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Cancérologie générale 2021

DIAGNOSTIC ET BILAN D’EXTENSION DES CANCERS

INTRODUCTION

Le cancer correspond à un ensemble de maladies graves, mortelles en l’absence de traitement


efficace. Ce traitement nécessite au préalable un diagnostic précis et l’évaluation de
l’extension de la maladie

1. GENERALITES
1.1. Définitions

 Le diagnostic en cancérologie est la démarche qui permet au médecin, généraliste ou


spécialiste, d’affirmer le cancer dont souffre le patient, lui permettant de proposer un
traitement.
 Le bilan d’extension est l’ensemble d'examens médicaux destinés à évaluer l'étendue
locorégionale d'un cancer et la présence ou non de métastases dans d'autres organes.

Ce sont des étapes primordiales dans la prise en charge d’un patient atteint de cancer. Elles
font appel aux explorations cliniques et paracliniques dans des conditions guidées par un
raisonnement clinique.

1.2. Intérêt

Diagnostique : le diagnostic bénéficie de nos jours des progrès des techniques d’imagerie,
d’anatomo-pathologie et de biologie moléculaire. Un cancer diagnostiqué tôt a plus de chance
de guérison

Thérapeutique : la conduite du traitement est intimement liée aux éléments du diagnostic


positif et du bilan d’extension.

1.3. Rappels
1.3.1. Cancer

Le cancer correspond à une multiplication cellulaire anarchique d’un clone de cellules


normales qui échappent aux mécanismes normaux de différenciation et de régulation de leur
multiplication. En outre, ces cellules sont capables d’envahir le tissu normal avoisinant, en le
détruisant, puis de migrer à distance pour former des métastases.

1.3.2. Histoire naturelle du cancer

L’histoire naturelle d’un cancer est l’évolution de ce cancer, en l’absence de tout traitement,
de la période de cancérisation jusqu’à la mort de l’hôte. Elle comporte plusieurs phases :

 L’extension locale

Les cellules cancéreuses se multiplient donnant une masse tissulaire qui a tendance à croitre
et à envahir et à détruire les tissus de voisinages. Pour survivre, la tumeur doit être capable
de susciter la création de nouveaux vaisseaux sanguins (angiogénèse).

 L’envahissement ganglionnaire

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Les cellules cancéreuses sont emportées par le courant lymphatique après l’atteinte de la
paroi lymphatique, vers les sinus corticaux du premier relai ganglionnaire. Au niveau du
ganglion, les cellules peuvent :

o Y être détruites ;
o Se fixer en restant quiescentes ;
o Se fixer, s’y multiplier et donner des métastases ganglionnaires palpables ;
o Traverser le ganglion et gagner les relais ganglionnaires suivants ;
o Infiltrer tout le trajet des vaisseaux lymphatiques (lymphangite carcinomateuse)

 Dissémination métastatique

Une métastase est une tumeur maligne constituée de cellules issues de la tumeur primitive et
se développant à distance de celle-ci.

Se fait en 4 étapes

 Détachement des cellules tumorales de la tumeur primitive. Il est lié :


 Migration : ces cellules libérées peuvent emprunter diverses voies :
o Lymphatiques : les cellules tumorales atteignent le premier relais ganglionnaire,
puis le canal thoracique et enfin la circulation sanguine.
o Hématogène : cette voie est particulièrement fréquente pour les sarcomes, ainsi
que pour beaucoup de carcinomes.
o Intracavitaire : plèvre, péritoine, méninges
 Fixation au lieu métastatique : peut se faire par plusieurs mécanismes
 Développement : se fait en deux stades (avasculaire et vasculaire).

2. DIAGNOSTIC

Devant des signes d’appels, la stratégie diagnostique fait intervenir l’examen clinique et les
explorations paracliniques.

2.1. Diagnostic Positif


2.1.1. Circonstances de découverte

 Devant des signes fonctionnels liés à la tumeur elle-même

Chez l’adulte Chez l’enfant


Induration, tuméfaction Tache blanche ou brillante de l’œil et/ou strabisme
Nouvel aspect d’un bouton de la peau Augmentation de volume de l’abdomen
Déglutition difficile Présence de sang dans les urines
Indigestion, alternance diarrhée-constipation Enfant grognon, qui ne joue pas
Cicatrisation trop longue, Dents qui bougent, douleur osseuses
Enrouement de la voix, toux opiniâtre, voix Amaigrissement inexpliqué, adénopathies
bitonale Fièvre au long cours, frissons fatigue
Saignement anormal

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 Devant des signes de complication


→ Symptômes compressifs ou obstructifs : Respiratoire, Vasculaire, Digestif, Nerveux
→ Complications métaboliques : syndromes paranéoplasiques à expression biologique,
hypercalcémie
→ Métastases révélatrices : les plus fréquemment en cause sont les localisations
ganglionnaires, pleuropulmonaires, cérébrales, osseuses, hépatiques.

 Devant des manifestations générales


→ Altération de l’état général,
→ Fièvre au long cours et/ou syndrome inflammatoire,
→ Syndrome infectieux local ou général,
→ Maladie thromboembolique avec CIVD chronique,
→ Syndrome paranéoplasique.

 Lors d’un dépistage

2.1.2. Examen clinique

L’examen clinique complet est souvent le premier et le meilleur moyen de faire un diagnostic
précis du cancer.

L’interrogatoire précis, courtois et empathique recherche les antécédents personnels et


familiaux, les signes fonctionnels ainsi que leur évolution, le mode de vie du patient.

L’examen physique se fait sur un patient détendu, en confiance tout en respectant sa pudeur.
Cet examen doit être complet et suivre les 4 temps que sont l’inspection, la palpation, la
percussion et l’auscultation.

→ Devant une lésion visible. Soit directement (tumeur cutanée, ORL, col utérin), soit par
endoscopie (cancers VADS, tube digestif, cavité abdominale). L’aspect est parfois
typique :
 Tumeur sessile ou pédiculée
 Tumeur bourgeonnante ou ulcérée
 Dure à la palpation
 Saignant au contact
 Présentant une base infiltrée

L’absence de ces caractères n’exclut pas la malignité

→ Devant une lésion non visible. Elle peut être palpable. Certains caractères sont
évocateurs d’une lésion cancéreuse :
 Dureté
 Absence de limites nettes
 Fixation au plan profond ou à la peau, avec extension locale
 Présence de lésion locorégionale, en particulier adénopathies.

2.1.3. Examens paracliniques


2.1.3.1. Examens Radiologiques

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Ils permettent très souvent d’objectiver les lésions soupçonnées cliniquement, mais aussi
mettent en évidence de nouvelles lésions.

Radiographies standards

Toujours très utilisées, restent indispensables à l’exploration thoracique ou à celle des tumeurs
osseuses. Un type particulier est représenté par la mammographie qui tend aujourd’hui à être
réalisée avec des capteurs numériques plutôt qu’avec des films classiques.

Scanner ou tomodensitométrie

Examen de choix pour le diagnostic des tumeurs au niveau du crâne, du cou, du thorax, de
l’abdomen ou du pelvis. Les lésions dont la taille est supérieure à 1 cm sont assez faciles à
repérer. Le renforcement du contraste de la lésion par un produit iodé est assez caractéristique
d’une lésion cancéreuse.

Imagerie par résonance magnétique nucléaire (IRM)

Apporte des résultats intéressants dans les tumeurs neurologiques et osseuses. Les
indications se multiplient en se différenciant des indications du scanner.

Echographie

Particulièrement performante pour distinguer une tumeur solide d’un kyste. Elle peut procurer
des informations fonctionnelles sur la vascularisation (écho-doppler) et être une aide précieuse
pour guider un geste biopsique. Sa performance diminue avec la profondeur anatomique de
la zone explorée. Elle reste l’examen de première intention pour explorer le foie.

Examens isotopiques

Ce sont des explorations fonctionnelles. La qualité de l’image est moins importante que la
fonction explorée.

 Scintigraphie osseuse : se fait après injection de biphosphonate marqué au technétium


99 qui va se fixer là où on observe un remaniement osseux. Constitue ainsi l’examen de
dépistage des métastases osseuses.
 Caméra à positons ou TEP : Un certain nombre d’isotopes de courte durée de vie,
émetteurs de positons, permettent une étude du métabolisme des tissus de façon
précise. Compte de tenu de leur radioactivité et des possibilités de localisation par l’étude
de la coïncidence, ils détectent avec grande précision les tumeurs actives
métaboliquement. Semble prometteuse pour la détection des tumeurs médiastinales ou
abdominales.

Les endoscopies

Permettent l’exploration des voies respiratoires, digestives, urinaires, génitales, pouvant être
pratiquées avec ou sans anesthésie générale et répétés si besoin. Ces examens permettent
non seulement de décrire les lésions, mais surtout d’effectuer des prélèvements.

2.1.3.2. Examens biologiques

Certains examens biologiques sont indispensables pour le diagnostic précis du cancer :

 Dosage des -HCG pour le diagnostic du choriocarcinome palcentaire ;


 Dosage des -HCG ou -foetoprotéine pour le diagnostic des tumeurs testiculaires ;

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 Thyroglobuline et ACE pour les tumeurs de la thyroïde.

2.1.3.3. Examens anatomo-pathologiques

Seule l’analyse anatomo-pathologique d’un prélèvement permet de confirmer le


diagnostic de cancer.

→ Cytologie : Réalisée par ponction, frottis, aspiration, brossage, ne peut fournir que des
arguments de présomption diagnostique sur la présence de cellules malignes. Elle doit
conduire à la réalisation d’une biopsie pour analyse histologique.

→ Histologie : Le diagnostic positif d'un cancer est acquis par l'examen anatomo-
pathologique d'une biopsie parcellaire ou de la totalité de la tumeur primaire, d'une
adénopathie ou d'une métastase. L'obtention de cette preuve est une obligation, car le
traitement est précisément adapté à la nature exacte de la tumeur.

→ Immunohistochimie : Utilise des anticorps monoclonaux reconnaissant des antigènes


spécifiques des différents tissus tumoraux. A pour objectif d’améliorer et préciser
l’analyse histologique.

→ Le diagnostic moléculaire : Cette expression recouvre les tests visant à étudier les
modifications de l’ADN des cellules tumorales à des fins pronostiques et/ou
diagnostiques. La technique essentielle est la Polymérase Chain Reaction (PCR) qui
permet l’amplification de l’ADN à partir de très petites quantités initiales.

→ La cytogénétique : c’est l’étude des phénomènes génétiques au niveau des


chromosomes sans nécessité d’extraire l’ADN. Le caryotype est la technique la plus
ancienne. De nouvelles techniques telles que l’hybridation fluorescente in situ (FISH) ou
de cytogénétique moléculaire ne nécessitent pas de tissu viable. Permet d’identifier les
anomalies chromosomiques en rapport avec les cancers.

2.2. Diagnostic différentiel

Se fait essentiellement avec les tumeurs bénignes

Tumeurs bénignes Tumeurs malignes


Bien limitée Mal limitée
Encapsulée Non encapsulée
Histologiquement semblable au tissu
Plus ou moins semblable au tissu d’origine
d’origine (bien différenciée)

Cellules régulières Cellules irrégulières (cellules cancéreuses)


Croissance lente Croissance rapide
Refoulement sans destruction des tissus
Envahissement des tissus voisins
voisins

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Pas de récidive locale après exérèse Exérèse complète difficile. Récidive possible après
complète exérèse supposée complète
Pas de métastase Métastase

Remarques

 Il faut savoir qu’il existe des tumeurs mixtes et des tumeurs à malignité atténuée
(ovaire).
 Une tumeur bénigne peut dégénérer (polype digestif).
 Le siège et la taille d’une tumeur bénigne peut entrainer une évolution défavorable

Dans tous les cas, l’anatomo-pathologie confirmera le diagnostic.

2.3. Diagnostic étiologique

Le cancer est une maladie d’origine multifactorielle. Un certain nombre de facteurs endogènes
ou exogènes concours, de concert, à la transformation d’une cellule normale en cellule
cancéreuse puis au développement du cancer dans l’organisme. Ces facteurs sont dits
facteurs de risque ou facteurs étiologiques. L’identification de ces facteurs fait appel à
l’interrogatoire minutieux, l’examen physique complet, et des examens paracliniques.

Confère : Facteurs de la cancérogénèse, Hérédité et cancers

3. BILAN D’EXTENSION

3.1. Extension locale

L'appréciation de l'extension locale repose sur l'examen clinique et sur certains examens
paracliniques. L'examen clinique, pour être performant, doit parfois être fait sous anesthésie
(ex : col utérin) ou analgésie (ex : hypopharynx). L'endoscopie explore les organes creux (ex
: vessie, bronches, cavum…) et peut être complétée par l'écho-endoscopie (ex : œsophage,
rectum…). L'imagerie (échographie, scanner, IRM, scintigraphie) est intégrée au bilan
d'extension locale ; le choix de la méthode d'imagerie dépend de son domaine explorable et
de la situation de l'organe (ex : IRM pour les tumeurs des os et des parties molles).

3.2. Extension ganglionnaire

L'examen clinique permet de suspecter l'existence d'un envahissement ganglionnaire :


ganglion ferme ou dur, indolore, augmenté de volume, longtemps mobile. Souvent il existe
plusieurs adénopathies développées le long d'une chaîne ganglionnaire (ex : chaîne jugulo-
carotidienne) ; elles peuvent être confluantes et former un volumineux bloc fixé ou non.

La preuve de l'atteinte néoplasique peut être acquise par une ponction avec examen
cytopathologique ou par une adénectomie diagnostique. L'imagerie (échographie, scanner,
PET-scan) peut évoquer une extension ganglionnaire quand elle est bien orientée et bien
interprétée.

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3.3. Dissémination métastatique

Le diagnostic de métastase est porté sur des signes cliniques d'appel et confirmé par
l'imagerie. Leur recherche peut être systématique en l'absence de signe d'orientation, mais
cette démarche ne se justifie que si le risque est significatif, si le moyen d'exploration
paraclinique est performant et si leur découverte influence les modalités thérapeutiques. Les
marqueurs tumoraux peuvent avoir un intérêt pour suspecter l'existence de métastases (ex :
taux très élevé du PSA pour le cancer de la prostate, FP et β HCG restant élevés après
castration et curage ganglionnaire pour un cancer du testicule).

CONCLUSION

Le diagnostic et le bilan d’extension sont des étapes primordiales de la prise en charge d’un
cancer. Ils offrent des informations importantes pour établir le pronostic et guider les décisions
thérapeutiques. Ils se font selon une stratégie susceptible de garantir leur rentabilité et leur
innocuité.

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