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Review

Reviewed Work(s): Fragments constitutionnels. Le constitutionnalisme sociétal à l'ère de la


globalisation, coll. « Bibliothèque de la pensée juridique » by Gunther Teubner and Isabelle
Aubert
Review by: Benjamin Bourcier
Source: Revue Philosophique de la France et de l'Étranger, T. 208, No. 1, LA COMPLEXITÉ
EN MOSAÏQUE (JANVIER-MARS 2018), pp. 114-115
Published by: Presses Universitaires de France
Stable URL: https://www.jstor.org/stable/26632094
Accessed: 24-07-2023 17:19 +00:00

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114 Analyses et comptes rendus

la promotion de la cybernétique, malgré l'incapacité de celle-ci à se faire


« allagmatique ». Cette idée d'allagmatique n'est du reste pas seulement
ce par quoi Simondon se voudra le penseur de l'unique et authentique
« Cybernétique universelle », où se réconcilieraient la cybernétique et la
systémique grâce à une idée réformée d'information. Elle est aussi le lieu
d'une tension irréductible : « On pourra, à cause de son caractère réflexif,
la nommer philosophique, mais on devra, en raison de ses origines et de sa
portée, la définir comme théorie scientifique » (p. 199). À cette tension, qui
motive notre propre rupture avec Simondon quant à la nature des fondements
de l'entreprise philosophique, s'ajoutent tous ces textes où le philosophe
propose, de façon à la fois obsessionnelle, schématique et variable, des sys
tématisations de l'histoire de la pensée dans lesquelles prédominent succes
sivement différentes dimensions de notre être-au-monde. C'est bien plutôt à
l'identification archi-réflexive et méthodique des dimensions du sens, milieu
de tous les milieux, qu'il s'agit aujourd'hui de procéder, afin de refonder
l'ontologie mais aussi l'économie politique et l'axiologie - seule la première
des trois ayant été réellement pensée par Simondon.
Jean-Hugues Barthélémy

PHILOSOPHIE DU DROIT ET PHILOSOPHIE POLITIQUE

Gunther Teubner, Fragments constitutionnels. Le constitutionnalisme sociétal à


l'ère de la globalisation, trad, et prés. d'Isabelle Aubert, Paris, Classiques
Garnier, coll. « Bibliothèque de la pensée juridique », 2016, 326 p.,
39 €.

Après les traductions françaises de deux ouvrages (Le Droit, un système


autopoïétique, Presses universitaires de France, 1993 ; Droit et réfiexivité,
LGDJ, 1994), c'est tout un pan de la pensée constitutionnelle de Gunther
Teubner qui devient accessible au public francophone. Alors que la philosophie
politique contemporaine interroge majoritairement les effets de la mondiali
sation aux prismes des théories de la justice de l'égalitarisme libéral et de
l'idéal démocratique, et, que le débat constitutionnel reste encore largement
associé à la théorie de l'Etat, G. Teubner propose de penser le « constitu
tionnalisme sociétal » (CS) comme une « troisième voie » (p. 30). Le CS
se veut une nouvelle manière de penser la constitution à partir de l'apport
des théories sociologiques et de l'héritage de la tradition critique allemande
plutôt qu'à partir des critères formalistes hérités du positivisme, kelsénien
notamment.

La proposition de Teubner surprend par sa conceptualité - parfois difficile


pour qui n'est pas familier des travaux du sociologue Niklas Luhmann - plus
que par l'intuition qui l'anime. Les effets de la mondialisation s'observent
non plus seulement dans le politique mais dans l'ensemble des sphères de la
société civile (p. 31) et chacune de ces sphères est, en puissance, un sujet
du CS œuvrant vers une nouvelle gouvernance mondiale.
L'intérêt du CS de Teubner appliqué à l'échelle mondiale est notamment
de faire apparaître des questions et problèmes originaux pour la réflexion
juridique et philosophique. Tout d'abord, qui et quoi devient « sujet consti
tutionnel » si la différenciation fonctionnelle des systèmes sociaux (plutôt
Revue philosophique, n° 1/2018, p. 87 à p. 147

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Philosophie du droit, Histoire des idées politiques 115

que l'État) devient matricielle dans le CS ? Si « la constitution est ainsi le


processus vivant par lequel s'auto-identifie un système social à l'aide du
droit y> (p. 133), il n'en reste pas moins, pour Teubner, que tout système social ne
peut s'instituer en règle au mépris de « l'autonomie » du système social dans
son rapport à la société. Ensuite, c'est la perspective résolument critique
qui attire l'attention. Le CS n'est pas une porte ouverte à la privatisation
et à la promotion d'un marché économique mondial. En effet, la « qualité
des normes » (p. 136) du CS global est bien au cœur d'un travail normatif
qui vise ultimement à proposer un concept de « constitution » cohérent,
inaugurant une politique décentralisée du monde. Pour Teubner, les normes
du CS mondial visent bien un « concept matériel de constitution, selon lequel
une constitution établit une autorité originaire de droit, soit un système de
droit autonome, qui structure, de son côté, un processus sociétal [...} et qui
est légitimé par lui » (p. 137). Dans cette réflexion, c'est donc l'analyse des
« systèmes sociaux » (les médias, la science, les technologies, etc.) et de
leur logique propre problématisée à l'aune d'un « test » en quatre points
qui prépare le CS mondial dans la seconde partie du livre. L'horizon du CS
est, enfin, de mettre en question le statut des droits fondamentaux et de
présenter une alternative au modèle centralisé de la politique mondiale. En
effet, pour Teubner, chacun des systèmes sociaux peut être un acteur non
seulement de légitimation et d'institution d'un CS mondial mais aussi un lieu
grâce auquel une nouvelle gouvernance mondiale se pense par un retour à
une « horizontalité » revendiquée du politique.
Benjamin Bourcier

Olivier Nay, Histoire des idées politiques. La pensée politique occidentalle de


l'Antiquité à nos jours, 2* édition, Paris, Armand Colin, coll. « U », 2016,
652 p., 29 €.

Ce manuel de référence sur l'histoire des idées politiques n'est pas le


seul du genre, mais me semble le meilleur. Plus complet que l'Histoire de
l'État en Europe de Jean Picq (Presses de Sciences Po, 2015), il garde
la neutralité que l'on attend d'un précis destiné à un public de débutants, à
la différence des sommes de Philippe Nemo (Histoire des idées politiques dans
l'Antiquité et au Moyen Age et Histoire des idées politiques aux Temps modernes
et contemporains, Presses universitaires de France, 2013-2014) et d'Ellen
Meiksins Wood (Des citoyens aux seigneurs, Liberté et propriété, L'Origine du
capitalisme et L'Empire du capital, parus chez Lux respectivement en 2013,
2014, 2009 et 2011). Ces deux auteurs assument sans complexe une vision
politique, libérale pour le premier, marxiste pour la seconde. Au contraire,
Nay joue la carte de l'information sans parti pris et il y réussit.
Il s'agit de présenter la pensée politique de l'Occident, de l'Antiquité
grecque à nos jours, soit les théories politiques des philosophes mais aussi
celles de littérateurs, hommes politiques ou activistes. Ces pensées sont fine
ment resituées dans leur contexte historique. L'auteur a visiblement pensé
à son public : le langage utilisé est clair ; chaque chapitre est complété
d'une bibliographie et d'une ligne du temps ; deux index (des auteurs et
des concepts), ainsi qu'une table des matières très détaillée aident à trouver
assez rapidement l'information que l'on recherche.
Les chapitres sont répartis chronologiquement, ou presque. Car si le pre
mier chapitre aborde l'Antiquité et le deuxième le Moyen Age, les troisième
Revue philosophique, n° 1/2018, p. 87 à p. 147

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