opérations qui portent sur celui-ci (Chapitre 2).

Chapitre 1. Notion de fonds de commerce

En l'absence de définition, le FDC a toujours nourri la controverse.

Caractère d'universalité. Le FDC est une universalité dans le sens où il constitue


un ensemble homogène et permanent distinct des éléments qui le composent et
soumis à un régime juridique unique. Mais la doctrine s’est divisée à propos de la
qualification de l’universalité : s’agit-il d’une universalité de droit ou de fait ? Par
universalité de droit, il faut entendre une sorte de patrimoine séparé du commerçant,
distinct du reste de son patrimoine où l’actif répond du passif. Par universalité de fait,
il faut entendre une collection d’éléments d’actif et n’inclut pas le passif
correspondant : les dettes nées de l’exercice de l’activité commerciale n’entrent pas
dans la composition du fonds. En effet, le FDC ne répond pas spécialement des dettes
commerciales; il fait partie du patrimoine général du commerçant et répond de toutes
ses dettes aussi bien civiles que commerciales. C’est cette deuxième qualification qui a
eu la faveur de la doctrine.

Caractère mobilier et incorporel. Le FDC ne peut comprendre que des éléments


mobiliers; il est lui-même un meuble. C'est un meuble incorporel.

Caractère commercial. Les règles du FDC ne s'appliquent qu'aux fonds affectés à


une activité commerciale; elles ne s'appliquent ni aux exploitations agricoles, ni aux
clientèles civiles des professions libérales.

Chapitre 2. Composition du fonds de commerce

Le FDC est un ensemble à contenu variable. Il est composé d'éléments corporels


et d'éléments incorporels qui sont affectés tous au même but : l’exploitation de
l’entreprise commerciale. Bien que certains éléments aient la même affectation, ils sont
exclus du fonds de commerce (Les immeubles, les créances, les dettes : le cessionnaire
du fonds de commerce n’acquiert pas les créances et ne prend pas en charge les dettes
sauf s’il s’agit d’une opération de cession distincte). Les articles 79 et 80 du code de
commerce précisent les éléments du fonds de commerce.

Section 1. Eléments corporels

Ce sont les éléments tangibles qui ont une existence concrète et qui sont susceptibles
d’une possession.

Matériel et outillage. Ce sont des biens meubles affectés à l'exploitation du


fonds: machines, outillage, matériel roulant, mobilier, etc.

Marchandises. Ce sont les stocks de matières premières ou de produits destinés


à la vente.

Section 2. Eléments incorporels

Les éléments incorporels sont les éléments immatériels qui échappent à toute
appréhension matérielle.

§1. La clientèle

Nature de la clientèle. La clientèle est constituée par l'ensemble de ceux qui


s'approvisionnent habituellement auprès d'un commerçant déterminé (relations
suivies). Elle se distingue de l'achalandage, clientèle passagère et occasionnelle qui
n'offre aucun lien de fidélité au marchand puisqu'elle consomme uniquement en raison
de son emplacement. Le terme de clientèle peut désigner la clientèle effective, le terme
d'achalandage peut désigner la clientèle potentielle.

La clientèle est soumise au libre jeu de l’offre et de la demande. Par


conséquent, elle ne devrait pas être un élément du fonds de commerce car elle n’est
pas susceptible d’appropriation. Mais en pratique, on considère que la clientèle
représente un potentiel de chiffre d’affaires et une valeur attachée aux éléments
distinctifs d’un fonds de commerce.

§2. Le droit au bail

Importance du droit au bail. Dans la majorité des cas, en effet, le


commerçant n'est pas propriétaire de l'immeuble dans lequel le fonds est exploité. Il
est donc essentiel pour lui de pouvoir disposer d'un local de manière prolongée (d'où
l'expression de propriété commerciale). Et l’emplacement de ce local peut jouer un
rôle important dans la prospérité du fonds de commerce. Par ailleurs, si le
commerçant est propriétaire de l’immeuble où il exploite son fonds, cette propriété ne
fait pas partie du fonds de commerce. Seule la jouissance de cet immeuble qui dépend
du fonds.

§3. Signes de ralliement de la clientèle

Le nom commercial : c’est le nom sous lequel le commerçant exerce le


commerce. Quand il s’agit d’une société, on parle de dénomination sociale et de
raison sociale pour les sociétés civiles. Ce peut être son nom patronymique, un
prénom, un surnom ou même une dénomination de fantaisie. Même lorsqu'il est
constitué par le nom patronymique, le nom commercial fait partie du fonds et est
transmissible avec lui à l'acquéreur. Le nom commercial est protégé par l'action en
concurrence déloyale contre les usurpations ou imitations des concurrents qui
pourraient être cause de confusion dans l'esprit de la clientèle.

L'enseigne : elle sert à désigner la boutique plutôt que l'entreprise, elle


individualise l’établissement. Elle peut se confondre avec le nom commercial; mais ce
peut être une dénomination de fantaisie ou un emblème. L'action en concurrence
déloyale permet de la protéger contre les imitations des concurrents.

Les noms de domaine. Ils sont apparus avec le développement de l'Internet.


Le nom de domaine permet en effet de désigner un site. Il s'agit d'une adresse plus
facilement lisible que l'adresse informatique ou numérique correspondant à une suite
de chiffres. Le nom de domaine est très vite devenu un signe de ralliement de la
clientèle. C'est en effet un signe distinctif qui a une valeur patrimoniale et qui peut être
vendu.

§4. Droits de propriété industrielle

Le FDC comprend fréquemment des droits de propriété industrielle et


commerciale. Ce sont des droits incorporels portant sur des créations de l'intelligence,
qui confèrent à leur titulaire un monopole d'exploitation ou d'utilisation, protégé
légalement par des sanctions pénales et civiles, et par l'action en contrefaçon. Ces
droits de P. Ind ont aujourd'hui une importance économique considérable. Il s'agit de :
brevets d'invention, marques, dessins et modèles.

§5. Autres éléments incorporels

Licences et contrats transmis. Le FDC peut aussi comprendre des licences ou


autorisations administratives, comme la licence des débits de boissons, les cartes de
transporteurs publics... Mais d'autres autorisations sont personnelles au commerçant et
ne sont pas transmissibles avec le fonds; le successeur doit en demander une autre,
comme par exemple pour la licence d'agence de voyages.

Enfin, dans la vente ou la location-gérance de FDC, le bénéfice ou la charge


de certains contrats passe ou peut passer au successeur (contrats de travail, contrats
d'assurance relatifs au fonds sauf résiliation par l'acquéreur ou l'assureur, contrats de
fourniture "téléphone"). Cela dit, le principe reste que les contrats conclus par le
propriétaire du fonds de commerce ne sont pas transmis avec le fonds car ne font pas
partie de ce dernier.

Chapitre 3. Opérations portant sur le fonds de commerce

Diversité des opérations. Le FDC est un bien incorporel. Il représente une


valeur. Par conséquent, il fait l’objet de plusieurs opérations : une vente, un apport en
société, une mise en location-gérance ou un nantissement.

Section 1. La vente du fonds de commerce

Justification du régime dérogatoire. La vente de FDC est soumise, en principe,


aux règles de droit commun régissant les ventes commerciales de meubles incorporels.
Cependant, des règles particulières justifiées par l'importance économique du FDC ont
été données par le C. com : d'une part pour organiser la publicité de la vente dans
l'intérêt des créanciers et d'autre part pour créer un privilège au profit du vendeur
lorsqu'il fait crédit à l'acheteur.

§ 1. Conditions de la vente du fonds de commerce

A. Conditions de fond

Adaptation des règles du droit commun. Les règles du droit commun


applicables sont en principe, celles de tout contrat et spécialement de toute vente de
meubles. La vente du FDC est un contrat consensuel qui en pratique doit être constaté
par écrit. Il a en principe un caractère commercial.

L'acquéreur peut se prévaloir d'un vice de consentement (ex. le dol). Les règles
de capacité sont applicables (mineur, majeur placé sous le régime de la tutelle).

L'objet de la vente doit être un FDC, c'est-à-dire une clientèle actuelle. Le prix
est fixé librement par les parties, il doit être déterminable, réel et sérieux.

B. Conditions de forme et de preuve

La vente de FDC, comme tout contrat commercial, peut en principe se prouver


par tous moyens et sa validité n'est pas subordonnée à la rédaction d'un écrit.
Cependant, en pratique un écrit notarié ou sous seing privé est toujours rédigé car il
est nécessaire pour la publicité de la vente, pour celle du privilège du vendeur et pour
l'immatriculation de l'acheteur au RC. L’acte doit comporter certaines mentions
obligatoires énumérées par l’article 81 du C.Com. Par exemple, identification du
vendeur, prix de vente, les renseignements sur le bail…

C. Publicité de la vente

Intérêt. Le FDC constitue généralement l'essentiel du patrimoine du


commerçant. En cas de vente clandestine ou de dissimulation du prix versé, ses
créanciers et spécialement ses créanciers chirographaires voient disparaître leur droit de
gage et risquent de ne plus être payés. C'est la raison pour laquelle le loi a organisé la
publicité de la vente du FDC pour permettre aux créanciers, ainsi prévenus, de faire
opposition sur le prix de vente et d'exercer un droit de surenchère s'ils estiment ce prix
insuffisant.

Formes de la publicité. L'acte de vente doit être enregistré. Une expédition de


l’acte de vente doit être déposée dans un délai de 15 jours de sa date au secrétariat
greffe du tribunal dans le ressort duquel le fonds est exploité. Un extrait de cet acte est
inscrit au registre du commerce. Cet extrait est publié sans délai par le secrétariat greffe
aux frais des parties dans un journal d'annonces légales et au bulletin officiel. Entre le
8ème et le 15ème jour après cette première publication, l’acheteur peut demander de
renouveler la publication (art. 83).

Sanctions du défaut de publicité. Le défaut de publicité n'empêche pas la vente


d'être valable; mais si le prix a été versé entre les mains du vendeur en l'absence de
toute publicité ou avant l'expiration du délai ouvert aux créanciers pour faire
opposition, ce paiement pourra être déclaré inopposable aux créanciers du vendeur et
l'acheteur sera obligé de verser une seconde fois le prix entre leurs mains.

Le droit d'opposition des créanciers. Les créanciers du vendeur, avertis par la


publicité, peuvent faire opposition sur le prix de vente dû par l'acheteur ou déposé
chez l'intermédiaire dans les 15 jours au plus tard après la seconde publicité. Tous
peuvent le faire, qu'ils aient une créance exigible ou à terme (art. 84).
L'opposition a pour effet de bloquer le prix de vente entre les mains de
l'acheteur ou de l'intermédiaire et d'empêcher que ce prix soit versé valablement au
vendeur. Cette somme sera répartie entre les créanciers à l'amiable ou, à défaut, par
une procédure judiciaire de distribution.

Le droit de surenchère du sixième. Si le prix de vente est insuffisant pour


désintéresser les créanciers du vendeur, un créancier opposant peut, dans les trente
jours de la seconde publication, faire surenchère du sixième; il demande au tribunal de
remettre le fonds en vente aux enchères publiques et offre de se porter enchérisseur
pour le prix initial augmenté du sixième de la partie du prix représentant les éléments
incorporels du fonds (non compris le matériel et les marchandises). Le tribunal dispose
d'un pouvoir d'appréciation. Cette surenchère est impossible si la vente primitive était
déjà une vente judiciaire aux enchères.

§ 2. Effets de la vente

A. Obligations du vendeur

Délivrance du fonds de commerce. Le vendeur doit mettre les éléments du


fonds à la disposition de l'acheteur. Le transfert de la propriété du fonds s'opère dès le
jour de la conclusion du contrat, sans aucune formalité. Cependant, pour chacun des
éléments qui le composent, ce transfert n'est opposable aux tiers que selon les règles
propres à chacun d'eux: pour le matériel et les marchandises, la mise en possession sera
nécessaire; pour le droit au bail il faudra une signification au bailleur ou son
acceptation; pour les brevets ou les marques, une inscription devra être prise à
l'OMPIC.

Garantie due en raison de l'inexactitude des mentions figurant dans l'acte de


vente. Le vendeur garantit à l'acheteur l'exactitude des mentions insérées dans l'acte de
vente (ex. présence d'un nantissement non signalé). En cas d'inexactitude, l'acheteur
peut demander soit la résolution de la vente, soit une réduction du prix à la condition
de prouver que cette inexactitude l'a induit en erreur sur la valeur du fonds.

Garantie du vendeur. Conformément au droit commun, le vendeur doit en


premier lieu garantir l'acheteur contre l'éviction. Il garantit d'une part contre les
troubles de droit provenant d'un tiers qui revendiquerait par exemple le fonds, d'autre
part contre les troubles de droit ou de fait provenant du vendeur lui-même (ex. droit
de reprise pour refuser le renouvellement du bail, obligation de non rétablissement).
Le vendeur est tenu de la garantie des vices cachés. Le défaut invoqué doit être
important pour l'existence du fonds lui-même.

A son choix, l'acheteur peut exercer l'action rédhibitoire (résolution de la vente)


ou l'action estimatoire (réduction de prix).

B. Obligation de l'acheteur

1. Contenu de l'obligation

Paiement du prix. L'obligation essentielle de l'acheteur est de payer le prix ainsi


que les frais accessoires, notamment le droit d'enregistrement. Le prix est indisponible,
pour protéger les créanciers du vendeur. Le prix est le plus souvent déposé entre les
mains de l'intermédiaire. Ce dernier a l'obligation de le bloquer pendant les quinze
jours qui suivent la publication de la vente au bulletin officiel. Si au terme de ce délai,
aucune opposition n'a été faite, il peut remettre le prix au vendeur dès lors qu'il
n'existe aucune sûreté inscrite sur le fonds.

2. Garanties du paiement du prix

Garanties du vendeur. Pour garantir le paiement du solde du prix de vente, la


loi donne au vendeur un privilège et une action en résolution de la vente, mais ces
garanties ne sont guère utiles en cas d'ouverture d'une procédure collective.

a. Privilège

Publicité du privilège. Le privilège ne peut être inscrit que si la vente du fonds a


été constatée par écrit et que ce dernier a été enregistré. Il est inscrit au greffe du
tribunal de commerce dans le ressort duquel le fonds est exploité. Ce privilège doit
être inscrit à peine de nullité absolue, dans la quinzaine de l'acte de vente (art. 92). Le
privilège a pour assiette les éléments désignés dans l'acte d'inscription. A défaut, il ne
s'étend qu'aux éléments incorporels suivants : l'enseigne, le nom commercial, le droit
au bail, la clientèle, l'achalandage (art. 91).

Effets du privilège. Le privilège octroie au vendeur deux droits : d’une part, un


droit de préférence sur le prix en cas de revente ; d’autre part, un droit de suite dans
le sens où le vendeur peut provoquer la revente du fonds même s’il a fait l’objet de
ventes successives. Le privilège s’exerce d’abord sur les marchandises, puis sur le
matériel et enfin sur les éléments incorporels.

b. Action résolutoire

Conditions du bénéfice de l'action. Le vendeur impayé a droit, s'il le désire, de


faire prononcer par le juge la résolution de la vente et de reprendre le fonds
moyennant restitution des acomptes reçus. Mais cette action résolutoire n'est
opposable aux tiers que si elle a été réservée expressément dans l'inscription du
privilège et si ce privilège n'est pas éteint (art. 99).
Section 2. L'apport du fonds de commerce en société

L'apport d'un FDC à une société ressemble à une vente en ce que la propriété
du fonds est transmise par l'apporteur à la société. L'acte d'apport doit contenir
d'ailleurs les mêmes mentions que l'acte de vente. Mais la contrepartie n'est pas un prix
comme dans la vente. L'apporteur devient un associé et reçoit des parts sociales ou des
actions. L'opération est cependant aussi dangereuse qu'une vente pour les créanciers de
l'apporteur. C'est la raison pour laquelle elle est soumise à la même publicité que la
vente.
Les créanciers de l'apporteur ont un délai de 15 jours au plus tard après la
seconde insertion pour se faire connaître par une déclaration au secrétariat-greffe du
tribunal qui a reçu l'acte, la somme qui lui est due. Cette déclaration a pour effet
d'obliger solidairement la société à leur égard (la société devient codébiteur solidaire
avec l’apporteur), à moins qu'un associé ne demande la nullité de la société ou celle
de l'apport si celui-ci a été fait au cours de la vie sociale.

Section 3. Le nantissement du fonds de commerce

Pour permettre au commerçant d’obtenir un crédit tout en continuant à


exploiter son fonds de commerce, le code de commerce lui permet de donner ce
dernier en nantissement.

§ 1. Conditions de validité et de publicité

Eléments grevés. Le nantissement porte obligatoirement sur les éléments


incorporels du fonds: clientèle et achalandage, nom, enseigne et, le cas échéant droit
au bail. A la condition de le dire dans l'acte, il peut porter sur le matériel et les droits
de propriété industrielle ou commerciale. Il ne doit jamais porter sur les marchandises
car celles-ci sont destinées à être vendues. De même, elles constituent une valeur libre
sur laquelle peut porter le droit de gage général des créanciers chirographaires (art.
107).

Forme et publicité. Le nantissement doit faire l'objet d'un acte écrit, notarié ou
sous seing privé, dûment enregistré (art. 108).

Le nantissement du fonds de commerce doit être inscrit sur le registre de


commerce à la diligence du créancier dans un délai de 15 jours à compter de la date de
l’acte constitutif (art. 109). La publicité se justifie par l’absence de dépossession et aussi
par protection des intérêts des créanciers qui risqueraient de surestimer la solvabilité
du débiteur.

§ 2. Droits des créanciers inscrits

A. Droits conservatoires

Déplacement du fonds. Le commerçant peut déplacer son fonds, mais il doit


notifier son intention aux créanciers inscrits, quinze jours à l'avance, sinon, il encourt la
déchéance du terme que ceux-ci avaient pu lui consentir. Les créanciers peuvent faire
vendre immédiatement le fonds pour se payer sur le prix. Si la notification est faite, ils
peuvent aussi demander au tribunal de prononcer la déchéance du terme à raison du
risque de dépréciation qu'entraîne le déplacement; sinon, ils doivent modifier leur
inscription ou prendre une nouvelle inscription pour conserver leur sûreté au nouvel
emplacement du fonds; à défaut, leur sûreté serait inopposable aux nouveaux
créanciers à qui le défaut de publicité causerait un préjudice.

Vente séparée d'un élément du fonds. La vente séparée d'un élément du fonds
(machine, matériel, etc.) peut entraîner une dépréciation du fonds. Elle est interdite au
débiteur commerçant sous peine de sanctions pénales prévues par le délit de
détournement d'objets remis en gage. Si un créancier saisit un élément isolé du FDC
pour le faire vendre, il doit notifier cette saisie aux créanciers inscrits qui, dans un délai
de dix jours, peuvent demander au tribunal d'ordonner la vente globale du fonds (art.
120).

Résiliation du bail. La valeur du fonds peut subir une importante diminution si


le bail des locaux est résilié à la demande du bailleur, notamment pour défaut de
paiement des loyers (art.112). Il doit notifier sa demande de résiliation aux créanciers
intérieurement inscrits. Le jugement de résiliation ne peut intervenir qu’après 30 jours
de la notification et s’il y a eu résiliation amiable, celle-ci ne devient définitive qu’après
30 jours de la notification. Ce délai de 30 jours permet aux créanciers inscrits de payer
les loyers dus, pour éviter la résiliation; ils seront d'ailleurs subrogés dans le privilège
du bailleur.

B. Droits principaux

Vente forcée du fonds. Huit jours après une sommation de payer demeurée
infructueuse, un créancier inscrit peut demander au tribunal d'ordonner la vente aux
enchères publiques du FDC par les soins de l'agent d'exécution (art. 114).

Droit de préférence. Que le fonds soit vendu à l'amiable ou sur vente forcée, les
créanciers inscrits bénéficient d'un droit de préférence sur le prix, qui leur permet d'être
réglés avant les créanciers chirographaires. Ce droit de préférence est indivisible.
Autrement dit, le paiement partiel ne libère pas le fonds : le solde dû restera garanti
par la valeur totale du fonds jusqu'à complet désintéressement du créancier. Lorsque
plusieurs nantissements viennent en concours, le rang des créanciers gagistes entre eux
est déterminé par la date de leurs inscriptions. Les créanciers inscrits le même jour
viennent en concurrence (art. 110).

Droit de suite. Les créanciers inscrits peuvent saisir le fonds en quelques mains
qu'il se trouve, notamment entre celles d'un acquéreur. Ils n'ont pas à faire opposition
lors de la vente car c'est à l'acquéreur de prendre l'initiative de "purger" les inscriptions
en offrant le prix à ces créanciers. Il s'agit de permettre au tiers acquéreur d'éliminer les
sûretés grevant le fonds en offrant de verser le prix de cession entre les mains des
créanciers. Si ces derniers acceptent la proposition, ils renoncent à leur droit de suite et
perçoivent le prix à la place du cédant. Le fonds se trouve ainsi purgé de toute
inscription. Si ces derniers estiment que le prix est insuffisant, ils peuvent faire une
surenchère du dixième ce qui entraîne la remise en vente du fonds; toutefois cette
surenchère est irrecevable si le fonds avait déjà fait l'objet d'une vente forcée aux
enchères (art. 122).

Section 4. La location-gérance de fonds de commerce

Caractères essentiels. La location-gérance de FDC est un contrat par lequel le


gérant libre exploite le fonds d'un propriétaire pour son compte et à ses risques et
périls, moyennant paiement d'un loyer ou d'une redevance qui est souvent indexée sur
le chiffre d'affaires.

§ 1. Conditions de validité

Objet. Le contrat de location-gérance doit avoir pour objet un FDC ou un


établissement artisanal. Il faut donc qu'une clientèle soit attachée aux éléments loués;
la simple location d'un local aménagé, par exemple d'une salle de spectacles, sans
clientèle, est un bail d'immeuble et non une location-gérance de FDC.

§ 2. Publicité de la location-gérance

Tout contrat de gérance libre est publié dans la quinzaine de sa date, sous
forme d'extrait au Bulletin officiel et dans un journal d'annonces légales.
Le bailleur est tenu, soit de se faire radier du registre de commerce, soit de faire
modifier son inscription personnelle avec la mention expresse de la mise en gérance
libre. La fin de la gérance libre donne lieu aux mêmes mesures de publicité (art. 153).
Le gérant libre est tenu d'indiquer sur tous documents relatifs à son activité
commerciale ainsi que sur toutes pièces signées par lui à cet effet ou en son nom, son
numéro d'immatriculation au registre du commerce et le siège du tribunal où il est
immatriculé et sa qualité de gérant libre du fonds. Cette obligation est punie d'une
amende de 2.000 à 10.000 dirhams.

§ 3. Effets de location-gérance

Qualité de commerçant. Le gérant libre a la qualité de commerçant et il est


soumis à toutes les obligations qui en découlent; le bailleur cesse en revanche d'être
commerçant, sauf au point de vue fiscal.

Effets entre les parties.

Le propriétaire a les obligations d'un bailleur: il doit mettre le locataire en


possession et ne pas le troubler dans sa jouissance; notamment il ne doit pas exploiter
un commerce concurrent.

Les obligations du locataire sont plus nombreuses :

- il doit payer un loyer ou redevance qui est souvent indexé sur le chiffre
d’affaires;
- il doit exploiter le fonds avec diligence, ne pas en modifier la destination, ne
pas en étendre l'objet, ne pas détourner la clientèle à son profit personnel;
- il ne peut ni céder ses droits, ni sous-louer le fonds sans l'autorisation du
bailleur, car le contrat est conclu intuitu personae.
- Il doit restituer le fonds en fin de location : la durée de celle-ci est
généralement brève et le gérant n'a pas de droit au renouvellement.

Effets à l'égard des tiers.

- Si les créanciers du bailleur de FDC estiment que la mise en location-gérance


de ce fonds met en péril le recouvrement de leurs créances, ils peuvent, dans les trois
mois de l'insertion au journal d'annonces légales, faire prononcer la déchéance du
terme et faire déclarer que leurs créances sont immédiatement exigibles.
- Pendant un délai de six mois qui ne commence à courir qu'à partir de la
publication du contrat de gérance-libre, le bailleur est tenu solidairement avec le
locataire-gérant de payer les dettes contractées par celui-ci à l'occasion de
l'exploitation du fonds et nécessaires à cette exploitation (art. 155).
- Dans ses rapports avec le propriétaire de l'immeuble, le locataire-gérant n'est
pas considéré comme un sous-locataire. Le renouvellement du bail doit être demandé
par le propriétaire du fonds et non par le gérant.

Titre 2. Le bail commercial

Fondement du régime dérogatoire des baux commerciaux. Le bail commercial


(B. com) est soumis à un régime juridique qui déroge aux dispositions du DOC
consacrées au bail. Les locataires commerçants bénéficient d'une protection particulière
depuis le dahir du 24 mai 1955 relatif aux baux d'immeubles ou de locaux loués à
usage commercial, industriel ou artisanal (complété par la loi n°6.79 du 25 décembre
1980). Le droit de disposer d'un local commercial est un des éléments essentiels du
fonds car l'emplacement constitue l'un des moyens principaux d'attirer la clientèle. La
perte du droit au bail pourrait ainsi avoir pour le locataire des conséquences
gravement préjudiciables : frais considérables de réinstallation, perte de la clientèle...
Le législateur a donc organisé un statut protégeant les commerçants locataires.

Chapitre 1. Conditions d'application du statut


Le bénéfice du statut est réservé aux locataires qui remplissent plusieurs
conditions relatives au bail, au local, et au FDC exploité. Des conditions sont
nécessaires pour les parties.

Section 1. Conditions relatives au bail

Un véritable bail. Seuls les titulaires d'un véritable louage d'immeuble peuvent
se prévaloir du bénéfice du statut. Le propriétaire du fonds ne doit donc pas jouir des
locaux en qualité de copropriétaire, d'indivisaire ou d'usufruitier. Sont également
exclues du statut les locations saisonnières. Le bail doit être régulier et valable.

Section 2. Conditions relatives au local

Nature du local. Celui qui se prévaut du statut doit disposer d'un local où il
exploite son fonds. Il doit s'agir de locaux stables et permanents. Le statut s’applique
aussi aux locaux accessoires dépendants du fonds et qui sont nécessaires à son
exploitation à condition que le bailleur donne son acceptation par écrit (dépôt,
bureaux…). Il s’applique aux terrains nus sur lesquels ont été édifiées des constructions
à usage commercial, industriel ou artisanal avec le consentement du propriétaire et
dans la limite de l’exploitation.

Le statut ne s’applique pas aux baux emphytéotiques (plus de 18 ans). Celles-ci sont
soumises à un régime spécial. Il ne s’applique pas aussi aux immeubles constitués en
habous sauf si certaines conditions sont remplies.

Section 3. Conditions relatives à l'exploitation du fonds

Un fonds propriété du locataire. Le bénéfice du statut est réservé aux seuls


commerçants et artisans qui sont propriétaires d'un FDC exploité dans les lieux loués.

Section 4. Conditions relatives aux parties

Le bailleur. Il peut être tout propriétaire d'immeuble. Des règles particulières


s'appliquent cependant à certains bailleurs (usufruitier).

Le preneur. Les bénéficiaires du statut sont les commerçants, les industriels et les
artisans.

Chapitre 2. Régime applicable au bail commercial initial


Section 1. Domaine d'application des règles de droit commun

Obligations des parties. Plusieurs principes gouvernant le bail civil ont vocation
à s'appliquer au B. com. Ainsi, le locataire doit jouir des locaux en bon père de famille,
les garnir de meubles suffisants pour garantir le paiement des loyers et le jeu du
privilège du bailleur sur les meubles, faire les réparations locatives, payer les loyers, ne
pas interrompre l'exploitation, etc.

De son côté, le bailleur doit sa garantie au locataire dans les conditions du droit
commun; notamment il ne doit pas le troubler par son fait dans la jouissance paisible
des locaux, par exemple en lui faisant personnellement concurrence; mais il demeure
libre de louer dans un autre local, même dans le même immeuble, à un concurrent
d'un locataire, sauf clause contraire du bail.

Section 2. Durée du bail

Liberté contractuelle. Le dahir de 1955 n’a pas imposé une durée minimale de
pour les baux commerciaux.

Section 3. Le loyer du bail

La fixation d'un montant déterminé. Lors d'un premier bail, le loyer est
librement fixé par les parties. Au moment du premier bail, il est fréquent que le
bailleur exige en outre le versement d'un "pas-de-porte", c'est-à-dire d'une somme
d'argent. Selon la volonté expresse ou implicite des parties, ce pas-de-porte peut
représenter soit un supplément de loyer capitalisé soit le prix d'acquisition d'avantages
commerciaux indépendants du loyer.

La révision du loyer. La révision est plafonnée à 10% du loyer initial. En


l’absence d’un accord des parties pour augmenter le loyer, ce dernier est augmenté de
10% chaque trois ans.

La déspécialisation : En principe, le locataire ne peut pas modifier sans l'accord


du bailleur la destination des locaux telle qu'elle est fixée dans le bail; sinon, il risque
une résiliation anticipée du bail ou le refus de renouvellement en fin de bail.

Cession de bail. Les clauses qui interdisent la cession du bail sans le FDC sont
valables. Il est ainsi possible d'introduire une clause n'autorisant la cession qu'à un
successeur dans son commerce. Elle signifie que la cession n'est autorisée qu'au profit
de celui qui acquiert le fonds. Une clause interdisant de céder le bail en même temps
que le FDC est nulle.

Sous-location. Les sous-locations de locaux doivent être autorisées par le


bailleur. Ce dernier peut exiger une augmentation de loyer correspondant au loyer de
la sous-location.

Clauses de résiliation du bail. Ces clauses par lesquelles le bailleur et le preneur


conviennent à l'avance que l'inexécution d'une des obligations du contrat emportera la
résiliation sont en principe licites. Ces clauses doivent être expresses. L'application des
clauses résolutoires a été source d'abus de la part de propriétaires mettant à profit la
moindre faute de leur locataire pour tenter d'obtenir la résiliation du bail et ainsi
retrouver la possibilité de relouer pour un montant bien supérieur.

Chapitre 3. Droit au renouvellement


La propriété commerciale. Le bénéfice du droit au renouvellement, appelé
"propriété commerciale" dans la pratique, est l'avantage le plus important qui est
accordé au locataire de locaux commerciaux.

Section 1. Conditions du droit au renouvellement

Conditions relatives au locataire. Ne peuvent bénéficier du droit au


renouvellement du bail que les locataires, leurs cessionnaires ou ayants-droit (héritier
par exemple).

Conditions relatives à l'exploitation effective du fonds. Pour bénéficier du


statut, il faut que le fonds de commerce soit exploité de façon effective pendant 2 ans
consécutifs quand le contrat de bail est rédigé par écrit, et quatre années lorsqu'il est
simplement verbal (art. 5 du dahir de 1955).

Section 2. Procédure de renouvellement

Si le bailleur (propriétaire) ne veut pas renouveler le bail. Il doit adresser un


congé (préavis) au moins six mois à l'avance et contenant éventuellement les motifs du
refus de renouvellement. Si le locataire veut obtenir le renouvellement, il doit en faire
la demande dans les 30 jours à compter de la réception du congé par acte d’huissier
ou lettre recommandée avec accusé de réception.

En l’absence de ce congé, le locataire qui veut obtenir le renouvellement doit


en faire la demande dans les mêmes formes soit dans les six mois qui précèdent
l’expiration du bail, soit le cas échéant à tout moment au cours de sa reconduction.
Dans les trois mois de la signification de la demande de renouvellement, le bailleur
doit faire connaître au demandeur s’il refuse le renouvellement dans les mêmes
formes. A défaut de réponse dans ce délai, il est réputé avoir accepté aux clauses et
conditions du bail antérieur.

Section 3. Refus de renouvellement du bail

Indemnité d'éviction. Le bailleur a toujours la faculté de refuser le


renouvellement du bail. Si le bailleur refuse le renouvellement du bail et n'oppose pas
de motif légitime de refus, le locataire n'en doit pas moins quitter les lieux; mais il
demandera au tribunal de condamner le bailleur à lui payer une indemnité d'éviction
représentant le préjudice que lui cause l'obligation de transférer son fonds dans
d'autres locaux. Cela veut dire que si le bailleur a des motifs légitimes pour ne pas
renouveler le bail, il ne sera pas condamné à payer l’indemnité d’éviction. Les motifs
légitimes admis sont : non paiement des loyers, les injures ou sévices du locataire à
l’encontre du propriétaire, le local doit être démoli comme étant insalubre suite à une
autorisation administrative (Le locataire a alors un droit de priorité si l'immeuble est
reconstruit), droit de reprise pour son habitation personnelle ou celle de ses proches
parents: ascendants, descendants,

Droit de repentir. Si le propriétaire trouve l'indemnité trop élevée, il a un "droit


de repentir" et peut accepter le renouvellement dans les quinze jours du jugement
définitif, mais à condition de payer tous les frais de l'instance. Le locataire ne doit pas
avoir déjà pris des mesures pour se réinstaller ailleurs. L'exercice de ce droit par le
propriétaire est irrévocable.

Titre 1. Les droits de propriété industrielle

Ce sont des biens de nature incorporelle qui procurent à leurs titulaires un


monopole d'exploitation ou d'utilisation. Il s'agit des marques, des brevets, des dessins
et modèles. Ces droits ont une valeur considérable car ils constituent le plus souvent la
véritable richesse d'une entreprise. Ces droits sont protégés par l’action en
contrefaçon. Un texte récent réglemente les différents aspects de ces droits (loi n°17.97
relative à la protection de la propriété industrielle, modifiée et complétée par la loi
n°31.05 du 14 février 2006).

Chapitre 1. Les marques


La marque de fabrique, de commerce ou de service est un signe susceptible de
représentation graphique servant à distinguer les produits ou services d'une personne
physique ou morale. Elle se distingue du nom commercial qui désigne l’entreprise et
de l’enseigne qui individualise l’établissement ou la boutique.

La marque est d’abord un signe distinctif. Il doit donc être apte à distinguer le produit
ou le service auquel il s'appuie par rapport à d'autres offerts sur le marché. Elle doit
être ensuite un signe disponible. Elle ne doit pas porter atteinte à des droits antérieurs.
Par exemple, elle ne doit porter atteinte à une marque antérieurement déposée, à une
dénomination ou raison sociale, à un nom commercial ou à une enseigne…Une
marque valide est enfin une marque licite. Le déposant d'une marque doit tenir
compte de quelques prohibitions (ordre public, bonnes mœurs, signes ou emblèmes
officiels des Etats : drapeau, des organisations internationales : anneaux olympiques,
etc.). Le signe de la marque ne doit pas être frauduleux de nature à tromper la
clientèle ou occasionner une confusion dans l’esprit du public.

La propriété de la marque s'acquiert par son enregistrement dans le registre national


des marques tenu par l’OMPIC. La demande d'enregistrement doit comporter
notamment le modèle de la marque et l'énumération des produits ou services auxquels
elle s'applique. L'enregistrement produit ses effets à compter de la date de dépôt de la
demande pour une période de dix ans indéfiniment renouvelable. En cas de non
renouvellement, la marque tombe dans le domaine public. La marque se perd par
déchéance. Encourt la déchéance de ses droits, le propriétaire de la marque qui, sans
justes motifs, n'en a pas fait un usage sérieux, pour les produits et services visés dans
l'enregistrement, pendant une période ininterrompue de cinq ans. La déchéance peut
être demandée en justice par toute personne intéressée.
Chapitre 2. Les brevets d’invention
Le brevet est un titre de propriété industrielle délivré par l'OMPIC (Office
marocain de la propriété industrielle et commerciale) après que l’inventeur dépose une
demande qui contient une description précise de l'invention, laquelle sera accessible à
tous. Pour être brevetable, l’invention doit être nouvelle, doit impliquer une activité
inventive et doit être susceptible d'application industrielle. Certaines inventions sont
non brevetables à cause de leur caractère abstrait ou pour des raisons éthiques.

En protégeant les inventions et en conférant à son titulaire un monopole


d'exploitation, le brevet permet à son titulaire de rentabiliser ses investissements. Il
constitue également une source de revenus pour le titulaire, lequel peut octroyer des
licences d’exploitation. Le brevet d’invention constitue un compromis entre les intérêts
de la société et ceux de l’auteur de la découverte : pour la société, il est important que
les innovations technologiques soient divulguées ; en contrepartie, la loi accorde à
celui qui accepte de révéler et de donner une description précise de son invention, une
récompense temporaire : exploiter l’invention (fabrication et commercialisation) à
titre exclusif pendant 20 ans.

L'exploitation du brevet est un droit mais également un devoir. Il s'agit d'éviter une
entrave au progrès économique. Pour cette raison, toute personne peut, à l'expiration
d'un délai de trois ans après la délivrance d'un brevet, ou de quatre ans à compter de
la date du dépôt de la demande, obtenir une licence obligatoire de brevet dans le cas
où il y a défaut d’exploitation par le titulaire. Cette licence ne peut pas avoir un
caractère exclusif.

Chapitre 3. Les dessins et modèles


Les dessins et modèles sont des créations protégées. Ils constituent l'art industriel. Un
dessin est un assemblage de lignes et / ou de couleurs sur une surface plane. Un
modèle est une forme plastique en relief. L'objet de la protection est l'apparence d'un
produit ou d'une partie d'un produit. La protection concerne tous les produits
industriels ou artisanaux, y compris les pièces destinées à être assemblées en produit
complexe.

Tout créateur d'un dessin ou modèle et ses ayants cause ont le droit exclusif
d'exploiter, vendre ou faire vendre ce dessin. Le dépôt ne joue pas le même rôle qu'en
matière de marques ou de brevets. Le premier déposant d'un dessin ou modèle est
simplement présumé jusqu'à preuve contraire, en être le créateur; mais le droit naît de
la création et non du dépôt. Le dépôt est donc déclaratif et non constitutif de droit.
Quatrième partie. Les sociétés commerciales
Titre 1. La constitution de la société

Chapitre 1. Les conditions de fond


Section 1. Les conditions du droit commun des contrats
§1. Le consentement
La société étant traditionnellement rattachée à la catégorie des contrats consensuels qui
se forment par le seul accord de volonté des parties, le consentement, expression de
cette volonté, demeure un élément essentiel de la naissance du groupement. Il doit
exister, être sincère et exempt de vices.
§2. Capacité
Celui qui exprime la volonté de s'associer, doit disposer de la capacité et de
l'intelligence nécessaires pour devenir associé. Ces aptitudes chez certaines personnes,
en particulier chez les aliénés, les mineurs et les personnes frappées d’une incapacité
commerciale (pour les associés commerçants).
§3. Objet social
L’objet de la société ou objet social est le type d'activité déterminé par le pacte social
et que la société envisage d'exercer, afin de réaliser les bénéfices ou l'économie
escomptés : prestations de services, négoce, fabrication et vente d'un produit. L'objet
social doit être déterminé dans les statuts par la description faite de la future activité
de la société. Sous réserve du respect de l'ordre public et des bonnes mœurs, les
associés disposent d'une grande liberté dans la détermination de l'objet statutaire. Ils
doivent toutefois observer certaines règles. D’abord, cet objet doit être suffisamment
explicite. Ensuite, il doit être possible. Enfin, il doit être licite, c'est-à-dire être
conforme aux lois, aux bonnes mœurs et à l'ordre public.
§4. La cause du contrat de société
La cause du contrat de société est la raison pour laquelle la société est constituée : celle
pour laquelle diverses personnes sont convenues de s'associer. Elle est souvent
confondue avec l'objet social, dans la mesure où la raison d'être de la société est la
réalisation de son objet. Mais ces deux notions doivent être bien distinguées du point
de vue juridique.
Cette distinction présente un intérêt pratique en matière d'annulation de la société. En
effet, l'objet social peut être tout à fait licite, alors que la cause ne le serait pas et
provoquerait la nullité de la société. La cause doit exister et doit être licite.

Section 2. Les conditions propres au contrat de société


§1. Les apports
L’apport c’est le bien ou la valeur qu’un associé affecte à la société en vue de la
constitution de son capital. Il existe plusieurs types d’apports :
 L’apport en espèces ou en numéraire (somme d’argent),
 L’apport en nature (tout bien autre qu’une somme d’argent) : ce sont les biens
corporels (meubles, immeubles) ou incorporels (fonds de commerce, propriétés
industrielles). Les apports en nature peuvent être réalisés en pleine propriété ou
en jouissance.
 L’apport en industrie (un travail, une activité intellectuelle ou un savoir faire).
Cet apport ne figure pas dans le capital social et est exclu donc dans les sociétés
de capitaux.
§2. Le partage aux bénéfices et la contribution aux pertes
D’une part, le but de la société doit être la recherche de profits. Ce but la distingue de
l’association et du syndicat. D’autre part, tous les associés doivent avoir vocation à se
partager les bénéfices ou éventuellement à supporter les pertes. La répartition des
bénéfices et des pertes se fait proportionnellement à l’apport de chacun. Cette règle
est d’ordre public (des exceptions légales sont admises en faveur de celui qui apporte
son industrie par exemple. Il peut avoir une part supérieure des bénéfices). La clause
qui donne à un associé des bénéfices plus que son apport est nulle et rend nul le
contrat alors que la clause qui l’affranchirait de toute contribution aux pertes serait
nulle elle-même sans effet sur le contrat (ce sont les clauses léonines).
§3. L’affection societatis
Cet élément désigne la volonté de collaborer à la conduite des affaires sociales en y
participant activement ou en contrôlant la gestion et l’acceptation d’aléas communs.
Cette collaboration est faite sur un pied d’égalité sans subordination entre associés.

Chapitre 2. Les conditions de forme et de publicité

Section 1. Les conditions de forme


La constitution d'une société suppose la rédaction de statuts qui représentent le pacte
social régissant les relations entre associés. Les statuts sont rédigés dans un acte écrit :
acte authentique ou sous seing privé. Cet acte doit contenir certaines mentions
obligatoires. Article 5 pour la SNC (identité des associés, objet de la société,
dénomination sociale, siège social, montant du capital social, la durée de la société…)
Section 2. Les conditions de publicité
Il faut déposer deux exemplaires des statuts au greffe du tribunal ou se trouve le siège
social dans un délai de 30 jours de la constitution de la société. Une inscription d’un
extrait des statuts est faite sur le registre du commerce. Cette immatriculation confère à
la société la personnalité juridique.
Dans le même délai, un extrait des statuts devra obligatoirement être publié dans un
journal habilité à recevoir des annonces légales et au Bulletin officiel. L'inobservation
des formalités de dépôt et de publication entraîne la nullité de la société.
Titre 2. La personnalité morale
Chapitre 1. La durée de la personnalité morale
Le contrat de société donne naissance à une personne juridique (personne morale),
c'est-à-dire qui a l'aptitude à être sujet de droits et d'obligations. La personnalité
morale existe à compter de l'immatriculation au registre du commerce. En l’absence de
l’immatriculation, la société en tant que personne morale n’existe pas et ne peut pas
exercer son activité. Les relations entre les associés est régies par le contrat de société et
les principes généraux du droit. Les personnes qui ont agi au nom d’une société en
formation avant qu’elle n’ait acquis la personnalité morale sont tenues solidairement
et indéfiniment des actes ainsi accomplis au nom de la société, à moins que la
première assemblée générale ordinaire ou extraordinaire de la société régulièrement
constituée et immatriculée ne reprenne les engagements nés desdits actes.
La personnalité morale disparaît à la dissolution de la société. Mais celle-ci garde sa
personnalité morale jusqu’à la clôture de la liquidation, c’est-à-dire, les opérations
postérieures à la dissolution ayant pour but de régler le passif. A l’égard des tiers, La
dissolution d'une société ne produit ses effets qu'à compter de la date à laquelle elle
est inscrite au registre du commerce.

Chapitre 2. Les attributs de la personnalité morale


Un nom : les sociétés ont une dénomination sociale qui doit figurer sur tous les
documents.
Un domicile : le siège social est le domicile de la société. Il s’agit du lieu de direction
effective de la société. Il joue un rôle important :
 Il détermine la loi applicable à la société ;
 C'est le lieu d'accomplissement des formalités (publicité, déclarations fiscales et
sociales) ;
 En cas de litige, il permet de déterminer le tribunal compétent ;
 Le transfert du siège nécessite une décision précise dans les conditions prévues
pour les modifications statutaires.
Une nationalité : la nationalité définit le statut juridique de la société et permet le
bénéfice des droits réservés aux nationaux (ex. : bail commercial). Elle marque la
soumission de la société à la loi d’un pays déterminé. Le critère retenu par le droit
marocain est celui du siège social.
Un patrimoine : Il est autonome, distinct de celui des associés. Par conséquent :
 Les créanciers d'un associé ne peuvent saisir les biens sociaux.
 Un dirigeant qui utiliserait des biens sociaux comme les siens serait coupable
d'abus de biens sociaux.
 Aucune compensation n’est possible entre une créance de la société contre un
tiers et une créance de ce dernier contre un associé et vice versa.
Une capacité juridique : La société a une vie juridique propre : elle a la capacité
juridique, dans la limite de son objet social, elle peut :

 passer des contrats ;

 ester en justice, par l'intermédiaire de ses représentants ;

 Sa responsabilité civile et pénale peut être mise en jeu ; elle est autonome et
distincte de celle des associés et dirigeants.

 La durée de la vie de la société est au maximum de 99 ans, mais cette durée est
prorogeable.

Chapitre 3. Les sociétés sans personnalité morale

Société en participation : elle n’existe qu’entre associés et n’est pas révélée aux tiers.

Société de fait ou devenue de fait : c’est une société qui a été constituée et
immatriculée mais qui a été ensuite annulée pour vice de constitution. Elle survivra
comme société de fait pour procéder à sa liquidation.

Société créée de fait : Les associés n'ont accompli aucune formalité, mais les autres
éléments du contrat de société existent (apports, participation aux bénéfices ou aux
pertes...). Autrement dit, les concernés ont agi comme de véritables associés sans pour
autant effectuer les démarches nécessaires à la constitution de la société. La société
créée de fait est soumise au même régime juridique que la société en participation.

Titre 3. La dissolution
La dissolution peut avoir plusieurs origines :
Statutaire : d’une part, par l’arrivée du terme fixé par les statuts. La durée d'une société
ne peut dépasser 99 ans ; il peut y avoir prorogation par vote de l'AGE. D’autre part,
par la réalisation de l'objet social ou extinction de l'objet social.
Légale : Si toutes les parts sont réunies dans une seule main, l'associé unique a un an
pour régulariser. Pour les SARL et les SA si, du fait de pertes, les capitaux propres sont
inférieurs à la moitié du capital social, les associés peuvent décider de régulariser et de
continuer.
Volontaire : Par la volonté commune des associés (dissolution anticipée).
Judiciaire : d’abord, pour justes motifs ; à la demande d'un associé au moins, se
prévalant d'un intérêt légitime (ex. : mésentente entre associés entraînant la paralysie
de la société). Ensuite, comme conséquence de l'annulation de la société (cas rare).
Enfin, à la suite d'un jugement de liquidation judiciaire.
La dissolution doit toujours être publiée au registre du commerce, c'est à partir de
cette publicité qu'elle produit effet à l'égard des tiers. La dissolution est suivie d'une
liquidation (règlement du passif) et d'un partage (distribution de l’actif net pouvant
rester disponible après apurement du passif).

Titre 4. La typologie des sociétés commerciales


Les sociétés commerciales sont classifiées selon deux critères :
 L’étendue de la responsabilité des associés : on distingue les sociétés qui
comportent une responsabilité indéfinie des associés (exemple : SNC) et les
sociétés à responsabilité limitée dont les associés sont engagés
proportionnellement à leurs apports (exemple : SARL, SA).
 L’intérêt attaché à la personne des coassociés : selon le degré que l’on
attache à la qualité des personnes avec qui on s’associe, on distingue : d’une
part, les sociétés de personnes dans lesquelles chaque associé est réputé
n’avoir consenti qu’en considération de la personne de ses coassociés (SNC,
la société en participation et société en commandite simple). D’où il résulte
que la part sociale de chacun d’eux n’est transmissible qu’avec le
consentement des coassociés. D’autre part, les sociétés de capitaux dans
lesquelles la personnalité des associés est indifférente, seuls étant pris en
considération les capitaux apportés. D’où il résulte que les parts de chacun
des associés appelées actions sont négociables et librement transmissibles (SA
et société en commandite par action). Toutefois, on distingue un troisième
type : la société mixte (SARL)

Chapitre 1. Les sociétés de personnes


Section 1. La société en nom collectif
§1. Constitution
Associés : Deux au minimum, personnes physiques ou morales, ils ont la qualité de
commerçant.
Responsabilité : Les associés répondent indéfiniment et solidairement des dettes
sociales.
Le capital social : la loi ne prévoit aucun montant minimum pour le capital social.
Les parts sociales sont nominatives. Aussi, elles ne peuvent être cédées qu’avec le
consentement de tous les associés.
La dénomination sociale qui peut comprendre le nom d’un ou plusieurs associés doit
être précédée ou suivie de la mention «société en nom collectif ».
Les statuts doivent indiquer, à peine de nullité, les renseignements suivants, les mêmes
que pour la SARL : nom, prénom, domicile, forme et siège des personnes morales (si
elles sont associés), précision de la forme de SNC, objet social, dénomination sociale,
siège social, capital social, apport des associés, évaluation des apports en nature (s’ils
existent), répartition des parts, durée de la SNC, nom, prénom des associés ou des tiers
devant gérer la SNC, le greffe du tribunal où les statuts seront déposés et la signature
de tous les associés.
Les actes, lettres, annonces et autres documents doivent comporter outre le nom de la
SNC, son capital, son siège et son registre de commerce (outre l’identifiant fiscal
imposé par la loi fiscale et le numéro de la CNSS imposé par ladite Caisse).

§2. Fonctionnement
A. Les gérants
Désignation : En principe, tous les associés sont gérants. Mais, les associés peuvent
désigner un ou plusieurs gérants, associés ou non. Le gérant peut être statutaire désigné
dans le statut ou non statutaire désigné par un acte distinct et en principe à
l’unanimité.
Responsabilité : Vis-à-vis des associés, les pouvoirs du gérant peuvent être limités par
les statuts. Les actes interdits au gérant seul doivent être autorisés par l’assemblée des
associés, à l’unanimité, sauf clause contraire des statuts. Vis-à-vis des tiers, le gérant
engage la société pour tous ces actes faits dans le cadre de l’objet social. Par
conséquent, les clauses statutaires limitatives des pouvoirs du gérant sont inopposables
aux tiers contractants de la société. Les gérants sont responsables individuellement ou
solidairement vis-à-vis des associés des actes accomplis contrairement à la loi ou aux
statuts de la SNC.
Révocation : Le gérant non associé peut être révoqué soit dans les conditions fixées
par les statuts ou, à défaut, par une décision des associés prise à la majorité. Dans tous
les cas, la révocation décidée sans juste motif peut donner lieu à des dommages et
intérêts. Si tous les associés sont gérants ou si un ou plusieurs gérants associés sont
désignés dans les statuts, la révocation de l’un d’eux ne peut être décidée qu’à
l’unanimité des autres associés. Cette révocation entraîne, sauf stipulation ou décision
contraire, la dissolution de la SNC. Si un ou plusieurs associés sont gérants et ne sont
pas désignés dans les statuts, chacun d’eux peut être révoqué soit dans les conditions
fixées par les statuts ou, à défaut, par une décision des autres associés, gérants ou non,
prise à l’unanimité.
B. L’assemblée générale des associés
Les associés se réunissent en assemblée au moins une fois par an. Les décisions sont
prises à l’unanimité, sauf clause contraire des statuts (qui sont fréquentes). L’assemblée
autorise les actes que le gérant ne peut faire seul ou ceux qu’il souhaite lui soumettre.
Elle délibère et statue sur les comptes de l’exercice, et affecte le résultat.
Comme pour la SARL Les gérants doivent présenter à l’approbation de l’assemblée
générale des associés dans les six mois suivant la clôture de l’exercice comptable (soit
au plus le 30 juin) le rapport de gestion, l’inventaire et les états de synthèse. Ces
documents en plus des projets des résolutions et du rapport du commissaire aux
comptes, s’il en existe un, doivent être adressés aux associés 15 jours avant la réunion
de la dite assemblée.
Les associés non gérants ont le droit, deux fois par an : De prendre connaissance au
siège des livres, de l’inventaire, des états de synthèses, du rapport de gestion, le cas
échéant du rapport du CAC, des P.V des AG, avec éventuellement l’aide d’un
conseiller. De poser par écrit des questions auxquelles il doit être répondu par écrit.
C. Le contrôle de la SNC par le commissaire aux comptes
La nomination d’un ou des commissaires aux comptes n'est pas obligatoire pour la
SNC sauf dans les sociétés dont le chiffre d'affaire à la clôture de l'exercice social,
dépasse le montant de cinquante (50) millions de dirhams hors taxe. Si ce seuil n’est
pas atteint, la nomination d’un CAC peut être demandée par un associé au président
du tribunal statuant en référé.
La nomination est faite par les associés à la majorité simple (50%+1).
Toutes les dispositions de la loi 17-95 sur le CAC relatives à la SA sont valables pour la
SNC en cas de nomination d’un CAC notamment en ce qui concerne les
incompatibilités, les pouvoirs, les obligations, les responsabilités, les récusations, les
révocations et rémunérations.

§3. Dissolution
La SNC est dissoute en principe par le décès de l’un des associés. Cependant, les statuts
peuvent toujours stipuler la continuation de la SNC sans ou avec les héritiers de
l’associé décédé. Si certains héritiers sont encore mineurs non émancipés, la SNC à un
délai d’une année pour se transformer en une société en commandite simple dans
laquelle les mineurs vont devenir commanditaires. A défaut, la SNC est dissoute.
En cas de liquidation judicaire, d’une mesure d’interdiction d’exercer ou d’une mesure
d’incapacité, prononcées à l’égard d’un associé, la SNC est dissoute à moins que sa
continuation ne soit prévue dans les statuts ou que les autres associés ne décident sa
continuation à l’unanimité. En cas de continuation, l’associé concerné doit quitter la
société moyennant un juste dédommagement évalué par un expert désigné par le
président du tribunal statuant en référé.
La société est dissoute également en cas de révocation d’un gérant associé statutaire. La
continuation est possible en cas d’une clause contraire des statuts ou une décision
unanime des autres associés au moment de la révocation.
Section 2. La société en participation
C’est une société qui n’existe que dans les rapports entre associés. C’est donc une
société qui ne se révèle pas aux tiers. De ce fait, elle n’a pas de personnalité morale.
Aussi, elle n’est soumise ni à l’immatriculation au Registre de commerce ni à aucune
formalité de publicité.
Cependant, en cas de litige, son existence peut être prouvée par tous les moyens. Elle
peut être crée de fait.
§1. Caractéristiques
Société occulte : elle n’est soumise à aucune formalité de publicité.
Société sans personnalité juridique : elle n’a pas un patrimoine propre.
Société dont l’intuitu personae est fort
§2. Fonctionnement
Les associés conviennent librement de l’objet social et de leurs droits et de leurs
obligations.
Chaque associé est propriétaire de ses apports. Les associés peuvent transférer la
propriété au gérant ou lui conférer la jouissance seulement. Ils peuvent créer une
indivision totale ou partielle. Auquel cas, les biens acquis en employant les deniers
indivis durant la durée de la société sont réputés également indivis.
Les associés choisissent un gérant parmi eux ou parmi les tiers. A défaut, tous les
participants ont la qualité de gérant.
A l’égard des tiers, chaque associé contracte en son nom personnel même s’il révèle le
nom des autres associés. Le gérant traite en son nom personnel et non en celui de
toute la société. Par conséquent, il est seul engagé vis-à-vis des tiers sauf dans deux
cas : si le gérant muni d’un mandat régulier a révélé ses coassociés ; si les participants
se sont révélés eux-mêmes et apparaissent clairement comme des coassociés. Dans ces
cas, les participants sont tenus à l’égard des tiers comme des associés en nom collectif.
Entre participants, chaque associé est tenu indéfiniment à l’égard du gérant et si l’objet
de la société est commercial leur responsabilité est de plein droit solidaire.
Si la société a été créée à durée indéterminée, sa dissolution peut avoir lieu à tout
moment avec une notification de l’un des associés aux autres associés. La dissolution
entraîne le partage des biens indivis.
Section 3. La société en commandite simple
La société en commandite simple est variante de la SNC. Elle est soumise aux mêmes
règles prévues pour les SNC sous réserve de certaines règles spécifiques. Les exceptions
tendent généralement à protéger les tiers qui ne doivent pas souffrir de la dualité de
statut des associés. Elle est régie par les articles 20 à 30 de la loi 5/96 modifiée par la
loi 82/99 et 21/05. Elle est rare dans la pratique. Souvent il s’agit d’une SNC
transformée au décès d’un associé afin de doter les mineurs du statut de
commanditaires puisqu’ils ne peuvent pas être commerçants.
§1. La constitution
C’est une société de personnes, commerciale par la forme. Elle est constituée d’associés
commandités ayant la qualité de commerçants et d’associés commanditaires n’ayant
pas cette qualité. C’est une collaboration entre des entrepreneurs (les commandités) et
des investisseurs (les commanditaires). Cependant, ces derniers ne sont pas actionnaires
à la différence des commanditaires dans la SCA.
Les premiers ont le statut des associés en nom collectif : sont tenus personnellement et
acquièrent la qualité de commerçants. Les seconds répondent des dettes sociales
seulement à concurrence du montant de leurs apports. Cela explique la position
prééminente des commandités par rapport aux commanditaires.
Publicité : les mêmes règles que la SNC.
Part sociales : Les parts sociales ne peuvent être représentées par des titres négociables.
Les deux catégories des associés sont choisies en considération de leurs qualités
personnelles. Par conséquent, la cession des parts sociales n’est possible qu’avec le
consentement unanime des autres associés. Mais les statuts peuvent déroger à cette
règle. Ces derniers peuvent autoriser la libre cession des parts de commanditaire à un
associé ; ils peuvent autoriser la cession des parts des associés commanditaires à des
tiers mais avec le consentement de tous les commandités et de la majorité en nombre
et en capital des commanditaires ; ils peuvent autoriser un associé commandité de
céder une partie de ses parts1 à un commanditaire ou un tiers avec le consentement de
tous les commandités et de la majorité en nombre et en capital des commanditaires. Il
semble que la cession de la totalité des parts d’un commandité à un commanditaire ou
un tiers et la cession à un autre commandité en totalité ou en partie nécessite le
consentement de tous les associés commandités et commanditaires. Le commandité qui
cède ses partes reste tenu du passif existant au jour de la cession.
La société en commandite simple est désignée par une dénomination sociale à laquelle
peut être incorporé le nom d’un ou plusieurs associés commandités et qui doit être
précédée ou suivie immédiatement de la mention « Société en commandite simple ».
Capital social : parce que les commandités sont responsables solidairement et
indéfiniment, il n’est pas exigé un capital minimum.
Les apports : les commandités peuvent faire tout type d’apport alors que les
commanditaires ne peuvent faire que des apports en numéraire ou des apports en
nature ; l’apport en industrie leur sont interdit.
§2. Le fonctionnement
La gestion de la SCS : La gestion est assurée conjointement par les commandités ou par
un gérant qui peut être un associé ou un tiers. L’associé commanditaire ne peut faire
aucun acte de gestion engageant la société envers les tiers même s’il a un mandat. S’il
viole cette règle, il sera tenu solidairement avec les associés commandités des dettes
nées de cet acte prohibé. Mais, cette interdiction ne concerne que la gestion externe
vis-à-vis des tiers. La gestion interne est autorisée aux commanditaires (donner des avis
et des conseils, délibérer et voter dans les assemblées par exemple).
Les pouvoirs des associés : la réunion d’une assemblée est obligatoire si elle est
demandée par un commandité ou par le quart en nombre et en capital des
commanditaires. Les décisions ordinaires résultant de l’assemblée générale ordinaire
sont prises dans les conditions fixées par les statuts. En revanche, les décisions
extraordinaires modificatives des statuts sont prises par l’assemblée générale
extraordinaire avec le consentement de tous les commandités et la majorité en
nombre et en capital des commanditaires. Les clauses édictant des conditions plus
strictes de majorité sont réputées non écrites.

1
Autrement, il y aura un associé commandité en moins.
Fiscalité : les commandités sont soumis à l’impôt sur le revenu et les commanditaires à
l’impôt sur les sociétés. Ces derniers sont imposés deux fois : l’impôt sur les sociétés et
les dividendes distribués sont imposés également.
La fin de la SCS : La société prend fin par les causes communes à toutes les sociétés. Elle
prend fin aussi par des événements touchant les commandités :
 Le décès d’un commandité : Le décès d’un commandité met fin en principe à la
SCS. Cependant, s'il est stipulé que malgré le décès de l'un des commandités, la
société continue avec ses héritiers, ceux-ci deviennent commanditaires lorsqu'ils
sont mineurs non émancipés. Si l'associé décédé était le seul commandité et si
ses héritiers sont tous mineurs non émancipés, il doit être procédé à son
remplacement par un nouvel associé commandité ou à la transformation de la
société en SARL ou SA, dans le délai d'un an à compter du décès. A défaut, la
société est dissoute de plein droit à l'expiration de ce délai. Par ailleurs, la
société continue malgré le décès d’un commanditaire.
 Autres événements : En principe, la société est dissoute en cas de redressement
ou de liquidation d’un associé commandité, d’incapacité ou d’interdiction
d’exercer le commerce frappant ce dernier. Cependant, les statuts ou la
majorité des associés (majorité requise pour la modification des statuts) peuvent
décider le contraire.

Chapitre 2. Les sociétés par actions

Section 1. La société anonyme

La société anonyme est régie par le dahir n°1-96-124 du 30 août 1996.


La société anonyme présente plusieurs particularités :

 C’est une société à risque limité, les actionnaires ne supportent les pertes
sociales qu’à concurrence de leur mise ;
 C’est une société de capitaux, le capital apporté compte plus que la personne
de celui qui l’apporte, la SA n’est pas conclue intuitu personae, l’actionnaire
s’efface derrière l’action ;
 C’est une société hiérarchisée, chaque organe dispose de pouvoirs propres ;
 C’est une société commerciale par la forme, la nature de l’activité (même civile)
est sans influence sur la qualification commerciale de la société ;
 C’est une société par actions, elle émet des valeurs mobilières.

§ 1. Les conditions de constitution

 Le nombre d’actionnaires ne doit pas être inférieur à cinq (art.1er).


 La SA se forme pour 99 ans au plus (art.1er),
 La SA se forme par l’accomplissement des actes suivants : la signature des statuts
par tous les actionnaires, la libération de chaque action de numéraire d’au
moins le quart de sa valeur nominale, le transfert des apports en nature, la
publication d’un avis descriptif dans un journal d’annonces légales et le dépôt
au greffe de pièces constitutives.
 La SA n’acquiert la personnalité juridique qu’à compter de son immatriculation
au registre du commerce (art.17), la publicité de la constitution de la SA est faite
dans les 30 jours au Bulletin Officiel et dans un journal d’annonces légales.
 Le capital social d’une SA ne peut être inférieur à trois millions de dirhams si la
société fait publiquement appel à l’épargne et à trois cent mille dirhams dans le
cas contraire (art.6).

§ 2. La gestion sociale de la SA

A. Les organes de gestion

1. La société à conseil d’administration

Composition

Le conseil d’administration est composé de trois à douze membres nommés par les
statuts nommés par les statuts ou par l’assemblée ordinaires.

L’administrateur qui peut être une personne morale ou un salarié de la société doit
être propriétaire d’un nombre statutaire d’actions de garanties nominatives et
inaliénables (art.44).

Le conseil d’administration désigne en son sein un président, personne physique qui


assure la direction générale et la représentation de la société avec le titre de président
directeur général (art.63 et 67). Le conseil d’administration nomme sur proposition du
président un secrétaire du conseil chargé de l’organisation des réunions sous l’autorité
du président et de la rédaction et de la consignation des procès-verbaux. Le secrétaire
peut être un salarié de la société ou un homme de l’art choisi en dehors de la société à
l’exception des commissaires aux comptes (art.64).

Pouvoirs

Le conseil d’administration détermine les orientations de l’activité de la société et


veille à leur mise en œuvre.

Il peut se saisir de toute question intéressant la bonne marche de la société et règle par
ses délibérations les affaires qui la concernent.

Il procède aux contrôles et vérifications qu’il juge opportuns.

A l’égard des tiers, le conseil est investi des pouvoirs les plus étendus pour agir en
toutes circonstances au nom de la société ; les limitations statutaires des pouvoirs du
conseil d’administration sont inopposables aux tiers, vis-à-vis d’eux, la société est
engagée même par les actes étrangers à l’objet social (art.69).

2. La société à directoire et à conseil de surveillance


Composition

Les statuts peuvent stipuler que toute société anonyme est régie par les dispositions du
dahir relatives à la société à directoire.

La société anonyme à directoire est dirigée par un directoire composé d’un nombre de
membres fixés par les statuts ne pouvant être supérieur à cinq (art.78). ces derniers
sont nommés par le conseil de surveillance qui confère à l’un d’eux la qualité de
président. Les membres du directoire doivent être des personnes physiques. Ils peuvent
être choisis en dehors des actionnaires et ils peuvent être des salariés de la société
(art.79).

Les membres du directoire sont révocables par l’assemblée générale ou par le conseil
de surveillance si les statuts le prévoient. La durée du mandat du directoire est
comprise entre 2 à 6 ans (art.81).

Dans cette configuration, le directoire est doublé d’un conseil de surveillance composé
comme le conseil d’administration (de 3 membres au moins et de 12 au plus). Les
membres du conseil de surveillance ne peuvent faire partie du directoire.

Le conseil de surveillance élit en son sein un président et un vice-président qui sont


chargés de convoquer le conseil et d’en diriger les débats.

Pouvoirs

Le directoire est investi des pouvoirs les plus étendus pour agir en toutes circonstances
au nom de la société. Il les exerce dans la limite de l’objet social. Comme pour le
conseil de surveillance, dans les rapports avec les tiers, la société est engagée même par
les actes du directoire qui ne relèvent pas de l’objet social. Les dispositions des statuts
limitant les pouvoirs du directoire ne sont pas opposables aux tiers.
Le conseil de surveillance exerce le contrôle permanent de la gestion de la société par
le directoire.

B. L’organe de contrôle : le commissaire aux comptes

L’institution du commissariat aux comptes correspond au souci de faire contrôler, par


des techniciens indépendants les documents comptables de l’entreprise. Les
commissaires aux comptes sont chargés d’une mission de contrôle et du suivi des
comptes sociaux. Dans une SA il doit être désigné au moins un commissaire aux
comptes. Toutefois, une SA faisant appel public à l’épargne est tenue de désigner au
moins deux commissaires aux comptes.
Le commissaire aux comptes doit nécessairement être inscrit au tableau d’ordre des
experts-comptables (art.160).

Le commissaire aux comptes a tout d’abord un devoir de contrôle : il a pour mission


permanente de vérifier, les valeurs et les livres, les documents comptables de la société
et de vérifier la conformité de sa comptabilité aux règles en vigueur. Il vérifie
également la sincérité et la concordance, avec les états de synthèse, des informations
données dans le rapport de gestion du conseil d’administration ou du directoire (art.
166).

Afin de mener à bien sa mission, le commissaire aux comptes opère toutes les
vérifications et les contrôles qu’il juge opportun et peut se faire communiquer sur
place toutes les pièces qu’il estime utiles (art. 167). Les commissaires aux comptes ne
sont pas autorisés à s’immiscer dans la gestion et leur mission doit demeurer celle d’un
contrôleur.

Les commissaires aux comptes ont ensuite un devoir d’information : ils doivent porter
à la connaissance du conseil d’administration ou du directoire et du conseil de
surveillance aussi souvent que nécessaire les contrôles et vérifications effectués, les
irrégularités, leurs conclusions ainsi que les faits leur apparaissant délictueux (art.169).

Ils doivent également rendre un rapport général dans lequel ils rendent compte à
l’assemblée générale de l’exécution de la mission qu’elle leur a confiée (art.172).

§3. La vie sociale de la SA

A. La réunion des associés en assemblée

Dans une SA, les associés participent au fonctionnement du groupe et à la vie sociale
grâce aux assemblées générales. Tout actionnaire a vocation à y participer, mais les
statuts peuvent subordonner la participation à une assemblée ordinaire à la détention
d’un nombre d’actions égal ou inférieur à 10 (art.127).

L’assemblée est présidée par le président du conseil d’administration ou de


surveillance. Elle est convoquée selon des règles strictes prévues dans les articles 122 à
126 sur un ordre du jour précis.

L’assemblée générale extraordinaire est seule habilitée à modifier les statuts mais non à
augmenter les engagements des actionnaires ni à changer la nationalité de la société.
Elle statue à la majorité des deux tiers des voix des actionnaires présents ou représentés
(art.110). Quant à l’assemblée ordinaire, elle prend toutes les autres décisions à la
majorité simple desdites voix (art.111). elle est réunie au moins une fois l’an, dans les
six mois de la clôture de l’exercice. Le conseil d’administration lui donne lecture de son
rapport de gestion et lui présente les états de synthèse annuels. En outre, les
commissaires aux comptes lui font rapport de leur mission et l’informent de leurs
conclusions (art.115).

B. L’émission de valeurs mobilières

Les valeurs mobilières sont les droits émis par les sociétés anonymes : ce sont les
actions et les obligations.

Les valeurs mobilières revêtent la forme nominative ou au porteur.


Il s’attache à l’action deux types de prérogatives : financières et fonctionnelles. Les
premières comportent une vocation aux bénéfices annuels distribués sous forme de
dividendes (art.331). Quant aux secondes, elles regroupent tous les droits reconnus
aux actionnaires dans le fonctionnement de la société (droit de vote, droit de
participer aux assemblées…).

Comme l’action, l’obligation est une valeur mobilière susceptible aussi de la forme
nominative. Elle traduit une assistance monétaire en forme de prêt au financement de
l’activité sociale en n’investit son titulaire que d’une double créance, d’une part en
remboursement de son dépôt à terme, d’autre part en rémunération des avoirs ainsi
immobilisés. Il en résulte que l’obligataire à terme ne peut prétendre à aucune des
prérogatives financières ou fonctionnelles de l’actionnaire.

Section 2. La société en commandite par actions


La société en commandite par actions est désignée par une dénomination ou le nom
d’un ou de plusieurs associés commandités peut être incorporé et doit être précédé ou
suivi immédiatement de la mention « société en commandite ».
§1. Les catégories d’associés
La société en commandite par actions dont le capital est divisé en actions est
constituée entre deux catégories d’associés : des associés en nom à savoir les
commandités et des actionnaires à savoir les commanditaires.
 Les commandités : un ou plusieurs commandités ayant la qualité de
commerçants. Ils sont traités comme un associé en nom collectif. Ils
répondent indéfiniment et solidairement des dettes sociales. En contrepartie
de cette responsabilité étendue, ils sont rémunérés avant les commanditaires
(intérêt préciputaire). Les commandités ont un droit de veto à l’encontre de
toute décision de modification des statuts. Ils sont désignés dans les statuts.
Par conséquent, l’entrée d’un nouveau commandité exige une modification
des statuts approuvée par l’accord de l’assemblée des commanditaires et des
commandités.
 Les commanditaires qui ont la qualité d’actionnaires, c’est-à-dire, en
contrepartie de leurs apports, ils ne reçoivent pas des parts sociales mais des
actions. Ils ne supportent les pertes qu’à concurrence de leurs apports. Le
nombre des associés commanditaires ne peut être inférieur à trois : nombre
minimum pour le conseil de surveillance. Les commanditaires ont vocation à
recevoir des dividendes. Ils sont exclus de la gestion externe de la société. Ils
exercent leurs pouvoirs dans le cadre des assemblées générales : ils
participent aux décisions sociales, approuvent les comptes…
§2. La gérance
Les gérants sont désignés par les statuts. Ils peuvent être personnes physiques ou
morales. En cours de vie sociale, leur nomination se fait selon les règles statutaires
(liberté contractuelle). Si aucune clause n’est prévue, les gérants sont désignés par
l’assemblée générale ordinaire des actionnaires avec l’accord de tous les associés
commandités.
Le gérant n’est pas nécessairement commandité, il peut être un associé ou non.
Les gérants sont révocables par l’assemblée dans les conditions prévues par les statuts
et en justice à la demande de tout associé pour juste motif. Aucune clause ne peut
supprimer cette possibilité de révocation judiciaire.
Le gérant dispose des mêmes pouvoirs et des mêmes obligations que le DG d’une SA. Il
est investi de larges pouvoirs et engage la société même par des actes qui ne relèvent
pas de l’objet social à moins que la société prouve que le tiers savait que l’acte
dépassait cet objet ou qu’il ne pouvait l’ignorer compte tenu des circonstances. La
seule publication des statuts ne suffit pas à constituer cette preuve.
Les limitations statutaires de ses pouvoirs sont inopposables aux tiers. Au niveau fiscal,
il est soumis à l’IGR.
§3. Le contrôle de la gestion
Le conseil de surveillance : Les membres du conseil de surveillance sont nommés par
l’assemblée générale des actionnaires. Aucun associé commandité ne peut être membre
de ce conseil. Plus encore, les actionnaires ayant la qualité de commandités ne peuvent
participer à la désignation des membres de ce conseil. Le conseil de surveillance assume
le contrôle permanent de la gestion de la société. Il dispose, à cet effet, des mêmes
pouvoirs que les commissaires aux comptes. Il peut convoquer l’assemblée générale
des actionnaires. Les membres du conseil de surveillance n'encourent aucune
responsabilité, en raison des actes de la gestion et de leur résultat. Ils peuvent être
déclarés civilement responsables des délits commis par les gérants si, en ayant eu
connaissance, ils ne les ont pas révélés à l'assemblée générale des actionnaires. Ils sont
responsables des fautes personnelles commises dans l'exécution de leur mandat.
Le commissaire aux comptes : un ou plusieurs commissaires aux comptes sont désignés
par l’assemblée générale ordinaire.

§4. Transformation de la SCA

La SCA peut être transformé en SA ou SARL par une décision de l’assemblée générale
extraordinaire des actionnaires avec l’accord des 2/3 des associés commandités. Les
statuts peuvent prévoir un autre quorum.

Chapitre 3. La société mixte : la société à responsabilité limitée

La SARL est une société de type hybride. Elle emprunte ses principaux caractères tant à
la société de personnes qu’à la société des capitaux.

Section 1. La constitution de la SARL

§1. Les conditions

Les associés :
 Leur nombre peut varier entre 1 et 50 personnes. Au-delà de 50 personnes la
société doit se transformer en SA. (art. 47).
 Il n’est pas nécessaire que les associés aient la capacité d’accomplir des actes de
commerce puisqu’ils n’ont pas la qualité de commerçant dans une SARL.

Le capital social :
 La SARL doit être dotée d’un capital minimum de 10.000 dirhams (art.46).
 Les apports en industrie sont impossibles (art. 51).

Conditions de forme et de publicité sont celles communes aux sociétés.

§2. Les parts sociales

Les parts sociales attribuées aux associés d’une SARL en représentation et à concurrence
de leurs apports ne sont pas librement cessibles contrairement aux actions émises par
les sociétés de capitaux. La cession des parts est cependant permise sous des
conditions :

 Si la cession est au profit d’un associé : elle est libre, les statuts peuvent
néanmoins prévoir une clause d’agrément (art.60).
 Si la cession est au profit d’un tiers : elle n’est normalement pas libre. Elle doit
être autorisée par la majorité en nombre des associés, représentant au moins
trois quarts des parts sociales (art.58). Si les associés refusent d’agréer la cession
envisagée, ils sont tenus dans les 30 jours d’acquérir les parts dont la cession est
souhaitée par le cédant ; ou bien ils doivent trouver un autre cessionnaire qui
ait leur agrément (art.58).

Section 2. Le fonctionnement de la SARL

§1. La gérance

Statut. Il peut être désigné un ou plusieurs gérants soit parmi les associés soit parmi les
tiers. Ils doivent être impérativement des personnes physiques (art. 62). Le mandat du
gérant est de 3 ans sauf stipulation contraire dans les statuts (art. 62).

Pouvoirs. Dans les rapports entre associés, les pouvoirs du gérant sont déterminés par
les statuts ; dans le silence de ceux-ci, le gérant peut faire tout acte de gestion dans
l’intérêt de la société. Les statuts peuvent cependant subordonner certains actes à une
autorisation de l’ensemble des associés. Au cas de pluralité de gérants, les statuts
pourraient prévoir une répartition des tâches, des fonctions et des pouvoirs entre eux.
A l’égard des tiers, les pouvoirs des gérants sont plus importants. Par souci de
protection des tiers, les limitations des pouvoirs du gérant sont réputées inopposables
aux tiers.
Les gérants de la SARL engagent la société même par les actes qui excèderaient les
limites de l’objet social (art.63).
Responsabilité. Les gérants sont responsables, individuellement ou solidairement,
envers la société et les tiers, des infractions aux règles légales applicables aux SARL, des
violations des statuts et des fautes commises dans leur gestion (art.67).
Les associés peuvent poursuivre contre les gérants l’action personnelle en réparation
de leur préjudice individuel. Ils peuvent également poursuivre l’action sociale en
responsabilité pour la réparation du préjudice subi par la société à condition qu’ils
représentent au moins le quart du capital social (art.67).

§2. Les associés

Tous les associés sont appelés à intervenir dans la vie sociale. Outre les réunions en
assemblée, les statuts peuvent prévoir une consultation par correspondance (art.71).

Chaque associé a droit de participer aux décisions et dispose d’un nombre de voix égal
à celui des parts sociales qu’il possède.

Le pouvoir de décision des associés non gérants d’une SARL s’applique à la nomination
et à la révocation des gérants, à la modification des statuts.

Les associés sont admis à contrôler la gestion et les actes de leurs représentants.

Section 3. La dissolution de la SARL

Outre les causes de dissolution communes aux sociétés commerciales, certaines causes
concernent particulièrement la SARL. Elles sont au nombre de trois :

 L’augmentation du nombre des associés au-delà de 50. La loi impose dans ce


cas à la société un délai de deux ans pour régulariser sa situation en ramenant le
nombre des associés à 50 ou moins ou bien la transformation en SA. A défaut,
la SARL est dissoute (art. 47).
 La réduction du capital au dessous du capital minimum légal. La société dans ce
cas doit régulariser sa situation dans un délai d’un an; à défaut la loi permet à
tout intéressé de demander en justice la dissolution de la société (art.46).
 La perte des trois quarts du capital social : lorsque l’actif net social devient
inférieur au quart du capital social, les associés doivent décider de dissoudre ou
non la société. a défaut tout intéressé peut demander au tribunal la dissolution
sauf au tribunal à accorder un délai de régularisation de 6 mois (art.86).

La SARL n’est pas dissoute par la réunion de toutes ses parts en une seule main
(art.48), ni par la liquidation judiciaire, l’interdiction de gérer ou l’incapacité
prononcée à l’égard d’un associé (art.85).
Le décès d’un associé n’entraîne pas davantage la dissolution sauf clause contraire
(art.85).
Cinquième partie. Les difficultés des entreprises

L’entreprise peut confronter des difficultés durant sa vie. Le législateur a prévu des
procédures pour prévenir ces difficultés voire les traiter le cas échéant. Globalement
l’approche économique est préférée à une approche purement juridique. Cela a pour
conséquence par exemple que la volonté de sauver l’entreprise préférée à la
protection des intérêts des créanciers. Pendant ces procédures, le juge joue un rôle
actif. Et ses décisions sont exécutoires de plein droit, les voies de recours n’étant pas
suspensives. Mais les intéressés peuvent demander au juge le sursis à exécution.
Ces procédures s’appliquent aux commerçants personnes physiques ou morales
(activités commerciales art. 6 à 8 du C. Com). Les procédures s’appliquent aux sociétés
commerciales, aux GIE, les coopératives lorsque leur objet est commercial, Les règles
relatives au traitement des difficultés des entreprises sont toutes d’ordre public (CA.
Com. Casablanca 18 juillet 2003).

Titre 1. La prévention des difficultés


La phase de prévention se caractérise par une certaine confidentialité le but est de
multiplier les chances de sauvetage.
Les procédures de prévention restent peut applicables du fait que les chefs d’entreprise
ne se manifestent qu’après que la situation de l’entreprise soit critique par crainte de
perte du contrôle de l’entreprise et par crainte d’effet sur le crédit de cette dernière.

Chapitre 1. La prévention interne


L’alerte : le commissaire aux comptes (désignation obligatoire dans les SA, SCA et SARL
réalisant un chiffre d’affaires supérieur à 500 000 dirhams) ou tout associé doit
informer le chef de l’entreprise des difficultés dans les 8 jours de la découverte des faits
par lettre recommandée avec accusé de réception.
Procédure : le chef d’entreprise doit prendre les mesures nécessaires dans les 15 jours
suivant l’’alerte. S’il n’arrive pas à les prendre, il doit faire délibérer les organes
d’administration. A défaut de résultat, sur rapport du commissaire aux comptes, il doit
faire délibérer la prochaine assemblée d’actionnaires (porter le problème à l’ordre du
jour).

Chapitre 2. La prévention externe


En cas d’échec de la prévention interne (assemblée d’actionnaires n’a pas pu prendre
des mesures ou des mesures n’ayant pas eu d’effets positifs), le chef d’entreprise ou le
commissaire aux comptes doit saisir le président du tribunal de commerce.
Procédure : le président du tribunal déclenche la procédure après son saisine ou
d’office (s’il apprend que l’entreprise affronte des difficultés). Le juge a un pouvoir
large pour s’informer : il peut convoquer le chef d’entreprise, il peut obtenir des
informations du commissaire aux comptes, des administrations, des organismes publics,
du représentant du personnel…Si le juge estime qu’il faut un tiers pour apaiser les
oppositions entre les partenaires, il désigne d’office ou sur demande du chef de
l’entreprise un mandataire spécial (mission à accomplir dans un délai fixé par le juge).

Chapitre 3. Le règlement amiable


La procédure du règlement amiable est ouverte pour remédier à une difficulté
juridique ou financière mais l’entreprise ne doit pas être en cessation de paiements.
Procédure : le président du tribunal ouvre la procédure suite à la requête du chef
d’entreprise. Cette requête est un acte de gestion. Par conséquent, il ne nécessite pas la
délibération de l’assemblée d’actionnaires ou d’associés. Dès réception de la requête,
le juge convoque le chef de l’entreprise pour recueillir ses explications. Le juge peut
obtenir des informations de la part des établissements bancaires et financiers, il peut
désigner un expert pour établir un rapport sur la situation de l’entreprise et ses chances
de redressement. Si la situation est redressable, le juge ouvre le règlement amiable. Il
désigne alors un conciliateur (mission : favoriser le fonctionnement de l’entreprise et
rechercher la conclusion d’un accord avec ses créanciers (rapprocher les parties) ; à
accomplir dans un délai fixé par le juge : maximum 3 mois + un mois à la demande du
conciliateur). Le juge communique les renseignements nécessaires au conciliateur.
Suspension provisoire des poursuites : s’il l’estime nécessaire, le conciliateur peut
demander au juge de suspendre provisoirement les poursuites pour un terme
n’excédant pas sa mission. Suspension pouvant être imposée aux créanciers. Elle
interdit à ces derniers d’intenter toute action en justice pour les créances antérieures à
la décision de suspension et suspend toute voie d’exécution. Elle interdit au débiteur
de payer les dettes antérieures sauf dettes nées du contrat de travail, de faire des actes
de disposition étrangers à la gestion normale de l’entreprise. Toutefois, le chef de
l’entreprise et les créanciers peuvent demander au juge la levée de cette interdiction.
Issue de la conciliation : soit un échec, dans ce cas la procédure est orientée vers le
redressement ou la liquidation juridique selon la santé de l’entreprise. Soit un succès,
dans ce cas un accord est conclu entre l’entreprise et ses créanciers, cet accord est
homologué par le président du tribunal et déposé au greffe ; il est communiqué aux
parties signataires. Si l’accord est conclu avec une seule partie des créanciers, le juge
peut homologuer l’accord (selon appréciation du juge) et accorder à l’entreprise des
délais de paiement pour payer les créanciers non signataires. L’accord signé suspend
toute poursuite individuelle, les délais impartis à peine de déchéance. Si le chef
d’entreprise n’exécute pas l’accord, le président du tribunal prononce sa résolution et
la déchéance de tout délai de paiement accordé.

Titre 2. Le traitement des difficultés


Chapitre 1. L’ouverture du traitement
Section 1. Les conditions d’ouverture
Cessation des paiements : impossibilité pour commerçant de faire face au passif
exigible avec son actif disponible. Les dettes peuvent être civiles ou commerciales,
doivent être exigibles (échues), certaines (non contestées). La cessation des paiements
doit exister au moment où le juge prononce le jugement d’ouverture. Sa date est fixée
par ce dernier mais elle n’est pas définitive dans le sens où le syndic peut demander
une ou plusieurs fois au tribunal de la reporter. Dans tous les cas cependant, la date ne
peut être antérieure de plus de 18 mois à celle du jugement d’ouverture. Cette date est
importante notamment pour déterminer la période suspecte. Les juges sont rigoureux
sur l’appréciation de l’état de cessation des paiements pour éviter que le chef
d’entreprise n’utilise la procédure pour neutraliser les demandes d’exécution de
jugements ou pour obtenir les remises de dette ou leur échelonnement.
Qui peut demander l’ouverture : l’ouverture de la procédure peut être décidée :
 Sur demande du chef de l’entreprise au plus tard dans les 15 jours suivant la
cessation des paiements.
 Sur assignation d’un créancier quelle que soit la nature de sa créance et peu
importe que le non paiement ne concerne pas sa créance mais la créance d’un
autre créancier.
 Sur requête du ministère public
 D’office par le tribunal
Section 2. Le jugement d’ouverture
Prononcé et publicité du jugement : avant de prononcer le jugement, le juge entend le
chef d’entreprise, peut auditionner toute personne (secret professionnel paralysé) et
peut désigner un expert. Le juge statue dans les 15 jours de sa saisine. Il prononce soit
le redressement soit la liquidation et désigne le juge commissaire et le syndic. Le JO est
mentionné sans délai au registre de commerce. Dans les 8 jours du JO, un avis est
publié dans un journal d’annonces légales (Cet avis invite les créanciers à déclarer leurs
créances au syndic.) et BO et il est notifié au débiteur. Le JO est affiché par les soins du
greffier au panneau réservé cet effet au tribunal.
La période suspecte : cette période s’étend de la date des cessations des paiements
jusqu’au jugement d’ouverture augmentée d’une période antérieure pour certains
contrats. Elle fait peser un soupçon de fraude sur les actes accomplis, pendant sa durée,
par le débiteur, au point que ceux-ci doivent ou peuvent selon les cas être annulés.
Certains actes échappent à la nullité : paiement d’une lettre de change, d’un chèque
ou billet à ordre sauf si le bénéficiaire avait connaissance de la cessation des paiements,
preuve incombant au syndic. Les actes à titre gratuit sont nuls d’office. Seul le syndic
peut intenter une action en nullité.
Désignation des organes de la procédure : dans le jugement d’ouverture, il est
désigné :
 Le syndic il est chargé sous la surveillance du juge commissaire de mener les
opérations de redressement et de liquidation judiciaire à partir du JO jusqu’à la
clôture de la procédure. Il agit au nom et dans l’intérêt des créanciers. Souvent
ce sont des experts comptables.
 Le juge commissaire : juge nommé par le tribunal dès le JO avec mission
générale de veiller au déroulement rapide de celle-ci et à la protection des
intérêts en présence, il a pour attribution principales de procéder à la
vérification des créances, d’autoriser certains actes graves, de centraliser toutes
les informations sur la situation de l’entreprise, d’ordonner les opérations de la
liquidation judiciaire. Le juge commissaire désigne un à trois contrôleurs parmi
les créanciers. Ils assistent le juge commissaire et le syndic.
Effets communs du jugement d’ouverture (y a des effets spécifiques selon que le
jugement ait prononcé le redressement ou la liquidation) :
 Effets sur le patrimoine de l’entreprise : le syndic est tenu de demander au chef
de l’entreprise, ou s’il est habilité, de prendre des mesures conservatoires pour
conserver les droits de l’entreprise et préserver ses capacités de production.
Continuation des contrats en cours à l’exclusion peut être des contrats de
travail, lesquels pourraient être rompu par les salariés (cas particuliers : société
en commandite est dissoute, bail commercial).
 Effets sur les dirigeants : incessibilité des droits sociaux des dirigeants à compter
du JO.
 Effets sur les droits des créanciers : dès le jugement d’ouverture, il y a arrêt des
poursuites individuelles : les actions en paiement, actions en résolution pour
non paiement. Il y a également arrêt des voies d’exécution, suspension des
délais, les instances en cours sont suspendues jusqu’à ce que le créancier déclare
sa créance. Par ailleurs, il y a interdiction de payer les dettes antérieures au JO
(la date de l’origine ou le fait générateur de la créance), l’arrêt du cours des
intérêts, interdiction des nouvelles inscriptions (hypothèques, nantissements et
privilèges ne peuvent être inscrits). La priorité est donnée aux créances nées
après le JO.
 Effets sur les droits du bailleur : le bailleur n’a privilège que pour les deux
années de loyer précédant immédiatement le JO.
 Effets sur les droits des cautions : les cautions du débiteur bénéficient de la
suspension et de l’interdiction des poursuites. Les cautions ne peuvent se
prévaloir ni du plan de continuation, ni de l’arrêt du cours des intérêts. La
déchéance du terme leur est opposable.
 Effets sur les conjoints : le conjoint doit établir la consistance de ses biens
personnels. Le syndic en apportant la preuve de l’origine des biens, les rattache
à l’actif du débiteur.
 La revendication : Logiquement, pour faciliter le sauvetage de l’entreprise les
créanciers d’un bien se trouvant entre les mains du débiteur ne doivent pas
pouvoir revendiquer le bien pour ne pas démanteler l’entreprise. Mais le code
de commerce permet cela. La revendication d’un bien meuble doit être exercée
dans le délai de 3 mois suivant le JO.
Section 3. La détermination du passif
Les déclarations des créances : les créances peuvent être déclarées soit par le débiteur
hormis le cas où la procédure a été ouverte sur déclaration de la cessation des
paiements. Le débiteur remet au syndic la liste certifiée de ses créanciers et du montant
de ses dettes 8 jours au plus tard après le JO. Si la dette d’un créancier n’a pas été
déclarée, ce dernier doit y procéder à peine de forclusion. Soit par les créanciers
titulaires d’une dette antérieure au JO à l’exception des salariés. La déclaration est
faite au syndic sans formalisme imposé dans un délai de 2 mois à compter de la
publication du JO au BO.
La vérification des créances : elle est faite par le syndic en présence du chef
d’entreprise ou dûment appelé avec l’assistance des contrôleurs. Le tout sous le
contrôle du juge commissaire. La vérification permet de protéger l’entreprise contre les
dettes fictives qu’un créancier réclame ou que le chef d’entreprise admet afin de
détourner l’actif de l’entreprise. S’il y a contestation, celle-ci est tranchée par le juge
commissaire. En cas de cession ou de liquidation, la vérification est une simple faculté
pour le juge commissaire. Il décide selon l’état de l’actif et du passif. Par exemple, s’il
apparaît que l’actif sera absorbé par les créances privilégiées, le juge commissaire ne
procède pas à la vérification des créances chirographaires. Dans un délai de 6 mois à
compter du JO et après avoir sollicité les observations du chef de l’entreprise, le syndic
établit la liste des créances avec sa proposition d’admission ou de rejet ou encore de
renvoi devant le tribunal, laquelle est transmise au juge commissaire qui tranche. La
décision de ce dernier peut faire l’objet d’un recours.
La responsabilité de la banque dans l’aggravation de la situation financière de
l’entreprise : cette responsabilité peut être recherchée dans deux cas : soutien abusif
(facilités de caisse créant une fausse solvabilité de l’entreprise) et rupture abusive de
concours financier (rupture brutale sans préavis raisonnable sauf faute grave du
débiteur).

Chapitre 2. Les solutions possibles


Le syndic avec le concours du chef de l’entreprise et l’assistance éventuelle d’un ou
plusieurs experts doit dresser dans un rapport le bilan financier, économique et social
de l’entreprise. Au vu de ce bilan, il propose le redressement, la cession ou la
liquidation. Les tiers peuvent soumettre au syndic leurs offres de maintien de
l’entreprise. Celles-ci sont annexées au rapport du syndic qui en fait l’analyse. Le syndic
peut proposer une augmentation ou une reconstitution du capital. Il fait des
propositions de règlement de dettes. Le chef de l’entreprise, les contrôleurs et le
comité d’entreprise sont consultés à propos du rapport. Ce dernier doit être remis au
juge commissaire au plus tard 4 mois du JO.
Section 1. La continuation de l’entreprise
S’il y a des possibilités sérieuses de redressement et de règlement du passif, le tribunal
décide la continuation de l’entreprise. Il fixe sa durée, laquelle ne peut excéder 10 ans.
Le débiteur n’a pas la qualité pour exercer une voie de recours. Seul le syndic voire les
contrôleurs ont qualité. Le tribunal peut prendre les mesures nécessaires à la réussite du
plan : par exemple, le tribunal peut d’office ou sur demande du syndic subordonner
l’adoption du plan de redressement au remplacement d’un ou plusieurs dirigeants, il
peut prononcer l’incessibilité ou la cession des titres de capital ou de droits de vote
détenus par les dirigeants et peut désigner un mandataire pour exercer leur droit de
vote, il peut déclarer inaliénables certains biens, il ne peut agir que sur les délais en
rééchelonnant les dettes ou en octroyant un différé de paiement (ne peut imposer des
remises de dette). Le tribunal peut modifier le plan à la demande du chef de
l’entreprise ou le syndic. Si le plan est dûment exécuté, le tribunal prononce la clôture
de la procédure. Si l’entreprise n’exécute pas ses engagements, le tribunal peut d’office
ou à la demande d’un créancier résoudre le plan et décider la liquidation judiciaire.
Section 2. La cession de l’entreprise
La cession a pour but d’assurer le maintien d’activités susceptibles d’exploitation
autonome, de tout ou partie des emplois qui y sont attachés et d’apurer le passif. Les
biens non compris dans le plan de cession sont vendus et les droits et actions de
l’entreprise sont exercés par le syndic. En cas de cession totale des biens d’une société
commerciale, celle-ci est dissoute. Les offres sont adressées au syndic, lequel informe les
contrôleurs et les représentants du personnel. Le tribunal examine les offres et choisit
celle qui assure plus durablement l’emploi et le paiement des créanciers. Il faut
distinguer l’offre de redressement faite par le débiteur lui-même et les offre faites par
les tiers. La première est soumise au régime de la continuation et non pas au régime de
la cession.
Cession des contrats passés avec l’entreprise : le tribunal détermine les contrats
nécessaires au maintien de l’activité, lesquels seront cédés au cessionnaire.
Le syndic passe tous les actes nécessaires à la réalisation de la cession. Il peut sous sa
responsabilité confier au concessionnaire la gestion de l’entreprise cédée. La mission du
syndic prend fin avec le jugement de clôture (paiement du prix de la cession et
répartition entre les créanciers).
Inaliénabilité des actifs de l’entreprise cédée : tant que le prix de la cession n’est pas
payé, le cessionnaire ne peut, à l’exception des stocks, aliéner, donner en garantie ou
en location gérance les biens corporels ou incorporels qu’il a acquis. Le tribunal peut
assortir la cession d’une clause d’inaliénabilité de tout ou une partie des biens cédés.
Le non respect du plan par le cessionnaire : à l’issue de chaque exercice, le cessionnaire
rend compte au syndic de l’exécution des dispositions du plan. Si le cessionnaire
n’exécute pas ses engagements, le plan peut être résolu d’office, à la demande du
syndic ou d’un créancier. Les biens sont alors réalisés dans les formes de la liquidation
judiciaire et leur prix affecté au paiement des créanciers admis.
Droit de suite des créanciers : les créanciers ne peuvent exercer leur droit de suite
qu’en cas d’aliénation du bien cédé par le cessionnaire. Le cessionnaire informe le
syndic de toute aliénation, ce dernier averti alors les créanciers.
Section 3. La liquidation de l’entreprise
Conditions d’ouverture : la situation de l’entreprise est irrémédiablement comprise.
Effets sur le débiteur : dessaisissement du débiteur de l’administration et de la
disposition de ses biens. Le syndic exerce ses droits et ses actions et assure la gestion.
Continuation exceptionnelle de l’activité de l’entreprise pendant la période de
liquidation judiciaire si l’intérêt général ou l’intérêt des créanciers le nécessite sans
réaliser des investissements nouveaux (art. 573 et 575 sont applicables).
Réalisation de l’actif immobilier : la vente des immeubles est réalisée selon les règles de
la saisie immobilière. S’il apparait au juge commissaire qu’une cession amiable est plus
avantageuse, il peut autoriser la vente par adjudication amiable soit de gré à gré.
Après réalisation de l’actif, le syndic répartit le produit et règle l’ordre entre les
créanciers.
Réalisation des autres actifs : le juge commissaire ordonne la vente aux enchères
publiques ou de gré à gré. Il doit entendre le chef de l’entreprise et les contrôleurs.
Le règlement des créanciers.
Prononcé de la clôture : le tribunal peut prononcer même d’office la clôture de la
liquidation judiciaire lorsqu’il n’existe plus de passif exigible, lorsque le syndic dispose
de sommes suffisantes pour désintéresser les créanciers ou lorsque la poursuite des
opérations de liquidation judiciaire est rendue impossible en raison de l’insuffisance de
l’actif. Le syndic procède alors à la reddition des comptes.

Chapitre 3. La sanction des dirigeants


Section 1. Les sanctions civiles
Les sanctions patrimoniales : L’action en comblement du passif (lors de toutes les
procédures) n’est possible que si trois conditions sont réunies : faute de gestion du
dirigeant, insuffisance d’actif, lien de causalité. Cette action fait supporter au dirigeant
fautif une partie ou la totalité des dettes de la personne morale. Cette action n’est pas
cumulable avec l’action en responsabilité civile. L’action en extension du redressement
ou de la liquidation judiciaire : par exemple (liste art. 706), si le dirigeant a disposé
des biens de la société comme des siens propres, si sous couvert de la société il a fait
des actes de commerce dans un intérêt personnel, s’il a fait des biens ou du crédit de la
société un usage contraire à l’intérêt de celle-ci.
La déchéance commerciale : interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler
directement ou indirectement toute entreprise commerciale. Elle frappe les personnes
physiques. Elle emporte également l’incapacité d’exercer une fonction publique
élective. Cette dernière incapacité frappe toute personne à l’égard de laquelle a été
prononcée une liquidation judiciaire (5 ans). Pour la liste des faits, art. 712
(commerçants personnes physiques) et art. 713 et 715 (dirigeants des sociétés
commerciales), art. 714 (dirigeants des entreprises). Le droit de vote des dirigeants
déchus est exercé par un mandataire spécial désigné par le tribunal. Ce dernier peut
leur enjoindre de céder leurs actions ou parts. Le jugement de clôture pour extinction
du passif rétablit le chef d’entreprise ou les dirigeants de la société dans tous leurs
droits.
Section 2. Les sanctions pénales
Domaine : La banqueroute peut frapper le dirigeant, le syndic, le créancier et les tiers.
L’article 721 énumère les faits du dirigeant susceptibles de banqueroute. Par exemple :
détournement ou dissimulation de tout ou une partie de l’actif, augmentation
frauduleuse du passif, comptabilité fictive. La banqueroute est passible de un à cinq ans
et de 10 000 à 100 000 Dh d’amende. Elle emporte la déchéance commerciale.
Quand la société est cotée en bourse, les peines sont doublées. L’article 724 énumère
les faits du syndic susceptibles de banqueroute : porter sciemment atteinte aux intérêts
des créanciers, abuser de ses pouvoirs pour acquérir pour son compte des biens du
débiteur, usage illégal de ses pouvoirs et contraire aux intérêts des créanciers. Le
créancier qui a conclu des contrats après le JO lui accordant des avantages particuliers
au détriment des autres créanciers selon l’article 724. Les tiers ayant dans l’intérêt des
dirigeants soustrait, décelé ou dissimulé une partie des biens de l’entreprise ou ayant
frauduleusement déclaré des créances fictives sont punis de banqueroute.
Procédure : la juridiction répressive est saisie sur la poursuite du ministère public ou sur
constitution de partie civile du syndic. Le juge ne peut prononcer la sanction que si
une procédure de redressement ou de liquidation est préalablement ouverte par le
tribunal de commerce à l’encontre de l’entreprise.

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