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Titre

I : La formation du contrat


Pour qu’un contrat se forme, il faut préalablement que les consentements des parties se
rencontrent.

Fréquemment, la conclusion du contrat est précédée de négociations.

Les négociations s’inscrivent dans une phase précontractuelle (Chapitre I).

Mais, au cours de cette phase précontractuelle, des contrats préparatoires peuvent
également être formés, dont l’objet est, comme leur nom l’indique, de préparer le
contrat principal.

Ensuite, l’une des parties à la négociation peut émettre une offre. La rencontre de l’offre
et de l’acceptation formera le contrat (chapitre II).

S’ensuit alors la conclusion proprement dite du contrat, laquelle doit obéir à une
pluralité de conditions.

Ces conditions de validité du contrat sont posées à peine de nullité du contrat
(Chapitre III).

Chapitre I – La phase précontractuelle - La négociation et les contrats


préparatoires

La rencontre de l’offre de contrat et de l’acceptation de cette offre constitue
l’extériorisation des consentements.

Mais pour cela, une période de négociation (§1), au cours de laquelle se forment
parfois des avant-contrats (§2), peut être nécessaire. Cette période permet un
rapprochement de la volonté des parties.

§ I – La période de négociation

Dans la mesure où les parties ne se sont pas encore engagées l’une envers l’autre, elles
sont soumises au principe de liberté contractuelle (A).

Dès lors, seule la faute commise dans le cadre des négociations ou lors de la rupture des
négociations ouvre droit à réparation de l’autre partie à la négociation (rupture fautive)
(B).

L’idée d’un balancement régule cette période de négociation : balancement entre la
liberté des précontractants et leurs devoirs.

Le nouvel article traduit cette idée :

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« Art. 1112. – L’initiative, le déroulement et la rupture des négociations
précontractuelles sont libres. Ils doivent satisfaire aux exigences de la bonne foi.

En cas de faute commise dans les négociations, la réparation du préjudice qui en résulte
ne peut avoir pour objet de compenser la perte des avantages attendus du contrat non
conclu.»

A/ Le principe de la liberté de conclure ou de ne pas conclure le contrat



La liberté contractuelle, qui est un principe important en droit français, signifie que
toute personne est libre de contracter dès lors qu’elle en a la capacité.

= Principe d’autonomie de la volonté

Mais, si la liberté contractuelle implique la liberté de conclure à un contrat, elle implique
également celle de ne pas conclure. La liberté s’exprime toujours positivement et
négativement.

Donc toute personne a la liberté de ne pas contracter, même si elle a préalablement
participé à des négociations dont l’objet était de parvenir à un contrat.

En d’autres termes, toute personne est libre de rompre unilatéralement – c’est-à-dire de
sa seule initiative – les pourparlers.

***

Le principe est donc que les parties sont libres de négocier et elles ne peuvent pas
encourir de responsabilité pour ne pas être parvenues à un accord.

Mais, la manière de mener les négociations, la brutalité de la rupture peuvent
constituer une faute.

B/ La sanction de la rupture fautive

Lorsqu’un participant à des pourparlers négocie de façon déloyale (dol dans la
négociation par exemple) ou rompt brutalement les négociations, il commet une faute.

Or, cette faute justifie la réparation du dommage subi par l’autre participant à la
négociation.

En effet, on considère que la partie qui conduit ou rompt des négociations contrairement
aux EXIGENCES DE LA BONNE FOI est responsable du préjudice qu’elle cause à l’autre
partie.

La responsabilité engagée est de nature extracontractuelle :

Par exemple, celui « Celui qui utilise sans autorisation une information confidentielle

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obtenue à l’occasion des négociations engage sa responsabilité extracontractuelle. »
(article 1112 nouv)

La question se pose toutefois de savoir quel est le préjudice réparable, dont peut se
plaindre la victime de la rupture :

- S’agit-il uniquement des frais engagés pendant les pourparlers (frais d’expertise ; de
location de salles ; de déplacement ; etc.) ?

- Ou s’agit-il également de la perte de chance de conclure le contrat et donc de la perte
de chance d’obtenir les gains espérés par la signature du contrat?

Face à cette hésitation, la Cour de cassation s’est prononcée de façon très claire dans un
arrêt «Manoukian» en 2003 (Cass. Com., 26 nov. 2003) :

Trois enseignements peuvent être déduits de cet arrêt :

Définition de la faute de celui qui rompt unilatéralement les pourparlers : « En
conduisant des négociations parallèles, alors que les parties étaient parvenues à un
projet d’accord aplanissant la plupart des difficultés, et en concluant un accord avec un
tiers dont elle n’a informé son partenaire que 14 jours après, en lui laissant croire dans
cet intervalle que la conclusion du contrat projeté restait possible, une partie a rompu
unilatéralement et avec mauvaise foi des pourparlers. »

La détermination du préjudice réparable : « Les circonstances constitutives d’une
faute commise dans l’exercice du droit de rupture unilatérale des pourparlers
précontractuels ne sont pas la cause du préjudice consistant dans la perte d’une
chance de réaliser les gains que permettait d’espérer la conclusion du contrat ».

La responsabilité du tiers qui a contracté avec l’auteur de la victime : « Le simple
fait de contracter, même en connaissance de cause, avec une personne ayant engagé des
pourparlers avec un tiers ne constitue pas, en lui-même et sauf s’il est dicté par
l’intention de nuire ou s’accompagne de manœuvres frauduleuses, une faute de nature à
engager la responsabilité de son auteur. »

Il résulte de cet arrêt quant à la détermination du préjudice réparable que les
dommages-intérêts ne peuvent pas avoir pour objet de compenser la perte des
bénéfices attendus du contrat non conclu.

En effet, le préjudice résidant dans la perte d’une chance de tirer profit du contrat avorté
résulte de la rupture des négociations et non des circonstances qui ont entouré cette
rupture. Or, la rupture, seule cause de ce préjudice, n’étant pas à elle seule fautive en
raison du principe de liberté contractuelle, les conditions de la responsabilité ne sont
pas réunies.

Les dommages-intérêts ne servent qu’à réparer le préjudice résultant des frais engagés
pour la négociation.

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Le nouveau droit des obligations conforte la jurisprudence Manoukian: les dommages
et intérêts en cas de rupture fautive ne peuvent avoir pour objet de compenser les
pertes des bénéfices attendus du contrat non conclu.

Art. 1112 al. 2 :

En cas de faute commise dans les négociations, la réparation du préjudice qui en résulte
ne peut avoir pour objet de compenser ni la perte des avantages attendus du contrat non
conclu, ni la perte de chance d'obtenir ces avantages.

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Exercice 1 : fiche d’arrêt

Cour de cassation
chambre civile 3
Date de l'audience publique 28 juin 2006
N° de pourvoi: 04-20040
Publié au bulletin
Cassation partielle

LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nouméa, 29 juillet 2004), que la société Antineas a mené
des négociations avec la société civile immobilière Longson (la SCI) et les consorts X... Y...
pour la vente d'un terrain destiné à la construction d'un immeuble ; qu'un projet de
"protocole" de vente n'ayant pu être signé et la société Antineas ayant vendu le bien à un
tiers, la SCI et M. Phiet X... Y... l'ont assignée en paiement de dommages-intérêts pour
rupture abusive des pourparlers ;

Sur le second moyen :

Vu l'article 1382 du code civil ;

Attendu que pour condamner la société Antineas à payer des dommages-intérêts à la SCI
l'arrêt retient que la cour dispose d'éléments suffisants pour évaluer le préjudice de
celle-ci consistant en la perte d'une chance sur le manque à gagner résultant de la
disparition du programme immobilier envisagé ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'une faute commise dans l'exercice du droit de rupture
unilatérale des pourparlers pré-contractuels n'est pas la cause du préjudice consistant
dans la perte d'une chance de réaliser les gains que permettait d'espérer la conclusion
du contrat, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société
Antineas à payer à la SCI Longson la somme de six millions de francs FCFP, l'arrêt rendu
le 29 juillet 2004, entre les parties, par la cour d'appel de Nouméa ; remet, en
conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant
ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nouméa,
autrement composée ;

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§ II – La conclusion de contrats préparatoires ou avant-contrats

Dans le cadre des négociations, il est assez fréquent que les participants concluent des
accords dans lesquels ils entérinent les points sur lesquels ils sont parvenus à
s’entendre.

Ces contrats sont ainsi préparatoires du contrat final.

Ils viennent préparer le contrat final, c’est-à-dire celui pour lequel les parties se sont
rapprochées.

On parle ainsi de contrats préparatoires ou encore d’avant-contrats.

Quels sont les principaux contrats préparatoires (A) ? Et quelles sont les sanctions de
leur non-respect (B) ?

A/ Les principaux avant-contrats



Il s’agit de véritables contrats puisqu’il y a rencontre de deux volontés qui se sont
manifestées en vue de produire des effets de droit.

Les avant-contrats les plus fréquents sont :
- La promesse unilatérale de contrat ;
- La promesse synallagmatique de contrat ;
- Ou encore le pacte de préférence.

1/ La promesse unilatérale de contrat est un avant-contrat dans lequel une partie
promet à l’autre de contracter dans l’hypothèse où cette dernière lèverait l’option.

« Art. 1124. nouv – La promesse unilatérale est le contrat par lequel une partie, le
promettant, consent à l'autre, le bénéficiaire, le droit, pendant un certain temps, d'opter
pour la conclusion d'un contrat dont les éléments essentiels sont déterminés, et pour la
formation duquel ne manque que le consentement du bénéficiaire. »

Autrement dit, le bénéficiaire de la promesse accepte d’être le bénéficiaire de cet
engagement pris par le promettant, mais dispose d’un délai avant de décider si lui
aussi souhaite conclure le contrat final.

Par exemple, Monsieur Dupont promet de vendre sa maison à Madame Martin, si celle-ci
manifeste sa volonté dans les 3 mois à venir.
Si au cours de ces 3 mois, Madame Martin lève l’option, cela signifie qu’elle décide
d’acheter la maison que lui a promise Monsieur Dupont.

En résumé, la promesse unilatérale de contrat est un contrat qui produit un effet
obligatoire. A l’issue de la période de réflexion, deux issues possibles : si lé bénéficiaire
accepte, le contrat est formé (date de la levée de l’option) ; si le bénéficiaire n’accepte
pas, le contrat ne se forme pas.

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2/ La promesse synallagmatique de contrat est un avant-contrat dans lequel les deux
parties se promettent réciproquement de contracter.

Par exemple, Monsieur Dupont promet à Madame Martin de lui vendre sa maison et,
réciproquement, Madame Martin promet à Monsieur Dupont d’acheter ladite maison.

Il s’agit d’un avant-contrat fréquemment utilisé en pratique.

L’article 1589 du Code civil décide d’ailleurs que « la promesse de vente vaut vente »
puisque chacune des parties a manifesté sa volonté d’être engagée dans un contrat de
vente.
En pratique, la promesse synallagmatique de vente est principalement utilisée dans
l’attente d’un acte notarié.

3/ Le pacte de préférence est un avant-contrat dans lequel le promettant
s’engage/s’oblige à préférer le bénéficiaire dans l’hypothèse où un jour il se décidait à
contracter.

« Art. 1125. nouv. – Le pacte de préférence est le contrat par lequel une partie s’engage à
proposer prioritairement à son bénéficiaire de traiter avec lui pour le cas où elle se
déciderait de contracter. »

Il s’agit bien d’un avant-contrat car dans cet acte, le bénéficiaire accepte de bénéficier
de la promesse.

Il est cependant unilatéral puisqu’il ne crée d’obligation qu’à la charge du promettant,
le bénéficiaire restant libre d’accepter ou non le jour où le promettant lui proposera
de contracter.

Exemple : Monsieur Dupont promet à son voisin que si un jour il décide de vendre son
terrain, il lui proposera la vente en priorité.

Ce n’est donc que si le voisin refuse d’acheter le terrain que Monsieur Dupont pourra
s’adresser à un tiers.

La question se pose alors de savoir ce qui se passe si celui qui a promis de contracter ne
respecte pas sa promesse.

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B/ La sanction de la violation d’un avant-contrat

1/ Lorsque le contrat préparatoire violé est une promesse unilatérale de contracter

Attention, sur ce point la réforme envisage des changements importants.

Avant la réforme :

La Cour de cassation a décidé, depuis un arrêt « Cruz » de 1993 que si le promettant
viole sa promesse pendant le délai au cours duquel le bénéficiaire a la possibilité de
lever l’option, et AVANT que le bénéficiaire ait effectivement levé l’option, il doit payer
des dommages-intérêts au bénéficiaire (Cass, civ 3, 15 décembre 1993 : « tant que les
bénéficiaires n’ont pas déclaré acquérir, l’obligation de la promettante ne constituait
qu’une obligation de faire et que la levée de l’option, postérieure à la rétractation de la
promettante, excluait toute rencontre des volontés réciproques de vendre et d’acquérir
»).

Autrement dit, le promettant n’était pas obligé à conclure le contrat pourtant promis
(contrat final).

Confirmation par un arrêt : Cass. Civ. 3ème, 11 mai 2011, n° 10-12875

En revanche, si le promettant se rétracte alors que le bénéficiaire avait déjà accepté,
donc si le promettant se rétracte APRES la levée de l’option, la Cour de cassation
considère que le contrat a été valablement formé.

En conséquence, le promettant est obligé de conclure le contrat promis (en ce sens,
Cass. Civ. 3, 26 juin 1996, n° de pourvoi: 94-16326).


Cependant, le nouveau droit des contrats prévoit concernant la promesse unilatérale
de vente:
La révocation de la promesse unilatérale de vente pendant le temps laissé au
bénéficiaire pour opter ne peut empêcher la formation du contrat promis.

Le contrat conclu en violation de la promesse unilatérale avec un tiers qui en
connaissait l’existence est nul.

Cette réforme répond aux attentes de la doctrine.
La doctrine majoritaire critiquait les divergences entre les solutions car selon elle,
chaque fois que le promettant ne respecte pas sa promesse/son engagement, il devrait
être contraint de conclure le contrat promis/final.

La doctrine était donc favorable à l’extension de la jurisprudence de 2006 développée
pour le pacte de préférence à tous les avant-contrats, notamment à la promesse
unilatérale de contracter.

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2/ Lorsque l’avant-contrat est une promesse synallagmatique de contracter :

Puisque les deux volontés de conclure le contrat final se sont manifestées, le contrat
final est valablement formé.

Dès lors, celui qui se rétracte peut être contraint par les juges de conclure ce contrat
final.

Cela ne concerne pas la rétractation de l’acheteur qui dispose de 7 jours en matière
immobilière.

3/ Lorsque c’est un pacte de préférence :



Si le promettant décide de proposer le contrat à un autre que le bénéficiaire de la
préférence, cela signifie que le promettant va conclure le contrat final avec un tiers,
au détriment du bénéficiaire de la préférence.

Pour connaître la sanction, depuis 2006, la jurisprudence distingue selon que ce tiers
était de bonne ou de mauvaise foi :

- Si le tiers ignorait l’existence de la promesse, c'est-à-dire s’il était de bonne foi, seul le
promettant sera sanctionné : il devra payer des dommages-intérêts au bénéficiaire de
la préférence (sur le fondement de la responsabilité contractuelle).

- Si le tiers était de mauvaise foi, c'est-à-dire s’il connaissait l’existence de la promesse,
alors le bénéficiaire de la préférence pourra se voir substituer dans les droits du tiers.

Autrement dit, le bénéficiaire de la promesse prendra la place du tiers de mauvaise foi
et conclura le contrat avec le promettant (Cass, Ch. Mixte, 26 mai 2006, Père c/ Solaris
: « Si le bénéficiaire d’un pacte de préférence est en droit d’exiger l’annulation du
contrat passé avec un tiers en méconnaissance de ses droits et d’obtenir sa
substitution à l’acquéreur, c’est à la condition que ce tiers ait eu connaissance,
lorsqu’il a contracté, de l’existence du pacte de préférence et de l’intention du
bénéficiaire de s’en prévaloir »).

On oblige ainsi le promettant à conclure le contrat avec le bénéficiaire de la préférence.

En outre, le promettant pourra également être condamné à payer des dommages-
intérêts au bénéficiaire.

Sous l’empire du nouveau droit des contrats, il est prévu :

« Lorsque, en violation d'un pacte de préférence, un contrat a été conclu avec un tiers
qui en connaissait l'existence, le bénéficiaire peut agir en nullité ou demander au juge de
le substituer au tiers dans le contrat conclu. Le bénéficiaire peut également obtenir la
réparation du préjudice subi.

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Exercice 2 : Fiche d’arrêt

Cour de cassation
chambre mixte
Audience publique du vendredi 26 mai 2006
N° de pourvoi: 03-19376
Publié au bulletin
Rejet.

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Papeete, 13 février 2003), qu'un acte de donation-partage
dressé le 18 décembre 1957 et contenant un pacte de préférence a attribué à Mme Adèle
A... un bien immobilier situé à Haapiti ; qu'une parcelle dépendant de ce bien a été
transmise, par donation-partage du 7 août 1985, rappelant le pacte de préférence, à M.
Ruini A..., qui l'a ensuite vendue le 3 décembre 1985 à la SCI Emeraude, par acte de M.
B..., notaire ; qu'invoquant une violation du pacte de préférence stipulé dans l'acte du 18
décembre 1957, dont elle tenait ses droits en tant qu'attributaire, Mme X... a demandé,
en 1992, sa substitution dans les droits de l'acquéreur et, subsidiairement, le paiement
de dommages-intérêts ;

Attendu que les consorts X... font grief à l'arrêt d'avoir rejeté la demande tendant à
obtenir une substitution dans les droits de la société Emeraude alors, selon le moyen :

1 / que l'obligation de faire ne se résout en dommages-intérêts que lorsque l'exécution
en nature est impossible, pour des raisons tenant à l'impossibilité de contraindre le
débiteur de l'obligation à l'exécuter matériellement ; qu'en dehors d'une telle
impossibilité, la réparation doit s'entendre au premier chef comme une réparation en
nature et que, le juge ayant le pouvoir de prendre une décision valant vente entre les
parties au litige, la cour d'appel a fait de l'article 1142 du code civil, qu'elle a ainsi violé,
une fausse application ;

2 / qu'un pacte de préférence, dont les termes obligent le vendeur d'un immeuble à en
proposer d'abord la vente au bénéficiaire du pacte, s'analyse en l'octroi d'un droit de
préemption, et donc en obligation de donner, dont la violation doit entraîner
l'inefficacité de la vente conclue malgré ces termes avec le tiers, et en la substitution du
bénéficiaire du pacte à l'acquéreur, dans les termes de la vente ; que cette substitution
constitue la seule exécution entière et adéquate du contrat, laquelle ne se heurte à
aucune impossibilité ; qu'en la refusant, la cour d'appel a violé les articles 1134, 1138 et
1147 du code civil ;

3 / qu'en matière immobilière, les droits accordés sur un immeuble sont applicables aux
tiers dès leur publication à la conservation des hypothèques ; qu'en subordonnant le
prononcé de la vente à l'existence d'une faute commise par l'acquéreur, condition inutile
dès lors que la cour d'appel a constaté que le pacte de préférence avait fait l'objet d'une
publication régulière avant la vente contestée, la cour d'appel a violé les articles 28, 30

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et 37 du décret du 4 janvier 1955 ;

Mais attendu que, si le bénéficiaire d'un pacte de préférence est en droit d'exiger
l'annulation du contrat passé avec un tiers en méconnaissance de ses droits et d'obtenir
sa substitution à l'acquéreur, c'est à la condition que ce tiers ait eu connaissance,
lorsqu'il a contracté, de l'existence du pacte de préférence et de l'intention du
bénéficiaire de s'en prévaloir ; qu'ayant retenu qu'il n'était pas démontré que la société
Emeraude savait que Mme X... avait l'intention de se prévaloir de son droit de
préférence, la cour d'appel a exactement déduit de ce seul motif, que la réalisation de la
vente ne pouvait être ordonnée au profit de la bénéficiaire du pacte ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.


§ III – Les devoirs précontractuels

La réforme du droit des contrats crée des devoirs précontractuels.

A/ Le devoir d’information

Le devoir d’information précontractuel n’était pas inconnu en droit français. Il existait
notamment en droit de la consommation (article L. 111-1 du Code de la consommation).
La jurisprudence de la Cour de cassation en faisait également état.

Aujourd’hui selon l’article 1112-1 du code civil :
« Celle des parties qui connaît une information dont l’importance est déterminante pour
le consentement de l’autre doit l’en informer dès lors que, légitimement, ce dernier
ignore cette information ou fait confiance à son cocontractant ».

Trois conditions sont exigées :

Première condition : l’information doit avoir une importance déterminante. Le devoir
d’information ne porte toutefois pas sur l’estimation de la valeur de la prestation. Il
appartient toujours au cocontractant de se renseigner sur la valeur de la prestation qu’il
doit ou qu’il reçoit.

Deuxième condition : le devoir ne pèse que sur celui qui connaît l’information
déterminante. Un devoir général de se renseigner pour informer son cocontractant n’est
ainsi pas créé.

Troisième condition : ce devoir ne profite qu’à celui qui, légitimement, ignore cette
information ou fait confiance à son cocontractant.
Le devoir d’information n’est dû que si le contractant ne pouvait découvrir par lui-même
le fait cédé (ex : Civ. 3, 3 juin 1988, Bull n° 198).

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Preuve : il appartient à celui qui prétend qu’une information lui était due de prouver que
l’autre partie la lui devait, à charge pour cette autre partie de prouver qu’elle l’a fournie.

Sanctions :
Le manquement au devoir précontractuel d’information est sanctionné par des
dommages-intérêts et, si les conditions sont réunies, par le nullité du contrat.


B/ Devoir de confidentialité

Il est prévu que celui qui utilise ou divulgue une information confidentielle obtenue lors
des négociations engage sa responsabilité (article 1112-2 du Code civil).

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