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Dans ses Réflexions sur le corps, P. Valéry pose l’existence d’une pluralité de
corps en nous. Ainsi, si le corps est dans une première acception le corps vécu qui
« nous appartient un peu moins que nous lui appartenons » mais aussi l’image, la
forme qu’autrui peut voir, il est encore ce qui est sans unité en dehors de notre
pensée; tel est le sens de la formule: « Quand l’âme est absente, les parties du
corps ne se reconnaissent plus comme parties du même » (Tel Quel, « Moralités »,
T.II, Pléiade, p. 525). En d‘autres termes, les éléments constitutifs de ce « troisième
corps » (ou corps intérieur) dépourvu d’âme ne pourraient s’identifier au même tout
du corps.
La forme de déréliction des parties face à l’absence du principe centralisateur
qu’est, selon Valéry, l’âme, met en avant l’équivocité problématique de l’union de
l’âme et du corps comme garantie de l’identité du corps. En quoi l’âme constitue-t-
elle le principe d’unification du corps? Ne peut-on pas penser le corps organique
compris comme la synthèse d’un multiple sans la conscience coordinatrice?
Comment penser l’individualité de cet « habit d’Arlequin » qu’est, selon G Deleuze,
le corps (Logique du sens, 1969) ?
Notre réflexion sur le rapport des parties au tout dans la camera obscura du
corps visera tout d’abord à mettre en évidence la présence de l’âme comme
condition sine qua non de l’individualité du corps. Une seconde approche de la
question nuancera le propos de Valéry en montrant le rapport identitaire des parties
au tout dans le corps vivant comprises comme organisme autonome et
métaphorique. Il faudra enfin considérer la remise en cause du dualisme cartésien à
travers la possibilité d’une union immédiate de l’étendue et de la pensée et la
reconnaissance du corps dans l’âme et de l’âme dans le corps comme garantie de la
dignité du corps.