Vous êtes sur la page 1sur 10

COURS ECONOMIE INTERNATIONALE

DEUXIEME PARTIE : MACROECONOMIE OUVERTE ET FINANCE INTERNATIONALE


CHAPITRE 4 : LE SYSTEME MONETAIRE INTERNATIONAL
Le but de ce chapitre est d’amener l‘étudiant à comprendre les équilibres internes et externes et leurs
enjeux pour la politique économique en macroéconomie internationale. Il doit maîtriser les enjeux à
conduire différentes politiques économiques dans un système monétaire donné. Au terme du cours, il
doit être à même d’expliciter les mécanismes derrière chaque système monétaire, de l’étalon-or à nos
jours, et rendre compte des raisons qui ont à chaque fois permis le dépassement des systèmes
préexistants.

Introduction
On entend par système monétaire international (SMI), les différentes méthodes qui sont utilisées pour
assurer l’échange des biens, des services et des dettes entre pays ayant des monnaies (devises)
différentes. Ces méthodes ont connu une évolution dans le temps depuis le 19e siècle jusqu’à nos jours.

Pour en donner un aperçu global, dans le cadre de ce cours, nous présentons les principes de politique
économique en macroéconomie ouverte dans une première section, dans la seconde, nous retraçons
l’historique du système monétaire international de 1870 à 1973 et dans une troisième section, nous
tablons sur le système monétaire international depuis 1973.

Section I : Principes de politique économique en macroéconomie ouverte


Dans une économie fermée, les politiques monétaire, budgétaire peuvent être mobilisées pour
modifier les niveaux de production et d’emploi. Mais, dans une économie ouverte, du fait de
l’interdépendance des pays, les actions menées sur le taux de change réel ou sur la demande de biens
domestiques ont des répercussions dans les pays étrangers. Il convient alors d’observer comment sont
réalisés les objectifs de politique économique en économie ouverte.

A) Les objectifs de la politique macroéconomique en économie ouverte

En économie ouverte, les objectifs de la politique économique portent sur les équilibres interne et
externe. L’équilibre interne se rapporte au plein emploi des ressources et à la stabilité du niveau
général des prix. L’équilibre externe est atteint lorsque pour l’économie considérée, le compte courant
n’affiche ni un déficit important qui ferait en sorte que le pays soit inapte à régler sa dette, ni un
excédent excessif qui exposerait les pays étrangers au même risque. Cependant, les objectifs de
politique économique sont plus variés que la simple distinction entre équilibre interne et équilibre
externe. Précisons toutefois ces deux notions.

A.1) Equilibre interne : Le plein emploi et la stabilité du niveau général des prix

L’équilibre interne est atteint lorsque les facteurs de production sont pleinement employés et que le
niveau général des prix est stable. Le sous-emploi est porteur d’un fort taux de chômage. C’est
pourquoi il fait l’objet d’une attention particulière de la politique macroéconomique. De même, le
suremploi, qui traduit une surchauffe de l’économie, constitue aussi une situation qu’il faut éviter. Les
deux phénomènes exercent des pressions sur les prix et les salaires au sein d’une économie.

En ce qui concerne le niveau général des prix, l’inflation, tout comme la déflation, sont des situations
qui doivent être évitées dans toute économie. Elles enlèvent à la monnaie ses propriétés d’unité de
compte et de réserve de valeur, tout en augmentant l’incertitude sur les différentes opérations des

1
agents économiques. Plus spécifiquement, l’instabilité du niveau général des prix influe sur la valeur
réelle des contrats de dette et entraîne une redistribution des richesses entre les créanciers et les
débiteurs. La politique macroéconomique consiste donc à maintenir l’économie à son niveau de plein
emploi et s’assurer que la croissance de l’offre de monnaie n’est ni trop rapide, ni trop lente.

A-2) Equilibre externe : le niveau optimal du compte courant

L’équilibre externe d’un pays est assimilé à celui du compte courant. Un déficit du compte courant
n’est pas forcément néfaste, de même qu’un excédent de ce compte. En ce qui concerne le déficit, il
traduit le fait que ce pays emprunte des ressources au reste du monde, ce qui ne pose aucun problème
si les opportunités d’investissement dans ce pays sont plus intéressantes que celles offertes à
l’étranger. Les rendements seront alors suffisants pour couvrir à la fois le capital et les intérêts versés
aux autres pays. Par ailleurs, si l’épargne intérieure est investie de façon plus profitable à l’étranger,
alors l’excédent ne pose aucun problème non plus.

Ces deux processus renvoient à la notion de commerce intertemporel pour lequel il est considéré que
les pays dotés de structures de production différentes gagnent à un moment donné à se spécialiser
dans les secteurs où ils sont les plus productifs puis à commercer. De même, les pays qui offrent de
faibles opportunités d’investissement ont intérêt à diriger leur épargne vers des investissements plus
productifs à l’étranger, et réciproquement.

Cependant, le solde du compte courant qui maximise les gains des échanges intertemporels est très
difficile, voire impossible à déterminer. Ce niveau optimal peut, en outre, varier de façon imprévisible.
Aussi, les autorités cherchent à « cibler » un certain niveau de gain et à éviter les excédents et les
déficits excessifs.

B) Le triangle d’incompatibilités et le système monétaire international

En économie internationale, les décideurs politiques font toujours face à un « trilemme » : celui-ci est
incontournable dans le choix du régime monétaire qui convient le mieux pout atteindre les objectifs
internes et externes de la politique macroéconomique.

Un pays qui fixe son taux de change sans s’opposer à la libre circulation des capitaux doit abandonner
le contrôle de sa politique monétaire. Ce renoncement illustre l’impossibilité pour un pays d’atteindre
simultanément les trois objectifs suivants :

- La stabilité du taux de change ;


- Une politique monétaire orientée vers des objectifs nationaux ;
- La liberté des mouvements de capitaux internationaux.

Ces trois objectifs sont tous désirables par chaque économie, mais seuls deux peuvent être poursuivis
en même temps. Ce trilemme qui a été mis en évidence par Robert Mundell et Tommaso Padoa-
Schioppa se représente sous forme d’un triangle d’incompatibilités.

Régime de changes fixes

A B

Parfaite mobilité internationale Politique monétaire


des capitaux autonome
C

2
Un pays avec un taux de change fixe qui limite les flux financiers internationaux (la parité des taux
d’intérêt n’est plus alors nécessairement vérifiée) conserve la possibilité de modifier son taux d’intérêt
intérieur pour agir sur l’économie nationale. Il peut ainsi prévenir une surchauffe de l’économie en
augmentant les taux d’intérêt à court terme, sans provoquer pour autant une chute de ses
exportations qui résulteraient d’une appréciation de la monnaie si les capitaux circulaient sans
entraves. C’est la situation de la Chine de nos jours.

Depuis l’abandon du régime de Bretton Woods au début des années 1970, la plupart des pays
industrialisés ont adopté un système qui leur permet de combiner la liberté de mouvements
internationaux de capitaux avec des politiques monétaires orientées vers des objectifs internes, en
revanche, les importateurs et exportateurs doivent faire face à la volatilité des taux de change. Ceci
permet de comprendre la complexité des régimes de changes qui fondent différents systèmes
monétaires internationaux.

Section II : Le SMI de 1870 à 1973


Dans cette section, nous présentons les trois premières périodes du système monétaire international.
Elles portent sur le régime de l’étalon-or (1870-1914), l’entre-deux-guerres (1918-1939) et le système
de Bretton Woods (1946-1973)

A) Le régime de l’étalon-or (1870-1914)

C’est depuis l’antiquité que l’or est utilisé comme moyen d’échange, unité de compte et réserve de
valeur, mais l’étalon-or est instauré officiellement en 1819 avec la suppression par le gouvernement
britannique des restrictions de longue date sur les sorties des espèces (specie) et des lingots (bullion)
d’or. Ce régime qui repose sur les changes fixes connait son apogée entre 1870 et 1914.

A-1) Le mécanisme de flux prix-espèces

L’étalon-or possède de puissants mécanismes d’ajustement qui contribuent à l’équilibre simultané du


compte courant de tous les pays, comme le mécanisme de flux prix-espèces (price-specie flow
mechanism). Si la balance globale d’un pays est excédentaire, cela veut dire que la somme du solde
courant et du compte capital excède le déficit du compte financier hors réserves. Ce déséquilibre doit
être compensée par une entrée d’or, ce qui augmente automatiquement l’offre de monnaie
domestique et réduit celle du reste du monde. Il en résulte une pression à la hause sur les prix du pays
et à la baisse sur les prix étrangers, ce qui entraine également une appréciation réelle de la monnaie
domestique, le taux de change étant fixe. La demande des biens et services nationaux s’en trouve
réduite, tandis que la demande nationale des biens et services étrangers augmente. Ces modifications
concourent simultanément à réduire l’excédent courant national et le déficit courant du reste du
monde jusqu’à ce que les balances des paiements soient à l’équilibre. Ce processus est également
valable dans le sens inverse.

A-2) Les « règles du jeu » de l’étalon-or

Le mécanisme de flux prix-espèces est, en théorie, automatique, même si les autorités peuvent
toutefois le renforcer et contribuer à restaurer l’équilibre de la balance courante. Les règles du jeu de
l’étalon-or font référence ici aux interventions des banques centrales lorsqu’elles sont incitées à
vendre des actifs domestiques pour obtenir de l’or afin de faire face à leur obligation de conversion
des billets. Ceci exerce une pression à la hausse sur les taux d’intérêt intérieurs et attire les capitaux
étrangers. A l’inverse, les banques centrales qui accumulent des réserves en or sont incitées à les
vendre contre des actifs domestiques bien plus rémunérateurs.

3
Mais dans la réalité, ces règles sont transgressées tout au long du 19e siècle. Les banques qui
accumulent de l’or sont moins incitées à intervenir que celles qui subissent une baisse de leur stock
d’or. En pratique ce sont les pays déficitaires qui portent tout le poids du rééquilibrage des balances
de paiements. En outre, ces pays se retrouvent en concurrence pour un stock d’or limité et doivent
donc adopter des politiques monétaires parfois très restrictives. De même, certains pays procèdent à
la stérilisation des flux d’or, c’est-à-dire en vendant (en achetant) des actifs domestiques en cas
d’augmentation (de diminution) des réserves.

A-3) Equilibre externe sous le régime de l’étalon-or

Ici, la banque centrale a pour obligation de maintenir la parité officielle entre sa monnaie et l’or. Les
réserves de change sont composées d’or et les excédents ou déficits du compte courant doivent être
ajustés par des transferts d’or entre les banques centrales. L’équilibre externe pour les Etats ne se
conçoit pas en termes de niveau de compte courant, mais plutôt comme une situation dans laquelle la
banque centrale ne thésaurise, ni ne perd des réserves d’or.

A-4) Equilibre interne sous le régime de l’étalon-or

L’un des objectifs de l’étalon-or consiste à imposer des limites à la croissance de l’offre de monnaie,
afin d’assurer la stabilité du niveau général des prix. Si dans les pays soumis à ce régime, ce niveau
n’augmente pas dans les mêmes proportions entre 1870 et 1914 qu’après la 2e grande guerre, à court
terme, il varie de façon imprévisible, occasionnant une alternance de périodes d’inflation et de
déflation. L’étalon-or a donc un bilan mitigé en matière de stabilité des prix qui est lié au problème de
changement des prix relatifs de l’or et des autres biens. En outre, l’étalon-or ne contribue pas vraiment
au maintien du plein-emploi. Entre 1893 et 1913, le taux de chômage est en moyenne plus élevé aux
USA (6,7 %) qu’entre 1948 et 2010 (5,7%).

B) L’entre-deux-guerres

Durant la première grande guerre, tous les pays ont suspendu le fonctionnement de l’étalon-or et ont
financé leur effort de guerre avec la planche à billet (impression des billets). La main-d’œuvre et les
capacités de production sont réduites de façon importante à cause de la guerre. Le niveau général des
prix est partout plus élevé en 1918 qu’en 1914. Et après la guerre, de nombreux pays continuent
d’augmenter l’offre de monnaie afin de financer la reconstruction, ce qui va entraîner une inflation
galopante.

B-1) Le retour provisoire à l’or

Après la guerre, les pays tentent de revenir à l’étalon-or dont Les USA en 1919. A la conférence de
Gênes en 1922, la Grande Bretagne, la France et le Japon conviennent d’un agenda pour le retour à
l’étalon-or et la coopération entre les banques centrales. Comme la quantité d’or disponible risque ne
pas suffire à satisfaire les besoins des banques centrales en réserves internationales, les participants
mettent sur pied un système d’étalon de change-or : les petits pays peuvent ainsi détenir comme
réserves les monnaies de plusieurs grands pays dont les réserves sont toujours entièrement
constituées en or.

La Grande Bretagne revient à l’étalon-or en 1925, avec la parité d’avant-guerre. Cette fixation de parité
au niveau d’avant-guerre, alors que le niveau général des prix est en 1925 en GB plus élevé que durant
la période de l’étalon-or va contraindre le pays à mener une politique monétaire restrictive, qui a pour
effet d’élever le taux de chômage. Ceci va conduire à un affaiblissement de l’économie britannique qui
avec la grande dépression de 1929 (jeudi noir, 24 octobre 1929) va conduire le pays à abandonner
l’étalon-or en 1931.

4
B-2) Les conséquences internationales de la grande dépression de 1929

La grande dépression de 1929 est marquée par sa propagation rapide au reste du monde à partir des
Etats-Unis. L’étalon-or est non seulement l’un des éléments déclencheurs, mais aussi un facteur
important d’aggravation et de contagion de la plus grave crise économique du 20e siècle.

En 1929, la plupart des pays adhèrent au régime d’étalon-or. Tandis que les USA et la France constatent
de fortes entrées de capitaux et accumulent de l’or (en 1932, ces 2 pays possèdent 70% du stock
mondial), les autres pays n’ont d’autre choix que de vendre des actifs domestiques et d’augmenter
leur taux d’intérêt afin de conserver leurs réserves. Il en résulte une contraction monétaire mondiale
qui, conjuguée aux violentes retombées du krach d’octobre 1929 plonge le monde dans une profonde
récession.

Les faillites bancaires qui découlent du krach boursier se propagent et amplifient la spirale dépressive
mondiale. De nombreux pays abandonnent alors l’étalon-or en réaction à la crise. Face à
l’augmentation du chômage, l’objectif de stabilité de change finit par passer au second plan. Les USA
abandonnent ainsi la convertibilité-or entre 1933 et 1934 et augmentent le prix officiel de l’or de 20,67
à 35 $ l’once. En abandonnant ainsi, même provisoirement, les changes fixes, ces pays retrouvent la
liberté de mener au plan interne des politiques monétaires expansionnistes, qui limitent ou empêchent
la déflation et la récession. Ceux des pays qui s’accrochent obstinément à l’étalon-or sans dévaluer
(France, Suisse, Belgique, Pays-Bas et Pologne qui restent attachés à ce système jusqu’en 1936)
souffrent d’ailleurs plus que les autres de la crise.

Pour faire face à la crise, nombre de pays prennent des mesures visant à restreindre le commerce et
les paiements internationaux. Ces politiques protectionnistes sont motivées par la volonté de soutenir
le produit intérieur, en limitant les importations et de contrôler les sorties de capitaux. C’est une autre
façon de répondre au trilemme. Les barrières commerciales, conjuguées à la déflation dans les
économies industrialisées amènent de nombreux pays, notamment ceux d’Amérique Latine dont les
débouchés à l’export ne sont pas assurés, à répudier leur dette.

L’économie mondiale se désintègre en unités nationales autarciques et ce protectionnisme est très


coûteux et empêche une reprise économique rapide, reprise qui n’est d’ailleurs pas atteinte par une
majorité de pays en 1939, à l’orée de la 2e grande guerre.

C) Le système de Bretton Woods et le Fonds Monétaire International (FMI)

C’est en 1944, à Bretton Woods, dans le New Hampshire, aux USA, que les représentants de 44 pays
qui s’y étaient réunis, créent le FMI. Tenant compte de la situation catastrophique de l’entre-deux-
guerres, les pays alliés entendent mettre sur pied un système qui permet tout à la fois le plein emploi
et la stabilité des prix, l’équilibre externe et la libre circulation des capitaux.

Les accords de Bretton Woods portent sur un régime de changes fixes avec pour référence le dollar
américain, qui à son tour était ancré à l’or au prix de 35$ l’once.

C-1) Objectifs et fonctionnement du FMI

Le système monétaire proposé par le FMI mêle discipline et souplesse. Le principal élément de
discipline est le taux de change fixe entre les monnaies étrangères et le dollar, qui lui est lié à l’or. Deux
mécanismes sont utilisés par les accords de Bretton Woods pour favoriser une flexibilité externe. D’une
part, les pays membres du FMI constituent un pool de ressources financières en mettant en commun
leur monnaie et leur or afin de les prêter le cas échéant aux pays qui en ont besoin. D’autre part, bien
que les taux de change avec le dollar soient fixes, ils peuvent être ajustés en cas de besoin (en situation

5
de déséquilibre fondamental). Seul le dollar américain ne bénéficie pas de cette possibilité
d’ajustement. Après la 2e grande guerre, tous les pays lient leur monnaie au dollar américain. Les USA
prennent l’or comme référence et acceptent de l’échanger contre des dollars aux banques centrales
étrangères au prix de 35 $ l’once.

Avec le retour à la convertibilité des monnaies en Europe en 1958, les marchés financiers deviennent
plus intégrés, les politiques monétaires moins efficaces (sauf pour les USA), et les réserves
internationales plus volatiles. Ces changements révèlent une faiblesse fondamentale du système. Afin
d’atteindre simultanément l’équilibre interne et externe, il est nécessaire de mettre en place des
politiques de changement des dépenses et des politiques de substitution des dépenses. Mais les
secondes (variation des taux de change) peuvent donner naissance à des mouvements de capitaux
spéculatifs, qui affaiblissent les taux de change fixes. Les USA, pays émetteur de la monnaie de réserve,
se trouvent confrontés à un seul problème d’équilibre externe : le problème de confiance. Ce dernier
se pose inévitablement à mesure que les réserves de dollars détenues par les banques centrales
étrangères augmentent par rapport aux réserves d’or américaines.

Les politiques des USA à la fin des années 1960 provoquent en partie la chute du système de Bretton
Woods. Une politique budgétaire trop expansionniste entraîne une dévaluation du dollar au début des
années 1970. Les craintes liées à cette situation provoquent un flux de capitaux spéculatifs contre le
dollar, qui fait gonfler l’offre de monnaie dans les autres pays. La croissance de l’offre de monnaie
américaine alimente l’inflation interne et étrangère. Les autorités étrangères deviennent de plus en
plus réticentes à importer l’inflation américaine par le biais des taux de changes fixes. Une série de
crises internationales amène progressivement à un abandon total en mars 1973 du lien entre le dollar
et l’or et des parités fixes entre le dollar et les monnaies des pays industrialisés.

C-2) Equilibre interne et externe sous le régime de Bretton Woods

On suppose une économie (autre que les USA) qui veut restaurer ses équilibres interne et externe.
Pour cela on considère que le degré de mobilité des capitaux est suffisamment élevé, de sorte que le
taux d’intérêt et le taux de change sont liés.

a) Maintien de l’équilibre interne

Ici, on considère que le plein-emploi suffit à caractériser l’équilibre interne. La demande globale est
alors égale au niveau de plein emploi du produit intérieur 𝑌𝑓.

La demande globale adressée au produit intérieur est égale à la somme de la consommation 𝐶, de


l’investissement 𝐼, des dépenses publiques 𝐺 et du solde du compte courant 𝐶𝐶. La part de cette
demande exprimée par les seuls résidents, appelée aussi Absorption, est notée 𝐴 = 𝐶 + 𝐼 + 𝐺.
L’excédent du compte courant est une fonction décroissante du revenu net et une fonction croissante
du taux de change réel 𝐸𝑃∗ /𝑃, mais comme les importations augmentent avec la demande intérieure,
on peut donc exprimer le compte courant comme une fonction décroissante de la demande
interne.𝐶𝐶(𝐸𝑃∗ /𝑃, 𝐴). L’équilibre interne est alors atteint si :

𝑌𝑓 = 𝐴 + 𝐶𝐶(𝐸𝑃∗ /𝑃, 𝐴)
Dans ce modèle, toute politique budgétaire expansionniste (augmentation des dépenses publiques ou
diminution des impôts) stimule la demande globale et entraîne une augmentation du produit intérieur,
même si une part des dépenses sert à l’achat des biens importés. De même, une dévaluation de la
monnaie (hausse de 𝐸) rend les biens et les services moins chers que ceux de l’étranger et accroît la
demande et le produit intérieurs (La politique monétaire n’a pas d’effet sur le produit intérieur en
changes fixes).

6
Figure 1 : Equilibre interne (𝐼𝐼), équilibre externe (𝑋𝑋) et les quatre zones d’inconfort économique
Taux de Change à l’incertain, 𝐸
𝑋𝑋(𝐶𝐶 = 𝑋)
Zone 1 :
Suremploi, excédent du
compte courant trop
important

Zone 4 : Zone 2 :
Sous-emploi, excédent du
1 Suremploi, déficit du
compte courant trop compte courant trop
important important

Zone 3 :
Sous-emploi, déficit du
compte courant trop
important
𝐼𝐼(𝑌 = 𝑌𝑓 )
Demande intérieure, 𝐴

Les effets des variations de taux de change et des politiques budgétaires sur l’emploi et le compte
courant. Le long de 𝐼𝐼, le produit intérieur est à son niveau optimal 𝑌𝑓 . Le long de 𝑋𝑋, le compte
courant est au niveau souhaité.

b) Maintien de l’équilibre externe

Supposons que les autorités ont pour objectif un excédent 𝑋 du compte courant. Elles doivent orienter
la demande intérieure et les taux de change de façon à satisfaire à l’équation ci-après :

𝐶𝐶(𝐸𝑃∗ /𝑃, 𝐴) = 𝑋
Etant donné 𝑃𝑒𝑡 𝑃∗ , une augmentation de 𝐸 améliore la compétitivité-prix des biens domestiques et
le compte courant. Une hausse des dépenses par les non-résidents a cependant l’effet inverse car elle
accroît la demande des biens étrangers, ce qui a un impact négatif sur le solde du compte courant. Afin
de maintenir le compte courant au niveau 𝑋 alors que 𝐸 augmente, les autorités doivent faire en sorte
d’accroître les dépenses intérieures. Sur la figure ci-dessus, la courbe 𝑋𝑋, le long de laquelle l’équilibre
externe est réalisé, est croissante. Elle montre quel niveau additionnel de dépenses intérieures est
nécessaire pour maintenir le niveau 𝑋 de l’excédent du compte courant, lorsque la monnaie est
dévaluée d’un certain taux. Puisqu’une augmentation de 𝐸 accroît les exportations nettes, le compte
courant est excédentaire par rapport à son objectif 𝑋 au-dessus de 𝑋𝑋. A l’inverse, en dessous de 𝑋𝑋,
le compte courant est déficitaire par rapport à son objectif 𝑋.

C-3) Les politiques de changement des dépenses et de substitution des dépenses

Sur la figure 1, les courbes 𝐼𝐼 et 𝑋𝑋 divisent le diagramme en 4 régions que l’on appelle « les 4 zones
d’inconfort économique ». Chacune représente les effets des différentes politiques économiques. La
zone 1 présente une situation de suremploi, avec un excédent du compte courant trop important. La
zone 2 donne un niveau d’emploi trop élevé et le déficit du compte courant excessif. La zone 3 est
caractérisée par une situation de sous-emploi avec un déficit excessif. Dans la zone 4, le niveau de
l’emploi est trop faible et l’excédent du compte courant supérieur à ce qui est souhaité. L’usage
conjoint de la politique budgétaire et de la politique de change peut permettre de placer l’économie à
l’intersection des courbes II et 𝑋𝑋 (point 1). Il s’agit du point d’équilibre à la fois interne et externe.

7
Si l’économie est au départ éloigné du point 1, des ajustements de la demande intérieure et du taux
de change sont nécessaires pour atteindre l’équilibre. Un changement de la politique budgétaire qui
modifie la demande interne est qualifié de politique de changement des dépenses, car il influe sur le
niveau de la demande globale des biens et services. L’ajustement des taux de change correspond à
une politique de substitution des dépenses, car il agit sur l’orientation de la demande, en modifiant la
répartition entre production domestique et importations.

Sous le régime de Bretton Woods, les modifications du taux de change sont exceptionnelles. La
politique budgétaire est donc l’outil principal utilisé pour atteindre les équilibres interne et externe.
Cependant, cet outil est insuffisant car il ne permet que de se déplacer horizontalement, et son
utilisation est soumis à l’approbation des parlements. En outre, les politiques budgétaires
expansionnistes à répétition conduisent à des déficits publics chroniques qui par ailleurs, nuisent à leur
efficacité.

Toutes ces faiblesses combinées au problème du déficit commercial des USA et au phénomène de
l’inflation importée vont conduire à l’abandon du système de Bretton Woods en 1973 et le passage au
changes flottants.

Section III : Le système des changes flottants


Dans cette section, nous analysons les arguments qui soutiennent les changes flottants, les phases
d’application des changes flottants depuis 1973 et ressortons une évaluation de ce système monétaire.

A) Les arguments en faveur des changes flottants

A la fin des années 1960, les faiblesses du système de Bretton Woods poussent de nombreux
économistes à revendiquer l’instauration des changes flottants. Quatre principaux arguments sont
développés pour soutenir les changes flottants :

• L’autonomie de la politique monétaire. Dans le régime des changes fixes de Bretton Woods,
seuls les USA ont la possibilité de conduire la politique monétaire. Si les banques centrales ne
sont plus contraintes d’intervenir sur le marché des changes pour défendre les parités fixes,
on peut espérer que la politique monétaire puisse de nouveau atteindre les objectifs internes
et externes. Plus aucun pays n’est obligé d’importer de l’inflation ou de la déflation. Le
mécanisme qui assure la protection contre l’inflation importée est la parité des pouvoirs
d’achat (PPA). Si tous les changements dans l’économie mondiale sont monétaires, la PPA se
vérifie à long terme : les taux de change se modifient jusqu’à compenser exactement le
différentiel d’inflation entre les pays.
• La symétrie. En changes flottants, les asymétries inhérentes au système de Bretton Woods
disparaissent et les USA cessent de définir les conditions monétaires mondiales. Dans le même
temps, les USA ont, comme les autres pays, la possibilité d’influer sur leur taux de change. Le
rôle central du dollar dans le système de Bretton Woods crée deux types d’asymétries. D’une
part, comme les banques centrales ancrent leurs monnaies au dollar et accumulent des dollars
comme réserves internationales, la Réserve fédérale américaine joue un rôle moteur dans la
détermination de l’offre mondiale de monnaie. Les autres banques centrales n’ont que peu de
latitude pour déterminer leur propre offre de monnaie. D’autre part, tous les pays, sauf les
USA, peuvent dévaluer leur monnaie par rapport au dollar s’ils se retrouvent dans des
conditions de « déséquilibre fondamental », mais le système n’offre pas aux USA la possibilité
de dévaluer le dollar par rapport aux monnaies étrangères.

8
• Les taux de change comme stabilisateurs automatiques. Même en l’absence d’une politique
monétaire active, l’ajustement rapide des taux de change aide les pays à maintenir leurs
équilibres intérieurs et extérieurs en cas de variation de la demande globale. Les longues
périodes de spéculation, qui précédaient les réalignements monétaires dans le système de
Bretton Woods ne sont pas censées se reproduire en change flottants.
• L’équilibre de la balance commerciale. En laissant au marché le soin de définir les parités, on
s’attend à ce qu’elles s’ajustent automatiquement de manière à prévenir l’émergence de
surplus ou de déficits du compte courant trop importants.

B) Les phases d’application des changes flottants depuis 1973


Entre 1973 et 1980, le régime de changes flottants fonctionne plutôt bien. Il est de toute façon peu
vraisemblable que les pays industrialisés auraient été en mesure de maintenir les changes fixes
pendant cette période de stagflation consécutive aux deux chocs pétroliers. Le dollar se déprécie
fortement après 1976, lorsque les USA adoptent des politiques macroéconomiques plus
expansionnistes que les autres pays.

Le resserrement de la politique monétaire aux USA, associé à un déficit budgétaire croissant, contribue
à une appréciation massive du dollar entre 1980 et 1985. Les autres pays développés poursuivent alors
une politique de désinflation. Le resserrement monétaire qui en résulte conduit à la récession. Malgré
une timide reprise qui ne dure que jusqu’à fin 1984, la balance courante des USA enregistre un déficit
record qui ravive les pressions politiques en faveur des restrictions commerciales. Cette orientation
protectionniste s’attenue seulement en septembre 1985 avec l’adoption des accords du Plaza, suite
auxquels les pays du G5 décident de poursuivre une action concertée et de faire baisser le dollar.

La stabilité des taux de change n’est pas considérée comme un objectif macroéconomique prioritaire
dans les années 1990 et 2000. Les Etats vivent plutôt une faible inflation, tout en essayant de soutenir
la croissance économique. A partir de 2000, les déséquilibres macroéconomiques mondiaux
augmentent dramatiquement. Parallèlement, on assiste aux USA, comme dans d’autres pays, à une
appréciation du prix de l’immobilier. La bulle immobilière des subprimes éclate en 2007, entrainant le
monde dans une grave crise financière, suivie d’une grave crise économique.

C) Interdépendance macroéconomique en changes flottants


Pour analyser les interactions entre les pays, nous considérons d’une part les pays industrialisés et
d’autre part le reste du monde. On ne peut plus imaginer que le taux d’intérêt étranger ou la demande
étrangère d’exportation est exogène. Dans une analyse à court terme, supposons que les prix
nominaux de production sont fixes.
Si on considère une expansion monétaire permanente dans le reste du monde, la monnaie s’y déprécie
et le produit intérieur augmente. Le même phénomène se produit dans le cas des pays industrialisés à
la différence que cette fois ci, le reste du monde est également affecté. Si un petit pays fait l’expérience
d’une dépréciation monétaire réelle, le pays étranger doit subir une appréciation monétaire réelle qui
rend ses produits relativement plus coûteux, ce qui induit un effet négatif sur son produit intérieur.
L’accroissement de la production du pays domestique agit cependant dans la direction opposée dans
la mesure où ce pays va dépenser une partie de son revenu supplémentaire pour importer des produits
étrangers. Il en résulte une augmentation de la demande globale adressée au pays étranger.
L’expansion monétaire du pays domestique exerce donc deux effets opposés sur la production
étrangère, le résultat net dépendant de l’effet qui l’emporte, de sorte que la production du pays
étranger peut augmenter ou baisser.

9
Dans le cas d’une expansion budgétaire permanente dans le pays domestique, elle provoque une
appréciation réelle de la monnaie et une détérioration de la balance courante qui annule tout effet
positif sur la demande globale. En effet, l’impact expansionniste du relâchement budgétaire
domestique se dissipe entièrement à l’étranger. Dans le cas d’un grand pays, la production étrangère
augmente puisque ses exportations deviennent relativement moins chères lorsque la monnaie
s’apprécie. En outre, une partie de l’accroissement des dépenses à l’étranger stimule les exportations
domestiques, de sorte que la production du pays domestique suit en fait le mouvement de la
production du pays étranger.
Ainsi, on peut tirer les conclusions importantes suivantes :
- Effet d’une expansion monétaire permanente : la production augmente, la monnaie se
déprécie et la production étrangère augmente ou diminue selon le cas ;
- Effet d’une augmentation budgétaire permanente : la production augmente, la monnaie
s’apprécie et la production étrangère augmente.

Conclusion
Si on peut tirer une leçon du fonctionnement du système monétaire international depuis la seconde
grande guerre, c’est qu’il n’existe pas de système de change qui ne requière, pour son bon
fonctionnement, la coopération économique internationale. Il est peu probable que des mesures
visant à restreindre la flexibilité des taux de change soient mises en œuvre dans un avenir proche.

10

Vous aimerez peut-être aussi