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BRULURES ET PLAIES v20100615

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BRULURES ET PLAIES

RAPPELS
La peau est l'enveloppe externe du corps, constituée par une partie profonde (derme) et une
partie superficielle (épiderme).
Elle a un rôle de protection (contre les infections surtout, contre les "chocs"…), sensoriel
(organe du toucher) et de régulation thermique.

Les lésions de la peau peuvent être :


● des brûlures : lésion de la peau ou des muqueuses provoquée par l’action de la chaleur,
de substances chimiques ou de l’électricité,
● des plaies : solution de continuité (=coupure) de la peau produite par un agent
mécanique,
● des infections : envahissement de la peau par des microbes.

Les dangers de ces lésions sont :


● l'infection locale voire générale,
● le tétanos (maladie due à la toxine du bacille tétanique et caractérisée par des
contractures),
● la détresse circulatoire…
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LES BRULURES

1 DEFINITION

Lésion de la peau ou des muqueuses provoquée par l’action de la chaleur, de


substances chimiques ou de l’électricité.

2 CAUSES

Il y a 150 000 à 200 000 brûlés par an en France, dont 10 000 hospitalisés (dont plus
de 3 500 dans les 24 centres de brûlés français) et 1 000 morts.
70% des brûlures sont dues à des accidents domestiques.

Plusieurs causes sont classiquement distinguées :


● origine THERMIQUE (93,7%):
o liquide chaud ou enflammé,
o flamme,
o explosion.

● origine ÉLECTRIQUE (3,3%):


o vraie,
o par arc électrique.
1° GESTE : COUPER LE COURANT.

● origine CHIMIQUE (2,5%):


1° GESTE : DECONTAMINER.
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3 FACTEURS DE GRAVITE D'UNE BRULURE

3A PROFONDEUR

1° DEGRE = érythème douloureux. Guérison spontanée en 48 heures sans séquelle.

2° DEGRE = congestion + phlyctènes. Le 2° degré va du 2° degré superficiel (sans


atteinte de la membrane basale, rouge, très sensible sous les phlyctènes et guérissant en 10
jours) au 2° degré profond (atteignant le derme, plus ou moins rosé, hypoesthésique sous
les phlyctènes et guérissant à partir du derme pileux en 3 semaines).

3° DEGRE = nécrose de l'épiderme et du derme avec peau de cuir de couleur plus


ou moins foncée (du blanc au marron) sans phlyctènes. Le 3° degré est indolore (destruction
des filets nerveux) et ne guérit pas spontanément. On parle de carbonisation en cas
d'atteinte des muscles et des os.

3B SURFACE

Elle est à estimer selon la règle des 9 de Wallace, en pensant que chez l'enfant la
tête est proportionnellement plus importante (jusqu'à 19% avant 1 an selon la table de Lund
et Browder). Le 1° degré n'est pas pris en compte dans l'estimation de la surface car il
n’entraîne que très peu de perturbations circulatoires.
Une face de main avec les doigts représente environ 1% de surface corporelle.
L’hospitalisation doit être la règle à partir de 10% de surface corporelle (SC), la brûlure étant
grave et relevant d’un service spécialisé à partir de 20% de SC.

3C LOCALISATION

Deux localisations sont particulièrement graves:


● le visage à cause de l'atteinte des voies aériennes supérieures (penser à regarder
les poils des narines),
● le périné à cause de la contamination microbienne.

Les brûlures circulaires avec risque d’effet garrot nécessitent une surveillance
particulière et parfois un geste chirurgical (aponévrotomie de décharge) dans les 6
premières heures.

Les yeux, les mains et les pieds n'ont de gravité que fonctionnelle.

3D LES LESIONS PRIMITIVES RESPIRATOIRES

Elles sont consécutives à :


● l’agression thermique (partie haute de l'arbre respiratoire, dont l'irritation doit être
suspectée devant l'apparition d'une voix rauque.),
● l’agression toxique et irritative (ensemble de l'arbre respiratoire),
● l’agression physique ou BLAST (si explosion), muet les premières heures
(voir cours sur le sujet).
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4 APPRECIATION DU RISQUE VITAL

Il est fonction de :
● la profondeur,
● la SURFACE (brûlure grave à partir de 10%, risque d’état de choc à partir de
15%),
● les LESIONS PRIMITIVES RESPIRATOIRES,
● l'AGE (gravité chez l'enfant et le sujet de plus de 65 ans) : quand l'indice de Baux
(âge + surface brûlée) est supérieur à 100, les chances de survie sont inférieures
à 10%.
● les antécédents du sujet (gravité de l'éthylisme, du diabète...),
● l'existence de lésions associées (traumatismes dont le traumatisme crânien…).

Une équipe de Boston (USA) a développé un système simple et précis pour estimer
de façon objective la probabilité de décès chez les brûlés.
Leur étude de 1990 à 1994 confirme que trois critères cliniques représentent les plus
importants facteurs de risque de décès :
● SURFACE brûlée supérieure à 40%,
● brûlure par INHALATION,
● AGE supérieur à 60 ans.

Une formule validée de façon prospective de 1995 à 1996 a été développée pour
prédire le risque de décès :
● 0,3% de risque si 0 facteur de risque,
● 3% de risque si 1 facteur de risque,
● 33% de risque si 2 facteurs de risque,
● 90% de risque si 3 facteurs de risque.

5 LE BILAN

Il doit comporter TOUS les éléments suivants :

● les CIRCONSTANCES de l'accident


o l'origine de la brûlure et l'heure,
o la notion d'incendie à cause du risque d'agression toxique et irritative de
l'arbre respiratoire et du risque d'INTOXICATION PAR LE CO ou les
cyanures,
o la notion d'explosion à cause du risque de BLAST.

● l'ETAT DU SUJET
o âge,
o conscience,
o respiration,
o circulation.

● la BRULURE
o surface,
o profondeur,
o localisation,
o atteinte respiratoire.

● les AUTRES LESIONS éventuelles.



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6 CONDUITE A TENIR

1. Assurer la liberté des voies aériennes supérieures et oxygéner.


2. Rechercher des signes de détresse circulatoire (tout brûlé au 2° degré à partir de
15% risque de mourir par détresse circulatoire, la brûlure étant considérée
comme critique à partir de 30%).
3. Réchauffer (tout brûlé qui frissonne est en danger de mort).
4. Calmer.

6A SOINS LOCAUX

● l'ARROSAGE est à réserver aux brûlures inférieures à 15% en utilisant avant les
15 premières minutes de l'eau du robinet entre 10° et 25°C par ruissellement
uniquement sur les régions atteintes et pendant au moins 5 minutes et moins de
15 minutes (le RN SC reprend 10 minutes, en cohérence avec ces données).
L'apparition d'une sensation de froid ou de frissons doit faire suspendre l'arrosage
(refroidir la brûlure et non le brûlé).

● ENLEVER LES VETEMENTS sans toucher aux lésions,

● NE RIEN APPLIQUER sur la brûlure,

● EMBALLER stérilement ou proprement (protocole BRULSTOP).

Pour une BRULURE SIMPLE (simple rougeur ou cloque < ½ paume de main de
la victime) :
● ARROSER autant que la victime le souhaitera (limitation de la douleur)
● et SURVEILLEE comme une plaie simple…
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6B SOINS SPECIFIQUES

● BRULURE ELECTRIQUE  commencer par COUPER LE COURANT. Savoir


que l'importance des dégâts est souvent plus grande que ne le laissent supposer
les seuls dégâts cutanés, et que l'atteinte du cœur et des reins n'est pas rare.
Les brûlures par arc électrique sont équivalentes à des brûlures thermiques.

● BRULURE CHIMIQUE  LAVAGE doux et prolongé (plus de 20 minutes) à l'eau


et déshabillage sous la douche.
Les brûlures par bases (type soude) sont plus graves que celles par acides (type
acide chlorhydrique) car elles entraînent une saponification des lipides tissulaires
et des lésions plus profondes.
Certains cas sont particuliers :
o brûlure par l’acide fluorhydrique (HF)  gluconate de calcium localement
en gel + 20ml à 10% en IV lente (la pénétration de l’HF est très importante
avec possible diffusion à l’organisme et risque de troubles du rythme
cardiaque par hypocalcémie).
A savoir que les vapeurs d’acide fluorhydrique ont une action suffocante.

● BRULURE RADIOLOGIQUE
○ si dépôts d'émetteurs BÊTA (contamination externe)  décontamination
par déshabillage et lavage abondant suivi d'un brossage doux.
○ si irradiation externe (X, GAMMA et NEUTRONS)  temps de latence
clinique, priorité au bilan lésionnel.

● LES BRULURES OCULAIRES sont le plus souvent d'origine chimique  lavage


en maintenant l'œil ouvert et en insistant sur le cul-de-sac…

6C SOINS GENERAUX

● PERFUSION dès que la surface atteint 15% chez un adulte (10% chez enfant et
sujet de plus de 65 ans) avec sérum physiologique à raison de 20ml/kg pour la
première heure (réanimer le brûlé et non la brûlure) puis 2ml/kg/%SCB pendant
les 8 premières heures…

● OXYGENATION…

● SEDATION par MORPHINE…

● Penser à la vaccination antitétanique.


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LES PLAIES

1 DEFINITION

Solution de continuité (=coupure) de la peau produite par un agent mécanique.

2 FACTEURS DE GRAVITE

Liés à la lésion :
● la PROFONDEUR (une plaie profonde est une plaie qui permet de voir la graisse
sous-cutanée voire les organes sous-jacents),
● la SURFACE,
● la LOCALISATION (gravité des localisations sur un trajet artériel ou veineux, une
articulation…).

Liés à la victime :
● l'AGE (gravité chez l'enfant et le sujet de plus de 65 ans),
● les ANTECEDENTS (gravité du diabète…),
● les LESIONS ASSOCIEES…

Une plaie simple est donc une plaie :


● peu étendue,
● peu souillée,
● de localisation non dangereuse,
● chez un sujet en bon état général par ailleurs,
● et sans autre lésion.

Une plaie grave est une plaie… qui n'est pas simple !
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3 LES DANGERS

consistent surtout dans le risque infectieux et le tétanos.


La détresse circulatoire ne survient qu'en cas de plaie artérielle ou veineuse.

4 CONDUITE A TENIR

Devant une plaie simple :


● NETTOYER:
o ASEPSIE = prévention de l'infection en empêchant l'introduction de
microbes  utilisation de GANTS.
o ANTISEPSIE = prévention de l'infection par destruction systématique des
bactéries  utilisation d'ANTISEPTIQUE type BISEPTINE ou
BETADINE…
● vérifier les VACCINATIONS antitétaniques,
● surveiller (risque d'infection).

Devant une plaie grave :


● ALLONGER le blessé:
o si plaie thoracique  position demi assise,
o si plaie abdominale  position à plat dos membres inférieurs fléchis,
● ne pas toucher la blessure sauf en cas d'hémorragie (  compression directe…),
● PROTEGER les lésions par un emballage propre,
● rassurer,
● alerter les secours.
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5 CAS PARTICULIERS

Devant une plaie de l'œil :


● ne pas toucher,
● faire un pansement occlusif bilatéral (pour éviter l'aggravation des lésions),
● adresser à un ophtalmologiste pour examen et traitement.

Devant une plaie des paupières, il faut toujours redouter une plaie de l'œil. Donc, en
cas de doute, même conduite que devant une plaie de l'œil.

Devant une épistaxis (hémorragie nasale), il faut éliminer les origines médicales
(maladies hémorragiques…) ou traumatiques qui nécessiteraient un bilan. Puis :
● ne pas mettre la victime tête en arrière (risque de gêne respiratoire par
l'écoulement sanguin),
● la faire se moucher afin d'éliminer les caillots présents dans la fosse nasale,
● appuyer fortement sur la narine d'où provient l'hémorragie pendant une dizaine de
minutes,
● adresser ensuite à un médecin pour examen et méchage si nécessaire.

Devant une plaie de l'oreille, il faut surtout ne pas oublier qu'une otorragie
(hémorragie extériorisée par le conduit auditif) peut être due à un traumatisme crânien avec
fracture du rocher. Donc, en cas de doute, même conduite que devant un traumatisé du
crâne.

Devant une plaie thoracique ou abdominale :


● si la plaie est peu étendue et MANIFESTEMENT PEU PROFONDE = plaie simple,
● DANS TOUS LES AUTRES CAS et même en cas de doute = plaie grave car il y a un
risque d'atteinte des organes sous-jacents (avec risque de pneumothorax, de plaie de
la rate ou du foie…), même si la plaie est d'apparence minime.
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REFERENCES

 Urgence Pratique 2010 n°100


 Revue du Praticien 2002 n° 20
 Urgence Pratique 2001 n° 46
 Urgence Pratique 1999 n° 33
 Urgence Pratique 1999 n° 32
 Urgence Pratique 1998 n° 27
 Quotidien du médecin 1998 n° 6216
 Urgence Pratique 1994 n°9
 Revue du Praticien 1992 n°12 *
 Revue du Praticien 1980 n° 9
 Cahiers Médicaux 1979 n° 14
 Livre : Urgences 2006 (collectif chez Editions scientifiques L&C)
 Référentiel National Compétences de Sécurité Civile PSE1 2007

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