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Olivier Tredan
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Partie III. Prise en charge du cancer du sein
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Chapitre 16. Cancers du sein localement avancés
est peu contributive, seule la biopsie et l’analyse séminées. En effet, il semble (dans des modèles
histologique permettent d’éliminer le carcinome précliniques) que la prolifération des cellules can-
mammaire. céreuses au sein de ces micrométastases puisse
La mastite à plasmocyte est une entité rare, elle être favorisée par des facteurs de croissance sécré-
correspond au stade évolué de la mastite inflam- tés lors de la chirurgie de la tumeur mammaire.
matoire, se présentant cliniquement comme un Par ailleurs, la prise en charge chimiothérapique
cancer inflammatoire, le diagnostic est posé par rapide (c’est-à-dire la précocité du traitement sys-
l’histologie qui décrit la présence de cellules plas- témique) permet un meilleur contrôle antitumo-
mocytaires en grand nombre dans la paroi des ral pour les lésions volumineuses. Elle permet
canaux très épaissis. d’évaluer la chimio-sensibilité de la tumeur et
permet surtout d’augmenter les chances de réali-
ser par la suite une chirurgie avec conservation
Histologie
mammaire. En contrepartie, la chimiothérapie
Le diagnostic formel est donné par l’histologie néo-adjuvante retarde le geste locorégional poten-
qui doit être obtenue par prélèvement microbiop- tiellement curateur (il existe un risque de progres-
sique couplé à une biopsie cutanée. Le type histo- sion tumorale sous chimiothérapie), augmente
logique de loin le plus fréquent est le carcinome parfois les risques de complications chirurgicales
canalaire infiltrant peu différencié, les formes et brouille l’évaluation de facteur pronostique
lobulaires ou tubuleuses sont exceptionnelles. Le classique, comme l’atteinte ganglionnaire axil-
grade histopronostique selon SBR est de III dans laire. En fait, le principal objectif de la chimiothé-
45 à 75 % des cas selon les séries témoignant d’une rapie néo-adjuvante est le même que celui de la
évolutivité tumorale importante. Les récepteurs chimiothérapie adjuvante. Il s’agit d’augmenter la
hormonaux sont moins souvent positifs que pour survie des patientes (survie sans rechute et survie
les tumeurs de présentation classique (44 % versus globale). Ainsi, quelques études ont comparé la
66 % dans l’étude de Paradiso). La biopsie cutanée survie des patientes traitées par chimiothérapie
retrouve des emboles lymphatiques dermiques adjuvante et celles traitées par chimiothérapie
dans 60 à 70 % des cas. néo-adjuvante. En reprenant toutes ces études, il
n’apparaît pas de différence statistiquement signi-
Bilan d’extension ficative entre les deux populations en termes de
risque de récidive à distance ou de décès [1].
Il est indispensable et doit être complet car les
formes métastatiques d’emblée sont fréquentes Il existe quelques facteurs, dans la littérature, qui
(près de 50 % au diagnostic). Il comprend un scan- permettent de sélectionner les patientes suscepti-
ner thoraco-abdomino-pelvien, une scintigraphie bles de répondre favorablement à la chimiothéra-
osseuse, une imagerie cérébrale en cas de sympto- pie première. Ainsi, les tumeurs ayant un taux
matologie neurologique. élevé de prolifération cellulaire (tumeur de haut
grade, sans récepteurs hormonaux, avec un taux
élevé du marqueur Ki67) présentent plus souvent
une régression tumorale complète que les tumeurs
Prise en charge thérapeutique ayant un index de prolifération faible (type lobu-
néo-adjuvante laire ou grade 1). Le taux de réponse complète his-
tologique est plus fréquent chez les femmes jeunes
Principe de la chimiothérapie ayant des tumeurs de petite taille. Pour évaluer la
préopératoire réponse tumorale, l’examen clinique est souvent
peu précis (variabilité interindividuelle) et est mal
Pour les tumeurs du sein inflammatoires ou pour corrélé à la réponse histologique ou à la survie.
les cancers localement avancés et négligés, la Lorsque cet examen clinique est couplé à la mam-
chimiothérapie première est le traitement initial mographie, il permet d’améliorer la prédiction de
de référence. Le rationnel biologique pour l’utili- la réponse histologique. Cependant, le résidu
sation de la chimiothérapie avant tout geste théra- tumoral est souvent surestimé. Plusieurs études
peutique locorégional s’appuie sur la nécessité évaluent actuellement l’apport des différentes
d’éliminer précocement les micrométastases dis- techniques d’imagerie mammaire fonctionnelle
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Partie III. Prise en charge du cancer du sein
(IRM de perfusion, scintigraphie au 18-FDG, Surgical Adjuvant Breast and Bowel Project –
spectroscopie…) avant et après la chimiothérapie NSABP (étude B27), il a été montré que le taux de
néo-adjuvante pour caractériser la réponse anti- réponse complète histologique est de 26 % avec
tumorale. Leur intérêt dans la pratique courante l’utilisation d’une combinaison de quatre cures
reste donc incertain. L’IRM mammaire permet d’AC suivies de quatre cures de docétaxel. Dans
souvent de bien évaluer les lésions suspectes pour 64 % des cas, les patientes ont bénéficié d’une
discuter, après la chimiothérapie, la décision de chirurgie de conservation mammaire [3]. Dans
conservation mammaire [2]. Quoi qu’il en soit, le cette étude, l’ajout du docétaxel permet également
traitement néo-adjuvant nécessite une étroite col- d’améliorer la survie sans maladie. Les protocoles
laboration entre les différents acteurs de la prise à base de FAC (5-fluoro-uracile, adriamycine,
en charge thérapeutique (chirurgiens, oncologues, cyclophosphamide), FEC (5-fluoro-uracile, épiru-
radiologues). L’évaluation de l’évolution tumo- bicine, cyclophosphamide), TAC (docétaxel, adria
rale sous traitement doit être régulière ; la straté- mycine, cyclophosphamide) et ET (épirubine,
gie doit être modifiée rapidement en cas de docétaxel) sont d’usage courant.
progression tumorale. La décision de conserva- Pour les patientes qui présentent des tumeurs avec
tion mammaire dépend de plusieurs critères, une surexpression de la protéine HER2 (ou une
incluant la taille et la localisation tumorale, la amplification du gène CerB2), l’utilisation du
présence de lésions multiples, d’œdème cutané ou trastuzumab est indispensable. En effet, le taux de
d’adhérence. réponse complète histologique double lorsque les
Il faut particulièrement souligner que le taux de patientes reçoivent du trastuzumab (en comparai-
réponse complète histologique est un facteur son avec les patientes qui ne reçoivent pas de tras-
indépendant de survie des patientes [3]. tuzumab) [5].
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Chapitre 16. Cancers du sein localement avancés
d’aromatase en double aveugle. Ainsi, il apparaît [2] Balu-Maestro C, Chapellier C, Bleuse A et al. Imaging
que 4 mois de traitement par tamoxifène ou par in evaluation of response to neoadjuvant breast
cancer treatment benefits of MRI. Breast Cancer Res
létrozole aboutissent à un taux de réponse, res-
Treat 2002 ; 72 : 145-52.
pectivement, de 36 % et de 55 % [7]. Il n’y a pas
[3] Rastogi P, Anderson SJ, Bear HD et al. Preoperative
pour l’instant de données fiables quant à la survie chemotherapy : updates of National Surgical Adjuvant
des patients traitées par hormonothérapie pre- Breast and Bowel Project Protocols B-18 and B-27.
mière. Par ailleurs, pour évaluer la réponse à l’hor- J Clin Oncol 2008 ; 26 : 778-85.
monothérapie, plusieurs semaines sont nécessaires. [4] Diéras V, Fumoleau P, Romieu G et al. Randomized
Il n’y a pas, à l’heure actuelle, de recommanda- parallel study of doxorubicin plus paclitaxel and
tions claires en cas d’échec de l’hormonothérapie doxorubicin plus cyclophosphamide as neoadjuvant
(chimiothérapie de rattrapage ou chirurgie ?). De treatment of patients with breast cancer. J Clin Oncol
2004 ; 22 : 4958-65.
plus, en pratique, se pose parfois la question de la
chimiothérapie adjuvante après un traitement [5] Untch M, Rezai M, Loibl S et al. Neoadjuvant treat-
ment with trastuzumab in HER2-positive breast
initial par hormonothérapie néo-adjuvante. Là cancer : results from the GeparQuattro Study. J Clin
encore, les recommandations dans ce domaine Oncol 2010 ; 28 (12) : 2024-31.
sont incertaines. [6] Anderson ED, Forrest AP, Hawkins RA, et al. Primary
systemic therapy for operable breast cancer. Br J
Bibliographie Cancer 1991 ; 63 : 561-6.
[7] Eiermann W, Paepke S, Appfelstaedt J et al. Preoperative
[1] Mauri D, Pavlidis N, Ioannidis JP. Neoadjuvant versus treatment of postmenopausal breast cancer patients
adjuvant systemic treatment in breast cancer : a meta- with letrozole : a randomized double-blind multicenter
analysis. J Natl Cancer Inst 2005 ; 97 : 188-94. study. Ann Oncol 2001 ; 12 : 1527-32.
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