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Ohadata D-09-37

REGARDS CROISES SUR LA DISTINCTION « DROIT CIVIL - DROIT


COMMERCIAL » A L’EPREUVE DE L’OHADA1

Justine DIFFO TCHUNKAM, Docteur en Droit,


Chargée de Cours - Faculté des Sciences Juridiques et Politiques
Université de Yaoundé II – CAMEROUN

RESUME

L’avènement du droit uniforme OHADA a profondément transformé la configuration


du droit privé africain. Dans ce contexte, si la distinction entre le droit civil et le droit
commercial a longtemps été considérée comme essentielle et consacrée par la doctrine
civiliste notamment, tel ne serait plus le cas de nos jours. Au rythme de l’évolution des
activités économiques, le législateur communautaire entend promouvoir des règles adaptées
aux besoins économiques des Etats. Le souci d’une plus grande efficacité et d’une plus
grande sécurité économique débouche sur une relative fusion de certains domaines du droit
privé, mettant à mal les distinctions classiques. L’érosion des bases séparatrices du droit civil
et du droit commercial coïncide avec le renouvellement de notions plutôt fédératrices des
deux disciplines. Cette démarche pragmatique du législateur OHADA suscite néanmoins des
interrogations auxquelles il est urgent de répondre. On se demande s’il n’est pas allé loin
dans cette entreprise d’unification des solutions du droit africain des affaires. A l’évidence,
bien que la plasticité et la transversalité de certaines matières commandent tantôt l’unicité
des sources, tantôt la simplification des procédures aux fins d’efficacité juridique et de
sécurité économique, la prudence dans l’art de légiférer voudrait que l’on évite les excès et
les dérives congénitales aux initiatives de reforme et de codification du droit. En outre, la
distinction du droit civil et du droit commercial paraît difficilement conciliable avec les
orientations de politique législative de l’OHADA.

La valeur de ces constatations ne doit cependant pas être exagérée ; elles peuvent
n’être qu’un leurre dissimulant la réalité selon laquelle la distinction du droit civil et du droit

1 - Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires.


1
commercial ne serait plus qu’un spectre dont il conviendrait de se débarrasser, ou une
survivance idéologique dont le droit des affaires, droit économique par essence permettrait
de mesurer l’ampleur de l’isolement.

2
SOMMAIRE

INTRODUCTION

I – LE DECLOISONNEMENT PROGRESSIF DES FRONTIERES ENTRE LE DROIT


CIVIL ET LE DROIT COMMERCIAL

A- L’INCURSION DU DROIT COMMERCIAL DANS LA SPHERE DU DROIT CIVIL

B- L’INFLUENCE DES TECHNIQUES DU DROIT CIVIL SUR CERTAINES


INSTITUTIONS DU DROIT COMMERCIAL

II – LA FUSION PERCEPTIBLE DU DROIT CIVIL ET DU DROIT COMMERCIAL PAR


L’OHADA

A- L’UNICITE DES SOURCES ENTRETENUE PAR LE TRAITE OHADA

B- LES ELEMENTS D’ANCRAGE DU PROCESSUS D’UNIFICATION AMORCE

C- L’ISOLEMENT DE LA DISTINCTION DU CHAMP DE L’HARMONISATION

CONCLUSION

3
1. Toute norme juridique est un défi au temps, une tentative de stabilisation des
rapports sociaux en perpétuel devenir2. Cet érudit de la science du droit qualifie ainsi le
renouvellement perpétuel des règles et des sources, en réponse aux besoins sans cesse
mouvants de la société humaine. Dans ce mouvement naturel qui intervient par la force des
choses, il arrive très souvent qu’un défaut de perspective, porte à faire croire que l’on se
trouve au commencement d’une ère nouvelle ou en présence d’une rupture révolutionnaire
avec le passé ; pourtant, à y voir de près, l’on se trouverait simplement en face d’indices
3
marquant l’accentuation d’un processus en cours. C’est en ces termes que M. ROTONDI
décrit le processus d’unification du projet italien de 1942 portant sur l’élaboration d’une
théorie générale des obligations civiles et commerciales. Et, selon toute vraisemblance, la
distinction du droit civil et du droit commercial qui a marqué d’une empreinte
presqu’indélébile plusieurs siècles du droit romano-germanique, s’inscrirait aujourd’hui dans
4
une construction révolutionnaire et pragmatique du processus d’unification du droit
OHADA. L’une des conséquences de cette logique d’harmonisation, d’intégration ou même
d’unification, serait sans doute la tendance inavouée mais perceptible, à la relativisation de
l’importance jusque là accordée au principe même de cette distinction comme étant l’une des
bases fondamentales qui consacrent la summa divisio du droit privé.

2. Cette œuvre du législateur communautaire est loin d’être une tentative isolée. En
effet, la perspective du rapprochement du droit civil et du droit commercial, et partant, de la
fusion progressive des méthodes des deux disciplines, est une constance qui a traversé
l’histoire du droit privé. Des esprits très éminents purent le croire au début du XXe siècle. Et,
LYON-CAEN dans l’étude qu’il consacrait à « l’influence du droit commercial sur le droit
civil depuis 1804 », affirmait que « les différences qui subsistent entre le droit civil et le droit
commercial n’ont rien d’essentiel (…) ; il ne faut, par suite, pas s’étonner que beaucoup de
ces différences aient disparu ou se soient, tout au moins, atténuées »5. Quelques années
auparavant, un article de M. VIVANTE avait même formellement préconisé la rédaction d’un
« Code unique des obligations »6. Dans cette progression historique, c’est surtout le droit
commercial qui a gagné du terrain, et ces progrès paraissent tout à fait en harmonie avec ceux
qui ont été réalisé dans la société moderne par le biais des opérations commerciales et l’esprit
commercialiste.

3. De plus en plus, le droit commercial partage très largement aujourd’hui, la même


conception libérale de l’économie et du droit, et la même faveur pour l’individualisme et les
principes civilistes de protection de la propriété privée et des biens. De ce point de vue
justement, le droit commercial, en tant que partie du droit privé interne, peut être défini
comme étant constitué « d’un ensemble de lois spécialement destinées, soit à régler la forme
et l’effet des transactions dont le commerce se compose, soit à déterminer les obligations
2- Jean Louis BERGEL, Théorie générale du droit, Coll. Méthodes du droit, Dalloz 1985, P. 24.
3 - Voir Rapport Général des Journées de Pavie et de Milan sur « L’intégration du droit civil et du droit
commercial en matière d’obligations », in Travaux de l’Association H. CAPITANT, Tome VIII, 1953, P.
63.
4 - L’exposé des motifs du Traité OHADA qualifie ainsi, et à juste titre, certains traits du droit OHADA, à

savoir qu’il introduit une unification perçue comme source de sécurité juridique et judiciaire dans le milieu
des affaires, source de symbiose dans les relations dès lors que les opérateurs économiques changeant de
cadre géographique ne sont pas pour autant juridiquement dépaysés.
5 - « De l’influence du droit commercial sur le droit civil depuis 1804 », in Livre du centenaire : Code civil,

1804-1904, Dalloz, Paris, 2004, P. 208.


6 - Annales de Droit commercial, 1983, PP. 1-15.

4
particulières auxquelles sont assujettis ceux qui en font leur profession ; de certains principes
du droit commun appliqués, autant que le permet la nature des choses, à ces mêmes
transactions, lorsque les lois spéciales n’ont rien déterminé »7.

4. Le contexte ainsi balisé suscite quelques interrogations assez pertinentes. La


première que l’on perçoit est celle de savoir s’il est théoriquement possible d’envisager une
fusion8 à terme des règles communes aux deux disciplines du droit privé sans que leurs
spécificités respectives déstabilisent dans leur fondement les solutions envisagées ? Si en
revanche, la distinction reste techniquement maintenue dans certains domaines, serait-elle
encore véritablement fondamentale au regard de l’objectif d’unification du droit africain des
affaires ? En d’autres termes, quelle serait la force de résistance de la distinction aux efforts
de modernisation et d’unification du droit OHADA ?

5. Pour y répondre, une réflexion critique sur les liens qu’entretiennent les deux
branches du droit privé dans la législation OHADA, nous semble scientifiquement
enrichissante9. Dans cette perspective, l’analyse devrait également permettre de démontrer le
champ matériel du droit OHADA relativement au domaine assez résiduel et très ciblé qu’il
réserve à la distinction dans ce contexte.

6. L’approche retenue et plus ou moins imposée par cette thématique est une approche
analytique et transversale. Les interrogations soulevées donneront droit à des pistes de
réflexion selon une démarche prospective qui tient compte non seulement de l’édification
d’un droit commun des activités économiques identique pour toutes les composantes de la
discipline, mais également des spécificités de la matière dans ses rapports avec l’ensemble des
relations consenties ou subies par les acteurs et opérateurs économiques.

7. L’approche législative ainsi annoncée vise à élaborer des solutions unificatrices du


droit des affaires OHADA. Elle présente un intérêt théorique constant : celui fondamental du
dépassement de la théorie étriquée de la commercialité comme fondement des solutions du
droit des affaires africain, en faveur de l’élaboration des solutions simples, flexibles et
équitables, construites autour de la notion de profession exercée dans le cadre d’une
entreprise organisée10.

7 - D. ALLAND et S. RIALS, Dictionnaire de culture juridique, Lamy PUF, Paris 2003, P. 439, V° Droit
Commercial. Dans le droit français contemporain, l’essence du droit commun est celle d’opposer les
principes aux exceptions, les règles d’application générale à celles qui n’édictent que des dispositions
spéciales, ou, en procédure, les juridictions qui ont vocation à gérer toutes sortes d’affaires à celles qui
n’exercent que des compétences d’attribution. Voir également R. GASSIN, « Lois spéciales et droit
commun », Dalloz 1961, Chronique XVIII.
8 - Ch. LAURENT, De la fusion du droit civil et du droit commercial, Thèse Paris 1903.
9 - Cependant, Pour des besoins de concision, nous nous sommes volontairement abstenu d’aborder les

questions relatives à l’extension du champ spatial du droit OHADA. Bien qu’intéressantes et pertinentes
du point de vue de la difficile conciliation des familles juridiques fondamentalement différentes dans un
espace francophone de tradition civiliste, ces questions soulèvent des problématiques qui, à notre sens,
n’intéressent pas directement le sujet en étude. Voir à ce propos les récents développements dans les Actes
P. MEYER, « L’harmonisation du droit des contrats », Rapport Général du Colloque sur l’harmonisation
du droit OHADA des contrats, 15-17 Novembre 2007, accès recommandé :
http://www.unidroit.org/english/publications/review/articles/2008-1&2/001-008.pdf ; P.G.
POUGOUE et Y.R. KALIEU ELONGO, Introduction critique à l’OHADA, Presses Universitaires
d’Afrique, Yaoundé, 2008, PP. 113 et ss.
10 - Pour comprendre l’évolution du droit des affaires africain qui a débouché sur le traité de l’OHADA,

il faut à la fois analyser et comprendre les particularités du processus d’élaboration de ce droit, les
conséquences sur son développement et ses destinées.
5
8. L’intérêt pratique d’une telle approche résiderait dès lors dans le souci de saisir
aussi bien les acteurs économiques que l’activité dans un instrument unique constitué de
règles homogènes dans le plus grand nombre de matières11. De la sorte, le droit OHADA
s’inscrirait parfaitement dans le sillage de l’unification du droit privé tel que préconisée par la
doctrine italienne du XVIIIe siècle12 et reprise par les concepteurs du Traité de l’OHADA.
Evidemment, la préoccupation centrale qui demeure est celle de la consistance et de la force
de résistance de la distinction entretenue entre le droit civil et le droit commercial face à la
pression de la modernisation du cadre juridique des affaires issu de l’OHADA.

9. La constance sur laquelle théoriciens13 et praticiens du droit OHADA s’accordent


aujourd’hui est celle de la perte de vitalité de cette distinction aussi bien dans l’élaboration
que dans la mise en œuvre du droit en étude. Toutefois, afin d’éviter les excès et les dérives
congénitales propres à l’art de légiférer14, la prudence législative voudrait que la tendance à
l’amenuisement des frontières de la distinction repose sur des notions suffisamment
transversales pour réaliser l’œuvre unificatrice du droit OHADA.

Pour y parvenir, une analyse duale guidée par les deux axes de la problématique
retenue, apportera un éclairage illustratif sur la tendance au décloisonnement progressif des
frontières entre le droit civil et le droit commercial dans le droit OHADA d’une part (I), ce
qui permettra ensuite de mieux appréhender l’ampleur du processus de fusion envisagé par le
droit OHADA d’autre part (II).

I - LE DECLOISONNEMENT PROGRESSIF DES FRONTIERES ENTRE LE


DROIT CIVIL ET LE DROIT COMMERCIAL DANS LA LEGISLATION OHADA

10. Des travaux préparatoires du Traité fondateur de l’OHADA, il ressort que les
rédacteurs se sont efforcés d’éviter des contradictions éventuelles entre les codes nationaux
dépassés pour la plupart et le but de la loi, en donnant à la législation africaine des affaires un
caractère objectif, moderne et fonctionnel. C’est sous ce prisme que l’on peut comprendre la
philosophie de la genèse du droit OHADA. Elle n’échappe pas à cette constance historique
qui justifie les reformes : exigences de modernisation du droit15 aux fins de prévisibilité de la
norme certes, mais également d’attractivité16 et d’efficacité économique.

11. Il s’est agi d’une intégration juridique à but économique car, en effet, dans
l’optique d’attirer les investisseurs internationaux et de relancer la croissance, les Etats
membres ont nourri le désir d’élaborer et d’adopter des règles communes, simples, modernes

11 - Pour comprendre l’ampleur du phénomène, il faut puiser encore une fois dans les tréfonds ethno-

sociologiques du droit. Voir L. JOSSERAND, « Comment les textes de loi changent de valeur au gré des
phénomènes économiques », in Etudes de droit civil à la mémoire de H. CAPITANT, p. 369 ; du même
auteur, « Un ordre juridique nouveau », D.H. 1937, Chronique P. 41.
12 - M. ROTONDI, « L’unification du droit des obligations civiles et commerciales en Italie », RTDCiv.

1968, PP. 1 et ss.


13 - P.G. POUGOUE et Y.R. KALIEU ELONGO, Introduction critique à l’OHADA, Presses Universitaires

d’Afrique, Yaoundé, 2008, PP. 71 et ss.


14 - A. OUTIN et A-M. REITA, « Quelques réflexions axées sur le droit des affaires », Recueil Dalloz

2006, Chroniques p. 2919


15 - D. ABARCHI, « La problématique des réformes législatives en Afrique : le mimétisme juridique

comme méthode de construction du droit», Penant, N° 842, Janvier-Mars 2003, 88-105.


16 - KEBA MBAYE, « L’histoire et les objectifs de l’OHADA », Petites Affiches, Spécial N°205, 13

Octobre 2004, P. 4 ; également, P.G. POUGOUE et Y.R. KALIEU ELONGO, Introduction critique à
l’OHADA, Presses Universitaires d’Afrique, Yaoundé, 2008, PP. 172 -209.
6
et adaptées à la situation de leurs économies17. Cette philosophie d’ensemble va très vite
inscrire le droit OHADA dans une démarche très englobante, se dotant progressivement des
solutions unificatrices et dont la neutralité et la maniabilité le créditaient d’une plus grande
sécurité juridique.

12. Dans cette logique, le droit commercial est utilement, et fonctionnellement sorti de
son domaine d’exception pour empiéter sur des espaces réservés jusque-là au droit civil. Avec
cette évolution consacrée par le droit OHADA, certaines institutions classiquement réservées
aux commerçants se sont étendues aux autres professionnels de la vie économique.

13. En outre, s’il est vrai que l’influence du droit commercial sur le droit civil est de
loin la plus sensible, un regard sur l’histoire révèle une influence réciproque de chacune de
ces disciplines, l’une sur l’autre. Dans la construction historique d’un droit des affaires unifié,
il s’est agi tantôt de l’incursion du droit commercial dans les sphères jadis réservées au droit
civil (A), tantôt de l’intégration par le droit commercial de certains mécanismes familiers au
droit civil (B). Toutes choses qui expriment une démarche fondamentalement téléologique de
simplification et d’unification des sources du droit applicable. Comment ce double
mouvement dans le processus d’élaboration de la norme s’est-il manifesté ?

A- L’INCURSION DU DROIT COMMERCIAL DANS LA SPHERE DU DROIT CIVIL

14. De façon constante, l’anthropologie juridique tend à démontrer que « le juriste,


volontiers conservateur, n’accepte de modifier ses modes opératoires que s’il y est contraint
par la nécessité »18. Plus ou moins contraint par les nécessités d’adaptation du droit des
affaires à l’évolution sans cesse mouvante du commerce international, l’assouplissement des
rigueurs du droit civil s’est imposé comme une condition essentielle de praticabilité de
l’environnement des affaires. Dans cet esprit, l’extension des techniques commercialistes s’est
justifiée par une double aspiration téléologique, l’une liée à l’efficacité (1), et l’autre à la
sécurité économique (2).

1. La généralisation des mesures de plus grande efficacité économique

15. Dans un premier temps, la généralisation des mécanismes du droit commercial est
justifiée par l’aspiration à une plus grande efficacité économique19. Il faut dire qu’en son
temps déjà, F. GENY écrivait que « le droit resterait comme un mécanisme tournant à vide
s’il n’était constamment approvisionné et nourri de la substance économique »20. Aujourd’hui
encore, le libre-échange et son corollaire la libre concurrence, deux forces motrices des
échanges mondialisés, sont les principes cardinaux de la politique économique que les
législateurs s’efforcent d’intégrer.

16. Le droit OHADA, à l’instar du droit commercial international, a privilégié l’intérêt


économique au détriment des intérêts individuels. Ceci s’est traduit en droit civil par exemple

17- Cf. article 1er du Traité du 17 octobre 1993 relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique,
J.O. OHADA n° 4, 01/11/97, p. 1 et s.
18 - N. ROULAND, L’anthropologie juridique, Que sais-je ? PUF, Paris, 1996, PP. 68-93.
19 - Sur la notion d’efficacité, voir C. JAMIN, Les pièges de l'évaluation économique de la réglementation,

in Mesurer l'efficacité économique du droit, dir. G. Canivet et M.-A. Frison-Roche, LGDJ, 2005, P. 103 s.
20 - Cité par P. VASILESCO, « L’œuvre de F. GENY et ses résultats », in Recueil d’études sur les sources

du droit en l’honneur de F. GENY, Tome II, « Les sources générales des systèmes juridiques actuels »,
Recueil Sirey, 1981, P. 57.
7
par la montée en puissance de la théorie économique du contrat qui, en privilégiant le
maintien du contrat, a fait de la nullité une solution exceptionnelle.

En référence à l’avant projet d’Acte uniforme sur le droit des contrats, il apparaît que
« le droit à l’exécution comprend, le cas échéant, le droit à la réparation ou au remplacement
de l’objet, ainsi qu’à tout autre moyen de remédier à une exécution défectueuse. Les
dispositions des articles 7/8 et 7/9 sont alors applicables »21. Ceci n’est qu’une reprise de
l’article 250 al 2 de l’Acte Uniforme OHADA relatif au Droit Commercial Général22 qui
dispose que « si les marchandises ne sont pas conformes au contrat, l’acheteur peut exiger du
vendeur la livraison des marchandises de remplacement… » et, al 3 « si les marchandises ne
sont pas conformes au contrat, l’acheteur peut exiger du vendeur qu’il répare le défaut de
conformité ». Suivant cette perspective et contrairement aux prévisions du Code civil, le
contrat n’est plus rompu du fait de n’importe quelle inexécution : il faut impérativement
apporter la preuve d’un manquement essentiel23 au contrat.

17. En réalité, cette tendance à la pénétration du droit civil par le droit commercial
semble être un phénomène plus global qui dépasse largement les frontières de l’espace
OHADA. Elle est soutenue au plan doctrinal par Ch. LYON-CAEN pour qui il s’agit
simplement d’une approche pratique et fonctionnelle qui se limite essentiellement à concilier
les solutions conciliables, compatibles, utiles et judicieuses pour l’harmonisation du droit des
affaires. L’auteur soutient en effet que, « quand deux législations coexistent, la plus équitable,
la plus simple, la moins formaliste, celle qui fait le plus complètement abstraction de la
nationalité des individus, et ce sont là des caractères du droit commercial par rapport au
droit civil, tend à s’étendre et à devenir la législation unique et commune »24.

18. A cet égard, si les instruments de paiement, tel que le chèque par exemple, et de
crédit, à l’instar de la lettre de change, du billet à ordre ou du warrant, étaient
traditionnellement utilisés par les professionnels commerçants, de nos jours, nombre d’autres
professionnels (salariés, agriculteurs, artisans, etc.) s’en sont familiarisés.

19. Dans le même ordre d’idée, l’Acte uniforme relatif aux sûretés a créé, en
remplacement de divers types de warrant sans dépossession une sûreté unique appelée
nantissement des stocks. La particularité de cette nouvelle sûreté est qu’elle n’est plus
l’apanage des seuls commerçants.25. En conséquence, tous les professionnels opérant sur les
stocks relevant de cette énumération devraient pouvoir recourir à cette sûreté.

21 - Article 7/10 de l’avant-projet d’Acte uniforme OHADA relatif aux contrats civils et commerciaux.
22 -Ci-après : AUDCG
23 - L’Article 7/13 al 1 de l’avant-projet précité dispose justement qu’ « une partie peut résoudre le contrat

s’il y a inexécution essentielle de la part de l’autre partie », Cette notion de « manquement essentiel »
s’inspire de l’article 254 al 1 qui dispose que « l’acheteur peut demander la résolution du contrat à la
juridiction compétente : si l’inexécution par le vendeur de l’une quelconque des obligations ou de
présentes dispositions constitue un manquement essentiel au contrat… » En effet, le manquement
essentiel est considéré comme étant celui qui prive le contractant de ce qu’il était en droit d’attendre de
l’autre partie. Ainsi, le contrat est résolu parce qu’il n’a plus de cause. De l’autre côté, on a une possibilité
de rupture unilatérale aux risques du créancier avec intervention a posteriori du juge une fois que les
conditions sont réunies. Voir Etienne NSIE, « La sanction de l’inexécution des obligations des parties
dans le contrat de vente » in Revue Penant 2001, P. 96 ; également l’article 255 al 2 de l’Acte Uniforme
relatif au Droit Commercial Général.
24 - « De l’influence du droit commercial sur le droit civil depuis 1804 », in Le livre du centenaire du Code

civil : le Code civil 1804-1904, Dalloz 2004, P. 207.


25 - L’Acte Uniforme relatif aux Sûretés ne fait référence à aucune catégorie professionnelle déterminée,

encore moins à celle de commerçant Article 100 de l’Acte Uniforme relatif aux Sûretés qui dispose : « Les
8
20. En outre, certaines opérations se voient aujourd’hui appliquer, sans égard à leur
nature civile ou commerciale, par extension, des solutions commerciales. Il en est ainsi de la
commercialité par la forme qui a été étendue à tous les effets de commerce, à l’exclusion du
chèque26.

21. La recherche de l’efficacité a conduit le législateur non seulement à simplifier les


moyens d’échange de biens et de services, mais également à unifier les modes de résolution
des différends. C’est ainsi qu’en période pré-contentieuse par exemple, le créancier bénéficie
d’un régime simplifié de recouvrement de ses créances, indépendamment de leur nature,
civile ou commerciale. C’est le cas également de l’institution de l’injonction de payer, qui a
été étendue à certaines opérations civiles.

22. En période contentieuse, les parties peuvent décider de se passer de la justice


étatique. Par ailleurs, si les modes alternatifs de résolution des conflits, notamment l’arbitrage,
sont classiquement destinés au règlement des litiges nés des échanges à caractère commercial,
cette vue ne reflète plus l’évolution contemporaine du droit de l’arbitrage. En application
d’une clause compromissoire27 ou d’un compromis d’arbitrage, toute partie à un contrat, soit
que l’une des parties ait son domicile ou sa résidence habituelle dans un des Etats parties, soit
que le contrat soit exécuté en tout ou partie sur le territoire d’un ou de plusieurs Etats, peut
soumettre un différend d’ordre contractuel, et nonobstant son caractère civil ou commercial, à
la procédure d’arbitrage28. Le droit OHADA n’ayant établi aucune distinction entre le contrat
civil et le contrat commercial, il en résulte que tous les différends d’ordre contractuel peuvent
être soumis à l’arbitrage. La justice arbitrale offre ainsi l’avantage de la maniabilité, de la
simplicité et de la discrétion, toutes choses qui concourent à la réalisation d’une plus grande
sécurité dans les transactions.

2. L’extension des mesures de plus grande sécurité économique

23. L’aspiration à l’efficacité va de pair avec le souci d’une plus grande sécurité des
transactions économiques. Plus que dans le cadre commercial, le besoin de sécurité est
ressenti dans les autres milieux professionnels. Le législateur OHADA a tenté d’accéder à ces
exigences de diverses manières.

24. Tout d’abord, l’unification du mode de publicité est amorcée par l’article 19 alinéa 2
de l’AUDCG à travers l’institution du Registre du Commerce et du Crédit Mobilier dont
l’obligation d’enregistrement est désormais étendue à toute personne physique ou morale
engagée dans une activité économique29.

matières premières, les produits d’une exploitation agricole ou industrielle, les marchandises destinées à la
vente peuvent être nantis sans dépossession par l’émission d’un bordereau de nantissement, à condition de
constituer un ensemble déterminé de choses fongibles avant l’émission du titre ».
26 - Article 4 de l’Acte Uniforme relatif au Droit Commercial Général : « Ont également le caractère d’acte

de commerce, et ce par leur forme la lettre de change, le billet à ordre et le warrant ».


27 Par définition, la clause compromissoire est la clause par laquelle les parties à un contrat conviennent au

moment où elles s’engagent que tous les litiges qui pourront naître à l’occasion de ce contrat seront
soumis à l’arbitrage.
28 - Article 21 du Traité OHADA.
29 - J. LOHOUES-OBLE, Innovations dans le droit commercial général, in L’Organisation pour

l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires, Petites Affiches, N° Spécial, 2005, P. 11 ; P.G.
POUGOUE et Y.R. KALIEU ELONGO, Introduction critique à l’OHADA, Presses Universitaires
d’Afrique, Yaoundé, 2008, P. 139, N° 112.
9
A l’évidence, ce registre qui était destiné à recevoir l’inscription des commerçants et de
leurs activités, est devenu le registre des activités, des professions, des acteurs, des
professionnels et des opérateurs économiques. Le législateur a étendu les règles de publicité
aux informations relatives au nantissement des actions et des parts sociales, aux clauses de
réserve de propriété ainsi qu’aux contrats de crédit bail. A cet égard, il n’opère aucune
distinction entre les sûretés commerciales et les sûretés civiles. Ce faisant, on évolue
progressivement vers un dispositif OHADA qui a le mérite de centraliser dans un registre
unique la publicité de toutes les sûretés utilisées par les professionnels, et qu’il conviendrait
simplement d’appeler « le fichier central des opérateurs économiques », car l’objectif final de
cette institution serait de simplifier la circulation de l’information, mais également d’établir
un fichier central qui retrace l’historique des sociétés régies par le droit OHADA. L’on se
rapproche ainsi du « casier commercial ou fichier commercial »30 défendu par une doctrine
française restée malheureusement sans écho.

25. Ensuite, et dans le même ordre d’idées, le législateur a progressivement étendu aux
autres professionnels certaines institutions.

26. C’est le cas, premièrement, de la prescription. Les prescriptions les plus courtes sont
classiquement du domaine commercial. Or, le droit de l’OHADA les a étendues aux actes
mixtes31. Il y a là une volonté d’uniformisation des solutions, commandée par la finalité des
règles adoptées par le législateur.

27. C’est le cas en second lieu de l’institution des baux commerciaux que l’OHADA
consacre du fait non pas essentiellement de l’activité commerciale exercée, mais par rapport à
la pertinence de la profession, et du fait de l’existence d’une clientèle professionnelle qui
mérite d’être protégée au même titre que la clientèle commerciale dans le cadre des
mécanismes de sécurisation du fonds commercial. Car en effet, si le bail commercial profite
aux professionnels sur la base des articles 69, 70, et 71 de l’AUDCG, l’article 69-1° de ce
texte ne fait justement aucune distinction sur la forme juridique de l’exploitation. Dès lors,
l’on pourrait être fondé à croire que dans l’esprit du législateur OHADA, le régime des baux
commerciaux doit s’appliquer, que l’exploitation soit une entreprise individuelle ou sociale,
une société civile ou une société commerciale. Ce dispositif aurait l’avantage d’étendre le
droit au bail aussi bien aux commerçants n’exploitant pas un fonds de commerce qu’aux
autres professionnels au sens où B. SAINSTOURENS l’envisageait déjà en élucidant « le bail
commercial des non commerçants »32.

28. Dans la mesure où la finalité du droit est commandée par le souci d’une plus grande
sécurité économique à savoir dans le cas de l’espèce la protection du fonds commercial, l’on
conçoit aisément que la propriété commerciale leur offre des privilèges exorbitants tels que
l’indemnité d’éviction et le droit au renouvellement. Les professionnels non commerçants ont
une clientèle à conserver, que l’usage soit commercial, industriel, artisanal ou de toute autre
nature, à l’exclusion de celle qu’écartent l’ordre public et les bonnes mœurs. Une telle
évolution traduit le constat que tous ces acteurs exercent finalement leurs activités dans les
mêmes conditions et sont soumis aux mêmes contraintes économiques que le commerçant.

29. Enfin, considérons l’institution de la faillite. Dès ses origines, elle revêt le
caractère d’une sanction dont la rigueur vise uniquement les commerçants qui trahissent leurs

30 - Ph. FARJEAU, « Le fichier commercial », RTDcom. 1965, P. 1.


31 -Article 18 de l’AUDCG.
32 - B. SAINTOURENS, Le bail commercial des non commerçants, in Les activités et les biens de

l’entreprise, Mélanges offerts à J.DERRUPPE, Litec, 1991, P. 93.


10
obligations professionnelles. Aujourd’hui, consacrée sous l’appellation de droit des
entreprises en difficulté, la faillite est désormais un droit plus thérapeutique que moralisateur
destiné à l’entreprise, qu’elle soit civile ou commerciale33. Il en résulte que, de façon
constante, bon nombre de mécanismes développés dans le cadre du droit des affaires
contemporain entraient déjà dans les prévisions du Code civil.

30. Au total, l’on se rend compte, pour s’en tenir à ces quelques exemples, que
l’incursion de certaines règles du droit commercial dans les matières relevant classiquement
du droit civil se manifeste à diverses échelles. Il serait néanmoins excessif d’en déduire la
manifestation d’une hégémonie du droit commercial sur le droit civil. Dans la mesure où l’on
observe, tel un mécanisme de vase communicant, des influences inverses de certaines
techniques familières au droit civil sur des institutions relevant du droit commercial.

B- L’INFLUENCE DES TECHNIQUES DU DROIT CIVIL SUR CERTAINES


INSTITUTIONS DU DROIT COMMERCIAL

31. Dans le cadre des transactions patrimoniales entre les individus, le droit civil
exerce une direction plus ou moins dominante. Il a construit, et tient en perpétuel maniement
une sorte de mécanisme des idées qui sert à actionner les rapports des commerçants comme
ceux des particuliers. Au droit commercial, il communique sa logique, sa méthode et ses
cadres de démonstration34. Quelques exemples marquants de l’attraction exercée
historiquement par le droit civil et ses méthodes sur le droit commercial sont assez révélateurs
de la démarche adoptée par le législateur OHADA.

32. Le recours aux dispositions du Code Napoléon a permis d’élaborer plusieurs


notions et institutions aujourd’hui classées comme étant des institutions fondamentales du
droit commercial.

33. Il en est ainsi de l’article 1832 du Code civil qui définit la société comme étant
« instituée par deux ou plusieurs personnes qui conviennent par un contrat d’affecter à une
entreprise commune des biens ou leur industrie en vue de partager le bénéfice ou de profiter
de l’économie qui pourra en résulter (…) ». Ce faisant, le Code civil a jeté en premier les
bases du régime des sociétés dans le Livre Troisième dudit Code, dont le Titre IX intitulé
« De la Société », contient les dispositions générales relatives à toutes les formes de société.

34. En outre, c’est cette notion civiliste de patrimoine qui a débouché sur le droit
comptable qui détermine les principes de gestion comptable des entreprises auquel le
législateur OHADA a consacré un Acte Uniforme35. Quoiqu’insuffisamment élaboré, l’article
2099 du Code civil entrevoyait déjà le régime des procédures collectives.

35. La jurisprudence, inspirée par l’article 1382 du Code civil, a construit la théorie de
la concurrence déloyale et des actions en contrefaçon.

33 - L’article 2 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif a
élargi le champ d’application des procédures collectives, qui comprend alors « toute personne physique ou
morale commerçante, toute personne morale de droit privé non commerçante, toute entreprise publique ayant la forme d’une
personne morale de droit privé ».
34 - E. THALLER, « De l’attraction exercée par le Code civil et par ses méthodes sur le droit
commercial », in Livre du centenaire : Code civil, 1804-1904, Op. Cit. PP. 223-243.
35 - Acte uniforme du 24 mars 2000 portant organisation et harmonisation des comptabilités des
entreprises, in J.O. OHADA, n° 10, PP. 1 et ss ; également Code vert, OHADA, Traité et Actes Univformes
commentés et annotés, Juriscope, Bruylant Bruxelles, 3e Edition 2008, PP. 587-647.
11
36. De même, l’article 1121 du même Code a ouvert l’assurance sur la vie aux champs
d’actions les plus inattendus.

37. A l’origine, le droit de la consommation tout comme le droit du travail, ont eu un


penchant nettement civiliste. Pour le premier, la consommation est envisagée au départ
comme une consommation de masse reposant sur une multitude de petits actes répétitifs qui
supposent simplicité et rapidité. A ce titre, le consommateur est d’abord envisagé comme une
personne ordinaire, fortement vulnérable, dont le besoin de sécurité a conduit à la naissance
d’un droit protecteur de ses intérêts. Pour le second, le droit du travail, son essence civiliste
ne fait aucun doute. Le travailleur dont la protection des intérêts fondamentaux est en cause,
est ici envisagé comme étant un individu dont les enjeux économiques de la protection sociale
sont encore largement escamotés.

38. De nos jours, le droit de la consommation comme le droit du travail sont dispensés
comme des disciplines relevant du droit des affaires, et donc, sont plus proches du droit
commercial que du droit civil. L’implication des salariés dans la gestion des entreprises par le
biais de l’actionnariat salarié illustre bien cette évolution. Le projet d’Acte Uniforme OHADA
relatif au droit de la consommation confirme bien cette tendance à l’étiolement des frontières
entre le droit civil et le droit commercial dans l’esprit du législateur OHADA36.

39. Du point de l’OHADA en effet, si la rencontre du droit et de l’économie


(formalisme juridique et flexibilité des règles) est quasiment réalisée en quinze ans de
pratique du droit communautaire africain des affaires, il convient de s’interroger sur les effets
de cette interaction entre les méthodes flexibles de l’économie et les règles plus ou moins
rigides du droit sur la force de résistance de la distinction entre le droit civil et le droit
commercial aujourd’hui.

40. La seule certitude pour l’instant résulte de ce que qu’à vrai dire, le législateur
africain n’a fait que traduire en données juridiques les exigences imposées par la conciliation
de l’économique et du juridique, du civil et du commercial, pour une meilleure régulation des
activités économiques.

41. Qui plus est, le droit OHADA et la philosophie dont il est porteur, révèle une
démarche d’uniformisation qui pourrait assurément conduire non pas au rapprochement des
droits nationaux au sens sémantique que renferme le terme « harmonisation », mais plutôt à
une fusion programmée et ressentie des méthodes du droit civil et du droit commercial, au
sens d’uniformisation des règles, et d’unification du « droit économique » dans l’espace
OHADA.

42. Destinée à se poursuivre, l’œuvre unificatrice ainsi amorcée - et dont les confins
restent encore quelque peu flous -, ne risque pas d’échapper à la maîtrise de ses concepteurs,
en ce sens que dans la perspective de l’adoption des actes uniformes portant sur le droit de la
consommation37 et sur le droit du travail par exemple, la plasticité et la fluidité des frontières
entre le droit civil et le droit commercial se renforcent davantage. Le Projet d’Acte Uniforme

36 -L’on se souvient aussi de la problématique relative à la mobilité internationale des travailleurs dans
l’espace OHADA, de toute la littérature relative aux clauses sociales dans le commerce international, du
principe de l’étiquetage imposé dans le cadre de l’économie solidaire, etc.

37 - Avant-projet d’Acte Uniforme sur le contrat de consommation, version de travail du 16 mai 2006,

www.ohada.com.
12
relatif au droit des contrats en gestation, semble bien faire la part entre la philosophie
d’uniformisation du droit applicable et la cohérence d’ensemble qui doit conduire les
réformes de cette envergure38.

43. Sur cette question, une doctrine ancienne39 a fait sienne l’écho de la neutralisation
progressive du principe consacré et intangible de la distinction entre les deux disciplines du
droit privé.

44. Aujourd’hui encore, l’on se rend bien compte que la problématique de la


prévisibilité, de la sécurité et de l’efficacité économique au cœur du processus de
modernisation du droit OHADA, a été un juste motif de relativisation de la pertinence, voire
de l’opportunité de la distinction dont le processus de fusion est assez perceptible dans la
réforme du droit africain des affaires.

II – LA FUSION PERCEPTIBLE DU DROIT CIVIL ET DU DROIT COMMERCIAL


PAR L’OHADA

45. Au gré des exigences tenant aussi bien à la délimitation matérielle qu’à celle de
son domaine spatial, la législation communautaire des affaires connaît une extension
progressive affectant tantôt le choix des matières à harmoniser, tantôt son champ spatial de
compétence. Avec la perspective de l’adoption de nouveaux Actes uniformes portant sur le
droit du travail, le droit de le consommation, le droit des contrats, l’on a tendance à voir dans
cette démarche universaliste l’expression d’une hégémonie du droit africain des affaires qui
sort de son domaine d’exception, celui du droit commercial, pour empiéter sur les matières
relevant jadis du droit civil.

46. Qu’est-ce qu’on peut en retenir ? D’une part, que l’OHADA n’échappe pas à
l’influence des mutations socio-économiques qui affectent le droit des affaires, droit
économique par essence, et lui imposent ses règles. Ramenée au contexte de l’OHADA, la
vision de l’unicité des sources (A) dont le but ultime est de saisir toutes les institutions aussi
bien civiles que commerciales afin justement de répondre à ces mutations, est perceptible
dans l’esprit du Traité ; d’autre part, que c’est cette vision qui soutient les éléments d’ancrage
du processus d’unification dudit droit (B) ; enfin, que l’œuvre entreprise par le législateur
OHADA s’inscrit bien et pour l’instant dans la philosophie de l’unification du droit40, c’est-à-
dire celle qui poursuit l’harmonisation des solutions tout en conservant néanmoins la
distinction du droit civil et du droit commercial dans des proportions bien précises (C).

38 - J. YADO TOE, « La problématique actuelle de l’harmonisation du droit des affaires par l’OHADA»,

Actes du Colloque sur l’harmonisation du droit OHADA des contrats, Ouagadougou 2007, Rev. Dr Unif.
2008, P. 32 : accès recommandé : http://www.unidroit.org/english/publications/review/articles/2008-
1&2/001-008.pdf.; P.G. POUGOUE, « Les tribulations d’un universitaire », Contribution au Colloque
international sur l’harmonisation du droit des contrats, Ouagadougou Novembre 2007,
www.ohada.com/Doctrine.
39 - J. HAMEL, « Les rapports du droit civil et du droit commercial en France », in Etudes de droit

commercial, Mélanges H. CABRILLAC, 1968, P. 183-196 ; également D. TALLON, « Réflexions


comparatistes sur la distinction du droit civil et du droit commercial », in Etudes offertes à A.
JAUFFRET, 1974, PP. 649-660 ; M. GERMAIN, « Le Code civil et le droit commercial », in Livre du
bicentenaire du Code civil : le Code civil : un passé, un présent, un avenir, Dalloz 2004, PP. 639-656.
40 - J. P. MARTY, « La distinction du droit civil et du droit commercial dans la législation contemporaine »,

RTDCom et Droit Economique, 1981, P. 685.


13
A- L’UNICITE DES SOURCES ENTRETENUE PAR LE TRAITE OHADA

47. L’esprit du Traité rend fidèlement compte de ce qu’à vrai dire, sous le prisme
visible de l’harmonisation, le législateur OHADA a entrepris d’unifier le droit privé
applicable aux relations économiques dans l’espace OHADA (1) ; car à la vérité, dans ce
domaine, comme dans bien d’autres et la plupart de temps, « tout est donné par les précédents
du passé et par les demandes d’un présent où s’amorce le futur »41. Cette citation de J.
CARBONNIER illustre clairement l’histoire contemporaine (2) qui entoure l’évolution et
l’amenuisement de la distinction du droit civil et du droit commercial dans la construction du
droit uniforme OHADA.

1- L’esprit du Traité de l’OHADA

48. Il n’est pas superfétatoire de rappeler la substance de l’exposé des motifs du Traité
créant l’OHADA, car celui-ci en fixe bien la vision ainsi que les objectifs. En son article 1er,
ce Traité précise les ambitions de ses signataires qui entendent harmoniser les droits
nationaux « par l’élaboration et l’adoption de règles communes simples, modernes et
adaptées à la situation de leurs économies, par la mise en œuvre de procédures judiciaires
appropriées, et par l’encouragement au recours à l’arbitrage pour le règlement des
différends contractuels ».

49. Défini à l’article 2 du Traité précité, le domaine du droit des affaires OHADA
apparaît bien vaste. Il intègre les matières relatives au droit des sociétés commerciales, au
statut des commerçants, au recouvrement des créances, aux sûretés, aux voies d’exécution, au
régime du redressement des entreprises et de la liquidation judiciaire, au droit de l’arbitrage,
au droit du travail, au droit comptable, au droit des transports, et « toute autre matière » sur
décision unanime du Conseil des ministres. L’impression qui se dégage alors est celle d’une
unification sans limites précises.

50. Ainsi formulée, cette disposition permet pratiquement de faire entrer dans le droit
des affaires n’importe quelle matière du droit privé, puisqu’elle n’indique pas de critère
d’inclusion. Aussi ne serait-il pas contraire au Traité d’inclure dans le domaine du droit des
affaires des matières considérées traditionnellement comme constituant des matières
spécifiques du droit civil, tel le droit des personnes et de la famille, les régimes matrimoniaux,
les successions ou les libéralités, parce que à maints égards, elles peuvent justement être
saisies par le droit des affaires lorsque des intérêts patrimoniaux d’une personne impliquée
dans des relations d’affaires sont engagés.

51. Bien que l’on soit encore assez éloigné d’une telle hypothèse, celle-ci est loin
d’être une vue de l’esprit dans la mesure où le nom patronymique de la personne peut aussi
être utilisé comme nom commercial et, à ce titre, il serait soumis à des règles particulières du
droit commercial, notamment celles relatives à la protection d’un fonds de commerce exploité
dans le cadre d’une entreprise familiale42. Il en serait de même de la gestion du régime
matrimonial de la femme mariée commerçante. En effet, le régime matrimonial de la femme
mariée emporte des conséquences particulières, qu’elle ait été mariée sous le régime de la
communauté ou sous celui de la séparation des biens. Question préjudicielle sans doute à

41 - J. CARBONNIER, « Le Code civil » : in les lieux de mémoire, La Nation (II), P. NORA (dir.),

Gallimard, 1986, P. 293.

42 - J. NGUEBOU TOUKAM, L’entreprise familiale, Thèse, Université de Yaoundé II, 1995.


14
régler par le juge civil sans doute, mais qui doit être tranchée in fine par le juge commercial
au regard de la nature des intérêts patrimoniaux en cause.

52. L’ambition affichée de l’OHADA d’étendre le champ spatial du Traité aux pays
relevant de cultures juridiques de Common Law, ne semble pas éluder les contraintes liées à
la difficile conciliation des familles juridiques fondamentalement différentes dans un espace
francophone de tradition civiliste43. C’est dire que l’OHADA envisage de façon méthodique
l’éventualité à terme, de la simplification du formalisme qui entoure les procédures issues de
la tradition civiliste. Ce qui forcément va contribuer à l’amenuisement de l’importance
jusque-là accordée à la distinction du droit civil et du droit commercial.

53. Lorsque l’on envisage la perspective d’une telle hypothèse, la question qui
naturellement vient à l’esprit, est celle de savoir si d’ailleurs, une telle distinction est encore
véritablement nécessaire dans un contexte très poussé d’harmonisation du droit des affaires et
d’unification des règles destinées à juguler la vie du droit.

54. La portée historique de cette réflexion révèle justement que la politique législative
de l’OHADA pose les bases d’une construction méthodique qui porte les indices de
l’accentuation d’un processus d’unification en cours dans d’autres espaces et systèmes
juridiques.

2- L’histoire contemporaine de la fusion envisagée

55. Si une brève incursion dans les archives44 du droit commercial français révèle le
bien fondé d’une telle réflexion, celle-ci ne manque pas d’intérêt pratique lorsqu’on voit
l’importance que la théorie du droit accorde aujourd’hui à la formulation des règles de droit
érigées en principes45 pour la réglementation de l’environnement économique des affaires
dans différents systèmes et regroupements sous régionaux46. Toutefois, si le droit OHADA
évolue assez prudemment vers la confirmation de cette tendance, force est de constater que
dans l’ensemble, l’édification d’un droit des activités économiques dans l’espace OHADA ne
se fera pas sans quelques concessions méthodologiques attachées à la rigueur que renferme la
distinction du droit civil et du droit commercial en droit privé.

56. Cette démarche semble bien coïncider avec une tendance déjà ancienne à la
formulation des structures juridiques renfermant des solutions simples, flexibles et
pragmatiques47 au service de l’unification du droit privé.

43 - Voir Travaux de l’Association Henri Capitant, « Les droits de tradition civiliste en question », Rapport

2006, PP. 18-20, spéc. 81-115.


44 - S. FREDERICQ, « L’unification du droit civil et du droit commercial. Essai de solution pragmatique »,

in RTDCom. 1962, XV. PP. 203-232 ;


45 - Les Principes du droit européen des contrats, les Principes Unidroit relatifs au Commerce international,

les Principes Unidroit la Loi-type de la CNUDCI pour la réglementation du commerce électronique et


Guide pour son incorporation,
46 - Voir A. SAYAG, « Quelle prospective juridique ? », Actes du Colloque « Le droit des affaires, demain »,

in La Semaine Juridique Édition Entreprise N° 2 du 9 janvier 1986, Spéc. PP. 5, accès recommandé :
http://www.creda.ccip.fr ; V. LASSERRE –KIESOW, « L’ordre des sources ou le renouvellement des
sources du droit », in Rec. Dalloz 2006, Chroniques, P. 2279-2280.
47 - Au cœur de cette problématique se trouvent les modifications profondes qui se sont produites dans de

nombreux domaines depuis un demi-siècle déjà, lesquelles ont amené les juristes à se demander si les
rapports entre les différentes branches du droit tels qu’ils étaient compartimentés dans les codes, devaient
être considérés comme immuables.
15
Les archives de philosophie du droit révèlent que le problème de l’unification du droit
civil et du droit commercial a fait l’objet de multiples études à la fin du 19e siècle, notamment
lorsque la Suisse a réuni en un seul Code toute la matière des obligations48. Depuis que les
Pays-Bas (1934) et l’Italie (1942)49 ont renoncé à la distinction traditionnelle entre ces deux
branches du droit privé, la question connaît un regain d’actualité50. Elle a été évoquée comme
thématique centrale des Journées de Pavie et de Milan de l’Association Henri Capitant en
septembre 195351 et lors d’un colloque tenu à Paris du 6 au 10 octobre 195352. Aujourd’hui le
législateur européen a jeté les bases d’un Code européen des contrats53.

57. Au regard du rapprochement souhaité des solutions dans le processus


d’harmonisation proclamé par le législateur OHADA, l’on s’acheminerait très sensiblement,
toute proportion gardée, vers l’assimilation des régimes particuliers applicables tant aux
opérateurs du commerce international, qu’à certaines transactions professionnelles qui ne sont
pas nécessairement de nature commerciale. Cette évolution est perceptible dans la mesure où
l’Acte uniforme relatif au droit commercial général par exemple, n’a pas seulement traité des
commerçants dans leur ensemble. Il a aussi abordé les institutions publiques qui veillent sur
le commerce, les auxiliaires qui prêtent leur ministère aux opérations de commerce, les
institutions relevant du droit civil, mais dont la rigueur et la stabilité devront concourir à la
sécurisation des biens de l’entreprise et du professionnel.

58. Dans cet esprit et selon toute vraisemblance, l’on peut dire sans risque de se
tromper que le législateur OHADA ne considère pas la distinction comme un obstacle au
processus en cours. Au contraire, par leur adhésion à la réforme du droit africain des
affaires, les signataires du Traité ont entendu jeter les bases d’une unification des solutions du
droit privé. Car c’est bien de cela qu’il est question aussi bien dans la lettre que dans l’esprit
du Traité. Dans cette perspective dès lors, il devenait possible au sens de la prospective
juridique, d’envisager l’uniformisation des règles qui va de pair avec l’unification du droit54,
de formuler des règles de portée générale susceptibles de s’appliquer aux relations
économiques nonobstant leur nature, économique ou civile.

48 - P. ENGEL, « Traité des obligations en droit civil : dispositions générales du Code des Obligations», 2e
Edition, Berne, 1997 ; F. BELLANGER, F. CHAIX, Chr. CHAPPUIS, Le contrat dans tous ses états, Publ°
de la Société Genevoise de Droit et de Jurisprudence, à l’occasion du 125e anniversaire de la Semaine
Judiciaire, Ed° SA Berne, 2004.
49 - Voir C. VIVANTE, « Per un codice unico delle obligazioni », Archivo Giuridico, T. XXXIX, P. 407,

traduit sous le titre « Un code unique des obligations », Ann. Dr. Comm. 1893, PP. 1 et ss. ; Voir M.
ROTONDI, « L’unification du droit des obligations civiles et commerciales en Italie », RTDCiv. 1968, PP.
1-24.
50 - Pour la Belgique, voir R. PIRET, « Vers l’unification du droit civil et du droit commercial », Revue

(belge) de la Banque, 1946, PP. 225-240 ; J. LIMPENS, « De l’unification du droit civil et du droit
commercial », Journal (belge) de tribunaux, 1953, PP. 353-359 ; J. VAN RYN, « Autonomie nécessaire et
permanence du droit commercial », RTDCom. 1953, PP. 565-575 ; aujourd’hui, la même tendance se
dessine en Allemagne, et plus largement dans le projet en marche vers l’élaboration des principes
européens du droit des contrats.
51 - Travaux de l’Association Henri Capitant pour la Culture Juridique Française, T. VIII. Paris 1955, PP.

79 et ss.
52 - « L’unification interne du droit privé », Paris, 6-10 octobre 1953, in Collection des Colloques

internationaux du Centre National de la Recherche Scientifique, T. VI. Paris, 1954, P. 140.


53- Voir F. WERRO, « Vers un Code européen des contrats », in F. BELLANGER, F. CHAIX, Chr.

CHAPPUIS, Le contrat dans tous ses états, Publ° de la Société Genevoise de Droit et de Jurisprudence,
Op. Cit. PP. 341-357.
54 - Voir Op. Cit.

16
59. Pour ce faire, il a fallu élargir le champ matériel du droit régissant les activités
économiques, par le truchement des notions transversales susceptibles de saisir la plupart des
acteurs, des activités, et des biens impliqués dans la vie économique.

B- LES ELEMENTS D’ANCRAGE DU PROCESSUS D’UNIFICATION AMORCE

60. Le point de mire du processus législatif opéré dans l’espace OHADA, faut-il le
rappeler, repose essentiellement sur des considérations d’ordre téléologique. Ainsi compris,
pour éviter les dérives habituellement constatées dans les processus de réformes, il s’est avéré
nécessaire d’identifier et de consacrer des notions transversales susceptibles non seulement de
renforcer l’architecture juridique des affaires en faveur de l’unicité des sources et des règles,
mais également de répondre aux exigences de sécurité juridique55 et économique liées à la
globalisation des échanges.

61. Pour ce faire, l’utilitarisme prononcé du droit des affaires a conduit à des choix
fonctionnels telle que la consécration de notions plutôt fédératrices de la distinction du droit
civil et du droit commercial, à savoir la reconnaissance d’un véritable statut de professionnel
d’une part (1), et la notion économique d’entreprise d’autre part (2).

1- Du commerçant au professionnel, acteur économique

62. Pour que la distinction droit civil – droit commercial reste intangible, il aurait fallu
que l’AUDCG fasse l’objet d’une définition précise qui décline avec force clarté et
exhaustivité les actes dont l’empreinte serait décisive pour la qualification « commerciale »
d’une part, les personnes dont les actes par l’habitude ou la profession, imprimeraient le statut
de « commerçant » à leur auteur, d’autre part. Or pour l’instant, l’absence d’une telle
précision complique inutilement la tâche du praticien, et l’oblige à recourir très souvent à la
qualification préalable de l’opération en cause, pour ensuite lui affecter une nature
commerciale ou civile, ou alors un statut civil, commercial ou professionnel, pour ce qui est
de l’auteur de ladite opération.

63. L’article 3 de l’AUDCG par exemple, reprend les formules traditionnelles telles que
« les contrats entre commerçants pour les besoins de leur commerce, les opérations de
location de meubles… ». A cette énumération, il ajoute les immeubles qui, de par leur nature,
ressortissaient du domaine du droit civil. De ce fait, deviennent ipso facto commerçants les
promoteurs immobiliers56, les membres de certaines professions libérales57, les intermédiaires

55 -Il convient de rappeler ici la place importante accordée à la sécurité juridique par la théorie du droit :
voir P.G. POUGOUE, « Les figures de la sécurité juridique », Leçon inaugurale, Inédit, UFD-Université
de Yaoundé II, 2004. Sur la comparaison avec la notion de confiance légitime en science administrative,
voir P. CASSIA, « La sécurité juridique, un nouveau principe général du droit aux multiples facettes », in
Recueil Dalloz 2006, Chroniques P. 1190, spéc. 1193.
56 - Sur la question, voir A. TUNC, « Ebauche du droit des contrats professionnels », in Le droit privé

français au milieu du XXe siècle, 1950, T. 2, PP. 136-158.


57 - Cette tendance est fortement soutenue par la doctrine, notamment : R. SAVATIER, «Sociologie

juridique des professions libérales », in Les métamorphoses économiques et sociales du droit civil
d’aujourd’hui, Dalloz, 1952-1959, P. 122 ; J. SAVATIER, « Contribution à une étude juridique de la
profession », in Archives de Philosophie du Droit, 1971, PP. 3-17 ; J. SAVATIER, La profession libérale,
LGDJ. 1947 ; B. SAINTOURENS, Le bail commercial des non commerçants, in Les activités et les biens
de l’entreprise, Mélanges offerts à J.DERRUPPE, Litec, Op. Cit. P. 93 ; M. KONE, Le nouveau droit
commercial des pays de la zone OHADA, Bibliothèque de droit privé, T. 406, LGDJ. 2003, N° 364 et ss ; dans
le même sens, A. FOKO, Le devenir du statut du commerçant à la lumière du droit OHADA, Thèse, Université
de Yaoundé II-Cameroun, 2005, PP. 237 et ss.
17
visés par l’AUDCG58, etc. Au demeurant, les opérations de transit et de télécommunication
sont introduites dans la catégorie des actes de commerce par le législateur OHADA.
L’exploitation industrielle des carrières et de tout gisement de ressources naturelles ainsi que
les assurances constituent une véritable innovation du droit OHADA. Le législateur OHADA
a tellement élargi « l’assiette » des actes pouvant être considérés comme commerciaux que
l’on pourrait considérer que finalement, le professionnel de l’OHADA est un commerçant
qui s’ignore59.

64. Déjà, Ph. LE TOURNEAU, à travers une analyse comportementale du commerçant


et du professionnel60, tentait une assimilation des deux statuts sans toujours en tirer toutes les
conséquences juridiques au sens du dépassement de la distinction du droit civil et du droit
commercial. Pour le profane en effet, la définition du commerçant est toujours celle
contenue dans l’article 632 du Code de commerce qui déjà brillait par son incapacité à
encadrer toutes les opérations de commerce qui conditionnent le statut de commerçant61. Il en
résulte que ces professionnels de l’activité économique doivent de ce fait se soumettre à
toutes les obligations, mais aussi tirer avantage du régime spécial de protection attaché à cette
qualité.

65. Cette démarche trouve un écho favorable dans la doctrine de droit civil
notamment. En effet, la consécration juridique de la notion de profession par la doctrine de
droit civil62 est le point de départ de la réflexion sur l’esquisse d’un statut de professionnel.
C’est une fois de plus à la doctrine que revient le mérite d’avoir esquissé une définition par le
biais de la notion de professionnel. En ce sens, J. CALAIS-AULOY et STEINMETZ
définissent le professionnel comme étant une personne physique ou morale qui agit dans le
cadre d’une activité habituelle et organisée de production, de distribution et de prestation de
services63 .

66. Cette définition a l’avantage non seulement d’exclure les travailleurs salariés et
d’inclure les personnes morales d’une part, mais surtout, de limiter la notion de profession
aux activités de production et de distribution des biens et de services d’autre part.
Apparaissant ainsi comme une notion fédératrice du droit civil et du droit commercial, la
profession quelle que soit sa nature, constitue l’un des éléments d’ancrage qui permet de saisir
et l’activité économique, et la personne qui l’exerce.

58 - Les articles 184 à 195 de l’AUDCG définissent clairement le statut de cette catégorie d’intermédiaires
de commerce qui sont assimilés aux commerçants.
59 - Beaucoup de non commerçants font aujourd’hui des opérations répétées ; comme des commerçants,

ils ont de fréquents appels à faire au crédit ; comme eux, ils ont parfois de nombreux créanciers, ils
contractent avec des étrangers ; enfin, des sociétés se fondent pour des opérations civiles de la plus grande
importance. Les habitudes du commerce tendent à devenir des habitudes générales ; ses besoins
deviennent ceux de tout le monde ; voir à ce titre, F. POLLAUD-DULIAN, « L’habitude en droit des
affaires », in Etudes à la mémoire d’A. SAYAG, PP. 349-369.
60 - « Les professionnels ont-ils du cœur ? », Rec. Dalloz Sirey, 1990, Chr. V, PP. 21-26 ; J. DIFFO

TCHUNKAM, La responsabilité du professionnel, Mémoire de Maîtrise, Droit Privé, Université de Yaoundé,


1990, P. 43.
61 - J. CALAIS-AULOIS, « Grandeurs et décadences de l’article 632 du Code de Commerce
(Considérations sur le domaine du droit commercial) », in Etudes de droit commercial, Mélanges H.
CABRILLAC, 1968, PP. 37-45.
62 - J. SAVATIER, « Contribution à une étude juridique de la profession », in Archives de Philosophie du

Droit, 1971, PP. 3-17.


63 - J. CALAIS-AULOY et F. STEINMETZ, Droit de la consommation, Dalloz, 6e Edition 2003, PP. 12 et

ss.
18
67. Déjà, pour encadrer cette catégorie juridique, la doctrine de droit civil a essayé
d’élaborer un droit propre aux professionnels. Dans la pensée des auteurs civilistes tel que G.
RIPERT et R. SAVATIER, élaborer un droit professionnel reviendrait à construire une
théorie de la profession susceptible d’accueillir et les professions civiles et les professions
commerciales, autrement dit, un droit propre aux professionnels, commerçants et non
commerçants. Apparue pour la première fois dans les travaux de G. RIPERT en 1939,
l’« ébauche d’un droit professionnel »64 entretenue par la doctrine de droit civil, semble avoir
trouvé son assise législative dans le droit africain des affaires.

68. Le statut de professionnel a ainsi le mérite d’être fondé sur une conception
extensive de « la profession habituelle » qui, déduite des dispositions de l’article 3 de
l’AUDCG, est le substrat nécessaire d’une définition empirique et inclusive du commerçant.
Voilà encore une notion élaborée par le droit civil, qui permet d’asseoir plus aisément la
qualification de l’acteur économique dans l’espace OHADA, en servant de trait d’union entre
le droit civil et le droit commercial.

Inclusive, elle l’est parce qu’elle ne restreint pas l’élection du statut de commerçant à
la nature des actes exercés par leur auteur, encore moins à l’exercice, même à titre habituelle
de certains actes, mais inclut dans son champ d’action les opérations et actes de toute nature
dès lors qu’ils présentent un faisceau d’indices suffisamment révélateurs de leur substance
économique.

Elle est essentiellement empirique dans la mesure où les éléments déterminants de la


catégorie juridique de « professionnel », dépendent purement et simplement de l’exercice
d’une profession habituelle. Qui plus est, la plupart des professions indépendantes, qu’elles
soient commerciales ou non, sont dominées par la recherche du profit dans un environnement
économique globalisé et hautement compétitif. Les secteurs agricoles modernes, les secteurs
miniers et immobiliers, peuvent être convoqués à titre d’exemple.

69. En effet, l’agriculture moderne, bien que relevant du secteur primaire, nécessite
bien souvent de gros investissements pour faire face à la concurrence, et oblige les
agriculteurs à recourir aux crédits au même titre que les commerçants. C’est également le cas
des avocats qui, bien qu’exerçant une profession libérale, doivent bénéficier d’un droit de
propriété sur leur local, car ils possèdent une clientèle fidèle qu’il convient de protéger65.

70. En revanche, il ne fait aucun doute que certains professionnels non commerçants
tels que les agriculteurs66, les artisans et les fermiers, sont considérés comme relevant du
droit civil dans la mesure où leurs activités ne sont pas censées générer du profit. La
doctrine67 a témoigné du très grand attachement des agriculteurs à l’exclusion de leurs
activités du droit commercial. Par exemple, l’agriculteur traditionnel produisait d’abord pour
sa subsistance et vivait très largement à l’écart du marché, n’achetait guère et ne vendait que

64 - Etudes H. CAPITANT, Dalloz 1939, P. 607.


65 - B. SAINTOURENS, « Le bail commercial des non commerçants », in Les activités et les biens de
l’entreprise, Mélanges offerts à J. DERRUPPE, Litec, 1991, p. 93 ; également, A. JAUFFRET,
« L’extension du droit commercial à des activités traditionnellement civiles », Mélanges KAYSER, 1978, T.
2, P. 99.
66 - Au sujet de certains agriculteurs classés dans la catégorie des professionnels non commerçants, lire, G.

COSNRAD, L’irréductible droit agricole, Paris 1949, spéc. P. 57.


67 - A. JAUFFRET, L’extension du droit commercial à des activités traditionnellement civiles, Mélanges P.

KAYSER, T. 2, Op. Cit., P. 61, H. CABRILLAC, L’agriculture et le droit commercial, le droit privé
français au milieu du XX ème siècle. Etudes offertes à G. RIPERT, T. 2, LGDJ, 1950, P. 273.
19
le surplus de ses récoltes68 . Sa préoccupation fondamentale consistait plus à se nourrir qu’à
faire un profit. Ceci était autant indéniable pour l’agriculteur primaire au sens strict69 du
terme, que pour l’éleveur. D’ailleurs, traditionnellement, l’élevage ne se dissocie pas de
l’exploitation de la terre. Dans ces conditions, agriculteurs et éleveurs étaient allergiques à
tout ce qui concerne les activités du commerce ; et pour prendre appui sur un auteur70 bien
connu, « l’exclusion de l’agriculture du droit commercial n’est pas seulement…une règle
juridique,…elle constitue aussi un des traits essentiels de la société… : les agriculteurs lui
restent fermement attachés et ne manquent pas de s’insurger et même avec une certaine
véhémence, lorsqu’ils soupçonnent le législateur de vouloir y porter atteinte ».

71. De tout ce qui précède, l’on peut lire dans les orientations actuelles du droit
OHADA, l’émergence d’un véritable droit commun des activités économiques, et l’esquisse
d’un droit professionnel. Il faudrait alors, pour poursuivre le mouvement, établir une
distinction accessoire entre professionnel commerçant et professionnel non-commerçant.
Autrement dit, à l’instar des sociétés commerciales et des sociétés civiles, il s’établirait
aujourd’hui clairement une distinction entre profession commerciale et profession civile ; tout
simplement.

72. La plasticité du statut du professionnel permettrait ainsi de favoriser


l’harmonisation non seulement des règles et mécanismes, mais également des régimes
spéciaux applicables aux activités économiques qui, dans l’ensemble, trouveraient un ancrage
socio économique dans le critère de l’entreprise.

2- De l’acte de commerce à l’entreprise, socle de l’activité économique

73. La notion d’acte de commerce circonscrit la définition et l’octroi du statut de


commerçant à l’exercice répété de certains actes, ce qui exclut de cette catégorie des acteurs
et opérateurs engagés dans le secteur économique, alors même qu’ils exerceraient leurs
activités dans le cadre d’une organisation structurée. Dans ces conditions, des activités qui
pourraient être saisies par le droit des affaires, soit pour les soumettre au régime du droit
commercial, soit pour leur accorder les privilèges liés au statut d’entreprise commerciale, ont
longtemps été exclues du domaine matériel du droit des affaires. L’idée dominante ici c’est
que les activités économiques reposent sur un instrument économique et institutionnel
incontournable qui est l’entreprise. Dans cette optique, de même que le fonds commercial n’a
d’existence juridique et économique qu’à travers la réalité de la clientèle, de même, l’activité
économique – civile ou commerciale – ne peut exister et bénéficier de tous les attributs qui
sont naturellement attachés à une telle activité que parce qu’elle est exercée dans le cadre
d’une entreprise structurée, quelle qu’en soit la taille.

74. La définition communément admise de l’entreprise l’appréhende comme étant une


structure organisée « réunissant, sous une direction commune, des moyens tant humains que
matériels en vue de l'accomplissement d'activités économiques, commerciales, industrielles
ou de services »71. Qu’elle soit de nature commerciale ou civile, elle constitue, selon M.

68 - Dans la société traditionnelle africaine, les populations procédaient à des échanges de produits pour
assurer leur équilibre alimentaire. Cette opération a reçu la dénomination de « troc ».
69 - Dans cette optique, l’activité agricole ne concerne que l’exploitation de la terre. Voir également, P.

DIDIER, La terre et le droit commercial, Etudes de droit commercial à la Mémoire de H. CABRILLAC,


Librairies Techniques, 1968, P. 153.
70 - H. CABRILLAC, ibid.
71 V. Dictionnaire du vocabulaire juridique, Paris, Litec, 1ère éd. 2002, sous la direction de R. CABRILLAC ;

Lexique des termes juridiques, sous la direction de S. GUINCHARD et G. MONTAGNER, 21ème éd.,
Paris, Dalloz, 1999, P. 227.
20
PEDAMON, « la cellule de base de l’économie contemporaine »72. C’est pourquoi elle
exerce aujourd’hui, et au même titre que la société civile professionnelle, un attrait certain
auprès des opérateurs de l’activité économique. Elle est le centre de tous les enjeux, qu’ils
soient politiques, économiques ou sociaux. On comprend alors que la conception
exclusivement patrimoniale de l’entreprise soit de plus en plus critiquée73 par la doctrine
contemporaine.

C’est cette aptitude à concilier les intérêts sociaux, économiques et institutionnels qui
représentent les enjeux conjugués des acteurs économiques et dont la notion d’entreprise
permet de fédérer, qui justifie le glissement du critère d’acte de commerce à celui de
l’entreprise.

75. Il apparaît clairement dès lors que la législation de l’OHADA porte une vision
transformatrice de l’environnement des affaires. Elle est orientée vers des actions ciblées et
assure par conséquent une fonction utilitaire aux notions et institutions flexibles et
pragmatiques. Le mérite de la théorie du droit, on le sait, c’est d’« esquisser des moules
permanents de la construction juridique dans lesquels se coulent les aspirations variables de
chaque société, selon les époques, les latitudes et les choix idéologiques ou techniques»74.
Autrement dit, il s’agit non pas d’assimiler tous azimuts les règles du droit civil à celles du
droit commercial sans réserve, mais il est question d’identifier des notions unificatrices qui
faciliteraient la mise en œuvre des mécanismes fonctionnels du droit économique75 en fin de
compte, notamment dans ses aspects purement spéculatifs et transactionnels. Du commerçant
au professionnel et l’esquisse d’un droit professionnel, de l’acte de commerce au critère de
l’entreprise, cette approche téléologique et utilitariste du droit marque bien la tendance à une
unification progressive et prudente des sources du droit OHADA.

76. En ce sens en effet, de nouveaux Actes uniformes76 en préparation sur les contrats,
la consommation et les organisations coopératives, augurent bien de la tendance à
l’unification des sources du droit régissant les activités économiques dans l’espace OHADA.
Dès lors, si les motifs avoués restent le renforcement de la prévisibilité du droit à travers
l’unicité des sources et la simplification des procédures, l’efficacité du droit en construction
demeure soumise aux équilibres idéologiques qui permettent de contrôler et de maîtriser les

72 M. PEDAMON : Droit commercial, Précis Dalloz, Paris, 1994, n° 71, P. 59 ; H.D. MODI KOKO,
« L’harmonisation du Droit des affaires en Afrique : Regard sous l’angle de la théorie générale du droit »,
Etudes Juriscope, 2002, accès recommandé :
www.juriscope.org/actu_juridiques/doctrine/OHADA/ohada_10.pdf
73- V. G. LAMBERT, « Introduction à l’examen de la notion juridique de l’entreprise », in Mélanges en

l’honneur de KAYSER, T.2, 2003, pp. 77 et s.


74 - J.-L. BERGEL, Théorie générale du droit, Dalloz, 1985, n° 1.
75 - J. ISSA SAYEH, Op. Cit., P. 470 ; J. LOHOUES-OBLE, « L’autonomie des parties : le caractère

supplétif des dispositions de l’avant-projet d’acte uniforme OHADA sur le droit des contrats », in Actes
du Colloque sur l’harmonisation du droit OHADA des contrats, Ouagadougou 2007, Rev. Dr. Unif. 2008,
P. 319 : accès recommandé : http://www.unidroit.org/english/publications/review/articles/2008-
1&2/001-008.pdf
76 - dont certains, qualifiés d’ « actes uniformes transversaux », englobent le droit des sûretés, les

procédures simplifiées de recouvrement de créances, le droit de l’arbitrage ; ils sont suffisamment


révélateurs de la volonté d’extension aussi bien matérielle que spatiale du champ législatif de l’OHADA, et
sa tendance exprimée au desserrement des frontières du droit civil et du droit commercial dans
l’élaboration des normes applicables sui generis : D. SOSSA, « Le champ d’application de l’avant-projet
d’acte uniforme OHADA sur le droit des contrats : contrats en général, contrats commerciaux, contrats de
consommation », in Rev. Dr. Unif. 2008, Op. cit, P. 339 et ss, accès recommandé :
http://www.unidroit.org/english/publications/review/articles/2008-1&2/001-008.pdf
21
fondements théoriques77 de la distinction du droit civil et du droit commercial chère au droit
privé.

77. C’est pourquoi, nous l’avons dit, l’approche adoptée par le législateur OHADA, et
qui est d’actualité dans la plupart des regroupements régionaux, est celle qui permet « de
mesurer, de contrôler et de maîtriser les avancées du droit uniforme »78. Elle a le mérite de
circonscrire le processus de fusion aux domaines d’élection identifiés par le législateur, en
isolant ceux qui sembleraient allergiques à toute œuvre d’unification.

78. L’épreuve que subirait la distinction du droit civil et du droit commercial sous
l’angle de la construction du droit uniforme OHADA est une épreuve congénitale au
processus qui, dans le cours normal des choses, conduit à l’isolement de la distinction à
certains domaines précis selon la technique connue de l’unification du droit privé.

C- L’ISOLEMENT DE LA DISTINCTION DU CHAMP DE L’HARMONISATION

79. Le cantonnement de la distinction aux questions procédurales notamment, permet


de mesurer l’ampleur de l’isolement. Il concerne les domaines intrinsèquement exclus du
champ de l’harmonisation. L’harmonisation a-t-on pu le remarquer notamment dans la
pratique du droit OHADA, ne se confond pas avec l'harmonie ; le suffixe exprime seulement
un mouvement vers l'harmonie des solutions, une volonté en mouvement qui inclut déjà
l'objectif d'intégration (normative et/ou judiciaire), mais exclut la composition ou la
recomposition, qui prendrait, par exemple, la forme d'un code, civil ou commercial, unifié à
l'échelle régionale79. Car les risques d'une construction africaine des affaires à dominante
hégémonique sont suffisamment réels, et la résistance suffisamment argumentée, pour inciter
à concevoir l'harmonisation comme une alternative à l'unification, c'est-à-dire comme un
processus spécifique qui inclut l'objectif d'intégration (normative et/ou judiciaire), mais se
limite à une intégration imparfaite dont la clé comme on le sait est non seulement la
préservation de marges nationales, mais surtout la survivance nécessaire des domaines
irréductibles de compétence spécifique (1), et des considérations d’ordre procédural (2).

1- Des domaines de compétence propre aux deux disciplines

80. Une brève incursion dans les fondements théoriques du droit privé révèle bien les
particularismes, la singularité et l’autonomie classiques des méthodes et solutions du droit
commercial et du droit civil. C’est la manifestation du dualisme du droit privé80 qui
commande et entretient encore cette précaution législative observée dans les initiatives
d’uniformisation du droit. Droit civil, droit commun de tous les citoyens pour la gestion de
leur fortune personnelle et l’exercice de leur activité professionnelle non commerciale. Droit
commercial, droit d’exception applicable soit à tous les citoyens pour régir leurs activités
économiques, soit aux commerçants pour réglementer leurs activités professionnelles.

77 - J-L. HALPERIN, Histoire du droit privé français depuis 1804, Op. Cit, spéc. PP. 258 et 283.

78- M. DELMAS-MARTY, « Le pluralisme ordonné et les interactions entre ensembles juridiques »,


Recueil Dalloz 2006, Chroniques, P. 951 et ss.

79 - « L’harmonisation du droit des affaires en Afrique : Regard sous l’angle de la théorie du droit, Etudes

Juriscope, p. 2, 2002, www.juriscope.org


80 - J-L. HALPERIN, Histoire du droit privé français depuis 1804, Manuel, PUF Quadrige 2001, PP. 261-265.

22
81. C’est bien ce caractère exceptionnel du droit commercial qui figure à l’article 1107
du Code civil qui, fixant la portée d’application du titre « Des Contrats », prévoit que « les
règles particulières aux transactions commerciales sont établies par les lois relatives au
commerce ».

82. Les rédacteurs du Code de commerce, tous imprégnés de cette conception d’un
droit d’exception, se sont contentés de poser des règles qui dérogent au droit commun du
Code civil.

83. Historiquement du moins, ces deux disciplines situées aux antipodes l’une de
l’autre, sont présentées dans des manuels distincts et étudiées séparément. Le droit civil
conserverait en propre certaines matières. Il en est ainsi en ce qui concerne l’état des
personnes81, l’organisation de la famille, les successions, les donations, les testaments, les
régimes matrimoniaux82. Le droit civil protège le citoyen ordinaire dans sa personne et dans
ses biens, alors que le droit commercial est gouverné par la vie des affaires et la quête
effrénée du gain. Ainsi par exemple, l’esprit des lois civilistes83 sera opposé à ce que le droit
de la famille (mariage, rupture du lien conjugal, filiation, tutelle, émancipation, succession,
…) soit cité comme une matière pouvant relever du droit commercial.

84. De l’autre côté, c’est l’esprit commercialiste qui trouvera impropre le fait que les
actes de commerce ou certains types de contrats commerciaux84 soient régis par le droit civil,
même si certaines institutions commerciales tirent leur racine du code civil.

85. En poussant un peu plus loin l’analyse, l’actualité du droit OHADA relativement
au projet d’Acte Uniforme relatif aux contrats, confirme encore pour l’instant la prudence qui
devrait conduire tout processus d’uniformisation du droit OHADA dans le sens du maintien
de la distinction dans certaines matières. En effet, si l’on considère la matière des contrats par
exemple, un Acte uniforme portant théorie générale des contrats traitant aussi bien des
contrats civils que des contrats commerciaux, conduirait selon J. ISSA SAYEGH85 à une
situation paradoxale :

- la CCJA86 serait compétente pour connaître en cassation, de tous les contrats civils, y
compris ceux qui n’ont rien à voir avec le droit des affaires tel que le bail à usage
d’habitation, le contrat de régime matrimonial, le prêt ou la location entre voisins, le mandat
entre un père et ses enfants, etc.

81 - En ce qui concerne la capacité des personnes toutefois, on concevrait que le droit civil fasse quelques
emprunts au droit commercial. De la sorte, les dispositions de l’AUDCG relatives aux conditions
d’exercice de la profession commerciale, au statut du commerçant, peuvent être étendues à la femme
mariée ou au mineur qui veut exercer une profession même non commerciale.
82 - J. YADO TOE, « La problématique actuelle de l’harmonisation du droit des affaires par l’OHADA»,

Actes du Colloque sur l’harmonisation du droit OHADA des contrats, Ouagadougou 2007, Rev. Dr Unif.
2008, P. 32 : accès recommandé : http://www.unidroit.org/english/publications/review/articles/2008-
1&2/001-008.pdf.
83 - PORTALIS opposait ainsi les lois commerciales et les lois civiles en déclarant que « l’esprit des lois

commerciales diffère essentiellement de l’esprit des lois civiles » : cité par M. GERMAIN, « L’esprit des
lois commerciales », in Le Discours et le Code », Portalis deux siècles après le Code Napoléon, Litec, Edition du
Jurisclasseur, 2004, P. 213.
84 - Les opérations sur le fonds de commerce par exemple, et le cas particulier du nantissement du fonds

de commerce, ainsi que les baux commerciaux.


85 - « L’OHADA : défis, problèmes et tentative de solutions », Actes du Colloque sur l’harmonisation du

droit OHADA des contrats, Ouagadougou 2007, Rev. Dr. Unif. 2008, PP. 470 et ss : accès recommandé :
http://www.unidroit.org/english/publications/review/articles/2008-1&2/001-008.pdf
86 - Cour Commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA.

23
- en revanche si l’on choisit de séparer les deux contentieux de cassation (CCJA et
Cour Suprême nationale), selon qu’un contrat est commercial ou civil, on court le risque
d’aboutir à des solutions contraires à propos d’un même point de droit, ce qui ne sert pas
l’objectif de sécurité juridique et judiciaire visé par le Traité.

86. C’est dans cet esprit que la spécialité du droit des affaires lui commande de ne pas
s’immiscer dans la théorie générale des contrats, mais plutôt de s’attacher à produire des
normes uniformes sur les contrats spécifiquement commerciaux qui n’ont fait l’objet jusqu’à
présent d’aucune réglementation de la part de l’OHADA. Le rapport général du Colloque de
Ouagadougou sur l’harmonisation du droit OHADA des contrats relève comme principal
champ d’intérêt le crédit-bail, le franchising, le factoring, le contrat de cession exclusive, les
contrats de distribution ainsi que tous les opérations liées à l’activité bancaire87.

87. L’on mesure par là l’ampleur de l’isolement de la distinction du droit civil et du


droit commercial aux fins de praticabilité du droit. C’est dans cet esprit qu’il faudrait
comprendre les irréductibles questions de procédures dont la maniabilité liées aux subtilités
de la matière, écartent toute velléité d’unification.

b- L’isolement des questions procédurales

88. Devant les tribunaux et les cours, la distinction des chambres civiles et
commerciales a survécu au processus d’unification du privé en général88, et du droit des
affaires et des activités économiques en particulier. Ce constat dénote sur le plan formel la
volonté manifeste de maintenir une séparation nette entre les deux branches du droit privé, du
moins d’entretenir la distinction entre le droit civil et le droit commercial. En outre, si l’on
considère certaines matières relevant foncièrement du droit civil tel que le droit des personnes
et de la famille qui est un droit séculaire, ces matières sont régies par des règles exclusives du
droit civil, tandis que celles relevant du droit commercial seront naturellement réglées par les
principes et solutions propres au commerce. Il apparaît donc légitime que des questions
préjudicielles soient soulevées devant le juge commercial, afin de permettre au juge civil de
trancher un point du droit relatif par exemple à la succession dans un litige commercial, et
vice versa.

89. Quant aux domaines susceptibles de fusion, il s’agira pour le juge de rechercher, à
partir de certains indices89, la nature des litiges qui y sont nés afin de les soumettre soit aux
règles de droit civil, soit à celles du droit commercial qui se démarquent bien souvent les unes
des autres. En matière de sociétés par exemple, il s’agira de savoir si, à défaut de
l’identification par la forme, le critère de la commercialité par l’objet peut être retenu pour
qu’une société soit qualifiée de commerciale ou, à défaut, revête une nature civile.

90. Dans cette optique, la preuve des obligations, les règles de la solidarité, le montant
des intérêts ou les délais de prescription de même que les règles de preuve, varieront suivant
que l’on est sous l’empire du droit commercial ou sous l’autorité des règles du droit civil. En
tout état de cause, le juge statuera soit en matière civile pour les litiges liés à l’état des
personnes, à la capacité, aux biens familiaux, etc., soit en matière commerciale lorsqu’il

87 - P. MEYER, « L’harmonisation du droit des contrats », Rapport Général du Colloque sur


l’harmonisation du droit OHADA des contrats, 15-17 Novembre 2007, Rev. Dr. Unif, 2008, accès
recommandé : http://www.unidroit.org/english/publications/review/articles/2008-1&2/001-008.pdf
88 - M. ROTONDI, « L’unification du droit des obligations civiles et commerciales en Italie », RTDCiv.

1968, PP. 1-24.


89 - Le recours à la règle de la distributivité par exemple.

24
s’agira de régler les litiges nés à l’occasion de l’exercice des activités économiques, ou des
différends entre commerçants et autres professionnels dans le cadre de leurs activités.

91. Sous ce prisme, il convient également d’observer que la suite de la procédure


demeurée classique en droit civil, a subi des profondes mutations en droit commercial à la
faveur des contraintes géo-juridiques nouvelles impulsées par le droit OHADA. A travers la
création de la CCJA avec ses règles processuelles et organisationnelles, il va sans dire que la
distinction du droit civil et du droit commercial sur le plan procédural tend plutôt à se
consolider. En effet, la tradition en matière de procédure judiciaire voudrait qu’une fois le
principe du double degré de juridiction observé, ou encore, dès lors qu’une décision est
rendue en dernier ressort, la Cour de cassation nationale soit compétente pour connaître des
pourvois formés à l’occasion de la procédure. Si cette règle est rigoureusement observée en
matière civile, une révolution a été opérée en matière commerciale. Dès lors, en plus de
donner des avis sur l’interprétation et l’application communes du traité de l’OHADA, des
règlements pris tant pour son application que pour celle des actes uniformes, en plus
d’intervenir en matière d’arbitrage, la CCJA, a principalement vocation à connaître des
pourvois contre les décisions de justice nationales rendues en dernier ressort en matière
commerciale, et plus largement sur les matières ayant fait l’objet d’un Acte uniforme.

92. Pour conclure sur ce point, il convient de relever la pertinence d’une question qui,
bien que relevant de la supranationalité du droit OHADA, a échappé à toute esquisse de
solution. L’OHADA n’ayant tenté d’uniformiser que les règles matérielles du droit affaires,
la question du règlement des conflits de lois et de conventions90 reste entière. L’unification
des règles de résolution des conflits de lois et de conventions, bien que relevant de la sphère
du droit civil, et plus spécifiquement du droit international privé, contribuerait efficacement à
supprimer les risques de conflits entre les dispositions des droits nationaux, dans la mesure où
les Actes uniformes laissent subsister les dispositions du droit national lorsqu’elles ne leur
sont pas contraires. Il s’agit d’esquisser une théorie générale de résolution des conflits de lois
et de conventions de droit privé en droit OHADA. Ce qui revêt toute son importance du point
de vue de la nécessaire coordination des solutions des conflits de lois d’un pays à un autre.
Car si l'unification est présentée comme la voie royale de l'internationalisation du droit, elle
ne l’est que d’un point de vue formel, dans la mesure où elle ignore les solutions nationales et
exclue les différences. Il serait judicieux d’anticiper sur la résolution des conflits de lois et de
conventions par la formulation des règles de conflits appropriées.

93. En outre, si « harmonisation » ou « uniformisation », procède avant tout d’un état


d’esprit, le processus actuel devrait d’ores et déjà intégrer l’éventualité d’une fusion
nécessaire des solutions du droit civil et du droit commercial qui serait justifiée par des
motivations d’efficacité du droit.

90 - La supranationalité de l’ordre juridique OHADA et son corollaire, l’applicabilité directe du droit


OHADA dans les ordres juridiques internes des Etats membres sont théoriquement consacrées. Les
principes sont connus, les solutions rencontrent l’adhésion des Etats, bien que celle des acteurs judiciaires
et extrajudiciaires impliqués dans le processus de mise en œuvre reste compromise par la sensibilité des
acteurs. En revanche, les règles de conflit de lois dans les domaines résiduels relevant des législateurs
nationaux, restent à élaborer. Voir à ce propos : Djibril ABARCHI, « La supranationalité de l’Organisation
pour l’Harmonisation an Afrique du Droit des Affaires (OHADA) », in Revue Burkinabe de Droit N° 37,
1er Semestre 2000, PP. 19-24, Ohadata D-02-02 ; également, C. BRIERE, Les conflits de conventions
internationales en droit privé, Bibliothèque de Droit Privé, T. 347, LGDJ. Paris, 2001 ; J. DIFFO
TCHUNKAM, « Les conflits de lois et de conventions de droit privé », Cours de Droit International
Privé, Université de Yaoundé II, 2008-2009.
25
94. Il faudrait alors relativiser l’importance de cette distinction pour envisager la
construction d’une théorie générale des obligations civiles et commerciales91 par exemple.
Cette démarche pourrait paradoxalement assurer toute sa vitalité au droit OHADA dans la
mesure justement où, dans ce domaine qui subit constamment les influences des
interdépendances économiques et juridiques, le droit ne serait qu’une vue de l’esprit s’il ne
répondait de façon méthodique92 pas aux contraintes sans cesse croissante de l’économie
globalisé.

95. Epreuve de la plasticité du droit93 ou épreuve des transformations94 des rapports


aux fins d’adaptation du droit à l’évolution du monde des affaires, l’amenuisement de la
distinction du droit civil et du droit commercial en droit OHADA permet aujourd’hui de
mesurer l’ampleur de son isolement au regard des impératifs de praticabilité du droit
économique.

91 - L’intérêt d’actualité des principes de droit européen des contrats, résulte d’un processus amorcé.
L’Europe a notamment connu un mode particulier d’harmonisation par le biais du jus commune. A
l’heure actuelle, la doctrine s’interroge même sur l’éventuel retour à un droit commun au sein de l’Europe.
C’est dans un paysage où de multiples « droits venus d’ailleurs » coexistent que vont être crées les
principes européens du droit des contrats. Ainsi, en 1980 la Commission pour le droit européen des
contrats dite Commission Lando, se met en place. Cette Commission a donc édicté des principes ayant
pour visée d’organiser les relations contractuelles au sein de la Communauté.
92 - H. MOTULSKY, Principes d’une réalisation méthodique du droit privé, Dalloz, Paris, 2002, PP. 10-

22 ; l’auteur soutient en effet que « le droit n’est pas désincarné.» ; voir, dans le même sens, B. LATOUR,
La fabrique du droit : une ethnographie du Conseil d’Etat », La découverte, Paris, 2004, P. 235.
93 - G. RIPERT, Les forces créatrices du droit, LGDJ. Paris, 1955, P. 76 ; voir également, dans le sens de

l’inopportunité de la science pour la praticabilité du droit économique : F. GRUA, « Les divisions du


droit », RTDCiv. 1993, Chr. P. 59 ; dans le même sens, X. MARTIN, « Le droit privé révolutionnaire :
essai de synthèse », RTDCiv. 2006, Chr. P. 239 ; B. FRYDMAN, Le sens des lois, Collection « Penser le
Droit », Bruylant, Bruxelles, 2005, P. 441, N° 211.
94 - C. THIEBIERGE –GUELFUCCI, « Libres propos sur les transformations du droit des contrats »

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