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INSTITUT SUPERIEUR DE COMMERCE

ET D'ADMINISTRATION DES ENTREPRISES


CYCLE D'EXPERTISE COMPTABLE (C.E.C)
ISCAE

MEMOIRE PRESENTE POUR L’OBTENTION DU


DIPLÔME NATIONAL D’EXPERT-COMPTABLE

LA PROBLEMATIQUE DES PRIX DE TRANSFERT

Auteur Madame Mahat CHRAIBI

Président du jury Monsieur Mustapha MELSA (Professeur à l’ISCAE)

Directeur de recherche Monsieur Abdelaziz ALMECHATT (Expert-comptable DPLE)

Suffragants Monsieur Mohamed El KHALIFA (Expert-comptable DPLE)


Monsieur Mohamed HDID (Expert-comptable DPLE)

Novembre 2005
2

A mon père …
3

TABLE DES MATIERES

INTRODUCTION ………………………………………………………………………………. 8

PREMIERE PARTIE : DU PRINCIPE DE PLEINE CONCURRENCE A LA


THEORIE DES PRIX DE TRANSFERT……………………………………………………. 13

I- MISE EN ŒUVRE DU PRINCIPE DE PLEINE CONCURRENCE ………………………..…………… 14

1- Le principe de pleine concurrence……………………………………………………………..

15 1-1 Exposé du principe de pleine concurrence…………………………………… ……... 15


1-2 Les limites du principe de pleine concurrence………………………………………..17
1-3 Maintien du consensus international autour du principe de pleine concurrence…….. 18

2- Analyse de comparabilité

………………………………………………………………………18 2-1 Caractéristiques

des biens et des services……………………………………………. 19


2-2 Analyse fonctionnelle…………………………………………………………………20
2-3 Analyse des clauses contractuelles……………………………………………………21
2-4 Analyse des situations économiques………………………………………………….21
2-5 Analyse des stratégies des entreprises………………………………………………...22

3- Evaluation de transactions distinctes ou combinées…………………………………………...

23 4- Intervalle de pleine concurrence

……………………………………………………………… 24 5- Examen de données sur

plusieurs années……………………………………………………... 25 II- LES METHODES

APPLICABLES POUR LA FIXATION DES PRIX DE TRANSFERT……………………. 26

1- Les méthodes traditionnelles fondées sur les transactions……………………………………


26

1-1 La méthode du prix comparable sur le marché libre………………………………….26


1-1-1 Le principe………………………………………………………………….
26
1-1-2 Exemples d’application……………………………………………………..27
1-1-3 Les avantages et les inconvénients de la méthode du prix comparable sur le
marché libre……………………………………………………………….
30 1-1-4 Application de la méthode du prix comparable, dans le contexte
4
marocain..30

1-2 La méthode du prix de revente………………………………………………………..31


5

1-2-1 Le principe………………………………………………………………….
31
1-2-2 Exemples d’application……………………………………………………..32
1-2-3 Les avantages et les inconvénients de la méthode du prix de revente……...
34 1-2-4 Application de la méthode du prix de revente dans le contexte
marocain….34

1-3 La méthode du prix de revient majoré………………………………………………..


35 1-3-1 Le
principe…………………………………………………………………. 35
1-3-2 Exemple d’application……………………………………………………...
37 1-3-3 Les avantages et inconvénients de la méthode du prix de revient
majoré…. 39 1-3-4 Application de la méthode du prix de revient majoré, dans le
contexte
marocain…………………………………………………………………… 40

2- Les nouvelles méthodes……………………………………………………………………… 41

2-1 Les méthodes transactionnelles de bénéfices…………………………………………41

2-1-1 La méthode de partage des bénéfices……………………………………… 41


2-1-1-1 Le principe………………………………………………………. 41
2-1-1-2 Exemple d’application…………………………………………… 43
2-1-1-3 Les avantages et les inconvénients de la méthode de
partage de bénéfices………………………………………………
45 2-1-1-4 Application de la méthode de partage des bénéfices, dans le
contexte marocain…………………………………………………………46

2-1-2 La méthode transactionnelle de la marge nette……………………………. 47


2-1-2-1 Le principe………………………………………………………. 47
2-1-2-2 Exemple d’application…………………………………………… 48
2-1-2-3 Les avantages et les inconvénients de la méthode transactionnelle
de la marge nette………………………………………………… 49
2-1-2-4 Application de la méthode transactionnelle de la marge nette,
dans le contexte marocain……………………………………….. 50

2-2 La méthode basée sur la répartition globale selon une formule préétablie………….. 50
2-2-1 Le principe………………………………………………………………….
50 2-2-2 Application de la méthode de répartition globale, dans le contexte
marocain…………………………………………………………………… 52

3- Cas des transactions portant sur les biens incorporels et les services……………………….. 52

3-1 Cas des biens incorporels……………………………………………………………. 52

3-1-1 Distinction entre les biens incorporels manufacturiers et les biens


incorporels de commercialisation……………………………………………….. 52
3-1-2 Application du principe de pleine concurrence aux biens incorporels……..
54
6
3-2 Cas des services……………………………………………………………………… 58
7

3-2-1 Le service doit avoir été rendu…………………………………………….. 59


3-2-2 La rémunération…………………………………………………………… 61
3-2-3 Le prix du service…………………………………………………………. 62
3-2-4 Quelques exemples de services intragroupe………………………………. 63

3-3 Les accords de répartition des coûts…………………………………………………. 64


4- Critères de choix d’une méthode de fixation des prix de transfert : Cas du Maroc…………. 65

4-1 La méthode à envisager, en premier lieu……………………………………………..


65 4-2 Les autres méthodes envisageables, lorsque la méthode du prix comparable sur le
marché libre n’est pas applicable…………………………………………………………
65
4-2-1 Cas des services……………………………………………………………. 66
4-2-2 Cas de livraison des biens………………………………………………….. 67
4-2-3 Cas des biens incorporels……………………………………………………68

DEUXIEME PARTIE : LES REDRESSEMENTS OPERES AU TITRE DES TRANSFERTS


INDIRECTS DE BENEFICES ET LES MOYENS DE SOLUTIONNER OU D’EVITER LES
LITIGES Y AFFERENTS – PLACE DE L’EXPERT COMPTABLE …………………….. 69

I- LES TRANSFERTS INDIRECTS DE BENEFICES : ARTICLE 4 DU LIVRE DES PROCEDURES FISCALES 70

1- Le champ d’application de l’article 4 du livre des procédures fiscales……………………… 70

1-1Existence de liens de dépendance……………………………………………………..

71 1-1-1 Dépendance juridique……………………………………………………… 73


1-1-2 Dépendance de fait………………………………………………………….74

1-2 Existence d’un transfert indirect de bénéfices………………………………………..

75

1-2-1 Achat à prix majoré ou vente à prix minoré……………………………….. 76


1-2-1-1 Cas pratique de redressement lié à un achat à prix majoré……………… 77
1-2-1-2 Cas pratique de redressement lié à une vente à prix minoré…………….. 78
1-2-1-3 Autre cas de redressement lié à une minoration d’excédent
brut d’exploitation »……………………………………………………………...

79 1-2-2 Rémunération anormale des prestations de services……………………….

79

1-2-2-1 Le cas général…………………………………………………………… 79


1-2-2-2 Cas pratique de redressement lié à des prestations de services…………. 80

1-2-3 Versement de redevances excessives……………………………………… 81

1-2-3-1 Le cas général…………………………………………………………… 81


8
1-2-3-2 Cas pratique de redressement lié aux redevances excessives…………… 81
9

1-2-4 La pratique de taux d’intérêts réduits ou majorés…………………………. 82


1-2-5 Abandon de créance………………………………………………………. 82
1-2-6 La prise en charge de frais excessifs………………………………………..83
1-2-7Conclusion sur les méthodes utilisées par l’administration fiscale
marocaine pour mettre en évidence l’existence d’un transfert indirect de
bénéfices………………………………………………………………………….. 83

2- La charge de la preuve dans le cadre du contrôle des transferts indirects de bénéfices………84

3- La détermination du bénéfice imposable en cas de mise en œuvre des dispositions de


l’article 4 du livre des procédures fiscales…………………………………………………… 85

3-1 L’ajustement primaire………………………………………………………………...


86 3-2 L’ajustement au titre des revenus réputés distribués…………………………………
87 3-3 Sort de la TVA……………………………………………………………………….
89 3-4 Les pénalités et majorations de retard………………………………………………..
90

4- Parallèle avec l’article 57 du code général des impôts en France…………………………….92

4-1 Conditions d’application de l’article 57 du CGI………………………………………93

4-1-1 Existence de liens de dépendance………………………………………….. 93


4-1-2 Existence d’un transfert de bénéfices……………………………………… 97

4-2 La procédure applicable……………………………………………………… 98

4-2-1 Etablissement de la preuve……………………………………………….. 99


4-2-2 Quelques cas de jurisprudence, en matière de transfert indirect de
bénéfice…………………………………………………………………. 102
4-2-3 Possibilité d’apporter la preuve contraire………………………….…….. 104

4-3 Effets de l’application de l’article 57……………………………………………….. 105

4-4 La procédure d’accord préalable……………………………………………………..107

II- METHODES DESTINEES A SOLUTIONNER OU A EVITER LES LITIGES AVEC LES ADMINISTRATIONS
FISCALES, EN MATIERE DE PRIX DE TRANSFERT ET PLACE DE L’EXPERT COMPTABLE………. … 109

1- Méthodes destinées à solutionner les litiges, en matière de prix de transfert……………… 109

1-1 La procédure amiable…………………………………………………………… … 109


1-2 L’ajustement corrélatif………………………………………………………………. 111
1-3 Les problèmes posés par la procédure amiable et par l’ajustement corrélatif………. 113
1-4 L’arbitrage…………………………………………………………………………... 117

2- Méthodes destinées à éviter les litiges, en matière de prix de transfert ………………………119


10

2-1 La nécessité de mettre en place une documentation et de l’actualiser- Place de


l’expert-comptable……………………………………………………………………… 119

2-1-1 Recensement des informations…………………………………………… 119


2-1-2 Organigramme des entreprises associées………………………………… 120
2-1-3 La politique de prix de transfert………………………………………….. 121
2-1-4 Mise en place de procédures internes pour actualiser et conserver
toute documentation……………………………………………………… 124
2-1-5 Documentation liée au contrôle fiscal……………………………………. 125

2-2 Les contrôles fiscaux simultanés……………………………………………………. 127

2-2-1 Le fondement juridique des contrôles fiscaux simultanés………………… 127


2-2-2 Les contrôles fiscaux simultanés et les prix de transfert………………….. 128
2-2-3 La convention concernant l’assistance administrative mutuelle
en matière fiscale……………………………………………………………
129 2-2-4 L’accord modèle OCDE……………………………………………………
130 2-2-5 La pratique des contrôles fiscaux simultanés………………………………
131

2-3 Les régimes de protection……………………………………………………………. 132

2-3-1 Définition………………………………………………………………….. 132


2-3-2 Les principaux objectifs des régimes de protection…………………………133
2-3-3 Les problèmes posés par les régimes de protection………………………... 135
2-3-4 Conclusion sur les régimes de protection………………………………….. 138

2-4 Les accords préalables, en matière de prix de transfert……………………………….138

2-4-1 Définition……………………………………………………………………138
2-4-2 Le fondement juridique de l’APP…………………………………………..
140 2-4-3 Les avantages offerts par
l’APP…………………………………………….141 2-4-4 Les inconvénients des
APP………………………………………………… 141 2-4-5 La pratique de
l’APP………………………………………………………..142

CONCLUSION ………………………………………………………………………………….148

BIBLIOGRAPHIE…………………………………………………………………….………... 153

ANNEXES………………………………………………………………………………………. 158

LEXIQUE FRANÇAIS - ARABE………………………………………………………………159


11

INTRODUCTION
12

L’entreprise perçoit classiquement la fiscalité comme une série de charges, de contraintes, d’obstacles à
la réalisation d’une marge nette sur ses affaires. Ceci peut être vrai tant que l’entreprise demeure sur un
territoire où elle devra payer ses impôts, sans pouvoir jouer sur leurs taux et leur assiette. Mais lorsque
l’entreprise a la possibilité de faire circuler des masses de revenus positifs d’une entité d’un pays à une
entité d’un autre pays, la fiscalité étant spécifique à chaque Etat souverain, elle est amenée à envisager
le problème fiscal de façon globale. Ses dirigeants vont comparer le poids respectif de la fiscalité
suivant que le revenu positif apparaît dans un pays ou dans un autre. La charge fiscale peut être positive
dans le premier pays, nulle voire négative dans le second. On comprend donc aisément que
l’optimisation du coût fiscal mondial devienne un élément fondamental de la prise de décision, dans
une entreprise multinationale.

Le rôle des entreprises multinationales dans le commerce mondial a connu, ces vingt dernières années,
un développement spectaculaire, qui tient en partie, à l’intégration de plus en plus étroite des
économies nationales et au progrès technologique, notamment dans le domaine des
télécommunications.

Dans l’application des principes d’imposition des entreprises multinationales, l’une des questions les
plus difficiles qui se soit posée concerne la fixation des justes prix de transfert.

Les prix de transfert sont les prix auxquels une entreprise transfère des biens corporels, actifs
incorporels, ou rend des services à des entreprises associées résidentes d’un Etat différent. Ils
supposent ainsi des transactions intragroupe et le passage d’une frontière.

La problématique des prix de transfert est née et s’est développée aux Etats-Unis. Ensuite, elle s’est
exportée, dans l’ordre chronologique, en Asie, au Canada, en Europe et enfin, en Amérique latine. Les
Etats-Unis jouent, en matière de prix de transfert, un rôle précurseur.
Dans les années 30, la France, en reprenant le texte américain de la section 482 de « l’internal revenue
code » dans un article du code général des impôts devenu éminemment célèbre, l’article 57 a du moins,
dans les textes, engagé la lutte contre l’évasion et la fraude fiscales internationales. Durant des dizaines
d’années, la loi fiscale dans ce domaine a été peu employée, faute de moyens techniques et humains. Il
en va différemment depuis les années quatre-vingt. L’arsenal législatif a été renforcé et l’administration
13

fiscale française s’est dotée d’une équipe spécialisée aussi bien en termes de personnel qu’en termes de
moyens.

Les groupes multinationaux, y compris les plus importants, n’étaient pas toujours préparés à une telle
modification des législations fiscales. Beaucoup d’entre eux n’avaient, jusqu’alors, mis en place aucune
procédure spécifique à la détermination des prix de transfert : ceux-ci résultaient souvent de pratiques
anciennes ou de négociations non clairement matérialisées entre entreprises liées. La plupart des
groupes n’avaient pas constitué de documentation de leurs prix de transfert. En outre, ils se sont
souvent retrouvés dans l’impossibilité de produire cette documentation, les documents nécessaires
n’ayant souvent pas été conservés.

Ainsi, lors des premiers contrôles précisément axés sur ce point, ces groupes n’ont pas pu fournir
d’arguments convaincants et ont subi de lourds redressements.

A l’instar de ses homologues un peu partout dans le monde, l’administration fiscale marocaine
surveille de très près les relations intragroupe, transfrontalières.

Le Maroc ne pouvait rester insensible aux problèmes posés par les prix de transfert. Outre la présence
de nombreuses filiales de groupes américains, européens voire même arabes, l’ouverture de l’économie
qu’induira la multiplication des accords de libre-échange ne peut que faire de la problématique des prix
de transfert, un souci majeur, pour l’administration fiscale marocaine.

Aujourd’hui, à la lecture des chefs de redressement évoqués dans les notifications suite aux contrôles
fiscaux opérés, auprès des filiales de multinationales, il ressort que les prix de facturation intragroupe
est l’une des préoccupations de l’administration fiscale marocaine. L’objectif étant, bien entendu, de
s’assurer que l’impôt qui doit être payé au Maroc n’est pas transféré ailleurs.
Parmi les dossiers qui sont soumis à la commission nationale de recours fiscal, plusieurs portent sur les
prix de facturation entre entités appartenant à un même groupe multinational. Ce qui est reproché, le
plus souvent, aux filiales de sociétés multinationales, c’est de minorer les prix de vente au groupe, de
majorer le prix des intrants achetés auprès du groupe ou de pratiquer une rémunération excessive des
services rendus par le groupe.
14

L’enjeu fiscal est le cœur même de la problématique des prix de transfert. En outre, la problématique
des prix de transfert implique d’autres enjeux juridiques qu’il convient de ne pas négliger. Ces aspects
ne seront pas développés dans le présent mémoire. Il s’agit notamment de :

- l’annulation des conventions non autorisées : les transactions intragroupe peuvent constituer des
conventions réglementées (au sens de l’article 56 de la loi 17-95, relative aux sociétés anonymes).
Si les transactions n’ont pas fait l’objet d’un accord préalable du conseil d’administration de la
société et que celles-ci ont eu des conséquences dommageables pour la société, la nullité de la
convention peut être prononcée (sauf si le commissaire aux comptes la mentionne dans son rapport
spécial et que l’assemblée générale autorise cette convention à posteriori).

- l’abus des biens ou du crédit de la société : l’article 384 de la loi 17-95 sanctionne pénalement les
actes commis par les membres des organes d’administration, de direction ou de gestion d’une
société anonyme qui, de mauvaise foi, auront fait des biens ou du crédit de la société un usage
qu’ils savaient contraire aux intérêts économiques de celles-ci, à des fins personnelles ou pour
favoriser une autre société ou entreprise dans laquelle ils étaient intéressés directement ou
indirectement. Les mêmes peines sont applicables aux mêmes personnes qui auraient agi de la
même manière en utilisant les pouvoirs qu’ils possédaient ou les voix dont ils disposaient dans la
société. Le même délit est prévu pour les gérants de SARL.

- La responsabilité civile des dirigeants : L’article 352 de la loi précitée a institué une responsabilité
civile envers la société, les actionnaires ou les tiers, en cas de faute dans la gestion.

L’expert-comptable, en tant que conseil de l’entreprise, doit intervenir, en amont, pour sensibiliser ses
clients sur les risques fiscaux (et juridiques) propres aux prix de transfert. Il accompagnera l’entreprise
dans l’élaboration de la documentation relative aux prix de transfert.

Le présent mémoire se propose d’étudier la problématique des prix de transfert à travers :

• l’étude des méthodes applicables, par les sociétés multinationales, pour la fixation des prix de
transfert ;
15

• l’analyse des enjeux fiscaux des prix de transfert ;

• la proposition de solutions pour mettre un terme aux litiges, portant sur les prix de transfert ;

• et enfin, la proposition d’actions à entreprendre pour éviter lesdits litiges.

L’analyse des solutions pour régler les litiges et des actions pour éviter ces litiges mettrait en exergue le
rôle que pourrait jouer l’expert comptable, en tant que conseil de l’entreprise.

Le présent mémoire est structuré en deux grandes parties.

Dans la première partie, nous aborderons le principe de pleine concurrence et les méthodes de
détermination des prix de transfert.

Dans la seconde partie, nous traiterons des redressements opérés au titre des transferts indirects de
bénéfices à l’étranger ainsi que des moyens de solutionner ou d’éviter les litiges y afférents, tout en
mettant l’accent sur la place que pourrait avoir l’expert-comptable.
16

Première partie

DU PRINCIPE DE PLEINE
CONCURRENCE A LA THEORIE
DES PRIX DE TRANSFERT
17

I - MISE EN ŒUVRE DU PRINCIPE DE PLEINE CONCURRENCE

L’Organisation de Coopération et de Développement Economiques (OCDE) est une institution


1
internationale, basée à Paris et créée en 1960. Elle regroupe trente pays membres, tous attachés à
l’économie de marché. Ses relations de travail avec plus de soixante dix autres pays, des ONG et la
société civile lui confèrent une envergure mondiale. Renommée pour ses publications et ses
statistiques, ses travaux couvrent tout le champ économique et social.

Les deux principaux sujets d’intervention de l’OCDE ont été les conventions fiscales internationales et
les prix de transfert.

L’OCDE a, depuis longtemps, réfléchi à la question des relations entre entreprises associées. Le
modèle de convention établi en 1963 comportait déjà un article 9 permettant aux Etats de rectifier la
comptabilité des entreprises, pour le calcul des bénéfices imposables, si celle-ci ne fait pas apparaître
les bénéfices réellement réalisés, compte tenu des relations spéciales existant entre les entreprises qui
ont effectué les transactions examinées. Cet article a été repris dans le modèle de 1977, tout en étant
complété par un second paragraphe invitant les Etats à supprimer les doubles impositions qui peuvent
résulter de ces rectifications. Mais les commentaires des modèles de convention ne s’étendent pas
particulièrement sur la question de la rectification des prix de transfert, c’est au moyen de rapports
spéciaux que le comité des affaires fiscales de l’OCDE fit connaître son point de vue.
L’OCDE avait ainsi publié en 1979, un rapport sur la question des prix de transfert, complété en 1984
par une étude sur les ajustements corrélatifs. Les observations de l’OCDE ont été complètement
refondues en 1995, date à laquelle a été publié un nouveau rapport intitulé « principes applicables en
matière de prix de transfert à l’intention des entreprises multinationales et des administrations
fiscales ».

Les principes OCDE n’ont aucune force obligatoire mais les administrations fiscales des Etats en

1
Allemagne, Australie, Autriche, Belgique, Canada, Corée, Danemark, Espagne, Etats-Unis, Finlande, France, Grèce, Hongrie, Irlande, Islande, Italie,
Japon, Luxembourg, Mexique, Norvège, Nouvelle Zélande, Pays Bas, Pologne, Portugal, Royaume Uni, République Slovaque, République Chèque,
Suisse, Suède, Turquie
18

tiennent largement compte et les tribunaux étrangers s’y référent de façon croissante. La jurisprudence
2
étrangère en atteste .

L’administration fiscale marocaine assiste régulièrement aux réunions de l’OCDE et dispose de ce fait
des derniers développements de l’OCDE, en matière de prix de transfert.

La question des prix de transfert préoccupe également la Commission Européenne qui a mis en place,
en juillet 2002, un forum spécial sur ce sujet. Ce forum qui rassemble des représentants des milieux
d’affaires et des administrations fiscales, est notamment chargé de la mise au point d’une
documentation commune aux Etats membres et du traitement des questions relatives aux doubles
impositions et aux procédures d’accords préalables.

1- LE PRINCIPE DE PLEINE CONCURRENCE

Le principe de pleine concurrence est une norme internationale qui, comme en sont convenus les pays
membres de l’OCDE, doit être mise en œuvre, à des fins fiscales, par les groupes multinationaux et les
autorités fiscales pour la fixation des prix de transfert.

1-1Exposé du principe de pleine concurrence

Le principe de pleine concurrence qui fait autorité est énoncé à l’article 9 paragraphe 1 du modèle de
convention fiscale de l’OCDE :

« Lorsque :
1. Une entreprise d'un Etat contractant participe directement ou indirectement à la direction, au contrôle
ou au financement d'une entreprise de l'autre Etat contractant ou que :
2. Les mêmes personnes participent directement ou indirectement à la direction, au contrôle ou au
financement d'une entreprise d'un Etat contractant et d'une entreprise de l'autre Etat contractant, et que
dans l'un et l'autre cas, les deux entreprises sont, dans leurs relations commerciales ou financières, liées
par des conditions acceptées ou imposées, qui diffèrent de celles qui seraient convenues entre des

2
Article « une nouvelle bataille économique : les prix de transfert (les principes directeurs) » Ed Francis Lefebvre Décembre 1995
19

entreprises indépendantes, les bénéfices qui sans ces conditions, auraient été obtenus par l'une des
entreprises mais n'ont pu l'être en fait à cause de ces conditions, peuvent être inclus dans les bénéfices
de cette entreprise et imposés en conséquence ».

3
Le commentaire de l’OCDE relatif à l’article 9 indique qu’en vertu de ces dispositions, les autorités
fiscales d’un Etat contractant peuvent, pour calculer les sommes imposables, rectifier la comptabilité
des entreprises associées si, par suite des relations spéciales existant entre ces dernières, leurs livres ne
font pas apparaître les bénéfices réels imposables qu’elles réalisent dans cet Etat. On entend par
bénéfices réels imposables, ceux qui auraient été réalisés dans des conditions de pleine concurrence. Le
commentaire souligne que cette disposition ne s’applique pas lorsque les transactions se sont déroulées
« aux conditions commerciales normales du marché libre (de pleine concurrence) » ; les comptes ne
peuvent être rectifiés que lorsque « des conditions spéciales ont été convenues ou imposées entre les
deux entreprises ». L’enjeu de l’article 9 est donc de savoir si les conditions des relations
commerciales ou financières entre entreprises associées sont des conditions de pleine concurrence ou
s’il existe une ou plusieurs « conditions spéciales » (c’est à dire des conditions qui ne sont pas de
pleine concurrence).

En se référant, pour procéder, à un ajustement de bénéfices, aux conditions qui prévaudraient entre
entreprises indépendantes pour des transactions et dans des circonstances comparables, le principe de
pleine concurrence traite les membres d’un groupe multinational comme des entités distinctes et non
comme des sous-ensembles indissociables d’une seule entreprise. Les pays membres de l’OCDE ont
4
adopté le principe de pleine concurrence, pour plusieurs raisons. Selon le rapport de l’OCDE , « l’une
des raisons primordiales est que ce principe traite, sur un pied d’égalité, les entreprises multinationales
et les entreprises indépendantes. En s’efforçant d’harmoniser le régime fiscal des entreprises associées
et des entreprises indépendantes, le principe de pleine concurrence évite que l’une ou l’autre des
entreprises ne soit désavantagée sur le plan fiscal ».

L’application de ce principe de fiscalité internationale permet également d’asseoir l’impôt dans chaque
pays afin d’éviter les doubles impositions et les conflits entre les administrations fiscales.

3
Voir commentaires Article 9 fournis en Annexe 2
4
Paragraphe 1.7 du rapport OCDE
20

Le Maroc reconnaît la compatibilité de sa législation interne et notamment l’article 4 du livre des


procédures fiscales avec le principe de pleine concurrence. En effet, cet article, qui traite du transfert
indirect de bénéfices à l’étranger (entre autres), entre sociétés dépendantes, prévoit :

« Lorsqu'une entreprise marocaine a directement ou indirectement des liens de dépendance avec des
entreprises situées au Maroc ou hors du Maroc, les bénéfices indirectement transférés, soit par voie de
majoration ou de diminution des prix d'achat ou de vente, soit par tout autre moyen, sont rapportés au
résultat fiscal ou au chiffre d'affaires déclarés.

En vue de cette rectification, les prix d'achat ou de vente de l'entreprise concernée sont déterminés par
comparaison avec ceux des entreprises similaires ou par voie d'appréciation directe, sur la base
d'informations dont dispose l'administration ».

En outre, les conventions fiscales conclues par le Maroc comportent toutes un article similaire à
5
l’article 9 de la convention modèle OCDE .

1-2Limites du principe de pleine concurrence

Le principe de pleine concurrence peut être mis en œuvre, dans une majorité de cas. En effet, pour de
nombreuses opérations concernant l’achat et vente de biens ainsi que le prêt d’argent, on peut trouver
un prix de pleine concurrence pour une transaction comparable effectuée par des entreprises
indépendantes comparables, opérant dans des circonstances comparables. Par ailleurs, dans certains
cas, le principe de pleine concurrence est difficile à mettre en œuvre. C’est le cas notamment des
groupes multinationaux produisant de façon intégrée des biens hautement spécialisés, traitant des biens
incorporels uniques et fournissant des services spécialisés.
Le principe de pleine concurrence présente, à notre avis, une autre limite liée aux informations
nécessaires pour évaluer les transactions sur le marché libre. En effet, ces informations peuvent être
incomplètes ou difficiles à interpréter. Elles peuvent être inaccessibles, pour des raisons de
confidentialité.

5
Voir tableau fourni en Annexe 3
21

De plus, le principe de pleine concurrence ne tient pas toujours compte des économies d’échelle entre
les diverses activités qui résultent de l’intégration des entreprises.

Enfin, les entreprises associées peuvent s’engager dans des opérations dans lesquelles des entreprises
indépendantes ne s’engageraient pas. Ces opérations ne sont pas forcément réalisées dans le but
d’échapper à l’impôt mais parce que lorsqu’elles traitent entre elles, les entreprises d’un même groupe
évoluent dans un contexte différent de celui d’entreprises indépendantes.
Nous pouvons citer, à titre d’exemple, le cas d’une entreprise propriétaire d’un bien incorporel qui
hésiterait à autoriser une entreprise indépendante à exploiter ce bien, sous licence, de peur qu’il soit
dévalorisé. Par contre, elle peut accorder à des entreprises associées des conditions d’exploitation
moins restrictives car elle pourra contrôler, de très près, l’usage qui serait fait du bien incorporel.

1-3Maintien du consensus international autour du principe de pleine concurrence

Malgré les difficultés que pourrait poser le principe de pleine concurrence, les pays membres de
l’OCDE s’accordent à penser que le prix de pleine concurrence doit régir l’évaluation des prix de
transfert. Selon eux, le prix de pleine concurrence induit généralement des niveaux de revenus corrects,
6
aux yeux des administrations fiscales .

2- ANALYSE DE COMPARABILITE

L’application du principe de pleine concurrence se fonde sur une comparaison entre les conditions
pratiquées pour une transaction entre entreprises associées et celles pratiquées pour une transaction
entre entreprises indépendantes. Pour qu’une telle comparaison soit significative, il faut que les
caractéristiques économiques des situations prises en compte soient suffisamment comparables. En
d’autres termes, il ne doit pas y avoir de différences entre les situations comparées pouvant influer sur
le prix ou la marge bénéficiaire ou alors des correctifs peuvent être utilisés pour éliminer l’incidence
des différences.

6
Rapport OCDE paragraphe 1.13
22

2-1Caractéristiques des biens et des services

Les différences dans les caractéristiques des biens ou des services expliquent souvent, au moins en
partie, les différences de valeurs sur le marché libre. Par conséquent, une comparaison de ces
caractéristiques peut être utile pour déterminer la comparabilité des transactions entre entreprises
associées et entreprises indépendantes.

Les caractéristiques à prendre en compte sont les suivantes :

• Pour les biens corporels :


- les caractéristiques physiques du bien ;
- sa qualité ;
- sa fiabilité ;
- la facilité d’approvisionnement ;
- le volume de l’offre ;
- le délai de livraison ;
- la durée de la garantie accordée aux clients etc.

• Pour les prestations de services :


- la nature du service (administratif, commercial, financier, recherche et développement,
conseil etc.) ;
- le volume de service ;
- le savoir faire attaché au service ;
- le délai d’exécution etc.

• Pour les actifs immatériels :


- la forme de la transaction : concession d’une licence ou vente ;
- le type d’actif tel que brevet, marque de fabrique ou procédé technique ;
- la durée et le degré de protection et l’avantage escompté de l’utilisation de l’actif en
question.
23

2-2Analyse fonctionnelle

Pour déterminer si des transactions entre entreprises associées et des transactions entre entreprises
indépendantes sont comparables, il faut comparer les fonctions exercées par les parties. Pour des
entreprises indépendantes, la rémunération correspondra, en général, aux fonctions assumées par
chaque entreprise, compte tenu des actifs mis en œuvre et des risques assumés.

La comparaison des fonctions assurées par les entreprises repose sur une analyse fonctionnelle qui a
pour but d’identifier et de comparer les activités et les responsabilités significatives qui sont exercées
par les entreprises associées et les entreprises indépendantes.

Les fonctions à identifier et à comparer peuvent être la conception, la fabrication, l’assemblage, la


recherche et développement, la prestation de services, les achats, la distribution, la commercialisation,
la publicité, le transport etc.

La comparaison des fonctions exercées par les entreprises doit prendre en compte les actifs mis en
œuvre : le type d’actifs utilisés, leurs caractéristiques (âge, valeur marchande, localisation, existence de
droits de propriété industrielle) etc.

Cette comparaison doit également tenir compte des risques assumés par les parties respectives. Il est
entendu que l’accroissement du risque sera compensé par un accroissement du rendement escompté.
Par conséquent, les transactions entre entités associées et entités indépendantes et les entités elles-
mêmes ne sont pas comparables quand des différences significatives existent, eu égard aux risques
assumés.

Les risques à prendre en compte sont :

• les risques de marché tels que les fluctuations des coûts des moyens de production et du prix
des produits,
• le caractère aléatoire des résultats des investissements en recherche et développement,
• les risques financiers tels que ceux qui découlent des variations des taux de change et des taux
24

• d’intérêt, les risques de crédit etc.

A titre d’exemple, si un distributeur assume la responsabilité de la commercialisation et de la publicité


en risquant ses propres ressources dans ces activités, il est en droit d’en attendre un revenu
proportionnellement plus élevé et les termes de la transaction ne seront pas les mêmes que si le
distributeur intervient uniquement en qualité d’agent, se fait rembourser ses frais et perçoit le revenu
approprié à son activité.
De même qu’un fabricant ou chercheur sous contrat qui ne prend pas de risque n’aura droit qu’à un
revenu limité.

2-3Analyse des clauses contractuelles

7
Dans son rapport , l’OCDE précise que dans des transactions de pleine concurrence, les clauses
contractuelles définissent en général, expressément ou implicitement, les modalités de répartition des
responsabilités, des risques et des bénéfices entre les parties. Pour cela, l’analyse des clauses
contractuelles est nécessaire. A défaut de l’existence de clauses écrites, les relations contractuelles
entre les parties peuvent être déduites de leur comportement ainsi que des principes économiques qui
régissent habituellement les relations entre les entreprises indépendantes.

Dans le cadre de transactions entre entreprises indépendantes, les parties s’obligeront à faire respecter
les dispositions du contrat qui les lie et les clauses contractuelles ne seraient transgressées que si les
parties y ont intérêt. La divergence d’intérêt n’étant pas fréquente dans le cas d’entreprises associées, il
importe de vérifier si les parties au contrat ont respecté les clauses contractuelles.

2-4Analyse des situations économiques

Le prix de pleine concurrence peut varier en fonction du marché, même pour des transactions portant
sur un même bien ou service. Par conséquent, pour pouvoir faire des comparaisons, il faut que les
marchés sur lesquels opèrent les entreprises associées et les entreprises indépendantes soient

7
Rapport OCDE paragraphe 1.28
25

comparables et que leurs différences n’aient pas d’effet sensible sur le prix. A défaut, des ajustements
doivent être opérés.

Les caractéristiques de la situation économique à prendre en compte pour déterminer la comparabilité


des marchés sont :

• la localisation géographique ;
• la dimension des marchés ;
• le degré de concurrence ;
• la position concurrentielle ;
• l’existence de biens et de services de substitution ;
• le niveau de l’offre et de la demande sur l’ensemble du marché ;
• le pouvoir d’achat des consommateurs ;
• la nature et la portée des réglementations publiques applicables au marché ;

Le prix de pleine concurrence doit tenir compte des ajustements de l’Etat, sous la forme d’un contrôle
de prix ou des taux d’intérêts, de restrictions concernant la rémunération de prestation de services ou
de prestations de gestion, d’une réglementation des versements des redevances, de subventions en
faveur de certains secteurs, d’un contrôle des changes etc.

- les coûts de production (en particulier, le coût des terrains, de la main d’œuvre, et du capital),
- les coûts de transport ;
- le stade de commercialisation (détail ou gros) etc.

2-5Analyse des stratégies des entreprises

Les stratégies des entreprises doivent être prises en compte dans la détermination de la comparabilité
8
des transactions entre entreprises associées et entreprises indépendantes .

8
Rapport OCDE paragraphe 1.31
26

Les stratégies des entreprises présentent de nombreux aspects. Elles portent sur l’innovation et la mise
au point de nouveaux produits, le degré de diversification, la prise en compte des facteurs politiques
(stabilité politique, économique (monnaie), le rôle de la législation du travail en vigueur et de tous les
autres facteurs pouvant avoir un impact sur le fonctionnement de l’entreprise.

Les stratégies des entreprises peuvent porter également sur les modalités de pénétration du marché.
Une entreprise souhaitant pénétrer un marché ou accroître sa part de marché pour son produit pourra
pratiquer temporairement, pour son produit, un prix inférieur à celui pratiqué sur ce marché pour des
produits. De même, une entreprise qui souhaite accroître sa part de marché pourra supporter
temporairement des coûts plus élevés ( de commercialisation, par exemple) et réaliser ainsi des
bénéfices inférieurs à ceux d’autres entités opérant sur ce marché.

Exemple : Une entreprise en charge de la fabrication facture à son distributeur associé un prix inférieur
à celui du marché, sous prétexte qu’elle se positionne dans le cadre d’une stratégie de pénétration de
marché. Les économies réalisées par le distributeur peuvent se refléter dans le prix demandé par le
distributeur à ses clients ou dans les dépenses engagées par le distributeur pour mieux se positionner
sur le marché. Une stratégie de pénétration du marché, au sein d’un groupe multinational, peut-être
mise en place par le fabricant ou le distributeur et le coût est supporté par l’un ou l’autre. Ladite
stratégie s’accompagne souvent d’efforts de commercialisation et de publicité importants. Il faudra
alors rechercher si la nature des relations entre les parties à la transaction est compatible avec le fait
que la partie supporte le coût de la stratégie. Dans le cadre d’une transaction de pleine concurrence, une
entreprise qui intervient uniquement comme agent et dont la responsabilité dans le développement à
long terme du marché est faible ne supporte pas, en général, le coût d’une stratégie de pénétration de
marché.

3 - EVALUATION DE TRANSACTIONS DISTINCTES OU COMBINEES

9
Le principe de pleine concurrence doit être appliqué, transaction par transaction . Mais, il arrive que
des transactions soient tellement liées qu’il n’est pas possible de les appréhender séparément mais dans
leur ensemble. C’est le cas notamment des contrats à long terme de fourniture de biens et de services,

9
Rapport OCDE paragraphe 1.42
27

des contrats d’octroi de licences de procédés de fabrication accompagnés de la fourniture de


composantes de fabrication.
Ces transactions doivent être analysées conjointement pour vérifier que les conditions sont bien de
pleine concurrence.

Dans d’autres cas, des transactions faisant l’objet d’un contrat unique peuvent nécessiter des
évaluations séparées. C’est le cas d’un contrat unique assurant un certain nombre de prestations comme
la concession de brevets, de marques de fabrique, des prestations d’assistance technique et la location
d’installations de production. Dans ce cas, il est difficile d’évaluer l’arrangement, dans son ensemble et
par conséquent, il faut en isoler les différents éléments.

4 - INTERVALLE DE PLEINE CONCURRENCE

La mise en œuvre du principe de pleine concurrence conduira, parfois, à un seul chiffre qui constituera
la meilleure référence possible pour savoir si un prix a été fixé dans des conditions de pleine
concurrence. Par ailleurs, la fixation de prix de transfert n’étant pas une science exacte, l’application
d’une ou de méthodes pour la fixation de prix de transfert débouchera sur une fourchette de prix dite
intervalle de concurrence. Ceci est dû au fait que l’application du principe de pleine concurrence ne
permet d’obtenir qu’une approximation des conditions qui se seraient établies entre des entreprises
indépendantes. De plus, des entreprises indépendantes effectuant des transactions comparables ne
pratiqueraient pas exactement le même prix pour la même transaction.

La fourchette de prix est également applicable en cas de recours à plusieurs méthodes de fixation de
prix de transfert. Lorsque l’écart entre les points de l’intervalle de pleine concurrence est important, il
peut s’expliquer par le fait que les données utilisées pour établir certains de ces points ne sont peut-être
pas aussi fiables que celles qui ont servi à obtenir les autres points ou qu’elles nécessitent des
correctifs.
28

5- EXAMEN DE DONNEES SUR PLUSIEURS ANNEES

Pour mieux appréhender les conditions d’une transaction entre entreprises associées, il est souvent utile
d’examiner les données sur plusieurs exercices. L’analyse de ces données permet d’expliquer, par
exemple, si une perte déclarée pour une transaction fait suite à une série de pertes antérieures ou si elle
est le résultat de conditions économiques particulières à un exercice qui ont influencé les coûts des
exercices antérieurs ou si elle liée à la fin du cycle de vie du produit.

Lorsqu’une entreprise associée accuse constamment des pertes, il faut examiner avec soin les modes de
fixation des prix de transfert. Les pertes peuvent être justifiées par des coûts de démarrage élevés, par
une stratégie consistant à fixer les prix, pour une durée limitée, à un niveau particulièrement bas pour
pénétrer le marché, ou par d’autres facteurs. Toutefois, une entreprise indépendante n’acceptera pas de
faire des pertes indéfiniment. Elle finira par cesser son activité. Une entreprise associée, quant à elle,
peut continuer son activité tout en accusant des pertes, si ses activités sont profitables au groupe
multinational, dans son ensemble. L’entreprise déficitaire peut ne pas être correctement rétribuée.
Exemple : un groupe multinational peut avoir besoin de produire toute une gamme de produits ou de
services pour rester compétitif et être globalement bénéficiaire, alors que certaines lignes de produits
ou de services seront déficitaires. Dans ces conditions, le membre du groupe multinational qui produit
cette gamme de produits ou de services va constamment accuser des pertes.
29

II - METHODES APPLICABLES POUR LA FIXATION DES PRIX DE TRANSFERT

L’article 9 du modèle de convention OCDE ne définit pas les différentes méthodes applicables pour la
fixation des prix de transfert. Aussi, le choix sera-t-il effectué, selon la libre appréciation de l’entreprise
associée et de ses auditeurs. Cependant, l’OCDE préconise des méthodes en phase avec le principe de
pleine concurrence et invite les entreprises multinationales et les administrations fiscales à les
respecter. L’OCDE distingue les méthodes « traditionnelles » et les autres méthodes.

1- LES METHODES TRADITIONNELLES FONDEES SUR LES TRANSACTIONS

Les méthodes traditionnelles sont les plus anciennes identifiées par l’OCDE. Elles sont fondées sur les
transactions. Elles sont au nombre de trois : la méthode du prix comparable sur le marché libre, la
méthode du prix de revente et la méthode du prix de revient majoré.

Nous présenterons chacune de ces méthodes et illustrerons nos propos, à l’aide d’exemples chiffrés.
Nous ne manquerons pas de citer les avantages et les inconvénients de chaque méthode.

1-1 La méthode du prix comparable sur le marché libre (« comparable uncontrolled price »)

1-1-1 Le principe

En principe, pour déterminer si un prix est conforme au prix de pleine concurrence, il faut déterminer
quel serait le prix pratiqué, pour des transactions comparables, entre entreprises indépendantes ou bien
entre entreprises d’un groupe et une entreprise indépendante.

La méthode du prix comparable sur le marché libre consiste à comparer le prix d’un bien transféré ou
d’un service, dans le cadre d’une transaction contrôlée à celui d’un bien ou d’un service transféré, dans
10
des conditions comparables . S’il existe une différence entre ces deux prix, cela peut indiquer que les
conditions des relations commerciales et financières entre les entreprises associées ne sont pas des
conditions de pleine concurrence.

10
Rapport OCDE paragraphe 2.6
30

Pour l’OCDE, c’est normalement la méthode à retenir car elle constitue le moyen le plus direct et le
plus fiable pour mettre en œuvre le principe de pleine concurrence. En pratique, cependant, il arrive
souvent que cette méthode ne puisse pas aboutir, faute d’éléments de comparaison. Dans ce cas, on doit
recourir à d’autres méthodes. On ne doit pas, toutefois, l’écarter trop vite au motif qu’il n’y aurait pas,
sur le marché, de comparables exacts. Il suffit que les caractéristiques économiques des situations
prises en compte soient suffisamment comparables ou que des correctifs suffisamment fiables puissent
être utilisés pour éliminer l’incidence des différences.

Selon le rapport de l’OCDE, la méthode du prix comparable sur le marché libre est applicable si l’une
des conditions suivantes est remplie :

• aucune différence entre les transactions faisant l’objet de la comparaison ou entre les entreprises
effectuant ces transactions n’est susceptible d’avoir une incidence sur le prix du marché libre ;
• des correctifs suffisamment exacts peuvent être apportés pour neutraliser les effets de ces
différences.

Pour appliquer la méthode du prix comparable sur le marché libre, il faut identifier des situations
comparables, compte tenu des caractéristiques des biens et des services en cause, des fonctions
exercées et des risques assurés, des clauses contractuelles, de la situation du marché et de la stratégie
des entreprises.

1-1-2Exemples d’application

Exemple 1 :

Supposons qu’une société marocaine A vende un produit X à l’une de ses filiales étrangères B.
Dans ce cas, la transaction de référence pourra être :

- le prix de vente du produit X par A à une société de distribution tierce C (c’est à dire ne faisant pas
partie du groupe auquel A appartient ) ; tel pourrait être le cas d’une société de fabrication A qui
distribue ses produits sur certains marchés étrangers à travers des filiales et sur d’autres marchés
31

étrangers où son groupe n’est pas implanté, à travers des sociétés tierces, il pourra être envisagé de
fixer les prix de vente aux filiales de distribution par référence aux prix de vente aux sociétés de
distribution tierces ) ;

- le prix d’achat du produit X par B à une société tierce D ; cela pourra concerner une société de
distribution B qui se fournit auprès de A mais aussi, auprès d’une société tierce, pour le même
produit ;

- le prix de vente du produit X par une société E à une société F, E et F étant des sociétés
indépendantes l’une de l’autre et ne faisant pas partie du même groupe que A et B.

Le prix de transfert entre A et B pourra être égal au prix de la transaction de référence (dans les
exemples ci-dessus, celle entre A et C, ou celle entre B et D , ou celle entre E et F), à condition que
celle-ci porte sur un même produit , mais aussi que ses conditions contractuelles soient les mêmes que
celles valant pour la transaction entre A et B.

En cas de différence portant sur le produit ou sur les conditions contractuelles ayant un impact sur le
prix, il sera nécessaire d’ajuster le prix de la transaction de référence, un tel ajustement suppose de
pouvoir quantifier les différences constatées pour les neutraliser.

Exemple 2
:

Une société française vend directement à sa filiale marocaine un produit A, que cette dernière utilise
elle-même. Ce produit est couramment employé au Maroc, où il existe un prix de vente quotidien
moyen. Ce prix représente le prix de livraison et inclut le frêt (30dhs la tonne) et les droits de douane
(20dhs la tonne). Selon l’accord conclu entre la société française et la société marocaine, la filiale prend
possession du produit, chez la société mère.

Le prix de transfert par tonne, pour une livraison donnée, est calculé comme suit :
32

Prix quotidien moyen, au Maroc : 630 Dhs

- Ajustement pour frêt : 30 Dhs


- Ajustement pour droits de douane : 20 Dhs

Montant total des ajustements : 50 Dhs

Prix de transfert par tonne : 580 Dhs

La méthode du prix comparable sur le marché libre s’applique notamment dans les cas suivants :

a- une entreprise indépendante vend le même produit que celui qui est vendu entre deux entreprises
associées. Par exemple : une entreprise indépendante vend du café de Colombie sans marque et une
entreprise associée vend à une autre entreprise associée, en quantités similaires, un café d’un type et
d’une qualité similaire. Les deux types de transactions ayant lieu au même moment, au même stade
production. Si la seule information dont on dispose se rapporte au prix du café du Brésil sans
marque, il faudra rechercher si la différence au niveau du produit peut avoir une incidence
matérielle sur le prix. Il s’agira de rechercher, par exemple, dans quelle mesure l’origine du café
exige, sur le marché libre, un prix plus élevé ou moins élevé. De telles informations peuvent être
obtenues sur le marché des matières premières. Si la différence a un effet sensible sur le prix, il y a
lieu de procéder à des ajustements.

b- Les conditions de vente sur le marché libre et des ventes contrôlées sont identiques à l’exception
que les prix des ventes contrôlées est un prix de livraison et que les ventes sur le marché libre sont
des prix départ usine. Les différences en terme de transport et d’assurance peuvent être chiffrées.
Par conséquent, pour déterminer le prix de vente sur le marché libre, il y a lieu de corriger le prix
par la différence des conditions de livraison.

c- Une entreprise vend 500 tonnes d’un produit pour 50 dollars à une entreprise associée.
Parallèlement, elle vend 200 tonnes du même produit à une entreprise indépendante pour 65 dollars.
33

Dans une telle situation, il y a lieu de vérifier, en analysant des transactions sur des produits
analogues afin de déterminer les rabais normalement appliqués, en fonction du volume fourni.

1-1-3 Les avantages et les inconvénients de la méthode du prix comparable sur le


marché libre

Les avantages :

La méthode présente l’avantage de la simplicité.

Les inconvénients :

Les conditions d’application de la méthode du prix comparable sur le marché libre sont strictes. Elles
supposent de réussir à identifier des transactions entre sociétés indépendantes identiques ou dont les
différences avec la transaction considérée et ayant un impact sur les prix peuvent donner lieu à un
ajustement les neutralisant.

Elle est inadaptée à certaines prestations de services et aux transactions portant sur des produits
élaborés.

1-1-4 Application de la méthode du prix comparable sur le marché libre, dans le


contexte marocain

Cette méthode nous semble pouvoir être utilisée au Maroc, à condition, bien entendu, d’avoir accès aux
informations nécessaires.
34

1-2 Méthode du prix de revente (« resale minus »)

1-2-1Le principe

Le point de départ de la méthode du prix de revente est le prix auquel un produit acheté à une entreprise
associée est revendu à une entreprise indépendante. On défalque ensuite de ce prix de revente une
marge brute appropriée (la marge sur prix de revente) représentant le montant sur lequel le revendeur
couvrirait ses frais de vente et autres dépenses d’exploitation et à la lumière des risques assumés
(compte tenu des actifs utilisés et des risques encourus), réaliserait un bénéfice convenable. Le prix
obtenu, après défalcation de la marge brute peut être considéré, après correction des coûts liés à l’achat
du produit (comme les droits de douane) comme un prix de pleine concurrence, pour le transfert initial
11
de propriété entre entreprises associées .

La méthode du prix de revente est fréquemment utilisée pour rémunérer des activités de distribution.

Exemple :

Une société de distribution B achète un produit à une société de fabrication liée A et les revend à des
clients tiers pour un prix de 150 . La méthode du prix de revente permettra de définir le prix de B à A,
soit le prix de transfert. S’il décidé d’allouer à B une marge brute de 30% du chiffre d’affaires, celle-ci
sera égale à 30% x 150 = 45 ; le prix de vente de A à B sera alors égal à 150 – 45 = 105.

Détermination de la marge sur prix de revente

La marge sur prix de revente peut être déterminée par référence à la marge que le même revendeur
réalise sur les produits achetés et revendus dans le cadre de transactions sur le marché libre. La marge
sur prix de revente réalisée par une entreprise indépendante dans le cadre de transactions comparables
peut également servir d’indicateur.

11
Rapport OCDE paragraphe 2.14
35

Lorsque la marge sur le prix de revente retenue est celle qu’une entreprise indépendante aurait utilisée
dans le cadre d’une transaction comparable, la fiabilité de la méthode du prix de revente peut être
affectée par des différences ayant trait au mode de fonctionnement des entreprises. Exemple : le mode
de gestion des stocks peut avoir une incidence sur la rentabilité de l’entreprise sans en avoir
nécessairement sur le prix auquel une entreprise achète ou vend ses produits sur le marché libre.

Une transaction sur le marché libre est comparable à une transaction contrôlée, pour l’application de la
méthode du prix de revente, si l’une des deux conditions suivantes est remplie :

• aucune différence entre les transactions ou entre les entreprises effectuant ces transactions n’est
susceptible d’avoir une incidence sensible sur la marge sur prix de revente ;

• des correctifs suffisamment précis peuvent être apportés pour supprimer les effets matériels de
ces différences.

Pour l’application de la méthode du prix de revente, les différences des produits sont moins
importantes. A titre d’exemple, une entreprise de distribution exerce les mêmes fonctions (en tenant
compte des actifs utilisés et des risques encourus) en vendant des grille-pain et des mixeurs. Par
conséquent, le niveau de rémunération devrait être similaire pour ces deux activités.
Toutefois, une comparabilité plus étroite des produits donne de meilleurs résultats.
La méthode du prix de revente repose également sur la comparabilité des fonctions assumées. Elle peut
se révéler moins fiable lorsqu’il existe des différences entre les transactions contrôlées et les
transactions sur le marché libre ou entre les entreprises ayant une incidence sur la marge brute réalisée.
Il convient, par conséquent d’apporter des correctifs pour neutraliser ces différences.

1-2-2Exemple d’application

Une société allemande A distribue en Allemagne un produit X pour sa maison mère française F. D’un
autre côté, une société allemande G indépendante de la société F distribue un produit Y (similaire à X),
pour le compte de la société F. Pour cela, F verse une commission à G de 15% sur les ventes nettes de
rabais et escompte.
36

La principale différence fonctionnelle entre l’opération contrôlée et celle qui ne l’est pas (outre les
différences mineures sur le produit ) est que F assume le risque de la garantie dans le cadre de la
transaction avec l’entreprise G alors que c’est A qui assume le risque, dans l’autre cas.
La détermination du prix de transfert du produit X de la société F à la société A peut, selon la méthode
du prix de revente, se déterminer de la manière suivante :

Prix de vente du produit Y de A à G 4 000 Euros

Commission de 15% 600 Euros

Frais de garantie 32 Euros

Prix de transfert du produit X vendu à F par A 3 368 Euros

Il est plus facile de déterminer la marge appropriée sur prix de revente, lorsque le vendeur n’accroît pas
sensiblement la valeur du produit.

Le montant de la marge sur le prix de revente dépend des fonctions exercées par le revendeur. Le
revendeur peut-être simple transitaire comme il peut assumer la totalité des risques de la propriété du
produit ainsi que la responsabilité de la publicité, de la commercialisation, de la distribution et de la
garantie des marchandises et du financement des stocks.

Si la fonction du revendeur se limite à transférer les biens à un tiers, la marge sur le prix de revente sera
faible.

Si par contre, le revendeur met en œuvre un savoir faire important pour commercialiser les biens et s’il
assume des risques, la marge sur prix de revente sera plus importante.
37

La marge sur prix de revente dépendra aussi de l’octroi ou non, au profit du revendeur, d’un droit
d’exclusivité.

1-2-3Les avantages et les inconvénients de la méthode du prix de revente

Les avantages :

La méthode de la marge sur prix de revente est recommandée lorsque la filiale est passive dans la
conception du produit, c’est à dire quand la société de commercialisation n’est pas à l’origine de la
fabrication du produit. Cette méthode est simple à appliquer puisqu’elle part d’un prix de vente final
sur le marché, donc connu, duquel on soustrait un niveau de marge. Elle est souvent retenue par les
PME car elle permet de traiter sur un même pied d’égalité les filiales de commercialisation directes et
les agents ou commissionnaires présents dans des pays moins stratégiques.

Les inconvénients :

Le prix de vente minoré d’une marge lisse le niveau des marges commerciales par produit, au niveau de
la division distributrice, puisque celles-ci sont constantes et fixées d’avance, dans le cadre du prix de
transfert.

Il peut inciter la société distributrice à baisser les prix, pour augmenter les quantités vendues et son
chiffre d’affaires, quelle que soit la marge globale du groupe. En effet, un certain niveau de marge étant
assuré, la société distributrice peut avoir tendance à être agressive sur le marché alors que la société
productrice peut être en perte.

1-2-4Application de la méthode du prix de revente dans le contexte marocain

Cette méthode nous semble pouvoir s’appliquer au Maroc, dans le cadre d’opérations de
commercialisation. La pratique des commissions sur les ventes est courante dans le cas des entreprises
de distribution.
38

1-3 Méthode du prix de revient majoré (« cost plus »)

1-3-1Le principe

La méthode du prix de revient majoré consiste, comme son nom l’indique, à facturer avec une marge,
tout ou partie des coûts de la société livrant des marchandises ou rendant des services à une société liée.
Elle suppose la définition d’une base de coûts à facturer ainsi qu’un niveau approprié de marge à
12
appliquer à ces coûts .

Il s’agit de déterminer, pour les biens ou services transférés à un acheteur apparenté, les coûts
supportés par un fournisseur dans le cadre d’une transaction entre entreprises associées. Une marge est
appliquée au prix de revient , de façon à obtenir un bénéfice, compte tenu des fonctions
exercées et des conditions du marché.

Selon les commentaires OCDE, cette méthode convient lorsque des produits semi-finis sont vendus
entre des entreprises associées , lorsque des entreprises associées ont conclu des accords de mise en
commun d’équipements ou d’approvisionnement à long terme ou lorsque la transaction contrôlée est
une prestation de service.

Fixation de la marge

La solution idéale est de déterminer la marge sur le prix de revient du fournisseur, dans le cadre de la
transaction contrôlée, par référence à la marge sur le prix de revient du même fournisseur, dans le cadre
de transactions comparables sur le marché libre.

La marge sur prix de revient obtenue dans le cadre de transactions comparables par une entreprise
indépendante peut servir d’indicateur.

12
Article intitulé « les méthodes de détermination des prix de transfert : critères de choix et modalités d’application de Pierre Escault Revue de droit
fiscal du 15.01.04
39

Selon le rapport OCDE, une transaction sur le marché libre est comparable à une transaction contrôlée
(et constitue, par conséquent, une transaction comparable sur le marché libre), pour l’application de la
méthode du prix de revient majoré, si l’une des deux conditions suivantes est remplie :

• Aucune différence entre les transactions faisant l’objet de la comparaison ou entre les
entreprises effectuant ces transactions n’est susceptible d’avoir une incidence sensible sur la
marge sur le prix de revient pratiqué sur le marché libre ;

• Des correctifs suffisamment exacts peuvent être apportés pour supprimer les effets de ces
différences.

Fixation des coûts à refacturer :

Les coûts et dépenses d’une entreprise sont divisibles en trois grandes catégories :

• les coûts directs de production d’un bien ou d’un service tels que le coût des matières
premières ;

• les coûts de production indirects qui sont étroitement liés au processus de production mais qui
sont communs à plusieurs biens ou services (exemple les coûts d’une unité de réparation,
d’équipements utilisés pour produire différents biens ) ;

• les dépenses d’exploitation des entreprises telles que les dépenses administratives, les frais
généraux etc.

En général, la méthode du prix de revient majoré se fondera sur des marges calculées, après prise en
compte des coûts directs et indirects de production alors qu’une méthode portant sur la marge nette
utilisera des marges calculées, après que les dépenses d’exploitation aient été également prises en
compte.
40

Les coûts à prendre en compte pour l’application de la méthode du prix de revient majoré sont limités à
ceux du fournisseur de biens ou services. Cette limitation peut soulever le problème de la répartition de
certaines charges entre fournisseurs et acheteurs. Dans certains cas, certains coûts sont supportés par
l’acheteur pour diminuer les charges du fournisseur sur la base desquelles la marge sera calculée ou
alors certains coûts sont supportés par l’acheteur, sans être imputés au vendeur. Par conséquent, il y
aura lieu de procéder à cette imputation en analysant les fonctions assumées , en tenant compte des
actifs mis en œuvre et des risques encourus.

Illustrons la méthode du prix de revient majoré par un exemple chiffré :

1-3-2Exemple d’application

Une société X française fabrique un produit A pour des clients n’ayant aucun lien de dépendance avec
elle, selon des concepts fournis par ces derniers. Elle récupère ses coûts plus une majoration de 10%,
lors de la vente du produit A. Selon les accords conclus entre les parties, le prix de revient correspond à
la somme des coûts directs (main d’œuvre et matière première) et des coûts indirects (y compris les
frais généraux) qui sont évalués à 50% des coûts directs.

La société X fabrique également un produit B, pour sa filiale marocaine, X Maroc, en utilisant les
concepts fournis par cette dernière. Selon l’entente conclue avec la filiale, le prix de revient correspond
à la somme des coûts directs et indirects, y compris les frais généraux.

X France a calculé ses coûts indirects et les a attribués aux différents projets, en fonction des heures de
travail de main d’œuvre imputées à chaque projet.

D’après les calculs, le montant réel des coûts indirects (y compris les frais généraux) devant être
imputés à chaque projet correspond à 45% des coûts directs.

Le prix de revient des opérations comparables doit être corrigé pour déterminer la majoration
appropriée.
41

Le calcul du prix de transfert est le suivant :

1/ Calcul de la majoration, selon les accords avec les tiers indépendants :

Coûts directs 1 000 Euros

Coûts indirects (50% x 1000) 500 Euros

Prix de revient 1 500 Euros

Majoration de 10% 150 Euros

Prix de vente 1 650 Euros

2/ Calcul de la majoration, selon les accords avec des tiers indépendants, en utilisant le prix de revient
corrigé :

Coûts directs 1 000 Euros

Coûts indirects corrigés(45% x1000) 450 Euros

Prix de revient 1 450 Euros

Prix de vente calculé ci-dessus 1 650 Euros

Soit une majoration du prix, en fonction du prix de revient corrigé de 200 Euros (1650 – 1450) et une
majoration, selon le prix de revient majoré de 13,8% (1650-1450) / 1450
42

3/ Calcul du prix de transfert de pleine concurrence :

Coûts directs de fabrication de X France, selon le contrat avec X Maroc 900

Coûts indirects corrigés (45% x 900) 405

Majoration (13,8% x (900 + 405) 180

Prix de transfert 1 485 Euros

On suppose que les opérations, entre entreprises apparentées, sont fonctionnellement comparables à
celles réalisées entre entreprises indépendantes.
Dans la réalité, il existe très souvent des différences fonctionnelles qu’il conviendra d’intégrer, lors du
calcul d’une majoration de pleine concurrence.

La fiabilité des comparables peut être amoindrie par des différences existant entre l’entreprise
apparentée et l’entreprise indépendante qu’il est difficile de corriger, comme par exemple l’efficience
de la gestion.

La méthode du prix de revient majoré est souvent utilisée, en cas de sous-traitance, de vente de produits
semi-finis ou en présence de prestations de services ou d’accords de mise en commun d’équipements
ou d’approvisionnements.

1-3-3Les avantages et les inconvénients de la méthode du prix de revient majoré

Les avantages :

Cette méthode est plutôt adaptée à des transactions portant sur des produits dont l’essentiel de la valeur
est constitué par les coûts de production. C’est le cas notamment des produits semi-ouvrés qui, ne
43

trouvant pas de comparables sur le marché, peuvent être valorisés en appliquant une marge sur leur
total de coûts.

Les inconvénients :

La difficulté de l’approche du prix de revient majoré réside essentiellement dans la fixation de la marge
à appliquer, les entreprises gardant le secret, le plus souvent, sur leur marge.
De plus, elle induit un manque de transparence au niveau de l’acheteur qui est face à un prix de cession
dont il ne maîtrise aucun paramètre. En effet, à contrario de la méthode du prix de revente où la marge
de la société distributrice est fixée, ici, c’est la marge de la société productrice qui est assurée.
L’acheteur est donc, parfois, amené à subir des hausses de son prix d’achat consécutives à une dérive
du coût de revient (mauvaise maîtrise des achats, des procédés de fabrication……), sans pouvoir,
toujours, les répercuter sur le prix de vente au client final.

1-3-4Application de la méthode du prix de revient majoré, dans le contexte marocain

La méthode du prix de revient majoré peut s’appliquer au Maroc notamment dans les activités de
production et de répartition de coûts.

Les méthodes traditionnelles fondées sur les transactions sont, selon le rapport OCDE, le moyen le plus
direct de déterminer si les conditions des relations commerciales et financières entre les entreprises
associées sont des conditions de pleine concurrence. Mais du fait de la complexité des situations dans
lesquelles se trouvent souvent les entreprises, l’application des méthodes fondées sur les transactions
peut soulever un grand nombre de difficultés pratiques. L’OCDE précise que dans ces situations
exceptionnelles, lorsque les données ne sont pas disponibles ou lorsque les données disponibles ne sont
pas d’une qualité suffisante pour qu’on puisse se fier uniquement ou de façon générale aux méthodes
fondées sur les transactions, il peut être nécessaire de se demander si et sous quelles conditions d’autres
méthodes peuvent être utilisées.
44

2- LES NOUVELLES METHODES

Dans cette partie, nous examinerons les autres méthodes qui permettent de se rapprocher des conditions
de pleine concurrence, lorsque les méthodes traditionnelles fondées sur les transactions ne sont pas
suffisamment fiables. Ces méthodes sont appelées méthodes transactionnelles de bénéfices. Elles
s’inspirent assez largement de la nouvelle approche américaine de la détermination des prix de
transfert. En effet, la section 482 du code fiscal américain dispose : « il est nécessaire de prendre en
compte l’effet combiné de l’ensemble des transactions entre le contribuable sous contrôle et les autres
membres du groupe afin que le bénéfice définitif reflète le revenu imposable réel du contribuable sous
contrôle ».

2-1Les méthodes transactionnelles de bénéfices

Les méthodes transactionnelles de bénéfices consistent à prendre en compte les bénéfices réalisés, à la
13
suite de transactions particulières, entre entreprises associées .

2-1-1 La méthode de partage des bénéfices (profit split method)

2-1-1-1 Le principe

Comme son nom l’indique, la méthode de partage des bénéfices consiste à partager un bénéfice entre
14
des sociétés liées . La répartition se fait, en fonction d’une base économiquement valable, dans un
accord réalisé en pleine concurrence.

Illustrons cette méthode à l’aide d’un exemple chiffré :

Exemple :

13
Rapport OCDE paragraphe 3.2
14
Article intitulé « les méthodes de détermination des prix de transfert » : critères de choix et modalités d’application de Pierre Escault
45

Un produit est fabriqué par une société A , avec un prix de revient de 10 DHS et revendu, pour un
montant de 100 DHS, par une société de distribution dont les coûts sont de 30DHS.

Le profit global de cette transaction sera de :

P = 60 DHS = Chiffre d’affaires réalisé (100)


-
Coût de fabrication (10)
-
Coût de distribution (30)

Ce profit global de 60 devra être réparti entre A et B, au prorata d’une grandeur reflétant les
contributions de A et B à la génération du profit (en fonction des actifs utilisés, charges d’exploitation,
nombre d’employés…………….). Une clef de répartition combinant ces différentes grandeurs pourra
être utilisée).

Une clef de répartition prenant en compte les charges d’exploitation aboutirait par exemple à un profit
de 60x10/40, soit 15 pour A et 60x30/40, soit 45, pour B.

Mode de détermination de la contribution de chaque entreprise :

Le rapport de l’OCDE précise que la contribution de chaque partie est déterminée sur la base d’une
analyse fonctionnelle et évaluée, dans la mesure du possible, sur la base de données externes fiables
relatives au marché qui sont disponibles.

Bien entendu, l’analyse fonctionnelle tiendra compte des actifs mis en œuvre et des risques assumés par
chaque entreprise. Les critères extérieurs ayant trait au marché peuvent être, par exemple, les
pourcentages de partage des bénéfices ou les rendements observés dans les relations entre les
entreprises indépendantes exerçant des fonctions comparables.
46

L’analyse résiduelle :

Il peut être difficile de déterminer la valeur relative de la contribution de chacune des entreprises
associées aux transactions contrôlées.

L’analyse résiduelle consiste à répartir, en deux phases, le montant total des bénéfices provenant des
transactions contrôlées. Dans un premier temps, chaque participant se verra attribuer un niveau
suffisant de bénéfices pour lui assurer un revenu standard, en fonction du type de transactions qu’il
effectue.

Son revenu standard sera déterminé par référence au revenu observé sur le marché, pour des
transactions similaires, par des entreprises indépendantes.
Le revenu standard ne prendra pas en considération le revenu procuré par des actifs uniques, de grande
valeur, détenus par les participants.

Dans une seconde étape, tout bénéfice résiduel (ou toute perte) à l’issue de la répartition opérée
précédemment sera réparti entre les participants. La contribution des parties sous forme d’actifs
incorporels sera utile.

2-1-1-2 Exemple d’application

La société française F a mis au point et fabrique une puce électronique qui est considérée comme une
innovation technologique. Sa filiale marocaine M a développé et fabrique un ordinateur qui incorpore
cette puce. Le succès de cet ordinateur repose à la fois sur la technologie mise au point par M et sur
celle de F. L’ordinateur est ensuite vendu à des distributeurs indépendants.

Le total des bénéfices de la vente d’un ordinateur au distributeur indépendant est :

Vente au distributeur indépendant 1 000 Euros

Coût de fabrication de F -200 Euros


47

Coût de fabrication de M -300 Euros

Dépenses de développement de F -100 Euros

Dépenses de développement de M - 50 Euros

Frais de fonctionnement de F - 100 Euros

Frais de fonctionnement de M -100 Euros

Total des bénéfices nets 200 Euros

Compte tenu du caractère innovant de la puce et de l’ordinateur, le groupe a été incapable de trouver
des entreprises comparables qui possèdent des biens incorporels similaires.

En l’absence de comparabilité suffisamment élevée, il n’a donc pas pu appliquer les méthodes
traditionnelles.

Cependant, il a identifié des données intéressantes sur des fabricants de puces et d’ordinateurs qui ne
possèdent pas de biens incorporels innovateurs, et ces derniers obtiennent un rendement de 10% sur les
coûts de fabrication, à l’exclusion des achats.

Une première répartition des bénéfices peut donc se faire en comparaison avec le marché :

Rendement de F sur ses coûts de fabrication 20 Euros (200 x 10%)

Rendement de M sur ses coûts de fabrication 30 Euros (300 x 10%)

Les bénéfices résiduels attribuables au développement sont de 150 Euros (200-20-30)


48

Si l’on retient comme hypothèse que les dépenses respectives de mise au point de la puce et de
l’ordinateur reflètent de très près leur contribution relative à la valeur de l’innovation technologique, le
calcul de la part des bénéfices résiduels se fera en fonction des coûts de développement :

Part du bénéfice résiduel attribuable à F 100Euros (150Eurosx 100/150)

Part du bénéfice résiduel attribuable à M 50Euros (150Eurosx50/150)

Le prix de transfert de la puce électronique de la société F vers sa filiale M est alors calculé comme
suit :

Coût de fabrication de la puce 200 Euros

Dépenses de développement de la puce +100 Euros

Frais de fonctionnement de F + 50 Euros


Rendement sur ces coûts de fabrication (10%) + 20 Euros

Part du bénéfice résiduel pour F +100 Euros

Prix de transfert de F vers M = 470 Euros

2-1-1-3 Les avantages et les inconvénients de la méthode de partage des bénéfices

Les avantages :

La méthode de partage des bénéfices ne se fonde pas, en général, sur des transactions comparables et
peut, par conséquent, être utilisée, dans des cas où de telles transactions n’ont pas été identifiées.
49

La répartition des bénéfices repose sur la répartition des fonctions entre les entreprises associées elles-
mêmes. Les données externes provenant d’entreprises indépendantes sont utiles dans l’analyse du
partage des bénéfices pour déterminer la valeur de la contribution de chaque entreprise associée aux
transactions et non pour déterminer directement la répartition des bénéfices.

En vertu de cette méthode, aucune des deux parties à la transaction ne peut se retrouver avec un résultat
extrême puisque l’analyse porte sur les deux parties à la transaction.

Les inconvénients :

Les données externes utilisées pour déterminer la contribution de chaque entreprise à la transaction
contrôlée se rattachent moins étroitement à la transaction que dans les autres méthodes. Par conséquent,
la répartition des bénéfices risque d’être subjective.

Il pourra être difficile, pour les entreprises associées, d’obtenir des informations concernant des
entreprises étrangères affiliées. De plus, les entreprises indépendantes n’utilisent pas, en général, la
méthode de partage des bénéfices, pour déterminer leurs prix de transfert.
Il pourra être difficile également de déterminer les recettes et les charges globales de l’ensemble des
entreprises associées participant aux transactions contrôlées car cela suppose d’uniformiser les
documents comptables et de tenir compte des monnaies utilisées.

2-1-1-4 Application de la méthode de partage des bénéfices dans le contexte


marocain

La méthode de partage des bénéfices ne nous semble pas pouvoir être utilisée au Maroc car il serait
certainement difficile d’obtenir les informations nécessaires et par conséquent, de justifier les résultats
obtenus.
50

2-1-2La méthode transactionnelle de la marge nette

2-1-2-1 Le principe

La méthode transactionnelle de la marge nette consiste à déterminer, à partir d’une base appropriée (par
exemple, les coûts, les ventes ou les actifs) la marge bénéficiaire nette que réalise une entreprise, au
15
titre d’une transaction contrôlée .
Cette méthode revient donc à allouer une marge nette et non brute, comme pour la méthode du prix de
revente, prédéterminée à l’entreprise considérée, les prix de transfert constituant la variable permettant
d’atteindre cet objectif de marge nette.

L’objectif de marge nette sera exprimé comme un pourcentage d’une grandeur telle que :

• le chiffre d’affaires, pour des sociétés de distribution, par exemple, lorsque la nature
commerciale de leur activité justifie que leur profit soit proportionnel au chiffre d’affaires ;

• les charges d’exploitation, pour des prestataires de service, par exemple, lorsque la valeur du
service rendu dépend de l’étendue des charges engagées pour le rendre et lorsque cela justifie
que leur profit soit proportionnel au chiffre d’affaires qu’elles génèrent ;
• tout ou partie de l’actif pour des façonniers, par exemple, ayant un outil de production
important et lorsque cela justifie que leur profit soit proportionnel aux investissements réalisés.

Mode de détermination de la marge nette :

16
Selon le rapport de l’OCDE , la marge nette obtenue par une entreprise, au titre d’une transaction
contrôlée devrait être déterminée par référence à la marge nette que cette même entreprise réalise, au
titre de transactions comparables, sur le marché libre. Lorsque cela n’est pas possible, la marge nette
obtenue au titre de transactions comparables par une entreprise indépendante peut donner des

15
Rapport OCDE paragraphe 3.26

16
Rapport OCDE paragraphe 3.26
51

indications. Une analyse fonctionnelle de l’entreprise associée et le cas échéant de l’entreprise


indépendante est nécessaire pour déterminer si les transactions sont comparables et quels sont les
ajustements à apporter pour obtenir des résultats fiables.

2-1-2-2 Exemple d’application

La société marocaine M fabrique un produit pour son propre usage et pour les trois filiales étrangères
de sa société mère française F.
La société M et les trois filiales possèdent les droits technologiques, pour les ventes dans leur pays
respectif. La société M n’a pas trouvé de comparable externe qui fabrique un produit similaire sur
mesure pour des acheteurs non liés, à partir de formules fournies par les acheteurs.

Puisqu’il n’y a pas de biens incorporels de grande valeur, M peut, après une analyse fonctionnelle,
s’assurer que ce fabricant de produit sur mesure est comparable. Toutefois, M ne peut obtenir
d’information pertinente au niveau de la marge brute et par conséquent, ne peut pas appliquer la
méthode du prix de revient majoré. Le comparable externe de pleine concurrence réalise une marge
nette ou majoration sur ses coûts de 10%.

Le prix de transfert du produit de la société M vers une des filiales est alors calculé comme suit :

Coût des marchandises vendues par M 1 000 Dhs

Frais d’exploitation de M 300 Dhs

Majoration (1300x10%-Marge nette) 130 Dhs

Prix de transfert de M vers la filiale 1 430 Dhs


52

2-1-2-3 Les avantages et les inconvénients de la méthode transactionnelle de la


marge nette

Les avantages :

o Les marges nettes sont moins sensibles aux différences affectant les transactions que les prix
tels qu’utilisés dans la méthode du prix comparable sur le marché libre ;
o Les différences qui existent entre les entreprises quant aux fonctions exercées se traduisent
souvent par des variations dans les dépenses d’exploitation. Par conséquent, les entreprises
peuvent avoir un large éventail de marges brutes mais dégager des bénéfices nets d’un niveau
similaire ;
o Il n’est pas nécessaire de déterminer les fonctions exercées et les risques assumés par toutes les
entreprises associées. L’analyse repose sur une seule entreprise.

L’uniformisation de la présentation des documents comptables de toutes les entreprises associées n’est
pas nécessaire.

Les inconvénients :

La marge nette peut être influencée par certains facteurs qui n’ont pas d’incidence ou une incidence
moins marquée sur les prix ou sur les marges brutes, car les dépenses d’exploitation sont fluctuantes
d’une entreprise à l’autre.

Du fait qu’elle n’est appliquée qu’à une seule des entreprises associées et que plusieurs facteurs, sans
rapport avec les prix de transfert, peuvent affecter les marges nettes, cette méthode peut s’avérer moins
fiable.

La marge nette peut être affectée par plusieurs facteurs :

• la menace de nouvelles entrées sur le marché ;


• la position concurrentielle ;
53

• l’efficacité de gestion ;
• la menace de produits de substitution ;
• la structure variable des coûts (obsolescence des équipements, par exemple) ;
• les différences liées au coût du capital (auto-financement ou emprunt, par exemple).

Une analyse unilatérale peut amener à attribuer à un membre d’un groupe multinational des niveaux de
bénéfices très faibles ou des très élevés.
Bien que l’impact sur les bénéfices des autres parties à la transaction ne soit pas déterminant pour fixer
le prix d’une transaction, il peut permettre de vérifier les résultats obtenus.

2-1-2-4 Application de la méthode transactionnelle de la marge nette dans le


contexte marocain

La méthode de la marge nette ne nous semble pas pouvoir s’appliquer toute seule, au Maroc du fait que
beaucoup de facteurs n’ayant rien avoir avec les prix de transfert peuvent affecter la marge nette. Par
contre, cette méthode pourrait aider à vérifier les résultats obtenus, suivant d’autres méthodes.

2-2Méthode basée sur la répartition globale selon une formule préétablie

2-2-1 Le principe

La méthode de la répartition globale selon une formule préétablie consiste à répartir les bénéfices
globaux d’un groupe multinational sur une base consolidée entre les entreprises associées localisées
17
dans différents pays au moyen d’une formule prédéterminée et automatique .

Cette méthode comporte trois composantes :

• la détermination de l’unité à imposer ;


• la détermination des bénéfices globaux ;
• la détermination de la formule à appliquer pour répartir les bénéfices globaux.

17
Rapport OCDE paragraphe 3.59
54

Cette méthode repose généralement sur une combinaison des coûts, des actifs, des salaires et des
ventes.

La méthode de la répartition globale selon une formule préétablie a pour effet d’imposer un groupe
multinational, sur une base consolidée, c’est à dire qu’elle écarte l’approche par entité distincte. Elle ne
prend pas en compte l’efficience des entreprises, la situation géographique etc.
La méthode de la répartition globale selon une formule préétablie se distingue des méthodes
précédentes par le fait qu’elle utilise une formule de répartition des bénéfices qui est préalablement
fixée pour toutes les entreprises du groupe multinational alors que les autres méthodes, comparent au
cas par cas, les bénéfices d’une ou plusieurs entreprises associées avec les bénéfices que des entreprises
18
indépendantes comparables auraient cherché à réaliser, dans des circonstances comparables .

La méthode de la répartition globale selon une formule préétablie suppose l’application de ladite
formule par les deux autorités fiscales en coopération avec le groupe multinational, ce qui rend la
coopération internationale nécessaire. La formule découle de la situation spécifique de l’entreprise
concernée.

Les partisans de la méthode estiment qu’elle offre plus de commodité administrative et plus de sécurité
pour l’entreprise. Selon eux, cette méthode est plus conforme à la réalité économique car le groupe
multinational devrait être envisagé sur une base consolidée.

La méthode de la répartition globale selon une formule préétablie a été, parfois, présentée comme
alternative au principe de pleine concurrence pour déterminer la répartition appropriée des bénéfices
entre différents pays.

Les pays membres de l’OCDE rejettent ces arguments et considèrent que la méthode de la
répartition globale selon une formule préétablie n’est pas une alternative réaliste au principe de
pleine concurrence.

18
Rapport OCDE paragraphe 3.60
55

2-2-2 Application de la méthode de répartition globale, dans le contexte marocain

Cette méthode ne nous semble pas pouvoir recevoir application au Maroc, du fait que la formule de
répartition des bénéfices utilisée est la même pour toutes les entreprises du groupe et qu’elle ne tient
pas compte de la contribution réelle de chaque entreprise.
Il n’existe pas de méthode de fixation des prix de transfert utilisable, en toute circonstance. Le recours
à d’autres méthodes est possible, dans la mesure où il peut être justifié qu’elles satisfont au principe de
pleine concurrence.

3- CAS PARTICULIER DES TRANSACTIONS PORTANT SUR LES BIENS INCORPORELS ET LES SERVICES

Nous allons nous intéresser, à présent, au cas particulier des transactions portant sur les biens
incorporels et les services.

3-1Cas des biens incorporels

L’expression biens incorporels vise les droits d’utilisation d’actifs industriels : brevets, marques de
fabrique, noms commerciaux, dessins et modèles, propriété littéraire et artistique, propriété
intellectuelle (savoir faire, secrets industriels et commerciaux). Sont concernés les biens incorporels
attachés à des activités commerciales.

3-1-1 Distinction entre les biens incorporels manufacturiers et les biens incorporels de
commercialisation

Il y a lieu de distinguer deux catégories de biens incorporels :

19
- les biens incorporels commerciaux, également appelés les biens incorporels manufacturiers
(brevets, savoir-faire, logiciels informatiques…………….). D’une manière générale, ces biens sont
le résultat d’activités risquées et supposent des coûts élevés de recherche et développement.
L’entreprise qui les a mis au point entend récupérer les frais qu’elle a engagés à ce titre et réaliser

19
Rapport OCDE paragraphe 6.3
56

un revenu en vendant les produits ou en concluant des contrats de prestation de service ou des
contrats de licence ;

20
- les biens incorporels de commercialisation : il s’agit des marques de fabrique ou de commerce et
des noms commerciaux liés à l’exploitation commerciale des produits et des services, les réseaux
de distribution et les désignations, symboles ou graphismes uniques qui ont une forte valeur
promotionnelle pour les produits en cause.

Illustration

La distinction entre biens incorporels manufacturiers et biens incorporels de commercialisation peut


être illustrée par la comparaison entre brevets et marques.

Les brevets visent généralement le droit de fabriquer des marchandises. De leur côté, les marques
servent à la distribution.

Au regard de la durée, le brevet permet l’utilisation d’un droit pendant une période limitée alors que la
marque est susceptible d’exister indéfiniment car sa protection ne peut tomber que sous l’effet de
circonstances exceptionnelles(non accomplissement de formalités particulières. …..).

Une marque est un nom, un symbole ou un signe que son propriétaire ou le titulaire d’une licence peut
utiliser pour identifier des produits ou services spécifiques.

Des situations de monopole peuvent résulter d’un brevet mais non des marques, puisque la concurrence
peut, dans ce dernier cas, distribuer des produits similaires ou identiques, dès lors qu’elle utilise des
signes distincts.

Un brevet résulte généralement de travaux de recherche et développement importants, risqués et


coûteux. L’entreprise qui a effectué ces travaux cherchera à récupérer les dépenses grâce à la vente des

20
Rapport OCDE paragraphe 6.4
57

produits couverts par le brevet et à la conclusion d’accords de licence pour permettre à d’autres
entreprises d’utiliser l’invention ou grâce à la vente pure et simple du brevet.

La création d’une marque n’est pas, en général, très onéreuse. En revanche, lui donner de la valeur et
veiller à ce que celle-ci se maintienne ou s’accroisse sera souvent coûteux. La valeur d’une marque
dépend :

• des éventuelles actions de commercialisation et de promotion ;


• des dépenses de contrôle de qualité ;
• de la réputation et de la qualité de son propriétaire ;
• des mesures adoptées pour l’entretien de ladite réputation.

Une marque peut faire l’objet d’une vente, de l’octroi d’une licence ou de tout autre transfert.

3-1-2Application du principe de pleine concurrence aux biens incorporels

21
Les méthodes OCDE applicables en matière de marchandises s’appliquent mutatis mutandis aux
biens incorporels : méthodes traditionnelles fondées sur les transactions et méthodes transactionnelles
de bénéfices. Cependant, en raison de la particularité des biens incorporels, de la difficulté à valoriser
le prix à la date de la transaction et des considérations commerciales spécifiques et légitimes tenant
également des liens des sociétés d’un même groupe, la fixation du prix de pleine concurrence requiert
l’examen combiné de la situation :

- du cédant, d’une part. A quel prix serait-il disposé à transférer l’actif au bénéfice d’une
entreprise indépendante comparable ?
- et du cessionnaire, d’autre part. Quelles sont la valeur et l’utilité de l’actif, pour ses
activités ?

Le prix est-il proportionné à l’avantage qu’il est raisonnablement en droit d’attendre, comparativement
aux autres options réalistes à sa disposition ? S’il est nécessaire d’engager des dépenses pour exploiter

21
Chronique intitulée « la fixation des prix de transfert, en matière de biens incorporels et de services » Francis Lefebvre
58

la licence, une société indépendante serait-elle prête à verser ce prix, au regard de la rentabilité attendue
des frais à supporter et d’investissements supplémentaires ?
Par exemple, dans la plupart des cas, un distributeur n’ayant aucun lien de dépendance détenant le droit
exclusif de distribuer un produit accepterait de verser des redevances plus élevées pour l’utilisation
d’une marque de commerce de grande valeur, seulement si cela lui permettait de réaliser des bénéfices
supérieurs à ceux auxquels il pourrait s’attendre pour la distribution d’un bien similaire, sans cette
marque de commerce.

Il faut s’assurer qu’une entreprise appartenant à un même groupe ne paye pas pour l’achat ou
l’utilisation d’un actif incorporel un montant fixé, comme il est stipulé dans le rapport OCDE, selon
l’utilisation la plus intensive ou la plus productive de cet actif dès lors que son utilité est plus limitée,
au titre de son activité.

Typologie des conventions

Le transfert d’un bien incorporel peut revêtir diverses modalités : cession ou octroi d’une licence,
moyennant le paiement de redevances.
Les redevances mises à la charge du licencié sont, en général, fixées selon le chiffre d’affaires ou la
production et exceptionnellement en fonction des profits réalisés par le licencié.

Le prix de transfert peut être global en visant les produits et les biens incorporels, ce qui permet à
l’acquéreur de ne pas payer spécifiquement de redevances pour la mise à disposition du savoir-faire
technique. Cette modalité n’est, à l’expérience, pas recommandable car d’une part, elle entraîne un
risque de confusion, en raison de son caractère inhabituel et d’autre part, les deux rémunérations sont
susceptibles de suivre des régimes fiscaux différents (le savoir-faire est, en général, passible d’un impôt
retenu à la source dans l’Etat du débiteur).

Eléments d’appréciation

La détermination d’un prix de pleine concurrence de biens incorporels, entre entreprises associées,
prend en considération de nombreux facteurs tels que :
59

• les avantages attendus du bien, déterminables selon un calcul de la valeur actualisée nette ;
• la zone géographique d’utilisation ;
• l’exclusivité ou non des droits transférés ;
• le réseau de distribution du licencié ;
• l’autorisation de sous-licences ;
• le doit éventuel du développement du bien par le cédant ;
• les dépenses de démarrage et de développement ;

Cas du brevet

Si le bien est un brevet, il faut prendre en compte, d’une part, la nature du brevet et d’autre part, le
degré et la durée de sa protection.
Si le propriétaire du bien incorporel l’a cédé ou concédé à un tiers indépendant, ce prix peut servir de
référence, sous réserve que les circonstances soient comparables.

Cas d’une licence

Dans le cas d’une cession ou d’une concession d’une licence portant sur un bien incorporel, il est
possible d’utiliser la méthode du prix comparable sur le marché libre lorsque le même propriétaire a
transféré des biens incorporels comparables ou en a cédé la licence dans des conditions comparables à
des entreprises indépendantes. Le montant des règlements faits dans le cadre de transactions
comparables entre entreprises indépendantes du même secteur peut servir d’indication, lorsque
l’information est disponible. Les offres faites à des entreprises indépendantes ou les offres de licenciés
concurrents peuvent également être prises en compte. Si l’entreprise associée cède le bien incorporel à
des tiers par voie de sous-licence, il sera possible d’utiliser la méthode du prix de revente pour analyser
les conditions de la transaction entre entreprises associées.

Cas d’une vente de marchandise comprenant un transfert de biens incorporels

Si la vente de marchandise comprend un transfert de biens incorporels, la méthode du prix comparable


sur le marché libre ou celle du prix de revente peut être retenue.
60

S’il s’agit de biens incorporels de commercialisation (marque), l’examen , pour procéder à la


comparaison, doit prendre en compte :

• la valeur ajoutée, (au regard des exigences des consommateurs),


• le territoire géographique ;
• la part de marché ;
• le chiffre d’affaires ;
• et tout autre élément pertinent.

Si des biens incorporels manufacturiers sont visés, cette analyse doit, en plus , tenir compte de la
recherche –développement et de la valeur qui leur est attribuable.

La fixation du prix de transfert peut résulter de l’examen du montant, de la nature des frais encourus
par la société ayant mis au point l’actif incorporel.

En outre, les biens incorporels peuvent requérir des dépenses régulières de recherche et développement
et de contrôle de qualité. Il faut en tenir compte.

Détermination du prix de pleine concurrence lorsque l’évaluation est très incertaine , au moment de la
transaction

Les biens incorporels étant très spécifiques, il est parfois difficile de trouver des éléments de
comparaison.

Si une incertitude importante existe, au jour de la transaction pour fixer le prix, il est alors envisageable
de :

• le déterminer en fonction des avantages attendus , à savoir en recherchant à mesurer l’évolution


prévisible ;
61

• à défaut, de prévoir des clauses de révision des prix (augmentation de la redevance en fonction
de la croissance des ventes) ou bien de conclure des contrats à durée déterminée.

Commercialisation réalisée par des entreprises non propriétaires de la marque ou du nom commercial

Ce cas se rencontre pour les distributeurs de marques.


La question se pose de savoir si l’entreprise doit être rémunérée pour sa prestation de services
promotionnels ou le cas échéant être rétribuée à raison d’une partie des revenus additionnels
attribuables au bien incorporel de commercialisation. Se pose alors la question liée au montant
imputable, à ce titre, à l’actif de commercialisation.

La réponse dépend de la nature du contrat. Si le distributeur est un simple agent, il se limite à sa


rémunération d’intermédiaire et il doit être, en principe, remboursé pour ses dépenses promotionnelles.
Il ne peut revendiquer une partie des revenus afférents au bien incorporel de commercialisation. En
revanche, s’il supporte les dépenses de son activité de commercialisation de manière définitive, il
pourra, selon les circonstances, percevoir un revenu supplémentaire qui peut être traduit par une
diminution du prix d’achat des marchandises ou une réduction du taux de la redevance.

Le montant imputable aux activités de commercialisation prend en compte le comportement de chaque


partie sur plusieurs années (campagnes de publicité et de promotion pour préserver la marque, qualité
du produit etc.).

3-2Cas des services

Les sociétés d’un groupe international se rendent fréquemment des services d’ordre administratif,
financier, commercial ou technique (en recourant, au besoin, à l’assistance de prestataires extérieurs).
Une mention particulière doit être faite pour le savoir-faire comprenant un service car il est difficile de
séparer le transfert du service et le transfert du bien incorporel. Il convient de procéder à un éclatement
de la nature du transfert, pour réduire tout risque d’ambiguïté.
62

Les dépenses afférentes à ces services sont, suivant le cas, supportées par la société mère ou l’une de
ses filiales (parfois créée spécialement, à cet effet). Les activités de services intragroupe, leurs
avantages réels ou attendus présentent des différences significatives, selon les entreprises
internationales visées.

La problématique, en matière de prix de transfert de services est double :


• une prestation a-t-elle effectivement été rendue ?
• Son prix, est-il celui de la pleine concurrence ?

3-2-1Le service doit avoir été rendu

22
Selon le rapport OCDE , il faut rechercher si, pour celui qui en bénéficie, le service présente « un
intérêt économique ou commercial renforçant sa position commerciale ».
Autrement dit, une entité indépendante aurait-elle payé pour ce service ou l’aurait-elle réalisé en
interne, dans une situation comparable ? Si la réponse est négative, le service rendu n’est pas conforme
au principe de pleine concurrence. Tout dépend donc des circonstances, ce qui rend nécessaires la tenue
et la conservation d’une documentation.

Si des services sont rendus par une entreprise du groupe pour satisfaire un besoin précis d’une ou
plusieurs entités du groupe, la réponse est simple car une entreprise indépendante aurait fait appel à un
tiers ou à un service interne, le service peut être facturé. En revanche, si une entreprise réalise des
activités concernant plusieurs membres d’un groupe ou tout le groupe, la situation est plus complexe.

Les activités d’actionnaire ne doivent pas être supportées par les sociétés qui en bénéficient. Il s’agit
des coûts afférents :

• à la structure juridique de la société mère (organisation d’assemblées générales, émission


d’actions etc.) ;

22
Rapport OCDE paragraphe 7.6
63

• à la mobilisation des ressources nécessaires à l’acquisition des participations. En revanche, si


une société mère emprunte pour le compte d’une société membre du groupe, qui elle-même
emploie les fonds pour procéder à l’acquisition d’une société cible, un service est rendu par la
société mère à la société membre du groupe et doit être rémunéré ;

• aux obligations de la société mère pour la consolidation et la présentation des comptes du


groupe.

Le double emploi

Si un service fait double emploi, il ne peut être rémunéré. Cependant, un double emploi peut, sous
certaines conditions, être admis. Il en est ainsi, lorsque le double emploi est destiné à réduire le risque
de mauvaise décision, en obtenant, par exemple, un deuxième avis juridique su la question. C’est
également le cas lorsque le double emploi est temporaire. En effet, en cas de réorganisation pour
centraliser les fonctions, une dépense double peut être encourue.

L’effet accessoire

Un service rendu par un membre peut viser seulement certains membres mais avoir des effets
avantageux sur d’autres membres. Ces derniers ne sont pas, en général, considérés comme bénéficiant
d’un service intragroupe. Tel est également le cas lorsque l’avantage est procuré, en raison de
l’appartenance au groupe de l’entité intéressée, par exemple si des conditions de crédit meilleures sont
accordées (sauf si l’avantage résulte d’une garantie d’un autre membre du groupe ou de la notoriété à la
suite de campagnes de sensibilisation).

Activités centralisées

Ces activités assurées par la société mère ou par une société de services du groupe, sont des services
intragroupe. Elles englobent les services administratifs, planification, comptabilité, audits, services
juridiques, affacturage, services informatiques, gestion de trésorerie, contrats de prêt, gestion du risque
de taux d’intérêt et ou de change, refinancement, assistance pour la production, achats, distribution,
64

gestion du personnel, formation du personnel, recherche-développement, protection de la propriété


intellectuelle.

Service à la demande

La question se pose de savoir si la disponibilité du service revêt un caractère distinct, à ce titre


facturable à part, indépendamment des services effectivement rendus. Cette approche est acceptable si
l’avantage accordé au membre du groupe est suffisamment précis. Un examen sur plusieurs années
doit, le cas échéant, être fait pour déterminer si un service intragroupe est rendu.

3-2-2La rémunération

Si la réalité du service est établie, il faut fixer son prix de pleine concurrence, à savoir celui qui aurait
été déterminé en montant et en conditions entre un prestataire et son client indépendant, au plan
économique et juridique. La notion de groupe de société n’existe pas en la matière. Il faut se référer au
prix qu’un indépendant aurait réclamé ou payé pour le service en cause et l’appliquer aux relations
intragroupes. Il faut :

• que le service soit rémunéré. Appartenir à un même groupe n’est pas une raison valable pour
s’abstenir de faire payer des services ;

• fixer le prix comme si les parties en cause n’étaient pas liées. Si des services sont déjà facturés à
des tiers, ce tarif peut être retenu comme celui de la pleine concurrence. A défaut, une demande
de prix ou un devis auprès d’un tiers peut servir de fondement à la fixation du prix intragroupe.

Deux modalités de facturation se retrouvent dans les groupes :

• la méthode de la facturation directe ;


• la méthode de répartition des coûts (ou méthode d’imputation indirecte).
65

La première méthode est la plus appropriée et la plus sûre. Elle consiste à établir une facturation
spécifique pour chaque service identifiable. Cependant, elle se révèle dans la plupart des cas, difficile,
voire impossible à mettre en œuvre. Pour cette raison, les groupes n’ont, en général, d’autre choix que
23
de faire appel à des méthodes de répartition des coûts qui conduisent à des évaluations .
Ces méthodes, appelées méthodes d’imputation indirecte, consistent à répartir les coûts d’un service
fourni à plusieurs entités et à allouer à l’entité visée sa quote part de la valeur de ce service, selon une
base ou clé de répartition. Elles doivent être suffisamment précises pour être admises. La prestation
doit être identifiable et prévisible.

Elles doivent être sensibles aux circonstances commerciales de chaque situation. La clef de répartition
doit être choisie avec discernement et être justifiée (chiffre d’affaires, employés, etc.).

Si le prix du service est compris dans le prix d’autres transferts, il convient de s’assurer qu’un service
n’est pas facturé deux fois.

Il faut essayer de faire un rapprochement entre la facturation et le service rendu. Rien n’interdit un
système de provision, sous réserve d’une régularisation, en fin d’année, en fonction du service
réellement rendu in fine.

3-2-3Le prix du service : prix du marché ou cost plus

Le prix dépend de la valeur du service et de la somme qu’une partie indépendante serait prête à payer
dans des circonstances économiques similaires, en tenant compte des coûts supportés par le prestataire.
En pratique, le prix retenu est celui en vigueur sur le marché donc le prix comparable sur le marché
libre ou celui obtenu par la méthode du prix de revient majoré. Dans cette dernière hypothèse, une
cohérence entre les transactions des entreprises du groupe et celles de parties indépendantes doit
exister, en matière de coûts à retenir.

Comme dans toute politique de prix de transfert, l’examen des fonctions assurées par les membres du
groupe est essentiel pour établir la relation entre le service et les activités. Le cas échéant, il s’avère

23
Chronique intitulée « la fixation des prix de transfert, en matière de biens incorporels et de services » Francis Lefebvre
66

utile de s’attacher aux impacts immédiats du service et également à ses conséquences à long terme. Il
faut donc prendre en compte les avantages auxquels l’entreprise pouvait raisonnablement s’attendre.
Une question se pose de savoir si le prestataire de service doit réaliser un bénéfice. Traditionnellement,
une marge doit être fixée car tel est le cas entre parties indépendantes. Cependant, ce principe n’est pas
absolu car, dans certains cas, un indépendant s’abstiendrait d’appliquer un profit : par exemple, lorsque
le coût du service pour le fournisseur excède le prix du marché mais qu’il accepte de fournir ce service
pour accroître sa rentabilité, en complétant sa gamme d’activités. Par conséquent, un prix de pleine
concurrence ne se traduit pas toujours par un bénéfice pour une entreprise associée qui fournit un
service intragroupe.

3-2-4Quelques exemples de services intragroupe

Le recouvrement des créances :

Un groupe multinational peut décider de centraliser l’activité de recouvrement des créances, pour
limiter les risques monétaires et les risques de crédit et pour alléger la charge administrative. Un
organisme central va alors être chargé de ces fonctions et fournira des services intragroupe qu’il doit
facturer à un prix de pleine concurrence. L’application de la méthode de prix comparable sur le marché
libre peut être appropriée dans un tel cas.

La fabrication sous contrat

La fabrication sous contrat peut également constituer un service intragroupe. Le producteur pourra
recevoir des instructions sur ce qu’il doit fabriquer, les quantités, la qualité……….Le risque qu’il court
est très faible puisqu’il est sûr d’écouler tout ce qu’il produit, à condition, bien entendu, de respecter les
normes de qualité. Dans ce cas, la société productrice rend un service intragroupe et la méthode du prix
de revient majoré pourra être appliquée.
67

3-3Les accords de répartition de coûts

Il arrive souvent que les entreprises multinationales financent leurs dépenses de recherche et
développement par des systèmes de contribution aux coûts, plutôt que de vendre ou de concéder aux
entreprises membres le droit d’utiliser le brevet ou le procédé technique mis au point par le procédé de
recherche. Il peut s’agir d’un accord de partage des coûts proprement dit , selon lequel les entreprises
se partagent les coûts réels et les risques des activités de recherche et développement entreprises au
profit de chacune d’elles ou d’un accord de mise en commun des dépenses , dans lequel la contribution
de chaque membre est fixée de manière forfaitaire et n’est pas liée au coût effectif d’une activité
déterminée. L’OCDE appelle ces accords, accords de répartition des coûts, ARC.

Les clés de répartition sont fonction de divers paramètres, tels que le chiffre d’affaires, les ventes ou
simplement au prorata de l’usage que les entreprises comptent faire du produit de la recherche.

Ces accords, fondés sur l’attente d’avantages mutuels, doivent reposer sur un équilibre entre les coûts
que chaque membre du groupe incorpore à ses charges déductibles et l’avantage qu’il retirera, selon le
principe de pleine concurrence.

En réalité, le problème est lié aux avantages qu’une société retire ou est susceptible de retirer de
l’opération de partage des coûts. Entre autres, les recherches effectuées doivent être étroitement liées
aux besoins spécifiques des participants, faute de quoi la dépense pourrait être rejetée comme n’étant
pas liée à l’exploitation .

Les recherches menées ne sont pas toujours couronnées de succès. Mais même dans ce cas, les
dépenses devraient pouvoir être déductibles, sauf si elles se prolongent sur une durée relativement
longue, compte tenu de l’absence de résultats, par référence aux pratiques des entreprises
indépendantes.

Le rapport OCDE de 1995 contient quelques recommandations sur les accords de partage des coûts :
68

• les participants doivent se composer exclusivement d’entreprises pouvant en retirer des


avantages mutuels ;
• l’accord doit préciser la nature et l’importance de la part de chaque participant ;
• il ne doit pas y avoir de paiement par un participant autres que les contributions ;
• les contributions doivent être réparties proportionnellement au partage des avantages escomptés
de l'accord ;
• des ajustements doivent être prévus, en cas d’adhésion d’un nouveau participant ou de retrait.

L’OCDE n’aborde pas la question de l’application éventuelle d’une marge alors qu’elle est parfois
exigée par certains Etats ; Il faut peut-être en conclure qu’il n’y a lieu de ne répartir que des coûts,
puisque tous les participants sont propriétaires des produits, dans une sorte d’indivision économique.

4- CRITERES DE CHOIX D’UNE METHODE DE FIXATION DES PRIX DE TRANSFERT : CAS DU MAROC

Compte tenu de tout ce qui précède, nous allons exposer, ci-après, les critères de choix d’une méthode
de fixation des prix de transfert, dans le contexte marocain.

4-1 Méthode à envisager, en premier lieu

La première des méthodes à envisager est la méthode du prix comparable sur le marché libre. La
référence au prix d’une transaction identique entre sociétés indépendantes constitue, comme le souligne
l’OCDE, la façon la plus directe d’obtenir un prix de pleine concurrence.

4-2 Autres méthodes envisageables, lorsque la méthode du prix comparable sur le marché libre
n’est pas applicable

Si la méthode du prix comparable sur le marché libre ne peut être utilisée (ce qui est souvent le cas, en
l’absence généralement de transactions de référence entre sociétés indépendantes), il pourra alors être
envisagé d’appliquer une méthode de prix de transfert fondée, à la différence de la méthode du prix
comparable sur le marché libre, sur des comparaisons ou des répartitions de marge et non sur la
référence à un prix de marché.
69

4-2-1Cas des prestations de service :

En général, on utilisera une méthode de prix comparable sur le marché libre, lorsqu’un service
comparable est fourni entre entreprises indépendantes, sur le marché du bénéficiaire. Tel pourrait être
le cas en matière de tenue de comptabilité, de conseils juridiques ou de services informatiques.

En l’absence de prix comparables sur le marché libre, et à défaut de pouvoir appliquer la méthode du
prix comparable sur le marché libre, il convient d’utiliser la méthode du prix de revient majoré.

Dans le cadre d’un accord de répartition des coûts, la méthode généralement utilisée est la suivante :

(Coûts à refacturer + marge) x CA filiale/CA total du groupe

La répartition peut être fondée sur le chiffre d’affaires, les effectifs employés ou sur toute autre base.
La clef de répartition doit être choisie avec discernement et être justifiée.

Exemple
:

La meilleure clé de répartition pour évaluer l’avantage que chaque membre d’un groupe retire d’un
service centralisé de ressources humaines peut être le nombre d’employés de chaque membre du
groupe.

La répartition des frais d’assistance pour dépannage d’urgence d’ordinateurs pourra se faire en
proportion des dépenses d’équipements informatiques des divers membres du groupe.

Une facturation au pourcentage pur et simple du chiffre d’affaires n’est pas, en principe, admise
par les administrations fiscales.
70

4-2-2Cas des livraison de biens

En matière de livraison de biens, le choix d’une méthode de prix de transfert suppose d’effectuer, au
préalable, une analyse fonctionnelle, c’est à dire de déterminer les fonctions, risques et actifs des
sociétés en présence.

Le principe de sélection d’une méthode de prix de transfert sur la base de l’analyse fonctionnelle est
que la méthode retenue devra se traduire par des possibilités de profits et par des risques de pertes
d’autant plus élevés que la société considérée a des fonctions/risques/actifs importants (exemple
autonomie de gestion, risques de perte sur par exemple les stocks et les créances, actifs incorporels de
valeur tels que des marques ou des brevets) et s’apparente, en conséquence, à un entrepreneur.
Corrélativement, une société ayant des profits/risques/actifs limités telle qu’un sous-traitant dans le
domaine de la production ou un agent commercial dans le domaine de la distribution, devra avoir des
perspectives de profits et des risques de pertes limités, du fait de la méthode de prix de transfert
appliquée.

Le choix de la méthode de prix de transfert est plus délicat, lorsque les différences de profil des
sociétés considérées, en termes d’analyse fonctionnelle, sont moins claires. C’est le cas notamment
lorsqu’une des parties agit en tant qu’entrepreneur mais l’autre présente aussi certaines des
caractéristiques de l’entrepreneur.

Activité de production :

La méthode, qui pourrait être retenue pour une activité de production, est la méthode du prix de revient
majoré.

Activité de distribution :

La méthode qui pourrait être retenue est la méthode du prix de revente ou commission sur les ventes.
71

4-2-3Cas des biens incorporels

La nature même des biens incorporels peut souvent rendre difficile leur évaluation. Le risque inhérent
souvent associé à de tels biens peut générer des variations importantes dans leur valeur. De plus, les
biens incorporels peuvent avoir une valeur considérable même s’ils n’ont pas eu ou peu de valeur
comptable au bilan du contribuable.

Il est possible d’utiliser la méthode du prix comparable sur le marché libre, pour déterminer un prix de
pleine concurrence relativement à la vente ou à l’octroi d’une licence d’un bien incorporel, notamment
un brevet, une marque de commerce ou du savoir-faire, lorsque le même bien incorporel ou un bien
incorporel comparable a été vendu ou octroyé à des parties n’ayant aucun lien de dépendance.

Les offres véritables provenant des parties n’ayant aucun lien de dépendance, concernant les biens
incorporels, peuvent également être prises en considération. Cependant, lorsqu’une telle offre ne donne
pas lieu à une entente entre les parties, les contribuables devraient également tenir compte des facteurs
qui ont contribué au rejet de l’offre. Une offre faite par un acheteur peut être représentative d’un prix
que le cessionnaire était prêt à payer, mais pas nécessairement du prix qu’un vendeur est prêt à
accepter.

Les méthodes fréquemment retenues pour la concession de l’usage d’un bien incorporel représentent un
pourcentage du chiffre d’affaires réalisé par l’entité utilisatrice du bien incorporel.

Pour déterminer un taux de redevance, il y a lieu de tenir compte des facteurs suivants :

• les taux en vigueur, dans l’industrie ;


• les modalités de l’entente y compris les restrictions géographiques, les droits d’exclusivité ;
• les bénéfices que l’utilisateur espère obtenir ;
• l’assistance technique et le savoir-faire qui pourraient être fournis en même temps que
l’autorisation d’exploiter un brevet etc.
72

Deuxième partie
LES REDRESSEMENTS OPERES AU
TITRE DES TRANSFERTS
INDIRECTS DE BENEFICES ET LES
MOYENS DE SOLUTIONNER
OU D’EVITER LES
LITIGES Y AFFERENTS – PLACE DE
L’EXPERT COMPTABLE
73

I - LES TRANSFERTS INDIRECTS DE BENEFICES : ARTICLE 4 DU LIVRE DES PROCEDURES


FISCALES

1 - LE CHAMP D’APPLICATION DE L’ARTICLE 4 DU LIVRE DES PROCEDURES FISCALES

Pour lutter contre certaines formes d’évasion fiscale, l’article 4 du livre des procédures fiscales stipule
que :
« … Lorsqu'une entreprise marocaine a directement ou indirectement des liens de dépendance avec des
entreprises situées au Maroc ou hors du Maroc, les bénéfices indirectement transférés, soit par voie de
majoration ou de diminution des prix d'achat ou de vente, soit par tout autre moyen, sont rapportés au
résultat fiscal ou au chiffre d'affaires déclarés.

En vue de cette rectification, les prix d'achat ou de vente de l'entreprise concernée sont déterminés par
comparaison avec ceux des entreprises similaires ou par voie d'appréciation directe sur la base
d'informations dont dispose l'administration … ».

La législation fiscale marocaine permet un ajustement des prix de transfert sans une référence express
24
au prix de pleine concurrence .

Les dispositions de l’article 4 du livre des procédures fiscales s’appliquent dans les situations
suivantes :

• celle où une entreprise marocaine a directement des liens de dépendance avec des entreprises
situées hors Maroc (le cas des entreprises situées au Maroc ne nous concerne pas ) ;

• celle où une entreprise marocaine a indirectement des liens de dépendance avec des entreprises
situées hors du Maroc (le cas des entreprises situées au Maroc ne nous intéresse pas).

24
Article intitulé « Approches du règlement des litiges en matière de prix de transfert » de Noureddine Bensouda, durecteur des impôts Juillet
2001, présenté à Genève, lors de la dixième réunion du groupe d’experts de la coopération internationale en matière fiscale
74

Nous estimons que ces dispositions sont applicables aussi bien dans le cadre de l’impôt sur les sociétés
que dans celui de l’impôt général sur le revenu. En effet, l’article 4 vise les entreprises marocaines
ayant directement ou indirectement des liens de dépendance avec des entreprises situées au Maroc ou
hors du Maroc. Lesdites entreprises peuvent être assujetties aussi bien à l’IS qu’à l’IGR. Il y a lieu de
noter que, préalablement à la promulgation du livre des procédures fiscales, la notion de transfert
indirect de bénéfices était prévue aussi bien par l’article 35 de la loi relative à l’impôt sur les sociétés
que par l’article 33 de la loi relative à l’impôt général sur le revenu.

Nous nous intéresserons, dans les développements qui suivent, uniquement aux redressements, au titre
des transferts indirects de bénéfices, dans le cadre de l’impôt sur les sociétés.

1-1 Existence de liens de dépendance

Toute la problématique des prix de transfert suppose l’existence d’un intérêt de groupe transcendant
l’intérêt des parties en cause.
L’existence d’un tel intérêt se traduit par un lien de dépendance entre les sociétés. Sans ce lien, les
parties sont alors indépendantes et aucun problème de prix de transfert ne saurait se poser. L’existence
25
d’un tel lien constitue donc un préalable à l’application des mesures sur les prix de transfert .

L'article 4 du livre des procédures fiscales ne donne pas de définition de la notion de dépendance
qui peut être juridique ou simplement de fait.

La situation de dépendance économique est prévue par le droit de la concurrence.

La notion de dépendance économique n’est pas définie par la loi sur la concurrence et la liberté des
26
prix .

25
Ouvrage « les prix de transfert » de Patrick Rassat et Gianmarco Monsellato – page 24
26
Article 7 de la loi 06-99 sur la liberté des prix et de la concurrence
75

27
D’après le conseil de la concurrence français , la situation d’un état de dépendance économique d’un
distributeur à l’égard de son fournisseur, s’apprécie en tenant compte de « l’importance de la part du
fournisseur dans le chiffre d’affaires du revendeur , de la notoriété de la marque du fournisseur , de
l’importance de la part de marché du fournisseur, de l’impossibilité, pour le fournisseur, d’obtenir
d’autres fournisseurs des produits équivalents », ajoutant que ces critères doivent « être simultanément
présents pour entraîner cette qualification ».
Le conseil de la concurrence a rejeté l’état de dépendance économique parce qu’il estimait que ces
critères n’étaient pas tous réunis, en particulier, parce que le fournisseur possédait des parts de marché
faibles, parce qu’il existait, sur le marché des produits équivalents pouvant être proposés avec succès à
la clientèle ou parce qu’il était possible de passer d’un réseau à un autre commercialisant une marque
de notoriété différente etc.

L’article 144 de la loi relative aux sociétés anonymes définit, quant à lui, plutôt la notion de contrôle
d'une société sur une autre :

« Une société est considérée comme en contrôlant une autre :

• lorsqu'elle détient directement ou indirectement une fraction de capital lui conférant la majorité
des droits de vote dans les assemblées générales de cette société ;

• lorsqu'elle dispose seule de la majorité des droits de vote dans cette société, en vertu d'un
accord conclu avec d'autres associés ou actionnaires qui n'est pas contraire à l'intérêt de la
société ;

• lorsqu'elle détermine en fait, par les droits de vote dont elle dispose, les décisions dans les
assemblées générales de cette société.

Elle est présumée exercer ce contrôle lorsqu'elle dispose directement ou indirectement, d'une fraction
des droits de vote supérieure à 40% et qu'aucun autre associé ou actionnaire ne détient directement ou
indirectement une fraction de ces droits supérieure à 30%.

27
LAMY Droit économique Concurrence-distribution-consommation
76

Toute participation même inférieure à 10% détenue par une société contrôlée est considérée comme
détenue indirectement par la société qui la contrôle ».

1-1-1Dépendance juridique

Dépendance directe

La circulaire d’application du livre des procédures fiscales n’ayant pas encore été publiée (nous avons
consulté le projet de circulaire et nous avons constaté qu’il ne prévoyait rien de nouveau par rapport à
l’ancienne circulaire prise pour l’application des dispositions concernant les transferts de bénéfices à
l’étranger, si ce ne sont les définitions des notions de filiale, contrôle etc.), nous pouvons nous référer
aux circulaires de l’administration fiscale commentant les dispositions des articles 35 de la loi IS et 33
de la loi IGR, abrogés suite à la promulgation du livre des procédures fiscales.

Selon la circulaire prise pour l’application des dispositions de l’ancien article 35 de la loi relative à
l’impôt sur les sociétés, la dépendance directe ne peut être conçue que dans le cadre des relations
suivantes :

• sociétés mères et filiales ;


• sociétés et établissements stables ;
• sociétés et leurs succursales.

Il est à noter que la notion de filiale est définie par la loi relative aux sociétés anonymes, comme étant :
« une société dans laquelle une autre société, dite mère, possède plus de la moitié du capital ».

Dépendance indirecte

Quant aux liens de dépendance indirecte, selon la circulaire précitée, ce type de relations s’établit
notamment entre sociétés filiales apparentées à l’intérieur d’un même groupe de sociétés qui lui-même
est sous le contrôle de la société mère.
77

1-1-2Dépendance de fait

Si l’administration n’est pas en mesure de prouver une dépendance de droit, elle peut néanmoins
démontrer l’existence d’une dépendance résultant d’un état de fait.
La circulaire prise pour l’application de l’ancien article 35 de la loi relative à l’impôt sur les sociétés
précise qu’indépendamment des situations de dépendance de droit , il peut être établi des situations de
liens de dépendance de fait, en particulier lorsqu’il existe une situation de monopole, de quasi-
monopole ou d’intérêts communs.

La même circulaire cite les cas où certains dirigeants de sociétés, par le biais de leurs participations
financières dans d’autres sociétés, influent la gestion et la prise de décisions au sein de ces sociétés,
tout en étant membres actifs des conseils d’administration ou de surveillance.

A notre avis, la situation de dépendance de fait peut résulter de l’existence d’un lien contractuel ou
simplement des conditions dans lesquelles s’établissent les relations entre les entreprises. Nous
28
partageons l’idée du conseil d’Etat en France , suivant laquelle une dépendance de fait se définit
comme étant la « capacité de dicter »des conditions économiques défavorables à l’entreprise
dépendante mais correspondant à l’intérêt de l’entreprise dominante ou du groupe.

Nous estimons que c’est à l’administration fiscale, qui invoque l’article 4 du livre des procédures
fiscales, qu’il incombe d’apporter la preuve de l’existence de liens de dépendance juridique ou de
fait.

L’administration fiscale peut avoir recours à tout moyen pour prouver le lien de dépendance.
Dans la pratique, nous avons constaté que l’administration fiscale marocaine invoque souvent la
dépendance juridique, qu’elle soit directe ou indirecte, à l’occasion des contrôles fiscaux, plutôt que la
dépendance de fait.

En règle générale, l’administration fiscale, à l’occasion du contrôle fiscal, demande l’organigramme du


groupe aux entreprises multinationales.

28
Décision du conseil d’Etat du 18 Mars 1994
78

Ces dernières peuvent tenter d’omettre certaines structures du groupe de l’organigramme fourni à
l’administration. Cette attitude est très risquée car une administration peut toujours parvenir à
reconstituer un organigramme.

1-2Existence d’un transfert indirect de bénéfices

En vertu des dispositions de l’article 4 du livre des procédures fiscales, les transferts indirects de
bénéfices peuvent être opérés soit par voie de majoration ou de diminution des prix d'achat ou de vente,
soit par tout autre moyen.

L’approche préconisée par l’article 4 énonce les moyens pouvant entraîner des transferts indirects de
bénéfices. Ainsi, l’analyse ne porte pas sur le résultat global d’un exercice. Le contrôle porte sur
chaque opération prise individuellement. Le régime de base fait donc appel au principe de
comparabilité, opération par opération, prise individuellement. La méthode de comparaison préconisée
est compatible avec la convention OCDE.

La majoration et la diminution des prix d'achat ou de vente sont expressément citées comme des
moyens pouvant conduire au transfert de bénéfices. Ledit transfert est donc lié à une manipulation de
prix constatée.
En outre, l’association de la notion de transfert indirect de bénéfice à la mention « autre moyen » peut
poser des difficultés. Par ailleurs, il faut peut-être interpréter cette apparente imprécision comme une
volonté du législateur de rédiger un texte souple permettant de contrôler une réalité économique très
variée.

Dans la circulaire prise pour l’application des dispositions de l’ancien article 35 de la loi relative à
l’impôt sur les sociétés, l’administration fiscale précisait que les transferts indirects des bénéfices
pouvaient résulter notamment :
«
• de la majoration des prix d'achat de biens et services importés ;
• diminution des prix de vente des biens et services exportés ;
79

• de la pratique de taux d'intérêts réduits ou majorés ;


• de la pratique des prix excessifs pour les redevances et autres rémunérations ;
• de la prise en charge des frais de gestion excessifs ou fictifs ;
• d'abandon de créance, ou renonciation à recettes ;
• d'opérations diverses de compensation etc.»
S’agissant d’entreprises apparentées, contrôlées par des groupes industriels et financiers ayant des
ramifications au plan international, les procédés de transfert utilisés et énumérés ci-dessous peuvent
conduire à localiser la majeure partie des bénéfices du groupe dans les pays où l’impôt est le moins
élevé.

29
En cas de contrôle fiscal, les vérificateurs ont, à leur disposition, un certain nombre d’informations :
le dossier historique de la société, les renseignements à raison du droit de communication auprès des
tiers, bien entendu les données comptables de l’entreprise ; les commentaires de l’OCDE sur les prix
de transfert (même s’ils n’ont pas force obligatoire), les données accessibles sur Internet etc.

1-2-1 Achat à prix majoré ou vente à prix minoré

Un transfert de bénéfices peut, comme nous l’avons vu, être réalisé par des achats d’une entreprise
marocaine auprès d’une entreprise étrangère à des prix majorés ou des ventes de cette même entreprise
à la société étrangère à des prix minorés. Pour apprécier l’existence d’un transfert de bénéfices, nous
estimons que l’administration fiscale devrait éviter d’utiliser une méthode purement comparative. Elle
devrait faire application du principe du prix de pleine concurrence. Il faut réellement que les termes de
la comparaison soient très proches et qu’il s’agisse d’entreprises opérant dans le même secteur,
fonctionnant dans des conditions identiques. Souvent, la spécificité des produits importés rend délicats
les termes de la comparaison.

Il est à noter que l’administration des douanes devrait appliquer le principe de pleine concurrence pour
disposer d’un critère neutre de comparaison entre les valeurs à attribuer aux marchandises importées

29
Article « Prix de transfert : comment préparer son contrôle fiscal ? Revue option Finance 26.05.2003
80

par des entreprises associées et la valeur d’articles similaires importés par des entreprises
indépendantes.
Les autorités douanières et l’administration fiscale peuvent poursuivre un objectif similaire dans
l’examen des valeurs déclarées de transactions transfrontières entre entreprises associées ; les
contribuables peuvent avoir des motivations contradictoires, lorsqu’ils fixent la valeur de leurs
transactions à l’intention des autorités douanières et des autorités fiscales. En général, un contribuable
qui importe des produits a intérêt à fixer le prix de la transaction à un faible niveau à l’intention des
autorités douanières de manière que le droit de douane applicable soit faible. En revanche, en matière
fiscale, le contribuable peut avoir intérêt à déclarer un prix plus élevé pour ces mêmes biens afin
d’accroître ses charges déductibles. La coopération entre les administrations fiscales et douanières
pourrait être utile.

1-2-1-1 Cas pratique de redressement lié à un achat à prix majoré

Le chef de redressement invoqué par l’administration fiscale marocaine :

Pour opérer un redressement de prix de transfert, au titre d’un achat à prix majoré, l’administration
fiscale a comparé le prix d’achat de la matière première importée auprès d’une société du groupe, au
titre des exercices n et n+1 au prix d’achat de la matière première importée auprès d’une autre société
du groupe (située dans un pays différent de la première), au titre de l’exercice n+2. Ayant remarqué que
le prix de la matière première enregistré au titre de n+2 est largement inférieur au prix enregistré au
titre des années n et n+1, l’inspecteur a considéré qu’il y avait transfert indirect de bénéfices, au titre
des exercices n et n+1 et a retenu comme prix de marché, pour les années n et n+1, le prix enregistré au
titre de n+2.

Nos commentaires :

Nous considérons que l’inspecteur ne s’est pas conformé aux dispositions de l’article 35 de la loi
relative à l’impôt sur les sociétés (en vigueur au titre de la période contrôlée) car cet article prévoyait
clairement que lorsqu'une société marocaine a directement ou indirectement des liens de dépendance
avec des entreprises situées hors du Maroc, les bénéfices indirectement transférés à ces dernières, soit
81

par voie de majoration ou de diminution des prix d'achat ou de vente, soit par tout autre moyen, sont
rapportés au résultat fiscal déclaré.
En vue de cette rectification, les prix d'achat ou de vente de la société concernée sont comparés
avec ceux des entreprises similaires.
En effet, l’inspecteur aurait dû comparer les prix pratiqués par la société au titre des années n et
n+1 à ceux pratiqués par des entreprises similaires, pour la même période. Dans la circulaire prise
pour l’application de l’article 35 de la loi relative à l’impôt sur les sociétés, l’administration fiscale
précisait clairement que l'administration recourt à la méthode des études comparatives portant sur
des entreprises exerçant dans des conditions normales, des activités similaires à celles des sociétés
ayant procédé au transfert desdits bénéfices. L’inspecteur n’a nullement procédé à des comparaisons
avec des entreprises similaires mais s’est contenté d’une analyse de l’évolution du prix d’achat de la
matière première importée sur trois exercices.

Une baisse importante du prix d’achat d’une année à l’autre (qui se justifiait par ailleurs par une
différence dans les caractéristiques de la matière importée et de son origine) ne saurait constituer un
argument valable, en faveur du transfert indirect de bénéfices à l’étranger, au regard de l’article 35 de
la loi relative à l’impôt sur les sociétés.

1-2-1-2 Cas pratique de redressement lié à une vente à prix minoré

Le chef de redressement invoqué par l’administration fiscale marocaine :

Pour opérer un redressement de prix de transfert, au titre d’une vente à prix minoré, l’inspecteur a
comparé les prix à l’exportation aux prix pratiqués localement et à réintégré au chiffre d’affaires à
l’exportation, la différence de prix constatée.

Nos commentaires :

Nous considérons que l’inspecteur n’a pas appliqué les dispositions de l’article 35 de la loi relative à
l’impôt sur les sociétés et de la circulaire prise pour son application. En effet, il aurait dû comparer
les prix à l’exportation aux prix pratiqués par des entreprises similaires, vendant les mêmes
82

produits, à l’exportation, sur le même pays. Les prix pratiqués à l’exportation sont fixés, en fonction
de la conjoncture internationale. Le marché international et le marché local n’ont pas les mêmes
caractéristiques et de ce fait, ne sont pas comparables.
L’OCDE insiste sur le fait que le prix de pleine concurrence peut varier selon les marchés, même pour
des transactions portant sur un même bien. Il faut que les marchés sur lesquels opèrent les entreprises
associées et les entreprises indépendantes soient comparables et que leurs différences n’aient pas
d’effet sensible sur les prix ou que des correctifs valables puissent être apportés.

1-2-1-3 Autre cas de redressement lié à une « minoration d’excédent brut


d’exploitation »

Le chef de redressement invoqué :

Pour opérer un redressement lié à un transfert indirect de bénéfices, l’inspecteur a comparé l’excédent
brut d’exploitation de la société marocaine à l’excédent brut d’exploitation d’une filiale située à
l’étranger. Il a considéré que l’insuffisance constatée était constitutive d’un transfert indirect de
bénéfice.

Nos commentaires :

L’inspecteur ne s’est pas conformé aux dispositions de l’article 35 de la loi relative à l’impôt sur les
sociétés puisque celui-ci précise expressément qu’en vue de cette rectification, les prix d'achat ou de
vente de la société concernée sont comparés avec ceux des entreprises similaires. La comparaison
des excédents bruts d’exploitation pour opérer une rectification n’est pas prévue par la loi.

Les dispositions de la loi sont claires. La rectification ne peut se faire que par voie de comparaison
des prix d’achat et de vente avec ceux des entreprises similaires. Un résultat jugé insuffisant par
l’inspecteur ne peut, en aucun cas, constituer une preuve de transfert indirect de bénéfices.

1-2-2Rémunération anormale des prestations de services


83

1-2-2-1 Le cas général


Des transferts de bénéfices peuvent être opérés également par la facturation anormale des prestations
de services (sans parler des prestations fictives).
D’une manière générale, le fait de fournir des prestations de services à un tiers sans les lui facturer et
sans contrepartie constitue, de la part d’une société commerciale, un acte étranger à une gestion
commerciale. Par suite, les sommes qui auraient dû être facturées et ne l’ont pas été doivent être
réintégrées dans les bénéfices imposables de la société.

1-2-2-2 Cas pratique de redressement lié à des prestations de services

La filiale marocaine d’un groupe multinational payait, au même titre que les filiales situées dans les
autres pays, une rémunération à un centre crée par le groupe, en vue de rendre un certain nombre de
services, pour l’ensemble des filiales du groupe. Les coûts de ce centre étaient répartis sur l’ensemble
des membres du groupe, selon des clés de répartition déterminées. Une partie des coûts était répartie,
au prorata du chiffre d’affaires de chaque filiale.

L’inspecteur a rejeté la déductibilité des charges enregistrées par la filiale marocaine en estimant que la
méthode d’allocation des charges pratiquée ferait payer à la société marocaine des frais qui ne la
concernent pas. De plus, il a avancé que cette méthode de répartition des charges est propre aux
établissements stables.

Nos commentaires :

Nous considérons que les factures du centre ne constituent pas une quote-part des frais mais une
rémunération contractuelle des services obtenus, sur la base de la méthode de rémunération fixée dans
le contrat. Cette rémunération se base sur les frais réels encourus. Elle est assise sur le cost plus et est
conforme aux principes OCDE.

La société marocaine ne paie pas de participation forfaitaire à des frais qui ne la concernent pas. Bien
au contraire, elle rémunère des prestations de service, répondant à des besoins vitaux, qui sont par
ailleurs facturées sur la base des frais effectivement engagés par le centre prestataire. La centralisation
84

des services auprès d’un seul prestataire permet d’obtenir des économies d’échelle. Le recours à des
prestataires indépendants pour obtenir les mêmes services serait beaucoup plus onéreux, voire
impossible. L’utilisation d’une société membre du groupe permet de bénéficier d’un prix de transfert
avantageux, ne laissant qu’une faible marge pour la société prestataire de services, en échange d’une
garantie de couverture de ses frais.

1-2-3Versement de redevances excessives

1-2-3-1 Le cas général

Les redevances servent à rémunérer divers services spécifiques rendus, au titre de la concession d’une
licence d’exploitation, d’un brevet ou d’une formule de fabrication, ou encore au titre de l’assistance
dans les domaines technique, scientifique, commercial ou administratif.

Les sommes payées à ce titre peuvent constituer des transferts de bénéfices si elles ne sont pas
légitimes ou si leur montant est anormal, par référence aux principes de l’OCDE.

L’appréciation de la normalité des sommes payées pourra se faire, par le biais des comparaisons,
pourvu que celles-ci soient exactes.

Il est à noter que la réglementation des changes a édicté des mesures de convertibilité applicables aux
opérations courantes, ce qui signifie un libre accès à l’achat de devises cotées par Bank Al Maghrib
pour le règlement. Les établissements bancaires chargés d’opérer le paiement sont tenus, toutefois,
d’informer à posteriori, l’office des changes de l’opération en lui adressant un compte rendu la
concernant. Ainsi pour exécuter l’ordre de virement et pour préparer ce compte rendu, les banques
exigent généralement la présentation du contrat conclu entre l’entité marocaine et l’entité étrangère en
question.

1-2-3-2 Cas pratique de redressement lié aux redevances excessives :

En matière de redevances, le chef de redressement qui revient le plus souvent est lié au caractère
excessif de la redevance. Par ailleurs, une entreprise se fait redresser sur la base de données de sociétés
85

que l’administration présente comme comparables mais dont elle ne divulgue pas l’identité, sous
prétexte qu’elle est tenue par le secret professionnel.

Nos commentaires :

Les comparables sont des rouages importants à l’appui d’une politique de prix de transfert. Ils doivent
être collectés auprès de sociétés n’appartenant pas à un groupe et ayant des fonctions identiques. Pour
pouvoir s’assurer de la pertinence des comparables utilisés par l’administration fiscale, cette dernière
devrait en principe révéler la source et l’identité des sociétés visées. En tout état de cause, nous
considérons que l’administration doit le faire devant les commissions et le cas échéant, devant le
tribunal.

1-2-4 La pratique de taux d’intérêts réduits ou majorés

Les transactions financières doivent faire l’objet d’une attention particulière car elles couvrent souvent
des opérations qui sont qualifiées de transferts de bénéfices. Les prêts sans intérêts en constituent un
exemple flagrant.

D’une manière générale, il y aura lieu de réintégrer, dans le bénéfice imposable de la société
marocaine, un intérêt correspondant à un taux normal qui doit être apprécié dans chaque cas particulier.

Par ailleurs, il ressort de la jurisprudence du conseil d’état français qu’un avantage financier peut être
admissible, si la société française en retire par ailleurs une contrepartie.

1-2-5Abandon de créance

L’abandon de créance consenti par une société marocaine au profit d’une société liée établie à
l’étranger, constitue, aux yeux de l’administration fiscale marocaine, un transfert indirect de bénéfices.

L’administration fiscale marocaine ne fait pas la distinction entre les aides à caractère commercial et
les aides à caractère financier, comme c’est le cas en France.
86

1-2-6La prise en charge de frais excessifs

Les entreprises multinationales ont souvent des filiales communes dont l’objet est d’entreprendre, pour
l’ensemble des membres du groupe, des études, la fabrication ou bien de réaliser des achats ou des
ventes pour l’ensemble des membres du groupe.

La répartition des charges de ces filiales entre les associés soulève des problèmes complexes.

1-2-7 Conclusion sur les méthodes utilisées par l’administration fiscale marocaine pour
mettre en évidence l’existence d’un transfert indirect de bénéfices

Il ressort des cas de redressements présentés ci-dessus et rencontrés dans la pratique que le prix de
référence auquel l’administration fiscale compare celui de la transaction conclue entre la société
marocaine et la société étrangère considérées n’est pas toujours pertinent. En effet, le prix retenu est
parfois pratiqué par des entreprises qui interviennent sur un marché différent de celui sur lequel se situe
l’entreprise marocaine visée par le redressement. Il arrive même, comme nous l’avons vu, que
l’administration fiscale se limite aux données de l’entreprise vérifiée. Il arrive également que les
éléments de comparaison utilisés par l’administration ne se rapportent pas à la même période que les
opérations incriminées.

Conformément aux principes retenus par l’OCDE, l’analyse comparative de l’administration ne peut
être validée que si elle détermine « le prix normal », par référence à des transactions dont les conditions
sont comparables à celles des transactions opérées par l’entreprise marocaine redressée.

Dès lors, si les transactions comparées par les autorités fiscales comportent des différences
déterminantes, la société contrôlée pourra en faire état à l’appui de sa défense.

Les comparables qui sont utilisés par l’administration fiscale devraient, en principe, être extraits de
bases de données et doivent être sélectionnés pour s’assurer que les fonctions et les risques assumés par
l’entreprise vérifiée sont identiques à ceux des comparables retenus et être ajustés pour que la
comparaison soit idoine.
87

2- LA CHARGE DE LA PREUVE DANS LE CADRE DU CONTROLE DES TRANSFERTS INDIRECTS DE

BENEFICES

La charge de la preuve est un aspect fondamental dans l’approche d’un contrôle fiscal. En effet, la
partie qui supporte cette charge est en position de faiblesse car les preuves tangibles sont, la plupart du
temps, difficiles à apporter.

L’un des principes fondamentaux du droit est la présomption d’innocence. Nul n’est déclaré coupable
jusqu’à preuve du contraire. De même que la preuve incombe à celui qui prétend. En fiscalité, ces
principes se traduisent par le fait que c’est, en principe, à l’administration fiscale de prouver que la base
imposable calculée par le contribuable est inexacte. C’est à elle d’apporter les éléments nécessaires à
cette démonstration.

Pour opérer les redressements prévus par l’article 4 du livre des procédures fiscales, nous estimons, par
conséquent, que l’administration fiscale doit prouver l’existence de liens de dépendance, mais
encore que les opérations incriminées sont constitutives d’un transfert indirect de bénéfices à
l’étranger.

C’est à l’administration d’assumer la charge de la preuve, avec son cortège de difficultés pratiques. Le
contribuable aura à critiquer les éléments apportés par l’administration fiscale et prouver que son prix
est juste, que sa base imposable est exacte, bref qu’il n’a pas transféré du revenu imposable à
l’étranger, qu’il n’a pas manipulé ses prix de transfert.
Sur le plan juridique, le contribuable ne pourra être aucunement tenu de démontrer qu’il a correctement
calculé ses prix de transfert, tant que l’administration fiscale n’aura pas fourni la preuve montrant que
la fixation des prix n’est pas conforme au principe de pleine concurrence.

Ni les anciens articles 35 et 33 des lois relatives à l’IS et à l’IGR ni l’article 4 du livre des procédures
fiscales ne fixent de procédures particulières quant à l’établissement de la preuve qui permet de
présumer le transfert de bénéfices. C’est donc, selon les procédures de droit commun qu’il appartient à
l’administration de prouver le caractère anormal de l’opération qu’elle entend redresser.
88

Dans la pratique, lors des contrôles fiscaux, la stratégie adoptée par l’administration fiscale tend parfois
à renverser la charge de la preuve sur le contribuable en invoquant la technique du « comparable
secret ». En effet, l’administration peut utiliser des comparables émanant de ses bases de données
qu’elle ne communique pas au contribuable, dans le cadre de la procédure contradictoire afin de
respecter le secret professionnel.

Ce renversement de la charge de la preuve peut s’analyser comme une extinction de la présomption


d’innocence de toute entité engagée dans une politique de prix de transfert.

3- LA DETERMINATION DU BENEFICE IMPOSABLE, EN CAS DE MISE EN ŒUVRE DES DISPOSITIONS DE

L’ARTICLE 4 DU LIVRE DES PROCEDURES FISCALES

Rappelons les dispositions de l’article 4 du livre des procédures fiscales :

« … Lorsqu'une entreprise marocaine a directement ou indirectement des liens de dépendance avec des
entreprises situées au Maroc ou hors du Maroc, les bénéfices indirectement transférés, soit par voie de
majoration ou de diminution des prix d'achat ou de vente, soit par tout autre moyen, sont rapportés au
résultat fiscal ou au chiffre d'affaires déclarés.
En vue de cette rectification, les prix d'achat ou de vente de l'entreprise concernée sont déterminés par
comparaison avec ceux des entreprises similaires ou par voie d'appréciation directe sur la base
d'informations dont dispose l'administration ».
Dans la circulaire prise pour l’application des dispositions de l’ancien article 35 de la loi relative à l’IS,
l’administration fiscale disposait que pour la détermination du résultat fiscal des sociétés précitées,
l'administration recourt à la méthode des études comparatives portant sur des entreprises exerçant dans
des conditions normales, des activités similaires à celles des sociétés ayant procédé au transfert desdits
bénéfices.

Il y a lieu de noter que l’article 4 du livre des procédures fiscales contient une mesure qui n’était pas
prévue par les articles 35 et 33 des lois IS et IGR à savoir :
89

« … En vue de cette rectification, les prix d'achat ou de vente de l'entreprise concernée sont déterminés
par comparaison avec ceux des entreprises similaires ou par voie d'appréciation directe sur la base
d'informations dont dispose l'administration ».

[Il est à noter que dans le projet de circulaire prise pour l’application du livre des procédures fiscales,
cette nouvelle mesure n’a fait l’objet d’aucun commentaire. Par contre, il est précisé que pour la
rectification des prix d’achat ou de vente rapportée au résultat fiscal ou au chiffre d’affaires des
entreprises dépendantes, l’administration recourt à la méthode des études comparatives portant sur des
entreprises exerçant des activités similaires (l’expression « dans des conditions normales » a été
supprimée) à celles d’entreprises ayant procédé au transfert desdits bénéfices ou par voie
d’appréciation directe, sur la base d’informations dont dispose l’administration].

Il découle de ces dispositions les redressements à opérer :

3-1L’ajustement primaire

Dans un premier temps, les bénéfices transférés sont rapportés au résultat fiscal ou au chiffre d'affaires
déclarés. Par conséquent, ils sont soumis à l’IS (ou à l’IGR) et à la TVA (si le chiffre d’affaires est
assujetti à la TVA).

Dans certains cas, l’administration fiscale n’a pas besoin de recourir à la comparaison avec d’autres
entreprises pour déterminer le montant des sommes à réintégrer dans les bénéfices imposables de la
société marocaine, si elle peut trouver, dans la comptabilité de cette dernière, des éléments lui
permettant d’opérer les redressements. C’est le cas notamment lorsque des rémunérations ont été
accordées, sans contrepartie, des prêts ont été octroyés, sans intérêts etc.

Dans le cas contraire, l’administration évaluera les bases d’imposition à partir :

• soit d’une comparaison avec les données des entreprises similaires ;


• soit par voie d’appréciation directe sur la base d’informations dont elle dispose.
90

L’évaluation des bases d’imposition à partir d’une comparaison avec les données des entreprises
similaires peut laisser croire que l’administration fiscale marocaine retient comme unique méthode de
détermination des prix de transfert, la méthode du prix comparable sur le marché libre, ce qui ne serait
pas conforme aux principes OCDE .

Quant à l’évaluation, par l’administration, par voie d’appréciation directe sur la base d’informations
dont elle dispose, elle peut, à notre avis, s’avérer abusive. En effet, nul ne peut se constituer une preuve
unilatérale à l’encontre des tiers. L’administration fiscale a des moyens énormes et peut se constituer
plusieurs preuves, ce qui met le contribuable dans une position de faiblesse. La base d’informations
utilisée par l’administration doit être crédible, vérifiable et légale. Elle ne doit pas être discrétionnaire.

3-2L’ajustement au titre des revenus réputés distribués

L’administration fiscale peut être tentée de considérer les sommes réintégrées dans l’assiette de
l’impôt sur les sociétés, comme des revenus distribués, sur le fondement des distributions occultes
telles que prévues dans la circulaire prise pour l’application de la loi de finances pour la période allant
er
du 1 juillet au 31 décembre 2000.

Ladite circulaire définit les distributions occultes comme suit :

« Il s'agit des redressements des résultats déclarés opérés suite à un contrôle fiscal dans le cadre de la
procédure de rectification. C'est le cas notamment :

• des produits dissimulés ;


• des rémunérations et charges non justifiées ;
• ou, de tous autres avantages consentis aux associés.

Ces redressements sont passibles de la retenue à la source, même s'ils ne couvrent pas les déficits
déclarés.

Toutefois, les redressements portant sur les amortissements et les provisions ne donnent pas lieu à
l'application de la taxe puisque les sommes correspondantes n'ont pas été décaissées.
91

Il en est de même, entre autres, des réintégrations portant sur :

• les honoraires dûment justifiés mais non déclarés sur l'état modèle 8306 conformément aux
dispositions de l'article 46 de l'impôt sur les sociétés ;
• les paiements en espèces des charges justifiées dont le montant est égal ou supérieur à 10 000
DH.

L'émission des rôles concernant ces redressements ne peut avoir lieu qu'après :

• accord exprès ou tacite du contribuable ;


• taxation d'office effectuée dans le cadre des articles 29 et 47 de la loi relative à l'impôt sur les
sociétés ;
• décision non contestée de la commission locale de taxation ;
• décision de la commission nationale de recours fiscal.

Il convient de signaler à cet égard, que dans le cas de vérification de comptabilité, l'inspecteur
vérificateur doit informer la société vérifiée dans une lettre jointe à la notification, des redressements
passibles de la retenue à la source.

Le montant correspondant aux redressements passibles de la retenue est présumé constituer un montant
net après impôt. En effet, dans ce cas, il y a lieu de reconstituer leur montant brut pour le calcul de la
retenue à la source ».

Si les redressements opérés au titre des transferts indirects de bénéfices sont assimilés par
l’administration fiscale à des distributions occultes, ils seront soumis à une retenue à la source, au titre
de l’IS.

A notre avis, cette position est très discutable, pour les raisons suivantes :
92

1 / La notion de distribution occulte n’a pas de fondement légal, elle est prévue par une circulaire
d’application, ce qui n’est pas le cas en France. Par conséquent, si elle est doit être maintenue, elle doit
être « légalisée ».

2 / Abstraction faite du fondement légal de la notion de distribution occulte, la retenue à la source


pourrait être réduite voire supprimée, si la société bénéficiaire est ressortissante d’un Etat ayant
conclu avec le Maroc, une convention destinée à éliminer les doubles impositions. Dans cette
hypothèse :

• Si la convention définit, d’une manière très large les dividendes, en incluant les sommes
assimilées par la législation du pays de la source à des revenus distribués, la retenue à la source
peut être déduite, au taux conventionnel.
• Si la convention donne une définition des dividendes limitée à la distribution de revenus au titre
de parts ou d’actions de sociétés, les sommes réputées distribuées échappent à la retenue à la
source, au Maroc. L’article de la convention relatif aux revenus non dénommés (article 21du
modèle de convention OCDE – communément appelé « article-balai ») s’applique : l’imposition
est attribuée au pays de résidence du bénéficiaire du revenu et le Maroc perd le droit d’imposer
ces revenus, au titre de la retenue à la source.

Si ledit article balai n’existe pas, le Maroc garde le droit d’imposer ces revenus et d’appliquer la
retenue à la source, au taux de droit commun.

3-3 Sort de la
TVA

Au niveau de la TVA, deux situations doivent être distinguées :

Cas où le redressement est lié à une minoration de chiffre d’affaires :

Le redressement du chiffre d’affaires engendrera un redressement, au niveau de la TVA, encore faut-il


que le chiffre d’affaires en question soit assujetti à la TVA. En effet, en application des dispositions de
l’article 4 du livre des procédures fiscales, les bénéfices indirectement transférés, soit par voie de
93

majoration ou de diminution des prix d'achat ou de vente, soit par tout autre moyen, sont rapportés au
résultat fiscal ou au chiffre d'affaires déclarés.

Le problème de TVA se pose moins, en matière de chiffre d’affaires car souvent, il s’agit d’opération
d’exportation de produits ou de services, exonérée de TVA.

Cas où le redressement est lié à une majoration d’une charge (achat ou autre) :

L’administration fiscale peut être tentée de rejeter la récupération de la TVA afférente à la partie de la
charge dont la déductibilité fiscale a été remise en cause, du fait de l’existence d’un transfert indirect de
bénéfices. Cette position ne serait fondée sur aucune base légale. En effet, l’article 22 de la loi
relative à la taxe sur la valeur ajoutée énonce les cas d’exclusion de droit à déduction.
Les charges assimilées à des bénéfices transférés ont été engagées dans l’intérêt de l’exploitation et ne
sauraient constituer, à notre sens, une libéralité (la libéralité, étant l’acte par lequel une personne
30
procure à autrui un bien ou un autre avantage, sans contrepartie ). La TVA y afférente, lorsqu’elle a
été payée, doit ouvrir droit à récupération, dans les conditions prévues par la loi.

Le refus, par l’administration fiscale, de la récupération de la TVA, sous prétexte que la base est
majorée devrait engendrer un remboursement de la TVA payée sur cette base majorée.

3-4Les pénalités et majorations de retard

En sus des montants d’impôt découlant des redressements, la société redressée aura à supporter des
pénalités et majorations de retard :

3-4-1Les sanctions applicables aux impositions résultant de déclarations incomplètes

En vertu des dispositions de l’article 44 de la loi relative à l’impôt sur les sociétés, traitant des
sanctions applicables dans les cas de défaut ou de retard dans le dépôt des déclarations du résultat fiscal
ou du chiffre d'affaires, les impositions résultant de déclarations incomplètes donnent lieu à

30
Définition donnée sur le site Actufinance.fr
94

l'application d'une majoration égale à 15%, soit des droits correspondant au bénéfice ou au chiffre
d'affaires de l'exercice comptable, soit de la cotisation minimale, lorsqu’elle est supérieure à ces droits,
ou lorsque la déclaration incomplète ou déposée hors délai, fait ressortir un résultat nul ou déficitaire.
Dans tous les cas le montant de la majoration ne peut être inférieur à cinq cents dirhams (500 DH).

Le même article précise que lorsque le résultat bénéficiaire ou le chiffre d'affaires d'un exercice
comptable est rectifié, la majoration de 15% est calculée sur le montant des droits correspondant à cette
rectification.
Lorsqu'un résultat déficitaire est rectifié, toute réintégration affectant ce résultat est majorée de 15%
tant que le déficit n'est pas résorbé.

3-4-2Sanctions pour défaut ou insuffisance de versement de l'impôt

Conformément aux dispositions de l’article 45 de la loi relative à l’impôt sur les sociétés, la société doit
acquitter spontanément, en même temps que les sommes dues, une pénalité de 10% et des
majorations de 5% pour le premier mois de retard et de 0,50% par mois ou fraction de mois
supplémentaire, écoulé entre la date d'exigibilité de l'impôt et celle du paiement.
Si la retenue à la source, sur les produits des actions ou parts sociales et revenus assimilés et les
bénéfices des établissements des sociétés n'a pas été versée à la caisse du percepteur dans le délai légal,
les montants y afférents sont assortis de la pénalité de 10% et des majorations de 5% pour le premier
mois de retard et de 0,50% par mois ou fraction de mois supplémentaire, écoulé entre la date
d'exigibilité de la retenue et celle du paiement ou de l'émission du rôle.

Les majorations prévues ne s'appliquent pas pour la période située au-delà des trente-six mois écoulés
entre la date de l'introduction du recours du contribuable devant la commission locale de taxation et
celle de la mise en recouvrement du rôle comportant le complément d'impôt exigible.

Le taux des majorations prévues aux deux alinéas précédents peut être porté, jusqu'à 100%, quand la
mauvaise foi de la société est établie.
95

Nous avons constaté qu’en application de la disposition qui précède, l’administration fiscale commence
à appliquer des taux de majorations particuliers, à l’occasion des contrôles fiscaux, en l’occurrence
celui de 40%.

Il est à noter que dans le cas où le redressement du chiffre d’affaires entraînerait un redressement, au
niveau de la TVA, les pénalités et majorations de retard applicables en matière de TVA seraient
également dues.

4 - PARALLELE AVEC L’ARTICLE 57 DU CODE GENERAL DES IMPOTS EN FRANCE

31
Depuis une loi du 31 mai 1933 , codifiée à l’article 57 du code général des impôts, l’administration
française a la possibilité de redresser, sous le contrôle du juge, les résultats déclarés par les entreprises
françaises relevant de l’impôt sur le revenu ou passibles de l’impôt sur les sociétés qui sont sous la
dépendance ou qui possèdent le contrôle d’entreprises situées hors de France.

Le premier alinéa de l’article 57 est libellé comme suit :

« pour l’établissement de l’impôt sur le revenu dû par les entreprises qui sont sous la dépendance ou
qui possèdent le contrôle d’entreprises situées hors de France, les bénéfices indirectement transférés à
ces dernières, soit par voie de majoration ou de diminution des prix d’achat ou de vente soit par tout
autre moyen sont incorporés aux résultats accusés par les comptabilités. Il est procédé de même à
l’égard des entreprises qui sont sous la dépendance d’une entreprise ou d’un groupe possédant
également le contrôle d’entreprises situées hors de France ».

Ces dispositions sont très voisines, dans leur esprit, de celles qui sont incluses dans les conventions
fiscales modèle OCDE.
Le conseil d’Etat a eu, à plusieurs reprises, l’occasion de juger qu’il résulte clairement des stipulations
de cette nature (celles du modèle OCDE) incluses dans les conventions fiscales qu’elles permettent à

31
Ouvrage « les impôts dans les affaires internationales » Editions Francis Lefebvre Page 840
96

l’administration de l’Etat duquel ressortit une entreprise qui, par sa situation et par ses opérations, entre
dans leur champ d’application, d’appliquer sa loi fiscale interne.

L’administration fiscale française considère que les dispositions des conventions fiscales ne sont pas
très différentes de celles de l’article 57 et qu’elles doivent, par conséquent, recevoir la même
interprétation.

4-1Conditions d’application de l’article 57 du CGI

Lorsqu’elle entend se prévaloir des dispositions de l’article 57 du CGI, l’administration fiscale


française doit établir l’existence de liens de dépendance entre l’entreprise française et l’entreprise
er
étrangère, sauf depuis le 1 janvier 1982, lorsque le transfert s’effectue avec des entreprises établies
32
dans des Etats dont la fiscalité est privilégiée au sens de l’article 238A , alinéa 2 du CGI.
L’administration doit ensuite apporter la preuve de la réalité du transfert de bénéfices réalisé au profit
de l’entreprise étrangère, à charge pour l’entreprise de prouver qu’il s’agit d’un acte de gestion normal ,
compte tenu de l’existence de contreparties suffisantes et justifiées.

Une note circulaire de l’administration fiscale française, en date du 04.05.1973, précise les conditions
d’application de l’article 57 du CGI français. Elle explicite notamment la notion de dépendance.

4-1-1 Existence de liens de dépendance

Les dispositions de l’article 57 s’appliquent dans les situations suivantes :


• entreprise française placée sous la dépendance d’une entreprise étrangère ;
• entreprise française ayant sous sa dépendance une entreprise étrangère ;
• entreprise française ayant placée, en même temps qu’une ou plusieurs entreprises étrangères,
sous la commune dépendance d’une même entreprise, d’un groupe ou d’un consortium.

32
Voir Article 238A du CGI français en Annexe
97

C’est à l’administration qui invoque l’article 57 d’apporter la preuve des liens de dépendance, comme
le conseil d’Etat a eu l’occasion de le rappeler à plusieurs reprises.

Les conditions de dépendance juridique et de fait sont explicitées dans la circulaire en date du
04.05.1973, sus évoquée.

a- Dépendance juridique :

33
Selon la position administrative , une entreprise française est placée sous la dépendance d’une
entreprise étrangère lorsque cette dernière possède une part prépondérante de son capital ou la majorité
absolue des suffrages susceptibles de s’exprimer dans ses assemblées. Il en est de même lorsque
l’entreprise étrangère exerce, au sein de l’entreprise française, directement ou par personne interposée,
des fonctions comportant le pouvoir de décision. Par personnes interposées, il faut comprendre :

• les gérants, administrateurs, directeurs de l’entreprise dirigeante (et les membres de leur
famille) ;
• toute entreprise placée elle-même sous la dépendance de l’entreprise dirigeante ;
• toute personne qui possède un intérêt dans le commerce ou l’industrie de chacune des
entreprises ou une part de leur capital.

b- Dépendance de fait

L’article 57 peut être appliqué, en cas de dépendance de fait. Cette situation qui dépend uniquement des
faits et circonstances propres à chaque cas particulier a été illustrée par une jurisprudence abondante.

Des liens de dépendance de fait ont été établis dans les situations suivantes :

- une société française liée par un contrat à une société étrangère qui fixait les prix d’achat et de
vente pratiqués par la première, laquelle devait rendre compte de ses opérations et verser des

33
Voir circulaire de l’administration fiscale française du 04.05.1973, en Annexe 4
98

redevances importantes pour le seul usage de la marque dont l’entreprise était propriétaire (décision
du conseil d’état du 23 Mars 1953).

- De même, dans un arrêt du 06.05.1966, il a été jugé qu’une société française obtenant certains de
ses marchés, par l’intermédiaire d’une société Marocaine à laquelle elle verse, sur la totalité de ses
bénéfices, y compris ceux provenant des marchés dans la conclusion desquels la société marocaine
n’est pas intervenue, des sommes hors de proportion avec les services rendus par cette dernière
société, doit être regardée comme se trouvant sous la dépendance de la société étrangère.

- Un lien de dépendance a également été reconnu par le conseil d’Etat , dans un cas où une entreprise
française et une société étrangère dont les raisons sociales étaient les mêmes, avaient pour objet la
fabrication d’objets de même nature, utilisaient le concours des mêmes représentants et se
partageaient, le cas échéant, entre elles les commandes recueillies par lesdits représentants (CE du
29.01.1964).

- Un lien de dépendance de fait a également été retenu entre une entreprise française qui assure la
distribution exclusive d’ouvrages édités par une société suisse et cette dernière, dès lors que la
première utilise des locaux et du matériel d’exploitation mis à sa disposition par une filiale de la
société suisse , que les deux sociétés ont une activité identique, qu’elles ont un personnel et un
gérant communs et qu’aucune latitude n’est laissée à la société française dans le choix des ouvrages
à diffuser (Décision du tribunal administratif du 13.02.1997).

- En revanche, le seul fait de réaliser un chiffre d’affaires important avec une société étrangère ne
suffit pas à caractériser une situation de dépendance de fait ; par exemple, une société française
n’était pas ipso facto sous la dépendance d’une société étrangère lorsque la vente des produits
portant sur les marques concédées représentait un tiers de son chiffre d’affaires (CE du 29.03.78)

- De même, dans une autre affaire (CE du 02.11.87), l’administration n’a pas été en mesure
d’apporter la preuve d’un lien de dépendance entre une société française et ses fournisseurs
Suisses ; le circuit était le suivant : vente de produits par une société française à des sociétés
suisses, revendus à des sociétés allemandes puis à des laboratoires monégasques, puis, enfin, à une
99

autre société française à laquelle l’administration voulait appliquer la notion de dépendance. Bien
entendu, le prix auquel cette dernière achetait les produits aux laboratoires monégasques était très
supérieur au prix auquel le fabricant français le vendait aux sociétés suisses. Le conseil d’Etat a
estimé que l’administration n’établissait pas que la dernière société française ou ses dirigeants
participaient directement ou indirectement à la direction, au contrôle ou au capital des sociétés
suisses en se bornant à alléguer que cette société ne pouvait ignorer l’origine des produits achetés.
Le redressement a été écarté par le conseil d’Etat en l’absence de preuve de relation de groupe et de
lien de parenté entre la société française et les sociétés Suisses.

Plus fondamentalement, le conseil d’Etat a confirmé qu’une étroite communauté d’intérêt et une
interdépendance économique ne suffisent pas à caractériser un lien de dépendance. Le commissaire du
gouvernement avait, dans cette affaire, défini le lien de dépendance par la « capacité de dicter »des
conditions économiques défavorables à l’entreprise dépendante mais correspondant à l’intérêt de
l’entreprise dominante ou du groupe.

c- le cas particulier des transferts effectués au profit d’entreprises établies dans des paradis « fiscaux »

Avant l’intervention d’une loi du 30 décembre 1981 (loi de finances pour l’année 1982), la mise en
œuvre de l’article 57 exigeait toujours de la part de l’administration la preuve de l’existence d’un lien
de dépendance. Il est évident que ce lien est très difficile, voire impossible à découvrir lorsque les
relations concernent des entreprises françaises et des entreprises établies dans des paradis fiscaux,
compte tenu des règles relatives au secret qui existent dans ces pays et qui empêchent de découvrir les
propriétaires réels des entreprises qui y sont domiciliées.

L’article 57 a été complété par une disposition qui dispense l’administration d’avoir à prouver le lien de
dépendance ou de contrôle pour les transferts de bénéfices effectués au profit d’entreprises établies
dans un Etat étranger ou dans un territoire situé hors de France dont le régime fiscal est privilégié.

er
Antérieurement au 1 janvier 2005, les personnes étaient regardées comme soumises à un régime fiscal
privilégié dans l’Etat ou le territoire considéré si elles n’y étaient pas imposables ou si elles y étaient
assujetties à des impôts sur les bénéfices ou les revenus notablement moins élevés qu’en France.
10
0
34
La loi de finances pour l’année 2005 a remplacé l’expression « impôts sur les bénéfices ou les
revenus notablement moins élevés qu’en France » par les mots « à des impôts sur les bénéfices ou sur
les revenus dont le montant est inférieur de plus de la moitié à celui de l’impôt sur les bénéfices ou si
les revenus dont elles auraient été redevables dans des conditions de droit commun en France, si elles y
er
avaient été domiciliées ou établies ». Ces nouvelles dispositions seront applicables à compter du 1
janvier 2006.

4-1-2 Existence d’un transfert de bénéfices

La circulaire de l’administration fiscale française en date du 04.05.1973 explicite également la notion


de transfert indirect de bénéfices.

Pour pouvoir opérer les redressements prévus à l’article 57, l’administration fiscale française doit
apporter la preuve du transfert indirect de bénéfices à l’étranger. Ce principe a souvent été réaffirmé
par le conseil d’Etat par une formule du type : « les dispositions de l’article 57, sous réserve que
l’administration fiscale ait établi l’existence d’un lien de dépendance entre l’entreprise située en
France et l’entreprise située hors de France ainsi que des majorations ou des minorations de prix
ou de moyens analogues de transferts de bénéfices, constituent une présomption pesant sur
l’entreprise passible de l’impôt sur les sociétés laquelle ne peut obtenir, par la voie contentieuse, la
décharge ou la réduction de l’imposition établie en conséquence qu’en apportant la preuve des faits
dont elle se prévaut pour démontrer qu’il n’y a pas eu transfert de bénéfices ».

Aux termes de l’article 57, ces transferts peuvent être opérés soit par voie de majoration ou de
minoration de prix d’achat ou de vente soit par tout autre moyen. De manière générale, il appartient à
l’administration d’établir les faits sur lesquels elle se fonde et l’existence d’un avantage, mais le conseil
d’Etat a jugé, par exemple, que si l’acte contesté qui s’est traduit par une opération comptable, a porté
sur la déduction d’une charge, l’administration est réputée apporter la preuve qui lui incombe si le
contribuable n’est pas lui-même en mesure de justifier, dans son principe comme dans son montant,
l’exactitude de l’écriture dont il s’agit (CE du 27.07.88).

34
Voir Article 238A du CGI, en Annexe 5
10
1

L’administration française doit véritablement établir l’existence d’un avantage, ce qui n’est pas le cas
lorsqu’elle fait simplement état d’une marge bénéficiaire inférieure à la moyenne des exercices suivants
(CE du 16.06.1993).
La preuve est dévolue à l’entreprise pour combattre la présomption de transfert en justifiant du
caractère normal de l’avantage consenti et de l’existence de contreparties.

En cas de désaccord, celui-ci peut être soumis à l’avis de la commission départementale des impôts
directs et des taxes sur les chiffres d’affaires.

4-2La procédure applicable

Comme il a été souligné auparavant, l’article 57 du code général des impôts français ne peut être
appliqué que s’il est établi que des avantages particuliers ont été consentis à la société étrangère. C’est
à l’administration de prouver l’existence de ces avantages et d’en déterminer le montant, étant entendu
qu’elle doit aussi établir l’existence de liens de dépendance qui unissent la société française à la société
étrangère.

L’article 57 offre une facilité supplémentaire à l’administration par rapport à l’invocation d’un acte
anormal de gestion.

En France, la loi prévoit que, pour la détermination des bénéfices imposables, les frais et charges ne
sont admis en déduction que dans la mesure où ils sont exposés dans l’intérêt de l’exploitation ou dans
35
le cadre d’une gestion commerciale normale . Ainsi, même si l’exploitant est libre de sa gestion dans
laquelle l’administration française ne doit pas s’immiscer, il est possible à l’administration de remettre
en cause des dépenses qui ne se rattacheraient pas à une gestion normale ou n’auraient pas été exposées
dans l’intérêt de l’entreprise (actes commis dans l’intérêt d’un tiers par rapport à l’entreprise).

D’une manière générale, tel serait le cas de dépenses effectuées par une entreprise :

35
Ouvrage « les impôts dans les affaires internationales » Editions Francis Lefebvre Page 759
10
2

• qui auraient bénéficié en fait à des dirigeants sans pouvoir être considérées comme la
contrepartie de services rendus ;
• qui auraient consisté en l’achat de biens non affectés à l’exploitation ;
• qui auraient pris la forme de libéralités ou de dépenses d’agrément sans rapport avec l’objet de
l’entreprise.

Ces dépenses seraient considérées comme relevant d’un acte anormal de gestion, donc non déductibles.
L’administration fiscale française fait application de ce principe aussi bien en ce qui concerne les
opérations internes que les opérations internationales d’une entreprise résidente de France.

Dans le cas de ventes à prix minorés, l’administration doit, si elle se fonde sur la notion d’acte anormal
de gestion, établir non seulement la minoration, mais encore qu’il ne s’agit pas d’une erreur mais d’une
véritable intention consciente de la part de l’entreprise, alors que dans le cadre de l’article 57, la preuve
de la minoration suffit.

En cas de transferts entre sociétés liées, la jurisprudence française considère que l’acte anormal de
gestion est présumé si la minoration de prix est établie, rapprochant ainsi nettement les deux dispositifs.

4-2-1Etablissement de la preuve

La loi ne fixe pas de procédures particulières quant à l’établissement de la preuve qui permet de
présumer le transfert indirect de bénéfices.

Dans la pratique, l’administration française a rencontré des situations où il lui était difficile d’apporter
la preuve qui lui incombe, en l’absence de véritable dialogue avec le contribuable.

36
C’est pour cette raison que la loi a d’abord crée l’article L13B dans le livre de procédures fiscales qui
prévoit que lorsqu’au cours d’une vérification de comptabilité, l’administration a réuni des éléments
faisant présumer qu’une entreprise a opéré un transfert indirect de bénéfices au sens de l’article 57 du
CGI, elle peut demander à cette entreprise des informations et documents précisant :

36
Voir Article L13B en Annexe 6
100

1/ la nature des relations entrant dans les prévision de l’article 57 du CGI entre cette entreprise et une
ou plusieurs entreprises exploitées hors de France ou sociétés ou groupements établis hors de France ;

2/ la méthode détermination des prix des opérations de nature industrielle, commerciale ou financière
qu’elle effectue avec des entreprises, sociétés ou groupements visés au 1/ ;

3/ les activités exercées par des entreprises, sociétés ou groupements visés au 1/ liées aux opérations
visées au 2/ ;

4/ le traitement fiscal réservé aux opérations visées au 2 / et réalisées par les entreprises qu’elle exploite
hors de France ou par les sociétés ou groupements visées au 1/ dont elle détient directement ou
indirectement la majorité du capital ou des droits de vote.

Quant à l’article 57, il a été modifié pour prévoir qu’en cas de défaut de réponse à une demande faite en
application de l’article L13B du livre des procédures fiscales, les bases d’imposition concernées par la
demande sont évaluées par l’administration à partir des éléments dont elle dispose et suivant la
procédure contradictoire. L’entreprise est, par ailleurs, passible d’une pénalité fiscale de 7 622,45
Euros.

L’article L13B a introduit une obligation de coopération de l’entreprise, afin que la question des prix de
transfert soit examinée convenablement dès le début de la vérification, sans attendre les
développements contentieux.

L’article L13B ne peut pas être invoqué préalablement à une vérification. Il faut que le contrôle ait
commencé et que l’administration ait réuni des présomptions d’un transfert de bénéfices. Celles-ci
n’ont pas à être dévoilées au contribuable (la demande n’a pas à être motivée), mais elles doivent
exister et être préalables à la demande. Le juge en particulier devra contrôler leur existence préalable
car s’il s’avère que l’article L13B a été invoqué sans raison, l’ensemble de la procédure pourrait être
vicié et d’éventuels redressements fondés sur l’article 57 devraient donc être annulés. Il s’agit d’une
procédure délicate à manier par l’administration fiscale , car elle ne peut s’appliquer que s’il y a des
101

indices de transfert sans par définition, qu’il y ait déjà de véritables preuves (un indice de transfert
pourrait être le fait de vendre à l’étranger à un prix inférieur au marché français etc.).

En pratique, l’objet essentiel de la demande sera sans doute la méthode de détermination des prix de
transfert. Celle-ci devra être expliquée par le contribuable qui n’aura pas cependant à justifier qu’il
s’agit de la meilleure méthode applicable dans le contexte.

37
La procédure est relativement contraignante pour l’administration puisque les demandes doivent être
précises et explicites, l’entreprise dispose d’un délai de réponse qui ne peut être inférieur à deux mois
mais qui peut être prorogé, sur demande motivée, sans pouvoir excéder un total de trois mois.

L’article L13B ne renverse pas la charge de la preuve. C’est toujours à l’administration qu’il incombe
de prouver l’existence d’un transfert de bénéfices ou de revenus ainsi que le lien de dépendance, au
sens de l’article 57. En particulier, un défaut de réponse ou une réponse insuffisante ne peut suffire à
motiver un redressement. S’il n’y a pas de réponse, la seule sanction véritable est la pénalité ; mais si
l’administration est autorisée à évaluer le montant des transferts de bénéfices d’après les éléments en sa
possession, l’entreprise peut toujours contester cette évaluation en produisant ses propres éléments.

Il y a lieu de noter que l’un des moyens dont dispose l’administration française pour contrôler les prix
de transfert est celui de l’échange d’informations avec les administrations fiscales des pays partenaires.
38
C’est pourquoi un article L188A a été institué dans le livre de procédures fiscales. Il permet à
l’administration fiscale, lorsque dans le délai initial de reprise, elle a demandé à l’autorité compétente
d’un autre Etat des renseignements concernant les relations d’un contribuable qui entrent dans le
champ d’application de l’article 57, les omissions ou insuffisances d’imposition y afférentes
peuvent être réparées même si le délai initial de reprise est écoulé, jusqu’à la fin de l’année qui
suit celle de la réponse à la demande et au plus tard, jusqu’à la fin de la cinquième année qui suit
celle au titre de laquelle l’imposition est due.

37
Ouvrage « les impôts dans les affaires internationales » Editions Francis Lefebvre Page 860

38
Voir Article 188A du livre des procédures fiscales, en Annexe 7
102

L’administration a ainsi les moyens de donner une suite effective aux informations qu’elle peut obtenir
de la part des autres administrations, dans le cadre de la procédure d’échanges d’informations entre
Etats.

Lorsque le contribuable n’accepte pas les redressements effectués par l’administration, le désaccord
peut être soumis à l’appréciation de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le
chiffre d’affaires. Cette commission connaît notamment toutes les questions de fait qui se rattachent à
l’existence et aux montants de transferts de bénéfices à l’étranger. La commission est compétente pour
constater la matérialité des faits et l’appréciation qu’il convient de porter à leur égard, compte tenu de
la situation de l’entreprise et de la pratique de la branche à laquelle elle appartient. Elle peut être saisie
à l’initiative du contribuable ou de l’administration. Son avis ne s’impose pas aux parties en cause.

Depuis la loi du 08.07.1987, son avis n’a plus, sauf exceptions, de conséquences sur les conditions de
preuves, en cas de procédure contentieuse ultérieure. En effet, l’administration fiscale supporte la
charge de la preuve, quel que soit l’avis rendu par la commission (sauf lorsque le contribuable a
présenté une comptabilité comportant des irrégularités graves).
La commission peut être amenée à donner un avis sur l’existence de liens de dépendance, ou d’un
transfert d’un bénéfice et sur l’existence d’une contrepartie pour l’entreprise française.

4-2-2Quelques cas de jurisprudence, en matière de transfert indirect de bénéfices

- Selon une décision de la cour administrative de Nancy en date du 26.01.95, l’administration


n’établit pas que les ventes effectuées par une société française à une entreprise allemande dont elle
était dépendante sont effectuées à des prix minorés et révèlent ainsi un transfert de bénéfices à
l’étranger, en se prévalant des prix pratiqués par d’autres entreprises exerçant la même activité mais
dont aucune n’exporte dans les mêmes conditions que la société requérante.

La preuve d’une minoration des prix ne saurait résulter de la comparaison avec les prix consentis sur le
marché intérieur, en raison des sujétions particulières susceptibles d’être imposées aux entreprises
exportatrices.
103

La question des transferts de bénéfices par majoration des prix d’achat de marchandises au sein des
groupes a donné lieu à un jugement intéressant du tribunal administratif de Lyon, en date du
25.04.1990. Il s’agissait d’un laboratoire pharmaceutique qui achetait des principes actifs à sa mère
britannique par l’intermédiaire d’une filiale de facturation aux Bermudes. Le laboratoire achetait ainsi
9765f/kg à la société des Bermudes les produits que celle-ci avait acquis 1053f/kg, c’est à dire neuf fois
moins cher auprès de la société britannique. L’administration fiscale avait considéré qu’il y avait
transfert indirect de bénéfices. Le juge n’a pas partagé ce point de vue car il a reconnu valables les
arguments de la société française qui proposait d’utiliser les méthodes préconisées par l’OCDE, pour
justifier sa position :

• le prix contesté n’était pas très différent de celui qui avait été appliqué au cours de la période à
des distributeurs indépendants du groupe ;
• pendant la période concernée, la société française avait conservé un taux de marge brute
comparable à celui des autres entreprises, ce qui montre qu'elle n'a pas cherché à éluder l’impôt,
étant observé qu’elle était elle-même détenue à 50% par un tiers par rapport au groupe dont il
paraît exclu qu’il ait accepté de payer un produit au dessus de son coût normal pour le seul
profit de l’autre actionnaire.

En réalité, le problème des prix de transfert se posait certainement, mais au Royaume Uni et pas en
France. Cette affaire illustre la difficulté particulière du sujet car en présence de schémas de facturation
anormaux et visiblement inspirés par l’évasion ou la fraude fiscale, il faut encore déterminer, ce qui
n’est pas évident, si l’anomalie est à l’achat ou à la vente.

• Il a été jugé qu’une société française qui facture à sa société mère étrangère, pour son
intervention en qualité de commissionnaire exclusif , des commissions calculées sur une base
insuffisante et selon un taux inférieur aux usages de la profession transfère des bénéfices hors
de France (CE 5 Février 1975).

• L’appréciation d’un éventuel transfert de bénéfices doit être effectuée par référence à
l’ensemble des éléments et circonstances de l’affaire et non pas seulement à certains d’entre
eux ; ainsi, la filiale française et importateur exclusif d’un fabricant d’automobiles allemand n’a
104

pas transféré de bénéfices à l’étranger, en prenant contractuellement à sa charge, l’obligation de


garantie incombant normalement au constructeur et incomplètement compensée par une
réduction du prix d’achat des véhicules, à l’importation dans la mesure où ces éléments ne
suffisent pas à eux-mêmes et doivent être utilisés avec d’autres, tels que les délais de règlement,
les frais de publicité et le coût de certains équipements des véhicules (CAA de Nancy du
06.07.1995).

• La jurisprudence française fournit des exemples où le juge a considéré qu’il y avait transfert
indirect de bénéfices, dans le cadre de versement des redevances :

Nous citerons, à titre d’exemple, le cas d’une société française qui versait des redevances d’édition
calculées au taux de 7% puis 12% puis 15% à une association de Liechtenstein, alors que la
comparaison avec les prix pratiqués habituellement par les éditeurs faisait ressortir un taux de 4,8% à
5,9% du chiffre d’affaires (CE 27.02.1991).
Par contre, le conseil d’Etat a estimé qu’il n’y avait pas transfert indirect de bénéfices dans le cas
d’une filiale française d’une société américaine, qui versait à cette dernière une commission de 5% de
son chiffre d’affaires, que le matériel vendu ait été fabriqué par elle ou qu’elle se soit limitée à en
assurer le montage. Le vérificateur soutenait que le taux de 5% était trop élevé au titre des matériels
simplement montés par la société française, car le chiffre d’affaires français réalisé à cet égard ne
devait rien à l’apport technologique de la société américaine. Le conseil d’Etat n’a pas suivi cette
position ; il a estimé que la distinction opérée par l’administration entre les opérations qui concourent à
l’élaboration des produits finis ne pouvait être retenue. Le commissaire du gouvernement soulignait
que le taux moyen effectif ressortait à 3,5%, ce qui n’était guère plus élevé que les taux pratiqués par
d’autres groupes multinationaux présentés par l’administration fiscale, dans le cadre de la recherche de
termes de comparaisons (CE 25.10.89).

4-2-3Possibilité d’apporter la preuve contraire

L’article 57 établit une présomption de transfert de bénéfices lorsque l’existence d’avantages accordés
par l’entreprise française à l’entreprise étrangère est établie. Mais le contribuable peut combattre cette
présomption en démontrant que les avantages constatés ne se traduisent pas par un transfert de
105

bénéfices à l’étranger dès lors que l’entreprise en retirait une contrepartie dans le cadre d’une gestion
normale.
L’administration reconnaît, dans une décision administrative en date du 09.03.2001, la nécessité de ne
pas interpréter trop strictement les dispositions de l’article 57 dans le cas d’entreprises françaises
possédant des filiales ou contrôlant des entreprises situées à l’étranger, car cela pourrait nuire au
développement des exportations à partir de la France. C’est pourquoi elle estime qu’il convient de ne
pas faire jouer ces dispositions lorsque les entreprises exportatrices sont en mesure d’établir que les
cessions consenties à leurs filiales étrangères à des prix de vente voisins des prix de revient répondent
non au souci d’effectuer des transferts de bénéfices, mais à des nécessités commerciales.
Il est à noter que la jurisprudence examine avec précision l’existence de contreparties pour l’entreprise
française, afin de permettre au contribuable de faire tomber la présomption de transfert de bénéfices qui
pèse sur lui : avantages reconnus indispensables à la conclusion de l’affaire, compte tenu de l’état du
marché et des conditions de la concurrence, intérêt économique et financier qui s’attache à la prospérité
de filiales étrangères etc.

4-3Effets de l’application de l’article 57

Lorsque l’article 57 est applicable et que le contribuable ne fait pas tomber la présomption de transfert
de bénéfices, les résultats de l’entreprise française doivent être rectifiés.

La rectification peut se faire :

• directement, par incorporation des bénéfices transférés hors de France aux résultats
comptabilisés ; dans ce cas, la rectification est opérée d’après les éléments précis de l’opération
redressée. L’article 57 retient cette méthode comme étant celle qui doit, en principe, être
appliquée (par exemple, le cas de non perception d’intérêts, de rémunération sans contrepartie
etc.) ;

• en cas de défaut de réponse à une demande faite en application de l’article L13B du livre des
procédures fiscales, par évaluation par l’administration fiscale, des bases d’imposition
106

concernées par la demande à partir des éléments dont elle dispose et en suivant la procédure
contradictoire ;

• à défaut d’éléments précis pour opérer les redressements, par comparaison avec les produits
imposables des entreprises similaires exploitées normalement. Dans ce cas, il est possible de
faire application de méthodes forfaitaires, par exemple de l’application au chiffre d’affaires
d’un coefficient de bénéfices fixé par comparaison avec ceux des entreprises similaires
exploitées normalement.

Le recours à des méthodes forfaitaires est peu utilisé, en France.


39
Le commissaire du gouvernement a critiqué les comparaisons portant sur des exercices différents
mais réservait les comparaisons avec des sociétés du même secteur au titre des mêmes exercices. Il
estimait que les comparaisons dans le temps sont moins significatives que celles qui auraient pu être
faites à partir du cours pratiqué par d’autres entreprises du secteur pour déterminer une marge de
référence au titre de l’exercice en cause, ce qui souligne la légitimité de cette dernière comparaison.

Les sommes réintégrées dans les bases de l’impôt sur les sociétés doivent être considérées comme des
40
revenus distribués par référence à :

• l’article 109-1-1 du code général des impôts si l’exercice de rattachement est bénéficiaire ;

• ou à l’article 109-1-2 ou 111 du même code si les résultats de l’exercice sont déficitaires et si la
société étrangère bénéficiaire des produits indirectement transférés est associée, actionnaire ou
porteur de parts de la société française ;

• ou à l’article 111c du code, relatif aux avantages occultes si l’une ou l’autre des dispositions qui
précèdent ne peut être appliquée.

39
Ouvrage « les impôts dans les affaires internationales » Editions Francis Lefebvre Page 863

40
Ouvrage « les impôts dans les affaires internationales » Editions Francis Lefebvre Page 863
107

Il en résulte que la distribution indirecte donne lieu à perception d’une retenue au taux de 25/75, sous
réserve des conventions internationales.

41
Il est à noter que selon la direction générale des impôts , les redressements effectués sur la base de
l’article 57 et de l’acte anormal de gestion lorsque ce dernier est utilisé pour contester certains résultats
des montages internationaux, sont de l’ordre du milliard d’Euros par an (987 millions d’Euros en
2003, pour 531 redressements effectués).

4-4La procédure d’accord préalable

Compte tenu des difficultés auxquelles l’administration française est confrontée pour déterminer le prix
42
exact de la transaction, une instruction administrative de 1999 a prévu la possibilité pour les
entreprises multinationales de solliciter un accord auprès de l’administration sur la méthode de
détermination des prix de transfert.

Afin de renforcer la sécurité juridique liée à l’appréciation des prix de transferts, l’article 20 de la loi de
finances rectificative pour l’année 2004 a conféré un fondement légal, en droit interne, à la procédure
d’accord préalable.

En outre, cet article a introduit, dans le nouveau cadre légal, la possibilité de conclure des accords
unilatéraux, c’est à dire des accords conclus uniquement entre l’administration française et une
entreprise, sans intervention d’une autorité fiscale étrangère.

er
Depuis le 1 janvier 2005, l’article L80B,7° du livre des procédures fiscales constitue désormais le
fondement à la conclusion d’accords préalables en matière de prix de transfert.

41
le rapport du sénat, en date du 18.06.2004
42
Voir la circulaire de l’administration française, ayant trait à la procédure d’accord préalable, en Annexe
108

Aux termes de cet article, il ne sera procédé à aucun rehaussement d’impositions lorsque
l’administration a conclu un accord préalable portant sur la méthode de détermination des prix de
transfert.
La procédure d’accord préalable ou APP permet aux entreprises multinationales françaises et
étrangères, d’obtenir l’accord de l’administration fiscale sur la méthode de fixation de leurs prix de
transfert.

Cet accord concerne la détermination des prix pratiqués lors des futures transactions intragroupe. Il
garantit les entreprises contractantes contre toute mise en œuvre des dispositions de l’article 57 du CGI,
en cas de contrôle fiscal ultérieur.
La procédure d’accord préalable sera analysée dans la partie II-2-4.

Les accords préalables conclus en France

Selon le rapport du sénat en date du 18.06.2004, à cette date, quatorze accords préalables ont été
conclus et une vingtaine était en cours de négociation, dont six devaient aboutir avant la fin de l’année.
Le même rapport précisait que le flux annuel des dossiers déposés était en augmentation : il est passé
de quelques dossiers en 2002 à une dizaine en 2003 et presque une vingtaine en 2004.

Le rapport précisait également qu’en termes de bilan qualitatif, seuls deux dossiers ont été écartés et
une seule procédure d’accord n’a pas abouti , l’entreprise ayant refusé les modalités définies par
l’accord concernant la méthode et la valorisation de l’opération. Enfin, cinq accords ont été renouvelés,
soit 100% des accords parvenus à échéance.
Les administrations fiscales avec lesquelles ont été conclus des accords sont les Etats-Unis, la
Belgique, l’Espagne, le Royaume Uni, la Suisse, l’Allemagne, Singapour et les Pays-Bas. Ces pays
représentent en effet la majorité des investissements directs étrangers en France.

Les secteurs d’activité concernés majoritairement par les APP sont en réalité nombreux et divers. Les
demandes ont émané des secteurs suivants : automobile, aéronautique, informatique, banque et
finances, biens de consommation, papeterie, pharmacie, électronique, énergie, métallurgie, emballage
et pneumatique.
109

Seules deux PME ont soumis une demande, leurs moyens de déposer un dossier permettant de valider
une méthode détermination des prix étant bien plus réduits. Les autres accords conclus ou en cours
concernent des groupes, disposant de cabinets de conseil et dont le chiffre d’affaires est compris entre
un et vingt millions d’Euros. En Avril 2004, a été signé le premier accord multilatéral européen
permettant de fixer les prix de transfert entre les filiales du groupe Airbus, conclu entre les
43
administrations fiscales française, britannique, espagnole et allemande .

II - METHODES DESTINEES A SOLUTIONNER ET A EVITER LES LITIGES AVEC LES


ADMINISTRATIONS FISCALES, EN MATIERE DE PRIX DE TRANSFERT ET PLACE DE

L’EXPERT COMPTABLE

Dans cette partie, nous allons aborder les différentes méthodes susceptibles d’être utilisées pour
solutionner ou éviter les différends en matière de prix de transfert.

1- METHODES DESTINEES A SOLUTIONNER LES LITIGES, EN MATIERE DE PRIX DE TRANSFERT

1-1La procédure amiable

La procédure amiable constitue, pour les administrations fiscales, un moyen classique pour solutionner
44
les litiges ayant trait à l’application des conventions fiscales internationales .

45
Ce moyen est prévu par l’article 25 du modèle de convention OCDE . Il permet d’éliminer les doubles
impositions qui peuvent résulter des redressements en matière de prix de transfert.

Ledit article 25 stipule que :

43
Les informations relatives à la pratique des accords préalables en France ont été puisées dans le rapport du Sénat français en date du 18.06.2004

44
Rapport OCDE paragraphe 4.29
45
Voir Article 25 Modèle de convention OCDE en Annexe 10
110

«1. Si un contribuable estime que les mesures prises par les autorités fiscales des Etats contractants
entraînent une imposition non conforme aux principes de la présente convention, il peut présenter une
réclamation aux autorités compétentes de l'Etat dont il conteste l'imposition. Si cette réclamation est
demeurée sans suite pendant un délai de six mois, il peut saisir les autorités compétentes de l'autre Etat.
Si le bien fondé de sa demande est reconnu, ces autorités s'entendent avec les autorités compétentes du
premier Etat pour éviter une imposition non conforme à la convention.

2. Les autorités compétentes des Etats contractants s'efforceront par voie d'accord amiable, de résoudre
les difficultés ou de dissiper les doutes auxquels peuvent donner lieu, l'interprétation ou l'application de
la convention. Elles peuvent aussi se concerter en vue d'éviter la double imposition dans les cas non
prévus par la convention.

3. S'il apparaît que, pour parvenir à une entente, des pourparlers soient opportuns, l'affaire est déférée à
une commission mixte composée de représentants, en nombre égal, des Etats contractants. La
présidence de la commission est exercée alternativement par un membre de chaque délégation ».

L’article 25 indique trois domaines dans lesquels la procédure amiable est utilisée. Il s’agit :

• des cas d’imposition non conforme aux dispositions de la convention fiscale : Dans ce cas, la
procédure est engagée par le contribuable ;
• des cas ayant trait à l’interprétation ou l’application de la convention ;
• l’élimination de la double imposition, dans des cas non visés par la convention.

La procédure amiable n’oblige pas les autorités compétentes à parvenir à un accord et à résoudre leurs
46
différends en matière fiscale. Elles sont seulement tenues de s’efforcer de parvenir à un accord . Par
conséquent, il est possible qu’elles n’y parviennent pas, en raison de divergences dans la législation
interne ou autres. Si le différend n’est pas résolu, il est possible d’avoir recours, dans certains cas, à
l’arbitrage.

46
Rapport OCDE paragraphe 4.32
111

La procédure amiable permet aux administrations fiscales de traiter les problèmes dans un cadre non
contentieux et de trouver des solutions négociées conformes à l’intérêt des parties.

1-2L’ajustement corrélatif

Pour éliminer les doubles impositions susceptibles de découler de redressements au titre de prix de
transfert, les administrations fiscales peuvent prendre en compte les demandes en vue d’un ajustement
corrélatif tel que décrit au paragraphe 2 de l’article 9 du modèle de convention OCDE.
En pratique, l’ajustement corrélatif peut s’opérer, dans le cadre de la procédure amiable.

Il permet d’atténuer ou d’éliminer la double imposition lorsqu’une seule administration fiscale redresse
les bénéfices imposables d’une société, en application du principe de pleine concurrence, à des
transactions faisant intervenir une entreprise associée relevant d’une autre autorité fiscale.

47
L’ajustement corrélatif consiste en un ajustement à la baisse, effectué par l’administration fiscale de
l’autre pays, de l’impôt dû par une entreprise associée, de sorte que la répartition des bénéfices entre les
deux autorités fiscales soit conforme à l’ajustement primaire et qu’il n’y ait pas double imposition.

L’article 9 paragraphe 2 prévoit expressément que les autorités compétentes se consultent, si


nécessaire, pour déterminer l’ajustement corrélatif. Ceci démontre que la procédure amiable prévue à
l’article 25 du modèle de convention OCDE peut être utilisée pour demander des ajustements
corrélatifs.

Par ailleurs, la question qui se pose est de savoir si la procédure amiable peut être utilisée pour
procéder à un ajustement corrélatif, lorsque la convention bilatérale ne comporte pas de disposition
comparable au paragraphe 2 de l’article 9, ce qui est le cas des conventions fiscales bilatérales conclues
par le Maroc.

47
Rapport OCDE paragraphe 4.32
112

48
Le paragraphe 10 des commentaires de l’article 25 du modèle de convention fiscale OCDE précise
que la procédure amiable s’applique aux ajustements des prix de transfert, même en l’absence de
disposition comparable à l’article 9 paragraphe 2.

Ce même paragraphe de commentaires dispose que les pays membres de l’OCDE qui ne partagent pas
cette opinion trouvent, dans la pratique, des moyens pour remédier, le plus souvent, aux cas de double
imposition, en s’appuyant sur des dispositions de leur législation interne.

Selon le paragraphe 2 de l’article 9 du modèle OCDE, un ajustement corrélatif peut être effectué par un
Etat contractant soit en recalculant, sur le prix révisé approprié, les bénéfices imposables de l’entreprise
associée assujettie à l’impôt dans cet Etat, soit en ne modifiant pas le calcul et en accordant à
l’entreprise associée un allégement qu’elle pourra faire valoir sur l’impôt acquitté dans cet Etat à
concurrence de l’impôt supplémentaire perçu dans l’Etat procédant à l’ajustement découlant de la
révision des prix de transfert.

Selon le rapport de l’OCDE, la première méthode est de loin la plus utilisée.

Selon les informations en notre possession, le Maroc n’a jamais été sollicité pour des ajustements
corrélatifs. Ceci pourrait s’expliquer, à notre avis, par le fait que lorsqu’ils sont opérés, les
transferts indirects de bénéfices se font souvent à partir du Maroc et non vers le Maroc.

L’ajustement corrélatif n’est pas obligatoire, les administrations fiscales n’étant pas tenues de parvenir
à un accord, dans le cadre de la procédure amiable.

49
Le paragraphe 2 de l’article 9 du modèle de convention OCDE précise qu’une administration fiscale
ne devrait procéder à un ajustement corrélatif que dans la mesure où elle considère que l’ajustement
primaire est justifié dans son principe et dans son montant.

48
Voir Commentaires Article 25 du modèle de convention OCDE en Annexe 11
49
Voir Article 9 du modèle de convention OCDE-paragraphe 2
113

Une administration fiscale n’étant pas obligée d’accepter les conséquences d’un ajustement arbitraire
opéré par un autre Etat, l’ajustement corrélatif ne pouvait être obligatoire.

L’ajustement corrélatif peut être un moyen très efficace pour éliminer les doubles impositions résultant
des redressements des prix de transfert.

Selon le rapport OCDE, en général, les pays s’efforcent de bonne foi de parvenir à un accord, chaque
fois que la procédure amiable est invoquée.

Par ailleurs, ces procédures posent des problèmes.

1-3Les problèmes posés par la procédure amiable et par l’ajustement corrélatif

- les délais :

Les délais prévus en droit interne peuvent rendre impossible l’ajustement corrélatif, en l’absence de
dispositions dérogatoires dans la convention fiscale.

L’article 25 paragraphe 2 du modèle de convention fiscale de l’OCDE précise que l’accord conclu via
la procédure amiable devra être appliqué, quel que soient les délais prévus par le droit interne des Etats
contractants.

Certains pays ne voulant pas déroger, par le biais de cette disposition, aux délais fixés dans le droit
interne, ont formulé des réserves sur ce point.

L’OCDE a invité les pays membres à allonger les délais prévus en droit interne aux fins de l’ajustement
50
corrélatif, lorsque la procédure amiable a été invoquée .
Un autre délai doit être pris en compte, celui dans lequel le contribuable doit invoquer la procédure
amiable, en vertu des dispositions de l’article 25 du modèle de convention OCDE. Le problème se pose

50
Rapport OCDE paragraphe 4.46
114

pour l’application de ce délai, en ce qui concerne la détermination de la date de la mesure


d’ajustement.

Le paragraphe 18 des commentaires de l’article 25 dispose que le délai de trois ans doit s’interpréter de
la manière la plus favorable au contribuable. Il précise que lorsque l’imposition non conforme à la
convention résulte de l’effet combiné de décisions ou de mesures prises par les deux Etats contractants,
le délai ne court qu’à compter de la première notification de la décision ou de la mesure la plus récente.

- La durée de la procédure amiable :

La procédure amiable peut être d’une durée excessive. En effet, les problèmes posés par les prix de
transfert sont souvent complexes et ils ne peuvent être résolus rapidement par les autorités fiscales.

De plus, souvent, du fait de l’éloignement, les autorités compétentes essaient de régler les différends
par échange de correspondances, ce qui n’est pas toujours aussi efficace que des séances de travail.

Les difficultés de communication linguistique et les différences sur le plan des procédures et des
systèmes juridiques et comptables constituent également des facteurs pouvant retarder les opérations.

- La participation du contribuable :

La participation des contribuables peut être limitée, dans le cadre d’une procédure amiable. En vertu
des dispositions de l’article 25 paragraphe 1 du modèle de convention OCDE, le contribuable peut
soumettre une demande de mise en œuvre de la procédure amiable. Le paragraphe 23 des commentaires
de l’article 25 précise que les demandes d’ouverture de la procédure amiable ne doivent pas être
rejetées sans motif.

Le contribuable a, par conséquent, le droit d’engager la procédure amiable mais n’a pas toujours le
droit d’y participer.
115

Dans la pratique, les autorités fiscales d’un grand nombre de pays membres de l’OCDE offrent
couramment cette possibilité au contribuable, en le tenant informé de l’état d’avancement du dossier,
en lui demandant s’il est en mesure d’accepter les solutions envisagées etc.

Dans son rapport, l’OCDE invite les autorités compétentes des pays à adopter aussi largement que
51
possible cette pratique .

- Les informations concernant les procédures applicables :

Les contribuables peuvent rencontrer des difficultés pour se procurer les informations leur permettant
d’utiliser la procédure.

Pour cela, l’OCDE invite les autorités compétentes à établir et à rendre publiques leurs propres règles
ou procédures internes régissant le recours à la procédure amiable.

- Les problèmes relatifs au recouvrement des redressements fiscaux et aux intérêts à percevoir :

Dans certains cas, il n’est pas possible de suspendre le recouvrement des redressements fiscaux ou la
perception d’intérêts, en attendant l’aboutissement de la procédure amiable.

Le processus d’obtention d’un allégement de la double imposition au moyen d’un ajustement corrélatif
peut être rendu plus complexe par des problèmes de recouvrement des redressements et de calcul
d’intérêts, en cas d’insuffisance de paiement d’impôts ou de trop perçu.

Un premier problème tient au fait que le recouvrement du montant du redressement peut intervenir
avant l’achèvement de la procédure d’ajustement corrélatif, en l’absence de mécanisme interne
permettant de suspendre le recouvrement. Par conséquent, le groupe multinational risque de payer deux
fois le même impôt en attendant que son dossier soit réglé.

51
Rapport OCDE paragraphe 4.60
116

Le deuxième problème est lié aux intérêts dus au titre de l’insuffisance de paiement d’impôt. En effet,
ceux-ci peuvent être égaux ou supérieurs au montant de l’impôt lui-même.

Dans certains cas, les autorités compétentes décident d’un commun accord que l’ajustement en cause
ne donnera pas lieu au paiement d’intérêts de la part du contribuable ou de leur part, étant entendu que
cela ne sera pas possible, en l’absence d’une disposition spécifique dans la convention fiscale
bilatérale.

L’amélioration de l’efficacité de la procédure amiable

L’essor spectaculaire des échanges et de l’investissement dans le monde exerce un impact substantiel
sur la fiscalité internationale. Une grande partie de l’attention se concentre aujourd’hui sur l’adaptation
des principes fiscaux à la nouvelle donne économique. Tout aussi importants sont les aspects
procéduraux de la fiscalité. A l’heure où les transactions internationales se multiplient, le nombre
potentiel de différends fiscaux impliquant plusieurs pays augmente, lui aussi. Les mécanismes existants
de résolution de différends, définis en tant que procédure amiable dans le modèle de convention, sont
généralement efficaces, mais doivent traiter des litiges de plus en plus nombreux et complexes.
La résolution efficace des différends par les autorités compétentes, dans le cadre des procédures
actuelles des conventions fiscales, constitue un aspect fondamental d’une obligation inscrite en droit
international : la mise en œuvre de bonne foi d’une convention fiscale dans son ensemble.

La procédure amiable impose aux autorités compétentes de s’efforcer de parvenir à un règlement


satisfaisant des litiges, c’est à dire de tout faire pour s’acquitter pleinement de cette obligation.
Néanmoins, même si les procédures existantes permettent le plus souvent de remédier aux différends,
il reste des cas dans lesquels on ne peut trouver de règlements satisfaisants. De surcroît, la consultation
organisée par l’OCDE le 17 Décembre 2003 a montré que les entreprises mettaient en doute l’efficacité
de la procédure amiable à plusieurs égards et étaient, par conséquent, réticentes à y recourir.

L’OCDE a lancé un projet ayant pour objectif d’instaurer une procédure amiable pleinement efficace,
en laquelle les contribuables auraient confiance et qui couvrirait tous les aspects depuis l’accès initial à
117

cette procédure jusqu’à la mise en œuvre d’un accord amiable. Tant le secteur privé que les Etats
concernés ont beaucoup à gagner d’une amélioration des mécanismes de résolution des différends.
La procédure amiable peut être améliorée par l’ajout de techniques supplémentaires de règlement des
différends, la réduction du nombre de différends fiscaux transfrontières en résultant, constitue
52
clairement un objectif important des travaux de l’OCDE .

Ces techniques supplémentaires peuvent améliorer l’efficacité de la procédure amiable proprement dite,
même dans les cas où le recours à ces techniques n’est pas nécessaire. Le seul fait que ces techniques
existent peut encourager l’utilisation accrue de la procédure amiable, dans la mesure où tant les
pouvoirs publics que les contribuables sauront d’emblée que le temps et les efforts investis dans la
procédure amiable aboutiront vraisemblablement à un résultat satisfaisant.

1-4L’arbitrage

Les commentaires actuels se rapportant à l’article 25 examinent la possibilité, pour les autorités
compétentes, d’obtenir un avis arbitral d’un expert impartial, pour l’aide à la prise d’une décision.
De plus, les commentaires envisagent la possibilité, pour les parties, d’obtenir un avis auprès du comité
des affaires fiscales concernant le sens précis à donner à une disposition de la convention.
En outre, le paragraphe 4 de l’article 25 du modèle de convention et les paragraphes 4 et 41 des
commentaires sur cet article prévoient la possibilité de création d’une « commission mixte », en vue de
traiter de certaines questions.

L’arbitrage est la technique supplémentaire de résolution des différends qui reçoit le plus d’attention
dans le domaine fiscal. Sur ce plan, la procédure d’arbitrage est de nature quasi-judiciaire, les parties
concernées délèguent en fait un pouvoir de décision au tiers décideur et conviennent, à divers degrés,
de suivre cette décision.

52
Publication de l’OCDE, en date du 27.07.2004, intitulée « Améliorer le processus de résolution des différends fiscaux internationaux »
118

La convention Européenne d’arbitrage

53
Une convention d’arbitrage existe déjà au sein de l’Union européenne. Il s’agit d’une convention
relative à l’élimination des doubles impositions, dans le cas de correction des bénéfices entre
entreprises associées, qui a été signée le 23 juillet 1990 et ratifiée en 1995.

Cette convention, qui rend l’arbitrage obligatoire, s’applique aux cas visés à l’article 9 du modèle de
convention OCDE.

Elle prévoit notamment que lorsque les parties n’ont pas trouvé d’accord dans un délai de deux ans,
elles doivent demander un avis à une commission consultative, laquelle le formule dans un délai de
deux mois.

La commission consultative comprend des représentants de chaque autorité compétente et des


personnalités indépendantes. Ces dernières sont choisies par les autorités compétentes sur une liste
déposée auprès du secrétariat général du conseil des communautés européennes.

A cette fin, chaque état est tenu de désigner cinq personnes compétentes et indépendantes
ressortissantes et résidentes d’un Etat contractant à la convention qui sont inscrites sur une liste
commune des Etats contractants.

Une commission consultative est constituée pour chaque affaire particulière.


L’avis de la commission s’impose si les autorités ne parviennent à aucun autre accord. La mise en
œuvre de l’élimination de la double imposition peut se faire par correction du revenu ou par crédit
d’impôt. Aucun recours en révision devant un tribunal n’est autorisé. Cette procédure arbitrale, qui peut
être visée conjointement à l’article 25 du modèle de convention OCDE de la convention fiscale relatif à
la procédure amiable ou visée seule, n’a cependant pas eu le succès escompté. Une seule procédure
d’arbitrage a été finalisée, en 2003.

53
Voir Convention Européenne d’arbitrage, en Annexe 14
119

Le forum conjoint de l’union Européenne sur les prix de transfert a été crée en juillet 2002. Il se
compose d’un expert de l’administration fiscale de chaque Etat membre et de dix experts de haut
niveau représentant le secteur des entreprises, ainsi que d’un président.

Dans sa communication du 23 Avril 2004, concernant les travaux menés par le forum conjoint de
l’union Européenne sur les prix de transfert dans le domaine de la fiscalité des entreprises, la
commission européenne a proposé un code de conduite pour la mise en œuvre effective de la
commission d’arbitrage.

2- METHODES DESTINEES A EVITER LES LITIGES, EN MATIERE DE PRIX DE TRANSFERT

2-1 La nécessité de mettre en place une documentation et de l’actualiser – Rôle de


l’expert- comptable

Il est indispensable que les entreprises conservent une trace écrite témoignant de leurs analyses menées
pour se conformer au principe de pleine concurrence. Ces documents peuvent revêtir des formes très
différentes : conventions, mémoires, correspondances, notes internes, consultations extérieures,
comptes rendus de réunions, extrait de journaux ou de revues etc.

2-1-1 Recensement des informations

Dans la pratique, ces informations sont dispersées dans différents départements opérationnels. Il est
important d’associer leur responsable à cette collecte d’informations qui répond à des impératifs
économiques et commerciaux mais également fiscaux. De même, il est intéressant de rassembler des
informations émanant des entreprises associées situées à l’étranger.

Toutefois, il convient de trouver un juste équilibre entre les besoins en documentation, le coût et la
charge administrative correspondants. Sur ce point, l’OCDE a précisé que les administrations ne
devraient pas exiger la production de documents que ne possèdent pas les entreprises ou qui ne sont pas
54
sous leur contrôle, ni des renseignements confidentiels qui ne peuvent pas être légalement obtenus .

54
Rapport OCDE paragraphe 5.10
120

Juridiquement, rien n’oblige à ce que ces documents soient établis à la date de détermination des prix
de transfert ou de la déclaration du résultat. Cependant, il n’est pas exclu que des mesures soient
adoptées à l’avenir dans certains pays, comme c’est le cas au Canada. En effet, le Canada impose le
dépôt de déclarations destinées à expliquer les conditions et les modalités de fixation des prix de
transfert. Ceci inciterait les entreprises à s’imposer une certaine rigueur.

D’un autre côté, si la constitution d’une documentation au fur et à mesure de la définition même de la
politique de prix de transfert ne représente pas une charge de travail excessive, il n’en est pas de même
lorsqu’il s’agit d’établir cette documentation à posteriori : le groupe risque de ne plus retrouver les
traces de éléments sur lesquels il s’était appuyé pour fixer les prix de transfert.

Or, l’administration sera d’autant plus encline à remettre en cause la politique appliquée par le groupe
que la justification de celle-ci lui semblera avoir été établie pour l’occasion.

2-1-2Organigramme des entreprises associées

L’organigramme est le document de base qui va permettre de situer une entité parmi les autres sociétés
du groupe. Cet organigramme devra tenir compte de la spécificité de la notion de lien de dépendance
tel qu’il ressort l’article 4 du livre des procédures fiscales et intégrer toutes les entités concernées par
ledit article.

L’entreprise qui souhaite se faire assister dans sa démarche de mise en place d’une véritable politique
de prix de transfert aura intérêt, étant donné la difficulté et les enjeux du sujet, à se tourner vers des
consultants externes, professionnels du droit et du chiffre.
La mise en place d’une telle politique relève davantage d’un travail d’économiste que de fiscaliste.

C’est pourquoi dans certains pays, et particulièrement aux Etats-Unis, ce travail leur est confié. Mais, la
démarche restera fortement imprégnée de critères comptables et fiscaux. Ainsi, l’expert- comptable
interviendra essentiellement dans les travaux d’analyse économique des transactions, de calcul des prix
de revient et des marges. En tant que fiscaliste, il contrôlera l’adéquation des prix au principe de pleine
concurrence.
121

Malheureusement, l’expert-comptable d’une filiale n’a qu’une vision limitée du groupe. La filiale se
caractérise par sa position dans un groupe, tant au niveau de l’exploitation (commercialisation,
production, recherche et développement) que du financement (situation financière dans le groupe et
situation capitalistique) ou du niveau des responsabilités. Il est difficile d’appréhender convenablement
tous ces aspects en ne connaissant qu’une seule entité du groupe.

Si le professionnel veut comprendre le rôle stratégique attribué à la filiale et l’enjeu des prix de
transfert dans le groupe, il devra recueillir des dirigeants du groupe un minimum d’informations
précises et chiffrées. La correcte détermination du prix de pleine concurrence de l’ensemble des
transactions en dépend.

La première démarche de l’expert-comptable auprès d’un client concerné par la problématique des prix
de transfert consiste à reconstituer l’organigramme du groupe.

Ainsi, l’expert-comptable devra :

• analyser les documents juridiques de base à sa disposition (statuts) ;


• analyser les documents juridiques récurrents tels que les PV des assemblées, conseils
d’administration ;
• analyser les conventions signées entre la société Marocaine et les autres sociétés du groupe ;
• recenser les flux financiers et les flux de facturation avec lesdites sociétés, à travers la
comptabilité de la société Marocaine ;
• vérifier l’adéquation des flux comptables avec les conventions correspondantes ;
• recenser les flux comptables non formalisés dans une convention écrite et tenter de les
rationaliser (mode de détermination, récurrence, historique etc.) ;

Le recensement de toutes ces opérations permettra de lister les transactions susceptibles de rentrer dans
une politique de prix de transfert.
122

2-1-3La politique de prix de transfert

La documentation doit décrire les procédures applicables, en matière de prix de transfert. Elle doit
démontrer la pertinence de la méthode de détermination du prix de la transaction.
L’approche effectuée devra être transparente et les choix devront être justifiés.
La documentation couvrira l’analyse de comparabilité et l’analyse
fonctionnelle.

L’expert-comptable peut jouer un rôle important. En effet, il pourra assister l’entreprise dans la
recherche de comparables, dans le découpage fonctionnel des activités du groupe et dans le choix de la
méthode de détermination de prix de transfert la plus appropriée à chaque transaction.
L’expert-comptable est un homme de rigueur, habitué à respecter, à faire respecter et à mettre en place
des procédures. Dans le cadre de ses différentes missions, il est en effet amené à instaurer souvent de
nombreuses procédures. De même, en tant que commissaire aux comptes, le professionnel de la
comptabilité est régulièrement amené à contrôler les procédures mises en place par la société et à
proposer des améliorations.

Ainsi, l’expert-comptable semble être la personne adéquate pour mettre en place une procédure
permettant au groupe de fixer et de faire appliquer une méthode de détermination de prix de transfert.

La mise en place de différentes modalités concernant les prix de transfert est un travail d’envergure
nécessitant une grande rigueur et la mise en place de procédures strictes. En l’absence de telles
procédures, les prix de transfert pourraient s’écarter du prix de pleine concurrence, ce qui engendrerait
d’importants risques pour la société, à moyen terme.
Pour choisir la meilleure méthode, l’expert-comptable se reportera aux recommandations de l’OCDE,
qui préconisent l’application des trois méthodes traditionnelles (prix du marché libre, prix de revente et
cost plus) et de deux méthodes transactionnelles (méthode de partage des bénéfices et méthode
transactionnelle de la marge nette). Bien que l’OCDE précise, dans ses principes directeurs, que toute
autre méthode aboutissant à un prix de pleine concurrence est acceptable, l’expert-comptable se
contentera, dans la plupart des cas, par mesure de simplicité, des cinq méthodes précitées.
123

Si l’expert-comptable ne parvient pas à sélectionner une méthode plus pertinente que les autres, il
devra faire des simulations en utilisant les différentes méthodes possibles, en comparant les résultats
obtenus, en tenant compte des contraintes et des risques liés à chaque méthode et également en prenant
en compte l’avis des dirigeants du groupe.

Pour réaliser ces simulations qui peuvent s’avérer fastidieuses, l’expert-comptable aura recours à l’outil
informatique et notamment à l’utilisation d’un tableur. Il existe par ailleurs des progiciels de gestion
adaptés aux prix de transfert et pouvant servir d’outils pour réaliser ces simulations.
Si le groupe a clairement défini et mis en œuvre sa politique de prix de transfert, il peut toutefois,
souhaiter l’assistance d’un professionnel de la comptabilité et de la gestion, afin de s’assurer que celle-
ci est globalement cohérente et répond principalement aux recommandations de l’OCDE.

Dans le cadre d’une telle mission, l’expert-comptable devra dans un premier temps, évaluer l’existant,
c’est à dire les procédures mises en place par le groupe pour s’assurer que les prix de transfert retenus
correspondent à des prix de pleine concurrence.

Il devra donc vérifier que le groupe a réalisé une étude approfondie afin de déterminer toutes les
transactions internes et leur nature réelle et qu’il a mis en place des procédures visant à faire remonter
régulièrement vers le groupe toute information relative à ce type de transaction et susceptible de
modifier la situation existante.

L’expert-comptable doit porter sur la documentation préparée, l’œil critique que pourrait porter sur
celle-ci une personne découvrant la société, pour la première fois. Il vérifiera si celle-ci permettrait à
une personne extérieure à l’entreprise de comprendre la nature des transactions intragroupe, les
méthodes utilisées pour déterminer les prix de transfert et les différentes justifications sur lesquelles
elles s’appuient.

Dans le cadre de prestations de service, la documentation devra permettre de prouver que les
prestations intragroupe facturées sont bien réelles et ne constituent pas des prestations fictives, ayant
pour seul but de faire remonter le résultat vers la maison mère.
124

2-1-4 Mise en place de procédures internes pour actualiser et conserver toute


documentation

La mise en place de procédures internes concernant les prix de transfert doit permettre d’actualiser
régulièrement la documentation, de vérifier sa pertinence, de la conserver et enfin, de la reconstituer,
en cas de besoin.

En effet, la documentation établie par la société doit être remise à jour régulièrement. Les conditions
qui ont prévalu à son élaboration changent en permanence : les fonctions réelles exercées par les
entreprises peuvent se modifier, de nouvelles méthodes de fixation des prix de transfert mieux adaptées
peuvent apparaître, les transactions comparables évoluent. Pour respecter le principe du prix de pleine
concurrence, les prix de transfert doivent être revus fréquemment. Or, chaque changement doit être
justifié (en montrant que la nouvelle méthode est davantage conforme au prix de pleine concurrence) et
matérialisé afin de pouvoir défendre la position retenue devant l’administration fiscale.

L’expert-comptable peut aider l’entreprise à mettre en place des procédures de suivi coordonnées entre
les différents services concernés de l’entreprise et du groupe.

Il pourra également l’aider à généraliser l’utilisation de supports écrits pour toutes les relations
contractuelles à l’intérieur du groupe, y compris pour les actes passés ou en cours.

Des audits fiscaux et une harmonisation des politiques de suivi des prix de transfert, seront nécessaires,
en cas de croissance externe ou de restructuration (ces éléments pourront justifier un changement de
méthode).

Une procédure d’archivage, de protection et de mise à jour sera mise en place pour s’assurer de la
cohérence des informations stockées avec l’actualité et de leur sécurité. De même, il faut prévoir une
procédure de rapatriement de toutes ces informations en un même lieu, en cas de contrôle fiscal, ou une
procédure d’envoi vers une filiale ou une succursale située à l’étranger.
125

2-1-5La documentation liée au contrôle fiscal

Enfin, en cas de contrôle fiscal, l’expert-comptable pourra assister l’entreprise, tant pendant le
déroulement de la procédure de contrôle que dans la phase contentieuse.

Si l’expert-comptable intervient, pour la première fois, dans le cadre d’un contrôle fiscal, il doit
commencer sa mission, avant même le début des opérations de contrôle : il bénéficie d’un délai court
(15 jours) pour identifier les principales zones de risques et se préparer à répondre aux questions de
l’administration fiscale sur ces différents points.

Dans un premier temps, l’expert-comptable rencontrera les dirigeants de la société et du groupe auquel
elle appartient afin de prendre connaissance d’éventuels risques identifiés et des sujets auxquels il
faudra se préparer à répondre (contrôles fiscaux précédents, risques assumés etc.). S’il s’avère que les
prix de transfert ont un impact sensible sur le résultat de la société contrôlée, l’expert-comptable devra
déterminer s’ils ont été fixés avec la plus grande attention (études fonctionnelles, recherche de
comparables) et s’ils correspondent aux prix de pleine concurrence. Si tel n’est pas le cas, les dirigeants
devront en convenir et déterminer en collaboration avec leur conseil l’écart qui existe entre les prix de
transfert et le prix de pleine concurrence, et les conséquences financières qui peuvent en découler pour
la société. A l’issue de cette rencontre, l’expert-comptable doit connaître les risques assumés par les
dirigeants et le montant de redressement afférent à ces risques qu’ils sont prêts à envisager.

Dans un second temps, l’expert-comptable va se faire décrire précisément les principes retenus en
matière de prix de transfert. Pour cela, il pourra prendre connaissance de la documentation préparée par
la société. En l’absence d’une telle documentation, l’expert-comptable et les dirigeants devront rédiger
une note de synthèse décrivant précisément les principes retenus et les principales justifications sur
lesquels ils reposent : cela ne constituera pas une réelle documentation des prix de transfert mais pourra
éventuellement dissuader le contrôleur d’approfondir ses travaux sur ce thème, si les principes retenus
lui semblent cohérents et normaux.

En revanche, si l’entreprise a documenté sa politique de prix de transfert (ce qui réduit les risques de
redressement fiscal sur ce point), l’expert-comptable veillera à ce que celle-ci soit à jour : il la passera
126

en revue avec les dirigeants des différentes entreprises concernées par les différentes transactions du
groupe, afin de s’assurer que tous les principes décrits sont toujours valables et correctement appliqués.

Pendant le déroulement du contrôle fiscal, l’expert-comptable doit se trouver aux côtés des dirigeants
de l’entreprise dès le début de la phase de vérification de la comptabilité. Celui-ci doit, en effet, essayer
de savoir, au plus vite, si les transactions intragroupe font partie des points que le contrôleur souhaite
étudier. L’expert-comptable devra bâtir un contre-argumentaire aussi étayé que possible.

Une fois la notification de redressements reçue, malgré les explications fournies au contrôleur fiscal,
celui-ci peut demeurer en désaccord avec la position retenue et notifier à la société un redressement
concernant les prix de transfert. Les dirigeants et l’expert-comptable devront rédiger la réponse en
reprenant leur argumentation et en recherchant, si possible, de nouveaux éléments permettant de
prouver que la position adoptée par la société n’aboutit pas à un transfert indirect de bénéfices.

Si ces différentes actions restent sans effet et si l’administration, dans sa deuxième notification,
maintient ses différents redressements, l’expert-comptable devra présenter aux dirigeants de
l’entreprise et du groupe la possibilité de soumettre le litige à la commission locale de taxation et à la
commission nationale et enfin, au tribunal.
Si les redressements notifiés sont acceptés par l’entreprise, les dirigeants et l’expert-comptable devront
en tirer toutes conséquences. Tout d’abord les impacts financiers devront être chiffrés.

Au niveau de la société, il y aura peut être lieu de provisionner les risques concernant les transactions
ayant fait l’objet de redressements fiscaux pour les exercices non encore contrôlés. Dans un second
temps, il serait peut être utile de réajuster la politique de prix de transfert existante pour tenir compte de
la position de l’administration fiscale. Dans ce cadre, la documentation des prix de transfert devra
également être revue.

La notification d’un redressement fiscal concernant les prix de transfert peut constituer une occasion,
pour les dirigeants et leur conseil, l’expert-comptable, de procéder à une réflexion stratégique sur
l’organisation du groupe.
127

2-2Les contrôles fiscaux simultanés

Le contrôle fiscal simultané est une forme d’assistance mutuelle, utilisée dans un grand nombre
55
d’affaires relatives à des transactions internationales .

Il permet à deux ou plusieurs pays de coopérer dans des enquêtes fiscales.

Il est utile notamment lorsque l’accès à des renseignements qui se trouvent dans un pays tiers est
déterminant pour une enquête fiscale car il facilite l’échange de renseignements.

Un contrôle fiscal simultané est un contrôle entrepris, en vertu d’un accord par lequel deux ou plusieurs
Etats contractants conviennent de contrôler simultanément et de manière indépendante, chacun sur son
territoire, la situation fiscale d’un contribuable qui présente, pour eux, un intérêt commun ou
complémentaire, en vue d’échanger les renseignements ainsi obtenus.

Cette forme d’assistance mutuelle n’est pas censée remplacer la procédure amiable.

2-2-1Le fondement juridique du contrôle simultané

56
Bien que l’article 26 du modèle de convention OCDE puisse constituer le fondement juridique du
57
contrôle fiscal simultané , les autorités compétentes concluent souvent des accords qui définissent les
programmes de contrôles fiscaux simultanés et les modalités pratiques des contrôles et des échanges de
renseignements.

Les contribuables concernés par le contrôle fiscal simultané sont normalement avisés que le contrôle
fiscal dont ils feront l’objet est un contrôle fiscal simultané.

55
Rapport OCDE paragraphe 4.78
56
Voir Article 26 du modèle de convention OCDE, en Annexe 12
57
Voir commentaires Article 26 du modèle de convention OCDE en Annexe 13
128

2-2-2Les contrôles fiscaux simultanés et les prix de transfert

Les différences qui peuvent exister d’un pays à l’autre quant aux délais dans lesquels les contrôles
doivent être opérés ou l’imposition doit être liquidée et également quant aux exercices fiscaux
susceptibles de donner lieu à un contrôle peuvent entraver la sélection des affaires de prix de transfert,
en vue d’un contrôle simultané.

Ces problèmes peuvent être atténués si les autorités compétentes se communiquent suffisamment tôt
leurs calendriers de contrôle, de façon à pouvoir synchroniser les périodes de contrôle.

Les contrôles fiscaux simultanés peuvent faciliter l’échange de renseignements relatifs aux pratiques
des entreprises multinationales, à des transactions complexes, à des accords de partage des coûts et aux
méthodes de répartition des bénéfices dans des domaines particuliers.

Les contrôles fiscaux permettent aux administrations fiscales d’être au fait des activités d’ensemble et
d’être mieux outillées pour comparer et vérifier les transactions internationales.

Les contrôles fiscaux simultanés permettent aux administrations fiscales d’obtenir plus rapidement et
plus efficacement les renseignements nécessaires concernant les prix de transfert.
La procédure des contrôles fiscaux simultanés permet de déceler tôt les différends en matière de prix de
transfert et permettent de minimiser les contentieux.

Sur la base des informations obtenues, les fonctionnaires des services fiscaux participants ont la
possibilité de discuter leurs divergences quant aux méthodes de détermination des prix de transfert.
Si ces divergences subsistent, elles peuvent donner lieu à des procédures amiables ultérieures, tout en
évitant les problèmes qui se posent lorsqu’un pays contrôle un contribuable longtemps après que l’autre
Etat contractant a définitivement liquidé le dossier de l’entreprise associée concernée.

La procédure des contrôles fiscaux simultanés permet d’éviter les difficultés auxquelles se heurte la
procédure amiable, par manque d’informations pertinentes.
129

Dans certains cas, le contrôle fiscal simultané débouche sur un accord entre les administrations fiscales
participantes, au sujet des conditions de détermination des prix de transfert des transactions entre les
entreprises associées.

Lorsqu’un accord est obtenu, un ajustement corrélatif peut être opéré suffisamment tôt de façon à éviter
au maximum la prescription et la double imposition économique.

Lorsque les administrations fiscales n’arrivent pas à s’entendre, lors d’un contrôle fiscal simultané, sur
les modalités de détermination des prix de transfert, l’une des entreprises associées peut présenter
l’ouverture d’une procédure amiable, en vue d’éviter la double imposition.

Dans ce cas, le contrôle fiscal simultané permet de réduire sensiblement le délai entre les redressements
effectués par l’administration fiscale et la mise en œuvre d’une procédure amiable.

Le contrôle fiscal simultané permet aux entreprises associées d’économiser le temps et les ressources
du fait de la coordination des enquêtes des administrations fiscales concernées.

Il offre également la possibilité aux entreprises multinationales de jouer un rôle plus actif dans le
règlement des problèmes liés aux prix de transfert.

2-2-3La convention concernant l’assistance administrative mutuelle en matière fiscale

Les Etats membres du conseil de l’Europe et les pays membres de l’OCDE ont signé une convention
concernant l’assistance administrative mutuelle en matière fiscale, à Strasbourg, en date du 25 janvier
58
1988 .

Cette convention a été élaborée au sein du conseil de l’Europe par un comité d’experts placé sous
l’autorité du comité Européen de coopération juridique, sur la base d’un premier projet établi par le
comité des affaires fiscales de l’OCDE.

58
Voir Convention concernant l’assistance administrative mutuelle en matière fiscale, en Annexe 16
130

L’objectif de la convention était d’élaborer un nouvel instrument à la fois général, c’est à dire incluant
les différentes modalités possibles d’assistance et couvrant un large éventail d’impôts et multilatéral,
c’est à dire permettant une coopération internationale plus efficace entre de nombreux Etats, grâce à
une application et une interprétation uniformes de ses dispositions. Les articles 8 et 9 de la convention
sont consacrés aux contrôles fiscaux simultanés.

En vertu des dispositions desdits articles, à la demande de l’une d’entre elles, deux ou plusieurs parties
se consultent pour déterminer les cas devant faire l’objet d’un contrôle fiscal simultané et les
procédures à suivre.

La convention prévoit également la possibilité pour un Etat d’autoriser les représentants de l’autre Etat
d’assister à la partie appropriée d’un contrôle fiscal.

2-2-4 L’accord modèle OCDE

59
Selon le rapport de l’OCDE , devant le recours croissant aux contrôles fiscaux simultanés entre les
pays membres de l’OCDE, le comité des affaires fiscales a jugé utile d’établir un accord modèle de
60
l’OCDE pour entreprendre des contrôles fiscaux simultanés, à l’intention des pays qui veulent
s’engager dans ce type de coopération.

Le 23 juillet 1992, le conseil de l’OCDE a recommandé aux pays membres de l’OCDE d’utiliser cet
accord modèle qui contient des principes directeurs sur les aspects juridiques et pratiques de cette
forme de coopération.

L’accord modèle OCDE repose sur l’idée qu’un contrôle fiscal simultané peut faciliter la procédure
amiable car les administrations fiscales ont la possibilité de réunir des informations plus complètes sur
les redressements opérés.

59
Rapport OCDE paragraphe 4.92

60
Voir Accord Modèle OCDE, en Annexe 15
131

L’accord modèle OCDE fait référence à l’article relatif aux échanges de renseignements de la
convention modèle OCDE et à l’article 8 de la convention du conseil de l’Europe concernant
l’assistance administrative mutuelle en matière fiscale, s’articule comme suit :

A- Définition et fondement juridique


B- Objectifs
C- Sélection des affaires et procédure de contrôle
D- Critères de sélection des affaires à vérifier
E- Personnel
F- Programmation de contrôle fiscal simultané
G- Déroulement du contrôle fiscal
H- Arrêt du contrôle fiscal simultané
I- Achèvement du contrôle fiscal simultané.

2-2-5La pratique des contrôles fiscaux simultanés

Plusieurs pays membres de l’OCDE pratiquent les contrôles fiscaux simultanés.

Nous citerons, à titre d’exemple, les cas suivants :

61
• Les Ministres des Finances Belge et Italien ont conclu un arrangement administratif , en date
du 11 juillet 1997, en vue d’effectuer des contrôles fiscaux simultanés, conformément à l’article
26 relatif à l’échange de renseignements de la convention entre l’Italie et la Belgique signée à
Rome le 23 Avril 1983 ;

• Les autorités compétentes de France et de la Belgique ont signé le 10.07.2002 un arrangement


administratif en matière d’échange de renseignements. Il ressort de l’examen de l’arrangement
que les dispositions adoptées se fondent sur plusieurs textes internationaux dont la convention
de l’Europe.

61
Voir Arrangement administratif conclu entre la Belgique et l’Italie, en Annexe 17
132

A travers les discussions que nous avons eues avec la direction générale des impôts, nous avons
compris que pour l’instant, le Maroc n’est pas encore sollicité, pour effectuer des contrôles fiscaux
simultanés avec d’autres pays.

2-2-6Conclusion sur les contrôles fiscaux simultanés

L’OCDE considère que les contrôles fiscaux simultanés permettent d’atténuer les difficultés
rencontrées par les contribuables et par les administrations fiscales dans le domaine de la fixation des
prix de transfert. L’OCDE recommande le recours aux contrôles fiscaux simultanés pour faciliter
l’échange de renseignements ainsi que le déroulement des procédures amiables.

2-3Les régimes de protection

2-3-1Définition

Les difficultés que pose l’application du principe de pleine concurrence peuvent être atténuées si les
entreprises associées peuvent se conformer, pour la fixation de leurs prix de transfert, à un ensemble de
règles simples et si les prix de transfert ainsi fixés sont automatiquement acceptés par l’administration
62
fiscale nationale. C’est ce qu’on appelle un régime de protection .

En matière fiscale, un régime de protection est une réglementation qui s’applique à une catégorie
donnée de contribuables exemptés de certaines formalités édictées par la législation fiscale et
bénéficiant d’un régime exceptionnel, souvent plus simple.

Dans le cas particulier des prix de transfert, les règles administratives applicables à un régime de
protection peuvent aller de l’exonération totale des contribuables concernés de l’obligation de se
conformer à la législation nationale en matière de prix de transfert à l’obligation de se conformer à
diverses règles de procédure pour pouvoir bénéficier du régime de protection.

62
Rapport OCDE paragraphe 4.95
133

Exemple :

• Imposer aux contribuables d’établir leurs prix de transfert d’une certaine manière, en appliquant
une méthode en particulier ;

• Imposer aux contribuables de fournir certains renseignements ;

• Tenir certains comptes pour les transactions avec les entreprises associées etc.

L’administration fiscale devra assurer le suivi du respect des règles de procédures par le contribuable.

Pour les transactions du contribuable avec les entreprises associées, deux situations peuvent alors être
envisagées :

• certaines transactions pourront échapper à l’application des réglementations, en matière de prix


de transfert, en particulier grâce à la fixation de seuils ;

• la réglementation sera simplifiée, par exemple, grâce à la fixation de fourchettes dans lesquelles
devront s’inscrire les prix.

2-3-2Les principaux objectifs des régimes de protection :

Les principaux objectifs des régimes de protection sont la simplification des obligations des
contribuables, l’assurance donnée aux contribuables et la simplification de la tâche de l’administration
fiscale.

La simplification des obligations des contribuables :

L’application du principe de pleine concurrence peut amener les entreprises associées à collecter et à
analyser des données difficiles à obtenir ou à évaluer.
134

Les régimes de protection pourraient faciliter le respect des obligations en exemptant les contribuables
de certaines dispositions.

Dans le cadre d’un régime de protection, l’entreprise associée connaîtrait, par avance, la fourchette de
prix ou la marge bénéficiaire que doit respecter l’entreprise pour bénéficier de ce régime.

Il lui suffit, pour ce faire, d’appliquer une méthode simplifiée, ce qui lui épargnerait la recherche
d’éléments de comparaison et par conséquent, lui épargnerait le temps et les ressources qui auraient été
consacrés à la fixation des prix de transfert.

L’assurance donnée aux contribuables :

Les régimes de protection présentent un autre avantage à savoir que les prix de transfert seront acceptés
par l’administration fiscale.

Les entreprises, admises au bénéfice, ont l’assurance que leurs prix de transfert ne seront pas soumis à
une vérification ou un redressement.

L’administration accepte automatiquement, sans aucun autre examen, tout prix ou résultat dépassant un
seuil minimum ou s’inscrivant dans une fourchette préétablie.

La simplification de la tâche de l’administration fiscale :

Une fois que l’administration fiscale a fixé le groupe de contribuables admis au régime de protection,
ces contribuables ne nécessiteraient qu’une vérification minimale de leurs prix de transfert et des
résultats de leurs transactions avec des entreprises associées.
L’administration fiscale pourra, par conséquent, affecter ses ressources à d’autres dossiers.
135

2-3-3Les problèmes posés par les régimes de protection :

La mise en place d’un régime de protection pour une catégorie d’entreprises peut avoir des
conséquences négatives. En effet :

• l’application d’un régime de protection dans un pays X influe non seulement sur le calcul de
l’impôt dans ce pays X mais également sur le calcul de l’impôt pour les entreprises associées
situées dans d’autres pays ;

• Il est difficile de définir des critères satisfaisants pour les régimes de protection, ce qui peut
aboutir à des prix non conformes au principe de pleine concurrence.

Dans le cadre d’un régime de protection, les entreprises associées peuvent être contraintes à appliquer
une méthode particulière de fixation des prix de transfert. Lorsque le régime de protection impose une
méthode très simple, il est peu probable que celle-ci soit la plus appropriée.

Nous pouvons prendre l’exemple d’un régime de protection qui impose une marge bénéficiaire
minimale, pour la fixation des prix de transfert, alors que l’entreprise associée peut utiliser la méthode
du prix comparable sur le marché libre ou d’autres méthodes fondées sur les transactions.

Dans une telle situation, les prix pratiqués ne seraient pas conformes au principe de pleine concurrence
qui exige l’utilisation d’une méthode de détermination des prix conforme aux conditions que des
parties indépendantes, réalisant des transactions comparables, auraient convenues, sur le marché libre,
dans une situation comparable.

En tout état de cause, le régime de protection sacrifie la précision, au niveau de l’établissement des prix
de transfert car ceux-ci ne sont plus établis, en fonction des situations individuelles, dans lesquelles
s’inscrivent les transactions, élément caractéristique du prix de pleine concurrence.

Par conséquent, les prix conformes à l’objectif normalisé ne sont pas toujours conformes aux prix de
pleine concurrence et les régimes de protection risquent d’être arbitraires.
136

Par ailleurs, l’ampleur des recherches indispensables pour définir les paramètres d’un régime de
protection qui soit suffisamment précis pour se conformer au principe de pleine concurrence risque de
remettre en cause la simplification du travail administratif, un des objectifs des régimes de protection.

Le risque de double imposition et les difficultés pour la procédure amiable

La mise en place d’un régime de protection peut inciter des entreprises associées à modifier les prix
qu’elles auraient pratiqués dans d’autres circonstances et ce, afin de se conformer aux objectifs relatifs
au régime de protection et éviter ainsi la vérification de leurs prix de transfert.
Les prix pratiqués par ces entreprises risquent de s’avérer supérieurs aux prix de pleine concurrence
qu’elles auraient pratiqués, compte tenu de leur situation particulière. Cette situation serait avantageuse
pour l’administration fiscale qui institue le régime de protection. En effet, les entreprises pouvant
bénéficier dudit régime déclareront davantage de revenus imposables. Par ailleurs, cette même situation
portera préjudice aux entreprises associées situées dans d’autres pays et à leurs administrations fiscales
car ces entreprises déclareront moins de revenus.
Devant une telle situation, l’administration fiscale du pays lésé par ce régime peut ne pas accepter les
prix facturés à ses contribuables, à l’occasion de transactions avec des entreprises situées dans le pays
qui accorde le régime de protection. D’où risque de double imposition.

Selon le rapport de l’OCDE, certains groupes multinationaux estiment qu’une double imposition
limitée constituerait un prix acceptable à payer pour ne pas avoir à se conformer à des règles complexes
de fixation des prix de transfert !

L’allégement de la double imposition imputable au choix d’un régime de protection par un


contribuable ne devrait être accordé que si le contribuable peut démontrer que les résultats obtenus
par application du régime de protection sont conformes au principe de pleine concurrence.

L’adoption de régimes de protection dans un pays peut obliger les administrations fiscales des autres
pays à examiner la politique de fixation des prix de transfert de l’ensemble des entreprises associées à
des entreprises qui ont opté pour le régime de protection, afin de détecter tous les cas éventuels de non
conformité au principe de pleine concurrence.
137

Par conséquent, la simplification administrative qui constitue un des principaux objectifs des régimes
de protection se fait au détriment d’autres pays qui devront déterminer, systématiquement, si les prix
autorisés dans le cadre du régime de protection sont conformes aux prix de pleine concurrence.

Le risque d’évasion fiscale

Les régimes de protection peuvent inciter les entreprises à modifier leurs prix de transfert et transférer
ainsi des revenus imposables.
Exemple
:

Si le régime de protection retient une moyenne par secteur d’activité, soit 10%, les entreprises qui ont
une rentabilité supérieure à la moyenne (soit 15%) pourront adhérer au régime de protection prévoyant
une marge plus faible. Par conséquent, elles seront imposées sur un bénéfice minoré. Il y aura donc
transfert de revenu imposable en dehors du pays. L’administration fiscale n’aura aucun recours pour
contrecarrer de tels transferts.

Les régimes de protection risquent d’engendrer une sous-imposition des revenus, à l’échelle
internationale lorsqu’ils aboutissement à des prix non conformes au principe de pleine concurrence. En
effet, ils permettront, dans certains cas, de transférer des revenus imposables vers des pays à faible
fiscalité ou des paradis fiscaux.

Les problèmes d’équité

Les régimes de protection posent le problème d’équité. En mettant en place un régime de protection, on
crée deux ensembles de règles de détermination des prix de transfert : dans un cas, il faut se conformer
au principe de pleine concurrence et dans l’autre, à des conditions différentes et plus simples.

Il peut arriver que deux contribuables présentant de grandes similitudes et éventuellement concurrents
se situent de part et d’autre du seuil ouvrant droit au régime de protection et soient donc soumis à un
traitement fiscal différent : l’un se conformera aux règles édictées par le régime de protection et sera
138

exempté du respect des obligations de droit commun. L’autre sera contraint de se conformer au
principe de pleine concurrence. Ceci crée donc une discrimination et fausse le jeu de la concurrence.

2-3-4Conclusion sur les régimes de protection

Les régimes de protection soulèvent des problèmes fondamentaux. En effet, ils risquent d’avoir des
effets négatifs sur la fixation des prix de transfert, par les entreprises effectuant des transactions avec
des entreprises associées.

Ils peuvent impacter également les recettes fiscales du pays qui les met en place et des pays dans
lesquels les entreprises associées réalisent des transactions avec des contribuables ayant opté pour un
régime de protection.

De plus, ces régimes de protection ne sont pas, généralement, conformes au principe de pleine
concurrence.
Quant aux avantages que présentent ces régimes, ils ont trait à la certitude et la simplicité pour le
contribuable et l’allégement de la charge administrative pour l’administration fiscale.

2-4Les accords préalables, en matière de prix de transfert

2-4-1Définition

Un accord préalable, en matière de prix de transfert « APP » est un accord qui fixe, préalablement à des
transactions entre entreprises associées, un ensemble approprié de critères, pour la détermination des
63
prix de transfert appliqués à ces transactions au cours d’une certaine période .

La procédure d’APP est engagée à l’initiative du contribuable. Elle suppose des négociations entre le
contribuable, une ou plusieurs entreprises associées et une ou plusieurs administrations fiscales.

63
Rapport OCDE paragraphe 4.124
139

L’objectif de l’APP est bien évidemment de réduire ou de résoudre préventivement les difficultés
rencontrées par les entreprises multinationales pour la détermination de leurs prix de transfert.

L’APP régira la détermination des prix de transfert du contribuable sur un certain nombre d’années.

La démarche bilatérale ou multilatérale permet de réduire le risque de double imposition.

Elle est équitable pour l’ensemble des administrations fiscales et offre plus de certitude aux
contribuables.

La coopération des entreprises associées est vitale pour l’aboutissement d’un APP. En effet, elles
doivent fournir des documents étayant leurs propositions, par exemple, des données concernant le
secteur, les marchés. Elles peuvent identifier des transactions sur le marché libre qui sont comparables
ou similaires à leurs transactions, effectuer une analyse fonctionnelle etc.
Un APP peut porter sur l’ensemble des prix de transfert du contribuable ou laisser au contribuable la
possibilité de limiter sa demande d’APP à des filiales ou des transactions déterminées.

L’APP ne s’applique qu’aux exercices et aux transactions futurs.

L’administration fiscale, partie à l’APP, veillera au respect des dispositions de l’APP. Pour cela, elle
pourra :

• soit exiger du contribuable un rapport annuel faisant état de la conformité de ses prix de
transfert aux conditions prévues dans l’APP et montrant la validité des hypothèses de base ;

• soit examiner la situation du contribuable, dans le cadre de ses vérifications régulières.

L’APP doit pouvoir faire l’objet d’annulation, en cas de fraude ou de dénaturation d’informations, au
cours des négociations, ou en cas d’inobservation par le contribuable des conditions prévues dans
l’APP.
140

2-4-2Le fondement juridique de l’APP

64
Selon le rapport OCDE , un APP qui fait intervenir l’autorité compétente d’un Etat contractant relève
de la procédure amiable de l’article 25 du modèle de convention fiscale de l’OCDE, bien qu’il ne soit
pas expressément visé.

Le paragraphe 3 du modèle de convention dispose que les autorités compétentes « s’efforcent, par voie
d’accord amiable, de résoudre les difficultés ou de dissiper les doutes auxquels peuvent donner lieu
l’interprétation ou l’application de la convention ».

Le paragraphe 32 des commentaires reconnaît expressément que ces difficultés ont pu être soulevées, à
l’occasion d’un cas particulier. Souvent, si un APP a été mis en place, c’est parce que l’application des
règles en matière de prix de transfert à une catégorie particulière de contribuables soulève des
difficultés.

L’article 25 du modèle de convention précise que les autorités compétentes peuvent se concerter, en
vue d’éliminer la double imposition, dans les cas non prévus par la convention.

Un APP doit pouvoir relever de cette disposition car un des objectifs de l’APP, c’est l’élimination de la
double imposition.

L’article 26 du modèle de convention OCDE, relatif à l’échange de renseignements, peut faciliter la


mise en place d’APP, en instaurant une coopération entre les autorités compétentes, sous la forme
d’échange de renseignements.

Certains pays ne peuvent pas, en vertu de leur droit interne, conclure des APP. Toutefois, lorsqu’une
convention fiscale comporte une disposition relative à la procédure amiable similaire à l’article 25 du
modèle de convention OCDE, les autorités compétentes devraient être habilitées à conclure un APP, si
les problèmes que posent les prix de transfert sont susceptibles d’engendrer une double imposition ou
soulever des doutes quant à l’interprétation de la convention.

64
Rapport OCDE paragraphe 4.140
141

Les conventions fiscales primant sur le droit interne, l’absence de base juridique en droit interne pour la
conclusion d’un APP n’empêcheront pas l’application d’un APP, au titre de la procédure amiable.

2-4-3Les avantages offerts par les APP

Un APP élimine l’incertitude liée au régime fiscal des transactions internationales. L’APP constitue,
pour les contribuables, un facteur de sécurité juridique pour les opérations régies par l’APP et ce, pour
une période fixée à l’avance. Ceci permet aux contribuables concernés de mieux prévoir leurs charges
fiscales.

La conclusion d’un APP favorise la coopération et la concertation entre le contribuable et


l’administration fiscale. Elle permet également à l’administration fiscale de mieux comprendre
certaines opérations internationales complexes auxquelles se livrent les entreprises multinationales.

L’APP évite, souvent, aux contribuables et aux administrations fiscales les vérifications et les actions
en justice longues et coûteuses auxquelles peuvent donner lieu les prix de transfert.

Un APP réduit ou élimine la double imposition dès lors que tous les Etats participent au processus.

2-4-4Les inconvénients des APP

La procédure de mise en place d’un APP est longue.

Un APP peut présenter un inconvénient s’il repose sur des prévisions concernant le marché qui ne sont
pas fiables. La fiabilité d’une prévision dans un APP est fonction à la fois de la nature de cette
prévision et des hypothèses sur lesquelles elle repose. A titre d’exemple, il ne serait pas raisonnable de
considérer que dans des conditions de pleine concurrence, le taux d’emprunt à court terme restera égal
à six pour cent les trois années suivantes. Une prévision plus plausible serait d’indexer ce taux sur le
LIBOR, par exemple.

Un APP permet à l’administration fiscale d’examiner les opérations en cause de façon plus approfondie
qu’en cas de contrôle fiscal. Le contribuable devra fournir des renseignements détaillés sur la fixation
142

de ses prix de transfert et se conformer à toute obligation que l’administration fiscale lui imposera pour
s’assurer des conditions fixées par l’APP. Mais, il n’est pas à l’abri des vérifications normales
auxquelles l’administration peut procéder.

L’administration fiscale peut faire usage abusif des renseignements obtenus lors d’un APP. Si le
contribuable retire sa demande d’APP ou si celle-ci est rejetée après instruction du dossier, les
renseignements fournis risquent d’être utilisés à des fins de vérification. Une demande infructueuse
d’APP peut même déclencher un contrôle fiscal.

Pour s’assurer de bonnes chances de réussite, la société qui envisage de solliciter le bénéfice d’un APP
peut avoir recours aux services de son expert-comptable conseil pour préparer et/ou présenter le dossier
d’APP, auprès de l’administration fiscale.

2-4-5 La pratique de l’APP65

Il y a lieu de noter tout d’abord qu’à travers les échanges que nous avons eus avec la direction de
la législation et de la coopération internationale, au sein de l’administration fiscale marocaine,
nous avons noté que cette dernière n’excluait pas l’institution d’une procédure d’accord
préalable, sur les prix de transfert, au Maroc.

Aux Etats-Unis, l’un des domaines qui a le plus évolué, en matière de prix de transfert, est celui des
APP, en anglais APA, « Advance Pricing Agreements ». Aux Etats-Unis, le dispositif d’APA a été
instauré en 1991. L’administration fiscale (Internal Revenue Service ou IRS) a publié un rapport
général sur les modalités et les résultats de l’application de la législation américaine sur les prix de
transfert. Ce rapport a confirmé le progrès effectué dans le domaine des APA par les Etats-Unis mais
aussi par l’Australie, le Canada, le Japon et le Royaume Uni qui ont également mis en place une
procédure d’accord préalable au début des années 1990.

65
Article « Accords préalables sur les prix de transfert – La France doit encore faire ses preuves Editions Francis Lefebvre Février 2000
143

Le Royaume Uni, après avoir légalisé le principe de l’accord préalable dans la loi de finances pour
l’année 1999, a publié une instruction administrative précisant les règles applicables en matière d’APP,
le 31 Août 1999. Pour la rédaction de cette instruction, l’Inland Revenue a consulté l’IRS.

Le Japon dont la procédure d’APP, préalablement dénommée PCS « Pre-confirmation System » est la
plus ancienne (elle existe depuis 1987), a publié le 25 Octobre 1999, une nouvelle circulaire
administrative modifiant les règles en vigueur afin de les rapprocher du modèle américain.

Etats-Unis, Canada, Royaume Uni, Japon mais aussi Espagne (qui a adopté une loi prévoyant de tels
accords en 1995), ont représenté une contrainte extérieure qui a constitué l’un des motifs principaux
ayant conduit la France à accepter, à son tour, de négocier des APP.

66
Dans une enquête publiée dans Tax Notes International , suite à une étude réalisée par Ernst & Young,
environ 12% des personnes interrogées, appartenant toutes à des firmes internationales en Europe, aux
Etats-Unis et au Canada, ont déclaré avoir eu recours à une procédure d’accord préalable en matière de
prix de transfert et 11%, une procédure amiable conventionnelle, essentiellement aux Etats-Unis, au
Royaume Uni et au Japon.

Il ressort de l’étude précitée que les craintes liées à la complexité, à la longueur et au coût de la
procédure restent présentes, même si une majorité de sociétés multinationales ont déclaré qu’elles
prendraient en compte la possibilité de demander un accord préalable (environ 45% des personnes
interrogées, contre 39% n’en ayant pas l’intention).

L’objet de l’APP : une méthode de fixation des prix pour une ou plusieurs transactions

Selon l’administration française, l’accord porte sur la méthode à retenir et non sur la fixation en tant
que telle de prix de transfert au sein du groupe multinational.

66
Etude publiée le 15.11.99
144

Cette formulation est similaire à celle retenue par les Etats-Unis. Il va de soi que l’APP ne peut pas
porter sur des niveaux de prix par nature fluctuants. Si l’APP porte sur la seule méthode, il fait
cependant explicitement référence au pourcentage ou au mode de répartition de la marge
transactionnelle selon que l’entreprise établit que la méthode la mieux appropriée pour établir ses prix
de transfert est la méthode du cost plus, du prix de revente ou de la mage transactionnelle.

Outre le choix de la méthode, le contribuable doit également indiquer les hypothèses et les modalités
retenues pour l’adapter à l’évolution du contexte économique ou opérationnel.

En France, l’APP peut porter soit sur l’ensemble des transactions entre les entreprises liées soit, à la
demande du contribuable, ne concerner qu’un segment d’activité, une fonction, voire un seul produit ou
type de transaction.

Cependant, une telle restriction ne peut avoir pour objet de dénaturer la demande. L’administration
française comme l’administration Américaine, entend pouvoir étendre le champ de la demande, au vu
des éléments présentés par l’entreprise chaque fois qu’elle le jugera nécessaire. Afin de préserver
l’assiette fiscale propre à leur Etat, il est naturel que les administrations fiscales cherchent à éviter que
l’APP ne soit, en lui-même, une source d’évasion fiscale.

Aux Etats-Unis, les APP s’appliquent aux transactions internationales aboutissant à un partage ou une
répartition de revenus, déductions, crédits, ou réductions d’impôts. Pour sa part, l’administration
japonaise évoque, sans plus de précision, les transactions transfrontalières entre sociétés.
En Espagne, les demandes d’accord préalable peuvent viser quatre thèmes cités précisément dans le
décret royal de 1997 qui sont la valorisation des transactions intra-groupes, la répartition des dépenses
de recherche et développement, la répartition des management fees et l’application d’un ratio de sous-
capitalisation dérogeant à celui fixé par la loi. En pratique, la plupart des accords en cours concernent
la valorisation des transactions intra-groupes.

Au Royaume Uni, les demandes peuvent porter sur deux thèmes généraux, le premier concerne la
détermination des prix de marché dans les prix de transfert entre deux entités distinctes et le second
concerne la détermination du revenu imposable d’une entreprise exerçant son activité dans plusieurs
145

pays. En tout état de cause, l’Inland Revenue a indiqué qu’elle ne donnerait suite qu’aux demandes
présentant des cas complexes et concernant un nombre et/ou des montants significatifs de transactions
pour lesquelles il existe un doute sérieux sur le principe du prix de marché.

Un enjeu essentiel de la procédure : la documentation transmise

Dans le cadre de la procédure française d’accord préalable, le contribuable voit désormais peser sur lui
l’obligation de fournir à l’administration tout type d’information de nature à permettre à cette dernière
d’apprécier pleinement sa situation.

La lecture des annexes 1- Documents à présenter à l’appui de la demande et 2- Justification de la


méthode retenue par le contribuable pour la détermination de ses prix de transfert atteste de l’étendue
que l’administration fiscale souhaite donner à son champ d’application.

Deux types d’informations peuvent être demandés à l’entreprise, lors de la présentation de sa


demande : des informations à caractère général et des informations spécifiques relatives à la
méthodologie choisie par l’entreprise.

En outre, après la conclusion de l’agrément, l’entreprise doit présenter à l’administration fiscale


française un rapport annuel sur l’application effective de la méthode choisie et des termes de l’accord,
sous peine de résiliation de l’accord.

Cette obligation existe également aux Etats-Unis ainsi qu’au Japon où les informations exigées sont
particulièrement détaillées (données sectorielles concernant les parties à l’accord qui sont en relation
avec l’étranger, notamment).

Au Royaume Uni, il y a également l’obligation de remettre, pendant la durée d’application de l’accord,


un rapport préalable un rapport de suivi et l’accord lui-même indiquera les hypothèses essentielles qui
le rendraient non applicable.
146

En Espagne, un rapport détaillé est également prévu et doit être fourni en même temps que la
déclaration d’impôt.
En fin de compte, la procédure impliquera, pour le contribuable, une somme de travail et de recherche
d'informations , excédant probablement largement celle qui serait la sienne dans le cadre d’une
vérification d’une comptabilité ou d’un contentieux portant sur sa politique de prix de transfert.

Le délai de négociation des APP : des durées variables

Pour ce qui est du délai de négociation des APP, en France, les délais d’instruction méritaient d’être
précisés. Si l’administration fiscale ne manque pas de rappeler que toute demande d’APP doit être
introduite six mois avant l’ouverture de l’exercice au titre duquel il pourrait s’appliquer pour la
première fois, elle ne fixe, en revanche, aucun délai d’obtention ou de refus de l’APP.

Aux Etats-Unis, le responsable de l’équipe chargée d’instruire la demande prépare un planning avec le
représentant de l’entreprise. La première réunion doit avoir lieu dans les soixante jours de la demande
mais comme en France, il n’y a pas d’autres délais.

Le Royaume uni se démarque sur ce point. L’instruction britannique prévoit non seulement un délai
fixé à 18 mois, à compter de l’introduction de la demande mais également un calendrier précis du
déroulement de la procédure.

En Espagne, un délai de 6 mois a été fixé pour parvenir à un accord. Si aucun accord n’est obtenu dans
ce délai, la proposition est présumée être rejetée. S’il a le mérite d’être court, nul doute que ce délai
sera difficilement respecté dans le cadre d’accords bilatéraux.

L’APP : Un accord limité dans le temps

En France, l’APP est conclu pour une durée allant de 3 à 5 ans.

La durée est identique en Grande Bretagne.


147

Aux Etats-Unis, c’est au contribuable de proposer un terme qui tienne compte de considérations
propres à son industrie et à ses produits.
En Espagne, l’accord est conclu pour trois ans.

Effet rétroactif de l’APP

L’APP ne peut pas avoir d’effet rétroactif, en France.


La rétroactivité est possible au Royaume Uni, mais elle sera examinée si elle apparaît nécessaire.

Aux Etats-Unis, la rétroactivité, bien que possible, est exceptionnelle. Elle reste à la discrétion de
l’administration Américaine.

En Espagne, la possibilité d’appliquer l’accord de manière rétroactive n’est pas prévue.


148

CONCLUSION
149

Il n’existe pas, au Maroc, comme dans beaucoup d’autres pays, de droit spécifique des groupes.
Chacune des sociétés appartenant à un groupe conserve sa personnalité juridique et sa personnalité
fiscale, même s’il s’agit d’une filiale à 100%, sous l’entière dépendance économique et financière de la
société mère. Celle-ci a pris le choix et le risque de créer un nouveau sujet de droit juridiquement
indépendant. Si elle a décidé de doter l’univers juridique d’un être nouveau, elle doit respecter sa
personnalité, même si la fille ne vit que par la mère. Les transactions entre la mère et la fille ou entre
les sœurs ne sont pas interdites mais elles doivent se faire à des conditions normales. L’appartenance à
67
un groupe, n’a pas, comme le souligne Maurice Cozian , « cette vertu magique que de transformer le
68
mal en bien, les conditions anormales en conditions normales et le prix anormal en prix normal ».
69
Aussi, les relations entre les sociétés d’un même groupe doivent-elles respecter ce que Jérôme Tutrot
appelle la règle de « l’égoïsme sacré ».

Les administrations fiscales ont une inclination naturelle à ne voir que les entités situées sur leur
territoire et à vouloir les traiter isolément, sans prendre particulièrement en compte le fait qu’elles
s’insèrent dans un groupe plus vaste qui peut avoir un intérêt propre. Cette approche est légitime et
naturelle dès lors qu’il existe des frontières entre les Etats et qu’il n’est donc pas indifférent que l’impôt
soit payé dans tel Etat ou dans tel autre. Mais, elle complique, bien entendu, la vie des groupes, car
ceux-ci doivent se placer dans une situation qui n’est pas la leur, sur le plan économique et se
demander, en permanence, si les transactions effectuées en leur sein sont « normales » ou non.

Un équilibre est donc à trouver entre le souci, pour les vérificateurs, de sanctionner des pratiques
répréhensibles par la loi et la volonté des groupes de se développer internationalement.

L’exercice de fixation des prix de transfert est international. Il est nécessaire de se renseigner sur les
droits et pratiques des Etats où les sociétés sont situées afin d’élaborer et mettre en place une politique
et une documentation acceptables localement.

Dans la pratique des prix de transfert au sein des groupes internationaux, le risque fiscal est
omniprésent. Chaque Etat est partagé entre réduire la fraude sur son territoire et attirer les capitaux et

67
Professeur de droit à l’université de Bourgogne-France
68
Article intitulé « les transactions intra-groupe : le principe des transactions à prix normal »
69
Maître des requêtes au conseil d’Etat français
150

les entreprises susceptibles d’investir et de s’installer. Parallèlement, les législations tendent à protéger
les petits investisseurs et les salariés contre les agissements abusifs de certains groupes. Enfin, les
organisations internationales réfléchissent à une reconnaissance de l’existence des groupes et à la mise
en place de règles particulières, visant à protéger les intérêts des minoritaires, des salariés et des
créanciers.

Il est aujourd’hui de la responsabilité des professionnels experts-comptables de sensibiliser leurs


clients aux risques liés à la répression fiscale des transferts indirects de bénéfices à l’étranger. La
pression croissante de l’administration fiscale dans sa quête à sanctionner lesdits transferts fait peu à
peu prendre conscience aux dirigeants des entreprises liées avec l’international des enjeux importants
de la problématique. Certains choisiront de mettre en place, au sein de leur direction fiscale ou
financière, une fonction dédiée à la gestion des prix de transfert. Grâce à cette fonction interne, le
groupe multinational pourra notamment établir, en amont de tout contrôle fiscal, une documentation
spécifique destinée à justifier la politique de prix de transfert suivie par les sociétés du groupe.
D’autres seront intéressés par la mise en place d’accords préalables sur les prix de transfert avec les
administrations fiscales, afin de sécuriser le traitement fiscal de certaines transactions.

A l’heure où l’essentiel des travaux d’expertise comptable se résume en des missions d’établissement
de comptes annuels, de déclarations fiscales et de commissariat aux comptes, cette perspective de
missions laisse entrevoir la possibilité de renouer avec des domaines de compétence de l’expert-
comptable si peu exploités, en général, tels que l’analyse financière, les études organisationnelles, le
contrôle de gestion etc.

Le regain d’intérêt actuel de l’administration fiscale et des entreprises pour les prix de transfert met en
avant le rôle du commissaire aux comptes dans ce domaine. Celui-ci doit non seulement certifier les
comptes de la société (donc indirectement porter un jugement sur le niveau des prix de transfert et des
risques qu’ils engendrent) mais également porter à la connaissance de l’assemblée générale les
conventions réglementées et enfin, se prononcer sur le respect de l’égalité entre les actionnaires.
L’intervention du commissaire aux comptes, par rapport aux prix de transfert, fera l’objet d’un autre
mémoire d’expertise comptable.
151

Si la compréhension des textes fiscaux paraît à priori simple, leur interprétation et leur compatibilité
avec un droit hiérarchiquement supérieur peut, la plupart du temps, faire l’objet de débats houleux, à
l’image de ce qu’on peut lire actuellement sur la définition de l’établissement stable par l’OCDE, le
régime fiscal des moyens modernes de communication etc.

En vertu des dispositions de l’article 7 de la convention modèle OCDE, le résident d’un Etat
contractant qui exploite une entreprise, par l’intermédiaire d’un établissement stable dans l’autre Etat
n’est assujetti à l’impôt dans cet Etat que sur les bénéfices attribuables à l’établissement stable. A cette
fin, le paragraphe 7-2 exige que l’établissement stable soit considéré comme une entité distincte qui
traite de façon indépendante avec l’entreprise dont il fait partie. De cette façon, les règles sur les prix de
transfert, prévues par l’article 9 du modèle de convention OCDE sont applicables aux fins du calcul des
bénéfices attribuables à l’établissement stable. Nous nous posons la question de savoir comment les
principes en matière de prix de transfert de l’OCDE, qui visent les opérations entre parties liées aux
fins de l’article 9 de la convention modèle OCDE, peuvent s’appliquer aux établissements stables
puisque, légalement, il n’y a pas d’opérations entre un établissement stable et une autre partie de
l’entreprise.

En février 2001, l’OCDE a rendu public un document de travail sur l’imputation des bénéfices aux
établissements stables en vue d’arriver à un consensus parmi les pays membres de l’OCDE. Le
document propose une hypothèse de travail visant l’attribution des bénéfices aux établissements
stables, en vertu de l’article 7, à savoir que les principes directeurs applicables en matière de prix de
transfert devraient, dans toute la mesure du possible s’appliquer aux établissements stables, si on fait
une analogie entre établissements stables et entités légales distinctes.

Le commerce électronique pose, quant à lui, des problèmes de prix de transfert, compte tenu des
circonstances dans lesquelles il s’opère : fonctions hautement intégrées et spécialisées, et souvent
dématérialisées. Les principales difficultés liées à l’application des principes OCDE sur les prix de
transfert au commerce électronique ont trait à la détermination d’une transaction du côté de
l’entreprise vérifiée, l’identification des parties à la relation contractuelle et de la transaction elle-
même, à la détermination de comparables sur le marché, à la documentation, à l’analyse fonctionnelle.
152

C’est sur le terrain de la preuve que le commerce électronique pose de sérieuses difficultés, en matière
de prix de transfert.

La problématique des facturations intragroupe touche également les groupes nationaux, depuis la
promulgation du livre des procédures fiscales. En effet, l’article 4 dudit livre, entré en application
depuis le 1er janvier 2005, sanctionne les transferts indirects de bénéfices entre sociétés situées au
Maroc, ayant des liens de dépendance directe ou indirecte entre elles. La nouvelle disposition soulève
de nombreuses questions et peut faire l’objet d’un autre thème de mémoire.
153

BIBLIOGRAPHIE

1-Ouvrages

Principes applicables en matière de prix de transfert à l’intention des entreprises multinationales et


des administrations fiscales
OCDE 2001

Les prix de transfert - Les concepts et la pratique, les lois françaises, américaines et internationales
De Patrick Rassat et Gianmarco Monsellato.
Edition MAXIMA 1998

Les impôts dans les affaires internationales


De Bruno Gouthière
Pages 200 à 247
Pages 823 à 869
Pages 947 à 972
Editions Francis Lefebvre 2004
Mémento fiscal Francis Lefebvre 2004

2- Mémoires d’expertise comptable / France

La problématique fiscale des prix de transfert : Application à un groupe du secteur de l’industrie


pharmaceutique
Banck Christelle – Novembre 2003

Mise en œuvre d’une politique de prix de transfert entre La France et La Suisse : Application à la
vente de logiciels et aux prestations associées
Gry Emmanuel – Mai 2001

Les prix de transfert : Risques et opportunités pour les entreprises et la profession


Olivier Ayache – Novembre 1998

La politique des prix de transfert : enjeux et place de l’expert-comptable


Hernandez Miguel Angel – Mai 2002

Contrôle des prix de transfert : Application pratique à une filiale française d’un groupe américain
Florence Porte – 1997
154

3- Mémoire de DESS de droit fiscal et douanier/France

Lorant Goossens / Année 1997-1998


Faculté des Sciences Economiques et de Gestion de Rouen.

4- Mémoires d’expertise comptable - Maroc

Problématique juridique et fiscale des conventions réglementées et démarche d’audit


Fatima Erradi- Novembre 2002

Mesures d’adaptation de la fiscalité marocaine à la pratique du Commerce Electronique


Sophia Guessous – Novembre 2003

5- Lois et Circulaires d’application marocaines

o Loi relative à l’impôt sur les sociétés


o Loi relative à la taxe sur la valeur ajoutée
o Circulaires d’application de la loi relative à l’IS
er
o Circulaire d’application de la loi de finances pour la période allant du 1 juillet au 31 Décembre
2000

6- Lois et Circulaires d’application étrangères

o Code Général des Impôts CGI français


o Livre des procédures fiscales français
o Circulaire de l’administration fiscale française, en date du 04.05.1973, prise pour l’application
des dispositions de l’article 57 du CGI
o Circulaire de l’administration fiscale française, en date du 07.09.99, relative aux accords
préalables
o Circulaire de l’administration fiscale française du 23 juillet 1998 relative aux informations et
documentation que peut demander l’administration fiscale française
o Circulaire d’information de l’administration fiscale canadienne, en date du 27.09.99, relative
aux prix de transfert, prise pour l’application de l’article 247 de la loi canadienne de l’impôt sur
le revenu

7- Publications professionnelles – Articles de presse

Document OCDE
Améliorer le processus de résolution des différends fiscaux internationaux
Version publiée le 27.07.04
Centre de politique et d’administrations fiscales
155

Rapport explicatif du conseil de l’Europe concernant l’assistance administrative mutuelle en matière


fiscale

Les prix de transfert


Robert Turner, C.A
Ernst & Young, Toronto
Décembre 1996

Document de travail rédigé pour le comité technique de la fiscalité des entreprises


Rapport du secrétaire général du conseil économique et social des nations Unies
Dixième réunion du groupe spécial d’experts sur la coopération internationale en matière fiscale
Questions relatives à l’économie et à l’environnement : coopération internationale en matière fiscale
Session de fond de 2002

Développer le dialogue international sur la fiscalité


13 Mars 2002
Memorandum of understanding on the Establishment and Operation of the International Tax Dialogue
ère
Prix de transfert : comment préparer son contrôle fiscal ? 1 partie
Par Pierre-Jean Douvier et Bruno
Gilbert, avocats Associés de CMS
Bureau Francis Lefebvre, département international
Revue option Finance N°738 du 26 Mai 2003

Prix de transfert : comment préparer son contrôle fiscal ? 2ième partie


Par Pierre-Jean Douvier et Bruno
Gilbert, avocats Associés de CMS
Bureau Francis Lefebvre, département international
Revue option Finance N°739 du 03 Juin 2003

Prix de transfert : les vérifications fiscales ont évolué


Par Pierre-Jean Douvier et Bruno
Gilbert, avocats Associés de CMS
Bureau Francis Lefebvre, département international
Revue option Finances N°821 du 14 Février 2005

Contentieux en matière de prix de transfert : quelles leçons faut-il tirer de la jurisprudence ?


Hervé Israel et Thomas Bouhours, Avocats Lovells
Revue de droit fiscal N°9 du 03.03.2005

Les dispositions françaises tendant au contrôle des prix de transfert (CGI, Art 57 et LPF art L13B),
sont-elles Euro-compatibles ?
Michel Taly, Avocat Landwell et Associés et Pascal
Schielle, Avocat à la cour, Landwell et Associés
Revue de droit fiscal N°29 Année 2003
156

Les méthodes de détermination des prix de transfert : critères de choix et modalités d’application
Par Pierre Escault, Avocat Landwell et Associés
Revue de droit fiscal N°3 du 15.01.2004

Comment se protéger des redressements fiscaux sur les prix de transfert ?


Par Pascal Luquet, directeur associé et Sébastien Gonnet,
Consultant prix de transfert, Fidal Direction internationale
Revue option finance N°782 du 26.04.2004

Trente mesures pour améliorer les relations entre les contribuables et l’administration fiscale
Conférence de presse de Nicolas Sarkozy,
Ministre d’Etat, Ministre de l’économie, des finances et de l’industrie
Bercy, le 3 Novembre 2004

Etablissement stable et prix de transfert : deux faces d’un même miroir


? Par Stéphane Gélin et Arnaud Le Boulanger CMS Bureau Francis
Lefebvre Bulletin Francis Lefebvre Octobre 2004

Régler les différends fiscaux internationaux


Par Jeffrey Owens
Le nouvel observateur Juillet 2004

Prix de transfert : le principe de pleine concurrence


Par John Neighbour, centre de politique et d’administration
Fiscales de l’OCDE – Mars 2002

Approche du règlement des litiges en matière de prix de transfert


Par Noureddine Bensouda, Directeur des impôts
5 juillet 2001

Prix de transfert : du principe de pleine concurrence à l’analyse de la valeur de l’entreprise


Par Stephane Gélin et Harnaud Le Boulanger Ernst &Young
Revue de droit fiscal N°48 Année 2001

Accords préalables sur les prix de transfert : la France doit encore faire ses preuves
Par agnès de l’Estoile-campi, Jean Christophe Sausey et Pierre Sebastien
Francis Lefebvre Paris
Fréderic Gerner et Edouard Mi Francis Lefebvre New York
Bulletin Francis Lefebvre Février 2000

L’extension des prérogatives de l’administration fiscale dans le contrôle des opérations


internationales
Par Patrick Dibout, Avocat à la cour
Revue de droit fiscal N°18-19 1996
157

La fixation des prix de transfert en matière de biens incorporels et de services intragroupe (fonctions
et documentation)
Par Pierre-Jean Douvier
Bulletin Francis Lefebvre
12/96

Les transactions intra-groupe : le principe des transactions à prix normal


Par Maurice Cozian
Bulletin Francis Lefebvre Mars 1996

Une nouvelle bataille économique : les prix de transfert (les principes directeurs de juillet 1995)
Par Pierre-Jean Douvier Avocat
Bulletin Francis Lefebvre Décembre 1995

Le régime fiscal des moyens modernes de communication : Cyberspace (« le net ») et commerce


électronique
Par Pierre-Jean Douvier et Philippe Bozzacchi – Avocats spécialisés en Droit fiscal
Bulletin Francis Lefebvre Mai 1998

Les prix de transfert dans le collimateur du Fisc


L’économiste – 10 Mai 2004

Face au fisc : Les voies de recours


Prix de transfert : Prouvez-moi la dépendance !
L’économiste 10 Octobre 2005

7- E-conference

Prix de transfert : détermination du prix de pleine concurrence selon la nature des opérations de
l’entreprise.
Xavier Daluzeau- Avocat fiscaliste
CMS Bureau Francis Lefebvre

8- Sites internet

Site Internet du Ministère des finances : www.finance.gov.ma

Site Internet de l’OCDE : www.oecd.org/daf/fa_price/tr_price/trans_fr.htm


158

ANNEXES

Annexe 1 : Article 9 du modèle de convention OCDE

Annexe 2 : Commentaires de l’OCDE sur l’article 9

Annexe 3 : Tableau récapitulant les dispositions contenues dans les conventions fiscales conclues par le
Maroc, équivalentes à l’article 9 du mode convention OCDE

Annexe 4 : Circulaire de l’administration fiscale française, en date du 04.05.1973, prise pour


l’application des dispositions de l’article 57 du CGI

Annexe 5 : Article L238A du CGI (France)

Annexe 6 : Article L13B du livre des procédures fiscales (France)

Annexe 7 : Article L188A du livre des procédures fiscales (France)

Annexe 8 : Circulaire de l’administration fiscale française, en date du 07.09.99, relative aux accords
préalables

Annexe 9 : Article L80B du livre des procédures fiscales (France)

Annexe 10 : Article 25 du modèle de convention OCDE

Annexe 11 : Commentaires de l’OCDE sur l’article 25

Annexe 12 : Article 26 du modèle de convention OCDE

Annexe 13 : Commentaires de l’OCDE sur l’article 26

Annexe 14 : La convention Européenne d’arbitrage

Annexe 15 : L’accord modèle OCDE relatif aux contrôles fiscaux simultanés

Annexe 16 : La convention concernant l’assistance administrative mutuelle en matière fiscale

Annexe 17 : Arrangement administratif entre la Belgique et l’Italie, en vue d’effectuer des contrôles
fiscaux simultanés

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