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UNIVERSITE HASSAN II-CASABLANCA

FACULTE DES SCIENCES JURIDIQUES, ECONOMIQUES ET SOCIALES

MOHAMMEDIA

Licence Droit Privé en langue françaises

Travaux dirigés de procédure pénale- Semestre 6

Pr. A.CHAKRI

Thème :

LA THEORIE DE L’ACTION

Année Universitaire : 2022-2023


LA THEORIE DE L’ACTION

La commission d’une infraction se traduit par un trouble à l’ordre social


dont l’intensité plus au moins grande implique une réaction sociale.
L’application de cette réaction donne naissance à une action exercée au
nom de la société et tendant au prononcé d’une sanction pénale : c’est
l’action publique.

Mais l’infraction est le plus souvent génératrice d’un préjudice matériel ou


moral pour la victime donne naissance à une action, exercée par celle-ci en
vue d’obtenir réparation.

Les notions de l’action publique et l’action civile

En matière pénale, l’infraction donne naissance à deux actions pour


l’application des peines ou action publique et l’action en réparation du
dommage causé ou action civile.

 L’action publique peut être définie comme l’activité procédurale


exercée au nom de la société par le ministère public pour faire constater par
le juge compétent le fait punissable, établir la culpabilité du délinquant et
obtenir le prononcé d’une sanction (peine ou mesure de sureté).

 L’action civile suppose qu’au trouble résultant de l’infraction s’est


ajouté un dommage matériel ou moral causé à une personne privée. Celle-ci
a droit de réclamer en justice la réparation de ce dommage.

L’action prévue à cet effet se définit comme l’activité procédurale


exercée par la victime d’une infraction pour faire constater par le juge
compétent (pénal ou civil) la réalité du préjudice né de cette infraction,
établir la responsabilité du délinquant dans la production du préjudice et
obtenir l’indemnisation ou les restitutions nécessaires.

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LA THEORIE DE L’ACTION

L’ACTION PUBLIQUE

Si l’objet de l’action publique et connu, condamnation à une peine ou à


une mesure de sureté et ne pose pas de difficultés.

Il n’en va pas de même de ses conditions d’existence. L’action publique


suppose l’existence de personnages qui en répondent activement et
passivement.

Activement l’action publique est exercée par un représentant de la


société. Ce représentant étant le ministère public ; passivement elle est subie
par le responsable de l’infraction, qu’il soit un auteur ou un complice. Mais
l’examen du droit positif relève que les sujets actifs et passifs de l’action
publique sont très nombreux et que leurs attributions sont bien nuancées.

I. LES DEMANDEURS A L’ACTION PUBLIQUE

Il convient ici, d’examiner les prérogatives dévolues au ministère


public(A) ; aux magistrats du siège(B), à certaines administrations(C) et à
la victime(D).

A-Le ministère public

La mise en mouvement et l’exercice de l’action publique sont du ressort du


ministère public, représentant de la société dans le procès pénal. C’est ce
qui résulte de l’article 3 alinéa 2 du Code de procédure pénale.

Le caractère général de cette prérogative du ministère public ne se signifie


pas que l’action publique lui appartient en personne. Elle constitue un droit
propre à la société et le parquet n’est que le mandataire de celle-ci pour
exercer ce droit. Cette qualité du ministère public entraine des
conséquences juridiques très importantes.

Le parquet n’a aucun droit de disposition sur l’action publique. Il ne peut

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LA THEORIE DE L’ACTION

pas l’abandonner aux termes d’une transaction conclue avec les


responsables. Il ne peut pas renoncer à poursuivre l’exercice de l’action
publique après l’avoir déclenchée ; enfin, il ne peut pas poursuivre
abusivement.

Ce sont les Procureurs généraux du Roi, près la Cour d’appel qui mettent
en mouvement l’action publique en matière de crime et exceptionnellement
en matière de délit, en vertu d’une disposition spéciale de la loi.

C’est le Procureur du Roi près le tribunal de première instance qui exerce


l’action publique pour les infractions relevant de la compétence de cette
juridiction.

B- Les juges du siège

Il parait choquant de parler de l’action publique exercée par les


juridictions d’instruction ou de jugement en raison du principe procédural
interdisant le cumul par la même autorité et dans le même procès de l’action
publique et de l’instruction ou de l’action publique et du jugement.

Cependant des exceptions d’extension de compétence sont prévues :

 L’article 238 du Code de procédure pénale permet à la chambre


correctionnelle près de la Cour d’appel d’ordonner à la demande du
Procureur général du Roi ou l’une des parties des compléments
d’informations ou d’extension d’informations à des actes qui n’étaient pas
visés par les poursuites précédentes du ministère public.
 Dans le cadre des règles d’extension de compétence, les articles 269
et 357 à 361 du Code de procédure pénale permettent aux juges de
jugement de se saisir d’office et de trancher de suite en cas de commission
de délit ou de contravention au cours de l’audience.

Les pouvoirs conférés au président de la juridiction pour arrêter les troubles


et juger leurs auteurs sont précisés par les articles 357 à 361 du Code de
procédure pénale.

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LA THEORIE DE L’ACTION

Ainsi, si une contravention vient d’être commise en cours d’audience, le


président de la juridiction ordonne d’en dresser un procès-verbal, procède
aux interrogatoires sans que sa décision puisse faire l’objet d’un recours (art.
360, C.P.P).

En revanche, s’il s’agit d’un délit ou d’un crime, le président de la


juridiction procède aux mêmes investigations en matière de contravention,
mais doit différer l’auteur au parquet pour être poursuivi (arts. 360 et 361,
C.P.P).

C- Les administrations

Le droit d’exercice de l’action publique est reconnu à certaines


administrations limitativement prévues par la loi. Il en est ainsi de
l’administration des douanes (Code des Douanes et Impôts Indirects du 9
octobre 1977) ; des eaux et forêts (Dahir du 10 octobre 1917) et de la pêche
maritime (Dahir, 23 novembre 1973).

Ces administrations bénéficient du droit commun du pouvoir de


déclencher l’action publique et à titre exceptionnel d’exercer les poursuites
inhérentes à l’action publique. Cette deuxième hypothèse est intéressante,
car la mise en œuvre de l’action publique a lieu soit concomitamment avec
le ministère public, soit en dehors de toute participation de ce dernier.

Donc, il a lieu de distinguer les deux hypothèses.

a- Exercice de l’action publique par l’administration

concomitamment avec le ministère public

L’administration et le ministère public peuvent déclencher ensemble


l’action publique lorsqu’il s’agit d’infractions sanctionnées par
l’emprisonnement et l’amende, le ministère public réclamera alors
l’application de la peine et l’administration demandera la réparation du
préjudice que l’infraction lui a causé.

Cette répartition acquière une importance particulière à cause du

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LA THEORIE DE L’ACTION

pouvoir de transaction conféré à l’administration. Ainsi le Code des douanes


et impôts indirects du 09 octobre 1977 reconnait à la transaction conclue par
l’administration des douanes un effet général sur l’ensemble de l’action
publique. Elle éteint complétement l’action publique aussi bien en ce qui
concerne l’application de la peine d’emprisonnement que la peine
pécuniaire.

Cet effet de la transaction sur l’action publique s’explique par la nature


artificielle de l’infraction et l’intérêt de l’administration à faire réparer son
dommage en faisant l’économie du procès.

Cet exercice cumulatif et abandonné lorsque seul le ministère public ou


seule l’administration exerce l’action publique. Chacun doit limiter ses
réquisitions à ce qui rentre dans ses compétences, l’administration à la
réparation et le ministère public à la répression.

b. L’action publique exercée par l’administration seule

Dans les hypothèses ou l’administration est habilitée à déclencher les


poursuites, le ministère public est toujours représenté à l’audience, car il fait
partie de la composition du tribunal. Mais ces situations se limitent à des
espèces purement techniques où la loi ne prévoit comme sanction que
l’amende ou la confiscation. Dans ces espèces, le pouvoir de transaction de
l’administration à une portée générale.

Il peut porter sur l’ensemble de l’objet du procès du procès. Mais à la


différence du cas précédent, si l’administration échoue dans ses
revendications, elle peut supporter les frais du procès dans les mêmes
conditions que la partie civile, en cas de relaxe ou d’acquittement de la
personne poursuivie.

C’est là la différence entre l’irresponsabilité de ministère public du résultat


de ses fonctions et le risque encourue par l’administration qui sera considérée
dans ces hypothèses comme un particulier qui se constitue abusivement

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LA THEORIE DE L’ACTION

partir civile.

D. L’exercice de l’action publique par la victime

Le Code de procédure pénale n’a pas retenu la règle des poursuites


automatiques mais a opté pour le principe de l’opportunité des poursuites.
Ainsi le ministère public est en principe libre de poursuivre ou de ne pas
poursuivre. Il peut poursuivre l’auteur ou classer l’affaire sans suite malgré
l’existence d’une infraction.

Pour limiter le risque de négligence ou d’arbitraire, l’article 92 du Code de


procédure pénale permet à la victime de se constituer partie civile devant le
juge d’instruction, ne soit contre personne dénommée ou, soit contre
inconnu.

La constitution de partie civile est moins formaliste. Il suffit que dans la


plainte écrite, datée et signée qu’elle adresse au juge d’instruction, la victime
déclare expressément se constituer partie civile et réclamer des dommages
et intérêts. Le juge d’instruction, transmettra la plainte au Procureur du Roi ou
au Procureur général du Roi (art.93, C.P.P) pour que celui-ci prenne des
réquisitions, lesquelles tendent à ouvrir une information contre personne
dénommée ou non dénommée.

Lorsque la plainte parait insuffisamment justifiée, le Procureur du Roi peut


avant de prendre des réquisitions, demander au juge d’instruction
d’entendre le plaignant partie civile et, le cas échéant, d’apporter toute
pièce utile à l’appui de sa plainte

Lorsque la constitution de partie civile est recevable, elle a pour effet de


saisir les juridictions répressives d’instruction et ainsi déclencher l’action
publique et de faire de la victime une partie au procès pénal.

II. LES DÉFENDEURS À L’ACTION PUBLIQUE

Les défendeurs à l’action publique ou contre qui l’action publique peut


être exercée semblent être limités selon l’article 3 du Code de procédure
pénale aux auteurs, coauteurs et complices des infractions. C’est

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LA THEORIE DE L’ACTION

l’application du principe de la responsabilité pénale individuelle et de la


personnalité des peines. Mais le droit pénal positif prévoit des atténuations à
ces principes en retenant la responsabilité pénale du fait d’autrui.

Il convient d’envisager la situation des auteurs de l’infraction (A) et celle


des personnes civilement responsables (B)

A. Les auteurs de l’infraction


a- Auteurs, coauteurs et complices

Étant d’une action pour l’application des peines, l’action publique ne


peut évidemment être dirigée que contre l’auteur de l’infraction (auteur ou
coauteur) ou le complice même s’il n’a pas encore été identifié (poursuite et
information contre X).

L’action publique a pour objet de mettre en évidence la responsabilité


pénale manifestée à l’occasion d’une infraction et obtenir du juge répressif
qu’il en tire toutes les conséquences en ce qui concerne l’application des
sanctions, il est évident que la poursuite ne peut viser que l’individu qui a agi
ou suspecté d’avoir agi comme auteur ou complice de l’infraction et ce par
application des principes de la responsabilité pénale individuelle et de la
personnalité des peines.

Il découle de ces principes, que les héritiers de l’auteur ou les tiers


civilement responsable, ne peuvent subir l’action publique. Cependant, des
atténuations sont prévues à leur sujet et à l’égard des auteurs intellectuels.

b- Les auteurs intellectuels

Ce sont les délinquants qui évitent l’exécution matérielle de ‘infraction. Leur


activité criminelle se limite à l’aspect intellectuel du trouble. Ils jouent le rôle
du cerveau. Ce sont :

1- L’auteur moral

Il s’agit de criminels qui obligent des personnes conscientes à commettre


des infractions. Leur action se traduit par la force ou la fraude. Le Code pénal

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LA THEORIE DE L’ACTION

donne quelques exemples. Il en est ainsi du fait de faire exécuter un ordre


illégitime (art.225, C.P) ou de faire enlever un mineur (art. 471,C.).

2- L’auteur média, s’efforce de dissimuler sa participation à l’infraction en


provoquant celle-ci par un inconscient. Exemple, inciter un mineur à donner
la mort à autrui, ou un fou à mettre le feu, soit pour nuire à son voisin, soit pour
escroquer une assurance.

3- L’auteur apparemment indirect

Dans les deux catégories précédentes, on note une relation causale


entre une infraction et un élément moral, caractérisé par l’auteur. Or, il arrive
que la simple faute pénale provoque la commission d’une infraction par un
tiers (relation causale apparemment indirecte). Ainsi, la négligence,
l’imprudence et l’inobservation de règlements peuvent engendrer la
commission d’infractions par d’autres personnes. Ainsi, la législation sur les prix
punit le chef d’entreprise pour hausse illicite opérée par ses collaborateurs. Il
en est de même de la pollution des eaux destinée à la consommation, par
l’industrie chimique.

Mais ici, les présumés auteurs peuvent dégager leur responsabilité en


prouvant que le trouble provient de la faute d’une autre personne.

B- Le personnes civilement responsables


Il est évident que les personnes civilement responsables ne peuvent
être pénalement responsables, si elles ne sont pas elles- même auteurs,
coauteurs ou complices de l’infraction reprochée aux individus dont elles
répondent. Le principe de la responsabilité pénale et celui de la personnalité
des peines interdisent de l’intenter contre les personnes qui ne sont que
civilement responsables du délinquant (père et mère d’un mineur, maitres et
commettants) (a). En application du même principe, l’action publique ne
peut, en cas de décès du délinquant être exercée contre les héritiers de
celui-ci (b), car ils ne sont tenus que des réparations civiles.

a -Les héritiers

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LA THEORIE DE L’ACTION

Le décès du délinquant a pour effet d’éteindre l’action publique, mais


l’action civile survit et peut être exercée contre les héritiers pour réparer le
dommage causé à la victime par le délinquant décédé. Cette solution se
justifie par l’idée que cette réparation n’est pas une dette pénale, mais une
dette de nature civile qui grève le patrimoine du de cujus et fait partie de son
passif. Les héritiers qui recueillent la succession, se trouvent obligés de réparer
le préjudice exactement comme l’auteur décédé.

Le problème pratique qui se pose ici, est celui de la détermination du


juge compétent.

Si l’action civile a été déclenchée en même temps que l’action


publique, devant le juge répressif, du vivant du délinquant, l’article 12 du
Code de procédure pénale dispose que le juge pénal demeure saisi l’action
civile et doit se prononcer sur la réparation.

En revanche, lorsque l’action civile n’a pas été exercée du vivant du


délinquant ; elle ne peut avoir lieu contre les héritiers que devant le juge civil.

b-Les tiers civilement responsables

Les tiers civilement responsables que la victime peut poursuivre en


réparation devant les juridictions répressives, sont ceux énumérés par l’article
85 du D.O.C (père et mère, maitres et commettants), auxquels s’ajoutent les
aubergistes et hôteliers.

1. Les responsables du fait d’autrui

 Les parents sont responsables des dommages causés par les


enfants mineurs qui cohabitent avec eux pour défaut d’éducation ou de
surveillance. Ils ne peuvent s’exonérer de leur responsabilité qu’en
démontrant qu’aucune faute ne leur est reprochable (article 85, D.O.C.).
 Les éducateurs, les artisans, les instituteurs et les fonctionnaires du
service de la jeunesse sont responsables des dommages causés par leurs
apprentis et élèves pendant le temps qu’ils sont sous leur surveillance (art. 85,
bis, D.O.C.).

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LA THEORIE DE L’ACTION

 Les employeurs (Maitres et commettants) sont responsables


d’actes dommageables commis par les domestiques et les préposés dans
les fonctions aux quelles, ils les exploitent (art. 85, al. 3, D.O.C.).

L’idée ici est que l’employeur engageant une personne à son service
assume volontairement un risque dont il lui faut répondre. L’employeur n’est
pas admis à se faire mettre hors de la cause. Il est tenu d’indemniser la
victime (sauf à agir ensuite contre son employé pour se faire rembourser).

En plus l’employeur est déclaré responsable même si le dommage a été


commis par le préposé en dehors de l’exercice de ses fonctions, c’est-à-dire
si le préjudice résulte d’un abus de fonction. Exemple : cas d’un employé de
banque qui apporterait son concours conscient à l’échange entre deux
personnes d’une série de chèques sans provisions.

 Les hôteliers et les aubergistes (art. 362, C.P.) qui, sciemment


inscrivent sur leurs registres, sous des noms faux ou supposées, les personnes
logées chez eux, ou qui de connivence avec elles, omettent de les inscrire,
sont responsables des restitutions, indemnités et frais alloués aux victimes des
crimes ou délits commis pendant leur séjour, par les personnes ainsi logées
chez eux.

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