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Repenser le travail en sortant de l'économie

Article  in  Krisis · June 2018

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Arnaud Diemer
Université Clermont Auvergne
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Arnaud Diemer (2018), « Repenser le travail en sortant de l’économie », KRISIS, vol 48.

Repenser le travail en sortant de l’économie


Arnaud DIEMER
OR2D, Université Clermont Auvergne

« Notre conception du monde nous a conduits à bâtir nos institutions et c’est


d’elles que nous sommes maintenant prisonniers. Les usines, les agences
d’information, les hôpitaux, les pouvoirs publics, les écoles produisent pour
nous satisfaire des biens et des services et nous n’imaginons plus le monde
autrement » (Illich, Libérer l’avenir, 1971, p. 155).

Si le travail est souvent associé à une tâche (plus ou moins pénible) qu’il convient de réaliser
(on devrait ajouter sous les ordres d’un responsable), à une rémunération qu’il s’agit d’obtenir
pour assouvir un besoin ou encore à une action de produire quelque chose, c’est pour alimenter
un mythe construit autour de deux principes : le productivisme et le consumérisme. Ces deux
principes constituent les deux piliers du système capitaliste et régulent la société de croissance.
Le raisonnement économique laisse ainsi peu de place à la dimension sociale et psychologique
du travail, celles qui rappellent que le travail renvoie à l’épanouissent personnel, à une
intégration sociale réussie, au tissage de liens sociaux... Repenser le travail suggère ainsi de
sortir de l’économie afin d’initier un nouveau projet de société. Pour ce faire, nous proposons
de passer par les deux étapes suivantes : 1° la déconstruction de notre imaginaire, 2° la sortie
du travail tout simplement (peut-être la phase la plus difficile à mettre en œuvre). Ces deux
étapes, qui s’apparentent à une digression autour de l’utopie (nous entendons ici l’espoir ou le
désir pour une vie meilleure), nous semblent nécessaires et justifiées lorsqu’il s’agit de proposer
une alternative à un modèle profondément ancré dans l’idéologie.

1. Le travail, la déconstruction d’un mythe


Le mythe est tenace, car le travail a engendré plusieurs représentations que l’on peut résumer –
de façon non exhaustive – par les formules suivantes : 1° le travail est une activité humaine
appliquée à la production, à la création et à l’entretien de quelque chose (difficile d’encastrer le
travail dans une dimension raisonnable, le travail peut être teinté de folie, c’est le travail de
l’artiste ou du visionnaire et donc de la réhabilitation de la folie comme acte créatif); 2° le
travail est une activité professionnelle régulière et rémunérée (c’est ce qui différencie le temps
de travail du temps de loisir lorsqu’il est encore possible de les séparer) ; 3° un lieu d’exercice
d’une activité (physique, l’usine ; suggestif, la délocalisation) ; 4° l’ensemble des opérations
parcellaires que l’on doit exécuter pour réaliser quelque chose (c’est la division des tâches vue
par Adam Smith en 1776 ou encore l’organisation scientifique du travail préconisée par
Frederick Taylor en 1911) ; 5° c’est une charge ou un coût (qui peut être caché) qu’il convient
de minimiser (stratégie d’externalisation) ; 6° c’est un ouvrage manuel, artistique, intellectuel
auquel on donne une valeur (certains travaux peuvent donc être sous-valorisés, d’autres peuvent
avoir une valeur différente du prix qu’on veut bien leur attribuer) ; 6° c’est une technique
permettant de travailler une matière, d’utiliser un outil (le travail entre ainsi en interaction avec
la technique et la technologie) ; 7° ce sont des exercices (routines) permettant d’acquérir la
maîtrise d’une activité (on est ici dans le registre des connaissances et des compétences) ; 8°
c’est une activité laborieuse (au sens de pénible) de l’homme considéré comme un facteur
essentiel de la production et de l’activité économique ; 9° c’est un résultat produit par quelque
chose (une force physique nécessitant un apport énergétique) et qu’il convient d’évaluer…

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Arnaud Diemer (2018), « Repenser le travail en sortant de l’économie », KRISIS, vol 48.

Ces représentations jouent un rôle important et participent à notre vision du monde. D’un
point de vue étymologique, elles désignent « l’action de replacer devant les yeux ». Il s’agit de
rendre compte de quelque chose d’absent présent mais également de placer ce quelque chose
(une idée) devant les yeux de l’autre. L’action est un mode de représentation parmi d’autres,
l’image, la figure, le graphisme ou l’abstraction constituent également des moyens de visualiser
une idée ou un concept. La notion de représentations peut cependant être abordée d’un double
point de vue : sociologique ou psychologique.
Du point de vue sociologique, la question des représentations renvoie directement aux
travaux de Durkheim. Dans un article publié dans la Revue de Métaphysique et de Morale,
Emile Durkheim (1898) part du constat que la vie collective comme la vie mentale est faite de
représentations. Nier qu’elles existent serait contraire à l’observation des faits : « Puisque
l’observation révèle l’existence d’un ordre de phénomènes appelés représentations, qui se
distinguent par des caractères particuliers des autres phénomènes de la nature, il est contraire
à toute méthode de les traiter comme s’ils n’étaient pas » (1898, p. 5). Durkheim distingue
cependant trois types de phénomènes, les processus physico-chimiques du cerveau, les
représentations individuelles et les représentations collectives. Ces dernières sont associées à
des croyances, des règles ou des pratiques communes à tous les membres d’une société : « Si
l’on peut contester peut-être que tous les phénomènes sociaux, sans exception, s’imposent à
l’individu du dehors, le doute ne paraît pas possible pour ce qui concerne les croyances et les
pratiques religieuses, les règles de la morale, les innombrables préceptes du droit, c’est à dire
pour les manifestations les plus caractéristiques de la vie collective. Toutes sont expressément
obligatoires ; or l’obligation est la preuve que ces manières d’agir et de penser ne sont pas
l’œuvre de l’individu, mais émanent d’une puissance morale qui le dépasse » (1898, p. 17).
Durkheim pense ainsi les représentations collectives comme une réalité sociale.
Du point de vue de la psychologie sociale, Moscovici (1961) a précisé dans son ouvrage La
psychanalyse, son image et son public que la notion de représentation (sociale) devait rendre
compréhensible la réalité tout en s’insérant dans un échange avec autrui et en mobilisant les
ressources de l’imagination : « La représentation sociale est un corpus organisé de
connaissances et une des activités psychiques auxquelles les hommes rendent la réalité
physique et sociale intelligible, s’insèrent dans un groupe ou un rapport quotidien d’échanges,
libèrent les pouvoirs de leur imagination » (1961, p. 27-28). Il ajoute quelques pages plus loin
que la représentation n’a pas besoin de coller à la réalité, c’est avant tout une forme de
reconstruction de la réalité : « Représenter une chose, un état n’est en effet pas simplement le
dédoubler, le répéter ou le reproduire, c’est le reconstituer, le retoucher, lui en changer le
texte » (1961, p. 56). La notion de représentation désigne ainsi les éléments mentaux qui se
forment par nos actions et qui informent nos actes. Elle se caractérise par un processus de
construction et de fonctionnement distinct d’autres manières de penser. La notion de
représentation (sociale) regroupe un certain nombre de traits tels que la symbolique,
l’imaginaire, la cognition, l’action et l’interaction…
On le voit, la conceptualisation des représentations par la sociologie et la psychologie sociale
font de ces dernières un véritable objet d’étude. Etudier une représentation sociale, comprendre
son fonctionnement, nécessite cependant d’en cerner sa structure et son organisation. Selon
Abric (2011), « toute représentation est organisée autour d’un noyau central » (2011, p. 28).
Ce noyau central est l’élément fondamental de la représentation, car c’est lui qui détermine à la
fois la signification et l’organisation de la représentation. Le noyau central (ou structurant)
d’une représentation assure deux fonctions essentielles : une fonction génératrice (il est
l’élément par lequel se crée ou se transforme, la signification des autres éléments constitutifs
de la présentation) et une fonction organisatrice (c’est le noyau central qui détermine la nature
des liens qui unissent entre eux les éléments de la présentation. Abric ajoute que le noyau central

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Arnaud Diemer (2018), « Repenser le travail en sortant de l’économie », KRISIS, vol 48.

a une propriété importante : « c’est l’élément le plus stable de la représentation, celui qui en
assure la pérennité dans des contextes mouvants et évolutifs » (ibid). Le noyau porte ainsi en
lui, une double identité : d’une part, il constitue dans la représentation l’élément qui résiste le
plus au changement, et d’autre part, toute modification du noyau central entraîne une
transformation complète de la représentation. Si le repérage du noyau central s’avère
déterminant pour connaître l’objet même de la représentation, il n’est pas suffisant pour
comprendre la structure et l’organisation de cette même représentation. En effet, autour de ce
dernier, gravitent des éléments périphériques. Ils sont en relation directe avec le noyau central,
ils constituent l’essentiel du contenu de la représentation, sa partie la plus accessible : « ils
comprennent des informations retenues, sélectionnées et interprétées, des jugements formulés
à propos de l’objet et de son environnement, des stéréotypes et des croyances » (Abric, 2011,
p. 33). Trois fonctions leur seraient assignées (Flament, 1989, 2011) : une fonction de
prescription des comportements (les éléments périphériques indiquent ce qu’il est normal de
faire ou de dire dans une situation donnée, compte tenu de la signification et de la finalité de
cette situation) ; une fonction de modulation personnalisée des représentations (une
représentation unique, organisée autour d’un noyau central, peut donner lieu à d’apparentes
différences, liées à l’appropriation individuelle ou à des contextes spécifiques) et une fonction
de protection du noyau central (les éléments périphériques fonctionnent comme un système de
défense, ce sont eux qui peuvent supporter certaines contradictions inhérentes aux
représentations sans pour autant provoquer un bouleversement complet du noyau central).
C’est au nom de cette analyse des représentations que nous entendons ici cerner les débats et
les discussions relatives au travail. Ce dernier occupe une place particulière dans la société, il
rythme notre vie, occasionnant des troubles bipolaires (phase d’excitation lors d’un premier
recrutement, à la suite de la réussite d’une mission… et phase de dépression lors d’un
licenciement, à la suite d’un échec professionnel). Pour ce faire, il convient de revenir sur les
trois mythes qui annihilent toute pensée créatrice, qui nous asservissent et nous rendent
toxicodépendants à une certaine forme de travail. Si le travail devait avoir un visage, une figure,
une représentation dans nos sociétés modernes, alors il prendrait les traits suivants : 1° le travail
est un droit, plus qu’une forme d’épanouissement personnel ; 2° le travail n’est pas une fin en
soi, il n’est que l‘expression d’un long processus qui ne garantit pas en bout de chaîne que les
résultats soient à la hauteur des attentes (obligation de résultat vs obligation de moyens) ; 3° le
travail s’inscrit dans une société bercée par les douces berceuses de la croissance et du
capitalisme.
1.1 Le travail, un droit plutôt qu’un épanouissement personnel
Associer le travail à un droit, n’est pas une nouveauté en soi, on pourrait même argumenter
que les avancées significatives en droit du travail ont été largement le fruit de conflits et de
revendications sociales qui ont baigné l’Europe tout au long de son histoire. Il nous semble
cependant qu’il y ait un moment significatif, un point temporel qui a fait basculer nos sociétés,
dans la reconnaissance du travail en tant que droit de propriété, valeur travail, travail-
marchandise, salaire-prix… Ce sont les écrits (1664 – 1697) de John Locke et plus précisément
ses considérations en matière de libertés, droit naturel et de travail. Les idées philosophiques et
économiques de John Locke ont été profondément influencées par les travaux d’Aristote et des
scolastiques médiévaux ; des légistes du droit naturel tels que Cicéron, Grotius et Pufendorf ;
des différents représentants (Descartes, Boyle, Newton) de la philosophie naturelle ; puis par
ses observations personnelles du monde économique (ces réalités, Locke en a pris conscience
auprès de Lord Shaftesbury). Aux dires de Fox-Bourne (1876), l’un des biographes du
philosophe anglais, John Locke occuperait une place importante dans l’histoire des idées. D’une
part, il est loué par certains comme le fondateur de la politique libérale moderne et de l’esprit
capitaliste. D’autre part, il a contribué à éclaircir les questions économiques et monétaires de

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Arnaud Diemer (2018), « Repenser le travail en sortant de l’économie », KRISIS, vol 48.

son temps. Dans ce qui suit, nous souhaiterions défendre la thèse selon laquelle le libéralisme
de Locke ne se limite pas à une simple réinterprétation en faveur des libertés anglaises, du droit
naturel fondé sur un État de nature producteur de droits individuels. Si Locke établit (i) un lien
entre état de nature et société économique en insistant sur les notions de libertés individuelles,
d’égalité et de loi naturelle, il pose selon nous (ii) les fondements de la société économique en
introduisant la question du droit naturel à partir d’une conception originale du travail. Le travail
permet de retirer les biens de l’état commun en délimitant les contours du droit de propriété.
(i) Si l’espèce humaine fait partie de l’ordre naturel crée par Dieu, elle est également l’artisan
de sa propre histoire. John Locke nous propose ainsi une étude conventionnelle des hommes
dans l’état de nature et de la loi naturelle qui régit cet état. Cette loi de nature peut être définie
comme « un décret de la volonté divine, accessible grâce à la lumière naturelle, révélatrice de
ce qui est conforme ou non à la nature rationnelle, et par là même, elle ordonne ou proscrit »
(1664, p. 7). L’homme en prend connaissance par la raison et la sensation, si et seulement si, il
choisit d’employer ses facultés intellectuelles à cette fin. Chaque homme a ainsi la tâche de se
préserver et de faire le maximum pour préserver le reste de l’humanité.
(ii) Ces prémisses étant posées, Locke peut introduire deux thèmes majeurs : les droits de
propriété et les limites de l’autorité politique. Les hommes prétendent à des droits sur la nature
mais également sur les autres hommes. En outre, ils ont des responsabilités dans l’exercice de
ces droits : des responsabilités envers Dieu et envers les autres hommes. Le fondement des
droits de propriété réside dans le travail. C’est en effet le travail qui soustrait les biens communs
à l’indivision et qui établit le droit de propriété. Locke ira jusqu’à considérer que le travail crée
la valeur, reprenant à son actif, la distinction entre valeur d’usage et valeur d’échange.
Si le travail et les droits de propriété sont à l’origine de la société économique, ils ne sont pas
suffisants pour assurer sa préservation et sa stabilité. La croissance de la population et l’usage
de la monnaie, occasionnant rareté de la terre et thésaurisation des richesses, déstabilisent cette
stabilité existentielle. Selon Locke, seule une délégation des pouvoirs politiques et judiciaires à
une institution – ici le gouvernement – permettrait de préserver et de réguler la propriété. Ainsi,
à côté de « l’histoire traditionnelle » de l’État de nature, du contrat social et des différents
arrangements institutionnels, Locke introduit une histoire moderne des institutions politiques
dont la principale dynamique réside dans le développement économique des sociétés (droit de
propriété, valeur travail et valeur d’échange, loi de l’offre et la demande, place de la monnaie)
et l’émergence de la société marchande. Dans son Report on the Poor, présenté au Board of
Trade en 1697, Locke n’hésitera pas à rappeler que le travail des pauvres peut rapporter un
surplus à la collectivité, à condition de mettre en place des institutions, des mécanismes
autoritaires permettant d’utiliser cette force de travail théoriquement disponible.
Ce détour par la pensée économique nous paraît ici indispensable pour cerner la place du
travail dans les sociétés modernes, et notamment son affiliation aux idées libérales. En
s’émancipant des normes et des règles religieuses, des pouvoirs du monarque (lois sur les
pauvres en Angleterre) et des princes, le travail a constitué le socle des sociétés économiques,
et sa marchandisation n’est que le résultat d’un long processus, qui a commencé dans l’antiquité
(esclavage) et qui continue à se propager aujourd’hui sous des formes plus subtiles. Nos
schémas de pensée sont toujours alimentés par des mots clés (liberté, droit, valeur, prix,
marchandise…), la seule issue serait de rompre avec cette conception du droit de propriété et
de s’engager dans la voie de l’épanouissement personnel, une sorte de révolution intellectuelle
qui peut s’appuyer sur la pleine conscience (réflexion sur le temps présent).

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Arnaud Diemer (2018), « Repenser le travail en sortant de l’économie », KRISIS, vol 48.

1.2 Le travail, une variable d’ajustement à court terme plutôt qu’un processus
d’ajustement à long terme

Si le droit de propriété constitue un premier mythe1 (au sens philosophique du terme), il en est
un second qui a fait définitivement basculer le travail dans sa dimension économique. En effet,
en donnant une valeur au travail, en proposant des prix (salaires) rattachés à des marchés
(encore faudrait-il prouver qu’ils existent réellement), en prétextant que l’efficience de ces
marchés devait passer par la flexibilité (numérique sous forme de licenciements ; géographique
sous forme de mutations ; fonctionnelle sous forme de changements de postes ou de métiers…),
certains économistes et grandes institutions internationales ont érigé un mythe aussi destructeur
qu’un tsunami : « s’il n’y a pas assez de travail, c’est qu’il y a encore trop de rigidités »… Au
final, le travail n’est ni plus ni moins qu’une variable d’ajustement à court terme, et son
corollaire, le chômage, permet de le convertir en stock (nombre de chômeurs à l’instant t) ou
en flux (nombre de personnes inscrites à Pôle emploi) au gré des souhaits des décideurs
politiques.
Comme toute variable d’ajustement opérant dans un univers marchand, l’horizon temporel
est court-termiste, quantifiable et prévisionnel.
Le court – terme car le travail est un facteur de production au service de la croissance et du
capitalisme. Quand la croissance s’effondre, il faut réduire le personnel (la barbarie des termes
est sans équivoque : il s’agit de dégraisser), la question des réembauches ne se posera qu’une
fois la croissance revenue (cela explique pourquoi nous scrutons l’horizon à la recherche de
voyants ‘positifs’). Quand le capitalisme devient financier, son horizon est le profit à court.
Seuls les bénéfices transformés en dividendes pour actionnaire (juste récompense de leur effort
d’épargnant) sont légitimes, seules les activités apportant un retour sur investissement de 20 à
25% sont envisagés. Le travail ne peut que s’inscrire dans une soumission librement consentie.
Quantifiable car nous avons besoin de savoir combien d’emplois sont créés, détruits,
transformés… (le travail est soumis au principe de la création de postes, la dimension
qualitative du travail - épanouissement, convivialité, amélioration des conditions de travail…-
passe au second plan).
Prévisionnel car nous ne faisons que partir du passé pour extrapoler le futur… autrement dit,
comme il nous est difficile de penser autrement, nous appliquons les mêmes méthodes (contrats
aidés ou publics durant les crises, subventions aux entreprises pour réduire les charges…).
A ce petit jeu, les nouvelles générations paient un lourd tribut : plus de 30 plans jeunes mis
en place en France depuis les années 70 et un chômage annihilant toute ambition future au
niveau européen (dans le cas grec, il s’agit tout simplement de faire l’impasse sur trois
générations…). Si le salut doit venir de ces jeunes générations, elles devront faire leur
révolution et provoquer une véritable rupture sociétale.


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Précisons que dans la pensée marxiste, ce mythe sert à expliquer l’exploitation du prolétariat, la création de la
plus-value et la répartition salaires – profits.

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Arnaud Diemer (2018), « Repenser le travail en sortant de l’économie », KRISIS, vol 48.

Figure 1 : Chômage des moins de 25 ans

Source : Eurostat (2016)

Cet ajustement du travail au gré des sursauts de la machine économique ne tient pas compte
d’un double phénomène :
(1) la situation de travailler ne correspond plus à une situation normale, de ce fait, il faut penser
le travail comme un processus avec des phases de transitions, plus ou moins longues. Schmid
(2001) et Gazier (2005, 2008) sont revenus sur ce qu’ils appellent « l’aménagement
systématique et négocié de l’ensemble des positions temporaires de travail et d’activité dans
un pays ou une région » (Gazier, 2005, p. 131). Ces positions temporaires, dénommées
transitions, comprennent tous les écarts possibles par rapport à la situation de référence
constituée par l’emploi régulier à temps plein. Il s’agit aussi bien de périodes de formation ou
de congé parental, de mi-temps tout court ou combinés à une autre mi-temps, de préretraite à
temps partiel que de périodes de recherche d’emploi ou d’année sabbatique. Günther Schmid
(2001) a identifié cinq champs principaux de transitions : au sein même de l’emploi ; entre
emploi et système éducatif ; entre emploi et chômage ; entre emploi et activités domestiques ;
entre emploi et retraite. Ces champs correspondent tout d’abord aux trois séquences de la vie
professionnelle : la formation (initiale) ; l’exercice d’une activité rémunérée (salariée ou non,
temps complet, temps partiel…) et la retraite (progressive ou totale). Deux sources

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Arnaud Diemer (2018), « Repenser le travail en sortant de l’économie », KRISIS, vol 48.

additionnelles de mobilité sont introduites avec le chômage et les activités sociales utiles non
rémunérées (tâches domestiques et familiales au sens le plus large). Les transitions peuvent être
réussies ou ratées, non pas simplement en elles-mêmes, mais dans leurs conséquences à moyen
et à long terme. L’idée clé est l’existence possible de transitions critiques au cours de la vie des
travailleurs. Par exemple, le licenciement d’une personne faiblement qualifiée, inaugure une
période de chômage, qui peut se prolonger et générer une situation de chômage de longue durée,
puis une relégation assistée (RSA), voire une exclusion sociale. La finalité d’une telle approche
est bien d’aménager les transitions. Il s’agit d’éviter les transitions critiques et de développer
les transitions favorables à la sécurité, l’autonomie et la carrière des travailleurs. Les pistes de
réflexion peuvent aller dans quatre directions : (1) accroître la liberté individuelle (autonomie)
en donnant aux personnes plus de pouvoir (pouvoir d’achat et pouvoir de décision) ; (2)
promouvoir la solidarité dans la gestion des risques sociaux et des risques associés au marché
du travail (programme de redistribution) ; (3) rechercher l’efficacité des mesures accompagnant
les transitions, à travers un processus de spécialisation, de coordination et de coopération
(mélange de contributions publiques et privées) ; (4) mobiliser l’arsenal des techniques de
gestion des risques (contrôle, évaluation, autorégulation) par le biais d’une démarche
décentralisée ou un management par objectifs.
A l’heure où le temps de chômage peut devenir excessif pour certaines catégories de personnes
(si les chômeurs restent en moyenne 14 mois sans emploi, près de 20% d’entre eux connaissent
une période d’inactivité professionnelle forcée de plus de deux années, ce chiffre passe à 35%
pour les plus de 50 ans), où les revenus sont proches du seuil de pauvreté (840 euros après
impôts et prestations sociales au seuil de 50% du niveau de vie médian) ou du RSA (537 euros
pour une personne seule, 805 euros pour un couple), où le nombre de salariés pauvres continue
à augmenter (en France, un million de pauvres vivent avec à peine plus de 800 euros par mois,
notamment suite au temps partiel contraint), la question des transitions demeure un sujet
d’actualité.
(2) Le travail s’articule autour de connaissances et de compétences acquises tout au long de la
vie, ainsi il ne s’agit pas de protéger l’emploi dans l’entreprise mais bien hors de l’entreprise
en créant des passerelles (comptes formation avec un droit minimum de 50 heures par an, à
prendre dans les 4 ans d’entrée en poste) et en proposant des plans de carrière (privilégiant la
promotion tous les 3 ans). Par ailleurs, toutes les discussions (dialogue social) et projets de lois
portant sur le travail prennent du temps et s’inscrivent dans un processus long et complexe. En
France, les lois sur la baisse du temps de travail (35h), la formation professionnelle, le
télétravail… sont de réelles innovations sociales, toutefois elles s’inscrivent dans un processus
de négociations permanent au cours duquel il faut savoir « prendre son temps », bien cerner les
enjeux organisationnels (application des 35 heures dans la fonction publique : hôpitaux,
police…)… Très souvent, ces innovations qui inscrivent le travail dans un processus temporel
long, parviennent à émerger et à se développer dans des entreprises qui ont déjà cette culture
de la négociation ou de l’autogestion.

1.3 Le travail, entre productivisme et consumérisme


Nous touchons là peut-être, le cœur de la machine économique, celui qui rythme nos vies et nos
angoisses. Ce mythe de la société de croissance a la ‘peau dure’, et malgré ses déséquilibres et
ses crises, il continue à nous fasciner et à constituer le symbole de l’occidentalisation du monde
(Latouche, 1989). Deux mots clés suffisent pour qualifier cette société : productivisme et
consumérisme.
Le productivisme fait directement référence à la productivité du travail, qui n’est autre que le
rapport entre la richesse créée (ici le produit intérieur brut) et la quantité de travail. Il est ainsi

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Arnaud Diemer (2018), « Repenser le travail en sortant de l’économie », KRISIS, vol 48.

possible de calculer la productivité horaire du travail ou la productivité par salarié. Depuis des
décennies, les pays industriels ont été caractérisés par des taux de croissance élevés de leur
productivité horaire du travail. Les avantages d’une augmentation de la productivité du travail
sont loués (hausse des niveaux de vie et des salaires, hausse de la richesse produite, amélioration
de la compétitivité internationale…) et s’appuient sur une méthode encensée par les entreprises
: l’organisation scientifique du travail (OST). En effet, il convient de rappeler que les industriels
commencèrent à se préoccuper des questions organisationnelles à la suite de la dépression
économique survenue dans les années 1870. La baisse prolongée de la demande et l’apparition
de capacités de production excédentaires donnèrent naissance au mouvement de
« l’organisation scientifique du travail » dans l’industrie américaine, dont Taylor fût la figure
de proue. Obsédé par la productivité et l’élimination du gaspillage, Frederick Winslow Taylor
écrivit en 1911 un ouvrage « Principals Scientific Managment » dans lequel il chercha à rendre
le plus efficace possible, le travail qui est par nature pénible et peu valorisant.
Aux dires de Taylor, les Principes d’organisation scientifique furent rédigés pour trois
raisons : « 1° Pour montrer par une série d’exemples simples, la perte immense que le pays tout
entier subit chaque jour, dans tous les actes de la vie ; 2° Pour convaincre le lecteur que le
remède est dans une organisation systématique et non dans la recherche d’hommes
extraordinaires ; 3° Pour prouver que la meilleure organisation est une véritable science basée
sur des règles, des lois et des principes bien définis » (1927, p. 21).
L’objet principal d’une organisation devait être d’assurer à l’employeur et à chaque employé la
prospérité maxima. Cette notion signifiait à la fois de gros dividendes pour l’employeur, un
développement de la branche, un salaire plus élevé et un rendement maximum pour les
employés. L’organisation scientifique du travail soulignait ainsi que la prospérité de
l’employeur devait être accompagnée de celle des employés : les intérêts des deux parties
seraient les mêmes. Taylor justifiait cette thèse en évoquant un mal qui ronge l’industrie : la
flânerie des employés. Ces derniers sont en effet amenés à limiter leur production pour trois
raisons : 1° une grande majorité est persuadée que l’augmentation du rendement de chaque
homme (ou de chaque machine) contribue à congédier un certain nombre d’ouvriers ; 2°
l’ignorance des employeurs à cerner le temps nécessaire pour exécuter un travail2 ; 3° des
méthodes de travail empiriques et dénuées de toute considération scientifique.
Pour résoudre ces maux, préjudiciables aux employeurs et aux employés, Taylor militait en
faveur d’une étude détaillée des mouvements et des temps de travail. Faute d’éducation ou de
capacités intellectuelles, l’ouvrier n’était pas capable de maîtriser « cette science ». Il devait
être guidé par ses chefs et d’autres ouvriers. Le travail devait ainsi être réglé sur la base de lois
scientifiques.
Ce mythe continue à exercer sur les chefs d’entreprises, les managers et les représentants du
personnel, une certaine influence. Le développement de nouvelles formes de taylorisme dans
le tertiaire (standardisation et parcellisation des tâches et des relations) en est une excellente
illustration. La recherche de gains de productivité ou l’élimination du gaspillage font
aujourd’hui partie des compétences qu’il convient d’acquérir, faute de quoi, on est qualifié
d’inapte au travail ou d’incompétent. Dans une société en proie à la mondialisation (il s’agit ici
de ne pas se faire décrocher) et à la concurrence (souvent présentée comme l’aiguillon qui nous
mène plus loin, qui stimule notre créativité), être productif est un critère de réussite et


2 Dans une communication à l’American Society of Mechanical Engineers, intitulée « Shop Management » (juin 1903), Taylor a précisé que
cette perte de temps était due à deux causes. La première renvoie à l’instinct naturel et à la tendance des ouvriers à prendre leurs aises (c’est la
flânerie naturelle). Cette tendance s’accroît lorsque l’on met un certain nombre de personnes ensemble, sur un travail similaire et qu’on les
paie à un tarif journalier uniforme. La seconde réside dans les idées et les raisonnements issus des rapports entre les ouvriers (c’est la flânerie
systématique). Aux yeux de Taylor, cette dernière constitue le plus grand mal. Elle serait pratiquée délibérément par les ouvriers afin de
maintenir leurs patrons dans l’ignorance de la vitesse à laquelle on peut faire un travail.

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Arnaud Diemer (2018), « Repenser le travail en sortant de l’économie », KRISIS, vol 48.

d’exigence (effort de tout instant). Dans la grande distribution, c’est l’obtention de tels résultats
qui permet de garder son poste ou d’obtenir la fameuse prime de fin d’année.
Si le travail est bien soumis aux sirènes du productivisme, il est également pris en tenaille par
le consumérisme. Car faute de productivité (ou de pouvoir travailler plus), le salarié ne peut
augmenter son niveau de vie et aspirer aux délices de la société de consommation. Le travailleur
stressé est finalement un travailleur frustré, incapable d’assouvir ses désirs (quand ce ne sont
pas des besoins vitaux). Or cette consommation constitue un puissant moteur de la croissance
(rappelons que si les français ne consomment pas autant que les américains, leur consommation
représente plus de 70% de la croissance française), c’est elle qui active l’investissement
(anticipation des industriels sur la base de leur optimisme ou pessimisme ambiant) et donc la
production. Faute de consommation, pas de création d’emploi mais augmentation du chômage.

Figure 2 : Dessine-moi le travail

La machine économique est donc implacable et laisse peu de place à une véritable réflexion
sur le bien-être au travail ou à une quête de sens à donner au mot travail. Penser est un luxe que
le travailleur ou le chômeur ne peut plus se permettre (le statut de salarié pauvre souligne bien
les limites du travail). Si le mal être au travail (on parle plus précisément de souffrance au
travail), la montée des arrêts de travail (en 2016, près de 40% des salariés – hors fonction
publique – ont eu un arrêt de travail et cet arrêt a duré en moyenne 12 jours) ou encore le passage
des risques psycho-sociaux dans le vocabulaire courant (en France, les consultations pour risque
psychosocial sont devenues en 2007 la première cause de consultation pour pathologie
professionnelle) sont les dommages collatéraux d’une société mal inspirée, l’unique remède à
cette soif de productivité et de consommation passe par l’euthanasie du travailleur (et non celle
du rentier, comme le pensait l’économiste John Maynard Keynes). Pure utopie diront certains,
oui, surement, mais peut-être avons-nous oublié la véritable signification de ce mot, l’utopie
apporte un message d’espoirs, elle nous rappelle que nous pouvons nous indigner et protester,
mais également imaginer et réinventer…

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Arnaud Diemer (2018), « Repenser le travail en sortant de l’économie », KRISIS, vol 48.

2. La fin du travail, une utopie nécessaire


Il ne s’agit pas ici d’imaginer ce que sera le monde en 2050 ou en 2100, mais de répondre aux
maux qui rongent la société, qui nous asservissent aux soubresauts de l’économie (en redoutant
les crises et en attendant le retour de la croissance), et qui finalement nous réduisent au rang
d’observateurs. Et pour commencer, il convient tout d’abord de faire le bon constat, puis de
proposer des solutions (qu’elles soient utopiques, elles seront de toute façon) et enfin de porter
ces réflexions dans le débat public.
21. Le constat : une montée de la pauvreté et une accumulation du capital
Les chiffres parlent d’eux-mêmes et pourtant, c’est comme si la situation se répétait
inlassablement. Nous nous sommes forgés un modèle de société (imaginaire) qui est
insatisfaisant et qui nous mène vers la catastrophe, cependant, faute de créativité et de bon sens,
nous ne parvenons pas à le déconstruire et à le réinventer. Si certains (Lipietz, 2012) soulignent
la triple crise que l’humanité traverse, elle serait à la fois économique (montée du chômage),
sociale (montée des inégalités et de la pauvreté) et écologique (disparition de la biodiversité,
risques climatiques), d’autres (Observatoire des inégalités) n’hésitent pas à pointer du doigt le
cœur du problème : une montée de la pauvreté et un enrichissement toujours plus important
d’une couche de plus en plus réduite de la population. Cette réalité stigmatise les paradoxes.
- Alors que de nombreux pays peinent encore à inverser la courbe du chômage (l’Europe
comptait plus de 19 millions de chômeurs en mai 2017 : le taux de chômage de la Grèce culmine
à 22.5%, celui de l’Espagne à 17.7%, celui de la France à 9.6% et celui du Portugal à 9.4%),
les mouvements de capitaux dans le monde ont atteint des records. Pour la seule année 2015,
pas moins de 1762 milliards de dollars d’investissements directs. En 2016, nous sommes même
revenus à la situation d’avant la crise des subprime de 2008, soit 1833 milliards de dollars en
2007. Autant dire tout de suite que du point de vue financier, la sortie de crise est bien réelle
(on pourrait même douter que cette crise ait bien eu lieu).
- Alors que de nombreux pays (Angleterre, Allemagne, Danemark…) affichent des résultats
macroéconomiques à faire pâlir d’envie certains pays d’Europe du Sud, la pauvreté s’installe
durablement. En mai dernier, l’Allemagne qui est régulièrement érigé en modèle par la France
(taux de croissance de 1,9% en 2016, excédent commercial record de 252,9 milliards d’euros,
taux de chômage au plus bas avec 5.8% de chômeurs en mars 2017) s’est vu notifier par le
Fonds Monétaire International (FMI), un message d’alarme : "Malgré un filet de sécurité
sociale bien développé et une forte progression de l’emploi, le risque de pauvreté
relative demande une attention continue" (FMI, Rapport annuel, communiqué du 15 mai 2017).
La belle réussite économique cacherait ainsi une dure réalité : la pauvreté a explosé outre-Rhin.
Selon les derniers chiffres d’Eurostat, le taux de pauvreté - fixé à 60% du revenu médian -
atteint aujourd'hui 17% de la population (contre 14% en France). Soit plus de 13 millions de
personnes touchées. Parmi elles, beaucoup de travailleurs « pauvres », ils représenteraient près
de 9.7% de la population allemande (ces allemands, pourvus d’un emploi, vivraient en dessous
du seuil de pauvreté). Cette situation s’expliquerait en partie par les réformes du marché du
travail menées par l’ancien chancelier social-démocrate (SPD) Gerhard Schröder entre 2003 et
2005. Les fameuses lois Hartz (du nom de l’ancien directeur du personnel de Volkswagen) ont
conduit à réduire la couverture du risque chômage et les cotisations sociales dues à raison de
certains emplois.

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Arnaud Diemer (2018), « Repenser le travail en sortant de l’économie », KRISIS, vol 48.

Encadré 1 : La dérèglementation du marché du travail allemand via les lois hartz


Loi Hartz I (1er janvier 2003) : Mise en place d’un cadre légal autorisant les agences d’intérim sous contrat avec
les agences pour l’emploi à procurer aux chômeurs des missions d’intérim. Durcissement des conditions d’accès
à l’allocation chômage par l’obligation pour les chômeurs d’accepter des emplois rémunérés à un salaire inférieur
à l’allocation chômage. Dès le 4ème mois de chômage, les chômeurs sans liens familiaux se voient imposer
d’accepter un emploi partout en Allemagne. Afin d’augmenter les écarts entre les revenus d’activité et les revenus
sociaux, le montant des allocations chômage est réduit pour les bénéficiaires vivant en couple (marié ou non).
Loi Hartz II (1er avril 2003) : Création d’un lieu d’accueil unique pour les chômeurs par la transformation des
agences pour l’emploi des Landers en Job Centers, cellules où sont gérées en même temps l’allocation chômage
et l’aide sociale. Mise en place de dispositifs d’allègement de charges sociales pour la création ou la reprise
d’entreprises par d’anciens chômeurs (600€/mois la première année, 260€/mois la 2ème année et 240€/mois la 3ème
année). Aide de transition pour les créateurs d’entreprises en fin de droits. Modification des dispositions existantes
pour les « mini-jobs ». Le salarié ne paie pas de charges pour une rémunération mensuelle égale ou inférieure à
400€ (plafond fixé auparavant à 350€) et paie entre 4 et 21% de cotisations sociales pour un niveau de rémunération
inférieur ou égal à 800€. Un ménage employeur paie 12% de charges sociales pour un salaire égal ou inférieur à
400€ tandis que qu’une entreprise privée en paie 25% (21% pour un salaire égal ou inférieur à 800€ afin de
combattre le travail clandestin). 10 à 12% des salaires versés sont déductibles des impôts sur le revenu.
Loi Hartz III (1er janvier 2004) : Transformation de l’Office Fédéral du Travail en « Agence Fédérale » pour
l’emploi, structure fédérant les Jobs-Centers dont le personnel est accru (75 dossiers de demandeurs d’emplois par
assistant contre 350 auparavant). Nouveau durcissement des conditions d’accès à l’allocation chômage. Il faut
pouvoir attester d’une période de travail d’un au cours des deux (et non plus des trois) dernières années. La durée
de prestations des assurances chômage est baissée à 12 mois (18 mois pour les plus de 55 ans).
Lois Hartz IV (3 janvier 2005, 1er janvier 2006) : L’aide aux chômeurs de longue durée (après 12 mois) est
fusionnée avec l’aide sociale (allocation chômage II). L’allocation perçue par les chômeurs en fin de droits est
forfaitaire et non plus calculée sur la base de l’ancien salaire. Loi amendée, elle impose une allocation unique de
345€ par mois aux chômeurs de longue durée. Les jeunes sans emploi, âgés de 18 à 25 ans et vivant chez leurs
parents verront leur allocation chômage réduite. Des sanctions financières sont mises en place en cas de refus de
travail offert, de non présentation à l’agence pour l’emploi, d’absence de recherche de travail.

Ce constat est loin de se limiter à l’Allemagne, l’Angleterre est également touchée par ce
phénomène de pauvreté relative et les écarts entre les riches et les pauvres s’est accentuée au
lendemain de la crise de 2008. En mars 2015, une étude publiée par la Social Market
Foundation soulignait que la richesse financière des 20% les plus riches s’était accrue en
moyenne de 64% entre 2005 et 2013. Les 20% les plus pauvres avaient quant à eux perdu 57%
de leurs revenus. Par ailleurs, l’étude a souligné que les salaires des plus jeunes avait baissé
plus que la moyenne nationale, amputant du même coup leur propension à épargner (l’épargne
aurait ainsi chuté de 36%). Le taux de pauvreté, proche de 17%, reste préoccupant puisque que
ce sont près de 10 millions de personnes qui vivent en dessous du seuil de pauvreté. Mais plus
que la pauvreté en soi, ce qui est insoutenable c’est que près de 20% des salariés anglais (et
allemands) touchent moins des deux tiers du salaire médian (contre 6% en France).
Les regards sont également tournés vers les réformes du marché du travail entreprises par le
gouvernement travailliste de Tony Blair en 1996 et notamment la création du Zero-Hours
Contract (contrat « zéro heures »). Ce type de contrat se caractérise par l’absence d’indication
horaire ou de durée minimum de travail dans l’accord conclu entre l’employeur et le salarié (ce
dernier est rémunéré au salaire minimum, soit 7.30 euros l’heure). L’entreprise peut ainsi
s’adapter en permanence aux ajustements de la demande. Peu utilisé dans les années 2000, son
usage s’est généralisé dès 2010 sous le gouvernement conservateur de David Cameron. En
2015, près de 1.5 millions de salariés britanniques avaient signé un contrat « zéro heure »
(précisons que certaines entreprises ont très largement profité de ce dispositif, McDonald
emploie près de 82 000 salariés sous ce statut précaire, soit 90% de son effectif ! La fonction
publique n’est pas en reste, 13% des effectifs du ministère de la Santé seraient concernés par
ces contrats). Précisons que ce contrat ne donne droit ni aux congés payés, ni aux indemnités

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Arnaud Diemer (2018), « Repenser le travail en sortant de l’économie », KRISIS, vol 48.

maladie. Au-delà de ces faits, on ne retient qu’un chiffre, le chômage a fortement reculé entre
2011 et 2017, passant de 8.1% à 4.7% !
Et la France dans tout ça, beaucoup n’hésitent pas à rappeler que si elle peine encore à réduire
son taux de chômage (9.6%), il semblerait que sur le terrain de la pauvreté, la situation soit
maîtrisée. La France comporte 8.8 millions de pauvres si l’on fixe le seuil de pauvreté à 60%
du niveau de vie médian (soit un taux de pauvreté de 14.1%). Ainsi, sur la période 2004 – 2014,
le nombre de pauvres a augmenté de 1.2 million. Toutefois, on ne peut se satisfaire de ces
chiffres, 1.8 millions de personnes percevaient fin 2016 le RSA socle (535 euros pour une
personne seule sans enfant, 963 euros pour une personne seule avec deux enfants, 1145 euros
pour un couple avec deux enfants). En mars 2017, l’Observatoire des inégalités avançait même
le chiffre de 7.7 millions de personnes fragilisés face à l’emploi, que ce soient des chômeurs,
des travailleurs précaires ou tout simplement de personnes découragées du travail.
Tableau 1 : Les personnes fragilisées face à l’emploi

Certains rétorqueront que la France ne s’est pas encore complètement engagée dans la voie
de la réforme de son marché du travail (loi du 17 janvier 2003 sur les salaires, le temps de
travail et le développement de l’emploi, dite loi Fillion ; les recommandations de la Commission
présidée par le secrétaire général du Groupe Renault, Michel de Virville en 2004 ; le plan
Borloo étalé sur 5 ans visant à fluidifier le marché du travail ; le débat sur le contrat unique ; la
création de Pôle Emploi…) et que les bienfaits de la flexisécurité vont lui permettre de rattraper
son retard en matière de création d’emploi (c’est l’un des objets de la réforme du Code du travail
lancé par le gouvernement d’Edouard Philippe durant l’été 2017 et qui devrait entrer en vigueur
durant l’automne). Mais si ce retard se traduit par plus de précarité (en 2014, la moitié des
jeunes de 15 à 24 ans avaient un emploi précaire ; en octobre 2016, la France comptait 3.4
millions de salariés précaires) et de pauvreté, la pilule risque d’être amère… et le remède, un
suicide collectif prémédité.
22. La baisse de la productivité du travail et les « mauvaises solutions »
Des années 50 jusqu’au milieu des années 2000, les pays industriels ont vu leur croissance
stimulée par l’augmentation de la productivité du travail et un haut niveau d’innovation
technologique. La concurrence internationale à laquelle se livrent les grandes puissances
industrielles a intensifié cette recherche de gains de productivité, le travail a dû s’adapter aux
nouvelles formes d’organisation de la production et à l’obligation de remplir les carnets de
commande des entreprises. Cette course effrénée s’est traduite dans les années 90 par des

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Arnaud Diemer (2018), « Repenser le travail en sortant de l’économie », KRISIS, vol 48.

vagues successives de déréglementation du marché du travail dans les principaux pays de


l’OCDE. Cette marche en avant vers la flexibilité totale a cependant des conséquences
désastreuses sur le tissu social et relationnel (inadéquation entre vie professionnelle et vie
privée, isolement des salariés, pression managériale en cascade…) au point de poser la question
du mal être au travail. Cette spirale infernale est d’autant plus perceptible au niveau
macroéconomique que l’on assiste depuis le milieu des années 2000, à un ralentissement de la
productivité du travail.
Figure 3 : Productivité du travail de certains pays vis à vis des Etats Unis

Source : BNP-Paribas (Van Der Putten, 2016).


Si la hausse de la productivité du travail a donc toujours constitué un pilier « stable » de la
croissance de nos sociétés, nous serions entrés depuis quelques années dans une phase de
ralentissement, voire de « stagnation structurelle » (Hansen, 1939). Si l’ère de la forte
croissance de la productivité du travail semble révolue (Gordon, 2012), elle remet surtout en
cause le consumérisme. En effet, la croissance de la productivité conditionne l’accroissement
du revenu des classes moyennes et permet d’améliorer leur niveau de vie. Elle permet
également aux sociétés de faire face aux coûts du vieillissement de la population.
Face à cette épée de Damoclès qui risque de gripper les rouages du système capitaliste, il est
possible de remettre au goût de jour les bonnes méthodes qui se sont déjà montrées efficaces
dans le passé : (1) Promotion des échanges internationaux et libéralisation des derniers bastions
protectionnistes (principalement dans les pays en développement ; (2) Stimuler la Recherche &
Développement pour continuer à innover ; (3) Investir dans les infrastructures publiques
(pratiques de la croissance endogène) ; (4) Poursuivre dans la voie de la dérèglementation du
marché du travail et accroître la flexibilité ; (5) Réformer l’impôt sur les sociétés et les
subventions de manière à stimuler les secteurs affichant une productivité élevée…
Toutes ces mesures visent bien entendu à relancer la machine, en s’appuyant sur une
combinaison capital – travail optimale, compatible avec ce que les économistes ont coutume
d’appeler la frontière technologique. Elles laissent cependant de côté les questions sociales
posées par la persistance du chômage, la montée de la pauvreté et le mal être au travail.

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Arnaud Diemer (2018), « Repenser le travail en sortant de l’économie », KRISIS, vol 48.

23. Harmonies utopiques autour de la fin du travail


Plus qu’un problème, la baisse de la productivité du travail pourrait bien être salutaire si l’on
envisage la fin du travail (Gorz, 1988). La véritable utopie consisterait ici à redéfinir les
contours du travail, en sortant de l’économie. Et c’est là que les thèses soutenues par les
objecteurs de croissance (Latouche, 2012) et les précurseurs de la décroissance (Illich, 1971 ;
Gorz, 1973 ; Castoriadis, 1975…) prennent tous leurs sens.
Si le mal qui ronge nos sociétés, est la montée de la pauvreté et la cristallisation des
frustrations, la réduction du chômage ne constitue plus la cible imaginaire d’un projet de société
et le travail ne doit plus être le moyen d’assouvir les besoins essentiels à l’existence. La
démystification peut alors prendre forme et engendrer un système utopique vertueux :
(i) La baisse radicale du temps travail (par radicale, nous entendons le passage de 35h à 20h)
ne doit plus servir à réduire le chômage. Elle ne fait que participer à sa réduction, toutefois ce
n’est pas sa cible. La baisse radicale du temps de travail doit profiter à l’épanouissement
personnel et nous permettre de réencastrer l’économique dans le social et le convivial. Plus de
temps pour sa famille, plus de temps pour ses amis, plus de temps pour les autres, plus de temps
pour soi, plus de temps pour les activités sociales et culturelles. Le travail fantôme (shadow
work) au sens d’Illich (1981) se trouve ainsi libérer du travail salarié.
(ii) Désencastrer de l’économique, la baisse du temps de travail n’est plus rattachée à une
rémunération (salaire), à un niveau de productivité ou à une quelconque politique de lutte contre
l’inflation. Si l’on prend l’exemple français, le passage de 39h à 35h a été amortie par une
hausse de la productivité horaire du travail (la France est le champion toutes catégories des pays
de l’OCDE), le remplacement d’un départ à la retraite sur 3, une inflation comprise entre 0.5 et
1% et un gel des salaires (via les conventions collectives renégociées tous les 5 ans). Cette
combinaison macroéconomique largement éprouvée par les modèles économiques disparaît si
l’on s’attaque au consumérisme et donc si la consommation diminue. La baisse du temps de
travail peut donc s’accompagner d’une baisse des salaires, chose inimaginable dans le système
actuel !
(iii) Si la baisse du temps de travail fait partie intégrante d’un projet de société, si les salaires
baissent suite à une diminution de la consommation, alors un dernier pas peut être franchi par
la suppression des salaires et du travail lui-même. Le revenu universel peut ainsi faire son
apparition… Libéré des contraintes du travail et d’une quelconque forme d’asservissement, les
individus pourront choisir de travailler ou de ne pas travailler. Son montant sera fixé à 2000
euros par individu, un couple de deux adultes et deux enfants touchera ainsi 4 000 euros par
mois. La pauvreté serait éradiquée. Dès sa majorité, un enfant pourra toucher ce revenu,
envisager de financer ses études sans recours à l’emprunt, choisir la formation qui le stimule et
qui répond à ses aspirations.
(iii) Si une personne souhaite gagner plus, elle pourra choisir de travailler, le chômage ayant
disparu, le mécanisme économique de l’offre et la demande pourra s’inverser pour les métiers
pénibles et donc redonner une certaine valeur au travail… Car sortir de l’économie ne signifie
pas faire table rase de ses mécanismes, mais bien la remettre à sa place, c’est à dire au service
de la société et des individus qui la composent…
(iv) Le revenu universel ou le salaire serait payé en euros et en monnaies locales à hauteur de
50/50, la fin du travail serait ainsi marquée par un retour au localisme, la consommation
baisserait cependant elle serait plus qualitative… Le temps serait consacré aux arts culinaires,
aux achats sur les marchés locaux, ces marchés où les voitures ne sont pas nécessaires… Cette
reterritorialisation des activités marquerait le démantèlement des grandes surfaces et l’essor des
circuits courts. La fin du travail marquerait ainsi la fin du consumérisme à grande échelle.

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Arnaud Diemer (2018), « Repenser le travail en sortant de l’économie », KRISIS, vol 48.

Figure 4 : Travail, productivité, croissance et décroissance

(v) L’existence d’un revenu universel faciliterait les possibilités de financement et nous
rendrait moins dépendant des banques. Associé à une taxe sur le capital (2 à 50% en fonction
du produit d’épargne et du patrimoine) rendant insupportable toute accumulation, le revenu
universel entraîne l’euthanasie du travailleur et celle du rentier. Nous pouvons ainsi entrer dans
l’ère de la convivialité et de la décroissance, sans être pour autant preuve de militantisme.
Figure 5 : Un nouveau projet de société

(vi) Cette entrée dans une société marquée par la fin du travail et de l’accumulation, c’est à dire
du productivisme et du consumérisme, nous permet également de nous libérer des derniers
grands bastions du capitalisme : le pouvoir de création bancaire (50% du revenu universel étant

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Arnaud Diemer (2018), « Repenser le travail en sortant de l’économie », KRISIS, vol 48.

délivré sous forme de monnaie locale par les associations, les banques perdront une partie de
leur monopole de création monétaire sans que ce pouvoir soit remis entre les mains de l’Etat).
C’est bien la société civile et donc l’économie sociale et solidaire qui organisera la circulation
de la monnaie locale en fonction de valeurs qu’il conviendra de préserver.

(viii) La liberté de choisir de travailler (via le revenu universel), le recours aux monnaies locales
ou encore le souhait d’apporter une contribution productive à la communauté (donner de son
temps) pourront permettre de stimuler certaines productions, notamment celles relevant de
l’agriculture biologique. Cette dernière présente des atouts écologiques, sociaux et
économiques (Levrel, Couvet, 2017). Elle est tout d’abord bonne pour l’environnement car elle
permet de réduire les émissions de polluants dans les sols, dans l’eau et dans l’air. Elle participe
également à la préservation de la biodiversité. Elle est par ailleurs profitable sans subvention
(marché qui représente 7 milliards d’euros et surtout qui mobilisent près de 33 000
exploitations). L’alternative des produits biologiques s’inscrirait dans cette démarche de
consommer moins de produits tout améliorant la dimension qualitative des denrées.
Les idées évoquées ci-dessous ne sont pas nouvelles en soi, pour certaines elles relèvent
d’utopies ou d’expériences que l’on retrouve dans l’économie informelle, l’économie sociale
et solidaire ou encore l’économie collaborative. Ce qui fait corps ici, c’est qu’elles sont
intégrées dans un système cohérent et structuré autour de valeurs sociétales que nous voulons
préserver. Il ne s’agit pas de défendre la fin du travail, la baisse du temps de travail ou le revenu
universel, mais de replacer ces alternatives dans un système global. C’est à ce prix que ces
innovations sociales pourront se poser comme une alternative crédible au fonctionnement du
système capitaliste.

Conclusion
Ainsi comme le rappelait Lyman Tower Sargent (2005, p. 15), « nous avons besoin d’utopies
et de ces gens qui choisissent de vivre une vie meilleure dans des communautés
expérimentales » pour nous aider à démystifier la société de croissance. C’est pourquoi nous ne
devons JAMAIS abandonner notre quête de l’utopie. Repenser le travail s’apparente à un rêve
social dans lequel l’épanouissement personnel, les relations humaines, la convivialité,
l’altruisme constitueraient des objectifs de premier plan. Face à l’excès d’épargne dans le
monde et à la montée des inégalités, la fin du travail pourrait bien transformer certaines utopies
en stratégies viables et soutenables. Si pendant des années, nous avons cherché en vain des
solutions pour réguler la finance, remettre en cause le productivisme ou le consumérisme, il
semble bien qu’une alternative au tout marchandise soit possible. Dans un article au titre
évocateur « L’écologie politique entre expertocratie et auto-limitation », André Gorz (1992, p.
26) avait ouvert la voie lorsqu’il affirmait que le sens fondamental d’une politique éco-sociale
était bien de « rétablir la corrélation entre moins de travail et moins de consommation d’une
part, plus d’autonomie et plus de sécurité existentielles, d’autre part, pour chacun et chacune ».

Bibliographie

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