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Journal de Radiologie Diagnostique et Interventionnelle (2012) 93, 93—102

FORMATION MÉDICALE CONTINUE : LE POINT SUR. . .

Imagerie des syndromes inflammatoires bénins夽


S. Ferron ∗, M. Asad-Syed , M. Boisserie-Lacroix ,
J. Palussière , G. Hurtevent

Service de radio-sénologie, institut Bergonié, 229, cours de l’Argonne, 33000 Bordeaux,


France

MOTS CLÉS Résumé Les mastites bénignes sont des pathologies rares et de prise en charge difficile. Le
Sein ; challenge diagnostique repose sur leur distinction des mastites carcinomateuses. On oppose les
Inflammation ; mastites aiguës secondaires, à une infection, à une inflammation au voisinage d’une structure
Mammographie ; bénigne ou à une thrombophlébite superficielle, aux mastites chroniques principalement les
Échographie mastites à plasmocytes et les mastopathies granulomateuses idiopathiques. L’imagerie est sou-
vent aspécifique mais certains signes échographiques, mammographiques ou IRM doivent être
connus et recherchés afin d’orienter le plus précocement possible vers une étiologie bénigne.
Le recours à une biopsie doit être systématique au moindre doute diagnostique pour ne pas
méconnaître une mastite carcinomateuse.
© 2012 Éditions françaises de radiologie. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

La mastite se définit comme une inflammation du sein. L’enjeu principal est de différencier
le plus précocement possible une mastite aiguë bénigne d’une mastite carcinomateuse,
véritable urgence diagnostique et thérapeutique au pronostic réservé. Leurs aspects cli-
niques et radiologiques peuvent être proches et un recours à la biopsie est la règle au
moindre doute diagnostique.
Les mastites bénignes sont rares, représentant moins de 1 % de l’activité sénologique
[1]. Elles peuvent être aiguës ou chroniques avec une prise en charge très différente.

DOI de l’article original : 10.1016/j.diii.2011.12.002.


夽 Ne pas utiliser, pour citation, la référence française de cet article, mais celle de l’article original paru dans Diagnostic and
Interventional Imaging, en utilisant le DOI ci-dessus.
∗ Auteur correspondant.

Adresse e-mail : ferron@bergonie.org (S. Ferron).

2211-5706/$ — see front matter © 2012 Éditions françaises de radiologie. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
doi:10.1016/j.jradio.2011.11.002
94 S. Ferron et al.

Étiologie des mastites bénignes renforcement postérieur des échos [4,5] (Fig. 1a). Des fis-
tules peuvent être visibles sous la forme de structures
Les mastites aiguës tubulées anéchogènes au contact de l’abcès. Des adénopa-
thies sont retrouvées fréquemment dans le creux axillaire. Il
Mastopathies bénignes d’origine infectieuse est parfois difficile de différencier un abcès d’une lésion car-
Infections non spécifiques : abcès aigus cinomateuse si les contours des masses sont irréguliers. Un
La prévalence des abcès de la lactation est en diminution. traitement d’épreuve de 15 jours doit être instauré, assorti
Ils ne posent pas de problème diagnostique et leur traite- d’une surveillance clinique étroite. Une biopsie sera réalisée
ment est bien codifié. Leur topographie est plutôt centrale, au moindre doute diagnostique.
profonde. La mammographie est de réalisation difficile compte
Les abcès non puerpéraux sont de prise en charge plus tenu de la sensibilité mammaire. Elle a pour but principal
complexe avec une évolution volontiers récidivante et chro- d’éliminer une lésion tumorale (microcalcifications ou masse
nique. suspectes) [5] (Fig. 1b). Son interprétation est souvent
Ils surviennent à n’importe quel âge, favorisés par délicate compte tenu de l’œdème et d’une compression
des facteurs locaux (ectasie galactophorique, inversion du insuffisante. Elle peut permettre la mise en évidence de
mamelon, métaplasie malpighienne des sinus lactifères) et signes aspécifiques : œdème sous-cutané, asymétrie de den-
généraux (tabagisme, obésité, diabète) [2,3]. sité, voire au stade d’abcès, une masse de forme ovale ou
Leur étiopathogénie est discutée. Les abcès peuvent ronde, de forte densité, aux contours plus ou moins circons-
être secondaires à une infection des canaux lactifères sous- crits [4,5].
aréolaires, distendus par un staphylocoque doré ou des Infections spécifiques
germes anaérobies [3,4]. Plus rarement, ils sont dus à la dif- Il s’agit essentiellement de la tuberculose mammaire. Les
fusion d’une infection bactérienne par voie hématogène [4]. infections parasitaires et mycosiques sont exceptionnelles
Leur localisation est souvent superficielle et sous-aréolaire [4,6].
[5]. La tuberculose est secondaire à une infection par une
Cliniquement les abcès aigus se manifestent par la triade bactérie appartenant à la famille des mycobactéries. La
classique, chaleur, rougeur et douleur, le plus souvent sans localisation mammaire est rare puisqu’elle représente moins
signes généraux associés [3]. de 0,1 % des atteintes tuberculeuses [7]. Elle touche pré-
L’échographie est l’examen à réaliser en première férentiellement les femmes jeunes en période d’activité
intention. Elle peut retrouver des signes aspécifiques : épais- génitale [7,8]. Elle est favorisée par la grossesse, la lactation
sissement cutané (supérieur à 3 mm), hyperéchogénicité et la multiparité [7].
des lobules graisseux en rapport avec l’œdème, dilata- On différencie la tuberculose mammaire primaire initia-
tions galactophoriques (supérieures à 3 mm). À un stade lement localisée au sein, des formes secondaires, faisant
plus avancé, on visualise des collections intramammaires suite à l’atteinte préalable d’un organe autre que le sein
sous la forme de masses rondes ou ovales, à parois épaisses avec contamination par voie lymphatique, hématogène, à
avec une couronne hyperéchogène vascularisée. Elles sont partir du mamelon ou à partir d’un organe de voisinage
anéchogènes ou hétérogènes, avec éventuellement un (côte, épaule, sternum) [9].

Figure 1. Patiente de 34 ans. Mastite aiguë du sein droit. À l’échographie, masse hypoéchogène, hétérogène, sans renforcement postérieur
des échos, de siège superficiel, sous-aréolaire, associée à un net épaississement cutané. Abcès sous-aréolaire (a). Mammographie normale,
notamment à droite (b).
Imagerie des syndromes inflammatoires bénins 95

L’aspect clinique le plus évocateur est une tumeur du sein


d’évolution traînante, associée à une adénopathie axillaire
fistulisée. Il faut également y penser devant un abcès mam-
maire persistant sous traitement bien conduit, ou devant
une fistule récidivante [7].
Il n’existe pas de signe spécifique de tuberculose mam-
maire en imagerie. L’aspect le plus fréquent est celui d’une
masse irrégulière qui en impose volontiers pour une néo-
plasie [6,7]. Sont également décrites en mammographie des
masses bien circonscrites (forme nodulaire), des asymétries
focales de densité (forme diffuse) ou une désorganisation
architecturale avec asymétrie de densité et rétraction du
mamelon (forme fibreuse) [6].
L’échographie retrouve des plages hypoéchogènes, mal
limitées, avec discret renforcement postérieur des échos,
des collections liquidiennes ou des dilatations galactopho-
riques. Figure 2. Kyste inflammatoire, masse ronde au contenu finement
La biopsie est le plus souvent indispensable et permet échogène, sans net renforcement postérieur.
de retrouver des lésions granulomateuses avec des folli-
cules épithélio-giganto-céllulaires non pathognomoniques, kyste typique au contenu plus ou moins échogène, ou devant
le diagnostic de certitude reposant sur la mise en évidence une collection à paroi épaisse, plus ou moins vascularisée,
de bacilles acido-alcoolo résistants [7]. au contenu échogène, avec parfois un niveau [5,10] (Fig. 2).
L’aspect peut être atypique et nécessiter une surveillance
Mastopathies bénignes non infectieuses ou une cytoponction.
Kystes inflammatoires Kystes sébacés et épidermiques
Ils sont secondaires à la fissure d’un kyste sous tension avec Les kystes sébacés et épidermiques se présentent sous
une réaction inflammatoire périphérique. Leur diagnostic la forme de masses superficielles, arrondies, rénitentes,
est échographique. Il se fait par la mise en évidence d’un qui se développent aux dépens de follicules pilosébacés.

Figure 3. Patiente de 60 ans, sans antécédent notable. Masse clinique du quadrant supéro-externe gauche, connue depuis 20 ans, mais
s’étant majorée récemment. En mammographie, masse ovale, dense, aux contours circonscrits (a). À l’échographie, masse de forme ovale,
aux contours circonscrits, hypoéchogène, de topographie superficielle, avec discret renforcement postérieur des échos (b). Microbiopsie
échoguidée : kyste épidermique (c).
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Ils peuvent se révéler sur un mode inflammatoire en cas Secondairement apparaît une fibrose, une infiltration
de surinfection. Le kyste épidermique devient volontiers lymphocytaire et une atrophie épithéliale, l’ensemble abou-
inflammatoire en cas de biopsie [11]. Ils doivent être diffé- tissant cliniquement à une rétraction du mamelon. Enfin, les
renciés sur le plan histologique : le kyste sébacé ne contient canaux se rompent et libèrent leur contenu riche en lipides,
pas de kératine mais des glandes sébacées, à la différence ce qui génère une réaction inflammatoire et la formation
du kyste épidermique. d’un granulome à corps étranger correspondant à la mastite
En mammographie, ces kystes se présentent sous la forme à plasmocytes. Cela est responsable de l’apparition d’une
de masses rondes ou ovales, aux contours bien limités, masse palpable et de signes inflammatoires. L’association
de forte densité et de topographie superficielle (Fig. 3a). à la rétraction du mamelon peut faire évoquer, à tort, une
L’aspect échographique est celui de masses ovalaires, lésion carcinomateuse inflammatoire [13].
hypoéchogènes, aux contours circonscrits, de localisation La mammographie de l’ectasie galactophorique peut être
superficielle (Fig. 3b et c). Le kyste épidermique typique normale ou mettre en évidence des structures tubulées de
correspond à un bulbe d’oignon, formé de couches concen- densité liquidienne, rétro-aréolaires. L’échographie montre
triques hypo- et hyperéchogènes [11]. des canaux dilatés au contenu plus ou moins échogène [14]
Les lésions asymptomatiques ne doivent pas être trai- (Fig. 4a et b).
tées. Les kystes présentant des poussées inflammatoires La mastite à plasmocytes se présente en mammographie
itératives seront pris en charge chirurgicalement [11]. de façon non spécifique par un épaississement cutané, une
asymétrie de densité (Fig. 5a et Fig. 6a). Peuvent s’associer
La maladie de Mondor des calcifications en bâtonnets à bords lisses, parfois dis-
La maladie de Mondor est une thrombophlébite superfi- continues, généralement supérieures à 1 mm de diamètre,
cielle le plus souvent de la veine thoraco-épigastrique, pleines si leur topographie est intracanalaire ou à centre
touchant les femmes jeunes en période d’activité génitale. clair si elles sont péri-canalaires (Fig. 7). Elles sont volon-
C’est une pathologie rare [6]. Elle peut être idiopathique tiers bilatérales. L’échographie retrouve des dilatations
ou secondaire à une cause locale : chirurgie, traumatisme, canalaires, un épaississement cutané et des plages hypo-
radiothérapie, cancer du sein [6,12]. échogènes atténuantes aspécifiques, rarement une véritable
Elle se manifeste cliniquement par un cordon induré dou- masse [14] (Fig. 5b et Fig. 6b).
loureux, enchâssé dans le derme [12].
La mammographie est normale ou montre une structure
Mastite granulomateuse idiopathique
tubulée dense rarement calcifiée en rapport avec la veine
thrombosée [6]. L’échographie Doppler retrouve les signes C’est une pathologie rare d’étiologie mal connue, caractéri-
habituels de thrombose avec présence d’un contenu écho- sée par la présence de lésions inflammatoires amicrobiennes
gène endo-vasculaire et l’absence de compressibilité du localisées aux lobules [6,15—17]. Elle touche la femme jeune
vaisseau [6,12]. en période d’activité génitale [15]. Les facteurs favorisants
La guérison est spontanée, accélérée par la prise d’anti- sont la grossesse, l’allaitement et la prise d’une contracep-
inflammatoires non stéroïdiens [12]. tion orale [6,18].
Cliniquement, elle se présente sous la forme d’une
induration mal limitée, unilatérale parfois fixée aux plans
Les mastites chroniques profonds mimant un cancer inflammatoire [15—17]. Des adé-
nopathies sont présentes dans 15 % des cas (Fig. 8a).
Ectasie galactophorique et mastite à plasmocytes La région rétro-aréolaire est volontiers épargnée.
Il s’agit de stades différents d’une même maladie, mar- En imagerie, elle se traduit classiquement à la mammo-
quée dans un premier temps par une dilatation canalaire graphie par une asymétrie focale de densité unilatérale et
supérieure à 3 mm, contenant un matériel plus ou moins en échographie par une plage hypoéchogène aux contours
épais. Elle est le plus souvent bilatérale et prédomine dans non circonscrits, atténuante, hypervascularisée, reliée à des
les canaux sous-aréolaires. À ce stade, elle se manifeste canaux [16,17] (Fig. 8b—d).
cliniquement par un écoulement mammaire jaunâtre ou bru- L’IRM n’est pas indiquée à titre systématique mais si elle
nâtre intermittent présent dans environ un quart des cas est réalisée, l’aspect le plus fréquemment décrit est celui
[13,14]. de masses en hyposignal T1, hyposignal T2, aux contours

Figure 4. Aspect typique de dilatations galactophoriques : structures tubulées dilatées de plus de 3 mm de diamètre, au contenu anécho-
gène ou finement échogène, parfois mobile (sécrétions épaisses) (a, b).
Imagerie des syndromes inflammatoires bénins 97

Figure 5. Patiente de 29 ans. Mastite aiguë du sein droit. À l’examen clinique, masse suspecte de 10 cm des quadrants supérieurs. À la
mammographie, asymétrie focale de densité et désorganisation architecturale du QSE droit, sans véritable masse visible (a). À l’échographie
(b), plage atténuante BIRADS 4, associée à un net épaississement cutané du QSE droit. Biopsie percutanée : mastite à plasmocytes.

Figure 6. Patiente de 55 ans. Mastite aiguë avec induration clinique du QSE gauche. Sémiologie mammographique (a) et échographique
(b) semblable aux Fig. 5a et b.

Figure 7. Microcalcifications typiques d’ectasie galactophorique, discontinues, en bâtonnet, à bords lisses, pleines et à centre clair.
98 S. Ferron et al.

spiculés non différentiables d’un cancer [17,19,20] (Fig. 8e Mastite bénigne : hiérarchie et modalités
et f).
d’imagerie
La biopsie doit être réalisée pour éliminer une pathologie
néoplasique. L’histologie retrouve un infiltrat inflammatoire Mammographie et échographie
lobulaire avec présence de nodules giganto-cellulaires sans
nécrose caséeuse [6,18] (Fig. 8g et h). La mammographie et l’échographie doivent être réalisées
Le traitement est basé sur la corticothérapie après avoir en première intention devant toute mastite. Les anoma-
éliminé formellement une origine infectieuse [6,18]. Une lies mises en évidence sont souvent aspécifiques (asymétrie
surveillance au long court est indiquée car la récidive sur- focale de densité, masse hypoéchogène mal limitée. . .)
vient dans un quart des cas [20,21]. ne permettant pas de poser un diagnostic étiologique de

Figure 8. Patiente de 36 ans. Mastite aiguë du sein gauche. Masse clinique suspecte du QSE de 7 cm avec adénomégalie du creux axillaire.
À l’échographie, volumineuse adénopathie axillaire gauche de 3 cm avec net épaississement du cortex (a). En échographie, plage hypo-
échogène atténuante, mal limitée, BIRADS 4, associée à un net épaississement cutané (b, c, d). IRM pondération T2 : masse en hypersignal,
associée à un épaississement cutané et à une désorganisation architecturale (e). IRM pondération T1 après injection de gadolinium (f) :
masse de forme et de contours irréguliers, rehaussée de façon progressive, hétérogène, sans wash-out. Diagnostic retenu : mastopathie
granulomateuse idiopathique. Histologie des prélèvements échoguidés (g, h) : mastite granulomateuse lobulaire abcédée. Le lobule est
effacé par une inflammation chronique lymphoplasmocytaire riche en granulocytes neutrophiles. Granulome : réaction fibro-inflammatoire
riche en lymphocytes, plasmocytes et cellules géantes multinucléées de Langhans.
Imagerie des syndromes inflammatoires bénins 99

Figure 8. (Suite.)

certitude [22]. Cependant, certains signes doivent être


recherchés de façon attentive afin d’orienter précocement
vers une étiologie bénigne ou une mastite carcinomateuse.
Une mammographie normale, même si elle n’élimine pas
un cancer inflammatoire, est plutôt en faveur d’une mas-
tite bénigne. La présence de dilatations galactophoriques,
l’absence d’épaississement cutané, de microcalcification
suspecte ou de masse notamment de grande taille, plaident
également en faveur de la bénignité [22,23].
En échographie, l’existence de dilatations galactopho-
riques, de collections et la mise en évidence de ganglions
axillaires de morphologie non suspecte orientent vers une
pathologie bénigne [22,23]. De même, l’absence de masse
tissulaire de grande taille, d’un épaississement cutané mar- Figure 9. IRM pondération T2 : abcès : masse de taille modérée
qué, ou d’un œdème interstitiel est plutôt en faveur de la en hypersignal franc, de localisation sous-aréolaire, associée à un
épaississement cutané.
bénignité [22,23].

Imagerie par résonance magnétique


L’IRM est un examen de deuxième intention. Elle doit être
réalisée au moins 15 jours après la mise en route d’un trai-
tement anti-inflammatoire et antibiotique bien conduit.
Elle semble la plus à même à différencier une mastite
bénigne d’une mastite carcinomateuse. Les séquences en
pondération T2 et les séquences dynamiques sont les plus
discriminantes et doivent être analysées finement [22]. Les
masses sont moins fréquemment retrouvées dans les étiolo-
gies non tumorales. Les arguments en faveur de la bénignité
sont un isosignal ou un hypersignal T2 (les cancers sont riches Figure 10. IRM pondération T2 : mastite à plasmocytes : masse en
en collagène et apparaissent en hyposignal T2), une taille hypersignal, associée à un épaississement cutané et à une désorga-
modérée et une localisation sous-aréolaire ou à distance nisation architecturale. Intégrité du plan pectoral et conservation
du plan pectoral [22,24,25] (Fig. 9 et 10). La forme et les de la ligne graisseuse pré-pectorale.
contours des masses ne sont pas des éléments discriminants.
Après injection, le rehaussement est volontiers progres-
sif ou en plateau, la présence d’un wash-out étant suspect Parmi les signes associés, sont rassurants, la présence
(Fig. 11—13). Il en est de même pour le « blooming sign » qui d’un œdème bilatéral, l’existence de ganglions ovales
correspond à une bonne définition des limites de la masse au de grand axe infra-centimétrique, avec conservation d’un
temps précoce, les contours s’estompant progressivement hile graisseux. On recherche, en faveur de la bénignité,
sur les temps tardifs avec augmentation du diamètre de la l’absence de « hook sign » (bande en hyposignal T2 reliant la
lésion. masse au muscle pectoral), de prise de contraste focale de
100 S. Ferron et al.

Conclusion
Le diagnostic de mastite bénigne reste un exercice dif-
ficile avec la crainte permanente de méconnaître un
cancer inflammatoire. Il repose sur une prise en charge
multidisciplinaire associant le clinicien, le radiologue et
l’anatomopathologiste. Au moindre doute diagnostique et
en l’absence d’amélioration clinique et radiologique après
traitement adapté, le recours aux biopsies percutanées
doit être systématique. L’instauration d’une surveillance
clinique et radiologique rapprochée est essentielle, d’une
part, devant le risque de récidive, et d’autre part, pour ne
pas méconnaître un carcinome non inflammatoire associé.

POINTS À RETENIR
Figure 11. IRM pondération T1 sans injection : mastite à plasmo-
cytes : masse en hyposignal, associée à un épaississement cutané et • Les mastites bénignes sont rares.
à une désorganisation architecturale. • L’imagerie des mastopathies bénignes chroniques est
souvent aspécifique.
• La distinction entre une mastopathie bénigne et une
mastopathie carcinomateuse peut être difficile.
• Certains signes d’imagerie doivent être recherchés
pour orienter vers une étiologie bénigne.
• L’IRM mammaire n’est pas indiquée en première
intention.
• Les mastopathies bénignes doivent être suivies au
long cours car elles récidivent volontiers.
• Le recours aux biopsies percutanées est
systématique au moindre doute diagnostique.

Cas clinique
Figure 12. IRM pondération T1 après injection de gadolinium :
mastite à plasmocytes : masse irrégulière rehaussée de façon pro- Patiente de 42 ans sans antécédent personnel ou familial de
gressive et hétérogène. Pas de rehaussement du muscle pectoral. cancer du sein.
Mastite aiguë du sein gauche, apparue depuis cinq jours,
sans fièvre, non traitée.
Patiente reçue en comité multidisciplinaire par un onco-
logue médical, un chirurgien, un radiothérapeute et un
radiologue.
Examen clinique : sein gauche induré, chaud, rouge, dou-
loureux, sans véritable masse palpée.

Question 1
Quel(s) examen(s) d’imagerie demandez-vous ?
1. Mammographie bilatérale ;
2. Échographie ;
Figure 13. IRM pondération T1 après injection de gadolinium 3. IRM mammaire ;
au temps tardif. Mastite à plasmocytes : nette prise de contraste
4. Aucun bilan d’imagerie immédiat ; à réaliser après
asymétrique avec épaississement cutané et désorganisation archi-
15 jours de traitement médical d’épreuve.
tecturale.

Réponse
la peau, de rehaussement du muscle pectoral et le respect 1. et 2. Ce bilan doit être réalisé en urgence afin de recher-
de la graisse pré-pectorale [22,24] (Fig. 10). cher des arguments en faveur d’une mastite carcinomateuse
Les rehaussements non masse n’ont pas de critère spéci- (microcalcifications ou masse suspectes) et guider une éven-
fique permettant d’orienter le diagnostic vers une étiologie tuelle biopsie. L’IRM ne doit pas être faite en première
bénigne ou maligne [22]. intention mais sera à discuter après 15 jours de traitement
Imagerie des syndromes inflammatoires bénins 101

médical adapté en l’absence d’amélioration clinique ou traitement. Des prélèvements sont à réaliser à type de
après réception de résultats histologiques discordants. microbiopsies sous échographie.

Question 2 Question 4

Quel(s) argument(s) plaide(nt) en faveur de la bénignité Le résultat histologique est en faveur d’une mastite à plas-
(Fig. 14) ? mocytes. Que faites-vous ?
1. La présence d’un épaississement cutané ; 1. Une IRM ;
2. L’absence de masse ; 2. Un traitement anti-inflammatoire ;
3. L’absence de calcification suspecte ; 3. Des macrobiopsies sous échographie ;
4. L’unilatéralité des anomalies. 4. Une surveillance clinique et échographique rapprochée.

Réponse Réponse

2. et 3. L’épaississement cutané est plus fréquemment 2 et 4. Les résultats histologiques sont bénins et peuvent
retrouvé dans les mastites carcinomateuses. Le caractère expliquer les manifestations cliniques. L’IRM n’est pas indi-
unilatéral est non discriminant. quée car elle ne modifie en rien la prise en charge. Une
surveillance clinique et échographique rapprochée est indis-
Question 3 pensable sous traitement médical adapté pour s’assurer de
la régression rapide de la symptomatologie et des anomalies
L’échographie retrouve une masse de 3 cm para-aréolaire échographiques.
interne du sein gauche (Fig. 15). Que faites-vous ?
1. Des microbiopsies sous échographie ;
2. Une cytoponction ; Déclaration d’intérêts
3. Une surveillance échographique à 15 jours après antibio-
thérapie ; Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en
4. Une surveillance clinique à 15 jours et une nouvelle écho- relation avec cet article.
graphie à quatre mois.

Réponse Références
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