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LES HYDROCEPHALIES CHRONIQUES DE

L'ADULTE
Dr A. Mahtout

I- Introduction

L'hydrocéphalie chronique de l'adulte (HCA) se définie par une triade clinique


associant, troubles de la marche, démence et incontinence urinaire. Rare avant l'âge de
60 ans. Elle résulte d'un trouble permanant de la circulation intra crânienne du LCR,
ce trouble est responsable d'une distension des ventricules sans HIC plus ou moins
associé à des lésions parenchymateuses.

II- Physio pathologie

Un demi litre par 24 heures; telle est la production quotidienne de LCR qui circule
régulièrement dans notre cerveau. La totalité du liquide est renouvelée 03 fois par
jour.

L'HCA est caractérisée par une réduction de l'absorption du LCR. L'augmentation de


pression dans le LCR va être en partie compensée par une augmentation de la taille
des ventricules sans HIC patente.

La dilatation des ventricules entraine une augmentation progressive des forces


appliquées par le LCR sur les parois des ventricules; cette majoration de la pression
exercée par les ventricules va être à l'origine des lésions cérébrales péri ventriculaires.

La diminution de résorption du LCR va induire, en outre, une diffusion compensatoire


de LCR vers la substance blanche péri ventriculaire et probablement une résorption de
LCR trans capillaire à contre courant.

Ces anomalies sont responsables d'une rupture épendymaire progressive avec œdème
péri ventriculaire et diminution de la perfusion cérébrale à l'origine d'une
dégénérescence neuronale et d'une gliose réactionnelle.

III- Etiologies

Dans la majorité des cas les causes de l'HCA sont inconnues, ce sont des formes
primitives ou idiopathiques qui touchent préférentiellement une population de plus de
70 ans.

Parfois l'HCA peut être secondaire à:


- Un traumatisme crânien.
- Une hémorragie méningée.
- Une méningite.
- Une tumeur.
- Ou à des séquelles d'interventions chirurgicales favorisant la fibrose des
espaces liquidiens et des voies de résorptions du LCR.
IV- Epidémiologie

La fréquence de l'HCA est difficile à évaluer. Les diagnostics par excès sont aussi
fréquents que par défaut. Actuellement elle est de l'ordre de 1.3 à 2.2 cas par million
d'habitant en France soit 0.4% de la population au delà de 65 ans.

V- Clinique

La symptomatologie clinique tient actuellement une place prépondérante dans la pose


du diagnostic. Elle est représentée par la triade d'ADAMS HAKIM.

A- Troubles Moteurs

Ils touchent essentiellement la marche et la station debout, le démarrage de la marche


est particulier avec l'impression que les pieds écartés restent collés au sol, la démarche
est ensuite hésitante et les obstacles ne peuvent êtres franchis, entrainant souvent la
chute.

Les troubles affectant les membres inf touchent également les membres supérieurs
contrastant avec un examen neurologique tout à fait normal.
L'installation de ces symptômes est progressive. En l'absence d'un traitement
l'évolution se fait au bout de quelques années vers un état grabataire.

B- Troubles cognitifs ou la démence pseudo Alzheimer

Il s'agit d'une régression des acquisitions, elle est difficile à étiqueter car elle
s'apparente à de nombreux tableaux cliniques rencontrés dans les démences
d'Alzheimer ou non Alzheimer hormis l'aphasie, l'apraxie et l'agnosie jamais
présentent dans l'HCA.

Il s'agit d'une dégradation progressive, petit à petit les personnes deviennent inactives
et désintéressées avec une altération de la mémoire des faits récents. Sans traitement
l'évolution va jusqu'au mutisme akinétique.

C- Troubles Sphinctériens

C'est le troisième élément du trépied clinique, il s'agit d'urgences vésicales se


majorant dans le temps avec une incontinence urinaire.

VI- Diagnostic para clinique:

Devant ces signes cliniques, une batteries d'examens est demandée a savoir:

A- TDM cranio-cérébrale:

Retrouvant le plus souvent une dilatation significative des ventricules.


B- L'IRM

Nécessaire pour préciser les lésions parenchymateuses associées et rechercher un


obstacle éventuel sur les voies d'écoulement du LCR, des séquences morphologiques
classiques et des séquences dynamiques flux) sont demandées.

Si le diagnostic reste incertain, d'autres examens non radiologiques sont demandés


comme la ponction lombaire à titre de test thérapeutique. La fréquence des lésions
dégénératives et/ou vasculaires associées à une HCA brouille les cartes en donnant
des réponses irrégulières à la ponction lombaire, tout comme à la dérivation du LCR.
Un solide examen neuro psychologique ainsi que l'imagerie permettra de faire le bilan
de l'ensemble des lésions.

La ponction lombaire soustractive, ou le tap test est avec le scanner le deuxième


essentiel au diagnostic de l'HCA. L'amélioration clinique qui fait suite à une ponction
est en général un bon indicateur pronostic de l'intérêt d'une dérivation chirurgicale de
LCR. L'amélioration peut être dissociée portant de façon incomplète sur un des trois
champs (moteur, cognitive, ou sphinctérien). Parfois la réponse est assez paradoxale
voir négative qui pourrait être expliquée par:

- Le volume du prélèvement serait insuffisant, il faudrait au minimum 30 cc et


au mieux 50 cc.
- L'HCA n'est pas isolée, des lésions vasculaire et ou dégénératives sont
associées, l'évacuation de LCR ne peut donc pas tout résoudre. Si des lésions
d'origines différentes Co existent (imagerie par IRM contribuera à préciser
l'importance des lésions vasculaires).
- L'imagerie fonctionnelle comme la tomoscintigraphie cérébrale (TEMP)
pourra fournir des images évocatrices en elle-même de l'HCA et contribue au
diagnostic des maladies dégénératives.
- A noter également que la PL peut avoir parfois une mauvaise valeur prédictive
puisque 40% des patients non améliorés par la ponction le sont par la
dérivation de LCR.

VII- Traitement

Le traitement consiste en la pose par le neurochirurgien d'un système de dérivation


qui draine du cerveau vers les autres parties du corps le LCR où il est absorbé dans la
circulation sanguine. Cette technique simple donne de bons résultats sur les troubles
moteurs et sphinctériens. Si l'HCA est prise en charge tôt, les résultats sont également
bons sur les troubles cognitifs.

Le traitement de référence de l'HCA consiste à mettre en place chirurgicalement une


dérivation interne et permanente du LCR qui va permettre d'éliminer au niveau du
cerveau, le trop plein de liquide, pour l'amener dans une autre partie de l'organisme.

Les Dérivations lombo péritonéales (DLP) ne sont plus pratiquées, car elles peuvent
être à l'origine de complications comme l'engagement. Les dérivations vers la plèvre,
la vessie et la vésicule biliaire sont historiques.
Actuellement deux possibilités sont offertes au chirurgien ; soit le drainage se fait
directement du ventricule vers le péritoine, soit du ventricule vers la veine jugulaire.
Depuis l'apparition des valves réglables, la préférence va vers la dérivation jugulaire.

Quand les patients sont inopérables d'autres solutions peuvent être proposées comme
la réduction médicamenteuse de la sécrétion de LCR (ACETAZOLAMIDE), la
réalisation de PL répétées ou la kinésithérapie.

L'utilisation de valve réglables permet de contrôler le drainage qui est adapté aux
besoins du patient, évitant ainsi une complication majeure de l'hyper drainage de LCR
qui est hématome sous dural.

VIII- Evolution

Les troubles de la marche sont les premiers à s'améliorer et ce très rapidement et d'és
les premiers jours en post opératoire, la récupération intervient dans plus de 70% des
cas.

L'amélioration de l'incontinence urinaire est légèrement décalée par rapport à celle de


la marche. Les troubles urinaires sont normalisés dans 50 à 60% des cas au cours du
premier mois post op.

La récupération des troubles cognitifs est plus aléatoire et s'étale dans le temps
pendant les 03 à 06 mois qui suivent la pose de la dérivation. Le résultat global est
apprécié un an après.

IX- Surveillance

Elle se base sur des signes cliniques et scanographiques, des ajustements de pression
sont nécessaires chez 50% des patients, avec en moyenne 03 ajustements par patient.
Le réglage de la valve se fait au cabinet du neurochirurgien par un simple aimant alors
qu'autre fois on été obligé de réopérer et de changer la valve. La valve peut rester en
place toute la vie.

X- Complications

Elles surviennent dans 13 à 20% des cas, il s'agit essentiellement:


- De dysfonctionnement de valve dans 1.5%.
- D'infections dans 1 à 6.5 %.
- D'hématome sous dural dans 07% des cas.

CONCLUSION

Il ne faut pas hésiter à proposer cette intervention chirurgicale aux patients de 80 ans
et plus, la pose d'une dérivation pour HCA, est certes un acte neurochirurgical mais
elle reste une intervention légère avec un risque de complication inf à 02% et avec
70% d'amélioration. La pose d'une Dérivation est un acte parfaitement codifié. Les
bénéfices sur l'autonomie, l'incontinence et si l'on intervient assez tôt sur les fonctions
cognitives sont spectaculaires.
***(((*)))***

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