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organisationnel en PME
Cas de l’entreprise MENARA PREFA
EL MANZANI Younes
Courriel : MR.ELMANZANI@GMAIL.COM
Démarche qualité et changement organisationnel en PME
Cas de l’entreprise MENARA PREFA
RESUME :
La mondialisation et l’ouverture continue des nouveaux marchés suscitent la diminution
rapide du cycle de vie des produits suite aux exigences qualitatives des clients, ce qui fait de
la qualité un impératif aussi bien qu’un véritable avantage concurrentiel pour toute entreprise
grande ou petite.
Pour la PME, une démarche qualité peut être un levier de compétitivité et de performance
financière, ainsi qu'une opportunité permettant d’enclencher réellement une démarche de
progrès organisationnel vers plus d’efficacité.
La présente recherche, qui repose sur une étude de cas exploratoire menée auprès d’une PME
certifiée, tentera d’analyser la relation entre la démarche qualité et le changement
organisationnel dans un contexte PME. Notre objet de recherche consiste à explorer les
répercussions organisationnelles de l’adoption d’une démarche qualité sur la structure et la
culture organisationnelle de la PME.
Mots clés : Qualité, PME, changement organisationnel, certification ISO 9001.
ABSTRACT:
Globalization, continuous open markets increases the fast decrease of the life cycle of the
products on the quality requirements of customers, which makes of the quality an imperative
as well as a real competitive advantage for any big or small company.
For SMEs, a quality approach can be a source of competitive advantage and financial
performance, as well as an opportunity to be engaged in a process of organizational progress
towards more effectiveness.
The research which based on an exploratory case study conducted with a certified SMEs, will
try to analyze the relationship between quality approach and organizational change in SME
context, the aims of our research consists in investigating the organizational repercussions of
the adoption of a quality approach on the structure and the organizational culture of the SME.
Keywords : Quality, SMEs, organizational change, ISO 9001 certification.
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Démarche qualité et changement organisationnel en PME
(Le cas : entreprise MENARA PREFA)
Introduction :
Depuis plusieurs années, l’ordre économique et industriel pour l’entreprise est soumis
à une nouvelle définition portée par la mondialisation et l’élargissement de la concurrence
entre les entreprises ; en effet, pour garantir leur pérennité et leur compétitivité ces entreprises
se trouvent quotidiennement amenées à bien améliorer et maîtriser la performance de
l’intégralité de leurs processus (Meunier, 2003). Cet environnement actuel oblige ainsi chaque
entreprise à accroître sa performance globale par l’amélioration du triptyque Qualité, Coût et
Délai (Senechal, 2004) dans le but d’optimiser la fidélisation de sa clientèle et la survie dans
les marchés locaux. Ce qui fait de la qualité un impératif aussi bien qu’un véritable avantage
concurrentiel pour toute entreprise grande ou PME.
Les entreprises ont pris de plus en plus conscience de l’importance d’une démarche qualité
dans leurs organisations. L’intégration de cette démarche dans le système de management
permet aux PME de respecter les règles internationales de conformité, de valorisation et de
perquisition de l’excellence, afin d’assurer la satisfaction de la clientèle qui prend de plus en
plus une forme légitime à travers des associations de protection du consommateur et de lutte
contre la non-qualité. En effet, les PME commencent à se lancer dans la conquête de
nouveaux procédés de management qui constituent à la fois un outil pour se démarquer des
concurrents et de s’aligner aux exigences et aux normes internationales (certification des
procédés de fabrication…), Ainsi qu’un outil incontestable d’implication des dirigeants et de
l’ensemble du personnel dans le développement de l’entreprise.
Shea et Gobeli (1995) trouvent que les PME adoptent des démarches qualité de manière
contrainte soit pour conserver un marché ou encore satisfaire les exigences d'un donneur
d'ordres principalement par la coopération. Pourtant, un grand nombre de PME indépendantes
choisissent d’adopter d’une manière intégrée des démarches qualité dont l’objectif est
d’améliorer leur performance et leur réputation, du fait que la certification ISO présente
certains avantages pour une organisation donnée. Celles-ci pourraient être internes ou
externes à cette organisation. Les avantages internes sont liés aux processus et la structure de
l'organisation, comme l'amélioration de la productivité, l'amélioration de l'efficacité, la
réduction des coûts et le gaspillage, et un meilleur contrôle de gestion. Alors que les
avantages externes pour les organisations sont : l'avantage concurrentiel, l'augmentation de la
vente et des parts de marché, chance possible d'entrer dans de nouveaux marchés, une bonne
relation client, l'identification des clients potentiels et l'augmentation de la satisfaction du
client, etc.
Le management de la démarche doit être considéré comme une stratégie organisationnelle qui
conduit à un processus de changement progressif et continu (Vass. D.J, Kincade. D.H, 1999)
très important et remarquable au sein de l’organisation, La mise en place d’une démarche
qualité au sein de la PME se manifeste par une série de changements organisationnels qui ne
sont pas directement bénéfiques sur le volet commercial, mais qui restent très présents sur le
volet managérial (Fekari. A, 2011). Seulement, l’ampleur et l’intensité de cette transformation
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dépendent des buts et de la perception du dirigeant de la PME. Ainsi, nous pouvons retenir
que la démarche qualité est souvent associée à un modèle de changement organisationnel
(Boronat. P, et Canard. F, 1995), qui constitue un objet de recherche relativement récent
(Aïssani. Y et Bordes. O, 2007b) même si les pratiques dans le domaine de la qualité sont
relativement anciennes.
L’objectif de cette recherche est d’éclaircir l’influence de la démarche qualité sur la structure
et la culture de la PME tout en tenant compte de ses spécificités. Et à travers une tentative
ethnographique, nous parviendrons à mieux comprendre les implications organisationnelles
de la démarche qualité dans un contexte PME. La problématique que nous posons donc est la
suivante : comment la démarche qualité transforme-t-elle la structure et la culture
organisationnelle de la PME en tenant compte de ses spécificités ?
Afin de répondre à cette problématique, nous exposerons dans une première partie le cadre
d’analyse théorique dans lequel s’inscrit cette recherche et à partir duquel nous proposerons
une grille d’analyse théorique, et nous présenterons dans une deuxième partie la méthodologie
retenue, et les résultats de notre étude de cas unique portant sur l’entreprise MENARA
PREFA.
LE CADRE THEORIQUE :
Les démarches qualité en PME se développent d’une façon similaire à celle des
grandes entreprises avec un degré de complexité moins important (Shea. J et Gobelli. D,
1993), cela revient en premier lieu aux principales spécificités qui caractérisent les PME : les
objectifs de l’entreprise et sa gestion sont personnalisés autour du propriétaire dirigeant, une
structure flexible et souple avec un faible effectif qui facilite la participation et le dialogue
entre tous les acteurs de l’entreprise ainsi que l’adaptation aux changements (Plane J.M et
Torres. O, 2003), et la forte imprégnation par l’environnement (Guilhon. A et Weill. M,
1995).
Face aux changements de l’environnement, Godet. M (2004) montre que l'attitude des
dirigeants d'entreprises est conforme à quatre attitudes possibles : passive, réactive, pré-active,
et proactive. Les PME optant pour une démarche qualité peuvent suivre une stratégie
proactive ou bien réactive conduite principalement par le dirigeant, en fonction de son degré
de dépendance vis-à-vis de l’ensemble de ses relations internes et externes : ses objectifs
recherchés, la capacité de changement et la situation de l'entreprise envers son secteur
d’activité et ses partenaires (Guilhon. A et Weill. M, 1995).
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Creplet et Lanoux (2000) considèrent que la stratégie adaptative caractérise le processus
réactif de l’entreprise, le dirigeant dans ce cas fait preuve d’une attitude plutôt réactive
suscitée par un une situation précipitante qui peut accélérer la prise de décision. Par exemple,
l’arrivée de nouveaux concurrents, des produits innovants, ou bien l’accentuation des
exigences des clients en termes des conditions d’achats peuvent tous engendrer ce
déclencheur ; dans cette situation le dirigeant cherche seulement à répondre à ces nouvelles
exigences en recourant à la démarche d’assurance qualité sans se demander si cette dernière
est réellement la solution la plus convenable pour son entreprise.
Creplet et Lanoux (2000) ces mêmes auteurs montrent aussi qu’à travers le processus
proactif, contrairement au processus réactif, le dirigeant fait preuve de plus d’initiative,
persévérance, et agit dans le but de trouver des opportunités qui peuvent soutenir le
changement vers plus de développement de son activité, par l’adoption de nouveaux modes de
production, de nouvelles technologies et le lancement de nouveaux produits sur le marché
comme exemple. La désirabilité et la durabilité de la certification seront plus fortes et grandes
lorsque le dirigeant trouve dans la certification un véritable moyen de créer un avantage
concurrentiel. Messeghem et Varraut (1997) font une illustration par l’exemple des démarches
d'assurance qualité qui ont réussi dans les industries agroalimentaires. Dans ce secteur,
certains dirigeants ont pu promouvoir la relation partenariale avec leurs clients, parce qu’ils
ont su comment anticiper le durcissement des relations interentreprises avant les autres.
Dans leur recherche Guilhon et Weill (1995) avancent que les types de procédures ou
de processus poursuivis par le dirigeant pour conserver ou améliorer le niveau de performance
de l’entreprise déterminent l’intensité des démarches qualité dans les PME. Ils font ressortir
deux niveaux d’intégration de la démarche qualité selon les activités, le but du dirigeant et le
degré de dépendance de la PME :
• le premier niveau cherche à définir d’une manière stricte des procédures portant sur les
objectifs à réaliser, les intervenants et leurs rôles pour la fabrication d’un produit ou le
déroulement d’une fonction relative à la recherche d’assurance qualité, des normes ISO 9000
avec leurs cercles de qualité, et la certification.
• le second niveau se concentre sur les modèles d’autoévaluation c’est-à-dire sur l’analyse des
processus stratégiques des organisations dans lesquelles la qualité s'insère.
Aussi, Guilhon et Weill distinguent deux typologies de démarche qualité qui cohabite au
moins dans La PME :
• la démarche qualité uniciste faisant référence à la qualité relative aux évolutions internes qui
concernent l’association directe entre produits et procédés.
• la démarche qualité pluraliste où la qualité est considérée comme un processus global
couvrant tous les processus de l’organisation ainsi que ceux de ses partenaires amont/aval.
Après avoir testé leur modèle sur un échantillon de 50 PME, Guilhon et Weill trouvent que
l’engagement de ces entreprises se fait fréquemment dans des démarches qualité uniciste qui
peuvent par la suite aboutir ou non à des démarches pluralistes. Et que rarement dans le cadre
d’une stratégie proactive les PME peuvent choisir des démarches qualité pluralistes
directement sans passer par le stade uniciste. Et que les répercussions de la démarche qualité
sont plus au moins importantes en fonction du degré d’intégration et de la typologie de la
démarche qualité.
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III. Evolution des paramètres configurationnels de la PME après l’adoption de la
démarche qualité
1. Standardisation :
La standardisation revient à rationaliser l’organisation par une définition des procédures dans
l’organisation du travail. Les PME sont souvent moins standardisées. Au sein de ces
dernières, le recours aux règles et procédures est moins important, car tous les opérateurs sont
orchestrés par une seule personne qui est en général un propriétaire dirigeant, qui privilégie
une flexibilité organisationnelle de son entreprise.
Les PME engagées dans une démarche qualité sont caractérisées par un niveau de
standardisation très important puisqu’elles font globalement recours aux règles et aux
procédures dans l’exécution des activités.
2. Formalisation :
3. Spécialisation :
4. Décentralisation :
La décentralisation détermine dans quelle mesure le pouvoir décisionnel est réparti et diffusé
dans les niveaux inférieurs de l’organisation.
Une structure est très centralisée lorsque tous les pouvoirs de décision se situent au sommet
de la hiérarchie, c’est le cas des PME où tous les pouvoirs sont entre les mains des dirigeants,
6
dont la plupart d’eux ne développent pas un management basé sur l’esprit d’équipe au sein de
l’organisation, en l’occurrence les PME sont fortement centralisées.
L’engagement dans un processus de certification pousse les PME à être caractérisées par une
plus forte décentralisation. Selon Mintzberg (1982), les entreprises caractérisées par la
décentralisation utilisent encore plus un système de planification et de contrôle pour mieux suivre
leurs décisions.
5. Planification et Contrôle :
La planification est la plus fondamentale de toutes les fonctions de gestion car elle implique le
choix de lignes de conduite engageant le futur de l’entreprise, c’est elle qui préside ainsi à
l’accomplissement des autres fonctions du management. Alors que le contrôle peut être défini
d’une manière générale comme une fonction de vigilance dont l’objet est d’assurer que
l’utilisation des ressources et les résultats seraient conformes aux objectifs tracés par
l’organisation.
Dans la plupart des PME, les dirigeants optent pour organiser leurs entreprises à des
processus cognitifs, qui sont pour la plupart des temps loin des aspects stratégiques, répondant
à des ajustements quotidiens. La PME souffre des moyens financiers et humains pour élaborer
des plans de développement et seul le directeur ou le propriétaire dirigeant fixent la politique
générale de l’entreprise, donc on assiste à une insuffisance ou manque de planification dans
les PME. Ainsi qu’une rigidité au niveau du contrôle due à la centralisation des pouvoirs entre
les mains d’une seule personne qui est le dirigeant.
Le système de planification et contrôle dans les PME suivant une démarche qualité se
distingue par une plus forte formalisation principalement dans le domaine de la gestion de la
qualité.
6. Système d’information :
Un système d’information est défini par l’ensemble des moyens nécessaires à la définition, la
collecte, le traitement, le stockage et le transfert de l’ensemble des informations liées à une
activité de l’entreprise.
La fonction des systèmes d’information est à ses premiers stades dans la plupart des PME,
elle est généralement subordonnée à la fonction comptable et n’a pas l’expertise managériale
nécessaire pour planifier, organiser et piloter l’utilisation des ressources informationnelles
dans l’organisation.
Les PME sous-utilisent leurs systèmes d’information organisationnels, la technologie de
l’information n’affecte dans la plupart des cas que des tâches qui ne sont pas au cœur de
l’entreprise (JULIEN. P. A, 1994).
Les PME dans une démarche d’assurance qualité ont tendance à diversifier de plus en plus les
informations dont elles ont besoin ainsi que leurs modes de collecte. Ce qui favorise la
formalisation du système d’information interne et externe.
D’après les hypothèses des travaux de Messeghem. K (1998) sur l’évolution de la structure
organisationnelle de la PME suite à l’adoption d’un modèle d’assurance de la qualité, on se
rend compte que les entreprises engagées dans un processus de certification se distinguent des
entreprises hors démarche d’un point de vue organisationnel.
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Tableau 1 : Hypothèses relatives à l’évolution du système de gestion
suite à l’adoption d’un modèle d’assurance de la qualité
PME PME dans
hors démarche un processus de
certification
Standardisation Faible Forte
Formalisation Faible Forte
Spécialisation Faible Forte
Centralisation Forte Faible
Système de planification et de Simple Complexe
contrôle
Système d’information Peu élaboré Formalisé
Source : K. Messeghem, (2000), « l’adoption d’un modèle d’assurance de la qualité en PME : entre logique
managériale et logique entrepreneuriale », Communication au 5ème Congrès International Francophone sur la
PME, LILLE (2000).
Les chercheurs utilisent souvent des dimensions différentes pour décrire la culture
organisationnelle. Par exemple, Caldwell, Chatman et O'Reilly (1991) identifient sept
dimensions pour développer leur profil organisationnel de la culture (POC) : l'innovation, la
prise de risque, orientation résultats, le souci du détail, esprit d'équipe, agressivité et stabilité.
Certains chercheurs affirment qu'il y a des principaux facteurs qui influencent le choix de la
culture et de la structure, par exemple, Handy (1993) suggère que ces principaux facteurs
correspondent à l'histoire, la propriété, la taille, la technologie, les objectifs, l'environnement
et les personnes. Hofstede (2001) fait ressortir quatre dimensions de la culture nationale qui
peuvent notamment influencer la culture organisationnelle, à savoir :
- L’individualisme/collectivisme,
- le contrôle de l’incertitude,
- la masculinité/féminité,
- la distance hiérarchique.
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La distance au pouvoir fait référence au degré de tolérance d’une société par rapport à
l’inégalité du pouvoir dans les institutions. « La hauteur de la distance hiérarchique fournit la
réponse au degré de centralisation des décisions qui s’instaure spontanément dans un pays :
plus la distance hiérarchique est haute, plus l’on verra apparaitre une centralisation du
pouvoir. À l’inverse, plus la distance hiérarchique entre les hommes sera courte, plus
facilement l’on pourra instaurer une décentralisation des décisions »1.
Le pouvoir dans les sociétés à forte distance hiérarchique surtout dans les organisations est
centralisé, le style de direction est plutôt autocratique (Hofstede. G, 1987, 2001). Cette
distance hiérarchique se traduit également dans les entreprises, par un fort degré de
dépendance à l’égard de la hiérarchie. Alors que le pouvoir dans les pays à faible distance
hiérarchique a tendance à être décentralisé et les lignes hiérarchiques plus courtes à travers
une pyramide organisationnelle aplatie et des rapports hiérarchiques plus simples.
Hofstede (2001) considère que le degré de distance hiérarque est lié au degré de centralisation
qui indique par ailleurs le degré de concentration des pouvoirs. Ainsi, une entreprise est
centralisée lorsque les pouvoirs sont concentrés entre les mains d’un seul individu.
En petite entreprise, les pouvoirs de décision ont tendance à être réunis entre les mains du ou
des dirigeants, cette centralisation peut être diminuée après l’adoption de la démarche qualité
à travers la promotion d’un management participatif entre les employés et aussi les différents
niveaux hiérarchiques, si on se réfère encore aux études Messeghem. K (1998) ; la mise en
place d’un système d’assurance de la qualité peut avoir pour comme effet de favoriser la
décentralisation. Dans ses études, deux tiers des entreprises hors démarche sont caractérisées
par un fort niveau de centralisation contre un tiers pour les entreprises engagées dans une
logique de certification. On peut déduire alors qu’il existe un lien significatif entre la
décentralisation et la diminution de la distance hiérarchique, c’est-à-dire que la
décentralisation de la prise de décision peut provoquer par la suite une diminution de la
distance hiérarchique au sein de la PME suite à la participation des employés considérée
comme la pierre angulaire d’un processus de certification qualité. La plupart des auteurs de la
qualité appuient sur la mise en œuvre de politiques d’incitation à la participation des
employés au sein de l’entreprise (Olian et Rynes, 1991 ; Deming, 1991 ; Ishikawa, 1984 ;
Glover, 1993 ; Hackman et Wageman, 1995). Puisque, dans la démarche qualité, les employés
restent les mieux placés concernant la résolution des problèmes qui apparaissent et la prise de
décisions dans les tâches qui les concernent. Jensen et Wruck (1997) suggèrent que le
management de la qualité établit un processus de distribution des décisions et transfère
temporairement les prises de décisions de la hiérarchie vers les groupes de résolution de
problèmes. Aussi, Glover (1993) mentionne que le management de la qualité repose sur le
transfert des prises de décisions du haut de la hiérarchie vers le bas.
1
PierreDupriez, (2005), « Entreprises roumaines en transition: études des cultures organisationnelles »,
Edition L’Harmattan.
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LE CADRE EMPIRIQUE :
Pour apporter une réponse à notre question de recherche, nous avons adopté une
méthode de recherche qualitative exploratoire fondée sur une étude de cas réel unique,
permettant selon Tesch (1990) de découvrir des régularités dans un phénomène ou s’efforcer
de trouver des significations du phénomène étudié. Dans notre cas, nous essayerons de
creuser en profondeur dans l’exploration de la relation qui existe entre la démarche qualité et
le changement organisationnel dans le contexte PME qui reste jusqu’à l’instant un terrain peu
exploré. En s’inscrivant dans le cadre d’un paradigme interprétativiste car nous chercherons
auprès de chaque acteur impliqué dans la démarche qualité des explications relatives au
changement organisationnel induit selon son expérience et sa propre vision.
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Concernant l’étude de l’évolution de la structure organisationnelle de la PME nous nous
sommes essentiellement basé sur les travaux de Messeghem. K (1998) qui portent sur les
implications organisationnelles de l’assurance qualité dans les petites et moyennes entreprises
en prenant les paramètres configurationnels de la structure comme variables opérationnelles.
Ainsi pour l’évolution de la culture organisationnelle de la PME suite à son engagement dans
la démarche qualité, le modèle culturel élaboré par Geert Hofstede (1984)
(L’individualisme/collectivisme, le contrôle de l’incertitude, la masculinité/féminité, la
distance hiérarchique) semble très intéressant car, il implique les dimensions culturelles du
modèle dans la structure des organisations, en partant de deux éléments principaux, la
centralisation du pouvoir d’une part, et le degré de standardisation, de spécialisation, de
planification et de formalisation des rôles, d’autre part (Dupriez. P, 2005). Ces deux
principaux éléments correspondent également à deux dimensions culturelles : le contrôle de
l’incertitude et la distance hiérarchique. Aussi parce que ce modèle a connu par ailleurs une
large utilisation et une validation par d’autres études empiriques réalisées depuis plus de vingt
ans maintenant (Hofstede et Bond, 1984, Sondergaard, 1994, Hall, 1989, Hoppe, 1990,
Lowe, 1996, Helmreich et Merritt, 1998, Merritt, 2000, Van Oudenhoven, 2001).
Nous avons fait recours à ce modèle en se focalisant uniquement sur la dimension « distance
hiérarchique » pour mesurer le changement culturel dans la PME, puisqu’elle est, selon notre
réflexion, la variable la plus proche à la structure organisationnelle, au jeu du pouvoir dans
l’entreprise, et plus particulièrement en relation avec le degré de centralisation de la prise de
décision
À partir de notre revue de littérature nous avons pu élaborer une grille d’analyse théorique qui
essaie de réunir l’ensemble des relations que nous souhaitons explorer dans le but d’identifier
s’il y a un lien entre ses différentes variables et non à confirmer un lien de causalité ou de
cause à effet entre ces dernières.
Changement organisationnel
Culture : Structure :
Standardisation
Formalisation
Spécialisation
Distance hiérarchique Centralisation
Planification et contrôle
Système d’information
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La collecte des données a été réalisée par le biais d’une méthode mixte à travers :
- Des entretiens semi-directifs face à face d’une durée de plus d’une heure et demie avec
quatre responsables de l’entreprise ayant une ancienneté de plus de cinq ans (GRH, SMQ,
Production, Responsable QSE du Holding Menara) pour avoir des renseignements sur la
stratégie de l’entreprise suivie pour l’adoption de sa démarche qualité, la nature de la
démarche qualité adoptée, l’évolution de la structure organisationnelle et la relation entre la
centralisation de la prise de décision et la distance hiérarchique. Nous avons respecté le
principe de saturation de l’information défini par Glaser et Strauss (1967). Yin (1990) stipule
que le nombre d’observations est estimé suffisant lorsque chaque nouvelle observation
n’apporte plus d’informations supplémentaires par rapport à la précédente. Yin juge que le
nombre d’observations se situe généralement entre deux et six.
L’analyse par le contenu que nous avons mené, n’a pas permis de donner une idée antérieure
sur l’entreprise, c’est-à-dire le degré d’évolution de la structure et la culture organisationnelle
de l’entreprise Ménara Préfa avant la démarche qualité, de ce fait on mettra l’accent sur un
petit détail qui pourra clarifier un peu l’état de l’entreprise avant, ce dernier réside dans la
durée qui sépare la création de l’entreprise en 2002 et l’adoption de la démarche qualité en
2006, on peut se permettre de dire que les variables que nous essayons d’étudier n’étaient pas
si développées et évoluées durant c’est quatre années de différence, en effet nous partons de
ce postulat pour étudier leur évolution après la démarche qualité en les considérant comme
étant moins évoluées.
Son positionnement en tant qu’entreprise leader sur son marché local (MARRAKECH
TENSIFT AL HAOUZ), a permis à l’entreprise Menara Préfa de suivre une stratégie
volontaire pour s’engager dans sa démarche qualité. Ce qui donne un caractère relativement
plus proactif à la démarche (Creplet et Lanoux, 2000), chose qui est encore pratiquement
inexistante chez la plupart des PME, ces manifestations proviennent d'une stratégie exigée à
une filiale par un groupe ou, parfois, de l'intention d'un dirigeant ayant expérimenté la qualité
totale dans une autre activité (Guilhon. A et Weill. M). Même si la démarche qualité reste
principalement liée à la volonté de répondre aux exigences des clients, le caractère proactif de
la démarche réside justement dans la volonté de s’adapter à la concurrence (Fekari. A, 2011).
La mise en œuvre de la démarche qualité dans l’entreprise Ménara Préfa se présente comme
une remise en cause de son organisation traditionnelle et ses manières d’organiser, puisque la
qualité est considérée comme une démarche complexe de restructuration de l’entreprise, qui a
mis la qualité au cœur de son mouvement au centre de ses actions organisationnelles. Ce qui
en résulte deux types de changements simultanés assez importants, d’une part, un changement
structurel qui se concentre sur le fonctionnement du système de management de qualité en
conformité avec les référentiels et les normes adoptées pour la certification, afin de permettre
à l’entreprise de mettre en œuvre sa démarche qualité et garantir un processus de changement
et d’amélioration continue, de l’autre part, l’interaction entre l’organisation et la démarche
qualité n’est pas passé sans un changement culturel fortement fondé sur l’implication, la
participation, la communication, et la motivation du personnel. Si la démarche qualité a
permis la possibilité de rationnaliser l'aspect structurel et technique de l'entreprise, ceci ne
signifie pas qu’elle n’est plus dans l’informel, même si la formalisation se fait d’une manière
écrite sur papier et à travers des réglementations, c’est le comportement des membres de
l'entreprise qui fait que l’entreprise respecte ou non les normes de la qualité. La démarche
qualité a nécessité des changements profonds dans le mode de fonctionnement de l'entreprise
particulièrement sur l’aspect humain.
1. Standardisation :
L’organisation du travail dans l’entreprise Ménara Préfa est globalement régie par des règles
et des instructions, auxquelles les employés adhèrent, qui trouvent leur fondement dans des
procédures normatives et des processus préétablis d’une façon opérationnelle avec les
personnes qui sont concernées, afin de commander le travail et standardiser les modes de
fonctionnement de chacun. Sauf les petites tâches ou d’autres imprévues qui ne sont pas
13
souvent définies par des règles pour éviter toute rigidité et lourdeur dans l’exécution du
travail.
Le recours aux procédures a connu une forte augmentation après la certification, surtout dans
le service qualité, production et gestion ressources humaines, puisque la certification, en effet,
exige la généralisation et la standardisation des normes au sein de l’entreprise, dans le but de
structurer les espaces d’action des employés, la définition, la contribution et la rétribution de
chacun, de même pour sa place et sa fonction, ainsi que les méthodes et les procédures qu’il
devra mettre en œuvre, sans oublier aussi les modalités de communication et de coordination
entre employés.
2. Formalisation :
La formalisation au sein de l’entreprise Ménara Préfa se situe dans un niveau élevé, expliqué
par l’augmentation de la standardisation, rendant visibles et lisibles les opérations de gestion
dissimulées auparavant, par l’existence d’un système documentaire spécifique qui vise le
respect de la charte, les normes et les systèmes standard de travail. Cette formalisation
cherche à laisser une trace écrite plus accentuée pour la totalité des informations qui touchent
toutes les fonctions dans la mesure où la certification est souvent présentée comme une
démarche qui fait passer la communication interne de l’entreprise d’une communication orale
à une communication écrite (Messeghem. K, 2000) qui facilite les remontées d’informations
consécutives à la mise en œuvre du principe de traçabilité, en organisant la consignation
systématique des opérations et des actions de travail (Campinos-Dubernet. M et Marquette. C,
1999). Ces informations peuvent expliciter l’implicite et par conséquent formaliser les
informations qui étaient déjà implicites (Plane, 1996).
3. Spécialisation :
L’entreprise Ménara Préfa après son engagement dans la démarche qualité se caractérise par
une plus forte spécialisation horizontale (fonctionnelle), c’est-à-dire que les responsabilités
par fonction sont définies au préalable par des fiches de poste, par une cartographie des
processus qui gère le déroulement et les interactions entre ces derniers, permettant de
déterminer les missions, les objectifs, le cadre et le champ de l’intervention de chacun sans
omniscient et chevauchement entre les responsabilités, sans bien négliger une stabilité relative
de la spécialisation verticale. L’entreprise regroupe sept directions qui se composent d’un
certain nombre de services différents, avec la généralisation de certaines fonctions comme la
gestion des ressources humaines et la qualité et aussi une nette progression d’autres fonctions
comme la fonction contrôle de gestion et système d’information qui sont placés à un niveau
très élevé dans l’organigramme juste au-dessous de la direction générale. Cette spécialisation
en général a fait progresser les compétences de gestion des subordonnés relatives à chaque
fonction ce qui se répercute encore en grande amélioration en matière de qualité, tout en
maintenant une polyvalence pour quelques tâches.
4. Décentralisation :
5. Planification et Contrôle :
Toute stratégie au sein de l’entreprise Ménara Préfa émane d’une planification a priori, qui
touche même toutes les fonctions de l’entreprise sans exception, cette planification a connu
une intensité grande due à la démarche qualité dans toute l’organisation et notamment dans
les activités des domaines de la qualité, la finance, la gestion des ressources humaines, la
production et la commercialisation, sur le moyen et le long terme, dans le but d’atteindre
l’excellence dans sa démarche, en se reposant sur la détermination des objectifs et la
recherche des moyens efficaces pour les accomplir, et ce à travers trois aspects selon Kélada
(1992) : un aspect administratif ou structurel, selon lequel la qualité est une fonction qui est
présente au niveau de tous les départements ou les services de l'entreprise, donc une fonction
horizontale dont les activités harmonisent les fonctions verticales; un aspect relatif à
l'organisation technique qui réorganise les systèmes et les méthodes de travail et un aspect
humain de l'organisation.
L’évolution de la planification dans l’entreprise Ménara Préfa exige un contrôle de résultats
par la suite, ce qui explique aussi l’intensité et la sophistication des procédures de contrôle qui
se fait selon la structure du Holding Ménara, c’est-à-dire par le top management du Holding
composé de plusieurs cadres spécialisés responsables de la gestion et du contrôle (par
objectifs) de chaque direction de l’entreprise. L’apparition d’une culture de mesure dans
l'entreprise, a permis de rendre les résultats fiables, autant que le développement de la
capacité d’apprendre des faits passés et des routines organisationnelles, à travers deux aspects
: L’autocontrôle des employés, grâce auquel la qualité invente une régulation inédite qui
consiste à « enchaîner les individus à leurs propres prescriptions et à les transformer
dernièrement en "autocontrôle" » (Rot. G, 1998). Ensuite le privilège de l’évaluation des
actions par la seule hiérarchie qui est la direction générale à travers la vérification des
indicateurs d’atteinte des objectifs et les rapports des audits internes réalisés une à deux fois
par an en plus des audits externes.
L’engagement dans la démarche qualité a permis la formalisation du système de planification
et de contrôle de l’entreprise Ménara Préfa
6. Système d’information :
15
revues, des tests, taux de pannes, réclamations et suggestions clients) ; le choix des
fournisseurs ; et les règles législatives et financières concernant le secteur d’activité. Toutes
ces informations transmises à travers des réunions sont importantes pour élaborer la stratégie
globale de l’entreprise, en les déclinants en sous stratégies, objectifs stratégiques et
opérationnels, puis en tâches.
Donc le système d’information constitue pour l’entreprise Ménara Préfa un outil stratégique
pour collecter, traiter, et diffuser l’information pour des besoins stratégiques et pour une
bonne communication entre les acteurs de l’entreprise. Après sa certification, les besoins en
matière d’information ont tendance à se diversifier (les nouveaux débouchés, le secteur, les
concurrents...) autant que leurs modes de collecte (enquêtes, études de marché, cabinets de
conseils externes…) menés par les différents responsables afin d’être toujours à l’écoute de
l’environnement, ce qui a incité une forte élaboration et formalisation du système
d’information que ça soit (au niveau ) aux niveaux interne et externe, puisqu’on assiste à un
changement au niveau des rapports au travail. A la base les acteurs qui étaient de simples
consommateurs de l’information deviendront des auteurs producteurs de l’information. Donc
la démarche qualité dans l’entreprise Ménara Préfa n’a pas amélioré seulement les systèmes
en matière de méthodes, de procédés, et de politiques etc. mais le système de l’entreprise dans
sa globalité, incluant le système d'information qui a facilité la gestion de ses relations, d’un
côté, avec l’environnement externe, avec les fournisseurs pour assurer la conformité des
matières premières et des fournitures et services aux exigences spécifiques de l'entreprise, et
d’un autre côté, avec les clients afin de garantir la conformité de la production aux besoins
actuels et futurs du marché.
Le traitement des données quantitatives que nous avons collectées par la distribution
du questionnaire au sein de l’entreprise nous a permis tout d’abord de construire un profil
culturel de l’entreprise Menara Préfa.
16
D’après la présentation en radar de nos résultats on constate que la distance hiérarchique est
la deuxième dimension culturelle à avoir un faible pourcentage (56%) après celle de la
masculinité/féminité, ce qui montre qu’il y a un bon degré d'égalité (Brown, 1995). Les
supérieurs hiérarchiques et leurs subordonnés considèrent les uns et les autres comme égaux
et la distribution du pouvoir dans l’organisation se fait seulement sur la base des rôles et des
fonctions. Les supérieurs devraient consulter leurs subordonnés aux sujets de leur travail et
aux décisions qui peuvent les affecter, cependant, il n'y a pas de conflit à ce que le supérieur
partage la décision finale (Hofstede, 2005). Donc on perçoit l’existence d’une diminution de
la distance hiérarchique au sein de l’entreprise Menara Préfa, que nous expliquerons par
l’adoption de la démarche qualité.
Les actions entreprises notamment par la cellule qualité visant la standardisation des procédés
et des qualifications ont pour principal objectif de définir clairement les rôles, par conséquent
les responsabilités de chacun à l’échelle de Ménara Préfa, en vue de faciliter le contrôle et la
prise de décision et renforcer le comportement d’engagement qui s’avère une exigence
nouvelle de la part de la direction de l’entreprise. La modification de la culture
organisationnelle est un processus long que Ménara Préfa a choisi de l’entamer avec
prudence, souplesse et de manière incrémentale pour limiter les résistances et faciliter
l’adhésion , par la mise à niveau de la fonction RH et le lancement des programmes de
formation à la qualité, qui ont pour objectif la consolidation de la communication et le
développement de la logique client-fournisseurs dans l’entreprise, considérée comme un
espace d’interaction entre le personnel et la direction, un espace de reconstruction de la
confiance entre les différents partenaires de la qualité (Chariler, 1992). Le changement
culturel a passé tout d’abord par les attitudes et la participation effective des employés dans
les domaines qui les concernent.
Les responsables interviewés affirment que la mise en place de la démarche qualité au sein de
l’entreprise Ménara Préfa s’est accompagnée par la mise en place de nouveaux dispositifs
motivationnels, relationnels et de partage de pouvoir. Le personnel commençait à développer
17
ce que l’on appelle selon Moënne C. (1994)2 « une nouvelle compétence relationnelle : la
substitution de l’autorité forcée par une autorité fondée sur la création d’un climat de
discussion et de reconnaissance », permettant à chaque subordonné dans l’organisation de
prendre en main la situation par une grande visibilité de l’ensemble des processus qui définit
la place de chacun. Donc le rapport de subordination qui relie le personnel est changé, ce qui a
impliqué une transition d’une organisation classique, dans laquelle la décision des uns
structure l’action des autres, vers une organisation « qualité », où les responsables et les
employés peuvent être en partie les mêmes et se situer à un moment donné du côté de la
décision et à un autre du côté de l’exécution, puisque dans certains cas l’employé opérateur
devient l’écrivant des procédures à appliquer par la suite, donc la procédure de prise de
décision vise à ne pas décider à la place, ou dans le dos des personnes concernées. Cependant
la règle n’est plus le monopole du supérieur hiérarchique.
Cette tendance vers la décentralisation de la prise de décision, ou du pouvoir, garantie à
chacun un nouveau intervalle d’autonomie (Yoo et al., 2006). Selon Sophie Dubuisson qui
montre que « la délégation aux dispositifs d’une partie de l’action et des responsabilités
ouvre aux acteurs de nouveaux espaces d’autonomie et d’action » cet effet d'autonomisation
donne aux employés le pouvoir de prendre des décisions précédemment prises par les
responsables, en leur offrant les informations nécessaires pour prendre les bonnes décisions,
et en assurant la formation nécessaire pour comprendre l'entreprise, et en attachant les
récompenses des employés pour leur performance (Lawler et al., 1995).
Dès lors que les règles d’action sont coproduites, les employés voient leur autonomie
reconnue : ils sont reconnus dans leur capacité de produire les règles et normes d’action. Ils
sont donc en situation d’autonomie, c’est-à-dire selon Dubois et al. qu’il y a « L’émergence
de nouveaux espaces de négociation et d’interaction »3. L’autonomisation des employés de
l’entreprise Ménara Préfa par la démarche qualité a poussé l’organisation à partager la
responsabilité et le pouvoir entre les différents niveaux hiérarchiques au point de diminuer la
distance hiérarchique. Il y’a un changement au niveau de la perception du degré d’inégalité de
pouvoir entre celui qui détient le pouvoir hiérarchique et celui qui y est soumis par le biais de
la diminution du degré de la dépendance, du fait que les employés croient que tous les
membres devraient avoir des droits égaux (Hofstede, 2001), dès lors il y’a dans certaines
mesures une interdépendance entre ceux qui ont et qui n’ont pas le pouvoir, entre
responsables et employés, et par conséquent les supérieurs traitent leurs subordonnés avec
respect, loin des privilèges et des symboles de statuts, de même les subordonnés peuvent être
chargés de missions importantes. Les responsables interviewés témoignent que leur
participation dans la prise de décision n’a pas augmenté leur sentiment et statut relatif au pouvoir
au sein de l’entreprise, puisque l’égalité du pouvoir correspond à l’égalité des responsabilités en
fonction du poids du poste et aussi le degré de coopération entre les équipes de travail ce qui est
2
Cite in Cochoy. F et DeTerssac. D, « Les enjeux organisationnels de la qualité : une mise en
perspective ».
3
Cite in Cochoy. F et DeTerssac. D, Op. Cite.
18
Conclusion :
La décision de l’adoption d’une démarche qualité dépend largement de la personnalité
du dirigeant, un dirigeant du type CAP ou managérial qui vise la croissance, l’autonomie puis
la pérennité de son entreprise n’hésitera pas d’adopter un système de management de la
qualité susceptible de remettre en cause les spécificités de son entreprise, selon une stratégie
proactive afin d’influencer son environnement au lieu de le subir ou de répondre uniquement
à ses exigences. Par notre exploration de l’entreprise Ménara Préfa nous avons déduit que la
proactivité du dirigeant qui résulte d’un réel engagement a pu le pousser à s’inscrire dans une
démarche qualité pluraliste prenant en considération tous les processus de l’organisation en
amont/aval, cette relation entre proactivité et "pluralisme" de la démarche qualité est due au
moyen financier dont la PME dispose du à son appartenance au grand Holding Ménara
puisque la démarche qualité fait courir à la PME un risque financier aussi bien
qu’organisationnel.
Les résultats de notre recherche ont répondu plus ou moins à notre problématique de
recherche puisqu’ils ont conclu que l’adoption de la démarche qualité nécessite des
implications organisationnelles au sein l’entreprise qui donnent naissance à des changements
très importants :
La démarche qualité en PME introduit une culture qualité qui sera un sous-ensemble de sa
culture globale. Elle reflète l'approche générale, les valeurs et l'orientation vers la qualité qui
imprègnent les actions de l'organisation, une culture édifiée sur une large intégration des
différents groupes professionnels autour d’objectifs managériaux qui consistaient bien plus à
faire de la qualité qu’à faire de la gestion.
Notre deuxième proposition : « la démarche qualité en PME permet une inter-liaison entre le
changement structurel et culturel », est acceptée puisqu’on a constaté que la diminution de la
distance hiérarchique trouve son explication dans l’existence d’une relation avec la
décentralisation de la prise de décision, une conséquence du changement structurel induite par
la certification de l’entreprise, c’est-à-dire que la décentralisation de la prise de décision
stimulée par l’orientation de l’entreprise vers un management plus participatif donnera plus
d’autonomie et d’interdépendance entre employés et développera le système d’information et
de communication de l’entreprise qui améliore à son tour la valorisation des individus en les
unissant sur les objectifs aussi bien que sur les moyens nécessaires pour les atteindre, suite à
une communication interne très forte, sans bien négliger que ce système de communication
qui implique non seulement une langue commune, mais aussi des croyances, des valeurs, des
attitudes, des émotions et des points de vue, est renforcé par l’introduction de la culture
qualité qui cherche à promouvoir le rapprochement inter-niveaux hiérarchiques au seins de
l’entreprise et en effet la diminution de la distance hiérarchique.
La limite de notre recherche est due au fait que l’étude a été réalisée sur une seule entreprise,
ce qui n’est pas représentatif. Ce travail permet d’ouvrir de nouveaux jalons de recherche,
c’est ainsi que d’autres études plus approfondies peuvent être entamées par la suite afin de
tester nos résultats.
Aussi d’après notre étude à l’entreprise Ménara Préfa nous avons relevé l’évolution de sa
structure vers plus de bureaucratisation selon les travaux de K. Messeghem (1998), et la
transformation de sa culture organisationnelle vers moins de distance hiérarchique après la
démarche qualité, ce qui semble contradictoire puisque la bureaucratisation ne favorise pas
assez la faible distance hiérarchique vue la rigidité des procédures et règles bureaucratiques
véhiculées par ce genre de structure, cette contradiction on peut la considérer comme une
nouvelle variable qui émerge de notre étude empirique et qui peut faire l’objet d’une nouvelle
piste de recherche.
20
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