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THÉORIE COMPORTEMENTALE DU PORTEFEUILLE

Intérêt et limites

Marie-Hélène Broihanne, Maxime Merli, Patrick Roger

Presses de Sciences Po | « Revue économique »

2006/2 Vol. 57 | pages 297 à 314


ISSN 0035-2764
ISBN 2724630351
DOI 10.3917/reco.572.0297
Article disponible en ligne à l'adresse :
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https://www.cairn.info/revue-economique-2006-2-page-297.htm
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Théorie comportementale du portefeuille
Intérêt et limites

Marie-Hélène Broihanne
Maxime Merli
Patrick Roger*

Cet article aborde l’évolution récente de la théorie des choix de portefeuille


dominée, depuis un demi-siècle, par l’approche moyenne/variance. Une première
section est dédiée aux anomalies observées sur les marchés et mises en lumière
par de nombreuses études empiriques. Ces anomalies, ainsi que les recherches
académiques portant sur les limites de la théorie de l’espérance d’utilité, ont conduit
au développement de modèles dits « comportementaux » tels que ceux de Arzac
et Bawa [1977] et Shefrin et Statman [2000]. Nous insistons, au travers de deux
exemples, sur les conséquences de ces approches sur le choix des portefeuilles
optimaux. En dépit de l’apparente capacité de ces modèles à expliquer les phéno-
mènes empiriques, nous soulignons également les raisons qui vont à l’encontre de
leur utilisation pratique par les gérants de fonds.

BEHAVIORAL PORTFOLIO THEORY: INTEREST AND LIMITATIONS


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This paper deals with the recent developments of portfolio choice theory, which
has been dominated by the classical mean/variance approach for half a century. In
a first section we present some market anomalies put to light by many empirical
studies. Academic researches on the limitations of the expected utility theory have
given rise to new models, called ‘‘behavioral’’, such as those by Arzac and Bawa
[1977] and Shefrin and Statman [2000]. They are presented in section 2. By relying
on two examples, we stress on the consequences of these approaches for optimal
portfolio selection. Despite the seemingly ability of these models to explain
empirical phenomena, we argue and expose reasons against their practical use by
portfolio’s managers.

Classification JEL : G11.

INTRODUCTION

La théorie financière et les modèles de choix de portefeuille se sont déve-


loppés depuis près d’un demi-siècle dans le cadre de la théorie de l’espérance
d’utilité, reposant sur l’axiomatisation des préférences individuelles de

* LARGE, Université Louis Pasteur, Faculté des Sciences Économiques et de Gestion, 61


avenue de la Forêt Noire, 67085 Strasbourg Cedex. Courriels : mhb@cournot.u-strasbg.fr ;
merli@cournot.u-strasbg.fr ; roger@cournot.u-strasbg.fr

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Revue économique

von Neumann et Morgenstern. L’hypothèse d’aversion au risque et les travaux


de Harry Markowitz [1952a] sur la diversification de portefeuille ont donné un
caractère opérationnel à la prise de décision dans le domaine du choix de porte-
feuille, en mesurant le risque par la variance de rentabilité des portefeuilles. Le
modèle de Markowitz repose cependant sur des hypothèses fortes, relatives aux
préférences des agents (utilité quadratique1) ou à la distribution de probabilité
des rentabilités (déterminée par ses deux premiers moments2).
Markowitz lui-même avait déjà mentionné que cette mesure (la variance)
n’était peut-être pas la meilleure en suggérant une alternative, la semi-variance,
qui tient uniquement compte des rentabilités inférieures à la moyenne. Il
s’agissait d’une première approche de ce qui est appelé aujourd’hui « aversion
aux pertes ». Dans un second article publié la même année et intitulé The Utility
of Wealth [1952b], il proposait une fonction d’utilité concave du côté des gains
et convexe du côté des pertes pour tenir compte des comportements couramment
observés, et notamment les comportements de jeu et de prise de risque dans
certaines circonstances.
Cette idée sera élaborée trente ans plus tard par Kahneman et Tversky [1979]
dans la théorie des perspectives. Ces auteurs, s’appuyant sur de nombreuses
expérimentations, enrichiront la description des préférences en introduisant
explicitement la notion d’aversion aux pertes ainsi que la déformation des
probabilités objectives par les agents. Tversky et Kahneman [1992] formuleront
cette déformation de manière rigoureuse en transformant les fonctions de
répartition et les fonctions décumulatives, plutôt que les probabilités elles-
mêmes, suivant en cela la proposition de Quiggin [1982] dans le cadre du modèle
d’utilité dépendante du rang3.
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Ces évolutions théoriques ont conduit à s’interroger sur la pertinence du
modèle, devenu classique, de choix de portefeuille à la Markowitz. En effet, à
ces progrès théoriques sont venues s’ajouter les constatations de nombreuses
anomalies, soit révélées expérimentalement, soit mises en évidence sur des
données de marché.
Enfin, l’éclatement de la bulle Internet en 2000 a conduit à la prolifération de
produits à capital garanti qui évitent aux investisseurs le risque de pertes impor-
tantes en cas d’effondrement du marché, tout en leur offrant de profiter, au
moins partiellement, de hausses conséquentes des indices boursiers. De même,
dans les années récentes, on a vu se développer des produits d’épargne associés
à des loteries qui poursuivent des objectifs similaires à ceux des comptes à
capital garanti, du point de vue de la sécurité du placement, mais qui offrent en
plus une possibilité de « jackpot » permettant à l’investisseur d’accroître de
manière très conséquente sa richesse (Guillen et Tschoegl [2002] ; Pfiffelmann
et Roger [2005]). L’attractivité de ces produits, et plus généralement celle des
jeux de hasard, est justifiée à la fois par la déformation des probabilités objec-
tives, le souci de sécurité des agents que traduit bien le concept d’aversion aux
pertes ainsi que l’aspiration à s’enrichir de l’épargnant.

1. Sur la pertinence du critère espérance/variance dans un cadre plus général, se référer, par
exemple, à Kroll et al. [1984].
2. Pour une analyse de choix de portefeuilles qui repose sur des moments supérieurs, voir
Dybvig [1988], et l’approche par la dominance stochastique de Levy et Kroll [1978].
3. Voir également Yaari [1987].

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Parallèlement à cette « rupture » par rapport à la théorie de l’espérance


d’utilité, de nombreux travaux ont été développés dans le cadre classique pour
étendre l’approche de Markowitz et tenir compte de l’asymétrie dans la percep-
tion du risque et/ou de l’observation selon laquelle les investisseurs ne sont pas
riscophobes en toutes circonstances.
Concernant le premier point, on peut se référer aux travaux qui, dans le cadre
de la problématique de choix de portefeuille, mesurent le risque par la Value at
Risk (par exemple, Campbell et al. [2001], Alexander et Baptista [2002, 2004]).
Ces derniers auteurs montrent en particulier qu’un investisseur opérant des choix
dans l’espace espérance-VaR ne sélectionne pas forcément le portefeuille de
variance minimale pour une espérance de rentabilité donnée. Ce phénomène
survient quand les distributions de rentabilité ne sont pas gaussiennes, ce qui est
confirmé par la plupart des tests empiriques.
La seconde direction de recherche concerne la prise en compte des situations
de prise de risque. Alors que dans l’approche comportementale, la prise de risque
en certaines circonstances est justifiée par la déformation des probabilités objec-
tives, l’approche classique s’appuie sur des modèles de choix de portefeuille
tenant compte de la skewness des rentabilités, en plus des deux premiers
moments de cette variable. Ces modèles supposent en particulier que les inves-
tisseurs recherchent les portefeuilles à skewness positive. Cette approche a
d’abord été proposée par Arditti et Levy [1975] et Kraus et Litzenberger [1976]
et se développe encore aujourd’hui (Chunhachinda et al. [1997], Sun et
Yan [2003], Athayde et Flores [2004], par exemple).
Dans cet article, nous nous concentrons sur quelques aspects comportementaux
de la gestion de portefeuille1. La première section du présent article rappelle les
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principales anomalies mises en évidence dans la littérature. Nous développons
ensuite, dans les sections 2 et 3, un modèle de choix de portefeuille, s’appuyant sur
les travaux de Roy [1952], Arzac et Bawa [1977] et Shefrin et Statman [2000], qui
tient compte des évolutions importantes mentionnées plus haut, en particulier
l’aversion aux pertes et la déformation des probabilités objectives. Nous illustrons
ensuite le fait que les portefeuilles efficients peuvent être très différents de ceux
retenus dans un modèle moyenne-variance. L’approche présentée ici est en outre
parfaitement compatible avec le développement de produits financiers associés à
des loteries. Nous mettons cependant en évidence le fait que la frontière efficiente
reste identique à celle obtenue dans le cadre moyenne/variance dans le cas standard
d’actifs à rentabilités gaussiennes. Cet exemple met en lumière les résultats théori-
ques de Levy et Levy [2004], toutefois établis dans un cadre légèrement différent.

REVUE DE LA LITTÉRATURE

La théorie moderne du portefeuille s’est fondée sur l’analyse moyenne/


variance de Markowitz et sur la logique de diversification. En dépit du succès de
cette approche auprès des professionnels, un certain nombre d’observations ne
sont pas conformes aux résultats attendus dans ce cadre.

1. Pour d’autres applications, le lecteur peut se référer à Broihanne, Merli, Roger [2004].

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Revue économique

La diversification insuffisante

Toute une série de travaux met en évidence l’insuffisante diversification des


portefeuilles individuels. Les salariés investissent en plus forte proportion dans
les titres des entreprises dans lesquelles ils travaillent (Holden et VanDerhei
[2001] ; Liang et Weisbenner [2003]) et, de façon plus générale, l’attractivité
d’un investissement augmente avec son aspect familier selon Huberman [2001],
l’exemple des salariés constituant un simple cas particulier de ce phénomène.
Chan, Covrig et Ng [2005] montrent que la forte part accordée dans les fonds
mutuels aux investissements en titres domestiques est liée positivement au degré
de développement du marché financier national et à la familiarité. Kilka et
Weber [2000] expliquent ce home bias par la perception erronée de la distribu-
tion de probabilité des rentabilités futures. En outre, dans le cas où la souscrip-
tion à des plans d’investissement est automatique et que seul le choix du type
d’investissement est possible, une forte proportion de l’investissement est effec-
tuée en faveur du placement par défaut qui, la plupart du temps, est un fonds
monétaire (Choi et al. [2004a]). Par ailleurs, les portefeuilles constitués sont peu
diversifiés par rapport à ce que prévoit la théorie du portefeuille. Ce point a été
confirmé par Polkovnichenko [2005] par une analyse des portefeuilles d’inves-
tisseurs individuels américains au travers des résultats de séries d’enquêtes,
réalisées tous les trois ans, appelées Survey of Consumer Finances1. Comme cela
avait précédemment été illustré par Goetzmann et Kumar [2001], la plupart des
ménages détiennent en moyenne peu d’actions, même si, par ailleurs, ces mêmes
investisseurs détiennent des parts de fonds indiciels dans le cadre de plans
d’épargne-retraite.
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La comptabilité mentale

Les exemples précédents illustrent la sous-optimalité des portefeuilles


construits par les investisseurs, eu égard à ce que prédit la théorie usuelle en
termes de diversification. Un second effet vient s’ajouter à cette diversification
insuffisante, appelé « comptabilité mentale » par Thaler [1985]. Les agents
négligent en fait les corrélations entre investissements, pourtant centrales dans
l’approche moyenne/variance.
Un exemple classique de cette erreur est donné par Benartzi et Thaler [2001].
Ces auteurs offrent le choix à des employés de l’Université de Californie de répartir
leur richesse entre deux plans de retraite dont l’un, le fonds A, est plus exposé au
risque des actions que l’autre, le fonds B. Trois expériences sont menées.
• Expérience 1. fonds A : 100 % d’actions et fonds B : 100 % d’obligations.
• Expérience 2. fonds A : 100 % d’actions et fonds B : 50 % d’obligations et
50 % d’actions.
• Expérience 3. fonds A : 50 % d’obligations et 50 % d’actions et fonds B :
100 % d’obligations.

1. On peut noter que ce résultat trouve une explication dans le cadre de la théorie de l’espérance
d’utilité dépendante du rang.

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Les résultats obtenus montrent que les participants ne tiennent pas compte de
la part de richesse globale investie sur le marché des actions mais répartissent
leur richesse entre les options proposées ; chaque fonds semble comptabilisé
individuellement. En effet, de nombreux répondants choisissent d’affecter leur
épargne à 50/50 sur les deux options proposées. Cette répartition fréquente de
50/50 sur les deux choix proposés est généralement nommée heuristique 1/n (ou
stratégie de diversication naïve) qui est une illustration d’une heuristique plus
générale, l’heuristique de la diversification (Read et Lowenstein [1995]). Dans
le cas de portefeuilles de titres, cette comptabilité mentale conduit les investis-
seurs à négliger les interactions possibles entre les différents titres et, de ce fait,
le portefeuille n’est pas appréhendé dans sa globalité.
Selon Thaler [1999], la comptabilité mentale revêt trois composantes : la
perception des décisions, leur affectation en compartiments et la fréquence
d’évaluation des portefeuilles. La façon dont les investissements sont perçus
affecte de manière importante la composition des portefeuilles. Pour
Benartzi [2001], c’est un excès de projection de la performance boursière des
entreprises sur les dix dernières années de travail qui conduit les employés à
investir dans ces titres aussi bien dans le cadre de plans de retraite que de
comptes titres.
L’étude de l’allocation effectuée par les investisseurs dans les célèbres plans
de retraite 401(K) fournit un cadre approprié à la confrontation de la théorie clas-
sique du portefeuille aux pratiques des épargnants. Dans ce domaine, la théorie
prédit que les investisseurs ne doivent pas tenir compte du nombre d’actifs en
portefeuille mais seulement du profil moyenne/variance du portefeuille. Il s’agit
du résultat classique de la séparation en K fonds qui justifie les différences dans
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les allocations en actifs entre individus par les différences dans leurs attitudes
face au risque. De nombreuses études documentent l’existence d’effets de
présentation, notamment en matière de liens entre parts en fonds sur actions et
exposition aux fonds actions (Camerer et al. [2003] ; Chordia, Roll et
Subrahmanyam [2002] ; Cogan et Mitchell [2003] ; Daniel, Hirshleifer et
Teoh [2002] ; Kahneman [2003] ; Langer et Fox [2003]). Ce n’est toutefois pas
le cas dans l’étude menée par Huberman et Jiang [2004]. Cette dernière porte sur
640 placements de types 401(K) et conduit à des résultats conformes à l’hypo-
thèse de diversification naïve de Benartzi et Thaler [2001]. Plus précisément, la
richesse est investie de manière uniforme sur peu de fonds (pas plus de trois). Le
nombre médian de fonds (entre 3 et 4) n’est pas affecté par le nombre de fonds
proposés dans le plan (entre 4 et 59). En outre, les données étudiées ne laissent
pas entrevoir d’effet de présentation et, en particulier, l’influence de l’exposition
aux actions, soulignée dans les expériences menées auprès des employés de
l’Université de Californie, est inexistante dans cette étude. Les auteurs attribuent
ce résultat surprenant au design des plans étudiés : ceux-ci offrent une présenta-
tion hiérarchique en catégories de fonds tout d’abord puis en fonds individuels.
Selon eux, les participants allouent alors mécaniquement leur richesse dans un
profil de risque spécifique à une catégorie de fonds (actions, obligations, moné-
taires, etc.) avant de choisir précisément les fonds dans la catégorie sélectionnée.
En conséquence, le biais de diversification naïve demeure indétectable au niveau
du fonds et ce, même s’il est présent au niveau de la catégorie. La rationalité des
participants peut être de ce fait seulement qualifiée de « rationalité apparente »
car les effets de présentation subsistent en dépit de l’apparente absence du
phénomène lié à l’exposition aux actions.

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Revue économique

Le choix de portefeuilles efficients

Certaines études récentes montrent que les investisseurs, bien qu’ayant


recours à l’approche traditionnelle, ne la mettent en œuvre que de façon
partielle ou erronée. Benzion, Haruvy et Shavit [2004] évaluent en laboratoire
la capacité des individus à former des portefeuilles situés sur la frontière effi-
ciente déterminée sur trois types d’actifs, une obligation, une action et un put
sur cette action, dont les rentabilités futures sont présentées sous la forme de
loteries. L’option permet une couverture totale ou partielle, selon le traitement
considéré. Les résultats expérimentaux montrent que les portefeuilles formés
par les participants sont constitués d’allocations qui convergent rapidement
vers celles des portefeuilles situés sur la frontière efficiente lorsque les possi-
bilités de couverture sont limitées. La vitesse de cet ajustement dépend positi-
vement des incitations, c’est-à-dire de l’existence de rendements élevés pour
les portefeuilles situés sur la frontière. En outre, l’ajustement vers la frontière
efficiente est effectué sur la base de règles de décision telles que l’EWA1, ce qui
démontre la présence d’une forme d’apprentissage. Cet ajustement temporel
des portefeuilles est à relier à l’hypothèse d’aversion myope aux pertes de
Benartzi et Thaler [1995] et de Thaler et al. [1997], selon laquelle l’attractivité
de l’actif risqué diminue avec la fréquence d’évaluation des portefeuilles par
les participants. Ce résultat a énormément d’impact dans le contexte actuel où
les investisseurs peuvent, via Internet, évaluer la performance de leurs actifs en
portefeuille sur une base hebdomadaire voire quotidienne, alors que la gestion
traditionnelle consistait le plus souvent à investir dans des fonds ou des plans
de retraite qui étaient, au mieux, évalués annuellement. Barber et Odean [2002]
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montrent à cet égard que la fréquence des ajustements des portefeuilles d’inves-
tisseurs ayant opté pour une gestion en ligne conduit à des échanges excessifs.
L’aversion aux pertes explique également le succès de la stratégie de call
couvert alors que celle-ci est jugée inefficace dans un cadre moyenne/variance
(Leggio et Lien [2002]). En outre, Haigh et List [2005] montrent dans une étude
expérimentale que, contrairement à d’autres anomalies observées en labora-
toire, le phénomène d’aversion aux pertes est encore plus présent auprès
d’investisseurs professionnels.
De façon générale, les choix de portefeuilles réellement opérés ne sont pas
efficaces au sens moyenne/variance. Il semble plutôt que les investisseurs utili-
sent des critères de choix d’allocation de portefeuille tenant compte de l’aver-
sion aux pertes et de la déformation des probabilités, critères pris en compte
dans la théorie des perspectives. Cependant, Levy et Levy [2004], en utilisant
les relations de dominance stochastique, montrent que les hypothèses diffé-
rentes qui fondent l’approche moyenne/variance et la théorie des perspectives
conduisent, de manière paradoxale, à définir des ensembles de choix efficaces
très proches, en particulier lorsque les rentabilités des titres présents sur le
marché sont gaussiennes. Ce résultat est lié aux caractéristiques de la loi
normale qui est une distribution continue entièrement déterminée par ses deux
premiers moments.

1. Experience Weighted Attraction de Camerer et Ho [1999], c’est-à-dire que les participants


évaluent la performance de l’ensemble des décisions possibles à chaque date et accordent plus d’impor-
tance aux décisions effectivement retenues à la date précédente pour prendre leur décision courante.

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LE MODÈLE D’ARZAC-BAWA

Le niveau de subsistance

Comme nous l’avons mentionné dans l’introduction, la variance de la renta-


bilité pondère de manière équivalente les rentabilités situées de part et d’autre de
la moyenne. En proposant la semi-variance comme mesure de risque, Markowitz
traduisait déjà le fait que le risque perçu par un investisseur est lié aux pertes et
non aux gains. Une formulation alternative de ce souci est donnée par Roy [1952]
qui propose comme critère de choix de portefeuille la probabilité que la richesse
de l’investisseur ne descende pas en deçà d’un seuil fixé appelé « niveau de
subsistance ». Cette formulation s’accorde tout à fait avec les produits à capital
garanti qui remportent un grand succès actuellement.
Toutefois, Roy ne précise pas ce qu’est censé faire l’investisseur de la richesse
excédentaire, une fois le portefeuille constitué et le seuil de subsistance assuré dans
tous les états de la nature. Supposons par exemple qu’un investisseur dispose de
100 euros et d’un seuil de subsistance de 95 euros. L’indice de référence vaut 100
points. Deux produits lui sont proposés ; le premier assure 95 euros dans tous les
états de nature et 60 % de l’augmentation éventuelle de l’indice mesurée à partir
de la valeur de l’indice aujourd’hui, c’est-à-dire 100. Le second contrat assure
aussi les 95 euros mais propose 100 % de l’augmentation de l’indice au-delà d’un
niveau égal à 110. Dans les deux cas, la probabilité d’une richesse finale supérieure
au niveau de subsistance est égale à 1. En l’absence d’un critère complémentaire
de choix, l’agent est indifférent entre les deux produits.
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La maximisation de l’espérance de richesse

Arzac et Bawa [1977] complètent le modèle de Roy en introduisant le critère


manquant. Considérons un ensemble de 10 états de la nature équiprobables et
reprenons l’exemple précédent d’une richesse initiale W 0 = 100 et d’un niveau
de subsistance A = 95 . Le tableau 1 indique le prix des 10 actifs purs contingents
à la réalisation des états ; ces prix sont notés π′ = ( π i, i = 1, ...,10 ). On a :

∑ πi
10
= 0, 9 (1)
i=1

correspondant à un taux sans risque de 11,11 %.

Tableau 1. Prix des actifs purs

État Proba Prix État Proba Prix


1 0,1 0,2 06 0,1 0,06
2 0,1 0,17 07 0,1 0,04
3 0,1 0,14 08 0,1 0,04
4 0,1 0,11 09 0,1 0,03
5 0,1 0,09 10 0,1 0,02

303

Revue économique — vol. 57, N° 2, mars 2006, p. 297-314


Revue économique

Pour atteindre le seuil de subsistance dans chaque état, il suffit d’acheter 95


unités de chaque actif pur, ce qui coûte :
95 × 0,9 = 85,5
Il reste 14,50 euros à répartir entre les dix actifs purs. Arzac et Bawa propo-
sent alors de retenir comme critère la maximisation de la richesse espérée. En
d’autres termes, le problème d’optimisation résolu par l’agent s’écrit :


max θ E ( W θ )
 s ⋅ c P ( Wθ ⭐ A ) ⭐ α

(2)

π′θ ⭐ W θ
10
θ ∈ ⺢ est le portefeuille choisi par l’agent ; W θ désigne la richesse finale
aléatoire obtenue en détenant le portefeuille θ, α est la probabilité de passer en
deçà du seuil A. La première contrainte correspond en quelque sorte au risque
qu’est prêt à supporter l’investisseur ; la seconde est simplement la contrainte de
budget. Dans l’exemple précédent, le seuil peut être atteint dans tous les états et
on peut résoudre le problème avec α = 0 . Dans ce cas particulier, il apparaît
que la maximisation de la richesse espérée consiste à investir la richesse restante
de 14,5 euros dans l’actif pur le moins cher, à savoir l’actif 10. Le portefeuille
optimal consiste alors à acheter 14,5/0,02 = 125 unités de l’actif 10, en plus des
95 unités de chaque actif détenues pour atteindre le niveau de subsistance.
On aboutit alors à un portefeuille composé d’un actif sans risque payant 95 euros
dans chaque état et d’un « billet de loterie » payant 725 euros si l’état 10 se réalise.
Il est clair qu’un tel portefeuille ne minimise pas la variance de rentabilité pour une
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espérance donnée. En d’autres termes, un portefeuille de ce type n’a aucune chance
d’être efficient au sens de Markowitz. En effet, dans l’approche traditionnelle,
l’agent cherche à lisser sa consommation future entre les états, compte tenu de la
contrainte d’espérance de rentabilité ; la quantité très élevée d’actif 10 obtenue dans
notre exemple est contraire à la minimisation de la variance mais la déviation de la
rentabilité par rapport à la moyenne se situe du côté des gains.

LA THÉORIE COMPORTEMENTALE DU PORTEFEUILLE

Nous avons mentionné dans la première section que les individus déformaient
les probabilités objectives et c’est à ce souci que répond le modèle de Shefrin et
Statman [2000], en s’appuyant sur les travaux de la psychologue Lola Lopes
[1987]. Selon cette dernière, les décisions des individus sont mues par deux
sentiments : la crainte et l’espoir. L’adaptation au choix d’investissement se
traduit, pour chacun de ces deux sentiments, par une déformation de la distribu-
tion de probabilité des richesses finales. Notons D ( s ) = P ( W̃ ⭓ s ) la fonction
décumulative de la richesse finale aléatoire et supposons qu’il existe n états de
la nature. On a alors n richesses possibles W 1, …, W n (supposées rangées dans
l’ordre croissant sans perte de généralité) et si l’on pose D i = P ( W̃ ⭓ W i ) , on
peut écrire, après quelques transformations élémentaires :

∑ Di ( Wi – Wi – 1 )
n
E ( W̃) = W 1 + (3)
i=2

304

Revue économique — vol. 57, N° 2, mars 2006, p. 297-314


Marie-Hélène Broihanne, Maxime Merli, Patrick Roger

Crainte et espoir

Pour traduire le côté craintif de l’investisseur, la fonction D est transformée


par une fonction φ de la forme φ ( D i ) = D1i + a qui vérifie bien φ ( 0 ) = 0 et
φ ( 1 ) = 1. Si φ est strictement convexe, c’est-à-dire si a est positif, on a
φ ( D ) < D . On attribue alors à l’état i le poids p*i = φ ( D i ) – φ ( D i + 1 ) pour i < n
et p *n = φ ( D n ). On constate alors que le poids accordé aux richesses faibles est
accru puisque la convexité de φ et la décroissance des Di en i entraîne :
φ ( Di ) – φ ( Di + 1 ) < φ ( Di – 1 ) – φ ( Di ) (4)

La représentation de l’espoir de l’investisseur se fait par une transformation


définie par :

( Di ) = 1 – ( 1 – Di ) 1 + b (5)
Cette fonction vérifie aussi (0) = 0 et (1) = 1 ; elle est concave dès que le
paramètre b est positif. On définit alors les poids accordés aux états comme
précédemment en posant :

 p **

i = ( Di ) – ( D i + 1 ) si i < n

(6)
p n** = ( pn )

Lorsque b est positif, les pondérations sont accrues pour les états favorables,
traduisant ainsi l’espoir de l’investisseur.
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Shefrin et Statman utilisent alors cette approche en caractérisant tout inves-
tisseur par une combinaison convexe des transformations φ et . Un investisseur
donné est alors caractérisé par une distribution de probabilité subjective des
richesses futures définie à l’aide de la transformation :

γ ( D i ) = δφ ( D i ) + ( 1 – δ ) ( Di ) (7)

avec δ ∈ [ 0 ; 1 ] . La probabilité accordée à l’état i s’écrit alors


q i = γ ( D i ) – γ ( D i + 1 ) si i < n et γ ( D n ) = γ ( p n ) .

Le problème d’optimisation

Chaque agent est caractérisé par les paramètres ( a, b, δ, A, α ) , les trois


premiers étant liés à ses caractéristiques psychologiques relatives à la déforma-
tion des probabilités, les deux derniers étant associés à son attitude face au
risque, A représentant son besoin de sécurité, traduit par le niveau de subsistance,
et α sa tolérance face au risque de ne pas atteindre ce seuil. Dans le cadre d’un
univers d’investissement réduit à n actifs purs, le problème d’optimisation résolu
par l’agent s’écrit alors :



max θ E γ ( W θ )
 s ⋅ c P ( Wθ ⭐ A ) ⭐ α

(8)
 π′θ ⭐ W 0

305

Revue économique — vol. 57, N° 2, mars 2006, p. 297-314


Revue économique

La modification essentielle par rapport à la section précédente réside dans la


probabilité sous laquelle l’espérance de la richesse finale est calculée.
Dans l’exemple de la section précédente, nous avions considéré le cas élémen-
taire d’états équiprobables et de richesses rangées dans l’ordre croissant. Dans
le cas général, si les poids q i sont différents, le choix de l’investisseur doit tenir
compte du coût relatif des actifs purs, fonction de leur probabilité d’occurrence.
On note alors ν la permutation de {1,2,..., n} telle que les ratios π v ( i ) ⁄ q ν ( i ) soient
décroissants en i. En d’autres termes, l’actif v ( 1 ) est le plus cher par unité de
probabilité et l’actif v ( n ) est le moins cher. L’investisseur qui souhaiterait maxi-
miser son espérance de richesse finale devrait investir sa richesse dans l’actif
v ( n ) puisque cette espérance serait q v ( n ) W v ( n ) avec W v ( n ) = W 0 ⁄ π v ( n ) . Il faut
toutefois vérifier les contraintes du problème, ce que ne fait pas cette stratégie
de tout ou rien. Cependant ce raisonnement permet de comprendre comment
l’agent forme son portefeuille optimal.
Notons Ꮾ un sous-ensemble d’états dont la probabilité d’occurrence est supé-
rieure à 1 – α et supposons que cet ensemble comporte K états. En achetant A
unités de chaque actif pur contingent à la réalisation d’un état de Ꮾ, les
contraintes sont vérifiées si le coût de ce portefeuille est inférieur à W 0. La
richesse résiduelle est alors investie dans l’actif dont le rapport π ⁄ q est le plus
faible. La procédure d’optimisation consiste alors à comparer les espérances de
richesse sur tous les ensembles Ꮾ d’états de la nature.
Shefrin et Statman [2000] résument ce résultat comme suit.

PROPOSITION 1. Soit ( W 1, …, W n ) une solution du problème


d’optimisation 8 ; il existe un sous-ensemble Ꮾ d’états contenant l’état v ( n )
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tel que :

 W i = 0 si i ∉ Ꮾ

 W i = A si i ∈ Ꮾ \v ( n )


 ∑
(9)
πi

W0 – A

 W i = ------------------------------------------
i ∈ Ꮾ \v ( n )


-
πν (n)

Le portefeuille obtenu a une structure très différente de celle obtenue dans le


cadre moyenne/variance. En considérant le cas d’une probabilité ␣ raisonnable,
c’est-à-dire relativement faible1, on obtient un portefeuille composé d’un actif
« presque sans risque » et d’un billet de loterie, ce dernier consistant à miser sur
l’état pour lequel le ratio prix sur probabilité (perçue) d’occurrence est le plus faible.
Même si la description d’un marché financier par un ensemble d’actifs purs
peut paraître éloignée de la réalité, on peut noter que l’existence d’options négo-
ciables (sur un indice par exemple) avec un suffisamment grand nombre de prix
d’exercice permet d’approcher la situation théorique. En effet, un butterfly

1. En effet, la richesse finale est nulle dans les états appartenant au complémentaire de Ꮾ, on
peut donc penser que l’investisseur ne peut supporter qu’une faible probabilité de se trouver dans
cette situation.

306

Revue économique — vol. 57, N° 2, mars 2006, p. 297-314


Marie-Hélène Broihanne, Maxime Merli, Patrick Roger

spread construit avec des options dont les prix d’exercice sont très proches peut-
être assimilé à un actif pur d’Arrow-Debreu. Pour illustrer ce point, prenons
l’exemple d’un actif qui offre les paiements x 1, x 2, x 3 sur trois états de nature
ω 1, ω 2, ω 3 . Il est dans ce cas aisé de construire un portefeuille d’options qui paie
une unité dans l’état ω 2 et rien dans les autres états. Dans la situation la plus
x1 + x3
simple où x 2 = ---------------- , un butterfly spread consistant à acheter deux calls de
2
prix d’exercice respectifs x 1 et x 3 et à vendre deux calls de prix d’exercice x 2
duplique l’actif pur contingent à la réalisation de l’état ω 2 .
Dans la section suivante, deux types d’illustrations sont présentées. La première
se situe dans le cadre usuel de rentabilités gaussiennes et la résolution du programme
d’optimisation 8 conduit à une frontière efficace identique à celle obtenue dans le
cadre moyenne-variance. Cet exemple met en lumière le résultat théorique de Levy
et Levy [2004] dans un contexte différent de celui proposé par ces auteurs puisque
le problème 8 ne pose pas d’hypothèse explicite sur la fonction d’utilité des agents.
La seconde illustration donne un contenu concret au théorème ci-dessus en
traitant un exemple à n états de la nature.

ILLUSTRATIONS

Le cas des rendements gaussiens


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L’économie est mono-périodique et trois actifs s’échangent sur le marché (X, Y
et Z). Les distributions des rentabilités sont supposées gaussiennes et la structure du
marché (espérances de rentabilités, matrice de variance-covariance) est la suivante1 :

r′ = ( 0, 05 ; 0, 06 ; 0, 085 )

 0,4 – 0,1 
 0,2 0,4 
0,2

V = 10 – 2 1
 – 0,1 0,4 1,7 

Considérons un investisseur qui ne transforme pas les probabilités de réalisa-


tion des états. Le programme que résout ce dernier est alors un cas particulier de
la théorie comportementale du portefeuille ( a = b = 0 ) et s’apparente à celui
proposé par Arzac et Bawa [1977]2 ; il s’écrit :

max E p [ W̃ ]

s ⋅ c P ( W̃ ⭐ A ) ⭐ α

1. La structure proposée est tout à fait standard, en particulier, les espérances et variances des
titres augmentent conjointement.
2. La seule différence est qu’ici seuls les portefeuilles vérifiant la contrainte d’aspiration sont
conservés.

307

Revue économique — vol. 57, N° 2, mars 2006, p. 297-314


Revue économique

Graphique 1. Frontière efficiente pour un seuil donné

0,16

0,14

0,12
Espérance

0,10

0,08

0,06

0,04
– 0,5 – 0,45 – 0,4 – 0,35 – 0,3 – 0,25 – 0,2 – 0,15 – 0,1 – 0,05 0
Aspiration

Seuil = 5 % Seuil = 10 %

Par souci de cohérence avec les données initiales, le programme est résolu
pour des niveaux de variation relative de richesse (et non pour des niveaux
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absolus de richesse) ; le niveau d’aspiration est de ce fait exprimé en pourcen-
tage. Dans la mesure où il n’existe pas de solution analytique simple comme c’est
le cas dans l’univers moyenne/variance, nous construisons un ensemble de porte-
feuilles de compositions variables. Les ventes à découvert sont autorisées et les
parts de richesse investies dans les trois actifs varient dans l’intervalle [ – 1 ; 1 ]
pour les titres X et Y et dans l’intervalle [ – 1 ; 3 ] pour le titre Z. Il faut évidem-
ment respecter la contrainte d’une somme de proportions investies égale à 1. Le
pas retenu est de 0,01, ce qui conduit à l’analyse de 40 400 portefeuilles. Ici, la
rentabilité maximale pouvant être atteinte est de 14,5 % et nous envisageons des
niveaux d’aspiration et des seuils « raisonnables » au vu de cette contrainte.
Deux seuils de probabilités sont retenus (5 % et 10 %) et le niveau d’aspiration
varie entre – 50 % et 10 % (le pas est de 2,5 %). Les frontières efficientes obte-
nues sont illustrées par le graphique 1. Le niveau d’aspiration est donné en
abcisse et l’espérance de rentabilité en ordonnée.
On remarque que le niveau d’espérance atteint par l’investisseur est une fonc-
tion décroissante du seuil choisi ainsi que du niveau d’aspiration retenu. Par
exemple, pour un niveau d’aspiration A = – 10 %, l’espérance du portefeuille
efficient vaut 7,95 % pour un seuil de 5 % et 8,93 % pour un seuil fixé à 10 %.
Soulignons que pour des niveaux d’aspiration « trop » élevés, aucun portefeuille
ne respecte les contraintes (à droite sur le graphique). C’est le cas, par exemple,
de niveaux d’aspiration supérieurs à – 5 % lorsque le seuil est de 5 % (– 2,5 %
pour un seuil de 10 %). Enfin, pour des niveaux d’aspiration très faibles et les
deux niveaux de seuils, la contrainte devient inopérante et le portefeuille dont
l’espérance est la plus forte est retenu (14,5 %).

308

Revue économique — vol. 57, N° 2, mars 2006, p. 297-314


Marie-Hélène Broihanne, Maxime Merli, Patrick Roger

Graphique 2. Frontière efficiente MV

0,15

0,14

0,13

0,12
Espérance

0,11

0,10

0,09

0,08

0,07

0,06
0 0,02 0,04 0,06 0,08 0,10 0,12 0,14 0,16 0,18
Variance

MV / BPT

La règle de décision utilisée par les investisseurs semble très éloignée de celle
choisie par des investisseurs se comportant à la « Markowitz ». Cependant, les
portefeuilles sélectionnés sont efficients au sens « classique » du terme. Le
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graphique 2 illustre ce point. L’ensemble des portefeuilles apparaissant sur le
graphique 1 y a été reporté dans un repère espérance/variance. Dès lors, on peut
constater que ces portefeuilles se situent tous sur la frontière efficiente moyenne/
variance. En d’autres termes, les deux critères de choix coïncident ici parfaitement.
Ce résultat n’est évidemment pas généralisable à tous types d’actifs ou de
portefeuilles. Les rentabilités aléatoires étant ici gaussiennes, la distribution de
probabilité de la rentabilité des portefeuilles construits est entièrement déter-
minée par ses deux premiers moments. Il s’ensuit que, pour A donné, la proba-
bilité de P ( W̃ ⭐ A ) dépend uniquement du vecteur r ′ et de la matrice V. Il n’est
donc pas surprenant d’obtenir une frontière efficiente identique. Il faut cepen-
dant noter que les titres retenus ne permettent pas de construire des portefeuilles
dont les paiements s’apparentent à des paris sur quelques états de nature. Ceci
serait envisageable en introduisant, par exemple, des produits optionnels dont les
paiements ont de telles caractéristiques, ce qui permet de sortir du cas gaussien
et engendre des différences entre l’approche moyenne/variance et le modèle qui
vient d’être présenté. Cette remarque conduit à présenter une seconde illustration
fondée sur une économie ou les titres sont des actifs purs.

Les portefeuilles d’actifs purs

Considérons une économie d’actifs purs à 10 états de nature équiprobables


(pour tout i, p i = 0, 1) ; le prix des actifs correspondants est donné dans la
colonne πi du tableau 2. Ces états sont classés par prix décroissants.

309

Revue économique — vol. 57, N° 2, mars 2006, p. 297-314


Revue économique

Tableau 2. Économie et caractéristiques de l’agent

δ = 0,9 δ = 0,3
πi πi
ÉTAT pi ␲i qi ----- qi -----
qi qi

1 0,1 0,250 0,173 1,453 0,064 3,900


2 0,1 0,180 0,156 1,154 0,072 2,500
3 0,1 0,160 0,140 1,143 0,080 2,000
4 0,1 0,120 0,124 0,967 0,088 1,360
5 0,1 0,090 0,108 0,833 0,096 0,940
6 0,1 0,060 0,092 0,652 0,104 0,577
7 0,1 0,050 0,076 0,658 0,112 0,447
8 0,1 0,030 0,060 0,500 0,120 0,25
9 0,1 0,015 0,044 0,341 0,128 0,117
10 0,1 0,012 0,028 0,429 0,136 0,088

Deux types d’investisseurs sont considérés, un investisseur « craintif »


défini par δ = 0,9 et un investisseur « optimiste » auquel est affecté un para-
mètre δ = 0,3 ; les paramètres a et b sont fixés à 1 (voir équation 7). Les
colonnes qi contiennent la probabilité affectée aux différents états par les deux
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types d’agent. L’investisseur « optimiste » affecte donc des probabilités supé-
rieures aux états favorables alors que l’investisseur « craintif » sur-pondère les
états défavorables. En outre, la déformation concave de la fonction de réparti-
tion opérée par l’investisseur « craintif » est ici plus importante que la défor-
mation convexe opérée par l’investisseur « optimiste ». Ceci est dû au posi-
π
tionnement relatif des deux paramètres ␦ par rapport à 0,5. Les colonnes ----i
qi
interviennent dans le classement des états et, par conséquent, dans le choix de
π
portefeuilles. On peut d’ores et déjà souligner que l’état dont le rapport ----i est
qi
le plus faible, qui tient une place particulière selon la proposition de la section
précédente, n’est pas identique pour les deux individus. Pour l’investisseur
« craintif », cette valeur minimale est atteinte pour l’état 9 avec
πi 0,015
---- = ------------- = 0,341. Pour l’investisseur « optimiste », ce minimum est atteint
qi 0,044
dans l’état 10 pour une valeur de 0,088.
En supposant que l’investisseur dispose d’une richesse initiale de 1 euro
( W 0 = 1 ) , les choix de portefeuilles opérés par les deux agents pour un seuil
de 10 % et un niveau d’aspiration de 1 (hypothèse du status quo) sont illustrés
par le graphique 3.

310

Revue économique — vol. 57, N° 2, mars 2006, p. 297-314


Marie-Hélène Broihanne, Maxime Merli, Patrick Roger

Graphique 3. Choix de portefeuilles

25

20

15

10

0
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10

Craintif Optimiste Moyenne/Variance

L’investissement optimal consiste dans ce cas en l’achat de 1 unité de 9 actifs


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purs, la somme restante (contrainte de budget) est totalement investie dans l’actif
π
pur dont le rapport ----i est minimal. C’est le cas de l’actif pur 9 pour l’investisseur
qi
« craintif » et 10 pour l’investisseur « optimiste ». Soulignons que le seuil retenu ne
permet pas d’assurer le niveau de subsistance dans tous les états. L’espérance
perçue par ce premier est alors de 2,13 euros ; cette espérance est en réalité plus
élevée et vaut 2,78 puisque l’investisseur déforme les probabilités objectives de
réalisation des états. Il est important de noter que les choix sont ici très différents de
ceux retenus par des investisseurs qui opèrent selon le critère moyenne/variance.
Par exemple, pour un niveau d’espérance de 2,78 (obtenue par l’investisseur
« craintif »), la variance du portefeuille choisi par un investisseur se comportant à
la « Markowitz » est de 5,95 ; le portefeuille retenu par ce dernier est illustré par le
graphique 3. On peut souligner que cette variance est plus de cinq fois plus faible
que celle associée au portefeuille retenu par l’investisseur « craintif » (variance de
32,5). On peut finalement remarquer que, contrairement aux deux investisseurs
(optimiste et craintif) qui associent sécurité et pari, l’investisseur « moyenne/
variance » tente de lisser sa consommation entre les différents états.

CONCLUSION

Dans cet article, nous avons abordé quelques aspects comportementaux de la


gestion de portefeuille suggérant une nécessaire évolution des critères de prise
de décision des gérants de fonds. En effet, il semble délicat de choisir des actifs

311

Revue économique — vol. 57, N° 2, mars 2006, p. 297-314


Revue économique

risqués sous hypothèse de distribution gaussienne des rentabilités et de proposer


aux clients des produits dont le rendement, par construction même, ne peut suivre
une loi normale et dont l’objectif est de tenir compte de l’aversion aux pertes des
investisseurs. Deux approches, sans doute complémentaires, sont possibles. La
première se situe dans le cadre du paradigme dominant de l’espérance d’utilité
et s’attache à intégrer les moments d’ordre supérieur dans le processus de déci-
sion et/ou à considérer des mesures de risque comme la VaR de façon à tenir
compte de l’aversion aux pertes.
Nous avons ici privilégié la seconde approche fondée sur les travaux
d’économie comportementale qui s’appuient sur une description alternative des
préférences individuelles. Bien que cette démarche soit intellectuellement sédui-
sante, il ne faut sans doute pas espérer qu’elle puisse s’imposer rapidement au
niveau opérationnel pour plusieurs raisons. La première est que l’univers gaus-
sien est très confortable. Son caractère bi-dimensionnel (espérance/variance) se
prête à la construction d’indicateurs et de représentations graphiques dont la
compréhension est élémentaire. La seconde raison, non indépendante de la
première, est que le modèle de Black-Scholes [1973] est aussi construit dans ce
cadre gaussien, avec une hypothèse de mouvement brownien géométrique pour
les cours des actifs supports des contrats. Les coefficients de gestion (les
« grecques ») de la théorie des options constituent, malgré leurs imperfections,
des points de repère importants pour les professionnels. Les abandonner suppose
que l’on ait autre chose (et mieux si possible) pour gérer, par exemple, les porte-
feuilles d’options, les opérations de couverture, et les arbitrages.
La troisième raison, plus profonde, est liée à la mécanique des modèles fondés
sur la déformation des fonctions de répartition. Avant d’opérer la déformation,
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il faut ordonner les « outcomes ». Par conséquent, même dans un univers
restreint à une cinquantaine de titres, la recherche d’un portefeuille optimal
nécessite une quantité gigantesque de tris de vecteurs. La première version de la
théorie des perspectives transformait directement les probabilités et ne nécessi-
tait pas de tri. Malheureusement, cette approche ne vérifiait pas le critère de
dominance stochastique de premier ordre. Ce problème théorique, résolu en
opérant une déformation des fonctions de répartition, en a engendré un autre plus
terre à terre. Le défi posé maintenant aux chercheurs est de rendre opérationnelle
la théorie comportementale du portefeuille, ce qui ne sera pas forcément très
simple. Le recours à des techniques d’optimisation numérique sophistiquées sera
sans doute déterminant de ce point de vue.

RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

ALEXANDER G. J. et BAPTISTA A. M. [2002], « Economic Implications of Using a Mean-


VaR Model for Portfolio Selection: a Comparison with Mean-Variance Analysis »,
Journal of Economics Dynamics & Control, 26, p. 1159-1193.
ALEXANDER G. J. et BAPTISTA A. M. [2004], « A Comparison of VaR and CVaR
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