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Proiect cofinanţat din Fondul Social European prin Programul Operaţional Sectorial Dezvoltarea Resurselor Umane 2007-2013

Investeşte în oameni!

Formarea profesională a cadrelor didactice


din învăţământul preuniversitar
pentru noi oportunităţi de dezvoltare în carieră

LANGUE FRANÇAISE
CONTEMPORAINE.
LA SYNTAXE
Elisabeta NICOLESCU

Program de conversie profesională la nivel postuniversitar


pentru cadrele didactice din învăţământul preuniversitar

Specializarea FRANCEZĂ
Forma de învăţământ ID - semestrul II

2011
© 2011 Acest manual a fost elaborat în cadrul "Proiectului pentru
Învăţământul Rural", proiect co-finanţat de către Banca Mondială,
Guvernul României şi comunităţile locale.

Nici o parte a acestei lucrări nu poate fi reprodusă fără acordul


scris al Ministerului Educaţiei, Cercetării, Tineretului şi Sportului.

ISBN 973-0-04103-2
Table des matières

TABLES DES MATIÈRES

Introduction 1
Listes des abréviations 4

A. Syntaxe de la phrase simple


1. Unités de l'analyse syntaxique. Catégories, rapports, relations 5

Les objectifs de l'unité d'apprentissage 1 5


1.1 L'objet d'étude de la syntaxe. Unités syntaxiques 6
1.1.1 Niveaux d'analyse et disciplines linguistiques 6
1.1.2 Unités syntaxiques hiérarchiques 7
1.2 La phrase – unité de base de la description syntaxique 8
1.2.1 Le concept grammatical de phrase 8
1.2.2 Le «modèle» syntaxique de la phrase 9
1.2.3 Les deux membres de la phrase noyau 10
1.2.4 Formes de surface d'une phrase 14
1.2.5 Phrase simple et phrase complexe 15
1.2.6 Subordination et phrase complexe 15
Test d'autoévaluation 15
1.3. L'expression linguistique des constituants de phrase 18
1.3.1 La notion de groupe syntaxique de mots 18
1.3.2 Fonctions syntaxiques à l'intérieur du groupe verbal 20
1.3.3 Conclusions sur la phrase (minimale et étendue) 20
Les clés du test d'autoévaluation 21
Test de contrôle 1 22
Références bibliographiques 23

2. Constituants obligatoires de la phrase nucléaire: le sujet et la prédication 24

Les objectifs de l'unité d'apprentissage 2 24


2.1 Le sujet et son expression 24
2.1.1 Notions introductives. Types de sujets 24
2.1.2 La réalisation linguistique du sujet 28
2.1.3 La place du sujet dans la phrase 32
Test d'autoévaluation 35
2.2 La prédication verbale 36
2.3 La prédication nominale 37
2.3.1 Termes de base de la prédication nominale 37
2.3.2 Les verbes attributifs 38
2.3.3 La réalisation linguistique de l'Attribut 39
2.3.4 Les valeurs sémantiques de la prédication attributive 40
2.4 L'accord avec le sujet dans la phrase à prédication verbale et nominale 40
Les clés du test d'autoévaluation 42
Test de contrôle 2 43
i
Table des matières

Références bibliographiques 44

3. Structure des constituants de phrase (i): la détermination du nom 45

Les objectifs de l'unité d'apprentissage 3 45


3.1 Le nom et sa détermination 46
3.1.1 La mise en discours du nom 46
3.1.2 La structure du groupe nominal 47
3.2 La réalisation linguistique des déterminants du nom 48
3.2.1 Déterminants du nom d'après leur type syntaxique 48
3.2.2 Déterminants du nom d'après leur sens 48
3.2.3 L'épithète. Le complément du nom. L'apposition 49
Test d'autoévaluation 51
3.3 La proposition relative 52
3.3.1 Définition et formation de la relative 52
3.3.2 Paramètres d'analyse d'une proposition relative 55
3.3.3 Les noms opérateurs d'une proposition conjonctive 65
Les clés du test d'autoévaluation 66
Test de contrôle 3 67
Références bibliographiques 68

4. Structure des constituants de phrase (ii): la syntaxe du verbe;


la syntaxe de l'adjectif et de l'adverbe 69

Les objectifs de l'unité d'apprentissage 4 69


4.1 Structure du GV d'après le type syntaxique du verbe pivot 70
4.2 Constructions intransitives. Sous-classes de verbes intransitifs 70
4.3 Construction transitives simples 73
4.3.1 Types de groupe verbal ayant comme pivot un verbe transitif 73
4.3.2 La double (ou la multiple) valence d'un verbe transitif 73
4.3.3 Construction avec verbes transitifs 74
4.4 Constructions transitives complexes: structures à verbe opérateur 78
4.4.1 Propriétés générales des constructions opératrices 78
4.4.2 Propositions complétives 80
Test d'autoévaluation 82
4.4.3 Sous-classes de verbes opérateurs 83
4.5 Groupe adjectival et groupe adverbial 85
4.5.1 Syntaxe de l'adjectif 86
4.5.2 Syntaxe de l'adverbe 87
Les clés du test d'autoévaluation 88
Test de contrôle 4 89
Références bibliographiques 90

5. Structure des constituants de phrase (iii): la pronominalisation 91

Les objectifs de l'unité d'apprentissage 5 91


5.1 Généralités sur la pronominalisation 92
5.1.1 La fonction substitutive des pronoms 92
5.1.2 Sous-classes de pronoms et leurs catégories grammaticales 93
5.1.3 La personne – catégorie grammaticale et référentielle 94
5.1.4 Le pronom personnel et la pronominalisation 96
5.1.5 La notion de pronom clitique 98
ii
Table des matières

5.2 La pronominalisation des principales positions syntaxiques 98


Test d'autoévaluation 105
5.3 Remarques sur la phrase minimale contenant des clitiques 107
5.3.1 Les pronoms personnels coréférentiels avec le sujet 107
5.3.2 Y et EN, substituts pour des groupes prépositionnels 108
5.3.3 Combinaisons de pronoms clitiques dans la phrase minimale 109
Les clés du test d'autoévaluation 112
Test de contrôle 5 112
Références bibliographiques 114

6. Les constituants facultatifs de la phrase: les circonstants 114

Les objectifs de l'unité d'apprentissage 6 114


6.1. Définition générale des circonstants 116
6.1.1 Réalisation linguistique des circonstants 117
6.1.2 Cumul des déterminations circonstancielles dans la phrase 117
6.1.3 Diversité sémantique des circonstants 118
6.1.4 Propriétés syntaxiques générales des circonstants 121
6.2. Types de circonstants 123
6.2.1 Classification générale 123
6.2.2 Une sous-classe hétérogène: le circonstant de manière 125
Test d'autoévaluation 130
6.2.3 Le circonstant temporel 131
6.2.4 Le circonstant spatial 133
Les clés du test d'autoévaluation 134
Test de contrôle 6 135
Références bibliographiques 136

B. Du modèle de la phrase aux énoncés de surface

7. Tours de phrase. La phrase modalisée 137

Les objectifs de l'unité d'apprentissage 7 137


7.1 La phrase modalisée: son statut énonciatif, logique et modal 138
7.1.1 Actes et modalités de discours 138
7.1.2 Modalités d'énoncé: phrase neutres ou marquées 140
7.1.3 Modalités superposées 143
7.2 Les modalités de phrase ou d'énonciation 145
7.2.1 La phrase assertive 145
7.2.2 La phrase interrogative 145
Test d'autoévaluation 152
7.2.3 La phrase impérative 153
7.2.4 La phrase exclamative 154
7.3 La modalité logique de la phrase : phrase affirmative/ négative 156
Les clés du test d'autoévaluation. 158
Test de contrôle 7 158
Références bibliographiques 159

8. De la phrase simple à la phrase complexe. Structure des énoncés de surface 160

Les objectifs de l'unité d'apprentissage 8 160

iii
Table des matières

8.1. La phrase complexe 161


8.1.1 Rapports syntaxiques dans la phrase complexe 161
8.1.2 Réalisation linguistique de la phrase complexe 163
8.1.3 Classification générale des phrases complexes 165
8.2. La phrase complexe réalisée par enchaînement syntaxique 167
8.2.1 La phrase complexe réalisée par juxtaposition 167
8.2.2 La phrase complexe réalisée par coordination 171
Test d'autoévaluation 174
8.3 La phrase complexe réalisée par enchâssement: la subordination 176
8.3.1 Proposition principale et proposition subordonnée 176
8.3.2 Critères de description des propositions subordonnées 176
8.3.3 Classification des propositions subordonnées 178
8.3.4 Subordonnées construites avec mot subordonnant 179
Les clés du test d'autoévaluation 180
Test de contrôle 8 181
Références bibliographiques 182

C. Syntaxe de la phrase complexe

9. La subordonnée circonstancielle temporelle 183

Les objectifs de l'unité d'apprentissage 9 183


9.1. Définition et valeurs de la phrase temporelle 184
9.2. L'ordre temporel et l'ordre séquentiel dans la phrase temporelle 186
9.3. Paramètres linguistiques dans la phrase temporelle 188
9.3.1. Mots subordonnants, introduisant la proposition temporelle 188
9.3.2. Sens de base et emploi des mots subordonnants temporels 194
Test d'autoévaluation 195
9.4. Principaux types de phrase temporelle: 196
– la phrase marquant le rapport d'antériorité 196
– la phrase marquant les rapports de simultanéité ou de postériorité 198
9.5. La subordonnée temporelle réduite 200
Idées à retenir 203
Les clés du test d'autoévaluation 203
Test de contrôle 9 204
Références bibliographiques 205

10. La subordonnée circonstancielle de cause 206

Les objectifs de l'unité d'apprentissage 10 206


10.1. Définition du rapport logique de cause 207
10.2 L'ordre temporel et l'ordre séquentiel 208
10.3 Réalisation linguistique de la proposition causale 208
10.3.1 Conjonctions et locutions conjonctives introduisant la cause 208
Test d'autoévaluation 216
10.3.2 Choix de la forme verbale (mode, temps) 217
10.3.3 Tours de phrase particuliers marquant la cause 219
10.3.4 La subordonnée circonstancielle de cause réduite 221
Idées à retenir 222
Les clés du test d'autoévaluation 223
Test de contrôle 10 224

iv
Table des matières

Références bibliographiques 225

11. La subordonnée circonstancielle finale 226

Les objectifs de l'unité d'apprentissage 11 226


11.1 Rapport logico-sémantique marqué par la proposition finale 227
11.2 Caractéristiques générales de la phrase à subordonnée finale 229
11.2.1 L'ordre temporel dans la phrase à proposition finale 229
11.2.2 L'ordre séquentiel dans la phrase à proposition finale 229
11.2.3 L'élément régissant une proposition finale 230
11.3 Réalisation linguistique de la proposition finale 234
11.3.1 Principales valeurs discursives 234
11.3.2 Mots subordonnants 234
Test d'autoévaluation 237
11.3.3 Choix du mode personnel dans la proposition finale 238
11.3.4 La subordonnée finale réduite à l'infinitif 239
Idées à retenir 243
Les clés du test d'autoévaluation 243
Test de contrôle 11 244
Références bibliographiques 245

12. La subordonnée circonstancielle consécutive 246

Les objectifs de l'unité d'apprentissage 12 246


12.1 La conséquence: rapport logique et argumentation discursive 247
12.2 Caractéristiques générales de la phrase exprimant une conséquence 248
12.2.1 Cohésion syntaxique et cohérence interprétative 248
12.2.2 L'ordre temporel et l'ordre séquentiel 250
Test d'autoévaluation 253
12.3 Réalisation linguistique de la proposition consécutive 254
12.3.1 Valeurs sémantiques de la proposition consécutive 254
12.3.2 Corrélatifs et mots subordonnants 255
12.3.3 Les tours de phrase exprimant une conséquence 259
12.3.4 La subordonnée consécutive réduite à l'infinitif 262
12.3.5 Choix du mode personnel dans la proposition consécutive 262
Idées à retenir 265
Les clés du test d'autoévaluation 266
Test de contrôle 267
Références bibliographiques 268

13. La subordonnée circonstancielle concessive 269

Les objectifs de l'unité d'apprentissage 13 269


13.1 Caractéristiques générales de la phrase à proposition concessive 270
13.2 Subordonnées concessives à mode personnel 274
13.2.1 La proposition concessive portant sur un fait réel 274
13.2.2 La concession hypothétique 277
13.2.3 L'opposition entre deux faits indépendants 278
13.2.4 Concessives qui portent sur l'identité d'un objet de discours
ou sur son indétermination qualitative/ quantitative 279
13.2.5 Concessives qui montrent l'exception et la restriction 283

v
Table des matières

Test d'autoévaluation 283


13.3. Les subordonnées concessives réduites 285
13.4 Autres formes d'expression de la concession 286
Idées à retenir 288
Les clés du test d'autoévaluation 288
Test de contrôle 13 289
Références bibliographiques 290

14. La subordonnée circonstancielle hypothétique (conditionnelle) 291

Les objectifs de l'unité d'apprentissage 14 291


14.1 Caractéristiques générales de la phrase conditionnelle 292
14.1.1 Rapport logico-sémantique d'hypothèse 292
14.1.2 L'expression de l'hypothèse: formes et valeurs 292
14.1.3 La systématique des types de phrase hypothétique 293
14.2 L'ordre temporel et l'ordre séquentiel dans la phrase conditionnelle 296
14.3 La réalisation linguistique de la phrase hypothétique 297
14.3.1 Moyens d'expression du rapport hypothétique 297
14.3.2 La conditionnelle introduite par la conjonction SI 298
14.3.3 La conditionnelle introduite par d'autres mots que SI 299
Test d'autoévaluation 301
14.3.4 Réalisations particulières de la phrase conditionnelle 308
Idées à retenir 309
Les clés du test d'autoévaluation 310
Test de contrôle 14 310
Références bibliographiques 311
Conclusion sur la phrase complexe 312

Bibliographie sélective 313

vi
Introduction

INTRODUCTION

Le cours de syntaxe française s'adresse aux étudiants de la


deuxième année. Il trouve sa place à côté des autres cours de
langue française, en particulier après le cours de Phonétique et
orthographe françaises et le cours de Morphologie.
Son objectif est de décrire les relations syntaxiques au niveau
de la phrase type et de l'énoncé réalisé.
Le cours comprend 14 unités d'apprentissage. Les six unités de
la première section sont consacrées à la phrase simple et s'occupent
des groupes: nominal, verbal, adjectival, adverbial, ainsi que des
fonctions syntaxiques structurées autour du pivot verbal de la phrase:
sujet, attribut, compléments et circonstants, et de la pronominalisation
de ces constituants.
Dans une section médiane, deux unités d'apprentissage
présentent les tours de phrase et la phrase modalisée, ainsi que la
mise en rapport des phrases dans des structures de coordination ou
de subordination.
La troisième section s'occupe de la phrase complexe, en
présentant dans six unités d'apprentissage les différentes
subordonnées circonstancielles: temporelle, causale, finale,
consécutive, concessive (oppositive), hypothétique (conditionnelle).
Un test d'évaluation est inséré dans chaque unité
d'apprentissage. Les espaces blancs à l'intérieur de ce test sont
réservés à votre intervention écrite. Pour vérifier vos réponses, vous
devez consulter la rubrique Clés du test d'autoévaluation.
Des instructions concernant la transmission des tests de contrôle
(étudiant ↔ tuteur) figurent en tête de chaque test. Vous trouvez ces
tests de contrôle à la fin des unités d'apprentissage.
L'évaluation finale de chaque étudiant au cours de syntaxe
sera concrétisée dans une note, moyenne calculée en prenant en
compte la note obtenue à l'épreuve écrite administrée lors de
l'examen final (qui a un poids de 60% dans la note pour l'évaluation
finale) et la note obtenue au contrôle continu (qui compte pour 40%
dans l'évaluation finale).
Chaque aspect syntaxique est décrit dans un paragraphe
thématique. Les exercices proposés se rapportent à l'une des règles
spécifiques; pour chaque type d'exercice, il faudra identifier avant tout le
problème syntaxique, ensuite se rapporter aux divisions thématiques de
chaque unité d'apprentissage, aux sous-divisions ou aux paragraphes
qui décrivent les règles dont dépend la solution de l'exercice. Parfois, la
solution des exercices est facilitée par la consultation d'un bon
dictionnaire de langue française, car les constructions syntaxiques ont à
la base un matériau lexical qui doit être maîtrisé. En particulier, les
dictionnaires de constructions verbales sont vivement recommandés,
1
Introduction

car ils font un recensement extensif des types de construction dont ce


cours de syntaxe ne présente que les plus importants.
Une unité d'apprentissage se propose avant tout de donner à la
question de grammaire traitée un certain «parcours de
problématisation»: une définition du phénomène syntaxique,
accompagnée d'une description analytique et d'une illustration qui se
veut sinon riche, du moins représentative; une explication des concepts
de grammaire et des critères de reconnaissance dans le texte du
phénomène grammatical étudié. En général, les notions théoriques sont
définies, expliquées et illustrées dans la première partie de l'unité
d'apprentissage, tandis que dans la seconde partie, ces notions devenant
opératoires, servent à décrire les différentes formes de réalisation
linguistique de la catégorie syntaxique qui fait l'objet d'étude de l'unité.
Le parcours explicatif commence donc par fixer les instruments
théoriques de la description syntaxique et continue par une
démarche de type analytique et classificatoire.
Comprendre les notions syntaxiques est tout aussi important
qu'enseigner la grammaire normative de la phrase. Les éléments de
théorie permettent de mémoriser et d'expliquer selon une logique
naturelle les nombreux faits de langue qui, en dehors d'un tel
appareil théorique, ne seraient qu'une immense collection de règles
grammaticales et d'exceptions, difficiles à mémoriser et à appliquer.
Ce cours de syntaxe se propose d'aider les apprenants à
développer leur pensée grammaticale, c'est-à-dire à se former l'habitude
d'une réflexion interprétative sur la langue étrangère et à soumettre au
raisonnement logique le fonctionnement du langage en général.
Pour donner au cours cette dimension formative, les concepts
de syntaxe sont parfois amplement définis, expliqués et illustrés, en
partant des notions de la grammaire traditionnelle (phrase, sujet,
prédication, attribut, complément, circonstant, etc.), redéfinies et
intégrées dans des réseaux terminologiques, conformément aux
théories modernes de la grammaire. La clé intégrative de toutes ces
notions se retrouve dans l'unité d'apprentissage no 1, qui présente la
structure de la phrase simple, ses niveaux et ses constituants, et dans
l'unité d'apprentissage no 8, qui fait une synthèse des moyens de
réalisation de la phrase complexe: juxtaposition, coordination,
subordination.
D'autres unités d’apprentissage contribuent aussi à l'intégration
d'une terminologie syntaxique cohérente: no 2, qui décrit les deux
membres de la phrase simple: le sujet et la prédication; no 5, unité qui
passe en revue toutes les fonctions syntaxiques de la phrase simple,
pour montrer la pronominalisation de ces fonctions; no 6, unité qui
présente l'ensemble des déterminations circonstancielles, constituants
facultatifs articulés à trois niveaux: sous la même prédication de la
phrase simple "étendue"; sous forme de modalisateur adverbial du
contenu de la phrase dans son ensemble; sous forme de subordonnée
circonstancielle, dans la phrase complexe.
Le cours de syntaxe vise aussi à fixer les connaissances sur les
formes linguistiques dans leur dynamique du discours. C'est pourquoi
une attention particulière y est accordée aux transformations d'une
2
Introduction

catégorie syntaxique à l'autre. Les énoncés attestés ne se réalisent


qu'assez rarement sous la forme canonique qui est enseignée dans les
livres de grammaire. Derrière la variété infinie des formes de surface, il
faut reconnaître un «modèle» abstrait, choisi parmi un nombre
relativement limité de structures syntaxiques élémentaires.
Afin d'atteindre cet objectif de systématisation et d'ouverture
vers le sens contextuel, chaque unité thématique propose de
prendre en compte:
– le plan des formes du langage, décrites en termes de
catégories grammaticales et de suites ordonnées de constituants;
– le plan de l'interprétation du discours, qui introduit une
explication visant la construction dynamique du sens contextuel, qui
met en jeu d'une part: les données toujours variables de la situation de
communication et, d'autre part: une donnée strictement délimitée par
les paramètres du sens associé à un type particulier de structure
grammaticale;
– le plan de la pratique des discours, permettant une
confrontation du modèle abstrait de la théorie grammaticale avec le
langage réalisé, attesté dans de courtes citations.
En effet, depuis le modèle grammatical enseigné par les manuels
jusqu'aux manifestations discursives authentiques, un grand nombre de
transformations, permutations, ellipses, substitutions, etc. exigent de la
part de celui qui interprète un énoncé une certaine capacité
d'abstraction qui lui permette de reconnaître le «modèle» grammatical
fondamental sous chaque manifestation du langage en situation.
Comprendre la mécanique de la langue, aussi régulière que les
rouages d'une horloge qui battent systématiquement l'heure, c'est
comprendre la richesse des langues en général et du français en
particulier, avec sa dynamique ininterrompue d'organisme vivant.

Bon travail !

3
Liste des abréviations

LISTE DES ABRÉVIATIONS

Adj : adjectif Préd : prédication


Adv : adverbe PS : passé simple
assert.: statut assertif de la phrase Qu : pronom relatif
ATTR : attribut Qu P : proposition relative
ATTR-O : attribut de l'objet que P : proposition complétive
ATTR-S : attribut du sujet S : sujet
CDT : conditionnel S–V : sujet antéposé (=ordre canonique du
Circ. : circonstant (=complément sujet dans la phrase)
circonstanciel) SBJ : subjonctif
Circ. cause : circonstant de cause TRel : transformation de relativisation
Circ. lieu : circonstant de lieu TPron : transformation de pronominalisation
Circ. manière: circonstant de manière TImpers.: transformation d'impersonnalisation
Circ. temps : circonstant temporel TPass. : transformation de passivation
Dt Adj : déterminant de l'adjectif var. : formes flexionnelles d'un mot (exemple:
Dt Adv: déterminant de l'adverbe lequel et var. = lequel, laquelle, lesquels,
Dt N : déterminant du nom lesquelles)
Dt V : déterminant du verbe V : verbe ou pivot verbal
excl. : statut exclamatif de la phrase VAttr : verbe attributif
fam. : langue familière Vcop : verbe copulatif (=verbe attributif dans
GAdj : groupe adjectival une structure équative)
GAdv : groupe adverbial Vintr : verbe intransitif
GN : groupe nominal Vsup : verbe support
GN0 : groupe nominal Sujet Vtr : verbe transitif
GPrép: groupe prépositionnel V–S : sujet nominal postposé
GV : groupe verbal V – Scl : inversion du sujet clitique
ibid. : (lat.) ibidem "même source vx. : vieux (emploi archaïque ou vieilli)
pour une citation"
IMP : imparfait
impér.: statut impératif de la phrase
impers.: statut impersonnel de la phrase
INF : infinitif Symboles
interr. : statut interrogatif de la phrase = : est identique, est le même
invar. : forme invariable ≠ : est différent, distinct
litt. : langue littéraire + : se combine avec
N : nom
→ : se réalise par
NANT : nominal antécédent
 : se réalise par (quand il y a aussi une
nég. : statut négatif de la phrase
transformation)
OD : objet direct
OI : objet indirect ←, ↵,→: est le déterminant de
OPrép: objet prépositionnel ←V →: double valence du V
P : proposition ⊃ : inclut ou implique
P-ant : participe présent  : est illustré par
PC : passé composé  : s'oppose(nt)
Pd N : prédéterminant du nom Ø : constituant nul
PH : phrase * : expression incorrecte
pop. : langue populaire (a-grammaticale, mal formée)
PP : participe passé

4
Unités de l'analyse syntaxique

Unité d'apprentissage 1

UNITÉS DE L'ANALYSE SYNTAXIQUE: CATÉGORIES, RAPPORTS,


RELATIONS

Sommaire page

Les objectifs de l'unité d'apprentissage 1 5


1.1 L'objet d'étude de la syntaxe. Unités syntaxiques 6
1.1.1 Niveaux d'analyse et disciplines linguistiques 6
1.1.2 Unités syntaxiques hiérarchiques 7
1.2 La phrase – unité de base de la description syntaxique 8
1.2.1 Le concept grammatical de phrase 8
1.2.2 Le «modèle» syntaxique de la phrase 9
1.2.3 Les deux membres de la phrase noyau 10
1.2.4 Formes de surface d'une phrase 14
1.2.5 Phrase simple et phrase complexe 15
1.2.6 Subordination et phrase complexe 15
Test d'autoévaluation 17
1.3. L'expression linguistique des constituants de phrase 18
1.3.1 La notion de groupe syntaxique de mots 18
1.3.2 Fonctions syntaxiques à l'intérieur du groupe verbal 20
1.3.3 Conclusions sur la phrase (minimale et étendue) 20
Les clés du test d'autoévaluation 21
Test de contrôle 1 22
Références bibliographiques 23

Les objectifs de l'unité d'apprentissage 1

Quand vous aurez parcouru ce chapitre et effectué les exercices, vous serez capables de:

• Être capable d'identifier la structure syntaxique élémentaire d'un énoncé de surface.


• Effectuer l'analyse syntaxique de la phrase minimale, pour découvrir ses
constituants obligatoires.
• Distinguer entre la phrase modalisée par un constituant énonciatif, de la phrase non
modalisée (de la phrase noyau).
• Reconnaître le type de la prédication dans une phrase: prédication verbale,
nominale, verbo-nominale.

5
Unités de l'analyse syntaxique

1.1 L'objet d'étude de la syntaxe. Unités syntaxiques

1.1.1 Niveaux d'analyse et disciplines linguistiques


L'unité de base de l'analyse linguistique est l'unité porteuse d'un
message logiquement complet: la phrase ou l'énoncé. À un niveau
supérieur, une phrase ou plusieurs entre lesquelles il y a une
L'unité syntaxique cohésion formelle constituent un texte si une cohérence de
de base : signification s'établit avec la situation de communication. À un niveau
inférieur de la phrase, il y a les constituants de phrase, qui sont des
la phrase (PH)
syntagmes (=séquences cohésives d'expressions) ayant une
ou l'«énoncé type» certaine fonction grammaticale dans la phrase. Les unités se
trouvant à un niveau encore plus bas que celui représenté dans la
phrase par le syntagme ou le groupe de mots fonctionnel sont du
ressort de l'analyse en morphologie, discipline qui décrit les mots en
présentant leurs formes variables dans le discours.
NIVEAUX Unités dans la chaîne verbale :
D'ANALYSE : 1. (–––––(–––(–––(––– (mots) –––) –––) ––––)–––––)
1. lexical
MORPHOLOGIE
2. groupes de mots (syntagmes fonctionnels)
2. syntagmatique SYNTAXE
3. phrastique 3. phrase
4. discursif ou LINGUISTIQUE TEXTUELLE
textuel
4. texte ou discours
PRAGMATIQUE
Située entre la morphologie et la linguistique textuelle, la syntaxe
apparaît comme une discipline de niveau intermédiaire, qui s'occupe
des agencements des expressions à deux niveaux:
– phrastique, l'unité étudiée étant la phrase (PH);
(Son caractère d'unité de base s'établit par l'intégration cohérente des
données informationnelles portées par la phrase avec les structures
cognitives de représentation du monde de référence extralinguistique).
Les macro-unités – syntagmatique, l'unité étudiée étant le syntagme ou le groupe
syntagmatiques, de mots ayant une identité fonctionnelle dans la communication. Il y
qui relient a deux types d'unités syntagmatiques (groupes de mots):
la plan du sens
et le plan formel • macro-unités ou constituants immédiats de la phrase: le groupe
d'une phrase: sujet et la prédication étendue, dans laquelle on retrouve la
prédication minimale (autour d'un verbe lexical) et les déterminations
• sujet, circonstancielles;
• prédication
• les groupes de mots fonctionnels: sujet1, pivot verbal, attribut,
• circonstances
compléments, circonstants; les syntagmes ayant ces fonctions
s'expriment par des groupes de mots organisés autour d'une catégorie
lexicale: groupe nominal, verbal, adjectival, adverbial (voir ci-dessous).
La syntaxe décrit les règles de la combinatoire grammaticale à un
niveau intégratif, celui de la phrase et des macro-groupes
(constituants immédiats), ainsi qu'à un niveau fonctionnel où l'on

1
Le sujet est un macro-groupe quand il est considéré comme l'un des deux membres de la phrase
(s'opposant à l'ensemble de la prédication), mais le sujet est aussi une fonction syntaxique (S) au niveau de
la phrase: [Notre premier professeurS de musique du collège]S portait un costume bleu nuit. Le terme de
sujet s'applique au macro-groupe souligné, mais aussi à la fonction S dans le nom central : professeur.

6
Unités de l'analyse syntaxique

retrouve les constituants de phrase, formés par l'agencement des


mots pour les différentes positions syntaxiques.

Exercice d'entraînement
1. Dans la phrase suivante, soulignez le pivot verbal et identifiez le macro-groupe du
sujet:
Dix à onze mille nouveaux docteurs arrivent sur le marché français chaque année.
[La Recherche, no 341/ 2001]
Groupe du sujet: ………………………………………………………………………………….
Pivot verbal de la prédication: …………………………………………………………...……
2. Divisez la même phrase en quatre constituants fonctionnels, S –V –Circ. lieu–Circ. temps:

……………………………………………………………………………………………………...
3. Faites l'analyse de la phrase suivante, en la divisant en cinq segments qui
correspondent aux constituants: Circ. temps – Circ. cause – S – V – OD.

Depuis le début des années 90, conséquemment à la chute du «Rideau de fer»,


les pays de l'Europe de l'Est connaissent une forte progression de leurs échanges
économiques avec l'Europe occidentale. [W/B, no 71/ 2000]

1.1.2 Unités syntaxiques hiérarchiques


Dans le tableau qui suit, l'objet d'étude de la syntaxe apparaît
précisément distingué de l'objet d'étude de la morphologie et des
différentes approches discursives qui s'occupent des conditions de
production des messages.
Compartiments Niveaux hiérarchiques d'analyse Disciplines
de la langue
analyse du discours
DISCOURS – texte (ou discours) linguistique textuelle
– énoncés réalisés, prélevés dans le discours pragmatique linguistique
– énoncé-type ou phrase, simple ou complexe (symbole: PH)
– constituants de la phrase: pivot verbal + sujet, attribut,
complément, circonstant (symboles: V, S, ATTR, OD, OI, syntaxe
GRAMMAIRE OPrép, Circ) de la phrase simple,
– groupes de mots à fonction syntaxique: (symboles: GV, de la phrase complexe
GN, GAdj, GAdv, GPrép)
LEXIQUE Catégories morpho-lexicales: lexicologie, morphologie
V, N, Adj, Adv

Il y a trois types hiérarchiques d'unités syntaxiques: (i) la phrase, unité de


communication, qui relie le plan énonciatif au plan représentationnel; (ii)
les constituants immédiats d'une phrase: le sujet et la prédication
(d'après certains auteurs, les circonstants aussi), qui sont des syntagmes
à double statut: formel et représentationnel; (iii) les constituants de
phrase strictement fonctionnels: sujet, attribut, complément, circonstant,
réalisés du point de vue linguistique par des groupes de mots ayant au
centre une catégorie lexicale (voir le tableau ci-dessus).

7
Unités de l'analyse syntaxique

1.2 La phrase – unité de base de la description syntaxique

1.2.1 Le concept grammatical de phrase


La phrase, unité de base de la description syntaxique, est une
séquence ordonnée de constituants immédiats, caractérisée par
unité et complétude structurale et fonctionnelle.
La phrase n'existe pas comme objet d'étude préalable à
l'analyse: elle est un objet théorique, construit par les grammairiens,
par suite de l'examen attentif d'un corpus.
Le corpus représente l'ensemble de produits verbaux issus
Corpus d'actes de communication authentiques: textes écrits (littérature,
de phrases attestés
œuvres scientifiques, didactiques etc.), publicité, écrits et
enregistrements journalistiques, conversations entre des sujets
(d'énoncés de
parlant une certaine langue (francophones, par exemple), ou, tout
discours) simplement le savoir linguistique d'un sujet locuteur auprès duquel le
grammairien s'informe pour décrire une règle d'usage ou pour
généraliser sur l'emploi d'une forme linguistique.
La terminologie grammaticale emploie régulièrement deux mots
distincts: phrase et énoncé, l'un pour se rapporter à une unité de
communication telle qu'elle apparaît dans la communication
authentique (énoncé), et l'autre rapporté à la description linguistique
d’une unité de communication (phrase). L'énoncé est une forme
minimale d'expression verbale associée à un usage situationnel
concret, tandis que la phrase (PH) représente le modèle ou la structure
schématique de constituants de cette forme d'expression minimale.
Énoncé = L'énoncé est découpé dans les expressions linguistiques réalisées
produit verbal réalisé (prononcées ou écrites) dans une situation de communication concrète,
dans un acte de par un sujet locuteur empirique; la phrase est une représentation
schématique des éléments formels d'une communication, sous la forme
communication
d'un enchaînement de symboles catégoriels.
«– Oh ! Qu'ils sont amusants, qu'ils sont drôles !» [Maupassant]
« L'affection calme de son père, la camaraderie amicale de son
frère, la tendresse froide de son mari, ne lui paraissait plus
rien, rien! » [ibid.]
Ces énoncés, cités en dehors de leur contexte de discours
Phrase = authentique, ne sont que de simples énoncés «types» ou modèles
unité d'analyse réalisés des phrases. Tout énoncé qui est isolé de son contexte de
communication (quand il est cité, par exemple), devient un simple
syntaxique
énoncé type ou une phrase réalisée dans sa forme d'expression. Le
terme de phrase sert souvent à parler d'un énoncé, mais qui est
présenté et analysé en dehors de son contexte. Dans cette
acception (en faisant abstraction du contexte de production), les
deux termes, phrase et énoncé, sont synonymes.
Dans son acception grammaticale encore plus restreinte, le
mot phrase se rapporte au modèle des constituants d'un énoncé
type. Ce modèle peut être décrit à l'aide de symboles qui
représentent les catégories grammaticales. Exemple: P = S + Préd,
est un modèle descriptif formé de plusieurs symboles: P=
proposition; S = sujet; Préd = prédication.

8
Unités de l'analyse syntaxique

La grammaire moderne fait associer à chaque phrase deux ou


plusieurs types d'analyse grammaticale. Il convient de distinguer tout
d'abord entre le modèle "profond" (le plus abstrait) et sa réalisation
par une phrase de surface. La structure profonde ne donne qu'une
représentation de la phrase en termes de symboles des catégories
grammaticales; la structure de surface est une représentation
Modèle structural linéaire (=enchaînement) de symboles immédiatement remplis par
d'une phrase : des mots du lexique d'une langue. Comparez:
(i) L'affection calme de son père lui était indifférente.
(ii) Elle était indifférente à l'affection calme de son père.
• Structure profonde (iii) Le fait que son père avait pour elle une affection calme lui
• Structures intermédiaires était indifférent.
• Structure de surface
Les phrases (i), (ii) et (iii) ont la même structure profonde, la même
structure lexicale, mais des structures de surface distinctes.
Il est clair que qu'une personne qui parle entre en contact
seulement avec la structure de surface, c'est-à-dire avec
l'enchaînement des unités de langue qui apparaissent dans
l'expression orale ou écrite. La structure profonde est un modèle
théorique, un modèle structural virtuel qui décrit le sens syntaxique de
la phrase.
Une personne qui ne connaît pas bien le français et construit
maladroitement une phrase comme:
(a) *Moi vouloir toi venir ici jour après.
sera tout de même relativement bien comprise par les locuteurs
francophones; cette phrase mal formée réalise dans la
communication la même signification effective que la phrase bien
formée qui lui correspond:
(b) Je voudrais que tu viennes demain ici.
Les deux structures de surface ont le même sens; les deux sont donc
formées à partir d'une seule et unique structure profonde virtuelle:
X veut que [Y venir à tel moment, dans tel lieu]
Phrase
Les grammaires modernes, qui, pour la plupart, sont
bien formée d'inspiration structurale, partent souvent de la structure de surface et
(phrase appliquent une procédure d'analyse en constituants immédiats,
grammaticale) chaque constituant immédiat étant à son tour analysé en unités plus
petites. C'est cette démarche analytique que nous allons appliquer
pour décrire la structure de la phrase.

1.2.2 Le «modèle» syntaxique de la phrase


La grammaire distingue aussi entre la partie structurale de la phrase,
Même noyau appelée phrase noyau, et la phrase modalisée ou enrichie par un
syntaxique constituant énonciatif, c'est-à-dire par les divers marqueurs de
+
surface qui lui confèrent un certain statut énonciatif dans le discours :
différentes
lexicalisations (1) Les enfants jouent dans le jardin.
pour le sujet, l'objet (2) Marie a joué dans le jardin.
direct, le circonstant (3) Nous ne jouons pas avec la poupée.
(4) Ils avaient beaucoup joué quand ils étaient petits.
(5) Comme elle est mignonne quand elle joue !
(6) Ont-elles joué dans le parc ? etc.

9
Unités de l'analyse syntaxique

Toutes ces phrases représentent un seul modèle structural, donc


une seule phrase du point de vue de sa structure de constituants
syntaxiques:
X ←jouer→ (±objet ou jeu) (±lieu) (±temps).
Une seule et même structure profonde peut se lexicaliser
différemment. Dans les phrases citées (1 à 6), le constituant X est
lexicalisé comme: Marie, les enfants, nous, elles etc. L'objet du jeu
La structure de la
phrase noyau est est exprimé ou non; il est indéterminé dans cinq des phrases citées
déterminée et lexicalisé une seule fois par le nom «poupée».
par la sous- Abstraction faite de la lexicalisation différente, les phrases
catégorie citées sous (1) – (6) ont la même structure syntaxique, donc elles
du verbe pivot
représentent la même phrase noyau, quoiqu'elles soient
différemment modalisées (statut énonciatif différent).
Ce sont seulement des tours de phrase avec un statut énonciatif
déterminé qui apparaissent dans la communication authentique. Dans
le discours, les phrases ont obligatoirement un constituant énonciatif.
Dans ce qui suit, on va noter avec des signes (#) les pauses
Le signe [ ± ] dans le discours. La phrase enrichie (=modalisée) est donc notée par
sert à noter le symbole # PH #, tandis que la phrase nucléaire sera notée par le
les marqueurs
du constituant
symbole PH, non accompagné de pauses (dans certaines
énonciatif grammaires on emploie le symbole P):
d'une phrase:
# PH #
1) phrase (tour de phrase = phrase totale, modalisée
assertive
ou non
ou "enrichie" par des marqueurs énonciatifs)

(Sinon, elle est:


interrogative, Constituant énonciatif de la PH PHRASE NOYAU: PH
impérative, [+assert.] [±nég.]
exclamative)
[–assert] [±excl.] [±nég.] S Préd
2) négative ou non [±impér.] [±nég.]
[±interr.] [±nég.]
3) impersonnelle ([±emphase])([±impers.])([±passif])
ou non

4) passive ou non La phrase simple nucléaire (non modalisée: PH ou phrase noyau)


est une structure propositionnelle bi-membre, ayant un membre
5) avec mise en Sujet et une Prédication.
relief (emphase) La phrase simple modalisée (# PH #) présente des marqueurs de
ou non
modalisation (interrogative, exclamative etc.). Ces marqueurs s'ajoutent
à la structure nucléaire de la phrase (ou structure de constituants de
base) et déterminent le statut énonciatif de la phrase ainsi modalisée.

1.2.3 Les deux membres de la phrase noyau


Le Sujet et la Prédication sont les deux constituants immédiats
obligatoires de la phrase; ils donnent naissance à trois types de
positions syntaxiques: Sujet (S), Groupe verbal (GV) et Attribut
(ATTR).

10
Unités de l'analyse syntaxique

PH

La phrase, S Préd
unité syntaxique
organisée autour GN0 GV + (GAdv)
d'un pivot verbal V + ATTR + (GAdv)

Le sujet, le premier constituant immédiat, se réalise par un groupe


nominal primaire (GN0), qui remplit la fonction syntaxique de Sujet
grammatical (voir l'unité d'apprentissage 2, ci-dessous); cette
position grammaticale est occupée par un groupe nominal situé
immédiatement sous le nœud PH (phrase noyau).
L'autre membre de la phrase, la prédication, peut être minimale
ou étendue par un déterminant adverbial (un circonstant). La
prédication minimale est réduite au verbe pivot (V) et aux fonctions
réalisées autour de ce verbe: compléments du verbe et/ou la
fonction d'attribut. Les compléments du verbe (objet direct, indirect
prépositionnel: OD, OI, OPrép), ainsi que l'attribut (ATTR) se
réalisent par des groupes nominaux, tout comme le sujet.
GN0 → sujet (S)
Un homme passe dans la rue.
GN ' → attribut (ATTR)
Fonctions Jean est un homme courageux.
syntaxiques autour GN1 → objet direct (OD)
d'un verbe pivot: Je vois un homme. (Je le vois)
– sujet GN2 → objet indirect (OI)
Nous parlons à un homme dans la rue. (Nous lui parlons)
– attribut
GPrép (=GN3, 4 ….) → objets prépositionnels (OPrép)
– compléments Nous parlons avec un homme dans la rue. Je collabore avec
d'objet un homme merveilleux. Elle est amoureuse de cet homme. Je
compte sur cet homme.
La réalisation d'une fonction syntaxique dépend de la position
hiérarchique dans la phrase: un groupe nominal sujet (GN0) est
autonome dans la phrase; mais un GN attribut n'est qu'une partie de
la prédication; moins autonomes encore sont les GN compléments
(du verbe, de l'adjectif, du nom), qui se rapportent à leur catégorie
dominante, le groupe dans lequel ils jouent leur rôle syntaxique.
De tous les GN constituants d'une phrase, il y a un certain GN
qui occupe une place privilégiée: il est promu en fonction de Sujet de
la phrase. L'analyse d'une phrase doit commencer par l'identification
du GN sujet, qui constitue l'un des deux membres de la phrase (l'un
des constituants immédiats de la phrase).
L'identification de l'autre membre de la phrase, la prédication,
est l'étape suivante d'une analyse grammaticale appliquée à une
phrase simple. Dans la prédication tout entière, on reconnaît le verbe
pivot (V) et, éventuellement, les fonctions dont ce verbe est entouré.
La détermination du type de prédication (verbale, nominale) est
11
Unités de l'analyse syntaxique

Phrase noyau l'étape suivante de l'analyse, qui permet de déterminer aussi, compte
à prédication
tenu de l'expression linguistique de la prédication, le type syntaxique
verbale
de la phrase tout entière.
La prédication minimale (non étendue par des circonstants) se
réalise par:
• GV = une prédication verbale, position syntaxique occupée
par un groupe de mots ayant comme catégorie centrale un verbe (V);
le groupe verbal est formé par un verbe entouré par ses
déterminants obligatoires, dont la nature et la fonction dépendent du
type de verbe: transitif ou intransitif (voir l'unité d'apprentissage 3, ci-
Phrase noyau
à prédication dessous). Le GV est occupé parfois par une construction à verbe
nominale support (locution verbale), par une construction à présentatif ou par
une interjection à fonction prédicative;
• ATTR = une prédication nominale, fonction syntaxique qui se
réalise par divers moyens: par un GN ou par un GAdj (voir l'unité
d'apprentissage 2, ci-dessous), par une proposition tout entière. La
prédication attributive est reliée au sujet à l'aide d'un verbe pivot
attributif (VAttr) (voir l'unité d'apprentissage 4).
Il y a donc deux types fondamentaux prédication:
Prédication verbale (GV) :
Marie travaille.
J'écoute la radio.
Formes de réalisation L'Europe va s'élargir.
de la Les dépenses maladies ralentissent.
prédication : Nous avons lu le journal.
Les fournisseurs d'accès luttent contre le piratage.
Prédication nominale (V + ATTR) :
I. verbale Luc est devenu ingénieur.
Il est prévisible que le temps va s'améliorer.
II. nominale Le progrès moral est possible.
Nous sommes fiers de nos résultats.
Le prix de l'essence me semble assez acceptable.
III. verbo-nominale Jeanne a l'air mécontente.
(prédicat verbal + Les types de phrases, d'après la réalisation linguistique de leur
prédication seconde ) prédication sont:
(I) Phrase noyau binaire → GN0 – GV
Phrase de structure binaire: S + V (prédication verbale) .
Tu as refusé notre projet.
Le film a été apprécié par la critique.
(II) Phrase noyau ternaire → GN0 – V – Attribut
Phrase de structure ternaire à prédication nominale (simple):
S + VAttr + Prédication nominale
Elle est occupée par son mémoire de licence.
Ce garçon me semble insupportable.
Travailler signifie réussir.
Le jeu devint une passion pour lui.
(le verbe seul n'aurait pas pu former la prédication, l'attribut est
donc la seule prédication de la phrase)
(III) Phrase noyau à prédication seconde → GN0 – GV – Attribut
Phrase ternaire à prédication nominale seconde (complexe) :

12
Unités de l'analyse syntaxique

S + V + Prédication nominale
Le directeur sortit en vitupérant contre tout le monde.
Je vous croyais de bonne foi, mes amis.
Depuis une semaine, papa rentre très fatigué.
Les négociateurs sont partis en claquant la porte.
Étapes
de l'analyse (le verbe aurait pu former seul la prédication; l'attribut n'est qu'une
syntaxique : prédication seconde).

–identification du Conclusion sur l'analyse d'une phrase simple :


groupe sujet; La phrase nucléaire est analysable en deux membres (=deux
constituants immédiats): le Sujet et la Prédication, minimale ou
– identification du étendue par des circonstants.
pivot verbal;
– le groupe Sujet (GN0 ou groupe nominal primaire) est en
– identification relation d'interdépendance avec la prédication;
des groupes – la prédication verbale (GV) est formée autour d'un verbe pivot;
fonctionnels – la prédication nominale ou attributive (ATTR) se relie au sujet
autour du pivot par un verbe de liaison (verbe attributif).
verbal:
Il ne faut pas confondre l'Attribut avec les compléments du verbe:
les compléments représentent la détermination intrinsèque d'un verbe,
• ATTRIBUTS tandis que l'Attribut qualifie ou décrit un objet de discours (sujet ou objet).
• COMPLÉMENTS Voici un modèle d'analyse des constituants de la phrase qui distingue
• CIRCONSTANTS
entre prédication (encadrée comme étant la partie centrale de la phrase)
et la détermination du verbe (ses compléments) :

Cette émission est intéressante.  prédication nominale (simple).


S Vcopule + ATTR–S

Luc trouve la solution du problème.  prédication verbale (simple)


S V + OD

Luc trouve cette émission intéressante  prédication seconde


S V + OD + ATTR–O (prédication complexe: verbo-nominale)

Exercice d'entraînement  À vous d'analyser :

Aux environs de Paris, au milieu d'un grand parc, se dressent les pavillons du collège Valvert.

Les souvenirs de cet homme tirent de l'ombre de son enfance de nombreux personnages.

Pendant tout l'après-midi je demeurai assis sur la pelouse.

À la fin de la partie, Luc lança d'un geste rageur sa raquette de tennis contre le mur du garage.

Chaque personne saluait toujours Luc, sa femme et le docteur, d'un geste respectueux.

1.2.4 Formes de surface d'une phrase


Dans la communication authentique, la structure canonique binaire
(S – V) ou ternaire (S – V – ATTR) ne se réalise pas toujours.
Exemple: Q. : Combien de places, monsieur ? R. Trois. La question,
ainsi que la réponse sont des phrases à structure grammaticalement
13
Unités de l'analyse syntaxique

elliptique. Comparez-les avec une phrase à structure de constituants


complète: En payant 200 euros, ce monsieur a acheté trois places
pour demain, à l'opéra. Outre ce type d'ellipses, les formes non
canoniques d'une phrase de surface sont:

• La phrase à présentatif. Un modèle particulier de phrase à


C'EST présentatif prédication verbale est représenté par les présentatifs: il y a, voici/ voilà,
(prédicatif) c'est… Ce sont des expressions à l'intérieur desquelles le verbe a
et perdu son indépendance: les verbes avoir, être et voir n'ont plus
d'autonomie dans les présentatifs. Ce type de phrase présente
C'EST … QUE ,
instrument toujours deux constituants immédiats, prédication + nominal présenté:
grammatical C'est Jean. Voici mon ami. Il y a de jolies fleurs dans ce vase. Les mots
de mise en relief voilà/ voici se construisent avec un objet direct: Le voilà/ voici.
d'un constituant Le nominal, sujet ou objet, qui apparaît après un présentatif, est
détaché
dans une position non thématique, car il fait partie de l'information
nouvelle, qui vient d'être introduite: Il y a deux personnes en bas. La
seule chose qui manque ici, c'est la mer… [Modiano]. Avec c'est, le
pronom démonstratif ce est un sujet grammatical postiche qui
anticipe le sujet réel: Ce n'est pas drôle d'attendre ici. (sujet exprimé
par proposition infinitive: attendre ici). Ce n'est pas que l'on comprît
rien aux progrès des enfants. [Stendhal] (sujet = une proposition).
Les expressions voici/ voilà, il y a et c'est sont des instruments
grammaticaux pour la dislocation de sa place d'un constituant :
C'est le facteur qui a sonné. (l'extraction du sujet)
C'est un livre nouveau qu'il vient de lire. (l'extraction de l'objet)
C'est à Paris qu'il veut aller. (l'extraction du circonstant de lieu)
Voilà et voici réalisent l'extraction dans les mêmes contextes, tandis
que il y a fait l'extraction dans des conditions particulières; par
exemple, l'extraction des GN indéfinis: Il y a un homme à qui je veux
m'adresser. Il y a un lieu où j'aimerais aller, mais aussi Il y a toi, à qui
j'ai pensé. Il y a Jean qui vient de téléphoner.
Divers types
● La phrase averbale (ellipse du pivot verbal):
de – Sans sucre, s'il vous plaît ! [le café].
phrase elliptique – Heureusement ! Encore ! Toujours ?! Vite ! Parce que !
Silence ! Attention! Au voleur ! Quel têtu !...
La prédication se réalise par un constituant nominal, le verbe étant
sous-entendu, de même que le sujet qui est implicite. Il y a souvent
un "indice prédicatif" qui oriente, en l'absence du verbe,
l'interprétation de la phrase.
Phrase averbale: Pour moi, pas de café aujourd'hui ! Phrase
complète: Moi, je ne veux pas de café aujourd'hui !
Phrase averbale: Trop d'insistance ! Phrase complète:
N'insiste pas trop, pour me faire prendre du café !
Dans ces indices prédicatifs (ou: rhématiques2) se concentre
l'information nouvelle apportée par l'ensemble de la phrase; voici de
tels indices de prédication dans la phrase elliptique:

2
La partie rhématique d'une phrase est celle qui communique une information nouvelle.

14
Unités de l'analyse syntaxique

– un adverbe d'intensité: plus, moins, beaucoup, vite, fort 


Fort intelligent ! Trop clair ! Plus fort ! vite fait !
– des termes négatifs: Rien à voir. Personne. Jamais ici ! Pas
du tout. Plus jamais ! Pas de blague !
– adverbes aspectuels: Encore Monique ! Toujours lui !
Maintenant, vous !
Divers types de – élément de comparaison:
phrases de surface Mieux ! Plus que ça ! Moins aujourd'hui qu'hier.
non canoniques
• La phrase interjectionnelle:
(dont la prédication
Bravo ! Bravo à vous ! Merci ! Mon Dieu ! Oh ! Bigre ! Holà !
ne s'exprime pas Pas si vite ! Voyons, venez ! Et alors ? ! Ben, bon, alors, c'est là ?
par un verbe)
• La phrase réduite à un adverbe substitut de phrase:
– Votre opinion, vous l'avez communiquée à la direction?
– Mais oui. / Pas du tout. / Tout à fait.
L'adverbe de phrase oui (non, tout à fait etc.) reprend le contenu
complet de la phrase: Oui = «J'ai communiqué mon opinion à la
direction».
– Il ne vient donc pas ? – Mais si. (= «Il vient»).

1.2.5 Phrase simple et phrase complexe


Un autre critère de classification syntaxique des phrases apparaît si
l'on prend en considération le nombre de verbes (le nombre de
pivots prédicatifs d'une phrase) et leur position syntaxique.
Les phrases peuvent être:
– simples, si elles ont un seul pivot ou noyau prédicatif: Luc
viendra à sept heures;
– complexes, si elles associent dans une seule phrase
plusieurs prédications: Luc viendra quand il aura fini son travail au
bureau. (deux prédications: venir et finir le travail ).

1.2.6 Subordination et phrase complexe


Par une tradition dans les approches structurales, les descriptions de
la phrase complexe ne prennent pas en considération les
subordonnées relatives, ni les complétives auprès du verbe, auprès
du nom, ou de l'adjectif, mais seulement les subordonnées dites
"adverbiales" (circonstancielles). Par conséquent, il y a deux types
de propositions subordonnées:
A. les propositions équivalentes à un objet (N) ou à une qualification
(Adj), qui sont intégrées dans un groupe syntaxique (syntagme
fonctionnel) de la phrase. Ces subordonnées se laissent substituer
par un nom ou par un adjectif :
L'homme honnête. → l'homme qui est honnête.
Je connais bien cette histoire. → Je connais bien ce qui s'est
passé.
Son geste ne me plaît pas. → Ce qu'il fait ne me plaît pas.
Ces subordonnées sont équivalentes avec un nom ou avec un
adjectif (les grammaires appellent ce type de subordonnées:
propositions substantives, respectivement, propositions adjectives).
15
Unités de l'analyse syntaxique

Quand les subordonnées sont équivalentes à un nom ou à un


adjectif, elles sont enchâssées dans une phrase principale à la place
de leur catégorie (d'un adjectif ou d'un nom):
L'homme que j'ai vu = l'homme honnête (Adj)
Jean sait bien que demain il pleut = Jean sait la vérité (N).
Jean est plus grand que je ne l'aurais cru = Il est plus grand
Subordonnées que Paul (N).
circonstancielles
L'auto roulait moins vite qu'il ne l'eût souhaité = moins vite que
s'opposent aux: le train (N).
B. les propositions subordonnées adverbiales (GAdv → P)
–subordonnées s'appellent aussi circonstancielles, car elles ont un rôle équivalent à
un circonstant (de temps, de cause, de but, de conséquence,
relatives
d'opposition, de condition ou d'hypothèse):
(équivalentes avec Quand je suis arrivé à la gare, Marie m'attendait déjà.
un adjectif); Marie est heureuse parce que son ami est rentré sain et sauf.
À la différence des subordonnées «substantives» et «adjectives» qui
sont équivalentes à un groupe organisé autour d'une catégorie
–subordonnées
lexicale (nom, adjectif), les subordonnées de types adverbial sont
complétives d'un équivalentes à un type complexe de constituant de phrase: l'adverbe
verbe, d'un adjectif seul ne pourrait pas substituer une proposition circonstancielle
ou d'un nom (l'équivalence peut s'établir seulement pour le temps). La cause, la
finalité, l'hypothèse, l'opposition etc. sont des rapports entre deux
opérateur
procès (états, activités, événements).
(équivalentes Cette distinction de nature sémantique et catégorielle entre les
avec un nom) deux types de subordonnées fait que les grammairiens leur
assignent une place distincte: le premier type de subordonnées est
traité dans les chapitres consacrés à la phrase simple, tandis que
les subordonnées circonstancielles (adverbiales) sont traitées dans
les chapitres qui s'occupent de la phrase complexe.
► Les subordonnées complétives sujet sont traitées dans l'unité
d'apprentissage no 2, étant des réalisations particulières du GNo ;
► Les subordonnées complétives du nom se réalisent sous forme de
propositions relatives ou de propositions conjonctives; elles sont
traitées dans l'unité d'apprentissage no 3, étant des Dt N.
► Les subordonnées complétives objet d'un verbe ou d'un adjectif
sont traitées dans l'unité d'apprentissage no 4, étant des Dt V ou Dt
Adj, faisant partie de la structure du GV, respectivement, du GAdj.
► Enfin, les subordonnées circonstancielles (adverbiales) sont
traitées dans les unités d'apprentissage no 9 à 14, consacrées à la
phrase complexe.

16
Unités de l'analyse syntaxique

Test d'autoévaluation
Pour bien gérer ce test, il est indispensable que vous ayez déjà parcouru les explications
et les analyses données dans l'unité d'apprentissage 1. Vérifiez vos solutions aux
exercices en consultant la rubrique Clés du test d'autoévaluation.

Exercice 1
Divisez les phrases en deux parties: l'ensemble du groupe sujet (que vous soulignez),
séparé par une barre verticale de l'ensemble de la prédication (encadrez seulement la
catégorie centrale de la prédication, le verbe pivot):
1. L'infirmière en blouse blanche vient soigner la blessure de l'enfant.
2. L'enfant en tricot vert fit un mouvement brusque sur l'allée du parc.
3. Un intense désir de revoir sa famille bouleversa le pauvre homme.
4. Des croiseurs et des paquebots, qui ne pouvaient décharger leurs
marchandises, montaient les masses obliques de fumée que le vent lourd dissipait
dans le sens de la course des insurgés. [Malraux]
5. Le boutiquier le plus proche sortit.
6. Il portait sur l'épaule un énorme volet.
7. L'homme faillit briser la vitre de l'auto.
Exercice 2
Faites l'analyse des phrases suivantes, en délimitant les constituants de la prédication (V,
OD, OI, ATTR-S, ATTR–O), selon le modèle d'analyse donné dans l'unité
d'apprentissage:

structure de constituants de la prédication


Phrases V + ( OD, OI, ATTR-S, ATTR–O )
(i) Jean court dans la rue. ……………………………………
(ii) Il invite ses collègues chez lui. ……………………………………
(iii) Nous avons offert des fleurs à maman. ……………………………………
(iv) Jean est très gentil. ……………………………………
(v) Mon frère est ingénieur. ……………………………………
(vi) Elle se montre déçue. ……………………………………
(vii) Il nous quitta très joyeux. ……………………………………
(viii) Nous la trouvons pâle et fatiguée. ……………………………………
(ix) Je considère Jean comme mon meilleur
ami.

Exercice 3
Soulignez l'objet direct des verbes transitifs de ces phrases, dites quelle est sa nature:
OD nominal, pronominal, exprimé par infinitif ou par proposition:

Rends-moi ce livre. (OD ……………………….)

17
Unités de l'analyse syntaxique

Je t'ai souvent mis en garde. (OD ……………………….)


Il nous a raconté une histoire sans queue ni tête. (OD ……………………….)
Pierre a avoué qu'il n'a pas voulu envoyer la réponse. (OD ……………………….)
Maman accepte de prendre pour le dîner ce que je veux. (OD ……………………….)
Il n'a pas deviné qui j'ai rencontré il y a une semaine. (OD ……………………….)
Si tu vas voir ce spectacle, dis-le moi. (OD ……………………….)

1.3. L'expression linguistique des constituants de phrase

1.3.1 La notion de groupe syntaxique de mots


Le mot: La phrase étant une unité verbale formée par agencement (succession
ordonnée des mots ou: disposition séquentielle des expressions), il
convient de définir d'abord les unités de départ d'une langue, c'est-à-
 il représente une
dire les classes de mots (les plus petites unités syntaxiques).
catégorie lexicale • Les principales classes lexico-syntaxiques sont en français: le
(il est doué d'un nom (N), l'adjectif (Adj), le verbe (V), l'adverbe (Adv) et aussi
sens) l'interjection, mais cette unité a un statut singulier parce qu'elle se
réalise dans le discours comme l'une des quatre catégories lexicales
de base (nom, verbe, adjectif ou adverbe), ou bien elle peut former à
 il représente une elle seule tout un énoncé.
catégorie syntaxique Les unités appartenant aux classes lexico-syntaxiques
(il a une capacité mentionnées ont: a) un sens lexical particulier; b) une capacité
combinatoire dans la phrase, qu'il revient à la syntaxe de décrire.
combinatoire)
Ces catégories lexicales de base sont mises en discours par
divers procédés3 qui les font devenir, d'une simple unité lexicale
immobile, inerte, virtuelle (homme, aller, beau), une unité
dynamique, active, actualisée dans le discours (Je connais cet
homme; ce beau chapeau lui va bien). Elles sont à la fois des unités
constitutives du système de la langue et des unités permettant
l'intégration syntaxique dans la communication.
• Les groupes de mots à fonction syntaxique dans la phrase
La phrase n'est pas une suite linéaire de mots, mais une structure
hiérarchique de constituants. Chaque constituant de phrase
représente un syntagme fonctionnel ou «groupe de mots» ayant une
fonction dans la phrase. On distingue trois niveaux d'unités
hiérarchiques de la phrase: le niveau supérieur d'analyse (III) est
formé par les constituants immédiats de la phrase: le groupe Sujet et
le groupe Prédicat; ces constituants immédiats se réalisent par
différents types de syntagmes fonctionnels: GN, GV, GAdj, GAdv,
GPrép qui occupent les positions syntaxiques dans la phrase: sujet,
attribut, complément, circonstant; ils sont en même temps des unités
formelles (ayant une catégorie d'expression) et fonctionnelles (ayant
une fonction auprès du pivot verbal). Ces groupes de mots

3
Actualisation (quand on passe du niveau 1 à 2), intégration hiérarchique dans des unités cohésives, par l'assignation
d'un rôle thématique et d'une fonction syntaxique (quand on passe du niveau 2 à 3); modalisation (quand on passe du
niveau 3 à 4). Les quatre niveaux syntaxiques sont présentés à la page 6, ci-dessus.

18
Unités de l'analyse syntaxique

représentent le niveau d'analyse intermédiaire de la phrase (II), entre


le palier du rapport Sujet – Prédicat et le niveau inférieur (I), des
catégories lexicales de base: N, V, Adj, Adv.
Les quatre premiers groupes fonctionnels mentionnés se
définissent d'après leur catégorie centrale:
• GN → Pd + N (Dt N)
Exemples: «ce/ le un/ mon garçon (étourdi)»;
• GAdj → Adj+ (Dt Adj)
Exemples: joli (garçon) timide, mais courageux, que je
connais; Jean est heureux d'être avec nous.
Les syntagmes
fonctionnels • GV → V+ (Dt V)
(groupes de mots) : Exemple: Jean donne (des fleurs à son amie).
• GAdv → Adv+ (Dt Adv)
GN= Exemples: Cet enfant est admirablement sage.
la groupe nominal Ils se conduisent (décidément) avec élégance.
L'aîné a répondu avec sagesse.
GAdj =
le groupe adjectival • Le groupe fonctionnel pour le cas régime
GV= Quant aux groupes prépositionnels (GPrép), ceux-ci ont un statut
le groupe verbal syntaxique distinct, puisqu'ils sont en réalité des GN précédés par
une préposition:
GAdv =
GPrép → Prép + GN
le groupe adverbial Cela n'implique en rien que la préposition s'emploie uniquement
devant un nom:
GPrép – prép + pronom: Nous avons parlé de toi; Je vais avec eux;
– prép + Adj: Il n'y avait rien de bon;
le groupe nominal
– prép + Adv: Tu m'as aperçu de loin; Il habite près d'ici;
prépositionnel – prép + infinitif: J'ai décidé de partir. Pour faire cela, j'ai besoin de toi.
(=prép + N) D'une part, la préposition intervient devant toutes les classes
de mots; d'autre part, la préposition devant une catégorie nominale
permet à celle-ci de jouer le rôle de n'importe quelle autre catégorie
(à l'exception du verbe):
prép + N = GN (les sans papiers ont exposé leur situation);
GPrép un sans papiers, un hors-la-loi =N
prép + N = GAdj (Un homme sans âme; une pluie d'automne; une
= cas particulier
histoire de nos jours etc.),
de groupe nominal, sans âme = cruel; d'automne = automnal; de nos jours =
pour une contemporain (Adj)
position syntaxique prép + N = GAdv (il roule à grande vitesse)
à grande vitesse = vite (Adv); avec difficulté = difficilement etc.
qui impose le régime
En conclusion, le GPrép est un type particulier de GN, qui apparaît
prépositionnel dans trois types de positions syntaxiques :
– compléments du nom :
cahier d'un enfant; cahier pour les exercices; café sans sucre;
– objets indirects (compléments d'un verbe, d'un adjectif):
Il s'adresse à quelqu'un; il lutte contre moi; il est reconnaissant
envers quelqu'un; furieux contre moi;
– circonstants : L'auto tourne à gauche (lieu). Il vient pour la leçon
(but); Il commença à pleuvoir vers le soir. (temps)

19
Unités de l'analyse syntaxique

1.3.2 Fonctions syntaxiques à l'intérieur du groupe verbal


La structure de constituants du GV dépend des propriétés
syntaxiques du verbe, catégorie centrale de ce groupe et pivot de la
phrase tout entière:

GV → V + (OD) (OI) (OPrép.1 ) (OPrép.2 ) …. (OPrépn )

compléments du verbe
verbe centre du GV
Les positions syntaxiques occupées dépendent des valences
combinatoires du verbe central, autour duquel s'organise la phrase.
Les valences à droite du verbe sont réservées aux différents types
de compléments: objet direct, objet indirect et les objets
prépositionnels. Mais le verbe pivot d'une prédication a aussi une
valence à gauche: c'est la position syntaxique de Sujet.
● Hiérarchie des fonctions
Les niveaux hiérarchiques des fonctions syntaxiques sont:
I. Sujet – Attribut (Attribut du sujet ou de l'objet)
II. Compléments (du nom, de l'adjectif, du verbe); Epithète;
III. Circonstants caractérisants, intégrés au groupe verbal
(circonstants de manière, de lieu);
IV. Circonstants d'argumentation, reliant des procès ou des
événements (circonstants de temps, de but, de cause, etc.)
V. Modalisateurs (adverbes de phrase comme: Heureusement, il
est rentré plus tôt ! Sans doute saura-t-il répondre !
En réunissant dans une seule catégorie les différents niveaux
hiérarchiques des sous-types de circonstants, les fonctions
syntaxiques dans la phrase se situent à trois paliers syntaxiques:

SUJET ATTRIBUT
les compléments l'adjectif épithète
les circonstants

1.3.3 Conclusions sur la phrase (minimale et étendue)


Le sujet est la plus importante fonction syntaxique et se retrouve au
plus haut niveau syntaxique dans la phrase à prédication verbale:
Ce magazine littéraire propose aux lecteurs un guide des
nouveaux romans marquant la rentrée littéraire de cette année.
La structure d'une telle phrase à prédication verbale met en rapport
un terme sujet (ce magazine littéraire) et un GV dans lequel le verbe
(proposer) est suivi de ses compléments. Le verbe pivot proposer :
– à qui ? → aux lecteurs (complément indirect en Datif nommé
aussi "Objet second")
– quoi ? → un guide des nouveaux romans marquant la rentrée
littéraire de cette année (complément direct, le nom tête ou
centre du groupe étant étendu par ses déterminants).
La phrase citée a donc une structure linéaire : N0 + V + N1+ N2
N0 = magazine ; N1 = guide ; N2 = lecteurs. Le nominal en fonction de
Sujet apparaît comme un constituant immédiat de la phrase, tandis

20
Unités de l'analyse syntaxique

que les compléments du verbe (N1 et N2) sont sous-jacents à un


groupe fonctionnel, le GV.
La phrase minimale comprend le sujet et la prédication minimale
(non étendue par des circonstants). Un groupe nominal est minimal si la
catégorie nominale centrale (nom ou pronom) ne présente pas de
déterminants facultatifs (épithètes, compléments du nom, propositions
relatives, quand ils sont non nécessaires, des ajouts de type "explicatif"):

Phrase étendue:
a) par des circonstants:
[ (Circ.) S – V– Compléments. – (Circ.) ]
phrase minimale

b) par des déterminants facultatifs du nom (GN étendu)

c) par des déterminants facultatifs du verbe, adjectif, adverbe (GV, GAdj, GAdv étendus)

En conclusion, la phrase é t e n d u e contient, outre les constituants


obligatoires: sujet et prédication, avec les compléments du verbe qui
sont requis par la nature même du verbe (ces compléments auxquels
s'ajoute le sujet, correspondent aux valences du verbe), certains
constituants facultatifs. Si la phrase présente des constituants
facultatifs, elle devient une phrase é t e n d u e :
Phrase minimale: La fillette cueille des fleurs.
Phrase étendue:
La petite fillette au chapeau de paille cueille de jolies fleurs de
printemps, en parcourant les allées du jardin.

 Les clés du test d'autoévaluation


Corrigé de l'exercice 1 :
(Le membre Sujet de la phrase a été souligné, le verbe pivot a été encadré)
1. L'infirmière en blouse blanche / vient soigner la blessure de l'enfant.
2. L'enfant en tricot vert / fit un mouvement brusque sur l'allée du parc.
3. Un intense désir de revoir sa famille/ bouleversa le pauvre homme.
4. Des croiseurs et des paquebots, qui ne pouvaient décharger leurs marchandises, /
montaient les masses obliques de fumée que le vent lourd dissipait dans le sens de la
course des insurgés. [Malraux]
5. Le boutiquier le plus proche/ sortit.
6. Il / portait sur l'épaule un énorme volet.
7. L'homme/ faillit briser la vitre de l'auto.
Corrigé de l'exercice 2 :
(i) Jean court dans la rue. (GV = V)
(ii) Il invite ses collègues chez lui. (GV = V +OD)
(iii) Nous avons offert des fleurs à maman. (GV = V + OD + OI)
(iv) Jean est très gentil. (GV = Vcopule + ATTR du sujet)
(v) Mon frère est ingénieur. (GV = Vcopule + ATTR du sujet)
(vi) Elle se montre déçue. (GV = Vcopule + ATTR du sujet)
21
Unités de l'analyse syntaxique

(vii) Il nous quitta très joyeux. (GV = V + OD + ATTR du sujet)


(viii) Nous la trouvons pâle et fatiguée. (GV = V + OD + ATTR de l'objet)
(ix) Je considère Jean comme mon meilleur ami. (GV = V + ATTR de l'objet)
Corrigé de l'exercice 3 :
Rends-moi ce livre. (ce livre = OD nominal)
Je t'ai souvent mis en garde. (te= OD pronominal)
Il nous a raconté une histoire sans queue ni tête. (= OD nominal)
Pierre a avoué qu'il n'a pas voulu envoyer la réponse. (= OD propositionnel)
envoyer la réponse = OD infinitival; la réponse = OD nominal)
Maman accepte de prendre pour le dîner ce que je veux. (OD infinitival et OD
propositionnel)
Il n'a pas deviné qui j'ai rencontré il y a une semaine.
(qui j'ai rencontré il y a une semaine = OD propositionnel)
(qui = OD pronominal)
Si tu vas voir ce spectacle (= OD propositionnel), dis-le moi. (le= OD pronominal)

→ Test de contrôle 1

Ce test est administré à l'issue de l'unité d'apprentissage 1.


Pour réaliser ce test, il est conseillé de relire l'unité et de suivre attentivement les phrases
données à titre d'exemple pour chacune des catégories d'unités d'analyse syntaxique,
pour les constituants de phrase et les symboles utilisés dans la grammaire pour décrire
les structures syntaxiques de la phrase simple et de la phrase complexe

Ne manquez pas de transmettre ce test à votre tuteur. À cet effet, il convient de marquer
votre nom, votre prénom et votre adresse personnelle sur la première page de votre
copie. N'oubliez pas de mentionner aussi le numéro du test. Vous êtes supposés le
recevoir après correction, avec les commentaires de votre tuteur.

Bon travail !

Exercice 1 (2 points)
Identifiez le type de prédication dans les phrases suivantes, en notant par le symbole V,
la prédication verbale et par ATTR, la prédication nominale:
1. Elle se sentait seule et perdue. 2.La nature féminine est si souple ! 3. Son cœur se
mit à battre. 4. Vous ne vous la rappelez pas ? 5.Votre nom m'est familier. 6.
Brusquement il se mit à genoux. 7. Voilà si longtemps que je vous recherche ! 8.Il parlait
d'une voix tremblante.

Exercice 2 (2 points)
Identifiez les phrases elliptiques parmi ces phrases de surface:
1. Quel toqué ? 2. Oh, pas vrai ! 3.Victoire ! C'est fait ! 4.Un mois ! Rien qu'un mois ! 5.
Elle était sa maîtresse. 6. Aujourd'hui il était son amant. 7. Liane, votre œil est comme le
ciel ! 8. Il me semble que j'y vois passer des hirondelles ! 9.Mais quelle journée, mes
amis! 10. Elle répondait: «Moi aussi, Paul, je vois votre cœur ! 11. Oui, la mer était là,
devant eux, là-bas !

22
Unités de l'analyse syntaxique

Exercice 3 (3 points)
Divisez les phrases en trois segments: sujet, noyau prédicatif et circonstant, en utilisant
les symboles : S, Préd et Circ.:
Le lundi matin, elle faisait le tour du bureau.
Ce médicament peut souvent entraîner la somnolence.
Nombreuses sont les personnes âgées qui consultent régulièrement un médecin.
Dans la conjoncture actuelle, nous ne faisons plus d'investissements dans cette
vieille société de transports.
L'armée a attaqué en même temps sur tous les fronts.
Tout le monde a été vraiment très aimable quand nos parents ont eu besoin d'aide
et de beaucoup de compréhension.

Exercice 4 (3 points)
Soulignez l'objet direct des verbes transitifs de ces phrases, et précisez quelle est sa
nature: OD nominal, pronominal, infinitival, propositionnel:
1. Rends-moi ce livre. 2. Je t'ai souvent mis en garde. 3. Téléphone-moi en rentrant. 4. Il
nous a raconté une histoire sans queue ni tête. 5.Pierre a avoué qu'il n'a pas voulu
envoyer la réponse. 6.Maman accepte de prendre pour le dîner ce que je veux. 7. Il n'a
pas deviné qui j'ai rencontré il y a une semaine. 8. Si tu vas voir ce spectacle, dis-le moi.

Références bibliographiques

• LEEMAN, D., La phrase complexe, Bruxelles, De Boeck-Duculot, coll. "Champs


linguistiques, 2002.
• MAINGUENEAU, D., (éd. revue) Syntaxe du français (chapitre 6), Paris, Hachette
supérieur, 1999.
• RIEGEL, M., PELLAT, J.-C., RIOUL, R., Grammaire méthodique du français
(chapitres V, XI, XII), Paris, Presses Universitaires de France,1994.

23
Constituants obligatoires de la phrase: le sujet et la prédication

Unité d'apprentissage 2

CONSTITUANTS OBLIGATOIRES DE LA PHRASE NUCLÉAIRE: LE


SUJET ET LA PRÉDICATION

Sommaire page
Les objectifs de l'unité d'apprentissage 2 24
2.1 Le sujet et son expression 24
2.1.1 Notions introductives. Types de sujets 24
2.1.2 La réalisation linguistique du sujet 28
2.1.3 La place du sujet dans la phrase 32
Test d'autoévaluation 35
2.2 La prédication verbale 36
2.3 La prédication nominale 37
2.3.1 Termes de base de la prédication nominale 37
2.3.2 Les verbes attributifs 38
2.3.3 La réalisation linguistique de l'Attribut 39
2.3.4 Les valeurs sémantiques de la prédication attributive 40
2.4 L'accord avec le sujet dans la phrase à prédication verbale et nominale 40
Les clés du test d'autoévaluation 42
Test de contrôle 2 43
Références bibliographiques 44

Les objectifs de l'unité d'apprentissage 2

Quand vous aurez parcouru ce chapitre et effectué les exercices, vous serez capables de:

• Reconnaître les constituants de base de la phrase nucléaire: Sujet et Prédication.


• Identifier le type de prédication (verbale, nominale) dans chaque phrase noyau.
• Exprimer des phrases à prédication nominale, avec Attribut du Sujet ou avec Attribut
de l'Objet.
• Faire l'accord du sujet avec son prédicat verbal ou avec le prédicat nominal.

24
Constituants obligatoires de la phrase: le sujet et la prédication

2.1 Le sujet et son expression

2.1.1 Notions introductives. Types de sujets

Définition. Le sujet est le constituant obligatoire de la phrase qui


impose l'accord du prédicat:
Marie travaille. Marie et Luc travaillent.
Le sujet Je vais, eux aussi, ils vont.
grammatical
Cette émission est intéressante.
Ces émissions sont intéressantes.
►Sujet grammatical (apparent) /vs/ logique (réel). À la différence
du sujet grammatical, qui est une simple position syntaxique dans la
phrase, le sujet logique (ou psychologique) représente l'entité
thématique de la phrase ("ce dont on parle"): Ce film ne m'a pas plu.
(sujet grammatical: ce film; mais la phrase semble affirmer quelque
chose sur la personne qui parle, donc le "sujet logique" est moi.) Dans il
pleut, il y a seulement un sujet apparent, qui remplit une position
grammaticale dans la phrase. Il n'y a pas de sujet logique pour le
Types de Sujet procès exprimé par un verbe impersonnel. Pour le prédicat à la voix
passive, le sujet réel est distinct du sujet grammatical: Luc a été
questionné sur cette affaire, à la police. L'exposition s'ouvre demain.
(Luc, l'exposition =sujets grammaticaux; les sujet réels sous-entendus:
les policiers, les organisateurs).
► Selon le nombre de termes, le sujet peut être:
– simple: Le fer est un métal. Marie vous souhaite bon anniversaire.
– multiple: Le fer et le cuivre sont des métaux. Marie, son frère, nos
parents et moi vous souhaitons bon anniversaire.
► Le sujet est "effacé" (segment Ø) s'il est identique ou
coréférentiel pour deux ou plusieurs prédicats qui entretiennent une
L'effacement du relation syntaxique (coordination ou subordination): Il entre, salue,
sujet coréférentiel s'assoit, ouvre sa serviette et en retire un dossier. Nous pensons
arriver ce soir. (le sujet implicite de l'infinitif arriver est toujours nous).
Marie dort et fait des rêves. (Marie = sujet segmental du premier
prédicat; sujet effacé pour le second prédicat). En s'approchant, Luc
vit quelqu'un devant la porte. (Luc = sujet coréférentiel effacé pour le
gérondif: en s'approchant: qui s'est approché ? – Luc). On peut
parler d'un effacement du sujet coréférentiel quand la phrase relie
plusieurs prédicats, juxtaposés, coordonnés par conjonction, ou
subordonnés (l'un dans le régime de l'autre): Un surveillant entra
dans la classe, interrompant le cours d'anglais. (les procès "entrer" et
"interrompre" ont le même sujet réel, exprimé une seule fois: un
surveillant = sujet grammatical auprès du premier verbe). Paul a
essayé une dernière fois de me dissuader: les procès "essayer" et
"dissuader" ont le sujet Paul, qui n'est exprimé qu'une seule fois:
sujet grammatical du premier verbe, sujet implicite de l'infinitif. Les
constructions factitives (avec les semi-auxiliaires laisser et faire),
impliquent un sujet différent pour le procès subordonné, ce sujet
étant parfois exprimé: La voiture s'arrêta en faisant crisser ses
pneus. L'action de s'arrêter se rapporte au sujet une voiture, le
25
Constituants obligatoires de la phrase: le sujet et la prédication

procès "crisser" se rapporte au sujet réel ses pneus, qui est


grammaticalement l'objet direct de la construction: faire crisser.

► Sujet personnel /vs/ impersonnel. Le sujet est dit "impersonnel"


Sujet
impersonnel
quand il représente une activité, une situation, un événement, c'est-
à-dire quand il s'exprime par (a) un verbe à l'infinitif: Dormir c'est bon.
Vivre est un art; (b) par une proposition: Il est sûr qu'il vient.; (c) par
un pronom impersonnel neutre: il (invar.), ce, cela, ça, ou par toute
nominalisation d'action (du type: Ce fait/ ce geste/ cet événement
etc. m'enchante), car cette nominalisation se substitue par il
impersonnel ou par ça/ cela: Voyager me plaît beaucoup. Que tu
viennes avec moi sera un plaisir pour moi.
Le test qui permet d’établir qu'il s'agit d'un sujet impersonnel
est la pronominalisation avec les pronoms cités: Cela me plaît
beaucoup (= de voyager). Ta venue/ ta visite me fera plaisir (=cela
me fera plaisir). Ce sera un plaisir que tu viennes avec moi. C'est
bizarre qu'il veuille partir seul (= cela est bizarre; son désir de partir
seul me semble bizarre). La phrase avec le sujet ça ou ce est
considérée par certains grammairiens comme un tour quasi-
impersonnel.

►Sujet collectif. On parle d'un sujet collectif (de référence plurielle)


quand il est exprimé par un nom collectif suivi d'un complément
Sujet
collectif
pluriel: une famille de médecins; une association de jeunes; un
couple de jeunes parents; un club d'aristocrates etc., ou par une
construction partitive: La majorité des députés a voté (ont voté)
contre. La plupart ont été contre cette loi. Une partie des députés
discute(nt) cette loi.

►Le sujet à la IIIe personne, peut être plein (notionnel) ou


pronominal (anaphorique). Le sujet est "plein" s'il est exprimé par
une expression nominale, par infinitif ou par une proposition
(subordonnée sujet). On considère que le sujet n'est pas "plein"
quand il est exprimé par un pronom anaphorique, car il faut se
Sujet «plein»
rapporter à l'antécédent de ce pronom si l'on veut retrouver son
contenu notionnel "plein". Ex. : Ça me plaît beaucoup. Le contenu
notionnel n'est pas donné dans le pronom ça; il faut donc se
rapporter à un antécédent pour savoir exactement "ce qui plaît": ce
roman (=ça) me plaît. Elle se met en retard.  Qui se met en
retard? – la forme pronominale elle ne donne pas le contenu
notionnel: il faut se rapporter à son antécédent pour savoir à qui fait
référence le pronom: Marie (=elle) se met en retard, Marie et elle
étant des expressions coréférentielles.
Il y a parfois des phrases qui ont simultanément un sujet
pronominal et un sujet "plein": Il risque beaucoup, Jean. Ça ne me
plaît pas qu'il vienne tous les jours. Il est nécessaire qu'il arrive à
temps. Le pronom anticipateur évoque un objet de discours "saillant"
pour le locuteur, ce qui explique la pronominalisation qui se rapporte
à un antécédent "mémoriel", explicité par le groupe sujet détaché à
droite dans la phrase.

26
Constituants obligatoires de la phrase: le sujet et la prédication

Détachement ► L'opposition sujet plein/ sujet pronominal permet de comprendre


à gauche
du sujet nominal
mieux le problème du sujet redoublé ou repris par une forme
+ pronominale: La guerre, c'est terrifiant. Qu'il se soit classé le premier,
reprise par sujet c e l a ne me surprend nullement. Là où le ministre a commis un
pronominal péché, c’est d’avoir négligé le pouvoir du Syndicat. Par le
détachement du sujet à gauche ( Jean, il aime bien voyager), ou à
droite (Elle n'est pas bête, cette créature.), le verbe pivot de la
Détachement phrase serait resté sans sujet, et donc cette place dans la phrase est
à droite
du sujet nominal
occupée par un pronom sujet: elle, il, dans les exemples donnés).
+ La reprise du sujet ne se limite pas à l'anaphore pronominale;
anticipation par sujet le sujet est redoublé parfois par une anaphore nominale (un nom
pronominal générique): Qu'il vienne avec son frère, ce fait /cette surprise/
cette bêtise ne me plaît guère. Plier bagages, cette activité m'ennuie
énormément. (sujets repris par anaphores nominales).
►Sujet clitique/ vs/ tonique.
Selon l'accent dans la phrase, il y a un sujet tonique (accentué) ou
Sujet clitique
un sujet atone ou clitique, exprimé par les formes non accentuées
(non accentué) des pronoms personnels et par le pronom on ou ce: Lui part, moi je
reste; Marie, est-elle d'accord ? (lui, moi, Marie = sujets toniques; je,
elle = pronoms conjoints au verbe, donc: sujets clitiques). C’est le
contexte qui permet de déterminer si un sujet est accentué ou non
dans la phrase. En fonction du contexte, elle, nous, vous, elles,
peuvent être toniques ou atones. Les pronoms sujets : je, tu, il, ils,
on et ce (et il impersonnel) sont des formes clitiques dans toutes les
positions syntaxiques: ils se prononcent toujours dans un même
groupe phonique que le verbe qu'ils accompagnent.

Sujet segmental ►Le sujet peut être segmental ou sous-entendu:


 Le sujet est proprement sous-entendu quand il n'a pas une
Sujet sous-entendu
Sujet implicite expression segmentale dans la même phrase, comme dans les
L'ellipse du sujet textes publicitaires suivants: Un numéro exceptionnel de jeux
Sujet non exprimé mathématiques ! La magie des algorithmes, de quoi mettre votre
logique à l'épreuve… Tout en s'amusant. (qui s'amusera? sujet sous-
entendu: celui qui achètera la revue avec des jeux mathématiques).
Le sujet est sous-entendu auprès d'un prédicat exprimé par un
infinitif dans une phrase impérative (Voir réponse au dos. À retourner
sous enveloppe affranchie.) ou interrogative (Que faire ? Où aller?
Comment répondre à son geste ?) ou dans une phrase elliptique. Le
style concis est propre à certains types de textes: un télégramme
(Arrive demain.), un journal intime («Goût de la vengeance. Plaisir
naturel de la démolition. Ivresse littéraire» [Baudelaire]), un
sommaire narratif: Salvador fait à pied le tour de son bureau, (…)
plie son ouvrage, (…) se lève. Sort. Descend dans le métro. Assez
absent de lui. [Echenoz] (ellipse du sujet).

27
Constituants obligatoires de la phrase: le sujet et la prédication

Textes Le sujet réel est non exprimé dans certains tours passifs: Luc a été
(A) Mon camarade lui nommé conseiller du ministre-délégué aux Relations internationales.
posa des questions sur Les nouvelles stratégies sont appliquées partout dans ce domaine.
son métier et l'écouta L'exposition s'ouvre samedi. La bière est servie dans des chopes.
avec intérêt. Je retrou- dans ces phrases, le sujet grammatical ne réalise pas l'action
vais là le Robert,
lunatique mais capable évoquée par le verbe, le sujet réel étant sous-entendu: c'est le
de s'intéresser aux ministre qui a nommé son conseiller; ce sont les chercheurs qui
autres et de gagner appliquent les nouvelles stratégies; ce sont les organisateurs qui
leur cœur. (…) ouvrent l'exposition; ce sont les tenanciers du bistrot qui font servir la
– Je trouve qu'il bière dans des chopes.
manque une chose ici,
dit-il au père d'Anne-
Marie. Devinez quoi,
Exercice d'entraînement
Papy… A. Dans le texte A, donné ci-contre, identifiez les sujets rattachés aux
(B) Anne-Marie neuf pivots prédicatifs (il y a seulement cinq sujets segmentaux ! ):
semblait ravie de poser  S …………………… écouter  S
l'entente entre son …………………………
père et Bob. (…) Elle retrouver  S ………………. s'intéresser  S …………………
éclata de rire. Ce rire,
quand je repense à la gagner  S ………………… trouver  S …………………………
tournure que prirent manquer  S ……………… dire  S …………………………
les événements, me deviner  S …………………
glace le cœur.
–Il manque la mer, dit
Robert, d'un ton grave B. Quels sont les sujets pronominaux et les sujets pleins (texte B) ?
qui nous surprit tous …………  S ……………. …………  S ………………………
les trois. [Modiano] …………  S ………….… …………  S ……………………
…………  S ………….… …………  S ……………………
…………  S ………….… …………  S ……………………

2.1.2 La réalisation linguistique du sujet

(I) Le sujet nominal. Le sujet peut être exprimé :


La fonction sujet • par un nom propre (défini) ou commun (défini/ indéfini, avec
est exprimée par :
prédéterminants ou avec article zéro):
• GN Luc / ce garçon/ un garçon/ le garçon/ vient avec nous.
→nom, Parents et enfants y sont convoqués. Les jours s'en vont.
nominalisation • par une nominalisation:
→ pronom "A" est la première lettre de l'alphabet. Un "tiens" vaut mieux
• P (subordonnée) que deux tu l'auras. «Napoléon» comprend huit lettres. (le nom
→ avec verbe
à l'infinitif
propre n'est pas employé, il est seulement "mentionné"). Le 55
est au troisième (l'appartement 55 est au 3e étage).
→ avec verbe (II) Le sujet pronominal se réalise:
fini • par un pronom personnel, clitique (Tu es invité) ou tonique
(Toi, tu es invité); Le pronom sujet redouble parfois un sujet
tonique pronominal (Ils se sont rebiffés, eux.) ou nominal:
L'amour, ça vous tombe dessus.
• par le pronom indéfini on, de référence personnelle: On nous a
proposé un contrat avantageux.
• par un pronom possessif, démonstratif, indéfini, relatif, interrogatif:
28
Constituants obligatoires de la phrase: le sujet et la prédication

Ton chien est là, le mien est à la maison. Celui-ci ne me plaît


plus. Chacun a sa part de vérité. Tous sont venus. L'homme
qui vient d'entrer porte un chapeau. Nous devons obéir à nos
parents, lesquels ont aussi leurs obligations envers les enfants.
Je veux savoir qui / lequel acceptera. Ça m'évite de décider.
Tout finit par s'arranger. Quiconque veut, réussit.

Distinguez :
«postiche», vide de contenu: il (neutre, impersonnel), ce, cela/ça :
Il neige; Il faut partir. Ça dure.
Sujet
sujet individuel ça (fam.), cela, il personnel (masculin singulier) :
Ça, c'est trop grand ! (=cet objet) Ça me plaît davantage. Il me plaît, ce garçon.
Cela est un peu cher, six francs la bouteille, mais cela réjouit le coeur.
Tout cela est laid,
Cela/ça n'est pas toujours impersonnel: il peut être aussi un pronom anaphorique de
référence individuelle, sans connotation virtuelle; les exemples qui suivent relèvent du
langage familier:
Qu'est-ce que ça décontracte !
C'est fou ce que ça détend. C'est un truc chinois, je crois.
C'est bien joli quand ça vous tombe dessus mais ça ne tient pas
(Pas d'entité notionnelle définie dans ces phrases, c'est seulement en connaissant la
situation de communication que l'entité sujet pourrait être repérée).

(III) Le sujet propositionnel se réalise par une proposition à verbe


fini ou infinitive :
• La subordonnée sujet réduite (quand elle est à l'infinitif)
Promettre est noble. Promettre et tenir font deux (sujet infinitif
multiple). Venir avec vous m'enchante. (Qu'est-ce qui
L'infinitif m'enchante ? Le fait de venir…).
en fonction Mon Dieu! être heureux, être aimé, n'est-ce que ça?[Stendhal]
 Parfois, l'infinitif en fonction de sujet est précédé par la préposition
de
DE (surtout dans la langue classique): Ça lui fait du bien d'y aller
sujet grammatical (Qu'est-ce qui lui fait du bien ? d'y aller = sujet). Mais: Aller là lui fait
du bien. (Dans cette phrase, il n'est pas nécessaire d'avoir la
préposition de). Cela ne me plaît pas de le voir avec Marie. (Qu'est-
ce qui ne me plaît pas ? Le fait de le voir avec Marie). En début de
phrase, la préposition de n'apparaît plus: Le voir avec Marie ne me
plaît pas (sans préposition dans la langue actuelle).
La subordonnée infinitive peut se développer en subordonnée à verbe
fini (avec indicatif, conditionnel ou subjonctif):
Il est essentiel (pour moi) de Il est essentiel que je vous
vous parler avant que les parle avant que les enfants ne
enfants ne vous voient. vous voient. [Stendhal]
Il lui est impossible d'avouer. Il est impossible qu'il 'avoue.
(subordonnée sujet infinitive) (subordonnée sujet à verbe fini)

29
Constituants obligatoires de la phrase: le sujet et la prédication

 L'infinitif peut avoir un sujet propre:


Le prédicat
– explicite (grammatical): Un fils S insulter son père, cela est odieux.
dans la – implicite (retrouvé dans le contexte):
subordonnée sujet: D'abord, ces gens-là ont-ils des passions? Mystifier est leur fort.
– infinitif Le sujet de l'infinitif est souvent un sujet indéfini ou générique: Faire
cela n'est pas bon (sujet indéfini: n'importe qui ferait cela, ou
– verbe fini
(forme verbale
générique: pour tout le monde, faire cela n'est pas bon). C'est positif
personnelle) de braquer les projecteurs sur la poésie ( Dans notre société, il est
bien d'accorder de l'importance à la poésie, sujet personnel indéfini
générique: «tout le monde», «qui ce soit», «les spécialistes», «les
médias», «l'État»).
 Le sujet «réel» de l'infinitif se retrouve parfois dans un objet
indirect: Pour Jean OI, faire cela est un grand triomphe. (le sujet du
verbe faire est le même actant que celui exprimé dans un
complément d'objet:
Pour Julien, faire fortune, c'était d'abord sortir de Verrières.
Il lui fut impossible de manger et presque de parler.
Il lui arrivait de dire les choses les plus ridicules. [Stendhal]
Ce sujet réel peut imposer l'accord du prédicat. Comparez:
(a) Il est impossible d'être plus raisonnable, plus simple. Être
raisonnable, c'est impossible !
L'expression
 sujet non déterminé, on sous-entend un sujet générique.
d'un sujet propre En revanche, dans les phrases :
auprès d'un verbe (b) Il nous est impossible d'être plus raisonnables, plus
à l'infinitif
simples. Pour nous, il est impossible d'être plus raisonnables,
plus simples. (accord au pluriel: raisonnables, car nous est le
sujet sous-entendu de l'infinitif).
• Sujet exprimé par une structure relative-infinitivale (prép +
qui/quoi + INF)
Il me reste strictement de quoi vivre  Que me reste-t-il → De quoi
vivre. La structure formée du pronom relatif (de +) quoi et de l'infinitif
vivre est une structure propositionnelle (S – V – OI):
X (sujet effacé ou zéro) – vivre – de quoi (objet indirect)
• La subordonnée sujet à verbe fini (non réduite)
Quand le prédicat dans la proposition en fonction de sujet est un
verbe à un mode personnel (verbe fini), la proposition sujet se définit
par son sous-type syntaxique:
a) proposition complétive sujet (conjonctive) :
Qu'il fasse mauvais temps, cela ne me plaît pas.
►Sujet propositionnel antéposé (à verbe fini: SBJ)
La complétive sujet est introduite par la conjonction que; elle se met
d'habitude en tête de phrase (situation dans laquelle elle est
construite obligatoirement avec le subjonctif):
Que vous ayez raison de refuser, ce n'est pas à moi de le dire.
Qu'il vienne seul, cela est très probable. (c'est sûr)
Que l'argent ne doive pas compter entre nous, c'est évident.
(Subjonctif, quelle que soit la nature de l'action verbale)

30
Constituants obligatoires de la phrase: le sujet et la prédication

D'après son élément Remarque: la subordonnée sujet antéposée (=sujet réel) est reprise
introducteur, par un sujet apparent (le pronom démonstratif "neutre" ce, cela ).
►Sujet propositionnel postposé (à verbe fini: IND/ SBJ)
la subordonnée à
Il est très probable qu'il vient seul.
verbe fini Il est certain que j'y vais au mois de mars.
en fonction de Sujet, (indicatif pour un fait réel/ probable).
Mais :
est une proposition :
Il n'est pas sûr qu'il vienne seul.
a) conjonctive ; Il serait bon que tu sois là, quand on discutera le programme.
b) relative ; Il est douteux qu'il ait fait cela. (Subjonctif pour action incertaine)
c) interrogative Remarque: la subordonnée sujet postposée (=sujet réel) est
anticipée par un sujet apparent (le pronom personnel "neutre" il ).
indirecte
b) proposition "substantive" (nommée aussi "relative sans
antécédent"):
Qui veut savoir saura.  X saura.
Qui veut la fin veut aussi les moyens.
Quiconque ne sait pas patienter, ne réussit pas ses projets.
La proposition introduite par le pronom relatif qui (sans antécédent) ou
par le pronom indéfini quiconque est une proposition subordonnée
substantive parce qu'elle équivaut à un groupe nominal renvoyant à
une entité X, définie (= "celui-ci", "cette personne", "cet objet" etc.), ou
indéfinie (= "quelqu'un", "quelque chose", "n'importe qui/ quoi").
Pour réaliser une proposition "substantive" à partir d'un autre
pronom relatif (que, quoi, dont), il faudrait ajouter un indice nominal
Propositions démonstratif: Ce que tu me caches, cela m'inquiète. Ce dont elle me
subordonnées parle n'a aucune importance. Ce à quoi tu penses m'intéresse plus
que ce que tu dis. Ce qu'il dit ne me plaît pas.
sujets
c) proposition interrogative indirecte, introduite par un élément
interrogatif (dans les interrogatives indirectes, le statut de la phrase
dans son ensemble est assertif): Comment il a fait cela / S'il a déjà
fait cela /Quand il a fait cela reste pour moi un mystère. D'où il vient
ne m'intéresse pas. Avec quoi il a réalisé cela est un mystère pour
moi. Pourquoi il se cache, c'est un mystère pour nous tous. Depuis
quand il est dans cet état est une question vitale.
Remarques finales sur l'expression du sujet grammatical par un
infinitif ou par une proposition à verbe fini
La proposition réduite à l'infinitif est parfois anticipée par la forme
"neutre" du pronom personnel il ou reprise par le démonstratif ce:
Il est facile de trouver son bonheur.
 Trouver son bonheur c'est facile.
Se promener chaque jour est (c'est) une bonne habitude.
De même: Il est utile de noter que lundi le musée est fermé.
C'est noté ! C'est utile de lire ça. Lire, c'est utile.
Qu'est-ce que ça rapporte, voir un bel arbre? (ça = le fait de
voir un bel arbre)
Il est rare de trouver un chien de race pure. (Trouver un chien
de race pure, c'est rare.
(…) tant il est difficile d'avoir assez de force de caractère pour
résister à la possession du pouvoir absolu. [Stendhal]
31
Constituants obligatoires de la phrase: le sujet et la prédication

 Quand le sujet se réalise par une proposition, la place du sujet


Propositions auprès du verbe principal reste disponible pour un sujet pronominal
subordonnées ou nominal qui reprend le contenu de la complétive sujet;
sujets et leur Qu'il parte si vite, cela S me semble bizarre.
reprise ..………"……….. ce geste S me semble bizarre.
..………"……….. cette attitude S est assez curieuse.
par un pronom
Qu'il fasse mauvais temps, voilà ce qui ne me plaît pas
impersonnel: .………"……….. ceci ne me plaît pas.
il0 .………"……….. cet événement / ce phénomène/ cette idée ne
ce me plaît pas etc.
ça Dans toutes ces variantes de phrase, la subordonnée sujet est
r e p r i s e par une anaphore pronominale: ce, cela, ou nominale: ce
cela
geste, cette attitude, cet événement, ce phénomène etc.

Pour mémoire :
Le sujet répété dans la phrase à coordination
a) Prédications juxtaposées
► Si plusieurs prédications se rapportent à un seul et même sujet, il n'est pas obligatoire
de le répéter devant chaque prédicat de statut affirmatif, s'il s'agit de phrases
juxtaposées: Je me lève, prends mon sac et quitte les lieux. (trois prédications, un sujet
coréférentiel, qui ne se répète pas).
►La non répétition « confère de la vivacité et de la rapidité au discours », considèrent
certains grammairiens.
b) Prédications coordonnées par conjonctions
►La répétition du sujet coréférentiel est facultative dans les phrases coordonnées par les
conjonctions ET, OU, MAIS : Il l'avait rencontré et, à cette occasion, l'avait invité au repas de
Noël. Il m'appellera demain ou m'enverra un message électonique. Cela lui produisit un
soulagement et lui fit retrouver son espoir. Mais la répétition est possible et, parfois, requise:
Ou il vient, ou il reste, cela m'est égal.
►Le sujet doit se répéter toujours dans la phrase à coordination par DONC, CAR, OR (le
sujet ne peut pas être effacé): Tu t'es mis en retard, DONC tu resteras debout jusqu'à
l'entr'acte. Il nous a refusé, CAR il a peur. Vous vous êtes payé notre tête, vous ne vous
attendez DONC pas que nous acceptions ce jeu.

2.1.3. La place du sujet dans la phrase

►L'antéposition du sujet : S – V.
La place "canonique" du sujet dans la phrase assertive est avant le
prédicat. Marie chante. (ordre non marqué: S–V)
►La postposition du sujet nominal ou propositionnel: V – S
 La postposition du sujet "plein" (nom ou proposition sujet)
apparaît dans les tours de phrase interrogatifs: Qui est ce garçon ? –
l'ordre canonique aurait été: "ce garçon (S) est mon frère". D'où vient
Jean ? Quand sera de retour votre père ? Comment se débrouillent vos
parents ? Quel nom a choisi la famille pour le dernier-né ? Quelle
énigme cache cette pyramide ? (sujet nominal postposé)
 Dans la phrase exclamative: Plût au Ciel que je réussisse !
Vive la France ! Puisse maman guérir ! (Qu'il) arrive, donc, ce bus!
La postposition est de rigueur aussi avec l'attribut détaché à gauche

32
Constituants obligatoires de la phrase: le sujet et la prédication

(pour topicaliser la caractéristique qu'il exprime): Impeccable cette


La place du Sujet: robe! Trop sobre cette coiffure ! Excessive cette retenue ! Parfaite
cette ligne ! Exquis ce repas ! Super ce gars !
S–V
 Dans les relatives: La politique que met en place un tel
(l'antéposition = parti…; / à laquelle s'attendent nos gens…; L'avion qu'attendent
position canonique) tous ces voyageurs…./ duquel sont descendus tous ces voyageurs.
Les idées qu'affirment nos politiques…./ autour desquelles se
réunit notre famille …; vers lesquels se dirige toute notre attention.
– postposition;  Le sujet postposé est soit un nom (éventuellement un
– inversion groupe nominal étendu), soit un pronom accentué : Où partira Jean ?
Quant partira mon frère ? Quand partira le tien? L'infinitif et la
proposition sujet ont parfois une place postposée requise, par
exemple pour les prédicats impersonnels: peu importe, mieux vaut,
reste(nt): Mieux vaut y aller. N'empêche qu'il est rentré sain et sauf
(l'antéposition du sujet est impossible pour ces expressions). Peu
Sujet en position importe qui vienne. Restent deux questions.
«non topique»  La postposition du sujet nominal est bloquée si ce sujet
(quand le sujet n'est postposé risque de se retrouver à côté d'un autre groupe nominal de
rection directe (objet direct ou attribut) ce qui produirait un message
pas un élément déjà
plus ou moins ambigu: *Quand verra Luc Marie ? *Pourquoi a battu
connu, mais un objet Pierre Luc ? (OD+ S  la succession immédiate d'un objet direct et
qu'on veut introduire d'un sujet est interdite en français). *Depuis quand est Jean
dans le discours) ingénieur ? (S + ATTR la succession immédiate d'un sujet et d'un
nom à fonction d'attribut est à éviter). *Où a mis le paquet Jean ?
*Où a mis Jean le paquet ?
 Conditions syntaxiques favorables à la postposition du
sujet: parfois, la postposition est de rigueur afin de pouvoir construire
une certaine stratégie perceptive dans la phrase:
– dans le discours scientifique, explicatif, didactique, pour introduire
un objet de discours porté à l'attention du public (du lecteur):
Soit un triangle… Soient les exemples suivants…. À cet endroit
se pose une question…; …ici apparaît un nouveau personnage;
Dans ce chapitre sont présentées les espèces dont nous venons
de parler…; À ce sujet, d'une grande importance est la théorie
de…; En cette matière, sont beaucoup cités les auteurs du grand
Traité de l'Académie; etc.
Par ces tours de phrase à sujet postposé, un nouvel objet de
discours est introduit à l'attention du lecteur, un objet que celui qui
interprète le message ne connaissait pas auparavant. L'information
nouvelle est portée par ce sujet postposé, le prédicat étant en
position syntaxique de topique (=élément connu). D'ailleurs les
Postposition du sujet
prédicats ont un sens général existentiel: être, apparaître, etc.
«non topique» – certains verbes (de mouvement, d'apparition) comme: venir,
«De retour dans la capitale survenir, apparaître, suivre, rester, etc. acceptent plus facilement un
britannique en fin de sujet postposé. Parfois, la postposition du sujet permet de thématiser
matinée, Jacques Chirac le dynamisme du procès: Viennent aussi les parents…; Arriveront les
s'est rendu à la résidence
de France, où l'attendait
jeunes mariés… Arrivent les invités;
une délégation des 300 – dans d'autres situations argumentatives impliquant la topicalisation
Français.» du prédicat (quand le prédicat apparaît en position de «topique» de
la phrase, et donc le sujet se dirige en postposition verbale):
[Infos, A.P., 18.11.04]
33
Constituants obligatoires de la phrase: le sujet et la prédication

Restent les indécis. N'entre pas ici qui veut. Reste qui veut.
Vient un moment où il faut choisir. À ceci s'ajoutent aussi mes
réticences. À quoi s'attendent ces gens … ? Heureux les
pauvres d'esprit !

►Postposition accompagnée par la reprise du sujet : il – V – S


(par une copie pronominale avant le prédicat):
 Le détachement à droite du sujet indéfini entraîne la
anticipation de celui-ci par une forme pronominale atone qui remplit
la place vide, en tête de phrase: Il tombe des clous ! Il arrive des
Sujet postposé invités. Il vient un moment dans la vie…;
et repris  La reprise pronominale du sujet indéfini se fait par la forme
neutre du pronom personnel, il, forme invariable, qui permet
d'anticiper le sujet réel, postposé. Les tours de phrase à sujet indéfini
postposé, sont des tours de phrase impersonnels: Ilsingulier arrive
des trainspluriel à la gare. (voir aussi les exemples antérieurs)
 À la différence de l'impersonnel Il neige (seul type de
construction possible, puisque le verbe neiger est toujours
T impers →
transformation
impersonnel, de par sa nature lexicale), la seconde phrase peut
d'une phrase revêtir les deux tours:
canonique – tour phrastique personnel: Les trains arrivent. (sujet défini)
personnelle, dans – tour phrastique impersonnel: Il arrive des trains. (sujet indéfini)
un tour de phrase L'impersonnel apparaît en général avec un sujet indéfini (on ne dit pas:
impersonnel
Il arrive les trains, mais Il arrive un train/ des trains dans la gare).

►L'inversion simple du sujet clitique: V – Scl (clitique).


On parle d'inversion simple du sujet pronominal (et non pas de
postposition) quand il s'agit d'un pronom sujet (Scl = sujet clitique,
exprimé par les formes conjointes du pronom personnel).
L'inversion simple apparaît avec le sujet exprimé par les formes non
accentuées (=clitiques) du pronom personnel, y compris l'indéfini on, et
aussi avec le démonstratif ce. L'inversion se fait:
• dans les tours interrogatifs:
Vient-il ? Ne veut-on pas y aller plus tôt ? Parlez-vous couramment le
français ? Êtes-vous contents ? En avait-il retenu les auteurs?
Obs. L'inversion est bloquée après la périphrase interrogative est-ce
que: Est-ce qu'il vient ? Est-ce qu'on ne peut pas y aller plus tôt ?
• dans la phrase exclamative: Est-il bête !
• après certains adverbes introducteurs de phrase:
Sans doute, avait-il raison de refuser. Toujours est-il que nous en
Inversion du Sujet avons besoin. Encore faut-il qu'il vienne.
• dans les propositions incises (quand on rapporte des discours directs):
• simple:
– D'accord, dit-elle.
– Où es-tu ? – demanda-t-il. (demanda l'enfant = sujet postposé).
Vient-elle?
• dans certaines subordonnées circonstancielles:
• complexe: Je veux ce café, soit-il refroidi ou non. (subordonnée concessive,
Marie, vient-elle ? voir aussi l'inversion dans la phrase temporelle, concessive,
conditionnelle).

►L'inversion complexe du sujet (dans les tours interrogatifs):

34
Constituants obligatoires de la phrase: le sujet et la prédication

L'inversion complexe implique simultanément l'expression d'un sujet


nominal, disloqué à droite ou à gauche:
V – S (clitique) – (N)
(N) – V – S (clitique)
et sa reprise par pronom clitique en position post-verbale:
Cet enfant est-il sage ? Est-il sage, cet enfant?
Cet enfant = sujet nominal; il = pronom clitique qui reprend le
sujet cet enfant, et qui se situe en position post-verbale.
Jean et Marie veulent-ils venir ? Acceptent-ils de partir, Jean et
Marie? Ces fillettes, seraient-elles vos cousines ?
Les situations d'inversion du sujet sont décrites dans les sections
consacrées aux types de construction syntaxique qui entraînent
cette inversion (voir par exemple, ci-dessous, dans l'unité
d'apprentissage 7, la variation stylistique impliquée par l'inversion
dans la phrase interrogative).

Test d'autoévaluation
Pour bien gérer ce test, il est indispensable que vous ayez déjà parcouru les explications
et les analyses données dans l'unité d'apprentissage 2. Vérifiez vos solutions aux
exercices en consultant la rubrique Clés du test d'autoévaluation.

Exercice 1
Identifiez le type de sujet dans les phrases suivantes:
En France, il y a en nombre infini des rites, des usages et des manières qu'il faut
assimiler, qu'il faut saisir, et qu'il faut respecter scrupuleusement si l'on a l'intention de
vivre en société. [...]Tout le fonctionnement de la société française est codifié dans le
détail, infiniment plus que les pays du Nord. Mais à Paris, la codification atteint un
niveau d'intensité et de complexité qui dépasse de loin tout le reste. [...] Phénomène
propre à Paris, tout le monde ici traque de façon obsessionnelle les fautes de code.
………………………………………………………………………………………………..
………………………………………………………………………………………………..
………………………………………………………………………………………………..
………………………………………………………………………………………………..
………………………………………………………………………………………………..
Exercice 2
Construisez des phrases à sujet propositionnel (deux phrases pour chaque type indiqué) :
a) S exprimé par interrogative indirecte: ………………………………………………………
…………………………………………………………………………………………………….
b) S exprimé par proposition précédée d'un élément relatif …………………………………
…………………………………………………………………………………………………….
c) S exprimé par complétive sujet : ………………………………………………………
…………………………………………………………………………………………………….
Exercice 3
Trouvez des phrases matrices pour les sujets suivants, exprimés par infinitif ou par
proposition à verbe fini :

• arriver à temps (proposition infinitive)


………………………………………………………………………………………………
35
Constituants obligatoires de la phrase: le sujet et la prédication

• à quelle heure rentrera papa (proposition interrogative indirecte)


………………………………………………………………………………………………
• qu'il fasse de la gymnastique chaque matin (complétive sujet)
………………………………………………………………………………………………
• qu'elle fait ses courses chaque matin (complétive sujet)
………………………………………………………………………………………………
• que vous preniez le bus (complétive sujet)
………………………………………………………………………………………………
• que vous prenez le repas en ville (complétive sujet)
………………………………………………………………………………………………
Exercice 4
Construisez six phrases contenant des verbes à l'infinitif et au participe présent ayant leur
propre sujet segmental.
………………………………………………………………………………………………
………………………………………………………………………………………………
………………………………………………………………………………………………
………………………………………………………………………………………………
………………………………………………………………………………………………
………………………………………………………………………………………………

2.2 La prédication verbale


Le constituant de phrase qui remplit le rôle de la prédication verbale
est le groupe verbal (GV) dont le pivot est un verbe sémantiquement
"plein": Marie chante. Elle a une belle voix. J'écris une lettre. Nous
prenons le déjeuner. Les enfants obéissent à leurs parents. La phrase à
GV = le syntagme
verbal
prédication verbale présente une structure bipartite: ses constituants
immédiats sont: le groupe sujet (GN0) et le groupe prédicatif (GPréd.).
pivot de la phrase Celui-ci comprend un pivot verbal, ses compléments (détermination du
à prédication verbe), éventuellement des ajouts ou constituants facultatifs (des
circonstants); la prédication minimale implique seulement les
verbale
constituants obligatoires du pivot verbal et le sujet.
Le GV est organisé autour d'une catégorie verbale à lexème
"plein"; de cette façon la structure du GV dépend de traits
contextuels imposés par ce lexème verbal, pivot de la prédication.
Le GV peut avoir comme catégorie verbale centrale:
– un verbe a-valent (impersonnel) : neiger, pleuvoir etc.;
– un verbe monovalent (intransitif): courir, marcher, passer,
traverser, se promener etc.
– un verbe bi- ou multi-valent (verbe ayant un ou plusieurs
compléments): donner, traduire, écrire, obéir etc.
La structure interne du GV, constituant obligatoire de la phrase
à prédication verbale, sera présentée ci-dessous, dans l'unité
d'apprentissage 4.

36
Constituants obligatoires de la phrase: le sujet et la prédication

2.3 La prédication nominale

2.3.1 Termes de base de la prédication nominale


La prédication nominale se réalise par un constituant de phrase appelé
attribut (ou tout simplement le "prédicatif" de la phrase), relié au sujet
par un lien verbal (copulatif), incomplet comme prédication. La phrase a
une structure ternaire ou tripartite, ses constituants étant: le sujet (S),
l'attribut (ATTR) et le verbe attributif (copulatif). Les grammaires
décrivent deux types de structures à prédication nominale:
• l'attribut du sujet (ATTR–S) : Marie est institutrice.
• l'attribut de l'objet (ATTR–O) : Je la croyais avocate.
Le verbe attributif, pivot d'une prédication nominale peut être:
L'attribut (ATTR) sert à
– un verbe copulatif (être ou d'autre verbe à fonction de "copule") qui
caractériser introduit seulement un attribut du sujet:
Marie est fatiguée. Le café est amer. Le temps se fait froid.
 le sujet, par Maman devient plus indulgente.
l'intermédiaire d'un verbe – un verbe sémantiquement "plein", auquel on pourrait rattacher un
d'état ou d'action;
attribut du sujet ou un attribut de l'objet:
ou Marie rentra très fatiguée (ATTR–S).
J'aime le café amer (ATTR–O).
l'objet direct par Ce dernier type de construction réalise une prédication complexe,
l'intermédiaire d'un verbe verbo-nominale, l'attribut marquant une prédication seconde:
d'action.
La pluie tombe monotone (ATTR–S).
La pluie tombe. ← prédication première
La pluie est monotone (quand elle tombe) ←prédication seconde
La prédication complexe peut apparaître avec les deux types d'attribut:
Maman me regarde indulgente.
Les contestataires sont partis furieux.
Cette femme paraît très indulgente envers ses enfants.
Je trouve cette femme très indulgente envers ses enfants.
Le tribunal a jugé Jean coupable.
La majorité le considère comme un héros.
Luc a été nommé président.

Exercice d'entraînement
Faites des phrases à prédication seconde ayant comme pivot verbal les verbes NAÎTRE
VIVRE, SORTIR, SOURIRE, PASSER.
……………………………………………………………………………………………………
……………………………………………………………………………………………………
……………………………………………………………………………………………………
……………………………………………………………………………………………………
……………………………………………………………………………………………………

2.3.2 Les verbes attributifs

A. Verbes copulatifs, qui sont des verbes intransitifs de sens lexical


incomplet. D'après leurs traits inhérents, on distingue plusieurs sous-
classes sémantiques de verbes copulatifs:

37
Constituants obligatoires de la phrase: le sujet et la prédication

– des verbes d'existence: Vcop→ être, rester, demeurer, se tenir;


– des verbes d'apparence: Vcop→ sembler, avoir l'air, paraître,
apparaître, se montrer, se révéler, s'annoncer etc. Ex. Ils ont l’air
Les verbes méchants (ou: méchant). Elle m'a eu l'air intelligente/ m'a semblé
copulatifs assez intelligente.
sont suivis
– des verbes de devenir, de changement d'état ou d'apparence:
d'un attribut du sujet
(ATTR–S); Vcop→ devenir, se faire, se muer en, naître, mourir, vivre, tomber, se
rendre, se faire, s'appeler etc.
L'attribut du sujet est parfois employé sans verbe copulatif.
Voici des constructions exclamatives avec ellipse du verbe de
relation prédicative:
Tiens, jolie cette maison ! (phrase elliptique: "la maison est
jolie"). (le sujet est aussi elliptique: Menteurs ! "ces gens, ils sont
des menteurs"). Quel menteur, Luc ! (sujet détaché à droite)
("Luc est un menteur": ellipse du verbe de relation prédicative). Quel
Salaud ! (avec ellipse non seulement du verbe copule, mais aussi du
sujet; il s'agit d'une phrase à sujet implicite, sujet recouvrable dans la
situation de communication).

B. Autres verbes attributifs :


– verbes causatifs: faire, laisser, élire, nommer, appeler etc.:
Nous l'avons élu sénateur. On a surnommé ce prince: « le Grand» .
–verbes d'expérience subjective et de perception: vouloir, voir,
aimer, plaire, vivre, etc.:
Sous-classes Il vécut très heureux dans ce petit village.
de verbes Au loin, la maison se voit claire et gaie.
–verbes de jugement, d'opinion, de déclaration: croire, se croire,
attributifs
juger, être présumé, trouver, estimer, voir, dire, annoncer,
reconnaître, déclarer, savoir, etc.: Il est supposé coupable. On le
croit honnête. Une partie de ces verbes se construisent avec un
attribut prépositionnel: tenir pour, considérer comme, regarder
comme, prendre pour, traiter de/ en: Ils la prennent pour une oie
blanche. Ils nous ont traités d'imposteurs. Ils nous ont pris pour des
imposteurs. Tu me regardes comme un ennemi.
– verbes de mouvement: apparaître, surgir, venir, sortir, partir,
quitter, rentrer, passer, traverser, se promener etc.:
Elle a quitté l'appartement en pleurs. Elle est rentrée en colère.
Elle se promène rêveuse.
Parfois, le verbe attributif dans la prédication nominale n'est pas exprimé:
– constructions avec de + ATTR:
Il n'y a de bon que celui-ci. (celui-ci est le seul qui soit bon)
Rien de plus triste que ce film ! (ce film est triste)

2.3.3 La réalisation linguistique de l'Attribut


L'attribut s'exprime par les mêmes moyens que la détermination
nominale (voir ci-dessous, l'unité d'apprentissage 3):
– adjectif ou tout autre constituant accordé en genre/ nombre
(participe passé, participe présent adjectivé): Cette employée n'est
pas aimable. Elle est pleine de soi. Je me sentais ankylosée. Ils sont
vraiment brillants;
38
Constituants obligatoires de la phrase: le sujet et la prédication

– groupe nominal de rection directe: Marie est ma sœur. Luc est


chercheur;
Expression de – groupe nominal prépositionnel ou diverses locutions : Ce meuble
est en bois de noyer. Cette serviette est en cuir. Il me tient pour un
l'Attribut par:
débutant. Maman était au bout (de ses forces). Papa est en colère.
GN – formes toniques des pronoms : Ce cahier n'est pas le mien. Ces
GAdj objectifs ne sont pas les nôtres. Luc est devenu quelqu'un de très
GPrép important.
– adverbe ou préposition utilisée adverbialement: Tout est bien. Elle
INF
était contre, nous étions pour.
Proposition À côté de toutes ces différentes réalisations de l'attribut, on
comparative peut avoir un attribut réalisé par proposition subordonnée attributive:
Luc est comme tu veux (qu'il soit). (prop. attributive comparative)
Je vois Luc travailler. (prop. attributive infinitive)
Je le vois qui travaille. (prop. attributive relative)
Je le vois travaillant à son bureau. (prop. attributive participiale).
Voici les formes que prend l'attribut propositionnel:
– infinitif (avec ou sans préposition): Notre objectif est d'assurer la
paix dans la région. Vouloir c'est pouvoir.
– proposition subordonnée attributive (comparative, relative sans
antécédent, relative en fonction de prédication seconde):
Luc est resté comme tu le sais. L'avenir est ce que vous voulez
qu'il soit. La vérité est qu'il a peur d'y aller. Luc est devenu ce
L'Attribut
qu'il est en trois ans. Il est là, qui sourit.
exprimé
par un pronom ►L'attribut se pronominalise par la forme neutre du pronom
personnel, le: Heureux, il l'a été bien, quand il avait revu sa famille.
Luc est conscient du danger, Marie, elle ne l'est pas.
►Il y a aussi des tours de phrase à attribut antéposé, dans
lesquels c'est le pronom relatif que qui apparaît en excluant une
autre pronominalisation par forme conjointe du pronom personnel:
Intelligente qu'elle était, elle a vite compris la trahison. (l'attribut
intelligente est repris par le pronom relatif que).
Conscients que nous étions du danger, nous refusâmes toute
implication. (selon les grammaires, que est une reprise
pronominale de l'attribut conscients par pronom relatif).
►Enfin, dans la phrase interrogative, l'attribut peut être
représenté par les pronoms interrogatifs que ou quoi:
Que serions nous sans votre aide ?! (Nous serions malheureux)
Qu'est-il ce jeune homme ? (Il est le fils du directeur).
Elle est quoi, Marie ? (Elle est employée dans une banque)

2.3.4 Les valeurs sémantiques de la prédication attributive


Du point de vue de leur interprétation, les phrases à prédication
nominale sont de deux types:
A. phrases à prédication nominale qualifiante, par laquelle
on attribue une qualité au sujet de la phrase par l'intermédiaire d'un
verbe copule :
(ATTR–S) Luc est laid. Marie est belle. Notre existence est éphémère.

39
Constituants obligatoires de la phrase: le sujet et la prédication

(ATTR–O) J'aime le café chaud. Luc le croit magnifique, son nouvel


appartement. Je la trouve assez large, la maison de Luc.
B. phrases à prédication nominale équatante (relation
"équative": Cet homme = mon père) par laquelle on identifie la
catégorie du sujet par nom de classe, propriété ou caractéristique
distinctive: Luc est ingénieur. (Luc = ingénieur). Cet homme est mon
frère. Mon frère est le chef cuisinier d'une grande maison.

2.4 L'accord avec le sujet dans la phrase à prédication verbale et nominale


Phrase à prédication verbale:
► le verbe de la phrase matrice s'accorde avec son sujet personnel
en personne, nombre et éventuellement en genre (formes verbales
Règles
composées, conjuguées avec l'auxiliaire être);
de l'accord Un lycéen M sg. s'estIII-e pers. sg. amusé M sg. à réciter un poème.
du prédicat Nous I-ère pers.pl. nous sommes I-ère pers.pl. amusés. M pl. à chanter.
avec le sujet Les rebellesM pl. ontIII-e pers.pl. été chassés M pl. de leurs principaux
bastions.
Phrase à prédication nominale:
► Il y a un double système d'accord grammatical: outre l'accord du
verbe, l'attribut (du sujet ou de l'objet) s'accorde lui aussi avec le
sujet ou l'objet, en genre/ nombre (s'il y a lieu, c'est-à-dire, si l'attribut
est réalisé par des catégories nominales variables en genre/
nombre).
Elle IIIe pers.sg / Fsg. n'est III-e pers. sg. pas belle Fsg. à regarder.
Ce cahier M sg. est le mien M sg..
Les journaux M pl. sont III-e pers. pl intéressants M pl..
►Quand le sujet est impersonnel, il est réalisé par: un infinitif, une
proposition ou un pronom de valeur neutre (impersonnel: cela, ce,
ça, il invariable), l'accord se fait à la IIIe pers. sg, masc. (invar.):
C'est fou de rouler à cette vitesse ! C'est très énervant (de
l'entendre). C'est bien quand ça vous vient, l'inspiration d'écrire
une poésie, mais ça ne tient pas! Tout cela nous distrait et
Sujet impersonnel nous empêche de faire le bien.
► Le sujet multiple impose le pluriel:
Bibliothécaires et enseignants côtoient éditeurs et imprimeurs, au
Accord avec le Salon du livre de Paris. L'actuel ministre de la culture, et l'ancien, ont
sujet on donné vendredi le coup d'envoi du Salon du livre.
– L'accord en personne du sujet multiple doit tenir compte de la
priorité des personnes du discours sur les "non personnes" (non
participants au discours), la hiérarchie personnelle étant:
Accord avec le
sujet multiple – Ière > IIe > IIIe ;
– le pluriel recouvre le singulier;
– le masculin prioritaire sur le féminin.
Cette hiérarchie agit simultanément, et donc la première personne se
met au pluriel si c'est un morphème d'accord prioritaire:
Toi (IIesg.) et moi (Ièresg.) partons (Ière pers.pl.), de même que:
Lui et moi partons.  Vous et moi partons. Nous et moi partons, etc.
– Quand le sujet à une personne prioritaire (Ière ou IIe pers.) est dans
une structure attributive nominale, on fait l'accord avec ce nominal (à
la troisième personne):
40
Constituants obligatoires de la phrase: le sujet et la prédication

Moi, Marie, je suis présente (Ièrepers. sg. / Fém.) au congrès.


Moi, Marie, je suis la seule présente (Ièrepers. sg. / Fém.).
Moi, Marie, je suis un citoyen qui est présent (IIIe sg./M)
Moi, Marie, je suis l'unique citoyen qui soit présent (IIIe sg. /M).
Accord avec le
Comparez à: Vous, Marie, vous êtes le seul Roumain qui soit
sujet personnel présent, ou: Marie, vous êtes (IIe pl/F) la seule Roumaine qui soit
on présente (IIIe sg/F). L'accord du verbe pivot de la phrase se fait à la
deuxième personne (vous↵ êtes), mais dans la proposition relative
l'accord se fait avec le nom (Roumain/ Roumaine), donc le verbe se
met à la IIIe personne du singulier (M ou F, selon le genre du nom
Accord avec le
employé).
sujet collectif ► Les sujets multiples en coordination (par d'autres conjonctions
que ET) ne font pas toujours l'accord au pluriel:
L'un ou l'autre doit venir (accord toujours au singulier pour la
coordination de ces pronoms); mais: Lui ou elle est attendu pour
présenter des excuses au nom de la direction; Lui ou elle sont
Accord des prédi-
attendus demain. L'un et l'autre sont venus/ est venu. (l'accord au
cats coordonnés pluriel est plus régulier, l'accord au singulier est rare dans ce cas de
sujets coordonnés par ET): Ni Paul ni Marie ne sont là. (accord au
pluriel); mais, si l'on applique la prédication à un seul des sujets,
distributivement, l'accord se fait au singulier: Ni Paul ni Marie n'est
arrivé.
►Le sujet on impose l'accord à la IIIe pers. du singulier, mais l'accord
en genre/nombre avec sa référence réelle: On est venus (=on =
nous, plusieurs, le masculin étant générique ou référentiel). On est
venues (on = Marie et sa mère). On s'est levés tard (les garçons/ les
enfants); on s'est levées tard (les fillettes).
► Le sujet collectif (foule, collectif, multitude, équipe, groupe,
groupement, etc.) s'accorde soit avec le nominal de sens collectif,
soit avec le nom de classe: Une foule d'institutrices sont apparues
Accord grammaical (visions sur les personnes: accord avec le nom de classe)/ Une foule
de travailleurs est apparue (vision sur l'ensemble compact de
(avec le sujet
personnes: accord avec le nom collectif). De même avec le peu de
apparent) Npl. : Le peu de gens qui reste/ qui restent.
► Il y a des noms de sens collectif grammaticalisés pour l'accord
logique, et donc, dans beaucoup de cas, ils s'accordent au pluriel:
– La majorité des employés sont arrivés. (accord logique,
d'après le sujet réel, donc au pluriel).
Accord logique – La majorité des employés est arrivée. (accord grammatical,
(avec le sujet réel) avec le sujet apparent).
À cette époque florissait (sg.) une société de jeunes gens riches ou
pauvres. (société n'est pas un nom grammaticalisé pour l'accord
logique, donc il s'accorde toujours au singulier).
– Après la plupart, le verbe s'accorde toujours avec le nom de classe
(complément du nom collectif), donc au pluriel: La plupart des gens
sont venus. La plupart sont d'accord.
► quand le sujet est le pronom relatif qui, il faut tenir compte de
l'antécédent de ce pronom: Marie, toi, qui es si belle ! Moi, Luc, qui
suis si beau ! Vous (les fillettes) qui êtes gentilles. Vous qui êtes
présents (générique).

41
Constituants obligatoires de la phrase: le sujet et la prédication

 Les clés du test d'autoévaluation


Corrigé de l'exercice 1:
1) des rites, des usages et des manières = S multiple postposé, après le présentatif
il y a; 2) qu'il faut assimiler = S impersonnel, après verbe impersonnel (falloir); 3)
qu'il faut saisir = S impersonnel; 4) qu'il faut respecter= S impersonnel; 5) on a
l'intention = S personnel indéfini; 6) de Ø vivre en société = S coréférentiel effacé,
l'infinitif ayant un agent identique avec l'agent du verbe principal (=On); 7) Tout le
fonctionnement de la société française est codifié = Sujet exprimé par GN étendu;
8) la codification atteint un niveau =S impersonnel (= le fait de codifier); 9) qui
dépasse = S pronominal, exprimé par pronom relatif qui, reprenant le contenu du
GN = niveau d'intensité; 10) tout le monde traque = S nominal.
Corrigé de l'exercice 2 :
a) Pourquoi il n'a pas appelé au secours, cela reste une énigme ! D'où il venait, c'était
une énigme pour moi. Comment il a trouvé l'issue, voilà qui est un miracle. C'est
inexplicable comment il a pu gagner la course.
b) Qui aime pardonne. Quiconque se lève tôt, réussit dans la vie.
c) Il est certain qu'il viendra demain soir. Je doute que tu puisses terminer cela jusqu'à midi.
Corrigé de l'exercice 3 :
• Il faut arriver à temps. Arriver à temps est un devoir/ est très important.
• À quelle heure rentrera papa, voilà la question qui me préoccupe. (À quelle heure
rentrera papa est pour le moment une donnée inconnue pour moi.)
• Il est bon / il convient qu'il fasse de la gymnastique chaque matin.
• C'est une certitude / il est clair qu'elle fait ses courses chaque matin
• Il n’est pas recommandable / Ce serait une joie pour vous que vous preniez le bus.
• Il est certain / Il est indubitable que vous prenez le repas en ville.
Corrigé de l'exercice 4
Sujet propre d'un participe présent:
Maman étant sortie, je peux appeler mon ami.
L'avion décollant avec un retard d'un quart d'heure, nous nous sommes inquiété un peu.
L'orage s'annonçant (s'étant annoncée) par de gros nuages, nous restâmes à la maison.
Sujet propre d'un infinitif:
Comment, moi, faire cela ? C'est impossible !
Lui, être un bon docteur, cela est bien son rêve !
Se prêter à de telles manœuvres, un homme comme lui, droit et honnête, cela est inconcevable
!

42
Constituants obligatoires de la phrase: le sujet et la prédication

→ Test de contrôle 2

Ce test est administré à l'issue de l'unité d'apprentissage 2.


Pour réaliser ce test, il est conseillé de relire l'unité et de suivre attentivement les phrases
données à titre d'exemple pour chacune des catégories de sujet grammatical et d'attribut
dans la phrase nominale.

Ne manquez pas de transmettre ce test à votre tuteur. À cet effet, il convient de marquer
votre nom, votre prénom et votre adresse personnelle sur la première page de votre
copie. N'oubliez pas de mentionner aussi le numéro du test. Vous êtes supposés le
recevoir après correction, avec les commentaires de votre tuteur.

Bon travail !

Exercice 1 (2 points)
Dans le texte suivant identifiez les prédicats à sujet personnel non exprimé:
« L'homme fait le tour de son bureau, regarde par la fenêtre, essaie de lire quelques
pages. (…) Referme distraitement l'ouvrage, qu'il enfouit dans un sac plastique, plie ses
notes en quatre, et les glisse dans sa poche puis se lève de son siège. Veut retourner
chez lui. Sort. Descend dans le métro. Assez absent de lui. »

(Précisez si l'absence du sujet survient par application d'une règle syntaxique ou pour
marquer un effet stylistique)

Exercice 2 (1 point)
Identifiez les sujets pour tous les verbes du texte, en précisant :
– l'expression du sujet: sujet segmental / sujet sous-entendu;
– sa réalisation linguistique: nominal/ pronominal/ propositionnel;

Les petits commerçants secouaient de toute façon leur tête en poussant leurs lèvres en avant.
Il arpentait la chambre qui était tendue d'un papier vert. Dans la vie, il se rencontre un cruel
moment où je ne sais quelle puissance les soumet à de rudes épreuves. Tout est mis au point.

Exercice 3 (1 point)
Construisez des phrases avec Attribut de l'objet exprimé successivement par:
(i) un adjectif;
(ii) une locution adjectivale;
(iii) un participe passé ou présent (adjectivé);
(iv) un nom de rection directe;
(v) un infinitif précédé par une locution prépositionnelle;
(vi) un infinitif de rection directe.

Exercice 4 (1 point)
Donnez trois exemples de phrases nominales avec les verbes copulatifs d'«apparence».

Exercice 5 (1 point)
Donnez trois exemples de phrases nominales avec des verbes de «jugement» ou
d'«appréciation».

43
Constituants obligatoires de la phrase: le sujet et la prédication

Exercice 6 (3 points)
Faites l'accord du prédicat avec le sujet:
• Maman et mon grand père ….. (« se coaliser contre moi» / au passé composé).
• Ma sœur et moi ……. (« sortir en ville ce soir» / au passé composé).
• Un couple d'amoureux ….. («s'asseoir sur un banc dans le parc» / au plus-que-parfait).
• Une centaine de personnes …… (« se présenter devant le gouvernement pour
protester»/ passé composé).
• La plupart de ses motivations ….. («s'évanouir devant mes arguments» / passé
composé).
• Un grand nombre de touristes ………….. (« être hébergé à l'hôtel Vénus» / futur
simple)
• C'est moi, Monique Martin, qui…………. («arriver le dernier»/ passé composé)
• Cette famille de médecins …… («tomber amoureux de ce petit village de vacances»
/ passé composé)

Références bibliographiques

• CRISTEA, T., Grammaire structurale du français contemporain (la partie: La phrase


et ses constituants, les chapitres: Les constituants fondamentaux, et : La phrase
noyau), Bucureşti, Editura Didactică şi Pedagogică 1979.
• GREVISSE, M., Précis de grammaire française (chapitres sur: le Sujet, le Prédicat,
l'Attribut), Paris, Duculot, Gembloux et Geuthner, 1975.
• MAINGUENEAU, D., (éd. revue), Syntaxe du français (chapitre 2, La phrase), Paris,
Hachette supérieur, 1999.

44
Constituants de la phrase (I): la détermination du nom

Unité d'apprentissage 3
CONSTITUANTS DE LA PHRASE (I): LA DÉTERMINATION DU NOM

Sommaire page

Les objectifs de l'unité d'apprentissage 3 45


3.1 Le nom et sa détermination 46
3.1.1 La mise en discours du nom 46
3.1.2 La structure du groupe nominal 47
3.2 La réalisation linguistique des déterminants du nom 48
3.2.1 Déterminants du nom d'après leur type syntaxique 48
3.2.2 Déterminants du nom d'après leur sens 48
3.2.3 L'épithète. Le complément du nom. L'apposition 49
Test d'autoévaluation 51
3.3 La proposition relative 52
3.3.1 Définition et formation de la relative 52
3.3.2 Paramètres d'analyse d'une proposition relative 55
3.3.3 Les noms opérateurs d'une proposition conjonctive 65
Les clés du test d'autoévaluation 66
Test de contrôle 3 67
Références bibliographiques 68

Les objectifs de l'unité d'apprentissage 3

Quand vous aurez parcouru ce chapitre et effectué les exercices, vous serez capables de:

• Reconnaître le groupe nominal étendu par une épithète, par un complément du


nom ou par un autre déterminant facultatif.
• Faire la différence entre les déterminants restrictifs du nom et les déterminants
descriptifs (appositifs, explicatifs).
• Réaliser correctement le choix contextuel du pronom relatif, dans la construction
d'une proposition relative.
• Appliquer la réduction d'une relative pour la transformer dans une épithète ou dans
un complément du nom et, inversement, enchâsser une relative auprès d'un nom
antécédent.

45
Constituants de la phrase (I): la détermination du nom
3.1 Le nom et sa détermination

3.1.1 La mise en discours du nom: le groupe nominal


• Le caractère obligatoire ou facultatif de la détermination
nominale. Pour remplir son rôle référentiel dans la phrase, le nom
commun doit «actualiser» la notion générique contenue dans son
lexème, dans le cas contraire, le nom remplit une fonction
prédicative: Luc est docteur. Marie est mère depuis janvier. Il est
encore élève. Les noms docteur, mère, élève sont employés en tant
que prédication nominale, ne se rapportant pas à des objets de
discours, mais à des propriétés ou à des qualités attribuées au sujet
de la proposition.
Pour remplir un rôle référentiel dans la phrase, le nom (N) doit
être actualisé à l'aide d'un article ou d'un autre prédéterminant (Pd).
Il serait impossible d'avoir en français des phrases avec des noms
sans actualisateurs:
* homme passe avec chien dans rue
Mais, on dirait bien :
(Pd + N ) Cet homme passe avec son chien dans la rue.
Un/ chaque homme passe avec son chien dans la/ cette/ ma rue.
L'actualisation dans le discours du nom sans aucun prédéterminant est
considérée dans les grammaires comme réalisant un «article zéro»:
(Ø + N) Oh, Temps qui fuit, arrête ton vol !
Oncle, comment vas-tu ? Mère, viens ici !
Hommes, femmes, enfants, tous fêteront cette victoire.
GN minimal: Dans tous ces emplois, l'absence d'article opère une actualisation
Pd + N
individuelle, singulière (l'unicité référentielle pour: oncle, mère, temps)
/vs/ ou plurielle (hommes, femmes, enfants se rapportant exhaustivement
aux référents du contexte: "tous les hommes, toutes les femmes etc.
GN étendu qui se trouvaient dans le contexte évoqué"), ce qui justifie de considérer
Pd + N + Dt N qu'il s'agit d'un actualisateur de discours, sous forme d'article zéro.
D'autre part, dans la communication authentique, même s'il est
actualisé par un article, le nom ne peut pas toujours se rapporter à
un objet précis de discours et requiert plus de précisions. Comparez
:
(a) énoncé à GN minimal : J'entrai dans une salle.
(b) énoncé à GN étendu : J'entrai dans une élégante salle de
conseil, de très grandes dimensions, qui s'imposait par ses
angles monumentaux et vastes.
Dans l'énoncé (b), le nom est «étendu» ou développé par des
déterminants facultatifs (autres que les articles et les
prédéterminants): le nom centre (N) du groupe nominal, salle, est
accompagné par un actualisateur (l'article une), mais aussi par des
déterminants facultatifs :
salle + élégante (épithète)
salle + de conseil (complément du nom)
salle + de très grandes dimensions (complément du nom)
salle + qui s'imposait par ses angles monumentaux et vastes.
(proposition relative)
• Le groupe nominal minimal (Pd + N). La détermination
nominale obligatoire se fait par des morphèmes grammaticaux

46
Constituants de la phrase (I): la détermination du nom
(articles, adjectifs pronominaux, quantitatifs) qui a c t u a l i s e n t la
notion nominale dans le discours.
• Le groupe nominal étendu (Pd + N + Dt N) contient un ou
plusieurs déterminants facultatifs, réalisés par des épithètes,
compléments du nom, appositions et propositions relatives:

Pd N Dt N
un – – – hôtel classé
dégriffé
Pd = de première classe
prédéterminants bel en cours d'aménagement
(actualisateurs du Dt N économique
nom) à bas prix
Dt N à l'atmosphère conviviale
de bon accueil familial
où nous sommes descendus maintes fois
Dt N = ajouts à rôle que vous nous avez recommandé
de déterminants
facultatifs cet – – – – hôtel de ville ouvert au public
récemment restauré
se trouvant à proximité de la Gare
ancien fraîchement repeint
N = catégorie intéressant historique
centrale du groupe Dt N en style gothique
Dt N qui date du XVIe siècle
couvert d'un toit de tuiles vernissées
à colonnes
que nous ne pouvons pas visiter aujourd'hui

La catégorie du nom présente deux types de déterminants:


● les déterminants obligatoires se réalisent par les morphèmes
appelés «actualisateurs» ou «prédéterminants» et leur rôle est
d'actualiser le nom dans le discours.
● les déterminants facultatifs se réalisent par GAdj, GN, GPrép ou par
proposition (P) et leur fonction est de modifier la notion contenue dans
le lexème nominal ou d'apporter des explications sur l'objet de discours
décrit.

3.1.2 La structure du groupe nominal


Tout groupe nominal (GN) qui se rapporte à des référents se
présente dans le discours sous une forme ternaire, car il réunit:
– un actualisateur du nom (ou prédéterminant – Pd);
– le nominal centre ou le "noyau" lexical du groupe (N);
– un déterminant du nom facultatif (modificateur – Dt N).

GN → Pd + N ± (Dt N)

GN minimal

GN étendu

Voici les trois propriétés syntaxiques d'un nom (commun) qui lui
permettent de constituer le centre d'un GN :
– (α) le nom présente un contenu lexical; sur la base de ce contenu
notionnel, le GN renvoie à une représentation du monde réel;
– (β) le nom s'actualise dans le discours par les marqueurs d'actualisation;
47
Constituants de la phrase (I): la détermination du nom
– (χ) utilisé dans le discours, le nom devient disponible à avoir divers
déterminants facultatifs, restrictifs (applicables à la sphère
notionnelle) ou explicatifs (applicables à l'objet de discours identifié).

3.2 La réalisation linguistique des déterminants du nom

3.2.1 Déterminants du nom d'après leur type syntaxique


• I. l'épithète (adjectifs et participes accordés) ;
• II. le complément du nom et l'apposition ;
• III. la proposition relative ;
• IV. la proposition conjonctive (auprès d'un nom opérateur).
À retenir :
– Tout Dt N est, du point de vue syntaxique, un constituant facultatif: il
Propriétés des apparaît dans le discours comme un a j o u t à l'idée lexicale d'un nom.
déterminants – Les Dt N servent à identifier un référent (les déterminants
facultatifs du nom
(Dt N)
restrictifs) ou à apporter une explication supplémentaire (les
déterminants explicatifs).
– L'ensemble du GN étendu, formé du nominal centre et de son ou
de ses déterminant(s) est un groupe de mots cohésif du point de vue
syntaxique et sémantique.

3.2.2 Déterminants du nom d'après leur sens


restrictifs (d'identification)
Dt N
explicatifs (descriptifs, évaluatifs)
Une notion générique, désignant une classe d'objets, n'a pas
toujours assez de précision pour définir un individu particulier. Dans:
(i) Le chien aboie, le GN ne permet pas d'isoler l'objet de discours
individuel auquel l'expression définie le chien se rapporte. Dans : (ii)
Modificateurs
Le chien de mon voisin aboie, il y a un déterminant restrictif, «de
restrictifs du nom
mon voisin» qui réduit l'application du nom de classe chien à un
sous-ensemble limité: la totalité des chiens de mon voisin. La phrase
(ii) n'est correcte que si cette classe ne contient qu'un seul élément,
sinon elle aurait dû avoir une forme différente : (ii') L'un des chiens
de mon voisin aboie.
Les déterminants restrictifs sont i n t é g r é s auprès du nom
(N) qu'ils modifient, avec lequel ils forment un GN qui peut se
pronominaliser: (ii) Le chien de mon voisin aboie. → (iii) Il aboie.
Comparez aussi :
(a) Luc avait un petit joli cahier, le GN souligné rattache deux
épithètes descriptives, non nécessaires à la communication: «il avait
un cahier» + «ce cahier était petit et joli» (ajout descriptif).
(b) Luc avait étudié le cahier des charges présenté par le bénéficiaire,
le GN souligné renferme un complément du nom restrictif, qui n'est plus
un simple «ajout», mais un constituant nécessaire à la communication;
il est un modificateur essentiel du nom cahier, permettant d'identifier le
référent (cahier des charges ≠ cahier).
Comparez les Dt N des phrases citées ci-contre, à titre
d'exemple. Les déterminants: joli, en cuir brun, grand, vieux, rouge,
qui avait beaucoup servi etc. ne servent pas à identifier l'objet, mais
à le décrire, en montrant plusieurs qualifications non nécessaires de

48
Constituants de la phrase (I): la détermination du nom
l'objet (vert ou d'autre couleur, joli ou non, l'objet conserve son
Phrases :
identité catégorielle), tandis que les déterminants: de voyage et de
(1) Elle avait pris son joli couchage servent à identifier le type d'objet auquel on fait référence.
sac en cuir noir. Ils sont donc des déterminants restrictifs du même type que: fil de
fer, fil de coton, machine à coudre, machine à laver, cuiller à café,
(2) Elle avait pris son joli serviette en papier, salle de bains, salle à manger, l'homme qui vient
sac de voyage en cuir d'entrer, les fleurs qui sont sur la table, une personne qui puisse
noir.
m'aider etc.
(3) Elle avait pris son
Dans un GN du type: la belle langue française, il y a deux
vieux sac de couchage épithètes, dont l'une (française) est restrictive et donc nécessaire, et
rouge, qui avait l'autre est descriptive et non nécessaire à l'identification de l'objet de
beaucoup servi du discours: si on élimine le Dt N restrictif (ex. la belle langue),
temps qu'elle était l'interlocuteur ne pourra plus identifier quel est l'objet de discours auquel
étudiante.
on veut faire référence.
Les Dt N restrictifs permettent de créer des référents de
(4) Elle avait pris un
énorme sac de blé tout discours particuliers qui n'existent pas comme concepts lexicalisés
rempli et qui avait été dans une langue: chien de berger, gants de dame, bonnet d'enfant ,
pesé par le meunier. eau de source, eau de puits, page de livre (exemples de G. Guillaume)
représentent des GN ayant des Dt N restrictifs, car l'objet de discours
auquel chacun renvoie ne se délimite que par toute l'expression : N +
(Dt N restrictifs en
caractères gras, Dt N
Dt N; en revanche, les expressions: le chien du berger, les gants de
descriptifs soulignés. Le cette dame, le bonnet de l'enfant, l'eau du seau, les mots du
nom centre, N = sac) dictionnaire, les pages lues, ont des Dt N explicatifs, l'identification du
référent se faisant sur la base du seul nom centre (N) du syntagme.
Dans: Cet homme menait une vie calme, monotone, la phrase
n'affirme pas que l'homme «menait une vie» (ce qui serait un énoncé
qui ne communique rien, étant sans pertinence discursive), mais que la
vie qu'il menait était calme et monotone. Dans ce cas, calme et
monotone ne peuvent pas être retirés de la phrase, ils sont des Dt N
restrictifs, donc obligatoires pour identifier un certain objet de discours.

3.2.3 L'épithète. Le complément du nom. L'apposition


►L'épithète est le déterminant nominal qui s'exprime par un adjectif
ou par autre catégorie assimilable à un adjectif (participe passé,
participe présent accordé, nom utilisé comme un adjectif invariable).
• La construction syntaxique de l'épithète: outre l'épithète de rection
directe, antéposée (bel homme, petite maison) ou postposée
(homme médiocre, maison petite), il y a aussi, dans les tours de
phrase affectifs, une construction épithétique inversive (cet imbécile
de Pierre, avec le nominal centre introduit après la préposition DE).
• La cohésion dans le GN à Dt N épithétique s'exprime par l'accord,
en genre: intérêt principal – destination principale, et en nombre:
personnage principal – personnages principaux. L'accord de
l'épithète implique une multitude de règles dont il faut tenir compte.
• L'épithète se place avant ou après le nom centre:
– la postposition de l'adjectif épithète: Pd + N + Dt N → un facteur
principal; un homme important; une maison petite, est la position
«canonique», qui entraîne une lecture objective, actualisant d'habitude le
sens propre de l'adjectif;
– l'antéposition: Pd + Dt N + N→ c'est le principal facteur; c'est un
très important homme politique, une petite maison, est une position

49
Constituants de la phrase (I): la détermination du nom
marquée, qui entraîne une lecture de type «expressif», le
déterminant actualisant un sens subjectif, affectif, figuré, abstrait etc.
Repères • Certains adjectifs changent de sens selon leur position par rapport
syntaxiques au nom centre: une femme pauvre /la pauvre femme; une jolie figure/
pour l'adjectif une figure jolie; une sacrée histoire; une formule sacrée.
épithète : •Parfois, l'usage impose une certaine position de l'épithète, en
antéposition (bel homme, jolies filles, un grand spectacle, un long
– accord avec le trajet etc.), tandis que d'autres adjectifs sont d'habitude postposés:
nom régissant; une femme laide; un spectacle intéressant, des cheveux courts etc.
• Les adjectifs relationnels sont toujours postposés: action sociale; les
boulevards parisiens; système solaire, surface terrestre, opinion
– place par rapport
au nom; publique;
• Les adjectifs qualificatifs sont souvent antéposés: jeune, vieux,
beau/bel, bon, petit, long, vif, grand etc.
– aspects • Les principaux facteurs à prendre en compte pour choisir un type
stylistiques
de construction de l'épithète simple ou multiple sont: facteurs
catégoriels (la sous-catégorisation de l'adjectif: relationnel, qualificatif
etc.); facteurs sémantiques (épithètes restrictives ou descriptives, ou
autres repères sur la caractérisation opérée dans l'ensemble du GN,
compte tenu du type et du sous-type de nominal centre); – facteurs
rythmiques (la succession d'accents toniques).

►Le complément du nom réalise un groupe nominal hétérogène,


qui inclut une préposition comme élément de liaison syntaxique:
auberge de jeunesse, l'hôtel de Jean, vase à fleurs. L'ensemble
formé du nom centre (N) et de son complément (Prép + N') apparaît
parfois dans le discours comme une unité cohésive de combinatoire
restreinte: hôtel de ville, nom composé, qui a intégré son
complément. Le centre lexical du syntagme nominal (GN) est
composé :
table d'hôte = N mise en garde avion à réaction
machine à laver lampe de poche temps de carême
père de famille vin d'honneur cahier des charges
coup de maître papier à musique canon de gros calibre
Dans ces groupes nominaux, le premier nom est devenu souvent un
simple «support» du complément qui donne le sens spécifique de la
locution dans son ensemble.

►L'apposition. Le déterminant facultatif d'un nom peut être un groupe


nominal de rection directe ayant au centre un nom second:
Marie, la sœur de Pierre (N 1 N2);
Moi, un homme qui n'oublie jamais les amis sincères;
Elle veut étudier la chimie, une discipline qui l'attire.
Les noms de qualité réalisent une apposition de type prédicatif:
Marie, la pauvre, est partie en pleurant.
Notre directeur, le chef suprême, nous a réunis dimanche.
(=c'est lui qui est le chef, prédication nominale)
Le film, une comédie sirupeuse, ne m'a pas plu. (=qui était une
comédie, prédication nominale).

50
Constituants de la phrase (I): la détermination du nom

Test d'autoévaluation
Pour bien gérer ce test, il est indispensable que vous ayez déjà parcouru les explications
et les analyses données dans l'unité d'apprentissage 3. Vérifiez vos solutions aux
exercices en consultant la rubrique Clés du test d'autoévaluation.

Exercice 1
Dans l'extrait textuel suivant, soulignez les épithètes et notez par la majuscule N leur nom
régissant :
De fait, le sommet de Prague aura constitué une étape décisive vers la transformation des
membres européens de l’Alliance atlantique, très largement majoritaires dans l’Union
européenne, en auxiliaires des forces armées états-uniennes dans leur entreprise
d’expansion impériale planétaire (…) [Le Monde diplomatique, fév. 03]

Exercice 2
Relevez dans le texte suivant trois GN étendus et trois GN minimaux et analysez leur
structure (Pd + N ± Dt N) :
S’il existait un baccalauréat en sciences politiques, Monsieur François du Falard, le
ministre de l’Instruction publique, serait incontestablement recalé. Il a l'air d'un élégant
père de famille, qui cultive depuis sa jeunesse une vague ressemblance avec Bonaparte –
autant qu’un homme aux yeux noirs, à la chevelure épaisse et brune, peut ressembler à
ce souverain aux yeux bleus, aux cheveux châtains. [Valeurs actuelles, fév. 05]
………………………………………………….
………………………………………………….
………………………………………………….
Exercice 3
Trouvez deux adjectifs de qualités physiques pour chaque catégorie, et introduisez-les
auprès des noms, en antéposition et en postposition, si possible:
– adjectifs de couleurs:
……………………………………………………………………………………………..
– adjectifs de forme:
……………………………………………………………………………………………..
– adjectifs de dimension:
……………………………………………………………………………………………..
– adjectifs dérivés des noms de matière:
……………………………………………………………………………………………..

Exercice 4
Trouvez au moins deux exemples pour les divers types de déterminants du nom facultatifs
réalisés par les catégories suivantes:

●Dt N = épithète, exprimée par participe passé ou participe présent accordé, (devenu
adjectif):
………………………………………………………………………………….

51
Constituants de la phrase (I): la détermination du nom
●Dt N = nom en apposition :

………………………………………………………………………………….
●Dt N = complément du nom exprimé par nom propre ou commun:

………………………………………………………………………………….
●Dt N = complément du nom exprimé par verbe à l'infinitif, par pronom ou par adverbe:

………………………………………………………………………………….

3.3 La proposition relative

3.3.1 Définition et formation de la relative


Caractéristiques de la proposition relative
• La proposition subordonnée relative s'appelle aussi proposition
adjective parce qu'elle équivaut à un déterminant adjectival:
L'homme qui est intelligent = l'homme intelligent. L'enfant qui n'a
jamais menti à ses parents = l'enfant avec la qualité ou la propriété:
«qui n'a jamais menti à ses parents».
• Cette subordonnée s'appelle «relative» parce qu'elle se lie à son
nominal antécédent (NANT) à l'aide d'un pronom relatif: qui, que, quoi,
lequel, dont, où (pronoms symbolisés dans la grammaire par Qu).
Mécanisme génératif • La proposition relative se rattache à son nom antécédent (NANT) pour
d'une relative réaliser avec celui-ci un groupe nominal complexe, obtenu par
l'enchâssement dans la phrase matrice d'une prédication subordonnée.
•La phrase obtenue contient deux verbes (deux prédications):
L'homme que nous avons accueilli (verbe second ou verbe2) à
l'aéroport est connu (verbe principal ou Verbe1) du monde entier.
L'une des prédications (V1, verbe pivot de la proposition principale)
appartient à la phrase matrice et l'autre (V2, verbe second, pivot de la
subordonnée) appartient à la relative enchâssée dans la matrice.
L'«enchâssement» • La formation de la proposition relative implique donc deux
d'une subordonnée structures propositionnelles nucléaires. Exemples:
dans la matrice P1 = Marie s'est installée dans un nouvel appartement.
à l'aide P2 = Le nouvel appartement est plus spacieux que l'ancien.
d'un pronom relatif
Les deux propositions pourraient apparaître ensemble, réunies dans
une phrase, en rapport de coordination:
Marie s'est installée dans un nouvel appartement ET son
nouvel appartement est plus spacieux que l'ancien.
La phrase ainsi formée contient deux fois la référence au même objet
de discours: «le nouvel appartement de Marie». L'identité référentielle
de deux GN permet la formation d'une seule phrase à deux pivots
verbaux, par l'enchâssement auprès du NANT de la proposition relative.
• La phrase dans laquelle s'enchâsse la proposition Relative contient
le nominal NANT. La phrase enchâssée s'obtient par l'effacement du
nominal coréférentiel (et de la conjonction copulative), le nominal
effacé étant remplacé par un pronom relatif :
Marie s'est installée (V1) dans un nouvel appartement QUI est
(V2) plus spacieux que l'ancien.
Le verbe V1 est le pivot prédicatif de la principale, tandis que le verbe
V2 est le pivot de la subordonnée.

52
Constituants de la phrase (I): la détermination du nom
Règles de la transformation de relativisation (T Rel):
1°– le nominal coréférentiel s'efface de P2 (de la subordonnée);
2°– à la place du nominal effacé, une copie pronominale est insérée
(un pronom relatif);
3°– la forme du pronom relatif doit correspondre morphologiquement
au rôle syntaxique que ce pronom joue dans P2 (dans la relative);
T Rel 4°– pour le pronom relatif composé lequel et var., il y a aussi l'accord en
= transformation genre et nombre du pronom relatif avec le nominal remplacé (NANT).
de relativisation 5°– quelle que soit sa fonction syntaxique dans la subordonnée, le
pronom relatif se met en tête de cette proposition (s'il n'est pas au
Génitif, quand il suit le nom régissant, celui-ci étant en tête de phrase);
6°– le point d'enchâssement de la proposition relative est toujours
immédiatement après son nominal antécédent (NANT), de sorte que
le pronom relatif (symbolisé par Qu) suive immédiatement le nom
antécédent avec lequel il est coréférentiel:

[………………………. NANT ……………….. ]proposition principale = MATRICE

[Qu + Relative]
Les conditions Mécanisme de génération d'une proposition relative
de la relativisation Voici d'autres phrases coordonnées, auxquelles on peut appliquer la
transformation de relativisation:
P1 = Lors de la réunion de fin d'année, Luc a remercié la
personne X (NANT).
P2 = Luc avait beaucoup pensé à la personne X .
Les conditions qui permettent la relativisation sont remplies: les
nominaux sont coréférentiels, P2 pourra donc se réduire à une
relative enchâssée dans P1:
L'effacement
Lors de la réunion de fin d'année, Luc a remercié une personne
du nominal à laquelle il avait beaucoup pensé (=prop. relative).
coréférentiel Le nominal coréférentiel effacé de sa place dans P2 (la
proposition qui va devenir la relative) laisse à sa place une position
syntaxique vide qu'il faut remplir par un pronom relatif:
(a) Luc avait beaucoup pensé (………) = à qui ?
(b) Luc a rencontré hier (………) = qui ?
(c) Luc aime beaucoup (………) = qui? quoi ?
(d) Luc a vu hier le frère (………) = de qui ?
(e) Luc m'a parlé hier (………) = de qui ? de quoi ?
(f) Luc a discuté ce projet (………) = avec qui ?
La «copie» pronominale se fait par Qu (l'un des pronoms relatifs simples
qui, que, quoi, dont, où, ou l'une des formes du pronom relatif composé:
lequel et var.). La substitution du nominal coréférentiel par la forme
convenable du pronom relatif s'accompagne d'une permutation en tête
de phrase du constituant relativisé:

(a) …cette personne à qui Luc avait beaucoup pensé (…).


(a') …ce projet auquel Luc avait pensé (…).
(b) …cette personne que Luc a rencontrée hier (…).
(b') …cette personne qui (…) est venue hier.
(c) …cette personne/ chose/ situation que Luc aime beaucoup (…).

53
Constituants de la phrase (I): la détermination du nom
(c') …cette personne/chose/situation qui (…) nous a consternés.
(d) …cette personne dont Luc a vu hier le frère (…).
(e) …cette personne/ ce sujet dont Luc m'a parlé hier (…).
(f) Jean, avec qui j'ai discuté. Cette personne avec laquelle Luc
La pronominalisation a discuté ce projet (…).
du nom effacé La forme du pronom relatif doit correspondre aux paramètres
par une forme
suivants :
– catégorie conceptuelle ou logico-sémantique du nom antécédent :
du pronom relatif
• personne : l'homme à qui je pense;
requise • non personne, objet individuel: le livre auquel je pense; le
dans le contexte crayon avec lequel j'écris; un abstrait: un résultat auquel je
pense;
• un domaine continu: • un abstrait: ce à quoi je pense (=idée,
donc une entité abstraite); ce à quoi je ne m'attendais pas
(situation); • espace ou temps: le pays où je suis né, et d'où je
viens; ou temps: le moment où je le verrai; l'époque où il a
vécu; mais: la période pendant laquelle il a vécu;
– genre et nombre de l'antécédent (seul le pronom composé lequel
présente des formes distinctes pour les genres/ nombres):
Luc a remercié un homme (NANT), auquel il avait beaucoup pensé.
Luc a remercié des personnes (NANT.), auxquelles il avait
beaucoup pensé.
Luc a remercié des amis (NANT), auxquels il avait pensé.
– position syntaxique dans la proposition subordonnée (sujet,
attribut, objet direct, indirect, cas prépositionnel):
S: L'homme était son prof de maths.
ATTR: Jean était l'homme providentiel.
OD : Luc avait vu l'homme deux jours auparavant.
OI (datif): Luc avait proposé à cet homme un plan d'action.
OPrép Luc avait pensé à cet homme. (à +N)
OPrép Luc ne se souvenait plus de cet homme. (de+N)
OPrép : Luc avait beaucoup de confiance en cet homme (en + N)
Les relativisations qui correspondent à ces différentes positions
syntaxiques sont:
S (qui):
Luc a remercié l'homme qui était son prof de maths.
ATTR (qui):
Homme providentiel que Jean était a redressé l'entreprise.
OD (que):
Luc a remercié l'homme qu'il avait vu deux jours auparavant.
OI (datif):
Luc a remercié l'homme auquel il avait proposé un plan d'action.
C'était bien ce à quoi nous devons obéir. (antécédent neutre,
une idée) Luc a remercié Jean, à qui / auquel nous devons obéir.
Exemples attestés:
Ses petits enfants à qui l'humidité pouvait causer des maladies
mortelles. (…) Il ne vit point de paysan à qui remettre le cheval.
Si je trouvais un homme digne de ce nom à qui recommander
mon pauvre Fabrice. …le comte Norbert, à qui j'ai vu faire trois
brouillons pour une lettre de vingt lignes. [Stendhal]
OPrép avec à + N (auquel et. var./ à qui/ à quoi) :
54
Constituants de la phrase (I): la détermination du nom

Formes du pronom
Un homme habile à qui la peur ôte l'esprit. [Stendhal]
Remarque: dans des contextes possessifs, les noms de référence
relatif:
personnelle sont suivis d'une relative introduite par (prép.) QUI :
Le cri des femmes à qui l'on chatouillait la taille pendant
• Même catégorie l'obscurité (…) [Flaubert]
…la personne à qui j'ai voulu ôter la vie;
logico-sémantique
…le personnage à qui appartenait ce bras. [Stendhal]
que le nom OPrép avec de + N (dont/ duquel, de laquelle etc./ de qui/ de quoi) :
antécédent Luc a remercié un homme dont (1) je ne me souviens plus. Luc a
remercié Jean de qui (2) je ne me souviens plus. (…)
Madame Roguin, de qui elle avait été séparée par un flot de monde.
• Lequel s'accorde
Ce cher homme de qui je vous parlerai tout à l'heure. [Balzac]
en genre et nombre Luc a remercié un homme duquel (3) je ne me souviens plus.
avec l'antécédent OPrép = dans, en + N→ dans qui/ dans lequel/ dans laquelle etc. :
Luc a remercié un homme dans lequel/ en qui nous voyons un
digne successeur de notre chef de laboratoire.
• Forme casuelle qui
OPrép = sur + N → sur qui, sur lequel/ sur laquelle etc. :
correspond à sa Luc a remercié un homme sur lequel nous ne savions rien.
fonction Luc a remercié Marie sur qui nous ne savions rien.
dans la relative OPrép= vers+ N → vers qui, vers lequel/ vers laquelle etc. :
Luc a remercié un homme vers lequel tous les regards se
tournaient. Luc a remercié Marie vers qui tous les regards se
tournaient.

3.3.2 Paramètres d'analyse d'une proposition relative


Les paramètres d'analyse des propositions relatives sont:
(I) Le pronom relatif est situé immédiatement après le nominal
antécédent, en tête de la proposition relative;
(II) Le nominal antécédent ou plutôt ses traits sémantiques sont
repris par le pronom relatif.
(III) La position syntaxique du nominal effacé de la proposition
relative (subordonnée) détermine le choix du pronom relatif.
(IV) La relative forme une unité cohésive avec le NANT, et donc le
choix du mode dans cette subordonnée dépend de la référence
(réelle/ virtuelle) du nominal antécédent.
Ces paramètres d'analyse, qui seront discutés l'un après l'autre,
dans les paragraphes qui suivent, impliquent des choix
grammaticaux particuliers.
(I) La fonction connective du pronom relatif (Qu)
a) Qu réalise la pronominalisation (anaphore) du nominal
antécédent; Qu reprend les caractéristiques du nom antécédent.
(b) en même temps, le pronom relatif (Qu) remplit un rôle syntaxique
(sujet, attribut, objet, etc.) auprès du verbe pivot de la subordonnée
(voir ci-dessus);
c) enfin, le pronom relatif (Qu) est essentiellement un élément de
relation, tout comme les conjonctions, marquant la frontière entre les
propositions (le point d'insertion de la subordonnée). Somme toute, le
pronom relatif joue un triple rôle grammatical: substitut (anaphore),
constituant de phrase dans la subordonnée et connecteur.
(II) La fonction substitutive du pronom relatif
55
Constituants de la phrase (I): la détermination du nom
Les formes du pronom relatif en français doivent correspondre aux
traits inhérents qui se retrouvent dans l'antécédent et à la position
grammaticale du nominal effacé.
• Le nominal antécédent d'une proposition relative peut appartenir
aux catégories sémantiques suivantes:
référence personnelle référence non personnelle référence neutre ou abstraite
Jean, de qui je tiens cette Un laboratoire d'où je tiens Une situation qui arrive.
photo cette photo

Exercice d'entraînement
Inscrivez dans les trois colonnes du tableau suivant le no de chaque phrase citée, qui
correspond à la catégorie de l'antécédent:
NANT→ L'antécédent est L'antécédent est un pronom L'antécédent est
un nom propre ou commun: personnel, démonstratif, possessif, une forme atone
indéfini, EN du pronom
(+V de perception)
No des
phrases
citées→

1. Moi, qui suis si amoureux d'elle…; 2. Marie, qui est amoureuse de moi; 3. Cette
femme, qui est amoureuse de Luc…; 4.Je le vois qui vient. 5.La voici qui arrive. 6.C'étaient
ceux avec qui je travaillais. 7.Il y avait quelqu'un qui parlait bien l'anglais. 8. Vous en qui
j'ai mis tous mes espoirs; 9.Celui-ci, qui était mon frère…; 10.Les miens, qui n'étaient pas
à la maison…; 11.Certains d'entre eux, qui n'avaient pas l'âge requis, s'en allèrent. 12. Il y
en avait beaucoup qui ne voulaient rien faire. 13.Il y en a plusieurs qui vont partir. 14.J'ai
vu quelque chose qui couvrait le lit. 15. J'ai choisi ça qui me plaît davantage. 16. C'était
ce à quoi il pensait. 17. Il n'y a rien qui puisse m'intéresser. 18. C'est cela qui le dérange.
19. Elle les avait sentis qui pleuraient en cachette. 20. Les enfants qui jouent sont mes
frères.
Distribution des six pronoms relatifs :
Le choix du pronom relatif convenable qui, que, quoi, dont, lequel (et
var.), où prend en compte des critères sémantico-logiques et aussi
des critères grammaticaux.
• Les classes sémantiques du nominal antécédent sont fondées,
d'une part, sur l'opposition personne/ chose (ou entité abstraite) et,
d'autre part, pour les inanimés, sur l'opposition discret (objet) /vs/
continu (espace ou temps). Les trois classes ainsi obtenues sont:
– entités individuelles:
– personnes → QUI (L'homme à qui je pense)
– choses ou situations (ou entités abstraites, "neutres")
Choix
→ QUOI (Ce à quoi je pense);
du pronom relatif : –domaines continus: lieu ou temps → OÙ (Le jour où je le
interférence verrai; Le lieu où il est allé).
des critères Les trois pronoms relatifs (prép+ QUI, prép +QUOI et OÙ) ont une
sélection sémantique; QUI (sujet), QUE (objet direct) et DONT (voir ses

56
Constituants de la phrase (I): la détermination du nom
fonctions ci-dessous) ont une sélection grammaticale; enfin, LEQUEL
et var. se rapporte à tout objet individualisé (choses ou personnes
également, au singulier ou au pluriel) et il se prête à toutes les
positions syntaxiques.

►Le pronom relatif OÙ


Parmi tous les pronoms relatifs, la distribution la plus restreinte
appartient au pronom où, spécialisé pour la référence spatiale ou
temporelle du NANT :
La maison où nous habitons…; le pays d'où il vient…; la gare
où tu dois descendre…; … la route par où nous devons aller.
Si le verbe de la subordonnée relative n'accepte pas dans sa
structure un déterminant spatial, le relatif où n'est pas acceptable.
Le pronom Dans les exemples donnés ci-dessus, la structure prédicative de la
relatif où
subordonnée présente une place syntaxique pour un circonstant de
lieu: habiter + lieu; venir de + lieu; descendre + à + lieu; aller + à +
lieu etc. Même les verbes qui n'ont pas une référence spatiale
spécifique doivent accepter un circonstant de lieu, autrement le
pronom où n’est pas justifié:
… la ville où nous avons fait nos études; … nous avons fait
nos études dans cette ville (Circ. lieu).
L'usage a fixé: Les rues par où il est passé (*par lesquelles); mais: la
Contextes rue par laquelle il s'approche (*par où); le livre d'où j'ai tiré cet
exemple (*le livre duquel j'ai tiré cette phrase); dans l'état où il est
de distribution
(non: *dans l'état auquel il est); le niveau où il est arrivé; la situation
du relatif où où il est / dans laquelle je me suis vu arriver; le bonheur auquel j'ai le
droit (fr. mod.); le bonheur où mon âme prétend (langue classique,
livresque). Au cas où et au moment où sont des constructions figées
(locutions conjonctives).
Mais le nominal antécédent d'une relative actualise parfois un
«objet source», et non un «lieu», et alors la construction de la relative
peut présenter une variation libre entre les relatifs où et lequel:
Le livre où // dans lequel j'ai lu que le climat change...
Le dictionnaire où // dans lequel j'ai cherché /trouvé des mots…
La revue de spécialité où // dans laquelle nous trouvons des
informations intéressantes sur ce sujet …
L'émission télévisée où // dans laquelle elle a vu ce chanteur.
Le nominal antécédent de ces exemples fait référence à un objet du
monde et non pas à un «lieu», les constructions avec le pronom relatif
Cas frontaliers:
où sont donc impropres. Les formes du pronom composé lequel
lequel /vs/ où correspondent mieux à une vision en tant qu'objet individuel, ce qui est
plus conforme au sens des mots livre, dictionnaire, revue, émission.
Le relatif où s'emploie aussi pour des antécédents de sens
temporel, par une extension sémantique qui permet d'assimiler
l'expression du temps à celle de l'espace:
Au moment où nous sommes arrivés, nous l'avons vu.
À l'époque où je l'ai vu pour la première fois… (=quand je l'ai vu)
Le relatif où s'emploie parfois avec un antécédent n'ayant pas de
sens spatial (ni temporel), par exemple avec le verbe support être,
se trouver etc. suivis d'un nominal introduit par la préposition dans :
Dans l'état où j'étais…/ dans la situation où nous étions…
Dans l'inquiétude où je me trouvais depuis un bon moment…
57
Constituants de la phrase (I): la détermination du nom
Avec un NANT de sens temporel, le relatif où peut être remplacé par
que temporel: une fois que j'étais là; du moment que (locution
conjonctive, spécialisée pour introduire une subordonnée de cause),
du temps que (voir l'unité d'apprentissage no 9, consacrée à la
subordonnée temporelle):
«La première fois qu'il se montra dans l'hôtel, ce fut pendant un
concert, où il semblait avoir été attiré vers le salon par la voix
enchanteresse de Marianina.» (Balzac)
Avec certains verbes, (dans) lequel  où sont en variation
sémantique, leur distribution dépend du sens que l'on veut souligner pour
l'antécédent: objet ou espace. Mais ce sont les verbes qui indiquent
d'habitude le sens spatial/ temporel quand le relatif où s'impose:
–où avec antécédent de référence spatiale:
(…) le jardin de l'hôtel où je passais la soirée;
(…) s'élança vivement vers le salon, où retentirent à ce
moment les préludes d'une contredanse;
(…) une porte d'où partaient de joyeux éclats de plusieurs voix
–où avec antécédent de référence temporelle :
Sémantique de (…) des inconnus qui s'en allèrent au moment où je résumais
l'antécédent du mes réflexions ;
pronom relatif où
(…) le premier moment d'extase où plongea sa vanité flattée
(…) qu'à cet âge où le désir a je ne sais quoi de terrible et
d'infernal;
– où avec antécédent désignant des objets :
(…) des gravures, des tableaux, des statues, où les artistes
exagèrent la beauté humaine;
(…) ces oeuvres où le talent à venir lutte contre l'effervescence
de la jeunesse; (dans lesquelles: sens concret, objectif; où: sens
abstrait: la création artistique qui se manifeste dans ces objets)
– où avec antécédent désignant des situations, circonstances :
(…) dans le grand monde où Bouchardon essaya de l'introduire
(= introduire qqn dans la société)
(…) qui fait de la vie une fête perpétuelle où l'on rit sans
arrière-pensées. (= rire pendant la fête) [citations de Balzac]
►Autres pronoms relatifs que OÙ
La référence de l'antécédent à un objet individuel de discours peut
marquer l'opposition entre les inanimés et les animés: Je suis
accompagné par qui je veux; Je suis habillé de/avec quoi je veux.
Les compléments prépositionnels opposent qui à quoi, tandis que
lequel et var. s'emploient pour toute sorte d'objets de discours
individuels, singuliers ou pluriels:
prép + qui, lequel  personnes, animés /vs/
Prép + QUI,
prép + quoi, lequel  choses; situations, éventualités.
Prép + QUOI C'est l'idée à laquelle je pense. La lutte pour laquelle je sacrifie
Prép + LEQUEL et var. ma vie. C'est ce à quoi je sacrifie ma vie. C'est l'homme auquel
je sacrifie ma vie./ Voici mon fils, à qui j'ai sacrifié ma vie.
Cette opposition sémantique se traduit par la sélection:
– prép. + qui s'utilise pour des personnes: L'homme à qui// auquel
je pense … La situation à laquelle (*à qui) je pense…; les gens
avec qui il vivait; l'homme duquel son sort dépendait; un livre sur la
couverture duquel il lut ces mots;

58
Constituants de la phrase (I): la détermination du nom
– prép. + quoi n'apparaît qu'avec des antécédents «neutres» : rien,
ce, ou avec des noms abstraits comme chose, situation:
C'était une situation à quoi je n'avais pas pensé.
(mais cet exemple est assez critiquable, l'usage commun étant:
une situation à laquelle je pense);
Voilà, il pleut, ce à quoi je ne m'attendais pas.
«…une familiarité à quoi il n'a pas pris garde» (dans Grevisse).
►DONT
La préposition DE est absorbée dans le pronom relatif dont: il est
Le pronom relatif
donc spécialisé pour substituer un nom précédé par la préposition
DE: une personne/ une chose/ une situation dont nous parlons.
DONT, Il convient de distinguer plusieurs positions syntaxiques du
ses contextes nominal effacé, substitué par dont:
grammaticaux DONT1 = substitut d'un nom en génitif (l'auteur dont le livre…);
DONT2 = substitut d'un complément du verbe précédé par la
préposition DE (l'objet ou la personne dont je me souviens)
DONT3 = substitut d'un nominal précédé par un quantitatif/
partitif (une quantité, une totalité, dont j'ai pris une partie).
La première variante grammaticale du pronom DONT s'emploie
auprès d'un nom tête:
l'œuvre + de l'artiste

dont1
Exemple: (l'artiste) dont tu connais l'œuvre; (l'auteur) dont j'ai lu
les poésies (= les poésies de N, génitif)
La deuxième variante grammaticale du pronom DONT s'emploie
auprès d'un verbe (le sujet dont tu parles) ou d'un adjectif qualificatif
(ma famille dont je suis fier); la troisième variante s'emploie auprès
d'un substitut quantitatif (...dont tu a pris trois / la moitié):

nom, verbe, adjectif, quantitatif ou partitif + de N

dont
A. L'emploi de DONT quand il est substitut d'un nom en génitif
Quand le nominal effacé est au cas génitif (complément d'un autre
nom, N'), l'insertion de la relative dépend de la fonction que remplit
N' dans la relative. On distingue deux situations:
(i) Relativisation par le pronom dont, quand le N' remplit dans la
subordonnée la fonction de sujet, d'objet direct ou d'attribut (N' est
donc dans un cas non prépositionnel):
La famille dont la maison (S) est située au milieu d'un parc.
Voici un livre dont l'auteur (S) est un contemporain de Balzac.
La famille dont j'ai vu la maison (OD).
Le pronom relatif
Voici le livre dont Jean connaît l'auteur (OD).
dont Voilà le livre dont je suis l'auteur (ATTR).
en cas génitif auprès Dans ces phrases: NANT = la famille; le livre; N'= la maison (de la
d'un nom sujet, famille); l'auteur (de ce livre). Le nominal N', déterminé par un
complément du nom en génitif, reste à sa place dans la proposition
attribut, ou objet direct
subordonnée. Exemples attestés:
« (…) j'ai lu des livres dont voici l'extrait.» (OD)
«(…) le château de Lude, dont il tua le commandant» (OD)

59
Constituants de la phrase (I): la détermination du nom
« (…) par un tribunal dont Pierre de l'Hôpital, sénéchal de
Bretagne, était président » (ATTR)
« (…) des maisons de bois dont le premier étage avance …» (S)
[Stendhal, Voyage à Nantes]
(ii) Relativisation par le pronom composé duquel (et var.), quand le
Le pronom relatif N' est dans un cas prépositionnel :
duquel et var. Voici la famille dans la maison de laquelle nous nous sommes
vus pour la première fois.
en cas génitif,
Voici le livre avec l'auteur duquel Jean a une relation d'amitié.
(complément du nom) Le nominal N', déterminé par un complément du nom en génitif, ne
reste plus à sa place dans la proposition subordonnée, mais il est
permuté en tête de phrase (en début de la relative). Ces structures
présentent l'ordre de constituants suivant:

NANT + (prép) N' + Rel. (duquel et var.) + S + Préd.

l'homme avec les parents duquel j'ai déjeuné hier…

GN connecteur entre les deux propositions


Le pronom relatif fait partie d'un groupe complexe:
GN → prép + N' + duquel (et var.)
le livre avec l'auteur duquel j'ai échangé des messages
les amis sur la participation desquels je compte
les règles contre l'application desquelles ils se sont insurgés
Jean avec le frère duquel je suis collègue
la voisine pour la sœur de laquelle j'ai acheté des fleurs
mes parents dans l'intuition desquels je crois
mes tantes au milieu desquelles j'ai grandi
l'amour de la patrie, au nom duquel ils ont lutté
Exemples attestés:
«(…) c'est un homme sur la vie duquel reposent d'énormes
capitaux»
«(…) un salon au milieu duquel s'élevait une table bien servie»
«(…)salon sur la porte duquel il avait plus d'une fois tourné les
yeux» [Balzac]
B. L'emploi de DONT, quand il est substitut du complément d'un
verbe ou d'un adjectif ou quand il est utilisé dans des contextes
partitifs
• V→ rêver de N; s'occuper de N; se dégoûter de N; jouir de N; etc.:
La personne/ la chose/ la situation dont il rêve; dont tu
t'occupes; dont on est dégoûté; dont on jouit.
V + de N
Exemples attestés:
«… jeune fille Béatrix, dont il abusait.» (abuser DE qqn);
«…une grâce charmante, et dont ces gens-ci ne peuvent se rendre
compte.» [Stendhal] (se rendre compte DE qqch.)
Mais: «…la fenêtre de laquelle autrefois Fabrice la regardait. »
«… une journée folle et de laquelle ils se souviennent longtemps.»

60
Constituants de la phrase (I): la détermination du nom

Exercice d'entraînement
Trouvez le verbe ayant un complément du type DE qqn ou DE qqch., qui justifie
l'apparition du pronom relatif DONT:
1. «C'est ce dont je vous supplie de me dispenser.» 2. «…cacher les larmes de joie dont
mes yeux étaient inondés.» 3. «…(il avait peur) ce dont je ne me suis pas aperçu.» 4. «…c'est
à la plus touchante des vertus dont Michel Colomb a orné le tombeau du duc François à la
cathédrale de Nantes.» 5. «… les illusions dont malgré moi mon imagination l'a embellie.»
6. «…les figures que nous leur connaissons, et dont l'Europe leur fit cadeau. »

1. ……………………………………… 2. …………………………………………..
3. ……………………………………… 4. …………………………………………..
5. ……………………………………… 6. …………………………………………..

•Adj → content de N; couvert de N; plein de N


La personne/ la chose/ la situation dont nous sommes
contents/ dont il est couvert; dont elle est pleine.

• Quantitatif ou partitif → un peu/ beaucoup de N; plusieurs N; une


Les pronoms relatifs bonne partie de N; quelques N etc. Contextes partitifs:
dont et duquel et var., «(…) jeunes mères de famille, dont chacune avait quatre ou
compléments d'un cinq marmots»
«(…)c'est blâmer l'auteur de ne s'être pas exposé à dix affaires
verbe ou d'un adjectif
désagréables, dont la première eût été décisive» [Stendhal]
Le pronom dont entre en concurrence avec de qui (qui ne s'emploie
jamais avec les choses, ni avec les abstraits); avec de quoi (qui ne
s'emploie jamais avec les personnes); avec duquel (et var.) qui
s'emploie pour des entités individuelles définies. Exemple: «…c'était
un homme grave et duquel il serait délicieux de se faire aimer» → se
faire aimer DE qqn. → «un homme dont elle s'est fait aimer».
«cette belle madone, de qui dépend notre bonheur éternel !»
Comparez:
… la personne de qui dépend notre bonheur
… la chose dont dépend notre succès
Il était en assez mauvaise santé, ce dont il ne parlait jamais.
…la santé, de laquelle il ne parlait jamais.
… quelque chose de quoi il ne parlait jamais.
Un sujet dont il a parlé longuement// duquel il n'a voulu rien
dire. (c'est ce de quoi personne ne dit rien).

(III) La fonction syntaxique occupée par le pronom relatif (à la


Rôle syntaxique du place du nominal effacé) dans la proposition subordonnée
pronom relatif: Le pronom relatif reprend la fonction syntaxique qu'avait
originairement un nominal effacé de la subordonnée; sa disparition
– substitut ; s'explique par le fait qu'il est coréférentiel avec le NANT, présent dans
– constituant de phrase;
– connecteur entre la proposition principale. La fonction syntaxique du nominal effacé
propositions. est reprise par le pronom relatif; la fonction du pronom relatif n'a
aucun rapport avec la fonction du nominal antécédent (NANT), car
chacun est lié à des prédicats distincts. L'antécédent occupe une

61
Constituants de la phrase (I): la détermination du nom
fonction par rapport au verbe principal, tandis que le pronom relatif
se rapporte au verbe de la subordonnée:
Je connais la personne de qui dépend notre bonheur.
Les deux nominaux qui se rapportent au même objet de discours
sont : la personne (OD dans la principale) et de qui (OPrép dans la
subordonnée relative). Le NANT est objet direct du verbe connaître, et
le pronom relatif est objet prépositionnel du verbe dépendre.
Il y a des situations dans lesquelles la transformation de
relativisation peut se faire indifféremment à partir d'une ou de l'autre
de deux proposions ayant un nominal coréférentiel :
P 1 = Marie veut se marier avec cet homme (OPrép).
P 2 = Cet homme (S) est très gentil.
Phrase 1: Marie veut se marier avec cet homme qui (S) est très gentil.
Phrase 2: Cet homme avec lequel (OPrép) Marie veut se marier est
très gentil.
Dans tous les cas, le pronom relatif conserve la fonction syntaxique
du nominal effacé.
Chaque position syntaxique dans la subordonnée a ses
propres formes pronominales requises:
a) pour les positions syntaxiques non prépositionnelles (S, OD,
ATTR) la relativisation se fait avec les pronoms qui (S) et que (ATTR,
OD), sans tenir compte de la nature du nominal remplacé.
b) pour les positions syntaxiques prépositionnelles, on emploie la
préposition convenable dans le contexte, suivie par qui, quoi ou
lequel. Un quatrième pronom, dont, a absorbé dans sa structure la
préposition de, ses contextes d'apparition étant donc ceux où il
remplace un syntagme de + N. Ces formes du pronom relatif entrent
parfois en concurrence. Voici toutes ses situations:

• La relativisation du Sujet se fait en règle générale par le pronom


qui et elle ne s'accompagne pas d'une extraction et d'un
déplacement, parce que le sujet occupe déjà la position initiale, en
tête de phrase. La substitution pronominale se réalise donc «sur
place» :
Mécanisme de
relativisation pour
……Le cahier qui est sur la table. (qui + V)
les principales … le temps qui s'écoule; …la rivière qui a inondé la plaine;
fonctions … le sportif qui a gagné la course.
syntaxiques : L'ordre des constituants reste inchangé, le GV a la même forme que
– Relativisation
dans la phrase simple, autonome :
du sujet X est sur la table; X s'écoule; X a inondé la plaine; etc.
Il y a des contextes dans lesquels la pronominalisation du sujet se
fait par lequel :
– Relativisation Au procès le défendeur a présenté un témoin, lequel a
de l'objet direct
repoussé les chefs d'accusation. (= QUI a repoussé…)
Cette reprise par lequel (et var.) est une construction du langage
– Relativisation juridique, qui permet de souligner, emphatiquement, l'identification
des objets coréférentielle avec l'antécédent:
indirects «(…) procès-verbal de tout acte de constat ou d’instruction
quelconque, non compris les frais de transport, lesquels sont
fixés par le Juge » [Code de procédure pénale] (=QUI sont fixés)

62
Constituants de la phrase (I): la détermination du nom
• La relativisation de l'objet direct et de l'attribut se fait toujours
par le pronom que:
L'homme que je vois. (OD du verbe voir)
La solution que (OD) j'ai proposée. (proposer une solution)
Les fleurs qu'il a commandées. (commander quelque chose)
Fatigués que (ATTR) nous étions, nous nous sommes retirés
très tôt dans nos chambres.

• La relativisation de l'objet indirect à + N se fait toujours par à


qui/ à quoi/ auquel (et var.):
Les personnes auxquelles nous obéissons/ parlons/ pensons …
(obéir à qqn; penser à qqn; parler à qqn)
Ma mère, à qui j'ai tout dit. (dire à sa mère)
Le directeur à qui je me suis adressé. (s'adresser à qqn)
Il n'y a rien de quoi parler. (relative réduite à l'infinitif)
Il n'y a rien à quoi tu puisses penser. (avec mode personnel)
Après une préposition, qui peut intervenir comme introducteur de
relative seulement quand il se rapporte à des êtres humains.
Après une préposition, quoi ne peut se mettre qu'après des
antécédents pronominaux indéfinis: ce, rien, ou «une chose
généralement vague»:
Il n'y a rien à quoi je pense./ rien contre quoi dresser ma haine.
C'est ce sur quoi je compte le plus.
C'est (ce) par quoi tu dois commencer.
• La relativisation d'un constituant de + N est plus complexe; elle
a été présentée ci-dessus. On rappelle les principaux types:
Je viens de Marseille. → La ville d'où je suis venu.
C'est le frère de Monique. →Voici Monique dont j'ai connu le frère.
Nous parlions d'elle. → Voici la personne dont nous parlions
tout à l'heure. Voici la personne au sujet de laquelle on a
beaucoup parlé. Voici Monique de qui tout le monde dit du
bien. C'est ce de quoi je n'aime pas parler. Il n'y a rien de quoi
il soit fier.
Exemples attestés :
«Il admirait en ce moment la beauté idéale de laquelle il avait
jusqu'alors cherché ça et là les perfections dans la nature»
« …une personne enchantée de qui dépendissent le bonheur,
la vie ou la fortune de tous.» [Balzac]
• La relativisation d'un groupe prépositionnel avec d'autres
prépositions que À et DE a été présentée ci-dessus: elle prend en
compte la nature du nominal remplacé: prép. + lequel/ qui/ quoi, et
où (pour le sens spatial de l'antécédent).

(IV) Choix du mode dans la relative


• Le verbe dans la proposition relative se met à l'indicatif à
l'exception des propositions déterminatives (restrictives) qui servent
à décrire les propriétés virtuelles du référent :
(a) Luc cherche une femme qui soit douce et gentille avec lui.
(subjonctif)
(b) Luc a rencontré une femme (,) qui est douce et gentille avec
lui. (indicatif)
63
Constituants de la phrase (I): la détermination du nom
Dans (a) il s'agit d'un objet de discours virtuel, la proposition
relative a une signification restrictive.
Dans (b) il s'agit d'un objet de discours qui existe déjà, repéré
dans l'univers de discours.
• Le verbe de la relative se met au subjonctif après un antécédent
précédé par les adjectifs: premier, dernier, seul, unique ou déterminé
• Le mode par un superlatif: La seule femme qu'il ait aimée. La dernière femme
indicatif / qu'ils aient vue. La plus belle femme que nous ayons rencontrée.
conditionnel Remarque : le participe passé s'accorde avec le nominal antécédent
dans la relative pour marquer la cohésion syntaxique:
GN étendu = NAnt. + proposition relative
La cohésion se vérifie aussi par pronominalisation:
La femme qui est venue hier m'a posé une question difficile.
Le groupe nominal étendu par une relative est intégré dans le
• Le mode nominal centre la femme, donc la pronominalisation embrasse
subjonctif
dans la
l'ensemble du groupe: Elle (= la femme qui + Relative) m'a posée
proposition une question difficile.
relative La variation sémantique peut se produire avec certains verbes
qui expriment «une idée de volonté ou d'hypothèse», comme:
chercher qqn, avoir besoin de qqn, connaître qqn etc.:
Je connais un homme qui fait bien son métier.
Je veux connaître un homme qui fasse bien son métier.
Il a rencontré quelqu'un qui peut (pourra/ pourrait) l'aider. (réel)
Il veut rencontrer quelqu'un qui puisse l'aider. (possible)
Il aurait voulu rencontrer quelqu'un qui eût pu l'aider. (irréel)
L'antécédent le fait est suivi d'une relative à l'indicatif, ou, parfois, au
subjonctif, selon le degré de réalité du fait dont on parle:
(SBJ) Pour Tony Blair, l'Europe doit réagir au fait, par exemple que
l'Inde produise plus de diplômés en sciences qu'elle. [L'Express]
(IND) Le fait que l'Inde produit beaucoup de diplômés, je le savais !

3.3.3 Les noms opérateurs d'une proposition conjonctive


La sous-classe des noms opérateurs est formée principalement par
les nominalisations de procès: Jean déclare accepter/ désire partir/
souhaite faire cela/ s'oppose à la venue de Pierre. 
La déclaration de Jean [qu'il acceptera de signer le contrat]
m'a produit une vive impression.
Le désir de Jean de partir est indubitable. / Jean a manifesté le
désir de partir/ [= que nous partions tout de suite].
Le souhait de Jean de faire cela est bien connu. Jean a exprimé le
souhait de faire cela/ [qu'un autre que lui fasse cela].
Tout comme les verbes qui se construisent avec des complétives
conjonctives, les nominalisations de procès sont en réalité des noms
opérateurs suivis soit d'un infinitif (en régime direct ou après préposition),
soit d'une complétive au même titre que la complémentation du verbe
(directe/ indirecte; au mode indicatif/ conditionnel ou au mode subjonctif).
L'opposition de Jean à la venue de Pierre ne fait plus aucun doute.
L'opposition de Jean à ce que Pierre vienne est connue de tous.
Les noms comme: opposition, évasion, départ etc. sont les
nominalisations des procès exprimés par les verbes qui leur
correspondent: s'opposer, s'évader, partir. Tout comme l'infinitif
représente une forme nominale du verbe, symétriquement, les
64
Constituants de la phrase (I): la détermination du nom

Noms opérateurs
nominalisations sont des formes verbales du nom. Elles peuvent
avoir leur propre «sujet» (sous la forme d'un génitif) et leurs
suivis d'une déterminations du procès:
proposition (Nom) La décision ferme de Jean
conjonctive [que son fils vienne avec nous].
(Verbe) Jean a décidé fermement
(que + P)

Les noms opérateurs sont aussi des noms de sens prédicatif dans
certaines expressions verbales: avoir une idée → l'idée que + P;
répandre un bruit → le bruit que + P; présenter une preuve →la
preuve que + P etc. Tous ces noms opérateurs régissent une
proposition de type conjonctif (le mot introducteur étant que):
Il a l'impression que je l'aie trahi.
Il a lancé la proposition que nous allions avec lui.
Son désir que nous lui rendions visite nous a convaincus.
J'ai apporté la preuve qu'il nous avait menti. (Le choix du mode
obéit aux mêmes règles que le choix du mode dans n'importe quelle
complétive: le subjonctif est amené par le sens du lexème verbal
(sentiment, volonté, souhait, regret, nécessité, obligation), par la
négation dans le support de ce nom opérateur (Il n'a pas présenté de
preuve que Jean lui eût menti); interrogation (Croyait-il à l'idée que je
fusse capable de cela ?).

65
Constituants de la phrase (I): la détermination du nom

 Les clés du test d'autoévaluation


Corrigé de l'exercice 1
une étape (N) décisive; membres (N) européens (…) très largement majoritaires ; l’Alliance
(N) atlantique; l’Union (N) européenne; forces (N) armées états-uniennes ;
d’expansion(N) impériale planétaire.
Corrigé de l'exercice 2
Exemples de GN étendu (on souligne le nominal centre du groupe, N) :
un baccalauréat en sciences politiques; (en) sciences politiques
Monsieur François du Falard, le ministre de l’Instruction publique
François du Falard, le ministre de l’Instruction publique
le ministre de l’Instruction publique; l’Instruction publique
la défense de cet élégant père de famille, qui cultive depuis sa jeunesse une vague
ressemblance avec Bonaparte ; cet élégant père de famille
une vague ressemblance avec Bonaparte ; cet élégant père de famille
un homme aux yeux noirs, à la chevelure épaisse et brune
à ce souverain aux yeux bleus, aux cheveux châtains
Exemples de GN minimal :
Bonaparte ; le ministre (…) ; (depuis) sa jeunesse ; (de) famille; (de) temps ;
(d’) argent ; un baccalauréat.
Corrigé de l'exercice 3
– adjectifs de couleurs: Elle porte un pardessus noir et olive et une blouse blanc cassé. Elle
a les yeux bleus et lui, il a les yeux couleur noisette. (les adjectifs de couleurs sont postposés)
– adjectifs de forme: C'est une boîte ovale. Un tapis carré. (adjectifs postposés)
– adjectifs de dimension: une salle immense/ une immense salle; des couloirs étroits/ de
longs couloirs. dans un bref délai/ un discours bref; une courte introduction/ un texte court.
– adjectifs dérivés des noms de matière: une peau soyeuse et veloutée; un objet un peu
graisseux/ métallique; produits laitiers; sels minéraux. (adjectifs postposés)
Corrigé de l'exercice 4
●Dt N = participe passé ou participe présent accordé, (devenu adjectif):
Le président sortant est le chef du parti libéral. Des regards menaçants. Elle avait une jupe
évasée. Bébé bien nourri. Le séjour rêvé. Une voix cassée.

●Dt N = nom en apposition (utilisé comme un adjectif invariable) :


À droite il y avait un espace étudiant. La globalisation s'intéresse aux États voyous. Une
toilette très chic et une belle voiture typiques pour la gauche caviar.

●Dt N = compléments du nom exprimés par un nom propre ou commun:


La voiture de Jean. Des chaussures de sport. Les pays de l'Europe. La lutte pour la liberté. La
liberté de la presse.

●Dt N = compléments du nom exprimés par un verbe à l'infinitif:


C'est un film à ne pas manquer ! Sa volonté de continuer ses études est remarquable.

●Dt N = compléments du nom exprimés par pronom ou par adverbe :


(pronoms) Un ami à moi. Le déjeuner avec eux. L'opinion de quelques-uns. Une décision
pour toujours. (adverbe) C'est le peuple d'en bas qui doit élire des dirigeants. Un message
de loin. Une voix d'en haut.

66
Constituants de la phrase (I): la détermination du nom

→ Test de contrôle 3

Ce test est administré à l'issue de l'unité d'apprentissage 3.


Pour réaliser ce test, il est conseillé de relire l'unité, de suivre attentivement les phrases
données à titre d'exemple pour chacune des catégories des déterminants facultatifs du
nom et d'étudier les paramètres syntaxiques de la formation d'une proposition relative.

Ne manquez pas de transmettre ce test à votre tuteur. À cet effet, il convient de marquer
votre nom, votre prénom et votre adresse personnelle sur la première page de votre copie.
N'oubliez pas de mentionner aussi le numéro du test. Vous êtes supposés le recevoir
après correction, avec les commentaires de votre tuteur.

Bon travail !

Exercice 1 (2 points)
Complétez par le pronom relatif convenable:
Nous sommes montés à l'étage ……….. notre amie habite.
Je l'ai oublié depuis l'instant ……….. je l'ai connu
L'immeuble …….. vous venez de sortir est habité par des retraités.
C'est une expérience ………. il a su tirer la leçon.
C'était un homme …………… j'avais de l'amitié.
Elle est arrivée au moment …….. j'étais en train de sortir.
La voiture ………. elle circulait était une Renault.

Exercice 2 (2 points)
Identifiez le pronom relatif dans les phrases suivantes et précisez quelle est sa fonction
syntaxique dans la subordonnée relative:
L'homme auquel je porte la plus vive reconnaissance est mon professeur du lycée.
La seule personne dont je n'aie pas reçu de message est Paul.

Les chaleurs qu'il a fait ce dernier temps ont été torrides.


Moi qui suis convaincu de l'utilité de cette action, je n'y renonce jamais.
« L'hypocrisie est un hommage que le vice rend à la vertu.»
«Le bien que nous avons reçu de quelqu'un veut que nous respections le mal qu'il
nous a fait.» (Maximes, La Rochefoucauld)

Exercice 3 (2 points)
Analysez les propositions relatives du point de vue de leur interprétation (leur type
sémantique: restriction/ explication):
«Ils se sont adressés à des promoteurs qui se sont révélés des escrocs, les canailles !»
«La loi a été votée par les députés qui n'ont pas vu, les idiots, tous les inconvénients !
«Les employés marrons [=corrompus] que j'ai, les canailles, fait rayer des cadres,
ont détourné un million.»
(exemples de discours expressif, cités par le linguiste Jean-Claude Milner)
Exercice 4 (2 points)
Faites l'extraction de la relative, et restituez-la comme proposition principale :
Modèle: Cet homme [que j'aime] ne m'aime pas. → J'aime cet homme qui ne m'aime pas.
Le garçon dont nous parlons est sage.
Le jour où il est né il pleuvait et il faisait froid.
La ville d'où il vient est située à une distance de mille kilomètres de nous.

67
Constituants de la phrase (I): la détermination du nom
C'est le sujet le plus intéressant avec lequel nous pouvons commencer notre exposé.
Cet homme dont elle a connu la vie a été un amateur d'art passionné.

Exercice 5 (2 points)
Identifiez les propositions relatives du texte et précisez la fonction syntaxique du pronom relatif.
1. Je sortais d'un théâtre où tous les soirs je paraissais aux avant-scènes en grande tenue
de soupirant.
2. J'étais plongé dans une de ces rêveries profondes qui saisissent tout le monde, je pouvais
contempler à mon aise le jardin de l'hôtel où je passais la soirée.
3. Les arbres, imparfaitement couverts de neige, se détachaient faiblement du fond grisâtre
que formait un ciel nuageux, à peine blanchi par la lune.
4. … glacée par un de ces vents coulis qui vous gèlent une moitié du corps tandis que l'autre
éprouve la chaleur moite des salons (…. )
5. … une jeune fille de seize ans, dont la beauté réalisait les fabuleuses conceptions des
poètes orientaux (…) [Balzac]

Références bibliographiques

• MAINGUENEAU, D., (éd. revue), Syntaxe du français (chapitre 4 «Groupe nominal,


groupe adjectival» et chapitre 6: 3. «La phrase-GAdj»), Paris, Hachette supérieur, 1999.
• MURĂREŢ, I., Syntaxe (chapitre «Les propositions relatives», pp. 26 – 64), Editura
Fundaţiei România de Mâine, Bucureşti, 2004.
• RIEGEL, M., PELLAT, J.-C., RIOUL, R., Grammaire méthodique du français,
chapitre VI (Le groupe nominal), Paris, Presses Universitaires de France, 1994.

68
Unités de l'analyse syntaxique

Unité d'apprentissage 4

CONSTITUANTS DE LA PHRASE (II) : SYNTAXE DU VERBE, DE


L'ADJECTIF, DE L'ADVERBE

Sommaire page

Les objectifs de l'unité d'apprentissage 4 69


4.1 Structure du GV d'après le type syntaxique du verbe pivot 70
4.2 Constructions intransitives. Sous-classes de verbes intransitifs 70
4.3 Construction transitives simples 73
4.3.1 Types de groupe verbal ayant comme pivot un verbe transitif 73
4.3.2 La double (ou la multiple) valence d'un verbe transitif 73
4.3.3 Construction avec verbes transitifs 74
4.4 Constructions transitives complexes: structures à verbe opérateur 78
4.4.1 Propriétés générales des constructions opératrices 78
4.4.2 Propositions complétives 80
Test d'autoévaluation 82
4.4.3 Sous-classes de verbes opérateurs 83
4.5 Groupe adjectival et groupe adverbial 86
4.5.1 Syntaxe de l'adjectif 86
4.5.2 Syntaxe de l'adverbe 87
Les clés du test d'autoévaluation 88
Test de contrôle 4 89
Références bibliographiques 90

Les objectifs de l'unité d'apprentissage 4

Quand vous aurez parcouru ce chapitre et effectué les exercices, vous serez capables de:

• Appliquer correctement les règles de construction d'une prédication verbale.


• Reconnaître la structure du groupe verbal qui correspond aux différentes classes
syntaxiques de verbes.
• Associer les verbes polysémiques les plus usuels avec leur sens actualisé par une
certaine construction syntaxique.
• Reconnaître dans la complémentation des verbes transitifs et des verbes
opérateurs les différents compléments d'objet, les complétives infinitives et les
complétives conjonctives.

69
Unités de l'analyse syntaxique

4.1 Structure du groupe verbal d'après le type syntaxique du verbe pivot

La structure du GV dans la phrase nucléaire dépend du type de


construction syntaxique du verbe pivot. Cette unité d'apprentissage
se propose de décrire les constituants immédiats du GV: d'une part,
les catégories de verbes pivots, d'autre part, les différents
déterminants du verbe (compléments d'objet direct, indirect,
prépositionnel), l'attribut et les propositions complétives (complétive
infinitive ou à un mode personnel). Les types de GV se rapportent
donc aux propriétés syntaxiques du pivot verbal :
– Verbes intransitifs sans déterminant obligatoire: Papa dort.
– Verbes intransitifs avec un déterminant obligatoire, mais qui n'est pas
Types de
un complément d'objet: Nous allons à l'aéroport. Elle est à la maison.
constructions – Verbes ayant un complément obligatoire: objet direct (Nous avons
verbales : une belle maison), objet indirect en Datif (Le fils ressemble à son père),
ou objet indirect prépositionnel (Le fils pense à son père. Il lutte pour
– transitives, ses droits. Elle compte sur toi); proposition complétive: (proposition à
(pivot verbal: Vtr) verbe fini) Je craignais qu'il ne découvrît mon secret. Je constate qu'il
pleut et qu'il fait froid. Le hasard voulut qu'il plût et qu'il fît froid ce
– intransitives,
dimanche; proposition infinitive: Luc a voulu partir. J'ai failli tomber.
(pivot verbal: Vintr)
– Verbes à double complémentation:
OD + OI → Luc écrit une lettre à son amie.
OD + OPrép → Je le prends par la main.
OI + OPrép. → Elle leur a servi d'interprète.
OPrép1 + OPrép2 → Nous discutons de cela avec nos amis.
– Verbes à triple complémentation: → Elle a traduit ce texte du
roumain en anglais. Le prof apprend la grammaire aux élèves
d'après le «Précis» de Maurice Grevisse.
Il y a donc des verbes sans complémentation (éventuellement
À retenir: déterminés par des circonstants); d'autres ont une complémentation
Le plus important sera obligatoire. Dans la première catégorie sont inclus les verbes
de décrire les grandes
classes de constructions intransitifs (Vintr) (venir, courir, arriver…), tandis que la seconde
verbales, plutôt que les catégorie comprend des verbes transitifs (Vtr) (avec complément
unités verbales, car un seul direct: boire, donner, etc. ou indirect: penser à, parler de, collaborer
et même verbe peut avec, compter sur). Parmi les transitifs se rangent aussi les verbes
apparaître dans différents opérateurs (Vop) (vouloir, pouvoir, savoir, admettre, dire, prétendre,
types de constructions.
supposer, souhaiter etc.). On convient donc de considérer comme
t r a n s i t i f un pivot verbal qui accepte un complément (direct,
indirect ou prépositionnel), ou une complétive.

4.2 Constructions intransitives. Sous-classes de verbes intransitifs


a) Verbes intransitifs impersonnels: pleuvoir, neiger, geler,
Vintr dégeler, grêler, grésiller (rare), bruiner, brumer (rare), brouillasser
etc. Ces verbes n'ont pas de sujet logique, leur action n'étant
a-valents
(impersonnels)
associée à aucun agent (les phénomènes météorologiques n'ont pas
un «agent», animé ou inanimé): *Qui neige ? *Qui pleut ?
Dans le discours, ces verbes sont a-valents, car ils sont
dépourvus de valence combinatoire avec un groupe nominal
référentiel: aucun agent n'occupe la place syntaxique de Sujet
(nominal sujet = Ø). La place vide du sujet est remplie par un
70
Unités de l'analyse syntaxique

pronom-sujet postiche, il0 (différent du pronom il qui fait référence à un


objet de discours): Il grêle. Il bruine. Il a plu toute la journée. De cette
façon, en français, langue ayant la contrainte d'exprimer toujours un
Les verbes sujet de surface, le pronom neutre il0 apparaît comme sujet postiche. À
impersonnels ont la place du sujet impersonnel il, la langue populaire emploie parfois le
un sujet postiche sujet indéfini ça qui n'est plus un sujet postiche, mais une reprise du
(= apparent):
sujet réel ("ce fait, cette situation"): Ça gèle à pierre fendre. Ça vente.
il 0 + V Ça commence à crachiner (pop.). Un tel sujet entraîne parfois une
modification du sens, par exemple: «ça neige» pourrait désigner, selon
les grammairiens, le brouillage de l'image sur un écran.
b) Verbes intransitifs personnels
Les intransitifs personnels expriment des procès ayant un seul
participant (actant), ils sont donc monovalents. Ces verbes se
combinent avec un seul nominal: Nous marchons. Ils s'en vont.
Marie s'éloigna. Un seul actant est représenté en relation avec le
procès exprimé. Exemples d'unités lexicales de la classe des
intransitifs:
– verbes de mouvement: arriver, courir, venir, passer, entrer, partir,
repartir, s’évader, se retirer, se dépêcher, déserter, se presser, s'en
aller, s'éloigner, détaler, fuir, se sauver, etc. ; aussi les expressions du
Vintr registre familier: se barrer, se débiner, décamper, déguerpir, prendre
la clé des champs, prendre ses jambes à son cou, filer, filer à
monovalents
l'anglaise;
(personnels) – verbes corporels ou d'action attribuée à un être animé: dormir,
parler, crier, gazouiller, bêler, braire, hurler, tousser, s'asseoir, nager,
sauter, trépigner, tousser, cracher, éternuer, pleurer, bâiller,
déjeuner, dîner, voyager, naître, mourir, décéder, vivre etc.
– verbes descriptifs d'une activité ou d'un état: briller, crépiter,
crisser, bruire, retentir, couler, serpenter, s'ériger, se dresser,
s'étendre, bouillir, etc.
Le nominal avec lequel ces verbes intransitifs se combinent
dans le discours occupe la position de sujet (N0): Le soleil brille. Le
lièvre court. Le robinet coule. L'eau bout. Cette conduite fuit.
c) Intransitifs à déterminant circonstanciel (facultatif ou
obligatoire)
Dans des contextes authentiques de communication, la plupart des
verbes monovalents s'accompagnent d'un déterminant circonstanciel:
L'enfant entre dans la classe. Elle a toussé toute la nuit. Le lièvre
court à travers le champ. ← (V intr + Circ. lieu)
Ça gazouille sans cesse devant mes fenêtres. ← (V intr + Circ.
temps + Circ. lieu)
L'enfant trépigne d'impatience. Il crie de joie. Elle a hurlé de
douleur. ← (V intr + Circ. cause)
Le déterminant circonstanciel est parfois obligatoire: *Il va.
Vintr + *Nous allons. Mais: Il va à l'école. Nous allons au marché. Le
complément interne circonstant obligatoire peut rester i m p l i c i t e : Jean s'est évadé (d'un
lieu où il aurait dû rester). Entrez, s'il vous plaît ! Asseyez-vous !
(circonstants de lieu implicites).
d) Verbes intransitifs avec complément interne
Un complément s'appelle «objet interne » quand il a le même sens et
parfois la même base lexicale que le verbe: dormir d'un long sommeil

71
Unités de l'analyse syntaxique

Vintr + (ou avec complément direct: dormir son dernier sommeil), vivre une
longue vie, vivre sa vie tranquillement, mourir de mort naturelle,
Attribut du sujet pleurer à chaudes larmes/ des larmes de joie etc.
Ces constructions étant équivalentes à un caractérisant verbal
intensif ont toujours un rôle stylistique. À comparer: Il pleut des
cordes. Il pleut de grosses gouttes. Il pleut des hallebardes, avec la
phrase neutre stylistiquement: Il pleut abondamment.
e) Intransitifs en construction attributive:
Les intransitifs, verbes qui rejettent la détermination par complément
d'objet, peuvent parfois être suivis par un nominal Attribut:
*Marie reste. Marie reste à la maison (circ. locatif obligatoire du
Le verbe passer verbe intransitif). Mais : Marie reste alitée. Marie est devenue une
bonne mère. (verbes copulatifs suivis d'un Attribut du Sujet).
 Les jours passent. Une partie des verbes jouant le rôle de copule entre le Sujet et
(intransitif) la prédication nominale avec Attribut du Sujet sont des verbes
Papa est passé dans la
employés comme Vintr : être, rester, demeurer, se tenir; apparaître, se
cuisine. promener etc. ou: passer, sortir, rentrer, tomber etc. quand ils sont
(verbe intransitif de des Vintr :
mouvement, avec un
déterminant locatif). Elle est partie en pleurs. Elle se promène toute rêveuse.
Elle est rentrée en colère. Elle demeure silencieuse.
 Luc a passé deux jours à
Paris.
(intransitif avec circonstant Conclusions sur la syntaxe des verbes intransitifs:
temporel de rection directe). ► La construction intransitive intègre souvent un ou plusieurs
déterminants circonstanciels (caractérisants verbaux, locatifs,
 Ils ont passé le pouvoir
entre les mains du vice- déterminants temporels, de cause, de but, etc.).
président. ►Il y a des intransitifs employés transitivement, avec un objet interne
Je passe un examen. (dormir du dernier sommeil), mais non seulement; comparez:
(transitif direct)
Ils crient. (Vintr)  Ils ont crié leurs revendications(Vsup).
 Il passe pour un expert Le directeur a aboyé un ordre (Vsup). (= ordonner en durcissant
en la matière. la voix) De même: Il pleut des cordes. Il pleut de grosses
(verbe attributif)
gouttes. Il pleut des hallebardes. (avec complément interne)
 Elle passe sur les détails. ► Certains verbes hésitent entre le statut d’intransitifs et celui de
Marie est passée sur ce transitifs: *Il habite. La construction absolue conduit à un énoncé
malentendu.
(verbe transitif indirect) incomplet, car ce verbe a besoin d'un déterminant:
(Comparez avec: Il habite 5, rue Edgar Quinet. J'habite Paris. (construction
Il passe sur un pont.) transitive directe).
Elle passe d'un sujet à Lui, il habite à Bucarest. (avec déterminant prépositionnel de
l'autre. sens locatif).
(verbe double transitif ►Presque tous les intransitifs ont des homonymes transitifs ou
indirect)
attributifs. (Exemple: le verbe passer, ci-contre).
►Les verbes intransitifs entrent dans des tours de phrase
impersonnels, du type:
Il0 passe rarement des bus par ici.
Il0 arrive peu de trains dans cette gare.
► Peu de verbes sont des intransitifs «purs»: beaucoup d'intransitifs
peuvent reconduire leur statut grammatical et s'employer avec un
complément direct ou indirect: monter, descendre, entrer, sortir etc.

72
Unités de l'analyse syntaxique

4.3 Constructions transitives simples


Dans une première partie (4.3) seront présentées les constructions
transitives simples (V + compléments), et dans une deuxième section
(4.4) les constructions transitives complexes (V + complétives). Ces
dernières, qui enchâssent une proposition complétive, sont appelées
«constructions opératrices».
4.3.1 Types de groupe verbal ayant comme pivot un verbe transitif
Les verbes transitifs (Vtr) sont la catégorie centrale d'une expansion
du verbe par un ou plusieurs compléments. Le complément
s'exprime par une catégorie nominale (GN), ou par une proposition,
qui peut être à un mode personnel (P = proposition subordonnée),
ou réduite à l'infinitif (INF). La complémentation du verbe fait partie
des constituants du groupe verbal : GV → V + compléments.
Quand la complémentation se réalise par une proposition
(infinitive, conjonctive, interrogative indirecte), cette proposition
subordonnée s'enchâsse auprès du verbe principal de la phrase
«matrice». Par conséquent, les constructions transitives se réalisent :
– par des compléments du type: objet direct, objet indirect («second»
s'il accompagne un premier complément, objet direct) ou divers
objets prépositionnels, à l'intérieur d'une phrase simple (GV avec un
seul noyau prédicatif);
– par des complétives (proposition à l'infinitif ou à un mode
personnel), à l'intérieur d'une structure propositionnelle complexe
(GV avec plusieurs noyaux prédicatifs: le verbe principal de la
prédication matrice, et le verbe du complément propositionnel qui est
une subordonnée enchâssée dans la matrice).
Il y a donc des constructions transitives simples (verbe
accompagné de ses compléments d'objet nominaux) et des
constructions transitives complexes (opératrices), impliquant
comme verbe principal de la phrase un verbe opérateur.
4.3.2 La double (ou la multiple) valence d'un verbe transitif
Les structures du GV organisées autour d'un verbe transitif (direct ou
indirect) se caractérisent par la double valence combinatoire:
Valences
Marie ← Vtr → son ami
combinatoires
d'un verbe transitif (schéma des arguments du verbe)
Dans ce schéma de la phrase minimale on peut trouver une
–direct: multitude de verbes représentant des procès bi-actanciels qui
puissent relier ces deux actants: Marie et son ami: Vtr → voir, aimer,
respecter, fêter, rencontrer etc.
N0 ←Vtr→ N1
Dans les phrases obtenues à partir de ces verbes transitifs, à
– indirect:
double valence, l'argument Marie occupe la position syntaxique de
sujet et l'argument son ami occupe la position d'objet direct:
Marie voit son ami.
N0←Vtr→ prép N2, Marie aime son ami (d'un amour sincère).
Marie respecte son ami (pour son courage).
Marie a fêté son ami quand il a eu 25 ans.
Le même couple d'actants pourrait se retrouver dans des phrases
ayant comme pivot d'autres catégories de verbes transitifs: penser à,
compter sur, voter pour, se fier à, se rappeler de, se remettre à, se
lier avec, collaborer avec (en construction prépositionnelle). Les

73
Unités de l'analyse syntaxique

phrases ainsi obtenues avec ces verbes auront un complément


construit avec préposition (objet prépositionnel):
Marie a beaucoup pensé à son ami.
Marie compte sur son ami pour garder le secret.
Marie a voté pour son ami, le maire sortant.
Les constructions à triple valence font intervenir un troisième
argument pour la fonction verbale (outre le sujet et le premier objet),
et donc ces constructions sont trivalentes. Par exemple, des verbes
Verbes avec un objet second, représenté par lui (= à qqn): Marie lui promet
qqch., lui souhaite bon anniversaire, lui dit la vérité, lui confirme sa
à triple valence
venue, lui rappelle sa promesse; lui demande conseil etc.
N0←Vtr→ N,' (±prép) N" Exemple de phrases ainsi obtenues:
Marie a promis du champagne à son ami.
Marie souhaite la bienvenue à son ami.
Marie a dit toute la vérité à son ami.
Dans ces dernières phrases, les verbes transitifs sont construits
avec deux compléments, donc ils sont doublement transitifs:
promettre quelque chose à quelqu'un. On appelle trivalents les
verbes à triple valence combinatoire dans la phrase (ces verbes ont
la latitude de se combiner dans la phrase avec un nominal sujet et
deux compléments d'objet).

Exercices d'entraînement
1. À partir des paires d'actants indiqués, formez des phrases avec différents verbes transitifs,
selon le modèle donné ci-dessus:
Marie Vtr ……………………….. un livre
……………………….. une chaise
Ce livre Vtr ………………………... le public
……………………….. son auteur
……………………….. les problèmes majeurs de la Planète
2. Dans les phrases suivantes, encadrez les verbes et soulignez leurs compléments
d'objet:

1. La porte s'ouvrit sur un vaste bureau directorial. 2. Sa pâleur dénotait une alimentation
mal équilibrée. 3. Le directeur leva sur Max un long regard. 4. Je répétai au directeur le
nom de mon ami. 5. Avec des rideaux fleuris, nous avons égayé un peu notre cuisine.

4.3.3 Constructions avec verbes transitifs


Voici un court inventaire des sous-classes de verbes transitifs:
a) Transitifs directs (bivalents)
Les verbes ayant un objet direct obligatoire expriment des procès qui
se rapportent à deux objets de discours (deux arguments ou
actants). Cette double valence combinatoire permet de situer les
verbes construits avec un objet direct (OD) dans la catégorie des
Structure du GV ayant verbes bivalents (ils se combinent avec deux nominaux):
au centre un (i) Marie mange sa soupe. (qqn manger qqch.)
Vtr direct +OD (ii) L'enfant a détruit son jouet. (qqn détruire qqch.)
(iii) Maman adore son bébé. (qqn adorer qqn)
(iv) Les docteurs soignent les malades. (qqn soigner qqn)
74
Unités de l'analyse syntaxique

Les transitifs directs peuvent permuter leurs arguments, le groupe


nominal objet direct peut devenir sujet d'une phrase passive:
« allumer le feu » (actif)  maman a allumé le feu (dans ma chambre);
(passif)  le feu est allumé (dans ma chambre).
T passif →
b) Transitifs directs en construction absolue
Au lieu de se lier à deux nominaux et d'être ainsi des verbes
bivalents, certains verbes transitifs sont employés en construction
absolue, leur complément direct restant sous-entendu ou implicite:
Je vais essayer (l'objet direct sous-entendu: de faire quelque chose).
 L'ellipse de l'objet direct apparaît parfois quand cet objet est sous-
Construction
entendu (prédictible) par la nature du procès:
absolue:
Il a refusé d'ouvrir. (OD = la porte)
Vtr + Ø Cette attitude irrite. (OD = la sensibilité des personnes devant
lesquelles se manifeste cette attitude)
Les spectateurs applaudissent. (OD = le spectacle)
 Employé dans une construction absolue, un verbe acquiert un sens
plus précis, ou bien il souffre un changement de sens :
Cette personne vole. (elle a l'habitude de voler; l'objet direct
sous-entendu: des objets qui ne lui appartiennent pas)
Il boit. (= il a l'habitude de boire; l'objet direct sous-entendu: de l'alcool)
Cette personne reçoit une fois par semaine. (l'objet direct sous-
entendu: des invités)
Je vois (avec le sens: «je comprends»; l'objet direct sous-
entendu: ce que tu dis; ou: je comprends où tu veux en venir)
 Le complément d'objet est parfois recouvrable dans la situation de
communication:
Coupez ici ! (OD = l'objet indiqué dans la situation: à l'endroit montré)
Mangez, s'il vous plaît ! (OD = la nourriture servie dans la situation)
C'est une odeur qui dégoûte. (OD = l'odorat de n'importe qui)
Nous devons allumer . (OD = l'électricité)
Jean a nié. (OD = ce qu'on vient de lui reprocher)
 L'omission de l'objet est parfois justifiée par son inexistence
préalable, l'objet n'étant que le résultat de l'action même qui est
exprimée par le verbe:
Nous nous écrivons une fois par semaine. (OD = des lettres,
des billets, des messages) Maman coud (OD = l'objet se
réalise en cours de ce procès: une robe, une chemise).
c) Transitifs indirects avec complément en datif. Ce sont les
verbes avec un objet indirect (OI): plaire, déplaire, convenir,
Vtr indirect + OI échapper, nuire, répondre, succéder, ressembler etc.
(avec objet second) Jean obéit à ses parents → Jean leur obéit toujours. (l'objet
indirect à ses parents pronominalisé par le pronom en Datif leur).
Je n'ai jamais menti à Marie. → Je ne lui ai jamais menti. (l'objet
indirect à Marie pronominalisé par le pronom en Datif lui).
 L'objet indirect en Datif peut être pronominalisé:
Luc s'est rendu chez Marie pour lui souhaiter bon anniversaire.
L'objet indirect (OI) du verbe souhaiter est lui (= à elle, à Marie):
À qui Luc a-t-il souhaité bon anniversaire ? À MarieOI .
 L'objet indirect en Datif peut être aussi redoublé et pronominalisé:
Le bébé sourit à sa maman, à moi et à toute la famille OI.
→ Le bébé nousOI sourit à tousOI. (tous = nous)
75
Unités de l'analyse syntaxique

d) Transitifs indirects avec complément prépositionnel


L'objet indirect prépositionnel (OPrép) se construit avec une
préposition: à, de, etc. Les prépositions à et de sont plus
grammaticalisées que sur, contre, celles-là plus grammaticalisées
que les prépositions lexicalement pleines avec, dans, contre, vers
etc.: penser à, accéder à, manquer à, s'affilier à, adhérer à,
Vtr indirect + OPrép s'associer à, rêver à, rêver de, abuser de, tenir compte de,
(avec objet bénéficier de, profiter de, se souvenir de, relever de, s'occuper de/
prépositionnel) avec s'apitoyer sur, compter sur, méditer sur, voter pour, se baser
sur, buter contre, se heurter contre, se plonger dans, pointer vers
etc. Exemples:
Luc parle de ses ennuis.
Marie s'est brouillée avec son père.
L'endetté se cache de ses créditeurs.
Je me méfie de lui/ de tout le monde/ des gens comme lui.
Luc n'a pas tenu compte de moi.
Les mêmes prépositions servent à introduire un complément ou un
circonstant : Je vais à BerlinCirc.lieu / Je pense à mon voyageOPrép. Je fais
confiance à mon pèreOI. Je viens de BerlinCirc.lieu J'ai rêvé de LucOPrép.
e) Verbes trivalents (doublement transitifs) ou quadrivalents
Beaucoup de verbes ont deux ou même trois compléments d'objet:
– OD + OI:
offrir, donner, soustraire, ajouter, livrer, envoyer, transmettre,
communiquer + qqch. à qqn. Exemples:
Vtr trivalents
Luc annonce à tout monde la nouvelle. (S – V – OI + OD)
(avec deux objets) Maman a envoyé des cadeaux à toute la famille. (S – V – OD + OI)
Maman a ajouté du miel au lait qu'elle nous a servi. (ajouter
qqch. à qqch.)
L'un des compléments d'objet peut se pronominaliser:
Luc m'a appris la nouvelle (me = OI).
La patrie m'a destiné à la souffrance (me = OD).
Elle s'y destine. (se =OD; y= OI)
(Voir les règles de la pronominalisation dans l'unité d'apprentissage 5).
– OD + OPrép:
Le cambrioleur avait braqué son pistolet contre le caissier.
(OD+ OPrép : braquer une arme contre une personne)
Luc a prié Paul de venir. (S – V – OD + de INF)
Elle a envoyé quelqu'un me chercher. (S – V – OD + Ø INF)
– OD + OPrép1 + OPrép2 :
Un collier de perles (S) transforme cette robe (OD) d'une
simple tenue (OPrép) de tous les jours dans une toilette
(OPrép)de soir. (quatre objets de discours évoqués
simultanément comme participants à un seul procès prédicatif)

Exercice d'entraînement
● Construisez des phrases dans lesquelles les verbes envelopper, attendre, charger,
partager, recevoir et raconter sont employés avec deux compléments d'objet (un objet
direct et un objet indirect ou deux objets indirects).
………………………………………………………………………………………………………..
………………………………………………………………………………………………………..
………………………………………………………………………………………………………..
76
Unités de l'analyse syntaxique

………………………………………………………………………………………………………..
………………………………………………………………………………………………………..
● Formez des phrases dans lesquelles les verbes apprendre, cacher, défendre, devoir,
enlever, apporter (au passé composé) sont utilisés avec un objet direct (OD) et un objet
second (OI).
………………………………………………………………………………………………………..
………………………………………………………………………………………………………..
………………………………………………………………………………………………………..
………………………………………………………………………………………………………..
………………………………………………………………………………………………………..
………………………………………………………………………………………………………..

f) Verbes symétriques
Constructions Certains verbes acceptent de modifier dans le discours leur structure
avec des V syntaxique, en permutant leurs arguments (ce qui entraîne ou non un
glissement sémantique) :
symétriques
[1] (a) Luc voit Marie. = (b) Marie voit Luc = (c) Luc et Marie se sont
vus au bal (l'un l'autre). La fonction syntaxique du nom Marie est: a)
OD; b) S ; c) S (Luc et Marie = sujet multiple).
[2] (a) Le docteur finit sa consultation OD dans un instant. (b) La
consultation finit dans un instant. (c) Le docteur finit dans un instant.
Non seulement les réciproques (V+ l'un, l'autre) sont symétriques,
mais aussi d'autres verbes ayant un sujet et un objet de la même
sous-catégorie nominale: voir, rencontrer, collaborer, etc.; et aussi:
N alterne avec N' (alterner); N rime avec N' (rimer); N dialogue avec
N' (dialoguer). Les causatifs (fondre, bouillir, brûler, cuire, casser,
sécher, vieillir, gâter, embellir, empoisonner etc.) entrent dans des
structures symétriques, en changeant de statut transitif: Le soleil fait
fondre la neige.
Je fais fondre le sucre. Le sucre fond.
Jean a brûlé la lettre. Le feu a brûlé la lettre. La lettre a brûlé.
Un seul et même procès est décrit avec un sujet qui est l'agent
(Jean), la cause (le feu), l'objet (la lettre). Le sujet grammatical de
ces verbes exprime tantôt l'agent du procès (Luc s'endort), tantôt
l'instigateur (Le docteur anesthésiste endort Luc), tantôt la cause
matérielle (L'anesthésie endort Luc) ou l'objet inanimé ayant
déclenché le procès (L'anesthésique endort Luc).
Il y a aussi des verbes de mouvement en construction
symétrique: Luc ouvrit la porte. La porte s'ouvrit. Je monte l'escalier
(monter transitif direct). Cet escalier monte au troisième (monter
intransitif), différent du Vintr: Je monte au troisième. Le berger
descend la pente (descendre transitif direct, sujet animé). La pente
descend jusqu'au village (descendre intransitif, sujet inanimé).

77
Unités de l'analyse syntaxique

Exercice d'entraînement
● Cherchez dans le dictionnaire le sens et les constructions des verbes: foisonner,
fourmiller, pulluler, grouiller, résonner et employez-les dans des constructions
symétriques.
………………………………………………………………………………………………………..
………………………………………………………………………………………………………..
………………………………………………………………………………………………………..
………………………………………………………………………………………………………..
………………………………………………………………………………………………………..

g) Transitifs indirects en construction absolue


Tout comme les verbes transitifs directs, les transitifs construits avec
un ou deux (trois) objets indirects (OI, OPrép1, Oprép2…) s'emploient
sans leurs compléments :
Luc se plaint tout le temps. (à qui ? de quoi?) (structure
complète avec deux compléments: se plaindre de qqch. à qqn)
Bon, j'attends ! (attendre qqch. de qqn)
Commettre des péchés, ça charge. (ça charge la conscience
avec un fardeau de regret, de repentance).
Toute construction absolue reconduit un verbe transitif au statut
d'intransitif: «De quoi s'occupe Jean ? – Il enseigne. » (construction
absolue) (Jean enseigne les maths à ses élèves, double
complémentation).

4.4 Constructions transitives complexes: structures à verbe opérateur

4.4.1 Propriétés générales des constructions opératrices


Les verbes opérateurs sont des verbes construits avec une
proposition subordonnée au mode infinitif ou à un mode personnel.
Les verbes opérateurs peuvent se combiner avec des
compléments d'objet nominaux, donc ils sont aussi des verbes
distributionnels (V): Je préfère les couleurs claires. Elle a réussi sa
vie. (complément d'objet). Nous avons étudié ci-dessus les verbes
Vop distributionnels avec leurs principaux types de compléments
(Verbes opérateurs) nominaux. Les mêmes verbes peuvent avoir le statut de verbe
opérateur (Vop), quand ils se combinent dans la phrase avec un
complément à l'infinitif ou avec une subordonnée complétive.
Exemples: Vop
Luc veut partir. (vouloir + INF)
Vous me permettez de fumer ? (permettre + de INF)
Marie a réussi à réaliser son projet. (réussir + à INF)
Luc veut que tu fasses ce voyage. (vouloir que P)
Vous permettez que nous restions avec vous ? (permettre que P)
Elle espère que demain à midi elle aura terminé.(espérer que P)
Structure Le complément à l'infinitif peut être direct (je préfère boire du
du GV ayant thé), ou indirect (tu as réussi à terminer, Il s'est hâté de partir). La
au centre un nature du complément infinitif est donnée par la substitution
pronominale de l'infinitif: nous décidons de partir/ nous décidons cela
Vop (objet direct). Certains opérateurs régissent des infinitifs introduits
par la préposition à (apprendre à, consentir à, continuer à, chercher
78
Unités de l'analyse syntaxique

à, parvenir à, s'obstiner à,, se préparer à, renoncer à, etc.), ou par de


(cesser de, finir de, arrêter de, achever de, prier de, proposer de,
tâcher de, éviter de, craindre de, accepter de, être obligé de,
regretter de etc.); les verbes opérateurs devoir, pouvoir, vouloir,
savoir, nier, soutenir, assurer, espérer, désirer, préférer, sembler,
paraître, croire, penser et parfois aimer et souhaiter se construisent
avec un infinitif de rection directe (Ø INF): Je préfère aller seul. Il
aime voyager. Elle souhaite se marier tôt. Pour quelques verbes, les
deux constructions prépositionnelles sont en variation libre
(commencer de/ à; continuer de / à; demander de / à), ou en
variation grammaticale: décider de/ se décider à.
• Verbes opérateurs (Vop) qui sont aussi distributionnels (V).
Le changement de statut grammatical s'accompagne souvent d'une
disjonction homonymique: le sens du verbe change, de sorte qu'on
pourrait considérer qu'il s'agit de deux verbes distincts:
(V) Luc aime Marie. (=avoir un sentiment pour une personne)
(Vop) Luc aime voyager. (= juger que c'est bon)
(Vop) Luc aimerait bien que vous lui téléphoniez. (id.)
Les verbes distributionnels (V) et les verbes opérateurs (Vop) ont des
propriétés communes, mais aussi des propriétés syntaxiques
divergentes: un complément nominal ne fait que renvoyer à un
actant du procès (il écrit une lettre, je pense à un ami, je me
souviens de notre vieille maison), tandis que le complément infinitif
ou le complément propositionnel renvoient à un procès second, avec
ses propres actants.
• Structure actancielle des constructions opératrices.
Chacun des procès représentés dans une construction opératrice a
ses propres actants (agents effectuant le procès, ou objets impliqués
Identité d'une façon non agentive dans la réalisation de ce procès):
ou non identité JE (agent) + voudrais + un café (objet).
des Agents TU (agent) + as prêté + ce livre (objet) + à ton ami (objet
second).
des deux verbes
L'emploi d'un complément à l'infinitif implique d'habitude1 une identité
des deux agents:
S1 – V1 S2 = S1 – V2
JeAgent 1 voudrais (V1) venir (V2). (Agent1= Agent 2)

La non identité des deux agents :


JeAgent 1 voudrais (V1) que tu Agent 2 viennes (V2). (Agent1 ≠ Agent 2)
S1 – V1 que S2 – V2
conduit à une structure avec proposition complétive, tandis que
l'identité des agents permet les deux types de complétives: infinitive
(INF), ou conjonctive (que P):
(Agent1 = Agent 2) (complément INF ou P)
a) Je crois avoir compris la leçon.
b) Je crois que j'ai compris la leçon.
(Agent1≠ Agent 2) (complétive: P)
Je crois que tu as compris la leçon.
(Je ne crois pas que Luc ait compris la leçon.)

1
Sauf construction à « sujet monté »: Je vois Marie sortir. Tu la fais pleurer.

79
Unités de l'analyse syntaxique

4.4.2 Propositions complétives


Complétives à l'infinitif ou à un mode personnel
• Choix du mode dans la complétive:
Les verbes opérateurs régissent un verbe second qui est soit à
l'infinitif (je dois téléphoner), soit à un mode personnel: l'indicatif
(IND) ou le conditionnel (CDT) pour une action réelle/ éventuelle, le
subjonctif pour une action imaginée:
Luc sait que nous sommes/ serons là. Indicatif
Luc pense que nous serions là ce soir. (éventualité) Conditionnel
Quel mode Luc ne pense pas que nous soyons là à sept heures. Subjonctif.
dans la complétive ? • Distribution des compléments propositionnels (INF ou/et que P).
Il y a des verbes (devoir, pouvoir, hésiter, commencer etc.) qui ne
peuvent pas se construire qu'avec une proposition complétive réduite
Sélection du mode en à l'infinitif, car leur agent premier est toujours le même que l'agent du
fonction du Vop procès second. L'unique forme possible pour la complétive de ces
verbes est donc l'infinitif:
(Agent1 = Agent 2)
Nous devons partir. (Il serait incorrect de dire: *Nous devons
que nous partions ou *que vous partiez.) Il n'a pas osé venir.
(Incorrect: *Il n'a pas osé qu'il vienne; *que nous venions.)
Mais la plupart des verbes opérateurs ont une double disponibilité
combinatoire (infinitif ou proposition):
Vous croyez pouvoir faire cela ? (INF) (Agent1 = Agent 2)
Vous croyez que vous pourrez faire cela ? (que P)
Vous croyez que Luc ait pu faire cela? (que P) (Agent1 ≠ Agent 2)

• Le sujet logique du complément à l'infinitif


Pour déterminer le sujet logique du complément infinitif, plusieurs
situations sont à prendre en considération:
Complétive 1. L'infinitif a un même sujet logique que le verbe opérateur:
réduite à Luc croit être malade.
l'infinitif 2. Le verbe opérateur se construit avec un objet (direct, indirect) qui
est le sujet logique de l'infinitif subordonné:
Luc me fait rire avec ses prétentions.
Luc a obligé Marie à venir à six heures.
Luc a demandé à ses collaborateurs de venir plus tôt.
C'est une obligation pour moi d'y aller.
C'est gentil pour vous de venir.
Luc nous invite souvent à lui rendre visite.
3. Le verbe introducteur est une construction impersonnelle:
a) l'infinitif est un verbe non pronominal qui exprime un procès à
agent indéfini, générique:
Il faut prendre des précautions.
C'est une obligation d'y aller.
b) l'infinitif est un verbe pronominal dont le pronom exprime en même
temps son agent :
Il faut se lever tôt (agent indéfini)/ me lever tôt (agent défini).
(aussi: Il lui faut se lever tôt.)
C'est un plaisir de se [nous/ me] trouver là.

80
Unités de l'analyse syntaxique

Sous-types de propositions complétives à verbe fini


►proposition complétive conjonctive, qui est introduite par la
conjonction que (notée symboliquement : que P);
Typologie
►proposition complétive «substantive» ou relative sans
antécédent (J'aime qui tu aimes; J'ai parlé avec qui tu sais). À cette
des subordonnées
catégorie appartient aussi la subordonnée précédée par un indice
complétives pronominal démonstratif ce qui/ ce que: Il a décrit ce dont il se
souvenait. Je vois ce que tu me montres. (ce n'est pas considéré
comme un pronom, mais comme simple indice nominal), car dans la
plupart des contextes il ne s'agit pas d'un objet du verbe
pronominalisable par ce: Papa a consenti à ce que je vous
accompagne. Je me souviens de ce que tu m'avais dit. (de tes
paroles), mais: Je me souviens de ce qui nous est arrivé.
► proposition interrogative indirecte, introduite par un élément
interrogatif: Luc sait bien où aller./ avec qui parler. / comment faire. /
à qui se fier./ à quoi s'attendre.
La complétive peut être reprise par une anaphore
pronominale: le substitut pronominal d'une subordonnée infinitive ou
d'une complétive avec mode personnel est la forme neutre du
pronom personnel: le, les démonstratifs: cela (ça), et l'indice nominal
ce, ainsi que les pronoms EN et Y:
Je le sais bien (=cela) (= que tu viendras)
Luc ne me l' a pas dit. (le = que P ou INF)
Luc m'a dit [de venir]. (INF)
[qu'il était fatigué]. (que P)
[qu'il était sur le point d'accepter]. (que P)
[à quoi il pensait]. [P = Rel]
[comment il va faire] [P =interrogation indirecte]
 Luc m'a dit cela. Luc me l'avait dit.
Je m'en doutais bien. (de ce que Jean manque son train)
J'en suis certaine. (que Luc arrivera à temps)
Papa n'y consent pas (que Marie se marie avec Jean).

Conclusions sur la complémentation d'un verbe opérateur


Un verbe peut avoir des compléments d'objet ou des complétives :
Jean désire cet emploi. (compl. d'objet: V + N)
Jean désire obtenir cet emploi. (complétive infinitive: Vop + INF)
Jean désire que j'obtienne cet emploi. (complétive à un mode
personnel: Vop + que P )
L'infinitif en fonction de complément est considéré comme une
proposition réduite parce que, contrairement à un complément
d'objet (nominal), l'infinitif introduit une structure propositionnelle
complète (avec son propre sujet et ses propres compléments).
Les constructions opératrices sont le résultat d'une mise
ensemble de deux ou plusieurs propositions sur la structure d'une
Structures proposition matrice construite avec pivot verbal opérateur :
de (P1) Luc a appris quelque chose. (OD)
complémentation (P2) Monique est venue hier chez Jean.
des verbes
(P3) Monique a remis hier un document à Jean.
Au nominal complément d'objet direct de la première proposition on
opérateurs peut substituer toute une proposition (P2 ou P3):
81
Unités de l'analyse syntaxique

PH = Luc a appris que Monique était venue hier chez Jean.


►phrase complexe, avec pivot verbal opérateur déterminé par
une complétive (P2).
PH' = Luc a appris que Monique avait remis hier un document à
Jean.
►phrase complexe, ayant comme pivot un verbe opérateur
déterminé par une complétive (P3).
PH'' = Luc a appris que Monique était venue hier remettre un
document à Jean.
►phrase complexe, ayant comme pivot un verbe opérateur
déterminé par une complétive (P2) qui, à son tour, renferme
une complétive infinitive (P3).
PH'' bis = Luc a vu Monique venir hier remettre un document à Jean.
(voir et venir sont des verbes opérateurs)
►phrase complexe, avec comme pivot un verbe opérateur
déterminé par une complétive infinitive (venir hier) qui renferme à
son tour une subordonnée circonstancielle (de but) infinitive
(remettre un document à Jean).
Dans la détermination verbale, il y a donc une continuité entre
les compléments d'objets (Dt V= N) et les complétives : infinitives (Dt
V= INF) ou construites avec un mode personnel (Dt V = que P).

Test d'autoévaluation
Pour bien gérer ce test, il est indispensable que vous ayez déjà parcouru les
explications et les analyses données dans l'unité d'apprentissage 4. Vérifiez vos
solutions aux exercices en consultant la rubrique Clés du test d'autoévaluation.

Exercice 1
Dans le tableau ci-dessous, écrivez les verbes transitifs du texte qui sont utilisés à un
mode personnel et précisez leur construction: active, passive, absolue.

Les laboratoires sont galvanisés par le marché brésilien


Magali a 45 ans et elle vit dans la banlieue nord de la capitale brésilienne. Elle habite
avec ses trois filles. Employée à domicile, Magali perçoit un bon salaire. Pourtant ses
revenus ne lui permettent pas un suivi médical. Elle consulte de temps en temps dans
les centres publics de santé. En cas d'urgence elle est accueillie à l'hôpital. Elle
n'achète que rarement les médicaments qu'on lui prescrit, même si leur prix est
remboursé par les assurances. (d'après Le Figaro)
Vtr = ………………………; employé en construction : ……………………. ;
Vtr = ………………………; employé en construction : ……………………. ;
Vtr = ………………………; employé en construction : ……………………. ;
Vtr = ………………………; employé en construction : ……………………. ;
Vtr = ………………………; employé en construction : ……………………. ;
Vtr = ………………………; employé en construction : ……………………. ;
Vtr = ………………………; employé en construction : ……………………. ;
Vtr = ………………………; employé en construction : ……………………. ;
Vtr = ………………………; employé en construction : ……………………. .

82
Unités de l'analyse syntaxique

Exercice 2
Construisez des phrases avec le verbe parler qui correspondent aux structures de
complémentation mentionnées:
parler + Ø (construction absolue) …………………………………………………………….
parler + OI (construction avec objet indirect en Datif) ………………………………………
parler + OPrép (construction avec objet prépositionnel) ……………………………………
parler + OI + OPrép (construction avec double complémentation) ………………………..
…………………………………………………………………………………………………….

Exercice 3
Faites deux phrases avec chacun des verbes: compter, écouter, consommer, voir,
rompre, pour mettre en relief la distinction de sens entre l'emploi du verbe avec
complément d'objet direct et son emploi en construction absolue (avec ellipse du
complément d'objet).
…………………………………………………………………………………………………….
…………………………………………………………………………………………………….
…………………………………………………………………………………………………….
…………………………………………………………………………………………………….
……………………………………………………………………………………………………..

4.4.3 Sous-classes de verbes opérateurs


a) Verbes d'aspect et de modalité :
 en construction directe (Ø +INF): devoir, pouvoir, faillir (employé au
passé composé), oser, savoir, sembler, paraître, etc. Exemples: Luc
V opérateurs (I) semble se sentir mieux. Marie sait bien parler. Il n'a pas osé
m'appeler.
 en construction indirecte:
V d'aspect
V de modalité – (à +INF) continuer, arriver, commencer, apprendre, demander,
réussir, se mettre, tendre, tenir etc. suivis d'un infinitif précédé par la
préposition à: Je tiens à faire cela. Il s'est mis à travailler. Il a
commencé à pleuvoir;
– (de +INF) (s')arrêter, continuer, finir, oublier, se dépêcher, se
presser, s'occuper etc.: Luc continue de parler; il s'est arrêté de
parler.
Les verbes pouvoir, devoir, faillir, oser ne peuvent pas avoir une
complétive, car l'agent du verbe second est toujours identique à celui
du verbe opérateur régissant: Tu ne peux pas venir. Vous devez
partir. J'ai failli tomber. Jean a failli se tuer dans un accident. (le sujet
du verbe opérateur est aussi l'agent du verbe à l'infinitif).
b) Verbes de mouvement en construction directe (l'infinitif est
considéré un circonstant de but et non pas un complément d'objet, ses
verbes étant des intransitifs): s'en aller, courir, entrer, venir, rester,
descendre, sortir, etc.: Ils sont sortis prendre l'air. Va te reposer un peu
! Maman est passée me dire quelque chose. Le plombier est venu
réparer la conduite qui fuit. Elle est restée à la maison, lire un livre.

c) Verbes de perception (regarder, voir, apercevoir, écouter, sentir


etc.) en construction complexe: avec complément d'objet; avec
infinitif; avec complétive:

83
Unités de l'analyse syntaxique

J'entends un bruit. J'entends le facteur. J'entends quelqu'un


V opérateurs (II) : sonner (à la porte). J'entends le facteur sonner. J'entends que
quelqu'un sonne, mais je ne bouge pas.
V de mouvement, L'objet direct du verbe de perception, est en même temps le sujet de
V de perception l'infinitif: Luc, je l'ai vu passer dans la rue. Marie, je l'ai vue arriver.
Les verbes sentir et entendre admettent toutes les constructions,
en revanche, apercevoir n'a pas de complément à l'infinitif.
La complétive est inadéquate avec un sujet qui exprime l'objet
perçu: *?J'entends que les oiseaux chantent.
Pour cet emploi, le français a généralisé les constructions:
(i) J'entends les oiseaux. (complément nominal)
(ii) J'entends les oiseaux chanter. (double complément)
(iii) J'entends les oiseaux qui chantent. (avec relative)
Comparez aussi: Je le vois marchant vers l'église. Je vois Jean qui
marche en fumant. Je le vois qui marche. Elle regardait l'enfant jouer
du piano/ jouant du piano/ qui joue du piano. L'objet direct du verbe de
perception est le sujet de l'infinitif: voir quelqu'un faire cela. Le pronom
atone objet direct peut régir une relative: Je le vois qui dort. Nous la
voyons qui s'approche. Je les sens qui bougent dans la maison.

d) Verbes causatifs (dont font partie aussi les semi-auxiliaires


factitifs faire et laisser + Ø INF):
 (Ø INF) envoyer, conduire, emmener :
Structure: S – Vop – qqn – Ø INF
Exemples: J'ai envoyé Marie chercher mes lunettes. Il vous conduira
voir les tableaux. Ils l’ont emmené chercher ses bagages. Je vous
emmène voir le jardin.
 (à INF) amener, aider, appeler, employer, obliger, préparer,
pousser, forcer, provoquer, instiguer, etc.
V opérateurs (III) : Structure: S – Vop – OD(qqn) – à INF
Exemples: Ils l'ont amené à partager leurs opinions. Ils nous ont
V causatifs obligés à faire cela. On dit: je m'oblige à faire cela; on l'a obligé à
faire cela/ je suis obligé de faire cela; Il a été obligé de faire cela; le
document qu'on m'a obligé à signer. On distingue entre le sens
causatif (quand un agent détermine un autre à effectuer une action
quelconque; le premier agent est un simple «instigateur» d'action; le
second est l'agent proprement dit, c'est-à-dire celui qui réalise
effectivement l'action), et le sens «autocausatif» du verbe
psychologique :
Ils m'obligent à faire cela. (obligation de l'extérieur du sujet)
Luc a été poussé/ amené/ conduit/ aidé à faire cela.
Luc est obligé de rester (il se sent intérieurement obligé de
rester). Luc a décidé de partir. Il a décidé de ne plus rester. Il
s'est décidé à ne plus rester.
Mais une nuance de sens reconduit le complément infinitif selon
l'aspect du procès :
Je m'oblige à lui annoncer la nouvelle. Je suis obligé de lui
annoncer la nouvelle. Cela m'oblige à faire des recherches.
J'ai décidé de partir. Je suis décidé à prendre des mesures.
Il est occupé à faire des recherches. (occupé à cela)
Marie s'occupe de cela = elle s'en occupe. (s'occuper de cela).

84
Unités de l'analyse syntaxique

(s'occuper à faire qqch., à cela = agir: Marie s'occupe à soigner ce malade;


s'occuper de qqch., de faire cela = penser à, veiller à: Marie s'occupe de
soigner ses semblables).
f) Verbes de communication: dire, soutenir, proposer, remarquer,
établir, confirmer, nier, affirmer, déclarer, admettre, expliquer, etc.
Ces verbes ont en général une double complémentation : un
destinataire de la communication et le contenu du message
communiqué: suggérer qqch. à qqn; convaincre qqn de qqch.;
V opérateurs (IV) : confirmer à qqn qqch., dire à qqn qqch.:
S – Vop (à qqn) – de INF
V de communication
S – Vop (à qqn) – que P
V d'expérience J'ai dit à Jean de venir/ qu'il faut nous dépêcher.
subjective Il me dit de venir/ que nous pouvons y aller.
La construction sans objet second (OI) est assez rare avec infinitif,
mais le tour avec complétive conjonctive est tout naturel:
(?) *J'ai communiqué partir plus tard.  J'ai communiqué que
je devais partir mardi (que P). Je lui ai communiqué de venir.
Tu déclares donc n'avoir rien comme document.  Tu déclares
+ que P (sans expression de l'objet second, destinataire de la
déclaration) : Tu déclares que cette personne est avec toi.
Il prétend avoir oublié ses papiers.  Il prétend
+ que P. (Il prétend que ses papiers se sont/ soient perdus).
g) Verbes d'expérience subjective: affective, intellectuelle, volitive
(verbes de sentiment, de volonté, de jugement etc.): aimer, détester,
désirer, préférer, espérer, souhaiter, savoir, douter, se douter,
supposer, craindre etc. Parfois, le procès de participation subjective
intègre un verbe de communication ou inversement: supplier, prier,
implorer, ordonner et autres verbes de requête:
(OI + de INF) Je lui défends de venir me chercher.
Mes parents me défendent de revoir mon ami.
(OI, OD) Le docteur nous défend le café.
La religion défend à qui que ce soit le mariage
entre ascendant et descendant en ligne directe.
(que PSBJ) Les parents défendirent que Luc vînt la voir.
Les autorités défendent qu'on passe par là.

4.5 Groupe adjectival et groupe adverbial

4.5.1 Syntaxe de l'adjectif


• Les fonctions qu'un GAdj remplit dans la phrase sont l'attribut et
l'épithète:
«Julien fut étonné (...)» (Attribut du sujet)
«Le marquis le trouvait commode (...)» (Attribut de l'objet)
«Il admira ces hommes pieux et sévères (...)» (épithètes).
Fonctions syntaxiques «Les hommes riches ont le coeur haut»(épithètes). [Stendhal]
de l'adjectif Ces deux fonctions syntaxiques se distinguent par la présence/ l'absence
qualificatif
d'un verbe de liaison entre le nominal qui impose l'accord et l'adjectif:
Cet homme ←riche. Un bel → homme. (épihètes)
Cet homme← est/ semble/ est devenu→riche / beau. (attribut)
Les épithètes se transforment en attributs si un verbe attributif est inséré
entre le nom déterminé et l'adjectif :
85
Unités de l'analyse syntaxique

Ces hommes étaient pieux et sévères. (N + Adj épithète:


hommes pieux, hommes sévères)
Leur cœur est haut. (N + Adj épithète: cœur haut)
• L'épithète détachée dans la phrase (séparée de son nom régissant) a
souvent un sens circonstanciel: une troisième fonction dans laquelle se
L'épithète détachée,
retrouve un GAdj est donc celle de circonstant (de cause, de temps):
«(…) fort timide, elle était surtout choquée (…) des éclats de
qui équivaut voix de M. Valenod. » (Circ. cause: étant timide, elle était
à une subordonnée choquée par la voix élevée de son mari).
circonstancielle Vieux, il avait des difficultés à parler. (parce qu'il était vieux…)
réduite
Jeune, il n'avait pas d'expérience. (parce qu'il était jeune…)
Ce circonstant est en réalité une proposition réduite, ayant le même
sujet que la principale et ayant effacé son verbe attributif:
Lâche, il renonça au projet. (épithète détachée, en fonction de
Circ. cause) = étant lâche, il renonça au projet (proposition
participiale de cause). Les propositions réduites à un GAdj apportent
des précisions de nature circonstancielle:
« Ainsi ces jolis enfants, si soignés par elle, ne tomberaient pas
dans les mains d'un prêtre sale et grognon. » [Stendhal]
Si soignés par elle = GAdj formant une subordonnée de cause réduite
au seul attributif ("parce que les enfants étaient si soignés par elle").
• Le GAdj étendu intègre auprès de l'adjectif (catégorie centrale du
groupe) un déterminant (nominal, infinitif ou propositionnel). En effet,
tout comme un verbe, l'adjectif peut être modifié, par:
La détermination – un adverbe → totalement idiot; entièrement acceptable; très beau;
de l'adjectif
assez délicat (circonstant de manière);
– un groupe prépositionnel :
a) nominal → bon pour moi; plein de fautes; poli avec les personnes
âgées; fort en thème; dur avec ses adversaires; furieux envers ses
proches; aimable avec tout le monde; coupable de complot ; réfractaire
aux critiques; doué pour les maths (compléments nominaux de l'adjectif);
b) infinitif → enclin à céder; difficile à convaincre; las de faire
cela; propre à servir à cela; bon pour essuyer les verres (complétive
indirecte réduite à l'infinitif);
– une proposition: sûr que nous venons; triste que nous ne soyons
pas là. Le choix du mode dans la complétive de l'adjectif est dicté par
le thème lexical de l'adjectif: …certain, sûr que tu feras (que + IND);
…. heureux, douteux que tu fasses cela (que + SBJ).
• Il y a des adjectifs dépourvus de modificateurs: les adjectifs
relationnels ne constituent pas le centre d'un syntagme étendu. C'est
une question juridique. (on ne pas peut dire: *plus juridique, *beaucoup
Adjectifs
juridique). Un mouvement social, le planning familial etc. , sont des
relationnels adjectifs de sens relationnel: «qui appartient à la société, à la famille»,
etc. L'expansion par un déterminant comparatif (que + GN) n'est
possible que lorsque l'adjectif prend un sens q u a l i f i c a t i f : ce
dossier est plus politique que l'autre.
En revanche, les adjectifs qualificatifs, tout comme les
verbes, ont une structure actancielle, monovalente ou polyvalente. Ils
réalisent une prédication qui se fait compléter par divers
Adjectifs compléments et/ou circonstants: mince des doigts/ de taille; moderne
qualificatifs comme forme (complément de relation); aliment riche en minerais

86
Unités de l'analyse syntaxique

(complément indirect du contenu); rouge au soleil (circonstant de


condition); fou à lier (circonstant de manière, formellement, un
consécutif); mort de peur, d'une maladie incurable, de sa main, dans
un accident, dans un café, d'une overdose (complément indirect, ou
circonstant de cause, de lieu ou de temps, en fonction du contexte);
peu intelligent (circonstant de manière, tandis que très intelligent ou
plus/ moins intelligent sont les formes que prend l'adjectif pour
montrer le degré superlatif ou comparatif).
• Les adjectifs opérateurs (à rôle de modalisateurs d'énoncé):
probable, possible, vraisemblable, incertain, sûr, curieux, douteux,
content, heureux, désirable, nécessaire, indubitable etc., se
construisent avec des complétives infinitives ou/et complétives à un
Adjectifs mode personnel:
opérateurs Adj op + complément d'objet indirect:
Jean est content de son succès.
Jean en est content.
Adj op + complétive infinitive:
Jean est content de me voir. (de INF)
Jean est content pour moi d'avoir fait cela.
Adj op + complétive à un mode personnel:
Jean est content que je sois à côté de lui. (que P)
Jean est content de ce qu'il voit autour de lui (de cela = cause,
d'où le mode indicatif).
Elle était désespérée de ce qu'elle croyait deviner.(cause)
...désespérée qu'elle soit abandonnée (complétive).
4.5.2 Syntaxe de l'adverbe
Le GAdv remplit une seule fonction, celle de complément
circonstanciel. Mais il y a au moins deux catégories syntaxiques
d'adverbes, selon leur incidence: les adverbes de phrase et les
adverbes modificateurs d'une prédication. Exemples:
• ADV → PH (adverbe modalisateur de phrase).
(i) Heureusement, il a accepté. (circonstant énonciatif, de
modalisation)
• L'adverbe caractérisant, en fonction de circonstant de manière, peut
être incident à un verbe, à un adjectif ou à un autre adverbe:
Adv Adv → V (caractérisant du procès verbal)
= modificateur Adv → Adj (caractérisant d'une qualification d'objet)
dans la phrase Adv → Adv caractérisant d'une qualification d'action)
simple;
(ii) Luc écrit correctement. (adverbe d'une prédication verbale)
(caractérisant ou (ii') Ce garçon, malheureusement timide, est très intelligent.
circonstant) (ii'') Tu comprends extrêmement vite.
• ADV → Adv pro-phrase. (substitut de toute une proposition):
ADV
(iii) [Luc s'est marié. (=P)] Probablement. Oui. Vite ! Bien sûr !
= modalisateur Les adverbes substituts de phrase sont: oui, non, si, si fait, et tous les
de phrase adverbes et locutions adverbiales à rôle de modalisateurs: bien sûr, sans
doute, certes, sûrement, certainement etc.
En guise de synthèse, vous noterez que les adverbes, tout
comme les adjectifs opérateurs se situent dans deux positions
syntaxiques :

87
Unités de l'analyse syntaxique

1°) – à l'intérieur du GV, dans une structure actancielle qui implique


les constituants de la phrase:

Luc se sent sûr de lui, sûr de ses connaissances.


Je me sens heureux quand maman est avec moi. (Adj en fonction d'Attribut)

Tu t'attends plus sûrement à la réussite de Paul qu'à son échec. Sa cravate s'assortit
heureusement avec la nuance de son costume. (Adv. = Circ.manière auprès du GV)

2°) – à l'extérieur du GV et de la phrase noyaux, comme partie de la


prédication modale:

C'est sûr (= c'est un fait indubitable) que tu as pris la bonne décision. (Adj. que P)
Mais aussi: Luc est sûr que Paul réussira à venir.
Sûrement, Paul réussira. Heureusement, il avait réussi. etc. (Adv. que P)

 Les clés du test d'autoévaluation


Corrigé de l'exercice 1 :
– Vtr du texte, en construction active: avoir … ans; percevoir une somme; permettre
qqch à qqn.; acheter qqch.: (elle) a 45 ans; Magali perçoit un bon salaire. Ses revenus ne
lui permettent pas un suivi médical. Elle achète rarement les médicaments.
– Vtr du texte, en construction passive : galvaniser qqch.; prescrire qqch. à qqn;
accueillir qqn; rembourser qqch. à qqn: Les laboratoires sont galvanisés par le marché
brésilien. Les médicaments qu'on lui prescrit; elle est accueillie à l'hôpital; même si leur
prix est remboursé par les assurances;
– Vtr du texte, en construction absolue: consulter un spécialiste (un médecin): Elle
consulte de temps en temps dans les centres publics de santé.

Corrigé de l'exercice 2 :
parler + Ø (construction absolue) : Les animaux ne parlent pas. Pour un banquier, les
chiffres parlent toujours.
parler + OI: Je lui ai parlé en vain, il ne m'a pas obéi. Tu dois parler à tes parents.
parler + OPrép : On parle du loup et on en voit la queue. Nous ne parlons jamais de nos
problèmes.
parler + OI + OPrép : Je lui ai parlé de son avenir. Il m'a parlé de ses projets. Nous avons
parlé de la pluie et du beau temps.

Corrigé de l'exercice 3 :
 compter 1 avec OD (dénombrer) ≠ compter 2 en construction absolue (= avoir de
l'importance) Il compte ses sous. ≠ Cela ne compte pas pour moi.
 écouter 1 avec OD (entendre des sons, volontairement) ≠ écouter 2 en construction
absolue (= prêter attention à qqn.) Il a écouté de la musique. ≠ Je vous écoute !
 consommer1 avec OD (manger, utiliser une matière première) ≠ consommer2 en
construction absolue (= utiliser des ressources) Cette voiture ne consomme pas beaucoup
d'essence ≠ Cette lampe consomme deux fois plus que l'autre. Des bouches qui
consomment sans produire.

88
Unités de l'analyse syntaxique

 voir1 avec OD (perception) ≠ voir2 en construction absolue (= entendement) Il a vu un


film. ≠ Ah, je vois ! Vous voyez donc ! (où il veut en venir)
 rompre1 avec OD (défaire un arrangement) ≠ rompre2 (= cesser d'avoir des relations)
Les anciens partenaires ont rompu leur contrat. ≠ Marie et Jean ont rompu (= ils se sont
séparés)

→ Test de contrôle 4

Ce test est administré à l'issue de l'unité d'apprentissage 4.


Pour réaliser ce test, il est conseillé de relire l'unité et de suivre attentivement les sous-
classes de verbes pivots d'une prédication, de lire les phrases données à titre d'exemple
pour chacun des types de constructions syntaxiques du groupe verbal: constructions
intransitives, transitives simples et transitives complexes (à verbe opérateur).

Ne manquez pas de transmettre ce test à votre tuteur. À cet effet, il convient de marquer
votre nom, votre prénom et votre adresse personnelle sur la première page de votre copie.
N'oubliez pas de mentionner aussi le numéro du test. Vous êtes supposés le recevoir
après correction, avec les commentaires de votre tuteur.

Bon travail !

Exercice 1 (3 points)
À partir des verbes donnés ci-dessous et des actants mentionnés entre parenthèses,
faites des phrases en constructions syntaxiques alternatives (deux ou plusieurs) pour
montrer que ces verbes sont symétriques:
commencer (orateur, discours)
arrêter (histoire, son cours)
interrompre (papa, bureau, activité)
ralentir (Luc, auto, vitesse)
réussir (docteur, opération)
changer (écrevisse, couleur).
Exercice 2 (2 points)
Identifiez les types de compléments d'objets du GV dans les phrases suivantes:
L'un des sportifs manque aujourd'hui.
Il a manqué son train.
Sa bien-aimée lui manque. Le temps me manque
Luc manque de patience avec Marie.
L'imprimante manque de papier.
Cet enfant manque de respect aux personnes âgées.
Exercice 3 (2 points)
Construisez des phrases avec les verbes venir, aller, qui correspondent aux structures de
complémentation mentionnées:
venir + Ø (verbe intransitif)
venir + à qqn + de faire qqch. (emploi transitif indirect)
aller + Ø + Lieu (verbe intransitif)
aller bien à qqn (avec sujet inanimé).
Exercice 4 (3 points)
Identifiez dans le texte les verbes opérateurs et leur déterminant (infinitif, complétive,
éventuellement d'autres compléments):
Dans la tourmente qui a secoué le club en début de saison, les joueurs se sont montrés
89
Unités de l'analyse syntaxique

sûrs de pouvoir continuer à avoir une bonne évolution. Le contrat de leur entraîneur arrive
à son terme à la fin de la saison et ils veulent le prolonger de deux saisons
supplémentaires. C'est donc qu'il s'apprête à étudier son avenir, car l'équipe veut tourner
la page olympique. L'entraîneur a affirmé qu'ils avaient gagné trois matches de suite:
«Mon but est de pointer le doigt vers les faiblesses de la préparation. Nous espérons
obtenir des succès pour notre club». [d'après Le Figaro]

Références bibliographiques

• CRISTEA, T., CUNIŢĂ, Al., Verbul – Le Verbe, Bucureşti, Editura Ştiinţifică şi


Enciclopedică, 1975.
• DRĂGHICESCU, J. (coord.), Dicţionar de construcţii verbale (română, franceză,
italiană, engleză) (la liste des verbes français: pp. 599–609, pour lesquels sont
indiqués les articles des verbes roumains qui leur correspondent), Editura
Universitaria, Craïova, 2002.
• MAINGUENEAU, D., 1999 (éd. revue), Syntaxe du français (chapitres 2.1, 2.2, 5.1,
5.2, 7.3, 7.5, 8.3) , Paris, Hachette supérieur.
• RIEGEL, M., PELLAT, J.-C., RIOUL, R., 1994, Grammaire méthodique du français
(chapitre VII: Le groupe verbal), Paris, Presses Universitaires de France.

90
Constituants de la phrase (III): la pronominalisation

Unité d'apprentissage 5

CONSTITUANTS DE LA PHRASE (III): LA PRONOMINALISATION

Sommaire page

Les objectifs de l'unité d'apprentissage 5 91


5.1 Généralités sur la pronominalisation 92
5.1.1 La fonction substitutive des pronoms 92
5.1.2 Sous-classes de pronoms et leurs catégories grammaticales 93
5.1.3 La personne – catégorie grammaticale et référentielle 94
5.1.4 Le pronom personnel et la pronominalisation 96
5.1.5 La notion de pronom clitique 98
5.2. La pronominalisation des principales positions syntaxiques 98
Test d'autoévaluation 105
5.3 Remarques sur la phrase minimale contenant des clitiques 107
5.3.1 Les pronoms personnels coréférentiels avec le sujet 107
5.3.2 Y et EN, substituts pour des groupes prépositionnels 108
5.3.3 Combinaisons de pronoms clitiques dans la phrase minimale 109
Les clés du test d'autoévaluation 112
Test de contrôle 5 112
Références bibliographiques 114

Les objectifs de l'unité d'apprentissage 5

Quand vous aurez parcouru ce chapitre et effectué les exercices, vous serez capables de:

• Comprendre le rôle syntaxique des pronoms dans la phrase.


• Reconnaître la position syntaxique remplie par un pronom clitique.
• Appliquer correctement les règles de la pronominalisation du sujet, de l'attribut et
des différents compléments du verbe.
• Réaliser diverses transformations sur la structure minimale de la phrase, impliquant
le changement de la catégorie de personne, la permutation des constituants ou la
substitution anaphorique.

91
Constituants de la phrase (III): la pronominalisation

5.1 Généralités sur la pronominalisation

5.1.1. La fonction substitutive des pronoms


• Constituants de phrase pronominalisés
Substitution Les constituants de phrase peuvent être lexicalisés ou
pronominalisés. Les constituants lexicalisés s’expriment par des
par des pronoms
groupes nominaux ou par une proposition subordonnée qui, parfois,
d'un constituant de phrase est réduite à un verbe à l'infinitif ou au participe:
= pronominalisation
(i) Jean a persuadé son ancien collègue de faculté de s'inscrire
à ce cours de français.
 (i') Il l'en a persuadé.
Le pivot prédicatif (persuader qqn de cela) est entouré de trois
constituants de phrase: S = Jean; OD = son ancien collègue de faculté;
OPrép (de cela) = de s'inscrire à ce cours de français. Ces constituants
ont un contenu lexical plein ou "notionnel" dans (i), avant leur
pronominalisation, tandis que dans (i'), après pronominalisation, ils sont
vides de contenu lexical: pour interpréter leur référence, le lecteur se
rapporte aux constituants antécédents. De même:
(ii) Mes parents, mes sœurs, mes amis, tous m'avaient
T pron → reproché bien des fois de rester trop longtemps devant
transformation de l'ordinateur.
pronominalisaiton
 (ii') On me l'avait reproché bien des fois.
on = S; me = OI; le = OD (complétive)

Quand un groupe nominal est pronominalisé, il est réduit à sa


fonction syntaxique et aux seules catégories grammaticales du
pronom substitut. Les constituants de phrase pronominalisés se
limitent à «représenter» du point de vue référentiel leurs antécédents
lexicaux pleins (nominaux ou propositionnels).

• Caractérisation générale des pronoms: à la différence des


catégories lexico-syntaxiques de base: N (noms), V (verbes), Adj
(adjectifs) et Adv (adverbes), les pronoms se distinguent par leur
rôle purement grammatical dans la phrase et par leur inventaire
fini de formes.

• Fonction substitutive. Les pronoms sont des substituts d'un objet


de discours mentionné antérieurement ou que l'on pouvait décrire
par une expression nominale. La fonction syntaxique principale des
pronoms est celle de substituts d'un groupe nominal ou d'une
proposition subordonnée:
«Je vais envoyer la lettre en dépôt dans un paquet bien
cacheté à M. l'abbé Pirard.  Celui-là est honnête homme,
janséniste (…)» (celui-là = l'abbé Pirard)
Je vous ai avertis que ce train ne circule pas en fin de semaine.
Je vous en ai avertis. Je vous ai avertis de cela.
(les pronoms en, respectivement, de cela, ont substitué toute
une proposition, complétive indirecte)

92
Constituants de la phrase (III): la pronominalisation

5.1.2 Sous-classes de pronoms et leurs catégories grammaticales


Sous-classes de pronoms:
 personnels (double série de formes)
Les expressions  possessifs
énonciatives
évoquent la
 démonstratifs (y compris la forme atone ce)
situation de  relatifs
communication:  interrogatifs
 indéfinis (y compris l'indéfini personnel on)
 deux pronoms ayant un régime syntaxique particulier :
les participants
(Ière et IIe
– en (substitut d'un GN prépositionnel: de+N, substitut de catégorie
personnes) nominale virtuelle et aussi d'un adverbial du point de départ)
la proximité ou – y (substitut d'un GN prépositionnel: à+N, substitut également
l'actualité: d'un adverbial locatif).
ce, celui-ci etc.
cela, cet homme,
• Catégories grammaticales qui se manifestent dans les pronoms :
– en commun avec le verbe: personne et nombre;
– en commun avec le nom: genre, nombre, cas, détermination.

Pronoms énonciatifs et pronoms substituts ou anaphoriques


Les pronoms p e r s o n n e l s , les pronoms et les adjectifs pronominaux
d é m o n s t r a t i f s et p o s s e s s i f s se rapportent parfois à la situation
communicative, quand ils font référence aux personnes du dialogue ou
aux coordonnées spatio-temporelles de la communication (ici-
maintenant). Les pronoms: moi, toi, vous, le mien, tout comme les
expressions: ma famille, notre maison etc. sont toujours des mots
énonciatifs, parce qu'ils renvoient à la situation énonciative, tandis que
ce garçon-là, cela, celui-ci, etc. sont des mots de référence variable
("embrayeurs"), qui renvoient soit à la situation soit au contexte
antérieur (à ce dont on vient de parler). Les personnes du dialogue
s'expriment avec des pronoms personnels (je, tu…) et aussi avec les
possessifs (mon, ma, le mien…), mais seuls les pronoms personnels
ont la Ière et la IIe personnes comme catégorie combinatoire avec le
verbe. Tous les autres pronoms: démonstratifs, possessifs, relatifs,
interrogatifs, indéfinis ont seulement la troisième personne comme
Formes
pronominales catégorie grammaticale combinatoire avec le verbe:
énonciatives Le mien (le tien/ le sien/ le nôtre/ le vôtre, le leur) est ici. (IIIe pers)
(déictiques)
↓ L'anaphore pronominale.
Ière personne Le rôle syntaxique p r i n c i p a l des pronoms qui se combinent avec le
IIe personne
verbe à la troisième personne est celui d'instruments de reprise
anaphorique d'un groupe nominal déjà mentionné:
Formes ►Celui-ci (l'autre) (quelqu'un) (chacun) (le même) (le nôtre) est à
pronominales sa place. Lequel viendra ? Qui est là ? Chacun veut quelque
substitutives chose. Le mien est là. Personne n'est venu. C'est le même qui
(anaphoriques)
a été envoyé. (+ Verbe à la IIIe personne au singulier)

IIIe personne ►Ceux-ci (les autres) (quelques-uns) (tous) (les mêmes) (les
nôtres) sont à leur place. Plusieurs sont arrivés. Les vôtres sont
encore là. Certains sont partis. Les autres sont restés. (+ Verbe
à la IIIe personne au pluriel)
L'anaphore pronominale réalise la reprise de la référence d'un
antécédent :

93
Constituants de la phrase (III): la pronominalisation

Il était une fois un empereur… Il avait trois fils. Ceux-ci étaient


tous beaux et vaillants. Chacun aimait son père et tous voulaient
mériter son estime.
Les pronoms soulignés sont coréférentiels avec des expressions
nominales déjà mentionnées. Les pronoms anaphoriques renvoient à
des objets de discours censés être connus; ces objets de discours sont
de référence notoire, car ils ont été déjà mentionnés:

un empereur (antécédent) ← - - - - - - - - - - - - il (pronom qui reprend le


Tpron → contenu de l'antécédent)
L'anaphore trois fils (antécédent) ← - - - - - - - - - -- ceux-ci (substitut pronominal)
se réalise grâce à la
- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - chacun (substitut pronominal)
fonction substitutive
- - - - - - - - - - -- - - - - - - - - - - - - - - - - - - tous (substitut pronominal)
de toutes
les sous-classes • Les pronoms de troisième personne sont des anaphoriques: ils
de pronoms
reprennent la référence d'un groupe nominal déjà mentionné:
–Je veux absolument prendre chez moi Sorel (1), le fils (2) du
scieur de planches, dit M. de Rênal; il (3) surveillera les enfants
(...) Je lui (4) donnerai 300 francs
– [Sorel] (5) C'est un jeune prêtre (6) (...) qui (7) fera faire des
progrès aux enfants; car il (8) a un caractère ferme. [Stendhal]
Dans ce fragment de dialogue, les interlocuteurs parlent d'une
personne à laquelle ils font référence d'abord par un nom propre (Sorel)
ou par des descriptions nominales (le fils du scieur de planches), et
dans la suite de la conversation, la référence à la même personne se
fait par des pronoms anaphoriques: il (3), lui (4), qui (7), il (8), sont
des substituts de GN pleins exprimés par nom:
Sorel (dans la phrase antérieure) ………. il (3); lui (4);
Dans la même phrase: prêtre………. qui (7);…. il (8).
Le référent d'un pronom de troisième personne a été déjà exprimé ou il
est sous-entendu, donc il n'est plus nécessaire de le nommer ou de le
décrire, il suffit de l'évoquer par un pronom. La référence d'un pronom
substitut n'est pas fixe, elle varie selon le contexte et s'établit par
rapport à la référence de son antécédent "plein":
C'est le livre que tu demandes qui se trouve à sa place.
C'est Jean qui se trouve à sa place.
Dans ce texte, il y a un mot qui ne se trouve pas à sa place.
Le pronom anaphorique relatif qui signifie chaque fois un objet de
discours différent: le livre, Jean, un mot. De même, l'adjectif
pronominal sa a une signification contextuelle variable, comme tout
élément pronominal anaphorique la place du livre, de Jean et du mot).
Les pronoms substituts n'ont pas une référence fixe, mais ils réalisent
leur référence en fonction de leur antécédent dans le discours.

5.1.3 La personne, catégorie référentielle et grammaticale


• Les termes de la catégorie de la personne. Outre les pronoms
pour la troisième personne, qui sont des substituts pour les
différents objets de discours, il y a aussi les pronoms qui renvoient
aux personnes du discours. Il convient de distinguer:

94
Constituants de la phrase (III): la pronominalisation

– les personnes du discours au singulier: moi (émetteur du


discours), toi (non émetteur du discours). Ces formes renvoient à un
référent humain, moi étant la personne qui s'exprime par son discours,
et toi fait référence à un destinataire virtuel ou à l'interlocuteur réel du
sujet parlant;
La référence du
– le pronom nous (à la Ière personne du pluriel) renvoie à un
pronom personnel: groupe de personnes, dont fait partie le locuteur aussi: Hâtons-nous !
• je; tu = personnes Faites-nous grâce de vos homélies sentimentales ! (nous  Je +
du discours autres personnes);
– le pronom vous signifie un ou plusieurs destinataires,
• nous, vous =
renvoyant à une pluralité de destinataires/ interlocuteurs, ou à un
groupes de
personnes qui ensemble dont fait partie le destinataire d'un discours. Mais vous
incluent au moins peut aussi se rapporter à une seule personne (ayant le même
une personne de référent que toi): Vous voyez, monsieur, que je réclame vos avis
discours comme si déjà vous occupiez le poste. La forme d'adresse par vous
marque des rapports de politesse (distance interlocutive). Le verbe
• substituts (à la IIIe
personne) s'accorde toujours au pluriel, quelle qu'en soit la référence (singulière
ou plurielle), mais l'accord en genre/ nombre de l'attribut se fait en
fonction de la référence réelle du pronom: Madame, vous êtes invitée
à ce bal. Messieurs, vous y êtes invités aussi.
Quelques remarques:
– Les pronoms énonciatifs (Ière et la IIe personnes grammaticales)
Référence : n'ont pas besoin d'une description catégorielle: Je veux absolument
prendre chez moi Sorel: les pronoms je et moi renvoient toujours à
+PERSONNE
une personne. En revanche, les pronoms substituts (IIIe personne),
Ière et IIepersonnes évoquent divers objets individuels de discours; dans ce cas, il faut
grammaticales savoir la catégorie générique de l'objet pour comprendre le sens
d'une phrase: Il se trouve à sa place. QUI se trouve à sa place? (À
– PERSONNE quel objet de discours renvoie il ?). Il faut chercher dans le texte un
IIIe pers.
grammaticale
nom masculin singulier: Où est le dictionnaire ? Il est sa à place. il =
objet individuel et singulier dans la situation, appartenant à la
catégorie générique des «dictionnaires».
– Les pronoms "neutres" (il impers., ce, cela, ça) servent à reprendre le
contenu d'une prédication ou d'une proposition:
Une fois, c'était un jour de dimanche, il y a quatre ans de cela
(=depuis les événements qui ont eu lieu ce dimanche)
Vous auriez dû dormir. Au lieu de cela…. (=au lieu de dormir)
Il faut renoncer à tout cela. (à faire cela , à penser à cela)
Je le sais bien. (le =ce que vous me dites).
– Les pronoms "neutres" sont des substituts pour une notion
«continue» (non pas pour un objet individuel): prédication,
événement, les dires de quelqu'un considérés dans leur contenu.
Les pronoms "neutres" sont à la troisième personne, parce que le
sujet pronominal neutre se combine avec le verbe impersonnel (il
neige), qui est aussi un verbe unipersonnel (ces verbes ont une
seule forme conjuguée, à la troisième personne, singulier, masculin):
Cela est inquiétant (cela = ce qui se passe). Cela, je le crois
incorrect. Tout cela, je le trouve trop beau pour être vrai. (on observe
le statut grammatical de ces formes: l'unipersonnel = IIIe pers. masc.,
sg.).

95
Constituants de la phrase (III): la pronominalisation

catégorie énonciative
Ière, IIe personnes : je, tu, nous, vous
catégorie manifestée
(valeur individuelle)

Personne catégorie substitutive (anaphore)


grammaticale IIIe personne : il, elle, on, ils, elles

catégorie neutralisée ou l'impersonnel :


(valeur "neutre")
Il faut partir. Il est nécessaire de partir. Tu le
sais bien. Cela, je ne l'ai pas fait.
(formellement, comme catégorie de surface,
le verbe apparaît à la IIIe personne sg.)

5.1.4 Le pronom personnel et la pronominalisation


Une importance grammaticale particulière doit être accordée aux
(i) Le pronom
personnel
formes du pronom personnel qui est une catégorie de liaison entre
est le seul le verbe et le nom, son rôle étant en particulier de représenter auprès
à pouvoir représenter du verbe les fonctions syntaxiques remplies par des groupes
auprès du verbe nominaux: On le lui avait reproché. Il ne nous l'a pas dit, Vous me
les «personnes l'avait communiqué trop tard etc. Ces phrases schématiques, n'ayant
du discours»
pas d'autre constituant lexical que le verbe, ont pronominalisé leurs
constituants de la phrase minimale (sujet, attribut, objet direct ou
indirect, objet prépositionnel).
Caractéristiques par lesquelles le pronom personnel s'oppose
aux autres sous-classes de pronoms:
► l'opposition grammaticale de la personne comme catégorie
combinatoire avec le verbe (non seulement catégorie
substitutive);
► formes parallèles, accentuées et non accentuées, ou:
toniques / non toniques: je  moi; ils  eux etc.
(ii) Le pronom Par ces deux propriétés, le pronom personnel est le plus complet
personnel instrument de pronominalisation dans le système grammatical d'une
est le seul langue comme le français:
à avoir des formes • le pronom personnel est le seul à pouvoir faire référence aux
pour toutes les
positions syntaxiques : personnes du discours. Il n'y a pas d'expression nominale qui puisse
il a des formes remplacer un pronom de Ière ou de IIe personne. La référence de
pour les cas : ces pronoms est mobile (tout comme la référence des pronoms
Nominatif, Datif, anaphoriques), mais chaque Je, ou chaque Tu signifie toujours le
Accusatif locuteur, respectivement, l'allocutaire, qui varient avec la situation
d'énonciation;
• le pronom personnel est la seule sous-classe de pronoms qui
a des formes parallèles: formes toniques, autonomes, et formes
clitiques, conjointes à une catégorie autonome (au verbe). Les
clitiques n'ont pas un accent tonique propre dans la phrase.
Les formes clitiques du pronom personnel se distinguent
d'après la position syntaxique dans la phrase minimale:
(1) Clitiques sujets: je, tu, il, elle, on, nous, vous, ils, elles (neuf
pronoms en NOMINATIF, y compris le pronom indéfini on);

96
Constituants de la phrase (III): la pronominalisation

(iii) Le pronom (2) Clitiques objet direct: me, te, le/ la, nous, vous, les (sept pronoms en
personnel ACCUSATIF);
est le seul (3) Clitiques objet indirect: me, te, lui, nous, vous, leur (six pronoms en
à avoir un double
DATIF)
inventaire de formes :
formes accentuées Il y a encore une forme pour l'objet direct et indirect: la forme clitique se,
(toniques) qui renvoie au même référent que le sujet de la phrase: Jean se regarde
et = Jean regarde lui-même (Jean regarde Jean). Les formes me, te, se,
formes atones nous, vous, se accompagnent la conjugaison pronominale du verbe.
(clitiques)
Ces formes coréférentielles avec le sujet sont donc les formes du
pronom personnel réfléchi; à la Ière et à la IIe personnes, le pronom
réfléchi présente des formes identiques avec celles du pronom
personnel: me, te, nous, vous.
(4) Autres clitiques (cas prépositionnels): en et y.

5.1.5 La notion de pronom clitique


Les pronoms • Définition. Un mot s'appelle clitique s'il n'a pas d'autonomie
clitiques sont des fonctionnelle, étant obligé de se joindre à une catégorie autonome.
"particules" En français les clitiques sont des particules préverbales: la négation
auprès du verbe: ne et les formes du pronom personnel qui sont conjointes au verbe:
je, me, tu, te, il, lui, prends-le; se laver; je le vois. (Dans d'autres langues, les clitiques
le, elle, la, lui, nous, sont conjoints au nom également, comme en roumain: casa-mi).
vous, ils, leur, les, • Les pronoms clitiques sont: les formes atones du pronom
elles, on, se, y, en personnel, y compris de sa variante "réfléchie" (se), le pronom ON,
ce.
et aussi: CE (pronom démonstratif), EN, Y. Ils seront présentés ci-
(les formes soulignées dessous, dans l'ordre de leurs fonctions syntaxiques dans la phrase:
sont aussi des formes S, ATTR et OD, OI, cas prépositionnel (OPrép) ou adverbial (Circ.).
toniques, dans certains
contextes syntaxiques) • Les pronoms clitiques sont non accentués dans la phrase, sauf
après un impératif, quand ils sont le dernier mot: Appelle-moi ! Lève-
toi ! Donne-la-moi !

5.2. La pronominalisation des principales positions syntaxiques


Les positions syntaxiques pronominalisables en français
Positions Les pronoms clitiques peuvent apparaître dans la phrase française
syntaxiques
pour les
dans les fonctions syntaxiques suivantes : sujet, attribut, objet direct,
constituants objet indirect (en datif), objet prépositionnel, circonstant.
pronominalisés:
S – Verbe – ATTR ou OD, OI, OPrép, Circ
– sujet
(1) (2) (2) (3) (4) (5)
– attribut
– objet direct
– objet indirect La pronominalisation de la position syntaxique d'attribut n'a pas un
– objet pronom spécifique, elle utilise le même pronom que la position d'objet
prépositionnel direct; il résulte que les positions clitiques sont:
– circonstant
(rare, seulement
►Sujet pronominal→ Elle parle (au lieu du sujet lexical Marie parle).
locatif: il en vient; ►Objet direct (ou attribut) pronominal → Marie le voit (au lieu de
on y va) l'objet direct lexical: Marie voit son ami); Marie a été occupée

97
Constituants de la phrase (III): la pronominalisation

hier, elle ne l'est pas aujourd'hui (au lieu de l'attribut lexical:


Marie n'est pas occupée).
►Objet indirect: Marie lui téléphone (au lieu de l'objet indirect lexical:
Marie téléphone au docteur)
►Objet prépositionnel : Marie en parle beaucoup. (au lieu de l'objet
prépositionnel lexical: Marie parle beaucoup de son ami).
►Circonstant (point de départ ou point d'arrivée): J'y suis entré (y
au lieu de : dans cette maison).

Exceptionnellement par rapport à d'autres langues, le français


dispose de deux pronoms pour le cas prépositionnel: EN (substitut
des groupes nominaux précédés par la préposition de) et Y(substitut
des groupes nominaux construits avec la préposition à) qui sont
aussi des substituts adverbiaux dans certains contextes (voir ci-
dessous la description de ces pronoms).
En dehors de ces deux prépositions de et à, le cas
prépositionnel n'est pas une position syntaxique pronominalisable
par un clitique, car, devant une préposition, la forme pronominale
employée est obligatoirement une forme tonique (accentuée).
Exemples: avec eux, sans moi, pour toi.

Exercice d'entraînement
Réécrivez les phrases suivantes, en lexicalisant les objets direct et indirect, constituants
qui ont été pronominalisés:
Modèle: Jean le lui a rendu.
 Jean a rendu à son propriétaire le livre dont nous avons parlé.
1. Pierre le lui a avoué. 2. Le fils lui succédera à la direction de la banque. 3. Dis le-lui. 4.
Nous les lui avons retirés. 5. Marie ne le croit vraiment pas. 6. Ce sont ses parents qui le
lui ont demandé.
………………………………………………………………………………………………….……
………………………………………………………………………………………………….……
………………………………………………………………………………………………….……
…………………………………………………………………………………………….…………
……………………………………………………………………………………….………………
……………………………………………………………………………………………………….

● La pronominalisation du sujet
Les neuf formes pronominales appelées des pronoms sujets: je1, tu,
il, elle, on, nous, vous, ils, elles, sont les variantes atones du pronom
personnel en nominatif. Les clitiques sujets s'emploient comme
formes conjointes au verbe dans la conjugaison aux modes
personnels. Les pronoms sujets se prononcent dans le même
groupe phonique que le verbe, étant donc des formes littéralement
"conjointes" (prononcées dans la même unité accentuelle que le

1
Devant un verbe qui commence par voyelle, je devient j' (j'aime), forme élidée.

98
Constituants de la phrase (III): la pronominalisation

verbe conjugué, auxiliaire ou forme verbale simple): Pierre a pris le


bus [*p i ε R/ a p R i l (ə) b y s]; Il a pris le bus [ i l a p R i l(ə) b y s].
Formes parallèles Les pronoms sujets indiquent auprès du verbe la personne et
(tonique/ atones): le nombre du sujet. Du fait qu'ils n'ont pas d'autonomie syntaxique
(ne pouvant pas constituer un groupe phonique à part entière), ils
sont considérés comme étant porteurs de simples i n d i c e s
MOI, je grammaticaux.
TOI, tu Les formes pronominales parallèles pour la fonction de sujet:
LUI, il formes accentuées et formes clitiques
► Pour les personnes du discours, c'est seulement le singulier (moi,
ELLE, elle
toi) qui dispose de deux formes pronominales distinctes, l'une
Ø , on accentuée, l'autre atone (clitique):
NOUS, nous Moi, je suis d'accord.
VOUS, vous Toi, tu es d'accord.
«(...) Une maison dont j'aurais donné, moi, huit cents francs
EUX, ils
pour ma fabrique, et j'aurais fait un bon marché.»
ELLES, elles Dans ces exemples, le sujet clitique je, tu est redoublé par des
formes pronominales toniques, moi et toi.
► Au pluriel (nous, vous), c'est la même forme qui s'emploie comme
pronom clitique ou comme pronom accentué. Pour identifier la
catégorie (forme clitique ou tonique), il faut prendre en considération
la position syntaxique:
NOUS, les jeunes, nous aimons la musique.
VOUS, mes amis, vous ne venez jamais à temps.
(la première forme est accentuée, la seconde est un clitique du
verbe). On reconnaît la forme tonique/clitique seulement en se
rapportant au contexte syntaxique, par exemple, en remplaçant les
formes communes vous, nous, elles, par les formes distinctes: MOI/
je; TOI/ tu, LUI/ il, EUX/ ils.
Vous ne comprenez rien, vous, mademoiselle…
Nous avons renoncé, nous, à faire ce voyage.
Vous êtes en quelle année, vous, là, la personne en rouge…
(la première forme est un clitique, et la seconde est un pronom
tonique, parce que seule la forme tonique peut apparaître en position
détachée dans la phrase.

99
Constituants de la phrase (III): la pronominalisation

Exercice d'entraînement
Identifiez les formes pronominales toniques (en les encadrant) et les formes clitiques (en
les soulignant):

Je me rappelle mon amitié pour Michel, un voisin de classe. Un jour on nous distribua
à nous, tous les élèves, un questionnaire. Nous devions écrire notre nom et la profession
des parents. Lui, il parut hésiter. Il promena un regard pensif sur nous. Il chercha quelques
mots dans le Larousse. Enfin, il se décida. (…) J'avais rencontré ses parents à plusieurs
reprises, les jours de congé, chez lui. Ils m'avaient paru très distingués. Son père était
docteur; sa mère travaillait était elle aussi. Moi, je ne pouvais pas m'abstenir de les
observer longuement. Parfois, eux aussi ils me regardaient furtivement.

►Une conséquence du fait que les personnes du discours (moi,


toi, nous, vous) se distinguent des objets de discours (un chien,
Jean, cela, lui, …), est que ces derniers peuvent s'exprimer en tant
que sujet grammatical sous une forme triplée:
Mon ami, il est, lui, toujours présent. (S, S, V, S)
Elle, tu sais, elle est vraiment fâchée, Marie. (S, S, S + V) (avec
détachement à droite du sujet plein, Marie)
tandis que les pronoms de première et deuxième personne n'ont pas
une expression tripartite, car il n'y a pas de nom plein ayant la même
signification que MOI/je ou que TOI/ tu:
Moi, Georges, je suis le meilleur au monde. (moi et je sont
sujets, car ils imposent l'accord au verbe; Georges n'est pas
sujet, mais une Apposition explicative.)
Lui, mon ami, il m'a toujours aidé. (sujet tonique: lui; apposition:
mon ami; sujet clitique: il) Mais dans:
«Mon ami, il m'a toujours aidé, lui. », le sujet est exprimé trois fois.
Contextes ► Dans les phrases à verbe de statut pronominal (s'apercevoir,
syntaxiques s'habiller, se peigner, s'évader, se rendre à etc.), trois formes
pour les formes pronominales peuvent apparaître auprès d'un seul verbe:
pronominales
toniques:
VOUS, vous vous moquez de moi ! (le premier vous est une
forme accentuée, le deuxième est un clitique sujet, et le troisième,
• avant un toujours un clitique, fait partie du verbe pronominal se moquer et
déterminant donc il n'est pas en fonction sujet, étant un objet coréférentiel avec le
nominal (épithète, sujet. De même, les formes: elle, elles sont soit des formes toniques,
complément du soit des clitiques, c'est seulement le contexte qui les distingue:
nom, apposition,
proposition relative) ELLE ? Elle est bien gentille.
►Pour la troisième personne, les formes pronominales toniques se
• après préposition distinguent des pronoms clitiques seulement pour le masculin:
LUI, il ne vient plus. Il ne veut rien, LUI, de moi.
•mise en relief Ils se sont fâchés, EUX. EUX, ils se sont absentés aujourd'hui.
«Julien, LUI, est au comble de la joie; il se prend pour un
officier de Napoléon».
«S'il eût cessé de voir M. de Rênal, en huit jours il l'eût oublié,
LUI, son château, ses chiens, ses enfants et toute sa famille.»
100
Constituants de la phrase (III): la pronominalisation

La forme tonique apparaît ici en position détachée dans la phrase,


isolée entre virgules, pour marquer la référence emphatique (lui et
non pas une autre personne).

► La forme tonique du pronom apparaît chaque fois que le pronom


personnel est déterminé, soit par un complément du nom ou épithète
soit par une proposition relative:
«Son amour était encore de l'ambition; c'était de la joie de
posséder, lui, pauvre être malheureux et si méprisé, une
femme aussi noble et aussi belle.» (lui, forme tonique suivie
d'une apposition nominale réalisée par GN étendu)
► La relative jointe à un pronom personnel ne peut suivre qu'après
une forme tonique du pronom:
«Mon cher Sorel, vous qui avez de l'esprit....»
L'accord du verbe pivot de la relative doit se fait avec le pronom qui
régit la relative et qui est repris par le pronom relatif (anaphorique),
qui, en fonction de sujet :
Moi, qui ai de l'esprit.
Toi, qui as tant de sagesse.
Lui/ elle, qui a raison.
Vous, qui avez eu tort.
Nous, qui avons participé à cela.
Eux/ elles qui ont fait cela.
► La proposition relative est toujours une relative explicative, non
pas déterminative (restrictive), car les pronoms personnels sont, par
leur nature même, des mots définis: du moment qu'ils ont une
référence individuelle, ils ne peuvent plus restreindre leur application:
«Il y eut des moments où lui, qui n'avait jamais aimé, qui n'avait
jamais été aimé de personne, trouvait un si délicieux plaisir à être
sincère» (lui + deux propositions relatives explicatives).

Le sujet pronominal parmi les autres catégories de sujet


Tableau de synthèse
• le sujet est tonique, quand il est exprimé par:

a) nom propre ou commun: Jean arrive. Ces lunettes arrêtent les rayons infrarouges.
Les ultraviolets menacent notre peau.
b) nominalisations: Le mieux est l'ennemi du bien. Deux mille a été une année
heureuse. "A" est la première lettre de l'alphabet. "Que sais-je?" est le nom d'une
collection aux éditions Gallimard.
c) pronoms toniques: Quelqu'un arrive. Chacun évolue durant la vie. Celui-ci quitte les
lieux. L'autre est parti. Qui est resté ? Lequel viendra ? Nul n'est savant en cette
matière. C'est moi qui le dis. (sujet emphatique)
d) verbe (à l'infinitif) ou subordonnée complétive sujet: Voyagercela me plaît
beaucoup. Que tu partes, cela inquiète toute la famille. Venir jusqu'icicela fatigue.
Ce que tu discela aggrave la situation. Si Jean a menti ou noncela est resté un secret
pour moi. C'est fatigant de venir jusqu'ici. C'est bon de le lui dire toi-même.
L'important est d'être sincère. (La fonction de sujet se reconnaît en appliquant la
substitution par un pronom neutre, par exemple par le démonstratif générique
cela).

101
Constituants de la phrase (III): la pronominalisation

• le sujet est clitique (non tonique) s'il s'exprime par des pronoms sujets:
On arrive. Il rentre. Vous passez demain. Elle pleurniche. Je ris. Tu pleures. Nous
arrivons. Il plaît beaucoup. Elles arrêtent les rayons infrarouges. Ils menacent notre peau.
C'est bon. Ce sont des détails sans importance. Ce sera demain la fête.

• Le sujet pronominal redoublé


Les pronoms sujets (clitiques) peuvent apparaître seuls:
Elle arrive toujours en retard.
ou en redoublant un Sujet tonique:
Marie, elle arrive toujours en retard. Elle arrive toujours en
retard, Marie.
Le sujet grammatical redoublé, détaché à gauche ou à droite, est un
sujet mis en emphase, quand on veut insister ou souligner une partie
de l'information portée par la phrase:
Tiens, elle est assez bizarre aujourd'hui, Marie ! 
redoublement du sujet: le commentaire sur Marie commence avant
que son identité ne soit révélée.
Moi, je ne suis pas d'accord !  sujet redoublé, pour marquer
l'insistance du locuteur qui veut démarquer sa position, son opinion
Sujet personnel personnelle.
redoublé :
• La place du sujet (nominal, pronominal), par rapport au pivot
En huit jours il l'eût prédicatif. En français, l'antéposition du sujet nominal ou pronominal
oublié, lui, son est la position canonique, tandis que la postposition du sujet nominal,
château. l'inversion simple (du sujet clitique) et l'inversion complexe (avec
sujet nominal ET sujet clitique) sont des tours de phrase qui
Julien, lui, est au apparaissent dans certaines conditions syntaxiques et énonciatives
comble de la joie; il
se prend pour un
particulières. L'inversion du sujet se fait: dans la phrase interrogative;
officier de Napoléon. après certains adverbes ouvreurs de phrase; pour marquer certains
rapports logiques sans conjonction (la concession ou l'opposition par
exemple). Voir aussi, dans l'unité d'apprentissage no 2, le problème
de la place du sujet dans la phrase. Les situations à distinguer sont:
Sujet impersonnel
1°) Antéposition régulière (canonique) du sujet nominal:
redoublé: Marie attendait une délégation.
(subordonnée sujet, 2°) Postposition accidentelle du sujet nominal (indéfini) :
redoublée par un Discourut d'abord un représentant sud-africain dont Selmer
substitut "neutre": ce,
cela, ça): contempla le visage sur l'écran de la télévision (…).
Lui succéda un représentant suédois et chauve (…).
3°) Sujet clitique non inversif :
Que je fasse mes
devoirs, cela est très Elle attendait une délégation.
urgent J'attendais une délégation.
4°) Inversion simple du sujet (= inversion du sujet clitique):
A-t-il attendu la délégation ? Vont-ils ensemble ?
«J'avais quelques doutes sur sa moralité (...) Aussi n'aurais-je
jamais songé à le mettre auprès de nos enfants.» [Stendhal]
Serai-je aussi tremblant ? (L'inversion avec je ne se fait que
dans la langue littéraire.)
5°) Inversion complexe du sujet (= redoublement du Sujet nominal
par Sujet clitique mis en inversion):
La délégation a-t-elle attendu le Président de la République ?

102
Constituants de la phrase (III): la pronominalisation

Valeurs
Le Suédois a-t-il succédé à cet intervenant ?
de discours Ces aspects correspondent-ils à ce dont vous vous parliez ?
du pronom • Le sujet personnel indéfini on
on, Le caractère particulier du pronom on vient du fait qu'il est toujours
sujet indéfini
un pronom en cas nominatif, conjoint au verbe. Le pronom on est
donc toujours un sujet clitique, personnel et indéfini. N'ayant pas
personnel une forme tonique propre, on s'emploie à la place de nous ou de soi
(étant parfois coréférentiel avec ces pronoms):
On rentre toujours en soi-même quand on est déçu de ses
amis. On apprend toute la vie à se connaître soi-même. Allez,
on descend ! On y va (on = nous).
Le pronom on réalise toujours un sujet personnel (indéfini).
Comparez le sujet on avec le sujet impersonnel:
►phrase à sujet impersonnel:
Tout cela trompa le sous-préfet. (cet événement, ces détails,
ces faits, ces agissements, cette conduite etc.)
►phrase à sujet personnel:
On trompa le sous-préfet. (quelqu'un le trompa)
On est donc un pronom indéfini, de référence toujours personnelle:
par exemple, en entendant frapper à la porte on dit: On frappe à la
porte, car on imagine que c'est une personne qui fait l'action. En
sentant une odeur dans la cuisine, on dit : Ça sent bon ! Ça sent le
brûlé ! Ça brûle ! Ça s'allume, fais attention ! Dans ces phrases il y a
un sujet non personnel indéfini.
Constituants Le pronom on s'inscrit dans la série: je/ tu/ nous/ vous, c'est-à-
substitués par
le pronom
dire il est le terme indéfini du pronom qui renvoie virtuellement à une
le (neutre) personne du discours:
«On les fit attendre, l'accusé et son témoin, trois grands quarts
►Complétive : d'heure». (on = ceux qui ont laissé attendre l'accusé et son témoin).
Je le sais bien.
(le = ce que tu viens de
me dire, cela)
●La pronominalisation de l'objet direct
Les pronoms personnels clitiques en Accusatif (me, te, le/ la, nous,
Tu l'as vite deviné, vous les)2 sont au nombre de sept (pour le sujet il y avait neuf formes):
j'espère. «Que puis-je pour elle?... la quitter? Mais je la laisse seule en
(l'- = ce secret, cela). proie à la plus affreuse douleur…»
► Prédicat actif
« Jamais je ne t'ai tant aimée, mon cher ange !»
Je veux faire cela. Certaines formes pronominales sont syncrétiques: seulement le
Fais-le ! contexte peut les désambiguïser:
–la forme LES s'emploie pour les deux genres:
► Prédicat passif je les vois. (les masc.= les garçons, ou: les fém. = les fillettes)
Je commence à
t'adorer comme tu
et donc, il faudra se rapporter à l'antécédent:
mérites de l'être. Tu lesfém. vois, ces dames en bleu, là ?
Tu lesmasc. vois, ces messieurs, là ?
► Attribut ou bien, compléter par la forme pronominale tonique:
Courageux, vous l'êtes, Eux, je lesmasc. déteste ! Elles, je ne lesfém. attends plus !
mais vous ne l'avez
pas été toujours.
À toutes les personnes, les formes toniques du pronom personnel
Pierre, il l'est aussi. (l- sont identiques pour l'objet direct et pour le sujet:
= le fait d'être MOI, je viens. (S)
courageux)
2
Devant un verbe qui commence par voyelle ou par h muet, toute forme clitique qui présente un e muet
final, comporte une variante élidée: me, te, le, se  m', t', l' (il m'a vu, il t'a vu, il l'a vu, elle s'est rendue).

103
Constituants de la phrase (III): la pronominalisation

MOI, il me cherche. (OD)


C'est la forme clitique du pronom qui permet de préciser la fonction
des pronoms MOI, TOI, LUI, ELLE, NOUS, VOUS, EUX, ELLES,
autrement ils présentent un syncrétisme fonctionnel : Sujet = Objet
direct = Objet indirect/ prépositionnel. Mais les clitiques permettent
de les distinguer:
LUI, il vient (Sujet);
LUI, je le vois. (Objet direct);
À LUI, je lui donne cela. (Objet indirect)
La forme pronominale LE, pour la IIIe pers. sg. a deux valeurs:
substitut d'un nom masculin singulier: Jean, je le vois demain. (le =
Jean); la même forme, le, peut avoir une valeur neutre, pouvant
substituer une proposition complétive ou seulement une prédication
(qualité, propriété, caractéristique): voir les exemples ci-contre.

● La pronominalisation de l'attribut
Le pronom neutre le peut substituer non seulement un objet direct,
mais aussi l ' a t t r i b u t , personnel ou impersonnel. On pourrait
considérer qu'il y a deux formes distinctes: LE1 pour le masculin et
LE2 , pronom neutre. Cette seconde forme, LEneutre, peut se mettre en
parallèle avec le démonstratif neutre cela:
Il voit cela chaque jour (ces faits, ces agissements  il voit
cela)  Il LE voit. Il leneutre voit chaque jour  ÇA, c'est chaque
jour qu'il leneutre voit. (il voit cela). Il devrait partir, mais il ne l'a
pas fait = il n'a pas fait cela.
●La pronominalisation de l'objet indirect
Syncrétisme Les pronoms personnels clitiques en Datif (me, te, lui, nous, vous,
des formes: lui) sont au nombre de six. Les clitiques en Datif sont employés seuls
ou ils redoublent leurs équivalents toniques: Nous, on ne nous a rien
Luc me voit (OD) dit, ou leur antécédent nominal: À Marie et à sa sœur, on ne leur a
te
nous
rien dit). Les formes toniques sont construites avec la préposition du
vous cas datif: à + pronom tonique.
«Il lui parlait le moins possible» (lui = OI clitique)
Luc me donne ça (OI) «Au fait, se disait-il à lui-même…» (à lui = OI tonique)
te «Ils vous feraient peur à vous-même». (vous = OI clitique, à vous =
nous
vous
OI tonique, renforcé par même, un adjectif pronominal d'identité)
Une comparaison avec les clitiques sujets (pour le sujet il y avait
neuf formes de clitiques) met en évidence plusieurs syncrétismes:
• le clitique objet indirect lui s'emploie pour les deux genres, tandis que
les formes toniques du sujet présentent des formes distinctes: elle  lui.
Je lui téléphone (à elle ou à lui)
En plus, cette forme, lui, est identique au sujet tonique lui. Ceci dit, il
y a quatre significations pour la forme LUI:
lui 1  sujet tonique: Lui, il vient. Il refuse, lui de venir. (lui – il)
lui 2 objet direct tonique: Lui, je ne le comprends pas. Lui, tu
le connais bien. (lui – le)
lui 3, 4  objet indirect atone (clitique), masculin ou féminin:
Tu lui as posé une question (à Paul) (lui – à lui)
Tu lui as posé une question (à Marie) (lui – à elle)
Il n'en est pas de même avec le pluriel, leur qui est toujours clitique:
Je leur ai dit la vérité (à mes parents) (leur1 = à eux)

104
Constituants de la phrase (III): la pronominalisation

Je leur ai dit la vérité (à mes filles) (leur2 = à elles.


(Accompagnant un nom, leur est prédéterminant possessif: leur
chien; les formes le leur, la leur, les leurs sont pronoms possessifs.)

Test d'autoévaluation
Pour bien gérer ce test, il est indispensable que vous ayez déjà parcouru les explications
et les analyses données dans l'unité d'apprentissage 5. Vérifiez vos solutions aux
exercices en consultant la rubrique Clés du test d'autoévaluation.

Exercice 1
Tout en mettant les verbes à la forme demandée, remplacez les sujets des phrases
suivantes par des pronoms personnels, redoublant des sujets pronominaux toniques.
Modèle: Maman et papa [aller, passé composé] au cinéma
→ Ils sont allés au cinéma, eux.
a. Nous, les élèves et nos professeurs [vouloir, indicatif imparfait] faire une excursion.
b. Paul et ses cousines [venir, passé composé] chez moi.
c. Le service de presse du ministère avec tous ses employés [déménager, futur proche].
d. Son esprit de vérité, son sens moral, sa charité [être, passé composé] remarquables.
e. Le nouveau professeur de français et moi [avoir, passé récent] une première réunion de travail.
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………………………………………………………………………………………………………..
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Exercice 2
Complétez les phrases pour les groupes nominaux indiqués:
(Ce garçon) → Où est-il ? Le voilà ! Lui, du moins il verra le spectacle.
(Cette femme) …………………………………………………………………………
(Ces étudiants) …………………………………………………………………………
(Mon mari) …………………………………………………………………………
(Mes cousines) …………………………………………………………………………
(Nos filles) …………………………………………………………………………
(Vous) …………………………………………………………………………
(Toi) …………………………………………………………………………

Exercice 3
Composez des phrases avec le sujet on ayant les prédications :
1. sembler ignorer qqch. ; 2. venir prendre la commande ; 3. ne pas pouvoir arriver à
temps; 4. aller voir l'exposition ouverte du Centre Pompidou; 5. remettre à plus tard la
réunion du conseil; 6. ne savoir plus sur l'équipage disparu; 7. beaucoup étudier le
génome humain ces dernières années.
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105
Constituants de la phrase (III): la pronominalisation

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………………………………………………………………………………………………………..
………………………………………………………………………………………………………..
………………………………………………………………………………………………………..
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Exercice 4
Mettez en relief le pronom en fonction de complément d'objet direct:
1. Mon frère m'attend après les cours. 2. Je l'ai rencontrée hier à l'école. 3. Nous devons
vous remercier pour la réussite de cette collaboration. 4. Nous l'avons invité à prononcer
une allocution. 5. Marie t'avait attendu toute la soirée. 6. On les avait cherchés partout
avant le départ du bus. 7. Il nous a vus sortir les premiers. 8. Vous les avez abandonnées
sans pitié.
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106
Constituants de la phrase (III): la pronominalisation

5.3. Remarques sur la phrase minimale contenant des clitiques

5.3.1 Les pronoms personnels coréférentiels avec le sujet


Les clitiques me, te, se, nous, vous (en Accusatif et en Datif) s'appellent
réfléchis quand ils sont identiques au sujet de la phrase:
Syncrétisme des (Accusatif) Je me regarde dans le miroir.
formes du pronom
nous Je me regarde MOI-MÊME avec attention.
(le même syncrétisme (Datif) Je me suis répété plusieurs fois cette phrase.
pour vous ): Je me répète À MOI-MÊME plusieurs fois, cette phrase.
Une seule forme, se, s'emploie à l'Accusatif (Luc se lave lui-même)
Nous, les enfants, et au Datif (Luc se fait une omelette à lui-même), au singulier et au
nous n'y allons pas.
(S) pluriel (Ils se lavent eux-mêmes / se préparent un plat à eux-
mêmes). Pour la troisième personne, l'unique forme réfléchie, se,
Nous, on nous a correspond à huit types d'antécédents.
invités, bien sûr. (OD) Les formes toniques qui correspondent aux clitiques me, te,
nous, vous, se, sont:
Nous, on ne nous a
pas dit la vérité (à – pour l'accusatif: moi, toi, nous, vous, lui/ elle, eux/ elles;
nous). (OI) – au datif : à moi, à toi, etc.
«Je me suis mis à nu au bord de la grande scène» (chanson)
Nous nous habillons (S = Je; se mettre à nu lui-même – OD)
nous-mêmes. «Je me suis répété tout ce qu'on s'était dit » [ibid.]
(réfléchi, Accusatif)
(S = Je; se répéter à lui-même – OI)
Nous nous faisons du Très souvent, pour marquer la coréférence avec le sujet de la
mal à nous-mêmes. phrase, ces pronoms toniques se renforcent par l'adjectif pronominal
(réfléchi, Datif) d'identité (même, mêmes): (à) moi-même, (à) toi-même etc.
• Les formes nous et vous représentent dix valeurs grammaticales
syncrétiques: a) pronoms personnels (toniques ou atones): sujet, objet
direct, objet indirect; b) des pronoms réfléchis en Accusatif ou en Datif.

• Le pronom (tonique) soi


Le pronom tonique SOI est employé comme un pronom autonome
sans impliquer la présence d'un clitique se devant le verbe: On est
Contextes discriminatifs: toujours plus exigeant envers soi (envers soi-même). Soi se rapporte
à une seule personne (individuelle), mais de référence souvent
Chacun pense à soi. générique: Il faut penser à soi. L'homme est un être qui ne songe
(en général) qu'à soi. Soi peut aussi se rapporter à tous les hommes, mais pris
individuellement: Chacun pour soi !
Pierre pense à lui-
même (individuel). Les formes toniques soi et soi-même peuvent s'employer aussi
avec une construction verbale pronominale (se + V), d'habitude
Chacun verra lui-même renforçant des sujets indéterminés: Il est difficile de se juger soi-même.
ce qui se passe. Il convient de se faire soi-même un plan, avant d'agir. Ici, on s'occupe
(distributif). soi-même de la nourriture.
Soi et soi-même ne sont plus liés grammaticalement avec le
clitique se, ni avec le possessif son+ N/ le sien; en général, soi et soi-
même ne se rapportent pas à un sujet individuel/ individualisé.
Les pronoms toniques qui correspondent au clitique se sont les
formes personnelles (lui ou lui-même; elle ou elle-même; eux ou eux-
mêmes; elles ou elles-mêmes).
«Sa figure n'exprimait rien que la satisfaction de soi-même.»

107
Constituants de la phrase (III): la pronominalisation

«Croyez-vous qu'il faille, pour être agronome, avoir soi-même


labouré la terre ou engraissé des volailles ?» [Flaubert]
«Il ne faut pas chercher la réconciliation, ni avec l'autre en soi
(rire), ni avec soi-même.» [Baudrillard, interview]

5.3.2 Y et EN, substituts pour des groupes prépositionnels


Les pronoms En et Y, toujours des clitiques, peuvent substituer des
syntagmes prépositionnels ou des adverbiaux. L'antécédent des
pronoms substituts EN et Y peut être:
– un adverbe:
Les pronoms
Jean est venu ici  Jean, il y est venu;
Nous sommes allés là-bas.  nous y sommes allés.
EN et Y
– un syntagme prépositionnel (GPrép) (prépositions de + N; à + N):
sont toujours Jean pense à cela  Il y pense souvent, Jean.
conjoints au Jean ne se souvient plus de cela. Jean ne s'en souvient plus.
verbe – un objet direct (seulement pour EN) :
Jean prend une bière, moi j'en prends deux.
(pronoms
Jean a deux autos à lui seul, mais son frère n'en a aucune.
clitiques) Les pronoms clitiques EN et Y s'emploient devant le verbe à tous
les modes autres que l'impératif: Prends-en ! Prenez-en ! N'en
prends pas ! Vas-y ! Pensez-y ! Mais: des photos ?  J'en ai
beaucoup. J'y pense. Nous nous y attendons. Il faut en prendre. Il
faut s'y rendre. C'est bon d'en avoir déjà pris hier.
Le gérondif inclut dans sa structure une particule en qui n'est
pas un substitut (pronominal, adverbial):
«Il y a eu des discussions d'une bassesse indicible: je
renouvellerais mon dégoût en en donnant le détail». [Stendhal]
Le premier en fait partie du gérondif, le second étant le pronom en,
tout comme dans:
En en mangeant, tu grandiras.
 en mangeant de cette huile de foie de morue;
En en buvant, elle restera jeune  en buvant de cet élixir.

Valeurs et emploi de EN :
Le clitique EN s'emploie pour substituer un complément du verbe, de
l'adjectif, ou du nom, construits avec la préposition DE : Je donnerai
le détail de ces discussions. J'en donnerai le détail. Discuter de ce
sujet  en discuter. S'occuper de cela  s'en occuper. Heureux de
cela  en être heureux. Content de cela  en être content etc.
« Au lieu de se moquer de la misère de ces braves soldats, on
La fonction en eut pitié, et on les aima. » (pitié DE lui)
substitutive: – Substitut d'un locatif (point de départ):
«Au lieu de sang, il en sortait une quantité de blé incroyable».
– Substitut de sphère nominale virtuelle (de ces N, contexte partitif):
• le pronom EN «Le dessin (…) fut gravé dans la nuit, et le lendemain on en
(de + N) vendit vingt mille exemplaires.» (= autant d'exemplaires du
dessin dont il est question).
«Ils avaient moins de vingt-cinq ans, et leur général en chef,
• le pronom Y
qui en avait vingt-sept.» [Stendhal] (en = ans; dans ce
(à + N) contexte, l'emploi du pronom en est livresque).

108
Constituants de la phrase (III): la pronominalisation

– Substitut d'un complément du nom (contexte possessif ou de


dépendance): J'en connais la solution (=du problème).

Valeurs et emploi du pronom Y :


– Le clitique Y se substitue au syntagme nominal précédé par la
préposition à :
Elle y renonça. (=à cela)
– Y peut être le substitut d'un locatif:
On y voyait encore des ponts-levis (= dans cette localité)
La duchesse y faisait la pluie et le beau temps (au milieu de la
cour, dans cette société).
Remarques:
Certaines expressions verbales (s'en aller, en prendre, en avoir
assez, s'en sortir, s'y comprendre, s'y faire, y avoir, n'y être pour rien
etc.) contiennent déjà les pronoms discutés.
Les linguistes (comme J. Dubois) font observer que le pronom y
se distingue de lui/ leur par le fait qu'il représente soit des inanimés, soit
un groupe de segments : J'y pense. / Je pense à lui (elle, eux, elles). À
l'oral, le clitique lui se prononce sous forme réduite [i], et ainsi les deux
pronoms (lui et y) sont arrivés à être identiques dans la langue parlée:
Tu lui diras, prononcé: [t y i d i r a] ou Je lui parlerai [з i p a R l r ε].

5.3.3 Combinaisons de pronoms clitiques dans la phrase minimale

(I) Phrase minimale avec un verbe pivot intransitif


Les seuls pronoms clitiques dans la phrase minimale ayant comme
S ± y ± en + V pivot un verbe intransitif sont les pronoms sujets et les pronoms Y
et/ ou EN: J'y suis. On y va. Nous y sommes restés. Ils en sont
revenus. (être, aller, rester, revenir = verbes intransitifs). Les
pronoms Y et EN occupent toujours une position conjointe au verbe;
aucun autre clitique ne peut séparer ces pronoms du verbe. Leur
ordre réciproque est: Y, avant EN. Exemple: Il y en a assez. Nous y
en avons beaucoup vu.
Si le verbe pivot de la phrase est un verbe pronominal, la
phrase minimale peut contenir en plus un pronom coréférentiel avec
le sujet (me, te, nous, vous, se), qui se met avant les pronoms Y et
me
te y
EN. Structure des constituants:
S ± se ± ± V • S + (me, te, se, nous, vous) + ( y ) + (en) + V
nous en
Il ne s'y comprend pas. On s'y attendait. Tu t'y rendras seule.
vous
Tu ne t'y es jamais rendue. Nous ne nous y sommes pas
rendus. Ils ne s'y étaient pas attendus. Vous vous y rendez
ce soir. Je m'en vais. Tu ne t'en es jamais remis. Ils nous
en remercient. Vous vous en remettez.

(II) Phrase minimale avec un verbe transitif et les pronoms Y, EN


le y
La même structure de clitiques apparaît avec un verbe transitif
S ± la ± ± V
les en construit avec objet direct et l'un des pronoms Y ou EN:
• S + (me, te, nous, vous, le, la, les) + ( y ) + (en) + V
109
Constituants de la phrase (III): la pronominalisation

Je vous en supplie. Il nous y invite. Tu m'y appelleras. Nous


les en avons retirées. (Nous avons retirés nos propositions du
secrétariat du concours). Nous l'en dissuadons fermement. Il
l'y conduira. Tu nous y mèneras. Nous les y conduirons.
Le pronom Y ne se combine pas avec lui, leur, tandis que EN
accepte devant lui ces pronoms:
• S + lui (leur) + en + V
S ± lui ± en ± V Il lui en fera part. Nous lui en donnerons une partie. Tu leur en
leur diras quelques mots. Je ne lui en ai jamais parlé. Je ne leur en
ai rien dit. Envoie-lui-en ! Donne-m'en ! Donne-nous-en !
En conclusion, le pronom Y n'accepte devant lui que les pronoms
coréférentiels avec le sujet de la phrase (me, te, se, nous, vous) ou
les clitiques objet direct (me, te, nous, vous, le, la les), mais jamais
les deux séries à la fois.

(III) Phrase minimale avec un verbe pronominal construit avec


d'autres clitiques que les pronoms Y, EN
Combinaison entre verbe pronominal et un clitique objet direct:
ME, TE, SE, NOUS, VOUS + le/la/ les 
me le Ils se le dessinent. (le plan de la ville, pour ne pas l'oublier) Ils
te la
se la disputent. Je me le promets. Tu te le dis. Nous nous
S ± nous ± les ± V
vous l'offrons.
se
(IV) Phrase minimale avec un verbe double transitif, avec
d'autres clitiques que les pronoms Y, EN
Les phrases ayant comme pivot un verbe double transitif présentent
diverses combinaisons de clitiques:

(a) combinaison entre une personne du discours et un objet direct à


la troisième personne :
ME + le/ la/ les  Tu me le donnes (le cahier). Vous me le donnez.
Ils me le donnent. Il me l'a montrée. Il me la montre (la photo).
Toutes les autres combinaisons sont possibles:
TE + le/ la/ les  Il te le dessine. ('Il te dessine un mouton'). Il te l'a
dessinée (la carte). Ils te la volent. ('Ils volent ta valise'). Ils te
l'ont volé. etc.
NOUS + le/la/les Il nous le dessine. Tu nous l'a donné (le cahier).
VOUS + le/la/ les  Il vous le dessine. ('Il vous dessine un mouton')
Ils vous la volent. (= la valise') etc.

(b) Les clitiques des deux sous-classes grammaticales (objets directs


et indirects) à la troisième personne se combinent entre eux:
LE/ LA/ LES + lui/ leur Je le lui donne (Je donne à quelqu'un ce
cahier). Nous le lui rendons. Nous le leur prêtons. Tu le lui
le lui
S± la ± leur ± V
rends. Nous la leur prêtons. Vous la leur portez ce soir. Je les
les lui donne (Je donne à quelqu'un ces revues).
Lui et leur n'admettent pas la combinaison avec la série des clitiques
me, te, nous, vous, se.
(V) Phrase minimale négative avec divers clitiques

110
Constituants de la phrase (III): la pronominalisation

Les deux parties de la négation vont encadrer le verbe sans le


séparer de ses pronoms conjoints, c'est-à-dire sans briser l'unité
entre le verbe et ses compléments clitiques, présentés ci-dessus:

S + ne + me le lui en V + PAS + Participe passé


te la leur
nous les y
vous
se

Papa ne me le PARDONNE jamais, cet échec à l'examen.


Papa ne me l' A jamais PARDONNÉ, cet échec à l'examen.
Je ne vous les PERDRAI pas.
Je ne vous les AI pas PERDUS.
Elle ne s'en REMETTRA jamais.
Elle ne s'en EST jamais REMISE.

• Conclusion. Le tableau récapitulatif qui suit fait apparaître dans ses


colonnes de droite, le pronom sujet impersonnel IL, l'emploi neutre de la
forme LE, tout comme certains pronoms toniques: le démonstratif
neutre avec ses variantes: ceci, cela, ça et le totalitaire tout. Ces
derniers pronoms, n'étant pas clitiques du verbe, n'ont pas été discutés
ci-dessus: ils ne servent qu'à compléter les traits sémantiques inscrits
dans ce tableau.
Traits sémantiques des formes clitiques du pronom en français
+Personne –Personne
[+défini] [–défini] [+actuel] [+virtuel]
Nombre de discours hors discours +discret +continu
singulier JE, TU IL, ELLE ON (ceci, cela, ça) ILimpers.
me, te le, la, lui, se (tu IL, ELLE (cela, ça)
générique) le, la, lui, se leneutre
en (de lui) y (= à cela) en
[soi, forme y (à, sur... lui) en (=de (en fonction

tonique] cela) partitive)

pluriel NOUS,VOUS ILS, ELLES ON ILS, ELLES [tout]


nous, vous les, leur, se (nous, vous les, leur, se
génériques)
(Les clitiques en fonction de sujet sont donnés en majuscules)
Il va de soi que VOUS, utilisé comme forme polie d'adresse à une
seule personne est une variante en contexte pragmatique particulier
de la forme du singulier TU.

111
Constituants de la phrase (III): la pronominalisation

 Les clés du test d'autoévaluation


Corrigé de l'exercice 1:
a) Nous, nous voulions faire une excursion. b) Ils sont venus chez moi, eux. c) Eux,
ils vont déménager. Ils vont déménager tous, au service de presse. d) * Ils ont été
remarquables. Ça a été remarquable. Tout a été remarquable. e) Nous, nous
venons d'avoir une première réunion de travail.
Corrigé de l'exercice 2:
Où est-il ? Le voilà ! Lui, du moins il verra le spectacle.
(Cette femme) Où est-elle ? La voilà ! Elle, du moins elle verra le spectacle.
(Ces étudiants) Où sont-ils? Les voilà ! Eux, du moins ils verront le spectacle.
(Mon mari) Où est-il ? Le voilà ! Lui, du moins il verra le spectacle.
(Mes cousines) Où sont-elles ? Les voilà ! Elles, du moins elles verront le spectacle.
(Nos filles) Où sont-elles ? Les voilà ! Elles, du moins elles verront le spectacle .
(Toi) Où es-tu ? Te voilà ! Toi, du moins tu verras le spectacle.
(Vous) Où êtres-vous ? Vous voilà ! Vous, du moins nous verrez le spectacle.
Corrigé de l'exercice 3:
1. Dans cette école, on semblait ignorer l'importance de l'exercice pour apprendre
une langue. 2. On nous a fait signe qu'on allait venir prendre la commande. 3. Dans
ces conditions, on ne pouvait pas arriver à temps. 4. Mardi, on est allé voir
l'exposition ouverte du Centre Pompidou. 5. J'ai appris que le directeur avait décidé
qu'on devait remettre à plus tard la réunion du conseil. 6. Au commandement de
navigation, on ne savait plus rien sur l'équipage disparu. 7. Au Royaume-Uni, on
avait beaucoup étudié le génome humain ces dernières années.
Corrigé de l'exercice 4:
1. C'est moi que mon frère attend après les cours. 2. C'est elle que j'ai rencontrée hier à
l'école. 3. C'est vous que nous devons remercier pour la réussite de cette collaboration.
4. C'est lui que nous avons invité à prononcer une allocution. 5. C'est toi que Marie
avait attendu toute la soirée. 6. Ce sont eux qu'on avait cherchés partout avant le
départ du bus. 7. C'est nous qu'il a vus sortir les premiers. 8. Ce sont elles que vous
avez abandonnées sans pitié.

→ Test de contrôle 5

Ce test est administré à l'issue de l'unité d'apprentissage 5.


Pour réaliser ce test, il est conseillé de relire l'unité et de suivre attentivement chacune
des catégories du pronom personnel, avec ses différentes formes et fonctions
grammaticales. Examinez en particulier les différentes valeurs grammaticales d'une
seule et même forme pronominale (lui, leur, ne, te, nous, vous, etc.), car seul le contexte
permet de préciser quelle serait la valeur actualisée par ces formes syncrétiques, qui
relèvent de différentes positions syntaxiques. Essayez de mémoriser les chaînes de
pronoms clitiques dans la phrase minimale.

Ne manquez pas de transmettre ce test à votre tuteur. À cet effet, il convient de marquer
votre nom, votre prénom et votre adresse personnelle sur la première page de votre
copie. N'oubliez pas de mentionner aussi le numéro du test. Vous êtes supposés le
recevoir après correction, avec les commentaires de votre tuteur.

Bon travail !

112
Constituants de la phrase (III): la pronominalisation

Exercice 1 (1 point)
Mettez à la voix active, en employant le sujet on :
Le dîner a été servi dans le grand salon.
Les sacs de couchage ont été mis à même le sol.
Votre mémoire sera examiné attentivement.
Ce qu'avait fait Pierre a été beaucoup apprécié.
Le nouveau projet de loi sera proposé à l'Assemblée Nationale.
Les modifications au code de procédure ont été votées au Sénat.
Les propositions que tu nous as faites viennent d'être acceptées.

Exercice 2 (2 points)
Mettez qui ou qu'il ou qui il pour compléter les phrases:
– C'est l'homme ……………... nous faut.
– Je ne sais pas ………… a vu hier à la gare.
– Il ne sait pas avec ……………... parler pour obtenir le renouvellement du contrat.
– À cause des ennuis ……………... a eus au bureau, il s’est rendu malade.
– Ce séjour était la récompense ……………... méritait après tant de travail.
– Luc nous a demandé avec …………. devait prendre contact.
– Je ne savais pas ……………... parlait si bien le français.
– Saviez-vous ……………... a renoncé au contrat avec cette entreprise ?
– À ce ……………... paraît, Marie a renoncé à son projet de mariage.
– ……………... parte tout de suite
Exercice 3 (2 points)
Remplacez les sujets par le pronom on:
Quelqu'un a demandé de vos nouvelles.
Quelqu'un nous a invités au vernissage de ce peintre.
Avant le départ, quelqu'un nous a apporté à boire et à manger.
Personne ne sait à quelle heure arrive le train.
Personne ne voulait renoncer au spectacle.
Personne n'était vraiment satisfait de se soumettre à ces contrôles sévères.
Nous ne pouvons plus continuer dans ces conditions.
Nous détestons d'attendre dans une longue file.
Exercice 4 (2 point)
Donnez une réponse négative aux questions suivantes, en remplaçant par le pronom y
les compléments indirects introduits par la préposition à:
Avez-vous renoncé à ces mesures que vous voulez prendre ?
Croyez-vous au bien-fondé de cette proposition de modification de la loi ?
Êtes-vous préparés à accueillir chez vous tous ces invités ?
As-tu pensé aux conséquences de tes actions ?
Avais-tu réfléchi suffisamment à tout cela avant d'agir ?
Vous croyez à tous ces mensonges qu'il ne cesse de débiter ?
Avait-il pensé à toutes ces conséquences fâcheuses pour notre entreprise ?
Sont-ils parvenus à trouver la solution de cette énigme ?
Exercice 5 (3 points)
Répondez affirmativement, en pronominalisant le constituant souligné par en +....
quelques-uns (unes), ou négativement, en pronominalisant par en+ … aucun(e) :
Modèle: Tu as cassé les œufs ?→ Oui, j'en ai cassé quelques-uns. /
Non, je n'en ai cassé aucun.
Vous avec lu les romans de cet auteur ?
Ce docteur, est-ce qu'il a guéri ses malades avec le médicament qu'il a inventé ?

113
Constituants de la phrase (III): la pronominalisation

As-tu jamais vu de ta vie un homme plus habile que moi à organiser un voyage?
Avons-nous encore à résoudre des problèmes inscrits sur l'agenda de cette semaine ?
T'es-tu servi de tous les mouchoirs que j'avais mis dans ce tiroir ?
Êtes-vous contents de tous vos adjoints ?
Est-ce que vous voulez pendre celles que vous aimez de toutes ces fleurs ?

Références bibliographiques

• CRISTEA, T., Grammaire structurale du français contemporain (chapitre: Les


substitus), Bucureşti, Editura Didactică şi Pedagogică, 1979.
• WAGNER, R.-L., et PINCHON, J., Grammaire du français classique et
contemporain (chapitre: Les pronoms, pp. 167 234), Paris, Hachette. 1962 (1991).
• RIEGEL, M., PELLAT, J.-C., RIOUL, R., Grammaire méthodique du français (ch. VI, 5:
Les substituts du groupe nominal), Paris, Presses Universitaires de France, 1994.
• VIŞAN, V., Les substituts – Exercices structuraux, CMUB, Bucarest, 1975.

114
Les constituants facultatifs de la phrase: les circonstants

Unité d'apprentissage 6
LES CONSTITUANTS FACULTATIFS DE LA PHRASE :

LES CIRCONSTANTS

Sommaire page

Les objectifs de l'unité d'apprentissage 6 115


6.1. Définition générale des circonstants 116
6.1.1 Réalisation linguistique des circonstants 117
6.1.2 Cumul des déterminations circonstancielles dans la phrase 117
6.1.3 Diversité sémantique des circonstants 118
6.1.4 Propriétés syntaxiques générales des circonstants 121
6.2. Types de circonstants 123
6.2.1 Classification générale 123
6.2.2 Une sous-classe hétérogène: le circonstant de manière 125
Test d'autoévaluation 130
6.2.3 Le circonstant temporel 131
6.2.4 Le circonstant spatial 133
Les clés du test d'autoévaluation 134
Test de contrôle 6 135
Références bibliographiques 136

Les objectifs de l'unité d'apprentissage 6

À la fin de ce chapitre, vous serez capables de:

• Reconnaître les différents types de circonstants, dans la phrase simple et dans la


phrase complexe.
• Reconnaître les moyens de réalisation linguistique de la détermination
circonstancielle.
• Distinguer les différents moyens d'expression de la référence temporelle et spatiale.

115
Les constituants facultatifs de la phrase: les circonstants

6.1 Définition générale des circonstants

► Définition. Les circonstants sont des constituants de phrase facultatifs


qui ajoutent une caractérisation adverbiale (lieu, temps, manière –
spécification qualitative, quantitative, comparative, instrumentale etc.) ou
une détermination argumentative (cause, but, conséquence, opposition
ou concession, hypothèse ou condition), auprès d'un verbe, adjectif ou
adverbe, auprès d'une phrase dans son ensemble ou auprès de sa
prédication.
Trois sont les volets de la problématique des circonstants:

Plan de traitement
– leur rôle à l'intérieur de la phrase simple; dans une phrase formée
d'un sujet et d'une prédication minimale: Marie dort. Nous écrivons une
de la catégorie carte postale à nos parents, la prédication peut se développer par un
hétérogène des constituant qui n'est pas essentiel à la communication, la phrase ainsi
circonstants obtenue étant, du point de vue syntaxique, une phrase é t e n d u e :
Marie dort profondément. Hier, en fin d'après-midi, nous avons écrit vite
une carte postale à nos parents;
– leur capacité de décrire des situations ou des perspectives sur des
événements réels ou imaginaires, en mettant en rapport deux procès
distincts: En arrivant à l'hôtel, nous avons écrit une carte à nos parents;
Nous écrirons une carte à nos parents avant qu'ils ne commencent à
s'inquiéter, ou: avant de nous remettre en route vers le Delta. Les
circonstants de ce type se manifestent au niveau de la phrase
complexe;
– leur apport en tant que marqueurs de modalité, quand une phrase
nucléaire (minimale: Marie dort. ou étendue: Marie dort profondément.)
insère un commentaire sur son propre contenu, devenant ainsi une
phrase modalisée: Curieusement, Marie dort. En effet, Marie dort
profondément. Bien sûr, nous écrivons une carte à nos parents.
Remarque: les marqueurs de modalisation ne se limitent pas aux
circonstants adverbiaux. Il y a des verbes, adjectifs, adverbes ou
nominalisations qui réalisent une prédication modale, surajoutée à la
prédication nucléaire de la phrase: Il est curieux/ C'est une bizarrerie/ Je
suis étonné/ que Marie dorme à cette heure = Curieusement, elle dort à
cette heure.
Le circonstant de modalisation n'affecte pas uniquement la
prédication, mais l'ensemble du contenu affirmé: les modalisateurs
expriment l'attitude du sujet parlant envers le contenu de sa phrase. Les
adverbes modalisateurs (souvent mis en tête de phrase: probablement,
heureusement, malheureusement, vraiment, sans doute, peut-être,
certes, etc.) se rapportent à une prédication implicite qui décrit l’acte de
dire d'un sujet énonciateur:
curieusement  «je pense, moi, que c'est assez curieux que…»;
bien sûr  «nous considérons naturel ou évident que…».

La classe des circonstants est assez hétérogène, car les niveaux


syntaxiques d'articulation d'une spécification circonstancielle sont: la
phrase simple nucléaire (non modalisée), la phrase modalisée, la

116
Les constituants facultatifs de la phrase: les circonstants

phrase complexe. Par conséquent, chacune des trois grandes divisions


de ce cours de syntaxe s'occupe des circonstants:
– dans la section Syntaxe de la phrase simple, l'unité d'apprentissage
no 6 donne une première vue générale sur les circonstants et en décrit
trois sous-types particuliers: les circonstants de manière, de temps et
de lieu;
– dans la section Du modèle de la phrase aux énoncés de surface,
l'unité d'apprentissage no 7 s'occupe des modalisateurs, y compris des
adverbes de phrase, une sorte de circonstants de type énonciatif;
– enfin, dans la section Syntaxe de la phrase complexe, les unités
d'apprentissage no 9 à 14 se consacrent entièrement aux subordonnées
circonstancielles.
Il y a une continuité entre les circonstants prédicatifs, de la phrase
simple étendue, ceux à rôle énonciatif (les adverbes modalisateurs), et
les circonstants d'argumentation, de la phrase complexe.

6.1.1 Réalisation linguistique des circonstants


Aspects généraux des circonstants :
Catégories Les déterminants circonstanciels se réalisent par un GAdv, qui
linguistiques s'exprime par divers moyens linguistiques:
● adverbe: Maman me regarde tendrement.
pour l'expression
● locution adverbiale: Le bébé crie à tue-tête.  (1) GAdv → Adv
des circonstants : ● adjectif pris adverbialement: On parle très fort.
GAdv ● groupe nominal à fonction adverbiale:
 – GN de rection directe: Le matin on sert un café. Chaque soir
on se promène. L'année prochaine je termine mes études. Un
– (1) adverbes
ou loc. adv. beau jour il décida de partir. Elle s'habille anglais.
 (2) GAdv → Ø + N
– (2) groupes
– GPrép: Il me regarde avec curiosité. Il me parla tout en
nominaux douceur. (2') GAdv →Prép + N
● verbe à un mode non personnel.
– (3) propositions – infinitif: Luc s'arrête pour me regarder.
réduites – participe présent: La voiture s'arrêtant, nous restâmes au
bord de la route.
– (4) propositions – gérondif: En l'écoutant, elle s'étonnait d'être si vieille.
à verbe fini
– participe passé: Perdu dans la foule, il demanda de l'aide.
Dans tous ces cas, le GAdv s'exprime par une proposition réduite à
une forme verbale non personnelle.  (3) GAdv → P (INF, PP, P-ant)
● propositions circonstancielles à verbe fini (= qui ont le verbe pivot à une
forme personnelle): (4) GAdv → P. (Voir les unités
d'apprentissage no 9 à 14, qui présentent les subordonnées
circonstancielles.)

6.1.2 Cumul des déterminations circonstancielles dans la phrase


Un seul et même procès (état, activité, événement) se laisse parfois
caractériser ou décrire par des circonstants de différents types
(temps, espace, cause, etc.), hétérogènes par leur forme linguistique
(adverbes, groupes nominaux, propositions):
«Le lendemain, vers midi et demi, Béliard vint chercher Max
histoire de vous socialiser un peu. » [Echenoz]
117
Les constituants facultatifs de la phrase: les circonstants

Le procès représenté dans cette phrase s'organise autour du


verbe VENIR (pivot verbal de la phrase).

VENIR (qui? B.)

Quand ? Quand précisément ? Dans quel but ? Qu'est-ce qui a déterminé B. de venir ?

Circ. Circ. Circ. Circ.


temporel temporel final (de but) de cause

Le lendemain vers midi et demi chercher Max histoire de vous socialiser un peu
adv. prép. + N prop. réduite (prép. +. INF) prop. réduite (loc. prép. +. INF)

6.1.3 Diversité sémantique des circonstants

► Le sens de base des circonstants


Les phrases attestées présentent parfois un grand nombre de
spécifications circonstancielles, très diverses du point de vue
sémantique et difficiles à classifier:
Devant son ordinateur, toute la matinée, Luc a lu très
attentivement plusieurs documents, en prenant des notes et
sans se lever pendant trois heures.
Dans cette phrase, les circonstants apportent diverses spécifications
sur le procès exprimé par le verbe LIRE :
– lieu: où se fait la lecture ? → (devant son ordinateur);
– temps: quand ? → (toute la matinée);
Caractéristiques
– manière d'effectuer le procès de lecture: comment ? →
sémantiques (attentivement);
des circonstants – intensité ou mesure: combien il est attentif Luc en lisant ? → (très
grande intensité de l'attention);
– attitude de l'agent pendant ce procès: comment ? → (en prenant
des notes); (LIRE et PRENDRE des notes = procès simultanés)
– autres procès en cours (simultanés): que faisait la personne
simultanément avec la lecture ? → (sans se lever).

Exercice d'entraînement
● Effacez les ajouts circonstanciels de la phrase étendue suivante pour obtenir la phrase
minimale, organisée autour du pivot verbal "manipuler":
Avec ce logiciel, vous pouvez manipuler rapidement des données particulièrement
importantes, quels qu'en soient le format et la source, pour visualiser les modèles et
repérer des tendances ou détecter des particularités dans vos données. [La
Recherche, no 341/ 2001] Phrase minimale → S – V – OD :
………………………………………………………………………………………………………
● Combien de circonstants avez-vous effacés ?
– Circ. instrument: ……………………………………………………………………………….
– Circ. manière du V manipuler: ……………………………………………………………….

118
Les constituants facultatifs de la phrase: les circonstants

– Circ. manière de l'Adj importantes : …………………………………………………………


– Circ. concessif: …………………………………………………………………………….….
– Circ. final1 (but): ……………………………………………………………………………….
– Circ. final2 (but alternatif): …………………………………………………….…………….
– Circ. final3 (but alternatif): ……………………………………………………….………….

► L'apport sémantique des circonstants en fonction de leur


incidence. Pour déterminer la signification des circonstants, il faut
prendre en considération non seulement leur sens de base, mais aussi
leur incidence ou la nature du constituant modifié.
Les circonstants de manière (qu'on peut découvrir en posant la
question comment?), de lieu (où? d'où, vers quelle destination ? etc.) et
de temps (quand? pour combien de temps? depuis quand ? etc.)
contribuent par leur contenu à la représentation plus précise:
– d'un procès: marcher à pas lents; aller quelque part; venir demain;
– du rapport entre deux procès: voyager après avoir dormi, courir
plus vite;
Caractéristiques – d'une propriété, d'une qualité, d'un état: gravement malade,
sémantiques relativement rond, quasiment sphérique, fort intelligent ; rouge
des circonstants depuis un moment; rouge sur les marges; jaune au milieu;
– d'une relation : très amoureux, assez proche;
– du rapport établi entre les objets de discours évoqués dans une
phrase toujours près de …; un peu de travers.
En général, l'apport sémantique des circonstants de manière
est de caractériser un procès, tandis que les spécifications spatio-
temporelles décrivent la situation dans laquelle se retrouvent les
objets de discours (personnes, choses):
– Ce médecin parle souvent à la télé. Dans le jardin, j'ai parlé avec
mon fils. Hier, j'ai parlé au directeur. Aujourd'hui, je suis rentré par le
métro. (spécifications spatio-temporelles qui décrivent l'ensemble de
l'événement);
– parler haut, parler au téléphone, rentrer par le métro. (circonstants
de manière, qui caractérisent les paramètres du procès).
Dans la phrase:
Marie est toujours extrêmement fatiguée.
le circonstant de manière (extrêmement) apporte une spécification
de l'état évoqué dans l'adjectif fatigué, tandis la spécification
temporelle (toujours) se rapporte à la relation entre Marie et cet état
de fatigue. L'adverbe extrêmement est un circonstant incident au
seul adjectif (en fonction d'Attribut, dans cette phrase), tandis que
l'adverbe toujours est incident à l'événement dans son ensemble (à
l'association entre le sujet Marie et le prédicat être fatiguée).
L'articulation différente s'observe mieux quand il y a plusieurs
circonstants dans la phrase:
L'incidence des
(i) Ce médecin parle souvent à la télé.
(ii) Ce médecin parle souvent très bien à la télé.
circonstants:
Les deux phrases sont différentes: (i) affirme que ce médecin a
portée ou point l'occasion de s'exprimer souvent sur le petit écran, tandis que (ii)
d'articulation affirme que, parmi les apparitions à la télé de ce docteur, beaucoup
syntactico-
sont vraiment très réussies, très convaincantes.
sémantique
119
Les constituants facultatifs de la phrase: les circonstants

(Sujet+ parler ← à la télé ←très bien ) ← souvent

caractérisants de procès descriptif de toute une situation

Les exemples qui suivent mettent en évidence les oppositions


entraînées non seulement par le sens de base, mais aussi par
l'incidence des circonstants:
Dans l'océan, le scaphandre a cherché l'épave tout au fond1.
Au fond 2, cet homme est assez courageux, à mon avis !
 au fond 1 = lieu (spécification prédicative)
 au fond 2 = modalisation (spécification énonciative), avec le sens:
"en réalité" ou: "à considérer le fond des choses, nous devons
apprécier que …"
Luc travaille sérieusement 1.
Sérieusement 2, Luc travaille déjà ? Je ne le savais pas !
 sérieusement 1 = manière d'effectuer (spécification prédicative)
 sérieusement 2 = modalisation (spécification énonciative), avec le
sens: "affirmer quelque chose avec responsabilité".
Il y a donc une distinction entre l'incidence des circonstants de
Caractéristiques manière (caractérisants ou modalisateurs) et les circonstants de
lieu et de temps (descriptifs d'une situation).
discursives
Les circonstants spatio-temporels ont une incidence «globale»: ils
des circonstants se rapportent à l'événement tout entier décrit dans la phrase ou, parfois,
ils mettent en rapport des événements distincts, réels ou virtuels:
Luc a bu hier un thé vert près de la gare. ou:
Luc boit du thé avant de quitter la maison.
L'ensemble de l'événement décrit dans chacune de ces phrases est
sous l'incidence des circonstants soulignés qui déterminent toute la
situation dans laquelle est représenté le sujet (ce que fait Luc).
L'incidence des circonstants de manière est plus variable; ils
sont susceptibles de se rapporter successivement à différents
termes de la phrase:
(i) Luc boit du thé vert exclusivement, avec un peu de lait.
(ii) Luc exclusivement (parmi nos salariés) boit du thé vert,
avec un peu de lait.
(iii) Luc boit exclusivement du thé vert avec un peu de lait.
(iv) Luc boit du thé vert, exclusivement avec un peu de lait.
(v) Luc boit du thé vert, avec un peu de lait exclusivement.
(vi) Luc boit du thé vert, avec exclusivement un peu de lait.
Pour distinguer les divers apports sémantiques des phrases (i) – (vi),
il suffit de montrer quel est le constituant de la phrase sur lequel
s'exprime la restriction introduite par l'adverbe exclusivement. On
constate que ces phrases, presque identiques du point de vue
Interprétation grammatical, actualisent de petites variations de sens, très
des circonstants importantes pour la communication:
en fonction (i) il ne boit rien d'autre, il refuse toute autre boisson que le thé
de leur incidence
vert (avec un peu de lait);
(ii) c'est la seule personne de chez nous qui boive du thé vert;
(iii) il boit seulement cette boisson (thé + lait);
(iv) il ne refuse pas le thé, mais exige qu'on y ajoute du lait;
120
Les constituants facultatifs de la phrase: les circonstants

(v) il ne refuse pas le thé, mais exige qu'on y ajoute rien que du lait;
(vi) quand il boit le thé, il n'y met qu'un peu de lait.
Ces énoncés parallèles ont permis de montrer combien l'incidence
d'un circonstant de manière (exprimé parfois par un adverbe dérivé
avec le suffixe -ment) est variable, dans le discours réalisé.

6.1.4 Propriétés syntaxiques générales des circonstants


Les principales propriétés syntaxiques des circonstants sont :
► Le caractère facultatif dans la phrase. Le circonstant apparaît
comme un ajout (Circ.1) dans la phrase binaire (S–V) ou ternaire (S –
V – ATTR):
Caractéristiques (Circ.) S – (Circ.) V – ATTR et/ou Compl. – (Circ.)
syntaxiques ►Le caractère effaçable. Le contenu circonstanciel (modal, spatio-
des circonstants : temporel, argumentatif) apporte une spécification qui n'est pas
– facultatifs indispensable à la prédication:
Je ne comprends pas bien, dit-il.
– effaçables
Les enfants ont joué deux heures dans le jardin.
– mobiles Cela me paraît assez injuste.
– multiples En éliminant les caractérisants verbaux bien, assez (circ. de
manière) et les circonstants de lieu et de temps, on obtient des
phrases qui expriment essentiellement le même contenu:
Je ne comprends pas (…), dit-il.
Les enfants ont joué (…).
Cela me paraît (…) injuste.
L'effacement des circonstants dans une phrase n'affecte pas le
rapport syntaxique principal, celui qui s’établit entre le sujet et la
prédication, ni celui qui s'établit entre une catégorie centrale (nom,
verbe, adjectif, adverbe) et sa détermination.
► Le caractère déplaçable dans la phrase. La plupart des
circonstants, qui explicitent les conditions de réalisation d'un procès en
Caractéristiques ajoutant diverses spécifications (temps, espace, manière, cause, but,
etc.), ont une position mobile dans la phrase:
générales
Hier, il a fait un petit tour dans le parc. Il a fait hier un petit tour
des circonstants : dans le parc. Il a fait un petit tour dans le parc, hier. Il a fait un
la mobilité petit tour hier, dans le parc (à l'oral).
dans la phrase Le groupe verbal qui supporte la prédication dans cette phrase a
été encadré, pour mieux distinguer la position du circonstant:
– Circ. intégré au GV;
– Circ. à l'extérieur du GV (avant ou après);
– Circ. détaché (à gauche, à droite, en tête de phrase ou
rejeté à la fin).
Les circonstants appelés "caractérisants" d'un procès, d'une
propriété, d'une relation, d'un rapport, etc., doivent se placer dans la
phrase immédiatement avant ou après le constituant de phrase modifié:
Il marche ←vite.
(Circ. vite = modificateur du procès "marcher")

1
Les parenthèses marquent le caractère facultatif d'un constituant de phrase.

121
Les constituants facultatifs de la phrase: les circonstants

Elle est extrêmement →belle.


(Circ. extrêmement = modificateur de la qualité exprimée par
l'adjectif belle)
Il est seulement →un homme simple et honnête.
(Circ. seulement = modificateur restrictif du rapport prédicatif,
donc cet adverbe doit se placer immédiatement avant ou après
l'Attribut du sujet : un homme simple et honnête).
On voit donc que les circonstants ont en général une position
mobile dans la phrase; même les caractérisants (qui exigent d'être
placés auprès du terme modifié) sont beaucoup plus libres que
d'autres constituants de phrase: Sujet, Prédicat, constituants
Les circonstants :
déterminatifs (compléments et épithètes).
hétérogènes, On peut conclure que: détachés en tête de phrase, intercalés
du point de vue entre sujet et verbe ou situés après le groupe verbal, les circonstants
syntaxique se caractérisent par leur position mobile dans la phrase.
►Le caractère multiple :
Les circonstants sont souvent des constituants multiples:
théoriquement le nombre de circonstants est non limité, comme dans
les exemples donnés ci-dessus.
►Le caractère hétérogène des niveaux d'articulation syntaxique des
circonstants :
– les circonstants spatio-temporels ont d'habitude un rôle descriptif
ou de caractérisation scénique de l'événement (Vendredi, c'est ma
fête. Le petit oiseau crie dans son nid.), se rapportant à l'ensemble de
l'événement décrit dans la phrase, non seulement à la prédication;
– les circonstants de type énonciatif (modalisateurs): Sans doute,
viendras-tu nous voir. Sincèrement, je l'aime bien, Marie. Ce malade
Une catégorie s'est sauvé, heureusement.) décrivent l'engagement subjectif du
syntaxique locuteur envers le contenu du message, se rapportant à l'ensemble
polymorphe: de la phrase ainsi modalisée;
les circonstants
– les caractérisants apportent des spécifications d'ordre quantitatif ou
qualitatif d'un procès et ils déterminent un verbe, un adjectif, un adverbe
(Jean fume trop. J'en suis bien inquiet.);
– les circonstants argumentatifs ont un double rôle: ils caractérisent
un procès ou décrivent un événement, mais il y en a certains qui
introduisent le point de vue d'un raisonnement subjectif: Ex. :
J'appelle mon amie au téléphone pour l'inviter chez moi. (Circ. but) En
montrant but poursuivi par l'appel téléphonique, le procès second
donne le p o i n t d e v u e subjectif sur l'événement présenté.
Vu ce caractère hétérogène du sens et de l'articulation
syntaxique (=incidence) des circonstants, les classifications diffèrent
beaucoup d'un auteur à l'autre, d'un livre de grammaire à un autre.

122
Les constituants facultatifs de la phrase: les circonstants

6.2. Types de circonstants

6.2.1 Classification générale


► Traditionnellement les grammaires parlent de compléments
circonstanciels de temps (T), de lieu (L), de manière (M) (ces derniers
expriment; la mesure ou la quantité, la caractérisation qualitative,
Classifications instrumentale, associative, comparative etc.). Tous ces circonstants
réalisent une détermination de type prédicatif, s'opposant aux
alternatives
modalisateurs (circonstants énonciatifs) et aux argumentatifs
des circonstants (circonstants du point de vue), parmi lesquels il faut compter aussi les
subordonnées circonstancielles de lieu (rares) et de temps, quand un
événement est décrit par rapport à un autre.
D'autres types de compléments circonstanciels: causal, final,
consécutif, oppositif ou concessif, hypothétique ou conditionnel,
impliquent la description d'une situation ou d'une perspective en se
rapportant toujours à un procès principal. Ces circonstances
apparaissent donc toujours dans la phrase complexe, même en
l'absence d'une prédication subordonnée explicite:
Luc travaille pour sa réussite au concours. (BUT)
Luc ralentit sa marche à cause de la fatigue. (CAUSE)
Malgré sa souffrance, Luc continue sa marche. (CONCESSION)
À ma grande surprise, le voleur m'a rendu le portefeuille.
(CONSÉQUENCE)
Sans un effort soutenu, Luc ne pourrait pas terminer son travail.
(CONDITION)
Les phrases citées n'ont apparemment qu'une seule prédication (qui a été
encadrée). Mais en réalité, tout circonstant du type argumentatif met en
relation deux procès distincts; par conséquent, il y a toujours une
prédication subordonnée, même si elle se présente sous forme
réduite:
– pour sa réussite au concours ⇐ "pour qu'il réussisse";
– à cause de la fatigue ⇐ "parce qu'il était fatigué";
– malgré sa souffrance ⇐ "bien qu'il eût beaucoup souffert";
– à ma grande surprise ⇐ "de sorte qu'il provoqua ma surprise";
– sans un effort soutenu ⇐ "s'il ne déployait pas un effort soutenu".
Dans tous ces circonstants, il y a une prédication subordonnée
implicite. Les circonstants qui apportent une argumentation se réalisent
toujours dans la phrase complexe, soit par une proposition
subordonnée réduite (réduction à un constituant nominal, comme
dans les exemples donnés ci-dessus, ou réduction à une forme verbale
non personnelle: circonstant participial, gérondival ou infinitival), soit par
une proposition subordonnée à verbe fini (à prédication exprimée par
une forme verbale personnelle: verbe à l'indicatif, au conditionnel ou au
subjonctif).
Voici en synthèse la classification qui résulte à intersection de
tous ces critères (distribution, incidence, apport informationnel):

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Les constituants facultatifs de la phrase: les circonstants

Circonstants→ paramètres
↓ Rôle Sens Élément
sous-types communicatif régissant

• de l'événement (a) descriptifs Circ. spatio-temporels S–V

• d'une prédication (b) Circ. manière V, Adj, Adv


caractérisants

Adverbes de phrase contenu de la


• du procès énonciatif (c) (sorte de circonstants de manière se phrase
modalisateurs rapportant au procès de dire de toute une nucléaire
phrase)
(a) descriptifs Circ. spatio-temporels Proposition
• des rapports entre procès et/ ou Circ. du rapport de causalité principale (S–
(d) (de cause, de but, de conséquence, de V) ou
argumentatifs concession, d'hypothèse ou condition) V, Adj,. Adv
(=du point de
vue)

Cette classification en quatre types pourrait se réduire à trois, si on


applique le regroupement des circonstants de type prédicatif:
1) Les circonstants prédicatifs, caractérisants d'un procès ou descriptifs
de tout un événement:
►Valeurs: circonstants de manière, de lieu et de temps.
►Niveau d'incidence: constituant verbal, adjectival, adverbial,
à l'intérieur de la phrase simple; la prédication nucléaire.
À l'intérieur de la phrase simple, une spécification de type (a)
décrit les paramètres spatio-temporels du procès; une spécification
de type (b) caractérise un procès, une qualité, un rapport.
►Exemples: Son chapeau lui va bien. Demain Luc sera ici.
2) Les circonstants argumentatifs (qui décrivent une situation/ une
perspective sur les événements):
►Valeurs: cause, but, conséquence, hypothèse, concession,
mais aussi des circonstants descriptifs, marquant les rapports
Les circonstants : temporels d'antériorité ou de simultanéité/ postériorité et de
comparaison entre des procès distincts.
►Niveau d'incidence: lien entre deux prédications différentes.
–prédicatifs
Au niveau de la phrase complexe qui met en rapport plusieurs
(caractérisants, procès en montrant les relations d'ordre argumentatif entre ces
descriptifs) procès, les circonstants (a) et (d) peuvent décrire une situation
ou une perspective.
►Exemples: Ce chapeau va mieux à Marie qu'à Jeanne.
– énonciatifs
Après son examen, Luc sera ici. Quand nous aurons terminé,
(modalisants); Luc sera ici. Luc sera à temps au spectacle parce que c'est moi
qui vais le chercher.
– d'argumentation 3) Les circonstants subjectifs/ énonciatifs à rôle de modalisateurs.
►Valeurs: modalisateurs se rapportant à un sujet de
(point de vue sur la
conscience (l'auteur du discours ou autre instance personnelle
cause, les qui prend en charge le contenu d'un énoncé).
conséquences, ►Niveau d'incidence: la phrase modalisée (l'information posée
l'effet, le but etc.) dans un énoncé qui renferme une phrase simple ou complexe).

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Les constituants facultatifs de la phrase: les circonstants

►Exemples: Ce chapeau lui va vraiment très bien ! En


définitive, Luc ne sera pas ici avant sept heures ! Il a
vraisemblablement manqué son train. Certes, il a refusé.
Cette typologie tripartite souligne le caractère hétérogène des
déterminations circonstancielles et/ ou de modalisation:
(a) Ce garçon est vraiment beau. (Circ. → beau)
(b) Vraiment, il est beau, ce garçon ! (Circ. → la phrase)
Vraiment introduit toujours une modalité d'énoncé car le sujet
locuteur s'engage envers la crédibilité du contenu affirmé. Incident
au prédicat (beau) ou à la phrase tout entière, l'adverbe vraiment est
un modalisateur.
Exercices d'entraînement
● Reformulez les phrases suivantes afin de mettre en évidence leur interprétation:
(a) Elle est toujours devant la porte. (Circ. → être là)
(b) Elle veut toujours y aller (Circ. → vouloir y aller)
(c) Toujours est-il qu'elle me plaît. (Circ. →l'assertion réalisée par la phrase «elle me
plaît»).

………………………………………………………………………………………………………
………………………………………………………………………………………………………
………………………………………………………………………………………………………
● Faites correspondre à chacune des trois phrases, les analyses données ci-dessous:
1. Luc s'est exprimé sans aucun doute sur l'événement auquel il avait été témoin.
2. Sans aucun doute, Luc s'est-il déjà exprimé hier sur l'événement dont il avait été
témoin.
3. Luc s'est exprimé sans aucun doute sur l'événement dont il avait été témoin et non sur
ses opinions sur le cours de l'enquête.

A.  corrélatif d'argumentation dans une phrase, par lequel on rejette le soupçon


que Luc aurait pu parler d'autre chose que de ce qu'il avait réellement vu. «il ne faut
pas croire que Luc ait parlé d'autre chose que de ses propres souvenirs sur ce qui
s'était passé».
B.  caractérisant: Comment s'est-il exprimé ? «Il a eu l'air de se rappeler très bien ce qui
s'était passé. Il n'avait aucune hésitation dans la voix».
C.  modalisant: Es-tu certain que Luc a parlé ? «Oui, Luc n'a pas manqué de dire
ce qu'il a vu, j'en suis certain».

6.2.2 Une sous-classe hétérogène: le circonstant de manière


►Le circonstant de manière apporte une caractérisation du procès
(ou d'une propriété) et il s'exprime par:
– des adverbes primaires (bien, vite, mal, fort, etc.) et des locutions
adverbiales de manière (à brûle-pourpoint, en coup de vent, sens
dessus dessous, en désordre, etc.):
Sens et expression Il est reparti sur la pointe des pieds (= silencieusement).
Ce changement s'est fait ni tambour ni trompette (= sans que
linguistique
personne en soit averti).
des circonstants – des groupes prépositionnels (noms ou pronoms précédés d'une
de manière préposition):

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Les constituants facultatifs de la phrase: les circonstants

Il s'en est allé en silence / sans bruit/ sans un mot/ dans une
totale confidentialité.
– par les propositions subordonnées à fonction circonstancielle:
Il partit à Londres sans que personne ne le sache./ sans avertir
personne/ sans dire un mot/ en prenant tous les risques/
comme il l'avait décidé tout seul.
►Les spécifications de manière constituent, du point de vue
syntaxique, une classe très hétérogène :
Il vit pauvrement, mais heureux. (prédication seconde)
Heureusement, il viendra. (modalisation, adverbe de phrase)
Ce mot n'est pas correctement employé. (caractérisant du procès)
Il faut noter qu'une seule et même catégorie lexico-grammaticale
Caractéristiques peut réaliser des fonctions différentes dans la phrase. Les adverbes
des circonstants dérivés par le suffixe -ment) et même les adverbes de manière
de manière primaires (bien, mal, mieux, beaucoup, etc.) peuvent avoir des
fonctions très diverses:
(i) Il parle bien. Il parle bien vite. Elle est bien aimable. Il fait
bien froid. (circonstants de manière se rapportant à la catégorie
verbale, adverbiale, adjectivale, et à la prédication tout entière)
(ii) C'est bien Paul qui vient. (spécification du GN sujet)
(iii) Il est bien de parler maintenant. Heureusement, il nous en a
avertis. (adverbes de phrase, dans des expressions
impersonnelles, ou en position détachée)
(iv) Bien ! On va parler maintenant ! (substitut de phrase
fonctionnant comme un énoncé tout entier)
► Certains déterminants du nom, mis en apposition ou non, et aussi
certains attributs ou épithètes peuvent avoir aussi un sens
circonstanciel: Ce pinson mange peu (circ. manière – quantitatif)/ peu
de nourriture (Dt N); Sincère, Luc a répondu à toutes mes questions.
Luc a répondu à mes questions, confus et inquiet. (épithètes
détachées, ayant un sens circonstanciel: comment a-t-il répondu? d'une
manière sincère; avec inquiétude; d'une manière confuse).
►En tant que constituant de la phrase simple, le circonstant de
manière est pour le verbe (pour l'adjectif et pour l'adverbe), ce que
l'épithète est par rapport à la classe nominale.

Exercice d'entraînement :
Comparez et ajoutez vos propres exemples !
Détermination d'incidence nominale: Détermination d'incidence verbale:
épithète → N caractérisant verbal → V
On s'attend à une conduite honnête. Il se conduit honnêtement
Un bref regard vers son père…. Il regarde brièvement vers son père.
Elle fit un repas frugal. Marie se nourrit comme toujours, frugalement.
Un charme certain caractérise ses gestes. Elle est charmante, certainement. Ou:
Elle vous a certainement charmés.
Une réponse probable de sa part…. Ils lui ont probablement répondu après.
Le reproche amer de la part de mes parents. Ils me l'ont reproché amèrement.

…………………………………………………… …………………………………………………….
…………………………………………………… ……………………………………………………

126
Les constituants facultatifs de la phrase: les circonstants

…………………………………………………… ……………………………………………………

► La détermination circonstancielle quantitative


Une catégorie de circonstants très liée à la détermination nominale
est représentée par la détermination quantitative. La quantité se
rapporte toujours à un objet de discours:
– pour un verbe intransitif, la quantité se rapporte à l'espace ou au
temps:
Il dort assez peu. (= peu de temps)
Il marche beaucoup pour faire de l'exercice. (beaucoup de
La détermination kilomètres par jour = espace)
quantitative
Il est arrivé vite. (=en peu de temps)
Il passe lentement dans la rue; il boit lentement son café (=en
prenant tout son temps)
– pour un verbe transitif, la détermination quantitative se confond
avec celle de l'objet: Elle mange peu de fruits. (objet direct) / Elle
mange peu. (combien? Peu, circonstant, apportant une
détermination quantitative de l'action). Nous ne lisons pas assez. (le
circonstant assez introduit une détermination quantitative de l'action,
mais se rapporte implicitement à l'objet direct: pas assez de livres,
pas assez de publications).

► La détermination qualitative du procès (voir ci-dessus) est


La détermination
encore plus proche de la détermination qualitative des objets de
qualitative discours (épithète, compléments du nom, attribut):
Il parle bien. (caractérisant d'un verbe). Comparez avec:
Son discours a été très bon. (Attribut du sujet)
Il est profondément ému par ce spectacle. (caractérisant d'un
adjectif ou participe). Comparez avec:
Son émotion profonde a été remarquée. (épithète)
Moralement, il est tombé extrêmement bas. (caractérisant d'un Adv)
Sa bassesse (morale) est extrême. (Attribut)
► La caractérisation du procès peut se faire par certains compléments
d'objet du verbe ayant une forte signification circonstancielle. Comparez
les circonstants de manière proprement dits avec les compléments de
Cas frontaliers : sens circonstanciel:
Cet homme parle vite. (circonstant de manière, caractérisant
– circonstant
du procès "parler")
Il parle la bouche pleine. (complément qui décrit l'attitude du
de manière ? sujet en effectuant l'action).
Il lit à haute voix. (l'action de lire se fait "à haute voix")
– complément Il parle au microphone. (complément d'instrument)
d'objet ?
Il faut donc distinguer la caractérisation du procès (plan sémantique) de
la réalisation linguistique (plan grammatical) qui peut s'exprimer soit par
divers circonstants, soit par les déterminants propres du verbe et du nom
(donc par modificateurs intégrés aux GN, GV, etc.).
► En particulier, les types suivants de compléments du verbe
réalisent aussi une «caractérisation du procès»:

127
Les constituants facultatifs de la phrase: les circonstants

– le complément du moyen (il a réussi dans la vie en faisant


des études; grâce à son intelligence; à l'aide de ses parents; par
protection divine).
– le complément de l'instrument (il joue du violon; il mange
avec une fourchette);
– le complément d'attitude (il se tenait devant moi la tête haute,
le regard osé; il regardait d'un œil furtif; il parlait l'œil enflammé);
– les compléments sociatifs (comitatifs, d'accompagnement)
(Luc vient avec moi).
Ces c o m p l é m e n t s d ' o b j e t se distinguent des c i r c o n s t a n t s
par le fait qu'ils font référence à des objets de discours, tandis que
les circonstants sont des caractérisants (d'un procès, d'une phrase,
d'une situation ou d'une perspective). En effet, les compléments du
moyen (Il a réussi par des mensonges) ou de l'instrument (il coupe
le pain avec le couteau), du propos (on a parlé musique), d'attitude
(il marche la tête basse, les mains dans les poches), de
l'association ou du comitatif (Il est parti avec sa femme) sont des
c o m p l é m e n t s d ' o b j e t s ; parfois, ils ont une double incidence,
ils déterminent le pivot verbal mai aussi le sujet (l ' a t t r i b u t du
sujet): Luc est parti accompagné de sa femme. La «caractérisation
Compléments
du procès» est implicite, par le fait de montrer un objet associé à la
réalisation d'une action. Distinguer entre circonstant (ajout) ou
à fonction
complément (objet essentiel du verbe) est une opération difficile:
caractérisante, Nous étions réveillés par les tambours du régiment =
proches des complément du moyen ou de l'instrument (ou: objet du verbe).
circonstants
En revanche: Ses affaires marchaient tambour battant. (locution
adverbiale, donc: circonstant de manière, la préposition à est omise).
de manière:
Elle dansait sur la pointe des pieds.
(prédication: danser + circonstant ou objet impliqué dans le procès ?)
complément Elle se soulevait sur la pointe des pieds. (objet du verbe) /vs/
instrumental
Elle revient sur la pointe des pieds. (circonstant).
Dans le premier contexte, sur la pointe des pieds évoque l'un des
objet impliqués dans le procès: se soulever effectivement sur la
complément pointe des pieds; dans le second contexte, il s'agit d'un circonstant
du moyen de sens figuré.
La distinction: objet du verbe/ circonstant se neutralise aussi
dans les exemples suivants :
complément (i) Ils ont trouvé collectivement une solution à ce problème.
d'attitude Comment ont-ils fait? Un remue-méninges collectif leur a permis
de trouver une solution.  moyen de réaliser le procès.
 complément Le circonstant de manière (collectivement) évoque par son
interprétation les participants au procès. De même:
d'accompagnement
(ii) Cette machine se met en marche électriquement (au moyen de
(le comitatif) l'électricité).
(iii) Monique et moi, nous partons ensemble. (le comitatif, association
de l'actant principal du procès, avec un autre actant).
(iv) Maman n'a pas réussi seule, qui est un attribut du point de vue
grammatical, avec le sens: "sans moi" (le comitatif nié).
(v) Seule, maman n'a pas réussi (épithète détachée)
(vi) J'ai pris le déjeuner avec mes parents (le comitatif, complément
de sens circonstanciel).

128
Les constituants facultatifs de la phrase: les circonstants

Les locutions prépositionnelles: au moyen de, à l'aide de, par


l'intermédiaire de, par l'entremise de, etc. suivies d'un nominal réalisent
des GPrép en fonction de circonstants, bien que le nom centre fasse
référence à un objet de discours, actant du procès:
« (Pour aller au restaurant il y avait) un réseau de couloirs vers
lesquels on passait par l'accès à l'ascenseur. »
Dans cette phrase l'expression par l'accès à l'ascenseur est un
circonstant de manière qui incorpore le moyen (par accès à) et
l'instrument (ascenseur), car il décrit la modalité par laquelle se réalise
l'action du verbe passer et aussi l'objet qui sert à effectuer cette action.
►Le complément d’attitude (objet du verbe) se rapporte à une partie
du corps du sujet, engagée dans une action:
Cet oiseau bat d'une aile (objet essentiel du verbe)
Les oiseaux volent à tire-d'aile. (circonstant)
L'expression à tire-d'aile s'est figée, elle n'est plus un complément
d'attitude, car elle n'évoque plus les parties du corps (ailes). La
locution adverbiale sert donc à réaliser une caractérisation de procès
Ambiguïté (=circonstant). Dans les exemples qui suivent les compléments
grammaticale: d'attitude ont une nuance circonstancielle:
Il dort le corps tout replié. = proposition complétive en fonction
L'homme traverse d'Attribut du sujet (prédication seconde), à nuance circonstancielle.
le jardin Le petit chien, la queue basse, fait son apparition dans la cuisine.
à grands pas. «Il se retournait (dans son lit) les yeux encore fermés.»
► Beaucoup de GN d'emploi courant en fonction d'objets essentiels du

verbe (compléments d'attitude corporelle) ont évolué en devenant des
expressions adverbiales: à pied, au pied levé (sans préparation), à plat
 Complément ventre, à genoux, nez à nez, le nez au vent, tête à tête, à toutes
d'attitude ?
jambes, main dans la main etc. sont autant de circonstants de manière,
à l'origine des compléments d'attitude corporelle. Il est clair que: rire
 Circonstant dans la barbe ou agir au nez et à la barbe de quelqu'un sont des
(caractérisant circonstants de manière et non des compléments essentiels du verbe.
verbal) ? ► Et pourtant, il n'y a pas de frontière grammaticale nette entre: les
compléments d'attitude (le bras gauche levé, les mains sous l'oreiller,
Attribut les mains dans les poches); les circonstants de manière (accueillir qqn
du sujet ? à bras ouverts "chaleureusement"; parler du bout des lèvres "sans
sincérité, sans être convaincu"; frapper qqn à tour de bras "violemment"
les expressions en fonction d'attribut (rester les bras croisés = "inactif",
locution adjective); se promener bras dessus bras dessous).
► Il faut retenir que les compléments d'attitude s'expriment en français
par des constructions nominales en général s a n s p r é p o s i t i o n ,
tandis que les circonstants de manière s'expriment par des GPrép et
par des verbes au participe passé ou présent ou des verbes au
gérondif: Papa s'assoit en s'appuyant sur mon bras. Il entra,
regardant de tous côtés. Dans la chambre, assis à son bureau, il lit la
tête appuyée sur son bras.
►En conclusion, les constituants de phrase permettant de
caractériser le procès sont, du point de vue grammatical:
– des circonstants (de manière): Luc s'exprime franchement.
– divers compléments (de moyen, d'instrument, d'attitude etc.):
L'homme s'approcha, l'œil enflammé, une cigarette au coin des lèvres.
– attributs du sujet/de l'objet: Luc reste assis. Il se tenait debout.

129
Les constituants facultatifs de la phrase: les circonstants

– épithètes détachées, avec nuance circonstancielle: assis à son


bureau, il travaille.

Test d'autoévaluation
Pour bien gérer ce test, il est indispensable que vous ayez déjà parcouru les explications
et les analyses données dans l'unité d'apprentissage 6. Vérifiez vos solutions aux
exercices en consultant la rubrique Clés du test d'autoévaluation.

Exercice 1
a) Lisez cet extrait d'un texte littéraire et soulignez les circonstants. Dans ce texte qui ne
contient que deux verbes à des modes personnels, combien de circonstants avez-vous
trouvé ?
« Arrivé à l'aéroport, il trouva vite la cafétéria devant le terminal où il devait rester,
pratiquement seul au milieu des bancs inoccupés, à attendre deux ou plusieurs
heures, assis devant un double express, les bras (appuyés) sur le haut comptoir.»
b) Effacez les circonstants trouvés ci-dessus en transcrivant la phrase obtenue et dites
quelles sont les conséquences sur l'intelligibilité de la communication.

……………………………………………………………………………………………………….
Exercice 2
Soulignez les adverbes et les expressions adverbiales qui se rapportent à la phrase tout
entière et qui expriment l'attitude du sujet qui parle (affective, appréciative ou autrement
cognitive) :
«Je vais quand même vous faire voir un logement de plus près. On peut certainement
aller y jeter un œil, heureusement c'est inoccupé en ce moment. (…) Il y a des arbres
fruitiers tant qu'on veut dans le parc, voyez-vous, on peut tranquillement manger de
tout. Enfin, quand je dis de tout, à vrai dire c'est surtout de la papaye, hein. Comme
une bizarrerie, il n'y a pratiquement pas de saison ici, le climat est idéal. C'est beau,
vraiment ! Donc ça pousse sans arrêt en définitive !»
Exercice 3
Faites de courtes phrases pour illustrer les catégories suivantes de circonstants:
– Le lieu (direction, point de départ): ……………………………….
– Le temps (époque) ………………………………..
– L'instrument : ………………………………..
– L'accompagnement: ………………………………..
– La mesure ………………………………..
– Le poids : ………………………………..
– Le prix : ………………………………..
– Le terme de comparaison: ………………………………..
Exercice 4
Trouvez différents déterminants circonstanciels pour le procès exprimés par les verbes:
dormir, parler, courir et introduisez-les dans de petites phrases.
…………………………………………………………………………………………………….
……………………………………………………………………………………………………
……………………………………………………………………………………………………

130
Les constituants facultatifs de la phrase: les circonstants

6.2.3 Le circonstant temporel


► Réalisation linguistique:
– adverbes et locutions adverbiales de temps: aujourd'hui, demain, à
présent; dernièrement; récemment; etc.
– groupes nominaux directs (ce soir, le matin etc.) ou
prépositionnels: avant Noël, depuis notre rencontre; vers minuit, etc.
– propositions subordonnées temporelles (voir ci-dessous, l'unité
d'apprentissage 9).

► Valeurs sémantiques des circonstants temporels. Les circonstants


temporels peuvent se classifier d'après le type interprétatif de la
référence temporelle et la réalisation linguistique:
a) circonstants temporels autonomes: la spécification temporelle
a) Circonstants qu'ils apportent peut s'interpréter sans se rapporter à un repère
temporels temporel supplémentaire:
Le onze septembre 2001, un événement a bouleversé le monde.
de référence
Ce poète est né en 1802. Il a beaucoup neigé le jour de
autonome : naissance de Paul.
dates, Ces circonstants sont considérés comme «autonomes» parce qu'ils
événements- décrivent eux-mêmes des repères temporels par une date de
référence temporelle auto-définie.
repères, etc.
La référence temporelle autonome s'exprime souvent par des
expressions nominales avec déterminant numérique: le XVIe siècle;
pendant la seconde guerre mondiale; à l'entre-deux-guerres.
b) circonstants temporels déictiques (la deixis est un mot latin qui
signifie: geste d'indication dans la situation extralinguistique). Pour
comprendre la signification contextuelle des déictiques, il faut se
rapporter au moment de la parole (noté conventionnellement par T0):
Aujourd'hui, je ne me sens pas bien.
b) Circonstants
L'adverbe aujourd'hui, tout comme l'adverbe maintenant et les
locutions temporelles à ce moment, à présent, en cet instant, etc.
temporels prennent comme repère le moment de la parole, T0.
déictiques : Il y a deux jours nous avons vu un film.
le procès "voir un film" a eu lieu deux jours AVANT le moment de la
la référence parole. Pour interpréter dans le contexte le sens d'une telle
au moment expression temporelle, il faut se rapporter à un point temporel à partir
duquel il faut calculer une durée de "deux jours" entre le moment de
de la parole
la parole et la projection du film.
Voici un axe temporel qui se rapporte au moment de la parole
T0. Sur cet axe sont inscrits quelques circonstants temporels
déictiques:

…………………………T0 …………………………….
il y a une minute maintenant dans un instant
il y a deux ans aujourd'hui demain, dans deux jours
hier l'année prochaine

Les circonstants déictiques s'utilisent dans le d i s c o u r s d i r e c t :


Aujourd'hui (ou: maintenant, hier, demain, il y a une minute, il y
a un mois …) j'ai rencontré Luc.

131
Les constituants facultatifs de la phrase: les circonstants

Dans le d i s c o u r s i n d i r e c t , ces spécifications temporelles


subissent des "transpositions", afin de permettre d'évoquer
correctement les moments auxquels on associe les procès:
Ce jour-là (ou: alors, un jour avant, juste une minute avant, un
mois avant), elle avait rencontré Luc.
Pour rapporter un discours direct contenant l'énoncé:
(1°) «Viens demain chez moi!», dit le docteur.
il faut opérer les transpositions temporelles suivantes:
(2°) «Ce jour-là, le docteur m'a dit de me rendre chez lui le
lendemain» (discours mémoriel, autobiographique)
(3°) «Ce jour-là, le docteur lui avait dit de se rendre à son cabinet
un jour après leur premier rendez-vous». (discours indirect)
Les déictiques du message d'origine sont: venir, demain et moi; ils
sont transposés par: se rendre (là); le lendemain et lui, se. Le jour où
le docteur avait dit "Viens demain" est maintenant représenté dans
l'esprit de la personne qui parle comme "ce jour-là", donc comme un
repère temporel, R.

R
..….. à ce moment …..…
une minute avant ← alors → un instant après, après un an
deux ans auparavant, la veille ← ce jour-là → le lendemain, dans deux jours, une année après

La phrase prend la troisième forme (3°), avec toutes les


transpositions opérées, quand un discours direct (1°) est rapporté
d'après un autre discours rapporté ( (2°), autobiographique ou
mémoriel). De cette façon, la phrase (1°) qui contenait des
circonstants déictiques se rapportant au moment de la parole T0, se
retrouve transposée (dans 2° et 3°) sous forme de circonstants qui
prennent un point de repère R, qui est décrit dans le texte:
R= ce jour-là (le jour où il avait rendu visite chez le docteur).
►Les circonstants temporels déictiques évoquent soit un moment, soit
une durée:
– le moment, un point dans le temps: en cet instant; dès maintenant;
– la durée ou la période (inclusive ou exclusive): pendant deux
heures, à partir de demain, dorénavant, etc.
c) Circonstants Ponctuels ou duratifs, les circonstants relatifs déictiques se
temporels rapportent au moment de la parole, marquant la simultanéité
anaphoriques (aujourd'hui, ce matin, ce soir, cet après-midi, maintenant),
l'antériorité (hier, avant-hier, tout à l'heure, autrefois, jadis, tantôt,
naguère), ou la postériorité (demain, après-demain, tantôt, bientôt,
plus tard, tout de suite, dans un instant).
c) circonstants temporels anaphoriques: pour comprendre leur
signification contextuelle, il faut se rapporter à un repère temporel
(R), exprimé dans le texte soit par un autre circonstant, soit par un
procès auquel on a déjà fait référence.
Voici des phrases contenant des circonstants anaphoriques
ayant un moment de référence R, représenté dans le texte:
Cela va continuer encore une heure. Jusqu'alors, je lis le journal.

132
Les constituants facultatifs de la phrase: les circonstants

(lire le journal jusqu'à quel moment?  jusqu'à ce que cela se


termine). Jusqu'alors est un circonstant dont l'interprétation se
rapporte à un repère donné antérieurement dans le texte.
Le dimanche suivant, il nous annonça ses fiançailles.
(= le dimanche après l’événement déjà raconté)
Calcul de la Au bout de quelques semaines, il commença à aller mieux.
(= quelques semaines après l’événement déjà raconté)
référence
L'après-midi, il partit se promener tout seul.
temporelle (= l'après-midi de la journée dont on a déjà parlé)
relativement On ne le voyait plus jusqu'à l'apéritif.
à un repère R (=l'apéritif servi habituellement à telle heure, pendant la période dont
on parle) Aussi: De l'apéritif à l'entremets, ils passèrent des moments
très agréables. (= à ce repas, dont il est question)
Ils n'eurent bientôt plus besoin de se casser la tête pour lui
trouver des distractions. (bientôt après l’événement déjà
raconté)
Depuis son arrivée, il n'avait jamais levé un doigt.
(depuis son arrivée jusqu'au moment dont on parle présentement
dans le texte)
«(…) Il traîna un moment dans le magasin. Ce faisant, il
écoutait les annonces diffusées.» (ce faisant= pendant sa visite
dans le magasin, simultanément avec sa présence dans le
magasin).

6.2.4 Le circonstant spatial


► Réalisation linguistique:
– adverbes et locutions adverbiales de lieu: ici, là, devant, derrière,
dehors, loin, là-bas, çà et là, ailleurs, nulle part, partout, par endroits,
tout autour, à côté, de l'autre côté, au-delà, en deçà, au-dessus, en
Réalisation dessous, etc.
– groupes nominaux prépositionnels: devant le garage; en face du
de la
Palais du Sénat; dans la rue; sur le boulevard; sur le quai;
référence spatiale – groupes nominaux sans préposition: Place Romaine, Place de la
par un circonstant Concorde; rue Vaugirard; 31, rue du Bac;
de lieu – propositions subordonnées (rarement): Où tu vas, il y a des
personnes à bicyclette, dans cette ville.
► Valeurs et illustration des circonstants locatifs. Les locatifs
s'emploient avec des procès statiques ou dynamiques (états,
activités, événements) de référence concrète, sinon le constituant
sera un complément indirect ou un circonstanciel argumentatif:
Je me suis assis sur un canapé. (Circ. lieu)
Je me suis apitoyé sur le sort de ces enfants. (Cause)
Jean a parié sur ce cheval. (Objet indirect)
Les circonstants de lieu s'emploient auprès des verbes
statiques ou dynamiques (de mouvement, de déplacement).
a) Locatifs rapportés à des procès statiques:
Il est à la maison. Elle se tient à la croisée. Marie s'était arrêtée
au seuil de sa boutique. Nous habitons près de la gare. La chaise
est restée à côté de la fenêtre. Le tableau est accroché contre le
mur. Luc s'est couché à même le parquet (à même le sol). La

133
Les constituants facultatifs de la phrase: les circonstants

foule se tenait autour de l'orateur. Cet enfant se lave dans la


baignoire.
b) Locatifs rapportés à des procès dynamiques:
– destination ou point d'arrivée:
Il va au cinéma. Tu iras chez le dentiste. Nous nous dirigeons
vers le parc. L'armée fonce sur la cité. Son âme est montée au
ciel. La fusée fut lancée dans la galaxie.
Rapport entre le – point de départ ou d'origine:
procès et le sous- Le train est parti de la gare. Nous sommes venus de loin. Le gaz
type de émane de ce conduit. L'eau coule du robinet. Éloignez-vous du
bord du quai !
circonstant
– locatifs du "trajet" (le lieu sur lequel ou à travers lequel un objet de
de lieu discours effectue son mouvement):
Nous nous promenons le long du canal. Il a voyagé à travers le
monde. Christophe Colomb a voyagé autour du monde. Nous
allons à Paris, via Zurich. L'auto roule au long du boulevard.
L'hélicoptère vole presque au ras du sol. Il nage dans la rivière.
Dans la forêt tropicale, les singes couraient de platane en platane
(d'arbre en arbre).

 Les clés du test d'autoévaluation


Corrigé de l'exercice 1 :
a) Il y a un très grand nombre de circonstants, autour de chacun des deux procès verbaux:
« Arrivé à l'aéroport, il trouva vite la cafétéria devant le terminal où il devait rester,
pratiquement seul au milieu des bancs inoccupés, à attendre deux ou plusieurs heures,
assis devant un double express, les bras (appuyés) sur le haut comptoir.»
b) La phrase sans circonstants: «Il trouva la cafétéria ; il devait rester seul». Le contenu
essentiel se maintient, mais le lecteur ne pourra pas se représenter les événements
décrits dans cet extrait de roman (fonction de description scénique des circonstants
spatio-temporels et fonction de caractérisation de procès pour les circonstants de
manière).
Corrigé de l'exercice 2 :
quand même; certainement; heureusement; enfin; à vrai dire; (c'est) surtout;
comme une bizarrerie; pratiquement; vraiment; donc, en définitive.
Corrigé de l'exercice 3 :
– Le lieu (direction, point de départ): Jean quitta son bureau pour se diriger vers la sortie..
– Le temps (époque) : Durant son hospitalisation, il resta au lit.
– L'instrument : Il creusa un trou à l'aide d'une pioche.
– L'accompagnement: Mes parents vivent à la campagne, avec mon frère.
– La mesure: Notre cour s'étend sur deux cents mètres carrés seulement.
– Le poids : Ce paquet pèse trois kilos.
– Le prix : Ces gadgets coûtent cher, plus qu'ils ne valent (200 euros).
(compléments de mesure du verbe: poids, prix, avec un sens circonstanciel)
– Le terme de comparaison: L'homme se mit à rire comme un bossu. Il a appris à se taire
comme une carpe.
Corrigé de l'exercice 4 :
– Le bébé dormait comme un ange. Il dormait à poings fermés. J'ai dormi de sept à dix
heures. Il a dormi comme un loir, profondément. Ils dormaient debout. Elle ne dormait que
d'un œil, d'un sommeil léger.
– Cette personne parle en bégayant. L'intervenant parlait trop bas. Ces messieurs ne

134
Les constituants facultatifs de la phrase: les circonstants

parlent pas français, ils préfèrent parler en anglais. En revanche, cette dame parle
couramment notre langue. Elle parle même sans accent et très vite.
– Interpellé, le voleur a couru comme un dératé. Il courait à perdre haleine. Les bruits
courent vite. Ce sportif court le cent mètres en un temps record.

→ Test de contrôle 6

Ce test est administré à l'issue de l'unité d'apprentissage 6.


Pour réaliser ce test, il est conseillé de relire l'unité et de suivre attentivement les phrases
données à titre d'exemple pour chacune des catégories de circonstants: de manière, de
temps, de lieu, et pour les construction adverbiales qui se rapportent à la phrase tout
entière (adverbes de phrase).

Ne manquez pas de transmettre ce test à votre tuteur. À cet effet, il convient de marquer
votre nom, votre prénom et votre adresse personnelle sur la première page de votre copie.
N'oubliez pas de mentionner aussi le numéro du test. Vous êtes supposés le recevoir
après correction, avec les commentaires de votre tuteur.

Bon travail !

Exercice 1 (2 points)
Donnez des exemples de circonstants ayant différents niveaux d'incidence:
– Circ. qui se rapporte à un verbe:
– Circ. qui se rapporte à un adjectif:
– Circ. qui se rapporte à un adverbe:
– Circ. qui se rapporte à un groupe verbal:
– Circ. qui se rapporte à la phrase tout entière.
Exercice 2 (1 point)
Passez du discours direct au discours indirect, en opérant les transpositions requises:
Depuis quelques jours, j'ai mal à la tête.
Prépare-toi, nous partons dans vingt minutes.
Cet été je vais à la mer.
Demain c'est dimanche.
Hier, l'idée lui est venue d'écrire à sa sœur.
Exercice 3 (2 point)
Identifiez les circonstants de lieu (L), de temps (T) et de manière (M) dans le texte:
Ils s'engagèrent dans un chemin (…) abondamment fleuri, environné d'arbres
fruitiers (…). Au sein de cette vaste flore, naturellement, la faune n'était pas en
reste. Des lapins détalaient des buissons, furtifs comme des mécanismes, des
colibris striaient le ciel de branche en branche, et, à mi-hauteur bourdonnaient des
insectes (…) Au-delà, des singes se balançaient aux lianes; d'autres, plus calmes
cueillaient des fruits dans les poiriers. De loin en loin, bientôt, se laissèrent
distinguer de petites maisons très espacées parmi les arbres.
Exercice 4 (2 points)
Étudiez le repérage temporel des circonstants des phrases, en précisant le moment
repère (moment de la parole, T0, ou autre événement, R):
Il y a deux jours, jeudi, j'ai rencontré Marie. Elle disait que sa mère avait été
hospitalisée la veille et que le lendemain, à midi, elle irait voir sa mère à l'hôpital parce
que mardi elle devrait s'en aller pour une semaine à une conférence au Japon. Quand
elle serait de retour, elle passerait encore visiter sa mère à la clinique.
135
Les constituants facultatifs de la phrase: les circonstants

Exercice 5 (3 points)
Identifiez les circonstants de manière, de lieu et de temps:
1. «Bizarrement, les hôtes du palais royal sont "restés à l'endroit où ils se trouvaient
alors que les balles sifflaient autour d'eux et que des victimes tombaient à terre", a
raconté ce parent.» [Reuters, 9 juin 2001]
2. «Il faisait si chaud ce soir-là que je n'eus sans doute pas le courage de sortir pour
éviter la rencontre.» [Nizan]
3. «La porte s'ouvrit tout doucement, Pluvinage entra comme un chat, Rosenthal et
Laforgue se turent et se regardèrent significativement.» [Nizan]
4. Le ciel est merveilleusement bleu. Vraiment, il est franchement difficile de rester à la
maison.
5. La chaleur était réellement étouffante. Sans mot dire, ils ouvrirent la porte.

Références bibliographiques
• CRISTEA, T., Le locatif spatio-temporel en français contemporain, CMUB,
Bucureşti, 1975.
• CRISTEA, T., Grammaire structurale du français contemporain (chapitre 5.9: Le
Groupe Adverbial), Bucureşti, Editura Didactică şi Pedagogică 1979.
• DRĂGHICESCU, J., «Le gérondif – caractérisant verbal», in Cahiers de grammaire
2, Bucureşti, CMUB, 1977.
• MAINGUENEAU, D., (éd. revue), Syntaxe du français (Chapitres: 5.5, 5.4, 6.4),
Paris, Hachette supérieur, 1999.
• RIEGEL, M., PELLAT, J.-C., RIOUL, R., Grammaire méthodique du français
(Chapitre V: 4.5: Les compléments circonstanciels), Paris, Presses Universitaires
de France, 1994.
• VIŞAN, V., «Le caractérisant adverbial», in Cahiers de grammaire, Bucureşti,
CMUB, 1977
.

136
Tours de phrase. La phrase modalisée

Unité d'apprentissage 7
TOURS DE PHRASE. LA PHRASE MODALISÉE

Sommaire page

Les objectifs de l'unité d'apprentissage 7 153


7.1 La phrase modalisée: son statut énonciatif, logique et modal 154
7.1.1 Actes et modalités de discours 154
7.1.2 Modalités d'énoncé: phrase neutres ou marquées 156
7.1.3 Modalités superposées 159
7.2 Les modalités de phrase ou d'énonciation 161
7.2.1 La phrase assertive 161
7.2.2 La phrase interrogative 161
Test d'autoévaluation 168
7.2.3 La phrase impérative 169
7.2.4 La phrase exclamative 170
7.3 La modalité logique de la phrase : phrase affirmative/ négative 172
Les clés du test d'autoévaluation. 174
Test de contrôle 7 174
Références bibliographiques 175

Les objectifs de l'unité d'apprentissage 7


Quand vous aurez parcouru ce chapitre et effectué les exercices, vous serez capables de:

• Reconnaître les différents types de phrase en fonction de leur statut énonciatif,


logique et modal.
• Appliquer correctement les règles de la formation d'une phrase interrogative, en
fonction du constituant mis en question et du but communicatif de la phrase.
• Reconnaître et interpréter correctement la fonction discursive de la phrase
exclamative.
• Distinguer les différents types de négation et le domaine sur lequel porte l'opérateur
de négation.

137
Tours de phrase. La phrase modalisée

7.1 La phrase modalisée: son statut énonciatif, logique et modal

7.1.1 Actes et modalités de discours


Les actes de parole sont accomplis par un sujet locuteur (=sujet
parlant), qui s'adresse explicitement ou non à un destinataire
(allocutaire) ou à plusieurs. Une classification simple du type de
communication réalisée par un acte de parole prend en
considération le statut des entités personnelles impliquées par le
contenu et par la forme du message verbal:
Je Tu ça

actes actes actes


élocutifs allocutifs délocutifs
(3) (2) (1)

Ces dénominations utilisent une racine lexicale latine: locutio =


Texte d'application parole; loqui = parler. L'adjectif locutif signifie donc : «qui appartient à
la parole», et ses dérivés sont: élocutif (é- «en dehors» + locutif) =
Vers dix-sept heures
je dus partir à la qui met à l'extérieur celui qui parle, qui donne expression à ses
préfecture porter pensées; allocutif = qui se rapporte au destinataire de la parole;
plainte pour le vol de délocutif = qui n'a pas de marques du dialogue.
ma voiture. (1) Un acte délocutif s'accomplit par un énoncé qui décrit l'état du
L'inspecteur qui tapa
monde, ni le sujet locuteur, ni son destinataire n'étant représentés:
mon dépôt de plainte
avait à peu près mon é1 = «Il pleut.»
âge. (...) Comme on Cet énoncé accomplit un acte délocutif parce qu'il ne renvoie pas
pouvait s'y attendre, il explicitement aux participants au dialogue: ni le sujet locuteur X,
était un peu amer et celui qui décrit l'état du monde («ça» = le fait qu'il pleut), ni le sujet
désabusé: interprète, Y, n'ont une expression dans cette phrase.
—«Les vols.... défilent
toute la journée.... (2) En revanche, l'énoncé:
aucune chance... de é2 = «Tu dois savoir qu'il pleut.»
toute façon on les réalise un acte allocutif par lequel le sujet locuteur X s'adresse à
relâche tout de suite.... son destinataire: «tu dois savoir que …», pour lui communiquer un
(...) Allez, au revoir ! On contenu propositionnel (délocuté) : «il pleut».
la retrouvera peut-être
quand même, votre (3) Enfin, un énoncé accomplit un acte élocutif s'il représente le
voiture ! Ça arrive !... » sujet locuteur et son état volitif, affectif, intentionnel, actionnel:
é3 = «Je voulais te dire, pour ton départ de demain, que la
[M. Houellebecq]
météo vient d'annoncer qu'il pleuvra toute la journée.»
Un seul et même énoncé peut réaliser plusieurs types de
communication, en réunissant plusieurs types d'actes:
[Je suis certain que…] [tu sais déjà que …] [demain il pleut].
acte acte acte
élocutif allocutif délocutif

Un tel énoncé réalise un acte élocutif parce que le sujet locuteur se


représente lui-même (Je) avec ses intentions, ses attitudes, avec ses
propres actions; le même énoncé réalise un acte allocutif, parce qu'il
s'adresse explicitement à son destinataire (tu) pour lui intimer un ordre,
lui faire une recommandation, lui suggérer une conduite, ou pour
commenter ses actions, son attitude ou ses croyances; enfin, le même
énoncé peut contenir un acte délocutif dans la mesure où il renferme un

138
Tours de phrase. La phrase modalisée

contenu propositionnel qui, étant une description objective du monde de


référence, n'implique pas les interlocuteurs.
Par exemple, dans une situation de communication comme
celle représentée dans le Texte d'application reproduit ci-contre, le
personnage qui raconte l'histoire (Je) dépose une plainte à la police
pour le vol de sa voiture et l'inspecteur qui enregistre sa plainte
prononce les énoncés suivants:
(i) Les vols défilent toute la journée.
(ii) Allez, au revoir !
(iii) On la retrouvera peut-être votre voiture !
La fonction Par leur contenu, ces trois énoncés impliquent principalement la
discursive troisième, la deuxième et la première personne:
d'un énoncé, (i) dans le premier énoncé, l'acte de parole est surtout délocutif, car le
réalisée
dans un certain
locuteur (l'inspecteur de police) veut seulement décrire une situation de
contexte fait: il dit que chaque jour beaucoup de personnes viennent dans le
de communication bureau de police porter plainte pour le vol de leur voiture;
(ii) l'énoncé suivant réalise principalement un acte allocutif: Allez, au
revoir ! (avec le sens: «Maintenant vous pouvez rentrer chez vous,
pour le moment vous n'avez plus rien à faire»);
(iii) en faisant une promesse, le sujet locuteur se représente dans
son acte qui devient ainsi un acte élocutif: «On la retrouvera peut-
être, votre voiture». La promesse n'implique pas en particulier la
personne du locuteur, mais toute son institution: «on la retrouvera,
votre voiture», on signifiant dans ce contexte: «nous, les autorités»,
ou «nous, ceux qui travaillons dans cette préfecture de police», ou,
plus vaguement encore: «quelqu'un la retrouvera».
Chaque fois qu'on veut analyser une phrase modalisée, il est utile
d'examiner successivement sa forme grammaticale, son statut énonciatif
Correspondances et le type d'acte de communication réalisée. Même s'il y a une certaine
partielles
entre : correspondance entre la forme d'un énoncé et son sens prédictible,
statut grammatical l'interprétation doit toujours prendre en compte le contexte de discours.
d'une phrase Dans les trois énoncés analysés ci-dessus, une correspondance
et sa fonction assez simple s'établit tout naturellement:
communicative (i) PH assertive  acte délocutif;
(ii) PH impérative  acte allocutif;
(iii) PH exclamative  acte élocutif.
Ces correspondances ne sont pas absolues, d'abord parce qu'il
existe un quatrième statut de phrase: l'interrogation, qui réalise un
type particulier d'acte allocutif, parfois élocutif aussi, son but étant
d'habitude la demande d'informations:
(iv) PH interrogative  acte allocutif: Où vas-tu ? ou :
élocutif: Quand cet enfant sera-t-il sage? (dans Wagner et Pinchon).
Dans certains contextes, ces correspondances sont assez
trompeuses, car il y a des phrases assertives qui peuvent réaliser
des actes allocutifs (Son Excellence est invitée à prendre la parole. –
avec le sens: «Veuillez commencer votre allocution»), ou élocutifs
(L'injustice est partout au monde, phrase qui exprime une attitude
subjective: regret, récrimination). En revanche: toute phrase
exclamative réalise toujours un acte élocutif, quel que soit le
contexte, et tout acte délocutif doit être neutre comme type de
phrase (en principe: assertif).

139
Tours de phrase. La phrase modalisée

7.1.2 Modalités d'énoncé: phrases neutres ou marquées


Toute phrase impérative, interrogative ou exclamative est
explicitement une phrase non neutre. Elle réalise un acte allocutif,
élocutif, ou un acte acte mixte. L'impératif, l'interrogatif et l'exclamatif
sont donc des marqueurs explicites d'une modalisation énonciative.
Les phrases ayant ces marqueus de modalisation sont non neutres
du point de vue communicationnel.
Mais quel est le statut de la phrase simplement déclarative ou
Modalités d'énoncé: assertive ? Elle ne peut contenir des marqueurs de modalisation qu'à
l'interieur de son énoncé, du moment que son statut énonciatif est
– phrases neutres ; simplement déclaratif (assertif), c'est-à-dire non marqué.
Les phrases déclaratives sont à leur tour: neutres comme
– phrases marquées
(pour les rapports modalité d’énoncé ou pourvues de marqueurs de subjectivité.
entre les personnes • Définitions. La phrase marquée par des modalisateurs subjectifs
du discours) réalise des énoncés appellatifs (allocutifs) ou expressifs (élocutifs),
étant porteuse de traces du sujet locuteur, de son attitude, de ses
évaluations, de ses rapports avec le destinataire de discours ou avec
un autre objet de discours. Une phrase non marquée par une
modalisation subjective réalise un énoncé neutre. En d'autres mots,
La phrase neutre:
dans une situation authentique de communication, toute phrase
• statut énonciatif: nucléaire apparaît sous une certaine modalisation:
assertif; – modalisation neutre: Il pleut.
– modalisation subjective: Il avait plu. Il pleuvait. Je crois qu'il pleut. Il
• statut logique: me semble bien improbable que dimanche il pleuve. Sans doute,
affirmatif; dimanche il pleuvra. Est-ce qu'il pleut ? Tu te trompes en affirmant
• modalité d'énoncé :
qu'il pleut ! Va téléphoner pour demander s'il pleut, etc.
non subjective; (C'est seulement un certain type de discours qui impose l'élimination
des marqueurs de subjectivité: texte scientifique, didactique, etc., en
général un discours ayant un contenu informationnel neutre,
• structure de surface: objectif.)
non transformée.
• Marqueurs. Le mode verbal est l'un des marqueurs de la modalité:
toute forme verbale personnelle sauf l'indicatif présent porte une
modalisation. D'autres modalisateurs d'énoncé sont donnés parfois
dans un adverbe, adjectif ou nom de phrase (Probablement, il vient.
Il est sûr qu'il vient. La certitude qu'il vient) ou dans une préface
modale qui évoque les personnes du dialogue: Tu savais que p (que
Luc a vingt ans)? J'ai du mal à imaginer que p (que Luc a vingt ans)!
Combien vite p (le temps passe)! Les énonciations sont explicitement
subjectives quand les participants à la communication sont représentés
au niveau de l'énoncé; elles sont neutres comme modalisation quand ni
le destinataire du message (l'allocutaire), ni le sujet locuteur ne sont
évoqués par le contenu ou par la forme de l'énoncé.
Les marqueurs de subjectivité sont parfois implicites: une
phrase comme C'était un énorme plat cuisiné, évoque indirectement
la subjectivité de celui qui a construit cette phrase, par le fait qu'elle
implique une identification («cuisiné»), une dénomination («c'était un
plat») et une appréciation («immense»).

140
Tours de phrase. La phrase modalisée

a) La phrase neutre. En l'absence d'une prise en charge


énonciative, l'énoncé se caractérise par une «modalisation neutre»,
et réalise un acte de communication appelé ci-dessus délocutif:
Luc a vingt ans. Il est ingénieur. Sa sœur s'appelle Marie.
Les énoncés ayant une modalisation subjective quelconque, en
réalisant ainsi des actes de parole allocutifs ou élocutifs
contiennent un positionnement explicite du sujet locuteur dans la
situation communicative:
Tu savais que Luc avait vingt ans ? J'ai du mal à m'imaginer !
Combien le temps passe vite ! Le voilà donc devenu ingénieur !
Qui l'aurait cru ?! Quel joli nom ! Sais-tu si elle est déjà
étudiante ? Va en demander des nouvelles !
Dans ces phrases on distingue un contenu propositionnel (p), qui est
la partie de l'énoncé qui communique un contenu neutre, objectif:
«Luc a vingt ans» = p (contenu propositionnel, objectif);
D'autre part, on distingue une partie de l'énoncé qui porte des
marques/ marqueurs de subjectivité.

Exercice d'entraînement
●Soulignez les mots et les expressions qui introuisent une modalité non neutre.
Les environs de Paris ont tellement changé.... Maman nous emmenait dîner au bord
de la Seine. J'ai tenté sans succès de retrouver cette auberge. J'avais un peu honte
de porter mon pantalon trop court. il me faisait paraître encore plus jeune que mes
quinze ans. À chacune de nos sorties, je portais une cravate de soie. Elle me donnait
un peu plus de confiance en moi. Les péniches passaient sur la Seine. On entendait
un bruit sourd. Les conversations se mêlaient à l'air tiède. [d'après P. Modiano]
● Modalisez subjectivement la phrase: Samedi est un jour de la semaine.
..........................................................................................................................................
..........................................................................................................................................

b) La phrase est «marquée subjectivement» si son contenu


propositionnel qui décrit objectivement un état du monde (p = la
prédication nucléaire d'une phrase) est communiqué sous diverses
modalités: Je ne crois pas que p. (doute); J'aime beaucoup que p.
(satisfaction, joie). Jean soutient que p (allégation de Jean)
Heureusement, p. (opinion) etc. Tous ces marqueurs à l'intérieur de
l'énoncé (souvent comme une "préface" de l'énoncé) sont interprétés
comme révélant l'attitude d'un certain sujet relativement au contenu
informationnel de la phrase.
La classification des modalités d'énoncé (Mé) prend en compte leur
valeur logique et l'instance personnelle (le Sujet modal) dont on révèle
l'attitude dans la phrase modalisée:
► les modalités aléthiques (de la «vérité objective», selon un jugement
neutre et impersonnel; absence d'un «sujet modal» individuel):
[Valeur logique: ±Nécessairement vrai ou faux] L'eau bout à
100 degrés Celsius (modalité d'énoncé implicite «certain»: il est
certain que l'eau bout à cette température). L'hépatite est une
affection du foie (contenu propositionnel tenu pour «vrai»). Hier

141
Tours de phrase. La phrase modalisée

matin, le président de la République a inauguré le 40e Salon de


l'agriculture [Le Journal du Dimanche, 23.02.03] (l'événement
annoncé est «avéré»). Ce malade pourrait avoir une lithiase
Modalités d'énoncé (avis d'expert: «probabilité»). Le mauvais temps persiste des
(Mé): Pyrénées orientales aux Cévennes. (prévisions de la météo),
avec valeur exprimée: «possibilité prévue».
– vrai/ faux/ probable/
possible etc. ► modalités déontiques:
(modalités aléthiques) [Valeur logique: +Norme instituée par une autorité déontique
qui représente le «Sujet modal»]
– ordre, obligation, Tu devras partir (sujet déontique: la personne qui donne
permission, interdiction, l'ordre). Oncle dit que tu pourras aller le voir ! (autorité
non interdiction, fait
recommandé, suggéré, déontique: celui qui a accepté de recevoir des visites). À la fin
bienséant etc. des études l'élève doit passer une épreuve. (autorité qui établit
(modalités déontiques) cette obligation: les règlements de l'enseignement national).
Venez, s'il vous plaît ! (sujet modal: celui qui parle). Papa dit
– croyance, doute, qu'il n'est pas défendu que nous fassions cela. (sujet qui donne
allégation, fait connu,
imaginé, conjecturé etc. l'obligation ou la permission: papa)
(modalités épistémiques) ► modalités épistémiques:
[Valeur logique: ±Savoirs, croyance, qui se manifestent dans
– désir, souhait, opinion un «Sujet de connaissance»]
favorable, défavorable, Je savais déjà qu'aujourd'hui c'est l'anniversaire de Luc. (p =
surprise, étonnement, etc.
aujourd'hui c'est l'anniversaire de Luc) Il paraît que demain c'est
(modalités affectives,
désidératives, l'anniversaire de Luc. (même contenu propositionnel, même sujet
appréciatives) de connaissance: la personne qui parle, autre type de modalité
épistémique: incertain, apparence). Je doute qu'il soit interrogé
aujourd'hui. Je pense que c'est hier que Luc a été interrogé en
histoire et en chimie. (sujet modal défini: je). C'est assez incertain
qu'il soit déjà arrivé chez lui. (où le sujet dont on communique la
connaissance n'est pas explicité: sujet modal indéfini). On dit qu'il
est un bon spécialiste. (sujet modal: la renommée publique).
► modalités affectives/ désidératives:
[Valeur logique: affectivité, désir, souhait, qui se manifestent dans
un Sujet de volonté, de désir etc.] J'aime bien qu'il soit là. Comme il
fait beau aujourd'hui! (sujet modal: celui qui parle); Papa a regretté
qu'il ne fût invité (sujet modal explicite: papa).
• Un exemple d'analyse des marqueurs superposés:
C'est sûr que tu ne regrettes pas d'avoir laissé Jean t'attendre
pendant deux heures ?
Cet énoncé présente plusieurs transformations par rapport à la phrase
canonique qu'il contient: «Jean a attendu qqn deux heures.» (=phrase
nucléaire non modalisée). Les marqueurs de modalisation énonciative
sont: le statut interrogatif, la négation; la forme verbale factitive (laisser
attendre); la mise en relief: c'est sûr … que; le tour impersonnel: cela
est sûr ? Les marqueurs des modalités d'énoncé sont: l'adjectif sûr
dans l'expression impersonnelle c'est sûr (modalité épistémique); le
verbe regretter (modalité affective).

142
Tours de phrase. La phrase modalisée

7.1.3 Modalités superposées


Chaque énoncé présente un contenu propositionnel (p) et un
ensemble de marqueurs de modalité (M): énoncé = M + p.
L'analyse d'une phrase implique donc une analyse de la phrase nucléaire
(p= Marie reste à la maison) et une analyse des marqueurs de modalité:
Est-ce qu'il faut que Marie reste à la maison ?
Est-ce qu'il faut que …. (p) ?
M = interr. + affirm. + il faut que p
Savez-vous si Marie est restée à la maison ?
Savez-vous si …. (p) ?
M = interr. + affirm. + savoir (vous, p)
Je te prie de dire à Marie de rester à la maison.
Je te prie de dire à Marie de …. (p).
M = assertif + affirm. + prier (je, tu, p)
Les parents de Marie n'ont pas accepté qu'elle reste
aujourd'hui à la maison.
Les parents de Marie ont accepté que …. (p).
M = assertif + négatif + accepter (parents, p)
Quelle chance que Marie reste aujourd'hui à la maison !
Quelle chance que …. (p) !
M = exclamatif + affirm. + Quelle chance que (p)
La phrase nucléaire, symbolisée par p (=contenu propositionnel)
représente une simple union entre sujet et prédication. À ce contenu
s'ajoutent les modalisateurs qui expriment une attitude cognitive
attribuée à une instance subjective (une autorité déontique, un sujet
épistémique ou de jugement, un sujet affectif ou une instance de la
vérité super personnelle, aléthique). Dans le discours, les phrases
modalisées ont un constituant M (ensemble des marqueurs de
modalité), qui s'ajoute à la proposition nucléaire (notée par p):
énoncé total (ou phrase modalisée) = M + p
Mé = Les marqueurs de modalité sont comme une sorte de prédication
modalité d'énoncé
supplémentaire: p = Jean a vingt ans. M + p = Je crois + que Jean a
/vs/ vingt ans. La prédication modale est réduite à zéro pour les énoncés
«à modalisation neutre»: Jean a vingt ans (M = Ø).
Plusieurs couches de modalisations apparaissent régulièrement
MÉ = avec les phrases non déclaratives: une modalité d'énoncé (Mé), non
modalité d'énonciation
obligatoire, et la modalité de l'énonciation (MÉ), obligatoire, parce
qu'elle transcrit le statut énonciatif de la phrase:
Tu savais que Jean avait vingt ans ?
p= Jean a vingt ans
Mé = SAVOIR (tu, p); forme verbale (IMP)
MÉ = interrogation à l'affirmative.
J'ai du mal à m'imaginer combien le temps passe vite !
p= Le temps passe vite.
Mé1 = AVOIR DU MAL (Imaginer (je, p)); forme verbale (PR)
Mé2 = Imaginer (je, p);
MÉ = exclamation, forme grammaticale affirmative;
négation lexicale (avoir du mal à + INF = ne pas pouvoir
+INF: je ne peux pas imaginer cela).
Le voilà donc devenu ingénieur ! Qui l'aurait cru ?!
p= Il est devenu ingénieur.
143
Tours de phrase. La phrase modalisée

Mé = VOILÀ DONC (je, p); Mé = CROIRE (x= qui, p);


forme verbale (CDT présent)
ME = exclamation, à l'affirmative. (Qui aurait cru p ?)
Tu ne savais pas qu'elle était étudiante ?
p= Elle + être étudiante.
Mé = SAVOIR (tu, p); forme verbale (IMP)
MÉ = interrogation à la forme négative.
Ces marqueurs de modalité (Mé = modalisation de l'énoncé),
s'appliquent directement à la prédication de la phrase nucléaire:
Phrase nucléaire modalisée = Mé (p)
Mais il y a aussi une modalisation de la phrase tout entière, qui
donne son statut énonciatif (MÉ):
Tours de phrase (dans le discours) = MÉ [ Mé (p) ]
Cette modalité de statut discursif s'applique à l’ensemble de la
phrase modalisée subjectivement. Types d'énoncés réalisés :
Statut énonciatifassertif + phrase nucléaire modalisée (±Sbj)1
Statut énonciatif interrogatif + phrase nucléaire modalisée (+Sbj)
Statut énonciatif Statut énonciatif impératif + phrase nucléaire modalisée (+Sbj)
de la phrase Statut énonciatifexclamatif + phrase nucléaire modalisée (+Sbj)
(MÉ) Les modalités étant si complexes, elles ne se reconnaissent
que dans le discours réalisé. Les phrases canoniques décrites par
les grammaires sont d'habitude des modèles syntaxiques simplifiés
et abstraits. En revanche, les énoncés attestés ont une complexité
Statut modal de la
phrase (Mé) donnée surtout par les structures de modalisation des phrases.
Les modalités d'énoncé (Mé) s'expriment par un nombre
pratiquement infini de moyens linguistiques, dont, en particulier, le
mode verbal. Chaque choix grammatical ou lexical peut s'avérer
significatif et s'interpréter comme une décision intentionnelle de l'auteur
du message. Par exemple, un énoncé déclaratif si simple et si court :
«La vérité, l’âpre vérité.» (Danton, cité par Stendhal)
contient autant de marqueurs de modalité que le nombre de ses
éléments linguistiques. Son contenu propositionnel se confond avec le
contenu modal. Cet énoncé contient une recommandation morale: "il
faut chercher toujours la vérité" (=modalité déontique); en même temps,
un tel énoncé déclare l'admiration de son auteur pour la vérité (=
modalité évaluative, appréciative); en plus, en choisissant l'adjectif âpre,
l'auteur déclare aussi qu'il considère qu'il est difficile parfois de
supporter la vérité (= opinion, donc modalité épistémique). Analyser ces
contenus si riches représente une démarche difficile et laborieuse
d'interprétation d'un message. L'étude des modalités d'énoncé (Mé)
excède l'objectif théorique de la syntaxe, qui est une science des
formes et des règles combinatoires. Ce sont seulement les
«grandes» modalités, celles de l'énonciation (MÉ) qui présentent des
moyens d'expression de nature syntaxique:
– les modalités énonciatives proprement dites, qui définissent la
forme (assertive, interrogative, impérative ou exclamative) que prend
une phrase quand elle devient un énoncé;
– les modalités logiques (affirmation/ négation);

1
Phrase qui contient ou non des marqueurs subjectifs.

144
Tours de phrase. La phrase modalisée

– les modalités topiques, qui réordonnent les constituants de la phrase


pour mettre en évidence le constituant sur lequel on veut attitrer
l'attention (mise en relief, passivation, tours impersonnels de phrase).

7.2 Les modalités de phrase ou d'énonciation


Les modalités d'énonciation (MÉ) assignent un statut énonciatif à la
phrase; elles s'appliquent à la phrase nucléaire qui parfois contient
déjà un prédicat modal auprès duquel s'enchâsse le contenu
propositionnel (p) :
Énoncé = MÉ [Mé (p) ]

M contenu propositionnel
7.2.1 La phrase assertive
La phrase est assertive (ou: déclarative) quand son contenu
propositionnel est affirmé comme vrai ou comme faux: L'enfant joue
dans le jardin. La semaine a sept jours. Je m'appelle Marie.
L'assertion ne porte pas toujours sur la prédication
grammaticale; la portée de l'assertion se détermine en fonction du
foyer informationnel de la phrase:
Luc joue dans le jardin. (Qui joue dans le jardin ?)
Luc joue dans le jardin. (Que fait-il Luc ?)
Luc joue dans le jardin. (Où joue-t-il ? Où est-il allé jouer ?)
Une seule phrase peut marquer plusieurs assertions, chaque
constituant de phrase pouvant entrer sous la focalisation assertive: le
Le statut énonciatif
assertif : sujet (Il est vrai/ faux que Luc – non pas une autre personne – joue
dans le jardin); le procès ou un objet impliqué dans la prédication (Il
• statut logique: est vrai/ faux que Luc joue dans le jardin – ce n'est pas pour se
affirmatif/ négatif; promener qu'il est là; Il est vrai/ faux que Luc joue au ballon, et non
pas aux échecs); le temps impliqué par la prédication (Il est vrai/ faux
• modalité d'énoncé :
subjective ou neutre;
que Luc a joué hier/ joue maintenant dans le jardin); par un
circonstant qui détermine le procès: (Il est vrai/ faux que Luc joue
dans le jardin et non dans sa chambre), etc.
• structure de surface: Cela montre qu'à partir d'une seule phrase nucléaire (p), le
ordre canonique : S –V locuteur peut formuler dans le discours plusieurs types d'assertions.
L'assertion peut être explicitement prise en charge par son
sujet locuteur: J'affirme sur l'honneur que Luc ne savait rien de nos
plans. Une assertion peut être reprise (en discours rapporté): Luc
nous a dit qu'il n'en savait rien. Luc nous a dit : «Je n'en sais rien».

7.2.2 La phrase interrogative


Il y a lieu de distinguer, d'une part: (I) l'interrogation vraie, adressée à
un allocutaire et, d'autre part: (II) l'interrogation rhétorique ou la
pseudo-interrogation.
I. L'interrogation proprement dite («allocutive» ou adressée)
L'interrogation : Définition. L'interrogation proprement dite (ou: adressée à quelqu'un)
réalise un acte allocutif, en créant toujours une situation interlocutive
• totale contraignante pour le destinataire de la parole. Il y réagit soit par un
• partielle
message verbal, soit par un refus de donner une réaction verbale (il peut
réagir par son silence).

145
Tours de phrase. La phrase modalisée

L'interrogation a comme but un appel d'information (Quelle


heure est-il?), mais elle peut aussi réaliser un acte de parole indirect,
servant à d'autre buts communicatifs: adresser une invitation: Vous
dînez avec nous ? une prière: Veux-tu fermer la fenêtre ? une
suggestion/ proposition: Tu seras libre jeudi soir?
Types d'interrogations. Les questions se classifient en fonction du
but discursif ou de la forme grammaticale.
● Classification d'après l'incidence de l'interrogation, c'est-à-dire d'après
la fonction syntaxique du constituant sur lequel porte l'appel
d'information:
►Les phrases interrogatives se rapportant à la prédication
grammaticale de la phrase réalisent une question totale. La réponse
virtuelle à une question totale est oui/ non (adverbes substituts de
phrase), ou un adverbe modalisateur de phrase (probablement,
certainement, assurément etc.):
– Marie est à la maison ? R: Oui./ Non.
– Luc, vient-il ? R.: Sans doute. / Peut-être.
►Les phrases interrogatives qui se rapportent à un autre constituant
de la phrase que la prédication réalisent des questions partielles,
auxquelles il suffit de répondre par une phrase réduite au seul
constituant interrogé:
– À quelle heure commence la réunion ? R.: À quinze heures.
– Qui vient avec toi ? – Mon frère.
– Qu'est-ce qu'il y a dans ce tiroir ? – Des photos.
– Avec qui ? – Avec mon papa.
Réalisation linguistique des questions totales et partielles
● Classification du point de vue du type de marqueur syntaxique:
d'après le marqueur, la phrase interrogative peut être mélodique,
inversive ou périphrastique.

Tour de phrase assertif: Marie est partie

Tours de phrase Moyens linguistiques marquant l'interrogation


pour l'interrogation totale d'appel d'information
 interrogation mélodique, signalée uniquement par la courbe
Marie est partie ? mélodique spécifique à l'intonation interrogative.

Marie, est-elle partie ?  interrogation par inversion: simple (inversion du pronom sujet),
ou complexe quand il y a aussi un sujet nominal: Marie, a-t-elle… ?
Est-ce que Marie est partie ? ou:
Marie, est-ce qu'elle est partie ? ou:  interrogation par la périphrase* est-ce que (sans inversion)
Est-ce qu'elle est partie, Marie?
*)
Dans la langue populaire, la particule -ti permet aussi de maintenir
l'ordre des mots non inversif: Tu les as-ti donc pris ?
• La courbe mélodique est le principal marqueur de l'interrogation (à
l'oral); elle apparaît dans tous les types grammaticaux d'interrogation:
mélodique, inversive, périphrastique.

146
Tours de phrase. La phrase modalisée

ma
au ciné ?
L'intonation = Ils vont (montée de l'intonation, phrase sans inversion)
marqueur distinctif vous
un crayon ?
de l'interrogation Avez-
(montée de l'intonation, inversion simple)
vu
ce film ?
Avez-vous (montée de l'intonation, inversion simple, forme
verbale composée)

Pour l'interrogation mélodique totale: le simple fait de prononcer avec


une intonation interrogative une phrase de forme canonique
assertive permet de faire comprendre à l'interlocuteur qu'il ne s'agit
plus d'une déclaration, mais d'une mise en question:
Tu viens ? Jean est là ? Vos parents ont déjà vu la chambre ?
• Dans les questions préfacées par la périphrase interrogative est-ce que,
la montée de la courbe mélodique se fait sur ce segment même :
que
Est-ce tu viens ?
• Dans l'interrogation partielle, la demande d'information porte sur un
constituant de phrase: sujet, attribut, complément, circonstant. La
phrase interrogative partielle s'ouvre par un mot interrogatif (pronom,
adjectif pronominal ou adverbe interrogatifs). Pour l'interrogation
partielle, il y a donc toujours un second moyen syntaxique (outre la
mélodie) qui permet de marquer le statut interrogatif :
Quelle heure est-il ? Il est quelle heure, s'il vous plaît ?
Quand voulez-vous dîner ? Vous venez quand, ce soir ?

Exercice d'entraînement
●Identifez le type de phrase interrogative: mélodique (m.), inversive (i.) ou périphrastique (p.).

1. C'est votre chien ? 2. Vous n'êtes pas Mme Portier ? 3. Alors, vous voulez louer une
chambre? 4. S'appelait-il Patrick Modiano ? 5. Qu'est-ce que tu en penses, toi ? 6. Est-ce
que tu peux m'acheter un album de Pomme d'Api ? 7. Qui est-ce, Claude ? 8. D'où sors-tu
? 9. Elles sont jolies, hein ? 10. C'est ta pièce ? 11. Qu'est-ce que tu fais là ? 12. Est-ce
que vous voulez m'aider ? 13. Tu es en vacances ici ? 14. Pourquoi n'avais-je pas le droit
de l'embrasser ? 15. L'avait-elle déjà emmené au collège ?
1. _____ ; 2. _____ ; 3. _____ ; 4. _____ ;5. _____; 6. _____ ;7. _____ ; 8. _____ ;
9. _____; 10. _____ ;11. _____ ; 12. _____ ;13. _____ ; 14. _____ ;15. _____ .
● Exprimez les trois types d'interrogation pour la phrase noyau: Vous êtes allés dire un
petit bonjour à Claude.
Interr. mélodique: ……………………………………………………………………………………
Interr. inversive: …………………………………………………………………………………….
Interr. périphrastique:……………………………………………………………………………….

147
Tours de phrase. La phrase modalisée

L'interrogation partielle portant sur: le sujet, l'attribut et les


compléments d'objet :
►L'interrogation portant sur le sujet de la phrase se réalise par un
mot introducteur pronominal (les pronoms qui, lequel): Qui vient?
Lequel va venir avec nous ?; Quel est le garçon qui vient ?; ou
adjectival (quel N): Quel garçon viendra avec nous?
Avec des verbes transitifs directs, l'interrogation par qui ? est
Moyens d'expression ambiguë : Qui a vu Paul ? (= X a vu Paul), car on peut entendre que
de l'interrogation porte sur l'objet direct: Paul a vu X. Les pronoms qui /
l'interrogation que en fonction de sujet ou d'objet direct peuvent se renforcer avec
la périphrase interrogative est-ce que. De cette façon, les ambiguïtés
partielle:
sont éliminées:
(Sujet) Qui a vu Paul ? (ambigu) / Qui est-ce qui a vu Paul ? (QUI
–pronom ou autre mot pour le sujet personnel), qui entraîne la réponse: Une personne
interrogatif; a vu Paul. Registre de langue non soutenu: Paul a vu qui ?
–dislocation en tête de Qu'arrive-t-il à Paul ? Qu'est-ce qui arrive à Paul ? (sujet non
personne, inanimé), qui accepte la réponse: Un très fâcheux
phrase du constituant
accident est arrivé à Paul.
interrogé; (Objet direct) Qui a vu Paul ? (ambigu) / Qui a-t-il vu, Paul ? QUI
– inversion du sujet; pour l'objet direct) = Qui est-ce qu'il a vu, Paul ?, avec réponse
– postposition du sujet possible: Paul a vu quelqu'un. (QUI pour l'objet direct
personnel) Qu'a-t-il vu, Paul? = Qu'est-ce qu'il a vu, Paul ?,
nominal.
avec la réponse: Paul a vu quelque chose. (QUE pour l'objet
inanimé).
►L'interrogation portant sur l'attribut du sujet se réalise par des
termes interrogatifs: qui, que, quel, lequel, combien de N? mais aussi
par d'autres termes: prépositionnels (de quoi, en quoi, avec quoi
etc.), ou par l'adverbe comment:
(L'attribut du sujet) Qui est cette jeune fille ? Comment était-
elle ? Qui sommes-nous pour le juger ? De quoi est-elle ? Que
devient-elle ? Comment est-elle ? Quelle est cette chanson ?
► Les questions portant sur les compléments indirects ou
prépositionnels se réalisent par (±prép.) qui ou quoi, selon la
nature du nominal (animé: qui; inanimé: quoi). L'interrogation sur
des constituants de phrase (prépositionnels ou non prépositionnels)
a trois formes possibles:
– phrase sans inversion, avec mot interrogatif non disloqué de
sa place dans la phrase (registre de langue: f a m i l i e r , r e l â c h é ) :
Tu écris avec quoi ? Vous parlez de qui ? Elle pense à qui pour
ce poste ? Papa a rencontré qui, hier soir ? Vous voulez quoi,
comme dessert ? Vous avez eu quoi ?
– phrase sans inversion, avec mot interrogatif disloqué en tête
de phrase et renforcé par est-ce que (registre de langue:
s t a n d a r d ):
(Compléments prépositionnels)
Avec quoi est-ce que tu as écrit ? ?
De qui/ quoi est-ce que vous parlez?
À qui est-ce qu'elle pense pour ce poste ?
Qui est-ce qu'il a rencontré hier soir, papa ?
Qu'est-ce que vous voulez, comme dessert ?

148
Tours de phrase. La phrase modalisée

Quoi apparaît après une préposition. Comme objet direct, quoi ne se


met pas comme mot interrogatif disloqué en tête de phrase; on
emploie que, simple ou renforcé avec est-ce que :
Que fait-il ? Qu'est-ce qu'il fait ?
L'inversion du sujet – phrase inversive, avec mot interrogatif (introducteur) disloqué
dans la phrase en tête de phrase (français c o r r e c t , parfois s o u t e n u ) :
interrogative:
Avec quoi écris-tu?
De qui parliez-vous tout à l'heure ?
À qui pense-t-elle pour ce poste ?
Papa, qui a-t-il rencontré hier soir ? Qui a-t-il rencontré hier
– inversion simple;
soir, papa ?
– inversion complexe; Que voulez-vous, comme dessert ?
– postposition du Sur quoi se fonde-t-il, en faisant cette assertion ?
sujet (nominal).
Contre qui se dresse-t-elle dans son article ?
Au profit de quelle entreprise a-t-elle conçu son plan de
redressement de la production ?
Remarque: il y a des phrases interrogatives clivées, avec
«désinversion», phénomènes caractéristiques à l'oralité:
– clivage (constituant détaché): Jean, il a quel âge ? Il a quel âge,
ton mari ? (sujet détaché à gauche, à droite)
– désinversion:
À qui elle pense pour ce poste ? (ordre canonique: S–V)
De qui vous parliez tout à l'heure ?
sont des phrases marquées comme registre de langue familier, avec
dislocation en tête de phrase du terme interrogatif.
Quel âge a-t-il, Jean ? (inversion + clivage + mot interrogatif en
tête de phrase)
Jean, il a quel âge ? (désinversion + clivage + mot interrogatif :
quel âge, qui n'est pas déplacé en tête de phrase).
La position en tête de phrase du mot interrogatif aurait demandé
l'inversion du sujet pronominal; et pourtant la personne qui parle
recourt à des stratégies de désinversion:
– (français standard) renforcement de l'interrogation partielle par la
périphrase est-ce que: À qui est-ce qu'elle pense pour ce poste ?
L'interrogation
– (français familier) isolement du point de vue syntaxique du mot
sans inversion: interrogatif :
À qui # elle pense pour ce poste ?
formes non littéraires À qui tu disais donc qu' elle pense pour ce poste ?
de À qui c'est que Marie pense pour ce poste ? (pop., registre de
l'interrogation partielle
langue sous-standard)
En conclusion, la langue parlée présente une grande variété de
formes pour l'interrogation partielle.
Les phrases du type: À qui tu disais donc qu' elle pense pour
ce poste ? (une interrogation et une assertion), sont issues de deux
actes énonciatifs, mis ensemble avec une pause de détachement :
a) Vous parliez tout à l'heure de quelqu'un. (assertion)
b) De qui ? (interrogation)
 (a + b) Vous parliez tout à l'heure (,) de qui ?
 (b + a) De qui (#) vous parliez tout à l'heure?
Ces tours de phrases sans inversion trahissent leur oralité.

149
Tours de phrase. La phrase modalisée

L'interrogation partielle portant sur les circonstants :


Les questions sur les circonstants se réalisent avec un adverbe
interrogatif: où … ? (d'où, jusqu'où ? etc.); quand ? (depuis quand ?
jusqu'à quand ? etc.); comment ? ; pourquoi ? etc. Ces adverbes
interrogatifs sont disloqués en tête de phrase, autrement la
construction est ressentie comme non littéraire:
Où vas-tu ? (français littéraire) ↔ Tu vas où ? (familier)
Comment va-t-il, votre père? (litt.) ↔ Il va comment, votre
père? (fam.)
Quand a-t-elle vu ce film, ta soeur ? (litt.) ↔ Elle a vu quand ce
film, ta soeur? (fam., pop.)
Si la phrase a un pronom sujet, elle revêt à l'interrogatif trois formes:
Où va-t-il ? Où est-ce qu'il va ? Il va où ?
Quand partira-t-il ? Quand est-ce qu'il partira ? Il partira quand ?
Si la phrase a un sujet nominal, elle revêt à l'interrogatif plusieurs formes:
Adverbes Où Paul va-t-il ?
interrogatifs (inversion complexe du sujet clitique)
Où va-t-il, Paul ? Paul, où va-t-il ?
(inversion complexe + détachement du sujet nominal)
Où va Paul ? (postposition du sujet)
Mais, si le verbe a un complément nominal, la postposition du sujet est
insuffisante pour marquer l'interrogatif : *Où a rencontré Paul son ami ?
*Où a vu votre frère ces albums ? (incorrect)  Où Paul a-t-il
rencontré son ami ? Où votre frère a-t-il vu ces albums ? (correct)
Où c'est que Paul va donc ! ? (pop.) (désinversion par c'est que)
Où est-ce que Paul va demain ? (litt. ) (désinversion par est-ce que)
Paul, où il va ? Où il va, Paul ? Il va où, Paul ? (fam.)
(détachement sans inversion)
La postposition est bloquée avec pourquoi, mais possible avec tous
les autres adverbes interrogatifs:
*Pourquoi vient Marie ? mais: Pourquoi Marie vient-elle ?
Quand viendra Marie ? Quand Marie viendra-t-elle ?
Comment va Marie ? Comment Marie va-t-elle ?

Fonctions discursives de l'interrogation allocutive (adressée) :


– demande d'information:
Principales fonctions Quelle heure est-il ? Quel âge as-tu ? Comment vas-tu ? Ça va ?
discursives
– reprise de l'interrogation: Où je vais ? Pourquoi je suis ici ?
– demande de confirmation:
de Tu travailles déjà, n'est-ce pas ? Ah, tu l'as vu, donc ?
l'interrogation C'est Jean-Luc votre nom, n'est-ce pas ?
L'interrogation de confirmation s'accompagne souvent d'interjections ou
de séquences interrogatives bloquées (des «exposants» interrogatifs) :
Elle est belle, non ? C'est joli, hein ? Tu es fatigué, c'est pas vrai ?
Ça dure longtemps, ne croyez-vous pas ? C'est barbant, hein, dis
donc ? Tu as chaud, au moins ? Tu aurais peut-être pu rester avec
elle, tu ne crois pas ?
II. La fausse interrogation (rhétorique, exclamative, polémique etc.)
L'acte interrogatif ayant comme but l'appel d'information ou de
confirmation est orienté vers le destinataire de l'acte de parole

150
Tours de phrase. La phrase modalisée

(l'allocutaire), en le mettant dans la situation de réagir, soit en


Pseudo-
donnant la réponse/ la confirmation, soit en refusant de le faire. Mais,
parfois, au lieu d'être adressée à un destinataire, l'interrogation a une
interrogations
pure fonction argumentative, étant le signe d'un débat intérieur ou
d'une polémique rhétorique. On distingue plusieurs sous-types de
phrases interrogatives ayant une visée argumentative :
• La phrase interro-exclamative est un type mixte, parfois relevant
de l'exclamation pure: Pourquoi ne me l'avait-elle pas dit plus tôt ?!
• L'interrogation hypothétique réalise des énoncés rhétoriques:
– Questions délibératives : Que faire ? Y aller et m'excuser ? Lui
téléphoner pour le refuser ? Combien de temps rester: une
semaine? Dix jours ? Plus ?
– Auto-questionnement dubitatif:
Qui donc appellerait à cette heure ?
Ce serait notre voisin qui aurait oublié ses clés ?
Ne serait-ce pas l'un des voisins d'en face ?
• L'interrogation de positionnement envers l'interlocuteur est
proche du statut assertif. La fonction discursive des phrases
suivantes n'est pas l'appel d'information, mais la réalisation d'une
certaine argumentation (persuasion de l'interlocuteur).
– Expliciter pour son interlocuteur un raisonnement personnel:
Quand lui rendre visite ? Toute la semaine je travaille. (excuse)
Que lui dire ? Il ne comprend rien. (explication)
Comment faire pour lui parler ? (inquiétude, souhait de lui parler)
Tu étais déjà là ? Alors, tu as terminé ? Tu es rentré ? (prise de
contact avec l'interlocuteur)
Alors, voyons, qu'est-ce qui ne va pas ? L'hypertension ? Le
L'interrogation surmenage? ( sollicitude envers son interlocuteur)
– Marquer un état subjectif de mécontentement, reproche, réprimande
pour exprimer :
de la part d'un proche: Est-ce que tu as vu l'état de ton pantalon ? Tu
une requête, as vu ce que tu t'es fait ? On ne pouvait pas en trouver un autre ?
un conseil, – Demande de permission: Je peux enlever ça ? Je pourrais
un ordre atténué. m'asseoir un peu ? Est-ce que tu crois qu'on pourrait y aller ?
– Marquer l'admiration, la satisfaction : C'est une belle journée, n'est-
ce pas ? N'est-ce pas bien ?
• L'interrogation injonctive :
Marquant divers degrés d'ordre ou de suggestion, ce type
d'interrogation sert à atténuer un ordre, une injonction :
Bon, dit-il, on y va ? (le locuteur propose de partir tout de suite)
Mon chéri, tu ne crois pas qu'on devrait aller le voir ?
Tu veux entrer ? (invitation) Tu ne veux pas prendre un café ?
(suggestion ou injonction atténuée).
L'interrogation indirecte est simplement une subordonnée introduite par un mot
interrogatif: Luc veut savoir si je pars/quand je pars/ où je vais/ comment je pars/ qui part.

151
Tours de phrase. La phrase modalisée

Test d'autoévaluation
Pour bien gérer ce test, il est indispensable que vous ayez déjà parcouru les explications
et les analyses données dans l'unité d'apprentissage 7. Vérifiez vos solutions aux
exercices en consultant la rubrique Clés du test d'autoévaluation.

Exercice 1
Mettez les locutions Qui est-ce qui…? et Qui est-ce que…? et Qu'est-ce que…? et
Qu'est-ce qui…? devant les segments de phrase interrogative suivants:
– …………………………………….…… a téléphoné hier ?
– ……………………………………….… Jean a dit à Marie au téléphone ?
– …………………………………….…… te plairait que je t'apporte au retour de mon voyage ?
– …………………………………….…… ne va pas avec elle depuis quelques jours ?
– ……………………………………….… tu veux servir au dîner ?
– ………………………………….……… tu as invité pour ce soir ?
– ……………………………….………… a proposé de remettre à plus tard notre réunion ?
Exercice 2
Marquez les segments textuels suivants par le signe (+Allocutif) s'ils font référence au
destinataire de discours et par (+Élocutif) s'ils font référence à la subjectivité du locuteur; les
segments restant sans spécification seront notés: (+Délocutif).

1. Défense de fumer ! 2. Diviser la pâte en deux; rouler pour former deux disques de pâte;
étendre une couche de confiture et cuire au four. 3. «Je m'attends bien, ma très chère soeur,
que dans la colère où vous êtes contre moi, vous déchirerez cette lettre sans la lire.» [Racine]
4. Ce poète, demeurant à Paris devient propriétaire d'un «moulin à vent et à farine, sis dans
la vallée du Rhône, au plein coeur de Provence». 5. Tous les étudiants en cours de
préparation à la maîtrise, présenteront leur projet de mémoire dans le contexte d'un séminaire
semestriel regroupant les étudiants inscrits à cette activité.
1.___________ 2.____________ 3.____________ 4.____________ 5. ____________
Exercice 3
Imaginez que vous êtes le destinataire de l'énoncé n° 5 de l'exercice précédent et
formulez trois questions se rapportant au contenu de cet énoncé.
…………………………………………………………………………………………………………
…………………………………………………………………………………………………………
…………………………………………………………………………………………………………
Exercice 4
Réalisez des phrases interrogatives et interro-exclamatives introduites par les adverbes
comment, pourquoi, où et des phrases exclamatives introduites par l'adverbe comparatif
comme.
…………………………………………………………………………………………………………
…………………………………………………………………………………………………………
…………………………………………………………………………………………………………
…………………………………………………………………………………………………………

152
Tours de phrase. La phrase modalisée

7.2.3 La phrase impérative


La phrase impérative doit être examinée en prenant en compte le
rapport entre forme et contenu :
– une forme verbale propre – le mode impératif du verbe – exprime
des ordres plus ou moins contraignants: injonctions fortes,
recommandations, suggestions etc., adressées au destinataire du
message: Viens ! Va-t'en ! Allez-y ! Écris-moi !
– en même temps, le même contenu peut s'exprimer par d'autres
formes du langage. Par exemple, en employant d'autres modes
verbaux (subjonctif, infinitif, indicatif/ conditionnel), et donc d'autres
types de phrase:
Phrases assertives → Je voudrais qu'il parte. Je serais
enchanté(e) de recevoir de ta part une lettre ou une carte.
Donner des ordres : Phrases exclamatives → Comme j'aimerais que tu m'écrives !
a) par des phrases à • Réalisation linguistique de la phrase impérative :
mode impératif ; – le mode impératif: Parle ! Parlez ! Parlons ! Ne vous penchez pas
dehors ! Ne fumez pas ! Ne lui répondons plus !
b) par des phrases
avec d'autres modes Pour les personnes grammaticales qui n'ont pas de forme à
du verbe; l'impératif, on emploie:
– le subjonctif : Qu'elle parle ! Qu'il vienne ! Que je fasse cela.
c) par des phrases – l'infinitif précédé ou non par la préposition à :
elliptiques. (Dans les modes d'emploi d'un produit) À conserver dans un
endroit sec. À retourner sous enveloppe affranchie. Champs à
remplir obligatoirement. Papier à décoller. Orifice à boucher
après avoir rempli la cartouche.
– l'infinitif après une formule allocutive (adressée à un destinataire
virtuel de message):
Merci de patienter. Merci d'ajouter votre numéro de téléphone.
– nominalisation d'action:
Défense de fumer. Sortie. Entrée. Présentation obligatoire
d'une pièce d'identité.
– noms en apostrophe (noms communs ou noms propres
désignant des personnes): Monique ! Les enfants ! L'équipe no deux
!
– les formes verbales de l'indicatif (présent, futur) employées avec des
sujets sur lesquels porte l'ordre (recommandation, injonction forte etc.) :
Tu seras à la maison à sept heures ! Vous écrivez cet exercice.
Nous partirons sans tarder. Il ira la chercher tout de suite. Ils
D'autres viendront plus tard.
moyens – interrogations (phrases interrogatives) avec verbes modaux
pour exprimer (vouloir, pouvoir etc.) ayant comme sujet la personne du destinataire
de message:
des ordres
Veux-tu faire cela pour moi ? Peux-tu me donner ton adresse ?
Serez-vous aimables de remettre ce dossier à qui de droit ?
Pourriez-vous me dire votre adresse exacte ?
L'interrogation est un moyen d'atténuer l'ordre et de laisser l'impression
au destinataire qu'il est libre de répondre ou non à la sollicitation.
– phrases nominales: Le feu ! La voiture ! Attention ! Silence ! Au
secours ! Paix ! Pinces ! Ouate ! (=donnez-moi ! passez-moi !)
– adverbes : Vite ! Doucement ! Tout doux ! Là ! Ici ! Encore ! Plus bas !
– autres phrases a-verbales :
153
Tours de phrase. La phrase modalisée

Toi, deux pas en avant ! Vous, là, votre copie! Vous, les bras
en avant ! Désolé ! (prononcé pour demander à quelqu'un de
se déplacer de son siège, ou de la place où il se tenait, etc.)
– interjections : Chut ! Adieu ! Ho ! Ho ! Voilà ! Tout doux ! Zut !
(fam.) Pst! Motus ! Gare !

7.2.4 La phrase exclamative


• La courbe intonatoire exclamative. Ce type de phrase est
marqué par une intonation non assertive et donc elle porte une
La phrase modalisation subjective: le locuteur souligne par son intonation
exclamative, qui marquée soit un segment de phrase, soit la phrase tout entière: Ton
renferme une
ami est formidable ! Monique est très intelligente !
La phrase exclamative présente toujours son contenu
modalité subjective propositionnel avec une modalité d'énoncé subséquente: Il pleut !!
Même si cette phrase n'a pas d'autre marqueur explicite que la
courbe mélodique exclamative, en réalité un tel énoncé réalise deux
communications:
– une communication propositionnelle (le contenu de la phrase
nucléaire): p = « Il pleut ».
– une communication modale: X croit/ estime/ apprécie que p
représente un fait surprenant /étonnant/ bon/
mauvais/extraordinaire/ inhabituel/ etc. La prédication modale
(aimer/ admirer /détester/ être surpris, étonné etc.) est donc
implicite: ce prédicat modal se découvre par l'interprétation du
sens particulier que prend l'énoncé dans la situation de
communication. Cette modalité affective/ émotive est toujours
liée à un sujet modal personnel X (qui, dans le discours direct,
s'identifie avec le sujet locuteur).
• La fonction discursive de la phrase exclamative est de marquer
la prise en charge par le sujet locuteur du contenu propositionnel, en
marquant ainsi son attitude (admiration, critique, amusement, ironie,
etc.), ses sentiments (surprise, colère, haine, révolte, dégoût, etc.),
son emprise affective:
Bon courage, mon gars ! Ô mon Dieu ! Oh oh, tu as une nouvelle
robe, Brigitte… Comme votre appétit de vivre était grand alors !
Mais comme il a l'air de s’intéresser au monde ! Comme elle avait
raison ! Espérons qu'il va marcher, votre logiciel ! [Houellebecq]
Quel plaisir, chère Madame! Quelle aubaine! Trop d'amabilités!
Assez ! C'était affreux à voir !
La phrase exclamative présente aussi un marqueur syntaxique, qui
L'interprétation
peut être: pronominal (quel et var.), adverbial (comme, trop, assez
contextuelle etc.), conjonctif (mais, donc, comment, etc.), interjectionnel (ah, oh, ô
d'une exclamation etc.). Parfois, plusieurs marqueurs se retrouvent dans un seul et
même énoncé exclamatif: Mais comment donc ! Comme c'est
dommage que vous ne soyez pas avec nous ! Et allez donc !
• Lien avec la situation de communication
Quand la modalité affective/ appréciative portée par la phrase
exclamative est implicite, elle est décodée dans la situation
d'énonciation:
Ce médicament est efficace.
(phrase assertive, courbe intonatoire neutre)
154
Tours de phrase. La phrase modalisée

Ce médicament est efficace !


(phrase exclamative, courbe intonatoire ascendante)
Sous le foyer modal peut se trouver n'importe quel constituant de phrase:
Mais ce médicament, ma foi, il est vraiment efficace !
Ah, ce médicament, comme il est efficace !
Ce médicament, il est si efficace ! (tellement efficace)
Qu'il est bon, ce médicament !
L'implicite • La forme souvent elliptique de la phrase exclamative
Les phrases exclamatives sont souvent elliptiques (réduites parfois à
dans
un seul élément), car la situation de communication permet
la phrase d'identifier l'élément sur lequel se focalise la modalité affective/
exclamative appréciative/ émotive qui justifie le contour exclamatif:
Formidable ! (phrase mono-membre, réduite au seul
Comment exprimer constituant de la prédication : formidable).
une phrase Le contenu propositionnel est sous-entendu dans la situation. La
exclamative phrase totale a donc la forme «Il est formidable que p». D'autres fois, la
phrase se réduit à un constituant autre que la prédication focalisée:
Une robe !!! Une poupée ! Un sapin ! Des crayons !
On sous-entend dans la situation : «Comment ?! Recevoir en cadeau
une robe pour moi, pour que je puisse la porter lors de la fête?!»
Dans ce cas, c'est la prédication sur laquelle porte la modalisation
qui reste implicite :
Quelle surprise ! Quel bonheur ! Comme je suis heureuse !
• Diverses marques formelles de l'exclamation :
– Mot introducteur: que, quel, combien, comme, ce que (très fam.)
mis en tête de phrase (qui se prononce avec l'intonation spécifique
de l'exclamation) :
Que c'est beau ! (très fam. : Ce que c'est beau !) Quelle chance!
Quel sot ! Combien grand ! Tiens, combien ça coûte ! Comme il
fait froid ! Quelle chaleur ! Quelle imprudence ! Quel courage !
Quel ne fut pas son étonnement !
– Les phrases à mot introducteur sont de type comparatif mais le
terme de comparaison est laissé sous-entendu, ce qui justifie la
courbe mélodique suspendue:
Comme il fait beau temps ! Comme c'est beau !!
– D'autres phrases elliptiques:
Si tu savais ! Vous l'aviez vu … ! (la continuation de la phrase
reste en suspens, la proposition principale étant sous-entendue).
Le pauvre ! La petite ! Pauvre imbécile !....
– L'ellipse exclamative prend parfois la forme d'un énoncé
interrogatif :
«Eh bien, m'exclamai-je, qu'est-ce qui t'en empêche ? …. Mais
oui ! fais-toi donc la main sur un jeune nègre!.....» [Houellebecq]
«Eh bien ?Ah ! s'exclama-t-elle presque avec triomphe, vous
voyez bien ! Dans ces conditions, comment est-ce que vous
voulez aimer la vie ? » [id.]
Divers types
Avec qui n'avait-elle pas parlé ! Où ne l'avait-elle pas cherché !
de Pourquoi n'est-il pas avec nous ! Que de problèmes avec cet
phrase exclamative enfant ! Que de monde à ce spectacle ! Avec quel courage il a
parlé ! Pourquoi ne m'avait-il pas attendu !
155
Tours de phrase. La phrase modalisée

L'interrogation à l'infinitif prend souvent un contour exclamatif:


Que lui dire ?! Que faire ?! Où aller !? Comment lui expliquer ?!
À qui s'adresser ?! Avec qui parler ! À qui faire confiance ! ?
– Le tour de phrase exclamatif avec préface modale explicite:
Dieu sait combien je souffre ! Dieu sait si cela m'a fait mal !
Comme tout le monde voit qu'elle est jolie ! Si vous pouviez y
penser ! Si nous avions su à temps ! (expression du regret)
– Le souhait, les vœux, l'imprécation prennent un contour exclamatif et se
construisent avec le subjonctif: Puisse-il réussir ! Que Dieu lui pardonne!
– L'ellipse du verbe est aussi courante pour ce type de phrase
(phrase nominale): Bon anniversaire ! Joyeuses fêtes de Noël !
Bonne année ! Bonne fin de semaine ! Bonne nuit ! À la vôtre !
– L'impératif au lieu de marquer l'injonctif (c'est-à-dire, un ordre, une
requête, une suggestion d'action, le locuteur étant un «causateur» ou
un «instigateur» d'action), s'emploie aussi dans des phrases
marquant les vœux: Dormez bien ! Faites comme vous voulez !
Soyez les bienvenus !
– L'énoncé exclamatif réunit souvent plusieurs marqueurs :
Eh bien ! voilà l'occasion d'une petite promenade à la
campagne… [Houellebecq]
Qu'ils continuent ! ça n'est pas cela qui pourra freiner le
développement de ma pensée !

7.3 La modalité logique de la phrase : la phrase affirmative/ négative


Toute phrase doit avoir un statut logique par rapport à sa prédication
Le statut logique
principale : Aujourd'hui il pleut. ↔ Aujourd'hui il ne pleut pas. La
de la phrase:
négation qui se rapporte à la prédication affecte la phrase tout
Affirmer / Nier entière (négation totale). La négation totale s'exprime par deux
éléments (ne… pas, morphème discontinu), le second élément
pouvant être pas, guère, rien, personne, jamais, nulle part,
nullement, ou un prédéterminant nominal : aucun, nul :
Ce soir, Luc n'a rien acheté. Luc n'acheta pas ses fruits. Ce
soir, Luc n'achète plus rien nulle part.
Un constituant de phrase mis en relief peut être nié à lui seul, sans
que la prédication totale de la phrase soit négative:
Ce n'est pas Paul qui a acheté ces fruits.

négation du sujet mis en relief + noyau prédicatif affirmatif


(négation partielle, incidente au sujet de la phrase)
Ce n'est pas au magasin du coin qu'il a acheté ces pêches.
(négation partielle, incidente au circonstant de lieu)
(En désignant un baromètre) – Ce n'est point une patraque,
c'est un instrument qui vous dit s'il fera beau demain ou s'il
pleuvra. (J.Verne) (négation incidente à l'attribut du sujet)
La négation (totale ou partielle) peut être du type restrictif:
 Attribut mis sous restriction:
Je ne puis détacher ma pensée de Julien. Au fond ce n'est
qu'un enfant plein de respect pour moi! [Stendhal] (qu'est-ce
qu'il est ? il n'est que ça)

156
Tours de phrase. La phrase modalisée

 Objet direct mis sous restriction:


L'ennui de la vie matrimoniale (...), ce n'est que les âmes
sèches, parmi les femmes, qu'il ne prédispose pas à l'amour.
[Stendhal] (L'ennui prédispose quelle personne à amour?)
 Objet indirect mis sous restriction:
Ce n'est qu'à moi qu'il adresse la parole. [Stendhal] (il adresse
La négation la parole à qui ?)
restrictive de la  Finalité ou circonstant de but, mis sous restriction:
prédication Ce n'est que pour flibuster votre bourse ou vous entraîner en
des démarches pernicieuses (qu'il vous mène au café, qu'il
vous invite ...) [Flaubert] (avec le sens: Dans quel but il vous y
invite ? – Pour profiter de votre argent et pour rien d'autre!)
Négation partielle restrictive du circonstant temporel:
Ce n'est que demain qu'il sera là. (Il aurait dû venir dès
aujourd'hui).
Avec un nominal précédé de l'adjectif pronominal tout, la restriction
porte sur la totalité exprimé en contexte:
Tous les fruits ne sont pas si bons ! (restriction sur la totalité des
fruits: parmi les fruits il y en a qui ne sont pas bons)
La restriction totale s'exprime par le double morphème de négation:
ne devant le pivot verbal (verbe plein ou auxiliaire) et que devant le
constituant de phrase restreint;
Luc ne mange qu'un peu de soupe.
Divers types Le restriction partielle dispose aussi de deux marqueurs: ne et que:
de Ce n'est qu'un peu de soupe que Luc a mangé hier.
négation restrictive Quand la restriction porte sur le prédicat, celui-ci s'exprime deux fois: par
un verbe générique (le verbe faire) qui portera la négation prédicative ne,
(du sujet, d'un objet
et par le prédicat lexical mis sous restriction, qui revêt le mode infinitif et
du verbe etc.) supporte la négation restrictive que: Luc n'a fait que dormir toute la
journée. Il n'avait fait qu'y jeter un coup d'œil.
D'autres moyens pour la négation restrictive sont: les adverbes
seulement, uniquement, les prédéterminants seul, unique ou
diverses paraphrases (moyens lexicaux):
Il a mangé seulement un peu de soupe. L'unique nourriture
pour lui aujourd'hui a été un peu de soupe. Il s'est limité
aujourd'hui à manger un peu de soupe.

Conclusion. La phrase a un statut typologique donné par la tournure


qu'elle revêt dans la situation de communication: un même contenu
propositionnel (p) peut apparaître dans divers tours de phrase :

p = « Marie dessine un bouquet de fleurs».


STATUT STATUT LOGIQUE DE LA PHRASE
ÉNONCIATIF
de la phrase Affirmatif Négatif

a) assertion a) Marie dessine un bouquet de fleurs. a) Marie ne dessine pas un bouquet de


fleurs, mais elle fait un portrait.
b)interrogation: b) – Est-ce que Marie dessine un bouquet b)–Marie, ne voudrait-elle pas nous
– totale Oui/Non: de fleurs ? dessiner un bouquet de fleurs ?
– Qui dessine un bouquet de fleurs ? – Pourquoi Marie ne veut dessiner rien ?
– partielles : Que dessine-t-elle Marie ? Qu'est-ce qu'elle ne veut pas dessiner,
Marie?

157
Tours de phrase. La phrase modalisée

c) injonction c) Marie, dessine s'il te plaît un bouquet c) Marie, ne dessine plus s'il te plaît
de fleurs ! toujours des bouquets de fleurs !
d) exclamation d) Comme c'est beau ce que Marie d) Ce n'est pas mal du tout ce que Marie
dessine ! dessine !

 Les clés du test d'autoévaluation


Corrigé de l'exercice 1: 1.Qui est-ce qui…? 2. Qu'est-ce que…? 3. Qu'est-ce qui…?
Qu'est-ce qui…? ? 4. Qu'est-ce que…? 5. Qui est-ce que…? 6. Qui est-ce qui…?
Corrigé de l'exercice 2: 1. Allocutif, non élocutif. 2. Délocutif avec stratégie Allocutive
(sans marques élocutives). 3. Fortement allocutif + élocutif. 4. Délocutif. 5. Allocutif avec
stratégie délocutive.
Corrigé de l'exercice 3: Quand devons-nous présenter notre projet de mémoire? La
présence au séminaire semestriel est-elle obligatoire ? Quels seront les professeurs qui
encadreront notre formation ?
Corrigé de l'exercice 4:
Interr. : Comment avez-vous réussi à envoyer ce courriel ? Pourquoi n'est-il pas
rentré ? Où peut-on dormir dans cette maison ?
Excl. : Comme c'est extraordinaire le Calvados, la Normandie ! Comme c'est beau
!
«Comme j'aurais aimé que nous nous fussions rencontrés à Cabourg !» [Ph.
Besson]
Interro-exclamatives : Où peut-on nous sentir mieux qu'en ce lieu ! ? Où sont les
jours d'antan !? Mais comment il pourra se débrouiller tout seul ?! Pourquoi tu ne
comprends jamais rien ? !

→ Test de contrôle 7

Ce test est administré à l'issue de l'unité d'apprentissage 7.


Pour réaliser ce test, il est conseillé de relire l'unité et de suivre attentivement les phrases
données à titre d'exemple pour chacune des modalités d'énonciation et des modalités
d'énoncé. Retenez les repères syntaxiques des principaux tours de phrase: assertif,
interrogatif, impératif, exclamatif et aussi les marqueurs de négation.

Ne manquez pas de transmettre ce test à votre tuteur. À cet effet, il convient de marquer
votre nom, votre prénom et votre adresse personnelle sur la première page de votre copie.
N'oubliez pas de mentionner aussi le numéro du test. Vous êtes supposés le recevoir
après correction, avec les commentaires de votre tuteur.
Bon travail !
Exercice 1 (1 point)
Analysez le statut énonciatif du fragment textuel suivant en relevant tous les marqueurs de
modalité:
«Pensez-vous réellement que j'aurais pu vous mentir, Vincent ? Si vous pensiez
cela, j'en éprouverais beaucoup de peine.» (P. Besson)
Exercice 2 (1 point)
Trouvez une phrase assertive affirmative, de modalisation neutre (sans marqueurs de
subjectivité) par laquelle vous reformulez le contenu du premier énoncé de l'exercice
précédent.
158
Tours de phrase. La phrase modalisée

Exercice 3 (3 points)
Écrivez trois phrases injonctives (impératives) dans lesquelles vous demandez à une
personne très proche (ami, votre mère ou votre frère etc.), a) de ne plus pleurer, b) de
vous rendre visite; c) d'aller en toute urgence répondre à un appel téléphonique.
Exercice 4 (1 point)
Mettez la ponctuation qui convient, et mentionnez le statut énonciatif de la phrase :
Retournes-y chez ta mère
Je me demande où avec qui vous avez parlé avant de venir ici
Pourquoi nous regarde-t-il avec ces yeux depuis un bon moment
Mais toi qu'est-ce que tu aurais répondu à ma place
Envoie tout de même un petit mot en guise de réponse à ton ami
Je t'ai souvent mis en garde
Exercice 5 (2 points)
Construisez des phrases contenant chacune l'un des douze marqueurs de modalité
d'énoncé suivants:
Il est obligatoire de+ INF;
Il est nécessaire (indispensable/ utile/ correct/ attendu/ convenable)
Il convient que…
Il vaut mieux de INF/ que SUBJ;
Force lui est/était de...
Exercice 6 (2 points)
Identifiez les marqueurs grammaticaux des modalités énonciatives dans les phrases
(i) Va-t'en ! Vas-y ! Allez-vous en! Partez ! Dehors ! Je vous ordonne de passer le Danube!
(ii) Qu'il parte tout de suite ! Il doit sortir immédiatement !
(iii) Il faut que je parte/ que tu partes/ qu'il parte. Nous devons quitter les lieux.
(iv) Il faut se coucher de bonne heure pour se réveiller tôt.

Références bibliographiques

• CHARAUDEAU, P., Grammaire du sens et de l'expression, chapitre 14 (La


modalisation et les modalités énonciatives), Hachette Éducation, 1992.
• RIEGEL, M., PELLAT, J.-C., RIOUL, R., Grammaire méthodique du français
chapitre XI (Les types de phrase), chapitre XX (L'Énonciation). Paris, Presses
Universitaires de France, 1994.
• C.A.P.E.S./ Agrégation: Lettres, Questions de grammaire pour les concours
(Section 4, chapitre 4), Ellipses, Paris. 2001.

159
De la phrase simple à la phrase complexe

Unité d'apprentissage 8

DE LA PHRASE SIMPLE À LA PHRASE COMPLEXE

Sommaire page

Les objectifs de l'unité d'apprentissage 8 160


8.1. La phrase complexe 161
8.1.1 Rapports syntaxiques dans la phrase complexe 161
8.1.2 Réalisation linguistique de la phrase complexe 163
8.1.3 Classification générale des phrases complexes 165
8.2. La phrase complexe réalisée par enchaînement syntaxique 167
8.2.1 La phrase complexe réalisée par juxtaposition 167
8.2.2 La phrase complexe réalisée par coordination 171
Test d'autoévaluation 174
8.3 La phrase complexe réalisée par enchâssement: la subordination 176
8.3.1 Proposition principale et proposition subordonnée 176
8.3.2 Critères de description des propositions subordonnées 176
8.3.3 Classification des propositions subordonnées 178
8.3.4 Subordonnées construites avec mot subordonnant 179
Les clés du test d'autoévaluation 180
Test de contrôle 8 181
Références bibliographiques 182

Les objectifs de l'unité d'apprentissage 8

Quand vous aurez parcouru ce chapitre et effectué les exercices, vous serez capables de:

• Reconnaître les types de relations syntaxiques dans la phrase complexe.


• Comprendre la fonction discursive de la juxtaposition, en opposition avec la
coordination et la subordination.
• Choisir les moyens linguistiques appropriés dans le contexte, pour construire des
subordonnées relatives, complétives, circonstancielles.
• Reconnaître la structure linguistique des subordonnées dont le verbe est à un mode
personnel et les mot de liaisons qui les introduisent: mot conjonctif, relatif,
interrogatif.

160
De la phrase simple à la phrase complexe

8.1. La phrase complexe

8.1.1 Rapports syntaxiques dans la phrase complexe

• La phrase complexe réunit dans une seule unité syntaxique


plusieurs phrases simples, avec ou sans mot de liaison.
Notions préalables Si les termes simples réunis dans une unité complexe sont sur
sur les types de le même plan syntaxique, c'est-à-dire si les propositions reliées sont
du même type, le rapport établi est de coordination; si les termes
rapports syntaxiques
reliés sont en rapport de dépendance syntaxique, on parle de la
dans la phrase subordination. Un troisième rapport syntaxique est la simple mise
ensemble de deux propositions autonomes juxtaposées, en rapport
de simple parataxe textuelle (un terme à côté de l'autre): Il pleut. Je
regarde par la fenêtre, ou de parataxe logique (le terme second lié
logiquement au premier): Il est huit heures. Dépêche-toi. Sur le plan
formel, ce rapport est très proche de la coordination.
• La présente unité d'apprentissage se propose de décrire et d'illustrer
À retenir: ces types de rapport syntaxique dans la phrase complexe:
L'examen préliminaire
– juxtaposition: Le temps passe; je demeure.
– coordination: Le temps passe et (mais) je demeure.
des phrases complexes – subordination: Bien que (même si) le temps passe, je demeure.
met en évidence une L'analyse de la spécificité de ces rapports s'appuie sur l'analyse des
grande diversité de échantillons de discours (attestés ou construits).
formes syntaxiques. • N'importe lequel serait le rapport (juxtaposition, coordination ou
subordination), toute phrase complexe réunit dans une seule unité
syntactico-discursive au moins deux noyaux prédicatifs, chacun avec
son verbe pivot.
• L'examen systématique des phrases complexes met à l'épreuve
plusieurs critères permettant d'en distinguer les sous-types: le critère
de l'e f f a c e m e n t de l'une des propositions (P), appartenant à la
Examen systématique
phrase complexe; le critère de la r é d u c t i o n de cette P à un
des formes simple constituant de phrase, lié à une prédication nucléaire; le
de la phrase complexe critère de la p r o n o m i n a l i s a t i o n .
• Le tableau qui suit permet un examen comparatif des principaux
types et sous-types de phrase complexe:

Principaux sous-types de phrase complexe : exemples Modèle


(schéma de symboles)
1. PH complexe juxtaposée → P1 , P2 , P3, P4, P5…...
À l'écrit, le lien entre les propositions est → (,) (.) (;).
À l'oral, le locuteur marque une pause (#) entre les propositions.
(i) a. Je suis resté immobile, je la regardai, je fus frappé par sa beauté.
(i) b. Il est huit heures. Vous devez partir à la gare.
2. PH complexe coordonnée → P1 conj. coord. P2
Le lien entre les propositions se fait par une conjonction de coordination.
(ii) a. Je suis resté immobile et je la regardai, donc je fus frappé
par sa beauté.
(ii) b. Un soir, une dame arriva et ma mère nous la présenta.
3. PH complexe à subordonnée facultative introduite par élément conjonctif → P mot subordonnant P'
Le lien entre les propositions se fait en général par: adverbe relatif,
conjonction ou locution conjonctive de subordination.

161
De la phrase simple à la phrase complexe

(iii) Quand une dame inconnue arriva, ma mère nous la présenta.


Après réduction de la subordonnée, on obtient une phrase simple:
(iii') À cette occasion, ma mère nous la présenta. (ou: alors, en ce
moment, ce soir, avant le repas….)
4. PH complexe à subordonnée facultative infinitive ou participiale → P(verbe fini), P' (verbe
Le lien entre les propositions se fait par une forme verbale non-autonome, infinitif ou participe)
(participe ou infinitif), dépendante d'une proposition principale:
(iv) a. Le jour se levant, le coq se mit à chanter. b. Après avoir
mangé, l'homme but un peu d'eau.
Après réduction de la subordonnée, on obtient une phrase simple:
(iv') a. Au lever du jour, le coq se mit à chanter. b. Après, l'homme
but un peu d'eau. L'homme but un peu d'eau après.
5. PH complexe à subordonnée relative explicative (facultative) ou → P (pronom relatif P')
restrictive (obligatoire)
Le lien entre les propositions: un pronom relatif ou verbe dépendant.
(v) a. Une dame arriva, que nous ne connaissions pas. b. Ma mère
nous présenta la personne qui était dans le compartiment voisin..
Phrase simple, après la réduction de la proposition subordonnée:
(v') a. Une dame arriva, (une) inconnue. b. Ma mère nous présenta la
personne du compartiment voisin.
6. PH complexe à subordonnée non facultative (complétive) → P que P'
Le lien entre les propositions se fait par la conjonction subordination que
(ou: à ce que, de ce que) ou par verbe dépendant (Infinitif).
(vi) a. J'ai appris que c'était tante Alice. b. Il est possible que Luc
vienne ce soir. c. Que Luc vienne ce soir, c'est possible (cela est
possible).
Phrase simple, après la réduction de la proposition subordonnée:
(vi') a. J'ai appris l'identité de cette dame. J'ai appris le nom de cette
dame. b. *Il est possible cela. c. C'est possible/ cela est possible.
(réduction de la proposition principale: b Luc vient ce soir, peut-
être. Peut-être, Luc vient-il ce soir.)
Phrase simple, avec pronominalisation de la proposition subordonnée:
(vi'') a. Je l'ai appris. (On me l'a appris). C'est possible.

Critère de l'effacement. Dans 1 et 2, chacune des propositions


intégrées dans la phrase réalise sa communication indépendamment
Le critère de
de l'autre: l'effacement de l'une n'affecte en principe ni le sens, ni
l'effacement montre l'unité grammaticalité de l'autre. Les phrases complexes qui
l'autonomie correspondent aux modèles 1 et 2 représentent une réunion dans la
des termes enchaînés communication de deux propositions autonomes. En revanche, dans
les autres phrases citées (de 3 à 6), l'effacement de l'une des
dans une phrase
propositions pourrait détruire la cohérence d'interprétative du
segment qui reste. Par exemple, si les phrases (iii) à (vi) ne
contiendraient que la proposition P', la communication resterait
inachevée, exigeant une principale:
(iii) Quand une dame inconnue arriva ….
(iv) a. Le jour se levant ….
(iv) b. Après avoir mangé …
(v) a…. que nous ne connaissions pas.
(v) b.…. qui était dans le compartiment voisin, dans le train.
(vi) a.…. que c'était tante Alice.
(vi) b.…. que Luc vienne ce soir.

162
De la phrase simple à la phrase complexe

La non autonomie
Ceci implique que dans le modèle 3 et les suivants, les deux
( = la dépendance) propositions réunies pour former une phrase complexe ont un
du terme enchâssé rapport hiérarchique, l'une étant dépendante ou subordonnée et
dans une phrase l'autre principale. Syntaxiquement P est autonome, car elle réalise
une communication indépendante, tandis que la proposition P' ne
matrice
jouit ni d'autonomie syntaxique (à cause de l'élément conjonctif ou de
(réduction à un simple la forme verbale non autonome), ni d'indépendance sur le plan
constituant de phrase) communicatif. L'effacement1 d'une subordonnée facultative n'affecte
en principe pas l'unité grammaticale et sémantique de la principale.
L'effacement de la proposition principale n'étant pas possible
dans les phrases complexes citées sous 3 –6, un autre critère sera
appliqué: le critère de la réduction de la proposition subordonnée :
– dans les phrases (iii) et (iv), P' se réduit à un groupe adverbial,
nominal ou adjectival; le résultat de cette substitution est donné sous
(iii', iv').
– dans les phrases (v) et (vi), P' se réduit à un déterminant du nom, du
verbe ou de l'adjectif; le résultat de cette substitution est donné sous (v')
et (vi').
– dans les phrases (vi), P' se pronominalise par un pronom clitique; le
résultat de cette substitution est donné sous (vi'').
Le test de la pronominalisation et de la réduction à un constituant
de phrase (adverbial, adjectival, nominal ou pronominal) montrent le
rapport hiérarchique entre les deux propositions: la subordonnée se
pronominalise ou se réduit à un constituant de phrase simple sur la
structure de la proposition principale (matrice) et non inversement.

8.1.2 Réalisation linguistique de la phrase complexe


Phrase complexe et langue écrite
La phrase complexe La phrase complexe est une unité syntaxique du langage écrit en
et les registres de particulier, car, à l'oral, le découpage de la parole est moins rigoureux et
les frontières de la phrase sont ponctuées par l'intonation. L'étude de la
langue:
phrase complexe relève donc surtout des conventions de l'écriture,
oral ou écrit même quand elle transcrit des messages oralisés.
Le rôle de la ponctuation
Les signes de ponctuation jouent un rôle important dans le
marquage de la phrase complexe, en particulier dans la phrase à
structure d'enchaînement : phrases qui sont présentées l'une après
La ponctuation dans
l'autre se prêtent à une interprétation globale:
la phrase complexe Le métro est arrivé. Montons. P1 # P2 (deux énoncés)
Montons, le métro est arrivé. P1 , P2 ( phrase complexe)
Dans ce dernier exemple, les deux phrases simples constitutives
sont intégrées dans une unité syntaxique, mais sans perdre leur
La cohésion
autonomie de structure interne et de sens.
Le degré de cohésion syntaxique dans la phrase complexe
grammaticale se
dépend de l'autonomie ou la dépendance grammaticale et/ ou
réalise par mot de interprétative; de la présence d'un mot de liaison; du rapport
liaison ou par forme hiérarchique entre les deux propositions. Le rapport de coordination
verbale dépendante
(faiblement cohésif) permet la permutation des constituants, leur

1
La permutation est un critère moins fort que l’effacement: en général, les modèles 1, 2, 3 permettent la
permutation des termes dans la phrase, mais le modèle 4 bloque tout changement d'ordre séquentiel.

163
De la phrase simple à la phrase complexe

effacement; le rapport de subordination (très cohésif) permet la


réduction d'une proposition subordonnée à un constituant et la
pronominalisation.
• Liens syntaxiques dans la phrase complexe sont: segments
conjonctifs, relatifs; rapport logique de subordination, marqué par le
mode verbal de dépendance.
• Le critère de la ponctuation n'est pas toujours suffisant pour séparer
deux propositions qui s'i n t è g r e n t l'une à l'autre par l'interprétation:
Je serais vous, j'hésiterais. Cette phrase complexe ne se limite pas à un
simple enchaînement de propositions autonomes, parce que
Phrase construite l'interprétation de l'un des termes de la phrase ne se fait pas
sur la structure indépendamment du sens de l'autre. Les composantes de la phrase (Je
d'un seul serais vous) et (j'hésiterais) sont imbriqués, l'un sur la structure
grammaticale et interprétative de l'autre. Cet enchâssement syntaxique
noyau prédicatif
devient explicite en reformulant la phrase: Si j'étais vous, j'hésiterais.
 (subordonnée + principale). La subordination s'établit donc parfois
sans aucun segment de liaison.
• Le rôle du mot de liaison. Le rapport logique entre des
propositions réunies dans une seule phrase est mieux compris par
l'auditeur si le lien logique est explicité par un mot de liaison
Enchâssement (conjonction ou autre marqueur de coordination ou de
subordination):
syntaxique:
Le métro est arrivé, donc nous sommes allés à la gare.
la subordonnée est Soit nous prenons le métro, soit nous allons à pied.
greffée sur une • Marqueurs de subordination: mots conjonctifs ou relatifs ou
position syntaxique à rapport de dépendance syntaxique. Dans des phrases juxtaposées du
type analysé déjà ci-dessus: Je serais vous, j'hésiterais. ou: Je l'aurais
l'intérieur de la
su, j'aurais agi (= Si j'avais su, j'aurais agi), la forme verbale elle-même
prédication de la est un marqueur de cohésion grammaticale, et remplit la même fonction
phrase matrice. qu'un mot de liaison (conjonction). Les formes verbales qui marquent
toujours une relation de dépendance syntaxique (=de subordination)
sont: formes non personnelles: infinitif; participe (présent, passé); le
gérondif; formes personnelles: le subjonctif (mode de la
dépendance syntaxique) et le conditionnel aussi, quand celui-ci est
associé à une parataxe (enchaînement simple de deux propositions):
Tu serais venu hier, tu n'aurais trouvé personne. L'aurait-il vu, il ne
l'aurait pas reconnu. il ne l'aurait L'inversion du sujet est aussi un
marqueur syntaxique de la dépendance, dans: Maman veut lire un
journal, soit-il celui d'hier.

164
De la phrase simple à la phrase complexe

8.1.3 Classification générale des phrases complexes


Analyse des données. Les phrases présentées ci-dessus
permettent de constater qu'elles ont une seule caractéristique
commune, à savoir la présence de plusieurs noyaux prédicatifs: une
phrase complexe est une structure syntaxique unitaire qui renferme
plus d'un seul pivot prédicatif. Nous analysons maintenant les traits
caractéristiques différenciateurs, afin de mettre en évidence les
termes de base d'une typologie de la phrase complexe. D'après le
degré de cohésion, on distingue:
– La phrase qui réunit deux ou plusieurs propositions dans une
structure de cohésion faible (modèle 1 et 2). Les propositions reliées
sont situées sur le même plan syntaxique, enchaînées l'une après
Phrases complexes l'autre, avec ou sans mot de liaison. Les propositions réunies dans la
obtenues par : phrase réalisent chacune une communication plus ou moins
autonome: P1 –– P2 ou P1 conj. coord. P2 .
• enchaînement
Le retranchement de l'une des composantes de la phrase
complexe n'affecte pas la complétude grammaticale de l'autre:
P 1 – P2
Ma mère a tout compris; aucun reproche n'a été exprimé.
Ma mère a tout compris et, donc, aucun reproche n'a été
• enchâssement exprimé. Aucun reproche n'a été exprimé, car ma mère avait
d'une subordonnée tout compris.
dans une matrice: – La phrase qui réunit dans une structure hiérarchisée deux
propositions, l'une étant une proposition principale et l'autre
P subordonnée. Illustration: phrases des modèles 3, 4 et 5a, ci-dessus.
La subordonnée est enchâssée sur la structure prédicative étendue
de la principale :
P (principale)
P'

P' (subordonnée facultative)


Le retranchement de la subordonnée n'affecte pas en principe la
complétude grammaticale de la principale:
Ma mère comprenant tout, aucun reproche n'a été exprimé.
Parce que ma mère a tout compris, aucun reproche n'a été
exprimé.
– La phrase complexe qui réunit dans une structure de cohésion
très forte deux propositions en rapport de dépendance syntaxique et
dont l'unité est impossible à défaire, la subordonnée occupant l'une
des positions syntaxiques de la structure minimale de la principale :
P (principale)

P' (subordonnée essentielle)


Illustration: phrases des modèles 5b et 6, ci-dessus. Ce type
d'enchâssement conduit à une solidarité syntaxique très forte
(indestructible): la subordonnée peut se pronominaliser, occupant
une position syntaxique auprès de la prédication minimale de la
principale. Le retranchement de la subordonnée affecte donc en
principe la complétude grammaticale de la principale: J'ai appris ….
(incomplet). Les phrases de cohésion forte réunissent dans une
165
De la phrase simple à la phrase complexe

Structures de
seule unité syntaxique une proposition subordonnée à un support
dépendance: prédicatif auprès duquel la subordonnée occupe diverses positions:
– subordonnée ayant le rôle de s u j e t dans la phrase nucléaire:
•subordonnée
Ce que j'avais à lui reprocher était facile à comprendre.
– subordonnée ayant le rôle d'o b j e t d i r e c t dans la phrase
facultative nucléaire: Je voulais qu'elle me parle.
(circonstancielle, – subordonnée ayant le rôle d'o b j e t i n d i r e c t dans la phrase
relative explicative) nucléaire: Nous pensons partir demain.
– subordonnée ayant le rôle d'a t t r i b u t dans la phrase nucléaire:
Elle était comme je me l'imaginais.
•subordonnée – subordonnée restrictive ayant un antécédent nominal (nom ou
nécessaire pronom) dans la phrase principale:
(complétive, relative Les mères qui comprennent leurs enfants sont de bonnes
éducatrices. (proposition ayant le rôle d'adjectif épithète ou de
restrictive)
complément du nom restrictifs).
Conclusion. Les structures grammaticales d'enchâssement réalisent
une phrase à subordination de cohésion relativement forte ou très forte,
(indestructible). Il existe donc plusieurs degrés de cohésion
syntaxique qui ont été mis en évidence dans le tableau ci-dessus:
1. cohésion syntaxique faible, non marquée  juxtaposition (=
l'asyndète dans la rhétorique classique);
2. cohésion faible entre des termes équivalents, marquée par un
élément de jonction  coordination;
3. cohésion (a. forte b. très forte), réalisée par subordination =
l'imbrication du terme subordonnant sur la structure syntaxique du
terme régissant.

Types de rapports syntaxiques dans la phrase complexe


Autonomie syntaxique Dépendance syntaxique
Enchaînement Enchâssement

PH complexe par: PH complexe par: PH complexe par:


juxtaposition coordination subordination

P1 , P2 (autonomes) P1 conj. coord. .P2 a) Principale autonome + subordonnée


(coordonnées) circonstancielle ou relative explicative/ appositive
Cas particuliers:
a) l'incise de discours b) Principale de structure incomplète + subordonnée
direct déterminative (subordination à l'intérieur d'un
b) la prop. incidente constituant de la PH simple minimale:
Terme recteur (N, V, Adj) + Complétive ou Relative
restrictive
Jonction: Jonction: Jonction:
sans mot de liaison avec mot de liaison sans mot de liaison

166
De la phrase simple à la phrase complexe

8.2. La phrase complexe réalisée par enchaînement syntaxique


Les deux types d'enchaînement syntaxique, la juxtaposition et la
coordination, sont considérés comme illustrant le phénomène de
parataxe, car les grammaires modernes réservent le terme parallèle,
hypotaxe, à la subordination. Ces acceptions sont conformes au
sens en vieux grec des préfixes: gr. para- "à côté de"; gr.hypo- "au-
dessous" (chez les auteurs classiques, seulement la juxtaposition
était un procédé «paratactique», un rapport établi sans mot qui
spécifie le lien).
8.2.1 La phrase réalisée par juxtaposition
La juxtaposition établit une relation entre deux phrases simples entre
lesquelles il n'y a qu'une simple pause à l'oral ou une virgule, point-
virgule ou deux points à l'écrit. La juxtaposition se fait sans qu'un mot
de liaison indique la nature du rapport entre les termes reliés.
La juxtaposition est une relation qui s'établit entre deux
propositions «entre lesquelles le lien de dépendance n'est qu'implicite, la
courbe mélodique commune dispensant de l'usage d'un outil de
coordination ou de subordination» (définition d'après le Trésor de la
langue française).
Rapports Exemples attestés (dans Stendhal):
Cette action bouleversa l'âme de cette pauvre femme; elle y vit
entre
la manifestation de son sort.
les phrases Vous nous quitterez, vous partirez ?
juxtaposées Cas particuliers de juxtaposition:
►la proposition incise:
«Que m'arriverait-il», se dit-elle.
«Mais songes-tu», lui répétait-il…
►la proposition incidente:
«(…) Je t'associe, ou, si tu l'aimes mieux, que je te donne
quatre mille francs par an…»
La c o h é s i o n dans une phrase réalisée par juxtaposition s'établit par
des liens de sens, par des liens dans l'ordre des choses et par des liens
grammaticaux.
• Liens sémantiques. Le rapport de sens entre les deux phrases
juxtaposées fait l'objet d'une «recherche» interprétative de la part du
récepteur du message: il doit supposer l'intention communicative de
Fonctions l'énonciateur, en cherchant à «intégrer» le contenu de la proposition
textuelles juxtaposée avec le contenu de la phrase initiale:
de la Une pluie monotone ne cesse de tomber, le feu crépite dans la
cheminée, la jeune fille est plongée dans la lecture d'un roman
juxtaposition
intéressant.
Ces phrases juxtaposées s'interprètent en respectant l'exigence de
cohérence textuelle : on considère que l'état décrit dans la première
proposition est relié aux situations décrites dans les propositions
suivantes, juxtaposées:
pluie – feu – jeune fille qui lit.
Ce lien interprétatif est toujours implicite dans la lecture d'une phrase à
juxtaposition, quand l'intégration sémantique de ses propositions
composantes se réalise même sans aucun mot de relation.

167
De la phrase simple à la phrase complexe

La lecture des phrases juxtaposées est plus difficile que la lecture


des phrases coordonnées ou subordonnées, car la juxtaposition laisse
entièrement au destinataire du message la tâche de découvrir seul les
rapports logiques entre les contenus qui s'enchaînent dans la phrase.
• Liens pragmatiques
La connaissance du monde est aussi impliquée:
La juxtaposition, Il y avait de la lumière, une veilleuse brûlait sous la cheminée; il
un phénomène ne s'attendait pas à ce nouveau malheur. [Stendhal] (P1 – P2 – P3)
syntaxique propre à la La juxtaposition des trois propositions conduit à une interprétation
communication orale cohérente, à condition seulement que le lecteur ait pu se représenter
correctement la situation: la source de la lumière dont il est question
ou aux séquences
dans la première proposition est expliquée dans la deuxième
textuelles proposition (il y avait une lumière; d'où venait-elle? de la veilleuse
à thème récurrent brûlant sous la cheminée). Cette lumière dans le couloir représente
le malheur dont il est question dans la troisième proposition. Ce lien
pragmatique assure la cohérence de la phrase:
Veilleuse  donc: lumière dans le couloir;  donc: un vrai
malheur pour celui qui voulait traverser le couloir sans être vu.
L'interprétation d'une série de propositions juxtaposées ne serait pas
possible en l'absence d'une certaine compréhension du monde.
• Liens discursifs (la cohésion textuelle)
Les personnes qui parlent construisent leur discours en mettant à
Suite de prédications l'épreuve toutes les stratégies de cohérence discursive. C'est toujours
juxtaposées un aspect global du sens qui permet la compréhension des séquences
de phrases juxtaposées et cet aspect est donné par le choix des
– séquence descriptive; thèmes sur lesquels portent les différents types de discours.
La juxtaposition s'emploie souvent dans le texte descriptif ou
– séquence narrative ; explicatif, dans le texte procédural (qui donne des consignes à
respecter, comme par exemple: des recettes de cuisine, des modes
– séquence d'instructions;
d'emploi etc.), dans le texte narratif, dans le texte argumentatif.
– séquence d'arguments Voici des exemples de proposition P2 juxtaposée à une phrase de
début, P1, par l'intégration de son interprétation au sens du segment
etc. premier, sur la base de la cohésion thématique du discours:
• Séquence textuelle descriptive. Le rapport implicite établi entre les
phrases simples est l'appartenance des prédications juxtaposées à
un même thème de discours: les prédications descriptives se
rapportent à l'objet décrit dans son ensemble: paysage, personne/
portrait, autre catégorie thématique.
«Quelques regards trop vifs perçaient ça et là, éclipsaient les
lumières, le feu des diamants, animaient encore des cœurs
trop ardents.» (Balzac, description du va-et-vient d'un salon
mondain) (même sujet grammatical, même thème de
référence: le salon dans lequel ont lieu les actions décrites).
«Ce visage noir était anguleux et creusé dans tous les sens. Le
menton était creux; les tempes étaient creuses ; les yeux
Prédicats juxtaposés:
étaient perdus en de jaunâtres orbites.» (Balzac, portrait de
une action globale personnage) (l'objet global, visage, est détaillé, trait par trait).
est analysée en • Séquence d'instructions, expliquant comment réaliser une action:
plusieurs Travailler la pâte; diviser la pâte en deux; rouler la pâte; former
deux disques de pâte; déposer le premier sur une plaque;
actions partielles
étendre une couche de confiture sur le premier disque;
168
De la phrase simple à la phrase complexe

recouvrir avec le deuxième cercle de pâte; badigeonner à l'œuf


battu; cuire au four 20 minutes. (Recette de cuisine)
Dans cette séquence textuelle procédurale, chaque proposition
juxtaposée exprime une opération. Les activités décrites s'ensuivent
dans l’ordre chronologique: D'ABORD travailler la pâte, ENSUITE
diviser…etc.
• Séquence textuelle narrative:
Daniel Lemaire naquit à Lyon, passa son enfance à Autun,
partit pour le lycée à Aix-en-Provence, déménagea avec ses
parents à Toulouse, monta à Paris faire ses études en droit.
(récit de vie)
Dans la séquence textuelle narrative, chaque proposition juxtaposée
exprime une étape du parcours du personnage: l'unité thématique
est donnée par l'unité de la scène racontée ou du sommaire narratif,
spécifiques à ce type de texte.
• Séquence argumentative :
(P1) Il avait plu toute la nuit, (P2) l'autoroute est moins sûre
sous cette pluie, (P3) conduire une auto dans ces
circonstances est assez risqué, (P4) Luc devait faire attention.
Quelques
P1 ⊃ P2 ⊃ P3 ⊃ P4 ( le signe ⊃ signifie une relation
d'implication)
caractéristiques
(pluie → autoroute glissante → danger d'accident en route →
discursives et attention requise)
grammaticales Dans cette séquence textuelle argumentative chaque proposition
de la juxtaposée apporte une explication, une justification, une pièce à
ajouter au raisonnement présenté. L'enchaînement de ces quatre
juxtaposition
propositions réunies dans la phrase complexe se fait dans l'ordre de
l'implication: le contenu de P1 implique la réalisation du fait décrit dans
P2 , dont le contenu représente une prémisse pour P3, qui, à son, tour,
sert de prémisse à P4. La phrase par juxtaposition peut toujours se
transcrire dans une rédaction plus claire :
Par suite du fait qu'il avait plu toute la nuit, l'autoroute est
devenue moins sûre, et donc il est assez risqué de conduire
une auto dans ces circonstances; voilà pourquoi Luc devait
faire attention.
Les conjonctions et les adverbes à rôle d'organisateurs textuels
facilitent l'interprétation.
Liens grammaticaux (la cohésion grammaticale) :
• Liens anaphoriques. Outre les liens de sens sur la base desquels
s'établit la cohérence textuelle d'une phrase formée par juxtaposition,
il y a aussi des moyens linguistiques spécialisés pour marquer la
cohésion grammaticale.
– La reprise d'un terme référentiel par une anaphore :
L'anaphore (gr. "la reprise") d'une expression référentielle se fait par
des pronoms personnels, par des pronoms ou adjectifs pronominaux
démonstratifs, possessifs, relatifs, indéfinis:
(P1) Cette action bouleversa l'âme de cette pauvre femme;
(P2) elle y vit la manifestation de son sort.
La seconde phrase se rapporte aux mêmes réalités que la première :
(P1) (P2)
cette pauvre femme ---------- elle (=cette pauvre femme)
169
De la phrase simple à la phrase complexe

cette action --------------------- elle y vit (= voir dans cette action)


• Sujet coréférentiel. Les phrases simples juxtaposées se
rapportent souvent à un même sujet grammatical ou logique; le sujet
coréférentiel n'a pas besoin d'être répété devant tous les prédicats
La cohésion (Daniel Lemaire naquit, passa, partit etc. – phénomène rhétorique
grammaticale d'a d j o n c t i o n ).
dans la phrase
Il en est autrement d'une séquence d'action: la liaison entre les
prédications procédurales (consignes de réalisation d'une action) se
réalisée par fait en rapportant chaque action ponctuelle à l'action globale. Si le
juxtaposition prédicat est à l'impératif, le sujet ne s'exprime pas, le sujet implicite
est le destinataire même du message (tu ou vous):
Prenez le métro deux stations, descendez à la Place Romaine,
sortez, allez vers la gauche, tournez…etc. (une seule action,
décomposée, en une suite d'actions dans leur ordre
d'exécution).
L'infinitif aussi, quand il est employé avec la valeur d'un impératif,
met en jeu le même mécanisme de la juxtaposition:
Agiter le flacon, renverser-le, tourner à droite.
(Ce n'est pas le sujet qui est décrit, le destinataire implicite du texte,
mais les composantes d'une action).
Conclusion. La juxtaposition est un phénomène caractéristique de
l'oralité. La lecture des phrases juxtaposées est plus difficile que la
lecture des phrases coordonnées ou subordonnées, car la
juxtaposition laisse entièrement au destinataire du message la tâche
de découvrir seul les rapports logiques entre les contenus qui
s'enchaînent dans la phrase.

Exercice d'entraînement
● Soulignez les pivots prédicatifs des propositions juxtaposées et donnez-leur un numéro
d'ordre: 1, 2…
«Leur visage est une âme passionnée, il étincelle; chaque trait y brille d'intelligence; chaque
pore possède un éclat particulier, surtout aux lumières. Leurs yeux séduisants attirent,
refusent, parlent ou se taisent ; leur démarche est innocemment savante ; leur voix déploie les
mélodieuses richesses des tons les plus coquettement doux et tendres» [Balzac].
● Trouvez les règles qui ont permis de mettre ensemble les propositions juxtaposées
(notez seulement le no d'ordre des propositions reliées, ex. 1 , 2 ou 4 ; 7) :

Une proposition n se juxtapose à une proposition m antérieure, parce que:


– Règle a) : n se rapporte au même sujet que m:
…………………………………………………………………………………………
– Règle b) : n est une reformulation explicative de m :
…………………………………………………………………………………………
– Règle c) : n apporte un détail de l'aspect du monde décrit par m:
…………………………………………………………………………………………

170
De la phrase simple à la phrase complexe

8.2.2 La phrase complexe réalisée par coordination


• Réalisation linguistique de la phrase par coordination
Les principales La coordination se réalise à l'aide d'une conjonction, d'un adverbe ou
d'une locution adverbiale de coordination. Les sept conjonctions
conjonctions
simples à rôle coordonnant sont: et, ou, ni, mais, donc, car, or.
de
coordination • Liens logiques qui s'établissent entre les termes coordonnés
simples – simple addition, liaison (rapport de coordination copulative): et, ni
sont des conjonctions purement copulatives; puis, alors, ainsi, aussi,
bien plus, ainsi que, de même que réalisent la coordination
copulative en ajoutant diverses nuances de sens (comparaison,
succession temporelle, cumul);
– rapport adversatif ou d'opposition: mais, au contraire, cependant,
toutefois, néanmoins, en revanche, par contre;
Rapports marqués – explication, argumentation, raisonnement justificatif (proche du
par les conjonctions rapport causal, mais distinct2): car, en effet, effectivement,
d'ailleurs etc.;
et les adverbes
– disjonction: ou, soit…. soit, tantôt… tantôt, ou bien (alternative);
de coordination – conséquence, conclusion: donc, aussi, partant, alors, ainsi, par
conséquent, en conséquence, conséquemment (rare), en définitive,
au reste (langue littéraire), du reste (courant), sinon;
– transition d'un contenu général à une illustration particulière,
introduisant un argument: or.

• Termes reliés par un rapport syntaxique de coordination


Les termes d'une phrase complexe réalisée par coordination sont
des unités se trouvant sur le même plan:
– propositions autonomes (P+P):
«Il fut gauche et s'exagéra sa gaucherie.» [Stendhal]
«Elle n'y songeait pas, mais avait été fort contente de voir les
habitants de la ville (…).». [id.]
– propositions dépendantes (p+p) (dans ce cas, les propositions
coordonnées doivent remplir la même fonction dans la phrase
matrice):
«Mais songes-tu, lui répétait-il… que je t'associe, ou, si tu
l'aimes mieux, que je te donne quatre mille francs par an?»
Coordination (deux subordonnées du même type syntaxique: complétives du
entre deux même verbe, songer )
constituants – constituants du même type (c+c), à l'intérieur de la phrase
simple: deux sujets, attributs, déterminants du nom, compléments
d'une phrase simple
d'objet ou circonstants du même type peuvent être reliés par des
conjonctions de coordination.
• compléments du nom coordonnés:
C'est un homme sans foi, sans honneur et sans âme.
• compléments d'objet direct coordonnés:
«Il craignait un remords affreux et un ridicule éternel»

2
Voir l'unité d'apprentissage 10, consacrée à la proposition subordonnée de cause.

171
De la phrase simple à la phrase complexe

Je n'ai plus ni bien, ni retrait, ni père, ni mère, ni patrie assurée.


[apud Fontanier]
«Tout cela trompa le sous-préfet, mais non Mme Derville»
• circonstants coordonnés :
«Il trouva de sa dignité de rentrer exprès au grand jour et avec
imprudence».
Afin de prouver que la coordination s'établit entre deux propositions
(au niveau de la phrase complexe), et non à l'intérieur de la phrase
simple, il faut donc mettre en relief les prédicats coordonnés:
• prédicats coordonnés = coordination de propositions :
Il neige et il gèle. L'avion devrait décoller, mais il se met en
Coordination
retard. Luc prépare lui-même son déjeuner, car il vit seul.
entre deux termes
– la coordination peut se faire entre un constituant de phrase et
mixtes: une subordonnée ayant la même fonction (c+ p):
un constituant de Nous avons interrompu le travail à cause de la chaleur (c) et
phrase et une parce qu'il était tard (p). (Circ. cause + Prop. cause)
«Un vieillard de quatre-vingts ans, mais qui devait à l'air vif de
subordonnée ayant
ces montagnes une santé et un caractère de fer » (proposition
la même fonction relative coordonnée avec un complément du nom, les deux se
rapportant au même nominal antécédent, N = un vieillard,)
À l'intérieur d'une phrase nucléaire, deux termes peuvent être
coordonnés sans qu'aucun marqueur n'explicite leur rapport:
«En l'écoutant, elle admirait son génie, sa beauté.» (deux
objets directs coordonnés, sans mot de coordination)
Les constituants de phrase reliés par simple virgule (pause à l'oral)
sont, soit des termes coordonnés (ex. deux objets directs, un sujet
multiple, des épithètes coordonnées, etc.), soit un terme appositif
subordonné à son terme recteur (= régissant, dominant). Il n'y a pas de
juxtaposition entre constituants de phrase, car au niveau de la phrase
nucléaire toutes les positions syntaxiques s'interprètent par rapport au
pivot prédicatif et donc à la structure argumentative du verbe.

Exercice d'entraînement
● Soulignez les conjonctions de coordination :
Mon petit frère sortait de sa cachette furtivement et apparaissait au milieu de mes
invités. Or, nous avions toujours du travail à faire et donc le pauvre petit se sentait
ignoré. Mais il ne se retirait pas dans sa chambre et se mettait à danser autour de
nous. Ou bien il se laissait cajoler par l'une de mes collègues qui n'avait ni famille ni
personne plus proche et donc se montrait toujours très tendre et attentive, et
chantait avec lui. Ma mère nous apportait des cafés; puis, en le prenant dans ses
bras, elle le portait dans sa chambre. Il disparaissait emmené, ou, pour mieux dire,
emporté par elle. Papa était là, mais il n'avait pas l'air de se faire obéir. Mon frère
se conduit comme un enfant gâté, dont les parents écoutent les caprices ou
redoutent la mutinerie.
● Identifiez les termes reliés par une conjonction de coordination:
– deux propositions (p + p)
– deux constituants de phrase du même type (c+ c);
– une proposition et un constituant de phrase, les deux du même type (p + c).
conj._______………………… conj._______…………….… conj._______…………………

172
De la phrase simple à la phrase complexe

conj._______………………… conj._______………….…… conj._______…………………


conj._______………………… conj._______………….…… conj._______…………………
conj._______………………… conj._______……….……… conj._______…………………
conj._______………………… conj._______……………………
(Les conjonctions à formant multiple comme: et puis, et alors, ni…ni, etc. s'analysent
comme une seule unité).

Emploi des principales conjonctions de coordination


►Les conjonctions car et or relient seulement des propositions
autonomes (P+ P), tandis que les conjonctions et, ni, ou, donc, mais
coordonnent aussi des constituants de la phrase simple: Jean et moi;
un livre ou un crayon; devant ou derrière; elle n'est ni belle, ni
laide…etc. représentent des termes coordonnés qui sont des
constituants de phrase (dans la phrase nucléaire).
►La phrase complexe qui contient la conjonction or est divisée en
Conjonctions de deux parties parfois indépendantes, car la conjonction ouvre une
coordination nouvelle argumentation; souvent, les propositions coordonnées par
/ vs/ or sont séparées par point-virgule ou même par point. Quand la
conjonction or apparaît en début de phrase, elle marque le lien
adverbes utilisés
logique avec un contenu exprimé antérieurement:
dans la coordination «Il devait se rendre immédiatement à la ferme (…). Or il y a, de
Tostes aux Bertaux, six bonnes lieues de traverse.» [Flaubert]
►À l'inventaire des conjonctions proprement dites, il faut ajouter un
nombre d'autres organisateurs textuels de coordination: des
adverbes (toutefois, tantôt, aussi, alors, effectivement, cependant
etc.) et des locutions adverbiales (par conséquent, par ailleurs, en
outre, en conséquence…), qui sont utilisés en guise d'éléments
introducteurs d'une proposition coordonnée du point de vue du sens,
mais indépendante du point de vue grammatical:
P1 et alors P2 = phrase complexe coordonnée:
Il ouvrit la porte et alors il aperçut un étranger.
P1 ; alors P2 = deux phrases indépendantes juxtaposées:
Il ouvrit la porte; alors il aperçut un étranger.
P1 . Alors P2 = deux phrases indépendantes:
Il s'approcha et ouvrit la porte. Alors il aperçut un
étranger. (relation textuelle, non syntaxique)
On observe que le rapport de coordination passe souvent au-delà
des frontières de la phrase (marquées par écrit par un point ou par
un autre signe de ponctuation «forte») ce qui amène certains mots
Rapports marqués
par: coordonnants à ouvrir parfois un nouvel énoncé (et, donc, or, mais
ET, MAIS, DONC, ont aussi une fonction "discursive", en début de phrase, non
seulement "connective").
OR, PARTANT, SOIT,
► Un seul et même élément conjonctif peut avoir différents sens
SINON, par les contextuels: la situation de communication seule peut permettre à
adverbes de chaque fois de choisir l'interprétation qui convient.
coordination: ►Par exemple, le sens adversatif de la conjonction mais ne s'actualise
pas dans tous les contextes. Cette conjonction apparaît aussi en début
PUIS, ALORS
d'énoncé (phrase indépendante), avec des fonctions énonciatives, sans
marquer la coordination:

173
De la phrase simple à la phrase complexe

ou les locutions: Mais non...! (=je refuse de croire ! C'est une énormité !)
Non, mais ! (franchement ! je ne m'attendais pas à cela)
EN EFFET,
Mais, dites... (puisqu'on en est là, peux-tu me dire …?)
AU Mais, oui, c'est bien ça ce qu'il voulait de toi ! (confirmation de
CONTRAIRE, l'hypothèse de l'interlocuteur) etc.
AU MOINS, On pourrait considérer qu'il y a plusieurs vocables mais: outre la
conjonction adversative, il y a aussi des "mais" discursifs, comme dans
DU RESTE etc.
les exemples cités ci-dessus. Il en est de même avec d'autres
a) liaison conjonctions simples: et, or, donc, ou, qui ont une multitude de valeurs
syntaxique de discours. Par exemple, donc, une «conjonction qui amène la
b) articulateurs conséquence, la conclusion de ce qui précède», se met après une
phrase initiale: P1, donc P2, tandis que le donc qui sert «d'enclencheur
de discours
de reprise de conversation» se met dans un énoncé nouveau (Nous
disions donc que….). Ce donc n'est pas un connecteur de segments
textuels, mais un mot du discours, marquant la «transition pour revenir à
un sujet, après une digression» : «– Donc, il est vrai, reprit le vieillard».
«– Papa, viens donc ! dit-elle.» ;«Parlez donc !», en début d'une
intervention verbale, amorçant une nouvelle séquence d'échange verbal.

Test d'autoévaluation
Pour bien gérer ce test, il est indispensable que vous ayez déjà parcouru les explications
et les analyses données dans l'unité d'apprentissage 8. Vérifiez vos solutions aux
exercices en consultant la rubrique Clés du test d'autoévaluation.

Exercice 1
Ajoutez des phrases en rapport de juxtaposition, compte tenu de la ponctuation indiquée:
L'orage approchait ; ………………………………………………………………….
Mange ta soupe, …………………………………………………………………….
Il fallait rentrer : ……………………………………………………………………….
Il nous a refusé : ………………………………………………………………………
La pluie avait cessé, ………………………………………………………………...
Dépêche-toi, …………………………………………………………………………..
Exercice 2
Reliez les phrases simples par des conjonctions de coordination convenables :

1. Tu n'as rien dit; tu es d'accord avec lui.


……………………………………………………………………………………………
2. Marie doit couver une grippe; elle s'est absentée aujourd'hui.
…………………………………………………………………………………………………
3. Marie passa tout près de moi, elle ne me salua pas.
…………………………………………………………………………………………………
4. Nous étions au mois d'avril; les arbres étaient en fleurs.
…………………………………………………………………………………………………
5. Ce soir je prends le dîner en ville ; je me contente d'un petit plat sans prétention
que je préparai moi-même à la maison.
…………………………………………………………………………………………………
…………………………………………………………………………………………………

174
De la phrase simple à la phrase complexe

Exercice 3
Justifiez le recours à la juxtaposition dans les phrases suivantes et dites quel est le rapport
de sens sous-entendu entre les propositions constitutives :
1. «La porte s'ouvrit, le jeune homme entra comme un chat, ses parents se turent,
se regardèrent.»
……………………………………………………………………………………………
2. «J'entrai dans le salon, Massard me tendit la main, elle était moite.»
…………………………………………………………………………………………….
3. «Le dîner se termina; nous descendîmes dans le jardin; des hannetons
venaient se cogner contre la soie de l'abat-jour.» (Paul
Nizan)
………………………………………………………………………………………………
Exercice 4
Complétez par l'une des conjonctions: et, donc, or, ou, car,
1. L'enfant était impatient de revoir enfin son père après une si longue séparation; ……….
quand il arriva, il ne le regarda même pas.
2. Mon ami n'avait pas fait son apparition ….…….je commençais à m'inquiéter.
3. Il se mettait en retard, ………. notre attente s'annonçait assez longue.
4. Vu le retard imprévu du train, nous devons renoncer au voyage ….….. nous décider à
aller dans la salle d'attente.
5. Le rendez-vous devait avoir lieu à quatorze heures. ………. il était déjà quinze heures
et il n'avait pas fait son apparition.
6. Je mourais de faim, …..…. je n'avais plus rien mangé depuis six heures
7. Je n'avais plus rien mangé depuis six heures, ….….. je mourais de faim.

175
De la phrase simple à la phrase complexe

8.3 La phrase complexe réalisée par enchâssement: la subordination

8.3.1 Proposition principale et proposition subordonnée


Chaque proposition subordonnée dans la phrase complexe permet
de réduire son pivot verbal et de se réaliser par un constituant de
Enchâssement phrase: S, ATTR, OD, OI, OPrép, fonctions syntaxiques dans la
d'une subordonnée phrase simple, auxquelles il faut ajouter les constituants de phrase à
dans une phrase rôle de "caractérisants": l'épithète et le circonstant. Symétriquement,
tous les constituants de phrase peuvent se réaliser en principe sous
matrice
forme de proposition subordonnée:
Jean est devant la porte. → Qui tu sais est devant la porte. (S)
Jean est devenu ingénieur. → Jean est devenu ce qu'il a voulu
être. (ATTR)
Jean mange une glace. → Jean mange ce qu'il veut. (OD)
Jean vient ce soir. → Jean vient quand tu l'appelles. (Circ. temps)
Rapports L'homme courageux (épithète) gagne la lutte. L'homme qui est
de dépendance courageux gagne la lutte (subordonnée relative).
dans La proposition qui intègre dans sa structure une subordonnée
s'appelle proposition "mère" ou structure matrice.
la PH complexe
La proposition subordonnée est en rapport de dépendance
réalisée par syntaxique par rapport à la proposition matrice:
enchâssement
(P = Phrase matrice; P', P'' = Propositions enchâssées)

P = L'homme P': qui est courageux réussit à P": conserver sa dignité.

Le prédicat de la proposition principale (réussit) est le prédicat pivot de


toute la phrase nucléaire. Les prédicats des propositions subordonnées
sont hiérarchiquement dépendants de ce prédicat principal :
J'espère que mon père arrivera à l'heure. (espérer quoi ?
arriver….: espérer = prédicat régissant, arriver = prédicat
dépendant)
La fonction d'objet direct de la proposition subordonnée que mon
père arrivera à l'heure est déterminée par sa position syntaxique
dans la phrase matrice: J'espère …(que P) = complétive directe.

8.3.2 Critères de description des propositions subordonnées


Phrases complexes réalisées par subordination:
La subordination
– phrase à subordonnée (s) circonstancielle(s):
dans la phrase «En ouvrant sa porte, il était tellement tremblant que ses
complexe genoux se dérobaient sous lui»
(deux subordonnées circonstancielles et une principale)
– phrase à subordonnée complétive en fonction de sujet,
complément d'objet, attribut:
«Elle s'attendait à chaque moment qu'il allait s'expliquer. »
(complétive indirecte, auprès du verbe s'attendre. )
– phrase à subordonnée relative auprès d'un nom ou d'un pronom:

176
De la phrase simple à la phrase complexe

«L'action de savoir par cœur la Bible(…) avait frappé les


habitants.» (proposition relative réduite à l'infinitif auprès du
nom l'action).
Les propositions subordonnées se classifient d'après: a) la forme
modale de leur pivot verbal ; b) la fonction remplie dans la matrice; c) la
nature du constituant de phrase qui pourrait s'y substituer; d) le type
sémantique, c'est-à-dire d'après le type d'information que la
subordonnée apporte à la phrase complexe tout entière; e) le type du
mot introducteur.
Types syntaxiques de subordonnées d'après la forme de leur
pivot verbal
– subordonnées à verbe fini (indicatif, conditionnel, subjonctif)
– subordonnées réduites :
• propositions infinitives
• participiales.

Subordonnées à • Le choix du mode dans une proposition subordonnée:


verbe fini – (mode non personnel) proposition infinitive, participiale:
/vs/ J'ai vu Marie traverser la rue.
Nous félicitons les piétons s'arrêtant au feu rouge.
subordonnées
– verbe à un mode personnel :
réduites ►pour représenter une situation réelle ou éventuelle, on choisit
entre: indicatif/ conditionnel . Exemples:
(indicatif) Je crois que cet homme a vécu une désillusion au
sujet de son fils. Il est probable qu'il s'en est senti déçu.
(conditionnel) Je me demande si cet homme n'aurait pas vécu
une désillusion au sujet de son fils. Il est vraisemblable
qu'il en aurait ressenti une désillusion amère.
►pour une perspective représentée sur le plan mental ou pour
une situation envisagée comme ayant pu ne pas survenir, le
Subordonnées
mode subjonctif s'impose:
réduites: Je doute que cet homme ait eu des désillusions au sujet
de qui que ce soit.
infinitives
• Les subordonnées réduites3 sont: propositions infinitives;
et
propositions participiales, ainsi appelées d'après la forme
participiales grammaticale de leur pivot verbal. Elles ont comme pivot prédicatif un
verbe non fini:
– verbe à l'infinitif: Je pense réussir bientôt.
– verbe au participe (présent, passé): Mon père parti, je reste
seule à la maison. Mon père partant, nous l'accompagnons à la
gare. Mon père étant parti, nous rentrions. Le train se mettant
en marche, ils commencèrent à discuter.
– verbe au gérondif : Je suis parti en saluant. La porte s'ouvre
en grinçant. En lisant, tu enrichis tes connaissances.
Les subordonnées elliptiques du verbe (Il est venu, quoique malade;
Laide, elle n'aurait éveillé aucun intérêt) sont seulement des

3
Ces propositions seront traitées largement dans les unités d'apprentissage consacrées à la phrase
complexe.

177
De la phrase simple à la phrase complexe

variantes de surface, et non des propositions réduites par leur


structure profonde.
• Exemples de propositions participiales (relatives ou
circonstancielles) :
J'ai vu un homme portant un chapeau vert.
(=qui portait, proposition relative)
Un homme, s'éloignant du garage, s'approcha de nous.
(= prop. attributive)
Ne sachant se taire, il fut découvert. (= prop. circ. cause)
Rien qu'en se mettant à parler, il montrait ses lacunes.
Subordonnées (= prop. circ. conditionnelle)
infinitives La soupe terminée, il se leva de la table. (prop.circ.
et temporelle)
Je l'ai réconforté en parlant de sa réussite. (= prop. circ.moyen)
subordonnées
En tournant la clé, il ouvrit la porte.
participiales (= prop. circ. manière/ moyen)
• Exemples de propositions infinitives (relatives, complétives,
circonstancielles):
J'espère venir. Partir c'est mourir un peu. L'aspirine est bonne
pour soigner la grippe. Ce visage est agréable à voir. Il ne
savait comment agir dans ce genre d'affaire.
«Pour fouiller le portefeuille, il recula dans la lumière»
«Il eut envie à la fois de le gifler pour le faire taire, et de
l'étreindre parce qu'il était vivant.» [Malraux]

8.3.3 Classification des subordonnées

Types expressifs de subordonnées selon la catégorie lexico-


syntaxique d'équivalence :
– propositions substantives:
«Il put à grande peine contenir sa haine pour tout ce qui
l'environnait.» [Stendhal] ("sa haine pour les personnes et les
choses de sa vie")
Subordonnées :
«Il était trop fidèle à ce qu'il appelait le devoir…»
– complétives – propositions adjectives: L''homme que tu vois…
– relatives – propositions adverbiales: Luc ira où tu veux.
– circonstancielles Types fonctionnels de subordonnées selon la fonction remplie
auprès de la prédication matrice:
– propositions complétives;
– propositions caractérisantes.

• Les subordonnées complétives déterminent une catégorie


centrale (N, V, Adj) et donc leur fonction dans la phrase est de sujet,
attribut, ou complément d'objet.
• Les subordonnées caractérisantes sont de deux types:
adjectivales (caractérisantes d'un nom ou pronom) et adverbiales
(caractérisantes d'un verbe, adjectif, ou d'un autre adverbe).
– Les propositions caractérisant d'un nom ou pronom s'appellent
aussi : adjectives ou relatives.
–Les propositions qui apportent une caractérisation du verbe,
de l'adjectif ou de l'adverbe s'appellent aussi: subordonnées
178
De la phrase simple à la phrase complexe

circonstancielles. De toutes ces dénominations alternatives, nous


retenons les plus fréquentes:

relatives (adjectives):
L'homme que je vois;
Classification des
Luc, qui est mon ami, vient de se marier.
subordonnées
d'après leur type Subordonnées complétives (sujet, attribut, objet):
fonctionnel
Jean a lu ce que tu lui avais écrit.
et d'après
leur expression Je pense à ce dont tu m'as parlé hier.
( =le type du
constituant de phrase Qui arrivera le premier, gagnera la course.
équivalent)
circonstancielles (temporelle, causale,
finale etc.):
Tu es fâché parce qu'il se met en retard.

Quand je l'avais vu, je l’ai reconnu.

8.3.4 Subordonnées construites avec mot subordonnant


Les subordonnées à verbe fini sont marquées par divers mots
Subordonnées subordonnants: pronoms et adjectifs pronominaux relatifs et
interrogatifs; conjonctions et locutions conjonctives; adverbes relatifs
d'après
et interrogatifs et locutions adverbiales du même type.
le mot introducteur :
Types de subordonnées selon le mot subordonnant:
•conjonctives (i) propositions subordonnées conjonctives: a) introduites par des
• relatives conjonctions de sens abstrait: que, à ce que, de ce que, sur ce que,
etc.; b) par des conjonctions ayant un sens spécialisé pour un certain
• interrogatives
rapport logique marqué par les circonstancielles: parce que, pour
(indirectes) que, à condition que, si, bien que, de sorte que etc.;
(ii) propositions relatives (introduites par un relatif: qui, que, quoi,
dont, lequel et var., où);
(iii) propositions interrogatives indirectes, introduites par des mots
Subordonnées interrogatifs: pourquoi, comment ou, quand, si, etc. :
d'après la fonction Comment on peut arriver au Vieux Port (proposition sujet) est
remplie dans la ce qui m'intéresse le plus.
Les interrogatives indirectes sont des subordonnées complétives qui
matrice:
remplissent les fonctions de sujet, d'objet, etc. :
Je me demande combien de temps il lui faudra pour terminer.
• complétives (interrogative indirecte en fonction d'objet direct)
J'aimerais savoir avec qui elle est mariée/ quand elle sera de retour.
/ qui l'avait opérée d'appendicite (fonction: objet direct)
• attributives
Quelles sont leurs motivations, voilà ce dont je suis inquiet.
(relatives) (fonction: objet indirect)
• circonstancielles En faisant une synthèse de tous les critères de classification
présentés ci-dessus, on choisit de prendre comme critère de base la

179
De la phrase simple à la phrase complexe

fonction remplie par la subordonnée et de distinguer ainsi trois types


de base.
A. le premier type est représenté par les subordonnées « adjectives»
(équivalentes à un caractérisant nominal); elles s'articulent auprès
de leur nom régissant à l'aide d'un pronom relatif, d'où leur
dénomination de propositions relatives:
L'homme que je vois est Luc. Il est l'homme dont je me
souviens avec enthousiasme et à qui je pense souvent.
B. le deuxième type est représenté par les subordonnées qui
s'appellent complétives, car elles réalisent la complémentation
d'une structure prédicative; elles sont introduites par :
(a) une conjonction de sens abstrait (que, à ce que, de ce que sur
ce que etc.): Je sais que Marie vient. Je parle de ce que tu veux.
(b) un pronom relatif composé (de sens neutre): ce que/ ce qui: Je
sais ce qu'il a dit. Ce qu'il dit me fait plaisir.
(c) un adverbe interrogatif, précédé ou non d'un préposition: quand,
depuis quand, comment, pourquoi, où, etc.: Je sais pourquoi elle
vient. Je ne sais pas où et avec qui elle part.
C. Enfin, le dernier grand type de subordonnées est représenté par les
circonstancielles. Elles seront traitées ci-après, dans la section
consacrée à la phrase complexe (unités d'apprentissage 9 à 14).

 Les clés du test d'autoévaluation


Corrigé de l'exercice 1 :
L'orage approchait; il fallait rentrer au plus tôt possible.
Mange ta soupe, elle va refroidir.
Il fallait rentrer : le soir commençait à tomber (maman nous attendait à la maison).
Il nous a refusé: notre proposition ne lui a pas plu. (notre projet ne lui plaisait pas)
La pluie avait cessé, nous pouvions sortir et continuer notre chemin.
Dépêche-toi, il se fait tard (on nous attend) (le spectacle va commencer).

Corrigé de l'exercice 2 :
1. Tu n'as rien dit, par conséquent tu es d'accord avec lui.
2. Marie doit couver une grippe car elle s'est absentée aujourd'hui.
3. Marie passa tout près de moi, mais elle ne m'a pas reconnu.
4. Nous étions au mois d'avril, et les arbres étaient en fleurs.
5. Le soir [soit] je prenais le dîner en ville [soit] ou je me contentais d'un petit plat
sans prétention que je préparais moi-même à la maison.
Corrigé de l'exercice 3 :
1. Succession temporelle des actions: quand des prédicats narratifs sont
juxtaposés, le rapport logique est celui de succession temporelle: d'abord P1 (La
porte s'ouvrit,), ensuite P2 (le jeune homme entra comme un chat), et puis P3 (ses
parents se turent), et enfin P4 (ils se regardèrent).
2. Succession temporelle pour les deux premiers prédicats: d'abord P1 (J'entrai
dans le salon),ensuite P2 (Massard me tendit la main); un prédicat sous-entendu :
alors je sentis (je constatai) que sa main était moite.
3. Succession temporelle pour les deux premiers prédicats: d'abord P1 (Le dîner
se termina),ensuite P2 (nous descendîmes dans le jardin); un prédicat sous-

180
De la phrase simple à la phrase complexe

entendu : alors j'ai pu voir (je constatai) que des hannetons venaient se cogner
contre la soie de l'abat-jour.
Par ces phrases utilisant le rapport de juxtaposition, l'écrivain crée un effet narratif
(le lecteur s'imagine découvrir lui-même la scène).
Corrigé de l'exercice 4 :
1. or ; 2. et ; 3. donc; 4. ou ; 5. or ; 6. car ; 7. donc.

→ Test de contrôle 8

Ce test est administré à l'issue de l'unité d'apprentissage 8.


Pour réaliser ce test, il est conseillé de relire l'unité et de suivre attentivement les phrases
données à titre d'exemple pour chacune des catégories de la phrase complexe, réalisée
par enchaînement (juxtaposition ou coordination), ou par enchâssement syntaxique
(subordination).

Ne manquez pas de transmettre ce test à votre tuteur. À cet effet, il convient de marquer
votre nom, votre prénom et votre adresse personnelle sur la première page de votre copie.
N'oubliez pas de mentionner aussi le numéro du test. Vous êtes supposés le recevoir
après correction, avec les commentaires de votre tuteur.

Bon travail !

Exercice 1 (2 points)
Identifiez les propositions réunies dans des phrases complexes et précisez le lien
grammatical entre ces propositions: juxtaposition, coordination et subordination:
1. Un jour, grand-mère m'attira et me confia: "Je vais te faire un cadeau". 2. C'était un
beau cahier tout neuf; elle en souleva la couverture rouge pour me montrer sur la
première page, une sorte de longue banderole qui la traversait. [E.Feuillère] 3. Un père
avait deux fils; mais si l'aîné était capable et intelligent, sachant fort bien se débrouiller,
le cadet par contre, était stupide et ne comprenait rien, n'apprenait rien. 4. Et il
mangea, mangea, jusqu'à ce qu'il ne restât plus rien. 5. L'oiseau vint prendre la
chaînette d'or avec sa patte droite, se mit en face de l'orfèvre et chanta. 6. Avant de
recevoir ma fille et la moitié du royaume, lui dit-il, il faut que tu accomplisses un autre
exploit. 7. Le voyant indemne, en effet, les cavaliers n'arrivaient pas à le croire. [Grimm]
Exercice 2 (2 points)
Rétablissez les phrases complexes dont les propositions constituantes sont présentées,
pour des raisons rhétoriques, comme indépendantes, en restituant leur ponctuation:
Parfois, quand on a fini d'écrire une page, on croit qu'on n'écrira plus jamais
d'autres, que le livre va s'effondre. Alors on est dans le malheur absolu, une
détresse abominable. Et puis ça revient. Sans qu'on sache nécessairement
pourquoi, ça finit par revenir. [Ph. Besson].
Exercice 3 (2 points)
Séparez par une barre ( / ) les propositions constitutives des phrases complexes
suivantes, et précisez pour chacune des subordonnées leur fonction syntaxique auprès de
la proposition principale:
Je sais déjà qu'il va m'annoncer la grande nouvelle.
Maman a appris que la société de produits chimiques va être déclarée en faillite.
Je lui ai demandé de me dire quand précisément le spectacle commencera.
Ce que Luc vient de dire ne me surprend pas.
Quand le jour se lève, les coqs chantent.

181
De la phrase simple à la phrase complexe

Que cette personne prenne la parole pour faire le bilan annuel de l'activité de
l'entreprise n'était pas prévu.
Le professeur tolère que les étudiants fassent des plaisanteries.
Je répète ce que je viens de dire pour que vous entendiez mieux.
Exercice 4 (2 points)
Classifiez les subordonnées des phrases suivantes d'après la forme modale de leur prédicat,
en mettant sur deux colonnes: a) les propositions à verbe fini; b) propositions réduites:
Trente ans avant de connaître Charles, deux hommes avaient aimé Nicole, mais elle
se maria à quelqu'un que personne ne connaissait. L'inconnu qu'elle préféra aux deux
hommes qui l'aimaient n'eut plus le temps de l’épouser, son avion étant pulvérisé en
plein midi de mai. L'enfant qu'elle eut deux mois après, baptisée Justine, portera donc
le nom de sa mère. Celle-ci, son deuil éteint, conçut l'idée de revoir ses anciens amis.
Exercice 5 (2 points)
Créez six phrases complexes en utilisant l'infinitif, le participe présent et le participe passé
pour exprimer des propositions réduites.

Références bibliographiques
• LEEMAN, D., La phrase complexe, Bruxelles, De Boeck.Duculot, coll. "Champs
linguistiques, 2002.
• MAINGUENEAU, D., (éd. revue) Syntaxe du français (chapitre 6), Paris, Hachette
supérieur, 1999.
• RIEGEL, M., PELLAT, J.-C., RIOUL, R., Grammaire méthodique du français
(chapitre XII, La phrase complexe: juxtaposition, coordination et subordination),
Paris, Presses Universitaires de France,1994.

182
La subordonnée circonstancielle temporelle

Unité d'apprentissage 9
LA SUBORDONNÉE CIRCONSTANCIELLE TEMPORELLE

Sommaire page

Les objectifs de l'unité d'apprentissage 9 183


9.1. Définition et valeurs de la phrase temporelle 184
9.2. L'ordre temporel et l'ordre séquentiel dans la phrase temporelle 186
9.3. Paramètres linguistiques dans la phrase temporelle 188
9.3.1. Mots subordonnants, introduisant la proposition temporelle 188
9.3.2. Sens de base et emploi des mots subordonnants temporels 188
Test d'autoévaluation 194
9.4. Principaux types de phrase temporelle: 196
– la phrase marquant le rapport d'antériorité 196
– la phrase marquant les rapports de simultanéité ou de postériorité 197
9.5. La subordonnée temporelle réduite 200
Idées à retenir 202
Les clés du test d'autoévaluation 203
Test de contrôle 9 204
Références bibliographiques 205

Les objectifs de l'unité d'apprentissage 9

À la fin de ce chapitre, vous serez capables de:

• Construire des propositions temporelles d'antériorité, de simultanéité et de


postériorité en utilisant les différents moyens d'expression de la circonstance
temporelle.
• Distinguer entre les différents sens discursifs des conjonctions et des locutions
conjonctives temporelles.
• Employer les formes verbales correctes dans la subordonnée temporelle.

183
La subordonnée circonstancielle temporelle

9.1. Définition et valeurs de la phrase temporelle


La subordonnée circonstancielle temporelle ajoute à l'action décrite
dans la proposition principale une indication temporelle, en précisant:
à quel moment se situe le procès principal (Nous partons quand tu
veux); quel en est l'intervalle: (Pendant que tu parles, je t'écoute);
quelles sont les bornes temporelles du procès principal (Dès qu'il
m'aperçut, il me salua; Passé le délai de trois ans, l'appareil reprend
du service – début des procès «saluer», «reprendre»; Attends-moi et
lis le journal, jusqu'à ce que la réunion se termine – fin du procès
«attendre»); quel est l'ordre temporel relatif d'une série de procès
dont fait partie l'action représentée dans la principale (Une fois le
précieux diplôme en poche 1, le jeune pilote n'attendra pas qu'une
compagnie vienne le chercher; L'homme se présenta avec sa
proposition, avant que nous ayons établi un plan d'action et après
La notion de que le président avait lu son rapport).
"repère temporel" Le procès secondaire, énoncé dans la subordonnée temporelle,
joue le rôle de repère temporel pour le fait énoncé dans la principale :
Hier, pendant la matinée, nous sommes restés à la maison
aussi longtemps qu'il a plu.
L'action de RESTER à la maison est située par rapport au repère
temporel exprimé dans la subordonnée, la PLUIE: "tant qu'il y a eu de
la pluie, nous n'avons pas quitté la maison".
Souvent, entre deux procès successifs, il y a un rapport
implicite de détermination causale.
Aussi longtemps qu'il a plu, nous sommes restés à la maison.
(lectures possibles: → simultanéité temporelle: Pendant qu'il a plu,
nous sommes restés dedans. → cause: Parce qu'il a plu, nous
sommes restés dedans.)
Aussi longtemps qu'il pleuvra, nous resterons à la maison.
(lectures possibles: simultanéité → Tant qu'il pleuvra, nous resterons
dedans. → détermination conditionnelle: S'il pleut, nous resterons
dedans.)
La locution conjonctive aussi longtemps que peut introduire non
seulement une subordonnée temporelle, mais aussi des
subordonnées de cause ou de condition.
C'est la nature du rapport logique entre deux procès reliés dans
le discours qui permet de reconnaître les différentes propositions
subordonnées (de cause, finale, consécutive et temporelle).

• La notion de r e p è r e t e m p o r e l
Définition: le repère temporel est un procès secondaire qui permet
de situer la temporalité d'un fait principal ou de caractériser son
aspect, en précisant sa durée; ses limites (ou bornes) dans le temps
– c'est-à-dire: son point de départ ou son point final; sa répétition ou
sa fréquence; sa progression dans le temps etc.
Le procès qui sert de repère donne le cours des événements, en
situant dans le temps le fait décrit dans la proposition principale:

1
Avec ellipse du verbe dans la temporelle («après avoir obtenu son diplôme»).

184
La subordonnée circonstancielle temporelle

Arrivé à Québec, Ferrer prit un taxi de marque Subaru en


direction du port. [Echenoz]
Le contenu de la phrase temporelle s'organise autour d'un certain fait
principal, exprimé en général2 par le verbe de la proposition
Fait principal principale: "Il a pris un taxi " – Quand ? – "Quand il fut arrivé à
Québec ".
et
ARRIVER (repère) – PRENDRE un taxi (fait principal)
repère temporel:
Quand la pendule marquait sept heures et un quart, elle s'en
allait au Lion d'Or . [Flaubert]
L'activité d'un agent animé ("elle") est mise en rapport avec un
• fait principal
procès qui implique un agent inanimé ("pendule"):
unique,
MARQUER (repère) – S'EN ALLER (fait principal)
rapporté à
On pourrait croire qu'il serait moins logique de rapporter un
de multiples phénomène naturel à une action humaine:
repères
Dès que nous sommes sortis nous promener, la pluie a
commencé à tomber.
• plusieurs faits PLUIE (fait principal) – SORTIR (repère)
Cette phrase sert à construire un certain point de vue sur les
se rapportant
événements: on rapporte le phénomène de la pluie au moment où les
à un seul sujets humains sont sortis de la maison. Dans ce cas, le repère est une
repère action personnelle; l'action principale est un phénomène naturel qui
n'est pas déterminé par l'activité des hommes, la pluie étant par sa
nature un procès causateur, qui détermine des effets sur l'activité
des hommes.
► Un seul verbe, pivot de la principale, peut avoir plusieurs
subordonnées temporelles donc des repères temporels multiples:
(...) Lorsqu'il avait mangé sa soupe, endossé sa limousine3,
allumé sa pipe et empoigné son fouet, il [le cocher] s'installait
tranquillement sur le siège. [Flaubert]
Le fait montré dans la proposition principale (S'INSTALLER) est ainsi
rattaché à toute une suite d'actions antérieures.
(On souligne le fait que l'homme n'était pas du tout empressé de
partir en course; le matin, il ne s'installait sur son siège qu'après
tout un cérémonial: il mangeait sa soupe; se levait pour prendre
son manteau et sa pipe avant de se diriger lentement vers sa
voiture et saisir en dernière minute le fouet.)
Dans la phrase citée ci-dessus, le verbe auxiliaire étant élidé, le
rapport grammatical de subordination se transmet depuis la première
subordonnée temporelle. Devant chacun des verbes de forme
elliptique, la conjonction temporelle (lorsque) est implicite :
T1 = lorsqu'il (=après qu'il) avait mangé
T2 (lorsqu'il) (avait) endossé
T3 (lorsqu'il) (avait) allumé
T4 (lorsqu'il) (avait) empoigné… , il s'installait

2
Il en est autrement dans la subordination inverse (voir ci-dessous).
3
Vêtement du Limousin, région de France.

185
La subordonnée circonstancielle temporelle

Prop. subord. circ. de temps Prop. principale


► Il y a aussi des phrases temporelles dans lesquelles plusieurs
propositions principales se rapportent à un seul et unique repère
temporel donné dans la subordonnée:
Après que l'homme s'est éloigné [en quittant le parking], Ferrer
extrait de sa poche une paire de gants (…), les enfile, puis il
Faits successifs,
met le contact et il démarre. [Echenoz] (repère distributif pour
se rapportant chaque verbe subordonné)
à un La subordonnée temporelle soulignée donne un repère temporel pour
repère la série d'actions qui s'ensuivent: la personne qui était au volant de sa
voiture sort ses gants, les enfile, met le contact et démarre – gestes
présentés comme se succédant juste après le départ de l'homme qui
s'éloigne. La subordonnée temporelle se rattache grammaticalement à
une seule proposition principale («F. extrait de sa poche une paire de
gants»), mais l'interprétation de toute la phrase traite globalement tous
les procès qui se succèdent l'un à l'autre.
9.2 L'ordre temporel et l'ordre séquentiel dans la phrase temporelle
Le rapport logique marqué dans une phrase complexe dépend de l'ordre
Ordre de succession des événements (= ordre temporel) et non de l'apparition
des propositions dans la chaîne verbale (= ordre séquentiel).
dans le temps
Le fait exprimé dans L'ordre dans le temps
la proposition A. Le rapport d'antériorité: le procès décrit dans la principale a lieu
principale est, du antérieurement au procès présenté dans la subordonnée:
point de vue Il est disparu avant que je lui demande comment il s'appelait.
DISPARAÎTRE t1 .... DEMANDER t2
chronologique :
Princ.------------------------------------------------------Subord. T
►antérieur,
►simultané ou Jusqu'à ce que les lumières s'éteignent et que le film
►postérieur commence, j'ai regardé les photos d'acteurs dans le foyer.
par rapport au fait
REGARDER t1...... S'ÉTEINDRE t2 …. COMMENCERt3
Princ.-------------------------------------- Subord. T------------------------------ Subord T --------
exprimé dans
la subordonnée
Il m'a embrassé sur les deux joues avant que je sache
temporelle pourquoi.
EMBRASSER t1 ....... SAVOIR t2
Princ.-------------------------------------------Subord. T
B. Le rapport de postériorité ou de simultanéité: le procès décrit
dans la principale est postérieur ou simultané au fait exprimé dans la
subordonnée:
Une semaine après qu'il avait ouvert le premier coffre, il
découvrit aussi le reste du trésor.
OUVRIR t 1 …... DÉCOUVRIR t 2
Subord. T -----(distance entre les événements) ------ Princ

Sitôt qu'elle fut arrivée sur la plage, elle se sentit mal. Ou:
Sitôt qu'elle fut arrivée sur la plage, il ne lui fallut qu'une petite
demi-heure pour se sentir vraiment mal.

186
La subordonnée circonstancielle temporelle

ARRIVER t 1 …..SE SENTIR MAL t 2


Subord. T (petite distance entre les procès successifs) Princ.

Ordre séquentiel Dès que j'entrai dans sa chambre, je le vis dormir.


La place qu'occupe ENTRER t 1 … VOIR t 2 (le point de départ du procès
la proposition principal coïncide avec la fin du procès repère: VOIR se produit tout
de suite après ENTRER)
subordonnée
Subord. T (distance très petite ou nulle) Princ.
temporelle peut être
►avant Papa fume une cigarette, pendant qu'il lit le journal.
la proposition LIRE = FUMER t i (simultanéité)
Subord. T (distance nulle, superposition des événements) Princ..
principale
Dans une phrase, il y a divers types de rapports temporels: depuis la
(antéposition) postériorité éloignée ou immédiate, à la simultanéité et à l'antériorité.

►après la L'ordre séquentiel. Il y a deux types de subordonnées, d'après le


proposition
critère séquentiel:
– la proposition temporelle antéposée apparaît dans une phrase
principale du type: Quand P, alors Q. ;
(postposition) – la proposition temporelle postposée apparaît dans une
phrase du type: P quand Q.
►La proposition temporelle est en général antéposée quand elle est
introduite par: CHAQUE FOIS QUE, TOUTES LES FOIS QUE,
SITÔT QUE, COMME etc.
►La temporelle est en général postposée quand elle est introduite
par: TANDIS QUE, DURANT QUE, CEPENDANT QUE, EN MÊME
TEMPS QUE etc.
► Les structures avec À PEINE... QUE ont un ordre séquentiel fixe,
à peine étant toujours en début de la phrase. Pour le reste des
conjonctions et locutions conjonctives, les deux constructions
(antéposée et postposée) sont également possibles:
(ordre: Subordonnée antéposée – Principale) :
Quand l'horloge sonne trois coups, elle s'en va.
(ordre: Principale – subordonnée postposée) :
Elle s'en va quand l'horloge sonne trois coups.
Les circonstancielles présentées dans la phrase AVANT le pivot
verbal régissant, se séparent d'habitude par virgule.
Quel que soit l’ordre séquentiel entre les deux propositions, il
est toujours important de soumettre à l'examen l'ordre temporel
relatif entre deux procès, afin de "comprendre" la phrase temporelle.
C'est l'ordre dans lequel les événements apparaissent dans la
réalité (donc: l'ordre temporel) qui sert à fixer la signification
particulière de la phrase tout entière. Le rapport logique sur lequel
repose cette signification dépend de la réalité factuelle (de l'ordre
des choses dans le monde). En conclusion, l'ordre d'apparition dans le
discours des deux propositions ne doit pas se confondre avec l'ordre
temporel de réalisation des deux procès.

187
La subordonnée circonstancielle temporelle

9.3 Paramètres linguistiques dans la phrase temporelle


9.3.1. Mots subordonnants, introduisant la proposition temporelle
A. mots subordonnants spécialisés pour l'expression grammaticale
du rapport d'antériorité:
Sous-types de ►(ANTÉRIORITÉ) : avant que, en attendant que;
mots introducteurs ► (ANTÉRIORITÉ + LIMITE FINALE, INITIALE, INTERVALLE):
pour la jusqu'à ce que (borne finale), d'ici à ce que (intervalle), sans attendre
subordonnée
que, jusqu'au moment où… ;
temporelle: B. pour exprimer le rapport de postériorité /simultanéité:
A. pour marquer ► (POSTÉRIORITÉ) après que; maintenant que; quand/lorsque (litt.)
l'antériorité ► (POSTÉRIORITÉ + POINT DE DÉPART ou FINAL) depuis que,
de la principale;
dès que (borne initiale); une fois que; aussitôt que; sitôt que; aussi loin
que, de si (d'aussi) loin que (point maximal de remontée en arrière);
►(SIMULTANÉITÉ) en même temps que; aussi longtemps que;
B. pour marquer la durant que; pendant que; cependant que; tandis que; tant que; au
postériorité / moment où; à l'instant où; à l'instant que; alors que, etc.
simultanéité de la
► (RÉPÉTITION, ITÉRATIVITÉ) toutes les fois que; chaque fois
que; des fois que;
principale ► (PROGRESSION) au fur et à mesure que; à mesure que, etc.

9.3.2 Sens de base et emploi des subordonnants temporels


● Certains mots introducteurs d'une subordonnée circonstancielle
sont spécifiques pour exprimer le rapport temporel (ex.: quand),
mais ils s'emploient souvent avec d'autres valeurs que le temps (le
quand causal, oppositif/ concessif; hypothétique/ oppositif); parfois,
le sens temporel s'est atténué dans certains mots et,
grammaticalement, ils s'emploient avec une autre valeur (la locution
du moment que ne s'emploie plus que pour exprimer la cause); enfin,
seul ou dans des locutions, un mot comparatif (comme) ou quantitatif
(tant) ou spatial (loin) peut introduire une subordonnée de temps.
La première catégorie représente un phénomène de
polyvalence fonctionnelle (que, comme, quand, aussi longtemps
que etc. sont des mots subordonnants polyvalents); dans les autres
situations, il y a un glissement de sens, avec changement de
fonction grammaticale. Voici ces phénomènes:
►mots ● En général, dans la structure des locutions présentées ci-dessus, il
subordonnants y a un élément lexical de référence temporelle: temps, fois (N),
de sens temporel longtemps, tôt, maintenant (Adv), puis, depuis, pendant (prép), et
même des verbes: attendre (dans: en attendant que), durer (durant
devenus
que), pendre4 (pendant que).
susceptibles de ● Il y a aussi des subordonnants qui ont perdu la spécificité
marquer d'autres grammaticale pour l'expression du temps: alors que, aussi longtemps
valeurs: oppositives, que, sitôt que, tandis que, pendant que, cependant que, quand
(même), lorsque (litt.), maintenant que, du moment que etc. servent
causales etc.

4
La préposition pendant et la locution conjonctive pendant que conservent le sens de l'expression d'origine
latine : le temps pendant.

188
La subordonnée circonstancielle temporelle

à marquer d'autres rapports logiques que le temps (cause,


opposition, hypothèse):
Aussi longtemps qu'il est un garçon si dissipé, je ne le
considère plus mon neveu (cause). Sitôt qu'il ne me sera plus
utile, je m'en débarrasserai. (hypothèse). Pourquoi prendre le
bus, alors qu'il fait si beau ? (cause justifiante). Il est venu à
temps, alors que je m'attendais à ce qu'il se mette en retard.
►mots (opposition, concession).
subordonnants ● En général, ces mots ont conservé aussi leur sens temporel, de
base, mais pas toujours:
« polyvalents »
– accompagné de l'adverbe même, quand affaiblit son sens temporel
(=ayant plusieurs à la faveur de la valeur hypothétique ou concessive (pour cette
valeurs): dernière valeur, il est suivi du conditionnel) :
Tu ne pourrais plus m'épouser quand même je trouverais un
tant que moyen d'éloigner cet odieux marquis. (proposition concessive)
à peine... que aussi Le charme est toujours un sujet de regret, même quand nous
loin que nous trouvons plus heureux. [Balzac] (temps, concession ou
de si loin que
hypothèse ? – l'interprétation hypothétique est soutenue par le
présent indicatif et l'adverbe aspectuel toujours, qui confèrent à
comme cette phrase le caractère d'une vérité générale: Le charme est
que toujours un sujet de regret, même dans les conditions où nous
nous sentons le plus heureux.)
– avec un verbe copulatif ou modal, quand s'éloigne souvent de son
sens temporel:
Quand ce garçon est comme il est, que veux-tu que je fasse ?
(proposition de cause);
– l'interprétation est souvent ambiguë:
Lorsqu'une lutte s'éleva entre un camarade et lui, rarement le
combat finissait sans qu'il y eût du sang répandu. [Balzac]
(l'interprétation temporelle est appuyé par l'emploi du passé
simple dans la subordonnée, l'interprétation hypothétique est
plus naturelle à cause de l'imparfait dans la principale:
►Subord. temporelle, si la phrase décrit une situation;
►Subord. hypothétique décrit un comportement "habituel".
● Les locutions du moment que et maintenant que s'emploient avec
des sens non temporels; la première de ces locutions a perdu
entièrement son sens temporel et sert uniquement à introduire un
argument dans le débat (=cause justifiante): Du moment qu'il a
refusé notre invitation, nous renoncerons à ses services.

Exercice d'entraînement
Identifiez les valeurs de quand/ lorsque, en fonction de leur équivalent donné entre
parenthèses: subordonnant temporel (équivalant de: au moment où), causal (à cause du
fait que), concessif (bien que), conditionnel / habituel (si ; chaque fois que):
1. Je déteste l'action de se réunir à l'étranger pour faire triompher son parti; mais cette
erreur est pardonnable chez des paysans, et quand elle dure peu. 2. [L'homme] mourut à
Paris lorsque sa fille unique avait quinze ans. 3. À Nantes, lorsque mes affaires me l'ont
permis, je n'ai pas manqué de venir passer une demi-heure devant cet admirable

189
La subordonnée circonstancielle temporelle

monument. 4. Il se retournait pour appeler ses soldats, lorsqu'il tomba raide mort. 5. (…)
Cette reine (…) battait ses ministres lorsqu'elle était contrariée dans ses desseins. 6. Au
reste, quand même je n'eusse pas eu cette rage de parler, j'aurais été charmé des cinq ou
six braves Bretons avec lesquels mon correspondant m'a fait faire connaissance. [Stendhal]

1. _________ 2. _________ 3. _________ 4. _________ 5. _________ 6. _________

►Certains mots subordonnants n'ont pas à l'origine un sens


spécifiquement temporel:
●Tant est un quantitatif; la locution tant que peut avoir aussi un sens
temporel, en faisant référence à la durée (à la "quantité" de temps):
Tant que tu es avec moi, je suis contente. (= aussi longtemps
que tu restes avec moi…).
Selon le sens du verbe, tant est interprété comme durée (longtemps),
intensité (dans une grande mesure, très, fort) ou quantité (beaucoup):
(…) Tant que le Lion d'Or vivra, on y viendra.
 "vivre tant" = longtemps
Il avait appris son malheur, et l'en consola tant qu'il put.
 "pouvoir se consoler tant" (peu ou fort)
Trois jeunes gens à moustaches le persiflèrent tant qu'ils
voulurent.
"vouloir persifler" (longtemps ou beaucoup, intensivement)
● Aussi loin que, d'aussi loin que, au plus loin que, du plus loin que
se rapportent à un procès éloigné dans le temps, dont le début se
perd dans le passé. Ces locutions conjonctives ont à l'origine un
sens spatial (loin). Et pourtant, il est plutôt rare que ce sens spatial
s'actualise :
D'aussi loin que l'on vit l'épave, Ferrer fit signe aux guides de
se taire. [Echenoz]
Dans ce contexte, il est difficile de discerner entre la valeur
temporelle (=dès le premier instant que l'épave fut aperçue) et celle
Les locutions spatiale (le signe a été fait de très loin): l'épave a été aperçue de loin
dans l ' e s p a c e , mais aussi dans le t e m p s , car ceux qui ont vu
conjonctives
l'épave se trouvaient sur un navire qui s'avançait.
polyvalentes: Ces locutions formées avec loin ont grammaticalisé leur emploi
aussi loin que, temporel, pour lequel elles se construisent avec l'indicatif: Aussi loin
d'aussi loin que qu'on alla/ allait, tout était désert. L'éloignement dans le temps peut
aussi introduire l'idée d'opposition ou de concession; dans ce cas, le
etc.
subjonctif est de rigueur:
Du plus loin qu'il me souvienne, la chose était ainsi. (apud
GREVISSE)
(Bien qu'il soit beaucoup de temps depuis… )
Aussi loin que portât sa vue, elle n'apercevait que la forêt. [J.
GREEN, apud GREVISSE] (Bien qu'elle fît des efforts …)
La conjonction ● Comme est à l'origine une préposition de sens comparatif (Petite
fille jolie comme un cœur). Mais, devant un verbe, comme devient
COMME:
conjonction, ayant plusieurs valeurs contextuelles:
 comparatif Il ment comme il respire. (comme comparatif)
 temporel Comme elle fut longtemps avant de trouver son étui, son père
 causal s'impatienta. (cause justifiante) Même valeur dans:

190
La subordonnée circonstancielle temporelle

Comme la salle était fraîche, elle grelottait tout en mangeant.


(comme causal, avec PS, PC, PQP)
et le temps :
Comme il passait par Vassonville, il aperçut, au bord d'un
fossé, un jeune garçon assis sur l'herbe.[Flaubert]
(comme temporel, d'habitude avec l'imparfait)
Il ne faut pas confondre la conjonction de subordination comme avec
l'adverbe exclamatif comme :
Oh ! comme son coeur battit quand il aperçut un pied mignon.
[Balzac]
Dans cette phrase, la proposition principale exclamative (soulignée)
régit une subordonnée temporelle (ou causale) introduite par quand:
APPERCEVOIR t1...... BATTRE t2
Subord T -------------------------------------Princ.

● Enfin, que5 est une conjonction abstraite ayant de multiples


fonctions; pour ce qui est du QUE temporel, ont distingue les
situations suivantes:
a) Que substitut. La conjonction que peut substituer une conjonction
"pleine" lexicalement (quand, pendant que, aussitôt que etc., sauf au
moment où); de cette façon, que sert à signaler les circonstancielles
coordonnées comme étant du même type syntaxique que la
première de la série:
Quand il viendra et qu'il verra cela…
La conjonction au lieu de: Quand il viendra et quand il verra cela, il sera très fâché.
Quand elle passe près de vous et qu'elle étend le bras,
substitutive
repoussez-la !
QUE L'emploi substitutif de la conjonction que s'explique mieux quand
qui reprend un mot l'élément repris est une locution ayant déjà la conjonction que dans
introducteur de sa structure: depuis que, pendant que, dès que etc. Pour assurer la
concision expressive, dans le contexte de la coordination (ET), il
sens "plein"
n'est plus nécessaire de reprendre la partie de la locution conjonctive
porteuse de contenu lexical (depuis + que), mais seulement
l'élément strictement grammatical (que, neutre du point de vue de la
signification):
Depuis qu'il a décroché son diplôme, et qu'il enseigne le
français, il connaît bien les thématiques francophones. (que =
depuis que)
Emma ne s'endormait que le matin, quand l'aube blanchissait
les carreaux et que déjà le petit Justin, sur la place, ouvrait les
auvents de la pharmacie. [Flaubert]
Le rôle grammatical de la conjonction que est:
– de marquer la coordination de deux ou de plusieurs propositions
circonstancielles;
– de permettre d'éviter la répétition d'un même élément de relation.

5
Ne pas confondre la conjonction que (invar.) avec le pronom relatif interrogatif que (marquant le cas de
l'objet direct, donc faisant partie du même paradigme que qui, la forme du pronom pour le cas sujet).

191
La subordonnée circonstancielle temporelle

Quand il [le frère de Bijou] ne se faisait pas servir seul par le


cuisinier chinois et qu'il venait plus tôt que d'habitude, nous
dînions ensemble Bijou, lui et moi. [Modiano]
(et qu'il venait … = et quand il venait)
Remarque: QUE substitut peut reprendre n'importe quel élément (si,
Le QUE temporel parce que, comme, etc.), marquant la coordination de n'importe quel
ou que type de proposition: de temps, de cause, de but, de condition, etc.
de succession Parfois, dans les propositions coordonnées, les formes
rapide
verbales composées mettent en ellipse leur auxiliaire; dans ce cas,
la conjonction substitut QUE ne se met plus, car cette conjonction
ou de est toujours en rapport avec une forme "conjuguée" du verbe. QUE
«concomitence» substitut n'apparaît pas devant les formes nominales du verbe
(infinitif ou participe), comme dans la phrase citée ci-dessus:
Lorsqu'il avait mangé et qu'il avait endossé son vêtement, le
cocher s'installait sur son siège. (que= lorsque)

Lorsqu'il avait mangé et endossé son vêtement, le cocher


s'installait sur son siège. (ellipse de l'auxiliaire et de la conjonction)

b) Que temporel ("que de concomitance"; de succession rapide; de


continuation; "que inverse"). Un tout autre emploi de que temporel
sert à marquer le rapprochement dans le temps de deux procès: le
premier n'est pas encore terminé, que déjà un autre procès a lieu:
Il dormait déjà profondément qu'un bruit le réveilla.
On s'était retiré depuis un quart d'heure dans nos chambres,
qu'on entendit un grand bruit.
La proposition temporelle introduite par QUE suivi de l'indicatif est en
réalité une subordonnée inverse, qui introduit dans le discours un fait
nouveau, situé dans le temps à l'aide d'un repère déjà connu. La
temporelle introduite par QUE est parfois en corrélation avec une
principale négative: Il n'avait pas encore quitté son ami, que celui-ci se
Le QUE plongea dans la lecture de son journal, ou bien en corrélation avec
temporel inverse: une spécification adverbiale (encore, à peine, déjà), qui souligne le
rapport de simultanéité (concomitance) ou de postériorité immédiate
(avec écart temporel très réduit entre les deux procès, le sens global
– type de étant: immédiatement après): À peine avait-il quitté son ami, que celui-
construction; ci se plongea dans la lecture de son journal.
– rapport temporel; Les grammairiens citent souvent des exemples littéraires de
temporelles construites avec subjonctif: Tu ne bougerais pas d'ici
– corrélatif
que tu n'aies demandé pardon (G. Sand); Je ne me relèverai pas
adverbial que vous ne m'ayez donné votre bénédiction (Montherlant) Dans ces
(à peine, contextes (que= avant que), il ne s'agit plus d'un "que inverse": la
encore ….)
subordination inverse n'apparaît qu'avec que temporel marquant la
postériorité/ simultanéité:
Avec ces os, les gens du pays firent bâtir une église. Mais
l'église n'était pas encore couverte, que la contrée fut
éprouvée, bien souvent, par des tempêtes et des grêles.
[légende] (que = après que)
Mais les deux contextes: que temporel de postériorité (rare, litt.) ou que
d'antériorité (que inverse) ont des paramètres descriptifs communs:
«Parfois le première proposition est négative et exprime un fait non

192
La subordonnée circonstancielle temporelle

encore commencé ou non encore achevé au moment où a lieu le fait


marqué par la seconde proposition» [Grevisse, Le Bon usage, §1018].

►Les rapports temporels dans la phrase à subordination inverse


Si, dans la phrase temporelle, le "repère" est donné dans la principale,
tandis que le fait qui est "situé" dans le temps est donné dans la
subordonnée, on parle d'une construction grammaticale inverse (quand
ou lorsque inverse) :
Je dormais encore quand il arriva.
(Quand arriva-t-il ? pendant que je dormais = repère temporel).
Il était trois heures pile au moment où il s'est présenté. (À quel
moment s'est-il présenté ? à trois heures = repère temporel).
La pendule marquait sept heures quand elle sortit. (À comparer
avec la phrase citée ci-dessus.)
Il avait déjà passé quinze jours dans l'état d'extase (…),
quand, un soir, [il] entra au théâtre d'Argentina. [Balzac]

La pluie avait cessé depuis une heure, lorsqu'il vint nous


chercher.
(Quand vint-il nous chercher ? Une heure après l'arrêt de la pluie =
repère temporel)
Nous étions à l'Étude, quand le Proviseur entra suivi d'un
nouveau habillé en bourgeois et d'un garçon de classe qui
portait un grand pupitre. [Flaubert]
Le procès
nous étions à l'étude – le proviseur de l'école entra
principal = procès
situé dans le
intervalle temporel imprécis événement qui surgit à un moment précis
temps;
Depuis quelle perspective sont présentés les deux événements
reliés? L'un est un fait habituel, de tous les jours; l'autre est un
événement particulier qui surgit. L'événement survenu est l'arrivée
Le procès
d'un nouveau garçon dans la classe; le sens de la phrase serait: "un
subordonné = jour, quand nous étions à l'étude, le directeur de l'école entra dans la
repère temporel salle de classe suivi d'un garçon, notre nouveau collègue".
La subordination inverse se reconnaît par l'interprétation de la
phrase: elle traduit un point de vue personnel. Le procès exprimé par
la proposition principale donne le repère, tandis que le procès de la
subordonnée temporelle introduit un fait nouveau, inattendu pour la
personne qui donne le point de vue de la phrase.
Souvent, la temporelle inverse s'emploie avec, comme marque
grammaticale spécifique, la conjonction que (qui est comme un
"inverseur" de dépendance syntaxique), accompagnée souvent d'un
adverbe corrélatif dans la principale:
À peine fut-elle assise de nouveau, qu'elle rendit sa main au
jeune homme. (= dès qu'elle s'assied, elle lui tend sa main)
Il était nuit; à peine fut-on assis, que Julien, usant de son
ancien privilège, osa approcher les lèvres du bras de sa jolie
voisine. [Stendhal] (il approcha ses lèvres, dès qu'on s'était assis)

193
La subordonnée circonstancielle temporelle

A peine entre-t-on dans la ville que l'on est étourdi par le fracas
d'une machine bruyante. [ibid.] (avec indicatif présent)
La proposition logiquement principale (contenant le procès qui est
situé dans le temps) apparaît comme précédée par la conjonction
que, la circonstancielle (qui donne le repère temporel) n'ayant pas de
mot subordonnant, mais se signalant par le corrélatif adverbial à
peine. Le même rôle inverseur est joué par la simple négation.
Comparez :
(i) Mais à peine eut-il signé ce billet, qu'une idée audacieuse lui
surgit. [Flaubert]
(ii) Il n'avait pas signé le billet depuis une minute, et une idée
lui vint. [ou: qu'une idée lui vint. ] (l'idée lui vient tout de suite
après avoir signé)
(iii) Une idée audacieuse lui vint, (immédiatement) après avoir
signé le billet. (après qu'il signa…)
(iv) Il signa le billet. Un instant après, une idée audacieuse lui vint.

Test d'autoévaluation
Pour bien gérer ce test, il est indispensable que vous ayez déjà parcouru les explications
et les analyses données dans l'unité d'apprentissage 9. Vérifiez vos solutions aux
exercices en consultant la rubrique Clés du test d'autoévaluation.

Exercice 1
Soulignez le verbe principal et celui de la proposition subordonnée en précisant le
rapport temporel entre les procès exprimés par ces verbes:

Aussi longtemps que nous travaillons chez lui, le patron nous paiera nos salaires.
……………………………………………………………………………………………..
Maman parle au téléphone, pendant que nous regardons la télé.
……………………………………………………………………………………………..
Chaque fois que je le vois, je me perds.
……………………………………………………………………………………………..
Toutes les fois que nous nous sommes rencontrés, il y a eu une petite dispute entre nous.
……………………………………………………………………………………………..
Dès que la porte du métro fut ouverte, la foule se rua vers les escaliers.
……………………………………………………………………………………………..

Exercice 2
Remplacez le mot grammatical qui introduit la proposition temporelle par une locution
temporelle plus précise:

Quand il eut obtenu la réponse qu'il désirait, il contempla fort attentivement l'artiste.
………………………………………………………………………………………………
Tout à coup il [le visiteur] fut ébloui, quand, sur un mot de la vieille, il fut admis dans ce
mystérieux appartement.
………………………………………………………………………………………………

194
La subordonnée circonstancielle temporelle

Quand l'artiste tendit les bras à sa maîtresse pour l'aider à descendre il la sentit toute
frissonnante. [Balzac]
………………………………………………………………………………………………
Quand je passe sur le quai, je me souviens de la neige de ce temps-là, qui recouvrait les
statues (…). [Modiano]
………………………………………………………………………………………………
Exercice 3
Remplacez le mot quand par dès que; chaque fois; pendant que; au moment où, et
précisez le type de relation temporelle (antériorité, ou postériorité / simultanéité):
La jeune femme (...) frissonna quand cet homme, qu'elle regardait, tourna sur elle deux
yeux sans chaleur. → …………………………………………………………………
Quand les voyageurs s'arrêtaient, celui qui les examinait finissait par douter qu'ils
eussent remué. → ……………………………………………………………………
Quand le souper devint une orgie, les convives se mirent à chanter.
→…………………………………………………………………………….…………
Les événements le surprirent quand il était encore sous le charme de cette
printanière hallucination. →…………………………………………………………...

Exercice 4
Réécrivez cette phrase en introduisant les locutions conjonctives données:
Mon ancien ami me rend visite chaque fois qu'il arrive dans la ville où j'habite avec
ma famille. avant que; dès que; quand; pendant que; lorsque; aussitôt que.
……………………………………………………………………………………………….
……………………………………………………………………………………………….
……………………………………………………………………………………………….
……………………………………………………………………………………………….
……………………………………………………………………………………………….
………………………………………………………………………………………………

195
La subordonnée circonstancielle temporelle

9.4 Principaux types de phrase temporelle


A. La phrase marquant le rapport d'antériorité
● Le rapport temporel d'antériorité: le fait énoncé dans la
principale est situé dans le temps AVANT le procès énoncé dans la
subordonnée temporelle:
Avant qu'elle se mariât, elle avait cru avoir de l'amour.
[Flaubert]
Croire ……………….. Se marier (antériorité simple)
La durée du procès principal peut s'étendre jusqu'au début du procès
repère :
La perspective
Jusqu'à ce qu'elle se mariât, elle avait cru avoir de l'amour.
antérieure sur le fait CROIRE ……………….. SE MARIER (antériorité + continuité)
principal: • La perspective antérieure introduit un repère réel, mais qui n'est
pas encore réalisé au moment où se déroule l'action principale.
A. Le fait principal
fait1  avant fait2 (perspective antérieure)
L'action de la subordonnée (se marier) semble être représentée dans
a lieu avant
le discours depuis un instant où cette action n'était pas encore
le fait qui donne le réalisée: le mode subjonctif est donc régulier dans les
repère temporel subordonnées temporelles d'antériorité. Cet effet de point de vue
antérieur sur une action commande le choix d'une forme verbale
spécialisée dans l'expression d'un fait non réel: Il est essentiel que je
vous parle avant que les enfants ne vous voient (l'action de voir est
envisagée depuis une perspective antérieure, anticipant les faits: les
enfants n'ont pas encore vu la personne, l'action n'est que virtuelle
(pas encore réelle).
Le caractère réel du procès exprimé dans la subordonnée de la
phrase temporelle d'antériorité n'a rien à faire avec la perspective
depuis laquelle ce procès est décrit: il apparaît comme non réalisé, et
donc l'emploi du subjonctif comme mode de l'action non réelle est de
rigueur:
Homais retira son bonnet grec bien avant que le docteur fût
entré. [Flaubert] (le docteur entra, en effet, mais plus tard que
l'instant qui donne le point de vue sur l'événement)
Le geste de retirer son bonnet devance le moment où le docteur entre
dans la pièce. L'entrée du docteur dans la maison est un fait bien réel,
mais la phrase propose une perspective, une «vision sur le monde»
depuis un instant avant que ce procès se soit réalisé. Le discours
surprend non pas l’entrée du docteur, mais un état du monde
antérieur: on attendait l'arrivée du docteur, et déjà l'une des personnes
se découvrit la tête, comme pour se préparer de saluer le docteur.
Cette perspective sur l'événement depuis un moment antérieur
explique l'emploi du subjonctif :
Il ne se hâta point. (…) Il s'ajourna de semaine en semaine,
jusqu'à ce qu'il reçût une seconde lettre maternelle où on le
pressait de partir. [ibid.]
La réception de la lettre a certainement eu lieu (d'ailleurs, la phrase
présente le contenu même de cette lettre), mais la perspective sur
cet événement est bien antérieure. Le point de vue est situé AVANT
l'arrivée d'une seconde lettre. La phrase décrit le monde depuis un
instant dans lequel la lettre n'était pas encore arrivée.

196
La subordonnée circonstancielle temporelle

● Justification du subjonctif avec l'antériorité


Avec une principale non assertive (interrogative, impérative, comme
dans les phrases citées ci-dessous), il y a la une perspective
Justification d'attente sur une action qui pourrait se produire:
du mode subjonctif (litt.) Le faut-il assommer avant qu'il ait parlé? [Chateaubriand]
dans la phrase
Devons-nous lui demander de nous montrer son travail avant
temporelle qu'il le termine? / avant qu'il ne l'ait terminé ?
d'antériorité: Veux-tu appeler maman au téléphone avant qu'elle ne quitte /
la perspective sur avant qu'il se fasse trop tard?
Explique-moi cela bien nettement avant que je te quitte, je veux
un événement non
voir clair dans mon cœur (…).
(encore) réalisé Remontez à cheval, sortez de l'hôtel avant qu'on ne se lève de
table. [Stendhal]
Mais le subjonctif apparaît aussi avec un fait réel comme repère
temporel, le choix du mode correspond à la "perspective antérieure"
de représentation de ce repère (une succession de deux faits, fait 1
et fait 2, est représentée depuis une point de vue discursif situé
AVANT le fait second, ce qui justifie le subjonctif. Enfin, dans
certains cas, l'emploi du subjonctif dans la subordonnée d'antériorité
peut être dicté par la nature irréelle, seulement imaginée, de
l'événement : Que s'était-il passé pour que Nic Deck et le docteur
n'eussent pas reparu, après une journée d'absence ? Cela étant, nul
n'aurait songé à réintégrer sa demeure, avant qu'ils fussent de
retour. [Verne]
• Systèmes temporels marquant le rapport d'antériorité
La valeur réelle/ irréelle du fait exprimé dans la subordonnée
temporelle dépend aussi d'une bonne lecture interprétative du procès
Systèmes exprimé dans la principale :
temporels
Proposition principale Proposition subordonnée de temps
pour le rapport Je prépare le café
d'antériorité Je préparerai le café avant qu'il soit là/ ait été là/ fût/ eût été là.
J'aurai déjà préparé le café jusqu'à ce qu'il…
du procès Je préparerais en attendant qu'il… fait imaginaire
principal J'aurais préparé
----------------------------------------- ------------------------------------------------------------
Je préparais
Je préparai le café (litt.) avant qu'il fût là/ qu'il eût été là.
J'ai préparé le café fait réel ou non
J'avais préparé le café

B. La phrase marquant la simultanéité ou la postériorité


• Rapport temporel de postériorité et de simultanéité: le fait
énoncé dans la principale est situé après le procès énoncé dans la
subordonnée, ou les deux procès se recoupent, totalement ou
partiellement.
• La perspective postérieure donne un point de vue dans la
principale (fait2) depuis lequel c'est un repère temporel déjà réalisé
qui est représenté dans la subordonnée:
après fait1  fait2 (perspective postérieure)
Une fois qu'on eut déjeuné, il était temps de rentrer. [Echenoz]
197
La subordonnée circonstancielle temporelle

L'antériorité s'établit entre un fait accompli (le déjeuner) et un fait pas


encore accompli (une action à l'état de projet).
La perspective
(une fois que) DÉJEUNER ……………… IL ÉTAIT TEMPS
postérieure sur le action accomplie – projet à réaliser
fait principal: Alors, dit F., quand il a bu son thé, quand est-ce qu'on va
pouvoir s'y mettre ? [Echenoz]
B. Le fait principal (quand) BOIRE ………… DIRE (antériorité simple)
a lieu après ou Dans les deux cas:
simultanément une fois qu'on eut déjeuné
avec le fait qui
et:
quand il a bu son thé,
donne le repère les subordonnants (quand, une fois que) marquent un repère temporel
temporel ponctuel: la fin du déjeuner représente une limite temporelle par rapport
à laquelle le fait de rentrer devient possible ou souhaitable.
Je vais me jeter dans ses bras sitôt qu'il va venir vers moi.
(sitôt que) VENIR ---------------------- ALLER SE JETER
Les deux procès sont à l'état de projet, aucun n'est devenu un fait
accompli. Mais ces deux procès sont représentés comme étant dans
un rapport de postériorité immédiate (conformément au sens de la
locution sitôt que); l'emploi de l'indicatif est justifié par la perspective
postérieure: au moment où s’accomplit l'action future «se jeter dans
ses bras», l'action repère (venir vers moi) sera déjà accomplie. Et
pourtant, en français contemporain l'usage est d'employer le
subjonctif avec après que (voir ci-dessous), sans que cette forme
soit motivée grammaticalement. Dans ces conditions, l'indicatif dans
la phrase temporelle est plutôt réduit à l'expression de la
simultanéité:
Il récupère faute de mieux les reliefs de citron pendant que le
radio-cassettes continue de tuer le temps. [Echenoz]
RÉCUPÉRER …………(pendant que, en même temps que)
CONTINUER DE TUER (simultanéité)

Exercice d'entraînement
Établissez la perspective (antérieure, postérieure, simultanée) des phrases temporelles
suivantes et précisez la forme verbale dans la subordonnée:
1. Je suis parti un matin avant que la petite ne se réveille. [Modiano]
2. Lorsqu'il paraîtra cette chronique, trois semaines auront passé depuis la mort d'Aragon.
[Renaud Camus]
3. Une Française a été écrouée hier soir pour avoir provoqué involontairement l'incendie
d'un hôtel. Après s'être querellée avec le veilleur de nuit, son compagnon, une femme aurait
jetée des vêtements sur des bougies avant de quitter l'établissement. [Ouest-France, 20.04.05]
4. Une fois l'appareil garé, les deux pilotes enfourchent leur VTT et disparaissent. [ibid.]
5. Je me suis hâté de courir au Musée, avant que le jour me quittât. [Stendhal]
6. Je vais chercher les frusques, je te ferai prendre quand tout sera prêt. [Malraux]

198
La subordonnée circonstancielle temporelle

Perspective: Forme verbale: Perspective: Forme verbale:


1. ………………… ………………. 4. ………………… ……………….
2. ………………… ………………. 5. ………………… ……………….
3. ………………… ………………. 6. ………………… ……………….

• Spécification de la "distance" temporelle


La distance temporelle entre le fait principal et le repère temporel est
parfois marquée explicitement :
Trois jours avant qu'il soit de retour, je lui ai téléphoné.
Je lui ai téléphoné trois jours après qu'il était rentré de ses
vacances.
Une semaine avant qu'il ne meure, je l'ai vu à l'hôpital.
Je l'ai vu à l'hôpital une semaine après que sa maman se fut
cassé la jambe.
• Choix du mode dans la subordonnée de perspective
postérieure. La locution après que s'emploie dans le français
contemporain presque régulièrement avec le subjonctif (voir la
remarque ci-dessus), selon le système temporel spécifique à la
perspective antérieure :
Elle ne se reconnaît plus après qu'elle se soit fait opérer le nez.
(au lieu de: Elle ne se reconnaît plus après qu'elle s'est fait
opérer le nez).
Le subjonctif n'est en rien motivé avec après que, mais l'usage est
très répandu parmi les natifs francophones. Les grammairiens citent
des exemples issus des plumes illustres:
« Longtemps même après qu'elle m'ait quitté… » [Sartre, apud
Repères GREVISSE] (au lieu de: après qu'elle me quitta/ m'eut quitté)
temporels «Une demi-heure après qu'il ait été tué….» [Montherlant, ibid.]
L'emploi abusif du subjonctif dans ces contextes peut être expliqué
complexes:
par la présence d'une expression qui, explicitant la distance, donne
antériorité/ un effet de perspective, et reconduit l'interprétation de la locution
postériorité + après que:
DISTANCE Longtemps après que …
temporelle
Trois ans après que…
Une semaine après que…
Peu de temps après que…
Conclusions: Dans la phrase temporelle (d'antériorité ou de
postériorité/ simultanéité), le repère donné dans la subordonnée
circonstancielle de temps sert à marquer :
►l'intervalle de déroulement du procès principal;
►le début, la fin, la répétition etc. du procès principal;
►la situation chronologique du procès de la proposition
principale (l'ordre de succession, autres repères).
Locutions
● Continuité et rapprochement entre la signification temporelle
conjonctives et la signification argumentative (cause, opposition, hypothèse):
temporelles
ayant changé Maintenant que nous sommes seuls, s'écria l'artiste, et que
vous n'avez plus à craindre l'effervescence de ma passion,
leur valeur
dites-moi que vous m'aimez.
sémantique ÊTRE SEULS – DIRE ("dites-moi que vous m'aimez")
199
La subordonnée circonstancielle temporelle

La principale étant à l'impératif, la subordonnée ne peut pas marquer


un rapport temporel; au lieu de décrire une situation avec son cadre
temporel, son contenu est plutôt de type informatif/ argumentatif. La
proposition apporte comme information la raison qui détermine le
locuteur à adresser une telle recommandation: "puisque nous
sommes seuls, je peux te demander de me dire que vous m'aimez".
Les locutions du moment que et maintenant que ont évolué
sémantiquement depuis le sens temporel primaire des éléments
lexicaux incorporés, vers un sens argumentatif pur, sans aucune
référence à la temporalité des événements impliqués. Maintenant
que… et du moment que… sont devenus des locutions
conjonctives spécialisées pour le rapport de causalité (cause
justifiante ou cause "notoire").
9.5 La subordonnée temporelle réduite
La subordonnée construite avec une forme verbale non personnelle
(infinitif, participe, gérondif), ou avec une nominalisation, est une
proposition dépendante "réduite", proposition infinitive ou participiale:
• Infinitif:
► Structures: prép. avant/ après + INF
Avant de partir, l'homme salua gentiment.
prép. temporelle (avant, après) + de + INF. (présent ou passé)
(En quel moment salua-t-il ?  antériorité)
Après avoir fermé la fenêtre, Jean a eu chaud.
(Rapport temporel de postériorité, avec une nuance causale)
La circonstance ► Forme temporelle du verbe infinitif: la proposition infinitive de
postériorité se construit d'habitude avec la forme passée de
temporelle
l'infinitif.
exprimée par: ► Sémantique contextuelle:
INFINITIF Après avoir entendu la nouvelle, mon père m'en félicita.
prép. + INF Deux lectures possibles:
Quand me félicita-t-il ?  subordonnée réduite marquant un
rapport temporel de succession immédiate (postériorité immédiate);
PARTICIPE ou Pourquoi me félicita-t-il ?  subordonnée réduite de cause.
GÉRONDIF ► Identité des agents: la bonne formation de ce type de phrase
exige l'identité entre le sujet de la proposition principale (matrice) et
l'agent du procès exprimé à l'infinitif:
Après avoir reçu les compliments assez affectueux de la
GROUPE plupart des personnes présentes, qu'il connaissait de vue, il
NOMINAL tâcha de s'approcher de la bergère [Balzac]
prép. + N Qui avait reçu les compliments? Lui. (le sujet de la principale =
l'agent du procès à l'infinitif).
• Participe présent et Gérondif:
La subordonnée participiale qui n'a pas un sujet exprimé, impose
une lecture interprétative par laquelle le sujet de la proposition
matrice est reconnu comme agent de la proposition participiale:
En passant par chez eux, j'ai appris la nouvelle.
Ouvrant la porte, il me vit.
(Le sujet de la principale = l'agent du procès au gérondif ou au
participe présent).

200
La subordonnée circonstancielle temporelle

– Les rapports marqués par les temporelles construites avec un


participe présent ou avec un gérondif sont de simultanéité (Elle
parlait en soupirant et en s'essuyant les larmes) et la postériorité
immédiate (En poussant la porte, il s'aperçoit de l'intérieur).
– L'agent du procès exprimé par une proposition participiale doit être
identique avec l'agent auquel renvoie le sujet de la proposition
principale: Le facteur frappa à la porte en criant (crier et frapper ont
un même agent: le facteur).
Distinguant une bouilloire abstraite posée près d'un obscur
lavabo, il l'emplit et la pose sur un Butagaz. [Echenoz]
Après avoir distingué une bouilloire..., il emplit cette bouilloire au
robinet et la posa sur le fourneau à gaz. DISTINGUER et EMPLIR
ont un même agent. Si les agents sont distincts, le sens causal
s'impose parfois: Mon ami arrivant, nous nous asseyons à table.
La circonstance (temps = maintenant nous nous asseyons); Mon ami arrivant, je suis
temporelle content de l'avoir près de moi le jour de mon anniversaire. (cause)
exprimée par:
• Participe passé:
Papa sorti, nous restâmes seuls. (postériorité)
L'examen passé, j'étais libre.
PARTICIPE La proposition circonstancielle réduite, construite avec le participe
ou passé incorpore souvent un circonstant de distance temporelle ou de
GÉRONDIF
simultanéité:
Papa une fois sorti, nous restâmes seuls.
L'examen passé il y a déjà une semaine, j'étais libre.
Une fois sortis de Rome, la gaieté, un moment réprimée par
les combats que chacun avait livrés au sommeil, se réveilla
soudain. [Balzac]
L'agent du procès exprimé par une proposition participiale peut être
exprimé ou, sinon, il est identique avec l'agent du procès principal:
Aussitôt la lectureSujet terminée, Marie referma le livre.
Partie depuis trente ans pour travailler en ville, Marie arriva un
beau jour dans son village natal.
Sitôt pris, sitôt pendu. (même sujet implicite)
• Nominalisations et circonstancielles elliptiques:
Il y a certaines formes nominales ayant un sens verbal très marqué:
La circonstance Pendant ses études à la faculté, il avait loué un petit
appartement. études nominalisation < verbe
temporelle
Des noms comme: (ses) études, (son) travail, (notre) départ, (son)
exprimée par: retour, et d'autres comme: course, examen, opération, intervention,
discours, allocution, exécution, arrêt, voyage, chemin, route, etc.
GROUPE sont reliés du point de vue sémantique à la classe verbale.
NOMINAL :
Depuis son hospitalisation, il se sent mieux.
Depuis son mariage, elle a perdu la joie de vivre.
prép. + N Sur le plan syntaxique, les nominalisations forment des syntagmes
nominaux ayant une fonction circonstancielle (voir le chapitre sur les
circonstants). Ces nominalisations peuvent être considérées des
circonstancielles elliptiques:

201
La subordonnée circonstancielle temporelle

Au sortir, je m'arrête discuter avec lui. À la fin on se retrouva


dehors. À table il ne me dit rien. Au déjeuner, je le lui ai dit.
Au réveil, il ne se rappela plus le rêve.
Pendant toute la messe, elle éprouva une angoisse.
Le verbe être peut être réduit aussi:
Debout, il m'en demanda des nouvelles.
(= quand il fut debout)
Dans la rue, il me dit enfin ce qui le tourmentait.
(= quand nous étions arrivés dans la rue).
Malade, il ne voulait pas garder le lit (=quand il était malade).
Sur l'escalier, il se tourna vers moi. (= quand il était en train de
monter l'escalier).

Idées à retenir
• Il y a deux types fondamentaux de phrase temporelle:
– la phrase temporelle d ' a n t é r i o r i t é , du type avant que, qui se construit avec le mode
subjonctif dans la subordonnée;
– la phrase temporelle de p o s t é r i o r i t é / s i m u l t a n é i t é , de type après que ou quand,
construite en général avec les modes indicatif/ conditionnel dans la subordonnée.
• Ces dénominations ne caractérisent pas la temporalité de la subordonnée, mais la
perspective depuis laquelle est exprimée le repère donné dans la subordonnée: la
perspective antérieure, respectivement postérieure/ simultanée, traduit la position
temporelle de la principale, relativement au fait exposé dans la subordonnée.
• La subordonnée temporelle introduit une indication ou un "repère" de nature temporelle:
– certains de ces repères situent un événement sur un axe chronologique: l'événement
principal est antérieur, simultané ou postérieur au repère;
– d'autres repères servent à marquer l'intervalle, les bornes ou limites (le début ou la fin)
d'un procès (état, action, événement).
• La référence temporelle se retrouve non seulement dans la forme verbale (simple ou
composée), mais aussi dans le sens des verbes ou de la prédication tout entière ainsi que
dans les circonstants temporels. Le croisement des références temporelles permet de définir
selon une perspective autonome les deux procès présentés en relation temporelle.
• La subordonnée inverse représente un conflit entre la "perspective" des choses réelles et
celle d'ordre discursif: le repère est donné dans la principale et il caractérise le temps de
déroulement du procès subordonné.
• L'expression de la temporalité est souvent solidaire avec l'expression de la cause, de la
finalité, de la concession, de l'opposition, etc.
•Il y a des propositions temporelles avec "nuance" causale, concessive, etc. Il y a aussi
des mots subordonnants polyvalents: quand/ lorsque, comme, aussi loin (longtemps) que
etc. : Quand je le vois, je l'embrasse. (temps); Quand je le vois si gentil, je l'embrasse
(cause); Quand je l'appelle, il tourne la tête. (condition) Quand bien même je l'inviterais, il
ne viendrait pas (concession).

202
La subordonnée circonstancielle temporelle

 Les clés du test d'autoévaluation


Corrigé de l'exercice 1 :
travailler ; PAYER nos salaires (aussi longtemps que : SIMULTANÉITÉ)
PARLER ; regarder; (pendant que : SIMULTANÉITÉ)
le voir ; SE PERDRE ; (chaque fois que: SIMULTANÉITÉ)
se rencontrer; Y AVOIR une petite dispute. (toutes les fois que: SIMULTANÉITÉ)
s'ouvrir; SE RUER (dès que : POSTÉRIORITÉ IMMÉDIATE)
Corrigé de l'exercice 2:
Quand se remplace par : dès que; après que; au moment où; pendant que.
Corrigé de l'exercice 3:
• La jeune femme (...) frissonna dès que cet homme, qu'elle regardait, tourna sur elle deux
yeux sans chaleur. (postériorité immédiate)
•Chaque fois que les voyageurs s'arrêtaient, celui qui les examinait finissait par douter
qu'ils eussent remué. (simultanéité, procès itératif)
•Au moment où le souper devint une orgie, les convives se mirent à chanter.
(simultanéité du point de départ)
•Les événements le surprirent pendant qu'il était encore sous le charme de cette
printanière hallucination. (simultanéité, vision sécante)
Corrigé de l'exercice 4:
Mon ancien ami me rend visite chaque fois qu'il arrive dans la ville où j'habite avec ma
famille.  avant qu'il arrive dans la ville où j'habite;  dès qu'il arrive dans la ville où
j'habite;  quand il arrive dans la ville où j'habite;  lorsqu'il arrive dans la ville où
j'habite; aussitôt qu'il arrive dans la ville où j'habite.

203
La subordonnée circonstancielle temporelle

→ Test de contrôle 9

Ce test est administré à l'issue de l'unité d'apprentissage 9.


Pour réaliser ce test, il est conseillé de relire l'unité et de suivre attentivement les phrases
données à titre d'exemple pour chacune des valeurs discursives de la proposition
temporelle, ainsi que les explications sur le repère temporel, et sur l'emploi des mots
subordonnants spécifiques ou non spécifiques pour rendre le rapport de simultanéité/
postériorité ou d'antériorité.

Ne manquez pas de transmettre ce test à votre tuteur. À cet effet, il convient de marquer
votre nom, votre prénom et votre adresse personnelle sur la première page de votre copie.
N'oubliez pas de mentionner aussi le numéro du test. Vous êtes supposés le recevoir
après correction, avec les commentaires de votre tuteur.

Bon travail !
Exercice 1 (2 points)
Complétez par des propositions subordonnées temporelles:
Je lui ai parlé beaucoup avant que….
Nous n'avons pas connu le bonheur avant que…
Vous avez eu peut-être une grande surprise avant que …
Les enfants sont toujours timides avant que ….
Tout le monde doit consulter un spécialiste avant que …
Mon père était décidé de renoncer à son plan avant que….

Exercice 2 (2 points)
Introduisez un mot subordonnant convenable pour marquer un rapport temporel:
1. Ce jeune homme était très peu connu ….. qu'il obtienne d'excellents résultats en
informatique.
2. ….. qu'il a connu sa femme, il l'a aimée passionnément.
3. La neige continuera à tomber …… que les rues, les arbres, les toits des maisons etc.
deviennent tout blancs.
4. …. mes enfants dormaient, les parents préparaient leur travail pour le lendemain.
5. Cet incident aurait passé inaperçu….. tout le monde ne s'en aperçoive.

Exercice 3 (3 points)
Dans les phrases ci-dessous, identifiez les subordonnées circonstancielles en précisant
dans chaque cas le rapport logique marqué et le mot de relation:
Quand Léon sentait la semelle de sa botte poser dessus, il s'écartait comme s'il eût
marché sur quelqu'un. [Flaubert]
Mme Bovary détourna la tête pour qu'il ne vît pas sur ses lèvres l'irrésistible sourire
qu'elle y sentait monter.» [ibid.]
Ces entretiens se tenaient dans le jardin, sous des pommiers, quand Carré avait
achevé son travail du jour (...)[Nizan]

Exercice 4 (3 points)
Réunissez ces propositions indépendantes (juxtaposées ou coordonnées) dans une seule
phrase complexe à l'aide d'une locution conjonctive temporelle :
«Jeanne refusa ce jour-là de sortir et nous passâmes l'après midi dans le petit
salon de ma tante.»

204
La subordonnée circonstancielle temporelle

«J'entrai dans le salon, Massard me tendit la main, elle était moite.»


«Le dîner se termina; nous descendîmes dans le jardin; des hannetons venaient
se cogner contre la soie de l'abat-jour.»
«Marie-Anne entendit le moteur de l'auto; elle descendit les premières marches de
l'escalier.»
«Au matin il débarqua, des bateliers s'emparèrent de ses valises, de son corps; il
se laissa guider» [Nizan]

Références bibliographiques

• CRISTEA, T., Grammaire structurale du français contemporain (chapitre 5.9. Le


groupe adverbial: la détermination temporelle), Bucureşti, Editura Didactică şi
Pedagogică, 1979.
• GREVISSE, M., Le bon usage. (Quatrième partie, Les propositions subordonnées:
Propositions temporelles), XIème édition, Louvain-la-Neuve, Duculot; 1980, ou:
GREVISSE, M. – GOOSSE, A. (éd.), Le bon usage. Grammaire française, Louvain-
la-Neuve, Duculot, 1990 (et éditions suivantes).
• WAGNER, R.-L., et PINCHON, J., Grammaire du français classique et
contemporain (chapitre: Syntaxe des phrases complexes, Les propositions
dépendantes circonstancielles: Les propositions dépendantes temporelles), Paris,
Hachette, 1962 (nouvelle édition: 1991).

205
La subordonnée circonstancielle de cause

Unité d'apprentissage 10

LA SUBORDONNÉE CIRCONSTANCIELLE DE CAUSE

Sommaire page

Les objectifs de l'unité d'apprentissage 10 206


10.1. Définition du rapport logique de cause 207
10.2 L'ordre temporel et l'ordre séquentiel 208
10.3 Réalisation linguistique de la proposition causale 208
10.3.1 Conjonctions et locutions conjonctives introduisant la cause 208
Test d'autoévaluation 217
10.3.2 Choix de la forme verbale (mode, temps) 218
10.3.3 Tours de phrase particuliers marquant la cause 220
10.3.4 La subordonnée circonstancielle de cause réduite 221
Idées à retenir 223
Les clés du test d'autoévaluation 223
Test de contrôle 10 234
Références bibliographiques 235

Les objectifs de l'unité d'apprentissage 10

Quand vous aurez parcouru ce chapitre et effectué les exercices, vous serez capables de:

• Reconnaître le rapport logique de détermination causale entre deux faits réels.


• Identifier les multiples valeurs discursives réalisées par la proposition de cause.
• Employer correctement les conjonctions et les locutions conjonctives introduisant
une cause.
• Distinguer entre différents moyens d'expression de la cause.

206
La subordonnée circonstancielle de cause

10.1. Définition du rapport logique de cause


La subordonnée de cause présente les circonstances ayant
déterminé la réalisation du fait énoncé dans la proposition principale,
en attribuant un rôle effectif à un certain procès (état, activité,
événement) dont elle affirme l'existence.
La proposition causale apporte donc une double information:
Le rapport
elle contribue à décrire une situation dans laquelle deux procès sont
logique de reliés par un rapport de causalité; en même temps, la phrase qui
cause s'établit renferme une cause s'inscrit nécessairement dans la stratégie du
entre deux
sujet locuteur d'apporter dans le discours une argumentation.
a) La proposition de cause décrit une situation, ayant ainsi un
faits réels:
caractère descriptif ou factuel :
Parce qu'il était fatigué, Jean s'endormit tout de suite.
Fait 1 = cause;
Fait 2 = effet fait 1  fait 2
détermination causale
L'expression de la cause permet d'établir un lien entre un fait
premier, la fatigue de Jean, et un fait qui lui succède comme un effet
naturel, celui de s'endormir vite. Nous avons noté par fait1 ou
antécédent, le contenu de la proposition causale, et par fait2 ou
descendant, contenu de la proposition principale:
fait 2 (effet) fait 1 (cause)

Princ. Subord. Cause


Les indices numériques montrent que le fait décrit dans la principale
survient à un moment 2, postérieur au fait décrit dans la
subordonnée (moment 1, antérieur). Le même rapport logique peut
s'observer en analysant le contenu des phrases suivantes, (i) à (v) :
Situation décrite:
Phrases contenant une proposition causale CAUSE (fait1) – EFFET (fait2)
(i) L'enfant a la fièvre parce qu'il a pris froid. (i) froid1 – fièvre2
(ii) Puisqu'il s'est fait soigner par un bon médecin, il s'est rétabli vite (ii) soins médicaux1 – rétablissement
(iii) Comme il est heureux d'avoir réussi son examen ! (iii) réussite1 – joie et bonheur2
(iv) Je dois y aller puisque maman le veut. (iv) ce que veut1 maman – obligation2
pour moi
(v) La lettre était déjà arrivée à sa destination, étant donné qu'elle
avait été expédiée il y a deux semaines. (v) envoi1 de la lettre – arrivée2 à
destination

b) La phrase causale a aussi un caractère argumentatif ou discursif,


parce qu'elle implique l'existence d'une personne de discours dans
l'esprit de laquelle s'établit le raisonnement causal, le lien
déterminatif entre le fait antécédent ou cause, et l'effet déclenché.
Observons que le fait réel de s’endormir est mis en relation causale
avec la fatigue du même agent; mais cette relation de cause à effet
n'est pas un simple lien établi par le discours. C'est un rapport qui se
fonde sur une "loi naturelle" (la fatigue d é t e r m i n e naturellement le
sommeil). Les lois du raisonnement factuel, fixant nos
connaissances sur les causes et les effets dans le monde réel,
restent sous-entendues lors de l'interprétation des phrases de ce

207
La subordonnée circonstancielle de cause

Caractère
type. Ce ne sont pas ces lois (que tout sujet locuteur devrait
connaître) qui constituent l'objet véritable de la communication. Si un
argumentatif locuteur prononce la phrase citée ci-dessus, c'est qu'il veut affirmer
de la phrase quelque chose de plus que le simple lien causal régulier entre la
causale fatigue et le sommeil. Ce qui rend pertinente une phrase causale est,
en effet, la loi naturelle sous-entendue sur laquelle repose la vérité
logique d'une phrase; mais au-delà de la situation décrite, ce qui
assure l'utilité dans la communication d'une telle phrase est
l'engagement effectif du locuteur dans son témoignage discursif sur
la situation décrite.

10.2 L'ordre temporel et l'ordre séquentiel


L'ordre dans le temps. Le procès exprimé dans la subordonnée de
cause est toujours antérieur au fait décrit dans la proposition
principale (régissante): la CAUSE doit précéder dans la réalité son
EFFET. Afin de nous rappeler cette règle de base servant à
Ordre séquentiel l'interprétation des phrases causales, nous avons noté
La place qu'occupe conventionnellement par fait1 l'éventualité considérée comme le
la subordonnée procès "déclencheur" ou "causateur" d'un autre procès, et par fait2 –
l'éventualité qui se produit ou qui surgit comme "effet déclenché".
de cause:
Entre le procès "cause" et le procès "effet", une relation de
►avant détermination s'établit, impliquant un lien de causalité entre les deux
la principale éventualités. Non seulement le fait1 est, du point de vue
►après chronologique, antérieur au fait2 présenté dans la principale, mais
en plus, du point de vue logique, ce fait principal doit être réel. Le
la principale
prédicat principal est d'habitude à l'une des formes passées de
l'indicatif (voir ci-dessous d'autres considérations sur la forme
verbale dans la phrase causale).
L'ordre séquentiel. Par rapport à la proposition principale, la
proposition circonstancielle de cause peut être:
►antéposée : Puisque P, alors Q ou :
►postposée : P, parce que Q
Avec certains mots subordonnants (comme, et, dans le style "formel":
vu que, attendu que, étant donné que), la proposition de cause est
antéposée; après d'autres mots subordonnants (à preuve que; surtout
que) la proposition de cause est postposée. Il y a une préférence pour
exprimer la cause réelle avec subordonnée postposée, et une
préférence encore plus marquée pour exprimer la cause justifiante
avec subordonnée antéposée.

10.3 Réalisation linguistique de la proposition causale

10.3.1 Conjonctions et locutions conjonctives introduisant la cause


Le sens global de la phrase complexe varie en fonction de la nature
des deux procès associés, de la forme verbale choisie, mais surtout
du sens des mots subordonnants. Les principaux connecteurs du
rapport de causalité sont spécialisés pour l'expression de l'une ou de
Sous-types l'autre des valeurs discursives de l'argumentation causale:
(I) la cause réelle du procès évoqué par la principale;
de propositions
(II) la fausse cause (ou cause non réelle, fictive, irréelle,
de cause alléguée, etc.), c'est-à-dire le rejet du lien causal.
208
La subordonnée circonstancielle de cause

Dans cette section, nous passons en revue les principaux mots


subordonnants du rapport causal, en tenant compte de leur valeur
d'interprétation particulière. La présentation qui suit réunit donc deux
paramètres distinctifs de la phrase causale:
– la valeur sémantique ou discursive des énoncés qui expriment une
cause;
– le mot subordonnant spécifique pour ces valeurs.

Exercice d'entraînement  À vous d'analyser :

Identifiez les prédications de la subordonnée et de la principale, qui


expriment les deux situations de fait reliées par un rapport logique de
causalité :
1. Comme la loi française lui donne le droit de se faire représenter par son avocat, il ne se
présenterait pas au tribunal lors de son procès. [La Tribune] 2. Il passait d'ailleurs pour un
profond politique, peut-être parce qu'il riait rarement, et citait toujours M. de Metternich ou
Wellington. [Balzac] 3. Elle se réveillait tout à coup, parce qu'ils faisaient en s'en allant
claquer leurs sabots sur les dalles. 4. Il se portait bien, il avait bonne mine; sa réputation était
établie tout à fait. Les campagnards le chérissaient parce qu'il n'était pas fier. 5. J'ai
soupçonné l'accusé, parce qu'il savait où nous mettions la clef de notre armoire, et qu'il a
fait de grandes dépenses depuis le vol. [Stendhal]
Prédicat de la subord. cause Prédicat de la principale
fait1 …………………………………….. fait 2 ……………………………………
fait1 …………………………………….. fait 2 ……………………………………
fait1 …………………………………….. fait 2 ……………………………………
fait1 …………………………………….. fait 2 ……………………………………
fait1 …………………………………….. fait 2 ……………………………………
fait1 …………………………………….. fait 2 ……………………………………

I. L'expression de la cause réelle

a) La cause réelle apportant une information


• Mots subordonnants stylistiquement neutres :
►parce que (emploi général)
Pour les locutions: de ce que ; du fait que ; par cela (même) que,
voir ci-dessous, la cause emphatisée, la cause explicite.
• La locution à cause que connaît un usage très rare dans le
français standard actuel (emploi populaire), mais elle apparaît
souvent dans des textes de grands auteurs du XVIIe s. :
« Ainsi, à cause que nos sens nous trompent quelquefois, je
voulus supposer qu'il n'y avait aucune chose qui fût telle qu'ils
nous la font imaginer.» [Descartes] (=parce que nos sens nous
trompent souvent, j'ai voulu supposer qu'aucune chose ne soit
telle que nous l'imaginons quand elle se présente par nos
sens.)

209
La subordonnée circonstancielle de cause

Mots subordonnants marqués stylistiquement:


►étant donné que [=raisonnement formel]
►vu que
►attendu que
►du fait que (en considération du fait que)
Tous les problèmes de ces enfants naissent du fait qu'ils n'ont
pas de mère ou de père véritablement reconnu. (les problèmes
naissent à cause du fait que… )
Texte juridique • En considération du fait que est plutôt une construction "libre",
pour illustrer l'emploi
des locutions
formée à partir de la locution prépositionnelle en considération de.
conjonctives de cause Les grammairiens considèrent qu'il s'agit d'un circonstant de cause
marquées exprimé par le nom abstrait fait, suivi d'une proposition relative. Le
stylistiquement : participe dans: considérant que, considéré que, et autres formes
du verbe considérer (="regarder attentivement") s'emploient aussi
pour exprimer la cause par des tournures libres, moins
Attendu qu’ au vu du grammaticalisées:
dossier administratif, il y a Puis, considérant la mine mélancolique du svelte animal (un
lieu de ramener le débet chien) qui bâillait avec lenteur, elle s'attendrissait (…).
[Flaubert].
global arrêté au montant de
Appartenant à la même famille lexicale, le nom "le considérant" est
…mille F, (…), étant donné un synonyme contextuel des noms: motif, raison, cause, motivation,
que ce droit était constaté à justification.
charge de la Direction du • Étant donné que est en revanche une locution conjonctive
ministère en raison d’une
grammaticalisée, d'où son caractère invariable: "étant donné les
circonstances" (et non pas avec l'accord en genre et en nombre:
occupation occasionnelle "étant données les circonstances…"). La construction figée (sans
de locaux de accord) est régulière, mais la construction libre (avec accord) est
l’établissement scolaire en attestée aussi, considérée comme une forme "hypercorrecte".
cause; que, partant la • L'emploi de ces locutions est restreint aux discours "formels":
administratif, juridique, politique, philosophique, scientifique,
partie …. (…); PAR CES
explicatif, didactique etc. Dans l'extrait textuel proposé ci-contre, les
MOTIFS, Vu l’article 180 locutions conjonctives: attendu que, étant donné que, les loc. prép.:
de la Constitution (…), la au vu de, en raison de, la préposition: vu (invar.), ainsi que les
Cour condamne X… à circonstants de cause anaphoriques: par ces motifs et partant sont
caractéristiques à un certain type de texte officiel (juridique, dans ce
verser au Trésor public la
cas).
somme de… (…). Dans le langage de tous les jours, il serait surprenant
d'employer ces mots subordonnants, stylistiquement marqués, et
[extrait de l'Arrêté d'une dont le sens est celui de délimiter le rapport de causalité d'une
Cour des comptes] manière non ambiguë, afin d'exprimer une cause "formelle" (légitime,
vraie, correcte etc.).
On observe que dans les documents officiels, l'exposé des motifs
précède la décision administrative: le fragment cité ci-contre n'a de
proposition principale qu'à la fin du texte1: la Cour condamne X a verser
une somme…, proposition principale, qui rattache la multitude de
subordonnées causales antérieures, introduites par: attendu que,
étant donné, (vu, mot invariable, est ici une préposition qui introduit un
circonstant causal), et par le substitut de conjonction, que.
1
C'est la décision administrative qui constitue la proposition principale: «Vu que...; attendu que ... etc.
(motivation), nous décidons que...(décision)».

210
La subordonnée circonstancielle de cause

L'illustration textuelle proposée permet aussi de remarquer que


différents constituants peuvent s'intercaler entre attendu que et le
prédicat auquel cette locution se rapporte: «Attendu que (au vu
de….) il y a lieu de …» (voir le texte, ci-contre). Il convient de
Mots
remarquer aussi le cumul de procédés (attendu + dès lors, avec rejet
du formant QUE) :
subordonnants Attendu, dès lors, que le cité doit être tenu pour
spécifiques responsable…
pour les Attendu, d’une part, que le cité….…
différentes
Attendu, d’autre part, qu’il a été ..
Attendu qu’eu égard à ces circonstances particulières, la
valeurs Cour considère ne devoir condamner le cité qu’à
discursives rembourser une partie…
de la cause • Dans les échanges informels (les conversations, par exemple), on
ne s'attend pas à ces mots subordonnants. Et pourtant:
Que mademoiselle se dépêche un peu d'rentrer, vu que nous
sommes en retard ! (citation littéraire, apud TLF)
Cette phrase montre que, dans une situation courante de
communication, le locuteur cherche à s'exprimer comme dans le
langage soutenu, officiel. L'auteur a transcrit donc la prononciation
populaire du personnage (d'rentrer) qui fait un emploi inadéquat de la
locution conjonctive vu que, en voulant imiter les discours formels.
•Toutes ces tournures, dont l'emploi est limité comme registre de
langue, s'emploient dans des situations de communication
spécifiques, pour rendre des raisonnements corrects, scientifiques,
rigoureux, clairs, sans ambiguïté. Le besoin d'éviter l'ambiguïté
apparaît dans les discours d'autorité, non seulement langue officielle
(administrative et juridique): l'expression non ambiguë de la causalité
apparaît aussi dans le discours théorique (la dissertation
philosophique, l'explication scientifique etc.) :
«Mais la nature n'a pas de privilège dans ce sens-là, nous
faisons tous partie de ce "déchet virtuel", étant donné que les
forces humaines, productives, etc., subissent le même sort que
les éléments naturels.» [Baudrillard, discours philosophique]
Les textes journalistiques puisent souvent aux divers discours
théoriques:
Étant donné l'extrême densité des textes de Camus, l'attention
au détail, la patience, l'insistance sont méthodologiquement
cruciales. [E.SAÏD] (commentaire dans Le Monde
diplomatique).

b) Cause réelle apportant une justification


• La cause justifiante n'apporte pas une information nouvelle. Cette
cause apparaît d'habitude en position thématique, en début de la
phrase, la conjonction spécialisée pour cette valeur sémantique
étant puisque (la cause pure) ou: comme, du moment que;
maintenant que; quand; lorsque; alors que (avec nuance
d'opposition). Nous examinons ci-dessous ces mots de relation
causale.
• Le connecteur spécifique pour la cause justifiante est:
►puisque

211
La subordonnée circonstancielle de cause

Cette conjonction, qui a perdu tout sens temporel, invoque un fait


Mots déjà connu, notoire, généralement accepté :
Allons-y donc puisque on est là. [Echenoz]
subordonnants
de sens causal :
"À quoi bon faire trop d'efforts, puisque c'est la crise!"
[Baudrillard, interview]
– cause réelle (On souligne qu'il faut se rendre à l'évidence, et donc admettre ce que
tout le monde sait, à savoir que: «C'est la crise ! »)
– cause Puisque cela est l'inconnu, on ne peut pas dire "voilà ce qui va
justificative être, et voilà ce qu'il faut faire".
L'homme est [existe], et puisqu'il est, je préfère dire que c'est
bien qu'il soit. [discours philosophique]
• Les connecteurs non spécifiques pour la cause ont un sens
primaire temporel :
►comme
►du moment que
►maintenant que
►quand
►lorsque
►alors que (nuance d'opposition)
Pourquoi faire tous ces efforts, quand il est déjà trop tard !?
L'adverbe relatif quand, non temporel, en emploi argumentatif causal
dans une phrase souvent interrogative, a le sens de: puisque, du
moment que.
Maintenant que nous sommes seuls, s'écria l'artiste, et que
vous n'avez plus à craindre l'effervescence de ma passion,
dites-moi que vous m'aimez. [Balzac] (cause –
temps)
• Il y a aussi des phrases complexes dans lesquelles la cause
justifiante apparaît dans une proposition postposée introduite par:
►à preuve que (fam. et pop.)
►la preuve que ; la preuve c'est que ; preuve que
(fam. et pop.)
►dès lors que (soutenu)
►dès le moment que (fam., pop.)
Tout l'intérêt du PACS est, précisément, d'offrir aux couples qui
ne veulent pas ou qui ne peuvent pas se marier des droits
nouveaux dès lors qu'ils souhaitent une stabilité de vie
commune et l'affirment socialement. (offrir aux couples des
droits parce qu'ils souhaitent… = du moment qu'ils veulent…)

Valeurs particulières de la cause réelle :

c) La cause supplémentaire ou la cause particulière exprime une


cause qui se distingue parmi d'autres facteurs ayant contribué à la
réalisation du procès:
►même parce que
►surtout que (familier)
212
La subordonnée circonstancielle de cause

►d'autant plus que


►d'autant moins que
Mots Ces connecteurs soulignent le fait que, parmi un faisceau de faits
subordonnants déterminatifs, parmi la multitude de causes potentielles, on en choisit
une particulière, considérée comme la plus importante sur le plan de
de sens causal :
l'argumentation :
– cause En tant que toujours en mouvement vers (...) notre Ithaque, le
supplémentaire repos satisfait d’une réponse, doit nous être exclu et cela
d’autant plus que la vérité elle-même ne pose pas.
Il ne nous sera pas possible d’effeuiller la fleur de la vérité (…).
– cause mise en
emphase D’autant plus qu’avec Jankélévitch, la vérité n’est pas non
plus attestable par quelque diplôme que ce soit (…).
d) La cause explicite, parfois emphatisée (s'accompagnant avec
le rejet d'une fausse cause), met en relief une cause :
►adv. justement + parce que (langue standard)

►c'est pourquoi
►c'est par / pour cela que (subordination inverse)

►par cela que (litt.)


►par cela même que (cause emphatisée,
explicite)
►pour/par ce que
C'est pour cela que les nouvelles générations vous regardent
comme un modèle de provocation, de défi... [Libération]
C'est par cela que/ c'est pourquoi nous résistons au climat
morbide dans lequel nous vivons.
La vie est très belle par cela même que tout ne va pas mal
partout. [Baudrillard]
e) Les tours emphatisés détachent la proposition causale en tête
de la phrase (c'est parce que, c'est pourquoi), et donnent la
proposition principale après que, qui n'est pas, dans cet emploi, une
conjonction de subordination, mais seulement une "cheville"
grammaticale:
Ce n'est pas parce qu'il avait été malade, qu'il a manqué hier
les classes. Prop. principale: [qu'] il a manqué hier les classes.
Je vous fais cette proposition justement parce que vous vouliez
y aller. (… et non pour une autre raison).
Comparez :
– tour emphatique: C'est par cela qu'elle a gagné, parce qu'elle
s'est préparée d'avance.
– tour non emphatique: Elle a gagné par cela qu'elle s'est préparée
d'avance.

f) Les phrases contenant des raisonnements déductifs font emploi


des locutions conjonctives qui renferment un pronom démonstratif (à

213
La subordonnée circonstancielle de cause

L'expression fonction cataphorique, c'est-à-dire qui anticipe le contenu de la


proposition énonçant la cause):
du
►de ce que
raisonnement
►par cela même que
déductif ►par cela que
• Selon certains auteurs, ces tours ne sont pas interprétables comme
expression de la cause, car la proposition après le pronom ce ou
cela est une proposition relative avec des significations contextuelles
diverses : cause, instrument, moyen, manière, relation.
Ma chère amie, tu me vois fort troublé, fort triste et fort
embarrassé de ce que j'ai à t'avouer. [Stendhal]
être embarrassé de cela (Compl. d'objet indirect)
être embarrassé à cause de cela (Circ.cause)
Je ne m'inquiète jamais de ce qu'elle fait. [ibid.] (objet indirect)
Le même rôle d'élément substitutif est parfois rempli par le substantif
L'argumentation fait, de sens abstrait:
causale: Supposons un instant que la monarchie française dans l'état
actuel ressemblât à l'ancien empire romain, (…) vous voyez
analyse
clairement que par cela même qu'on se conduit mal à Rome
de la valeur aujourd'hui, on ferait bien d'adopter ici tous les règlements de
contextuelle Rome. [Galiani] (il y a aussi d'autres marqueurs du
de certaines raisonnement déductif : supposons, vous voyez clairement, le
conditionnel dans la principale : on ferait bien… )
phrases
Les richesses qui se trouvent ainsi collectionnées dans (…) la
civilisation apparaissent désormais comme identifiées pour
toujours. Cette conception fait bon marché du fait qu’elles
doivent (...) leur existence (…) à un effort constant de la
société. [Benjamin]
• Reprise anaphorique de la proposition de cause par le nominal
abstrait fait ou par le pronom cela :
Nous pouvons avancer l’idée que la vérité si elle détient le
dernier mot ce ne serait pas parce qu’elle parlerait en dernier,
mais plutôt parce qu’elle se place au dessus de tous les mots.
De ce fait elle leur donne sens. [discours philosophique]
Dans le texte il y a deux propositions causales au conditionnel
(spécifique pour rendre dans le contexte le raisonnement déductif):
Cause 1= parce qu'elle parlerait en dernier et Cause 2= parce qu'elle
(la science), se place au-dessus de tous les mots. Ces deux causes
supposées sont reprises dans le contenu contextuel du nom
générique fait:
De ce fait elle leur donne sens = la science donne sens aux
mots à cause de 1 et de 2.

214
La subordonnée circonstancielle de cause

• La cause alternative ou cause incertaine:


Mots
subordonnants ►selon que …, ou selon que ….
de sens causal : ►ou que …, ou que…. cause imaginée (+SBJ)
►soit que…, soit que ….

– cause alternative ►suivant que… (+IND)


►soit parce que…, soit parce que ….(+IND)

La cause réelle n'étant pas connue, la phrase complexe sert à


exprimer un raisonnement qui prend en compte l'éventuel cours des
événements limité à une alternative:
Le petit garçon, de son côté, faisant des fagots de bois mort et
des bottes de bruyère, se voyait exposé souvent aux reproches
de Tord-Chêne, soit parce qu'il n'en avait pas assez rapporté,
soit parce qu'il s'était trop occupé à causer avec la petite
pêcheuse. (conte)

II. L'expression de la « fausse cause »

Les grammaires emploient une variété de termes quasi-synonymes


pour parler de ce rapport logique dans la phrase: la cause non
réelle, écartée, rejetée, fictive, réfutée, niée…
• La cause peut être écartée ou niée comme argument, même
quand on accepte la réalité du fait qu'elle exprime:
Mots ►non parce que + IND
Il l'aimait non parce qu'elle était belle [elle l'était en effet], mais
subordonnants
pour elle-même. Il disait cela, non parce qu'il était d'accord [il
de sens causal : l'était ou non] avec son père, mais parce il ne voulait pas le
contredire.
– cause fausse • La cause rejetée comme étant non sincère, non vraie (fausse
allégation):
► sous prétexte que + IND ou COND
– cause rejetée ► soi-disant que
Et vous refusez le PACS sous prétexte qu'il constituerait une
– cause écartée véritable usine à gaz.
Sous prétexte qu'il serait pris avec son projet de fin d'études,
il ne s'est présenté à aucun examen.
La négation • Marqueurs pour la cause fictive, fausse (irréelle):
d'une cause ► non que + SBJ.
amène ► non pas que + SBJ.
► non point que + SBJ.
le subjonctif ;
► ce n'est pas que + SBJ.
ces phrases ne
► sans que + SBJ.
décrivent pas ► faute que + SBJ. (très rare)
des situations, elles ► ce n'est pas parce que + IND
ont Tous ces mots subordonnants ont un formant négatif (le morphème
seulement
grammatical ne ou non, ou un sens négatif lexical comme dans les
mots: sans, faute = "un manquement, une absence, une condition
un rôle argumentatif

215
La subordonnée circonstancielle de cause

précaire"). Par conséquent, la forme verbale après ces locutions


conjonctives est le subjonctif.
Nous devons renoncer à ce projet, non qu'il soit impossible à
réaliser, mais il est déjà trop tard pour lui trouver un
financement.
Choisissez un autre livre, non que celui-ci ait un sujet trop
difficile, mais il serait bon de commencer par les bouquins qui
traitent les aspects généraux du problème.
Ce n'est pas que les piqûres fassent peur. (= une cause
rejetée, niée).
Comparez à:
Ce n'est pas parce que les piqûres lui font peur, qu'il veut des
tablettes à la place. (= une cause écartée comme argument,
sans nier la réalité du fait).

• L'expression de la cause présomptive (avec verbe modal de


"nécessité" dans la principale):

► pour que (subordination inverse)


2
► pour + INF
Elle doit être malade pour qu'elle s'absente ce soir.
(Elle s'est absentée ce soir, parce que – selon toutes apparences –
elle a été malade – autrement elle ne se serait pas absentée)
Il devrait être encore sorti pour ses courses pour qu'il ne
réponde au téléphone à cette heure. (le verbe modal devoir
dans la principale)

2
Proposition causale "réduite", voir la section 9.4. ci-dessous.

216
La subordonnée circonstancielle de cause

Test d'autoévaluation
Pour bien gérer ce test, il est indispensable que vous ayez déjà parcouru les explications et
les analyses données dans l'unité d'apprentissage 10. Vérifiez vos solutions aux exercices
en consultant la rubrique Clés du test d'autoévaluation.

Exercice 1
Construisez trois phrases dans lesquelles la conjonction comme introduit une circonstance
temporelle et trois avec une de cause justifiante.
…………………………………………………………………………………………………….
…………………………………………………………………………………………………….
…………………………………………………………………………………………………….
…………………………………………………………………………………………………….
…………………………………………………………………………………………………….
…………………………………………………………………………………………………….
Exercice 2
Trouvez des propositions principales pour les subordonnées suivantes:
1. …, puisqu'ils veulent le faire partager. 2. …, puisqu'on est coupé de sa propre culture.
3. …, puisqu'elle vient de m'écrire.. 4. Puisque vous ne vous ennuyez pas trop dans les
visites que vous avez la bonté de faire à un pauvre vieillard malade, … 5. …, puisque j'ai
trouvé les chiens.
…………………………………………………………………………………………………………..
…………………………………………………………………………………………………………..
…………………………………………………………………………………………………………..
…………………………………………………………………………………………………………..
…………………………………………………………………………………………………………..
Exercice 3
Créez des phrases causales introduites par: parce que, vu que, du moment que, même
parce que, d'autant plus que, c'est pourquoi.
…………………………………………………………………………………………….
…………………………………………………………………………………………….
…………………………………………………………………………………………….
…………………………………………………………………………………………….
…………………………………………………………………………………………….
…………………………………………………………………………………………….
Exercice 4
Soulignez les subordonnées de cause et notez le type de rapport causal marqué:
1. Je vis tantôt d'une manière, tantôt d'une autre, en philosophe, au hasard de la
fourchette. C'est pourquoi je ne suis point délicat comme vous. ____________________
2. N'est-ce pas dans ce même pays que, de nos jours, un paysan se battait avec fureur,
parce qu'on lui avait persuadé que le décret de la Convention sur le divorce l'obligeait à se
séparer de sa femme qu'il adorait ? _________________________
3. Il essaye de parvenir à des phrases brillantes d'esprit, parce qu'il cherche à plaire à la
jeune femme. __________________________
4. Je pourrais imprimer vingt faits comme le suivant, que je n'admets ici que parce qu'il a
été publié dans un journal qui se respecte.____________________________

217
La subordonnée circonstancielle de cause

10.3.2 Choix de la forme verbale (mode, temps)


•La proposition de cause exprime par définition un fait réel, donc la
cause réelle se construit avec l'indicatif.
•La forme temporelle est aussi importante pour déterminer
l'interprétation de la valeur d'une phrase. Par exemple, comme et
Règle générale:
quand, suivis d'une forme verbale composée (passé composé, plus-
la cause se que-parfait, futur antérieur, futur antérieur dans le passé),
construit avec introduisent une proposition causale :
le mode indicatif
Comme le Tour de France a commencé (passé composé) sa
boucle, je me suis penché (passé composé) sur le jargon des
cyclistes.
("je m'intéresse au langage du cyclisme, maintenant, parce que le
Tour de France a commencé" – phrase qui exprime la cause et non
pas un repère temporel: "maintenant que le Tour de France a
commencé, je m'intéresse" = PRÉSENT indicatif)
Comme Luc a vu ce film, nous renonçons/ avons renoncerons
au projet d'aller au cinéma.
Comme Luc avait vu ce film, nous avons renoncé/ renonçâmes
au projet d'aller le voir.
Demain, comme Luc aura sans doute vu ce film, nous
Choix de la forme renoncerons au projet d'aller le voir.
…Et, le lendemain, comme Luc aurait vu ce film, nous
verbale dans la
renoncerions au projet d'aller le voir.
proposition Comme elle vient de terminer son travail, elle se lève sans
causale perdre une minute et se dirige vers les ascenseurs. (= au
moment où elle a terminé, elle s'est levée sans perdre une
minute)  TEMPS. Comme elle avait déjà terminé, elle se leva
et partit. (= puisque/parce qu'elle avait terminé)  CAUSE
• Après une principale impérative à la forme négative, la proposition de
cause exprime une pure virtualité causale (une éventualité à éviter):
Ne prenez pas trop de bagages, parce que vous n'auriez pas
qu'en faire quand vous serez là.
La cause après une Les grammairiens peuvent considérer qu'il y a une cause élidée avec
le sens «en faisant ainsi»:
proposition
…parce que, en faisant ainsi, vous n'auriez pas….
principale Le conditionnel ou le futur (formes en -R-) permettent de présenter
construite avec une pure éventualité (un fait virtuel, mais non accompli):
l'impératif Ne mangez pas tant de pâtisseries, (parce que) vous en auriez
mal au foie. (éventualité: conséquence virtuelle)
Le futur proche n'a pas la même capacité d'évoquer un fait virtuel, en
l'absence du subordonnant parce que, la phrase serait interprétée
comme hypothétique:
Ne sortez pas sans veste, parce que vous allez vous rendre
malades ! (cause virtuelle: il y a le risque de vous rendre malade)
La frontière grammaticale entre cause, conséquence, supposition etc.
est faiblement retracée. Il faut retenir en premier lieu que:

218
La subordonnée circonstancielle de cause

La phrase causale doit exprimer dans la principale un fait réel,


accompli, sinon elle est interprété comme hypothétique, consécutive,
donc comme décrivant une perspective sur les événements et non
une situation de fait.
• Pour la phrase complexe exprimant une fausse cause ou une
cause rejetée, fictive, invoquée sans raison, le mode requis dans la
subordonnée est le subjonctif.
L'emploi du
Les locutions non que, non pas (point) que, ce n'est pas
subjonctif avec la que, faute que et sans que, qui incorporent un formant négatif, sont
fausse suivies du mode subjonctif. Comparez ces locutions avec: sous
cause
prétexte que qui se construit avec indicatif ou conditionnel; non
parce que + IND, car la négation est "à l'extérieur" de la locution
conjonctive, et donc on rejette la validité du raisonnement, sans
rejeter la vérité du fait énoncé dans cette proposition.
Le choix du subjonctif se justifie parce que ce n'est pas un fait
réel qu'on invoque, mais, au contraire, on nie une éventualité:
Non qu'il ne soit pas gentil, mais il a quelque chose de
répugnant. (+ construction adversative, avec mais)
Ce n'est pas que je ne sois pas d'accord.
• Avec un verbe au futur, la valeur causale est plus ou moins atténuée:
Il séduira les experts parce que, en leur donnant un peu
d'espace et de grand large, il les libèrera de leur propre
spécialisation. Il amadouera les militants, parce qu'il leur
donnera de quoi stimuler leurs propres utopies. [Le Figaro]

Exercice d'entraînement
Trouvez la forme verbale correcte dans ces phrases causales:
1. Je me suis représenté que, puisqu'il [PLEUVOIR], je [TROUVER nég.] personne
dans la rue à qui demander mon chemin. Ce raisonnement était bon, mais il avait le
défaut de ressembler à la peur.
………………………………………………………..……………………………………………..
2. Mon ami, parce qu'il [POUVOIR, nég.] rester longtemps seul, il [ALLER] chercher
un peu partout une partenaire.

………………………………………………………..……………………………………………..
3. On [APPELER] romantiques ces auteurs, parce qu'ils [CHERCHER] à plaire à leurs
contemporains par leur états d'âme devant la nature.

………………………………………………………..……………………………………………..
4. La Chambre des députés, (…), [VOULOIR, nég.] voter cette loi, parce qu'elle
[DONNER] à la province une partie des avantages de Paris.
………………………………………………………..……………………………………………..
5. La Roumanie, pays de la «deuxième vague» de l'élargissement, [DEVOIR] ainsi voir
son attrait redoubler pour les investisseurs étrangers, d'abord parce qu'elle [RESTER]
encore quelque temps un des ateliers les moins chers de l'Union européenne.
………………………………………………………..……………………………………………..
Note: L'une des solutions possibles à cet exercice sera de choisir les formes que voici
(dans un ordre aléatoire): PR, PR, PC, CDT, CDT, dans les principales, et,
respectivement: PR, IMP, IMP, PC, FS dans les subordonnées. Pour les symboles des
formes verbales, consultez la Liste des abréviations, à la page 4.
219
La subordonnée circonstancielle de cause

10.3.3 Tours de phrase particuliers marquant la cause


• Subordonnées multiples
Variété des Une seule principale peut associer une multitude de circonstancielles
moyens de cause, dans une rhétorique "cumulative", assurant une
d'expression progression démonstrative, et donc une efficacité persuasive:
Ceci, parce que les lois des hommes sont imparfaites et que
de la cause
l'on doit toujours rechercher les conseils là où l'information est
la plus fidèle; et quoi de plus juste que la Justice elle-même.
Aussi, parce qu'en se dérobant d'une loi imparfaite on se
dérobe encore plus aux Lois parfaites. Enfin, parce qu'en
respectant les Lois du ciel des idées on ne peut faire que le
bien, et on doit toujours faire le bien.
Causes multiples, signes d'une stratégie rhétorique soutenue:
Cause 1 = parce que les lois des hommes sont imparfaites..
Cause 2 = [parce] que l'on doit toujours rechercher les conseils
Cause 3 = aussi, parce qu' on se dérobe aux Lois parfaites
Cause 4 = enfin, parce qu'on doit toujours faire le bien.
La rhétorique conversationnelle présente aussi des causes multiples;
la citation qui suit appartient au style familier, dépourvu de rigueur,
malgré l'apparence systématique que veut prendre la suite des
arguments:
Mon intention n'était nullement d'offenser quiconque. D'abord
parce que je ne suis pas un maniaque de l'hyper correction et
qu'ensuite, je commets des erreurs et fautes de frappe.
L'enchaînement ne présente pas un ordre de faits: les deux procès:
Le tour de "être quelqu'un qui n'est pas maniaque" et "être quelqu'un qui
phrase commet d'erreurs" ne se prêtent à un arrangement dans l'ordre.
elliptique: • Ellipse du sujet et du verbe copulatif dans la subordonnée de
parce que +
cause (tour livresque):
elle était
adjectif Principale + parce que + Adj. :

C'est une personne agréable, parce que calme.


(ellipse du sujet et du verbe copulatif)

C'est (…) dans les mots qu'on prononce pour demander un


bifteck ou apprécier un tableau, que se lisent les désirs et les
frustrations (….) dans tout ce qui semble anodin et dépourvu de
signification parce que trop familier ou ordinaire. [Ernaux]
Et pourtant, la marque stylistique livresque de ces constructions ne
les rend pas hors d'usage: ces tours sont assez utilisés quand on veut
pasticher le "style docte", avec une intention ironique ou non:
Ce dico est indispensable, parce que simple, complet, et
amplement illustré.
Il est d'une extrême exigence, parce que chicaneur !
• Reprise pronominale de l'attributif (rhétorique soutenue):
Autres moyens
Jean est un garçon studieux et appliqué. Parce que tel doit
d'expression être celui qui pense à son avenir ! (tel – reprend le contenu
de la cause : déjà exprimé).
divers
tours de phrase

220
La subordonnée circonstancielle de cause

Nous devons stabiliser davantage notre environnement


macroéconomique (…). Parce que telle est la seule voie qui
soit ouverte à notre pays.
La proposition circonstancielle de cause apparaît ainsi détachée de
sa proposition régissante. Dans la rhétorique argumentative, le
détachement de la subordonnée permet de souligner son contenu:
en laissant à l'auditeur / au lecteur le temps de réfléchir seul et de
trouver une justification, la stratégie du sujet énonciateur est de
laisser se manifester une certaine "attente", faisant naître une tension
argumentative. C’est là une expressivité «oratoire», mise en oeuvre
dans les grandes occasions. Par ce tour de phrase avec proposition
de cause postposée et détachée (séparée de la principale par point
virgule ou point), la causalité n'est plus simplement une cause
factuelle ou réelle, mais il s'agit d'une «cause de principe»: le
contenu de cette proposition exprime une affirmation générale, un
point de vue ferme, un principe, une norme, une règle.

10.3.4 La subordonnée circonstancielle de cause réduite


La subordonnée de cause infinitive se réalise avec le verbe à
l'infinitif précédé le plus souvent de la préposition de:
►prép. de + INF (l'infinitif passé le plus souvent)
►prép. pour, à, à force de, histoire de + INF
Il se réjouit d'avoir fait cela.
Elle est heureuse d'être là. / de l'avoir rencontré./ de lui avoir
parlé. / de ne pas être restée là.
Après un adjectif en tête de phrase, les subordonnées infinitives
contiennent une double spécification circonstancielle: un
La proposition complément de cause ou temporel exprimé par l'adjectif, et une
infinitive en proposition de cause infinitive se rapportant à l'état exprimé par
fonction de l'adjectif:
Heureux d'avoir réussi à passer son examen, Luc pensait
cause
maintenant aux vacances. (proposition attributive détachée)
P 1 (Cause de P 3 = heureux….)
P 2 (Cause de P1 = d'avoir réussi à…)
P 3 (principale = Luc pensait…)

Pourquoi était-il heureux ? parce qu'il avait réussi à passer son


examen. Pourquoi pensait-il aux vacances ? parce qu'il était
heureux.

Fait 1 → (CAUSE) état psychologique →(CAUSE) décision

La construction: rien qu'à + INF exprime une cause mise en


Prépositions
emphase, une cause unique et suffisante :
et locutions Elle s'est sauvée du bureau, rien qu'à entendre la voix de
prépositionnelles son patron.
de Rien qu'à le voir devant son échiquier, on comprend son
succès.
sens causal :
Rien qu'à l'entendre, le public est ravi.
à force de + INF La construction: sous couleur de + INF (en français classique, le
rien qu'à + INF mot couleur avait aussi le sens: "prétexte, apparence" ):

221
La subordonnée circonstancielle de cause

Sous couleur d'apporter amélioration, il a tout changé.


 La construction: à force de + INF montre la cause et aussi un
procès progressif:
À force de parler avec tout le monde, elle a fini par obtenir ce
qu'elle a voulu.
À force de lire ce manuel, non seulement il a réussi à installer
correctement son programme, mais il en est devenu expert.
● La proposition de cause réduite au participe présent
Le participe présent s'emploie souvent à la forme composée (ayant
chanté, étant venu) , mais aussi à la forme simple (chantant, venant).
….la cigale ayant chanté tout l'été… [LA FONTAINE]
(= proposition causale réduite: parce que la cigale avait chanté tout l'été)
Les deux actions doivent être non pas simultanées, mais en rapport
de postériorité: Perdant patience, il s'écria… (1. perdre patience et
après, 2. s'écrier). L'interprétation des deux procès doit être décalée
temporellement, de sorte que la cause puisse manifester ses effets.
C'est ainsi que s'explique le grand nombre d'exemples avec le
participe présent à la forme composée, forme propre pour l'expression
d'un rapport temporel d'antériorité:
Ayant perdu patience après deux heures d'attente, il s'écria…
La proposition Max rechercherait des solutions dans le réfrigérateur, mais,
causale Alice n'ayant pas fait de courses, il n'y avait rien qui se
proposât de façon convaincante.
participiale:
Remarques: il y a un certain nombre d'expressions avec le participe
présent qui semblent figées: cela étant (=parce que c'est comme
–participe présent, ça); chemin faisant … (quand nous sommes allés là…) ; Dieu
forme simple ou aidant … (cause). Ces expressions expriment, selon le contexte,
composée différentes valeurs: cause, hypothèse, temps etc.
● La proposition de cause réduite au participe passé
– participe passé
Cause mise en apposition;
Occupée avec les enfants, elle n'entendit pas qu'on frappait à
la porte. (= parce qu'elle était occupée).
Interrogé sur ses sentiments quant à l'absence de Lionel
Jospin à ses côtés après cinq années de cohabitation, Jacques
Chirac a rappelé d'un sourire que les Premiers ministres n'étaient
pas conviés à ce sommet. [Le Monde] (temps ou cause)
● Proposition de cause réduite à une nominalisation
(= circonstancielles elliptiques):
►Faute de + Nom, nominalisation d'action
►À force de + Nomimalisation
Faute d'un siège convenable où s'asseoir, il resta debout.
(= Parce qu'il n'avait trouvé qu'un tabouret bancal, il est resté
debout.)
Ne trouvant qu'un tabouret de cuisine bancal, il resta debout. )
Faute d'autre activité, Max entreprit de récapituler toutes les
informations recueillies depuis son entrée.
(=il récapitula…parce qu'il n'avait plus d'autre activité)
Cette proposition réduite peut rétablir sa structure complète en
insérant un prédicat (il y a, être, avoir etc.): Parce qu'il n'y avait pas
d'autre siège… .

222
La subordonnée circonstancielle de cause

Idées à retenir :

● Les principales valeurs discursives :


– l'expression de la cause réelle, construite avec les modes indicatif/ conditionnel
dans la subordonnée;
– l'expression de la fausse cause (cause non réelle, fictive, niée, écartée etc.), qui
se construit avec le mode subjonctif dans la subordonnée.
●L'expression de la cause a des mots subordonnants spécifiques, parmi lesquels: parce
que, vu que, attendu que etc. De même: puisque et du moment que qui introduisent
toujours la cause justifiante (leur sens temporel à l'origine ne se manifeste plus).
●Un nombre de mots subordonnants ne sont pas spécifiques pour la cause (sens
temporel à l'origine) : quand, dès lors que, alors que, maintenant que etc. servent aussi
pour l'expression de la cause.
●Les types fondamentaux d'expression propositionnelle de la cause se distinguent du
point de vue grammatical par la sélection du mode dans la proposition subordonnée:
– indicatif régulier pour la cause réelle, s'emploie après parce que, puisque, étant
donné que etc.;
– subjonctif, pour la cause niée, rejetée, s'emploie après: non que, ce n'est pas
que, sans que etc. ;
– conditionnel, amené par une éventualité dont la réalité est possible ou non le
locuteur ne pouvant pas assumer ce raisonnement causal (fausse motivation,
simple prétexte), ou conséquence à éviter, après proposition principale impérative.
Étudiez la distribution correcte du mode après ces conjonctions et locutions
conjonctives !
● Quand le mot subordonnant n'est pas spécifique, pour pouvoir discriminer une
proposition de cause d'un autre type de subordonnée circonstancielle, il faut examiner
attentivement non seulement le contenu de la subordonnée, mais surtout le contenu de la
proposition principale: c'est toujours un procès présenté dans sa "réalité de fait" qui
peut avoir une cause ! C'est ce qui différencie le rapport de cause du rapport d'hypothèse;
ou la cause du temps etc.

 Les clés du test d'autoévaluation


Corrigé de l'exercice 1
–temporelle: Comme le soir était tombé, les patients du pavillons se retiraient chacun dans
sa chambre. Comme maman venait d'ouvrir, tout d'un coup elle aperçut quelqu'un qui
l'attendait. Comme je m'étais levé de la table, je suis allée tout de suite chercher Marie.
–cause justifiante: Comme il faisait froid, nous avons fermé les fenêtres. Comme j'en avais
assez, je quittai la salle. Comme tu ne comprends rien, je te conseille de relire certains
passages. Comme l'émission durait une heure pile, nous avons pris place.
Corrigé de l'exercice 2
1. Leur bonheur doit être grand, puisqu'ils veulent le faire partager. 2. On se sent un peu
étranger en suivant ces programmes télévisés, puisqu'on est coupé de sa propre culture.
3. Mon amie ne m'a pas oublié, puisqu'elle vient de m'écrire.. 4. Puisque vous ne vous
ennuyez pas trop dans les visites que vous avez la bonté de faire à un pauvre vieillard
malade, je vous propose de vous inscrire dans un programme d'aide familiale aux retraités
institutionnalisés. 5. Le chasseur ne doit pas être loin, puisque j'ai trouvé les chiens.
Corrigé de l'exercice 3
 «Et là je grince des dents, parce que celui qui m'avait promis de m'aider semble avoir

223
La subordonnée circonstancielle de cause

oublié sa promesse !»  «Du moment que Julien se fut aperçu de sa folie, il ne s'ennuya
plus.»L'élégance de la jeune femme frappa me frappa d'autant plus qu'aucune autre
personne de la famille n'était habillée pour l'occasion.Nous avons cultivé notre jardin,
c'est pourquoi nous sommes heureux. «Toute vraie passion ne songe qu'à elle. C'est
pourquoi, ce me semble, les passions sont si ridicules à Paris. »  Vu que vous n'habitez
pas cette commune, vous n'avez pas le droit d'y installer votre réseau de transport des
personnes.
Corrigé de l'exercice 4
1. C'est pourquoi je ne suis point délicat comme vous. (cause mise en emphase)
2. parce qu'on lui avait persuadé que le décret de la Convention sur le divorce l'obligeait à
se séparer de sa femme qu'il adorait (cause réelle)
3. parce qu'il cherche à plaire à la jeune baronne
4. (je n'admets ici) que parce qu'il a été publié dans un journal qui se respecte (cause
restrictive, l'unique fait causal qui justifie le fait principal).

→ Test de contrôle 10

Ce test est administré à l'issue de l'unité d'apprentissage 10.


Pour réaliser ce test, il est conseillé de relire l'unité et de suivre attentivement les phrases
données à titre d'exemple pour chacune des valeurs discursives de la proposition causale,
ainsi que les explications sur rapport logique de cause et sur les mots subordonnants
spécifiques non spécifiques pour rendre le rapport de cause.

Ne manquez pas de transmettre ce test à votre tuteur. À cet effet, il convient de marquer
votre nom, votre prénom et votre adresse personnelle sur la première page de votre copie.
N'oubliez pas de mentionner aussi le numéro du test. Vous êtes supposés le recevoir
après correction, avec les commentaires de votre tuteur.

Bon travail !

Exercice 1 (1 point)
Réalisez des phrases causales avec les expressions:
1. ce n'est pas que…. 2.c'est que 3. non que… mais parce que…4. – non parce que….,
mais que… 5. c'est pour cela que.
Exercice 2 (2 points)
Reliez les propositions pour former des phrases causales:
1) Vous vous êtes mis en retard; votre frère ne vous a pas attendu. 2) L'enfant a de la
fièvre; sa maman fait venir le docteur. 3) Ce pays a des paysages merveilleux; nous
aimons passer nos vacances d'été au Calvados. 4) Mes amis ont refusé de m'aider; ma
conduite envers eux n'a pas été trop amicale. 5) Jean est une personne très difficile;
personne de notre équipe ne veut travailler avec lui.
Exercice 3 (2 points)
Mettez en emphase la cause exprimée dans les phrases suivantes:
(i) Le journaliste avait quitté la rédaction du quotidien parce qu'il voulait lancer un
magazine peur les jeunes mères. (ii) Le coureur a gagné la course parce qu'il était dans
une excellente forme physique. (iii) Parce que ma voisine avait été si gentille avec moi, je
l'ai invitée à la fête de mon anniversaire. (iv) Jean a forcé la serrure parce qu'il avait oublié
son trousseau de clés au bureau. (v) La musique s'entendait jusqu'à l'autre bout de la rue
parce que la fenêtre était ouverte.
224
La subordonnée circonstancielle de cause

Exercice 4 (2 points)
Soulignez les subordonnées causales et identifiez leur type :
Elle était complètement trompée par la beauté du teint, les grands yeux noirs de
Julien et ses jolis cheveux qui frisaient plus qu'à l'ordinaire, parce que pour se
rafraîchir il venait de plonger la tête dans le bassin de la fontaine publique.

On avait, d'ailleurs, du temps devant soi, puisque le mariage ne pouvait décemment


avoir lieu avant la fin du deuil de Charles, c'est-à-dire vers le printemps de l'année
prochaine.

Elle se faisait l'image la plus désagréable d'un être grossier et mal peigné, chargé
de gronder ses enfants, uniquement parce qu'il savait le latin, un langage barbare
pour lequel on fouetterait ses fils. [Stendhal]

Exercice 5 (3 points)
Trouvez les propositions participiales de sens causal et transformez-les en subordonnées
de cause à verbe fini:
1. Dévoré par son amour sans espoir, le jeune homme implorait la pitié de sa bien-aimée !
2. Ne pouvant s'occuper de rien utile, Luc restait toute la journée devant sa fenêtre. 3.
Pressée par sa famille de se marier, elle n'a pas pu trouver le bonheur. 4. N'ayant pas la
force de vaincre sa curiosité, elle ne s'est pas arrêtée de poser directement ses questions.
5. Persuadée que vous ne la refuserez pas et accepterez l'invitation, elle a préparé un bon
plat pour vous le servir. 6. Installé enfin dans son compartiment, le voyageur était devenu
tout tranquille. 7. Satisfait d'avoir obtenu de si bons résultats, le directeur invita tout le
monde à un vin d'amitié.

Références bibliographiques

• CRISTEA, T., Grammaire structurale du français contemporain (chapitre 6. La


phrase moléculaire: 6.3. La phrase cause – effet), Bucureşti, Editura Didactică şi
Pedagogică, 1979.
• GREVISSE, M., Le bon usage. (Quatrième partie, Les propositions subordonnées:
Propositions de cause), XIème édition, Louvain-la-Neuve, Duculot; 1980, ou:
GREVISSE, M. – GOOSSE, A. (éd.), Le bon usage. Grammaire française, Louvain-
la-Neuve, Duculot, 1990 (et éditions suivantes).
• WAGNER, R.-L., et PINCHON, J., Grammaire du français classique et
contemporain (chapitre: Syntaxe des phrases complexes, Les propositions
dépendantes circonstancielles: Les propositions dépendantes cde cause), Paris,
Hachette, 1962 (nouvelle édition: 1991).

225
La subordonnée circonstancielle finale

Unité d'apprentissage 11

LA SUBORDONNÉE CIRCONSTANCIELLE FINALE

Sommaire page

Les objectifs de l'unité d'apprentissage 11 226


11.1 Rapport logico-sémantique marqué par la proposition finale 227
11.2 Caractéristiques générales de la phrase à subordonnée finale 229
11.2.1 L'ordre temporel dans la phrase à proposition finale 229
11.2.2 L'ordre séquentiel dans la phrase à proposition finale 229
11.2.3 L'élément régissant une proposition finale 230
11.3 Réalisation linguistique de la proposition finale 234
11.3.1 Principales valeurs discursives 234
11.3.2 Mots subordonnants 234
Test d'autoévaluation 237
11.3.3 Choix du mode personnel dans la proposition finale 238
11.3.4 La subordonnée finale réduite à l'infinitif 238
Idées à retenir 242
Les clés du test d'autoévaluation 243
Test de contrôle 11 244
Références bibliographiques 245

Les objectifs de l'unité d'apprentissage 11

Quand vous aurez parcouru ce chapitre et effectué les exercices, vous serez capables de:

• Reconnaître le contenu du rapport logique de finalité ou de but d'une action


intentionnelle.
• Identifier les valeurs discursives réalisées par la proposition finale: le but à atteindre
(finalité positive) et le but d'éviter une conséquence indésirable (finalité négative).
• Reconnaître les conjonctions et les locutions conjonctives introduisant la
proposition finale.
• Savoir mettre en discours les différents moyens d'expression du but: divers tours de
phrase à subordonnée finale.

226
La subordonnée circonstancielle finale

11.1 Rapport logico-sémantique marqué par la proposition finale

La subordonnée circonstancielle de but exprime un procès dont la


réalisation est souhaitée, voulue, projetée, poursuivie ou évitée au
moment de la réalisation du procès énoncé dans la proposition
principale.
(i) Je mange les légumes "nature", pour qu'ils ne perdent pas
leurs vitamines.
Phrases
(ii) Maman a préparé une tarte à la crème pour l'offrir aux invités.
à proposition finale: (iii) Le ministre promet de "clarifier ces sujets" en 2005 pour qu'ils
– exemples construits soient "derrière nous" avant la présidentielle de 2007. [Le Monde]
(i, ii) (iv) Nous devons assurer l'accès à l'éducation, afin de permettre
ainsi, à chacun, un développement général de la personnalité.
– exemples attestés
[discours officiel]
(iii – v) (v) Le biographe a étudié la vie de cet écrivain afin de mieux saisir
les ressorts de la sa création. [Magazine litt.]
(vi) Il prit même des précautions pour qu'elle fût informée de tout
ce qui se passait le plus tard possible. [Stendhal]

La notion logique de finalité d'une action implique l'activité d'un


sujet ou d'une instance qui manifeste sa volonté de mener une action
Le rapport logique pour atteindre un certain but, qu'elle se représente sous la forme d'un
résultat attendu, souhaité, voulu, ou représenté comme dessein ou
de finalité
comme suite souhaitable de l'activité mise en place.
Imaginer un "but" ou décider sur la finalité d'une action permet
d'évaluer l'efficacité de celle-ci: imaginer d'avance un certain cours de
l'action à effectuer donne un critère d'évaluation de cette activité. Une
activité dirigée volontairement vers un certain but peut réussir ou
échouer, en rapport du succès ou de l'échec dans l'obtention du
résultat désiré.
Les paramètres d'une analyse grammaticale complète d'une
proposition finale sont: le rapport déterminatif entre les procès reliés
dans la phrase; le lien grammatical (conjonction ou forme modale de
subordination) et le sémantisme de l'élément régissant. L'analyse
doit prendre en compte à la fois des paramètres d'ordre grammatical
(mot subordonnant et forme verbale) et d'ordre sémantique (les
éléments du monde représentés dans la phrase).
• Le rapport de détermination entre les procès reliés dans la
phrase implique un certain type de relation logique. Il y a un lien de
c a u s a l i t é entre l'action exprimée dans la principale et celle
donnée dans la subordonnée: la proposition principale décrit une
action volontairement conduite, tandis que la subordonnée décrit le
résultat poursuivi (le but, le dessein, la finalité).
• Le mot subordonnant signale la connexion entre l'action
effectuée et le résultat à obtenir.
• La sémantique volitive ou intentionnelle du prédicat principal,
qui régit la proposition finale, conduit vers l'interprétation finale,
permettant de rejeter l'idée de cause, de conséquence, ou de simple
succession temporelle.

227
La subordonnée circonstancielle finale

Dans les phrases citées ci-dessus, l'action volontaire apparaît


dans la principale (à gauche) et le résultat à obtenir ou l'effet voulu
est donné dans la subordonnée (à droite) :
MANGER les légumes "nature"
 ne pas PERDRE (les vitamines)
PRÉPARER une tarte
 SERVIR (la tarte aux invités)
CLARIFIER les sujets
ÊTRE "derrière nous" (=n'avoir plus à s'en occuper plus tard)
ASSURER l'accès à l'éducation
 SE DÉVELOPPER (la personnalité)
ÉTUDIER la vie d'un écrivain
 SAISIR mieux les ressorts de sa création.
PRENDRE DES PRÉCAUTIONS
 L'INFORMER le plus tard possible.

Afin de vérifier le caractère intentionnel du procès donné dans la


Paramètres logico- principale, on peut examiner la nature de l'Agent de ce procès: c'est un
sémantiques et formels agent animé ou toute autre entité au niveau de laquelle on pourrait
concevoir une action volontaire : une personne, un être animé qui peut
permettant de
diriger le cours de ses actions. Des institutions, organisations, sociétés,
reconnaître collectivités, etc. sont aussi des entités "volontaires", dans la mesure où
la phrase elles ont des dirigeants qui manifestent, eux, leur volonté. Voici les
à proposition finale sujets qui apparaissent avec le verbe de la proposition principale dans
les exemples cités ci-dessus:
Je = personne ; maman = personne; gouvernement = instance
de décision et d'action volontaire; pouvoir politique ou
institutions de l'État= centres de décision d'une activité
volontaire; un biographe = personne; celui qui prend des
précautions = personne.
Tous ces Agents, étant des personnes ou des organismes dirigés par
des personnes, peuvent être impliqués dans une action volontaire:
MANGER intentionnellement…
PRÉPARER un plat, action intentionnelle
CLARIFIER volontairement les problèmes
ASSURER, action politique planifiée (conçue d’avance)
ÉTUDIER, activité volontaire, dirigée vers son objectif
PRENDRE DES PRÉCAUTIONS, activité préméditée.
Le rapport exprimé dans une phrase complexe est un rapport
logique de finalité si et seulement si tous ces trois paramètres
d'analyse correspondent au caractère spécifique de la relation
syntaxique décrite:
1° – lien de détermination entre les deux procès énoncés (entre le
fait1, ou antécédent, dans la principale, et le fait2, dans la
subordonnée);
2° – distribution de ces procès de sorte que la subordonnée énonce
le procès déterminé (l'effet voulu), et la principale le procès
déterminatif, antécédent;
3° – l'agent du procès déterminatif doit être une entité capable de
poursuivre volontairement son action.

228
La subordonnée circonstancielle finale

En conclusion, le rapport grammatical de "finalité" se manifeste


dans les phrases qui expriment une conséquence volontairement
poursuivie, ou une action réalisée en vue d'obtenir un certain effet.
La valeur de base d'une subordonnée circonstancielle de but est de
marquer le caractère volontaire et intentionnel du procès exprimé
dans la principale, procès réalisé de manière à ce qu'un certain
résultat puisse se produire, ou de manière à ce que cette action
volontaire ait une certaine conséquence voulue.

11.2 Caractéristiques générales de la phrase à subordonnée finale

11.2.1 L'ordre temporel dans la phrase à proposition finale


La proposition principale doit représenter un procès de type
causateur (fait1), nommé aussi procès "antécédent". L'ordre temporel
de réalisation des procès dans la phrase finale est: 1. le fait exprimé
Ordre dans la principale; 2. le fait exprimé dans la subordonnée:
temporel : Le premier ministre français a proposé la création d'une
commission internationale (fait1) du type de l'Unicef pour tenter de
Le fait1 présenté régler (fait 2) les cas d'adoption d'enfants roumains. [Le Monde]
dans la principale
Le contenu de cette phrase et des phrases citées ci-dessus permet
est
antérieur au fait2 de remarquer que le procès représenté dans la proposition
exprimé dans la circonstancielle de but n'est pas encore réalisé, et, qui plus est, il ne
proposition finale le sera qu’après un nombre d'étapes ayant permis de conduire
l'action à la réalisation de l'objectif envisagé.
La phrase à proposition finale fait toujours une référence
implicite au temps de réalisation des procès décrits. Le procès de la
subordonnée est virtuel, il n'est pas encore réel, il ne s'associe pas à
un instant temporel révolu ou à une durée réelle de manifestation. Si
tout de même, on lui associe un temps réel, ce temps est dans
l'avenir. Les grammairiens font remarquer que la phrase finale ne
décrit pas une situation, mais construit une perspective.

11.2.2 L'ordre séquentiel dans la phrase à proposition finale


Par rapport à la proposition principale, la proposition circonstancielle
de but peut être:

► finale antéposée : Afin que P, Q ,

► finale postposée : P, pour que Q.

Pour afin que et pour que l'ordre séquentiel n'est pas contraint (les
deux positions sont également possibles). Mais quand la
subordination se fait par l'une des locutions: de manière à ce que,
Ordre séquentiel:
de façon à ce que, de sorte (manière, façon) que, il y a toujours
postposition.
les deux ordres sont – Postposition de la finale:
possibles: (i) Il nous faudra prendre le temps nécessaire, afin que
la proposition finale nous puissions réfléchir à cette importante question.
avant ou après
– Antéposition de la finale:
(ii) Afin que nous puissions réfléchir à cette importante
la principale question, il nous faudra prendre le temps nécessaire.
229
La subordonnée circonstancielle finale

La proposition finale réduite, exprimée par verbe à l'infinitif est


donnée toujours après la principale si l'infinitif se joint directement,
sans préposition, mais l'antéposition est aussi possible pour l'infinitif
précédé par préposition ou par locution prépositionnelle :
Je descends faire des courses.
Je lis plusieurs fois pour mieux comprendre.
Pour mieux comprendre, il faut lire plusieurs fois.
Luc a recopié le texte afin de le discuter avec un spécialiste.
Afin d'obtenir ces documents, vous présenterez une demande.

11.2.3 L'élément régissant une proposition finale

Pour mieux faire la distinction entre la proposition finale et les autres


types de phrases qui mettent en rapport deux procès en relation
déterminative (de cause à effet), il est nécessaire d'examiner le caractère
spécifique de l'élément régissant une proposition finale. Il convient de
distinguer deux contextes d'apparition d'une subordonnée finale :
• (I) après une principale assertive;
• (II) après une proposition principale dont le statut est non
assertif (phrase à statut exclamatif, interrogatif, impératif).

(I) Proposition finale après une principale assertive


L'élément régissant est le procès exprimé dans la principale, qui doit
exprimer l'intentionnalité d'un agent qui mobilise sa volonté d'agir:
Il s'efforce de parler clairement pour que son interlocuteur le
Rapport de finalité comprenne.
entre Il cherche à obtenir de bonnes places au spectacle, pour que / de
deux procès sorte que sa fiancée soit contente. (pour contenter sa fiancée).
exprimés dans une
Les classes de verbes qui apparaissent préférentiellement dans la
principale sont les verbes de volonté ou d'actions que le sujet aurait
phrase assertive bien pu ne pas accomplir:
Maman évite les aliments trop gras pour respecter les conseils
de son médecin traitant. (elle aurait pu en faire autrement)
Mon amie m'a envoyé une carte postale pour que je sache où
elle est en train de passer ses vacances.
Il y a certains verbes dont le type de construction est prédictible: les
Action dans la verbes de mouvement et autres verbes d'action volontaire
principale d'une finale: apparaissent souvent dans la phrase à proposition finale; en
revanche, les verbes psychologiques se construisent plutôt avec une
subordonnée de cause et non avec une finale.
• un verbe de
Sous-classes de verbes et leur construction avec une finale
mouvement
• La finale régie par un verbe de mouvement. Seuls les verbes qui
• un verbe d'activité
impliquent le mouvement volontaire régissent une subordonnée finale:
intentionnelle Elle quitta les lieux pour que la police ne vienne lui poser des
• un verbe de tension questions. [Echenoz]
L'automobiliste roulait à toute vitesse pour qu'il puisse se tenir
• tout autre verbe
à distance des motards qui le poursuivaient.
interprétable comme
Les exemples qui suivent que les verbes de mouvement volontaire
activité dirigée
acceptent toutes sortes de circonstancielles mettant en jeu un
volontairement

230
La subordonnée circonstancielle finale

rapport logique et factuel déterminatif entre deux faits reliés: de


cause, de conséquence et de but:
marcher à pied + (cause): «parce qu'il n'a plus de permis de
conduire».
marcher à pied + (conséquence): «de sorte qu'il a pu admirer les
quartiers de cette belle ville en
humant l'air des petites ruelles et
des grands boulevards».
marcher à pied + (but) : «pour faire un peu d'exercice
physique».
À la différence des verbes de mouvement, les verbes
psychologiques se construisent avec une complétive (Il se réjouit de
cela), avec une proposition de cause (Il se réjouit à cause de cela/
parce qu'il voit ses enfants réussir leur vie), ou avec une
conséquence (Cette mère se réjouit tellement de la réussite de son
fils, que tout son visage s'illumine). Avec des processus
involontaires, on ne peut pas exprimer une finalité !! Nos sentiments
ont bien une cause, une conséquence, mais il serait difficile
d'exprimer un BUT avec une prédication qui exprime un sentiment,
parce que la finalité suppose de diriger volontairement son action.
Analysez les rapports marqués dans les phrases suivantes:
 CAUSE: Il est heureux de visiter ce musée parce qu'il le
trouve intéressant.
L'expression  CAUSE: Il est heureux de visiter ce musée parce qu'il aime
du but est peu beaucoup les animaux préhistoriques.
 CONSÉQUENCE: Il est si heureux de visiter ce musée qu'il
compatible
supplie ses parents d'y revenir encore.
avec  CONSÉQUENCE: Il est si heureux de visiter ce musée qu'il
un verbe ne voulait plus quitter les salles d'exposition.
de sentiment Mais :
 BUT: Il est heureux (il se réjouit) de visiter ce musée pour
dans la principale
faire plaisir à ses parents.
S'il s'agit d'un BUT, alors la principale n'exprime pas un état
psychologique, mais une "apparence", une expression du visage, un
"faire semblant" qui veut tromper les autres. Dans la phrase «Il est
heureux de visiter ce musée pour (dans le but de) faire plaisir à ses
parents», la proposition principale fait un emploi particulier de l'adjectif
heureux: être heureux ne décrit plus dans cette phrase l'état psychique
involontaire d'un sujet, mais une action intentionnelle. Par exemple: le
sujet dissimule son véritable état d'âme, en feignant son enthousiasme
pour les visites au musée, alors qu'il est si barbant d'écouter les
explications du guide ! Ou bien, le sujet s'efforce d'être heureux.

231
La subordonnée circonstancielle finale

Exercice d'entraînement
Pour chacune des structures suivantes (a, b et c), construisez deux phrases, en trouvant
des propositions principales dont le prédicat est un verbe de mouvement:
a) Deux phrases à proposition de conséquence (Vmouvement + de sorte que… +indicatif)
…………………………………………………………………………………………………..
…………………………………………………………………………………………………..
b) Deux phrases à proposition de but (Vmouvement + de sorte que… + subjonctif)
…………………………………………………………………………………………………..
…………………………………………………………………………………………………..
c) Deux phrases à proposition de but (Vmouvement + afin que…; pour que … (+subjonctif)
…………………………………………………………………………………………………..
…………………………………………………………………………………………………..

• La finale régie par un verbe de tension


Les "verbes de tension" montrent une action à laquelle l'agent
participe avec un certain intérêt, en mobilisant tout son effort, toutes
ses capacités:
Cet homme remue terre et ciel pour obtenir ce qu'il veut.
Il s'est donné beaucoup de peine pour obtenir ce qu'il voulait.
J'ai fait tous les efforts afin de retrouver dans ma mémoire l'image
d'autrefois de ces lieux.
Maman s'efforce d'obéir aux conseils du médecin, afin de limiter
les effets de sa maladie.
Cette femme cherche à économiser ses ressources, pour que,
Les verbes
les jours suivants, sa famille puisse vivre.
«de tension» : Remuer ciel et terre, faire des efforts, se donner de la peine,
tendre à, s'efforcer de, chercher à, etc. représentent des activités à caractère
chercher à,
volontaire, intentionnel.
Les verbes de tension régissent aussi un complément ou une
s'efforcer de,
complétive. Ne confondez pas le complément du verbe, qui est un "objet
s'évertuer à, interne au procès verbal", avec la détermination c i r c o n s t a n c i e l l e ,
s'ingénier à, etc. qui fait référence au résultat attendu ou souhaité :

Il s'efforce de parler plus fort, pour que tout le monde l'entende.

complétive infinitive circonstancielle de but


De même: J'ai fait tous les efforts de l'écouter, pour qu'il ne se fâche.
Distinction (complément: de l'écouter + but: pour qu'il ne se fâche).
Comparez avec:
entre phrases
 Il s'efforce de parler plus fort parce que la salle est très large et
reliant des procès qu'il n'y a pas de microphone. (CAUSE)
en rapport
Il s'est tant efforcé de parler, qu'il a perdu sa voix.
déterminatif :
(CONSÉQUENCE)
– cause
– but Il s'est efforcé de parler plus haut pour qu'on l'entende mieux au
– conséquence fond de la salle. (BUT)
232
La subordonnée circonstancielle finale

Les différentes circonstancielles après un verbe de tension


sont: conséquence si l'action dans la subordonnée est réalisée
(accomplie); but, si son accomplissement est seulement envisagé
comme motivation de l'action principale; cause, si l'action dans la
principale a été déterminée par celle exprimée dans la subordonnée:
Principale:
Il a consacré une partie de sa vie à étudier le droit administratif…
Subordonnées circonstancielles de différents types:
… de sorte qu'il a réussi à devenir un spécialiste en la matière.
(CONSÉQUENCE)  il est devenu un spécialiste (+accompli)
… pour devenir un spécialiste en la matière. (BUT)  devenir
un spécialiste est la motivation de l'action principale;
… puisque sa mère y tenait tant. (CAUSE)  l'action principale
commence après l'action de la subordonnée.
(II) Proposition finale après une principale impérative,
interrogative, exclamative
Proposition Où est-t-il, que je le voie ! Dis-lui de venir ici, que je lui serre la
finale
main ! Mange, que tu reprennes un peu tes forces !
– Descends, animal, que je te parle. [Stendhal]
après principale :
Remarquons que la proposition finale ne peut être régie que par une
interrogative, principale (interrogative, exclamative etc.) qui représente une activité
exclamative volontaire, intentionnelle. Dans:
impérative
Qu'eussé-je dû faire pour ne pas avoir l'air de me plaindre ?
[Nothomb] (tour de phrase livresque, langue châtiée)
la principale est une proposition interrogative-exclamative («que faire
dans le but de ne pas avoir l'air de… ?» ), et donc la prédication de
la proposition principale satisfait à l'exigence de montrer une activité
dirigée volontairement vers l'obtention d'un certain résultat.
Parfois, dans la phrase non assertive, la proposition finale
détermine un pivot prédicatif construit autour d'un verbe de
mouvement, exprimé ou elliptique:
Où il est, [pour] que je le voie ? !  (Qu'il vienne ici)
VENIR ici, pour que je le voie.

élément BUT
régissant
La simple conjonction que peut introduire une proposition finale
après un impératif: Ôte-toi de là, que je m'y mette. – Descends, que
je t'embrasse (La Fontaine, apud Grevisse).

233
La subordonnée circonstancielle finale

11.3 Réalisation linguistique de la proposition finale

11.3.1 Principales valeurs discursives


Les subordonnées finales peuvent exprimer:
a) le but à atteindre, c'est-à-dire le résultat imaginé en
effectuant une action;
b) le but "négatif", à éviter (ou plutôt : la conséquence à éviter)
quand un résultat prévisible, ou qui risque de se produire presque
sûrement, est indésirable et donc le sujet se met à réagir pour
interrompre la suite naturelle des événements, afin que les
conséquences naturelles du procès puissent être évitées.

11.3.2 Mots subordonnants


Les conjonctions et les locutions conjonctives introduisant la
subordonnée finale seront présentées en rapport de leur valeur
sémantique de base ou de leur valeur discursive.

A. L'expression du but à atteindre (ou de l'effet voulu)


Les principaux mots subordonnants qui introduisent une proposition
du but à atteindre sont les locutions conjonctives:
pour que + SBJ
Locutions
conjonctives (litt.) afin que + SBJ.
pour l'expression
du but à atteindre: Pour la courtisane Ninon, il fallait qu'elle en eût beaucoup
(=d'esprit), pour que les dames de la cour l'acceptent parmi elles.
•pour que
•afin que (litt.)
J'en ai marqué les dates autant que possible, afin qu'on pût
suivre dans mes vers, comme on a suivi dans ma prose, l'ordre
chronologique des idées et le développement graduel de l'art.
(marquant l'orientation [Chateaubriand]
de l'action Étymologiquement, ces deux locutions conjonctives sont spécifiques
vers une finalité
pour le rapport de conséquence et pour le rapport de finalité, parce
qu'elles contiennent un élément de sens final intrinsèque (pour, afin).
ou vers une suite) ►le sens de la préposition pour charrie un sens de "but", ou de
"cible" d'une action. Elle s'oppose à la préposition par, qui indique le
"moyen" dont on se sert, et qui s'est soudée dans la locution causale
parce que:
parce que  pour que
cause  but ou conséquence
►la seconde locution représente le figement d'une expression
formée de à + fin (le nom la fin signifie: dessein, but, finalité, objectif).
Du point de vue stylistique, la locution afin que apparaît plutôt
dans la langue soutenue, tout en étant assez fréquente. Pour que
peut remplacer afin que dans tous les contextes: l'emploi de afin que
caractérise un niveau de langue considéré par les grammairiens
comme "un peu guindé", tandis que la locution finale pour que n'a
pas une telle connotation.
La locution afin que est spécifique uniquement pour la finalité,
tandis que la locution pour que introduit des propositions finales (avec

234
La subordonnée circonstancielle finale

subjonctif), consécutives réelles (avec indicatif) et des consécutives


imaginées (avec subjonctif), et même la cause "présomptive" dans une
phrase à subordination inverse (voir ci-dessus).
Les subordonnants avec "manière", façon"et sorte" ont un sens
de base comparatif, ou de "manière", mais s'emploient également
pour exprimer le rapport de logique de conséquence et de finalité
(avec subjonctif) :
Locutions conjonctives
de sorte que + SBJ
pour l'expression (faire) en sorte que + SBJ. (après le verbe faire dans la
du but à atteindre:
principale) :
Je ferai en sorte que mon mari ait l'idée d'y passer quinze
jours. [Echenoz]
•de sorte que
•de (telle) manière que
Le juge, étonné de cette façon de répondre, voulut multiplier
les questions pour faire en sorte que l'accusé se coupât dans
•de manière à ce que ses réponses. [Stendhal]
•de façon à ce que
Il se dissimule sous le canapé, de sorte qu'on ne puisse pas
l'apercevoir en entrant. [ibid.]
(marquant une de (telle) manière que +SBJ.
comparaison)
de manière (façon) à ce que + SBJ.
à ce que + SBJ.
(Cette locution s'emploie après certains verbes de
tension comme: tenir, veiller, aspirer etc.)
Elle s'arrangea de façon à ce qu'un de ses enfants restât
toujours auprès d'elle. [Stendhal]

Ce malfaiteur ne se montre jamais avec son identité de façon à


ce qu'il soit impossible de l'amener devant les tribunaux. [ibid.]

Il faudra veiller à ce que votre conscience se tienne en garde


contre cette faiblesse. [ibid.]

Exercice d'entraînement
Mettez sur deux colonnes, à l'infinitif, le verbe de la principale et le verbe de la
subordonnée finale et écrivez pour chaque verbe soit «+action volontaire», soit «+effet
voulu», suivant votre interprétation:
Madame, je viens pour voir le studio du cinquième qui est à louer, dit-il. C'est moi
qui vous ai téléphoné lundi pour visiter.
Il est redescendu voir la gardienne. Il lui dit de faire en sorte que les visiteurs ne
soient pas refusés s'ils veulent monter à l'appartement. [Echenoz]
verbe de la principale: verbe de la subordonnée finale:
1 .………………………………………. 1 .……………………………………….
(+……………………….……) (+……………………….……)

2 .………………………………………. 2 .……………………………………….
(+……………………….……) (+……………………….……)

235
La subordonnée circonstancielle finale

3 .………………………………………. 3 .……………………………………….
(+……………………….……) (+……………………….……)

4 .………………………………………. 4 .……………………………………….
(+……………………….……) (+……………………….……)

B. L'expression du but à éviter ou de la conséquence


contrecarrée:

La finale marque parfois un but négatif (éviter un résultat indésirable,


L'expression une conséquence que l'on veut empêcher de se manifester). L'action
principale est effectuée dans le but d'éviter un résultat indésirable, une
du but à éviter:
conséquence naturelle, mais non souhaitée. Ces propositions font
intervenir, dans la principale ou dans la subordonnée, soit le morphème
• par négation; de négation, soit un mot qui explicite le caractère indésirable du
résultat qui pourrait se produire (peur, crainte):
de peur que + SBJ.
• par mot
subordonnant de crainte que + SBJ. (litt.)
spécifique (locution
avec mot de sens
Dans la rue, il parlait au téléphone très discrètement, de sorte
qu'on ne puisse pas l'entendre.
négatif: crainte, peur)  Le but à éviter s'exprime par la négation de la conséquence
indésirable de se faire entendre parler.
Julien avait attaché la corde au dernier échelon de l'échelle, il
la descendait doucement, et en se penchant beaucoup en
dehors du balcon pour faire en sorte qu'elle ne touchât pas les
vitres [Stendhal]
 Le but à éviter s'exprime par la négation dans la proposition finale.
Le s t a t u t n é g a t i f du procès décrit dans la subordonnée
finale montre que le résultat à obtenir est un but à éviter ou une
conséquence qu'on veut contrecarrer.
Finales avec locutions qui expriment spécifiquement le but à
éviter (de peur/ crainte que):
Comme il était sorti sans parapluie, il est reparti sans tarder, de
peur que la pluie ne commence à tomber.

Locutions
Donnez-moi le bras, je vous prie, de peur qu'on ne nous
observe, et marchons naturellement. [Chateaubriand] (= Ainsi,
conjonctives
on évitera qu'on vous observe)
pour l'expression
du «but négatif» Tenez, mon ami, ajouta-t-il, allez vous reposer quelques
heures, et de peur qu'on ne vous enlève, moi je vais vous
(conséquence
enfermer à clef dans votre chambre. [Stendhal] (= Ainsi, on ne
à éviter): pourra pas/plus vous enlever)
Fabrice avait eu l'attention de n'écrire que quelques jours après
• de peur que l'envoi, de peur que son nom ne fît renvoyer tout le paquet
avec indignation. [Stendhal]
• de crainte que (litt.) Remarque: les locutions conjonctives (vieillies) dans la crainte que
ou crainte que (vx.), utilisées dans les textes classiques,
n'apparaissent plus dans le langage actuel.
236
La subordonnée circonstancielle finale

Test d'autoévaluation
Pour bien gérer ce test, il est indispensable que vous ayez déjà parcouru les explications et
les analyses données dans l'unité d'apprentissage 11. Vérifiez vos solutions aux exercices
en consultant la rubrique Clés du test d'autoévaluation.

Exercice 1
Identifiez les finales et notez a) quels sont les verbes qui montrent l'action intentionnelle
(dans la principale) et l'effet voulu (dans la subordonnée); b) le mot subordonnant et le
mode verbal pour chacune des propositions finales.
Elles peuvent parler au chef de l'expédition, qu'elles visitent, afin d'obtenir de lui une
part du butin fait sur l'ennemi, car les sauvages ne doutent jamais du succès de leurs
entreprises.
Tenez, mon ami, ajouta-t-il, allez vous reposer quelques heures, et de peur qu'on ne
vous enlève, moi je vais vous enfermer à clef dans votre chambre.
(i) action intentionnelle: …………………………. ; effet voulu: ………………………………
(ii) action intentionnelle: …………………………. ; effet voulu: ………………………………
(iii) action intentionnelle: …………………………. ; effet voulu: ………………………………

mot subordonnant + mode du verbe dans la finale


(i) ……………………….. ………………………..
(ii) ……………………….. ………………………..
(iii) ……………………….. ………………………..

Exercice 2
Recopiez les propositions finales, complètes ou réduites, et notez leur type: but positif ou
négatif (à atteindre ou à éviter):
Il traversa la chambre afin de se retrouver du côté de la rangée de fenêtres qui
donnaient sur la rue; il se posta derrière une fenêtre qu'il n'a qu'entrouverte, pour que
la gardienne qui était en bas ne puisse l'apercevoir.

(1) ……………………………………………………………………………………………

(2) ……………………………………………………………………………………………
Se tenant légèrement en retrait, invisible de l'extérieur, il a suivi avec beaucoup d'attention
toute la cérémonie qui se déroulait devant l'église, de manière à ce qu'il puisse fixer
l'emplacement des voitures sur les allées.

(3) ……………………………………………………………………………………………
Exercice 3
À partir d'une principale contenant les verbes suivants: se déplacer souvent d'une région à
l'autre; rester à la maison toute la journée de dimanche, construisez en parallèle: a) des
phrases à subordonnées finales, et b) un autre type de phrase: à subordonnée de cause,
de conséquence ou temporelle.

a) ……………………………………………………………………………………………………...
b)………………………………………………………………………………………………………...
………………………………………………………………………………………………………...

237
La subordonnée circonstancielle finale

a) ……………………………………………………………………………………………………….
b) ……………………………………………………………………………………………………...
………………………………………………………………………………………………………...
Exercice 4
Transformez la proposition finale en proposition principale, et la principale en proposition de
cause, et écrivez les phrases obtenues par ce renversement qui maintient le rapport
déterminatif entre les procès reliés:
1. Vous n'avez épargné aucun effort lorsque nous sommes venues chez vous, pour que
nous ayons un séjour inoubliable. 2. Pendant ses vacances, Luc a travaillé du matin au soir
pour qu'il puisse gagner un peu d'argent. 3. J'ai essayé d'écrire ma lettre le plus lisiblement
possible, pour que grand-père puisse la lire.

………………………………………………………………………………………………………...
………………………………………………………………………………………………………...
………………………………………………………………………………………………………...

11.3.3 Choix du mode personnel dans la proposition finale


La forme modale requise dans la proposition finale
Dans la proposition finale non réduite (proposition à verbe fini, c'est-
à-dire proposition construite avec un verbe pivot à un mode
Le subjonctif est la personnel), le subjonctif est la seule forme verbale possible. Pour
seule forme verbale tous les mots subordonnants présentés ci-dessus, la forme verbale
dans la proposition amenée dans la proposition finale a été le subjonctif.
Motivation du subjonctif dans la finale. L'exigence du subjonctif
finale à verbe fini
découle du statut même du procès exprimé dans la subordonnée de
but: au moment d'effectuer une activité volontaire, le procès "final"
est seulement représenté sur le plan mental. Les efforts de l'agent se
dirigent volontairement vers l'obtention d'un certain effet (but à
atteindre), ou vers l'esquive d'un certain résultat indésirable
(conséquence contrecarrée). Dans les deux situations, le procès
dans la subordonnée doit s'exprimer au subjonctif, comme mode de
l'action non réelle.
L'identité de l'agent de la proposition principale avec celui de la
subordonnée permet d'avoir une proposition finale "réduite"
(proposition infinitive).

11.3.4 La subordonnée finale réduite à l'infinitif


• La circonstancielle finale réduite s'exprime par un infinitif précédé en
La forme type général par la préposition pour.
Dans la salle de cinéma, le jeune homme s'assit au fond pour
d'une proposition
surveiller tout le monde.
finale réduite:
Paul s'installa vers le huitième rang, assez latéralement pour la
pour + INF
tenir dans son champ visuel. [Echenoz]
«Pour surveiller tout le monde» et «pour surveiller tout le monde» sont
des finales réduites à un mode verbal non personnel.

238
La subordonnée circonstancielle finale

• Ordre séquentiel. La proposition infinitive est le plus souvent (mais


pas toujours), postposée par rapport à la proposition principale:
Postposition:
Voilà comment certaines gens s'y prenaient pour faire sécher
peu à peu leurs ennemis.
Antéposition:
Pour éteindre sa soif, il avalait la neige par charretées.
Caractéristiques
(légende)
générales Pour se tenir au courant , il ne cesse de surfer sur l'Internet.
des finales réduites • Valeur sémantique. Les deux valeurs de base de la proposition
à l'infinitif finale, le but à atteindre et le but à éviter, se réalisent par les mêmes
moyens grammaticaux: mot subordonnant ou négation permettant
d'interpréter la valeur positive ou négative du résultat poursuivi:
Elle s'appuie sur mon épaule pour monter sur l'escabeau.
(but à atteindre)
Elle s'appuie sur mon épaule pour ne pas tomber de
l'escabeau. (conséquence à éviter)
• Mots introducteurs. L'élément introducteur de l'infinitif qui
représente une proposition finale réduite peut être aussi l'une des
locutions prépositionnelles suivantes: en vue de + INF ; dans le but de
+ INF; de manière à + INF; à dessein de + INF; dans l'intention de +
INF; histoire de + INF(fam.) ; question de + INF (fam.); afin de + INF;
afin de ne pas + INF; par/de crainte de + INF; par peur de + INF :
Afin de mettre de l'espoir dans ce dossier particulièrement
difficile et particulièrement douloureux, le Premier ministre
français a proposé à son homologue roumain de "créer une
commission internationale. (but à atteindre) [Le Monde]

Nous devons lutter contre les «abus» des distributeurs, afin


L'infinitif d'établir un «équilibre plus juste» dans leurs relations avec
à rôle de leurs fournisseurs. [WB]
proposition finale:
Souvent elle s'arrêtait une minute à regarder où poser sa
bottine (…) de peur de tomber dans les flaques d'eau.
•Ø + INF [Flaubert] (conséquence à éviter)
ou • Après les verbes de mouvement, l'infinitif s'emploie sans aucune
•précédé par: préposition:
Ø + INF (après les verbes de mouvement)

en vue de; «Vous êtes le cireur?» –« Non, madame, je ne suis pas le


dans le but de ; cireur, je suis Bougras et je viens cirer vos planchers pour
de manière à; gagner ma vie.» [Sabatier]
L'infinitif seul suit directement, sans préposition, le verbe de
à dessein de;
mouvement de la proposition principale:
dans l'intention de; Venir + Ø cirer les planchers;
histoire de (fam.); Comparez à: je travaille pour gagner ma vie, la finale réduite étant
question de (fam.); introduite par la préposition pour.
Une fillette vint lui serrer la main. [Sabatier]
afin de;
Après un verbe de mouvement dans la principale (comme venir,
par (de) crainte de; dans cette phrase), l'infinitif dans la finale est de rection directe:
par peur de Venir + Ø lui serrer la main.

239
La subordonnée circonstancielle finale

Hé, petit, attrape donc ces dix balles et va me faire la monnaie.


[Sabatier].
(aller dans la principale; me faire la monnaie, la finale réduite, de
rection directe).

Valeurs stylistiques de certaines propositions finales réduites à


l'infinitif :

• La construction nommée « fausse finale »


La préposition pour, suivie de l'infinitif peut marquer un simple
rapport de succession temporelle et non pas un but. Ce type de
phrase est considéré comme une fausse finale.
Pour comprendre ce tour de phrase, il faut approfondir les
moyens linguistiques d'expression de la succession temporelle,
d'une part, et du rapport d'opposition, d'autre part.
Ainsi, une phrase comme :
La porte s'ouvrit pour laisser entrer le nouveau venu.
donne une vision globale et mémorielle sur une scène du passé. Pour
interpréter cette phrase, le lecteur doit se représenter un point de vue
sur les événements, point de vue depuis lequel on peut comprendre
l'effet de "surprise", le "résultat inattendu", le fait que l'action survient
alors qu'on ne s'y attendait pas. Le nouveau venu produit par son
entrée inattendue une surprise à ceux qui se trouvaient déjà réunis:

Ils discutaient l'ordre du jour, quand, la porte s'ouvrit, pour


laisser entrer leur partenaire qui reprit sa place tout en souriant.
La construction avec pour + INF est une fausse proposition finale
parce qu'elle ne fait que marquer, en plus du rapport temporel de
simple succession («inattendue»), le point de vue sur les
événements décrits.
La fausse proposition finale se reconnaît par le fait que les deux
procès reliés grammaticalement n'ont pas de lien factuel de causalité.
Ces propositions ne font que marquer en réalité les r a p p o r t s
t e m p o r e l s entre deux procès:
ENTRER – (et ensuite) VOIR ou
S'OUVRIR – (et ensuite) LAISSER ENTRER
La proposition Une personne n'entre pas dans une salle pour voir ceux qui y sont
nommée déjà réunis, mais elle entre et ensuite elle voit – avec surprise, avec
étonnement – et constate qui sont les personnes déjà réunies dans
fausse finale
la pièce. Les deux procès mis en rapport, ENTRER et VOIR, n'ont
est pas de liens factuels de causalité (ils ne sont pas "cause" et "effet" ).
une proposition Ces propositions ne répondent pas à la question: "pour quelle
temporelle, raison s'accomplit telle action?", donc elles ne montrent pas le BUT. En
d'autres mots: il n'est pas vrai que quelqu'un entre dans une salle "afin de
marquant
voir" quelque chose… Quelqu'un qui entre dans une pièce ne sait pas
la succession d'habitude ce qu'il va retrouver derrière la porte (obstacle perceptif). De
depuis un certain même: il n'est pas vrai qu'une porte s'ouvre afin de laisser quelqu'un
point de vue entrer, car la porte est un objet inanimée, qui ne pourrait pas être l'Agent
d'une action intentionnelle, dirigée vers l'obtention d'un certain résultat.

240
La subordonnée circonstancielle finale

La proposition nommée «fausse finale» marque une


succession d'actions non intentionnelles, même avec verbe à agent
humain, dans des exemples comme:
L'homme se leva brusquement de son fauteuil pour s'incliner
avec raideur avant de se redresser. [Echenoz, 2003 : 58]
Bien que les verbes de mouvement à agent animé se construisent
d'habitude avec une proposition finale, quand la proposition
principale représente des mouvements corporels non intentionnels,
la circonstancielle infinitive (pour + INF) est une «fausse finale», car
elle sert à marquer le simple rapport temporel de succession, et non
la volonté de l'agent:
SE LEVER + s'incliner + se redresser
t1 – t2 – t3 – ….
(moments successifs d'une action de sens global)

La phrase citée trahit le point de vue d'un observateur de la scène:


trois moments successifs sont décrits dans leur déroulement
temporel, comme si la première action avait comme conséquence la
seconde et ainsi de suite: pour saluer une personne qui vient
d'entrer, l'homme se lève, s'incline, et ensuite se redresse et se
rassied à sa place: «L'homme se leva brusquement de son fauteuil
pour s'incliner avec raideur avant de se redresser.». La succession
de mouvements est rapide, de telle façon que l'homme n'a pas le
temps de se proposer une action comme but à réaliser; dans ce cas
pour + INF ne pourrait marquer ni conséquence, ni finalité.
En conclusion, ce tour de phrase qui renferme une fausse
finale emploie les moyens grammaticaux de la proposition de but,
mais le rapport logique marqué est seulement un rapport temporel,
avec la construction d'un certain point de vue sur les événements.
C'est ce point de vue qui justifie l'emprunt d'une construction finale.

Cas particuliers des propositions «fausses finales»


L'emploi des fausses finales avec des verbes aspectuels et des
Stylistique
circonstants temporels.
et interprétation ►Faux but d'une action non intentionnelle:
des propositions Sur le premier coup de onze heures, la messe commence par
FAUSSES FINALES la fin, et tout à rebours, pour finir juste à minuit. [Stendhal]
(les verbes aspectuels: commencer, finir; les circonstants temporels:
à minuit; sur le premier coup).
– après verbe «La messe commence à onze heures pour finir à minuit»
d'aspect dans la Dans cette phrase, le début et la fin d'une activité durative (la messe)
principale; sont mis en rapport de contraste (d'opposition). La construction finale
sert à mettre en opposition les deux limites (commencement et fin)
– avec négation
d'une activité durative.
restrictive pour Ce remue-ménage sournois cesse complètement pour
marquer le reprendre ensuite…[apud LE BIDOIS]
«providentiel» (les verbes aspectuels: cesser, reprendre; circonstant temporel:
ensuite.)
►Les constructions finales de type "providentiel":

241
La subordonnée circonstancielle finale

(...) Oui, j'abandonne un pays où je suis oublié même de ce


que j'ai le plus aimé en ma vie, et je le quitte pour ne jamais le
revoir. Je vais à Paris... [Stendhal]

Il s'endormit … pour n'ouvrir les yeux qu'à neuf heures [apud


LE BIDOIS]

Cet illustre écrivain nous a quittés, pour ne jamais mourir. /


pour rester toujours parmi nous.
Entre les deux événements présentés, l'un dans la principale et l'autre
dans la «fausse finale», tout un intervalle (une durée) se décrit comme
un "arc à travers le temps" (distance entre deux points de vue):
Le personnage quitta Venise pour n'y revenir jamais.
Entre le moment de sa vie où il était en visite à Venise et la mort de cette
personne, un arc dans le temps se décrit, pour un individu de point de
vue omniscient, qui, au moment de la mise en discours, revoit dans son
esprit l’ensemble d'une situation, et donc il peut anticiper le cours des
événements. C'est l'un des effets stylistiques de la fausse finale du type
«providentiel». Dans ce cas, les verbes ne sont pas toujours
aspectuels (commencer, finir, s'endormir, etc.), mais aussi des verbes
qui décrivent le cours des événements: quitter, revenir etc.

Idées à retenir :
• Les constructions finales spécifiques sont: afin que+SBJ et pour + INF; les autres
locutions employées pour exprimer le but ont un sens de base généralement consécutif:
pour que, de sorte que, de manière que, de manière à (à ce que), (faire) en sorte que etc.;
• Dans la proposition finale, ces locutions conjonctives sont suivies d'un subjonctif.
• La proposition finale exprime le but d'une action volontaire, envisagé comme résultat
souhaité, effet voulu, dessein projeté, et non pas comme une simple conséquence
naturelle attendue à se produire.
• Afin de discriminer la finalité des autres types de causalité, il faut prendre en compte
l'interprétation du procès principal: une action volontaire dirigée vers l'obtention d'un
certain résultat définit le caractère de finalité de ce type de proposition ;
• Les principales valeurs de la proposition finale sont:
– le but affirmé (ou : but à atteindre);
– le but nié (ou: conséquence à éviter)
• La sémantique intentionnelle (action poursuivie volontairement) du procès principal est
une caractéristique des phrases à subordonnée finale.
• Du point de vue grammatical, la poursuite d'une finalité négative (le but à éviter) entraîne
l'application de certaines règles particulières visant l'emploi de la négation (le ne explétif).
Retenez les classes de verbes qui apparaissent le plus souvent dans la principale
d'une circonstancielle de but.
N'oubliez que le but se construit avec le subjonctif !
Rappelez-vous les règles du NE explétif dans la phrase à proposition finale.

242
La subordonnée circonstancielle finale

 Les clés du test d'autoévaluation


Corrigé de l'exercice 1 :
a) rapport de dépendance déterminative entre les procès:
(i) action intentionnelle: parler au chef de l'expédition; effet voulu : afin d'obtenir de lui une
part du butin. (ii) action intentionnelle: allez ("maintenant vous devez vous retirer dans
votre chambre"); effet voulu: vous reposer (dans le but de vous reposer). (iii) action
intentionnelle: je vais vous enfermer à clef dans votre chambre; effet voulu: de peur qu'on
ne vous enlève (la mesure de fermer la porte à clé est prise dans le but d'éviter que
quelqu'un vienne et enlève la personne).
b)mot subordonnant + mode du verbe dans la finale:
(i) afin de + INF; (ii) Ø + INF (après verbe de mouvement); (iii) de peur que + subjonctif.
Corrigé de l'exercice 2 :
(1) afin de se retrouver du côté de la rangée de fenêtres qui donnaient sur la rue (but
positif à atteindre)
(2) pour que la gardienne qui était en bas ne puisse l'apercevoir (but à éviter)
(3) de manière à ce qu'il puisse fixer l'emplacement des voitures sur les allées (but positif ou but
à atteindre)
Corrigé de l'exercice 3:
a) Ce banquier se déplaçait souvent dans la région afin de régler ses affaires. (BUT)
b) Ce banquier se déplaçait souvent dans la région chaque fois qu'il le fallait. (TEMPS)
… parce qu'il le fallait. (CAUSE) … de sorte qu'il pouvait se tenir informé sur ses affaires
en province. (CONSÉQUENCE)
a) Je suis resté toute la journée à la maison pour que mon ami puisse m'y retrouver s'il
venait.
b) Je suis resté toute la journée de dimanche à la maison parce que je ne me sentais pas
bien, ayant de la fièvre. (CAUSE) …. de sorte que je commence maintenant la semaine
en assez mauvaise disposition. (CONSÉQUENCE) …. depuis que mon ami m'a appelé
m'annonçant son arrivée (TEMPS).
Corrigé de l'exercice 4 :
1. Nous avons eu un beau séjour, parce que vous n'avez épargné aucun effort lorsque
nous sommes venus chez vous. 2. Luc a gagné un peu d'argent parce qu'il a travaillé
pendant ses vacances. 3. Grand-père a pu lire ma lettre, parce que j'ai essayé de l'écrire
le plus lisiblement possible.

243
La subordonnée circonstancielle finale

→ Test de contrôle 11

Ce test est administré à l'issue de l'unité d'apprentissage 11.


Pour réaliser ce test, il est conseillé de relire l'unité et de suivre attentivement les phrases
données à titre d'exemple pour chacune des valeurs discursives de la proposition finale,
ainsi que les explications sur le rapport logique de but et sur l'emploi des mots
subordonnants spécifiques ou non spécifiques pour rendre le rapport de finalité.

Ne manquez pas de transmettre ce test à votre tuteur. À cet effet, il convient de marquer
votre nom, votre prénom et votre adresse personnelle sur la première page de votre copie.
N'oubliez pas de mentionner aussi le numéro du test. Vous êtes supposés le recevoir
après correction, avec les commentaires de votre tuteur.

Bon travail !

Exercice 1 (2 points)
Soulignez les mots subordonnants (conjonction ou locution conjonctive pour la proposition
finale à verbe fini ou préposition ou locution prépositionnelle pour les subordonnées
réduites):
(…) Chacun possédait une clef de l'autre appartement pour s'occuper des plantes vertes
et du courrier. (…) Au bout d'une semaine, inquiète du silence de Delahaye, elle avait fini
par entrer chez lui pour découvrir son corps sans vie sur le carreau de la salle de bains.

On freina, ensuite on coupa les moteurs avant de s'approcher prudemment, pendant


que F. entreprit de monter seul à bord pour qu'il puisse découvrir dans la coque d'acier
du navire les engins qu'il cherchait. [J. Echenoz]

Exercice 2 (2 points)
Soulignez le verbe fini (au subjonctif) ou le verbe à l'infinitif exprimant le résultat attendu
(le but ou l'effet souhaité).
Faites rafraîchir un peu ce studio, mettez-lui des rideaux plus gais pour qu'il perde
cet air vieillot… Il gagnerait beaucoup et vous verrez, que les clients ne tarderont
pas à venir louer ou acheter ce studio.

Cette instance pourrait être mise en place dans les semaines qui viennent afin
d'examiner les dossiers les plus critiques avant la fin de l'année, a-t-on précisé
dans l'entourage du premier ministre. [AFP]

Que peut bien faire un amoureux éconduit pour tenter de regagner le coeur de sa belle?
Lui envoyer des fleurs, lui téléphoner jour et nuit, dormir devant sa porte, supplier ?

Exercice 3 (2 points)
Créez trois phrases à propositions finales réduites et trois phrases à propositions finales
complètes, ayant dans la principale les verbes et les locutions verbales suivants:
s'efforcer; faire tout son possible; employer toute son énergie; n'épargner aucun effort;
travailler du matin au soir; se battre.

244
La subordonnée circonstancielle finale

Exercice 4 (2 points)
Donnez des exemples de subordonnées introduisant la cause, la conséquence et le but
après une principale construite dont le prédicat contient l'expression marcher à pied.

marcher à pied + (cause) parce qu'il a assez de temps jusqu'au début du spectacle.
marcher à pied + (conséquence), de telle manière qu'il a croisé ses anciens collègues.
marcher à pied + (but) pour qu'il puisse se dégourdir un peu les jambes.

Exercice 5 (2 points)
Faites des phrases à proposition finale exprimant le but à éviter, en distribuant le
morphème de négation dans la principale ou dans la subordonnée:
deux phrases avec une principale affirmative à verbe fini;
deux phrases avec une principale négative à verbe fini;
deux phrases avec une principale affirmative à infinitif;
deux phrases avec une principale négative à infinitif.

Références bibliographiques
• CRISTEA, T., Grammaire structurale du français contemporain (chapitre 6. La
phrase moléculaire: 6.3. La phrase cause – effet), Bucureşti, Editura Didactică şi
Pedagogică, 1979.
• GREVISSE, M., Le bon usage. (Quatrième partie, Les propositions subordonnées:
Propositions finales), XIème édition, Louvain-la-Neuve, Duculot; 1980, ou:
GREVISSE, M. – GOOSSE, A. (éd.), Le bon usage. Grammaire française, Louvain-
la-Neuve, Duculot, 1990 (et éditions suivantes).
• WAGNER, R.-L., et PINCHON, J., Grammaire du français classique et
contemporain (chapitre: Syntaxe des phrases complexes, Les propositions
dépendantes circonstancielles: Les propositions dépendantes finales), Paris,
Hachette, 1962 (nouvelle édition: 1991).

245
La subordonnée circonstancielle consécutive

Unité d'apprentissage 12

LA SUBORDONNÉE CIRCONSTANCIELLE CONSÉCUTIVE

Sommaire page

Les objectifs de l'unité d'apprentissage 12 246


12.1 La conséquence: rapport logique et argumentation discursive 247
12.2 Caractéristiques générales de la phrase exprimant une conséquence 248
12.2.1 Cohésion syntaxique et cohérence interprétative 248
12.2.2 L'ordre temporel et l'ordre séquentiel 250
Test d'autoévaluation 253
12.3 Réalisation linguistique de la proposition consécutive 254
12.3.1 Valeurs sémantiques de la proposition consécutive 254
12.3.2 Corrélatifs et mots subordonnants 255
12.3.3 Les tours de phrase exprimant une conséquence 259
12.3.4 La subordonnée consécutive réduite à l'infinitif 262
12.3.5 Choix du mode personnel dans la proposition consécutive 262
Idées à retenir 265
Les clés du test d'autoévaluation 266
Test de contrôle 267
Références bibliographiques 268

Les objectifs de l'unité d'apprentissage 12

Quand vous aurez parcouru ce chapitre et effectué les exercices, vous serez capables de:

• Identifier les valeurs discursives réalisées par la proposition consécutive: la


conséquence réelle, la conséquence imminente, la conséquence virtuelle.
• Savoir mettre en discours, dans un contexte adéquat, les conjonctions et les
locutions conjonctives pour la conséquence (non spécifiques).
• Discriminer entre: (1) cause; (2) effet ou conséquence; (3) but; ou (4) simple rapport
de succession temporelle.

246
La subordonnée circonstancielle consécutive

12.1 La conséquence: rapport logique et argumentation discursive


• Définition du rapport de conséquence
La subordonnée circonstancielle consécutive exprime le résultat ou
Le rapport l'effet du procès énoncé dans la proposition principale, ou une suite
logique naturelle de ce procès, réalisée ou simplement imaginée comme
possible:
de conséquence
(i) Clélia fut tellement surprise qu'elle fut obligée de s'appuyer
sur le bras de son fauteuil. [Stendhal]
Principale: elle fut tellement surprise; subordonnée: elle fut
obligée de s'appuyer = conséquence réelle.
La principale exprime le fait1: l'émotion du personnage, qui s'est senti
Principale : sur le point de s'évanouir et donc: fait2 =elle s'appuie sur le bras de
son fauteuil. La phrase souligne l'intensité de la surprise.
fait 1 ou antécédent
(ii) Quant à Julien, il était tellement plongé dans l'extase (…)
qu'à peine put-il rabaisser son attention jusqu'à écouter les
Subordonnée:
propos durs que lui adressait M. de Rênal. [Stendhal]
fait 2 ou conséquent En montrant les suites du procès principal ("être plongé dans
l'extase"), la phrase consécutive souligne justement les proportions
que prend ce procès.
Parfois, la simple réalisation du procès principal suffit pour
entraîner les conséquences décrites dans la subordonnée:
(iii) Elle m'avait maintes fois demandé de faire cela, si bien que
j'ai dû accepter.
Le simple fait que quelqu'un avait demandé cela plusieurs fois, entraîne
l'acceptation du sujet locuteur. La phrase consécutive apporte dans le
débat l'argument que le fait exprimé dans la subordonnée est une
conséquence du fait exprimé dans la principale.

• Opposition entre conséquence (effet, suite), but et cause


La définition du rapport de conséquence a des points communs avec
Comment distinguer
la cause et le but: les trois types de phrase mettent en relation, par
les prédications données dans la principale et dans la subordonnée,
les différents liens des faits entre lesquels il y a un rapport logique de
déterminatifs: d é t e r m i n a t i o n de type causal.
cause, but CAUSE : Je lui ai pardonné, parce qu'il s'est excusé.
et conséquence
BUT : Il est venu pour s'est excuser.
CONSÉQUENCE : Il a tellement regretté son geste, que je l'ai excusé.
Les différences entre les trois types de phrase sont les suivantes:
– La communication par une phrase ayant une subordonnée de
cause présente une focalisation argumentative sur la motivation
causale fournie dans la subordonnée :
Je me suis absenté (effet, suite, conséquence), parce que j'ai
été malade (cause, fait déterminant).
Dans la phrase causale, on veut montrer que le fait2 (le conséquent
ou l'effet) s'est réalisé par suite du fait 1 (l'antécédent):
La cause J'ai obtenu une très bonne note, parce que j'ai étudié
= explique pourquoi assidûment. (Principale – Subordonnée de cause)
l'action principale s'est – La phrase ayant une subordonnée de BUT réalise une
communication qui souligne toujours le contenu de la subordonnée,
produite
qui décrit une perspective imaginée par le sujet et non un fait réel :
247
La subordonnée circonstancielle consécutive

Je prends des médicaments pour guérir. (effet, suite,


conséquence voulue).
La motivation du fait1 (antécédent) réside dans la volonté du sujet
d'accomplir un fait2 (qui n'est pas encore réalisé).
La finalité J'étudie beaucoup pour prendre de bonnes notes en français.
= l'effet voulu, le but Principale Subordonnée de but (finale)
poursuivi par une action – La phrase ayant une subordonnée de CONSÉQUENCE, situe sa
intentionnelle focalisation argumentative sur la principale: on veut montrer que le
fait1 (antécédent) a pris de telles proportions ou, tout simplement,
qu'il s'est réalisé, de sorte que le fait2 (conséquent) a pu se réaliser
aussi, ou bien il pourrait virtuellement se réaliser:

La conséquence J'ai été si malade que j'ai dû garder le lit et que je me suis
m'absenté une semaine de l'école.
= sert à souligner la
Principale – Subordonnées consécutives réelles
manière de déroulement
La phrase à proposition de cause souligne la r a i s o n ou le
de l'action principale, les
p r é t e x t e du fait principal; la phrase à proposition finale met en
proportions ou les limites évidence la m o t i v a t i o n intentionnelle ou l'a c t i o n v o l i t i v e de
dépassées par cette quelqu'un, sa volonté d'accomplir d'obtenir un certain résultat; la
action
phrase à proposition de conséquence décrit les s u i t e s entraînées
involontairement par le fait principal, présenté sous un certain p o i n t
d e v u e é n o n c i a t i f , qui permet d’établir ce lien argumentatif.

12.2 Caractéristiques générales de la phrase exprimant une


conséquence

12.2.1 Cohésion syntaxique et cohérence interprétative


• La fonction discursive de la proposition consécutive
La fonction argumentative d'une phrase qui renferme une
c o n s é c u t i v e est non seulement d'établir un lien déterminatif entre
deux événements, mais aussi de souligner le caractère particulier ou
Fonction les proportions "démesurées" du fait principal, l'intensité des
argumentative paramètres de cette action, ou bien toute une conjoncture qui entraîne
d'une phrase certaines suites naturelles: non intentionnelles, involontaires,
spontanées, en un mot: régies par les lois naturelles.
à proposition
consécutive L'homme était un peu nerveux, de sorte qu'en quittant le gala
de bienfaisance, il se mit à boire pour se faire du courage.
[Echenoz]
L'homme était nerveux (fait1); la nervosité était telle, qu'il se mit à
boire. Le fait de boire est présenté comme une conséquence de l'état
inhabituel d'anxiété. C'est dans la conscience d'un sujet humain
(l'énonciateur ou le personnage dont on décrit les pensées) que deux
faits se présentent dans leur rapport consécutif:
Le rapport Finalement, il avait descendu pas mal de champagne avec ses
de conséquence n'est
collègues, de moins en moins nombreux, jusqu'à ce qu'il n'y eût
plus personne à côté de lui, et qu'il dût à son tour s'en aller. [ibid.]
pas sous le contrôle
• Les structures consécutives apparaissent dans des phrases dont
d'une instance le procès déterminatif ou causatif (fait1) produit ses effets sans que
personnelle quelqu'un se propose d'obtenir volontairement cette suite. Parfois, la

248
La subordonnée circonstancielle consécutive

conséquence se produit même à l'insu du sujet humain, qui, dans ce


cas, assiste à l'effet produit, incapable d'intervenir:
(L'homme regarda la femme) …la considérant gravement, il avait
l'air impressionné au point de se mettre à bafouiller. [ibid.]
• Le point de vue discursif dans la phrase consécutive
La proposition consécutive est issue d'un raisonnement discursif: la
conséquence s'établit depuis un certain point de vue qui s'identifie ou
non avec les personnes impliquées dans l'action décrite. À la
Décrire une situation différence du but qui est poursuivi consciemment par un agent, la
depuis un certain point conséquence se produit sans impliquer nécessairement une action
volontaire.
de vue
Il a plu continuellement depuis trois jours, si bien que les rues
sont inondées.
Entre la pluie et l'aspect des rues inondées il y a un rapport de
succession et de conséquence, mais l'action causative n'est pas une
action à finalité, la pluie n'étant pas un procès intentionnel.
L'analyse d'une proposition consécutive doit mettre en
évidence le rapport entre un procès quelconque (état, activité,
événement) non intentionnel, d'une part, et, d'autre part, un certain
résultat du procès "causateur".
L'expression de la conséquence est reliée au point de vue de
l'énonciateur ou d'un autre sujet qui observe et qui juge les
"proportions exagérées", non habituelles, d'un procès, d'une qualité
ou caractéristique :
Fait tout à fait remarquable: ces financiers internationaux
Conséquence croient tellement dans le potentiel logistique de la Région
wallonne qu'ils se permettent d'investir à risque. [WB]
et raisonnement
L'auteur du discours émet l'opinion qu'il y a un lien déterminatif entre
conclusif la confiance (1) des financiers et leur courage (2) d'investir à risque.
– fait1 déterminant: ils croient dans le potentiel de la région;
– fait2 (conséquence): ils investissent à risque.
L'investissement à risque est une conséquence inattendue, ce qui
permet de souligner l'importance du fait déterminatif: la confiance
des investisseurs, idée focalisée par l'argumentation de la phrase
tout entière.
La phrase à proposition consécutive peut redoubler ou même
multiplier le point de vue discursif:
Clélia (…) le trouva tellement maigri, qu'elle finit par arriver à
cette affreuse conclusion: Fabrice était tout à fait changé; il
l'avait oubliée. (…) Clélia fut confirmée dans cette triste idée
par la conversation de tous ses voisins. [Stendhal]
Mots de sens
Le raisonnement conclusif ne rapporte pas les faits dans l'ordre réel,
consécutif et/ou mais en suivant les étapes de la réflexion du personnage féminin. Il
conclusif: y a donc dans la phrase citée un double r a i s o n n e m e n t
conclure, finir par, c o n c l u s i f , rendu par des moyens grammaticaux (la proposition
arriver à, forcer,
consécutive) et aussi par des moyens lexicaux/ interprétatifs:
– la proposition consécutive (qu'elle finit par arriver…);
obliger, s'ensuivre … – principale avec adverbe d'intensité: tellement maigri;
tirer une conclusion,
trouver que… etc.

249
La subordonnée circonstancielle consécutive

– mots qui font référence à des raisonnements personnels:


conclusion, idée; et aussi les verbes: trouver (=juger,
apprécier); finir par; arriver à une conclusion.
N'oublions donc que le rapport consécutif factuel (lien entre deux faits)
s'accompagne toujours d'un rapport conclusif d'argumentation. La
conséquence grammaticale exprime simultanément un rapport
"conclusif" (effet, suite, résultat naturel, spontané, conséquence qui
découle naturellement). Certains mots dans la phrase sont porteurs
d'une telle interprétation conclusive ou d'un raisonnement consécutif.

Mots qui expriment l'idée d'une argumentation conclusive:

Verbes: croire, se douter, imaginer, conclure, tirer une conclusion, affirmer, finir par, se rendre
compte, arriver à l'idée, confirmer une hypothèse, soulever, éveiller, déclencher, inciter,
provoquer, entraîner, amener, susciter, etc. Noms: conclusion, doute, idée, crainte,
considération (d'un fait) etc. Adverbes: finalement, décidément, au bout du compte, après
tout, pour conclure, en conclusion, en définitive, à la rigueur, somme toute, réflexion faite
etc. (voir aussi les mots de coordination marquant la conséquence et les corrélatifs: assez,
aussi/ si, tel/ tellement, trop etc.)
La phrase à proposition consécutive s'intègre dans une séquence
textuelle contenant des mots qui signalent un raisonnement
personnel, un jugement porté sur la manière de déroulement d'un
procès, ou sur l'intensité ou la fréquence de ce procès.

12.2.2 L'ordre temporel et l'ordre séquentiel


• L'ordre temporel dans la phrase consécutive :
Le fait exprimé dans la principale entraîne les conséquences
exprimées dans la subordonnée. L'ordre temporel est donc l'ordre du
rapport déterminatif: la réalisation de la cause ou du procès
déterminatif (1) s'exprime dans la principale; elle précède la
réalisation de l'effet ou du procès déterminé (2), qui s'exprime dans
la proposition dépendante consécutive:
Resté dans l'angle, derrière la porte, si bien qu'on l'apercevait
à peine, le nouveau était un gars de la campagne [Flaubert]
Rester dans l'ombre (1) = cause (procès déterminatif); Il ne s'aperçoit
qu'à peine (2) = effet, ou procès déterminé par le procès exprimé
dans la principale (rester dans l'ombre).
«Il fuma (1) dans la chambre, cracha (1') sur les chenets,
causa (1'') culture, veaux, vaches, volailles et conseil
municipal; si bien qu'elle referma (2) la porte, quand il fut parti,
Ordre avec un sentiment de satisfaction qui la surprit elle-même.»
temporel : [Flaubert]
Le fait1 présenté Une série de procès donnés dans des propositions principales
dans la principale coordonnées (fumer + cracher + causer culture de la terre, veaux,…,
est vaches…) ont comme effet la réjouissance de la personne qui
antérieur au fait2
exprimé dans la referme avec satisfaction la porte après le départ de celui ayant fait
proposition toutes ces actions dégoûtantes. Le lien déterminatif peut s'expliciter
consécutive dans une phrase causale :

250
La subordonnée circonstancielle consécutive

«Parce que l'homme avait fumé dans la chambre et parce qu'il


avait fait d'autres choses qui dégoûtaient la maîtresse de la maison
(cracher, causer sur des sujets inintéressants etc.), celle-ci fut très
contente de voir enfin ce personnage quitter sa maison.»
La conséquence est qu'elle avait refermé avec satisfaction la
porte après le départ de celui qui avait fumé dans la chambre.
• L'ordre séquentiel :
La proposition consécutive suit naturellement la proposition
principale parce que l'argumentation est centrée toujours sur le
procès énoncé dans la principale, procès décrit en montrant quelles
sont les conséquences entraînées.
► consécutive postposée : P, si bien que Q.
(phrase complexe)
P. De cette façon, Q.
(propositions autonomes)
Non seulement la principale donne l'information qui est la plus
Ordre séquentiel: importante du point de vue argumentatif, mais elle est parfois
en règle générale, achevée comme proposition indépendante, la conséquence venant
la proposition dans le texte comme un ajout explicitant les dimensions ou la
modalité (manière) de l'action principale :
consécutive
(1) fait déterminant:
est donnée Je mange les légumes nature, sans les cuire.
après (2) fait déterminé :
la principale De cette façon, ils ne perdent pas leurs vitamines.
►(rare) consécutive antéposée : Pour que P, il est nécessaire Q.
Ce type de phrase conséquentielle qui admet l'ordre séquentiel
inverse se situe sur une zone conceptuelle très proche de
l'expression du but à atteindre.
• La conséquence voulue. Quand la principale exprime ce qui doit
s'accomplir nécessairement pour qu'une conséquence en découle
naturellement, il ne s'agit pas d'un but, mais d'une conséquence voulue.
La prédication dans la principale exprime: nécessité, obligation, devoir,
contrainte, ou simplement ce qu'il convient de faire pour obtenir la
conséquence voulue: Il est nécessaire de faire cela pour qu'un certain
effet s'ensuive. Pour que cette récolte soit sauvée, il faut qu'il pleuve
plus souvent. Pluie (fait déterminant) – récolte bonne (fait déterminé
ou conséquence voulue). Le but aurait impliqué une action volontaire
et l'intention du sujet.
Pour que les familles grandissent, la durée est nécessaire.
[Bourget, apud Le Bidois]
Pour obtenir cet effet, il suffit que telle conditionne soit remplie.
Un type particulier Dans ce type de phrase, la n é c e s s i t é doit porter sur un procès en
de conséquence,
dehors du contrôle d'une instance personnelle. Si la principale donne
une nécessité normative, imposée à un sujet de volonté, la
qui prête à proposition introduite par pour que est une proposition de but:
confusion avec Pour dormir bien, il est nécessaire d'aérer la chambre. ou: Il est
la proposition finale nécessaire d'aérer la chambre pour dormir bien. (proposition
subordonnée de conséquence, à sujet indéfini, générique)
Comparez à :
J'ai aéré la chambre pour dormir bien. (But)
(pour dormir bien= BUT; aérer la chambre = principale)
251
La subordonnée circonstancielle consécutive

Le critère permettant de distinguer la conséquence voulue du but est


la nature du procès principal (action volontaire ou non):
CONSÉQUENCE :
(…) Et une fois dans cette demeure élevée et en bon air,
comme on dit à Parme, il faut un miracle pour que l'on se
souvienne du prisonnier. [Stendhal]
La principale «il faut un miracle» n'est pas une action volontaire,
dirigée intentionnellement vers un but. L'auteur ne fait qu'exprimer
dans la principale quelle est la conjoncture permettant qu'une telle
La conséquence conséquence ait lieu.
«voulue» : CONSÉQUENCE :
Souvent il fut obligé de relever la tête pour que ses larmes
seul le prédicat
ne tombassent pas sur son papier. [Stendhal] (dans la
de la proposition principale: l'action nécessaire pour qu'une certaine
principale permet conséquence se produise)
de distinguer BUT :
Pour que sa belle lettre en italien ne fût pas perdue, Fabrice y
le BUT de la
fit quelques changements nécessaires, et l'adressa au comte
CONSÉQUENCE Mosca. (dans la principale: une action intentionnelle)
De même dans :
Que peut-on faire pour voir le petit gibier revenir dans nos
plaines ? [Le chasseur français]
Que doit-on faire pour voir le petit gibier revenir dans nos
plaines ? (conséquence voulue)
La proposition soulignée n'est pas une finale, mais une conséquence
voulue. Cela montre qu'il y a une zone d'interférence entre la
conséquence virtuelle et la finalité, et que les locuteurs semblent
interpréter parfois comme «conséquence voulue» une proposition
finale antéposée, alors que, dans la définition restrictive du rapport
de conséquence donnée ci-dessus, ce n'est que la proposition finale
qui peut précéder la principale.
De même, dans les textes publicitaires, après des principales à
fonction injonctive (suggestion, conseil au consommateur etc.), les
propositions de forme pour + INF ou pour que + SBJ ne sont pas des
propositions finales, mais des conséquences voulues:
Pour répondre (BUT) à vos questions sur les successions, les
donations, les maisons de retraites, les aides sociales, le soutien
BUT à domicile. (…) Profitez des conseils gratuits par téléphone pour
et
envisager (CONSÉQUENCE) l'avenir avec sérénité. [Le chasseur
français, nov. 1998]
CONSÉQUENCE :
Exprimer le but à atteindre (Tu as travaillé pour réussir le concours)
moyens
introduit dans l'argumentation une motivation qui justifie le fait
linguistiques exprimé dans la principale. En revanche:
communs • Proposition consécutive, la principale montre une nécessité ou une
obligation:
Pour que tu réussisses, tu dois travailler (tu es obligé de …)
Tu devras travailler beaucoup pour que tu puisses réussir à
faire cela. Il faut travailler beaucoup pour que tu réussisses.
• Proposition consécutive réelle :
252
La subordonnée circonstancielle consécutive

Tu as tant travaillé que tu as réussi.


• Proposition consécutive: effet non accompli:
Il n'a pas travaillé assez pour qu'il obtienne le résultat voulu.

Test d'autoévaluation
Pour bien gérer ce test, il est indispensable que vous ayez déjà parcouru les explications
et les analyses données dans l'unité d'apprentissage 12. Vérifiez vos solutions aux
exercices en consultant la rubrique Clés du test d'autoévaluation.

Exercice 1
Mettez la forme verbale convenable, pour les sujets donnés entre parenthèses:

Elle avait si mal à la tête que (elle) [RENONCER] à aller ce soir à l'opéra.
………………………………………………………………………………………………..………
Elle était tellement jeune et naïve, que (elle) [VERSER] des larmes chaque fois qu'elle
voyait un mélodrame avec une histoire d'amour malheureux.
………………………………………………………………………………………..………………
Cette maison est trop grande pour (nous deux) [en OCCUPER] toutes les pièces, aux
deux étages et au rez-de-chaussée.
……………………………………………………………………………………..…………………
Elle avait un emploi à mi-temps, si bien que (elle) [POUVOIR] s'occuper de son bébé elle-
même.
………………………………………………………………………………………..………………

Exercice 2
Construisez des propositions consécutives dans les contextes suivants:

1. Il est trop indépendant pour que….…………………………………………………………..

2. Paris est une ville trop grande pour que ………………………………………………………

3. Ce poème est suffisamment facile à comprendre pour que………………………………..

4. Cet auteur n'est pas assez connu pour que ..………………………………………………..

5. Il suffit une seule grosse erreur pour que ..………………………………………………..

Exercice 3
Reliez les propositions dans une phrase complexe à subordonnée consécutive:
1. Papa était fatigué après une journée de travail; il s'est endormi tout de suite.
…………………………………………………………………………………………..……………
2. Mon petit frère est un enfant précoce; il est entré au cours primaire quand il avait cinq ans.
………………………………………………………………………………………..………………
3. Elle n'est pas très jolie; pour se faire une carrière, elle ne parie que sur son intelligence.
……………………………………………………………………………………..…………………
4. Notre voiture est tombée en panne; nous nous sommes présentés en retard au rendez-vous.
……………………………………………………………………………………..…………………
5. La radio a annoncé la nouvelle; maman a dû entendre elle aussi mon succès.
…………………………………………………………………………………..……………………
253
La subordonnée circonstancielle consécutive

Exercice 4
Réalisez des phrases sur les modèles structuraux suivants:
a) …… un tel N (…), que… ; b)…… une telle N (…), que… ; c) …… de tels (telles) N (…),
que… ; d) Son (sa) N était tel (telle) (…), que… ; e) Ses N étaient tels (telles) (…), que…
……………………………………………………………………………..…………………………
……………………………………………………………………………..…………………………
……………………………………………………………………………..…………………………
……………………………………………………………………………..…………………………
………………………………………………………………………………..………………………

12.3 Réalisation linguistique de la proposition consécutive

12.3.1 Valeurs sémantiques de la proposition consécutive


Il y a deux sous-types de conséquences: A. un fait principal
détermine un certain effet ou pourrait le déclencher (conséquence de
manière); B. l ' i n t e n s i t é d'un procès déterminatif énoncé dans la
principale produit ou pourrait produire des suites (conséquence
d'intensité). Nous étudions les moyens linguistiques particuliers de
réalisation de ces deux types de phrase consécutive:
A. l'effet se produit comme une conséquence de la manière de
déroulement du fait principal, comme une étape dans le cours
Deux types de naturel les événements ;
CONSÉQUENCE: B. l'effet réel ou virtuel est attendu à cause des paramètres
démesurés, inhabituels, du procès principal.
– de manière :
A. La phrase consécutive de manière :
suite d'un procès; Pierre est parti avant mon arrivée (1), de sorte que je n'ai pas
pu lui souhaiter personnellement bon anniversaire (2).
– d'intensité :
L'événement (1) s'est produit, et donc cela a entraîné l'événement (2).
suite des
B. La phrase consécutive d'intensité :
paramètres Elle avait tant souffert (1), sans se plaindre, que, finalement
particuliers elle s'était tue (2), avalant sa rage dans un stoïcisme muet
d'un procès
qu'elle garda jusqu'à sa mort. [d'après Flaubert]
Ce n'est pas simplement le fait de souffrir, mais l'intensité de cette
(dépassement
souffrance qui produit les effets décrits. (souffrir intensément
d'une certaine détermine  le fait de garder le silence)
limite) L'intensité d'une qualité ou de l'un des paramètres du procès
entraîne les conséquences exprimées dans la subordonnée:
J'ai tant attendu que je me suis mise en colère.
(fait1) attente  (fait2) colère
Le d é p a s s e m e n t d ' u n e c e r t a i n e l i m i t e produit des
conséquences.
Ce parfum est terriblement acide et persistant, (…) qu'il vous
asphyxie. [Echenoz]
(fait1) qualités du parfum terriblement acide  (fait2) asphyxie.

254
La subordonnée circonstancielle consécutive

Exercice d'entraînement
Réalisez des phrases consécutives d'intensité sur les modèles structuraux suivants :
1. …… tellement V (…), que+SBJ ; (ex. V =critiquer ses supérieurs)
2. …… tellement Adj (…),que+SBJ ; (ex. Adj = beau)
3. …… tellement Adv (…),que+SBJ ; (ex. Adv = bien)
4. …… suffisamment V (…),que+SBJ ; (ex. V = parler de ce sujet)
5. …… suffisamment Adj (…),que+SBJ ; (ex. Adj = intelligent)
6. …… suffisamment Adv (…),que+SBJ . (ex. Adj = vite)
……………………………………………………………………………………………….
……………………………………………………………………………………………….
……………………………………………………………………………………………….
……………………………………………………………………………………………….
……………………………………………………………………………………………….
………………………………………………………………………………………………

12.3.2 Corrélatifs et mots subordonnants


Les moyens spécifiques de réalisation grammaticale de la
conséquence sont:
– des corrélatifs dans la principale;
– des mots subordonnants:
 conjonctions ou locutions conjonctives (pour les consécutives
à mode verbal personnel);
 prépositions ou locutions prépositionnelles devant l'infinitif
(pour les consécutives réduites à l'infinitif).
– le choix du mode personnel, qui oppose le subjonctif, marquant la
conséquence virtuelle, à l'indicatif qui apparaît dans la consécutive
réelle.
Corrélatifs dans la
A. Corrélatifs et mots subordonnants dans la phrase à
principale + mots consécutive «de manière»
subordonnants Ces phrases se construisent sur le modèle des comparatives, la
dans la phrase de proposition subordonnée étant introduite par une locution de
comparaison (avec les mots: manière, façon, sorte) :
CONSÉQUENCE
Corrélatif dans la principale : Conjonctions pour la consécutive:

de (telle) sorte que + IND


en sorte que + IND/ SBJ
de (telle) façon que+ IND/ SBJ
de (telle) manière que + IND/ SBJ
sans que + SBJ
…………V …………… si bien que + IND
Le corrélatif, qui sert à résumer l'idée du verbe principal, est arrivé à
faire corps commun avec la conjonction consécutive que, donnant
naissance à des locutions conjonctives: de sorte que, de manière
que etc. :
Cher disciple, disait-il à Julien, ma mère était loueuse de
chaises dans cette vénérable basilique, de sorte que j'ai été
nourri dans ce grand édifice. [Stendhal]

255
La subordonnée circonstancielle consécutive

La proposition consécutive est introduite par la locution conjonctive


de sorte que: la locution adverbiale de (telle) sorte forme avec la
conjonction que une locution conjonctive (une seule unité
grammaticale, à éléments figés). Et pourtant, ces locutions ne se
limitent pas à introduire la subordonnée de conséquence, elles ont
conservé aussi leur adverbe à rôle auprès du verbe principal:
Il adressait la parole à la maréchale, mais son but unique était
d'agir sur l'âme de Mathilde. Il s'anima de telle sorte [ , ] que
Mme de Fervaques arriva à ne plus comprendre ce qu'il disait.
Le procès principal est caractérisé par l'expression de telle sorte: il
s'anima de telle sorte (=il s'anima beaucoup, intensément).
En conclusion, les corrélatifs «de manière» forment un corps
commun avec la conjonction que; ils ont perdu l'élément
caractérisant (telle): de telle manière (façon/ sorte) que = de manière
(façon/ sorte) que. Il y a aussi une variante négative: sans que.
Comment se réalise le procès principal ? 
 Cet homme chante de manière qu'on entend bien les paroles. (IND)
 Cet homme chante sans qu'on puisse entendre les paroles. (SBJ)
Le subjonctif est amené dans la conséquence qui n'est pas réalisée,
Le double rôle qui reste virtuelle.
grammatical La phrase à subordonnée consécutive peut se réécrire comme
des locutions une phrase coordonnée, tout en maintenant le lien entre les
conjonctives de
propositions par une locution adverbiale (de cette manière/ façon ou
de la sorte = en faisant cela):
CONSÉQUENCE :
Les gravures du livre présentaient aussi les amoureux sous de
vieux costumes du temps passé, de sorte que pour moi vous
–assure étiez Saint-Preux, et je me retrouvais dans Julie. [NERVAL]
la cohésion
 Je voyais ces images. De cette façon, je m'imaginais dans
avec le segment la même situation que les personnages, Saint-Preux et Julie.
antérieur; Les locutions conjonctives de conséquence continuent à remplir un
double rôle grammatical: expression adverbiale auprès du verbe
principal (V+ de telle façon/ manière etc.) et élément de
– marque le
subordination (d'habitude, la simple conjonction que) :
lien avec la
Je l'ai prié de ne pas parler de moi, et je n'ai pas même voulu
subordonnée.
être mené au cercle, de façon que je suis réduit aux deux seuls
journaux que reçoit le café. [Stendhal] (= donc, par conséquent)
De façon que (= dans cette situation) résume toute la situation
décrite: l’auteur explique qu'il n'avait aucune autre source
d'information que les journaux qui se trouvaient au café qu'il
fréquentait. Pour souligner le rapport de conséquence ou
l'enchaînement conclusif, l'expression purement adverbiale (de
manière, de façon etc.) se prolonge par à ce que:
Ces hérauts d'armes indiens disparaissent aussitôt dans la nuit
comme des fantômes, en poussant le fameux cri ou woop de
guerre. On le forme [ce cri] en appuyant une main sur la
bouche et frappant les lèvres, de manière à ce que le son
échappe en tremblotant, tantôt plus sourd, tantôt plus aigu.
[Chateaubriand]

256
La subordonnée circonstancielle consécutive

De manière à reprend et résume les caractéristiques du procès


principal (le texte décrit longuement la "manière" dont les indiens
Mots poussaient leurs cris). La partie finale de la locution (simple que ou à
subordonnants ce que) réalise l'enchaînement consécutif dans la phrase.
dans la phrase Quand la subordonnée est introduite par une locution qui se
de
termine par …à ce que, le mode requis est toujours le subjonctif,
quel que soit le nature (réelle, virtuelle) de réalisation du procès:
CONSÉQUENCE
de façon à ce que + SBJ
de manière à ce que + SBJ.

B. Corrélatifs et mots subordonnants dans la phrase à


consécutive «d'intensité»
La consécutive peut impliquer l'intensité d'un procès, le degré d'une
qualité ou d'une propriété, la quantité d'un objet impliqué dans le
procès etc. Ces propositions consécutives montrent les suites
entraînées par le dépassement d'une certaine limite. Dans la
Les corrélatifs proposition principale, il y a un caractérisant d'intensité (aussi, si, tel
et var., tant, tellement, à tel point) auprès d'un nom, verbe, adjectif,
dans la principale
adverbe. Ce caractérisant (qualitatif ou quantitatif) joue le rôle d'un
s'ajoutent c o r r é l a t i f dans la principale permettant de préciser la nature
à la conjonction consécutive du rapport logique établi dans ce type de phrase:
QUE, avec
…………V …………… + au point que + IND
laquelle peut
…………V …………… + tant que + IND
former des …………V …………… + tant et si bien que + IND
locutions
conjonctives La disparition de Delahaye créait un vide que rien ne saurait
jamais combler. Au point que post mortem il semblait
inconcevable qu'il ne continuât point de se manifester. [Echenoz]

Cela fut au point que nul n'osait aller garder son bétail à moins
de trois lieues de la demeure du Serpent. [ibid.]
Quand dans la principale il y a un corrélatif marquant le
dépassement d'une certaine limite (l'intensité ou la quantité
impliquées dans le procès), la conséquence s'introduit par la
conjonction simple QUE, ou par POUR QUE (la préposition pour
permettant de souligner l'orientation du rapport déterminatif vers
l'effet, vers une suite):

Corrélatif dans la principale : Conjonctions pour la consécutive:


Les corrélatifs Ø + si bien que + IND
dans la phrase (aussi) si bien + que + IND
consécutive tant +V + que + IND
d'intensité
trop (peu) +V + que + SBJ
sont suivis de assez +V + que + SBJ
QUE tellement
ou de
assez +V + pour que + SBJ
POUR QUE
trop +V + pour que + SBJ

257
La subordonnée circonstancielle consécutive

suffisamment + V + pour que + SBJ

Les corrélatifs agissent solidairement avec la conjonction que ou


pour que, de sorte que les grammairiens considèrent parfois qu'il y a
des locutions conjonctives discontinues: assez…. pour que;
suffisamment… pour que etc. Le rôle des adverbes corrélatifs dans
la principale est quand même assez distinct de celui d'une
conjonction (simple lien syntaxique), car ils occupent dans la phrase
leur place auprès de la prédication principale.
Les exemples avec si bien que ont montré qu'il y a différents
contextes d'emploi:
– si bien = corrélatif dans la principale;
– si bien que = locution conjonctive devant la subordonnée;
– si bien que adverbe ouvreur de phrase autonome dans la
Constructions coordination conclusive.
(Dans cet admirable petit temple d'Isis) la conservation de la
polyvalentes:
plupart des édifices est assez complète pour que l'on ait pu
SI BIEN QUE : prendre grand plaisir à cette tentative palingénésique. [NERVAL]
– corrélatif +que;
– locution conjonctive; un tel (une telle)
(de) tels (telles) +N + que + IND
– expression adverbiale
tant de
en tête de phrase
(qui introduit une si
proposition autonome) aussi
tant + Adj (Adv) + que + IND
tellement

Faire + que + IND


Faire + en sorte de + INF

Exercice d'entraînement
Identifiez dans chacune des cinq phrases suivantes l'un des contextes syntaxique A, B, ou C:
(A) Adv. si bien .... + conj. que;
(B) Loc. conj. si bien que;
(C) Adv. de phrase (suivi d'une proposition autonome) si bien que.
1. Quelque chose de plus fort qu'elle la poussait vers lui, si bien qu'un jour, la voyant
survenir à l'improviste, [l'homme] fronça le visage comme quelqu'un de contrarié.
2. Il n'avait plus, comme autrefois, de ces mots si doux (...), ni de ces véhémentes
caresses (...); si bien que leur grand amour, où elle vivait plongée, parut se diminuer sous
elle, comme l'eau d'un fleuve (...).
3. Elle s'en allait toute seule sur le bord de la mer, si bien que le lieutenant de la douane
(...) la trouvait étendue à plat ventre et pleurant sur les galets.
4. Il avait enfreint la loi (...); si bien que, sur des dénonciations ténébreuses, Homais avait
été mandé à Rouen, prés M. le procureur du roi.
5. Resté dans l'angle, derrière la porte, si bien qu'on l'apercevait à peine, le nouveau était
un gars de la campagne. [Flaubert]

1. ____________ 2. ____________ 3. ____________4. ____________ 5. ____________


258
La subordonnée circonstancielle consécutive

12.3.3 Les tours de phrase exprimant une conséquence


• La double articulation argumentative
La structure d'une phrase à proposition consécutive présente
souvent deux articulations distinctes: (1°) le constat d'un
dépassement de limites dans la réalisation d'un procès, et (2°) la
mise en relation consécutive du procès déclencheur avec ses
conséquences. Dans les exemples déjà discutés ci-dessus:
(1°) elle avait tant souffert (constat) –
(2°) que finalement elle s'est isolée du monde (mise en relation
avec la conséquence).
Ou bien:
(1°) le parfum était si acide (constat) –
(2°) qu'il vous asphyxie (mise en relation de la cause avec les
effets).
Cette structure à double articulation se traduit sur le plan linguistique
par l'articulation binaire de la phrase. L'unité syntaxique disparaît, c'est
La ponctuation seulement l'interprétation qui réunit les deux segments; leur ligne de
comme marqueur
séparation est parfois marquée par une ponctuation (virgule; point-
virgule; point), comme dans:
grammatical
Tout tremblait dans son hôpital quand il se mettait en colère, et
qui brise la
ses élèves le vénéraient si bien , qu'ils s'efforçaient, à peine
cohésion
établis, de l'imiter le plus possible ; de sorte que l'on retrouvait
syntaxique sur eux, par les villes d'alentour, sa longue douillette de
dans la phrase mérinos et son large habit noir. [Flaubert]
consécutive
Au lieu de la locution conjonctive si bien que, cette phrase a séparé
les deux articulations argumentatives:
(1°) ses élèves le vénéraient si bien (constat);
(2°) qu'il s'efforçaient de l'imiter. (Cette imitation dans la façon
de s'habiller est mise en relation avec l'intensité de la
vénération). (Et aussi: de sorte que, après point-virgule.)

Le rapport logique • La double articulation syntaxique


de conséquence Dans la phrase citée en exemple, l'argumentation se continue par
une troisième articulation (il y a deux propositions consécutives):
entre des propositions
1. on le vénérait tant (constat), 2. de sorte que l'on essayait de
juxtaposées; l'imiter ; 2. cette imitation était telle, 3. qu'on retrouvait sur eux son
P1 (,) (;) (.) P2 large habit noir.
L'articulation dans deux étapes d'argumentation: 1. constat; 2.
mise en relation entre "cause" et "effets", conduit à avoir des
propositions consécutives séparées par virgule (si bien - , - que), ou
par point-virgule (… ; de sorte que).
La proposition introduite par de sorte que est détachée dans
la phrase, séparée de la principale, comme si elle était autonome:
Cette seconde moitié du Havre s'appelle Graville, et a
l'avantage de former une commune séparée. De façon que,
lorsque la mauvaise humeur de M. le maire du Havre ou
l'intrigue d'une coterie proscrivent une invention utile, elle se
réfugie à Graville. [Stendhal]

259
La subordonnée circonstancielle consécutive

Le degré de cohésion peut varier depuis un lien très faible


(juxtaposition), jusqu'au lien le plus serré (subordination avec
conjonction ou locution conjonctive et corrélatif dans la principale).

• Tours de phrase marquant la conséquence :

a) Propositions juxtaposées:
Il a plu toute la nuit; les trottoirs sont mouillés.

b) Proposition coordonnées:
(Il) prononçait si mal le français, que ses camarades crurent
voir dans ses paroles un ton de supériorité, ils furent vivement
Mots choqués, et dès lors dans leur esprit un duel se prépara pour
coordonnants
la fin de la journée. [Stendhal]
dans la coordination L'un des deux mariniers qui était né sur la rive droite du Pô, et
par conséquent n'avait pas besoin de passeport à l'étranger,
conséquentielle
pour aller à Parme. [ibid.]
et/ou conclusive:
L'homme arrive à se méfier de la Bible, des ordres de l'Eglise,
et
de la tradition, etc., etc.; dès lors il est perdu. [ibid.]
(conjonction coord.) Deux propositions coordonnées sont en rapport de conséquence
par conséquent quand le fait exprimé dans la première est celui qui a conduit aux
en suites naturelles exprimées dans la deuxième proposition.
conséquence
Mots de coordination marquant la conséquence
dès lors Les phrases coordonnées marquant un rapport de conséquence ont
alors un ordre préétabli: le fait déterminant (fait1) s'exprime le premier,
ainsi tandis que la proposition qui exprime le fait conséquent est donnée
après, introduite le plus souvent par un marqueur adverbial de
aussi
coordination conclusive/ consécutive:
de là • donc, en conséquence, par conséquent, en effet
(marqueurs conclusifs):
Tout à coup, à une hauteur immense et à ma droite j'ai vu un
aigle, l'oiseau de Napoléon; il volait majestueusement se dirigeant
vers la Suisse, et par conséquent [il volait] vers Paris. [Stendhal]
(Ces deux lettres) sont de votre écriture, et par conséquent font
preuves judiciaires contre vous. [ibid.]

• ainsi, aussi (que montrent que la manière de réalisation du fait


déterminant, antécédent, entraîne une suite naturelle):
C'est dans l'hiver de 1830 que cette nouvelle fut écrite; ainsi [il
n'y a] aucune allusion aux choses de 1839.
Le cumul des procédés conduit à des pléonasmes: *ainsi donc, *ainsi
par exemple,*ainsi par conséquent sont des articulateurs textuels
pléonastiques (ils sont donc à éviter).
La vie de ce château, (…) était fort triste; aussi Fabrice passait-
il toutes ses journées à la chasse. [ibid.]

260
La subordonnée circonstancielle consécutive

L'adverbe aussi en tête d'une phrase s'accompagne souvent (mais


facultativement) du tour inversif:
La porte était fermée; aussi dût-il attendre que quelqu'un
vienne lui ouvrir.
Dans la rue, le comte était un passant remarquable; aussi eut-il
le plaisir d'être reconnu et accosté.
Mais aussi sans inversion:
…. Aussi il a dû (j'ai dû) attendre quelqu'un qui vienne lui
ouvrir.
Tours de phrase (…) Des appels passaient pour lui dans l'obscure affliction des
exprimant la voix; aussi éprouvait-il une reconnaissance toute filiale pour
cette église. [Huysmans]
conséquence:
Aussi en tête de phrase = par conséquent, c'est pourquoi. La
conséquence s'exprime dans ce cas par la proposition indépendante,
– juxtaposition
ayant en tête l'adverbe aussi (= ouvreur de phrase).
• de là, d'où (devant une conséquence réduite à un nom):
– coordination marqueurs montrant en arrière l'origine motivationnelle du fait2 , c'est-
à-dire le fait déterminant, fait1;
Elle était belle, d'où son succès. (le succès vient comme une
–subordination
conséquence naturelle de sa beauté).
• dès lors, alors: marqueurs montrant la succession logique
entre les deux faits: d'abord le fait déterminant, fait1, ensuite la
conséquence déterminée, le fait2 .
Nous avions encore des espaces libres, alors nous avons
réduit nos prix. [AFP]
L'église Saint Sulpice lui paraissait trop grande et trop froide (…).
Alors, il se réfugiait dans la vieille église de Saint-Séverin,
enfouie en un coin du Paris pauvre. [Hyusmans] (alors = en
conséquence)

c) Propositions subordonnées :
Lorsqu'elle revit Julien, elle était toute tremblante, sa poitrine
était tellement contractée qu'elle ne put parvenir à prononcer
la moindre parole. [Stendhal]
Le mot subordonnant est la conjonction que qui s'appuie aussi sur
l'adverbe corrélatif dans la principale, tellement.
• Liens entre les tours de phrase exprimant la conséquence
L'expression de la conséquence met en jeu des moyens alternatifs:
simple juxtaposition de deux propositions reliées logiquement, ou
l'emploi de certains adverbes, conjonctions ou locutions conjonctives
de coordination ou de subordination :
C'est le printemps déjà. La nature reverdit. (juxtaposition)
C'est le printemps, donc la nature reverdit. (coordination)
C'est le printemps, de sorte que la nature va bientôt reverdir.
C'est le printemps, si bien que la nature va bientôt reverdir.
(subordination)
En conclusion, les rapports déterminatifs dans une phrase
consécutive s'expriment par divers moyens: juxtaposition,
coordination, subordination.
261
La subordonnée circonstancielle consécutive

12.3.4 La subordonnée consécutive réduite à l'infinitif


Tout rapport de détermination causale peut prendre dans le langage
diverses formes discursives: cause (papa m'a grondé pour être
rentré tard hier soir/ pour avoir commis des erreurs), but (Je me
prépare pour partir. Je travaille pour vivre. J'étudie pour savoir) et
conséquence (Cet intervenant parle trop vite pour le comprendre,
C'est assez bon, pour en demander encore. C'est trop cher pour
l'acheter.), ou simple lien temporel de succession (elle entra un
La proposition instant pour partir aussitôt).
La conséquence est une fonction du rapport factuel entre les
infinitive deux procès prédicatifs, celui de la proposition principale et l'infinitif:
consécutive (…) Et je vous crois assez poète pour vous soucier peu des
réalités. [NERVAL]
est toujours postposée:
Le corrélatif (assez, trop, etc.) dans la principale aide à interpréter la
proposition infinitive comme conséquence.
En l'absence d'un corrélatif d'intensité ou de nécessité/
Prédication + pour + INF suffisance (assez/ trop/ trop peu … pour + INF; insuffisant pour +
INF; suffisamment + INF etc.), l'infinitif se fait précéder par des
locutions prépositionnelles de sens consécutif: de manière à, de
façon à, jusqu'à, en sorte de etc., ou tout simplement par la
préposition à:
Elle est folle à lier. Je suis malade à garder le lit. (Grevisse).

Nous savons tout de la cuisson des truffes, baignées « de bon


vin blanc très sec », salées « sans excès », poivrées « avec
tact » et de l'ébullition entretenue de manière à laisser les
truffes «danser, entraînant dans les remous de l'écume une
vingtaine de lardons mi-gras, mi-maigres qui étoffent la
cuisson.» [Mag. litt. 266, 1989]

12.3.5 Choix du mode personnel dans la proposition consécutive


Le mode spécifique dans la subordonnée de conséquence est
l'indicatif. Après si bien que, aussi bien que, et dans les phrases
avec corrélatif d'intensité: tellement, tel (et var.), tant, au point que,
si, aussi etc. , c'est indicatif qui est requis (voir ci-dessus).
En revanche, dans la consécutive de manière, l'opposition
indicatif/ subjonctif traduit une opposition sémantique: conséquence
réelle /vs/ conséquence imaginée, virtuelle ou une opposition
grammaticale (subordonnée de but/ vs/ subordonnée consécutive) :
J'ai marché très vite de sorte que j'ai pu arriver avant eux.
(conséquence)
Je marche vite de sorte que je puisse arriver avant eux. (but à
atteindre)
Dans la plupart des contextes, la distinction entre les propositions
finales et les consécutives est marquée au niveau du mode choisi
dans la subordonnée:
– subjonctif dans la finale, pour montrer que l'action est simplement
envisagée comme finalité de l'action intentionnelle présentée dans la
principale:
Je dors maintenant pour que je puisse être reposé ce soir.
262
La subordonnée circonstancielle consécutive

Il s'efforce de faire ses devoirs, de sorte qu'il puisse réussir à


l'INDICATIF, passer ses examens.
parfois, le – indicatif dans la consécutive, pour montrer la réalité des effets
CONDITIONNEL = intervenus par suite de que l'action présentée dans la principale:
J'ai dormi dans l'après-midi si bien que maintenant je me sens
les modes
reposé. Il s'est efforcé de faire ses devoirs, de sorte qu'il a pu
verbaux réussir à passer ses examens.
dans la
subordonnée • INDICATIF ou CONDITIONNEL
La proposition consécutive avec mode personnel se construit en
marquant la
général avec i n d i c a t i f . Pour marquer l'éventualité, le conditionnel
conséquence est (comme dans tout autre contexte) une variante discursive de
RÉELLE/ l'indicatif:
ÉVENTUELLE Mon ami est venu hier soir chez moi, si bien que j'ai pu lui
donner la nouvelle.
Mon ami est venu hier soir chez moi, si bien que maintenant je
serais heureux de lui rendre visite moi-même.
Il fait tellement chaud à Paris en été que tout le monde serait
Le mode verbal
content de pouvoir faire la plage au bord de la Seine.
dans la
subordonnée • SUBJONCTIF
consécutive Le subjonctif est amené dans la proposition consécutive pour la
VIRTUELLE
conséquence virtuelle :
– Après principale négative :
est le
Notre ami n'est pas si changé pour que vous ne le
SUBJONCTIF
reconnaissiez plus. /…pour qu'il devienne à ce point
méconnaissable.
Elle n'a pas été si bonne au chant, pour que nous l'acceptions
dans notre chorale.
Ils ne sont pas si malhonnêtes pour qu'ils soient mis au pied du
mur.
– Après principale interrogative:
Est-ce que papa est rentré, pour que nous puissions nous
mettre à table ? – conséquence potentielle. (Papa est rentré de
sorte que nous nous sommes finalement attablés:
conséquence réelle)
Es-tu d'accord avec tous ces points du plan, pour que je puisse
le communiquer au directeur du projet ?
– Après: de façon à ce que; de manière à ce que il y a toujours le
subjonctif:
Nous devons faire venir le docteur, de manière à ce que nous
puissions obtenir l'avis d'un expert. Comparez à :
Nous avons fait venir le docteur, de manière que nous avons
pu obtenir l'avis d'un expert.
– Pour exprimer la conséquence voulue, en général, après une
prédication qui exprime la nécessité, l'obligation:
Il est nécessaire de se montrer compréhensifs pour que les
clients ne nous quittent. Il faudrait beaucoup de tact pour qu'il

263
La subordonnée circonstancielle consécutive

se laisse convaincre. La réussite exige trop de patience pour


Contextes que je me fasse des illusions là-dessus.
d'emploi du – Après une prédication de sens restrictif, formée avec les verbes
SUBJONCTIF suffire, falloir ou avec être suffisant :
Il n'en fallait pas tant pour qu'on décidât sur ce problème.
dans la
Il n'y a pas suffisamment de raisons pour qu'il soit recalé.
subordonnée Il suffit le moindre geste pour qu'il se sente contrarié.
consécutive Il s'en est fallu de peu qu'il ne se rendît malade.
VIRTUELLE Il fallait un seul petit mot pour qu'il se mette ne colère.
– Après assez…; trop….; pas assez….., suivis de que ou pour
que:
J'étais assez confus pour que je ne réagisse pas vivement.
Tu étais trop fatigué pour que tu pusses t'endormir tout de
suite. Elle était trop malade pour qu'elle pût entendre nos
conversations. Le vie est trop belle pour qu'on veuille s'en
défaire.
– Conséquence hypothétique (mise ne relation avec une situation
imaginaire):
Il faut faire en sorte qu'il n'y ait aucun reste.
Je m'étais juré de lui parler en sorte qu'il puisse (litt. pût)
comprendre.
– Après sans que :
Elle hurle sans toutefois que son beau grand visage roman
s'anime. (Mallet-Joris, apud Béchade)
[Elle devint inquiète] Sans qu'elle daignât le dire à personne, un
accès de fièvre d'un de ses fils la mettait presque dans le
même état que si l'enfant eût été mort. [Stendhal]
La fièvre aurait pu la faire en parler, mais il n'en fut pas ainsi, elle n'en
parla à personne: conséquence naturelle qui ne s'est pas manifestée.
On partit à l'instant même [ , ] sans que le cocher eût le temps
de parler à personne. (Conséquence du départ empressé: le
cocher n'avait pu parler à personne.)

Conclusion. L'expression de la conséquence doit tenir compte des


types syntaxiques de phrase, des formes verbales qui expriment le
procès consécutif, et des valeurs interprétatives, qui sont en étroite
relation avec la forme verbale employée:

264
La subordonnée circonstancielle consécutive

Expression de la conséquence
Tours de Mode dans la consécutive Valeur sémantique
phrase
(valeurs
Juxtaposition sémantiques
indicatif ou conditionnel actualisées en
conséquence réelle fonction de la
Coordination nature
du corrélatif et
indicatif ou du mot
conditionnel subordonnant)
mode conséquence virtuelle
Subordination personnel « manière »
subjonctif d'un fait positif
conséquence irréelle
d'un fait négatif
« intensité »
mode non infinitif conséquence réelle
personnel ou virtuelle

Cette classification met enjeu des critères formels (tours de phrase,


mode) et des critères logico-sémantiques: la valeur interprétative de
la proposition consécutive. On observe que la conséquence virtuelle
et irréelle s'exprime par subjonctif; on remarque aussi que la
consécutive réduite à l'infinitif provient soit qu'une structure à indicatif
(conséquence réelle), soit d'une structure au subjonctif
(conséquence irréelle ou virtuelle).

Idées à retenir

►L'expression du but, d'une part, et de la conséquence imaginée, virtuelle ou


apparente, d'autre part, ne se distinguent pas toujours. Du point de vue grammatical, les
mêmes locutions conjonctives, pour que, de sorte que, de manière que, de manière à,
(faire) en sorte que etc., suivies d'une proposition au subjonctif peuvent marquer aussi
bien le but que la conséquence imaginée ou la conséquence voulue après une principale
qui explicite les conditions nécessaires, l'obligation ou le devoir à accomplir pour qu'une
conséquence survienne.
► Pour distinguer le but de la conséquence, il faut interpréter le procès principal: une
action volontaire dirigée vers l'obtention d'un certain résultat définit le caractère de
finalité de cette proposition; une action non intentionnelle, qui surgit sans l'intervention du
sujet humain ou à son insu amène l'idée de conséquence. Les verbes d'obligation et de
nécessité (il est nécessaire, il faut, il suffit, il est suffisant de etc., quelqu'un doit, il est
obligé, contraint, forcé etc.) conduisent vers une interprétation consécutive et rejettent la
valeur de finalité, car une action intentionnelle n'est pas une obligation, une nécessité ou
une contrainte.
►L'expression de la conséquence réalisée se distingue du point de vue grammatical des
structures finales par l'emploi du mode verbal de l'action réelle (indicatif) ou éventuelle
(conditionnel). S'opposant au but ou à la conséquence virtuelle, la conséquence réelle
décrit un fait déjà réalisé ou possible, qui découle d'une action principale non
intentionnelle.
►Les systèmes corrélatifs caractérisent les tours de phrase consécutifs, tandis que la
sémantique intentionnelle (action poursuivie volontairement) du procès principal
caractérise les tours de phrase à subordonnée finale.

265
La subordonnée circonstancielle consécutive

 Les clés du test d'autoévaluation


Corrigé de l'exercice 1 :
Elle avait si mal à la tête qu'elle renonçât à aller ce soir à l'opéra. Elle était tellement jeune
et naïve, qu'elle versait des larmes chaque fois qu'elle voyait un mélodrame avec une
histoire d'amour malheureux. Cette maison est trop grande pour que nous en occupions
toutes les pièces, aux deux étages et au rez-de-chaussée. Elle avait un emploi à mi-
temps, si bien qu'elle pouvait s'occuper elle-même de son bébé.

Corrigé de l'exercice 2
1. Il est trop indépendant pour qu'il accepte nos conseils. 2. Paris est une ville trop grande
pour que nous puissions la visiter en une seule journée. 3. Ce poème est suffisamment facile
à comprendre pour que vous puissiez le proposer comme lecture à des enfants du cours
primaire. 4. Cet auteur n'est pas assez connu pour qu'il soit accepté comme vedette de cette
émission télévisée. 5. Il suffit une seule grosse erreur pour que tout cet ouvrage soit rebuté.

Corrigé de l'exercice 3
1. Papa était fatigué après une journée de travail si bien qu'il s'est endormi tout de suite. 2.
Mon petit frère est un enfant précoce, de sorte qu'il est entré au cours primaire à l'âge de cinq
ans. 3. Elle n'est pas très jolie, de sorte que, pour se faire une carrière, elle ne parie que
sur son intelligence. 4. Notre voiture est tombée en panne, si bien que nous nous sommes
présentés en retard au rendez-vous. 5. La radio a annoncé la nouvelle, de sorte que
maman a dû entendre elle aussi mon succès.

Corrigé de l'exercice 4
a) Cette journaliste manifestait un tel courage dans ses prises de position, que tous
les lecteurs du journal voulaient savoir son opinion à elle.
b) Notre équipe eu une telle réussite au match de vendredi, qu'elle s'est déjà
qualifiée pour la Coupe de l'Europe.
c) Le président a prononcé de telles paroles, que tout le monde en fut ému.
d) Sa formation était telle, qu'il fut tout de suite admis comme membre de cette
fameuse équipe de recherche.
e) Ses opinions politiques étaient telles, qu'il valait mieux ne pas lui demander de
venir dans cette émission télévisée.

266
La subordonnée circonstancielle consécutive

→ Test de contrôle 12

Ce test est administré à l'issue de l'unité d'apprentissage 12.


Pour réaliser ce test, il est conseillé de relire l'unité et de suivre attentivement les phrases
données à titre d'exemple pour chacune des valeurs discursives de la proposition
consécutive, ainsi que les explications sur rapport logique de conséquence et sur les mots
subordonnants spécifiques non spécifiques pour rendre le rapport de conséquence.

Ne manquez pas de transmettre ce test à votre tuteur. À cet effet, il convient de marquer
votre nom, votre prénom et votre adresse personnelle sur la première page de votre copie.
N'oubliez pas de mentionner aussi le numéro du test. Vous êtes supposés le recevoir
après correction, avec les commentaires de votre tuteur.

Bon travail !

Exercice 1 (2 points)
Complétez le début de ces phrases:
– ……… , si bien que a renoncé à tout.
– ……… , si bien qu'elle avait dépensé tout son argent.
– ……… , pour qu'elle soit arrivée à temps.
– ……… , de sorte que personne n'a voulu accepter.
– ……… , de sorte qu'il a réussi sans peine.
– ……… , de sorte que chacun pourrait voir sans peine.
– ……… , qu'il a dû suivre un long traitement avec des antibiotiques.

Exercice 2 (3 points)
a) Soulignez les propositions subordonnées consécutives dans les phrases suivantes; b)
reformulez chacune des phrases, en trouvant des moyens linguistiques alternatifs pour
exprimer le rapport de conséquence logique.
(i) Un large couloir y distribuait quantité de chambres aux murs très vivement peints.
(ii) Chacune était dallée d’un ton de marbre assorti, ciré comme un parquet, tellement
encaustiqué qu’il prenait un air de linoléum. [Echenoz]
(iii) De ce tapis saillaient des détails hétéroclites (…); la surface était trop grande, pour que
l’on pût en distinguer les motifs éloignés. [A. Nothomb]
(iv) Il fit son apparition devant elle, tout pâle et maigre; cela eut comme effet que les yeux
de Clélia se remplirent de larmes.
(v) Elle ne voyait Fabrice qu'en profil, mais elle le trouva tellement maigri (…) qu'elle finit
par arriver à cette affreuse conclusion: il l'avait oubliée. [Stendhal]

Exercice 3 (2 points)
Construisez des propositions consécutives dans les contextes suivants:
• Vous êtes assez intelligent pour……………………………………………..
• Cet autre auteur n'est pas suffisamment connu pour que…………………
• Ces phrases sont trop longues pour que ……………………………………
• Cet homme est assez malin pour…………………………………………….
• Ces vêtements ne sont pas assez chauds pour…………………………….
Exercice 4 (3 points)
Analysez les moyens linguistiques d'expression de la conséquence dans les phrases
suivantes, en identifiant pour chaque proposition consécutive: a) le mot subordonnant; b)

267
La subordonnée circonstancielle consécutive

le mode verbal; c) l'éventuelle présence d'un corrélatif dans la principale.


(i) Il suffisait de donner deux tours à un ressort, dont le gouverneur portait la clef sur lui,
pour précipiter ce pont de fer dans la cour.
(ii) Il regardait beaux habits, les mains blanches de la duchesse de telle sorte que la peur la saisit.
(iii) Cette dernière phrase étonna tellement Fabrice, qu'il lui fallut quelques secondes pour
s'en réjouir.
(iv) Son succès dans la seconde partie du discours fut tellement fou et mondain, les élans
de contrition chrétienne furent tellement remplacés par des cris d'admiration tout à fait
profanes, qu'il crut devoir adresser, en quittant la chaire, une sorte de réprimande aux
auditeurs. [Stendhal]

Références bibliographiques

• CRISTEA, T., Grammaire structurale du français contemporain (chapitre 6. La


phrase moléculaire: 6.3. La phrase cause – effet), Bucureşti, Editura Didactică şi
Pedagogică, 1979.
• GREVISSE, M., Le bon usage. (Quatrième partie, Les propositions subordonnées:
Propositions consécutives), XIème édition, Louvain-la-Neuve, Duculot; 1980, ou:
GREVISSE, M. – GOOSSE, A. (éd.), Le bon usage. Grammaire française, Louvain-
la-Neuve, Duculot, 1990 (et éditions suivantes).
• WAGNER, R.-L., et PINCHON, J., Grammaire du français classique et
contemporain (chapitre: Syntaxe des phrases complexes, Les propositions
dépendantes circonstancielles: Les propositions dépendantes consécutives), Paris,
Hachette, 1962 (nouvelle édition: 1991).

268
La subordonnée circonstancielle concessive

Unité d'apprentissage 13

LA SUBORDONNÉE CIRCONSTANCIELLE CONCESSIVE

Sommaire page

Les objectifs de l'unité d'apprentissage 13 269


13.1 Caractéristiques générales de la phrase à proposition concessive 270
13.2 Subordonnées concessives à mode personnel 274
13.2.1 La proposition concessive portant sur un fait réel 274
13.2.2 La concession hypothétique 277
13.2.3 L'opposition entre deux faits indépendants 278
13.2.4 Concessives qui portent sur l'identité d'un objet de discours
ou sur son indétermination qualitative/ quantitative 279
13.2.5 Concessives qui montrent l'exception et la restriction 283
Test d'autoévaluation 283
13.3. Les subordonnées concessives réduites 285
13.4 Autres formes d'expression de la concession 286
Idées à retenir 288
Les clés du test d'autoévaluation 288
Test de contrôle 13 289
Références bibliographiques 290

Les objectifs de l'unité d'apprentissage 13

Quand vous aurez parcouru ce chapitre et effectué les exercices, vous serez capables de:

• Reconnaître le rapport logique de concession et les structures d'opposition.


• Identifier les valeurs discursives réalisées par la proposition concessive.
• Transformer réciproquement des différents types de phrase oppositive: subordonnées
concessives, phrases coordonnées, tours de phrase inversifs, propositions réduites,
etc. , formes qui expriment le même rapport logique.
• Savoir mettre en discours les différents moyens d'expression du rapport logique
d'opposition ou de concession: divers tours de phrase à subordonnée concessive.

269
La subordonnée circonstancielle concessive

13.1 Caractéristiques générales de la phrase à proposition concessive


• Le rapport logique de concession/ d'opposition
Les grammairiens distinguent entre plusieurs types de rapports logiques
qui mettent en contraste deux procès, deux attributs d'un objet, deux
caractérisants de procès, deux objets de discours:
– rapport d'opposition: la phrase est formée de deux segments, P et
Description Q, de polarité évaluative opposée (+/–):
du rapport logique Il est tard et tu ne dors pas !
– rapport de concession: P, quoique (en dépit de) Q:
d'opposition
Nous ne dormons pas encore quoiqu'il se fasse assez tard.
Le rapport de coordination adversative est très proche de
l'opposition: P, mais Q (inversion de polarité évaluative1):
Il est tard, mais je ne peux pas dormir.
• Le rapport d'opposition
La phrase construite sur un rapport logique d'opposition met en
regard deux procès contraires ou contradictoires:
Je viens; tu pars. J'ai monté deux étages, au lieu de descendre.
( opposition d'orientation du mouvement: d'ici, là/de là/ici; haut/ bas.)
Luc est intelligent et studieux; mais sa sœur est très dissipée.
( attributs contradictoires, qui s'excluent l'un l'autre. )
Luc est intelligent; sa sœur l'est moins.
Il parle bien le français, quoique avec un peu d'accent.
 attributs ou caractérisants de procès contraires, qui admettent des
degrés d'intensité.
Marqueurs L'o p p o s i t i o n s'exprime par des phrases autonomes (coordonnées
lexicaux ou juxtaposées), par subordination, par divers autres moyens, y
et grammaticaux
compris par des moyens lexicaux:
Tout ce que je puis2 assurer [le lecteur], c'est que si l'ouvrage
de l'opposition
est trop long à son gré, il n'a pas dépendu de moi de le rendre
plus court: toute vanité de voyageur à part, je me serais
contenté d'un chapitre. [Xavier de Maistre]
L'opposition est marquée plusieurs fois dans cette phrase:
a) par les attributs: plus long/ plus court (opposition lexicale et
parallélisme syntaxique);
b) par le si adversatif qui est une construction de type oppositif;
Ce tour de phrase est une fausse conditionnelle de la forme: Si P, alors
ce n'est pas Q. Cette conditionnelle d'argumentation concessive
pourrait se transcrire sous forme de phrase concessive:
Quoique cet ouvrage puisse paraître trop long au lecteur, il n'a
pas dépendu de moi de le rendre plus court.
(avec proposition concessive introduite par quoique).
c) par la construction exceptive ou restrictive: toute vanité mise à part:
Quelle que soit ma vanité d'auteur, j'aurais accepté volontiers
de rendre le texte plus court.
d) par l'emploi du conditionnel: je me serais qui, à côté d'un indicatif,
donne naissance à une opposition entre deux propositions de sens

1
Si P est jugé favorable d'un point de vue subjectif, Q est jugé comme étant défavorable et inversement.
2
Je puis (vx.) = je peux.

270
La subordonnée circonstancielle concessive

CONCESSION =
opposition +
autonome: Ce n’est pas de moi que cela dépendait: je me serais
causalité inefficace contenté d'un seul chapitre.  deux propositions qui décrivent, l'une
(à l'indicatif), une situation de fait, et l'autre (au conditionnel) une
hypothèse qui s'oppose à la situation décrite.
Les tours de phrase oppositifs sont donc très divers du point de
•opposition :
vue syntaxique. L'opposition trouve dans le discours différents types
fait1  fait 2 de marqueurs : conjonctions; tours inversifs; rapport entre les
modes verbaux; le sens opposé des mots employés; le
parallélisme syntaxique, etc. Les plus importants marqueurs
linguistiques de l'opposition seront passés en revue ci-dessous.
• causalité inefficace
• Le rapport de concession
fait1 ⊃ ~ fait 2
(détermination La phrase construite sur un rapport logique de concession décrit
contrariée) dans la proposition subordonnée une p e r s p e c t i v e qui pourrait
représenter un obstacle à la réalisation du procès exprimé dans la
principale, mais ne le fait pas:
Nous prendrons un taxi jusqu'à la gare, quoique nous ayons
tout le temps d'y aller à pied.
Avoir tout le temps n'empêche pas l'action principale: prendre un
taxi; l'opposition s'établit entre les moyens alternatifs d'aller à la gare:
prendre un taxi  aller à pied.
(…) Quoiqu'on eût infiniment peu d'argent, on paya
généreusement. [Stendhal] L'action principale (la générosité) se
réalise en dépit du manque d'argent.
Quoiqu'il parût écouter les convives, il n'entendait pas un mot
de ce qu'ils disaient; tant il s'adonnait au plaisir de se trouver
près d'elle, de lui effleurer la main, de la servir. [Balzac]
L'opposition s'établit entre apparence et réalité: paraître écouter 
n'entendre pas un mot. La concession implique l'idée d'un rapport de
La concession causalité échouée: à cause de l'expression d'attention sur son visage,
logique le personnage semble faire attention à la conversation; or, cet homme
= le fait était tout absorbé dans ses propres pensées.
qui aurait dû
• Le rapport de concession est souvent rapproché de l'idée d'une
cause qui ne produit pas ses effets; au lieu de produire ses effets,
empêcher
la cause reste inefficace:
la réalisation Elle prononça ses voeux avec une voix aussi forte et intelligible
du fait principal, que si elle n'avait eu que quinze ans, quoiqu'elle en eût
ne le fait pas
cinquante-six. [Ste-Beuve]
L'âge aurait dû estomper le timbre de la voix de cette femme de
cinquante-six ans; et pourtant si on l'entendait parler, on aurait pu
croire qu'il s'agissait d'une jeune fille de quinze ans. La vieillesse est
une "cause" qui ne produit pas ses effets, dans ce cas.
Il nageait dans une joie secrète. Malgré l'éloquence de
quelques regards mutuels, il fut étonné de la réserve dans
laquelle la Zambinella se tint avec lui. [Balzac]
L'opposition se construit sur une p o l a r i s a t i o n é v a l u a t i v e de
l'attitude observable chez une personne:
regards en direction de qqn  réserve envers qqn
(+) signe favorable (–) signe défavorable
L'encouragement du regard aurait dû produire ses effets: l'abandon
de toute réserve. Cette conséquence ne s'est pas produite (la
"cause" reste inefficace). Le rapport logique est donc de concession: le
271
La subordonnée circonstancielle concessive

procès de la subordonnée aurait dû avoir des effets qui auraient


empêché de se produire le procès de la principale, mais il ne l'a pas fait.
• L'ordre temporel
En général, l'ordre temporel entre le procès principal et le procès
subordonné n'est pas pertinent. D'ailleurs, la phrase oppositive met
en relation d'habitude deux procès simultanés. Et pourtant, la
proposition concessive décrit une situation logiquement antérieure à
celle donnée dans la principale:
Ordre
Quoique je veuille vous parler, je n'ose pas vous le dire.
temporel :
Le procès subordonné (vouloir parler) précède naturellement celui
non pertinent
principal (oser le dire), car une intention ne pourrait que précéder l'acte
. même. Les propositions concessives ne décrivent pas des situations
inscrites dans le temps, mais plutôt des états ou des activités en dehors
de leur dimension temporelle. Dans la phrase concessive, c'est
seulement la proposition principale qui peut évoquer une situation
inscrite dans le temps. En revanche, la subordonnée concessive
n'évoque qu'une simple p e r s p e c t i v e a t e m p o r e l l e .
Quoique Jean habite loin, j'irai chez lui.
Quoique Jean soit assez intelligent, il n'a pas trouvé la solution.
Quoique Jean porte une blouse blanche, il n'est pas docteur.
Même dans la phrase marquant l'opposition entre deux faits
également réels, la concession est présentée comme une alternative
imaginaire et atemporelle: Qu'il vienne ou qu'il ne vienne pas; Que ce
soit A ou que ce soit B…; Que ce soit ici ou que ce soit là…, etc.:
Quoiqu'il fasse mauvais temps, je me sens bien.
Ordre séquentiel:
Les situations confrontées sont toutes les deux réelles: (1) il fait
les deux ordres sont mauvais temps et (2) je me sens bien. Le mauvais temps (procès
possibles: réel et située temporellement) est évoqué comme perspective
la proposition finale atemporelle ou comme propriété virtuelle de la situation décrite
dans la principale: le temps qu'il fait (qu'il soit beau, qu'il soit
avant ou après
mauvais) ne produit pas d'effets sur ma disposition (je me sens bien,
la principale dans les deux cas: beau ou mauvais temps).
L'ordre temporel entre les faits évoqués n'est pertinent que
dans les phrases ayant une subordonnée t e m p o r e l l e ,
c a u s a l e , f i n a l e ou c o n s é c u t i v e .
• L'ordre séquentiel
Par rapport à la proposition principale, la proposition circonstancielle
de concession peut être:
► concessive antéposée : Quoique P, Q ,
► concessive postposée : P, quoique Q.

Les concessives qui montrent que c'est l'état, l'identité, la quantité ou


la qualité d'un objet de discours qui s'oppose au procès principal sont
d'habitude antéposées:
Quels que soient les changements et, si l'on veut, les
déformations que l'usage lui impose, une langue reste belle
tant qu'elle reste pure. [Rémy de Gourmont]
Et pourtant, même cette concessive d'indétermination qualitative ou
quantitative peut également suivre la principale:
Une langue reste belle, quels que soient les changements que
l'usage lui impose.
272
La subordonnée circonstancielle concessive

Exercice d'entraînement
Quels sont les contenus opposés pas les locutions au lieu de et tandis que ? Trouvez
dans chaque phrase une ou deux, trois oppositions lexicales ou syntaxiques (parallélisme
de construction syntaxique) :
(i) (Description d'un jardin public) Ah, la manière barbare dont l'autorité fait tailler et
tondre jusqu'au vif ces vigoureux platanes ! Au lieu de ressembler par leurs têtes basses,
rondes et aplaties, à la plus vulgaire des plantes potagères, ils ne demanderaient pas
mieux que d'avoir ces formes magnifiques qu'on leur voit en Angleterre.
(ii) Le lendemain, le jeune homme se sent en disgrâce dans le salon, tandis que
Mathilde a repris ses grâces auprès des jeunes aristocrates.
……………………………………………  …………………………………………………..
……………………………………………  …………………………………………………..
……………………………………………  …………………………………………………..
……………………………………………  …………………………………………………..
……………………………………………  …………………………………………………..

• La réalisation linguistique des phrases oppositives met en jeu


des paramètres grammaticaux très divers. Il convient de distinguer
les principaux types syntaxiques de phrase permettant
Plan de l'expression de la concession ou de la simple opposition:
A. phrases avec des subordonnées à un mode personnel (13.2):
présentation des
avec a) subjonctif; b) indicatif; c) conditionnel, dans la concessive;
types et sous-types B. phrases avec des subordonnées réduites(13.3):
de la proposition – ayant le verbe à l'infinitif ou au participe;
concessive. – ayant élidé le pivot verbal;
C. phrases coordonnées ou juxtaposées, avec l'expression de la
concession par des propositions autonomes (13.4).

• Diversité des marqueurs grammaticaux de la concession


Le rapport d'opposition et de concession présente en français de
multiples marqueurs spécialisés pour rendre une perspective
imaginaire ou pour exprimer l'inversion de polarité évaluative:
– le s u b j o n c t i f : Tant soit peu… = si petite que soit la quantité; si
Les plus importants
peu que soit…;
– le mode conditionnel, associé à une conjonction temporelle (quand
moyens suivi du mode de l'hypothèse): Vous parlez en vain, alors qu'il
linguistiques faudrait vous taire. Quand même tu serais un ange… = même si tu
de réalisation étais innocent…
du rapport
– si (le si adversatif), ou même si (pour l'opposition/ concession
hypothétique): Si la parole est d'argent, le silence est d'or.
d'opposition: – l'inversion du sujet pronominal: Je ne le veux pas, soit-il le meilleur
du monde…
– mots de jonction – des marqueurs de la simultanéité (pendant, cependant, alors, dès
(relatifs et
lors, tandis que, alors que, etc.) peuvent aussi s'utiliser dans des
structures oppositives fondées sur une polarité évaluative:
conjonctifs) Dans la maison le feu brûle, tandis que dehors la neige ne
cesse de tomber.

273
La subordonnée circonstancielle concessive

feu ⇔ neige, polarisation référentielle, et aussi évaluative


– mode (favorable/ défavorable) ;
verbal: – un certain parallélisme syntaxique de la phrase accompagne et
subjonctif souligne l'expression grammaticale de l'opposition, qui se retrouve
dans la phrase citée:
et
Lieu agent action verbale 
conditionne dans la maison  dehors; le feula neige ; brûler tomber
l – mots subordonnants spécifiques:
de • locutions conjonctives (bien que, quoique, même si, quand
supposition
bien même etc.) ;
• marqueurs formés d'un élément indiquant l'indétermination
(tout, quel et var., quelque, qui, où, quand etc.), ces mots suivis
– négation de la conjonction que sont considérés comme marqueurs
dans l'une discontinus (tout….que; quel…. que; quelque……. que, etc.):
des Tout important qu'il soit, il ne m'intéresse pas.
 Important ou pas important  (+ / –)
proposition
Quel qu'il soit, il m'est indifférent…
s  Qu'il soit X ou qu'il soit Y….  (+ / –)
Qu'il vienne donc: je ne lui parlerai pas.
 Il vient, il ne vient pas  (+ / –) etc.
La conjonction QUE est un inverseur de polarité évaluative: Tout
jeune et inexpérimenté que soit cet auteur, son livre est la meilleure
vente de la saison.

13.2 Subordonnées concessives et oppositives à un mode personnel

13.2.1 La proposition concessive portant sur un fait réel


Les mots subordonnants sont suivis en général d'un verbe au
subjonctif:
►BIEN QUE (litt.) + SBJ;
►QUOIQUE (cour.) + SBJ

Les dictionnaires séparent arbitrairement [ces mots], quoique


l'un ne soit que la métaphore de l'autre. [Rémy de Gourmont]
L'opposition: rapprochement  séparation (les mots sont proches;
et pourtant, ils sont séparés dans les dictionnaires).
• Bien que et quoique sont synonymes parfaits du point de vue du
sens, mais des synonymes partiels du point de vue des contextes
d'apparition: la locution bien que est réservée au style littéraire, la
conjonction quoique a un emploi général, elle se retrouve dans tous
Les locutions les types de contextes de bien que.
conjonctives : • Selon les grammairiens, bien que est considéré «de signification
quoique/ bien que plus précise, et peut-être par là même plus insistant, semble moins
(distribution employé; quoique, sans doute à cause de son sens plus abstrait et
en quelque sorte neutre, est le plus courant. On ne l'évite guère que
et valeurs)
s'il y a dans le voisinage un conjonctif (qui, que, quoi) qui risquerait
de produire une suite de sons désagréables. » (Le Bidois, § 1554]
Mais sa robe trop longue l'embarrassait, bien qu'elle la portât
relevée par la queue. [Flaubert]

274
La subordonnée circonstancielle concessive

"Bien qu'elle soit relevée, la robe longue l'embarrassait dans


ses mouvements".
Homonymies: • La proposition concessive introduite par quoique ou bien que peut
(bien =ADV) que
élider le pivot verbal de son prédicat ou toute la phrase minimale,
excepté le constituant opposé:
et
Une étude de ce genre doit, pour avoir son intérêt, aboutir,
bien que quoique par un chemin détourné et nouveau, à la vieille route
(locution conjonctive) royale piétinée par les longues caravanes. [Rémy de Gourmont]
La proposition concessive complète est: quoiqu['elle doive aboutir]
par un chemin détourné et nouveau. La prédication minimale,
identique avec celle de la principale, a été donc élidée.
• L'opposition concessive s'établit soit sur l'ensemble de la
subordonnée, soit, spécifiquement, sur un constituant de phrase:
Principale: Après le dîner, Jean regarde la télé + subordonnée:
Emploi  quoiqu'il fût occupé. (support de l'opposition: l'événement
de la locution décrit: le fait qu'il était occupé)
conjonctive  quoique regarder la télé ne lui plaise pas. (support
quoique
d'opposition: le procès prédicatif, le fait de regarder la télé)
 quoique la télé lui provoque des insomnies. (l'opposition
porte sur un objet de discours: la télé)
 quoiqu'il soit seul à la maison. (opposition qui porte sur
l'attribut du sujet)
• La phrase concessive est donc de deux types, selon le support de
l'opposition logique, qui est soit toute la proposition subordonnée
concessive: Quoiqu'il s'absente …. (=p), soit un certain constituant
concessif de cette proposition, exprimé par:
 N → …. quoique prof de maths. (en fonction d'attribut du sujet)
Cet enfant ne boit pas de lait, quoiqu'il en ait besoin. (objet)
Adj → ….quoiqu'il soit/ fût très jeune …. (=Attribut du sujet)
La conjonction Adv → …quoiqu'il se déplaçât très vite …. (=Circ. manière,
que, caractérisant du procès)
substitut Participe passé → L'homme, quoique endormi, nous entendait.
Participe présent→ …quoique ayant répondu à toutes les questions.
de
Dans la section 13.3 ci-dessous, on fait le bilan de toutes ces
quoique propositions concessives "réduites", qui s'expriment en l'absence
d'un verbe (la concessive elliptique, averbale, réduite à un simple
déterminant circonstanciel de concession; la concessive réduite à
l'infinitif ou au participe).

► MALGRÉ QUE (à l'origine, suivi du verbe avoir) + SBJ


Conformément au sens du mot gré ("volonté, goût de quelqu'un, ce
qui lui plaît": au gré de = selon la volonté de quelqu'un), la locution
malgré que est normalement suivie du verbe avoir; de cette façon, la
phrase rétablit les deux termes de la locution verbale avoir (bon) gré
de faire quelque chose = se sentir bien en faisant cela, consentir à
faire cela. La forme négative, (avoir) mal gré signifie: "s'opposer à".
Malgré qu'il en eût, il accepta notre visite. = en dépit de son
opposition. Malgré qu'on en eût, nous devons accepter ce plan.
(= en dépit de notre désaccord)
La soudure des deux éléments mal+gré n'affecte pas l'exigence du
verbe avoir dans le contexte de l'expression mal gré .
275
La subordonnée circonstancielle concessive

Valeurs et fonctions • Cette locution ne s'emploie pas avec toutes sortes de verbes. Les
de la locution concessives du type suivant sont à éviter:
conjonctive : Ses vêtements «sentaient le tabac, malgré qu'il ne fumât
jamais». (Il faut dire: quoiqu'il ne fumât jamais.)
malgré que
• Le procès décrit dans la principale se réalise en dépit de
l'opposition du sujet de la proposition avec malgré que :
Cet homme doit partir, malgré qu'il en ait. (= en dépit de son
désir de rester).
Il faut éviter aussi des phrases comme: Malgré qu'il en ait, nous
savons son secret. (avec le sens de: quoique ça ne lui plaise pas).
• Le circonstant concessif malgré + N (voir ci-dessous, la concessive
réduite) présente moins de restrictions que la circonstancielle
concessive malgré que + V.
• Qui plus est, la locution malgré que n'est pas synonyme de bien
que ou de quoique: «elle ne se confond pas avec bien que qui
n'indique qu'une résistance passive; elle indique une opposition» [A.
Gide, apud, A, Thomas]

► ENCORE QUE (litt.) + SBJ


Pour cette locution – qui adoucit l'opposition, l'usage a fixé aussi des
emplois avec le conditionnel ou l'indicatif.
Pour mon anniversaire, mon ami m'a envoyé une carte de
voeux, encore qu'il aurait été plus facile pour lui de passer un
coup de fil.
Son message de félicitations m'a produit beaucoup de plaisir,
encore qu'il soit arrivé un mois plus tard que mon anniversaire.
Le sens d'origine étant temporel, il ne faut pas confondre la locution
encore que (de sens oppositif) avec l'emploi temporel de encore:
Théophile a toujours passé pour solide; il n'a jamais cependant
pris de ventre, et s'est conservé tel encore que nous le
connaissions. (il s'était conservé tel que nous le connaissions =
Valeurs et fonctions avec imparfait de l'indicatif)
de la locution
conjonctive : Il semblait très jeune, encore qu'il eût quelque embonpoint, et
pour le combattre il faisait de longues marches à pied.
encore que ENCORE + tour inversif (vx.) est un adverbe de phrase de sens
restrictif et d'atténuation:
Il préféra rester seul, et (…) n'eut pas d'autre maîtresse que la
Sculpture et Clotilde, l'une des célébrités de l'Opéra. Encore
cette intrigue ne dura-t-elle pas. [Balzac] (= quoique cette
intrigue n'ait pas duré trop longtemps).
À ce niveau, l'amour des belles actrices tient peut-être du
génie. Encore faut-il, là aussi, mettre en sourdine sa réputation
de «découvreur». [Libération, 13 fév. 2000]
• Dans le segment oppositif introduit par encore que, l'énonciateur
apporte une restriction à l'affirmation principale, qu'il trouve
partiellement contestable, et énonce lui-même ce qui s'oppose au
contenu déclaré dans la principale:
Il préfère (...) l'automne, encore que l'on ne voie sur les arbres
que des feuilles sèches et fanées. [Sainte-Beuve]

276
La subordonnée circonstancielle concessive

• L'opposition marquée par encore que est partielle, et n'affecte pas


pour l'essentiel la vérité de la proposition principale:
Car les mots expriment des idées, encore que plusieurs de
ceux qui les entrechoquent ne s'en rendent pas compte très
bien. [Balzac in Le Bidois]

► EN DÉPIT QUE + SBJ


n'est qu'une contamination entre la locution prépositionnelle en dépit de
(voir ci-dessous) et d'une locution conjonctive bien que, malgré que.

13.2.2 La concession hypothétique


L'opposition hypothétique (simple supposition) se réalise par des
propositions oppositives qui portent sur un fait non réel (on emploie
Valeurs et fonctions la conj. si ou le conditionnel, pour construire une supposition).
de la locution
conjonctive :
● Mots subordonnants suivis d'un indicatif
même si ► MÊME SI + IND (excepté les formes en -R- )
Tout cela dans un silence de soie même si, des quartiers
animés, provenait une rumeur monotone à peine perceptible
mais ininterrompue. [Echenoz]
Le contenu de la proposition introduite par même si s'oppose au
contenu de la principale: silence  rumeur monotone.

● Mots subordonnants suivis du mode conditionnel


►QUAND
L'opposition ►QUAND MÊME
avec ►QUAND BIEN MÊME + CDT
mode conditionnel
►ALORS MÊME QUE
dans la subordonnée
• L'adverbe quand avec l'indicatif est employé pour marquer un rapport
temporel, mais, suivi du conditionnel, il peut introduire une supposition,
(concession une condition:
hypothétique)
Ne fais pas ça, c'est stupide, quand tu devrais gagner dix mille
francs. Tu te fermes l'avenir du coup. (le conditionnel introduit
un sens implicitement oppositif: «au lieu de gagner dix mille
francs, tu te fermes l'avenir».
(…) Étaient-ce des bohémiens ? Étaient-ce des flibustiers?
Quand ce serait le diable ! disaient de jeunes politiques, ils
reçoivent à merveille. [Balzac]
(Même dans l'hypothèse que chacun de ces gens eût été le diable
en personne, je continuerais à leur rendre visite, car ils reçoivent
toujours admirablement bien leurs invités !)
Renforcé par même, bien, ou les deux, quand suivi du
conditionnel introduit un fait possible ou simplement imaginaire qui
n'empêche en aucun cas la réalisation du procès principal:
Ils ont mal raisonné, et en conséquence, quand même ils
auraient rencontré une vérité, je n' en ferais aucun cas. [Galiani]
Ces propositions subordonnées décrivent une perspective imaginaire
(simple supposition): Quand même je le verrais, je n'y croirais pas.
Quand même il serait venu, il n'y trouverait personne.
277
La subordonnée circonstancielle concessive

• Les formes modales de la supposition concessive avec quand


sont: le conditionnel présent ou passé et, dans la langue littéraire, le
conditionnel deuxième forme (=subjonctif plus-que-parfait):
Quand bien même il eût perdu sa vie, il resterait toujours aux
pieds de sa bien-aimée. (l'emploi du conditionnel passé deuxième
forme: il eût perdu sa vie construit la supposition irréelle)
Comparez à: Quoiqu'il eût fait cela..; Quoiqu'il eût perdu sa vie…
(subjonctif plus-que-parfait = conditionnel deuxième forme)
• La concessive hypothétique introduite par quand (suivi du
conditionnel) sert à renforcer l'affirmation portée dans la principale:
Quand bien même on l'aurait tué, il ne m'aurait pas quitté.
Une telle subordonnée s'emploie quand on veut souligner par une
rhétorique persuasive l'assertion principale:
Quand un démon aurait mis entre Sarrasine et la Zambinella
les profondeurs de l'enfer, en ce moment il eût tout traversé
d'une enjambée. [Balzac] (expressivité rhétorique)

13.2.3 L'opposition entre deux faits indépendants


L'opposition entre deux faits simultanés. Le rapport d'opposition
s'exprime souvent par des mots subordonnants de sens temporel:
► ALORS QUE; ALORS MÊME QUE;
► LORS MÊME; MÊME QUE;
►TANDIS QUE + IND/ CDT
►CEPENDANT QUE
►PENDANT QUE
Ces mots temporels marquent l'opposition dans la simultanéité, en
mettant en parallèle deux faits indépendants simultanés. C'est par
interprétation contextuelle que s'établit le sens concessif:
Mon ami vient de m'écrire de Miami, pendant que je le croyais
à la campagne, chez ses grands-parents.
Faits simultanés Les enfants dorment, tandis que leurs parents travaillent.
qui s'opposent par Ces locutions introduisent une proposition qui décrit soit une
situation dans le monde et alors il s'agit d'une phrase temporelle
leur polarité
(Papa dîne, pendant que les enfants dorment déjà, proposition de
évaluative temps marquant la s i m u l t a n é i t é ); soit elles introduisent une
(+/ –) perspective d'argumentation, en marquant une opposition logique
(Papa dîne seul, pendant qu'il aurait dû avoir autour de lui toute sa
famille, proposition oppositive: "quoiqu'ils eussent dû se réunir en
P, tandis que Q
famille).
P, pendant que Q Les locutions polyvalentes (en variation contextuelle: sens
etc. temporel et sens oppositif) ont des valeurs proches:
(Il était) occupé à se chauffer devant une bonne cheminée,
tandis que des soldats bivouaquaient. ou: Les soeurs (…)
entrèrent chez leur mère tandis que la comtesse cousait ces
diamants dans l'habit de voyage de notre héros. (sens temporel:
simultanéité)
Elle croira que je manque d'amour pour elle, tandis que c'est
l'amour qui manque en moi. [Stendhal] (sens argumentatif:
opposition)

278
La subordonnée circonstancielle concessive

Le parallélisme syntaxique d'une proposition oppositive vient à


l'appui de l'interprétation rhétorique, argumentative:
Elle(1) croira (V) que je (2) manque (V') d'amour (3) pour elle
(1), tandis que c'est l'amour (3) qui manque (V') en moi (2). 
1, V, 2, V', 3, 1 – tandis que – 3, V', 2
L'opposition adversative :
►AU LIEU QUE + SBJ
►LOIN QUE, BIEN LOIN QUE + SBJ
► D'AUSSI (DE SI) LOIN QUE + SBJ
Ces locutions adversatives contiennent un mot abstrait locatif pour
marquer l'opposition: loin = distance; au lieu de = substitution,
remplacement, donc opposition) :
Le film didactique, au lieu qu'il soit un cours de langue, il est
Valeurs et fonctions une guide touristique. (opposition entre deux attributs)
des locutions
conjonctives : Ce sportif se met en retard, au lieu qu'il vienne une demi-heure
avant son entraîneur. (opposition adversative entre deux
au lieu que
procès: l'un vient substituer ou remplacer un autre)
loin que
Loin que le besoin ait dégradé l’homme, c'est l'éloignement de
la société qui le dégrade. [Voltaire, apud Wagner et Pinchon]
(opposition entre deux causes)
Si le procès décrit dans la subordonnée est favorable, le procès
principal est défavorable et inversement:
Bien loin qu'il fasse beau temps en cette région, je peux vous dire
qu'il pleut sans cesse tout l'été.

13.2.4 Concessives qui portent sur l'identité d'un objet de discours


ou sur son indétermination qualitative/ quantitative

Les marqueurs de l'indétermination quantitative ou qualitative sont


des mots introducteurs: pronoms relatifs indéfinis (qui, quoi), en
fonction attributive, et donc employés avec le verbe attributif être ou
en fonction d'objet; des prédéterminants nominaux indéfinis
(quelque, quelques) marquant la quantité non déterminée;
adverbes d'intensité indéfinie (si, aussi, quelque, tout, tant, autant)
employés devant un adjectif ou adverbe; préposition (pour) employée
avec un adjectif en rôle d'attribut du sujet.
Opposition et Tous ces marqueurs indéfinis sont suivis dans la phrase
concession portant concessive par la conjonction que et du subjonctif (l'indicatif
seulement après le constituant opposé introduit par tout…). Les tours
sur l'identité d'un
concessifs avec les adverbes si et aussi s'accompagnent de la
objet de discours : postposition du sujet nominal ou par l'inversion du sujet clitique.
Le constituant sur lequel porte l'opposition est détaché en tête
Qui que + SBJ de phrase:
Quel que soit ton âge, tu es admis dans ce club.
Quoi que… + SBJ Quoi que tu choisisses comme métier tu le feras bien. (ce métier)

(a) Propositions concessives qui portent sur l'identité non


pertinente d'un objet de discours ou sur l'indétermination
qualitative/ quantitative de celui-ci:
279
La subordonnée circonstancielle concessive

► QUELQUE(S) + N + que + SBJ


Quelques richesses que vous possédiez, soyez modestes.
[Grevisse]
Ce type de proposition montre qu'une certaine entité aurait pu ou
pourrait (encore) empêcher la réalisation de l'action exprimée dans la
principale, mais ne le fait pas.

►QUI, QUOI, QUEL (var.) …QUE + SBJ


Le procès principal est affirmé en dépit de l ' i d e n t i t é d'un objet de
discours; la concessive est introduite par une locution pronominale:
qui que; quoi que, quel que, quelque… que; qui que ce soit, quoi que
ce soit (relatifs indéfinis):
Qui que soit l'auteur de ce livre, il est un grand écrivain.
J'accepte de lui rendre hommage, quelles que soient ses
opinions sur ces questions délicates.
Je voulais lire un livre quel que soit son sujet.
Le constituant qui supporte l'opposition est détaché en tête de la
proposition subordonnée; l'élément qui montre l'identité ou la
Quelque(s) N + que +
SBJ détermination qualitative/ quantitative de l'objet cumule deux rôles
syntaxiques:
Quelque + Adj + que + –(i) élément de jonction syntaxique entre les propositions;
SBJ –(ii) marqueur de l'indéfini:
l'identité indéfinie: QUI ? QUOI ?
Quelque + Adj+ N+ que
+ SBJ
détermination indéfinie:
– qualitative: QUEL ? (quelle, quels, quelles)?
– nature de l'objet: QUELQUE (S) :
– détermination quantitative indéfinie: AUTANT, TANT
Quel que soit le livre que tu choisisses parmi les romans de
cet auteur, tu en seras enchanté.
Quoi qu'il tentât, un immense ennui l'opprimait. [Huysmans]
(= quelle que fût son action, l'ennui l'accablait; en dépit de ses
tentatives d'agir, tout ce qu'il faisait ne suffisait pas pour
apaiser son ennui)
• Les marqueurs spécifiques de nature adjectivale sont variables:
quel (quelle, quels, quelles) que + verbe être au subjonctif + N

---------------------------------accord------------------------------------
(...) Il y en a d'autres, mais quel qu'en soit le nombre, nous ne
les confondons jamais. (quel  nombre)
La poésie, en somme, et l'art, quel qu'il soit, a pour outil
premier l'œil. (quel  outil)
Sans doute, quelle que soit la métaphore, son âge ou son
habitat, elle a toujours été une création personnelle (...).[Rémy
de Gourmont] (quelle  métaphore)

280
La subordonnée circonstancielle concessive

Exercice d'entraînement
Soulignez les propositions concessives et notez leurs marqueurs principaux:
mot conjonctif ou relatif, qui établit le lien syntaxique + forme verbale:
1. Quoi qu'il en soit, je me livre avec confiance aux juges. 2. C'est un bon appareil
quoiqu'il y en ait de meilleurs. 3. Le patron nous a présenté les lignes du programme qu'il
venait de signer, bien qu'il n'ait pas eu à s'expliquer formellement sur ce point. 4. Nous
n'avons pas parlé au docteur quoique nous le connaissions bien. 5. Quoiqu'elle aimât ses
enfants, la femme n'avait jamais aidé ses enfants. 6. «Car l'homme est fini, borné; si grand
et si saint qu'il soit, il n'embrasse pas tout.» [Ste-Beuve] 7. Le rôle particulier du professeur
Dupont à la direction du Centre de recherches, bien qu'il n'ait pas été du tout ce qu'on
aurait pu espérer et désirer, fut très réel, et, en tant que négatif, fut grand. 8. Quels que
soient leurs avantages sur moi, mes ennemis n'auront pas une victoire facile
Lien syntaxique: Forme verbale: Lien syntaxique: Forme verbale:
1……………………. ………………..….. 5……………………. ………………..…..
2……………………. ………………..….. 6……………………. ………………..…..
3……………………. ………………..….. 7……………………. ………………..…..
4……………………. ………………..….. 8……………………. ………………..…..

(b) Propositions concessives qui portent sur l'intensité d'une


propriété/ qualité/ caractéristique d'un procès:
►QUELQUE (invar.) + Adj. … que + SBJ
►AUSSI (SI) + Adj./Adv. … que + SBJ
►AUTANT … que + SBJ
►TANT … que + SBJ
• L'indétermination d'une référence spatiale:
►OÙ … que + SBJ
• La principale est affirmée en opposition avec la détermination
qualitative/ quantitative d'un objet de discours impliqué; la
concessive est introduite par les locutions conjonctives discontinues:
Tout…. que + IND si… que; quelque… que; tout … que; pour … que et par
Pour…. que + SBJ Si intelligent qu'il soit, il ne réussira pas sans travailler
beaucoup. Si bonne mère que soit Catherine, elle devra confier
Aussi … que + SBJ
son fils à un éducateur. Si vite qu'on fasse, on aura encore
Si… que + SBJ trois bonnes heures de travail. Quelque cher que soit le miel, il
Tant … que + SBJ faut l'acheter pour ses propriétés nourrissantes.
Le constituant mis en opposition est détaché en tête de phrase; le
sujet nominal est postposé: Si bonne mère que soit Catherine ⇐
Catherine (S) est bonne mère (ATTR-S). La conjonction que marque
la frontière entre le constituant détaché et le reste de la proposition;
que se met donc soit devant le sujet clitique, soit devant le verbe
pivot (au subjonctif) qui est suivi du sujet nominal.
• Les adverbes: si, aussi, quelque, servent à restreindre l'importance
d'un attribut (aussi sincère qu'il fût/ soit; quelque courageux qu'il soit;
si important qu'il soit … si importants que soient les progrès réalisés,
aussi maître de lui-même qu'il fût… si bon qu'il soit) ou d'un
caractérisant adverbial: si fort qu'il parlât; aussi courageusement qu'il
soutienne/ soutînt ses idées … etc.
• L'indétermination quantitative s'exprime par Adv. tant ou aussi (si) :
281
La subordonnée circonstancielle concessive

Aussi vite qu'il roule… ; aussi loin qu'il puisse habiter; aussi
nombreux soient-ils… ;
Autant et tant (adverbes et pronoms marquant la quantité indéfinie)
s'emploient dans des structures comparatives ou concessives quand
on nie les effets d'une quantité insatisfaisante:
La parole (de cet homme) agréablement sentencieuse a
volontiers la forme et, tant soit peu, le crédit d'un oracle. [Ste-
Beuve]
Autant que je sache… (dans la mesure où je connais ce sujet);
Autant qu'il puisse faire cela (dans la mesure où il peut …).
Autant qu'on en puisse juger (comparatif et oppositif, avec le
sens: quelque petite que soit notre capacité ou notre droit de
juger…).
• L'opposition sur l'attribut ou l'intensité d'un attribut:
►POUR + Adj. que + SBJ
►TOUT + N/ Adj. que + IND
Pour intelligent qu'il soit…; tout bon soldat qu'il est, ce poste
n'est pas pour lui. Pour grand que soit ce bâtiment….
Aussi Adj/Adv Tout… que s'emploie avec indicatif, tandis que pour … que demande
le subjonctif:
Si Adj/Adv Tout bon enfant qu'il est…; tout vieux qu'il est… tout riche qu'il
Quelque Adj/Adv
est.. Mais le subjonctif est amené aussi : tout roi qu'il fût….
avec subjonctif.
«La foi, pour absurde soit-elle, sert un grand homme…»
Pour séduisante qu'elle soit, cette thèse ne répond pas à la
question qui intéresse le tribunal: quel rôle M.T. a-t-il pu jouer
dans la mise en œuvre de ces transits ? [Le Monde, 20 avr. 2001]

282
La subordonnée circonstancielle concessive

13.2.5 Propositions concessives qui montrent l'exception/ la


restriction
►SAUF SI + IND
►EXCEPTÉ SI
►MÊME SI (restrictif)
Même s'il vient , il ne trouvera plus personne. Même s'il venait,
il ne trouverait plus personne.
Personne ne vous donnera son opinion, excepté si vous le lui
demandez expressément.
Je ne le revois plus cette semaine, excepté si quelque chose
d'urgent arrive/ excepté si c'est lui qui me convoque.
Je ne viens pas, excepté s'il le demande expressément.
Ces phrases expriment en réalité la condition restrictive dont dépend
la réalisation du procès exprimé dans la principale.
►SAUF QUE + IND
Opposition
►SAUF à + INF (voir ci-dessous: la proposition infinitive)
restrictive
Tout a été bien, sauf qu'à midi nous n'avons pas eu de pause
et exceptive
pour le déjeuner.
Nous nous entendons bien, sauf qu'on a toujours à se disputer
sur l'un ou l'autre des programmes que nous employons.
«Ces provinciaux ont été choqués de la fortune rapide que je
vous dois, et, croyez-m'en, il n'en est pas un qui ne désire ma
condamnation, sauf à pleurer comme un sot quand on me
mènera à la mort.» [Stendhal]
("quoiqu'ils désirent tous ma condamnation, vous verrez que tous
pleureront comme des sots en me voyant conduire à l'échafaud").
►SANS QUE + SBJ
qui marque l'hypothèse, la condition négative/ restrictive, la cause,
peut aussi marquer la conséquence négative:
Cet homme est très intelligent, sans qu'il soit un génie: malgré
son esprit incontestable, son intelligence a des limites.

Test d'autoévaluation
Pour bien gérer ce test, il est indispensable que vous ayez déjà parcouru les explications
et les analyses données dans l'unité d'apprentissage 13. Vérifiez vos solutions aux
exercices en consultant la rubrique Clés du test d'autoévaluation.

Exercice 1
Recopiez les subordonnées concessives/ oppositives :
1. Quoique Mme de Rênal n'eût jamais pensé aux théories de l'amour, la différence d'âge
est, après celle de fortune, un des grands lieux communs de la plaisanterie de province. 2.
Ce pauvre président des Assises, tout juge qu'il est depuis nombre d'années, avait la
larme à l'œil en me condamnant. 3. Mais, quoique je veuille vous parler de la province
pendant deux cents pages, je n'aurai pas la barbarie de vous faire subir la longueur et les
283
La subordonnée circonstancielle concessive

ménagements savants d'un dialogue de province. 4. Le second de ses fils venait de


monter sur le parapet du mur de la terrasse, et y courait, quoique ce mur fût élevé de plus
de vingt pieds sur la vigne qui est de l'autre côté.
…………………………………………………………………………………..…………………
…………………………………………………………………………………..…………………
…………………………………………………………………………………..…………………
…………………………………………………………………………………..…………………
…………………………………………………………………………………..…………………
…………………………………………………………………………………..…………………
Exercice 2
Écrivez sur deux colonnes les deux adjectifs, noms, verbes ou propositions entières qui
représentent les procès présentés comme étant opposés :
1. Quoiqu'il soit conservateur et moi libéral, je le loue chaque fois qu'il s’occupe d'une
action utile.
……………………………………………  …………………………………………………..
2. Il osa répondre directement, quoiqu'il ne fût pas interrogé, et tous trois finirent par rire.
……………………………………………  …………………………………………………..

3. Malgré l'opposition du conseil municipal, il a élargi la promenade de plus de six pieds.


……………………………………………  …………………………………………………..

4. Au lieu de surveiller attentivement l'action de tout le mécanisme, Julien lisait.


……………………………………………  …………………………………………………..

5. Quelqu'un le gronda sévèrement; au lieu de chercher à se justifier, Julien croisa les bras
sur sa poitrine.
……………………………………………  …………………………………………………..
Exercice 3
Mettez les verbes à la forme convenable:
1. Aussi pauvre qu'il (être), à Noël il faisait des cadeaux à tout le monde. 2. Nous nous
sommes très bien débrouillés à Tokyo, même si nous ne (connaître) pas le japonais. 3.
Quoi qu'on (dire), le printemps est la plus belle saison de l'année. 4. Si intelligente qu'elle
(être), elle s'est laissé duper. 5. Quoique nous ne (pouvoir) pas subvenir à tous ses
projets, nous le soutenons. 6. Bien qu'il (avoir) attendu beaucoup, du moins il a réussi à
signer un contrat important. 7. C'est un très bon architecte, encore que son expérience
dans la restauration des monuments (être) quasiment nulle. 8. Quoique ce médicament
(être) cher, nous devons nous le procurer. 9. Quoiqu'il (ne rien voir) dans l'obscurité, il
s'avança dans le couloir.
1. …………………………………………… 2. ………………………………………………..
3. …………………………………………… 4. ………………………………………………..
5. …………………………………………… 6. ………………………………………………..
7. …………………………………………… 8. ………………………………………………..
9. ……………………………………………

284
La subordonnée circonstancielle concessive

13.3 Les subordonnées concessives réduites


•Propositions infinitives et participiales marquant la concession
Les concessives infinitives sont précédées par les locutions
prépositionnelles: au lieu de, loin de :
Les balais brouillaient l’écran de verre au lieu de le nettoyer.
La photo du maréchal de Lattre, au lieu de remplacer l’une et
de retourner l’autre contre le mur (…), reposait face à la nappe.
La chair n’était nullement dorée et le corps, loin de s’amincir en
une ligne abstraite (…) grossissait ses lignes. [d'après Echenoz]
• La proposition concessive elliptique de pivot verbal
Quand les propositions subordonnées concessives sont elliptiques,
Réalisation de la
le verbe fini est effacé, mais le statut de proposition concessive se
concessive réduite : conserve grâce à l'élément conjonctif introducteur:
-propositions bien que, quoique + Adj
participiales bien que, quoique + Adv
bien que, quoique + Participe passé
-propositions
infinitives
bien que, quoique + Participe présent composé (ou autre
élément de la phrase minimale)
-propositions La rue du Cénotaphe est une petite artère calme, résidentielle
elliptiques
quoique poussiéreuse, presque une allée bordée de grands
acacias qui jaillissent des buissons (...).[Echenoz]
(…) Consternés par l’imminent spectacle, quoique excités
intimement, [les deux hommes] se modelèrent un masque
condoléant. (ibid.)
Visage veule assez disgracieux quoique expression
Circonstants indéterminée. (ibid.)
concessifs :
• Le circonstant concessif ou oppositif se manifeste parfois sans
impliquer la trace d'un verbe:
quoique, malgré, en dépit, avec + N
malgré + N Malgré (seul, sans que) est une préposition qui sert à construire
en dépit de + N l'opposition par un circonstant nominal: en l'absence du verbe, il
s'agit d'une proposition réduite au seul constituant nominal :
avec + N
Malgré sa fierté, M. le maire a dû faire bien des démarches.
(avec cela) (= en opposition avec son caractère fier)
au lieu de + N
(Des yeux où), malgré le grand âge, brillait ce feu sacré qui
annonce le plaisir de faire une belle action un peu
dangereuse. (le feu sacré brillait dans ses yeux malgré l'âge)
Il fit beaucoup de questions, et, malgré d'étranges réponses,
ne se permit pas la moindre marque de blâme. (quoique les
réponses fussent assez étranges, il ne se permit pas le
moindre signe de blâme)
Malgré toute sa méfiance du destin et des hommes, son âme
dans ce moment n'était que celle d'un enfant. = Quoiqu'il se
méfiât du destin….

285
La subordonnée circonstancielle concessive

Jean-Pierre Raffarin assurait, dès dimanche soir, qu'en dépit


du fiasco de dimanche, des "consultations permettront aux
citoyens de choisir les modalités de la décentralisation".
Au lieu du parfait azur se creusait un paysage d’ombre.
Kastner, malgré tous les sens interdits de sa vie, n’avait jamais
aimé demander son chemin (à qui que ce soit).
La bataille pour la garde de l'enfant a suscité des débats
passionnés aux Etats-Unis. Elle a également rapproché un
court instant, malgré eux, Washington et la Havane, qui
souhaitaient tous deux le retour de l'enfant à Cuba.

13.4 Autres formes d'expression de la concession


Tours de phrase inversifs
● tours inversifs (exclamatifs), avec mode conditionnel ou subjonctif
(imparfait ou plus-que-parfait), ou avec indicatif imparfait:
Le comte de Lanty eût-il dévalisé quelque Casauba,
j'épouserais bien sa fille ! – s'écriait un philosophe. [Balzac]
(Dans cette phrase, le subjonctif plus-que-parfait a la valeur d'un
conditionnel deuxième forme.)
Phrases «La mort dût-elle m'attendre au sortir de la maison, j'irais
juxtaposées encore plus vite», répondit-il.
marquant la
Venait-elle s'asseoir à sa table, lui se relevait et partait !
Tu verras bien, ne fût-ce qu'un instant !
concession Lui aurait-on parlé de ses devoirs, il s'enfermait toute la journée
dans sa chambre !
● tour inversif (non exclamatif) après adverbe en début de phrase,
avec négation dans la proposition de sens concessif :
France n'est pas un modèle en tout, loin de là, mais au moins
dispose-t-elle en matière d'antifascisme d'une expérience
(récente) qui pourrait inspirer ailleurs [Libération, 12 fév. 2000]
Dans cette phrase, l'opposition se réalise avec: tour inversif,
négation polémique, locutions adverbiales au moins, loin de là, et
conjonction adversative mais.

Exercice d'entraînement
Transformez les tours de phrase inversifs en phrases concessives marquées par la
conjonction quoique ou par la locution même si:
1. L'aurait-il su, il ne me l'aurait jamais dit. 2. Aurait-il appris la grande nouvelle, il ne me
l'aurait pas dite. 3. Dût-il m'en coûter la vie, je ne partirai pas. 4. Les aurait-il vues, il ne
les aurait pas reconnues. 5. Vous aurais-je rencontré dans la rue, je ne vous aurais
reconnu. 6. Serait-il entré dans la maison, nous n'aurions pas cru qu'il était vivant.
......................................................................................................................................
......................................................................................................................................
......................................................................................................................................
......................................................................................................................................
......................................................................................................................................
......................................................................................................................................

286
La subordonnée circonstancielle concessive

• Propositions coordonnées ou juxtaposées


Coordination par les conjonctions et, mais, les adverbes à rôle de
Phrases
coordonnées conjonction: pourtant, cependant, néanmoins:
marquant la (…) Aussi éprouvait-il une reconnaissance toute filiale pour cette
concession
église où il avait vécu de si douces et de si dolentes heures ! Et
cependant, (…) il ne la fréquentait point; elle lui paraissait trop
grande et trop froide et elle était si laide ! [Huysmans]
Cependant, il s'agit de mémoire, et d'une mémoire étendue et
sûre, quoique bornée d' un côté. [Rémy de Gourmont]
La coordination Sans cela, je n'y serais pas allée, mais bien sûr je ne le lui ai pas dit !
adversative
L'opposition peut apparaître même si les propositions sont
simplement juxtaposées, le rapport s'établit entre deux procès de
polarité évaluative opposée:
Rosenthal parlait; ses compagnons ne l'écoutaient pas. [Nizan]
– tour de phrase impératif dans la proposition de sens concessif :
Venez, si vous y tenez ! Vous n'obtiendrez rien !
Expressions de sens
• Emploi des périphrases de sens oppositif : n'empêche que (il
oppositif, concessif,
n'empêche que, ça n'empêche que + IND) :
adversatif
Ce garçon a la bosse des maths. Il est un enfant prodige.
(de polarisation
N'empêche qu'il aime jouer comme tout enfant de son âge.
évaluative):
Mon fils fait un voyage dans le midi. N'empêche que le jour de
avoir beau + INF mon anniversaire il sera de retour. (Quoiqu'il soit parti, il
rentrera à cette date)
N'empêche + IND • La locution verbale avoir beau + INF (gallicisme), employée dans
une proposition de polarité évaluative positive, le contenu de la
principale étant d'évaluation négative :
Il a eu beau insister, je n'y suis pas allé.
«Il a beau jouer son jeu le plus fin, il nous apparaît à nu sous
son personnage de comédie; c'est le Tartufe-Philinte: il est
démasqué.» [Ste-Beuve]
Tu as beau te montrer gentil avec lui, il fera comme il veut.
«Julien avait beau se faire petit et sot, il ne pouvait plaire, il
était trop différent. » [Stendhal]

287
La subordonnée circonstancielle concessive

Idées à retenir :
• L'expression de l'opposition et de la concession dispose d'un grand nombre de valeurs
et de très divers moyens linguistiques de réalisation.
• Les grands types syntaxiques de la phrase concessive sont: phrase à subordination ;
phrase à juxtaposition; phrase à coordination.
• Les sous-types syntaxiques de phrase concessive à subordination se classifient selon le
l'élément subordonnant et le mode verbal. Les modèles de phrase les plus importants sont:
► phrase à subordonnée introduite par locution conjonctive spécifiquement
oppositive: quoique, bien que, encore que, loin que, au lieu que, sans que, etc. +
SUBJONCTIF;
► phrase à subordonnée introduite par locution conjonctive de supposition: même
si + INDICATIF;
► phrase à subordonnée introduite par locution conjonctive temporelle: quand,
quand même, quand bien même + CONDITIONNEL;
► phrase à subordonnée introduite par un élément pronominal ou adverbial indéfini
(qui, quel, quoi etc.), ou par un adverbe (aussi, si, tout, quelque), qui forment avec la
conjonction que une unité conjonctive (discontinue, parfois) : QUI que…; QUOI que… ;
QUEL … que; QUELQUE Nsg. que…; QUELQUES Npl. que….; QUELQUE (invar.,
adverbe) …. +que..; SI… que; AUSSI …que; TOUT …que; POUR … que, TANT…que.

 Les clés du test d'autoévaluation


Corrigé de l'exercice 1 :
1. Quoique Mme de Rênal n'eût jamais pensé aux théories de l'amour.. 2. …tout juge qu'il
est depuis nombre d'années. 3. … quoique je veuille vous parler de la province pendant
deux cents pages. 4. … quoique ce mur fût élevé de plus de vingt pieds sur la vigne qui
est de l'autre côté.
Corrigé de l'exercice 2 :
1. être conservateur  être libéral 2. répondre  être interrogé. 3. l'opposition du conseil
municipal  élargir la promenade. 4. surveiller attentivement l'action de tout le mécanisme
 lire. 5. chercher à se justifier  croiser les bras sur sa poitrine.
Corrigé de l'exercice 3 :
1. Si pauvre qu'il fût …; 2. même si nous ne connaissions pas le japonais; 3. quoi qu'on
dise; 4. si intelligente qu'elle fût; 5. quoique nous ne puissions ; 6. bien qu'il ait attendu; 7.
son expérience est/soit quasiment nulle; 8. quoique ce médicament soit cher; 9. quoiqu'il
ne vît rien.

288
La subordonnée circonstancielle concessive

→ Test de contrôle 13

Ce test est administré à l'issue de l'unité d'apprentissage 13.


Pour réaliser ce test, il est conseillé de relire l'unité et de suivre attentivement les phrases
données à titre d'exemple pour chacune des valeurs discursives de la proposition
concessive, ainsi que les explications sur rapport logique d'opposition et sur les mots
subordonnants spécifiques ou non spécifiques pour rendre le rapport d'opposition.

Ne manquez pas de transmettre ce test à votre tuteur. À cet effet, il convient de marquer
votre nom, votre prénom et votre adresse personnelle sur la première page de votre copie.
N'oubliez pas de mentionner aussi le numéro du test. Vous êtes supposés le recevoir
après correction, avec les commentaires de votre tuteur.

Bon travail !

Exercice 1 (2 points)
Formez des phrases concessives avec les prédications suivantes:
1. Décider de quitter cette auberge de vacances. Les jours de congé ne sont pas encore
terminés. 2. Avoir beau dire. Ne rien changer. 3. Travailler beaucoup. Les satisfactions
être grandes. 4. Voyager pour la première fois dans ce pays. En savoir beaucoup. 5. La
pluie ne pas cesser toute la nuit. Vouloir se promener en ville. 6. Être pauvre. Avoir une
grande âme. 7. Aimer beaucoup la musique. N'aller qu'à de rares occasions assister à un
concert.

Exercice 2 (3 points)
Transformez les circonstants concessifs / oppositifs dans des propositions subordonnées
du même sens, en introduisant une forme verbale conjuguée comme pivot de cette
proposition:
1. Malgré son respect pour les lois, elle se trouvait en contravention.
2. Malgré les préjugés qui recouvrent encore une partie de la face de l'Europe comme un
réseau, la lumière cependant commence à pénétrer dans nos campagnes.
3. Elle lui avait passé les mains dans ses cheveux, et elle répétait d'une voix enfantine,
malgré de grosses larmes qui coulaient (…).
4. Elle fit, au commencement du printemps, bouleverser le jardin d'un bout à l'autre,
malgré les observations de son mari.

Exercice 3 (2 points)
Complétez les phrases:
Si douloureux que soit son reproche….
Si discrets que nous ayons été….
Si belle âme qu'il soit ce grand écrivain, ….
Si incroyable que son apparition puisse paraître….
Si solides que soient ses connaissances de chimie…
Si intéressant que soit son dernier film ….

Exercice 4 (3 points)
Complétez par a) qui que ce soit; b) quoi que ce soit ; c) quel qu'il soit / quelle qu'elle soit/
quels qu'ils soient / quelles qu'elles soient:
1. Nous lui faisons toujours confiance ………….. les surprises qu'il nous réserve.

289
La subordonnée circonstancielle concessive

2. Jean a travaillé beaucoup pour son bac, …………. sa négligence habituelle.


3. Sa mère acceptera que sa fille se marie, ………… le jeune homme qu'elle choisse.
4. ……………….. à la place aurait réagi de la même façon.
5. ………le cadeau que je lui apporte, il ne dit jamais mot pour remercier du geste.
6. ……………… ses idées d'amélioration de l'appartement, pour l'instant nous ne pouvons
pas nous permettre aucun investissement.

Références bibliographiques
• CRISTEA, T., Grammaire structurale du français contemporain (chapitre 6. La
phrase moléculaire: 6.3. La phrase concessive), Bucureşti, Editura Didactică şi
Pedagogică, 1979.
• GREVISSE, M., Le bon usage. (Quatrième partie, Les propositions subordonnées:
Propositions d'opposition [concessives]), XIème édition, Louvain-la-Neuve, Duculot;
1980, ou: GREVISSE, M. – GOOSSE, A. (éd.), Le bon usage. Grammaire
française, Louvain-la-Neuve, Duculot, 1990 (et éditions suivantes).

• WAGNER, R.-L., et PINCHON, J., Grammaire du français classique et


contemporain (chapitre: Syntaxe des phrases complexes, Les propositions
dépendantes circonstancielles: Les propositions dépendantes concessives), Paris,
Hachette, 1962 (nouvelle édition: 1991).

290
La subordonnée circonstancielle hypothétique (conditionnelle)

Unité d'apprentissage 14

LA SUBORDONNÉE CIRCONSTANCIELLE HYPOTHÉTIQUE


(CONDITIONNELLE)

Sommaire page

Les objectifs de l'unité d'apprentissage 14 291


14.1 Caractéristiques générales de la phrase conditionnelle 292
14.1.1 Rapport logico-sémantique d'hypothèse 292
14.1.2 L'expression de l'hypothèse: formes et valeurs 292
14.1.3 La systématique des types de phrase hypothétique 293
14.2 L'ordre temporel et l'ordre séquentiel dans la phrase conditionnelle 296
14.3 La réalisation linguistique de la phrase hypothétique 297
14.3.1 Moyens d'expression du rapport hypothétique 297
14.3.2 La conditionnelle introduite par la conjonction SI 298
14.3.3 La conditionnelle introduite par d'autres mots que SI 299
Test d'autoévaluation 301
14.3.4 Réalisations particulières de la phrase conditionnelle 308
Idées à retenir 309
Les clés du test d'autoévaluation 310
Test de contrôle 14 310
Références bibliographiques 311

Les objectifs de l'unité d'apprentissage 14

Quand vous aurez parcouru ce chapitre et effectué les exercices, vous serez capables de:

• Identifier les valeurs discursives de la phrase hypothétique.


• Savoir reconnaître les paramètres du système des formes verbales dans la phrase
hypothétique avec la conjonction si.
• Savoir mettre en discours les différents moyens d'expression de l'hypothèse: mots
subordonnants, tours de phrase, choix de la forme verbale dans la principale et
dans la proposition de sens circonstanciel.
• Reconnaître les conjonctions (autres que si) et les locutions conjonctives
introduisant la proposition conditionnelle.

291
La subordonnée circonstancielle hypothétique (conditionnelle)

14.1 Caractéristiques générales de la phrase conditionnelle

14.1.1 Rapport logico-sémantique d'hypothèse


Définition. Dans la phrase hypothétique, le procès de la proposition
principale a besoin pour se produire que le procès de la proposition
subordonnée soit accompli:
fait 1 (proposition subordonnée)  fait2 (proposition principale)

(non réalisé, seulement représenté


comme réalisable, éventuel ou
potentiel, ou irréel dans le passé)
«Voici un élève que je vous recommande, il entre en
cinquième. Si son travail et sa conduite sont méritoires, il
Description
passera dans les g r a n d s , où l'appelle son âge. » [Flaubert]
du rapport logique La condition pour cet élève d'entrer dans un cycle supérieur d'études
(passer dans les "grands") est d'obtenir des résultats méritoires.
d’hypothèse :
Autrement, il ne sera pas promu dans la classe où son âge l'appelle.
Si P, alors Q La phrase exprime une perspective réelle: l'élève a devant lui la
P = prémisse période pendant laquelle il devra se montrer méritoire dans son activité.
Q = fait qui dépend Mais il y a aussi des phrases hypothétiques qui décrivent une
perspective imaginaire sur le cours des événements :
de la réalisation
d'une condition Si son enfance se fût écoulée dans l'arrière-boutique d'un
quartier marchand, elle se serait peut-être ouverte alors aux
envahissements lyriques de la nature. [ibid.]
Dans les deux propositions, c'est un mode verbal de l'irréel: se fût
écoulée (SBJ plus-que-parfait ou conditionnel passé 2e forme du
verbe s’écouler); se serait peut-être ouverte (conditionnel passé du
verbe s'ouvrir), car la perspective construite est purement imaginaire
(l'enfance de cette jeune femme NE s'était PAS écoulée dans
l'arrière boutique d'un quartier marchand, mais à la campagne).
Entre les deux valeurs (supposition réelle et hypothèse
irréelle), toute une gamme de nuances de sens s'exprime par les
phrases qui renferment des subordonnées hypothétiques.

14.1.2 L'expression de l'hypothèse: formes et valeurs


● Distinction terminologique entre hypothèse et condition
L'hypothèse est «une vérité affirmée comme vraie, mais non
validée». La condition est un fait antécédent (noté ci-dessus: fait1)
dont la non réalisation met en cause la réalisation du fait principal,
conséquent (noté ci-dessus: fait2). Pour distinguer le rapport
strictement conditionnel des autres sous-types du rapport
hypothétique, on peut employer comme test la paraphrase, en
introduisant la négation dans la subordonnée :
(a) S'il fait beau temps, nous nous promènerons au Bois de
Boulogne.
Paraphrase par négativisation de la subordonnée:
(a') S'il NE fait pas beau temps, il s'ensuit que la promenade au
Bois de Boulogne sera annulée. La réalisation du procès se
promener dépend de la réalisation du procès décrit dans la

292
La subordonnée circonstancielle hypothétique (conditionnelle)

subordonnée (beau temps). La proposition s'il fait beau temps est


une subordonnée hypothétique de type conditionnel. Soit maintenant
un autre type de phrase hypothétique:
Dans (b) Si je suis dénoncé on me destituera. [Stendhal]
Sa paraphrase par négativisation de la subordonnée est:
la terminologie
(b') (Même) Si je ne suis pas dénoncé, on pourra toujours me
grammaticale, destituer, au cas où mon employeur prendrait cette décision.
la proposition De même: S'il neige, je serai heureuse (éventualité). S'il avait neigé,
conditionnelle les arbres, les toits, tout aurait été blanc. (hypothèse imaginaire). La
non réalisation du procès subordonné n'entraîne pas l'arrêt ou la non
est un cas
réalisation du procès principal. Il ne s'agit pas strictement d'une
particulier subordonnée conditionnelle, mais d'une supposition.
de la proposition La c o n d i t i o n est une circonstance nécessaire ou préalable à
hypothétique la réalisation d'un certain fait. La condition implique donc un rapport
déterminatif, tandis que la s u p p o s i t i o n est un raisonnement par
lequel quelqu'un admet (provisoirement) un certain fait (présent ou
passé, réel ou imaginaire). Si l'événement pourrait bien se produire,
il s'agit d'une é v e n t u a l i t é (une possibilité), mais on peut aussi se
rapporter au passé ou à l'irréel (hypothèse imaginaire). Dans la
grammaire, le concept d'hypothèse sous-tend donc plusieurs
valeurs :
Hypothèse

éventualité ou supposition réelle/ imaginaire – condition

14.1.3 La systématique des types de phrase hypothétique


►Les principaux types syntaxiques de la phrase hypothétique
Du point de vue grammatical, l'expression de l'hypothèse (en
général), ou de la condition (en particulier) est très systématique:
elle réalise trois types syntaxiques de phrase avec SI, auxquels
correspondent quatre valeurs sémantiques de base.
Types syntaxiques
Les types syntaxiques de la phrase construite avec une
de subordonnées subordonnée en si (hypothétique) mettent en place un système
introduites par SI, régulier de formes verbales après si:
montrant: a) Si + présent de l'indicatif
b) Si + imparfait de l'indicatif
– la condition
c) Si + plus-que-parfait de l'indicatif
(a, b, c) Dans la principale, on met d'habitude:
– la cause (d) a) futur, impératif, présent de l'indicatif;
– l'opposition (e) b) et c) conditionnel, présent ou passé.
Mais d'autres formes verbales après SI sont attestées:
d) SI + passé composé, passé simple, ou avec imparfait dans les
deux propositions: la phrase n'exprime plus la condition, mais un lien de
causalité, un fait habituel. (voir ci-dessous des exemples) e) SI +
conditionnel (litt. et pop.). Dans ce cas, la phrase exprime une
opposition forte (concession): Si tu ne le ferais pas, eh bien, moi, je le
ferai ! (langue archaïque ou, en langue moderne, registre populaire).

293
La subordonnée circonstancielle hypothétique (conditionnelle)

►Les valeurs sémantiques de base sont:


La supposition pure:
Principales – supposition réelle (fait réel ou dont la réalisation est
valeurs de la certaine ou probable):
Si tu travailles bien tu seras récompensé.
phrase
– le potentiel (fait réalisable):
hypothétique Si tu travaillais bien (à partir de ce moment), tu serais
récompensé (à l'avenir), mais tu peux ne pas travailler bien.
– Hypothèse L'hypothèse imaginaire:
– l'irréel du présent (fait dont on affirme la non réalisation au
sur le présent
présent):
et sur le futur Si tu travaillais bien (jusqu'à ce moment), tu serais récompensé
(maintenant).
– Hypothèse – l'irréel du passé (fait dont on affirme la non réalisation au
passé)
sur le passé
Si tu avais travaillé bien (dans le passé), tu aurais été
récompensé (dans le passé).
(Var.) S'il eût travaillé bien (dans le passé), il eût (aurait) été
récompensé. (langue littéraire).
Le potentiel présente les mêmes formes linguistiques que l'irréel du
présent, c'est seulement le contexte qui permet de les distinguer :
Les larmes d'Elisa redoublèrent; elle lui dit que si sa maîtresse
L'expression le lui permettait, elle lui conterait tout son malheur. [Stendhal]
de l'hypothèse: Au moment où elle pleure, Elisa a devant elle la perspective potentielle
de raconter tout à sa maîtresse, à condition que celle-ci veuille l'écouter
et qu'elle lui permette de retenir son attention avec ses histoires.
• Valeur
►La systématique des formes linguistiques, combinée avec les
sémantique valeurs sémantiques réalisées, conduit à réduire à trois les sous-
• conjonction types de phrase hypothétique:
ou locution «la proposition dépendante [hypothétique] traduit un acte de
l'esprit par lequel ou bien se recrée le passé autrement qu'il n'a
conjonctive
eu lieu, ou bien on évoque une actualité présente, ou bien on
spécifique construit l'avenir en imagination.» [WAGNER ET PINCHON, §708]
• combinaison Ces trois valeurs sont :
des formes Premier type: …« on construit l'avenir en imagination»…
verbales A. (SUPPOSITION RÉELLE): la supposition pure et simple ou
• moyens l’hypothèse sur un fait réalisable, probable (au cas où, à supposer que,
lexicaux en admettant que…, locutions qui traduisent ce rapport). Exemples:
Si demain il pleut, je resterai dans la maison.
(circonstants
Si tu es sage, nous allons t'acheter des babouches. [Sartre]
ou Mais si tu attrapes des poux, ne viens pas te plaindre à moi. [ibid.]
mots de sens
hypothétique) Système des formes verbales:
• Subordonnée: Si + présent indicatif.
• Principale: futur, conditionnel présent, impératif, présent
indicatif.
Valeurs particulières:
– conséquence logique: Si tu frappes, la porte s'ouvre. Si tu bouges,
tu es mort !

294
La subordonnée circonstancielle hypothétique (conditionnelle)

– condition: Si je suis content, j'aiderai à vous faire par la suite un


petit établissement.

Principales valeurs Deuxième type: … «on évoque une actualité présente»….


conceptuelles B. (LE POTENTIEL): la proposition conditionnelle porte sur un fait
de l’hypothèse:
potentiellement réalisable:
Si tu étais plus studieux [à partir d'aujourd'hui], tu obtiendrais
de meilleurs résultats.
• SUPPOSITION Système des formes verbales:
• POTENTIEL • Subordonnée: Si + imparfait indicatif.
• IRRÉEL
• Principale: conditionnel présent, futur, impératif
– DU PRÉSENT
– DU PASSÉ Valeurs particulières:
► l'habituel : Si par malheur il se forçait à parler, il lui arrivait de dire
les choses les plus ridicules (= TOUTES LES FOIS QUE, avec IMP
dans la principale). La valeur "habituelle" réalise un rapport de nature
temporelle, plutôt qu'hypothétique. Valeur générique (a-temporelle):
quand une même forme verbale (le présent ou imparfait de l'indicatif)
apparaît dans les deux propositions.
►le SI causal (avec le verbe à un temps du passé dans la
subordonnée: passé composé, plus-que-parfait, passé simple, et
avec temps réel dans la principale; avec plusieurs nuances:
– cause, conséquence inverse ou succession temporelle:
Si je travaille bien, je suis récompensé. (TANT QUE, DÈS QUE)
– conséquence immédiate:
Si je travaillais bien, j'étais récompensé. (CHAQUE FOIS QUE)
Et, si j'avais refusé le café, il m'offrait (sans tarder) une tisane.
(DÈS QUE)
Valeurs
– cause ou concomitance temporelle:
Si tu as travaillé bien, tu es récompensé. Voilà ! Si j'ai travaillé
particulières (travaillais) bien, je suis (j'étais) récompensé. (DU MOMENT
des phrases QUE, TANT QUE) Si tu as travaillé bien, tu es maintenant
exprimées récompensé. (PARCE QUE)
par les mêmes
L'apparition d'un passé (simple, composé) après SI conduit à une
lecture de type causal.
moyens que les Parfois, c'est la subordination inverse: Si je le refuse, c'est que
hypothétiques: je pense aux inconvénients. (= je le refuse parce que je pense…). Si
cause, elle est venue, c'est qu'elle avait appris la nouvelle. (CAUSE
conséquence,
INVERSE: Elle est venue parce qu'elle avait appris la nouvelle).
Parfois, avec un passé simple ou composé dans la principale, la
effet habituel, phrase exprime un rapport non pas causal, mais oppositif
rapport temporel (concession  le si inverse, ou si oppositif):
(concomitance), Mais si elle savait inspirer l'amour, elle en fut aussi la victime
opposition (puisqu'elle ressentit une forte passion pour Adonis). (= Bien
qu'elle sache inspirer l'amour, elle en est parfois la victime).
Troisième type: «…le passé se recrée autrement qu'il n'a eu lieu…»
C. (L'IRRÉEL): la phrase construit une perspective entièrement
imaginaire sur le passé. Aucune action n'est attendue à se produire;
on décrit seulement une perspective hypothétique irréelle:

295
La subordonnée circonstancielle hypothétique (conditionnelle)

Si nous étions maintenant au Pôle Nord (ce qui n'est pas le


cas), nous verrions des ours polaires (habiterions dans un
igloo). (IRRÉEL DU PRÉSENT)
Si nous étions nés au Pôle Nord, nous aurions appris à
supporter le froid.
Si vous vous étiez venu à temps, vous auriez vu tout le
spectacle. (IRRÉEL DU PASSÉ)
S'il ne les avait pas vus entrer de ses propres yeux, il aurait
juré que le café était vide. [Sartre]
Si j'avais su, je ne les aurais pas tant fatigués. [ibid.]
Si j'avais pu une fois, une seule fois, être libre, eh bien, ça
serait tout de même une sale duperie. [ibid.]
Système des formes verbales:
• Subordonnée: Si + imparfait ou plus-que-parfait indicatif (ou
conditionnel 2e forme).
• Principale: conditionnel présent ou passé (ou conditionnel 2e
forme).
Valeurs particulières:
– Dans la langue littéraire, l'imaginaire du passé, se construit avec
conditionnel 2ème forme dans la principale et/ou dans la subordonnée:
Si elle eût appris ce genre de succès, Mme de Rênal en eût été
bien honteuse. [Stendhal]

Exercice d'entraînement
Mettez la forme verbale requise:
1. Si [ALLER, je] à Paris cet été, je visiterai le Musée du Louvre. 2. Si [ne pas
COMPRENDRE, tu], renseigne-toi auprès du guide. 3. Si [ne pas PARTIR, nous] tout de
suite, nous arriverons en retard. 4. Si [ÉCOUTER, tu], tu ne te serais pas mis dans cet
état. 5. Si [VOULOIR, vous] bien m'entendre, vous auriez pris le parapluie. 6. Si [AVOIR,
elle] du temps sur l'aéroport, elle aurait dû téléphoner à ses copains.

1. _______________________________ 4. _______________________________
2. _______________________________ 5. _______________________________
3. _______________________________ 6. _______________________________

14.2 L'ordre temporel et l'ordre séquentiel dans la phrase conditionnelle


• L'action exprimée dans la principale d'une phrase hypothétique ne
peut pas se réaliser avant sa prémisse, exprimée dans la
subordonnée, car la subordonnée est une sorte de "cause", et la
principale est une "conséquence". L'ordre temporel est donc
uniquement déterminé, tout comme dans les phrases: causale,
finale, consécutive. D'ailleurs, pour les grammairiens, la
conditionnelle est une cause qui n'est pas (encore) réalisée: Si tu
travailles bien, tu seras récompensé.
Si P, alors Q (~ P ⊃ ~ Q)
Ordre Dans la phrase conditionnelle, la non réalisation de la prémisse P
temporel rend irréalisable ou non nécessaire la suite Q:

296
La subordonnée circonstancielle hypothétique (conditionnelle)

Si vous parlez comme ça, je ne vous répondrai plus. [Sartre]


D'abord P: vous parlez comme ça. (Subordonnée)
Ensuite Q: je ne répondrai pas. (Principale)
Ce rapport temporel se retrouve dans toutes les phrases
hypothétiques, car le rapport de détermination logique implique un
fait1, antécédent ou simultané à un fait2 (conséquent).

• L'ordre séquentiel (antéposition ou postposition, également)


Ordre Dans la rhétorique classique, la conditionnelle est appelée la protase,
séquentiel : terme du vieux grec qui signifie la première partie d'une période (de
discours ou de musique). La partie montante d'une mélodie était la
Si P, alors Q
protase, et la partie descendante, l'apodose. Cette dernière est moins
ou: importante: elle peut rester implicite dans certains contextes
Q, à condition que P d'énonciation: Si j'avais des pouvoirs magiques…. Si j'étais maintenant
sur une planète lointaine… (sans principale, on ne juge pas utile de
continuer la phrase).

14. 3 La réalisation linguistique de la phrase hypothétique

14.3.1 Moyens d'expression du rapport hypothétique:


Le français s'est créé un système propre pour l'expression de
l'hypothèse, en utilisant principalement trois types de marqueurs
grammaticaux: conjonction, mode conditionnel, mode subjonctif.

1) L'opposition entre deux types de base de conjonctions:


SI / vs/ QUE
Si Jean se présente (IND) seul devant les juges, tout est perdu.
Qu'il aille (SBJ) seul devant les juges, ET tout est perdu.
Moyens La conjonction si s'emploie dans les questions indirectes totales, qui
d'expression portent sur la prédication dans son ensemble: Je me demande si tu
de l’hypothèse: viens (OUI ou NON). Après un verbe de communication, la
conjonction si ouvre l'éventualité de réalisation de l'action montrée
par le prédicat mis sous l'incidence de SI :
• la conjonction SI Tu viens ? OUI ou NON ? Dis-moi si tu viens (Si : oui ou non ?).
• mode verbal : Cet emploi dans l'interrogation indirecte explique le rôle important de
si dans la systématisation des formes verbales exprimant l'hypothèse
– subjonctif
en français. La conjonction si est un moyen grammatical suffisant
–conditionnel pour exprimer l'hypothèse (pure supposition, éventualité… ), donc
• locutions elle s'emploie avec l'indicatif.
conjonctives 2) Le mode conditionnel est la forme verbale spécifique pour
exprimer l'éventualité, mais aussi, parfois, il est homonyme avec le
futur dans le passé:
Jean dit que tu viendras demain. (futur simple)
Jean m'avait dit que tu viendrais le lendemain. (futur dans le passé)
Dans ce dernier contexte, la forme connue comme "conditionnel" est en
réalité un futur dans le passé.
Le conditionnel étant aussi un marqueur modal d'une
éventualité, il permet d'ouvrir une perspective sur un état du monde
qui n'est pas réel, mais seulement représenté comme éventuel ou
hypothétique. Le mode conditionnel s'emploie dans la proposition

297
La subordonnée circonstancielle hypothétique (conditionnelle)

principale d'une phrase hypothétique, avec la même valeur que SI +


indicatif . On pourrait établir les é q u i v a l e n c e s suivantes:
Subordonnée Principale (avec forme verbale en -R-)
SI + présent indicatif  futur
Si P….., alors Q
SI + imparfait indicatif  conditionnel présent
(protase) – (apodose) SI + plus-que-parfait indicatif  conditionnel passé

3) Le troisième moyen grammatical de l'hypothèse est le mode


subjonctif, exclu après si (excepté le subjonctif plus-que-parfait,
quand il est conditionnel passé 2ème forme) ayant la même valeur de
représentation hypothétique que la conjonction elle-même: D'ailleurs,
fût-il coupable, je le ferais acquitter. (hypothèse + concession).

14.3.2 La conditionnelle introduite par la conjonction SI


La spécialisation des formes verbales a permis aux grammairiens de
décrire les systèmes des formes verbales utilisées dans la phrase
hypothétique (voir les trois encadrés donnés sous 14.1.3), dans l'un
ou dans l'autre des types de phrase (avec si ou avec locution
conjonctive du type à condition que). Quelques remarques:
• L'emploi d'une forme verbale en –R– après la conjonction SI
Le comportement syntaxique de la conjonction si dépend de son
sens de base: parce ce qu'elle a déjà un sens conditionnel, elle
Forme verbale en rejette dans la langue actuelle la combinaison avec les formes
–R– après SI verbales qui expriment spécifiquement l'hypothèse et l'éventualité:
(conditionnel futur, conditionnel, subjonctif. Et pourtant, dans certaines conditions,
le futur ou le conditionnel peuvent s'employer après la conjonction
ou futur)
SI:
– introduisant une proposition interrogative indirecte, après un verbe
de communication:
Il se demanda s'il enverrait la photographie à Catherine avec
une lettre insultante: quand il eut hésité deux jours et tourné
dans sa tête plusieurs formules agressives, il ne sut plus quelle
lettre écrire. [Nizan]
– après à peine si :
Ce n'est pas à nous à détruire le prestige du pouvoir, les
journaux français le démolissent bien assez vite; à peine si la
manie «respectante» vivra autant que nous, et vous, mon
neveu, vous survivrez au respect. Vous, vous serez bon
homme! [Stendhal]
– dans des phrases autonomes affectives, dans la langue familière
(après du diable si, par exemple):
Tu mériterais bien qu'après avoir empoigné ton napoléon je
fisse prendre son grand trot à Cocotte; du diable si ta rosse
pourrait me suivre. [ibid.]
– parfois, dans les phrases avec mise en relief:
Si jamais batailles auraient dû être gagnées, ce sont celles-là !
La locution si jamais s'emploie avec indicatif (tout comme la
conjonction si seule), mais aussi avec subjonctif:
C'est bien pour le coup que la duchesse m'eût dit, si jamais il
m'eût été donné de revoir ses beaux yeux… .[ibid.]

298
La subordonnée circonstancielle hypothétique (conditionnelle)

Mon père dit que la passion du souverain allait jusqu'à


l'épouser si jamais il fût devenu libre!... [ibid.] (conditionnel
passé, deuxième forme).

Exercice d'entraînement
Analysez dans les phrases citées le rôle grammatical ou la fonction discursive de SI, et
notez par a, b, c ou d la valeur interprétative de SI:
SI conditionnel (a) introduit un proposition conditionnelle.
SI dubitatif (b) introduit une interrogative indirecte après un verbe de communication.
SI atténuatif (c), en début d'une phrase autonome, avec la valeur discursive d'atténuation d'un ordre
pour en faire une simple suggestion, invitation (le contour de la phrase est interrogatif, assertif ou
exclamatif, mais la valeur discursive est celle d'un énoncé impératif atténué).
SI participatif (d), en début d'une phrase autonome, la valeur discursive est celle de montrer l'intérêt
du locuteur (joie, admiration, regret etc.) relativement au contenu communiqué.
1. Dans ton bureau, au moins tu es caché, personne ne te connaît, tu peux en sortir si tu
es fort, et faire ton chemin. 2. Si on parle de Cicéron ou de Tibère, tu sais à peu près ce
que c'est? 3. Duroy dit: « – Si nous faisions un tour dans la galerie? » 4. Il emporta la
tasse, puis il revint: «– Si vous saviez, madame, quels bons moments m'a fait passer la
Vie Française, quand j'étais là-bas dans le désert». 5. D'abord, nous supposons que vous
adressez à un ami vos impressions, ce qui vous permet de dire un tas de bêtises, de faire
des remarques de toute espèce, d'être naturel et drôle, si nous pouvons. 6. Et si vous
saviez comme elle est drôle, originale, intelligente! 7. (L'huissier dit:) «Si monsieur veut
bien s'asseoir un peu». Et il indiqua le salon d'attente, déjà plein de monde. 8. En tous
cas, voyez si mon ami M. Forestier n'est pas ici. 9. Je t'apporterai la chose demain, si tu
veux. 10. Si tu n'es pas plus exact que ça, tu rateras ton avenir, toi. [Maupassant]
1. _________ 2. _________ 3. _________ 4. _________ 5. _________
6. _________ 7. _________ 8. _________ 9. _________ 10. _________

14.3.3 La conditionnelle introduite par d'autres mots que SI


Dans la présentation qui suit, trois seront les paramètres syntaxiques
permettant de caractériser les différents sous-types de phrase
Diverses hypothétique: la valeur sémantique; les mots subordonnants; la
locutions forme verbale dans la subordonnée.
conjonctives a) La conditionnelle réelle (action logiquement possible):
hypothétiques À CONDITION QUE (variantes: À LA CONDITION QUE,
SOUS LA CONDITION QUE, SOUS CONDITION QUE) +
subjonctif, ou indicatif (futur), ou conditionnel :
L'intervention d'une norme est possible, à condition qu'elle soit
explicite et identifiée.
Elle lui pardonne, à condition que, converti à la religion de
charité, il ne fera plus de mal à personne. [apud Guberina]
Elle lui pardonnait, mais à condition qu'elle ne dirait jamais un
mot de cette étrange scène à qui que ce fût. [Stendhal]

299
La subordonnée circonstancielle hypothétique (conditionnelle)

Locutions
«Dans la langue parlée l'emploi d'une subordonnée introduite par à
conjonctives condition que est souvent évitée par l'emploi d'autres constructions»,
hypothétiques affirment les grammairiens. Mais il y a de beaucoup d'énoncés oraux
construites avec attestés, comme ceux-ci (langue littéraire, dialogues imaginés):
«J'irai moi,… mais à la condition que Patak m'accompagnera. »
• indicatif [Verne]
• conditionnel «Je te le dirai (…) à la condition que tu me promettras de ne
• subjonctif jamais le répéter.» [apud Guberina]
«Je lègue une rente viagère à chacun de ses cinq enfants,
sous la condition que Ferrante Palla donnera des soins comme
médecin à mon neveu.» [Stendhal]
b) L'éventualité introduite par :
AU CAS OÙ, DANS LE CAS OÙ, POUR LE CAS OÙ etc.
(avec conditionnel ou indicatif)
Après les conjonctions et les locutions conjonctives dont le dernier
élément est où, le mode employé dans la subordonnée est le
conditionnel (parfois l'indicatif aussi, mais jamais le subjonctif):
Au cas où tu arriverais avant moi, attends-moi !
Au cas où quelque chose se produirait, appelle maman !
Dans le cas où maman appellerait, donne-lui mon numéro de
portable. Dans l'hypothèse où vous auriez des ennuis avec la
concierge, appelez-moi !
Sens et emploi
Ces locutions conjonctives contiennent un mot qui exprime une
des locutions éventualité: cas, condition ou hypothèse font référence à une
conjonctives situation éventuelle. De même, les noms circonstance et situation,
hypothétiques état (de choses), éventualité, supposition, (en pareille) circonstance,
conjoncture:
au cas où ;
Dans l'éventualité d'un échec, nous t'aiderons.
dans le cas où Il se peut que nous ayons un empêchement; dans ces
etc. circonstances, je passerai un coup de fil.
Dans ces derniers exemples, les mots de sens hypothétique n'ont
pas le rôle de locution conjonctive, mais d'un circonstant. Comparez:
●Au cas où j'aurai un empêchement, je t'avertis. (locution
conjonctive) ●Dans l'hypothèse d'un empêchement, il vaut
mieux m'avertir par téléphone. (circonstant)

Songe à préparer un mot pour le cas où le domestique


passant devant l'échelle, dans le corridor, la remarquera
[Stendhal] (ambiguïté fonctionnelle: ●pour le cas = circonstant
+ proposition relative ? ou ●pour le où + Prop. )
De tous ces multiples éléments lexicaux dont le sens évoque une
hypothèse, c'est seulement les locutions avec cas, condition et
hypothèse qui se sont grammaticalisées, en devenant les locutions
conjonctives.
La proposition principale peut être une nominalisation:
(…) Donc brouillerie complète, oui, et réconciliation seulement dans
le cas où il n'y aurait que ce moyen de l'empêcher de s'en aller.
Une forme verbale
La proposition conditionnelle introduite par au cas où se rattache à
en –R– n'apparaît
qu'exceptionnellem une principale nominalisée: Réconciliation = il y aura réconciliation.
ent après si. Le temps futur exprime lui aussi l'éventualité du procès.

300
La subordonnée circonstancielle hypothétique (conditionnelle)

Toute forme verbale contenant le morphème -R- dans le


contexte d'une locution conjonctive marquant l'éventualité peut servir
à renforcer dans la phrase l'idée d'éventualité:
(…) Dans le cas où le jugement terrible lui accorderait le
pardon de ses péchés, elle irait à quelques pas de la prison.
C'est dans le cas où je devrais mourir comme un autre, que la
vue de ce pauvre vieillard aurait dû me jeter dans cette
affreuse tristesse. [Stendhal] (L'éventualité : je devrais mourir)

Test d'autoévaluation
Pour bien gérer ce test, il est indispensable que vous ayez déjà parcouru les explications
et les analyses données dans l'unité d'apprentissage 14. Vérifiez vos solutions aux
exercices en consultant la rubrique Clés du test d'autoévaluation.

Exercice 1
Identifiez le système des formes verbales dans les phrases hypothétiques suivantes:
a. Si elle entendait dans la rue les tambours d'un régiment en marche, elle se mettait
devant la porte avec une cruche de cidre, pour offrir à boire aux soldats.
…………………………………………………………………………………………………….
b. «Dans un an, si la fortune ne changeait pas, il s'embarquerait pour l'Amérique ou se
ferait sauter la cervelle.» [Flaubert]
…………………………………………………………………………………………………….
c. «Que faire ? S'il lui en demandait raison, le bohème protesterait de son innocence,
et il n'y gagnerait rien.»
…………………………………………………………………………………………………….
d. Si c'est la suite de la nuit dernière, dit Rosenthal, ça va faire une belle saloperie.
…………………………………………………………………………………………………….
e. «Au fond, si mon père n'avait pas exercé ce métier, peut-être ne se serait-il
absolument rien passé».
…………………………………………………………………………………………………….
f. «Je mentirais si je disais que j'ai beaucoup souffert.» [Nizan]
…………………………………………………………………………………………………….
Exercice 2
Mettez la forme verbale convenable:
1. S'il [être] riche, il [prendre] des leçons particulières et il [se faire] expliquer les obscurités.
……………………………………………………………………………………………………….
2. Si votre ami [arriver] demain, où le [loger]-vous donc ?
……………………………………………………………………………………………………….

3. Si je [parler] de cela, on [se moquer] de moi.


……………………………………………………………………………………………………….
4. Il [être] moins satisfait, s'il [savoir] ce qui se passait dans la tête de son maître.
……………………………………………………………………………………………………….
5. Si par hasard quelqu'un [monter] les marches jusque dans mon appartement, je
[redouter] d'être surpris inerte et désoeuvré.
……………………………………………………………………………………………………….
6. Si mon portefeuille [exister] encore, avec quelle attention je [l'examiner] !
……………………………………………………………………………………………………….

301
La subordonnée circonstancielle hypothétique (conditionnelle)

Exercice 3
Soulignez les subordonnées conditionnelles:
1. Voulez-vous me promettre le secret sur ce que je vais ajouter, même dans le cas où
vous ne trouveriez pas convenable d'accéder à ma demande? 2. Il s'imagine toujours que
donner sa démission est le plus grand sacrifice que puisse faire un premier ministre; et
toutes les fois que son miroir lui dit qu'il vieillit, il m'offre ce sacrifice: donc brouillerie
complète, oui, et réconciliation seulement dans le cas où il n'y aurait que ce moyen de
l'empêcher de s'en aller… 3. Quoi! faire des cadeaux à un homme dont nous sommes
parfaitement contents, et qui nous sert bien? ce serait dans le cas où il se négligerait qu'il
faudrait stimuler son zèle. [Stendhal]
……………………………………………………………………………………………………….
……………………………………………………………………………………………………….
……………………………………………………………………………………………………….

c) La supposition introduite par :


EN ADMETTANT QUE
À SUPPOSER QUE
SUPPOSÉ QUE + SBJ
EN SUPPOSANT QUE

Ces locutions conditionnelles se sont formées des verbes admettre


et supposer; elles marquent donc le rapport logique de
supposition:
L'expression En supposant que Fouqué imprime mon pamphlet posthume,
ce ne sera qu'une infamie de plus. [Stendhal]
de la supposition
L'idée de supposition se rattache souvent à celle d'opposition:
[Même] En supposant que cette famille eût été bohémienne
d'origine, elle était si riche, si attrayante, que la haute société
pouvait bien lui pardonner ses petits mystères. [Balzac]

d) La condition suffisante introduite par :


POUR PEU QUE + SBJ
Cette locution conjonctive sert à former une conditionnelle très faible,
une requête minimale: le procès décrit dans la principale a lieu dans
L'expression presque toutes les conditions, il lui suffit de très peu pour qu'il se
de la condition produise:
suffisante Pour peu que le voyageur s'arrête quelques instants dans
cette grande rue (…), il y a cent à parier contre un qu'il verra
paraître un grand homme à l'air affairé et important. [Stendhal]
Le procès principal est presque c e r t a i n : dès qu'on arrive à passer
par cette rue, on voit apparaître ce personnage. Dans ce type de
phrase, la prédication principale s'accompagne (ou elle pourrait
s'accompagner) d'une spécification adverbiale montrant la certitude
Sens et emploi du procès principal. Ce procès ne se soumet pratiquement pas à des
de la locution
conditions, il se réalise dans presque tous les cas: « il y a cent à
parier contre un qu'il verra paraître un grand homme» (= il verra
conjonctive sûrement, sans aucun doute).
hypothétique La subordonnée décrit la condition minimale à remplir pour
POUR PEU QUE assurer la réalisation de la principale. Le procès subordonné est

302
La subordonnée circonstancielle hypothétique (conditionnelle)

d'habitude une activité ou un événement dont l'accomplissement est


très accessible: s'arrêter quelques instants dans une rue représente
une très faible condition, car tout le monde peut sans grand effort
s'arrêter quelques instants dans une rue: c'est un procès facile à
accomplir. Dans les exemples suivants, on va fixer ces contenus
spécifiques:
– condition très faible dans la subordonnée;
– procès presque certain dans la principale.
Du reste, les étudiants sont fort bien vus à Paris. Pour peu
qu'ils aient quelque talent d'agrément, on les reçoit dans les
meilleures sociétés. [Flaubert]
La principale a toutes les chances de s'accomplir: les étudiants ne
doivent que montrer un peu de talent pour les arts, que déjà les
meilleurs sociétés les reçoivent volontiers.
[Il] ne voyait qu'affectation dans toutes les femmes de Paris;
et, pour peu qu'il fût disposé à la tristesse, ne trouvait rien à
leur dire. [ibid.]
La circonstance exprimée dans la subordonnée (pour peu qu'il fût
disposé à la tristesse), est un fait commun pour sa disposition: cet
homme n'avait pratiquement presque jamais rien à dire aux femmes.
Autrement dit: ce n'est qu'exceptionnellement que cet homme
trouvait quelque chose à dire aux femmes.
Ce caractère d'exception de la circonstance qui empêcherait
la réalisation du procès principal est souvent souligné dans le texte:
Julien ne voyait qu'affectation dans toutes les femmes de Paris;
et, pour peu qu'il fût disposé à la tristesse, ne trouvait rien à
leur dire. Mlle de La Mole fit exception. (c'est la suite de la
phrase conditionnelle citée antérieurement).

e) La condition restrictive positive (la condition nécessaire à


remplir) introduite par :
POURVU QUE + SBJ
Les différents Je suis d'accord d'y aller, pourvu qu'il me le demande.
types de (condition nécessaire et suffisante: sans qu'il me le demande
condition
personnellement, je n'irai pas).
restrictive Le premier venu, pourvu qu'il sache amuser, a le droit de parler
de lui-même. [Baudelaire]
Le procès principal échoue ou s'interrompt si la condition
déterminative nécessaire ne s'accomplit pas.
La nature du procès principal permet de distinguer deux sous-
types de condition nécessaire et suffisante:

– la subordonnée décrit ce qui pourrait empêcher le maintien


d'une situation favorable, dans laquelle la principale se réalise:
Sens
Papa est bien pour le moment, tu pourras parler avec lui,
et emploi pourvu qu'il ne soit obligé de partir.
de la locution Une situation déjà réalisée, en général favorable, se maintiendra, à
conjonctive moins que la condition décrite dans la subordonnée n'évolue dans un
sens défavorable:
hypothétique:
Mon frère est déjà là et il nous raccompagnera, pourvu qu'il ne
POURVU QUE soit appelé pour une urgence.
303
La subordonnée circonstancielle hypothétique (conditionnelle)

Le procès principal se maintient tant que le procès décrit dans la


conditionnelle n'évoluera dans la direction contraire au souhait d'une
instance personnelle donnant le point de vue de la phrase:
Pourvu qu'on la laissât seule errer dans son beau jardin, elle ne
se plaignait jamais. [Flaubert] (être seule  ne pas se plaindre)
L'unique condition dont dépend le bien-être de la jeune femme est
d'être laissée seule: il faut la laisser seule et elle ne se plaindra pas.
– la conditionnelle restrictive exprime une "réserve", en
décrivant l'unique circonstance dans laquelle la réalisation de la
principale pourrait être mise en cause.
Les résultats y sont, pourvu qu'on les cherche. [B.Constant,
apud TLF].
Hypothèse
Le contenu de la principale est mis en rapport d'une simple et unique
et restriction : condition, nécessaire et suffisante, décrite dans la subordonnée.
• pourvu que Vous pouvez vous embarquer dimanche dans la course pour
(restriction
Londres, pourvu que vous confirmiez votre réservation.
Le voyage est presque certain, à ceci près qu'il faut confirmer la
nécessaire) réservation.
La conditionnelle introduite par pourvu que décrit souvent une
• à moins que situation réalisée en dépit d'une autre situation qui aurait pu
s'opposer. Dans ce cas, la structure hypothétique se superpose à
(restriction
une structure oppositive:
exceptive) Pourvu que je vive, c'est assez. [La Fontaine, apud Grevisse]
Le procès dans la subordonnée, vivre (être en vie), est un procès
réalisé qui agit comme une "cause" pour le procès principal: (Je sens
que) c'est assez ! De même:
Peu importe l'échec du spectacle, pourvu que nous ayons
gagné de l'argent.
Subordonnée: Principale:
gagner de l'argent (+)  échec (–)
Non seulement la prédication subordonnée (gagner de l'argent)
décrit une condition déterminative (cause virtuelle) pour le procès
principal ("Cela m'est indifférent le succès ou l'échec du spectacle"),
mais en plus les deux procès sont en opposition évaluative: +/ –. La
proposition subordonnée décrit une situation favorable et donc
souhaitable, un état des choses évalué positivement : Peu importe la
qualité de l'image que l'on véhicule, pourvu qu'elle soit regardée par
un maximum de monde. De même:
Nic Deck n'était pas homme à s'en inquiéter, d'ailleurs, et,
pourvu qu'il pût gagner à travers le bois, il ne se préoccupait
pas autrement de quelques égratignures. [J.Verne]
Hypothèse et
Subordonnée: Principale:
gagner  se préoccuper des égratignures
polarisation
+ –
évaluative : polarité évaluative positive polarité évaluative négative
Le personnage ignore les quelques égratignures qu'il pourrait se faire
pourvu que en traversant le bois. La conditionnelle restrictive est proche d'une
concessive: «même si cet homme se blesse quand il traverse le bois, il
exprimant le
est tout de même content de pouvoir gagner de son travail».
SOUHAIT Divers effets rhétoriques peuvent engager le caractère oppositif
de ce type de phrase:

304
La subordonnée circonstancielle hypothétique (conditionnelle)

« …et quant à croire aux choses, je les crois toutes, pourvu


qu'elles soient incroyables.» [Wilde]
L'apparente contradiction: je les crois  à (la seule) condition
qu'elles soient incroyables, est soulignée par le sens exclusif de la
condition introduite par pourvu que: cette locution implique toujours
une négation latente: l'adjectif incroyable doit s'interpréter comme
signifiant "fabuleux", "exceptionnel".
• La proposition conditionnelle avec pourvu que avec une
principale implicite
– Pourvu que cette abominable voix ne les réveille pas pendant
leur sommeil ! [Verne] (la proposition principale reste implicite)
La situation dans l'ensemble étant évaluée positivement, la
Hypothèse et
conditionnelle sans principale est souvent prononcée avec un
contour mélodique exclamatif, marquant le regret, la crainte,
polarisation l'inquiétude, car la situation initiale, jugée harmonieuse, pourrait se
évaluative : suspendre inopinément (subordonnée négative):
«– Pourvu que la voix ne recommence pas à bavarder, tandis
POURVU QUE
qu'ils seront en train de souper ! » pensait Jonas. [Verne]
Le personnage est content (évaluation positive), à condition qu'une
employé devant éventualité qui ferait renverser la situation favorable ne se produise.
une phrase – Pourvu qu'on ne leur dise pas de mal de mon auberge !
exclamative pensa Jonas inconsolable. Ils seraient capables de n'y point
indépendante
vouloir prendre logement ! [J. Verne]
La circonstance décrite dans la conditionnelle aurait mobilisé
négativement l'évaluation du personnage: si on disait du mal de son
auberge, il se serait fâché.
En revanche, la phrase exclamative affirmative décrit la seule
condition à accomplir pour que la principale (implicite) puisse se réaliser:
– Pourvu que Vinçart veuille m'entendre ! Du reste c'est
convenu, je ne lanterne pas, je suis rond comme une pomme.
[Flaubert] (seule ombre d'inquiétude du personnage: que
Vinçart puisse ne pas vouloir l'entendre !)
Pour finir, voici la description de cette valeur sémantique de pourvu
que, donnée dans la plupart des grammaires: cette locution s'emploie
«au début d'une phrase indépendante au subjonctif, en général
exclamative, pour exprimer le souhait qu'une chose soit ou ne soit
pas, lorsqu'on redoute la possibilité du contraire» [TLF, s.n.].

La locution f) La condition restrictive négative (l'exception) introduite par :


conjonctive À MOINS QUE (avec ne explétif) + SBJ
Je vous donnerai un coq, à moins que vous ne teniez de
hypothétique
préférence aux " picots". [Flaubert]
[On parle d'un château] Quel architecte l'a édifié sur ce plateau
À MOINS QUE
(…)? On l'ignore (...), à moins que ce soit le roumain Manoli, si
introduit une glorieusement chanté dans les légendes valaques. [Verne]
condition La condition restrictive négative marquée par à moins que est de
restrictive nature exceptive: la subordonnée décrit la seule circonstance dans
laquelle la principale ne se réalise pas:
exceptive
Demain notre voyage finira, à moins qu'une circonstance
pour l'action exceptionnelle ne survienne (un retard, un empêchement).
principale
305
La subordonnée circonstancielle hypothétique (conditionnelle)

L'action décrite dans la principale se réalise dans toutes les


circonstances SAUF dans celle décrite dans la subordonnée. La
locution à moins que peut se mettre en parallèle avec:
sauf le cas où + CDT
sauf si + IND
sauf que, excepté que + IND, CDT (selon le cas)
Votre voyage prendra fin demain sauf que quelque chose
d'imprévu ne survient. / excepté que vous ne préfériez rester
encore deux jours.
(…) Et si j'étais un héros, je voudrais que ma statue fût au coin
de la rue, sauf à voir les enfants m'assiéger à coups de pierres.
[Stendhal] (sauf à + INF = construction oppositive/ concessive:
même si les enfants m'assiégeront sans doute à coups de
pierres)
Comparez avec: Notre voyage se fera sans que vous ayez quelque
chose à payer. La locution sans que +SBJ introduit une subordonnée
caractérisant la m a n i è r e d'effectuation de l'action.

► Diversité de réalisation linguistique de la condition restrictive


Ne pas confondre:
 sauf que et excepté que +IND/ CDT qui «marquent que l'action de la subordonnée est
exclue»;
 sans que +SBJ «le non accomplissement de l'action exprimée par la subordonnée»;
 outre que, qui «marque que l'action de la subordonnée vient s'ajouter à celle de la
principale»;
 sauf à + INF, qui signifie: «sans exclure l'éventualité d'une telle action», «sans qu'il soit
exclu le risque de…»; sens proche de quitte à + INF;
 sauf si, avec le sens: «excepté le cas où»;
 sauf au cas où; sauf dans le cas où + prop. hypothétique; (ou circonstant : sauf en cas
de force majeure, sauf erreur; sauf avis contraire; sous réserve de + N; à l'exception de +
N; à moins de + N ):
«...sauf au cas où l’information demandée serait requise pour accomplir un but…»
«... sauf dans le cas où de telles garanties s'appliqueraient à des défauts…»
«Vous n’avez pas le droit d'y aller, sauf au cas où vous êtes expressément autorisé
de le faire.»
«Les programmes sont proposés au niveau des ministères, sauf le cas où le vote du
conseil est requis expressément....»
Avec toute une périphrase: sans qu'il soit exclu le risque de + le nom d'une action, d'un état.
La condition introduite par à moins que donne dans la subordonnée
conditionnelle l'unique circonstance qui empêche la réalisation du
Justification procès principal:
du NE explétif, – Viendras-tu me voir tous les jours pendant ces deux mois?
utilisé dans la – Je te le jure. Tous les jours, à moins que mon mari ne me le
phrase ayant
défende. [Stendhal]
La promesse de venir tous les jours se réalise dans toutes les
une proposition circonstances sauf interdiction de la part du mari.
introduite par: Subordonnée: Principale:
si le mari NE me le défende (+)  je viendrai (+)
À MOINS QUE
306
La subordonnée circonstancielle hypothétique (conditionnelle)

L'hypothèse que le mari NE s'oppose pas, est une circonstance


favorable, par conséquent la phrase hypothétique utilise une négation
explétive pour marquer cette inversion de polarité évaluative:
La condition favorable est que le mari N'intervienne PAS avec
son interdiction. S'il intervient, la situation est non souhaitable:
Le mari intervient (prédicat affirmatif)  je NE viendrai plus.
– –
Le mari N'intervient PAS (prédicat négatif)  je viendrai.
+ +
La particule NE (appelée aussi: ne explétif) s'emploie dans la
subordonnée de sens positif, mais de polarité évaluative négative :
Il n'en fera rien, à moins que vous ne lui parliez.
Le ne est simplement "explétif" dans cette phrase, du moment que le
sens de la conditionnelle reste affirmatif: si vous lui parlez, il fera
quelque chose, sinon, il ne fera rien.
Avec une principale négative, à moins que introduit la condition
nécessaire exclusive:
Ainsi, je ne jouerai plus (…), à moins que le prince ne me jure
de m'adresser la parole comme il le ferait à une femme d'un
certain âge – dit la duchesse.
(seulement s'il me jure cela, je jouerai)
g) La temporelle hypothétique introduite par :
QUAND (avec indicatif, d'habitude le présent ou le futur,
pour la valeur hypothétique):
Quand mes procès vous ennuieront, ou que vous ne me
conviendrez plus, je demanderai pour vous une bonne cure (…).
[Stendhal]
Les propositions causales et temporelles ont une principale qui
exprime un procès réel, tandis que dans la phrase hypothétique le
procès principal n'est pas réalisé. Dans la phrase citée, on reconnaît
le caractère hypothétique du fait que la principale étant au temps
futur, la phrase entière permet une lecture "hypothétique".
h) La causale hypothétique ou la conditionnelle alternative,
introduite par :
SOIT QUE… OU QUE + SBJ
Valeurs OU QUE…., OU QUE….; (avec indicatif présent/ futur)
des locutions
SELON QUE…, OU QUE… (avec indicatif futur)
La proposition alternative (de cause ou de condition) se réalise à
conjonctives
l’aide des locutions: soit que… soit que… ; (soit) que…, ou que;
alternatives : selon que ou que…, ou que…. :
Cependant les flammes s'apaisèrent, soit que la provision
– hypothèse
d'elle-même s'épuisât, ou que l'entassement fût trop
considérable. [Stendhal]
– cause
Ce type de phrase présente dans les deux subordonnées, des
alternative causes alternatives, hypothétiques (le procès principal est réalisé:
les flammes se sont réellement apaisées).
Soit qu'il copiât les personnages des tableaux qui garnissaient
le choeur, soit qu'il improvisât, il laissait toujours à sa place de
grossières ébauches. [Balzac]
Cette phrase ne décrit pas un procès réalisé, mais un procès
habituel (d'habitude, ce peintre faisait ce genre d'ébauches). Quand
307
La subordonnée circonstancielle hypothétique (conditionnelle)

le procès principal est réel et réalisé (le verbe étant à un temps


passé), la phrase dans son ensemble est de type causal: (marquant
la cause alternative, hypothétique):
Mais, soit qu'il n'eût pas remarqué cette manoeuvre ou qu'il
n'eût osé s'y soumettre, la prière était finie que le nouveau
tenait encore sa casquette sur ses deux genoux. [Flaubert]
(L'enfant n'avait pas renoncé à tenir sa casquette soit parce qu'il
n'avait pas remarqué les signes qu'on lui faisait, ou parce qu'il n'osait
pas s'y soumettre).
C'est le seul type de proposition de cause qui se construit avec
un mode non réel. C'est la nature hypothétique non pas de la cause,
mais du raisonnement, que le mode subjonctif exprime.
Le sacrifice est fait, demain, qu'il y ait ou qu'il n'y ait pas de
lettre anonyme, moi aussi je dirai à mon mari que j'ai reçu une
lettre anonyme (…) [Stendhal]
La principale étant au futur simple indicatif (je dirai), la phrase est
interprétée comme hypothétique et non comme une cause alternative.

14.3.4 Réalisations particulières de la phrase conditionnelle


Les conditionnelles réduites
– La proposition conditionnelle réduite à l'infinitif ou au gérondif: En
regardant de plus près, vous pourrez découvrir sa manière de poser la
couleur. À regarder de plus près, vous découvrirez les touches de
couleur. Quand la conditionnelle restrictive est réduite à l'infinitif, la
condition s'exprime affirmativement n'ayant plus besoin d'un ne
explétif:
(…) À moins de se moquer des moeurs, on devait surveiller
celles des domestiques. [Flaubert]
Nous irons à l'opéra à moins d'être fatigués.
– Les conditionnelles sont parfois réduites à l'attribut:
Abandonnée, personne de s'en intéressait.
Mariée, elle aurait au de chances.(dans quelles conditions
aurait-elle plus de chances ? si elle avait été mariée).
Tours de phrases hypothétiques (sans subordination):
• La coordination entre deux propositions indépendantes, dont
l'une est précédée par que (+ subjonctif):
L'expression Qu'il vienne, ET je lui montrai tout.
Remarque: QUE apparaît aussi comme substitut de SI ou d'un autre
de l'hypothèse
mot subordonnant, quand plusieurs propositions conditionnelles
dans coordonnées se rapportent à la même proposition principale:
des phrases Si vous êtes d'accord, et que vous n'ayez pas d'autre projet pour
sans cet été, alors on se verra demain pour mettre au point les détails.
• La proposition conditionnelle introduite par que + subjonctif peut
subordination
avoir un sens oppositif:
Qu'on lui ferme la porte, il entrera par la fenêtre !
Que tu sois là, et puis je ne veux plus rien. (coordination)
• Tours inversifs avec subjonctif, impératif, conditionnel:
Survienne le moindre événement, les journalistes sont là, faire
leur relation sur place.
• Tours de phrases inversifs avec:
– imparfait: Lui parlait-on, il n'écoutait pas !
308
La subordonnée circonstancielle hypothétique (conditionnelle)

– présent (indicatif): Vient-il (viendra-t-il), on lui pardonnera.

Principaux sous-types de phrase hypothétique (synthèse)

► Idées à retenir :
Il y a lieu de distinguer trois cas figure :
avec SI (voir les systèmes verbaux avec si)
+ mode i n d i c a t i f
– la supposition
(réelle) avec une locution conjonctive:
• à supposer que, supposé que, en supposant que, en admettant que,
des fois que, soit que… soit que..., si tant est que, etc.
+ mode s u b j o n c t i f
• dans le cas où, au cas où, pour le cas où, dans l'hypothèse où,
quand bien même
+ mode c o n d i t i o n n e l

• avec SI (voir les systèmes verbaux avec si)

– la condition + mode i n d i c a t i f

• avec une locution conjonctive: sous la condition que, à condition que


(+indicatif, conditionnel, le plus souvent subjonctif) pour peu que, à
moins que, pourvu que;
+ mode s u b j o n c t i f
• suivant que, selon que, ou que
+ mode i n d i c a t i f

• avec SI (voir les systèmes verbaux avec si)


– l'hypothèse + mode i n d i c a t i f
irréelle ou
condition • avec une locution conjonctive: en admettant que, supposé que,
dans le passé dans l'hypothèse que, etc.
+ mode s u b j o n c t i f

309
La subordonnée circonstancielle hypothétique (conditionnelle)

 Les clés du test d'autoévaluation


Corrigé de l'exercice 1 :
Identifiez le système des formes verbales dans les phrases hypothétiques suivantes:
a. Si + IMP ; dans la principale: IMP (valeur: habituel).
b. Si + IMP ; dans la principale: CDT présent (valeur: potentiel).
c. Si + IMP ; dans la principale: CDT présent (valeur: éventualité imaginée).
d. Si + PR ; dans la principale: IND présent (valeur: condition).
e. Si + PQP ; dans la principale: CDT passé (valeur: irréel du passé).
f. Si + IMP ; dans la principale: CDT présent (valeur: irréel du présent).
Corrigé de l'exercice 2 :
1. Si je vais….. 2. Si tu ne comprends pas… 3. Si nous ne partons pas tout de suite. 4. Si
tu m'avais écouté. 5. Si vous aviez voulu m'entendre... 6. Si elle eût au (avait eu) du temps
sur l'aéroport.
Corrigé de l'exercice 3 :
a) dans le cas où vous ne trouveriez pas convenable d'accéder à ma demande.
b) dans le cas où il n'y aurait que ce moyen de l'empêcher de s'en aller.
c) dans le cas où il se négligerait.

→ Test de contrôle 14

Ce test est administré à l'issue de l'unité d'apprentissage 14.


Pour réaliser ce test, il est conseillé de relire l'unité et de suivre attentivement les phrases
données à titre d'exemple pour chacune des valeurs discursives de la proposition
hypothétique, et sur les mots subordonnants spécifiques non spécifiques pour rendre le
rapport de condition.

Ne manquez pas de transmettre ce test à votre tuteur. À cet effet, il convient de marquer
votre nom, votre prénom et votre adresse personnelle sur la première page de votre copie.
N'oubliez pas de mentionner aussi le numéro du test. Vous êtes supposés le recevoir
après correction, avec les commentaires de votre tuteur.

Bon travail !

Exercice 1 (1 point)
Complétez les phrases:
1. S'il avait donné cours à ses désirs,…. 2. Si ma sœur était arrivée à temps… 3. Si tu
mets la table sur la terrasse, … 4. Si papa avait déjà appris la nouvelle…. 5. Si Jean était
déjà passé nous apporter le livre… 6. Si la télé a présenté l'enregistrement en question….

Exercice 2 (2 points)
Liez les phrases suivantes par à moins que, en conservant la première proposition
inchangée et en modifiant la seconde proposition de chaque couple:
1. Son voyage se déroulera bien: rien d'imprévu n'arrivera. 2. Elle aura une très bonne
journée. Aucun client n'est venu la déranger. 3. Ils partiront tous les deux par le train de 15
heures. Son mari pourra venir à temps à la gare. 4. Les enfants veulent toujours jouer avec
des adultes. Les adultes posent souvent des questions ridicules aux enfants. 5. Vous pouvez
vous inscrire à ce cours de français. Vous devez avoir déjà parcouru le premier manuel.

310
La subordonnée circonstancielle hypothétique (conditionnelle)

Exercice 3 (3 points)
Liez les phrases suivantes par pourvu que, en conservant la première proposition
inchangée et en modifiant la forme de la seconde proposition de chaque couple:
1. Nous nous entendrons bien avec nos voisins. Nos enfants à leur tour s'entendront bien. 2.
Vous pouvez venir nager dans la piscine. Il faut être membre de ce club. 3. Vous obtiendrez un
laisser-aller. Vous expliquez que vous devez soigner votre père qui est malade. 4. Vous pouvez
vous inscrire à ce cours de français. Vous payer une taxe pour trois mois d'avance. 5. Demain
nous ferons le tour de l'île en bateau. Il fera aussi beau temps que hier et notre capitaine ne
voudra pas changer d'idée.

Exercice 4 (1 point)
Construisez deux phrases pour chacune des locutions conjonctives: en admettant que,
supposé que, au cas où.

Exercice 5 (3 points)
Soulignez les propositions conditionnelles, tout en identifiant la conjonction (locution
conjonctive) et la forme verbale dans la subordonnée:
1. J'ai toujours la dernière place, à moins que je n'aie la protection de quelque parent
riche. 2. S'il avait découvert les moyens, il aurait fait obtenir la position voulue. 3. En
regardant cette clarté, pour peu qu'on marchât dans la direction, il n'y avait point de
chance de faire mauvaise route. 4. Je prends ce meuble à condition que vous me donniez
ce petit bureau par-dessus le marché. 5. En admettant que son amie vînt le chercher, il
ne la suivrait pas. 6. Cela ne le gênait nullement de s'occuper du petit, pourvu qu'il eût
accès à la vaste bibliothèque du père. 7. Au cas où il aurait appris que vous êtes là, ne lui
dites pas que nous nous sommes mis d'accord sur cette question.

Références bibliographiques
• CRISTEA, T., Grammaire structurale du français contemporain (chapitre 6. La phrase
moléculaire: 6.3. La phrase conditionnelle), Bucureşti, Editura Didactică şi
Pedagogică, 1979.
• GREVISSE, M., Le bon usage. (Quatrième partie, Les propositions subordonnées:
Propositions conditionnelles), XIème édition, Louvain-la-Neuve, Duculot; 1980.
• WAGNER, R.-L., et PINCHON, J., Grammaire du français classique et
contemporain (chapitre: Syntaxe des phrases complexes, Les propositions
dépendantes circonstancielles: Les propositions dépendantes hypothétiques),
Paris, Hachette, 1962 (nouvelle édition: 1991).

311
La subordonnée circonstancielle hypothétique (conditionnelle)

En guise de ….

Conclusion sur la phrase complexe

La section consacrée à la phrase complexe s'est occupée de six types de


subordonnées circonstancielles, chacun faisant l'objet d'une unité d'apprentissage. À la fin
de ce parcours didactique, l'organisation des moyens linguistiques d'expression de la
circonstance apparaît clairement, permettant de regrouper:
– d'une part, les propositions: temporelle, causale, finale et consécutive, comme
marquant une détermination circonstancielle descriptive d'une situation, tout en
introduisant aussi, pour les trois derniers types, la perspective d'un point de vue subjectif
sur la situation décrite;
– d'autre part: les propositions concessive et hypothétique, qui construisent
essentiellement une perspective d'argumentation (subjective).
Les circonstancielles décrivent des situations si les propositions reliées dans la
phrase entretiennent une relation temporelle ou factuelle, entre une "cause" ou fait
antécédent (fait1) et un "effet" ou fait conséquent (fait2).
Les circonstancielles décrivent des perspectives imaginaires si les propositions
reliées dans la phrase entretiennent une relation argumentative, entre une prémisse ou
fait antécédent (fait1) et une conclusion ou fait conséquent (fait2).
Les unités d'apprentissage no 9, 10, 11, 12 et, partiellement, 14, présentent la
phrase fondée sur la relation temporelle ou déterminative entre l'action décrite dans la
principale et l'action décrite dans la subordonnée, tandis que les unités d'apprentissage no
13, 14 présentent la phrase fondée sur une relation purement argumentative.

Plan de traitement des subordonnées circonstancielles

Unité Relation temporelle Rapport logique


d'apprentissage fait1 fait2
PRINC. Subord. temporelle succession temporelle (ANTÉR.)
NO 9 antériorité
Subord. temporelle PRINC. succession temporelle (POST., SIM.)
postériorité, simultanéité
NO 10 Subord. cause PRINC. détermination causale
O
N 11 PRINC. Subord. but effet voulu, finalité
O
N 12 PRINC. Subord. consécutive conséquence naturelle
O
N 14 Subord. conditionnelle PRINC. supposition conditionnelle
Relation argumentative
NO 13 fait1  fait2 concession
Subord. oppositive /PRINC.
(opposition ou «cause inefficace»)
fait1  fait2 hypothèse
NO 14 Subord. hypothétique /PRINC.
(implication ou «cause virtuelle»)



312
Bibliographie

BIBLIOGRAPHIE SÉLECTIVE

Bibliographie sommaire
CHEVALIER, J.-Cl., BLANCHE-BENVENISTE, C., ARRIVÉ, M.,
PEYTARD, J., Grammaire du français contemporain, Paris,
Larousse, 1969.

CRISTEA, T., Grammaire structurale du français contemporain,


Bucureşti, Editura Didactică şi Pedagogică, 1979.

GREVISSE, M., Précis de grammaire française, Paris, Duculot,


Gembloux et Geuthner, 1975.

GREVISSE, M., Le bon usage. XIème édition, Louvain-la-Neuve,


Duculot; ou: GREVISSE, M. – GOOSSE, A. (éd.), 1990 (et éditions
suivantes), Le bon usage. Grammaire française, Louvain-la-Neuve,
Duculot, 1980.

MAINGUENEAU, D., Syntaxe du français (éd. revue), Paris,


Hachette supérieur, 1999.

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français, Paris, Presses Universitaires de France, 1994.

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édition, Bucureşti, Editura Gramar, 2003.

Bibliographie supplémentaire
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C.A.P.E.S./ Agrégation, Lettres, Questions de grammaire pour les


concours, Paris, Ellipses, 2001.

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CRISTEA, T., CUNIŢĂ, Verbul – Le Verbe, Bucureşti, Editura


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CRISTEA, T., A. CUNIŢĂ, Morphosyntaxe du français contemporain.


Les catégories grammaticales, T.U.B., 1973.

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Bibliographie

DELAVEAU, A., KERLEROUX, F., Problèmes et exercices de


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GARY-PRIEUR, M.-N., De la grammaire à la linguistique – l'étude de


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LE BIDOIS, G. et R., Syntaxe du français moderne, II, Paris, Picard,


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LE GOFFIC, P., Grammaire de la phrase française, Paris, Hachette,


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LEEMAN, D., La phrase complexe, Bruxelles, De Boeck.Duculot,


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MAINGUENEAU, Précis de Grammaire pour les Concours, nouvelle


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MAUGER, G., Grammaire pratique du français d'aujourd'hui – langue


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MURĂREŢ, I., Syntaxe – La phrase complexe, Bucarest, Editions de


la Fondation La Roumanie de Demain, 1999.

VIŞAN, V., Norme et usage dans l'enseignement du français,


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WAGNER, R.-L., et PINCHON, J., Grammaire du français classique


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WILMET, M., Grammaire critique du français, Louvain-la-Neuve,


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314
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