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TUMEURS GLANDULAIRES BENIGNES ET MALIGNES

Définition - Nomenclature

Tumeurs développées à partir d’un épithélium cylindrique recouvrant un organe creux (tube
digestif, canaux excréteurs), un parenchyme exocrine (foie, pancréas exocrine, sein….) ou
endocrine (thyroïde).
Les tumeurs bénignes se nomment adénome et les tumeurs malignes adénocarcinomes. Ce terme
général est complété par la mention du tissu d’origine : adénome colique, adénocarcinome
pancréatique.
L’adénome = tumeur glandulaire bénigne : est constitué de tissu normal est en excès.
L’adénocarcinome = tumeur glandulaire maligne:
¾ différenciés (ou typiques) quand le tissu tumoral rappelle la structure du tissu d’origine.
¾ Moyennement différencié
¾ peu différenciés ou totalement indifférenciés

I Tumeurs des organes creux

Ce sont les tumeurs des revêtements muqueux glandulaires :


- muqueuses digestives : estomac, duodénum, intestin grêle, colon
- muqueuses de l’appareil génital féminin : trompes utérines, endomètre, endocol
- voies aériennes : fosses nasales, trachée, bronches.
La structure d’une muqueuse glandulaire est différente de celle d’un revêtement épidermoïde. Elle
comporte un épithélium unistratifié avec sécrétion de mucus. Cet épithélium de surface émet des
flexuosités de profondeur variable qui s’enfoncent dans le conjonctif sous jacent, réalisant des
cryptes ou des glandes.
La muqueuse glandulaire est donc formée par l’ensemble : épithélium de surface, cryptes ou
glandes et tissu conjonctif (chorion).

IA- TUMEURS BENIGNES DES MUQUEUSES : ADENOME

Macroscopie :
¾ les tumeurs bénignes forment des masses saillantes sur la surface des muqueuses. Elles
sont rattachées à la paroi par un pédicule plus ou moins bien individualisé : leur terme
macroscopique est : polype glandulaire.
¾ Ce terme de polype, purement macroscopique, désigne une « tumeur pédiculée développée
dans un organe creux ». Mais tous les polypes ne sont pas des adénomes : il existe des
polypes inflammatoires, hyperplasiques, ou rétentionnels.
¾ siège : surtout le tube digestif : colon, rectum. Ils sont parfois multiples ayant dans ce cas
un caractère familial : polypose recto colique ou adénomatose familiale. Plus rarement, ils
siègent au niveau bronchique ou du col utérin.
¾ 2 formes macroscopiques : polype (ou adénome) tubuleux et polype villeux

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ADENOME TUBULEUX

- petite tuméfaction en relief sur la muqueuse colique, de taille variable : 1 à 5 mm


jusqu’à 3 cms.
- Sa surface est irrégulièrement bosselée, dessinant de petits lobules
- Recouverte d’une muqueuse normale, rouge plus ou moins sombre
- Appendue à un pédicule constitué d’une évagination de muqueuse saine
- En somme, aspect de fraise ou de champignon

ADENOME VILLEUX :
- juxtaposition de papilles serrées les unes contre les autres, donnant un aspect chevelu ou
en touffe d’algues
- dépourvu de pédicule, s’étendant en nappes (tumeur sessile)

Microscopie
Les adénomes sont constitués de cavités glandulaires augmentées en taille et en nombre. En
principe, le revêtement est fait de cellules normales.

En réalité, en particulier au niveau du colon, un grand nombre de ces adénomes est constitué de
cellules présentant des anomalies cytologiques que l’on apprécie par un grading : ces atypies sont
classées en dysplasie de bas grade ou de haut grade, selon les critères suivants :
o Glandes plus basophiles
o Perte de la muco sécrétion
o Atypies cellulaires
Ces anomalies microscopiques sont plus ou moins intenses, et ceci est la base de la notion de grade
: l'anatomo-pathologiste doit non seulement reconnaître une dysplasie mais doit indiquer son grade
c'est-à-dire son intensité. En règle, plus la dysplasie est marquée, plus le risque de transformation
en cancer à plus ou moins court terme est élevé.
Le grade a donc pour but de proposer un pronostic pour guider l'attitude thérapeutique.

Ainsi, la plupart de ces adénomes coliques sont des lésions précancéreuses. Dans le colon il existe
une véritable filiation entre tumeur bénigne (adénome) et tumeur maligne (adénocarcinome) dans
le côlon. Dix à quinze pour cent des adénomes (10 à 15%) sont susceptibles de cancérisation. Ce
potentiel de malignité justifie leur dépistage endoscopique et leur exérèse par voie endoscopique
surtout dans les familles à risque. Ainsi, dans l’adénomatose familiale la transformation cancéreuse
est constante justifiant un geste chirurgical large (colectomie dès l’adolescence).

IB- TUMEURS MALIGNES : ADENOCARCINOMES

Macroscopie
¾ Il existe 3 aspects souvent intriqués : bourgeonnant (en saillie, en forme de chou-fleur),
infiltrant, ulcéré
¾ Les petites tumeurs sont souvent bourgeonnantes ; lorsqu’elles deviennent plus
volumineuses et évoluées, elles deviennent ulcérées en leur centre et infiltrantes, restant
bourgeonnantes à la périphérie.
¾ Certaines tumeurs sont purement infiltrantes (linite gastrique), d’autres, riches en mucus,
sont gélatineuses.
¾ La tumeur occupe tout ou partie de la circonférence colique.

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Microscopie
Les adénocarcinomes sont :
¾ Bien différenciés (ou typiques) quand le tissu tumoral rappelle la structure du tissu
d’origine. Ils sont constitués de glandes bien individualisés
¾ Moyennement différencié : formés de massifs polyadénoïdes
¾ peu différenciés : peu de glandes
¾ totalement indifférenciés = anaplasique : absence de glandes
On peut alors rechercher la sécrétion de mucus par des techniques spéciales :
o des colorations spéciales : mucicarmin, PAS
o immunohistochimie : détection de filaments intermédiaires : Cytokératine + dans les
tumeurs épithéliales ; Vimentine – (marquage en revanche positif dans les tumeurs
conjonctives). Ces marqueurs de base permettent de différencier une tumeur
épithéliale d’une tumeur conjonctive (sarcome).

¾ métaplasiques quand la tumeur prend des caractères habituellement rencontrés dans des
tumeurs d’autre origines. Ex : adénocarcinome gastrique de type lieberkühnien (rappelant la
structure colique) – carcinome bronchique épidermoïde à partir d’un épithélium de type
glandulaire.

Les critères de malignité sont :


1. l’architecture
2. la cytologie =atypies des cellules et des noyaux
3. infiltration de la paroi
4. la stroma réaction fibreuse et/ou inflammatoire

L’infiltration dans la paroi de l’organe (colon, utérus) est variable, conditionnant le pronostic.

II Tumeurs des parenchymes glandulaires

Définition : tumeurs développées dans des organes pleins :


- glandes annexes du tube digestif : foie, pancréas, glandes salivaires
- sein, glandes sudorales
- rein, épithélium ovarien, prostate
™ à noter que le pancréas peut développer des tumeurs à partir de son contingent endocrine.

Macroscopie
o Les tumeurs bénignes sont uniques ou multiples, arrondis, encapsulés sur toute leur
circonférence. A la coupe, ils sont homogènes, de la coloration et de la consistance du tissu
normal lequel est refoulé et déformé mais non infiltré.
o Les tumeurs malignes sont uniques ou multiples, de forme irrégulière, mal limitées, envoyant
des prolongements dans le tissu sain (étoilée), dure. Elles peuvent être nodulaires, unique ou
multiples. Il existe des remaniements nécrotiques (pouvant réaliser des pseudo-kystes) et
hémorragiques. La consistance est généralement ferme, sauf en cas de nécrose. Elles peuvent
être kystiques (cystadénocarcinome).

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Exemple : tumeur du sein

A- Tumeurs bénignes : adénofibromes


Au niveau de la glande mammaire, la prolifération adénomateuse est associée à un développement
du tissu conjonctif réalisant une tumeur à double composante glandulaire et conjonctive.
Présentation clinique : Les adénofibromes surviennent chez la femme jeune. Il s’agit de
tumeurs arrondies, ferme et mobiles
Macroscopiquement, ils forment un nodule rond, dur, encapsulé.
Microscopiquement, c'est une prolifération des galactophores: canaux à double assise cellulaire
cylindrique interne et myoépithéliale externe. Les canaux sont refoulés en fentes étirées par la
prolifération du tissu conjonctif.
Pronostic : ils ne récidivent pas si l’exérèse a été complète.

B-Tumeurs malignes : carcinomes


Une femme sur 10 sera touchée d’un cancer du sein pendant sa vie.
o Facteurs de risque :
-sexe féminin, avec augmentation avec l’âge
-importante exposition aux oestrogènes (intervalle long entre puberté et ménopause)
-âge élevé à la première grossesse
-obésité, régime riche en graisses
- histoire familiale de cancer de sein, altération des gènes de prédisposition au cancer du
sein : BRCA1 et BRCA2
o Présentation clinique : Ils surviennent avec un maximum de fréquence chez la femme après
50 ans, parfois chez la femme avant 35 ans. La localisation la plus fréquente est le quadrant
supéro-externe puis la région rétro-mamelonnaire. La tumeur est soit de découverte
clinique : masse palpable, dure et fixée de la glande mammaire, ou plus souvent depuis la
généralisation du du dépistage, de découverte mammographique (radiographie de la glande
mammaire), sur des microcalcifications.

o Macroscopiquement, il s’agit le plus souvent d’une tumeur stellaire, adhérente (rétraction


du mamelon quand il est proche).
o Microscopiquement, la prolifération carcinomateuse est plus ou moins bien différenciée. Il
faudra rechercher la présence d’emboles vasculaires ou lymphatiques.

o Pronostic : le pathologiste intervient en évaluant le grade histopronostique de Scarff, Bloom


et Richardson qui prend en compte le degré de différenciation glandulaire, l'importance des
anomalies cytonucléaires et le nombre de mitoses. Il donne également -un indice
d'extension qui est le T.N.M. (taille de la tumeur, nombre et siège des adénopathies
métastatiques, métastases à distance).

Remarque : Relation adénofibrome cancer : il n’y a pas de filiation directe.

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III Tumeurs des parenchymes endocrines

Elles sont développées à partir :


- des glandes endocrines organisées : hypophyse, thyroïde, parathyroïde, pancréas
endocrine (îlots de Langherans), surrénale (cortex et médullaire)
- mais aussi des cellules endocrines disséminées dans la paroi du tube digestif, les
bronches, le foie, la sphère génitale. Dans ce groupe rentrent aussi les cellules C qui
colonisent le corps thyroïde.

La présence de grains neurosécrétoires intracytoplasmiques, de nature neuropeptidique et


polypeptidique est mise en évidence par :
colorations argentiques : Grimélius
immunohistochimie : chromogranine, synaptophysine, définissant le caractère neuroendocrine.
La recherche de sécrétions spécifiques peut être effectuée : gastrine, insuline, VIP…

Macroscopie
Nodules tumoraux souvent d’assez petite taille lorsqu’ils sont fonctionnels (dépistés plus tôt) ou
plus volumineux s’ils sont silencieux. Coloration beige, jaune ou brunâtre. Ils sont uniques ou
multiples =Néoplasie Endocrine Multiple (NEM I ou NEM II) .

Microscopie
Les tumeurs endocrines ont généralement une architecture trabéculaire. Sur le plan cytologique, les
atypies sont modérées ou absentes. C’est pourquoi, seule parfois la présence de métastases permet
d’affirmer le potentiel malin d’une tumeur endocrine.
La différenciation n’est pas seulement morphologique mais aussi souvent fonctionnelle. Les
tumeurs endocrines seront donc :
- non sécrétantes, révélées par l’augmentation de volume de l’organe
- sécrétantes, révélées par un syndrome clinique d’hypersécrétion hormonale :
o insulinome pancréatique : hypoglycémie
o adénome corticosurrénalien : hypercortisolisme
o adénome parathyroïdien : hypercalcémie (Parathormone)
o adénome hypophysaire : acromégalie (GH), Cushing (ACTH).
Les produits de sécrétion sont mis en évidence en immunohistochimie avec des anticorps
appropriés : anti-insuline, anti-parathormone etc…

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TRAVAUX PRATIQUES : tumeur bénigne et maligne du colon

A) tumeur bénigne : adénome colique

Il survient le plus souvent entre 50 et 60 ans, principalement sur le rectosigmoïde.

MACROSCOPIE : la coupe examinée est un adénome tubuleux du colon :

- taille variable : 2-10 mm


- petite tuméfaction en relief sur la muqueuse colique
- sessile ou pédiculé (pédicule jusqu’à 5 cm)
- Sa surface est irrégulièrement bosselée, dessinant de petits lobules
- Recouverte d’une muqueuse normale, rouge plus ou moins sombre
- Appendue à un pédicule constitué d’une évagination de muqueuse saine
- En somme, aspect de fraise ou de champignon

MICROSCOPIE

1 Rappel de l’histologie normale du colon


- muqueuse : épithélium de surface cylindrique unistratifié composé d’entérocytes et de cellules
à mucus ouvertes au pôle apical ou fermées. Cet épithélium qui s’invagine en formant les
glandes de Lieberkühn, repose sur une basale collagène qui le sépare du chorion (ou lamina
propria)
- les couches sous jacentes comportent : la musculaire muqueuse, la sous muqueuse, la
musculeuse et la séreuse.

2 Description microscopique de l’adénome tubuleux : 2 parties distinctes :


a) une zone de prolifération glandulaire tumorale bénigne : c’est l’adénome proprement
dit
- augmentation en nombre et en longueur des glandes de Lieberkühn qui se pelotonnent et
s’infléchissent si bien qu’elles apparaissent sectionnées transversalement
- ces glandes sont revêtues d’une seule couche de cellules cylindriques ne comportant pas
d’atypies majeures tantôt hyperbasophiles tantôt mucosécrétantes. L’hypersécrétion de mucus
réalise parfois des zones de dilatation kystique.
- ces glandes sont séparées les unes des autres par un chorion et reposent sur une basale
intacte .
- dysplasie

b) un pédicule : recouvert d’une muqueuse normale et constitué d’un axe conjonctivo-vasculaire


émanant de la sous-muqueuse.

Cette tumeur est bénigne car :


• Il n’y a pas d’anomalies architecturales : pas d’accolement des glandes
• Il n’y a pas d’anomalies cytologiques majeures ni de mitoses
• Le pédicule est intact, sans glandes tumorales au sein de son axe ni au-delà
dans la paroi (musculaire muqueuse)

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B) tumeur maligne : adénocarcinome colique
Le cancer du colon est très fréquent (deuxième cause de mortalité par cancer) avec un âge moyen
de 60-65 ans. Il survient principalement au niveau recosigmoïde (66%), plus rarement caecum et
transverse.

SIGNES FONCTIONNELS : troubles du transit et hémorragies.

MACROSCOPIE :
a. forme bourgeonnante à surface irrégulière
b. forme ulcérée : perte de substance à bords irréguliers
c. forme infiltrante : placards indurés, mal limités, rigides
la coupe a porté sur une tumeur bourgeonnante, ulcéro infiltrante,

MICROSCOPIE

Il s’agit d’une tumeur maligne invasive présentant des signes de différenciation glandulaire

Signes de malignité :
1) désorganisation architecturale
2) la différenciation glandulaire :
• prolifération de glandes tumorales séparées les unes des autres ou accolées, réalisant
des massifs polyadénoïdes
• pluristratification cellulaire,
• papilles tumorales
3) les anomalies cytologiques :
• cellules cylindriques, aspect lieberkühnien ou mucosécrétant
• avec basophilie cytoplasmique
• noyaux volumineux, hyperchromatiques, mitoses atypiques
4) la stroma réaction : fibro inflammatoire, entourant les glandes tumorales
5) les signes d’invasion :
• destruction de la basale de l’épithélium et
• invasion des tuniques sous jacentes : sous muqueuse et musculeuse (p T2)

Cette tumeur est maligne car :


• il existe des anomalies architecturales : glandes accolées, papilles
• des atypies cytologiques nucléaires, mitoses
• elle suscite une stroma réaction
• la tumeur est invasive dans la paroi colique (musculeuse).

Type de réponse : adénocarcinome colique bien différencié, infiltrant la musculeuse de stade


anatomique p T2

Octobre 2007 Myriam Decaussin-Petrucci 7

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