Vous êtes sur la page 1sur 3

Etude de la scène 2, Acte III

Comment l'image du pouvoir est-elle (re)présentée au théâtre ?

La fiche auteur de Mister Jarry est disponible ici. Cet auteur est l'un des précurseurs du Surréalisme
et de l'Absurde, deux mouvements que vous pouvez retrouver là. Référez-vous aux fiches méthodo
sur les registres (polé./comique) par ici.

L'extrait étudié en classe.


L'oeuvre intégrale pour ceux que ça intéresse. 

Le résumé de la pièce : Le père Ubu a été roi d’Aragon et est maintenant capitaine de dragons,
officier de confiance du roi de Pologne, Venceslas. La mère Ubu aspire au trône et pousse son mari
à s’en emparer en lui brossant un tableau alléchant de la vie de souverain. Le père Ubu se laisse
convaincre et fomente une conspiration avec le capitaine Bordure. Pendant la revue de l’armée, le
père Ubu et Bordure commettent leur forfait. Le roi et ses deux fils présents à la revue sont tués. La
reine et Bougrelas fuient, mais la reine meurt de chagrin. Parvenu sur le trône, Ubu se montre
extrêmement cruel et cupide. Il fait tuer les nobles, les magistrats et les financiers, et impose au
peuple de nouveaux impôts, qu’il va récolter lui-même pour être sûr de ne pas être volé. Bordure,
emprisonné aussitôt après l’attentat, s’échappe et va chercher l’aide du tsar de Russie, Alexis,
contre Ubu. Le tsar envoie son armée, Ubu doit se résoudre à se battre. Pendant qu’il est à la
guerre, la mère Ubu tente de voler le trésor des rois de Pologne, mais elle est chassée du trône par
Bougrelas et doit fuir. La mère et le père Ubu, tous deux défaits, se retrouvent dans une caverne.
Cernés par l’armée conduite par Bougrelas, ils fuient et se retrouvent sur un bateau en direction de
la France.
Question à l'oral :
Comment Jarry met-il les ressources du comique au
service de la dénonciation de la tyrannie ?

Plan proposé :
   I. Le choix des personnages. 
        1. Père Ubu.
        2. Mère Ubu.
        3. Les nobles, financiers, greffier.
   II. Les registres (comique/polémique).
        1. Registre comique.
        2. Registre burlesque.
        3. Registre polémique.
   III. Dénonciation de la passivité.
        1. Mère Ubu.
        2. Les autres personnages qui ne parlent pas.
        3. La Cour.

Travail préparatoire
● Comique de mots : « Père Ubu » et « Mère Ubu » ne sont pas des titres honorifiques, ce sont des termes
familiers, voire péjoratifs. Néologismes inventés par Jarry : « bouffre » (v.17), « bouffresque » (v.63),
« merdre » (v. 50 et 78). « Tu n'as rien autre chose ? » (v.22) : syntaxe incorrecte, inattendue dans la
bouche d'un Roi. Le vers 34 insiste sur la cupidité d'Ubu et montre par la même occasion sa non-maîtrise
de la langue. Pronom « ça » (v.47, 74..) appartient au vocabulaire familier. Les magistrats parlent tous en
même temps mais ne prononcent qu'un seul mot à chaque fois (v.53 à 56) : chaos. Ironie d'Ubu avec « ma
douce enfant » (v.80).

● Comique de situation : La première phrase suppose que le roi convoque la Cour pour une réunion → se
transforme en scène de massacre (appuyée par champ lexical de la violence : « le crochet », « le
couteau », la didascalie « on pousse brutalement », « je vais faire périr », « condamnés à mort »,
« décervèlera », « quelle basse férocité », etc.). Mère Ubu n'est pas très énergique pour arrêter son mari
dans sa folie (chacune de ses répliques) → un peu de complicité, même si elle a un certain sens pratique
(« qui rendra la justice maintenant ? »). Réaction des financiers, des magistrats et des nobles : indignation.
Ils portent la parole du peuple mais ils pensent seulement à leurs intérêts personnels (comme leur roi).
REGISTRE POLEMIQUE (dénonciation de la corruption).

● Comique de caractère : Roi impulsif, dynamique (répliques brèves et rapides), violent (champ lexical de
la violence vu ds le comique de situation), autoritaire (impératifs), capricieux (comportement d'enfant),
cupide (champ lexical de l'argent : « enrichir », « revenus », « trois millions de rixdales », « revenus »,
« je m'enrichis », « m'enrichir », « j'aurai tous les biens », « je veux garder pour moi la moitié des
impôts », « j'irai […] recueillir les impôts » + « MA liste de MES biens » → insistance), impitoyable, qui
veut se mêler de tout (justice, finances), hyperactif (le dernier vers = summum du ridicule, Père Ubu
donne l'image d'un homme de pouvoir très agité). La Reine est soit passive (crainte ?), soit complice (elle
fait office de femme tyran). Les Magistrats, les Nobles et les Financiers n'ont pas d'identité, ils sont
seulement désignés par leur fonction, ils parlent souvent d'une même voix (ils ont tous le même caractère
et donc les mêmes intérêts) aux v.7, 49, 65, 68... Ils n'opposent cependant aucune résistance au roi.
REGISTRE POLEMIQUE (dénonciation de la tyrannie et de la passivité).

● Comique de geste : 5 didascalies qui signalent l'agitation → « On pousse brutalement les Nobles », « Il
le prend avec le crochet et le passe dans le trou », « On empile les Nobles dans la trappe », « Ils se
débattent en vain », « On enfourne les financiers ». Cette agitation sur scène est renforcée par l'agitation
de Père Ubu (phrases exclamatives dans tout le texte).

● Comique de répétition : Répétition de trois scènes de massacre. Paradoxal : les massacres font rire.
Nous avons affaire à un renouvellement de la représentation de la mort : la mort devient comique. Elle est
expliquée et vue sur scène, elle n'est plus implicite et dissimulée aux spectateurs : il s'agit d'une rupture
avec les règles du théâtre classique. Répétition de mots : « Noble(s) » et « trappe ». Toujours les mêmes
questions posées par Père Ubu qui reviennent lorsqu'il s'adresse aux Nobles : ces questions tournent
autour de l'argent, invariablement. Répétition des réactions des Nobles, Magistrats et Financiers : ils sont
indignés et effrayés. Cependant, les financiers ne se débattent pas, ils connaissent leur sort → ils n'ont
aucun courage, ce qui renforce l'aspect tyrannique d'Ubu et la faiblesse des membres de la Cour. 

Vous aimerez peut-être aussi