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La Cour répond que l’article 15-1 du pacte ne prévoyait une rétroactivité que pour les peines
et pas pour les infractions. De plus l’article 110 de la loi de 1992 prévoyait que la loi ne faisait
pas obstacle à la poursuite des infractions commises avant son EV. Dès lors les deux textes
cumulés permettaient de rejeter l’application de la rétroactivité in mitius.
Art. 7-1 CESDH : « Nul ne peut être condamné pour une action ou une omission qui, au moment où
elle a été commise, ne constituait pas une infraction d’après le droit national ou international. De
même, il n’est infligé aucune peine plus forte que celle qui était applicable au moment où l’infraction
a été commise. »
Rétroactivité in mitius pas consacré littéralement dans la CESDH.
Cependant dans l’arrêt Scoppola la CEDH fait une interprétation extensive de l’article en
déclarant que l’article ne prévoit pas seulement la non-rétroactivité des lois plus sévères,
mais aussi implicitement la rétroactivité in mitius.
« L’article 7-1 […], s’il interdit en particulier d’étendre le champ d’application des
infractions existantes à des faits qui, antérieurement, ne constituaient pas des
infractions, il commande en outre de ne pas appliquer la loi pénale de manière
extensive au détriment de l’accusé, par exemple par analogie. […] Infliger une peine
plus forte pour la seule raison qu’elle était prévue au moment de la commission de
l’infraction s’analyserait en une application au détriment de l’accusé des règles
régissant la succession des lois pénales dans le temps. »
Rétroactivité in mitius => Georges Vedel (rapporteur au CC) l’analyse comme un corollaire
du principe de nécessité des délits et des peines. Les Grandes délibérations du Conseil
constitutionnel 1958-1986, décision DC n°80-127, sécurité et liberté, p.377 :
« Le principe de la lex mitior n’est pas contraire au principe de non-rétroactivité » car
si on applique loi plus douce généralement ça limite par ex. la peine max, mais le juge
aurait déjà pu juger d’une durée moindre avant (voir exemple qu’il donne p.377 sur
Dalloz bibliothèque).
« La valeur constitutionnelle de la lex mitior ne saurait résulter de ce qu’elle serait un
« principe fondamental reconnu par les lois de la République » [mais…] la lex mitior a
un fondement constitutionnel. L’article 8 de la Déclaration de 1789 veut que la loi
n’établisse que des « peines strictement et évidemment nécessaires ». Or, quand une
loi nouvelle atténue les rigueurs de la loi ancienne, c’est que le législateur reconnaît
que les peines prévues par celles-ci sont devenues excessives et donc ne sont plus
« strictement et évidemment nécessaires » ».
Parler de G. Vedel pourrait constituer une très bonne accroche dans l’introduction
d’une dissertation portant sur la rétroactivité in mitius voire sur la non-rétroactivité tout
court.
2. Un système juridique peut-il appliquer rétroactivement une loi nouvelle
plus sévère ?
Ici montre que pas d’application rétroactive de la loi plus sévère. Nullus crimen nulla poena
sine lege. Pour pouvoir condamner il faut démontrer que le droit international applicable à
l’époque prévoyait l’incrimination.
Cas pratique :
Article 122-1 CP ancien : « N’est pas pénalement responsable la personne qui était atteinte,
au moment des faits, d’un trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli son
discernement ou le contrôle de ses actes.
La personne qui était atteinte, au moment des faits, d’un trouble psychique ou
neuropsychique ayant altéré sont discernement ou entravé le contrôle de ses actes demeure
punissable. Toutefois, la juridiction tient compte de cette circonstance lorsqu’elle détermine
la peine et en fixe le régime. »
Article 122-1 CP nouveau : « N’est pas pénalement responsable la personne qui était
atteinte, au moment des faits, d’un trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli son
discernement ou le contrôle de ses actes.
La personne qui était atteint, au moment des faits, d’un trouble psychique ou
neuropsychique ayant altéré son discernement ou entravé le contrôle de ses actes demeure
punissable. Toutefois, la juridiction tient compte de cette circonstance lorsqu’elle détermine
la peine et en fixe le régime. Si est encourue une peine privative de liberté, celle-ci est réduite
du tiers ou, en cas de crime puni de la réclusion criminelle ou de la détention criminelle à
perpétuité, est ramenée à trente ans. La juridiction peut toutefois, par une décision
spécialement motivée en matière correctionnelle, décider de ne pas appliquer cette
diminution de peine. Lorsque, après avis médical, la juridiction considère que la nature du
trouble le justifie, elle s’assure que la peine prononcée permette que le condamné fasse
l’objet de soins adaptés à son état. »
Conclusion : La cour d’assises a donc commis une erreur de droit en condamnant l’accusé en
vertu de la loi ancienne plus sévère.
Non, même solution ici, dès lors que le jugement intervient après l’EV de la loi (ce n’est pas
la date des faits qui compte mais la date du jugement).
d. S’il était établi en cours de procédure que son discernement était aboli le 1 er
septembre 2011 ?
Article 122-1 applicable aux seules PPh, les PM n’ont pas de discernement, donc celui-ci ne
peut jamais être altéré ou aboli.
La question peut se poser si la personne qui agit pour le compte de la PM a son
discernement aboli / altéré. Cependant pas toujours de cumul -> la PM peut être
responsable même si par ex. son président avait un discernement altéré voire aboli
et n’était donc pas pénalement responsable.
La légalité criminelle et la jurisprudence
Formulation « dont le contenu est déjà précisé par la jurisprudence » pour justifier une
précision suffisante de la loi.
Le CC donne à la JP une place analogue à celle de la loi, qu’elle vient préciser. La
jurisprudence perfectionne la loi. Confusion entre la règle et son application
(l’application devient elle-même une partie de la règle).
Les doutes quant à la règle de droit (imprécision de la loi) ne suffisent pas à considérer que
le texte est non-conforme à l’article 7 CEDH, notamment si la connaissance de la JP aurait pu
permettre de savoir qu’un acte serait incriminé.
Dit l’inverse -> notion de « droit » de l’article 7 englobe aussi la jurisprudence, qui doit
répondre aux mêmes critères qualitatifs que la loi, notamment prévisibilité. Dès lors le
revirement de JP peut s’appliquer rétroactivement, mais seulement dans la mesure où celui-
ci était prévisible pour la personne poursuivie.
Ici fondement invoqué pour justifier la condamnation (« vision civilisée du mariage ») est
assez douteux. L’individu aurait dû prévoir le revirement parce que l’immunité conjugale
serait « dépassée ». Même si on peut saluer la décision il apparaît choquant de mettre de
côté le principe de légalité (avec la légalité formelle et la légalité matérielle {dont
prévisibilité}) en demandant aux citoyens d’anticiper les futures évolutions
jurisprudentielles.
Thèmes de réflexion :
1. Art. 7 § 2 CESDH :
« 1. Nul ne peut être condamné pour une action ou une omission qui, au moment où elle a
été commise, ne constitue pas une infraction d’après le droit national ou international. De
même il n’est infligé aucune peine plus forte que celle qui était applicable au moment où
l’infraction a été commise.
2. Le présent article ne portera pas atteinte au jugement et à la punition d’une personne
coupable d’une action ou d’une omission qui, au moment où elle a été commise, était
criminelle d’après les principes généraux de droit reconnus par les nations civilisées. »
A première vue pourrait sembler paradoxal, on pourrait avoir l’impression que pose une
exception au principe du 7 § 1, pour permettre de condamner même si loi plus douce ne
condamne plus. Mais en fait ce n’est pas le cas, l’article n’a pas une portée générale, il vise
certains cas très précis. Article sert à valider les jugements rendus après la GM2.
Dans le cas où une loi nationale plus douce ne punirait plus les faits considérés à
l’époque comme criminels d’après les PGDRNC, on pourrait quand même punir ces
faits. L’article n’a pas en fait une portée générale, l’objectif n’était pas de créer une
exception générale.
Différent oui. Plutôt une conception type common law => la JP a valeur de loi à part entière.
Cela dépend. Avec Pessino c/ France on pourrait dire oui car empêche rétroactivité du
revirement si non prévisible, ce qui à première vue a l’air d’être une bonne chose (- mais pas
totalement car cela autorise du même coup l’application rétroactive des revirements
considérés comme prévisibles). Cependant à la lumière de Cantoni c/ Fce et SW c/ RU on
peut largement tempérer cette idée car on voit que d’une part le citoyen devrait connaître la
JP, mais même que le citoyen devrait être capable d’anticiper les jugements des tribunaux
au regard des mœurs de la société, ce qui est sidérant.