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INTRODUCTION
Bien que le programme officiel tel qu’il est décrit dans le cahier des charges des études
de licence ne se compose plus que matières de conflits de lois et de conflits de
juridictions, il est question dans notre propos de faire référence à la matière dans sa
globalité : le droit international privé (D.I.P).
Notre réflexion portera sur les termes usités pour désigner la matière (A), ce qu’elle
signifie, son objet (B) et son évolution historique (C).
Le débat est grand, les définitions foisonnent, les appellations nombreuses et l’objet
de la discipline ne fait pas l’unanimité. L’expression « D.I.P » imputée à Story qui
l’utilisa, timidement, semble-t-il, pour la première fois dans son ouvrage «
commentaries on the conflict of law », fut introduite et vulgarisée en France par le
traité de droit international privé de Foelix (1843).
DIP est, de nos jours, une expression universellement employée. Une Critique majeure
lui est cependant faite, car, disent certains auteurs, cette discipline désigne une
branche du droit essentiellement nationale et, en réalité, étrangère au droit privé.
Cette définition restrictive prête le flanc à la critique pour la raison qu’elle ignore et
exclut du champ de la matière des disciplines ou titres fondamentaux telles que Le
conflit de juridictions, la condition des étrangers et la nationalité.
En définitive, dans la tradition française aussi bien dans les ouvrages français
classiques que ceux rédigés par la nouvelle génération des juristes internationalistes
privés, le droit international privé est conçu et traité dans sa signification extensive :
conflits de lois et conflits de juridictions, nationalité et conditions des étrangers.
en plus grandissant dans les règles internes et la jurisprudence des pays membres de
l’union européenne.
II – L’OBJET DU D.I.P.
Ressortant, surtout son caractère de droit public, J-P. Niboyet considérait que le droit
international privé « est la branche, appartenant actuellement, en principe, au droit
public national et assez exceptionnellement au droit des gens, qui se préoccupe de la
répartition internationale des individus, en vue de déterminer ensuite les droits dont
ils jouissent et de rechercher comment ils pourront les exercer sous l’empire des lois
compétentes, avec le concours des autorités ou des juridictions qualifiées ».
Ainsi certains auteurs considèrent -ils que le droit international privé est « ce droit qui
concerne les personnes privées quand elles sont confrontées au fait de l’existence dans
le monde de systèmes juridiques étatiques différents… ».
Si l’on retenait la définition qui nous est proposée par le professeur français P. MAYER
, selon laquelle « Le D.I.P est un droit spécial applicable aux personnes privées
impliquées dans des relations juridiques internationales »1, on pourrait en déduire trois
postulats.
Le premier est lié à ce caractère de droit spécial (A), le deuxième a trait au caractère
privé (B) de la relation et le troisième concerne « l’internationalité » de cette relation.
(C)
L’adjectif « spécial » évoque le fait que le droit international privé ne prend pas
nécessairement en charge le règlement intégral de la question juridique posée. Il ne
traite que les problèmes spécifiques directement liés au caractère international de
celle-ci. En d’autres termes, il cherche à travers la règle de conflit de lois à donner
une solution à un litige dans sa dimension première : la recherche de la loi applicable.
C’est, donc, presque toujours selon le droit commun applicable aux relations internes
de l’un des États avec lequel la relation juridique internationale est en rapport que
cette dernière est appréciée.
Néanmoins, il semble que dans certains cas, les personnes privées soient “sujets” de
droit international public. En effet dans le domaine de la protection internationale et
des droits humains, un individu peut déclencher à son profit les dispositions du droit
international public (convention, traité, etc.) .
Cependant le droit international public, même dans ces cas, a toujours pour objet
d’imposer des obligations aux Etats, alors qu’en droit international privé, le rôle de
l’État se borne à édicter des règles et à les appliquer.
La relation internationale est celle qui présente à l’organe étatique qui l’examine (juge,
officier de l’état civil, notaire ou Adel, préfet ou fonctionnaire consulaire, etc.) un
élément d’extranéité ; c’est à dire un élément par lequel elle est en contact ne serait-
ce que partiellement avec un ordre juridique étranger1.
1 P. Mayer. Op.cit.
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Introduction au Droit International Privé 2021 A. OUNNIR
Exemple : la relation entre deux époux marocains domiciliés en France, appréciée par
un juge français, est une relation internationale.
Est internationale, au contraire, la relation qui met en cause deux ou plusieurs pays,
par ses éléments intrinsèques. Sont, ainsi, objectivement internationales : la relation
matrimoniale entre un Marocain et une Française ou encore les héritiers marocains
d’une succession comprenant des immeubles en France.
Dans ces exemples, la relation internationale est objective car le rattachement à deux
ou plusieurs pays existe en soi, avant tout recours en justice ou toute saisine d’un
organe étatique quelconque. Ce rattachement est aisément constatable même par un
observateur extérieur à tout ordre juridique.
3 - La subjectivité suffit
Il faut et il suffit en effet pour que le droit international privé entre en jeu, que la
relation soit subjectivement internationale ; c’est à dire qu’elle présente, au juge ou
l’institution étatique saisis, un élément d’extranéité.
Avant que la matière n’ait reçu, pour la distinguer des autres disciplines juridiques,
l’expression « droit international privé », laquelle ne parait remonter qu’à un peu plus
d’un siècle (traité de Story 1834), les questions relatives à cette matière furent résolues
successivement par des procédés généraux dont l’évolution sera tracée sommairement
dans cette étude. Notons dès à présent que la terre d’Islam connut un système
différent.
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Introduction au Droit International Privé 2021 A. OUNNIR
L’idée principale réside dans le fait que L’étranger, sauf lorsqu’il jouit d’un statut
particulier, n’est pas un sujet de droit. Il ne bénéficie d’aucune protection. Cela résulte
de la combinaison de deux facteurs : le premier revêt un aspect religieux et le second,
réside dans l’aversion, déjà existante, à l’époque pour tout ce qui est étranger, différent
et donc provoque la suspicion et la crainte.
Des cités qui entretiennent des rapports privilégiés peuvent conclure entre elles un
traité au profit de leurs ressortissants respectifs. En Grèce les traités « d’isopolitie »
permettent aux individus originaires de l’une des cités contractantes de jouir dans
l’autre de tout ou partie des droits reconnus aux citoyens de celle-ci.
Les romains considèrent aussi les étrangers comme esclaves ou comme ennemis, donc
sans possibilité d’avoir des liens juridiques avec eux en tant que personnes juridiques.
Avec l’hégémonie progressive de Rome sur le bassin méditerranéen, le problème des
conflits de lois devint inéluctable. Lorsqu’un litige opposait un romain à un pérégrin
(habitant d’une région conquise), c’est la juridiction du gouverneur qui en est saisie en
général et celle du « préteur pérégrin » à Rome en particulier .
C’est l’action du préteur pérégrin qui permit la formation à côte du « jus civile », d’une
nouvelle discipline : le « jus gentium ». (Droit des gens).
Le X° siècle vit s’unifier le droit privé et avec le système politique féodal, une pure
territorialité des lois. L’homme étant lié au sol, ses droits et ses obligations y sont
attachés.
La loi de la seigneurie s’appliquait à tous les biens situés sur le territoire (lex rei sitae),
à toutes les personnes qui y sont domiciliées (lex domicilii) et à tous les actes qui y
sont conclus.
C’est au moyen âge, en Italie, que les conflits de lois firent leur réelle apparition. Ce
pays fut donc le berceau du droit international privé. Trois ordres de facteurs ont été
favorables au développement de la matière.
Ce fut sans doute l’importance du commerce et la prospérité des républiques qui ont
contribué à donner un essor considérable aux conflits de lois et à la recherche de leurs
solutions. Les commerçants, pour résoudre les conflits de lois nés des relations
commerciales, acceptent dans leur cité l’application de certaines institutions juridiques
des cités voisines.
La féodalité fut bien profonde en Italie qu’en France. Les villes avaient soit conservé
leur souveraineté soit acquis leur indépendance beaucoup plutôt que les communes
en France. Chaque ville avait des statuts municipaux distincts. Les relations
commerciales donnèrent naissance à des conflits entre ces statuts municipaux.
Ce sont ces trois écoles qui posèrent les jalons de la théorie des conflits de lois.
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Introduction au Droit International Privé 2021 A. OUNNIR
Comme pour toute réflexion sur toute discipline juridique dans notre pays, il y a lieu
de procéder à une analyse historique en prenant en considération les trois repères
chronologiques fondamentaux : l’Islam, le protectorat et l’indépendance.
Mais lorsque l’empire musulman s’est imposé, l’idée qu’on ne peut expulser ni
exterminer tous les chrétiens et tous les juifs est devenue une évidence. Ceux-ci, ne
voulant donc pas embrasser la religion musulmane et devenir musulmans à part
entière, jouiront, alors, au sein de la cité musulmane d’une situation particulière,
concrétisée dans cette institution appelée dhimma et qui est « un contrat par lequel la
communauté musulmane accorde hospitalité-protection aux membres des autres
religions révélées, à condition qu'eux-mêmes respectent la domination de l'Islam" .
La dhimma résulte, donc, d’une certaine méfiance. Elle traduit en même temps une
idée de protection et de sujétion.
La protection permit aux dhimmis d’être garantis dans leurs biens et dans leurs
personnes et la sujétion leur confère un statut inférieur à celui des musulmans en ce
sens qu’ils n’avaient ni les mêmes droits ni les mêmes obligations que les musulmans.
En effet en Islam, le rattachement du statut personnel à la loi nationale est une règle
qui prévaut dans tous les cas.
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Introduction au Droit International Privé 2021 A. OUNNIR
L’un des concepts clés du droit public islamique est la notion d’Al Oumma. C’est la
totalité des fidèles, liés les uns aux autres par des liens non d’ethnie ou de race, mais
de religion. Le chef de cette Oumma est Allah. Il est le législateur unique et il n’existe
pas dans la théorie musulmane de place pour une souveraineté temporelle.
Il ne peut donc exister d’État souverain si celui-ci devait avoir le pouvoir de promulguer
une législation propre et laïque.
A vrai dire, il est difficile de parler, à cette époque, de méthode de droit international
privé moderne. En effet le Maroc terre d’Islam, tout au moins dans la zone chrâa,
ignorait le concept de nationalité. Seule la notion d’Oumma cimentée par le lien de
religion était utilisée par les jurisconsultes musulmans. L’existence de communautés
non musulmanes (chrétiens et juifs) a conduit sur le plan du statut personnel à un
pluralisme communautaire à base confessionnelle, juridiquement désigné par les
historiens par les termes d’autonomie législative et juridictionnelle des communautés
non musulmanes.
Dès le très haut moyen âge on assista à une prolifération de traités diplomatiques
conclus entre les princes musulmans et les États chrétiens relativement à l’organisation
de la relation avec l’étranger ; ce fut le passage d’une situation unilatéralement définie
et imposée par l’autorité musulmane (l’état de dhimmi : protégé) à un statut négocié.
On entrevoyait déjà le régime des capitulations.
A partir du XVI° siècle, les traités (ex. Traité du 9 décembre 1856 signé avec la grande
Bretagne), et spécialement les capitulations étendent la personnalité des lois bien au-
delà du domaine classique du statut personnel.
2 - Sous le protectorat
Avec le 19° siècle, la doctrine islamique cède le pas aux idées réformistes et
révolutionnaires. On assiste à la naissance du concept de Patrie (Watane). Le critère
religieux qui sert à distinguer les musulmans des non musulmans n’est plus opérant.
Il va faire place à un critère plus politique qui va englober aussi les musulmans que les
non musulmans dans un cadre qui n’est plus désormais religieux mais sociologique,
politique et territorial. L’augmentation de plus en plus importante du nombre des
étrangers au Maroc permet un développement massif des relations internationales.
Dans les anciennes colonies et protectorats comme le Maroc, l’idée de Patrie sera
cimentée dans la lutte politique pour l’indépendance.
Avec la publication du dahir du 22 avril 1957, les tribunaux sont devenus exclusivement
marocains. Ils puiseront désormais les règles applicables aussi bien aux situations
internes qu’aux situations externes dans le seul code marocain de droit international
privé. Le droit international privé français est devenu à leur égard un droit étranger.
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Introduction au Droit International Privé 2021 A. OUNNIR
Le texte de base demeure donc le dahir de 1913. Sa mise à jour a été le fait de la
jurisprudence et du législateur à travers certains textes particuliers. Une doctrine
autorisée a plaidé pour la normalisation de ce système.
L’importance de plus en plus accrue du commerce extérieur s’ajoute à tous ces facteurs
qui permettent le développement de relations internationales privées au Maroc et par
voie de conséquence la renaissance de la discipline du droit international privé et la
mise en mouvement de la recherche par certains auteurs et juges marocains .
V. - Domaine du D.I.P.
Quatre matières importantes peuvent entrer dans l’orbe du droit international privé :
les conflits de lois, les conflits de juridictions, la condition des étrangers et la
nationalité.
Chacune de ces disciplines peut parfaitement être indépendante des autres et faire
l’objet d’un ouvrage particulier ou d’un cours annuel. La doctrine internationaliste n’est
pas unanime quant aux matières qui doivent composer le droit international privé.
Il y a conflit de lois toutes les fois qu’une situation juridique pouvant se rattacher à
plusieurs pays, il faut choisir entre les lois de ces différents États, celle qui est appelée
à régir le rapport de droit considéré. Cette définition nous révèle, ainsi, qu’il s’agit
essentiellement d’un problème d’option de loi applicable.
C’est ainsi le cas pour un époux anglais résidant en France désirant divorcer au Maroc.
Doit –il être soumis à sa loi nationale, la loi de son domicile ou encore la loi marocaine
s’il s’avère qu’il s’agit d’un anglais musulman.
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Introduction au Droit International Privé 2021 A. OUNNIR
Ces exemples montrent que, toutes les fois qu’une situation juridique peut être
rattachée à plusieurs pays et que les droits internes de ces différents pays donnent
des solutions différentes, il est indispensable avant de résoudre le problème au fond,
de déterminer la loi applicable.
L’économie de cette théorie est relative au fait que le droit international privé se limite
uniquement aux conflits de lois en raison de son particularisme.
D’abord quant aux sources : les conflits de lois trouveraient essentiellement leurs
sources dans la coutume et la jurisprudence. Ensuite, les règles de conflits de lois se
borneraient à déterminer la loi applicable sans trancher le litige au fond. Ce qui les
distingue des règles de conflits de juridictions se révèle principalement au niveau de
la méthode adoptée.
Pour résoudre un conflit de lois, il faut élaborer les catégories de rattachement, puis
faire entrer la situation juridique (le rapport de droit envisagé), dans l’une ou l’autre
de ces catégories de rattachement. C’est ainsi que l’on décide que :
- l’état et la capacité des personnes sont soumis à loi nationale du ou des intéressés.
- Le droit des biens à la lex rei sitae, c’est à dire à la loi du lieu où se trouve les biens.
B - La doctrine faisant entrer les conflits de juridictions dans le droit international privé
Cette thèse a trouvé un certain crédit dans les pays anglo-saxons. Elle a été soutenue
en France par Bartin et Pillet. Pour ses partisans, le droit international privé comprend
les conflits de lois et les conflits de juridictions.
Il y a conflit de juridictions toutes les fois qu’un litige posant un problème d’extranéité,
il faut déterminer si les tribunaux marocains sont ou non compétents.
Les conflits de juridictions se posent dans tout litige de droit international privé et sont
nécessairement préalables aux conflits de lois, car avant de déterminer la loi applicable,
le juge doit inévitablement se prononcer sur sa propre compétence.
1 Arrêt traité en TD
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Introduction au Droit International Privé 2021 A. OUNNIR
L’intégration des conflits de juridictions dans le droit international privé repose, d’une
part, sur les analogies existantes entre les conflits de lois et les conflits de juridictions
et d’autre part, sur l’interdépendance étroite de ces deux matières.
a.- Analogies existant entre les conflits de lois et les conflits de juridictions.
Les conflits de lois ont la même principale source que les conflits de juridictions : la
jurisprudence. C’est cette dernière qui a élaboré la théorie des conflits de juridictions.
Notons cependant, qu’en ce qui concerne le Maroc, le droit conventionnel est
également indirectement source de conflits de juridictions.
La jurisprudence adopte, en la matière, le même raisonnement que celui suivi dans les
conflits de lois. Ne trouvant pas de règles dans les textes à appliquer, notamment, aux
étrangers, elle les recherche dans le droit judiciaire interne pour les transposer sur le
plan international.
Cette influence se produit, car le juge, sans l’avouer, lie souvent conflit de lois et conflit
de juridictions. Dès le début, il envisage l’affaire dans son ensemble et se déclare
compétent suivant la loi qu’il aura à appliquer.
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Introduction au Droit International Privé 2021 A. OUNNIR
La règle de conflit de lois se borne à désigner la loi applicable sans résoudre l’affaire
au fond. La règle de conflits de juridictions est au contraire une règle substantielle, en
ce sens qu’elle ne se borne pas à désigner la loi applicable en vue du règlement du
problème de compétence juridictionnelle, mais tranche directement ce problème : le
tribunal marocain saisi de l’affaire se déclarant compétent ou non.
En matière de conflits de lois, marocains et étrangers sont traités sur le même pied
d’égalité. Il existe en ce domaine une caractéristique juridique. En revanche, les conflits
de juridictions présentent un aspect politique, notamment, par le jeu de la règle
découlant du dahir formant code des obligations et contrats (DOC) et du code de
procédure civile (CPC), qui permet à tout marocain défendeur ou demandeur dans un
procès qui l’oppose à un étranger, d’avoir recours à la justice marocaine .
1 –Définition
Ce problème qui se posait, il y a quelques années, au Maroc avec moins d’acuité que
dans les pays d’Europe occidentale, a tendance à devenir plus visible et plus
problématique.
2 - Exposé de la thèse
Les deux matières ont une source coutumière et jurisprudentielle. Cependant, dans le
contexte juridique marocain les deux matières sont essentiellement d’origine législative
(Dahir sur la condition civile des étrangers et le code de la nationalité).
La nationalité en tant que matière, est définie comme l’ensemble des règles qui
déterminent l’allégeance d’un individu par rapport à un État . De prime abord, on peut
constater que la nationalité revêt un certain particularisme à trois niveaux.
Si son lien avec la condition des étrangers peut expliquer l’inclusion, notamment en
France de la nationalité dans le droit international privé, il n’empêche qu’il existe une
différence fondamentale entre les conflits de lois et la nationalité.
En effet, la règle de conflit est bilatérale en ce sens que le juge marocain, français,
algérien, etc., peut être amené à appliquer soit sa loi nationale (lex fori) soit une loi
étrangère. A l’opposé, les règles relatives à la nationalité sont unilatérales.
Autrement dit, le juge marocain peut déclarer qu’un individu est marocain mais il ne
peut attribuer à cet individu une nationalité étrangère déterminée. Seul le tribunal
étranger peut le faire.
c.- Enfin quant au fait que le lien de nationalité est un lien de droit public
Selon une jurisprudence française très célèbre : « la nationalité est une institution de
droit public et non de droit privé, car elle ne régit pas des rapports entre individus,
mais des rapports entre l’individu et l’État ».
La réflexion sur les sources du DIP permet de constater l’existence d’un débat doctrinal
relativement à cette question (A) et sa singularité en droit international privé
marocain(B).
Il existe deux catégories de sources en droit international privé : les sources internes
et les sources internationales. L’importance respective qu’on leur attribue dépend de
la conception que l’on se fait du droit international privé.
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Introduction au Droit International Privé 2021 A. OUNNIR
1 - Les universalistes
On trouve à leur tête le Français Pillet, l’Italien Mancini et l’Allemand Savigny. Ces
juristes estiment qu’il est non seulement souhaitable, mais possible de parvenir à une
unification des règles de droit international privés communs à tous les États.
2 - Les particularistes
Cette tendance est représentée principalement par le Français Niboyet (élève de Pillet).
Les particularistes nient la possibilité d’une unification du droit international privé.
Cette discipline étant une projection des droits internes sur le plan international et
puisque, par la force des choses, les droits internes sont différents, les projections sont
différentes. D’ailleurs si les droits internes étaient identiques, il n’y aurait pas de conflits
de lois et par conséquent pas de droit international privé.
Les particularistes sont donc nationalistes en ce sens qu’ils retiennent les sources
internes au détriment des sources internationales.
Cette tendance s’est affirmée dans l’œuvre de H. Batiffol. Cet auteur s’efforce de
concilier le droit interne et le droit international. Les solutions qu’ils proposent sont
dictées souvent par le désir de respecter les ensembles législatifs et l’esprit
international. H. Batiffol observe la faiblesse des sources internationales en DIP en
raison, avance-t-il, de l’absence de toute force contraignante réelle en droit public
contrairement au droit privé.
De même, considère-t-il, que les conflits de DIP sont en réalité des conflits privés mais
contenant un élément d’extranéité ce qui ne modifie en rien leur nature ; les parties
dans la relation juridique saisiront presque toujours les juridictions internes (sauf en
cas d’arbitrage), lesquelles auront recours consciemment ou non aux sources internes.
Quoiqu’il en soit, le droit international privé marocain, comme toutes les autres
branches du droit, est très influencé par le système juridique français, car il donne la
primauté aux sources internes.
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Introduction au Droit International Privé 2021 A. OUNNIR
Le droit international prive marocain se caractérise, a-t-on dit, par la faiblesse de ses
sources internationales, mais néanmoins les conventions internationales existent. La
jurisprudence la plus importante et la plus significative est essentiellement issue du
protectorat. Quant à la doctrine, elle est encore jeune et en formation.
a.- La loi
La loi joue un rôle fondamental dans la réglementation des conflits de lois et conflits
de juridictions, et plus particulièrement de la nationalité et de la condition des
étrangers en raison du lien étroit de ces deux sujets avec la souveraineté de l’État.
• La nationalité
Cette matière détermine les éléments du peuple qui est l’une des composantes de
l’État. La nationalité est réglementée pour la première fois au Maroc par le Dahir du 6
septembre 1958 entré en vigueur le 1er octobre 1958 (art. 46 CMN), lequel a été
modifié et complété par les textes suivants :
Bibliographie. - Sur les conflits de nationalités : ANCEL, Les conflits de nationalités, JDI
1937. 37. - BASEDOW, Le rattachement à la nationalité et les conflits de nationalités
en droit de l'Union européenne, Rev. crit. DIP 2010. 427 . - DERRUPPÉ, La nationalité
étrangère devant le juge français, Rev. crit. DIP 1959. 201. - GÉGOUT, Des conflits de
nationalités, La nationalité dans la science sociale et le droit contemporain, 1935, p.
319 s. - GUIHO, L'incidence de la Convention du Conseil de l'Europe du 6 mai 1963 à
l'égard de la nationalité française, Mélanges Pelloux, 1980, p. 157. - HAMMAR, La
naturalisation et la double nationalité des travailleurs migrants et des membres de
leurs familles. Rapport pour le Conseil de l'Europe, MG-DN, 1983, multigr. - JORDAN,
Rép. La Pradelle-Niboyet, Vo Conflits de nationalités. - KILLERBY, Nationalité et statut
personnel dans les instruments internationaux du Conseil de l'Europe (Nationalité et
statut personnel…, 1984), p. 73 s. - LABORDE, Les conflits de nationalités dans le droit
français, J.-Cl. Dr. int., fasc. 502-1. - LAGARDE, Vers une approche fonctionnelle du
conflit positif de nationalités, Rev. crit. DIP 1988. 29. - LEQUETTE, De l'approche
fonctionnelle des conflits de nationalités dans un cas de répudiation entre époux
franco-marocain, Rev. crit. DIP 1992. 91 ; La nationalité française dévaluée, L'avenir
du droit, Mélanges en hommage à François Terré, 1999, p. 349. - LOUIS-LUCAS, Les
conflits de nationalités, Rec. cours La Haye, t. 2, 1938. - MAKAROV, Le droit d'option
en cas de double nationalité dans les conventions internationales, Liber amicorum J.
P. A. François, 1959, p. 194. - MAURY, Du conflit de nationalités et en particulier du
conflit de deux nationalités étrangères devant les autorités et les juridictions
françaises, Études Scelle, 1950, p. 365 s. - OTHENIN-GÉRARD, Nationalité multiple et
apatridie : conflits positifs et négatifs de nationalités en droit international privé suisse
(art. 23 et 24 ldip), Aktuelle Juristische Wochenschrift 2000. 1498. - VERWILGHEN,
Conflits de nationalités, plurinationalités et apatridie, Rec. cours La Haye, t. 277, 1999.
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Introduction au Droit International Privé 2021 A. OUNNIR
C’est l’ensemble des règles régissant les droits et obligations des personnes ne faisant
pas, au sens juridique du terme, partie du peuple mais vivant cependant en son sein.
Textes très nombreux et épars. Difficiles à recenser avec précision. Citons, cependant,
à titre indicatif : le Dahir du 12 août 1913 sur la condition civile des français et des
étrangers au Maroc, le Dahir 2 mars 1973 sur la marocanisation de certaines activités,
dahir n°1-74-433 du 14 novembre 1974, publié au B.O le 11 décembre 1974 relatif au
Protocole de New York, le 20 avril 1970 et à la Convention de l’OUA régissant les
aspects propres aux problèmes des réfugiés en Afrique le Dahir du 15 juin 1982 sur
les investissements industriels et parmi les textes les plus significatifs et récents. On
peut, aussi, citer le dahir du 11/11/2003 portant promulgation de la loi sur l’entrée
et le séjour des étrangers au Royaume du Maroc , à l’émigration et l’immigration
Irrégulières, le dahir n°1-08-90 du 20 octobre 2008 portant promulgation de la loi 37-
07 portant approbation, quant au principe, de la ratification du Royaume du Maroc de
l’Accord de coopération fait à Genève le 20 juillet 2007 entre le gouvernement du
Royaume du Maroc et le Haut-commissariat des Nations-Unies pour les réfugiés , le
décret n°2-09-607 du 1er avril 2010 d’application de la loi sur l’entrée et le séjour des
étrangers au Royaume du Maroc, à l’émigration et l’immigration Irrégulières , la loi
n° 27-14 du 25 août 2016 relative à la lutte contre la traite des êtres humains et la
circulaire conjointe n°8303 du ministre de l'Intérieur et du ministre chargé des
Marocains résidant à l'étranger et des affaires de la migration.
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Signalons, enfin, que le Maroc a signé des accords de réadmission avec l’Allemagne
(1998), l’Espagne (1992), la France (1983), l’Italie (1998) et le Portugal (1999).
----------------------------------------------------------
la loi Pasqua ou esquisse d'une « nouvelle citoyenneté » ?, ibid. 1989. 617 ; Le nouveau
régime juridique des étrangers en France : changement et continuité, ibid. 1982. 25 ;
Le statut constitutionnel de l'étranger, LPA 15 mars 1991, p. 13 ; La réforme de la
condition des étrangers par les lois des 24 août et 30 décembre 1993 et par la loi
constitutionnelle du 25 novembre 1993, Rev. crit. DIP 1994. 1 . - D. VIGNES, La clause
de la nation la plus favorisée et sa pratique contemporaine ; problèmes posés par la
CEE, Rec. cours La Haye, t. 130, 1970-II, p. 207. - V. égal. Rép. Francescakis, Vo
Étranger. - V. aussi Rép. La Pradelle-Niboyet, Vo Étranger.
M. BOYON VAN DE KERKHOVE, Le statut des étrangers en droit français, thèse, Paris-
II, 1972. - O. CARMET, Étude critique de la distinction entre la condition des étrangers
et les conflits de lois, thèse, Paris-I, 1977. - R. HERNU, Principe d'égalité et principe
de non-discrimination dans la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés
européennes, LGDJ 2003. - A. ILIOPOULOU, Libre circulation et non-discrimination,
éléments du statut de citoyen de l'Union européenne, Bruylant 2008. - M.-L.
MORANÇAIS-DEMEESTER, Les droits professionnels des étrangers non-salariés en
France, thèse, Paris-II, 1984. - S. SLAMA, Le privilège du national, Étude de la
condition civique des étrangers en France, thèse, Paris-X, 2003.
De même, l’art 2 du code de la famille constitue une source incontournable des conflits
de loi. Ce texte instaure les privilèges de religion et de nationalité et partant consacre
l’unilatéralisme comme fondement du système marocain des conflits de lois en matière
du droit international de la famille
rendus par les juridictions étrangères, sont susceptibles d'exécution s'ils sont rendus
par un tribunal compétent et fondés sur des motifs qui ne sont pas incompatibles avec
ceux prévus par le présent Code en vue de la dissolution de la relation conjugale. »
Ce texte prévoit le même principe pour les actes conclus à l'étranger devant les officiers
et les fonctionnaires publics compétents, après que ces jugements et actes aient
satisfait aux procédures légales relatives à l'exequatur, conformément aux dispositions
des Articles 430, 431 et 432 du code de procédure civile.
b. - La jurisprudence
Cette pratique était dictée par le souci de protéger les ressortissants français et ceux
des États ayant renoncé à leurs privilèges. Ainsi pourrions-nous citer le cas dans lequel
la cour d’appel de Rabat a reconnu valable le mariage d’une française célébré en
France en la seule forme de l’état civil, alors que le statut de son conjoint de nationalité
bulgare exigeait une célébration religieuse.
La cour suprême devenue cour de cassation établie aujourd’hui une jurisprudence tout
à fait indépendante fondé sur des principes issus de la doctrine islamique classique
mais surtout du nouveau code de la famille .
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Certains arrêts de l’ancienne cour suprême ont fait couler beaucoup d’encre et susciter
de vifs débats entre conservateurs et modernistes et la nouvelle haute juridiction
instaurée par la constitution de 2011 semble aller dans le même sens .
c. - La doctrine
Les auteurs représentant ce courant doctrinal conservateur sont à titre indicatif : MM.
Nasser Matioui Machkouri1, El Fakhouri2, Chafaii3, El Kachbour4.
D’autres auteurs spécialistes du DIP mais œuvrant pour la thèse de la coordination des
systèmes de DIP sans adopter une position tranchée et claire quant à la nécessité
d’arrimer le système juridique marocain en général et celui du DIP en particulier à
l’universalisme devant inspirer les systèmes de DIP de la famille, sont peu nombreux :
On peut citer le Doyen Abderrazak Moulay Rchid1, les professeurs Mohamed Loukili2
et khalid El Berjaoui3, notamment.
Enfin, une troisième tendance est celle des modernistes attachés à la philosophie du
respect des droits fondamentaux et à son application sans restriction au droit de la
famille et au DIP de la famille. Cette tendance fut remarquablement développée par
le professeur Layachi Messaoudi4 dans son article « Grandeurs et limites du droit
musulman au Maroc 5», mais aussi par Fatna Serhane6 et Malika Benradi7 . Nous
nous insérons dans cette dernière tendance doctrinale car il nous semble que l’on ne
peut penser le droit en général et le droit international privé en dehors de la
philosophie du respect des droits fondamentaux et de l’universalisme. Les humains
sont égaux en droit et en dignité et la spécificité d’un système ne peut être évoquée
lorsque les règles que l’on prétend appliquer en son nom sont discriminatoires vis-à-
vis des femmes et des enfants.
C’est ce que nous enseigne la jurisprudence de tous les pays de l’Europe de l’ouest qui
sont confrontés à ces lois et institutions venant de pays du sud et que leurs ordres
publics en droit international privé refusent de reconnaître .
L’expression « traité » s'entend d'un accord international conclu par écrit entre États
et régi par le droit international, qu'il soit consigné dans un instrument unique ou dans
1 Professeur à la faculté des sciences juridiques économiques et sociales de Rabat Agdal et Ancien doyen de la faculté des
sciences juridiques économiques et sociales de Rabat Souissi
2 Professeur à la faculté des sciences juridiques économiques et sociales de Rabat Agdal
3 Professeur à la faculté des sciences juridiques économiques et sociales de Rabat Souissi.
4 Professeur à la faculté des sciences juridiques économiques et sociales de Fès
5 Revue internationale de droit comparé. Année 1995. 47-1 pp. 146-154…
6 Professeur à la faculté des sciences juridiques économiques et sociales de Casablanca
7 Professeur à la faculté des sciences juridiques économiques et sociales de Rabat Agdal
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Introduction au Droit International Privé 2021 A. OUNNIR
Il s’agit bien entendu des traités réglementant les intérêts des particuliers. Leur but en
DIP est de résoudre les difficultés nées des divergences entre les législations, internes,
lesquelles, peuvent se manifester dans les différents domaines du droit international
privé.
En matière de nationalité, les traités ont pour but d’éviter les conflits négatifs
(risque d’apatridie) et les conflits positifs (problèmes posés par la double allégeance
résultant de la double ou la plurinationalité) de nationalité.
Les traités relatifs aux conflits de juridictions poursuivent un double but. Ils
peuvent tendre à donner une solution uniforme aux règles de compétence
internationale ou à faciliter l’exécution internationale des jugements et des sentences
arbitrales.
loi uniforme régissant au fond les relations internationales. L’inconvénient est que cette
législation internationale se superpose aux législations internes et qu’il est parfois
difficile de déterminer leurs champs d’application respectifs.
L’importance que peuvent avoir les traités en droit international privé est cependant
limitée par leur rareté relative dans le domaine des relations privées et par la primauté
donnée aux sources internes. La difficulté d’établir un droit international privé universel
conforte cette conclusion et la position des particularistes.
Différentes questions surgissent dès que l’on tente d’examiner les rapports entre une
convention, un traité et un droit ou une législation interne. Elle ont trait à la force
obligatoire des traités internationaux en tant qu’une des sources du droit international
privé marocain, à la nature du traité ou texte international en général : s’agit-il d’un
contrat ou d’une loi ?
Il est question de rapports entre États et non entre États et individus et la règle est
que le traité est une convention entraînant des obligations réciproques à la charge des
États contractants. Chacun des signataires est obligé de respecter loyalement les
termes du traité, et toute loi interne contraire au traité est en principe inopposable à l
’État contractant.
Quelle est la nature du traité dans les rapports de chacun des États contractants et de
ses ressortissants ? Le traité exerce nécessairement une incidence sur le droit interne
toutes les fois qu’il n’est pas identique à la loi interne. Le traité peut-il alors être
considéré comme une loi supérieure aux lois internes ?
• Le droit de l’union européenne et ses effets sur les traités signés par les États
membres de l’Union avec des États tiers
eux et dans leurs relations avec leurs enfants au regard du mariage, durant le mariage
et lors de sa dissolution […] ».
Cet article 5 a été utilisé à de maintes reprises par les juges français pour faire échec
à la reconnaissance d’institutions étrangères patriarcales telles que la répudiation,
signe le plus évident de l’influence du droit européen . Mais, en réalité, c’est la
convention européenne des droits l’homme et des libertés fondamentales, dans son
ensemble, qui est susceptible d’exercer une influence beaucoup plus large sur la mise
en œuvre des conventions franco-marocaines .
De plus en plus nombreux sont les textes européens susceptibles d’avoir une
influence, en matière familiale, sur le contenu de l’ordre public en droit international
privé des États membres du Conseil de l’Europe et indirectement sur les lois et
décisions judiciaires des États tiers.
L’article 32 de cette convention porte notamment sur les conséquences civiles des
mariages forcés : « Les Parties prennent les mesures législatives ou autres nécessaires
pour que les mariages contractés en ayant recours à la force puissent être annulables,
annulés ou dissous sans faire peser sur la victime une charge financière ou
administrative excessive ».
2. Jeux dialectiques entre le droit international privé et le droit européen. - Ces rapports
dialectiques mettent en scène, au premier niveau, une confrontation des méthodes et
des solutions du droit international privé et du système juridique de l'Union européenne
(V. infra, nos 3 s.). Une approche historique commande de distinguer les trois grandes
étapes qui ont marqué une européanisation du droit international privé (V. infra, nos
3 s.). La question des compétences de l'Union européenne à légiférer dans ce domaine
doit également être posée (V. infra, nos 19 s.). Reste la question cruciale des méthodes
: l'irréductibilité des deux matières du droit européen et du droit international privé
laisse entrevoir un jeu croisé d'influence de l'une sur l'autre (V. infra, nos 30 s.). Au
second niveau, la construction du droit international privé à une échelle européenne
doit être réexaminée (V. infra, nos 62 s.). La présence d'un juge européen (V. infra,
nos 63 s.) et le mouvement de codification européenne (V. infra, nos 112 s.) sont de
nature à expliciter les transformations qui sont actuellement à l'œuvre.
Se fondant sur ces valeurs et ces principes immuables, et fort de sa ferme volonté
de raffermir les liens de fraternité, de coopération, de solidarité et de partenariat
constructif avec les autres Etats, et d’œuvrer pour le progrès commun, le Royaume du
Maroc, Etat uni, totalement souverain, appartenant au Grand Maghreb, réaffirme ce
qui suit et s’y engage :
- consolider les relations de coopération et de solidarité avec les peuples et les pays
d’Afrique, notamment les pays subsahariens et du Sahel ;
Le Roi peut soumettre au Parlement tout autre traité avant sa ratification. Si la Cour
Constitutionnelle, saisie par le Roi ou le Président de la Chambre des Représentants
ou le Président de la Chambre des Conseillers ou le sixième des membres de la
première Chambre ou le quart des membres de la deuxième Chambre, déclare qu'un
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Introduction au Droit International Privé 2021 A. OUNNIR
La Maroc, on l’a souligné, a signé de multiples traités aussi bien dans le cadre
d’organismes internationaux comme l’ONU, la FAO, l’OMS, l’OMC, etc., qu’avec des
pays avec lesquels il entretient, outre des relations diplomatiques classiques (traités
bilatéraux), des relations privilégiées de coopération et d’échanges économiques,
culturelles ou militaires (France, Belgique, Tunisie, plusieurs Etats africains, Conseil de
coopération du golfe, Chine populaire, Etats Unis d’Amérique, etc.).
Les conventions ou traités régulièrement ratifiés, (c’est à dire approuvé par un acte
émanant du Roi), sont rendus exécutoires au Maroc par Dahir, lequel est publié au
B.O. La ratification vaut promulgation. Le contrôle de la cour suprême s’exerce sur le
traité comme sur la loi.
La doctrine n’est pas unanime au sujet de l’interprétation des traités. Certains auteurs
reconnaissent la compétence en la matière aux tribunaux, d’autres la leur refusent. Au
Maroc aucune disposition n’est venue réglementer la question.
La seule disposition ayant trait au sujet réside dans l’art 36 du code de la nationalité
marocaine. En effet l’alinéa 3 de cet article prévoit que lorsque, à l’occasion d’un litige,
il y a lieu à interprétation de dispositions d’une convention internationale, relatives à
la nationalité marocaine, cette interprétation doit être demandée par le ministère
public, à la requête du tribunal saisi, au ministère des affaires étrangères.
L’interprétation donnée par le ministre s’impose aux tribunaux et est publiée au bulletin
officiel. Cette solution constitue également une règle générale non écrite en droit
Français.
Le discours royal
Feu S.M. le roi Hassan II avait affirmé, sans équivoque, la primauté des accords
internationaux sur le droit interne dans les termes suivants « … nous constatons ici du
point de vue juridique que la souveraineté a des limites dès qu’il s’agit de problèmes
bilatéraux ou multilatéraux à caractère international… ».
- Dahir du 8.11.1958 sur l’extradition dont l’art 1er stipule que « … sauf dispositions
contraires résultant des traités, les conditions, la procédure et les effets de l’extradition
sont déterminés par les articles suivants… ».
- Dahir portant loi du 2.03 1973 relatif à l’exercice de certaines activités prévoit dans
son article premier que « sous réserve de l’effet des conventions internationales
dûment publiées ; les activités dont la liste sera arrêtée par décret ne pourront être
exercées que par des personnes physiques ou morales marocaines à compter d’une
date qui sera fixée pour chaque secteur groupe de secteurs, par décret pris sur
proposition du ou des ministres intéressés » .
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Introduction au Droit International Privé 2021 A. OUNNIR
La jurisprudence
De ce fait a-t-on affirmé, elle crée la confusion dans les sources du droit et leur
hiérarchie. Elle s’est néanmoins, clairement exprimée pour la supériorité des traités
aux lois dans l’affaire de la veuve Ecoffard contre la Compagnie Air France.
La cour d’appel de Rabat a adopté la même attitude dans deux cas relatifs à l’inscription
au barreau de Casablanca de deux ressortissants français. En effet, la cour a
respectivement, le 15 mai 1969 et le 16 décembre 1969, fait clairement prévaloir la
convention judiciaire franco-marocaine sur les lois internes organisant la profession
d’avocat.
Ce préambule clôt, à notre sens, le débat relatif au rapport entre droit interne et droit
international, tout au mois dans son aspect technique d’une manière claire : pour qu’un
texte international puisse produire effet en droit interne marocain, il faut qu’il soit, au
préalable, ratifié par le Maroc. Et à priori la ratification ne portera, aux termes du
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Introduction au Droit International Privé 2021 A. OUNNIR
préambule, que sur les textes qui soient conformes à la constitution, à « l’identité
nationale immuable !? »(terme non juridique) et après leur publication au bulletin
officiel.
Leur but est d’établir des règles objectives directement applicables aux relations
internationales privées sans soulever de problème de conflits ; c’est à dire que les États
signataires les intègrent dans leurs législations internes et leurs juridictions les
appliqueraient comme les règles d’origine interne.
En matière de transport
- L’union de Berne du 14 octobre 1890, révisée à plusieurs reprises, régit les transports
internationaux de marchandises, de voyageurs et de bagages par chemins de fer.
- L’union de Varsovie de 1929 complétée par celle de Madrid, ainsi que la convention
de Chicago de 1945 relative aux transports aériens.
En matière de vente
Les conférences reprirent après la seconde guerre mondiale, ce qui a donné naissance
à plusieurs conventions relatives aux obligations alimentaires, à la loi applicable en
matière de protection des mineurs, à la signification et notification des actes à
l’étranger en matière civile et sociale, à l’adoption, etc.
La convention des Nations Unies du 9 juin 1958 sur l’exécution des jugements
étrangers.
D’autres tentatives d’élaboration des traités multilatéraux ont été faites et les
principales réalisations étrangères sur ce point sont :
Mais c’est en 1928 que la conférence adopta un véritable code de droit international
privé : Code Bustamante, composé de 437 articles formant un véritable corpus et
destiné à être appliqué à quinze États d’Amérique centrale et du sud.
L’union scandinave
Signé le 7 février 1992 par les représentants des douze États membres de la
Communauté européenne, le traité de Maastricht ou traité sur l'Union européenne
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Introduction au Droit International Privé 2021 A. OUNNIR
marque une nouvelle étape dans la création d'une union. Il est entré en vigueur après
ratification des Parlements nationaux. En vertu du nouveau traité, la Communauté
économique européenne cède officiellement la place à la Communauté européenne,
intégrée dans une nouvelle entité : l'Union européenne.
L’un des piliers du traité de Maastricht concerne la justice et les affaires intérieures :
les questions frontalières telles que la politique d'asile, l'immigration, les questions
criminelles transfrontalières comme le terrorisme, la toxicomanie, et la coopération
judiciaire en matière civile, pénale et dans le domaine douanier.
1ère catégorie: les règlements contenant des règles de compétence directe ou des
règles de circulation des actes et décisions: le règlement Bruxelles I bis, le règlement
TEE du 21 avril 2004 et le règlement du 27 novembre 2003.
2ème catégorie: les règlements envisageant plus spécifiquement des règles de conflit
de lois: le règlement du 17 juin 2008 sur la loi applicable aux obligations contractuelles,
dit « règlement Rome I »,le règlement du 20 décembre 2010 sur la loi applicable au
divorce et à la séparation de corps
• Traités bilatéraux.
Ces traités lient deux États seulement. Ils sont plus aisés à conclure et à mettre en
œuvre car leur négociation est plus facile à mener. Ils permettent également de cerner
de plus près les nécessités juridiques des deux États, et de ce fait mieux équilibrer les
intérêts en présence. De même, la dénonciation de ces traités est plus facile que celle
des traités multilatéraux.
Cependant l’inconvénient majeur est la pluralité des règles juridiques. Le Maroc est lié
par plusieurs traités relatifs à la compétence judiciaire, à l’exécution des jugements
étrangers et aux sentences d’arbitrage.
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Introduction au Droit International Privé 2021 A. OUNNIR
Ce sont là des domaines dans lesquels les traités jouent un rôle capital en raison du
lien de ces matières avec la souveraineté. Ce qui nécessite leur réglementation sur le
plan international et cela à partir de négociations et d’accords.
3 - Le droit comparé
Les rédacteurs du dahir relatif à la condition civile des français et des étrangers au
Maroc, se sont largement inspirés du droit comparé lors de l’élaboration de ce texte.
La doctrine marocaine est unanime pour affirmer la subordination du droit international
privé marocain au droit conventionnel international antérieur à son élaboration .
Ainsi, par exemple, le contenu de l’art 10 du DCC sur la forme des actes fut emprunté
à l’art 11 de la loi d’introduction au code civil allemand. De même, l’art 19 sur
l’exécution des jugements sans révision au fond, sous condition de réciprocité, fut
inspiré de l’art 328 du code allemand de procédure civile.
L’art 17 sur le régime des biens est, semble-t-il, le fruit des articles 10 du code civil
espagnol et de l’art 77 Code civil italien. Enfin l’article 16 sur les obligations nées d’un
délit ou quasi-délit, est une reproduction de l’art 78 du projet de loi belge de 1887.
4 - La jurisprudence internationale
La jurisprudence internationale en DIP est assez faible par rapport à celle produite en
droit international public. Elle est l’œuvre de la cour internationale de justice de La
Haye fonctionnant sous l’égide des Nations Unies, connue sous le nom de cour
permanente de justice internationale (C.P.J.I) entre les deux grands conflits mondiaux.
On peut citer l’avis du 7 février 1923 relatif au conflit entre la France et l’Angleterre à
propos du décret 5 sur l’acquisition de la nationalité en Tunisie et au Maroc. La cour a
reconnu la suprématie de la loi française et affirmée qu’en matière de nationalité les
États ne sont tenus par aucune obligation autre que celles résultant des traités.
État est en droit de prendre à cet effet ne sont opposables aux États tiers que s’ils sont
conformes à certains principes qui relèvent du DIP.
Nottebohm
(Liechtenstein c. Guatemala)
Dans son arrêt du 12 juillet 1929, la CPJI déclare : « les règles de DIP peuvent être
commues à plusieurs États et même établies par des conventions internationales ou
des coutumes et dans ce dernier cas avoir le caractère d’un vrai droit international
régissant des rapports entre des États. Mais, à part cela, il y a lieu de considérer que
lesdites règles font partie du droit interne »
Dans son arrêt du 27 août 1952 La CIJ a eu notamment à se prononcer sur l’étendue
du privilège de juridiction capitulaire dont les Etats Unis prétendaient faire bénéficier
leurs ressortissants au Maroc et qui, du reste, leur était effectivement appliqué.
5 - La doctrine internationale
Il est difficile d’apprécier une telle source et notamment en raison du fait que les
auteurs et penseurs du DIP sont des personnes physiques appartenant à une nation
d’une part et en même temps du fait de l’absence d’un organe ou organisme
international chargé de recherches en DIP comme c’est le cas, pour le droit
international public.
Relativement à cette discipline, en effet, une commission des Nations Unies est
chargée de codifier et enrichir la matière, et un institut de droit international existe et
regroupe les meilleurs spécialistes dans ce domaine.
Ce qui est tout à fait instructif et bénéfique pour les législateurs et les juges.
L’école italienne ancienne ou les Post- glossateurs : (Bartole 1314 - 1357) (Balde
1327 - 1400) : cette école a élaboré le processus du conflit de lois comme moyen de
réglementation des relations internationales et des principales règles de rattachement.
Cela rappelle curieusement la situation du musulman qui doit rester soumis, tout au
moins en ce qui concerne son statut personnel et là ou il se trouve, aux règles du droit
islamique.
Dans la même tendance doctrinale, Bartin affirme que le DIP est une projection du
droit civil interne sur le plan international et Niboyet considère que « l’objet de la règle
française de conflit de lois doit être la défense des intérêts français : aucun droit
international prive solide ne peut être envisagé sans partir de cette base réaliste qu’est
le territoire » .
6 - La coutume internationale
La coutume, pour qu’elle constitue une source du droit, en général, suppose l’existence
de deux éléments : un élément matériel, c’est à dire des faits et comportements qui
se répètent sur un laps de temps plus ou moins long et un élément psychologique,
c’est à dire la croyance d’un groupe d’individus en son caractère obligatoire.
Les principes de droit naturel international qui ont été dégagés en ces matières sont
généralement conçus de façon différente dans chaque État de sorte qu’ils n’ont pas
été réglementés et sanctionnés par une coutume internationale.
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Même lorsque certains de ces principes sont communs à plusieurs États, il apparaît
que, faute d’une conscience universelle de leur nécessité, ils ne fondent en fait qu’un
droit positif de caractère interne, qui n’a d’autorité qu’au regard de cet État.
Néanmoins, certains principes, font cependant l’unanimité et sont respectés par tous
les États : le droit des biens immeubles est gouverné par le principe de la lex rei sitae
: loi du lieu de la situation du bien. La procédure relève de la lex fori ( loi du juge) et
les actes ou les faits juridiques sont soumis a la loi du lieu de l’acte (lex loci actus).