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La protection du consommateur sénégalais

dans le commerce électronique.


Face au développement toujours plus important du e-commerce, le législateur sénégalais a
élaboré un cadre de protection du consommateur sur internet en instaurant notamment une
obligation spéciale d’information et un droit de rétractation.

Le développement des Technologies de l’Information et de la Communication a eu pour


corolaire, une dématérialisation chaque jour plus importante, de l’activité humaine. En effet,
les réseaux de télécommunication [1] sont de plus en plus usités pour s’exprimer, s’informer,
communiquer ou tout simplement faire des affaires. Dans ce dernier cas, on parle de
commerce électronique ou e-commerce.

Il est défini aux termes de l’article 8 de la loi n° 2008-08 du 25 janvier 2008 sur les
transactions électroniques [2] comme étant : « l’activité économique par laquelle une
personne propose ou assure, à distance et par voie électronique, la fourniture de biens et la
prestation de services ». Il englobe aussi : « les services tels que ceux consistant à fournir des
informations en ligne, des communications commerciales, des outils de recherche, d’accès et
de récupération de données, d’accès à un réseau de communication ou d’hébergement
d’informations, même s’ils ne sont pas rémunérés par ceux qui les reçoivent » [3]. Cette
définition somme toute générale, mérite d’être édulcorée à la lumière de l’article 9 de la loi
précitée qui exclut les jeux d’argent, même sous forme de paris et de loteries, légalement
autorisés, les activités de représentation et d’assistance en justice et celles exercées par les
notaires en application des textes en vigueur.

Le e-commerce peut être réalisé suivant deux procédés. Le premier est appelé partiel ou off-
line. Le contrat est conclu de manière électronique mais la prestation ou la livraison est
matérielle. Dans le second par contre dit total ou on-line, aussi bien la conclusion du contrat
que la livraison ou la prestation sont électroniques.

Ses acteurs sont principalement les entreprises (business), les consommateurs (consumers),
les employés (employee) et les gouvernements (government). Selon que les premières traitent
entre elles, l’on parle de Business to business ou B2B [4]. Lorsqu’elles sont en relation avec
des consommateurs ou leurs employés, les termes respectifs Business to consumer ou B2C [5]
et Business to Employee, Intranet ou B2E [6] sont utilisés. Quand elles contractent avec des
gouvernements l’on parle de Business to government ou B2G [7]. Il arrive que les
consommateurs fassent aussi des affaires entre eux. Il s’agit du Consumer to consumer ou
C2C [8]. Cette étude ne s’intéressera cependant qu’à la protection du consommateur dans ses
rapports avec les entreprises. Il convient avant tout de donner un contenu à la notion de
consommateur.

En France, en l’absence d’une définition légale, c’est à la jurisprudence que l’effort de


conceptualisation est revenu. Dans un premier temps, la Cour de Cassation avait adopté une
définition extensive incluant les personnes morales qui sont, relativement au contenu du
contrat, « dans le même état d’ignorance que n’importe quel autre consommateur  » [9]. Par
la suite, elle a adopté une conception beaucoup plus restrictive en ne retenant que celles qui
signent un contrat n’ayant pas un rapport direct avec leur activité professionnelle [10]. À la
lumière de l’arrêt du 22 novembre 2001 de la Cour de Justice des Communautés Européennes
[11] interprétant l’article 2, sous b) de la Directive n°93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993,
concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs [12], la
Haute Juridiction française est revenue sur ses décisions antérieures. En effet, elle a retenu
que le consommateur ne peut être qu’une personne physique [13] qui, en dehors du cadre de
son commerce, de ses affaires ou de sa profession, passe un contrat avec un fournisseur lui-
même dans l’exercice de son activité professionnelle ou commerciale.

Dans le maillage juridique sénégalais, le terme consommateur, bien qu’apparaissant dans la


loi n°94-63 du 22 août 1994 sur la concurrence, les prix et le contentieux économique [14] en
son article 32, aucun contenu ne lui est cependant donné. C’est le législateur de l’OHADA à
travers l’article 203 de l’Acte Uniforme sur le Droit Commercial Général qui le définit en
comme étant « toute personne qui agit à des fins qui n’entrent pas dans le cadre de son
activité professionnelle ». Cette conception somme toute large, englobe aussi bien les
personnes physiques que morales et correspond à celle de la Cour de Cassation française
avant l’intervention de l’arrêt de la Première Chambre Civile du 24 novembre 1993. Même si
elle est critiquable au regard de l’évolution jurisprudentielle, elle avait tout de même le mérite
de mettre à l’abri d’une insécurité que pourraient induire des divergences de lecture. C’est
pourquoi sa disparition dans le nouvel Acte Uniforme sur le Droit Commercial Général
adopté le 15 décembre 2010 à Lomé [15] ne peut qu’être à déplorer. Il appartiendra désormais
à compter du 16 mai 2011, date d’entrée en vigueur de ce nouveau texte aux juridictions
sénégalaises de combler les lacunes législatives.
La nécessité de protéger le consommateur n’a pas échappé législateur sénégalais. En effet,
c’est avec la loi n°94-63 du 22 août 1994 sur la concurrence, les prix et le contentieux
économique que l’on voit se dessiner, pour la première fois, les contours d’un droit de la
consommation. Ce texte institue une obligation de loyauté vis-à-vis du consommateur afin de
garantir son pouvoir et sa liberté de choix entre les services et produits qui lui sont offerts
[16]. Toutefois, un examen du paragraphe 1 de cette loi intitulé : « Obligation à l’égard
consommateur », du Titre II consacré à l’information commerciale, on se rend compte
aisément que la protection offerte au consommateur est circonscrite aux conditions de vente,
au prix et à la facturation. C’est certainement la raison pour laquelle, on a estimé devoir lui
assurer une protection supplémentaire dans le cadre du commerce électronique.

En effet, avec la loi n°2008-08 du 25 janvier 2008 sur les transactions électroniques [17], la
loi n° 2008-11 du 25 janvier 2008 portant sur la Cybercriminalité [18] et le décret n°2008-718
du 30 juin 2008 relatif au commerce électronique que l’on assiste à la naissance d’un véritable
droit de la consommation à l’échelle numérique. Si les deux premiers textes édictent les
dispositions impératives que le professionnel est tenu de respecter dans ses rapports avec le
consommateur, la loi sur la cybercriminalité elle, précise les sanctions pénales applicables en
cas de violation de ces normes.
Conscient que le professionnel avec qui le consommateur contracte ne se situe pas toujours
sur le territoire sénégalais et que ce dernier du fait de son manque d’expérience peut être
amené à accepter ou se voir imposer une loi qui le désavantagerait, le législateur sénégalais
s’est attaché, dans un premier temps, à travers l’article 12, alinéa 2-1 de la loi sur les
transactions électroniques, à préciser que les règles de droit international privé ne peuvent en
aucun cas, avoir pour effet ou conséquence, de priver le consommateur du bénéfice de la
protection que lui assure « les dispositions impératives (...) sénégalaises relatives aux
obligations contractuelles  ». Il a ensuite été institué d’une part, une obligation d’information
à la charge du professionnel et au profit du consommateur toutefois distincte de celle figurant
déjà à l’article 10 de la loi sur les transactions électroniques et d’autre part, un droit de
rétraction pour ce dernier. Afin d’éviter au consommateur des frais de procédure et des
tracasseries judiciaires, il a été enfin prévu, une résolution de plein droit du contrat lorsque le
professionnel est dans l’impossibilité d’exécuter ses obligations contractuelles du fait de
l’indisponibilité du bien ou du service commandé. C’est ce qui ressort de l’article 20, alinéa 2
décret relatif au commerce électronique. L’obligation d’information et le droit de rétraction
méritent d’être examinés plus amplement.

1- L’institution d’une obligation spéciale d’information au profit du consommateur

Législateur sénégalais à travers l’article 10 de la loi sur les transactions électroniques a mis à
la charge de toute personne exerçant le commerce électronique, l’obligation de s’identifier
auprès de ses cocontractants et de leur communiquer ses prix en précisant les frais et taxes qui
y sont compris. Lorsque le partenaire du professionnel est un consommateur, une obligation
d’information vient s’ajouter à celle évoquée plus haut. Il y a lieu de préciser son contenu (a)
et son encadrement (b).

a- Le contenu de l’obligation d’information

Les informations à porter à la connaissance du consommateur sont précisées par l’article 24


de la loi sur les transactions électroniques et les articles 8, 9 et 20 du décret relatif au
commerce électronique. Il est possible de les classer suivant qu’elles doivent être
communiquées avant la formation du contrat ou en cas d’inexécution lorsque le contrat est
déjà formé.
Le professionnel est tenu aux termes de l’article 8 du décret précité, de mettre à la disposition
du consommateur, avant la formation du contrat, toutes les données permettant de rentrer en
avec lui. Il s’agit du nom de son directeur de publication éventuellement, de ses adresses
électronique et postale pour les réclamations et de ses numéros de téléphone et fax. Il a en
plus, l’obligation de communiquer les mesures mises en place pour assurer la protection des
données personnelles de ses cocontractants de même que les conditions relatives à la
formation du contrat, sa durée, ses modalités de résiliation et son coût. Il s’agit concernant la
formation du contrat, conformément à l’article 24 de la loi sur les transactions électroniques,
de préciser les étapes à suivre, les moyens techniques pour identifier et corriger les erreurs de
saisie et la langue utilisée.
Pour ce qui est de l’offre de contracter, elle doit contenir les caractéristiques essentielles du
bien ou service proposé, son prix et les différentes composantes du prix tels les taxes et frais,
la monnaie de référence, les modalités de paiement du prix et les possibilités de crédit pour le
consommateur. Quand l’offre est archivée, ses modalités d’archivage et de consultation
doivent être aussi précisées. Le professionnel est tenu en outre indiquer le service après vente
offert ainsi que la garantie existante. Le consommateur devra être informé de l’existence ou
non d’un droit de rétractation. Lorsque celui-ci n’existe pas, le professionnel a l’obligation de
mettre à la disposition du consommateur les informations relatives aux caractéristiques du
système d’exploitation ou de l’équipement nécessaire pour utiliser de manière efficace le bien
ou le service, son temps approximatif et son coût de téléchargement, au besoin, les modalités
et conditions du contrat de licence et les caractéristiques techniques pour reprendre le
téléchargement interrompu (article 19 du décret). Il en est de même des modalités de
remboursements des sommes versées le cas échéant et des conséquences liées à l’acceptation
de l’offre sans que celle-ci ne soit confirmée. Il devra enfin avoir à sa disposition, les règles
professionnelles et commerciales auxquelles le professionnel est soumis.
Lorsque que le contrat est formé après communication préalable de toutes les informations
requises au consommateur, le professionnel n’en demeure pas moins tenu en cas de défaut
d’exécution causé par l’indisponibilité du bien ou du service, d’en informer par écrit, celui-ci
conformément aux dispositions de l’article 20, alinéa 2 du décret relatif au commerce
électronique.
L’obligation d’information ainsi identifiée est encadrée par le législateur.

b- L’encadrement de l’obligation d’information

Il ressort des dispositions de l’article 8 in fine du décret relatif au commerce électronique que
les informations que le professionnel est tenu de communiquer au consommateur doivent
revêtir certains caractères. Elles doivent être non équivoques, lisibles et d’un accès facile et
permanent. L’article 9, alinéa 2 du même texte rajoute quelles doivent être susceptibles de
reproduction afin de permettre leur conservation.
Elles doivent en outre figurer sur la page d’accueil du site web du professionnel. Tel est
l’économie du dernier aliéna de l’article 8 du décret relatif au commerce électronique. Il ne
suffit pas de faire figurer les renseignements sur le site web mais encore faudrait-il qu’ils
puissent être transmis par tout moyen adapté au service utilisé par le consommateur et à tout
moment de la transaction, dans le respect cependant des normes régissant la protection des
personnes incapables. Ces exigences ne dédouanent pas le professionnel lorsqu’il est en
mesure de le faire, de mettre en place un service permettant au consommateur de discuter
directement avec lui. C’est ce qui ressort des dispositions de l’article 10 du décret.

En cas de contestation relatives au respect de l’obligation d’information, le législateur


sénégalais a mis à la charge du professionnel, le devoir de prouver qu’il a communiqué, dans
les délais, toutes les informations requises au consommateur, que ce dernier a donné son
consentement et qu’il l’a confirmé.

Le non respect des exigences relatives à l’obligation d’information est sanctionné sur le
pénale aux termes de l’article 431-48 de la loi sur la cybercriminalité. En effet, il ressort de ce
texte que : « Les dispositions de l’article 431-44 de la présente loi s’appliquent pour tout
manquement à l’obligation d’information du consommateur prévue par l’article 10 de la loi
sur les transactions électroniques ». L’article 431-44 prévoit une peine d’« emprisonnement
de six (6) mois à un (1) an et d’une amende de 100.000 francs à 500.000 francs ou de l’une de
ces deux peines seulement ».
A coté de l’obligation spécifique d’information le législateur sénégalais a consacré au profit
du consommateur un droit de rétractation en matière de commerce électronique.

2- La consécration d’un droit de rétractation au profit du consommateur

L’article 12 du décret relatif au commerce électronique accorde au consommateur ayant


conclu un contrat par voie électronique le droit de se rétracter sans indication de motif et sans
pénalité dans un certain délai. Ce mécanisme qui est sans nul doute le premier genre dans le
maillage juridique sénégalais mérite d’être conceptualisé (a) avant d’examiner sa mise en
œuvre (b).

a- Le contenu du droit de rétractation


Il ressort des dispositions de l’article 96 du COCC [19] que « le contrat légalement formé
crée entre les parties un lien irrévocable  ». C’est sur le fondement de ces dispositions qu’une
personne déjà engagée dans une relation contractuelle ne saurait se délier de manière
unilatérale de ses obligations sans avoir à réparer le préjudice que son comportement
causerait. Certain auteurs [20] examinant l’article 1134 du code civil, pendant de l’article 96
précité en ont décelé la consécration du principe de cohérence.

Ce principe jusque là absolu, a connu un assouplissement avec l’article 12 du décret relatif au


commerce électronique qui a introduit le droit de rétractation. CORNU le défini comme étant
«  le fait de revenir, en vue d’en détruire les effets juridiques, sur un acte qu’on avait
volontairement accompli » [21]. Barrère quant à lui le considère comme étant la « substitution
de l’expression d’une volonté actuelle différente de la déclaration antérieure que le sujet
avait lui-même formulée » [22]. Mirabail par contre dans sa thèse [23] dégage trois éléments
pour caractériser le droit de rétractation. Il s’agit d’abord de « l’unilatéralité » de la
déclaration de volonté. Une seule partie exprime sa résolution de se délier du contrat. Il y a
ensuite « l’incompatibilité » de cette décision unilatérale, avec le consentement exprimé
initialement. Enfin, vient « la substitution » pure et simple qu’opère la rétractation, de sorte
que la première manifestation de volonté est « effacée » par celle qui lui succède. En
définitive, le droit de rétractation peut être considéré comme étant la faculté offerte au
consommateur, après avoir signé un contrat par voie électronique avec un professionnel, de
l’anéantir de manière unilatérale.

On ne saurait manquer de s’intéresser aux justifications d’une telle entorse au principe posé
par l’article 96 du COCC. Le silence du législateur dans le rapport de présentation du décret
relatif au commerce électronique oblige à se tourner vers les arguments avancés en France. La
loi du 12/07/1971 relative à l’enseignement à distance visait-elle à « faire cesser le scandale
du démarchage et des annonces mensongères, à protéger les élèves vulnérables d’une
exploitation éhontée de leur bonne foi » [24]. Dans le même ordre d’idée, la loi du 3/01/1972
relative au démarchage financier envisageait de « protéger les épargnants vulnérables de la
multiplication des efforts de publicité, des méthodes nouvelles des réseaux de démarchage »
[25]. De même la loi du 22/12/1972 relative au démarchage et à la vente à domicile entendait
protéger le consommateur moyen des démarcheurs qui « savent forcer les portes et les
consentements » [26]. Il est possible d’évoquer encore la loi du 6/01/1988 relative à la vente à
distance et au « télé-achat » qui cherche à prémunir l’acheteur d’une présentation
exagérément avantageuse sur le catalogue ou l’écran de sa télévision, de la chose qu’il a
commandé [27]. Enfin, on a présenté la loi du 8/07/1998 relative à la jouissance d’immeubles
à temps partagé comme visant exclusivement à « porter remède aux conséquences de la mise
en œuvre, par certains professionnels, de méthodes contestables de commercialisation » [28].
Le point commun entre ces différents textes accordant tous un droit de rétractation au
consommateur est de soustraire celui-ci de la contrainte morale exercée par le professionnel
par des pratiques aussi agressives que scandaleuses.

L’autre raison découle de ces propos de Thyraud : « Le Code civil avait admis que le
consentement servant de base à un contrat puisse être vicié par le dol ou la violence. Il existe
de notre temps un autre vice du consentement plus subtil : la séduction (...), il est du devoir
de l’Etat de protéger le consommateur contre ses propres emballements, contre des décisions
qui seraient insuffisamment réfléchies et le conduiraient à un achat inutile ou sans rapport
avec ses ressources  » [29].
Il apparait donc en définitive que le droit de rétraction trouve son fondement dans la nécessité
de protéger le consommateur aussi bien contre son cocontractant que contre lui-même. Il
convient d’expliciter sa mise en œuvre.

b- La mise en œuvre du droit de rétractation

La mise en œuvre du droit de rétractation obéit aussi bien à des conditions de fond que de
forme et emporte certaines conséquences.
S’agissant des conditions de fond, l’article 15 du décret relatif au commerce électronique
précise que la rétractation ne peut intervenir que lorsque le consommateur a la possibilité
d’essayer le bien commandé ou d’en faire usage sans que l’exécution du contrat ne soit
instantanée. Cela signifie donc que toutes les fois où l’exécution du contrat se fait d’un trait et
qu’il est impossible de tester la chose commandée, la faculté de rétractation disparait. C’est ce
qui arrive aussi aux termes de l’article 16 du même décret, sauf conventions contraires, pour
les contrats de :

 de fourniture des services dont l’exécution a débuté avec le consentement du consommateur
mais avant l’épuisement du délai de rétractation ;
 fourniture de produits confectionnés suivant ses indications ou qui, du fait de leur nature ne
peuvent pas être réexpédiés parce que susceptibles de se détériorer ou de se périmer
rapidement ;
 fourniture d’enregistrement audio, vidéo ou de logiciels informatiques descellés ou
téléchargés directement par lui ;
 fournitures de journaux, périodiques et de magazines ;
 ventes conclues lors des enchères ;
 police d’assurance de moins d’un mois ;
 services financiers dont le prix dépend des fluctuations du marché financier pouvant
survenir durant la période de rétractation.
Le consommateur conserve sont droit de rétractation lorsque le produit commandé se
détériore pendant le transport.

Pour ce qui est des conditions de forme, l’article 12 in fine précise que la rétractation peut être
effectuée sur tout support durable. En d’autres termes, elle peut se faire sur tout support
permettant de laisser une trace écrite et qui se conserve pour une longue durée mais dans un
délai de sept jours ouvrables. Toutefois, lorsque le professionnel n’a pas satisfait à
l’obligation spéciale d’information étudiée plus, le délai est de trois mois. La computation du
délai commence pour les services à compter de la conclusion du contrat et pour les produits,
de leur réception. Tel est le sens de l’article 14 du décret.

Lorsque le consommateur exerce son droit de rétractation en méconnaissance des conditions


évoquées plus, il engage sa responsabilité si un préjudice nait de son comportement.
Toutefois, dans l’hypothèse où il se conforme aux dispositions visées plus haut, la partie du
prix correspondant au service effectivement fourni par le professionnel reste à sa charge
(article 21 du décret). Il en est de même des frais directs de renvoi du produit commandé mais
seulement lorsque c’est le bon produit qui a été livré (article 17 du décret).

Le professionnel quant à lui est tenu de restituer sans frais et dans les mêmes conditions de
paiement, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la rétractation, toutes
les sommes reçues en exécution des termes du contrat, exceptés le prix du service
effectivement fourni et les frais directs de renvoi. Faute par lui de s’exécuter dans le délai
prévu, les montants à reverser produisent de plein droit des intérêts calculés au taux légal en
vigueur. De plus, il s’expose à une peine d’emprisonnement de six (6) mois à un (1) an et
d’une amende de 200 000 francs à 2 000 000 francs ou de l’une de ces deux peines seulement
sur le fondement de l’article 431-49 de la loi sur la cybercriminalité.

Notes :

[1] Le réseau de télécommunication est défini comme étant : « un réseau d’arcs (liaisons de
télécommunication) et de nœuds (commutateur, routeur, ...), mis en place de façon à ce que
des messages puissent être transmis d’un bout à l’autre du réseau au travers de multiples
liaisons ». Comme exemple de réseau de télécommunication, il est possible de citer : Internet,
le réseau Télétex Mondial, le réseau de téléphonie mobile public terrestre. Cf.
http://fr.wikipedia.org/wiki/R%C3%A9seau_de_t%C3%A9l%C3%A9communications
[2] Journal officiel du Sénégal, n° 6406 du Samedi 3 mai 2008.
[3] Article 8, alinéa 2 de la loi n° 2008-08 du 25 janvier 2008 sur les transactions
électroniques.
[4] Se prononce bi-tou-bi
[5] Se prononce bi-tou-ci
[6] Se prononce bi-tou-i
[7] Se prononce bi-tou- dgi
[8] Se prononce ci-tou-ci
[9] Cass. 1re civ., 28 avril 1987 , D. 1988.1 n. Delecbecque, JCP 1987.II.20892 n. Paisant,
RTD Civ. 1987, 548, obs. Mestre.
[10] Cass. 1re civ. >24 nov. 1993, D. 1994 som. com.p. 236 , obs Paisant, Defrénois, 1994 p.
818 obs. D. Mazeaud , Cass. 1re civ. 21 fév. 1995, JCP 1995.II.22502, n. Paisant, 5 nov. 1996
contrats, conc.consom. 1997 n°12.
[11] Disponible à l’adresse : http://www.clauses-abusives.fr/juris/cjce011122.htm
[12] Journal officiel L 95 du 21.04.1993.
[13] Cass. 1re civ., 2 avril 2009, disponible l’adresse suivante :
http://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?
oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000020484750&fastReqId=417519687&fastPo
s=2
[14] Journal officiel du 28 août 1994, disponible en téléchargement à l’adresse suivante :
www.globalcompetitionforum.org/.../senegal/Loi%2094-63.pdf
[15] Journal officiel OHADA n°23 du 15 février 2011.
[16] Cf. article 32 de la loi n°94-63 du 22 août 1994 sur la concurrence, les prix et le
contentieux économique
[17] Journal officiel du Sénégal, n° 6406 du Samedi 3 mai 2008.
[18] Journal officiel du Sénégal, n°6440 du samedi 29 novembre 2008.
[19] Code des Obligations Civiles et Commerciales du Sénégal
[20] Cf. FAGES (B) Le comportement du contractant, PUAM 1997, n°592 et s. ; STOFFEL-
MUNCK (Ph) L’abus dans le contrat, essai d’une théorie, thèse Aix-Marseille 1999, n°99 et
s..
[21] Vocabulaire juridique Association H. Capitant, sous la direction de G. Cornu, PUF 1996,
6ème éd. ;
[22] La rétractation du juge civil, Mélanges en hommage à P. Hébraud, 1981, p.1.
[23] La rétractation en droit privé français, th.1991, Bdp.t.284, LGDJ 1997, p.2 et s.
[24] GISSINGER(A) Rapport devant l’Assemblée nationale, J.O. Débats, Ass.Nat.,
11/12/1969, p.4832.
[25] BAS (P) Intervention devant l’Assemblée nationale, J.O. Débats, Sénat, 2/12/1971,
p.6351.
[26] CALAIS-AULOY (J) La loi sur le démarchage à domicile et la protection des
consommateurs, D.1973, Chr., p.266 ; pour les travaux préparatoires, voir par ex.
CHAVANAC (A) Rapport devant le Sénat, J.O. Débats, Sénat, 4/05/1972, p.289 et s.
[27] Voir PAISANT (G) La loi du 6/01/1988 sur les opérations de vente à distance et le “ télé-
achat ” , J.C.P.1988 éd.G., II, 3350, spéc.n°2.
[28] GUIGOU (E) Intervention devant le Sénat, J.O Débats, Sénat, 23/10/1997, p.2991.
[29] Rapport devant le Sénat, J.O. Débats, Sénat, 12/10/1976, p.2695, spéc. p.2696.

L’émergence des réseaux sociaux conduit les entreprises et


leurs marques à innover dans leurs méthodes de
communication. Elles utilisent depuis quelques années le
marketing d’influence qui permet de faire passer leurs
messages commerciaux via ce que l’on
appelle les « influenceurs ». Problème, ces influenceurs
n’ont pas de statut légal précisément défini par la loi.
Toutefois, leurs revenus très souvent faramineux
n’échappent pas pour autant à l’imposition.
Sommaire

 Le statut juridique des influenceurs


 La nature juridique des relations commerciales des influenceurs
 Quelle fiscalité pour les influenceurs ?

Le statut juridique des influenceurs

Actuellement, le statut juridique des influenceurs ne possède pas de régime légal propre.
Néanmoins, il faut noter que pour qualifier leurs statuts, les juges utilisent le régime
applicable aux contrats de travail des mannequins à savoir l’article L7123-3 du Code du
travail.

L’article L 7123-2 du Code du travail définit l’activité de mannequin comme suit: « 1°Soit de
présenter au public, directement, ou indirectement par reproduction de son image sur tout
support visuel ou audiovisuel, un produit, un service, ou un message publicitaire 2°Soit de
poser comme modèle, avec ou sans utilisation ultérieure de son image ».
On comprend donc par cette définition, les raisons de l’assimilation des juges français. Le
développement d’un régime propre aux influenceurs reste pour le moment en cours de
construction du côté du législateur.

La nature juridique des relations commerciales des influenceurs

En la matière, tout dépend du type d’activité et de la relation entretenue entre l’influenceur et


la marque. Bien que la loi ne prévoit aucun statut juridique pour les professionnelles des
réseaux sociaux, il est tout de même nécessaire de qualifier le contrat de travail in concreto et
de déterminer le statut juridique mais surtout le régime d’imposition applicable pour eux.

Pour pouvoir analyser la nature du contrat entre la marque et l’influencer ainsi que la qualité
de la prestation, il convient de prendre en compte trois facteurs :

 Dans un premier temps la contrainte de production et de diffusion des contenus tel que
les photos, les vidéos, la prise de parole en ligne face à la communauté.
 Dans un deuxième temps, le temporalité de l’accord c’est à dire est-ce qu’on parle
d’une prestation unique, une prestation dans le long/court terme…
 Dans un troisième temps, le contrepartie financière négociée entre les parties.

Le contrat peut alors déboucher sur une relation de subordination entre l’influencer et
l’enseigne. On est alors en présence d’un contrat de travail. Le professionnel des réseaux
sociaux est alors qualifiée de salarié et la marque l’employeur devant payer les cotisations
sociales.

Quelle fiscalité pour les influenceurs ?

L’Autorité de régulation professionnelle de la publicité définit l’influenceur comme « celui


qui exprime un point de vue, ou donne des conseils dans un domaine spécifique, avec un style,
et un traitement qui lui est propre et auquel son audience s’identifie ». Les
influenceurs perçoivent une rémunération de la part de la marque et donc, doivent
normalement payer des impôts. Ils peuvent en effet être soumis à deux types d’imposition,
soit l’impôt sur le revenu ou encore l’impôt sur les sociétés.

Concernant l’impôt sur le revenu, les Youtubeurs par exemple peuvent être soumis à cet
impôt s’ils n’ont pas de société ou si leur société est soumise à l’IR. Dans ce cas, ils seront
imposés au barème progressif de l’imposition pouvant aller jusqu’à 45% s’ils atteignent la
dernière tranche d’imposition. Ils seront également par principe soumis aux prélèvements
sociaux sur leurs revenus d’activités à hauteur de 17,2%.

Si ils exercent leurs activités par l’intermédiaire d’une société soumise à l’IS, ils seront
imposés à l’impôt sur les sociétés. Dans ce cas, leurs revenus seront imposés selon les taux
d’IS applicables, ils pourront ensuite éventuellement se verser un salaire, avec l’imposition
afférente à tout salarié voir percevoir des dividendes, dans ce dernier cas, l’imposition se fait à
hauteur de 30%.

Il est important de savoir que le contrôle des influenceurs est encadré de manière très stricte.
En effet, si les influenceurs omettent de déclarer les revenus normalement inclus dans
l’assiette du calcul de l’impôt, l’administration fiscale pourra lors de son contrôle majorer
l’impôt correspondant, de 40% voire 80%.

Concernant la fiscalité du contrat des influenceurs, la rémunération est soumise au régime de


l’impôt sur le revenu pour les traitements et les salaires. Le contrôle fiscal devrait augmenter
de plus en plus notamment avec la loi de finances pour 2020 qui autorise alors à
l’administration fiscale d’avoir la possibilité d’exploiter de manière automatique les données
personnelles de certaines plateformes pour avoir un contrôle plus approfondie.

Enfin, l’apparition de plus en plus fréquentes des enfants-influenceurs pose également des
problèmes fiscaux. En effet, malgré leurs jeunes âges, ils n’échappent pas non plus à la
fiscalité. Comme pour tout enfant percevant des revenus, ce sont les parents qui sont
redevables, ces derniers doivent donc déclarer les revenus au nom de leurs enfants.

Par ailleurs, depuis février dernier, les députés ont adopté en première lecture les textes visant
la protection de l’intérêt des enfants influenceurs. Le projet vise notamment à mettre en place
un blocage des sommes jusqu’à la majorité de l’enfant, un encadrement de la rémunération et
du temps de travail des enfants

La fiscalité du commerce électronique

Xavier Linant De Bellefonds

Dans Le droit du commerce électronique (2005), pages 110 à 118

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Le commerce électronique tel qu’il s’est développé dans les premiers temps est presque à la
marge du droit fiscal, notamment pour les biens immatériels pouvant circuler sans possibilité
d’appréhension pour les pouvoirs publics. Les pertes potentielles pour les États sont énormes.

Les deux caractéristiques fondamentales du commerce électronique que sont la virtualité des
sites et l’immatérialité des transactions qui transitent par eux viennent bousculer les règles sur
lesquelles est fondée la fiscalité du commerce traditionnel.

La nouveauté est telle que l’on a pu se demander si cette nouvelle activité devait être
assujettie à l’impôt. D’une façon réaliste il peut être répondu que l’impôt n’a jamais laissé
échapper une activité lucrative, mais les arguments avancés dans ce débat ne sont pas sans
intérêt sur les orientations qui pourraient être prises dans l’avenir et la façon dont, à terme,
pourraient être fiscalement encadrées les activités du commerce électronique.

I. L’opportunité d’imposer le commerce électronique

La matière du commerce électronique est encore jeune et l’on se demande justement si une
imposition normale ne risque pas d’obérer son développement alors que de grandes richesses
en sont attendues.

Une première piste a consisté à rechercher un principe d’imposition qui soit spécifique à cette
nouvelle activité. Mais on aurait plutôt tendance à s’orienter vers la neutralité fiscale

1. Un impôt spécifique

Un groupe d’experts avait proposé d’instaurer une taxe à la consommation d’unités


d’information : la « bit tax » sur un modèle suggéré par Arthur Cordell (1994) et repris par
Luc Soete dans Construire la société européenne de l’information pour tous (1996). Selon
Cordell, 1 cent par mégabit était une formule à étudier.

Le principe d’une semblable taxation est de ne s’attacher qu’à la quantité d’information


transmise et non à la qualité qui fait son prix. Cette approche est peu économique et conduirait
à taxer lourdement les fichiers graphiques ou musicaux beaucoup plus lourds que les fichiers
texte, ce qui serait arbitraire. En outre il y aurait une évasion fiscale facile du fait de
l’amélioration constante des logiciels de compactage. Les tenants de cette idée répondent que
la logique de l’immatériel conduira à optimiser les transmissions d’information en intégrant le
facteur fiscal, retrouvant en ceci les impôts simples à acquitter que l’on pouvait trouver dans
le passé : la caravane des marchands paie une piastre par chameau sans que l’on se préoccupe
de savoir le prix des marchandises transportées. Une régulation endogène devrait
normalement en découler. Les technologies de la communication font naître une valeur
ajoutée « invisible » qui se reporte sur la valeur des technologies et sur les gains en termes de
productivité et de création d’emploi (F. Huet).

Un autre bienfait serait d’introduire un frein au principe de la gratuité de la présence sur les
réseaux, dans laquelle certains voient un risque d’encombrement et de saturation. De même, si
les spams, au lieu d’être acheminés gratuitement, supportaient une imposition comme les
autres formes de messages il en résulterait un bien pour les libertés et le confort de la vie
privée. La localisation du vendeur ne serait plus un problème car le prélèvement serait
uniquement basé sur le lieu de la consommation.

2. La recherche de la neutralité fiscale

Cette notion d’une imposition spécifique n’est pas accueillie par les institutions qui pensent à
juste titre que son effet viendrait s’ajouter à la fiscalité traditionnelle susceptible de frapper
telle ou telle opération, ce qui soumettrait le commerce électronique, en fin de compte, à une
fiscalité plus lourde que l’ancienne.

3. Les États-Unis

Les États-Unis ont pris une position en flèche en affirmant dans plusieurs déclarations au plus
haut niveau que l’Internet devait constituer un espace libre de toute imposition.

Ce que l’on pourrait prendre pour une volonté d’exemption doit être tempéré : il s’agit en fait
de la volonté d’imposer une neutralité fiscale, en ce sens que les seuls impôts que pourraient
supporter les activités sur l’Internet sont ceux qui existent déjà pour le commerce traditionnel
et que l’on ne peut contourner (ainsi une vente en ligne doit-elle être considérée comme une
vente simple).

Le 20 octobre 1998, le Congrès a adopté l’Internet tax freedom act, instituant un moratoire sur
l’imposition du commerce électronique. Dans ce moratoire, décidé pour trois ans (reporté le
22 mars 2000 pour cinq années supplémentaires) sont interdites :

toutes nouvelles taxes sur l’accès à l’Internet ;

toute taxe discriminatoire à l’endroit du commerce électronique.

Ce texte institue en outre une commission consultative sur le commerce électronique


composée de politiques et d’entrepreneurs qui doivent évaluer l’impact des fiscalités sur les
échanges électroniques.

4. L’Union européenne

Pour l’Union européenne, la recherche de la neutralité fiscale est aussi un impératif : «


Aucune charge supplémentaire ne doit peser sur les nouvelles formes de commerce par
rapport aux activités plus traditionnelles » (Com (97) 157). Au sein des institutions
communautaires se sont rapidement dégagées des idées-forces telles que l’inopportunité de
créer un impôt spécifique pour le commerce électronique et la qualification de services pour
toutes les transmissions électroniques et tous les biens immatériels livrés par de tels moyens
au regard de la TVA ; cela introduit heureusement une harmonisation car certains pays telles
l’Allemagne ou l’Espagne étaient éloignés de cette conception.
Elle s’est aussi rendu à l’évidence que la TVA était due par les prestataires de l’UE sur tous
les services en ligne qu’ils fournissaient à des pays tiers tandis que les services fournis par des
pays tiers à l’UE aux consommateurs européens ne sont pas taxés, ce qui est une atteinte à la
neutralité. La commission se prononçait ainsi pour l’imposition de la TVA au lieu de situation
du preneur de service, solution logique puisque l’argent provient du pays qui reçoit la
prestation.

Ces réflexions ont conduit à une proposition de directive du Conseil modifiant la sixième
Directive du 17 mai 1977, le 7 juin 2000. Cette proposition vise à rendre imposables au lieu
de leur consommation les prestations de services effectuées par voie électronique à titre
onéreux (fourniture de son et d’image par voie électronique ; logiciels, lesquels incluent
notamment les jeux pour ordinateurs ; traitements de données, y compris l’accueil de sites
Web ; fourniture d’informations, etc.) mais en excluant la fourniture de contenus
électroniques sur supports matériels (cédérom, DVD, etc.).

Mais à la fin de l’année 2001, la Directive n’était toujours pas adoptée car il restait un point
de discorde entre les États membres : le taux de la TVA n’est pas identique dans toute
l’Union... Un accord au sein du Conseil Ecofin est intervenu le 12 février 2002 qui prévoit
l’imposition à la TVA des biens et services vendus par voie électronique, à l’intérieur de
l’Union : jeux d’ordinateurs, films, musiques, logiciels, hébergement de sites informatiques,
maintenance à distance de programme seront soumis à TVA dans le pays du consommateur.
Selon un mécanisme en vigueur jusqu’en 2006, l’opérateur d’un pays tiers pourra s’identifier
dans le pays de son choix, mais ce pays reversera la TVA au pays de résidence du
consommateur. La Directive devra être transposée avant le 1er juillet 2003.

I. Le régime français

Le progrès de ces idées et propositions dans l’ordre interne français est encore faible et l’on
s’y efforce de croire que les règles existantes permettent de soumettre aux impôts et taxes les
acteurs et les activités du commerce électronique.

1. Les impôts directs

Sont normalement imposables à l’impôt sur les sociétés ou à l’impôt sur les revenus (BIC) les
résultats des entreprises qui font du commerce électronique.

La difficulté provient du fait que l’efficacité de tout impôt est conditionnée par la possibilité
de faire pression sur le redevable qui doit posséder un établissement stable dans le pays qui
l’impose. Or de nombreuses configurations du commerce électronique (galeries marchandes,
sites miroirs, etc.) mettent à l’épreuve cette notion d’établissement stable qui permet et
d’imposer et d’éviter les doubles impositions. En outre le mécanisme des retenues à la source
de l’impôt, lors de paiement effectué à des non-résidents, se complique singulièrement.

A) La territorialité de l’impôt

Le système fiscal français repose sur la territorialité de l’impôt qui se préoccupe de la


situation géographique des entreprises et non de la nationalité.
Aussi bien dans le droit français que dans les conventions signées par la France, la notion
d’établissement stable a un substrat très matériel : localisation physique de dirigeants ou
représentants dans des locaux.

On est alors conduit à se demander si les outils logistiques du commerce électronique tels que
le site Web ou le serveur n’échappent pas à cette catégorisation.

Le site est une vitrine dont les fichiers sont situés sur un serveur. Or un serveur étant un
équipement informatique a forcément une implantation matérielle : mais cela ne suffit pas à
définir un établissement stable car il peut être entièrement piloté de l’étranger ou bien être
celui d’un prestataire de service qui se contente d’irriguer le pays de consommation. Dans ces
deux hypothèses la présence physique du commerçant ou de ses préposées est purement
théorique.

Inversement, si un résident fiscal exploite un site Web, même hébergé sur un serveur à
l’étranger, il sera imposable en France.

B) La retenue à la source

L’article 182 BI du CGI prévoit que, lorsqu’un paiement est effectué au profit d’un résident
d’un État étranger en rémunération d’une prestation de services rendue à une personne ayant
une activité en France, ce versement doit faire l’objet d’une retenue à la source.

Le taux de droit commun de cette retenue à la source est de 33,33 % du montant brut du
paiement. Ce taux qui varie suivant les pays et la nature de la prestation est réduit en cas de
convention. Le prestataire bénéficie généralement d’un avoir fiscal du montant de la retenue
qu’il peut imputer sur l’impôt dû dans son pays d’implantation.

Cette retenue s’applique aux prestations immatérielles telles que les conseils ou les
concessions de droits de propriété littéraire ou industrielle.

La question qui se pose est de savoir si la transmission sur les réseaux d’un logiciel,
d’informations, de livres ou de disques numérisés, de fichiers informatiques, etc. constitue
une vente ou une prestation de service supportant une retenue à la source. Cette difficulté,
pendante, ne pourra être résolue que dans le cadre d’accords internationaux.

2. La TVA

La distinction fondamentale en matière de TVA est celle qui oppose la vente de bien à la
prestation de service. La livraison d’un bien matériel qui a été commandé sur les réseaux est
aisément traçable et ne pose donc pas de difficulté pour le commerce électronique.

A) Les fournitures immatérielles

Par opposition, la fourniture en ligne de fichiers numériques (logiciels, fragments de bases de


données, films, photographies, musique téléchargeables sur l’Internet) par une entreprise
française à un consommateur final situé en dehors de l’Union européenne peut ne pas laisser
de trace. Constitue-t-elle
une livraison de bien ? – dans ce cas l’opération sera exonérée comme une exportation ;

une prestation de service immatérielle ? – celle-ci sera taxée en France.

En outre, en matière de prestation de service, une sous-distinction essentielle oppose les


prestations matériellement localisables (art. 259 A) et les prestations immatérielles (259 B du
CGI). Pour ces dernières le champ d’application territorial de la TVA relève de règles
spécifiques qui ne dépendent pas seulement du lieu d’établissement du prestataire. À laquelle
de ces catégories ressortit ainsi le téléchargement d’un fichier précieux ou d’un programme
coûteux qui peut ne pas laisser de trace ?

Selon le cas c’est l’article 259 A (taxe due par le prestataire) ou 259 B (taxe due par le
preneur imposable en France) qui s’applique. De nombreuses discussions ont ainsi eu lieu
pour savoir dans quelles catégories devaient être rangées les différentes familles de logiciels
(progiciel, logiciels spécifiques, etc.). Il semblerait que la doctrine administrative, suivant en
cela la doctrine universitaire, considère que la totalité du commerce en ligne de biens
immatériels doit être classée dans la catégorie des « traitements de données et informations »
clairement placés par l’article 259 B dans les prestations immatérielles.

S’ajoute le fait que les entreprises étrangères non établies en France qui y réalisent des
opérations assujetties à la TVA sont tenues de faire accréditer auprès du service des impôts un
représentant fiscal établi en France qui s’engage à remplir les formalités et à acquitter la TVA
à leur place. Là encore, on constate que, compte tenu de la délocalisation du Net, beaucoup
d’entreprises de pays tiers, et pas seulement celles situées dans des paradis fiscaux, omettent
de se conformer à cette obligation.

B) Conséquences

Cette opposition marquée entre produits culturels sur supports tangibles et produits sous
forme numérisée n’a pas tardé à montrer son caractère excessivement systématique : par un
arrêt du 5 juin 2002 (CE du 5 juin 2002, no 232392, Société Havas Interactive clic), le
Conseil d’État a considéré que le bénéfice du taux de TVA réduit à 5,5 % applicable aux
livres doit être refusé (...) à tout ouvrage numérique sur support électronique (cédérom), ce
taux ne trouvant finalement à s’appliquer qu’aux « livres-papier » car seuls les ouvrages
imprimés peuvent être qualifiés de « livres »...

Cette décision doit être critiquée car elle fait passer la division sur supports matériels en plein
milieu des produits culturels, ce qui ne peut que troubler gravement la sécurité du commerce
électronique.

C) Établissement stable

La question de l’établissement stable se repose donc cette fois-ci pour le preneur. Il n’y a pas
de nécessité à ce que la définition d’établissement stable soit la même pour les impôts directs
ou les impôts indirects, même si ce sont les mêmes considérations de difficultés
géographiques qui introduisent une gêne pratique. La notion d’établissement stable peut être
beaucoup plus souplement entendue pour les impôts directs ; c’est d’ailleurs ce qu’a fait un
arrêt récent de la CJCE (17 juill. 1997, Aro Lease BV)
Chapitre VIII

Preuve et signature électroniques

Xavier Linant De Bellefonds

Dans Le droit du commerce électronique (2005), pages 85 à 109

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Dans tout commerce, sauf lorsque les sommes en jeu sont dérisoires (distributeurs de boisson par
exemple), des preuves doivent pouvoir être « préconstituées » aux fins suivantes :

preuve de la nature du bien ou du service commandé mise en œuvre de la garantie ;


contestation relative au paiement état de charges ou défraiements divers, etc.

Dans le commerce traditionnel, la plupart des preuves se retrouvent sur papier (factures,
correspondances, etc.). Mais le commerce électronique, du moins dans sa forme la plus épurée,
aboutit à la suppression du papier. Il en résulte deux questions :

Dans quelle mesure les traces informatiques (fichiers en cours, « logs », listes, archivages matériels
ou logiciels, etc.) peuvent-elles être considérées comme des preuves au sens juridique du terme,
c’est-à-dire des documents propres à établir devant le juge la réalité des affirmations de celui qui
s’en prévaut à l’encontre de son contradicteur ?

Dans quelle mesure la cryptographie (cryptologie), qui accroît la sécurité physique des données
transmises et archivées, et par conséquent la fiabilité matérielle des preuves informatiques, peut-elle
être utilisée dans le commerce électronique, en dépit des risques de trafics illicites que leur
couverture favorise ?

I. Commerce électronique et droit de la preuve

La rédaction d’un écrit signé est une règle de prudence pour toutes les conventions importantes :
une preuve littérale est ainsi constituée en vue d’une contestation éventuelle. Cette preuve littérale
n’est pas dans la logique du commerce électronique qui tend, soit à multiplier les engagements
répétitifs qui ne donnent pas lieu à la rédaction d’un écrit, soit à fixer l’information sur des types de
supports plus ou moins éloignés des écrits traditionnels et difficilement « assimilables » par le droit
classique de la preuve (disques durs, bandes magnétiques, microfilms, etc.).

Le droit traditionnel de la preuve a donc été doublement « défié » dès les années 1980 par le
développement de l’informatique et de son prolongement que constituent les réseaux ouverts, plus
que par toute autre technique moderne.

1. Préliminaires

La valeur probante des documents informatiques n’est pas à confondre avec la preuve des usages
informatiques, ni avec la preuve de faits en relation avec l’activité informatique.

A) Preuve des usages du commerce électronique

L’usage est une clause sous-entendue et non une règle d’observance générale tirant son autorité de
la tradition. L’usage est souvent difficile à séparer de la tradition ; en revanche, en informatique où
aucune tradition n’existe, même de courte durée, cette distinction est aisée à mettre en œuvre.

À la différence de la coutume qui ne se prouve pas, l’usage doit être prouvé lorsque son existence est
discutée. Cette preuve peut se faire par tous moyens : témoignages, parères, avis de spécialistes et
professionnels de l’informatique.

B) Preuve des faits en relation avec le commerce électronique

Dans de nombreux contentieux, il incombe au créancier d’une obligation de prouver l’inexécution de


celle-ci (logiciel inopérant, système sous-dimensionné, etc.). Les questions de preuve factuelle
peuvent être très délicates et nécessiter l’intervention d’un expert, mais il ne s’agit pas d’un
problème tenant à la nature informatique d’un mode de preuve.

C) Liberté de la preuve en matière commerciale

Les difficultés relatives à la réception par le droit des traces et documents informatiques pouvant
servir de preuve ne concernent que le droit commun de la preuve. En effet, en matière commerciale
la preuve est libre, ce qui signifie que tous les modes de preuve sont recevables sous le contrôle du
juge. Cette observation ramène le problème de la « preuve informatique » à de justes proportions :
de très nombreuses transactions ne sont pas intéressées puisqu’elles ont lieu entre commerçants
(B2B). Mais évidemment cela ne saurait concerner le B2C puisque, dans la grande majorité des cas, le
client ne sera pas un commerçant : dans de nombreux secteurs en plein développement, les actes
sont mixtes, ou purement civils (assurances, banque, télématique grand public, etc

Il convient, dans un premier temps de rappeler en quoi notre philosophie de la preuve pouvait être,
jusqu’à une date récente, réfractaire aux traces informatiques et, dans un deuxième temps, de
signaler les évolutions advenues pour contourner ces difficultés.

2. Le commerce électronique et la philosophie classique de la preuve civile

Les questions à examiner dans cette section sont les suivantes :

Quelles sont, d’après la loi, l’admissibilité et la valeur probante des traces informatiques pour
prouver la réalité d’un fait ou préconstituer la preuve d’un acte ?

Dans quelle mesure est-il possible d’écarter conventionnellement les règles légales pour donner
plus de valeur probante aux différents états informatiques ?
A) La preuve légale et l’informatique

Notre droit distingue les faits juridiques qui sont des événements ou des actions indépendantes de
toute intention juridique et les actes juridiques (une commande, un paiement) qui sont des
manifestations de volonté visant à créer ou éteindre une obligation.

Les faits juridiques peuvent être prouvés par tous moyens (système de la preuve morale ) : le
document informatique est donc admis comme preuve des faits juridiques ; les difficultés matérielles
de récupération de traces informatiques se présenteront sans aucun doute, notamment pour l’expert
ou l’officier de police, mais il n’y aura pas d’obstacle juridique à les admettre.

En revanche les actes juridiques ne peuvent pas être prouvés par tous moyens : c’est le système de la
preuve légale (à l’origine art. 1326 et 1341 du Code civil) qui exige la présentation d’un écrit signé
pour toute transaction supérieure à 800 €.

Pourquoi ce système contraignant ? Les fondements en sont multiples : il faut faciliter le travail du
juge civil, le procès est la chose des parties, tout acteur raisonnable doit se préconstituer une preuve
pour les transactions importantes, ceux qui s’engagent à la légère sont sanctionnés par la nécessité
de recourir à des modes de preuve plus incertains, etc.

Une semblable rigidité est acceptable parce que les règles sur la preuve ne sont pas d’ordre public et
peuvent donc être aménagées par les parties. De plus, avant que l’informatique ne vienne supplanter
le papier dans des secteurs de plus en plus nombreux, les avantages de ce dernier en termes de
sécurité outrepassaient largement ses inconvénients en termes de lourdeur.

Or l’informatique, et singulièrement celle qui sous-tend les réseaux, ne paraît pas à même de fournir
spontanément les mêmes avantages. En quoi consistent ces avantages, essentiellement
sociologiques et revalorisés par le consumérisme du droit contemporain ?

B) Les supériorités du papier sur l’informatique

Le système probatoire traditionnel est assorti de fonctions rassurantes :

L’écrit assure la fonction de mise en alerte. – Dans le système traditionnel la contrainte de l’écrit a
une face positive : celui qui s’apprête à contracter prend la mesure de son engagement par la
rédaction d’un écrit (instrumentum) qui extériorise son acte intellectuel (negotium). Or, dans
l’informatique et particulièrement les architectures client-serveur telles l’Internet, les facilités du «
cliquage » balayent cette distinction.

Le papier est un support qui fournit des garanties. Dans les textes, les qualités essentielles que doit
présenter un document de preuve original sont : être fidèle (à lui-même) et durable (au moins le
temps d’une génération). Or, autant l’écrit traditionnel, en impliquant un support matériel, possédait
d’emblée ces deux qualités, autant le propre de l’informatique est de les exclure : le document
informatique ne recherche pas la stabilité de l’aspect et n’est pas fait pour durer physiquement.

a) La durée

Il serait inapproprié de considérer que l’inscription d’une information sur un disque lui confère la
moindre durée : les informations sont constamment réécrites d’une partie d’un disque à l’autre pour
optimiser les taux d’encombrement. De même, les protections logicielles contre l’écriture et
l’effacement sont précaires. Elles ne sont valables qu’au niveau de la couche applicative : en théorie,
le gestionnaire (humain) de la couche d’exploitation peut faire sauter les verrous.

Pour rendre un document informatique durable, il faut le sortir de la chaîne des traitements
(inscription sur un cédérom, sortie microfilmée, bande plombée, etc.), autrement dit l’archiver, c’est-
à-dire échapper à l’informatique en temps réel qui est notamment celle de l’Internet et de ses
déclinaisons : Intranet, accessible aux seuls membres de l’entreprise, Extranet, accessible aux
partenaires de l’entreprise, Outnet, accessible aux fournisseurs potentiels de l’entreprise, etc.

b) La fidélité

Ce terme a deux significations : « non-altérabilité des contenus », certes, mais aussi : « permanence
de la forme » :

sur la question de la sécurité des contenus les discussions paraissent dépassées : désormais
l’informatique permet de fiabiliser la transmission de fichiers jusqu’à la sécurité « absolue »
(protocoles et chiffrages) ;

de même, la question de la permanence des formes visuelles est actuellement posée : la rédaction
d’un écrit présente un avantage pour lequel l’informatique ne fournit pas de substitut. Les auteurs
d’un document de portée juridique, lorsqu’ils sont contraints à y revenir, le reconnaissent d’abord
par son aspect (volume, en-tête, type de caractère, nombre de pages, paraphes paginaux, signature
terminale, etc.) et mémorisent l’emplacement physique des mentions essentielles, en sorte qu’un
simple coup d’œil vérifiant la stabilité de la forme emporte pleine confiance sur l’intangibilité du
fond. En informatique, au contraire, la notion même de mise en page physique stable n’existe plus.

C) Les règles inconfortables pour les architectures client-serveur

Il est clair que toutes les applications basées sur la technique informatique, et l’Internet est la plus
transcendantale, s’accommodaient mal de ces règles :

bien que rien ne s’opposât à ce qu’un écrit n’ait pas de support matériel, une trace informatique
pouvait difficilement être assimilée sans texte à l’écrit tel que son concept sous-tend notre système ;
en informatique, il n’y a pas de véritable différence entre original et copie, et donc la notion de copie
ne pouvait gérer la question de façon satisfaisante les facultés de se dispenser de preuve littérale
devaient être interprétées restrictivement ; or la technique informatique a vocation à devenir un
environnement non exceptionnel ; en conséquence la trace informatique d’une transaction ne
pouvait guère avoir une valeur supérieure à celle d’un commencement de preuve par écrit tel qu’il
est envisagé par l’article 1347, alinéa 1, c’est-à-dire que, techniquement, le « gros » de la preuve
restait à administrer avant qu’une loi importante, la loi du 13 mars 2000, n’introduise une adaptation
radicale dans notre droit.

3. L’adaptation de la preuve légale au commerce électronique

La loi du 13 mars 2000 et son décret d’application du 30 mars 2001 ont introduit une réforme
considérable.
A) Invention de l’écrit numérique

L’esprit de la loi du 13 mars 2000 repose tout entier sur une assimilation : article 1316-1 : « – L’écrit
sous forme électronique est admis en preuve au même titre que l’écrit sur support-papier, sous
réserve que puisse être dûment identifiée la personne dont il émane et qu’il soit établi et conservé
dans des conditions de nature à en garantir l’intégrité. »

Cette assimilation permet de récupérer toutes les sécurités instituées par le droit depuis le Code civil
en les extrapolant à une réalité nouvelle. En revanche, une trace informatique, pour avoir la valeur
d’un écrit numérique, doit se conformer à un certain nombre d’exigences.

La solution a consisté à reconnaître aux documents informatiques un statut stable décalqué de celui
de l’écrit traditionnel et non dérivé au coup par coup par assimilation incertaine, ce qui était le cas
antérieurement. Il existe ainsi désormais un « écrit numérique », lequel peut être porteur d’une
signature électronique. La trace informatique a alors le caractère d’une preuve autonome et non
d’un simple commencement de preuve par écrit.

B) Qualités exigées de l’écrit numérique

La loi du 13 mars 2000 a fait sauter un blocage important en optant pour une philosophie aussi
simple qu’audacieuse : définir un concept de l’écrit suffisamment abstrait (une suite de signes, «
quels que soient leur support et leurs modalités de transmission », article 1316-1 Code civ.) pour que
l’écrit traditionnel (c’est-à-dire l’écrit-papier) et l’écrit électronique (c’est-à-dire en l’état actuel les
données magnétiques avant que d’autres ne soient inventées) en soient des versions également
admissibles par le droit probatoire.

Ainsi tout le droit de la preuve dégagé par une longue jurisprudence conserve-t-il son utilité,
notamment pour la défense des intérêts des parties supposées les plus faibles et l’écrit électronique
doit-il se conformer aux exigences fonctionnelles anciennement obtenues par l’écrit-papier.

Cette transposition n’est pas en réalité simple et la jurisprudence ainsi que la pratique juridique
devront ainsi définir ce que sont les transposés électroniques d’institutions telles que la formalité du
double original, etc.

C) Les documents électroniques susceptibles de constituer des preuves

Les états informatiques auxquels il peut être fait appel en tant qu’éléments de preuve ne peuvent
être recensés exhaustivement étant donné le caractère évolutif de la technique ; on citera comme
états :

les écrans ;

les listes d’imprimante ;

les e-mails ;

et comme supports de ces états :

les « hard copies » d’écran ;


les listes en sortie d’imprimantes ;

les microfilms COM (Computer Output Microfilm) ;

les supports optiques ;

les bandes et disques magnétiques ;

les cédéroms ;

les mémoires flash, etc.

Ces différents documents seront des preuves civiles pour peu que puisse être dûment identifiée la
personne dont ils émanent et qu’ils soient établis et conservés dans des conditions de nature à en
garantir l’intégrité. Le système de la signature électronique examiné plus loin permettra d’établir ces
qualités.

D) Admissibilité et valeur probante des documents informatiques

Les textes ont fixé un seuil de discrimination à 800 € qui constitue une valeur arbitraire mais réaliste
par rapport aux nécessités de la vie des affaires. La plupart des cas litigieux tant en monétique qu’en
télématique, c’est-à-dire toutes les transactions assistées par ordinateur, vont porter sur une
succession de petites transactions inférieures à ce seuil.

La voie électronique ne va-t-elle pas permettre, de façon incontrôlable, le fractionnement des


transactions importantes en multiples transactions inférieures audit seuil ? Quid si le montant global
d’une série de créances impayées dépasse les 800 € par exemple ? La réponse est dans la loi qui
dispose que « si dans la même instance, une partie fait plusieurs demandes, dont il n’y ait point de
titre par écrit, et que jointes ensemble elles excèdent la somme prévue à l’article 1341, la preuve par
témoins ne peut être admise, encore que la partie allègue que ces créances proviennent de
différentes causes ». Dans ce type de questions la jurisprudence a une conception très large de la
différence de causes : par exemples différents paiements effectués par le titulaire d’une carte.

E) Écrits informatiques et documents informatiques ordinaires

Sachant que le droit de la preuve établit un classement bien particulier entre les écrits (papier ou
électroniques) qui sont signés, les copies, les commencements de preuve par écrit et les
présomptions, dans quelle catégorie faut-il ranger les documents informatiques ?

La réponse sera désormais la suivante : ou le document informatique répond aux conditions posées
par la loi, savoir « que l’auteur de l’écrit puisse être dûment identifié » et que l’écrit soit « établi et
conservé dans des conditions de nature à en garantir l’intégrité », il vaut alors comme preuve de
premier rang ;

ou le document informatique ne répond pas à ces conditions ; il ne peut alors au mieux être
considéré que comme une copie ou un commencement de preuve par écrit.

L’un des effets logiques de la loi du 13 mars 2000 est en effet de vider de leur sens les efforts
antérieurement proposés par jurisprudence et doctrine pour retrouver dans l’informatique des
substituts au papier.

La question des croisements reste à poser : quelle est la valeur d’un état informatique revêtu d’une
signature manuscrite ?

quelle est la valeur d’un écrit-papier signé informatiquement ?


Le premier cas ne pose pas de difficulté de principe. Pour apposer une signature manuscrite, il faut
un support matériel supposant que le signataire ait pu prendre globalement connaissance du
contenu avant de signer : il semble bien que seules les listes d’imprimantes et les hard copies d’écran
soient dans ce cas, à l’exception des supports magnétiques ou optiques. Dans ces deux hypothèses
les documents vaudront comme écrits-papier.

Le second cas est plus complexe : il faut que l’écrit-papier ait été transformé en une image
informatique (.PDF ou.BMP).

Sinon nous sommes dans un cas qui rappelle la griffe : la griffe ou reproduction automatique d’une
signature numérisée, qui n’est d’ailleurs guère utilisée par les non-commerçants, n’étant tout au plus
qu’une copie de signature, ne peut servir à donner le caractère d’un original à quelque document
que ce soit sauf exception prévue par la loi.

F) Documents informatiques et commencement de preuve par écrit

Le droit de la preuve s’assouplit lorsqu’il existe un commencement de preuve par écrit, c’est-à-dire
l’équivalent « d’actes écrits qui émanent de celui contre lequel la demande est formée et qui rendent
vraisemblable le fait allégué ». Les documents informatiques peuvent être concernés de deux
manières :

a) ils peuvent, sans conteste, constituer le complément de preuve qui doit compléter le
commencement de preuve par écrit ;

b) ils peuvent aussi, lorsqu’ils répondent à la définition légale, constituer des commencements de
preuve par écrit. Il faut pour cela : ils peuvent aussi, lorsqu’ils répondent à la définition légale,
constituer des commencements de preuve par écrit. Il faut pour cela : qu’ils se présentent sur un
support qui les rende directement intelligibles ; qu’ils aient été créés antérieurement à la
contestation ; cette antériorité pourra être établie par une date d’enregistrement ou d’expédition, un
ordre relatif, etc. ;

qu’ils émanent de la partie contre laquelle ils sont allégués ; cette troisième condition limite
fortement la prise en compte des documents informatiques en tant que commencement de preuve
par écrit car, dans la plupart des cas qui se présentent en pratique, ces documents sont créés
unilatéralement par les personnes morales qui cherchent à s’en prévaloir (banques, assurances,
organismes et services publics) ; il s’agit, en revanche, d’une possibilité relativement favorable aux
simples particuliers.

La jurisprudence a élargi la notion de commencement de preuve par écrit en reconnaissant cette


qualité à des éléments qui ne sont pas des écrits au sens strict : il en est ainsi, par exemple, de
l’enregistrement magnétique analogique, qui contient des paroles. Est-il, dans cette ligne, possible
d’envisager qu’un enregistrement magnétique puisse être considéré comme un commencement de
preuve par écrit en profitant de cette définition large ? La chose n’est pas sûre, l’enregistrement
magnétique n’a pas la même tangibilité que l’enregistrement de la parole et n’est donc pas de nature
à entraîner la conviction du juge d’une façon aussi directe, bien que, dans un cas comme dans l’autre,
il soit nécessaire de passer par un appareil, magnétophone ou ordinateur, pour prendre
connaissance du contenu de l’enregistrement.

Peut, en revanche, être considérée comme un commencement de preuve par écrit la « bande-journal
» d’un terminal qui fixe et date, d’une façon même simplement relative, l’ensemble des opérations
effectuées ou des données recueillies à partir de ce terminal : le juge pourra admettre, jusqu’à
preuve du contraire, que 1’opération ayant donné lieu à contestation s’est bien déroulée, puisqu’elle
a été enregistrée. De même, un télex pourra constituer un commencement de preuve par écrit, à
condition que celui qui s’en prévaut établisse au préalable qu’il émane effectivement de celui à qui il
est opposé.

4. Conventions relatives à la preuve informatique

A) Licité des conventions

Devant les difficultés qui risquent de surgir en matière de preuve, les contractants peuvent envisager
que certains résultats de traitement informatique constitueront la preuve des opérations intervenues
entre elles, par exemple en matière de guichet automatique de banque.

Dans quelle mesure les parties, afin de tenir compte des nécessités de l’informatiques sont-elles en
droit de déroger, par des conventions particulières, aux règles légales, lorsque les possibilités de
celles-ci demeurent insuffisantes ?

Le principe est que les règles du droit de la preuve ne sont d’ordre public que lorsque la loi a prescrit
une réglementation spéciale pour la preuve de certains faits, par exemple l’état ou la capacité des
personnes devant les administrations : seul un extrait d’acte de l’état civil peut avoir valeur de
preuve.

Les règles de preuve peuvent donc être aménagées conventionnellement, ce qu’est venu confirmer,
si un doute subsistait encore, la loi du 13 mars 2000 (Code civ., art. 1316-2) : dans le contrat qui
définit quel sera le contenu de leurs obligations réciproques, les parties peuvent aussi décider
comment sera prouvée l’exécution de celles-ci.

B) Objet des conventions

Les parties peuvent convenir que la preuve testimoniale sera admise entre elles pour établir la
création ou l’extinction de leurs obligations réciproques. L’usage, d’un commun accord, d’un système
informatique pour la réalisation d’opérations juridiques entre-t-il dans ce cas ? Cette analyse est
possible, encore faut-il ne pas retomber dans la problématique des contrats d’adhésion : le client
d’un grand service public n’est pas en mesure d’exiger une facturation manuelle pour son cas
particulier, et donc son accord pour l’aménagement mutuel des règles de preuve est quelque peu
formel.

Par le biais des conditions générales de vente ou d’entreprise « acceptées » contractuellement il est
envisageable d’étendre l’article 25 du Code de commerce à des non-commerçants : preuve par
présomption et factures.

Les conventions relatives à la preuve informatique portent non seulement sur l’admissibilité, mais
aussi sur la force probante du procédé de preuve, par exemple « telle sortie d’ordinateur pourra
servir de preuve avec la valeur d’un écrit ».

5. Moyens juridiques de prévention et de solution relatifs à la preuve informatique

De nombreuses méthodes peuvent être développées pour diminuer les risques inhérents au
caractère immatériel et souvent unilatéral de la preuve informatique conventionnelle. Il s’agit
notamment : du dédoublement des moyens de preuve, de l’organisation de certaines procédures et
de la prise en charge par les professionnels du risque de contestation.

A) Dédoublement des moyens de preuve

– Délivrance d’un reçu aux guichets automatiques permettant la contestation immédiate.


– Maintien de la signature manuscrite de la facture aux « terminaux - points de vente » et
mémorisation des opérations dans la carte, en parallèle avec la mémoire de l’ordinateur, en matière
de monnaie électronique, etc.

B) Organisation de procédure de règlement

– Création de circuits de réclamations adaptés qui n’alourdissent pas excessivement les structures
des entreprises.

– Admission de délais de réclamation avant de considérer les opérations comme définitivement


effectuées.

C) Prise en charge du risque de contestation

Les professionnels (banquiers, etc.) doivent assumer la charge essentielle des divers coûts de
prévention et de correction pour les différents risques introduits par les nouveaux systèmes
transactionnels.

I. Commerce électronique et signature électronique

On pourrait penser, ce qui serait une grave erreur, que la signature électronique est à l’écrit
électronique ce que la signature manuscrite est à l’écrit-papier. On en déduirait ainsi sommairement
que l’acte sous seing privé électronique est pleinement accompli dès lors qu’un document
électronique est immédiatement suivi d’une signature elle-même électronique.

Ce serait nier toute l’importance du support-papier dans le mécanisme de l’écrit classique : celui-ci
confère l’assurance que la signature qui s’y trouve apposée manifeste l’adhésion de son auteur au
contenu de l’acte, car la signature et le contenu du document se trouvent sur le même support. La
fonction d’intégrité est ainsi garantie par la matérialité du papier.

Rien de tel ne se produit en électronique ; la liaison « contenu du document - signature » doit être
assurée logiciellement. Toute utilisation d’un semblable document doit donner lieu à la création d’un
objet informatique qui soit le produit univoque d’une fonction de deux paramètres au moins : le
fichier du document et le fichier de la signature. La meilleure façon d’y parvenir est de créer un «
condensat », lui-même acheminé en tant que tel. S’il y a congruence entre le contenu du message et
la signature, d’une part, et le condensat, d’autre part, alors le destinataire du message sait que la
signature concerne bien ledit message.

La conclusion est qu’il ne peut y avoir d’acte sous seing privé électronique sans mise en œuvre d’un
algorithme de calcul répondant à un minimum de fiabilité.

1. Signataire manuscrit et signataire électronique

Le propre de la signature manuscrite, sous réserve des imperfections qu’on peut lui reprocher dans
cette fonction et notamment la facilité (relative) avec laquelle il est possible d’imiter la signature
d’autrui, est de permettre d’identifier plus ou moins directement son auteur.

Une signature électronique, abstraite, peut être mise en œuvre par n’importe quelle personne. D’où
la nécessité absolue d’organiser une vérification de provenance, un système de certificat, qui ne peut
valablement être assumée que par un tiers à la transaction concernée : ce sera le tiers certificateur.

La conclusion est qu’il ne peut y avoir d’écrit électronique valant acte sous seing privé qu’à la
condition que les éléments constitutifs de l’acte ou transitent par un tiers ou donnent lieu à la
possibilité de vérifier des certificats.
2. Le problème de l’acte authentique

De façon relativement improvisée, le Sénat a modifié le projet de loi qui lui était soumis en y ajoutant
que l’acte authentique pouvait être dressé sur support électronique. Une partie importante de la
doctrine regrette cette initiative qui repose sur l’idée fausse qu’entre l’acte sous seing privé et l’acte
authentique il n’y a qu’une différence de degré dans la force probante et non une opposition de
nature dans la manière dont il est créé.

Sa valeur repose en effet sur la constatation effectuée par l’officier d’état civil des énonciations qui
ont été faites en sa présence. Tant que les conditions de validité de l’acte authentique électronique
n’auront pas fait l’objet d’un aval par les juridictions supérieures, la plus grande prudence s’impose
dans ce domaine.

I. Commerce électronique et chiffrage

Nous utiliserons de préférence le terme de « cryptage » (« chiffrage », cryptographie) à celui de «


cryptologie » qui désigne plus précisément la science du cryptage. Pour autant le terme de «
cryptologie » est utilisé par les textes et la doctrine. La cryptographie est à l’heure actuelle le seul
moyen de sécuriser les messages passant dans les réseaux, qu’ils soient fermés ou à plus forte raison
ouverts lorsque leur teneur doit être gardée confidentielle. Mais c’est aussi une technique qui
permet de signer lesdits messages. En sorte que le chiffrage d’un document sécurise son contenu
comme son contenant.

Malheureusement la technique du chiffre (qui a beaucoup profité des récentes recherches


mathématiques) a été pendant longtemps considérée comme un moyen réservé aux autorités et
particulièrement aux autorités militaires. Les États ont longtemps été réfractaires à l’idée que des
personnes privées pouvaient en user, car le risque n’est effectivement pas négligeable que, sous le
couvert de la confidentialité ainsi obtenue, ne circulent des messages contraires à l’ordre public, aux
bonnes mœurs et même à la sécurité publique ou visant au blanchiment d’argent sale.

Pour autant sous la pression du phénomène Internet, et à l’instigation des États-Unis, une certaine
libéralisation pointe, mais il faut reconnaître que la France, à tort ou à raison, figure parmi les pays
encore les plus réticents, bien que la LCEN soit venue fortement libéraliser l’utilisation des moyens de
cryptologie.

1. L’utilisation des clés asymétriquess

L’application de la cryptographie la plus avancée et la plus utilisée à l’heure actuelle est l’utilisation
des clés asymétriques.

A) Les paires de clés

Les algorithmes de chiffrage asymétrique reposent sur la génération de bi-clés : chaque transmetteur
dispose ainsi d’une clé privée et d’une clé publique liées entre elles par une relation mathématique
utilisant un nombre source tellement grand qu’il n’est pas possible de déduire la clé privée de la clé
publique et inversement, compte tenu du caractère exponentiel de la complexité introduite par les
combinaisons possibles.

En revanche, une donnée chiffrée à l’aide de la clé privée pourra être déchiffrée par la clé publique et
inversement.

Comme leur nom l’indique, les clés privées restent secrètes, ce qui permet d’éviter la vulnérabilité
principale des systèmes anciens dans lesquels expéditeur et destinataires possédaient la même clé
(clés symétriques), ce qui supposait que la clé secrète avait été acheminée au moins une fois d’un
point à un autre, avec les risques inhérents à cette opération.

Le principe, sommairement exposé, est le suivant : le message électronique constitutif d’un


engagement doit aller de son expéditeur (celui qui informe) à son destinataire (le bénéficiaire de
l’information). Deux fonctions sont souhaitées : la confidentialité du contenu du message et
l’identification de l’émetteur du message (appelée authentification par les professionnels). En outre il
faut que le message n’ait subi aucune altération du fait de la transmission sur les réseaux ou de la
malveillance d’un tiers : c’est la vérification de son intégrité.

B) La confidentialité

Le destinataire de ce message va proposer sa clé publique à l’expéditeur afin que le message de ce


dernier soit chiffré à l’aide de cette clé. Le message subit ainsi une entropie qui fait qu’il ne peut plus
être déchiffré que par le destinataire, seul possesseur de la clé privée correspondante.

C) L’authentification

Pour autant, le message peut avoir été émis par un tiers de mauvaise foi puisque la clé publique est
disponible pour tout un chacun. Aussi le message doit-il être logiciellement marqué par la signature
de l’expéditeur ; cette signature aura été obtenue avec la clé privée de ce dernier. Une signature
chiffrée par un tiers à l’aide d’une autre clé, une fois soumise par le destinataire à l’opération de
déchiffrage à l’aide de la clé publique de l’expéditeur, ne pourra produire qu’un résultat incohérent.

D) L’intégrité

La technique visant à assurer l’intégrité d’un message consiste à réduire celui-ci à un « condensat »
(empreinte) qui est une information de longueur fixe obtenue à l’aide d’un algorithme réducteur, le «
hachage ». La comparaison de ce condensat au départ et à l’arrivée permet de garantir l’intégrité du
message, la moindre différence aboutissant à des condensats différents. On comprend qu’il ne soit
pas nécessaire que les condensats soient lourds.

E) L’équivalence fonctionnelle

Le chiffrage simultané du contenu de message et de la signature de son émetteur assure les mêmes
garanties que l’écrit-papier qui porte à la fois des énonciations et la signature de la partie qui assume
ces énonciations. On peut donc en théorie considérer que la signature électronique simple ainsi
utilisée assure la même solidarité entre énonciations et signataire. Toutefois, il est clair que les
parties intéressées ne sont jamais capables d’assurer l’archivage des messages avec une efficacité
identique : par exemple le soin apporté par un consommateur à l’archivage de ses messages peut
être considéré comme nul tandis que celui du fournisseur d’un service en ligne complexe sera
effectivement fiable.

F) La signature électronique sécurisée (avancée)

Pour ces différentes raisons (fiabilité, rapidité, équilibre contractuel), la signature électronique peut
accéder à un degré supérieur de fiabilité en devenant une signature sécurisée. La signature sécurisée
se traduit par l’intervention d’un certificateur qui gérera des certificats, attestant notamment que
telle clé publique est bien celle de tel acteur économique.

Le mécanisme triangulaire, évidemment plus complexe, sera alors le suivant, avec des variantes selon
ce que l’on souhaite chiffrer :
L’offre de certification est assez lourde juridiquement et sociologiquement pour ne s’adresser qu’aux
seuls professionnels entre eux. Toutefois, il est possible aux consommateurs, moyennant une
rétribution du service, de profiter de la couverture d’un professionnel.

2. Le statut du chiffrage

A) Les définitions légales du chiffrage

Tout logiciel ou matériel conçu pour transformer à l’aide de conventions secrètes des informations
ou des signaux clairs en signaux inintelligibles pour les tiers, ou à réaliser l’opération inverse,
constitue un moyen de chiffrage. La technique a beaucoup évolué depuis que les algorithmes à clef
publique de type RAS ont été mis au point et ces algorithmes tendent à supplanter les méthodes
basées sur la possession d’une clé privée par les deux partenaires intéressés à la communication.

Le message peut être chiffré par un logiciel ; par exemple le logiciel PGP ( « pretty good privacy » ) est
un logiciel de chiffrement utilisant pour partie les clés symétriques et pour partie les clés
asymétriques. La plupart des transactions sécurisées sur les réseaux utilisent de semblables logiciels.

Le message peut être matérialisé sur un support et ne pouvoir être reconnu que par un certain
matériel ; les cartes à microprocesseur (cartes à « puce ») comme les lecteurs capables de
reconnaître et d’inscrire des signaux sur ces cartes sont des matériels de chiffrage. Pour résumer, une
technique de chiffrage repose sur un codage dont le mode de déchiffrement doit être ignoré des
tiers.

On a pu se demander avec raison si les logiciels en langage objet, du fait de leur caractère
hermétique, n’entraient pas dans la catégorie des messages chiffrés. Il ne paraît pas douteux que, si
le langage source de ces logiciels ne peut être tenu à la disposition des autorités en cas
d’investigation, compte tenu du caractère imparfait des instruments de décompilation, ce logiciel
aura bien la qualité de message codé.

En revanche, un dispositif logiciel ou (ce qui est devenu plus rare) matériel, introduit dans un logiciel
pour en interdire la démultiplication au-delà de la copie de sauvegarde, n’est pas considéré comme
un moyen de chiffrage, mais comme une simple protection.

Un long chapitre de la loi LCEN intitulé « Moyens et prestations de cryptologie » traite de la sécurité
dans l’économie numérique dans les articles 29 et s. et poursuit la tendance à la libéralisation
entamée avec la loi du 29 décembre 1990.

B) La liberté du chiffrage d’authentification et de contrôle d’intégrité

Après que le droit français a été un exemple de tergiversation sur les possibilités d’accès aux
personnes de droit privé à la technologie du chiffrage – la loi du 29 décembre 1990 distinguait de
façon complexe les prestations et les moyens de chiffrage –, la loi LCEN déclare sans ambages (art.
30) : « L’utilisation des moyens de cryptologie est libre. »

Sont assurés de la même liberté la fourniture, le transfert depuis ou vers un État membre de la
Communauté européenne, l’importation et l’exportation des moyens de cryptologie assurant
exclusivement des fonctions d’authentification ou de contrôle d’intégrité.

C) Les règles propres au chiffrage de confidentialité


En revanche, lorsque le chiffrage n’assure pas exclusivement des fonctions d’authentification ou de
contrôle d’intégrité, qui sont les fonctions attendues de la signature électronique, le régime de la
cryptologie est celui de la déclaration ou de l’autorisation, plus contraignant, selon que la technique
est importée ou exportée. On retrouve là les restes de la cryptographie conçue comme une arme de
guerre (décret du 18 avril 1939 fixant le régime des matériels de guerre, armes et munitions).

1 / En cas d’importation du procédé est obligatoire la formalité de la déclaration préalable auprès du


Premier ministre. Dans cette hypothèse le fournisseur ou la personne procédant au transfert ou à
l’importation tiennent à la disposition du Premier ministre une description des caractéristiques
techniques de ce moyen de cryptologie, ainsi que le code source des logiciels utilisés.

2 / En cas d’exportation, les transferts de cette technologie vers l’extérieur du pays sont soumis à
autorisation du Premier ministre.

Dans les deux cas le Conseil d’État devra par décret déterminer les règles et conditions des
procédures d’autorisation ou de déclaration.

Outre le fait qu’elles sont assujetties au secret professionnel les personnes qui assurent des
prestations de chiffrage sont soumises à des règles de responsabilité objective (puisque le texte
énonce « nonobstant toute convention contraire » pour tous les préjudices résultant du chiffrage de
confidentialité).

Le profil de la responsabilité des certificateurs est explicité : une présomption de responsabilité


pèsera sur eux dans les cas suivants :

Les informations contenues dans le certificat, à la date de sa délivrance, étaient inexactes.

Les données prescrites pour que le certificat puisse être regardé comme qualifié étaient
incomplètes.

La délivrance du certificat n’a pas donné lieu à la vérification que le signataire détient la convention
privée correspondant à la convention publique de ce certificat.

Le cas échéant, l’enregistrement de la révocation du certificat n’a pas été effectué et porté à cette
information tenue à la disposition des tiers.

D) Sanctions

La sanction de ces règles est la possibilité pour le Premier ministre de mettre un terme à
l’exploitation du procédé par le retrait du système de cryptologie, des logiciels associés et des plates-
formes matérielles éventuellement utilisées, la fermeture des établissement où se sont trouvées
mises en œuvre ces techniques.

En outre des sanctions pénales sont prévues pour l’inobservation des règles administratives dont le
maximum est deux ans d’emprisonnement et 30 000 € d’amende. La responsabilité des personnes
morales est spécifiquement prévue.
Cela est sans préjudice du cas beaucoup plus grave où l’utilisation d’un moyen de cryptologie aurait
permis de commettre un crime qui donne lieu à diverses dispositions (nouvel art. 132-79 du Code
pénal) : ces mesures prévoient notamment un emprisonnement d’autant plus long que l’infraction
commise a été plus grave, ce qui peut aller jusqu’à la perpétuité.

E) Procédures d’investigation

Pour étudier les techniques de chiffrage, dans les hypothèses où les textes admettent que
l’administration en connaisse, des procédures d’investigation mettant en œuvre experts et policiers
sont prévues selon des modalités qui ne sont pas sans rappeler les investigations de contrefaçon.

Mis en ligne sur Cairn.info le 01/03/2010

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