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UNIVERSITE CENTRALE

Année universitaire : 2022/2023


Théories du cinéma & de l’audiovisuel
Niveau L3
Enseignant : Hamadi BOUABID
Séance 3
La question du spectateur

Dans sa fondamentale introduction à une philosophie du cinéma, Cohen-Sénat, à


plusieurs reprises, est revenu sur les conditions du spectacle cinématographique et les
conséquences organiques, affectives, intellectuelles qui en découlent. On pourrait en
s’inspirant de ses remarques, amorcer le problème de la passivité du spectateur en
distinguant trois ordres de conditions propres à cet état :
1- Conditions matérielles du film
2- Conditions physiologiques et internes
3- Conditions affectives et psychologiques du spectateur.

 La rue et le monde cols de la salle de cinéma


 L’attraction qu’exerce l’écran. A cet effet, l’on se rappelle du premier spectacle
filmique au Rex à Paris, comment les spectateurs apeurés ont fui la salle, en
s’imaginant que le train qui entrait à la gare de la Ciotat aller les écraser.
 Intensité de l’écran
Au début de chaque séance de cinéma, le spectateur sait parfaitement qu'il n'aura rien
d'autre à faire que de se laisser porter par le cours du film. A défaut de toujours flatter
son confort, il s'agira de favoriser en tous points son plaisir, sans oublier les plus
gentiment pervers, femme à barbe, monstre sanguinaire…
La « bonne place », c'est celle d'abord qu'il suffirait de payer pour voir et entendre,
sans peine ni fatigue, sans autre forme d'engagement. Le ticket donne accès au
spectacle, mais le spectacle n'est pas exigeant et ne requiert que la disponibilité
(relative) du spectateur, une attente ou une attention à peine plus intenses que celle s
que promène la curiosité de l’inactif. Ce qu'il y a de désir de voir dans la place initiale
du spectateur n'est pas encore très mobilisé et ne demanderait en somme qu’à l'être
davantage, pourvu qu'il n'en coûte rien de plus.
Mais le spectateur de film qui vient au cinéma pour y trouver encore plus de spectacle,
va devoir le payer d'un autre prix. Il y a une lutte originelle entre la logique
accumulative du spectacle et celle, soustractive, du cinéma. Autant que de l'attraction
foraine, le cinéma procède de la photographie, qui est d'abord, inscription, trace,
révélation, une écriture de la lumière dans un cadre d'espace et de temps (la pose).
Spectacle d'un côté, avec ses débridés, ses relâchements, ses accélérations, ses points
de vue multiples et éphémères, ses exagérations, ses surenchères ; et de l'autre côté, via
la photographie : écriture, c'est-à-dire mesure (de la quantité de lumière, du temps
d'exposition, du cadre, de la focale) et relative cohérence de s principes d'exclusion.
Au cinéma comme en photo, on ne peut à la fois cadrer en plan large et en gros plan,
filmer de près et de loin ralentir et accélérer (prendre une même photo en pose longue
et en instantané) : le choix d'une valeur écarte les autres, les paramètres sont
intolérants, c'est le gouvernement d'un système paradigmatique .
Dès les premiers films Lumière, ces couples étaient fixés une fois pour toutes,
inamovibles, et nous les retrouvons tels quels, depuis, dans toutes les prises de vue qui
procèdent de la cinématographie : près/loin, serré/large, rapide/lent, fixe/mobile,
net/flou, sombre/clair, entier/coupé… . À commencer par la conjonction disjonctive
majeure : dedans/dehors.. .

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