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Économies d’agglomération
et productivité des entreprises : estimation
sur données individuelles françaises
Yoann Barbesol* et Anthony Briant**
* Insee, Dese/DEEE/MSE, 15, Boulevard Gabriel-Péri BP100 92244 Malakoff Cedex, yoann.barbesol@insee.fr
** École d’Économie de Paris / Paris-Jourdan Sciences Économiques (UMR 8545 CNRS-EHESS-ENPC-ENS),
48 Boulevard Jourdan, 75014 Paris, France, anthony.briant@m4x.org
Nous remercions Pierre-Philippe Combes, Laurent Gobillon, Simon Quantin et Sébastien Roux pour leurs conseils
et commentaires, ainsi que Pauline Givord, Anne Epaulard et deux rapporteurs anonymes pour leur lecture attentive
d’une première version de cet article. Anthony Briant remercie les membres du Département des Études Économiques
d’Ensemble pour leur accueil durant la rédaction de cet article. Nous remercions également les participants au sémi-
naire D3E du 10 décembre 2007 ainsi que ceux du séminaire Fourgeaud du 8 avril 2009 pour leurs remarques et com-
mentaires, et plus particulièrement Miren Lafourcade pour avoir accepté de discuter une première version de cet article
et Pierre Joly, rapporteur du séminaire Fourgeaud. Nous avons en outre bénéficié du travail de Sébastien Roux et de
Simon Quantin pour la construction de la base de données appariée utilisée dans l’article : nous les remercions pour
nous avoir aidés à comprendre comment les variables de cette base ont été construites.
L es fondements microéconomiques de
l’agglomération des entreprises et des tra-
vailleurs sont multiples (3). Depuis les travaux
Si l’existence de bénéfices à l’agglomération des
activités économiques est bien établie sur le plan
théorique, la mesure empirique de leur ampleur
d’Alfred Marshall (1890), il est coutume de est plus délicate. Un tel travail empirique se
penser que l’agglomération permet de réduire heurte d’abord à un problème d’identification.
les coûts de déplacement des biens, des person- Il est effectivement difficile à partir d’une seule
nes ou des idées. observable, la productivité des entreprises ou le
salaire des travailleurs, de déterminer lequel des
Dans un marché local plus large, il est possi- mécanismes évoqués plus haut est effectivement
ble pour une entreprise de se procurer une plus à l’œuvre (4).4
grande variété de consommations intermédiai-
res, générant des gains de productivité par une Face à cette difficulté, l’ambition des travaux
plus grande désintégration verticale et une plus empiriques a donc été plus modeste. Les auteurs
grande spécialisation. La disponibilité d’une ont cherché à évaluer l’environnement écono-
plus grande variété de biens de consommation
attire également les consommateurs. Face à des
rendements croissants, les entreprises profitent 1. Cf. Barlet, Briant et Crusson (2008) pour la France, Duranton
et Overman (2005) pour le Royaume-Uni et Ellison et Glaeser
de la présence d’un nombre plus important de (1997) pour les États-Unis par exemple.
consommateurs facilement accessibles. 2. Ellison et Glaeser (1999) estiment qu’au moins 20 % de la
concentration géographique mesurée aux Etats-Unis peut s’ex-
pliquer par la présence d’avantages naturels, à entendre dans un
Dans un bassin d’emploi plus large, les tra- sens large (ressources primaires, coût des facteurs, notamment
travail, peu élevé, etc..).
vailleurs ont tendance à être plus spécialisés et 3. Duranton et Puga (2004) offrent une revue détaillée de la litté-
donc plus productifs : face à un plus grand nom- rature théorique sur ces fondements microéconomiques.
4. Rosenthal et Strange (2004) proposent une revue détaillée
bre de possibilités d’embauche, ils n’hésitent de la littérature sur l’identification et l’estimation des externalités
pas à se spécialiser. Une entreprise a donc plus d’agglomération.
Données
Dans cette étude, nous utilisons la même base sont en effet absents des fichiers DADS, ainsi que des
de données que Combes, Duranton, Gobillon et établissements engagés dans les activités financières
Roux (2008), qui résulte, pour chaque année de ou immobilières, absents eux de la base de données
1994 à 2004, de la fusion de trois fichiers administra- Sirene. Le panel qui en résulte est ensuite fusionné aux
tifs : la base de données Sirene, les fichiers de décla- données fiscales RSI/BRN, qui contiennent eux entre
rations fiscales d’entreprises (RSI/BRN), les fichiers 1,6 et 2 millions d’observations (firmes) par an. Dans
de déclaration de données sociales (DADS) au niveau la base de données issue de ce nouvel appariement
établissement. ont disparu les firmes non soumises à l’impôt sur les
sociétés (coopératives, associations, etc.) qui ne figu-
La base de données Sirene (Système d’Identification rent pas dans les fichiers fiscaux.
du Répertoire des ENtreprises) contiennent les iden-
tifiants des firmes et des établissements (respective- Nous utilisons également les inventaires communaux
ment les codes Siren et Nic), des informations sur leur pour l’année 1998 qui nous fournissent un certain
classification économique (activité principale (APE) nombre d’informations sur les caractéristiques géo-
dans la catégorie NAF), ainsi que des informations graphiques, ainsi que sur les dotations, des commu-
sur la localisation géographique (code géographique). nes françaises.
Le champ du répertoire utilisé pour cette étude est le
champ ICS (Industrie, Commerce et Services). En sont Un certain nombre d’opérations de sélection et de cor-
exclues les activités agricoles, les activités financières rection ont été menées afin d’extraire du fichier brut
et l’administration. issu de l’appariement Sirene-BRN/RSI-DADS, une
base de données propre à l’estimation. Plus précisé-
Les fichiers RSI (Régime Simplifié d’Imposition) et BRN ment, nous construisons deux panels : un panel d’en-
(Bénéfices Régime réel Normal) contiennent les décla- treprises sur lequel sont menées les estimations ; un
rations annuelles de comptes d’entreprise à l’adminis- panel d’établissements servant à définir les différentes
tration fiscale. L’information concernant la production
variables d’agglomération.
et le capital des entreprises est issue de ces fichiers
fiscaux. Nous restreignons cette étude aux entrepri-
ses déclarant des impôts aux titres des bénéfices Traitements initiaux des données
industriels et commerciaux (BIC). Sont donc exclues
les entreprises avec des revenus agricoles (RA) ou Tout d’abord, les observations présentant des valeurs
des bénéfices non commerciaux (BNC). Seules celles aberrantes pour une des variables clés (valeur ajoutée,
remplissant les formulaires du Régime Normal (BRN)
capital, emploi) ont été supprimées. Nous supprimons
ou du Régime Simplifié (RSI) sont présentes. Les plus
également les quelques entreprises hors champs ICS
petites structures payant des impôts sous le régime
(Industrie, Commerce, Services).
allégé sont écartées. Cet ensemble représente près
de 98 % du chiffre d’affaire des entreprises françai- Ensuite, le suivi longitudinal des entreprises est parti-
ses et environ 65 % du nombre total des entreprises
culièrement difficile. Il se peut que des firmes entrent
(données 2003). Les fichiers fiscaux nous permettent
et sortent du panel, sans que cela corresponde à une
de reconstruire le chiffre d’affaire, la valeur ajoutée,
véritable création ou destruction d’entreprise (fusions
le capital ainsi que l’investissement des entreprises.
et acquisitions, changement de localisation géographi-
Rappelons encore que ces données ne sont disponi-
que, etc.). Lorsqu’une firme est observée de manière
bles qu’au niveau de l’entreprise et non pas au niveau
discontinue, nous conservons séparément l’ensemble
de l’établissement.
des périodes continues d’observation. L’identifiant
Les fichiers DADS (Déclarations Annuelles de Données d’une entreprise devient donc son identifiant Siren
Sociales) permettent de reconstituer toutes les infor- couplé à l’année de début de la période d’observation
mations sur l’emploi de chaque établissement (ci-après couple (Siren, début)). Nous disposons ainsi
employant au moins un salarié. Les employeurs sont de 1 773 341 identifiants d’entreprise (Siren), corres-
en effet tenus, annuellement et pour chaque salarié, de pondant à 2 198 714 périodes d’observations différen-
fournir un certain nombre d’informations : le nombre tes, i.e. couples (Siren, début).
de jours travaillés, le nombre d’heures travaillées, sa
rémunération et d’autres caractéristiques personnelles Il se peut en outre qu’une entreprise change de sec-
(sexe, âge, catégorie socioprofessionnelle). Ce fichier teur d’activité principale au cours d’une période d’ob-
a été réorganisé afin de disposer d’informations sur servation continue, Si, sur la période d’observation,
l’emploi au niveau de l’établissement (nombre d’heu- une firme change plus de deux fois de NAF220, nous
res travaillées, masse salariale) par catégorie de qua- la supprimons. Ensuite, pour chacune de ces pério-
lification. des, nous affectons donc chaque firme dans le secteur
où elle est présente le plus longtemps. Il est difficile
La base de données Sirene contient près de 3 millions d’avoir des explications toujours très pertinentes sur
d’établissements chaque année, tandis que le fichier ces changements de secteurs d’activité. Il est certain
DADS regroupe en moyenne 1,6 million d’établisse- qu’une firme est rarement mono-active. Les variations
ments tous les ans. L’appariement des deux conduit dans l’activité déclarée ne sont certainement pas tou-
à l’élimination des établissements sans salariés qui jours dues à un changement drastique dans l’activité
Encadré (suite)
des entreprises, mais plus à un rééquilibrage dans de la période d’observation. En terme économique,
les différentes activités exercées. Nous atteignons là cette sélection est plus dommageable que la sélec-
une des limites de la classification des entreprises tion précédente. Si les entreprises mono-établisse-
par secteur d’activité, limite qu’il nous semble diffi- ment représentent environ 90 % du total des entrepri-
cile de dépasser. Nous disposons alors d’un panel de ses présentes dans l’échantillon, elles ne comptent
2 184 811 couples (Siren, début) (1 762 367 entrepri- que pour 50 à 60 % de l’emploi total et environ 50 %
ses), correspondant à 9 186 699 observations entre- de la valeur ajoutée chaque année. Cette sélection
prise-année. est néanmoins justifiée pour les raisons suivantes.
Les données issues des BRN-RSI ne permettent
pas de calculer une productivité au niveau de l’éta-
Le choix du panel des établissements blissement, dont seules les données d’emploi sont
connues. Les données de production, de capital et
Nous conservons l’ensemble des établissements cor- de consommations intermédiaires ne sont disponi-
respondant à ces 1 762 367 entreprises. Cela repré- bles qu’au niveau de l’entreprise. Or une même entre-
sente 10 646 945 observations établissement-année. prise peut posséder plusieurs établissements, il est
alors impossible de localiser de manière satisfaisante
sa production et son capital. Quel est alors l’environ-
Le choix du panel des entreprises
nement industriel de la firme à considérer ? Celui de
son siège, de son établissement le plus grand ? Ou
Comme nous ne nous intéressons pas aux entrées ou bien une moyenne des environnements auxquels font
sorties de firmes d’un marché, nous ne gardons dans face chacun de ces établissements ? Nous testerons
notre panel que les périodes d’observation supérieures la robustesse de nos résultats à cette sélection (cf.
ou égales à 2 ans consécutifs. De plus, les estimations Tableau 8).
de productivité à la Olley et Pakes (1996) et Levinsohn
et Petrin (2003) nécessitent d’avoir des données retar- La sélection des entreprises mono-établissement per-
dées d’investissement ou de consommations intermé- met de plus d’éviter un écueil dans les données : celui
diaires non disponibles pour les entreprises présentes du dégroupage-regroupage. Pour des soucis de sim-
une année seulement. plicité de déclaration, certaines entreprises pluri-éta-
blissements sont autorisées à ne déclarer l’emploi que
Nous disposons de deux données d’emploi : l’une dans un seul établissement. Dans ce cas, la localisa-
issue des BRN, l’effectif salarié directeur, l’autre des tion géographique de l’emploi des établissements est
DADS, le nombre d’heures totales travaillées dans impossible (ce problème est également susceptible
l’entreprise. La première mesure est peu satisfai- d’influencer le calcul de nos indicateurs d’agglomé-
sante, et parfois sans lien avec les données d’heures ration. Tant que ce problème de dégroupage-regrou-
travaillées. Nous calculons donc un effectif salarié en page est aléatoire dans l’espace, il ne biaise pas nos
équivalent temps plein en divisant le nombre d’heu- résultats). C’est donc pour cette raison que nous
res travaillées par 1650. Cette valeur correspond à la faisons le choix de restreindre notre échantillon aux
moyenne de la durée annuelle de travail des salariés entreprises mono-établissement uniquement. Plus
à temps complet (hors enseignants) calculée à partir précisément, nous nous restreignons aux entreprises
des enquêtes Emploi 2003 et 2004 (Insee, 2006). Les qui restent mono-établissement tout au long de leur
entreprises employant strictement moins de cinq sala- période d’observation. Désormais la localisation des
riés ont été retirées du panel. Ce choix est important, facteurs et de la productivité ne pose plus de difficul-
puisqu’il conduit à la réduction de plus de moitié de la tés particulières.
taille de notre échantillon. Néanmoins, ces entreprises
représentent moins de 10 % de l’emploi total et de Nous ne conservons enfin que 181 secteurs d’activités
la valeur ajoutée chaque année. Ce processus de tri (en NAF220) qui correspondent, pour une année don-
ne vise à éliminer que des données susceptibles de née, à l’activité principale d’au moins 100 firmes. Ces
bruiter nos estimations. Il est nécessaire de rappeler firmes ne sont présentes que dans un petit nombre
que nos indices d’agglomération ont été établis à par- de clusters. Au total, notre base de données contient
tir du panel complet des établissements (entreprises 465 981 firmes, renvoyant à 3 242 626 observations
de moins de 5 salariés comprises). entreprise-année. Ces firmes sont des firmes mono-
établissement, présentes dans la base au moins deux
Nous ne conservons ensuite dans notre panel que les ans consécutivement, ayant un effectif (en équivalent
entreprises qui restent mono-établissement au cours temps plein) supérieur à 5 salariés.
Les variables observables individuelles consi- La littérature a proposé différentes solutions pour
dérées dans la fonction de production sont les corriger ce biais. Nous en retenons deux dans
suivantes : ce qui suit : la méthode d’Olley et Pakes (1996)
(OP) et celle de Levinsohn et Petrin (2003) (LP)
-- le logarithme de la valeur ajoutée vait ; (pour une revue de littérature sur les fonctions
de production et les grandes familles d’estima-
-- l’emploi lit mesuré par le logarithme du nom- teurs les concernant, cf. Ackerberg, Benkard,
bre d’heures travaillées ; Berry et Pakes, 2007).910
-- la part shiqt des heures travaillées par les Ces méthodes sont dites méthodes à indica-
employés de type q (9) ; teurs. Olley et Pakes (1996) et Levinsohn et
Petrin (2003) proposent de trouver des indi-
-- le logarithme du stock de capital kit (10). cateurs (proxies) au choc anticipé de produc-
tivité. Olley et Pakes (1996) supposent que ce
Les coefficients technologiques, i.e. les élastici- choc anticipé de productivité suit un processus
tés de la valeur ajoutée au travail et au capital, de Markov et, qu’à capital donné, il détermine
sont supposés être spécifiques au secteur d’acti- de façon unique le niveau des investissements.
vité de la firme en NAF220. Levinsohn et Petrin (2003) font l’hypothèse
qu’à capital donné, ce choc détermine unique-
L’effet fixe secteur-temps θst nous permet de ment le niveau des consommations intermédiai-
tenir compte de tous les chocs macroéconomi- res. Dans les deux cas, les auteurs utilisent ces
ques sectoriels et non locaux. Il élimine donc relations entre productivité et investissement (ou
de notre mesure de productivité tous les déter-
minants spécifiques au secteur d’activité, et
7. Les secteurs considérés dans cette étude sont ceux de la
notamment les effets de croissance technologi- Nomenclature d’Activité Française à 3 chiffres (224 groupes pour
que différenciés entre secteurs. la NAF 2003), dite NAF220. Le système statistique public dispose
de deux nomenclatures d’activité différentes : la Nomenclature
d’Activité Française (NAF) et la Nomenclature d’Économique de
La productivité de l’entreprise est alors mesu- Synthèse (NES). Cette dernière vise à refléter, autant que possi-
ble, le comportement d’agents confrontés à leur marché, alors
rée par le résidu estimé uit de l’équation que la NAF fait intervenir d’autres critères tels que les spécificités
précédente. techniques de production ou l’organisation en filière de produc-
tion. Il nous semble que la NAF est donc mieux adaptée à l’esti-
mation d’une fonction de production.
8. Les zones d’emploi ont été définies par l’Insee en 1983 (révi-
Corriger du potentiel biais de simultanéité sées en 1994 et 1999). Il s’agit de zones géographiques à l’inté-
rieur desquelles la plupart des actifs travaillent et résident. Leur
contour a donc été déterminé de manière à réduire les migrations
Nous estimons dans un premier temps cette domicile-travail trans-frontalières. La taille moyenne d’une zone
fonction de production par Moindres Carrés d’emploi est de 1 570 km2. La plus petite zone d’emploi (Vitry-
sur-Seine, 45 km2) est environ 140 fois plus petite que la plus
Ordinaires (MCO). Cependant, l’estima- grande zone d’emploi (Toulouse, 6 208 km2).
tion d’une telle fonction de production est 9. Ces catégories, introduites afin de contrôler de la qua-
lité de la main-d’œuvre employée par la firme, sont définies
potentiellement soumise à plusieurs sources au moyen de la Nomenclature des Professions et Catégories
d’erreurs comme le soulignent Griliches et Socioprofessionnelles (CSP). Suivant Burnod et Chenu (2001),
les CSP permettent de regrouper (partiellement) les travailleurs
Mairesse (1995). en fonction de leur niveau de qualification. On définit ainsi trois
catégories de travailleurs : (q = 3) renvoient aux travailleurs très
qualifiés, (q = 2) aux travailleurs qualifiés, enfin (q = 1) rassemble
La simultanéité entre la productivité et le choix les travailleurs non-qualifiés, catégorie prise comme référence
des inputs est très certainement la principale dans notre estimation.
10. Dans notre base de données, cette mesure est la somme
source de biais dans cette première étape. Ce des actifs tangibles et intangibles mesurés au coût historique,
biais est présent s’il existe des déterminants actifs financiers exclus.
Tableau 1
Corrélation entre mesures de productivité sectorielle locale
La productivité TFPzst est évaluée par…
MCO 1
Olley et Pakes 0,83 1
Levinsohn et Petrin 0,92 0,80 1
Effet fixe 0,96 0,79 0,88 1
Lecture : toutes les corrélations sont significatives au seuil de 1 %.
Champ : les seules entreprises mono-établissement de plus de 5 salariés en équivalent temps plein.
Le nombre d’observations est de 242 178.
Source : calculs des auteurs à partir de la base de données résultant, pour chaque année de 1994 à 2004, de la fusion de la base de
données Sirene, des fichiers de déclarations fiscales d’entreprises (RSI/BRN), des fichiers de déclaration de données sociales (DADS)
au niveau établissement (cf. encadré).
Tableau 2
Statistiques descriptives portant sur les logarithmes des productivités sectorielles locales TFPzst
La productivité TFPzst est évaluée par…
75 percentile
e
0,11 0,11 0,12 0,15
Tableau 3
Statistiques descriptives sur les indicateurs d’agglomération
(externalités d’urbanisation et de localisation)
Moyenne Écart-type Minimum 25e percentile Médiane 75e percentile Maximum
Externalités d’urbanisation
Diversité de la zone d’emploi 29,1 8,6 5,7 24,0 30,0 35,3 51,5
(évaluée au niveau NAF220)
Diversité de la zone d’emploi 12,4 2,6 3,9 10,9 12,5 14,2 18,7
(évaluée au niveau NAF60)
Externalités de localisation (évaluées au niveau NAF220)
Dotation locale en qualifications 0,91 0,47 0,00 0,64 0,87 1,10 11,81
Externalités de localisation (évaluées au niveau NAF60)
Tableau 4
Les entreprises sont plus productives dans les zones d’activité économique les plus denses
La productivité TFPzst est évaluée par…
Tableau 5
L’accessibilité au reste du marché national est également un déterminant important
de la productivité des entreprises
La productivité TFPzst est évaluée par…
Tableau 6
L’influence des externalités de localisation
Estimation (A) (B) (C) (D)
Externalités d’urbanisation
Ln Densité en emploizt 0,023*** 0,024*** 0,023*** 0,022***
(0,003) (0,003) (0,003) (0,004)
Ln Superficiez 0,019*** 0,021*** 0,02*** 0,018***
(0,003) (0,003) (0,003) (0,004)
Ln Potentiel marchandzt 0,018** 0,012 0,013 0,012
(0,008) (0,009) (0,009) (0,009)
Ln Diversité de la zone d’emploizt - 0,012** - 0,012** - 0,012** - 0,012**
(0,005) (0,005) (0,005) (0,005)
Externalités de localisation
Ln Spécialisationzst 0,021*** 0,021*** 0,02***
(0,002) (0,002) (0,003)
Ln Dotation locale en qualificationszst 0,007*** 0,007***
(0,002) (0,002)
Ln Nombre d’établissementszst 0,002
(0,003)
Les effets mesurés jusqu’ici sont des effets Lecture : le graphique reporte les 27 valeurs de l’élasticité de la
productivité à la densité en emploi, chacune correspondante à
moyens, tous secteurs confondus. Cependant, il une industrie en NAF60. La valeur 0,011 de l’élasticité moyenne
n’y a, a priori, aucune raison de penser que les sur l’échantillon poolé trouvée dans le tableau 7, ainsi que les
intervalles de confiance à 5 % pour chacune des élasticités. Ces
externalités d’urbanisation ou de localisation intervalles de confiance sont gris clair lorsque l’élasticité n’est
jouent avec la même force dans chaque secteur. pas significative au seuil de 5 %, noirs sinon.
À ce sujet, Henderson (2003) montre qu’aux La régression utilisée est celle du logarithme de la productivité
sectorielle locale (calculée par la seule méthode à effets fixes)
États-Unis les externalités de localisation jouent sur les logarithmes de la densité en emploi, de la superficie de la
avec plus de force dans les secteurs high-tech zone d’emploi, du potentiel marchand et de l’indice de diversité
progressivement complétée par l’introduction du logarithme de
que dans les secteurs plus traditionnels. Nous la spécialisation, le logarithme de la dotation locale en qualifica-
nous concentrons dans cette partie sur les élas- tions, le logarithme du nombre d’établissements.
Champ : les seules entreprises mono-établissement de plus de
ticités correspondantes aux variables de densité 5 salariés en équivalent temps plein.
et de spécialisation locale, qui ont le plus grand Source : calculs des auteurs à partir de la base de données
résultant, pour chaque année de 1994 à 2004, de la fusion de
pouvoir explicatif. la base de données Sirene, des fichiers de déclarations fiscales
d’entreprises (RSI/BRN), des fichiers de déclaration de données
sociales (DADS) au niveau établissement (cf. encadré).
Pour éviter de présenter un ensemble fastidieux
de tableaux, pour chacune de ces deux variables,
nous reportons chaque fois sur un graphique la 23. Nous avons également essayé d’introduire d’autres variables
de concurrence, telle que la taille moyenne des établissements
collection des 27 valeurs d’élasticité, chacune dans la zone ou l’inverse d’un indice de concentration de l’em-
correspondante à une industrie en NAF60 (cf. ploi de type Herfindhal . Ceci ne change
graphiques I et II). Les industries sont clas-
sées suivant leur ordre dans la classification en
NAF60 tel qu’elle est définie par l’Insee. Les pas le résultat.
Dans la liasse fiscale, la ligne « Charges exter- 25. Une autre limite importante concerne les effets de prix
des produits et des facteurs sur la mesure de productivité des
nes et autres charges » regroupe l’ensemble des entreprises. Foster, Haltiwanger et Syverson (2008) fournissent
prestations facturées à l’entreprise par l’exté- une avancée récente sur la correction des effets de prix dans
la mesure de productivité. Néanmoins, ce point est au-delà des
rieur et qui ne sont pas toujours, stricto sensu, ambitions de cet article et ne peut être traité avec les données à
des consommations intermédiaires. Il peut notre disposition.
Tableau 7
Évaluation « au niveau NAF60 » de l’influence sur la productivité des externalités d’agglomération
(urbanisation et localisation)
Estimation (A) (B) (C) (D)
Externalités d’urbanisation
Ln Densité en emploizt 0,023*** 0,023*** 0,018*** 0,011
(0,003) (0,003) (0,003) (0,007)
Ln Superficiez 0,018*** 0,018*** 0,014*** 0,006
(0,003) (0,003) (0,003) (0,006)
Ln Potentiel marchandzt 0,02*** 0,013 0,018** 0,015*
(0,007) (0,008) (0,007) (0,009)
Ln Diversité de la zone d’emploizt - 0,025*** - 0,022*** - 0,026*** - 0,025***
(0,008) (0,008) (0,007) (0,008)
Externalités de localisation
Ln Spécialisationzst 0,03*** 0,029*** 0,025***
(0,004) (0,004) (0,003)
Ln Dotation locale en qualificationszst 0,041*** 0,042***
(0,005) (0,005)
Ln Nombre d’établissementszst 0,008
(0,006)
nous présentons les résultats équivalents à ceux À l’inverse, ce test de robustesse en fournit une
du tableau 6 sans la soustraction dans le calcul valeur haute.
de la valeur ajoutée de la ligne « Charges exter-
nes et autres charges » (cf. tableau 9). N’étant Comme attendu, dans ce test de robustesse
pas en mesure d’introduire comme facteurs de l’élasticité de la densité augmente légèrement
production le capital ou le travail (intérimaire) passant de 2 % à 3,2 % (cf. tableau 9). De même,
correspondants, la productivité n’est mesurée les élasticités de la spécialisation augmentent
qu’approximativement. Notre a priori est que la légèrement. Néanmoins, les changements res-
location de capital ou de travail est plus répan- tent assez faibles. Aussi, si un biais existe du
due dans les zones d’emploi denses que dans fait de différences spatiales dans le recours à la
les zones peu denses. Aussi les effets mesurés location de capital (notamment de terrain) ou
jusqu’ici, notamment concernant les externali- de travail, son effet sur l’estimation précédente
tés d’urbanisation fournissent une valeur basse. reste très limité. n
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