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i

DEDICACE

En prélude à ce travail de notre fi de troisième année de graduat, il nous plait


de le dédier à mes très chers parents Laurent NTUMBA ²mon père, Juliette TETE NTUMBA
ma mère, Israël et David NTUMBA mes frères.
ii

REMERCIEMENTS

Au terme de notre troisième année de graduat, il nous plait


particulièrement de témoigner notre profondeur envers tous ceux qui, de loin ou de près, ont
contribué à la réalisation de ce présent travail :

Au première rang je remercie Victor BATUBENGA et Grace NTUMBA


BATUBENGA, et sa famille ; Anthony KABONGO et sa famille ; Macaire FATAKI,
Chantal SAKOMBI FATAKI, Eunice et Obed FATAKI ; Anne SAKOMBI ; Aaron, Cléa
MAYELE et leur famille ; Laurence … ; Erick et Fanny KABEYA ; Loick et Karyn
BATUBENGA ; Alpha IFOFO ; Vincent et Aniesse KUMBI, et leurs famille ; la famille
TUDIABIOKO ; Loïck KUPA ; le couple DINZILA ; La famille BAHIGA ; la famille
MIKOBI ; la famille MUBUKE ; Steve et Grace KABAU… Georgette MUBAKE.

Au deuxième rang, il m’est strictement important de remercier ceux qui sont


devenus ma famille et m’ont encouragé de poursuivre ma quête dans cette fabuleuse faculté,
s’agissant : Jérémie MUTEBA; Jonathan-Joffre LUZINGU; TSHIBA et tous les NGOIE ;
Elvis MUNKONKOLE; Le VATICANT de ZUZA; Nathan NSOMUE; David MUNONGO;
Jule ZAGABE ; Hendrik MBALE; Keren EDGEBE ; Deborah MBUYI ; Deborah
MAKELA ; Joël MULONDA ; Jean-Pierre SHARADY ; Poupette MOMENE ; Fofo
MOMENE ; Mireille MOMENE ; Ange SIMBA ; Frank MBALA ; Bethy PANZU ; Evody
MANTONGO ; Base YANGO ; Gloriette NLOMBA ; Naomi TSHITENGE ; Ephraim
NKANGA ; Jonathan ANANI ; Parfaite BOMBEKE ; Jaellel BOLUMBE ; mon groupe
d’étude IUS DIVINUM ; Droit Pour Christ ; ketsia KIYANDA ; Charly NSIANGU ; Diane
KALASI ; Déborah MANDUNGU ; Ange SIMBA ; George LOHATA ; Samuel Jeancy
KYALA et Maddhie BOKOLOMBE ; Danny AFATA ; Bonheur TSHAMA ; Daniel
BIDUAYA ; Daniel ZEKA ; Bruno OGOBANI ; Erichine MBAYO ; Sony TETE ; Marni
KALOMBO ; Ariane SUANA ; arnaud MALEBE ; Arnaud KIBUILA ; Elie BRANDON ;
Caleb PASSE ; Celin YOGO ; Plamedie MUSENGE ; Elie MUSENGA ; Dally KAMBA ;
Divina KATANDA ; Clausette MULOMBI ; Cleophas TSHIBANGU ; J-MOS ; Glody
MUYEKE ; Margueritte KAMANGO ; Methode MULENDA ; ainsi que qu’à tout celui qui a
contribué de pret ou de loin à cette travail ;

Au dernier rang je remercie le directeur du présent travail, le professeur


LOKO OMADIKUNDJU et mon encadreur KORONGO Jean de Dieu qui en est superviseur,
iii

des personnes ayant une grande personnalité, arrosées d’éloge pour la considération dans la
contribution de la science et de la manière dont il le transmette.
iv

PRINCIPAUX SIGLES

- AUPCAP : Acte Uniforme portant organisation des Procédures Collectives


d'Apurement du Passif.
- AUPSRVE : Acte Uniforme portant organisation des Procédures Simplifiées de
Recouvrement et des Voies d'Exécution.
- AUS : Acte Uniforme portant organisation des Sûretés.
- Bull.civ : Bulletin civil.
- CA : Cour d'Appel.
- Cass.civ : Cour de cassation, chambre civile.
- Cass.com : Cour de cassation, chambre commerciale.
- CCMM : Code Communautaire de la Marine Marchande.
- CEMAC : Communauté Économique et Monétaire de l'Afrique Centrale.
- Cf. : confer.
- CPCC : Code de Procédure Civile et Commerciale (Camerounais)
- DMF : Droit Maritime Français.
- Éd. : Édition.
- Obs. : Observations.
- OHADA : Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires.
- Op.cit. : Opere citato.
- PTPI : Président du Tribunal de Première Instance.
- TPI : Tribunal de Première Instance.
- Tricom : Tribunal de commerce.
1

INTRODUCTION

Dans ce travail, nous analysons la notion sur le régime juridique


applicable au navire définit par le code de la navigation maritime 1, la convention de
Bruxelles de 19522, la convention Genève de 19993, le code communautiare de la
marine marchande CEMAC4 l’acte Uniforme portant Organisation des Procédures
Simplifiées d’Apurement du Passif et Voies d’Exécution, il est question de faire une
étude de son applicabilité en la matière en République Démocratique du Congo 5, ainsi
certaines lois étrangères le droit camerounais, français, togolais, béninois. Ainsi que
les conséquences qui en découle dans le monde des affaires.

I. Motivation

Motivé par l’importance de la notion que ce travail traite, la saisie de


navire, cette étude se veut crucial dans l’espace OHADA ainsi que dans le gala
judiciaire congolais (décision de justice, jurisprudence, principes généraux de droit).
L’étude de la saisie de navire épuise mieux la limite aussi bien le principe de la libre
entreprise ; permet au créancier maritime le droit de se faire payer par tout moyen
légal.

Etant une discipline ayant pour objet l’ordre juridique qui régi le milieu
marin et leur divers utilisation dont il est susceptible. Le droit maritime fait partie du
droit commercial et constitue une branche du droit de transport qui s’applique aux
rapports naissant entre ceux qui exploitent le navire, ceux qui en usent et plus
spécialement les contrat qui en sont l’accessoire6.

1
Ordonnance-loi n°66-98 du 14/3/1966 portant code de la navigation maritime, article 1
2
Convention internationale pour l’unification de certaines règles sur la saisie conservatoire des navires de mer
Conclue à Bruxelles, le 10 mai 1952
3
La convention internationale de Genève sur la saisie concervatoire des navires la du 12 mars 1999
4
Réglement n°03/01-UEAC-088-CM-06 portant adoption du code communautaire révisé de la marine
marchande du 3 aout 2001
5
Acte Uniforme portant Organisation des Procédures Simplifiées d’Apurement du Passif et Voies d’Exécution,
en ligne sur www.ohada.com, consulté le 10 novembre 2020.
6
J. Loko, droit maritime, note de cours 3ème graduat, UNIKIN, Kinshasa, 2017-2018.
2

II. Problématique

« SUM CUIQUE TRIBUERE », rendre à chacun sa part. Ce précepte


d’origine romaine traduit au mieux la réalité qui existe à ce jour dans nos différentes
sociétés en particulier celles qui sont marquées par une kyrielle de relations organisant
le plus souvent un déséquilibre dans lesdites relations au profit de la partie qui est dans
une certaine position de force. Pour vaincre donc l’insolvabilité doublée de mauvaise
foi en ouvre dans le cadre du traité du 17 octobre 1993, relatif à l’harmonisation du
droit des affaires en Afrique7, il s’agit de l’Organisation pour l’Harmonisation du
Droit des Affaires, qui est régie jusqu’à 9 actes uniformes parmi lesquels l’Acte
uniforme portant des Procédures Simplifiées de recouvrement et des Voies
d’Exécution qui est donc venu rendre homogène les différentes règles des Etats
parties qui existaient en matière de voies d’exécution particulièrement et régir ainsi
certaines saisies. Les saisies pour lesquelles le législateur OHADA n’a prévu aucune
règle sont nombreuses, peut-être par oublie ou en vertu d’un choix législatif. On pense
ainsi la saisie-contrefaçon, à la saisie de créances fiscales, à la saisie des aéronefs et à
la saisie de navire. Cette attitude du législateur peut faire objet de plusieurs
interprétations : soit il a insinué que ces saisies ont disparu de l’espace OHADA ; cette
interprétation prend appui sur l’article 336 de l’Acte Uniforme portant organisation
des Procédures Simplifiées de Recouvrement et voies d’Exécution qui dispose que :
« le présent Acte Uniforme abroge toutes les dispositions relatives aux matières qu’il
concerne dans les Etats parties », soit il a voulu laisser la tache aux législateur
nationaux de les légiférer ; l’article 10 du traité OHADA est à cet égard très
significatif et moins radical par rapport à l’article 336 ; cet article dispose : « les Actes
Uniformes sont directement applicables et obligatoires dans les Etats parties
nonobstant toute disposition contraire de droit interne, antérieur et postérieure ». A
contrario, aussi longtemps qu’elles ne sont pas contraires à la législation uniforme, ces
saisies subsistent dans les législations nationales. Cette position serait soutenable dans
la mesure où les biens qu’elles concernent sont devenus presque consubstantiels à la
vie des êtres humains, comme à celle de l’économie. Il aurait été impensable qu’ils
fussent exclus de toute législation, eu égard leur implication dans les relations
commerciales. Il n’est donc pas étonnant que ces saisies soient toujours
opérationnelles dans l’espace OHADA, sur base des législations qui leur étaient
7
A travers le traité du 17 octobre 1993 relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique signé à Port-
Louis : révisé le 17 octobre 2008 au Québec
3

applicables avant Uniforme portant organisation des Procédures Simplifiées de


Recouvrement et voies d’Exécution qui ont été adoptées postérieurement. On peut
néanmoins regretter que le législateur africain n’ait pas légiféré en la matière, surtout
quand on se rappelle e leur caractère international très marqué 8, et lorsque les objectifs
tels qu’assignés l’OHADA pourraient se manifester dans sa plénitude sur l’une de ces
saisies particulières qui n’ont pas été traitées par elle à savoir la saisie des navires qui
implique un gros déploiement textuel et une sécurisation juridique extraordinaire. Il ne
serait pas incongrue de penser que la saisie conservatoire des navires pourrait obéir
aux dispositions de l’Acte Uniforme portant organisation des Procédures Simplifiées
de Recouvrement et voies d’Exécution notamment dans celles sur la saisie
conservatoire des biens mobiliers, objet des articles 64 à 72 ; mais un auteur déclare
par lui-même ou par un tiers, qu’il importe cependant de tenir compte des règles de
l’immobilisation par destination ou par attache à perpétuelle demeure, et que même ne
sont concernés, les meubles spéciaux à l’instar des navires, lesquels relèvent des
législations spéciales demeures en dehors du champ d’action de la réforme 9, et cette
saisie est là tout le point névralgique conféré à cette étude qui et la nôtre et qui sera
dans la mesure du possible disséquée de fond en comble afin de ressortir les disparités
qui se dégagent en la matière10.

Déjà la saisie est une voie d’exécution forcée par laquelle un créancier
fait mettre sous mais de la justice les biens de son débiteur, en vue de le faire vendre
aux enchères publiques et se faire payer sur le prix 11. Une saisie dans une voie
d’exécution forcée, qu’elle soit, ne peut donc s’appliquer que sur un bien qu’il soit
mobilier ou immobilier, corporel ou incorporel12 ; Tandis que, la saisie conservatoire
est une procédure dont l’objet est de placer sous-main de la justice des biens du
débiteur, afin que celui-ci n’en dispose pas ou ne les fasse pas disparaitre 13. C’est ainsi
que l’objet sur lequel porter la saisie de notre cadre analytique est le navire. Cet objet
est au cœur du droit maritime et est un instrument de navigation indispensable à toute
activité en mer. Le navire est le fruit de l'ingéniosité de l'Homme, construit pour faire
8
ASSONTSA (R.), op.cit., p. 107
9
NDZUENKEU (A.), L'OHADA et la réforme des procédures civiles d'exécution en droit africain : l'exemple du
Cameroun, Juridis Périodique n° 50, Avril-Mai-Juin 2002, P.114 et ss
10
Christian Valdano KOJOUO « La saisie des navires en droit positif camerounais »,
https://www.memoireonline.com/04/15/9125/La-saisie-des-navires-en-droit-positif-camerounais.html#fnref12,
consulté le 12 mai 2021
11
Guillen R. et Vincent J, « lexique des termes juridiques », 14ème édition Dalloz 2003, p. 518
12
Guillen R. et Vincent J, idem
13
Guillen R. et Vincent,J, ibidem
4

face aux dangers de la navigation en mer et lui permettre d'entreprendre les


expéditions en mer et les transactions maritimes afin de satisfaire ses besoins Le
navire est le fruit de l'ingéniosité de l'Homme, construit pour faire face aux dangers de
la navigation en mer et lui permettre d'entreprendre les expéditions en mer et les
transactions maritimes afin de satisfaire ses besoins 14. notamment au définition par
l’Ordonnance-loi n°66-98 du 14/03/1966 portant code de la navigation maritime,
comme étant : « tout bâtiment d’au moins 25 tonneaux de jauge qui font ou sont
destinés à faire habituellement en mer le transport des personnes ou des choses, la
pèche, le remorquage, le dragage ou tout autre opération lucrative de navigation »15.
Le navire est un élément d’une valeur considérable pour le patrimoine de l’armateur
puisque l’aventure maritime nécessite un important investissement financier du fait
même de l’exposition aux dangers de la navigation en mer. Aussi, si les navires sont
des biens naturellement meubles, ils sont néanmoins soumis à un régime dérogatoire
réservé en principe aux immeubles16. Ce qui donne sa qualité juridique de bâtiment de
mer, ce n’est pas sa nature mais plutôt sa destination17.

Les navires pour ainsi dire, sont des embarcations affectées à la


circulation sur les mers et océans, à la différence des bateaux qui sont toutes
construction flottante destinée principalement à la navigation sur les eaux intérieures 18,
autrement dit, qui ne sont affectés qu’à la navigation intérieure c’est-à-dire sur les
fleuves, canaux et rivières19. Ils peuvent être aussi encombrants que les immeubles au
point que l’on n’hésite pas à parler à leur propos de bâtiments. Selon la loi : « sont
réputés bateaux aux fins de la présente loi :

1°Les bâtiments de 10 tonnes métriques de jauge brute ou plus, qui font


ou sont destinés à faire habituellement dans les eaux territoriales le transport de
personnes ou des choses, la pèche, le remorquage, les dragages ou tout autre
opération lucrative de navigation ;

2°Les bâtiments de moins de 25 tonneaux de jauge brute qui font


habituellement en mer de semblables opérations20 ».
14
Exposé sur « Le navire » par ZOGBELEMOU TOGBA HILAIRE, étudiant en 4ème année de droit privé de
l'Université générale LANSANA CONTE DE SONFONIA (U.G.L.C.) de la République de Guinée
15
Article 1 de l’ordonnance-loi n°66-98 du 14/3/1966 portant code de la navigation maritime
16
Immatriculation aux hypothèques maritimes
17
J. Loko, « note de cous de droit maritime », UNIKIN, 2018, p. 3
18
Guillen R. et Vincent, op. Cit. p. 245
19
Ordonnace-loi n°66-96 du 14 mars 1966 portant code de la navigation fluviale et lacustre, article 1, 2 et 3
20
Ordonnance-loi 66-96 du 14 mars 1966 portant code de la navigation fluviale et lacustre, article 1
5

Dans les rapport du propriétaire ou de son exploitant avec ses


créanciers, les navires représentent à la fois l’élément essentiel, sinon unique de leur
droit de gage, mais aussi un élément particulièrement fuyant de ce droit de gage, en ce
qu’il est très souvent affecté à un commerce international, l’amenant à naviguer dans
les eaux ne relevant de souveraineté d’aucun Etat ou des eaux étrangères. Le
recouvrement des créances contres les armateurs est donc difficile et incertain en
raison de la nature physique et de la fonction du navire 21. Il est donc nécessaire de
munir les créanciers de moyens d’exécuter et surtout de garantir le recouvrement de
leurs créances contre les exploitants du navire22. La saisie de navire a donc été prévue
et est une procédure spéciale pour saisir conservatoirement ou provoquer la vente
forcée d’un navire.

Des questions pullulent, les opinions doctrinales divergent et les


solutions fournies par la jurisprudence parfois contradictoire, parfois hésitantes, ne
sont pas de nature à étancher la soif de l’analyste dans la quête d’une réponse
cohérente et satisfaisante à l’évidente disparité constatée à véritable législation
applicable à telle ou telle situation juridique. De la sorte, quelle réponse devrait-on
apporter à un créancier qui se trouve dans une situation d’ambiguïté juridique ne lui
permettant pas de réaliser sous quel empire législatif, il doit agir, afin de ne pas se
confondre aux conséquences désastreuses qu’implique l’application d’une loi qui
pourrait s’avérer inappropriée au cas d’espèce ?

L’étude de la saisie des navires nous permet également de faire recours


au droit comparé, afin de mieux apprécier la réglementation interne incarnée par notre
code de navigation maritime. Notons par ailleurs que celle-ci (la saisie des navires) est
l’une des rares matières à avoir fait l’objet de plusieurs conventions internationales,
même s’il faut dire qu’une seule d’entre elles soit applicable 23 ? Dans tous les cas, ceci
montre à juste titre que la question intéresse au plus haut point les acteurs
internationaux, d’autant plus que la saisie des navires peut être un moyen pour
favoriser l’activité maritime internationale. On voit bien que le critère économique
n’est pas neutre dans la réglementation de la saisie.

21
GUINCHARD (S.) et MOUSSA (T.), Droit et pratique des voies d'exécution, Paris, Dalloz 2001-2002, p 416
22
GUINCHARD (S.) et MOUSSA (T.), idem
23
Il s'agit de la Convention internationale pour l'unification de certaines règles sur la saisie conservatoire des
navires de mer du 10 Mai 1952 adoptée à Bruxelles
6

Une telle étude pourrait aussi s’avérer importante sur un tout autre
terrain car un navire est toujours beau ; plus exactement, aucun navire ne manque
jamais d’exercer sur qui aime l’élément marin un pouvoir intense de fascination que
l’on imagine lié à la principale fonction du navire : permettre aux homme d’ouvrir les
portes du monde qui leur sont inconnues, de l’autre côté du rivage ou jusqu’aux
confins du monde ; cette fascination a sans doute incité les gens de mer à attribuer au
bâtiments de mer, selon la formule adoptée par le maritime français, un caractère qui
lui est propre, une personnalité, un nom. Cependant, un navire est également une
chose, un bien meuble susceptible de faire l’objet d’une évaluation financière et qui
représente souvent une valeur économique important, voire colossale. Dès lors, la
valeur marchande du navire attire immanquablement mais à juste titre, l’intérêt pour
ne pas dire la convoitise des personnes physiques ou morales à la recherche du
désintéressement des créances dont elles peuvent être titulaires. Gage de recouvrement
des créances, la valeur économique d’un navire est par ailleurs un gage d’autonomie
dudit navire lancé dans périple, sa traversée, dans son aventure maritime. En effet, la
valeur d’un navire détermine le crédit que peuvent lui accorder les éventuels
avitailleurs ou prestataires de services, dont l’intervention permettra au navire
d’arriver au terme de l’expédition maritime. Quan il quitte son port d’attache, le navire
fait route vers des ports dans lesquels il fera escale et à proximité desquels demeurent
les personnes qui ont pu permettre l’accomplissement de son précédent voyage. Dès
lors qu’ils ne sont pas désintéressés de leurs créances, les créances auprès d’armateur
ou affréteurs situées à l’étranger et dont la solvabilité et même l’identité peuvent être
inconnues. La pratique maritime a donc imagé très tôt des solutions afin de permettre
aux créanciers du navire d’exercer leurs droits ou de se faire attribuer un gage sur le
navire. Tendant à conférer aux germanique et anglo-saxonne, la théorie du patrimoine
d’affectation est ignorée du droit français. La notion même de patrimoine d’affectation
ne peut qu’être qualifiée d’aberration juridique au regard du droit français qui ne
reconnait au patrimoine qu’un caractère personnel24, unique25 et indivisible26. Or,
l’analyse des origines d’institutions fondamentales du droit maritime telles que la
limitation de responsabilité du propriétaire de navire et celle du transporteur maritime
révèle qu’à maints égard, le navire constitue un patrimoine exploitant du navire ne
saurait assumer seul l’ensemble des risque induits par l’aventure maritime qui doivent
24
Seule une personne peut détenir un patrimoine
25
On ne peut détenir qu'un seul patrimoine
26
On ne peut scinder son patrimoine au gré des affectations des éléments qui le composent
7

dès lors être partagés par tous ceux qui trouvent un intérêt à l’accomplissement du
voyage. A l’origine, le risque que subissait l’armateur était limité au navire ;
l’armateur pouvait perdre son navire ou sa valeur au gré des aléas rencontrés lors de
l’expédition maritime. Si face à l’augmentation de la valeurs des navires, la pérennité
du transport maritime a exigé d’abandonner un système de limitation à hauteur de la
valeur du navire, la limitation de la responsabilité de l’armateur fait encore
aujourd’hui référence à la jauge du navire, de même que la limitation de la
responsabilité du transporteur maritime puisqu’elle est calculée selon le poids des
marchandises chargées à bord ou selon le nombre de colis embarquées. Les marchands
et autres négociants acceptaient quant à eux de perdre le solde de leurs créances
puisqu’ils s’interdisaient d’en poursuivre le règlement sur les autres biens composant
le patrimoine de l’armateur27. Ainsi, comme nous aurons à le voir par la suite, la
convention de Bruxelles de 10 mai 1952, pour l’unification de certaines règles sur la
saisie conservatoire des navires de mer et le code communautaire de la marine
marchande dans ses disposition sur la saisie de navires, permettent donc de saisir un
navire à titre conservatoire afin d’obtenir la garantie d’une créance maritime se
rapportant au navire. La convention confère ainsi une action contre le navire, une
action in rem, institution fondamental du droit anglo-saxon. Or, de même qu’il ignore
la théorie du patrimoine d’affectation, le droit français ne permet pas d’exercer un
quelconque droit contre une chose mais seulement contre les une personne (action in
personam). C’est ainsi que des disparités naitront lorsque la nécessité sera pour nous
d’examiner les conditions d’ouverture de la saisie des navires qui revêt un intérêt tout
à fait particulier par rapport au droit interne des saisies des biens meubles corporels
dont aurait pu faire partie la saisie des navires.

Loin d’avoir la prétention de fournir à notre lecteur une solution


définitive, péremptoire, la présente étude s’efforcera d’examiner les Principles
questions nées de la particularité du droit de la saisie des navires, avant de dresser
l’état des réponses supra-légales, recherche législatives, jurisprudentielles et
doctrinales sur ces questions. Ce qui ne voulait pas la signifier que le fondement
méthodologique de notre recherche sera basé autour de deux axes principaux qui
intègrent d’une part l’exégèse fondée sur l’étude des textes juridiques y afférents et
27
Mémoire MOULET (J.), La saisie conservatoire du navire suite à son adjudication, citer par Christian Valdano
KOJOUO « La saisie des navires en droit positif camerounais »,
https://www.memoireonline.com/04/15/9125/La-saisie-des-navires-en-droit-positif-camerounais.html#fnref12,
consulté le 12 mai 202
8

d’autre part, la méthode comparative qui intègre la particularité de la saisie de navires


par rapport aux saisies de droit commun tout en faisant des adaptations.

Dans une perspective économique et juridique que nous prêtons une


attention aigue en vue de soulever dans le chef du lecteur une extase adaptée à la
réalité et adhérente dans le temps et dans l’espace.

III. Objet et intérêt de l’étude

Cette branche du droit présente un intérêt double : l’intérêt intellectuel


(a) et l’intérêt pratique (b).

a. Intérêt intellectuel.

Notre étude se veut un instrument de référence pour les acteurs du droit,


notamment les juristes, les hommes d’affaires, les chercheurs en droit communautaire
appelés à se nourrir des réalités nouvelles de ces normes qui constituent plus un
ajustement et restructuration pour mener à bien l’attractivité que présente l’application
de ce droit des affaires dans le territoire national de la République Démocratique du
Congo et des Etats parties à la galaxie OHADA, ainsi que la marine marchande.

En effet, en s’introduisant dans un domaine dont le caractère universel


n’est plus à démontrer. Comme l’a écrit PAEDESSUS, ce droit immuable au milieu
des bouleversements de sociétés, nous est parvenu après trente siècles tels qu’on le vit
au premier jour où la navigation établi des relations entre les peuples28.

En outre, ce travail contribue à la vulgarisation de la lecture sur la


possibilité de la saisie de navire en recourant au droit OHADA, plus précisément son
acte uniforme portant Organisation des Procédures Simplifiées d’Apurement du passif
et Voies d’Exécution modifié en 2010. Le souci est que les effets du droit OHADA en

28
PARADESSUS in « in collection des lois maritime antérieures au 18ème siècle », paris, 1828-1835
9

ce qui est la participation d’un nouvel acteur économique se fassent plus présents en
son application, qu’être spéculative.

b. Intérêt pratique.

Ce cadre juridique de l’exercice de son droit de faire saisir la navire par


la justice, de la vulgarisation de la pratique juridique dans le secteur maritime par la
personne physique ou moral après l’adhésion de la RDC au traité portant
Harmonisation en Afrique du droit des affaires.

Ainsi sur le plan pratique, le saisissant, l’affréteur et l’armateur comme


les pratiquant du droit trouvent leur compte ici. Les uns sont sensibilisés par les textes
sur les droits et devoirs auxquels leur métier, mieux leur profession est soumise ;
tandis que les autres sur le texte qui désormais doit être en application en lieu (l’acte
uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies
d’exécution).

L’objet de ce travail, au regard de la contribution pratique qu’il apporte


n’est plus démontrable. En effet, la saisie de navire par le créancier maritime a besoin
d’être vu dans législation communautaire, objet de ce travail.

IV. Hypothèse

La législation sur l’entreprenant existe en RDC depuis 2012, année


d’adhésion de notre pays au traité de l’OHADA. Hélas, son effectivité est encore
appréciable en RDC du fait de manque soit de volonté dans le chef des autorités soit
encore l’ignorance de gens auxquelles elle profite ainsi suggérons en termes de
solution anticipé ce qui suit :

- Campagne de vulgarisation de texte sur l’entreprenant en RDC ;


- L’allocation des agents commis au contrôle de l’effectivité de la loi un salaire
humain ;

V. Méthodes et techniques du travail.

a. Méthodes
10

Notre travail nécessite des méthodes de recherche, en effet, une


méthode est l’ensemble des opérations et instruments par lesquels une discipline
cherche à atteindre les vérités qu’elle poursuit ; les démontre ou les affirme29.
Cependant, une méthode ne peut être fixée une fois pour toute par le
chercheur, quand bien même la précision du début de sa recherche serait nécessaire, la
méthode évolue au cours de son application qui tend à s’adapter à la théorie à mesure
que celle-ci se dégage des faits30. C’est ainsi que pour comprendre le présent travail les
méthodes juridiques ou exégétique, historiques et sociologiques nous permettront
d’élaborer la présente étude. Par définition, la méthode exégétique ou juridique
consiste à interpréter les textes en se demandant qu’est a été la volonté du législateur.
En d’autres termes, c’est une méthode qui repose sur le culte des lois, attachement au
texte des lois31.

La seconde méthode c'est-à-dire la méthode historique permet de saisir


la réalité des dispositions légales en saisissant les textes de loi dans ses sources
historiques32.

Cette méthode vise à éclairer les lois par l’histoire et l’histoire par les
lois. En effet, « pour comprendre une règle de droit, il est nécessaire de savoir
comment elle est née »33.

La troisième méthode c'est-à-dire la méthode sociologique consiste à


une descente sur le terrain afin de se rendre à l’évidence de la matière centre d’intérêt,
grâce à cette méthode, l’auteur sera à mesure de confronter les faits au droit. Une
méthode pour traiter l’application concrète, doit s’appuyer sur un certain nombre des
procédés qui ne sont autres que les techniques de recherche.

b. Technique

Par technique de recherche, il faut entendre, tout moyen qui permet au


chercheur d’acquérir et de traiter les données dont il a besoin afin de comprendre et
expliquer un phénomène ou un sujet d’étude34.

29
VERHAEGEN, Méthodologie et problématique de l’histoire immédiate, in cahier économique ; vol3, Sep
1997, p. 472
30
Idem, p173
31
MWANZO Eddy, Méthodologie Juridique, éd2, PUK, Kinshasa, 2015, p71
32
MWANZO Eddy, Cours de méthodologie juridique, juce, Kinshasa, 2017, p73
33
MAZEAUD. J et DE JUGLARD. M, Leçons de droit civil, Paris, Mont-chrétien, 1981, p35
34
MWANZO. E, Op. Cit, p75
11

Dans notre travail nous allons utiliser la technique documentaire. Cette


dernière consiste à récolter les données qui sont incarnées dans les ouvrages, les
articles ainsi que les textes juridiques.

CHAPITRE I. L’ORIGINALITE DE LA SAISIE DE NAVIRE

La saisie des navires est née de la nécessité de créer un instrument


spécifique au crédit maritime, cela à travers la procédure spécifique de recouvrement
des créances. Les législateurs communautaires de l’OHADA l’ont bien compris en
excluant du champ d’application matériel des voies d’exécution mobilières des biens
ayant pourtant une nature reconnue mobilière tels les navires 35. La spécificité d’un tel
bien découlant certainement de son caractère particulièrement mouvant et
international. C’est la raison pour laquelle la communauté internationale s’est
mobilisée et a pris en la matière un texte sur la saisie conservatoire : il s’agit de la
convention internationale pour l’unification de certaines règles sur la saisie
conservatoire des navires de mer signée le 10mai 1952 à Bruxelles, laquelle
convention étant destinée à être remplacée dans un avenir proche parla règles sur la
convention internationale de Genève sur la saisie conservatoire des navires, signée le
12 mars 1999. A côté de ces textes internationaux, la communauté CEMAC s’est elle
aussi déployée et a uniformisé le régime de la saisie des navires dans l’espace
communautaire considérée. Ces conventions internationales et ce code

35
Ordonnance-loi n°66-98 du 14 mars 1966, portant code de la navigation maritime, article 2 et 531 du décret du
30 juillet 1888
12

communautaire, décèlent les originalités de cette saisie, celle conservatoire


particulièrement, comparativement à ce qui a cours en droit commun de la saisie
conservatoire mobilière de droit commun incarné par l’Acte Uniforme portant
Procédures Simplifiées de Recouvrement et Voies d’Exécution.

Ce particularisme de la saisie conservatoire des navires découle de son


originalité qui s’observe lors de l’ouverture de ladite saisie (section I) qui est d’un
formalisme beaucoup plus poussé et contraignant par rapport à ce qu’on observe en
droit commun de la saisie des biens meubles.

Cette originalité se prolonge également dans la mise en œuvre de cette


saisie (section II) qui fait intervenir des autorités typiques et originales, propres au
droit maritime.

Section I. L’ouverture de la saisie conservatoire des navires

L’ouverture de la saisie conservatoire des biens meubles de droit


commun ne pose généralement pas de difficultés majeures surtout lorsqu’on sait que
pour qu’une telle saisie soit pratiquée, il faut juste désigner un bien mobilier
quelconque sur lequel portera la saisie dès lorsqu’il est allégué une créance paraissant
fondée dans son principe et si cette personne justifie de circonstances de nature à en
menacer la recouvrement36.

Or en droit maritime, seul le navire est susceptible d’être saisi selon les
règles qui en sont issues, ce qui est fondé l’originalité quant aux biens susceptibles de
donner lieu à la saisie des navires (§1), laquelle saisie ne pourrait être enclenchée que
pour une créance propre au domaine maritime et que l’on appelle créance maritime ;
cette créance maritime, en fonction de la législation applicable devrait paraître ou pas

36 Article 54 de l'AUPSRVE
13

forcément fondée en son principe, ce qui soulève l’originalité de la saisie


conservatoire de navires quant à la créance à garantir (§2).

§1. L’originalité quant aux biens susceptibles d’ouverture de saisie des navires

La particularité du navire par rapport à la majorité d’objet mobiliers


ordinaires, est qu’il est susceptible de détachement, car constitué d’accessoires qui,
pris individuellement, forment également une valeur patrimoniales colossale, raison
pour laquelle, il serait nécessaire de déterminer les biens qui sont inclus dans la
procédure de saisie de navires, cela à travers son assiette (A).

Tout aussi, la saisie conservatoire des navires telle qu’elle organisée par
les textes nous fait ressortir une originalité aussi remarquable due à l’étendue des
navires pouvant être saisie (B) car outre le navire fautif ou causal, l’on se rendra
compte de la possible de saisir d’autres navires dans certaines conditions bien précises.

A. La détermination de l’assiette de la saisie des navires

La saisie conservatoire des navires, naturellement a pour cadre


d’application le navire (1). L’intérêt de cette précision tient au fait que le navire est
constitué de plusieurs accessoires à régimes différents dont certains, pris isolément se
verront appliquer les règles de la saisie des navires et d’autres à la saisie des
accessoires du navire (2).

1. La détermination évidente de l’assiette de la saisie : le navire, seul bien


susceptible de saisie

Comme il a été signalé dans nos propos introductifs, le navire est une
notion très difficile à cerner ; cela est très nettement perceptible à travers l’absence de
définition concordante sur le plan international. Ceci dit, ni la convention de
Bruxelles, ni celle à venir de Genève ne donnent de définition du navire sur lequel sera
appliquée la saisie conservatoire qui forme pourtant leur objet. En l’absence d’une
telle définition, le droit interne les définit « Sont considérés comme navires pour
l’application du présent Code, tous bâtiments d’au moins 25 tonneaux de jauge, qui
font ou sont destinés à faire habituellement en mer, le transport des personnes ou des
choses, la pêche, le remorquage ou toute autre opération de navigation 37», mais aussi

37
Ordonnance-loi n°66-98 du 14 mars 1966, portant code de la navigation maritime, article 1
14

le CCMM CEMAC vient en appui. Ceci étant, le droit maritime de la CEMAC entend
par navire tout « bâtiment ou engin flottant de nature mobilière, quel que soit son
tonnage ou sa forme, avec ou sans propulsion mécanique, et qui effectue à titre
principal une navigation maritime38». Cet article, tout en définissant le navire, fixe ses
critères déterminants, et rompt avec les définitions qui prennent en compte le tonnage
du navire39. Ce qui n’est pas le cas du droit interne. Qui lui soutient le jaugeage, de sa
définition se dégage 4 élément : la capacité minimum ; navigation en mer ; nature des
opérations visées ; et opération de navigation40.

De ce qui précède, on eut considéré comme exclus notamment : les


bâtiments de plaisance41, les vaisseaux de guerre, les bâtiments de police ou de douane
ainsi que tout bâtiment d’utilité publique42, même si cette classification, face au statut
juridique du navire laisse quelque peu perplexe 43. Le navire est en réalité un meuble
particulier qui possède une individualisation comparable à celle d’une personne : « il
nait (sur la cale de construction), possède un nom, une nationalité, un domicile (son
port d’attache), des pièces d’identités (papiers de bord), une activité lucrative ou de
plaisance. Il travaille, vieillit, meurt de mort violente (perte par événement de mer) ou
lente (par dépècement).44

Toutefois, cette complémentarité entre navire et navigation maritime


peut susciter quelques interrogations : le bateau de rivière qui fera de la navigation en
mer prendra-t-il la qualité de navire ? à cette interrogation, le doyen RODIERE
objecte que dès lors que la navigation maritime n’est pas l’activité principale, mais
une activité secondaire, un tel engin ne peut être considéré comme un navire 45. Il fonde

38
Art. 2(37) CCMM
39
Tel est le cas du Petit Larousse illustré, qui considère comme navire tout «bâtiment ponté, d'assez fort tonnage,
et destiné à la navigation en pleine mer ». V. Petit Larousse illustré, 1983. Face à l'absence de définition, la Cour
de cassation française rejettera le critère de tonnage retenu par la Cour d'appel de Grenoble pour qualifier l'engin
en cause. Bien que les deux Cours s'accordent pour refuser la qualité de navire à l'engin considéré, la Cour de
cassation se fonde plutôt sur l'inadéquation de l'engin à la navigation maritime. v. Cass. Civ. 6 décembre
1976, www.plevsi.com/jurisprudence.maritime, note de Cédric GROS.
40
Sébastien LESSEDJINA « droit maritime et les éléments de droit fluvial », presse universitaire du Congo,
Kinshasa, 2003, p. 27
41
Batiment de plaisance, bateau dont l’utilisation relève du domaine du loisir et de la détente pour les particuliers
autrement dit l bateau accueillant des passagers payant pour un séjour en mer, le nombre de passagers ne dit pas
dépasser douze. Le bateau peut etre à moteur (yatch) ou à voile, linternaute.fr consulté le 21 mars 2021
42
Sébastien LESSEDJINA, op. cit., p.30
43
JAMBU-MERLIN (R.), Le navire, hybride de meuble et d'immeuble ?, Études offertes à Jacques FLOUR,
Paris, Répertoire du Notariat Défrénois, 1979, p. 305
44
LANGAVANT (E.), « Droit de la mer : les moyens de la relation maritime », Paris, Cujas, tome3, 1983, p. 10
45
RODIERE (R.), « Traité général de droit maritime, Introduction, l'armement », Paris, Dalloz, tome 1, 1976,
pp. 217 et s
15

son argumentaire sur une jurisprudence constante qui prend en considération non les
aptitudes nautiques de l’engin, mais la réalité de son affectation 46. En effet, selon le
doyen RODIERE, le navire se définit comme un engin flottant de nature mobilière,
affecté à une navigation qui l’expose habituellement aux risques de la mer. Cette
définition exclut d’emblée du champ d’application les bateaux de rivière soumis à une
réglementation spécifique. Sont exclus par ailleurs les engins flottant tels que les
plates-formes pétrolières, ponton fixes, Challans, usines ou hôtel flottants 47. L’on s’est
aussi demandé si le navire doit perdre sa qualité et échapper à son statut quand, venant
de la mer, il pénètre profondément dans les terres, ou quand celui-ci ne navigue plus
(stationné au port) ou n’est plus en état de naviguer (épave). Pour LANGAVANT, tant
que le navire conserve son aptitude à prendre la mer, c’est-à-dire à effectuer une
navigation maritime, celui-ci conserve aussi sa qualité de navire 48. De même,
l’affectation du navire à une activité quelconque n’a aucune incidence et il peut s’agir
d’un navire de commerce, de pêche, de navigation sportive, de plaisance ou de
recherche scientifique49.

On peut conclure que si tous les navires sont des bâtiments de mer, tous
les bâtiments de mer ne sont pas des navires à cause du critère d’aptitude à la
navigation maritime. Il se pose donc par la suite la problématique de l’application des
règles de la saisie conservatoire des navires à la saisie des accessoires du navire.

2. La problématique de l’application des règles de la saisie des navires à la saisie des


accessoires du navire

Les accessoires du navire sont les éléments qui se rattachent à celui-ci


et qui fondent son existence ou son importance ; ce sont généralement les agrès et

46
« La destination de bâtiment de mer ne résulte pas de la destination qu'a pu envisager à l'origine le
propriétaire ou le constructeur, ni des mesures qu'ils auraient pu prendre à ce moment ; c'est à la nature de la
navigation que sont attachés le droit de suite et les privilèges de l'article 191 ». Req. 22 juillet 1896, D. 1896. 1.
560 ; S. 1897. 1. 81, note Blondel ; - BRUZIN (A.), NECTOUX (J.), Jurisprudence française de 1807 à 1952,
Paris, éd techniques. C'est en application de ce critère que la Cour de cassation qualifie de navire, parce qu'il
effectuait une navigation en mer et n'était destiné qu'à cela, un bateau de type Zodiac malgré son très faible
tonnage (Cass. Com. 27 nov. 1972, Gipsy II, DMF, 1973, 160, note PLUREAU ; SCAPEL, 1973, 4.
47
Béatrice FAVAREL-VEIDIG, La saisie conservatoire des navires en droit français, Gazette du Palais du 28 et
29 Septembre 2005
48
LANGAVANT (E.), op.cit., p.14
49
HESSE (Ph.J.), BEURRIER (J-P), CHAUMETTE (P.), TASSEL (Y.), MESNARD (A.-H.) et REZENTHEL
(R.), « Droits maritimes, mer, navire et marins », tome 1, juridis service, 1995, p. 271.
16

apparaux50. Leur régime juridique ne soulève pratiquement pas de problème majeur


car il est lié au régime du navire sur lequel ils fondent existence. Cependant, certains
accessoires retiendront notre attention par ce qu’ayant une nature juridique douteuse
par conséquent un régime juridique incertain ; il s’agit des soutes et des créances de
fret. En vertu du principe de l’accessoire découlant de l’adage latin « accessorium
sequitur principale »51, le bien principal doit communiquer sa condition juridique au
bien qui s’agglomère à lui. C’est donc dire que la saisie des soutes et des créances de
fret en tant qu’accessoires du navire devrait vraisemblablement obéir au régime
juridique du navire auquel elles se rattachent. Cependant, la jurisprudence française
suppléant l’incurie des textes français en matière de procédures civiles d’exécution 52
peut être un appui intéressant.

En effet, le juge suprême français dans une décision du 13janvier 1998


sur la saisie conservatoire des soutes et des créances du fret du navire « Saint-
Pierre »53 a mis fin aux controverses doctrinales et aux solutions adoptées par les juges
de fond en matière de règles applicables à la saisie des soutes du navires et des
créances de fret par la suite, a adopté une solution de principe, solution qui diffère
selon qu’il s’agisse de saisie conservatoire de l’un ou de l’un ou de l’autre accessoire
du navire. Les faits et la procédure sont les suivant : un litige portant sur l’avance de
frais d’escale et une mauvaise exécution du contrat avait opposé une agence maritime
havraise (Inchcape Shipping Services) et un armateur sénégalais (la Cosénam) à leur
agent général basé à Paris (la société Multi-Services Maritime M.SM) ; d’une part
M.S.M mit un terme au courant d’agence, tandis qu’elle restait redevable de sommes
avancées par Inchcape, et d’autre part la Cosénam faisait état de sommes qui lui
auraient été également dues par un M.S.M ; Inchcape et la Cosénam ont ainsi demandé
au juge l’autorisation de saisir d’un côté le navire « Saint-Pierre » et de l’autre ses
soutes ; en outre, chacune des sociétés a fait saisir conservatoirement des frets que la
société Marfret devait recevoir pour le compte de la société M.S.M ; pour ce faire, des
50
Le Petit Larousse illustré définit les agrès comme étant : l'«ensemble de ce qui concerne la mâture d'un
navire : poulies, manœuvres, voiles, vergues, cordages, etc. ». Les apparaux quant à eux sont des « objets
formant l'équipement d'un navire ». Cf. Petit Larousse illustré, Paris 1983.
51
Cet adage signifie que l'accessoire suit le principal.
52
Il s'agit des textes suivants : la loi n°91/650 du 09 Juillet 1991 portant réforme des procédures civiles
d'exécution ; le décret n°92/755 du 31 Juillet 1992 instituant de nouvelles règles relatives aux procédures civiles
d'exécution pour l'application de la loi n°91/650 du 09 Juillet 1991 portant réforme des procédures civiles
d'exécution ; la loi n°67/5 du 03 Janvier 1967 portant statut des navires et autres bâtiments de mer ; et le décret
n°67/967 du 07 Octobre 1967 portant statut des navires et autres bâtiments de mer
53
Cass.com, Arrêt du 13 Janvier 1998 relatif à la saisie conservatoire des soutes et des créances de fret du
« Navire Saint-Pierre »
17

ordonnances en autorisation de saisie conservatoire ont été rendues par le président du


tribunal de commerce de Rouen. Dans un arrêt rendu le 24 mai 1995, la cour d’Appel
de Roue, a d’une part infirmé les ordonnances rendues à la requête des sociétés
Inchcape et Cosénam à l’encontre de M.S.M autorisant la saisie des soutes et des
créances de fret, et ce sur le fondement de la loi du 9 juillet 1991 54, comme émanant
d’une autorité judiciaire incompétente et non par le juge de l’exécution ; d’autre part,
elle a ordonné la mainlevée de la saisie conservatoire concernant le navire « saint
pierre ». Les deux créanciers forment un pourvoi en cassation en reprochant à l’arrêt
de la cour d’appel d’avoir le juge président du tribunal de commerce incompétent pour
autoriser lesdites sociétés à saisir conservatoirement pour sureté d’une créance sur la
société française M.S.M.

Le juge suprême s’est donc retrouvé en face d’un dilemme : d’une part,
il s’agissait de savoir pour la cour de cassation si les disposition du décret du décret du
27 octobre 196755 pouvaient être étendues à la saisie conservatoire des créances de
fret ; d’autre part et principalement, la cour devait connaitre du statut juridique des
soutes, et dire si la saisie conservatoire des soutes devrait obéir ou non aux mêmes
règles de compétence que la saisie conservatoire de navire déterminée par l’article 29
du décret du 27 octobre 196756, réglant ainsi un problème de compétence.

Les solutions retenues par la cour de cassation sont d’un enjeu


considérable, car réglant de façon significative et définitive un problème longtemps
tergiversé en doctrine et doté de perplexité et de complexité devant le juges de fond.
Ceci, étant, il en ressort : en ce qui concerne la saisie de la créance de fret, les
demandeurs allègue que le juge compétent pour autoriser la saisie conservatoire de
frets liés à l’exploitation du navire est le même juge compétent pour autoriser la saisie
conservatoire du navire, c’est-à-dire le président du tribunal de commerce dans le

54
Le juge de la Cour d'appel de Rouen en l'espèce, aurait souhaité l'application du décret n°92/755 du 31 Juillet
1992 instituant de nouvelles règles relatives aux procédures civiles d'exécution pour l'application de la loi
n°91/650 du 09 Juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d'exécution, faisant office de droit commun
des procédures civiles d'exécution. Ceci étant, au lieu de l'intervention du président du tribunal de commerce
comme cela a été dans le cas d'espèce, il légitime plutôt le juge de l'exécution en vertu de l'article 211 du décret
de 1992 ci-dessus cité qui dispose : « Le juge compétent pour autoriser une mesure conservatoire est le juge de
l'exécution du lieu où demeure le débiteur ».
55
Le décret français n°67/967 du 07 Octobre 1967 portant statut des navires et autres bâtiments de mer, fait
office de droit interne français de la saisie des navires, qu'il s'agisse de saisie conservatoire ou de saisie-
exécution des navires.
56
L'article 29 du décret français susdit dispose en effet : « La saisie conservatoire est autorisée par ordonnance
rendue sur requête par le président du tribunal de commerce ou, à défaut, par le juge d'instance », parlant ainsi
de la saisie conservatoire des navires.
18

ressort duquel se trouve le port de saisie. Cependant, dans un attendu de principe, la


cour réaffirme que cette procédure particulière reste soumis aux règle de droit
commun.

En effet, elle énonce que « les dispositions du décret du 27 octobre


1967 portant statut des navires, relatives à la saisie conservatoire desdits navires,
constituent des exceptions aux règles générales gouvernant les saisies mobilières et
désormais définies par la loi du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles
d’exécution ; elles ne sauraient être étendues à la saisie conservatoire des créances de
fret. En conséquence, le juge compétent en la matière est le juge de l’exécution du lieu
où demeure le débiteur, par l’application de l’article 211 du décret du 31 juillet
1992 ». La cour de cassation confirme ici que la cour d’appel a retenu.

La problématique des soutes constitue l’enjeu de l’arrêt : le juges du


fond autorisaient de plus libéralement la saisie des soutes sur le fondement des règles
du droit commun. Les soutes étaient considérées comme un bien meuble indépendant
du navire, et devenaient saisissables dans les conditions fixées en droit commun les
textes de 1991 et 1992, ce qui implique également la compétence du juge de
l’exécution pour autorisation la saisie ; telle était précisément la solution de la cour
d’appel de Rouen, qui, et depuis un arrêt du 25 avril 1986 57, se prévalait de
l’autonomie des soutes par rapport au navire, et leur saisie comme mode alternative à
la saisie des navires.

Dans son arrêt, la cour de cassation adopte une solution inverse comme
nouveau fondement et vient censurer la solution de la cour d’appel en énonçant que les
soutes d’un navire sont un élément de celui-ci et relèvent par conséquent des mêmes
règles de compétence que la saisie du navire lui-même, qu’en conséquence,
conformément à l’article 29 du décret du 27 octobre 1967, le président du tribunal de
commerce est compétent pour l’autoriser.

Dans cet attendu, la cour précise le statut juridique des soutes ;


désormais elles se rattachent au navire comme étant un élément de celui-ci. Pourtant,
cette dernière formule parait contestable en ce sens qu’elle manque de précision.
Comme le souligne Monsieur Martin NDENDE dans ses observations 58, les soutes
pourraient être rangées dans la catégories des agrès et apparaux en ce sens que même
57
CA de Rouen, 25 avril 1986, navire « ASKANIA ».
58
Droit Maritime Français 1998, p.771, Note Martin NDENDE.
19

si les soutes ne font pas matériellement partie intégrante du navire, elles sont
néanmoins utiles à sa navigabilité au sens nautique, et constituent avec lui en « unité
juridique ». La difficulté réside dans leur nature fongible et consomptible. Ainsi, il
serait inopportun de les classer dans la catégorie des agrès et apparaux. Les professeur
RODIERE et Du PONTAVICE s’opposaient au rattachement des avitaillements en
général. Les soutes sont néanmoins des « accessoires nécessaires » au bon
fonctionnement du navire constituant avec lui une « unité juridique ».

En ce qui concerne la compétence du juges habilités à se prononcer sur


la saisie conservatoire des soutes, c’est bien le président du tribunal de commerce qui
est compétent pour autoriser la saisie.

La cour de cassation ajoute, sous le visa de l’article 79 du code de


procédure civile, qu’il résulte de ce texte que lorsque la cour d’appel infirme du chef
de la compétence, si elle n’est pas juridiction d’appel relativement à la juridiction
qu’elle estime compétente, elle doit renvoyer l’affaire devant la cour qui est juridiction
d’appel relativement à la juridiction qui eut été compétent en premier instance. La
cour de cassation censure la cour d’appel en ce sens qu’elle a pris l’initiative de
trancher l’affaire au fond alors même qu’elle souligne l’incompétence des juges
consulaire rouennais, donc par-là même sa propre incompétence. En effet, au regard
de l’article 211 du décret du 31 juillet 1992, la cour d’appel de Paris aurait été
compétente.

Pour en conclure, il faut retenir tout d’abord que c’est la première fois
que la cour de cassation la compétence du tribunal de commerce dans un contentieux
relatif à la saisie des soutes ; ensuite, l’intérêt de l’arrêt est d’exclure désormais les
exigences du droit commun issues des textes de 1991-1992 portant réforme des
procédures civiles d’exécution ; enfin, la saisie conservatoire des soutes étant soumise
aux mêmes règles que celles de la saisie des navires, celles-ci ne peuvent recevoir
application que si c’est ensemble du navire qui se trouve soumis à la procédure de
saisie ; cela sous-entend que les soutes ne seront que rarement saisissable ut singuli59.

59
C'est-à-dire la saisie conservatoire des soutes du navire à titre individuel ; par opposition à la saisie ut
universi qui renvoie à la saisie conservatoire des soutes du navire concomitamment à la saisie conservatoire du
navire auquel elles renvoient.
20

Etant fixé sur les accessoires du navire pouvant être soumis à la


procédure de saisie conservatoire des navires, il faudrait se déporter sur les navires
susceptibles d’être saisis.

A. L’étendue des navires susceptibles d’être saisis

Les textes sur la saisie conservatoire des navires sont unanimes sur le
fait que ladite saisie peut être pratiquée soit sur le navire auquel se rapporte la créance
(1), soit sur tout autre navire appartenant à celui qui était au moment où est née la
créance maritime, propriétaire du navire auquel se rapporte la créance 60 (2).

1. Le navire auquel la créance se rapporte

Sur le plan interne, la saisie peut être pratiquée sur n’importe quel
navire appartenant à celui qui est, au moment où est née la créance maritime,
propriétaire du navire auquel se rapporte cette créance 61. Cette formule rejoint
également celle retenue sur le plan international. C’est ainsi que la convention
actuellement applicable sur la sphère internationale à savoir la convention de
Bruxelles du 10 mai 1995 pour l’unification de certaines règles sur la saisie
conservatoire des navires de mer62 dispose que le demandeur peut saisir tout navire
auquel la créance maritime se rapporte. Cette faculté accordée au créancier constitue
un exemple typique d’application directe de l’action in rem puisqu’elle exclut toute
référence au propriétaire du navire et élude par la même occasion la question de
l’obligation du propriétaire à la l’origine de la demande de saisie, question qui aurait
été un préalable nécessaire à la saisie du droit OHADA. Selon la convention, le navire
seul est « débiteur » de la créance maritime puisque sa naissance est liée au navire ou
à son exploitation, ce qui justifie sa saisie63.

Cet état de choses se perçoit nettement lorsqu’il convient d’examiner la


particularité de l’exploitation d’un navire c’est à dire l’affrètement. La convention de
Bruxelles du 10 mai 1952 dispose qu’en son article 3 paragraphe 1 que « tout
demandeur peut saisir (…) le navire auquel la créance se rapporte ». Dès lors, il
importe peu, lorsque la saisie est pratiquée sur le navire qui se rapporte à la créance
60
Article 114 du CCMM, article 3 de la convention de Bruxelles de 1952, article 3 de la convention de Genève
de 1999
61
Ordonnance-loi n°66-98 du 14 mars 1966, portant code de la navigation maritime, article 110 alinéa 1
62
Convention international de Bruxelles du 10 mars 1952 pour l’unification de certaines règles sur la saisie
conservatoire des navires de mer, article 3 paragraphe 1
63
MOULET (J.), op.cit., p. 17.
21

que la dette ait été contractée par une personne autre que le propriétaire en
l’occurrence l’affrètement. Ainsi, là l’effet de cette disposition, le créancier bénéficie
en principe d’un droit personnel contre le navire, qualifiée de « maritime lien »64. La
convention précise en outre en son article 3 paragraphe 4 alinéa 1 er que le créancier de
l’affréteur coque nue du navire « peut saisir ce navire »65, et l’article 3 paragraphe 4
alinéa 2 ajoute que cette règle « s’applique également à tous les cas où une personne
autre que le propriétaire est tenue d’une créance maritime ».

La position du problème est simple. L’affrètement est le mode de


transfert d’exploitation consacré du navire. Son économie est très variable selon que
l’on est en présence d’un contrat d’affrètement coque nue66 qui est un contrat de
location, d’un contrat d’affrètement à temps67 ou d’un contrat d’affrètement au
voyage68. Très souvent, le véritable exploitant du navire, ou armateur non propriétaire,
est un affréteur soit coque nue, soit à temps, l’affréteur coque nue pouvant d’ailleurs
lui-même fréter à temps ou au voyage le navire à un sous-affréteur. En sa qualité
d’exploitant, l’affréteur conclut des contrats de transport pour son compte. Pour le
chargeur, le débiteur est alors le transporteur contractuel, l’affréteur du navire.

Dans le cas d’affrètement-location, lorsque l’affréteur répond seul


d’une créance maritime relative à ce navire, le demandeur pourra saisir tout navire de

64
GUINCHARD (S.) et MOUSSA (T.), Droit et pratique des voies d'exécution, Paris, Dalloz, 2001-2002, p. 432
65
C'est-à-dire celui auquel se rapporte sa créance
66
Affrètement coque-nue : « se définit comme le contrat par lequel le fréteur met à disposition de l'affréteur un
navire sans armement, ni équipement ou avec un équipement et un armement incomplets, cela en contrepartie
d'un fret, moins important que celui demandé pour l'affrètement à temps », https://www.glossaire-
international.com/pages/tous-les-termes/affretement.html, consulté le 5 mai 2020
67
Affrètement à temps: « se définit comme le contrat par lequel le fréteur met à la disposition de l'affréteur un
navire armé, équipé et doté d'un équipage complet pour un temps défini par la charte-partie, cela en
contrepartie d'un fret », https://www.glossaire-international.com/pages/tous-les-termes/affretement.html,
consulté le 5 mai 2020
68
Affrètement au voyage : « se définit comme le contrat par lequel le fréteur s'engage, en contrepartie d'un fret,
à mettre à disposition un navire armé tout en conservant la gestion nautique et commerciale : il reçoit dans ce
cas la marchandise de l'affréteur à bord de son navire qu'il déplace d'un port maritime à un autre. Il ne faut pas
confondre l'affrètement au voyage et le contrat de transport maritime, le premier est une mise à disposition de
matériel et le second une prestation de service ; cela est différent même s'il y a des similitudes »,
https://www.glossaire-international.com/pages/tous-les-termes/affretement.html, consulté le 5 mai 2020
22

l’affréteur6970 ; la même disposition s’applique également à tous les cas où une


personne autre que le propriétaire est tenue d’une créance maritime71

S’agissant des dettes contractées par l’affréteur, la convention établit


une distinction importante ; son article 3 paragraphe 4 prévoit la possibilité de saisir
un navire donné en affrètement avec remise de la gestion nautique lorsque l’affréteur
répond seul d’une créance maritime relative à ce navire, quel soit son propriétaire.
Cette limite ne concerne que les contrats d’affrètement coque nue, dont l’économie est
celle d’un contrat de location. Cette précision est importante en ce que toutes les
créances visées à l’article 1 paragraphe 1 de cette convention à l’exception des alinéas
(e) et (f) qui concernent la gestion commerciale, se réfèrent à la gestion nautique du
navire que conserve le fréteur dans les contrats d’affrètement au voyage et à temps,
mais qu’il cède lorsqu’il frète son navire coque nue. Ainsi, lorsque la dette a été
contractée par l’affréteur coque nue, le créancier pourra saisir le navire objet de la
créance, propriétaire d’un tiers, mais dont l’affréteur supporte seul le risque de
l’exploitation. Aussi, le créancier peut saisir un autre navire appartenant à l’affréteur
coque nue, ce qui conforme aussi à la théorie du patrimoine du droit français qu’à
l’article 3 paragraphe 1 de la convention du 10 mai 1952. En revanche, le créancier ne
pourra pas saisir un autre navire appartenant au propriétaire du navire, celui-ci étant
totalement étrangère à la créance.

L’article 3 paragraphe 4 de ladite convention dispose en outre que la


règle selon laquelle le demandeur peut saisir le frété coque nue pour une dette de
l’affréteur relative à « ce navire », « s’applique également à tous les cas où une
personne autre que le propriétaire est tenue d’une créance maritime ». Cette
disposition concerne principalement les autres modes de transfert d’exploitation du
navire, notamment les autres formes d’affrètement. La saisie du navire affrété pour
une dette de l’affréteur à temps ou de l’affréteur au voyage est donc possible 72, mais à
la condition que la créance soit maritime et relative au navire saisi.
69
Ordonnance-loi n°66-98 du 14 mars 1966, portant code de la navigation maritime, article 111 alinéa 1
70
Convention international de Bruxelles du 10 mars 1952 pour l’unification de certaines règles sur la saisie
conservatoire des navires de mer, l’article 3. 4° « Dans le cas d’un affrètement d’un navire avec remise de la
gestion nautique, lorsque l’affréteur répond seul, d’une créance maritime relative à ce navire, le demandeur
peut saisir ce navire ou tel autre appartenant à l’affréteur, en observant les dispositions de la présente
convention mais nul autre navire appartenant au propriétaire ne peut être saisi en vertu de cette créance
maritime »
71
Ordonnance-loi n°66-98 du 14 mars 1966, portant code de la navigation maritime, article 111 alinéa 2
72
VIALARD (A.), La saisie conservatoire du navire pour dettes de l'affréteur à temps. À propos d'un arrêt de la
cour d'appel de Pau du 6 décembre 1984, DMF 1985, p 579 et suivant
23

L’article 3 paragraphe 1 précise par ailleurs que seul peut être saisie le
navire auquel se rapportent les créances relatives à la propriété contestée du navire 73, à
la copropriété contestée d’un navire, à sa possession, son exploitation, ou les droits
aux produits d’exploitation d’un navire en copropriété 74, ainsi qu’aux hypothèques
maritimes75. A contrario, s’il allègue une autre créance maritime, le demandeur peut
saisir un navire qui n’a aucun lien avec la créance à garantir ; l’unique élément de
rattachement tient à la personne du propriétaire du navire auquel la créance se
rapporte.

Toutefois, pour les cas de contestation de propriétaire de copropriétaire


ou possession et en cas d’hypothèque, seul le navire concerné peut faire l’objet de
saisie76

2. Les autres navires appartenant au propriétaire du navire auquel la créance se


rapporte

La question qui se pose est celle de savoir si le créancier peut saisir un


navire autre que celui auquel la créance se rapport. La réponse affirmative est donnée
tant par le droit interne que par celui internationale77.

Sur le plan interne78, aussi le CCMM, en son article 114 dispose que :
« la saisie peut être (…) sur tout autre navire appartenant à celui qui était, au moment
où est née la créance maritime, propriétaire du navire auquel cette créance se
rapport ». emboitant le pas du CCMM, la convention de Bruxelles dispose que « …
tout demandeur peut saisir (…) tout autre navire appartenant à celui qui était, au
moment où est née la créance maritime, propriétaire du navire auquel cette créance se
rapport alors même que le navire saisie est prêt à faire voile 79 ». Dans l’un comme

73
Convention international de Bruxelles du 10 mars 1952 pour l’unification de certaines règles sur la saisie
conservatoire des navires de mer, article 1 paragraphe 1 (o)
74
Idem, article 1 paragraphe 1 (p)
75
Ibidem, article 1 paragraphe 1(q)
76
Ordonnance-loi n°66-98 du 14 mars 1966, portant code de la navigation maritime, article 110 alinéa 2
77
Il convient toutefois de noter qu'en droit interne français, et avec son attachement à la conception personnaliste
en la matière, découlant de la consécration de l'action in personam de la saisie conservatoire du navire, le
créancier peut sans aucun doute saisir tout autre navire du débiteur autre que celui auquel la créance se rapporte,
dès lors que la créance invoquée paraît fondée dans son principe (article 29 alinéa 2 du décret n°67-967 du 07
Octobre 1967 portant statut des navires et autre bâtiments de mer). Voir également HESSE (Ph.J.), BEURRIER
(J.-P.), CHAUMETTE (P.), TASSEL (Y.), MESNARD (A.-H.) et REZENTHEL (R.), op.cit., p.273 ; également
MOULET (J.), op.cit., p. 14
78
Ordonnance-loi n°66-98 du 14 mars 1966, portant code de la navigation maritime,article 109
79
Convention international de Bruxelles du 10 mars 1952 pour l’unification de certaines règles sur la saisie
conservatoire des navires de mer, article 3 paragraphe 1
24

dans l’autre cas, il s’agit des formules identiques qui dérogeraient en quelque sorte à la
conception de l’action in rem telle que saisie ci-dessus telle que consacrée et
rejoindrait la conception in personam ; ce qui permettrait au créancier de l’obligation
de ne plus s’attaquer uniquement au navire débiteur à travers la possibilité à lui offerte
de saisir les autres navires qui appartenaient au débiteur au moment où la créance
maritime est née. La formulation ainsi exprimée est à relativiser dans la mesure où
dans certains cas, on ne devrait saisir que le navire auquel la créance se rapport : c’est
dans cette hypothèse que la convention prévoit qu’aucun navire ne pourra être saisi
pour une créance prévue aux alinéas (o), (p) ou (q) de l’article premier à l’exception
du navire même que concerne la réclamation80.

Sur un tout autre terrain, l’existence de navires d’Etat et de sociétés


d’un seul navire donne lieu à une certaine effervescence. Dans le premier cas, la
théorie de l’émanation a voulu signifier que l’on pouvait saisir tout navire relevant du
pavillon national par ce que, a-t-on dit, les sociétés armateurs de navires d’Etat ne
possèdent pas d’autonomie patrimoine, voire même d’autonomie de gestion. La
tentative qui a connu un certain succès semble avoir fait long feu 81. Dans le second
cas, il s’est agi de lutter contrat la dispersion des patrimoines de mer résultant de la
constitution des sociétés d’un seul navire82. Il a paru injuste que ceux contrôlent la
gestion d’un ensemble de navires ne soient pas poursuivis sur l’un où l’autre de ceux-
ci sous prétexte qu’ils ont constitué des sociétés indépendantes 83. C’est ainsi qu’il a été
fait recours à la théorie des « navires apparentés » pour soutenir que ces sociétés n’en
faisaient la plupart du temps qu’une seule, afin de pouvoir saisir les navires autres que
celui auquel la créance se rapporte, lorsque c’est possible 84. Aujourd’hui, la
jurisprudence française se montre extrêmement exigeante quant à la preuve de ce qui
n’est rien d’autre que la fictivité de ces sociétés. Il ne suffit pas d’établir que les
dirigeants ou les associés sont les mêmes, ou encire que les sociétés en cause font

80
Il s'agit des cas suivants : la propriété contestée du navire, à la copropriété contestée d'un navire, à sa
possession, son exploitation, ou les droits aux produits d'exploitation d'un navire en copropriété ainsi qu'aux
hypothèques maritimes.
81
GOUILLOUD (R.), L'émanation maritime-pour sortir de la clandestinité, DMF 1992 p.451, cité par HESSE
(Ph.J.), BEURRIER (J.-P.), CHAUMETTE (P.), TASSEL (Y.), MESNARD (A.-H.) et REZENTHEL
(R.), op.cit., p.273
82
Encore dénommées single ship companies ou one ship companies
83
HESSE (Ph.J.), BEURRIER (J.-P.), CHAUMETTE (P.), TASSEL (Y.), MESNARD (A.-H.) et REZENTHEL
(R.), op. cit., p. 273
84
JULIEN (P.) et TAORMINA (G.), op.cit. P 523
25

partie du même groupe, pour démontrer cette fictivité 85. Cette jurisprudence, plus
empreinte de droit des sociétés que de droit maritime, est directement inspirée de celle
ayant cours en matière d’extension d’une procédure collective ouverte à l’encontre
d’une société, à une autre société.

Afin, de faciliter l’établissement de la fictivité d’une société, la convention de


Bruxelles a prévu en son article 3 alinéa 2 une présomption d’apparentement en
disposant que « des navires seront réputés avoir le même propriétaire, lorsque toutes
les parts de propriété appartiendront à une même ou aux mêmes personnes ». Mais ce
texte est en pratique de peu d’utilité, la Cour de cassation, faisant une application
littérale extrêmement restrictive86. Elle considère en effet, qu’il faut s’en tenir
strictement à la question de savoir qui est associé dans les sociétés en cause, sans que
l’on puisse recherche qui se trouve exactement derrière les associés apparents ce qui
conduirait à une appréciation indirecte de la propriété des navires. On ne saurait donc,
dans le but de bénéficier de la présomption de l’article 3 alinéa 2 de la convention de
rechercher qui est l’associé majoritaire de la société elle-même associée de la société
en présence. Mais cette recherche demeure utile pour établir la fictivité d’une société
sans recourir à la présomption de l’article 3.

Pour conclure avec la question des navires susceptibles d’être saisis,


une faculté bien qu’encadrée est laissée au créancier saisissant tant par le CCMM, sur
le plan interne que par la convention de Bruxelles sur le plan international. De ce fait
le créancier pourra à son choix saisir soit le navire auquel se rattache la créance
maritime, soit tout autre navire appartenant à celui qui était au moment où est née la
créance maritime, propriétaire du navire auquel se rattache cette créance. Il convient
toutefois de signaler que cette formule consacrée par ces différents textes ne pose
guère de difficultés lorsque le navire se trouve entre les mains du débiteur. Mais elle
devient d’application difficile lorsque ledit navire a quitté les mains du débiteur et se
trouve actuellement entre d’autres mains. La question sera ainsi celle de savoir si le
créancier peut saisir le navire passé en d’autres mains que celles du débiteur. Aussi
bien en droit interne, en droit CEMAC qu’en droit international et par suite de la
consécration de l’obligation in rem, nous pensons que la solution affirmative fait

85
Cass.com., 21 janvier 1997, n°94-19.585, DMF 1997, p.612, Note VIALARD, arrêt dans lequel le fait que la
société possédant le navire et celle débitrice appartiennent au même groupe, n'a pas été jugé suffisant ; cité par
JULIEN (P.) et TAORMINA (G.), op.cit. p. 523
86
Cass.com., 23 novembre 1999, Bull. civ IV, n°204, Droit Maritime Français 2000, obs. MOLFESSIS.
26

moins des difficulté87. Elle ne conduit pas à une impasse contrairement à ce que l’on
pourrait penser, par ce que s’il est vrai que celui contre lequel la saisie est poursuivie
n’est pas débiteur et ne le devient pas du fait de la saisie, la garantie donnée par le
propriétaire non débiteur du navire saisi englobera l’armateur débiteur. C’est alors en
tant que souscripteur de cette garantie donnée pour le compte de ce débiteur que celui
est propriétaire du navire sera assigné et condamné.

L’on constate en fin de compte une originalité frappante des règles de la


saisie des navires par rapport à celles de la saisie de droit commun des biens meubles
surtout lorsqu’on se rend compte qu’en principe, seul le navire fautif devrait répondre
de cette dette, ce qui a donc donné lieu à la conception de navire débiteur et à la
consécration de l’action in rem en matière de saisie conservatoire des navires. Cette
originalité ne s’arrête pas là ; elle se prolonge aussi dans les conditions d’ouverture de
ladite saisie liées à la créance à garantir.

§2. L’originalité quant à la créance susceptible d’ouverture de la saisie conservatoire des


navires

Comme il a déjà été signalé, l’ouverture d’une saisie conservatoire de


droit commun sur les biens nécessite tout simplement l’allégation d’une créance
paraissant fondée dans son principe sans que le créancier ait à justifier de circonstance
de nature à en menacer le recouvrement. La réalité est tout autre en ce qui concerne la
saisie conservatoire des navires où il existe des exigences liées à la créance à garantir
(A) et où la créance) à alléguer est soumise à un double régime d’apparence fondée en
son principe ou non en fonction de la législation applicable (B).

A. Les conditions relatives à la créance à garantir

Les deux ordres juridique (international et la communauté CEMAC)


applicables en matière de saisie conservatoire de navires sont unanimes sur le fait que
le créancier qui nécessiterait l’ouverture d’une telle saisie devrait justifier d’une
créance maritime (1) dont la liste est dressée par ces ordres au point où l’on s’interroge
sur le caractère exhaustif ou non de cette liste au regard de son insuffisance manifeste

87
Nous pensons cependant qu'en droit interne français et avec sa prise en considération de l'obligation in
personam qui voudrait que le débiteur engage ses biens, tous ses biens et rien que ses biens, le créancier ne
pourrait pas saisir le navire qui est passé en d'autres mains que celles du débiteur. Cependant, si le créancier fait
valoir une créance privilégiée, la solution inverse pourra s'imposer, et dans la limite de l'opposabilité aux tiers de
ce privilège maritime. Voir en ce sens, CA de Pau, 6 décembre 1984, navire « spartan », DMF 1985, p.589 ; voir
également, VIALARD, La saisie conservatoire du navire pour dettes de l'affréteur à temps, DMF 1985, p.579.
27

(2).cependant, pour se convaincre sur l’originalité de la saisie conservatoire des


navires quant aux conditions relatives à caractère à garantir qui doit être forcément
maritime, nous allons examiner la portée de cette exigence (3).

1. L’allégation d’une créance maritime

Au demeurant, aucune de référence juridique nationale


qu’internationale citée si dessus ne définit expicitement la créance maritme (a). L’une
des très grandes particularités liées à la saisie conservatoire du navire en droit
CEMAC et en droit international tient à la créance à alléguer pour y parvenir. C’est
ainsi que dans ces deux espaces, il faudra pour ce faire, exciter l’existence d’une
créance maritime contre le débiteur que tant les conventions internationales relatives à
la saisie conservatoire des navires, ainsi que le CCMM (b) la code de la navigation
maritime (c) mettent en évidence. Dans nos propos introductifs, il a été signalé qu’un
problème pourrait en appeler d’autre et c’est ainsi qu’en traitant le problème des
créances maritimes telles qu’énoncées par chacun de ces différents cadres juridiques,
un problème sera abordé et résolu, celui des conditions d’application de chacun de ces
textes.

a. Définition de la créance maritime selon la doctrine

Ni la loi, ni la doctrine ne définit clairment la créance maritime, mais


nous pensons la définir de notre manière en faisant référence à la loi.

Nous définirons la créance maritime comme étant le droit subjectif


d’exiger d’une personne débitrice qui serait soit armateur, soit affréteur une prestation
sous les conditions préscrites par la loi.

b. Les créances maritimes au sens des conventions internationales sur la saisie


conservatoire des navires

En droit international de la saisie conservatoire des navires, la


convention de Bruxelles du 10 mai 1952, qui est celle actuellement applicable nous
dresse une liste de créances maritime (-). Cependant, au regard des insuffisances
constatées par l’application de cette liste, la future convention de Genève du 12 mars
1999 est venue, nous semble-t-il, combler le vide de son futur prédécesseur (-).
28

 La convention de Bruxelles du 10 mai 195288

Cette convention conclue en Belgique n’envisage que l’aspect


conservatoire de la saisie des navires car elle est littéralement intitulée « conv règles
sur la saisie conservatoire des navires de mer du 10 mai 1952 » et ne traite pas pour
une raison ou pour une autre de son aspect exécutoire. C’est ainsi que dans son corpus,
elle définit la saisie uniquement dans son sens conservatoire car son article 2 alinéa 2
l’envisage comme étant : « l’immobilisation d’un navire avec l’autorisation de
l’autorité compétente pour garantie d’une créance maritime, mais ne comprend pas la
saisie d’un navire pour l’exécution d’un tiers ».

Pour que cette convention soit applicable, il faut d’abord que la saisie
soit pratiquée dans un des Etats contractants 89. Tout Etat peut y adhérer en notifiant
son adhésion au Ministère des affaires étrangères de Belgique. L’adhésion engage
l’Etat adhérent à l’expiration d’un délai de 6 mois 90. La France ayant rendu cette
Convention applicable à ses colonies (parmi lesquelles le Cameroun), territoires
d'Outre-mer entre autres, depuis le 23 avril 1958, conformément à l'article 18
paragraphe (a) de ladite Convention 91. Le Zaïre, actuelle République Démocratique du
Congo a adhéré quelques années après son indépendance92.

Si le navire en cause bat pavillon d’un Etat étranger partie à la


convention de Bruxelles, on fera application de cette convention s’il bat pavillon d’un
Etat étranger non partie à la convention de Bruxelles, on considérait auparavant que le
créancier saisissant de choix de sa part, le juge du for, pouvait faire application à son
choix, de son propre droit ou de la convention de Bruxelles 93. En France, cette solution
88
Convention international de Bruxelles du 10 mars 1952 pour l’unification de certaines règles sur la saisie
conservatoire des navires de mer
89
Les dispositions de la présente Convention sont applicables dans tout État Contractant à tout navire battant
pavillon d'un État Contractant.
90
Convention international de Bruxelles du 10 mars 1952 pour l’unification de certaines règles sur la saisie
conservatoire des navires de mer, article 15
91
Convention international de Bruxelles du 10 mars 1952 pour l’unification de certaines règles sur la saisie
conservatoire des navires de mer, article 18 paragraphe a : « Toute Haute Partie Contractante peut, au moment
de la ratification, de l'adhésion, ou à tout moment ultérieur, notifier par écrit au Gouvernement belge que la
présente Convention s'applique aux territoires ou à certains des territoires dont elle assure les relations
internationales. La Convention sera applicable auxdits territoires six mois après la date de réception de cette
notification par le Ministère des Affaires étrangères de Belgique, mais pas avant la date d'entrée en vigueur de
la présente convention à l'égard de cette Haute Partie Contractante ».
92
Adhésion de la RDC par l’ordonnance-loi n°67/174 du 6 avril 1967
93
Convention international de Bruxelles du 10 mars 1952 pour l’unification de certaines règles sur la saisie
conservatoire des navires de mer, article 8 alinéa 2 : « Un navire battant pavillon d'un État non Contractant peut
être saisi dans l'un des États Contractants, en vertu d'une des créances énumérées à l'art. 1, ou de toute autre
créance permettant la saisie d'après la loi de cet État »
29

n’a semble-t-il plus cours depuis un arrêt du 30 octobre 2000 94. Pour comprendre la
portée de cette importante décision, il convention de rappeler qu’aux termes de
l’article 8 de la convention de Bruxelles du 10 mai 1952, « chaque Etat contractant
peut refuser tout ou en partie des avantages de la présente convention à tout Etat non
contractant et à toute personne qui n’a pas, au jour de la saisie, sa résidence
habituelle ou son principal établissement dans un Etat contractant ». C’est par
l’application littérale de ce texte que la cour de cassation française considère
désormais, que la convention de Bruxelles soit applicable à la saisie conservatoire
pratiquée en France même sur un navire d’un Etat non contractant, en l’espèce « le
panama », dès lors que cette saisie est au moins pratiquée pour recouvrer une créance
maritime. Seul l’Etat et non par le juge ou le créancier peut priver un Etat non
contractant du bénéfice de tout ou partie des dispositions de la convention de
Bruxelles, dans l’exercice de son pouvoir normatif réglementaire ou législatif.

Lorsque la convention de Bruxelles est applicable, la saisie ne peut être


effectuée que pour le recouvrement d’une créance maritime, c’est-à-dire pour l’une
des créances restrictivement énumérées par cette convention 95, en son article 1. Selon
cet article, la créance maritime signifie l’allégation 96 d’un droit ou d’une créance ayant
l’une des causes suivant : dommages causés par un navire soit par abordage, soit
autrement ; pertes de vies humaines ou dommages corporels causés par un navire ou
provenant de l’exploitation d’un navire ; assistante et sauvage ; contrats relatifs à
l’utilisation ou la location d’un navire par charte-partie ou autrement ; contrats relatifs
au transport des marchandises par un navire en vertu d’une charte-partie, d’un
connaissement ou autrement ; pertes ou dommages aux marchandises et bagages
transportés par un navire ; avarie construction, réparations, équipement d’un navire ou
frais de cale ; salaires des capitaines, officiers ou hommes d’équipage ; débours du

94
Cass. Com., 30 octobre 2000, Bull. civ. IV, n° 168, DMF décembre 2000, p. 1012, obs. J.-P. Rémery, et sur
renvoi après cassation, CA Montpellier, 1ère ch., sect. AS, 1er décembre 2003, n° 01 /00384, DK Line
c /Petredec Ltd, navire « Sargasso »
95
Rappelons cependant que cette définition restrictive de la notion de créance maritime n'avait pas cours, lorsque
le juge, avant l'arrêt du 30 octobre 2000, pouvait faire application de la convention de Bruxelles ou du droit du
for à son choix, c'est-à-dire, lorsque le navire bat pavillon d’un État étranger non partie à la convention de
Bruxelles. Comme nous l'avons vu, cette solution n'aura donc désormais plus cours, que lorsque l'État, et non
plus le juge ou le créancier, aura refusé à tout État non contractant, dans le cadre de son pouvoir normatif
réglementaire ou législatif, en application de l'article 8 alinéa 3 de la convention de Bruxelles du 10 mai 1952, le
bénéfice de tout ou partie des dispositions de ladite convention. Dans ce cas, et désormais dans ce cas seulement,
il y a lieu de considérer que la saisie peut être pratiquée pour toute créance, telle que définie par le droit interne
du for, solution d'autant plus favorable au créancier saisissant que le droit interne applicable sera moins restrictif
que le droit conventionnel en matière de définition de la créance saisissable.
96
Formulation que l’ordonnance-loi du 14 mars 1966 portant code de la navigation maritime
30

capitaine et ceux effectués par les chargeurs, les affréteurs ou les agents pour le
compte de navire ou de son propriétaire ; la propriété contestée d’un navire ; la
copropriété d’un navire ou sa possession ou son exploitation, ou les droits aux produits
d’exploitation d’un navire en copropriété ; toute hypothèque maritime et tout mort-
gage.

La future convention de Genève, sur la même question apporte plus des précisions, ce qui
rendra forcément son application moins malaisée.

 La convention de Genève du 12 mars 199997

La convention du 12 mars 1999, adopter à Genève en Suisse qui a elle


aussi pour objet la saisie conservatoire des navires, était ouverte à la signature du 1 er
septembre 1999 du 10 mai 1952. Ceci ne deviendra effectif que lors de son entrée en
vigueur, laquelle entrée n’est possible que six mois après sa 10 ème ratification98. A ce
jour, n’ont ratifié la convention de Genève que cinq Etat 99. Ce teste ne modifie pas
fondamentalement le droit issu de la convention de Bruxelles ; elle ne fait qu’éclaircir
certains points.

Lorsqu’elle entrera en vigueur, la convention de Genève du 12 mars


1999 devra obligatoirement être appliquée à la saisie de tous les navires stationnés
dans l’un des Etats contractant, quel que soit son pavillon 100. Il ne serait pas abusif de
remarque que contrairement à la convention de Bruxelles qui retient comme critère
principal et décisif d’application de ce texte, la nationalité du pavillon du navire en
cause qui doit être celle d’un Etat contractant 101, celle de Genève retient le lieu de
l’appréhension du navire102. A ce principe, il n’existera que deux exceptions :
premièrement, la saisie conservatoire d’un navire stationné dans le port d’un Etat dont

97
La convention internationale de Genève sur la saisie concervatoire des navires la du 12 mars 1999
98
La convention internationale de Genève sur la saisie concervatoire des navires la du 12 mars 1999, article 12 :
« La présente Convention est ouverte à la signature des États au Siège de l'Organisation des Nations Unies, à
New York, du 1er septembre 1999 au 31 août 2000. Elle reste ensuite ouverte à l'adhésion » Article 14 : « La
présente Convention entre en vigueur six mois après la date à laquelle 10 États ont exprimé leur consentement à
être liés par elle ». v. Berlingreri, Analyse de la convention du 12 mars 1999 sur la saisie conservatoire des
navires, DMF 1999, p.403 ; CMI newsletter n°1, 1999.
99
Il s'agit de l'Estonie, la Lettonie, la Bulgarie, la Syrie et l'Espagne.
100
La convention internationale de Genève sur la saisie concervatoire des navires la du 12 mars 1999, article 8
alinéa 1 : « La présente Convention est applicable à tout navire relevant de la juridiction d'un État partie, quel
qu'il soit, et battant ou non pavillon d'un État partie »
101
convention de Bruxelles de 10 mai 1952 pour l’unification de certainses règles sur la saisie conservatoire des
navires de mer, Article 8
102
convention de Bruxelles de 10 mai 1952 pour l’unification de certainses règles sur la saisie conservatoire des
navires de mer, Article 8
31

il bat pavillon, par un créancier établi dans cet Etat, révèle du droit du for c’est-à-dire
du droit interne de ce même Etat103 ; deuxièmes, chaque Etat signataire peut préciser
lors de son adhésion à la convention, que celle-ci ne s’applique qu’aux navires battant
pavillon de l’un des Etats signataires104.

En ce qui concerne le droit substantiel de la convention de Genève, il en


résulte que tout comme sa devancière (la convention de Bruxelles), la saisie
conservatoire d’un navire ne pourra être effectuée que pour le recouvrement d’une
créance maritime au sens des disposition de ladite conventionne 105. La créance
maritime est d’ailleurs un élément de définition du créancier saisissant, la convention
de Genève disposant en son article 1 alinéa 4, que par créancier, « il faut entendre
toute personne alléguant une créance maritime ». il s’agit des créances suivantes :
pertes ou dommages causés par l’exploitation du navire ; mort ou lésion corporelles
survenant, sur terre ou sur eau, en relation directe avec l’exploitation du navire ;
opérations de sauvetage ou d’assistance ainsi que tout contrat de sauvetage ou
d’assistance, y compris, le cas échéant, une indemnité spéciale concernant des
opérations de sauvetage ou d’assistance à l’égard d’un navire qui par lui-même ou par
sa cargaison menaçait de causer des dommages à l’environnement ; dommages causés
ou risquant d’être causés par le navire au milieu, au littoral ou à des intérêts connexes ;
mesures prises pour prévenir, réduire ou éliminer ces dommages ; indemnisation de
ces dommages ; cout des mesures raisonnables de remise en état du milieu qui ont été
effectivement prises ou qui le seront ; pertes subies ou risquant d’être subies par des
tiers en rapport avec ces dommages ; et dommages, couts ou pertes de nature similaire
à ceux qui sont ci-dessus cités ; frais et dépense relatifs au relèvement, à l’enlèvement,
à la récupération , à la destruction ou à la neutralisation d’un navire couplé, échoué ou
abandonné, y compris tout ce qui se trouve ou se trouvait à bord de ce navire, et frais
et dépense relatifs à la conservation d’un navire abandonné et à l’entretient de son
103
convention de Bruxelles de 10 mai 1952 pour l’unification de certainses règles sur la saisie conservatoire des
navires de mer, aticle 8 alinéa 4 : « Aucune disposition de la présente Convention ne modifie ou ne concerne les
textes de loi en vigueur dans les États parties relativement à la saisie d'un navire dans la juridiction de l'État
dont il bat pavillon, obtenue par une personne ayant sa résidence habituelle ou son principal établissement dans
cet État, ou par toute autre personne qui a acquis une créance de ladite personne par voie de subrogation, de
cession, ou par tout autre moyen »
104
La convention internationale de Genève sur la saisie concervatoire des navires la du 12 mars 1999, article 10
alinéa 1 b : « Un État peut, au moment de la signature, de la ratification, de l'acceptation, de l'approbation ou de
l'adhésion, ou à tout moment par la suite, se réserver le droit d'exclure du champ d'application de la présente
Convention (...) les navires ne battant pas le pavillon d'un État partie ».
105
La convention internationale de Genève sur la saisie concervatoire des navires la du 12 mars 1999, article 2
alinéa 2 : « Un navire ne peut être saisi qu'en vertu d'une créance maritime, à l'exclusion de toute autre
créance ».
32

équipage ; tout contrat relatif à l’utilisation ou à la localisation du navire par


affrètement ou autrement ; tout contrat relatifs au transport de marchandises ou de
passagers par le navire, par affrètement ou autrement ; pertes ou dommages subis par
les biens, ou en relation avec ces biens (y compris les bagages) transportés par le
navire ; avarie commune ; remorquage ; pilotage ; marchandises, matériels,
approvisionnement, soutes, équipements (y compris conteneurs) fournis ou services
rendus au navire pour son exploitation, sa gestion sa conservation ou son entretien ;
constructions, reconstruction, réparation, transformation ou équipement du navire ;
droits et redevances de port, de canal, de bassin, de mouillage et d’autres voies
navigables ; gages et autres sommes dus au capitaine, aux officiers et autres membres
du personnel de bord, en vertu de leur engagement à bord du navire, y compris les
frais de rapatriement et les cotisations d’assurance sociale payables pour leur compte ;
paiements effectués pour le compte du navire ou de ses propriétaires ; primes
d’assurance (y compris cotisations d’assurance mutuelle) en relation le navire,
payables par le propriétaire du navire ou par l’affréteur e dévolution pour leur
compte ; frais d’agence ou commissions de courtage ou autres en relation avec le
navire, payables par le propriétaire du navire ou par l’affréteur en dévolution ou pour
leur compte ; tout litige quant à la propriété ou à la possession du navire ; tout litige
découlant d’un contrat de vente du navire.

Les créances maritimes telles qu’il en ressort dans le cadre de cette


convention, sans être totalement identiques à celles ci-dessus exposées dans le cadre
de la convention de Bruxelles s’en rapprochent véritablement. Cependant, certaines
créances visiblement maritimes, à l’instar des primes d’assurances 106 et des frais
d’agence ou commission de courtage en relation avec le navire 107 qui n’avaient pas
mentionnées, sont désormais admises. De même, de nouveaux types de créances
consécutives au progrès de la technologie telles que les créances du chef des
dommages à l’environnement108, ont fait leur apparition.

106
La convention internationale de Genève sur la saisie concervatoire des navires la du 12 mars 1999, article
1er paragraphe 1(q)
107
La convention internationale de Genève sur la saisie concervatoire des navires la du 12 mars 1999, article
1er paragraphe 1(r)
108
La convention internationale de Genève sur la saisie concervatoire des navires la du 12 mars 1999, article
1er paragraphe 1(d)
33

Les créances maritimes découlant de cette convention ont été pour ainsi
dire, pour la plupart reprises dans le contexte CEMAC par le CCMM qui a d’ailleurs
fait un renvoi exprès à cette convention.

 Le CCMM

A titre d’information, en Afrique centrale, le fait le plus marquant en


droit maritime, ces dernières décennies, est l’adoption du code communautaire de la
marine marchande de la CEMAC. Il s’agit d’un évènement historique, en ce que le
code régente désormais le droit maritime dans tout l’Afrique centrale et, a même
vocation à s’appliquer dans un avenir proche, au-delà de cette sphère géographique109.

Pourtant, parmi les nombreuses matières maritimes que ce code régit


plusieurs d’entre elles coexistent avec d’autres dispositifs juridiques nationaux des
Etats parties ou internationaux. Il s’agit par exemple de la saisie des navires qu’il régit
dans ses articles 114 à 133. Pour ne pas tomber en conflit avec les conventions
internationales qui régissent la question, il faudrait examiner le champ d’application
de ce code.

En comparaison avec les conventions internationales sur la saisie des


navires, il s’ensuit que le code CEMAC ne devrait s’appliquer que de façon,
résiduelle, c’est-à-dire notamment l’occasion de la saisie, par un créancier ayant sa
résidence ou son établissement principal en Afrique centrale, d’un navire battant
pavillon d’un Etat de la CEMAC et pour autant qu’il ne s’agisse pas d’un rapport de
droit international ; car même dans ce cas, la convention internationale devrait
s’appliquer dans la mesure où la quasi-totalité des Etats de la CEMAC y sont
contractant. Aussi bien, notre analyse trouve confortée par l’article 8 alinéa 4 de la
convention internationale de 1952, texte qui énonce qu’aucune de ses dispositions ne
modifie ou n’affecte la loi interne des Etats contractants en ce qui concerne la saisie
d’un navire dans le ressort de l’Etat dont il bat pavillon, par une personne ayant sa
résidence habituelle ou son principal établissement dans cet Etat. En effet,
l’application de la convention internationale suppose l’existence d’un élément
d’extranéité110.
109
NGAMKAN (G.), Saisie conservatoire de navires en Afrique centrale : l'avis de l'autorité maritime
compétente : une exigence superflue ? Juridis Périodique n° 42, Avril-Mai-Juin 2000, P.111
110
Christian V.K, « la saisie de navire en droit positif camerounais »,
https://www.memoireonline.com/04/15/9125/La-saisie-des-navires-en-droit-positif-camerounais.html#fnref87,
consulté le 20 février 2021
34

En ce qui concerne le droit substantiel du code CEMAC, la saisie


conservatoire d’un navire, dans l’un des ports de l’Afrique centrale, est possible dès
lors qu’il est justifié d’une créance maritime 111. Le CCMM donne lui aussi la liste des
créances maritimes susceptibles d’ouvrir une saisie conservatoire dans son espace,
bien qu’en faisant allusion à la convention de Genève du 12 mars 1999 sur la question.
Ces créanciers maritimes résultent des causes suivantes : dommages matériels ou
corporels, y compris perte de vies humaines sur terre ou sur mer, causés par un
navire ou provenant de son exploitation ; assistance et sauvetage, contrat relatifs à
l’affrètement ou à l’utilisation d’un navire ; contrats relatifs au transport des
marchandises par un navire ; pertes ou dommages aux marchandises et bagages
transportés par un navire ; avarie commune ; remorquage ou pilotage d’un navire ;
fournitures de produits, de matériels ou de services à un navire en vue de son
exploitation ou de son entretien ; construction, réparation, équipement d’un navire ou
frais de cale ; salaires du capitaine et de l’équipage ; débours du capitaines, des
affréteurs, des chargeurs ou des agents maritimes, effectués pour le compte du navire
ou de son propriétaire ; commissions des agents du navires ; propriétaire contestée du
navire ; droits de copropriété d’un navire ou droits à l’exploitation d’un navire, ou aux
produits d’exploitation d’un navire en copropriété ; indemnité ou autre rémunération
due au titre de toute mesure ou tentative visant à prévenir, écarter ou limiter un
dommage imputable au navire y compris un dommage de pollution en vertu ou non
d’une convention internationale, d’un texte législatif ou réglementaire, ou d’un
contrat ; frais et dépenses relatifs à l’enlèvement de l’épave du navire ou de sa
cargaison ; toutes primes d’assurances relatives au navire, tout litige découlant d’un
contrat de vente du navire112.

Le CCMM bien que faisant allusion à la convention de Genève sur


l’énumération des causes de créances maritimes pouvant donner lieu à ouverture d’une
saisie conservatoire n’en conserve pas moins une certaine autonomie, car de
l’énumération de ces causes telles qu’elles ressortent de ce code, l’on constate
l’absence de certaines causes qui figurent pourtant dans le texte de référence à savoir

111
Réglement n°03/01-UEAC-088-CM-06 portant adoption du code communautaire révisé de la marine
marchande du 3 aout 2001, article 120 alinéa 2 : « elle peut être accordée dès lors qu'il est justifié d'une créance
maritime... ».
112
Réglement n°03/01-UEAC-088-CM-06 portant adoption du code communautaire révisé de la marine
marchande du 3 aout 2001, article 119 du CCMM
35

la convention de Genève de 1999113 ; cet état de choses pose le problème du caractère


exhaustif ou non des causes des créances maritimes.

c. Ordonnance-loi n°66-98 du 14 mars 1966–code de la navigation maritime

La République démocratique du congo n’a pas encore mis à jour cette


loi, certes, mais cette dernière resoud le problème que soulève la saisie conservatoire
de navire qui traite aussi son aspect exécutoire contrairement à la convention
internationale pour l’unification des certaines règles sur la saisie conservatoire des
navires de mer. Bien que serait observé certaines conctradictions en procédure devant
les cours et tribunaux avec l’acte uniforme portant procédure simplifiée des
récouvrements et voies d’exécution.

Cette loi ne définit pas expressement la créance maritime. Mais nous


donnes directement une liste dont l’une des allégations serait considéré comme étant
créance maritime.

Que faut-il entendre par créance maritime ? la loi précise qu’il faut
entendre par cette expressions l’allégation d’un droit yant l’une des causes suivant114 :

a) dommages causés par un navire soit par abordage, soit autrement;


b) perte de vies humaines ou dommages corporels causés par un navire ou
provenant de l'exploitation d'un navire;
c) assistance et sauvetage;
d) contrats relatifs à l'utilisation ou à la location d'un navire par charte-partie ou
autrement;
e) contrat relatif au transport des marchandises en vertu d'une charte-partie, d'un
connaissement ou autrement;
f) pertes ou dommages aux marchandises et bagages transportés par un navire;
g) avaries communes;
h) remorquage;
i) pilotage;
j) fournitures, quel qu'en soit le lieu, de produits ou de matériel, faites à un navire
en vue de son exploitation ou de son entretien;

113
Un exemple patent est le cas de l'hypothèque qui figure dans le texte de référence à savoir la convention de
Genève de 1999 (et même aussi dans celle de Bruxelles de 1952) mais qui ne figure pourtant pas dans le
CCMM.
114
Une formulation faite par la convention de Bruxelles
36

k) construction, réparation, équipement d'un navire ou frais de cale;


l) salaire du capitaine, officiers ou hommes d'équipage;
m) débours du capitaine et ceux effectués par les chargeurs, les affréteurs ou les
agents pour le compte du navire ou de son propriétaire;
n) la propriété contestée d'un navire;
o) la copropriété contestée d'un navire ou sa possession, ou son exploitation, les
droits aux produits d'exploitation d'un navire en co-propriété;
p) toute hypothèque maritime.

Le code de la navigation maritime s’applique en synergie avec la


convention de Bruxelles de 1952, selon le juge du for, bien que sous réserve de la
mention faite à l’article 8 de la dite convention, qui n’impose l’application de la
convention dans les Etats partie115.

Et de même l’on constate que parmis les causes qui donneraient accès à
une quelconque saisie conservatoire sont majoritairement reprises par la loi national,
saut deux allégations116.

En comparaison à la convention de Genève qui nous plus opportune


que celle de 1952 conclue à Bruxelles, l’ajoute des faits allégants la créance maritime
dans les domaines de droit de l’environnement

2. Le caractère exhaustif ou non des créances maritimes

Au premier abord, le caractère exhaustif s’appréhende comme ce qui


épuise à fond un sujet117 ; ce qui revient à employer également le terme limitatif ; dans
le cas contraire, il est plutôt indicatif cet antagonisme s’observe lorsqu’il est aussi
question de parler de la liste des créances maritimes.

115
1. Les dispositions de la présente Convention sont applicables dans tout Etat Contractant à tout navire battant
pavillon d’un Etat Contractant. 2. Un navire battant pavillon d’un Etat non Contractant peut être saisi dans l’un
des Etats Contractants, en vertu d’une des créances énumérées à l’art. 1, ou de toute autre créance permettant la
saisie d’après la loi de cet Etat. 3. Toutefois, chaque Etat Contractant peut refuser tout ou partie des avantages
de la présente Convention à tout Etat non Contractant et à toute personne qui n’a pas, au jour de la saisie, sa
résidence habituelle ou son principal établissement dans un Etat Contractant. 4. Aucune disposition de la
présente Convention ne modifiera ou n’affectera la loi interne des Etats Contractants en ce qui concerne la saisie
d’un navire dans le ressort de l’Etat dont il bat pavillon par une personne ayant sa résidence habituelle ou son
principal établissement dans cet Etat. 5. Tout tiers, autre que le Demandeur originaire qui excipe d’une créance
maritime par l’effet d’une subrogation, d’une cession ou autrement, sera réputé, pour l’application de la présente
Convention, avoir la même résidence habituelle ou le même établissement principal que le créancier originaire.
116
Convention international de Bruxelles du 10 mars 1952 pour l’unification de certaines règles sur la saisie
conservatoire des navires de mer, article 1 (h) Prêt à la grosse et (q) tout mort-gage
117
Petit Larousse illustré, 1983
37

Il convient d’emblée de relever que le débat sur le caractère exhaustif


ou indicatif de la liste des créances maritimes est depuis longtemps une préoccupation
constante sur la scène internationale ? il oppose les partisans d’une liste ouverte à ceux
d’une liste « closer list ». tandis qu’une liste restrictive a pour inconvénient d’exclure
certaines créances ayant un caractère maritime et de méconnaitre le caractère évolutif
des activités maritimes, une liste ouverte serait à craindre ne raisons des incertitudes
qu’elle pourrait causer en laissant aux tribunaux une liberté excessive118.

Pourtant, l’énumération des causes de créances maritimes telles que


contenues dans la convention de Bruxelles de 1952 n’est pas sujet à ambiguïté quant à
son caractère exhaustif ou indicatif ; de tout temps, cette liste a été considérée comme
étant exhaustive et d’interprétation restrictive119 d’où la dénomination de « closed
list » employée dans le jargon des martiniste. Par exemple le juge camerounais s’est
quelque fois montré peu rigoureux dans l’appréciation de cette exigence120.

Pour éviter les inconvénients liés au système de la « close list » et de la


liste ouverte, un compromis devrait s’avérer nécessaires. C’est ce qu’a tenté de faire la
convention de Genève du 12 mars 1999 qui a procédé à ce qu’on a appelé une « open
list partial »121. Une liste des créances maritimes est en effet adoptées, mais celle-ci
intègre des créance nouvelles et formule toutes les créances dans les termes assez
généraux, ceci dans le respect de l’attachement à la conception de la créance maritime
comme créance résultant de l’exploitation du navire. Schématiquement, la convention
de Genève dans son élaboration122 était partagée sur le point de savoir si cette
118
KODJO GNINTEDEM (M.D.), L'efficacité des sûretés maritimes, Thèse pour l'obtention du doctorat en droit,
soutenue en 2011, université de Yaoundé II p 219
119
REMOND-GOUILLOUD, Droit maritime, Pedone 1988, p 159, n°289 cité par NGAMKAN (G.), op.cit., p
112.
120
Mme Lucy ASUAGBOR dans son étude intitulée « la saisie conservatoire des navires au regard du nouveau
Code de la marine marchande » (in Les Cahiers de l'AJMC, pp 14 et ss.) donne une liste exemplative des
créances ayant donné lieu à saisie devant les juridictions camerounaises. Parmi celles-ci, figurent les primes
impayées sur les contrats d'assurance, or il est évident que celles-ci sont exclues par le texte même de la
convention (voir trib.com. Le Havre, 4 mars 1981, navire « Aifanourias » in DMF 1981. 740, « les primes
d'assurances ne figurent pas dans l'énumération de toute évidence restrictive »). De même, dans l'ordonnance
n°2056 rendue le 6 juillet 1998 par le PTPI de Douala, navire « La Lebombi », aff. SMAC contre CNNI, la saisie
est autorisée pour l'intégralité de la créance alors que celle-ci n'est que pour partie maritime ; en effet, la créance
résultant de la location des palettes a été admise alors qu'elle ne figure pas au catalogue des créances maritimes
prévues par la convention. Il est à noter cependant que cette tendance latitudinaire n'est pas propre aux
juridictions camerounaises ; en effet, l'examen des décisions rendues par les tribunaux français révèle que ceux-
ci prennent aussi beaucoup de liberté avec les textes applicables (voir PESTEL-DEBORD (P.) et GARO (Ph.),
La saisie conservatoire de navires, Pratic Export 1994, pp 19 et s.). cf. NGAMKAN (G.), op.cit., p 112
121
BERLINGIERI (F.), Analyse de la convention du 12 mars 1999 sur la saisie conservatoire des navires, DMF
1999, p 404.
122
Dans le rapport de la conférence diplomatique de l'ONU et de l'OMI sur la saisie conservatoire des navires
tenue au palais des Nations Unies à Genève du 1er au 12 mars 1999
38

convention devrait s’inspirer de la convention de Bruxelles de 1952 et prévoir ainsi


une liste exhaustive de la créance maritimes, évitant ainsi que des créances maritimes
authentiques ne puissent donner lieu à un droit de saisie. Après de longs débats et
examens de diverses propositions, il a été adopté un compromis délicat consistant à
établir une liste exhaustive de créance donnant lieu à une droit de saisie, tout en
prévoyant une certaine flexibilité pour certaines catégories de créances maritimes 123.

En droit CEMAC tout comme en droit international, le problème du


caractère exhaustif ou non de la liste des causes des créances maritimes se pose aussi ;
car comme il a été signalé, le CCMM fait, pour l’énumération de la liste des créances
maritimes, allusion à la convention de Genève de 1999, mais néanmoins donne une
énumération dans laquelle l’on ne retrouve pas certaines créances pourtant contenues
dans ladite convention. De ce fait, est ce qu’au regard de cette absence, l’on peut
considérer la liste du CCMM comme étant indicative et inclure par là même les
créances manquantes ? Un cas devrait forcément attirer notre attention ; il s’agit de
l’hypothèque qui figure à l’article 1er paragraphe 1 (u) de la convention de Genève lais
qui est pourtant absente dans le CCMM. Ce qui peut paraitre dangereux pour la
garantie hypothécaire, compte tenu du risque de distraction du bien pendant la longue
procédure de saisie-exécution124. La solution que l’on pourrait apporter à cette incurie
est que, sans promouvoir le caractère indicatif de l’article 119 du CCMM sur la liste
des causes des créances maritimes, il est souhaitable de considérer la créance
hypothécaire comme une créance maritime, sans que l’intérêt de l’activité maritime en
soit affecté. Ceci renforcerait les garanties du créancier dans un domaine où la saisie
exécution n’est pas très utilisée, et son application largement dépassée dans la pratique
par le recours à la saisie conservatoire125.

Le prêt à la grosse aventure, dit A. R Werner, est un contrat par lequel


un prêt à intérêt est consenti à l’avance pour couvrir les besoins d’une navigation
déterminée, c’est-à-dire d’un certain voyage fait par un certain navire ; la créance du
prêteur étant assortie d’une garantie réelle (soit de gage, soit de privilège), mais le prêt
ne devant être rendu que sous cette condition suspensive que la chose affectée à sa

123
Par exemple, à l'alinéa d du paragraphe 1 de l'article 1er qui couvrait les créances relatives à l'environnement,
on avait ajouté les « dommages, coûts ou pertes de nature similaire à ceux qui sont indiqués dans le présent
alinéa d »
124
KODJO GNINTEDEM (M.-D.), L'hypothèque maritime dans le Code CEMAC de la Marine Marchande,
mémoire pour l'obtention du master en droit, université de Yaoundé II, février 2008, p 58
125
KODJO GNINTEDEM (M.-D.), L'efficacité des sûretés maritimes, op.cit., p 221
39

garantie (c’est-à-dire soit le navire en soit le fret, soit la cargaison, soit deux d’entre
ces trois éléments, soit les trois), arrive à bon port 126(Le prêt à la grosse, en anglais
bottomry, ne se fait en droit anglais qu’en cas de nécessité survenant en cours de
route ; il faut que le capitaine se trouve dans une situation telle qu’il n’ait aucun
moyen de se procurer les fonds nécessaires à la poursuite du voyage) 127. Cependant,
Tel on l’aura remarqué, le prêt à la grosse se présente comme une combinaison de
contrat d’association, de crédit et d’assurance128.

En droit congolais, les hypothèques maritimes font partie des raisons


fondées pour faire saisie conservatoirement le navire. La loi parle ainsi de : « toutes
hypothèques maritimes »129.

Par cette attention que nous affirmerons à notre humble avis que les
hypothèques maritimes font partie des créances maritimes.

Que faudrait-il entendre par créance maritime ? Selon le code de la


navigation maritime congolaise ? L’article 109 précise qu’il faut entendre par cette
expression (créance maritime) l’allégation d’un droit ayant l’une des causes
suivantes…Pour l’article 1er de la convention de Bruxelles, « créance maritime »
signifie allégation d’un droit ou d’une créance ayant l’une des causes suivantes…

En tout état de cause, et pour éviter les débats autour de l’exhaustivité


ou non de la liste des créances maritimes telle qu’élaborée par les textes spéciaux. Il
faudrait que le créancier allègue une créance qui figure expressément sur cette liste.
Ainsi dit, on ne peut pas saisir conservatoirement un navire en garantie de n’importe
quelle créance. Ce principe constitue véritablement une singularité par rapport au reste
du droit de l’exécution forcée, ce qui ne serait pas sans causes ni conséquence, d’où
l’intérêt d’examiner la portée de l’obligation d’allégation d’une créance maritime.

3. La portée de l’obligation d’allégation d’une créance maritime

L’obligation d’allégation d’une créance maritime par le créancier pour


l’exercice d’une saisie conservatoire est donc clairement exprimée par les textes
applicables dans notre contexte en la matière à savoir en droit interne, le CCMM et en

126
Sébastien LESSEDJINA, op. Cit., p. 54
127
Idem
128
Sébastien LESSEDJINA, op. Cit., p. 54
129
Ordonnance-loi n°66-98 du 14/3/1966 portant code de la navigation maritime, Article 109 (p)
40

droit international la convention de Bruxelles 130. Ceci est un originalité qui déroge
fondamentalement au droit commun de la saisie conservatoire mobilière 131 qui exige
pour ce faire, tout simplement une créance paraissant fondée dans son principe 132.
Cette exigence nous fait nécessairement ressortir quelques remarques.

D’une part la limitation du droit de saisie au seul créancier maritime est


fondée sur une raison évidente et pertinente ; la protection de l’activité maritime.
L’immobilisation qui résulte de la saisie cause un préjudice très grave à l’armateur,
lequel est privé des bénéfices d’exploitation du navire alors que ses couts continuent à
courir. C’est pour protéger la liberté du commerce maritime que les législations
limitent ce droit de saisie conservatoire au seul créancier maritime, défini par rapport à
la créance maritime ; ce dernier est tout simplement le bénéficiaire d’une créance
maritime.

D’autre part, la notion de créance maritime témoigne de l’affectation de


mer à la garantie de tous les créanciers maritimes 133. Ainsi, et à la différence des
créanciers terrestres, ceux maritimes ne pourront se contenter que de la tranche du
patrimoine de leur débiteur affectée à l’aventure maritime, application manifeste de la
théorie du « patrimoine d’affectation »134. Ce constat emporte une conséquence très
particulière en raison de la situation très fréquente en droit maritime de la dissociation
de la propriété et de l’exploitation du navire : l’acceptation par les deux droits
applicables en matière du principe d’une obligation de nature particulière, l’obligation
in rem, obligation dont l’existence est rapportée à une chose à un point tel qu’on peut
dire que la chose, plutôt que la personne de son propriétaire ou de son exploitant en
répond135. Ceci permet donc au navire fautif de répondre de ces dettes,
indépendamment du droit de propriété. Le navire n’appartenant pas au débiteur à titre
de navire causal peut être saisi ; on parle ainsi d’action in rem fondée sur le principe
qui veut que la saisie conservatoire du navire soit en priorité dirigée contre le navire
130
Destinée à être remplacée plus tard par la convention de Genève
131
Tel qu'il résulte de l'AUPSRVE.
132
Article 54 de l'AUPSRVE : « Toute personne dont la créance paraît fondée dans son principe peut solliciter
(...) l'autorisation de pratiquer une mesure conservatoire sur tous les biens mobiliers (...) si elle justifie de
circonstances de nature à en menacer le recouvrement ».
133
KODJO GNINTEDEM (M.-D.), L'efficacité des sûretés maritimes, op.cit., p 219.
134
KODJO GNINTEDEM (M.-D.), L'efficacité des sûretés maritimes, op.cit., p 219.
135
Par contre le droit français est gouverné par la conception personnaliste du patrimoine. Ainsi, c'est la personne
du débiteur qui répond de la dette et non l'objet à l'origine de la créance. Ceci rejoint la théorie classique du
patrimoine telle que développée par AUBRY et RAU et qui constitue l'ensemble des biens et des obligations
d'une personne, envisagé comme une universalité de droit, c'est-à-dire comme une masse mouvante dont l'actif et
le passif ne peuvent être dissociés.
41

dont l’exploitation est cause de créance, en toute indépendance de la qualité juridique


de son exploitant. Le véritable propriétaire ne peut s’opposer à la saisie au motif qu’il
n’est pas le véritable débiteur136. Cette conception résulte de l’influence du droit
anglais, où seul le navire ayant provoqué la dette, peut être conservatoirement saisi.
Par ce biais, l’absence de lien personnel être entre l’obligation et le propriétaire
n’empêche pas la saisie du navire générateur de la créance. Ceci permet donc de saisir
conservatoirement les navires du propriétaire pour les dettes nées du fait de l’affréteur
ou de l’armateur exploitant, même si celui-ci n’est plus propriétaire du navire causal
au moment où s’exerce l’action. Il suffit qu’il l’ait été au moment où est née la créance
privilégiée.

La jurisprudence camerounaise ne conteste pas l’exercice d’une telle


action comme peut le voir dans l’affaire du navire « Salam 4 »137. A la faveur de
l’escale du navire « Salam 4 » au port de Douala le 16 février 2007, la société A/S
DAN BUNKERING a pratiqué une saisie conservatoire sur ledit navire pour sureté,
conservation et paiement de la somme de 122 927 6600 FCFA en règlement d’une
créance d’avitaillement (fourniture d’eau et de soutes) se rapportant audit navire,
créance qui serait née alors que le navire était affrété à temps par les sociétés
Crossword Shipping Ltd et Crossword Middle East Ltd.

De même, la conception du navire débiteur a permis de conclure, face


au silence de la loi, qu’un navire affrété peut être saisi par un créancier de l’affréteur
après la fin de l’affrètement ; ce qui fonde à la saisie, c’est le fait que le créancier a un
privilège sur le navire138. Sur la même lancée, et comme il a déjà été signalé, tant en
droit communautaire CEMAC qu’en droit international, le droit de saisie pourrait être
exercé quand bien même le navire causal ou encore navire débiteur aura changé de
propriétaire139.

136
CA de Noumea, 14 octobre 2010, navire « King Tamatoa », obs. P. DELEBECQUE, DMF, janvier 2011. Cité
par Christian V. K. note 106, Christian V.K, « la saisie de navire en droit positif camerounais »,
https://www.memoireonline.com/04/15/9125/La-saisie-des-navires-en-droit-positif-camerounais.html#fnref87,
consulté le 27 février 2021
137
PTPI-Bonanjo, ordonnance de référé n°299 du 12 Avril 2007, affaire Salam international transport and
trading Co. Ltd contre A/S Dan Bunkery Ltd, navire « Salam 4 » (inédit). Cité par Christian V. K. note 107
Christian V.K, « la saisie de navire en droit positif camerounais »,
https://www.memoireonline.com/04/15/9125/La-saisie-des-navires-en-droit-positif-camerounais.html#fnref87,
consulté le 27 février 2021
138
KODJO GNINTEDEM (M.-D.), L'efficacité des sûretés maritimes, op.cit., p 231
139
Cependant, en droit français, et comme l'a rappelé la Cour de cassation, une telle saisie n'est autorisée que pour
les créances privilégiées, à l'exclusion des autres créances maritimes, et en raison du fort droit de suite attaché
aux privilèges maritimes. Cf. Cass.com, 4 octobre 2005, navire « Renaissance One », www.lexinter.net.
42

En somme, la condition principale tenant à la créance à garantir es que


celle-ci doit être forcément une créance maritime, mais le problème se pose de savoir
si elle doit comme en droit un commun de la saisie conservatoire mobilière (droit
OHADA), paraitre fondée dans son principe.

b. La problématique de l’exigence d’une créance maritime paraissant fondée dans


son principe

Pour cette circonstance, le droit international et le droit communautaire


CEMAC se sont déployés chacun en ce qui le concerne. Pendant que le principe de
l’exigence d’une créance maritime paraissant fondée dans son principe est
formellement affirmé dans le CCMM (1), le droit international à travers ses
conventions, n’en pas fait mention (2).

1. L’affirmation dans le CCMM

Le droit interne CEMAC dispose à travers son CCMM : « elle (la saisie
conservatoire des navires) peut être accordée dès lors qu’il est justifié d’une créance
maritime paraissant fondée dans son principe »140. Contrairement à ce qu’on aurait pu
penser à travers nos analyses précédemment exprimées, le CCMM ne se contente pas
uniquement de mentionner pour l’ouverture d’une saisie conservatoire des navires,
l’existence d’une créance maritime car il requiert la justification d’une « créance
maritime paraissant fondée dans son principe ». Au regard de cette formulation, l’on
constate la souplesse du législateur communautaire et par là même la flexibilité et
l’accessibilité de la saisie conservatoire de navires dans l’espace CEMAC. Ainsi,
comme le droit commun de la saisie des biens meubles, la créance doit paraitre fondée
dans son principe141 mais à la différence du droit commun, l’existence de circonstances
de nature à menacer le recouvrement de cette créance n’est pas requise 142. Une simple
apparence de créance maritime répond à l’exigence requise.

Ainsi pour l'exercice d'une saisie conservatoire de navire dans l'espace


CEMAC, le juge ne doit se préoccuper ni de l'exigibilité, ni de la liquidité, ni de la
certitude la créance ; il doit vérifier si la créance est apparemment fondée. Une créance
fondée dans son principe est une créance dont l'existence est vraisemblable ; il peut
140
Article 120 alinéa 2 du CCMM
141
Article 54 de l'AUPSRVE : « Toute personne dont la créance paraît fondée dans son principe peut, par
requête, solliciter (...) l'autorisation de pratiquer une mesure conservatoire... »
142
Article 54 in fine de l'AUPSRVE : « ... si elle justifie des circonstances de nature à en menacer le
recouvrement ».
43

s'agir d'une créance conditionnelle ou d'une créance à terme ; il se peut aussi que le
montant de la créance ne soit pas encore déterminé en argent. L'essentiel est que la
personne qui a recours à la saisie puisse légitimement se prétendre créancière étant
donné que le créancier n'a pas besoin d'attendre que sa créance soit certaine, liquide et
exigible. Cependant, l'exigence d'une créance paraissant fondée dans son principe ne
devrait pas être prise pour une exigence exclusive car même si une créance fondée en
son principe suffit pour pratiquer une saisie conservatoire, a fortiori une créance
certaine, liquide et exigible peut également constituer la cause d'une saisie
conservatoire143.

Pour résumer, lorsque c’est le CCMM qui s’applique à l’exercice d’une


saisie conservatoire, l’exigence classique d’existence d’une créance maritime est
requise, mais édulcorée par le faut qu’il pourrait s’agir tout simplement d’une créance
maritime paraissant fondée dans son principe. Cette tolérance législative sur le plan
communautaire est aussi observée en droit interne français 144 où à l’image du droit
commun de la saisie conservatoire des biens meubles, il est exigé une créance (compte
non tenu son caractère maritime) paraissant fondée dans son principe145.

A priori, il ne serait pas incongru de dire qu’à ce niveau, dans l’espace


CEMAC, outre le caractère maritime de la créance, il n’y a pas de différence notable
avec le droit commun de la saisie des biens meubles corporels incarné par l’Acte
Uniforme portant Procédure Simplifié Recouvrement et Voies d’Exécution.
Cependant l’originalité de la saisie conservatoire des navires résulte du fait qu’il n’est
pas nécessaire de prouver par exemple l’imminence de l’insolvabilité du débiteur
comme en droit commun, laquelle insolvabilité imminente découle nécessairement de
l’exigence de circonstances de nature à menacer le recouvrement de la créance.

Si jusqu’à présent la conviction sur l’originalité de la saisie


conservatoire des navires par rapport au droit commun de la saisie des biens meubles
corporels n’est pas emportée quant au fait que la créance doit paraitre fondée dans son

143
ASSI-ESSO (A.-M), DIOUF (N.), OHADA, recouvrement des créances, Bruxelles, Bruylant, coll. Droit
uniforme africain, 2002, p 76.
144
Voir JULIEN (P.) et TAORMINA (G.), op.cit., p 534, d'où il ressort que la convention internationale de
Bruxelles demeure inapplicable si la saisie est effectuée dans un port français sur un navire battant pavillon
français par un créancier résidant en France. Dans ce cas de figure, c'est la loi n°67/5 du 3 janvier 1967 et son
décret d'application n°67/967 du 27 octobre 1967 portant statut des navires et autres bâtiments de mer qui
demeurent applicables
145
Article 29 alinéa 2 du décret de 1967 précité : « L'autorisation peut être accordée dès lors qu'il est justifié
d'une créance paraissant fondée dans son principe ».
44

principe, cette originalité est fortement perceptible en droit international où cette


exigence n’a point été formulée dans le textes régissant la saisie conservatoire des
navires.

2. L’absence de l’exigence d’une créance maritime paraissant fondée dans son


principe dans les conventions internationales

Fières de son attachement à l’obligation in rem découlant du droit anglo


saxon, la convention internationale de 1952 et sin futur successeur, celle de 1999 exige
pour l’exercice d’une saisie conservatoire, l’allégation d’une créance maritime
purement et simplement. Point n’est donc besoin que celle-ci puisse revêtir d’autres
caractères notamment ceux découlant du droit interne de la saisie conservatoire des
navires et résultant du CCMM et aussi et surtout ceux issus du droit commun de la
saisie conservatoire des biens meubles corporels, lequel devrait a priori régir la saisie
conservatoire des navires.

La simple référence à une allégation de créance maritime démontre le


caractère libéral de la convention puisqu’elles n’exigent même pas une apparence de
créance dont se satisfait le droit interne. Dès lors, le juge ne peut exiger de celui qui se
prévaut des dispositions de la convention de 1952 et de celle de 1999 qu’il établisse le
caractère certain et sérieux de sa créance ? en droit français, la Cour de cassation
sanctionne inévitablement les juridictions du fond qui accordent mainlevée de la saisie
pratiquée sur le fondement de la convention au motif que la créance devrait présenter
un caractère certain et sérieux 146. La cours d’appel d'Aix-en-Provence a en outre jugé
que le juge n’avait pas à rechercher si la créance maritime est ou non frappée d’une
éventuelle prescription147.

Ceci étant contrairement à ce que l’on observe dans le droit de saisie


contenu dans le CCMM et dans l’Acte Uniforme portant Procédure Simplifiée de
Recouvrement et Voies d’Exécution, les deux conventions internationales ne
mentionnant l’allégation d’une « créance paraissant fondée dans son principe », il
suffit donc que la créance allégué figure sur la liste limitative des causes des créances
maritimes figurant dans lesdites conventions pour que la saisie puisse être valablement

146
Cass. Com. 12 janvier 1988, DMF 1992, somm. Comm. p.134.
147
Aix-en-Provence, 2ème ch., 6 décembre 1995, navire « Friday Star », DMF 1996, n° 572, p. 591 et s., obs.
TASSEL (Y.).
45

pratiquée148, et les pouvoirs du juge se trouvent en même temps diminués étant donné
qu’il n’aura plus qu’à vérifier l’appartenance de la créance alléguée à celles figurant
dans ladite liste.

Etant donné que l’allégation d’une créance paraissant fondée dans son
principe découle du droit interne permet de rendre moins aisée la saisie des navires en
Afrique centrale, nous pourrons insinuer a contrario que l’absence d’une telle
formulation dans les conventions internationales rend plutôt souple l’exercice d’une
telle saisie car le créancier saisissant n’a pas forcément à démontrer qu’il est un
créancier inéluctable.

Section 2. L’originalité tirée de la mise en œuvre de la saisie conservatoire des


navires

En droit commun, le déroulement de la saisie conservatoire des biens


meubles nécessite par principe l'intervention d'un juge qui devrait donner son
autorisation149, et d'un huissier ou d'un agent d'exécution qui sera chargé du
déroulement de la procédure150.

En saisie conservatoire des navires, les législateurs attitrés en la matière


ont pris en compte la particularité que révèle le droit maritime ; certes, ils ne se sont
pas trop démarqués de leurs homologues du droit commun des saisies, mais ils ont
permis aux autorités typiquement maritimes d'avoir une certaine mainmise sur la
procédure, ce qui sera observé lorsqu'il sera question pour nous d'étudier les personnes
comprises dans les opérations de saisie conservatoire des navires (paragraphe 1)

Tout aussi, la mise en œuvre de la saisie conservatoire de droit commun


permet dans son déroulement de rendre indisponibles les biens qui en sont l'objet 151 ;
or dans la saisie conservatoire des navires, son déroulement permet l'immobilisation
du navire qui en est l'objet ; il s'agit là d'une originalité remarquable de la saisie
148
Cass.com., 3 février 1998, n°95-20.474 ; Cass.com., 30 octobre 2000, préc., et sur renvoi après cassation, CA
Montpellier, 1ère ch., sect. AS, 1èr décembre 2003, n°01/00384, DK Line c/Petredec Ltd, navire « Sargasse ».
Cité par Christian V. K. note 107 Christian V.K, « la saisie de navire en droit positif camerounais »,
https://www.memoireonline.com/04/15/9125/La-saisie-des-navires-en-droit-positif-camerounais.html#fnref87,
consulté le 27 février 2021
149
Article 54 de l'AUPSRVE. Cependant, l'article 55 dresse les cas dans lesquels on pourrait s'affranchir de cette
autorisation judiciaire : « Une autorisation préalable de la juridiction compétente n'est pas nécessaire lorsque le
créancier se prévaut d'un titre exécutoire. Il en est de même en cas de défaut de paiement, dûment établi, d'une
lettre de change acceptée, d'un billet à ordre, d'un chèque, ou d'un loyer impayé après commandement dès lors
que celui-ci est dû en vertu d'un contrat de bail d'immeuble écrit »
150
Article 64 de l'AUPSRVE.
151
Article 36 alinéa 2 de l'AUPSRVE
46

conservatoire des navires que l'on analysera dans le déroulement de ladite saisie
(paragraphe 2).

§1. L'originalité des personnes impliquées dans les opérations de saisie conservatoire des
navires

Pour l'exercice d'une saisie conservatoire des navires, les textes tant
internationaux que communautaires sont unanimes sur le fait qu'il faudrait forcément
l'intervention de l'autorité judiciaire compétente (A) qui devrait rendre pour la
circonstance une ordonnance après avis de l'autorité maritime compétente (B).

A. L'intervention de l'autorité judiciaire compétente

Il faudrait tout d'abord procéder à l'identification de cette autorité


judiciaire compétente (1) avant de voir par quel moyen le créancier devrait le saisir
(2).

1. L'identification de l'autorité judiciaire compétente

À la suite du débat houleux sur la juridiction compétente en matière de


droit commun de la saisie des biens meubles152, un autre, certes moins alléchant se
pose en ce qui concerne celle compétente pour l'ouverture de la procédure spéciale de
la saisie conservatoire du navire. En la matière, des imprécisions sont observées car
pour l'identification de cette juridiction, le code de la navigation maritime congolaise
dispose : « Dans les cas qui requièrent célérité, le président du tribunal de première
instance peut permettre de saisir conservatoirement les navires qui se trouvent dans le
ressort du tribunal. Le juge-président du tribunal de district peut également autoriser la
saisie lorsque le bâtiment se trouve dans le ressort de son tribunal » 153. Cette même
exigence ressort dans les deux conventions internationales. Ainsi, la convention
internationale de 1952 dispose : « Un navire ne peut être saisi qu'avec l'autorisation
d'un tribunal ou de toute autre autorité judiciaire compétente de l'État Contractant dans
lequel la saisie est pratiquée »154. Celle de 1999 dispose quant à elle qu' « Un navire ne
peut être saisi (...) que par décision d'un tribunal de l'État partie dans lequel la saisie

152
Ceci résulte de l'imprécision de l'article 49 de l'AUPSRVE qui dispose : « La juridiction compétente pour
statuer sur tout litige ou toute demande relative à une mesure d'exécution forcée ou à une saisie conservatoire
est le président de la juridiction statuant en matière d'urgence ou le magistrat par lui délégué »
153
Ordonnance-loi n°66-98 du 14/3/1966 portant code de la navigation maritime, article 108
154
Article 4 de la convention de 1952
47

est pratiquée »155, étant donné que le tribunal au sens de cette convention est l'autorité
judiciaire compétente de l'État156.

Ainsi, qu'il s'agisse du droit interne ou du droit international, pour


autoriser une saisie conservatoire, seule est qualifiée « l’autorité judiciaire compétente
dans l'État partie dans lequel la saisie est pratiquée ». Ces différents textes ne donnant
pas plus de précisions sur cette autorité judiciaire, le soin est donc laissé à chaque loi
nationale de déterminer cette dernière qui sera donc habilitée à autoriser les saisies
conservatoires des navires sur leurs territoires.

En droit congolais, particulièrement le président du Tribunal de Grande


Instance ou le juge-président du Tribunal de Paix selon le cas statue par voie
d’ordonnance, indique le montant et la nature de la garantie à fournir pour échapper
aux effets de la saisie, ici les ordonnances sont exécutoires par provision157

Une fois l'identification de cette autorité judiciaire compétente faite, il


faudrait dès lors examiner le moyen par lequel il est saisi.

Mais constate faite, à cause de la qualité de celui qui soit armateur ou


affréteur, commerçant ou société commercial, par ceci nous constarons que le tribunal
de commerce serait compétent pour ordonner la saisie conservatoire158.

2. Le mode de saisine

Généralement, il est reconnu à toute personne qui se prétend être


titulaire d'un droit méconnu, de saisir le juge afin que celui-ci se prononce sur la
légitimité de ce droit ; certes la loi ne définit pas l’action en justice. De ce fait est
appelé l'action en justice que l'on pourrait définir comme le droit pour l'auteur d'une
prétention d'être entendu sur le fond de celle-ci afin que le juge la dise bien ou mal
fondée159 ou encore c’est le pouvoir reconnu aux particuliers des s’adresser à la justice
pour obtenir le respect de leurs droits et de leurs intérêts légitimes 160.Pour intenter
donc cette action, le requérant devrait procéder par la demande en justice, car l'action

155
Article 2 de la convention de 1999
156
Article 1er paragraphe 5 de la convention de 1999
157
Ordonnance-loi n°66-98 du 14/3/1966 portant code de la navigation maritime, Article 114 et 115
158
Loi n°002/2001 du 03 juillet 2001 portant création,organisation et fonctionnement des tribunaux de
commerce, article 17
159
Article 30 du NCPC français
160
Jean VINCENT et Serge GUICHANRD, procédure civile, 23ème édition, Paris, Dalloz, 1994 cité par J.M
MULENDA KIPOKE, procédure civile, Kinshasa, Maison Béni Collections, février 2018
48

est le droit de saisir le juge, la demande en justice est la manière dont s'exerce ce
droit ; elle est donc l'acte de procédure 161 par lequel une personne exerce ce droit, se
fait entendre sur le fond de la prétention dont elle saisit le juge pour qu'il la dise bien
ou mal fondée162.

Appliquée en voies d'exécution et notamment en ce qui concerne la


saisie conservatoire des navires, cette demande n'est rien d'autre qu'une requête que
l'on peut définir comme étant une demande écrite adressée directement à un magistrat,
sans mise en cause d'un adversaire, dans les cas où la situation à régler est urgente et
où la nécessité commande qu'il soit procédé non contradictoirement ; il y est répondu
par une ordonnance de caractère provisoire, exécutoire sur minute et susceptible de
rétractation.

L'exigence d'une requête pour déclencher le processus de saisie


conservatoire des navires résulte des dispositions expresses des textes applicables en la
matière. En doit CEMAC, le CCMM dispose s'agissant des navires que « La saisie
conservatoire est autorisée par ordonnance rendue sur requête... »163. En droit
international, la formule serait la même, étant donné que les conventions
internationales sur la saisie conservatoire laissent en ce qui concerne la procédure de
saisie le soin aux législateurs nationaux 164; cela revient donc à l'application du droit
congolais de la consécration tant à l’internationale de la requête comme mode de
saisine du juge pour l'ouverture d'une saisie conservatoire des navires. Cette forme de
demande engendre plusieurs conséquences ; d'abord, la procédure est non
contradictoire, ce qui signifie a priori que le débiteur de la créance maritime en cause
n'a ni à être appelé, ni à être entendu ; ensuite, la décision rendue doit prendre la forme
d'une ordonnance et plus précisément d'une ordonnance sur requête qui, théoriquement
n'a pas besoin d'être motivée, doit être datée et signée par le président du tribunal,
lequel n'a pas besoin d'être assisté d'un greffier; enfin, le débiteur maritime ne peut
attaquer cette ordonnance que par la voie de la clause de référé généralement

161
Ordonnance-loi n°66-98 du 14/3/1966 portant code de la navigation maritime, Article 108
162
TCHOU-BAYO (J.-P.), Cour magistral des voies d'exécution, master 1, année académique 2009-2010
163
Article 120 du CCMM
164
convention de Bruxelles de 10 mai 1952 pour l’unification de certainses règles sur la saisie conservatoire des
navires de me, Article 6 paragraphe 2: « Les règles de procédure relatives à la saisie d'un navire, à l'obtention
de l'autorisation (...) sont régies par la loi de l'État contractant dans lequel la saisie a été pratiquée ou
demandée » ; dans le même sens, l'article 2 paragraphe 4 de la convention de Genève dispose : « Sous réserve
des dispositions de la présente convention, la procédure relative à la saisie d'un navire (...) est régie par la loi
de l'État dans lequel la saisie est pratiquée ou demandée ».
49

introduite dans les ordonnances sur requête, étant donné que l'opposition et l'appel
ne lui sont pas propices car l'exercice de ces voies de recours ordinaires suppose que la
personne qui les intente ait été partie ou représentée en instance 165. Signalons que
l’ordonnance sur requête s’insère dans un contentieux ; souvent elle est dirigée contre
un adversaire virtuel qui, sans figurer dans la procédure sera appelé à conséquence de
la décision prise ; l’intéressé qui n’a pas été entendu et qui s’estime lésé par
l’ordonnance, a la possibilité d’exercer le recours en rétractation, ce qui a élevé le
contentieux166. Du fait que l’ordonnance sur requête est prise sur demande unilatérale
d’un requérant sans que le juge ne doive entendre les parties auxquelles sa décision
peut éventuellement faire découler que ces ordonnances n’ont pas l’autorité d’un
jugement ; n’étant pas rendu après un débat contradictoire, l’ordonnance ne prétend
pas arrêter la vérité judiciaire, ni vidé le litige en disant le droit167.

Comme il a été ci-dessus signalé, l'autorité judiciaire compétente


devrait rendre une ordonnance sur requête après avis de l'autorité maritime compétente
pour le cas du Cameroun. Ceci dit, cette dernière autorité est une institution propre au
droit maritime au point où il serait nécessaire d'y consacrer une analyse profonde.

Par contre une requête devant le tribunal de grande instance suffit pour
opérer l’éventuel saisie de navire.

B. L'intervention d'une véritable institution propre au droit maritime :


l'autorité maritime compétente

Nous l'avons dit, et nous le rappelons, en droit international de la saisie


conservatoire des navires, les conventions y relatives laissent en ce qui concerne les
questions de procédures de saisie, le soin aux législateurs nationaux. C'est ainsi que
dans notre contexte, c'est le code de la navigation maritime qui est la règle par
excellence en la matière. Se démarquant du droit commun de la saisie conservatoire
des biens meubles et prenant en considération le particularisme lié à la saisie
conservatoire des navires, le CCMM a créé une institution comme toute
originale contrairment au droit congolais : l'autorité maritime compétente qu'il
165
TCHOU-BAYO (J.-P.), Cour magistral des voies d'exécution, op.cit. Cité par Christian V. K. note 107
Christian V.K, « la saisie de navire en droit positif camerounais »,
https://www.memoireonline.com/04/15/9125/La-saisie-des-navires-en-droit-positif-camerounais.html#fnref87,
consulté le 27 février 2021
166
Jean VINCENT et Serge GUINCHARD, op. Cit., n°170 cité par JM MULENDA KIPOKE, procédure civil,
Kinshasa, Maison Béni Collection, février 2018, p. 168
167
idem
50

convient d'identifier (1) et ensuite de discuter de l'opportunité de l'intervention d'une


telle institution (2).

1. L'identification de l'autorité maritime compétente

Le CCMM dispose que : « La saisie conservatoire est autorisée (...)


après avis de l'autorité maritime compétente »168; en parlant d'autorité maritime
compétente, il essaie de donner une identification en disant que c'est « le ministre
chargé de la marine marchande et les fonctionnaires d'autorité auxquels il a délégué
tout ou partie de ses pouvoirs. À l'étranger, l'autorité maritime compétente désigne
l'ambassade ou l'autorité consulaire ; cependant, dans les ports étrangers où les États
membres n'ont ni ambassade, ni consulat, l'autorité maritime compétente de chaque
État peut déléguer ses pouvoirs selon la volonté nationale »169.

En droit congolais, c’est au ministre de transport de gérer le transport


mais n’intervient pas en matière de saisie de navire, pour exclusif du juge170.

Pour ce qui est du cas du Cameroun, et en l'absence d'un véritable


ministre chargé de la marine marchande, l'autorité maritime compétente est en
principe le ministre des transports, lequel peut cependant déléguer ses pouvoirs au
directeur des affaires maritimes et des voies navigables à Douala, anciennement
directeur de la marine marchande171

Au regard des inconvénients que peut susciter l'intervention de l'autorité


maritime compétente dans la procédure de saisie conservatoire des navires tels
l'allongement de la procédure de saisie dans un domaine qui requiert pourtant célérité,
l'on devrait logiquement s'interroger sur l'opportunité de l'intervention d'une telle
autorité, qui semblérait pas prévu en par le code de la navigation maritime congolais.

Pour le cas de la RDC, le code maritime nous indique directement la


compétence du tribunal dans le ressort duquel se trouve le navire qui opère la saisie,
mais n’indique pas une autorisation préalable 172. En effet, la convention de Bruxelles
dispose : « Un navire ne peut être saisi qu’avec l’autorisation d’un Tribunal ou de

168
Article 146 CCMM
169
Article 2 alinéa 11 du CCMM
170
Ordonnance-loi n°66-98 du 14 mars 1966, portant code de la navigation maritime, article 108
171
NGAMKAN (G.), op.cit., p 113
172
Ordonnance-loi n°66-98 du 14/3/1966 portant code de la navigation maritime, Article 108
51

toute autre autorité Judiciaire compétente de l’Etat Contractant dans lequel la saisie est
pratiquée »173.

2. L'opportunité ou non de l'intervention de l'autorité maritime compétente


dans la saisie conservatoire des navires

Le CCMM fait pratiquement de l'autorité maritime la plaque tournante


en matière de saisie conservatoire des navires. En effet, d'une part, pour pratiquer une
telle saisie, on l'a vu, l'autorité maritime doit émettre son avis ; dès lors, se pose la
question de savoir si c'est le juge ou le créancier qui sollicite cet avis. En pratique,
c'est le créancier qui sollicite ledit avis, y ayant intérêt, soit au bas de sa requête sur un
emplacement prévu à cet effet, soit sous la forme d'une sommation interpellative, par
l'entremise d'un huissier de justice174.

D'autre part, lorsqu'elle reçoit la notification de la saisie d'un navire en


vertu d'une décision judiciaire, cette autorité interdit au navire de quitter le port et
veille à la mise en œuvre de cette mesure 175. Outre ces dispositions, le CCMM prévoit
à plusieurs reprises l'intervention de l'autorité maritime compétente au point où l'on
peut légitimement s'interroger sur l'opportunité d'une telle institution qui vient à notre
sens alourdir inutilement la procédure de saisie conservatoire des navires et dont on
peut sérieusement douter du bien-fondé.

Étant donné que nous sommes ici dans une matière qui requiert
discrétion et célérité, si d'aventure, l'armateur était informé de ce qu'une saisie était
projetée, le navire risquerait certainement de filer entre les mailles des rets du
créancier saisissant et de prendre le large, le navire étant par définition « un objet
particulièrement vagabond doué d'une faculté poussé d'évanouissement dans la
nature »176. Il faut donc agir vite et par surprise ; c'est pourquoi, sous peine de manquer
son but, la saisie conservatoire doit obéir à des règles plus souples.

Pour justifier l'intervention de l'autorité maritime compétente, les


rédacteurs du CCMM font valoir qu'il s'agissait de limiter les abus en matière de
saisie, car avant la réforme, on saisissait pour toutes sortes de créances, y compris des
173
convention de Bruxelles de 10 mai 1952 pour l’unification de certainses règles sur la saisie conservatoire des
navires de me, Article 4
174
NGAMKAN (G.), op.cit., p 113
175
Article 115 du CCMM
176
VIALARD (A.), La saisie conservatoire des navires affrétés, conférence prononcée à l'AFDM le 9 décembre
1993, in DMF 1994, 305, cité par NGAMKAN (G), op.cit., p 114
52

créances non maritimes. L'argument est assez fallacieux dès lors qu'il appartient au
juge d'apprécier l'opportunité de la saisie et notamment la nature maritime de la
créance d'une part, et que comme nous le verrons, le saisissant engage nécessairement
sa responsabilité si la saisie s'avère abusive, s'il a agi avec une légèreté blâmable, dans
un but vexatoire ou s'il a fait preuve de malignité d'autre part.

L'intervention d'une telle autorité est davantage remise en cause car


imbue de cette prérogative que lui confère le CCMM, l'autorité maritime s'érige
désormais en véritable juridiction. En effet sur le plan pratique, n'étant pas juriste le
plus souvent, et encore moins un maritimiste, il n'est pas certain qu'elle perçoive les
arcanes du droit en la matière. C'est ainsi qu'il n'est pas rare qu'elle refuse d'émettre
son avis pour des raisons qui ne sont pas toujours juridiquement fondées, pour ne pas
dire avouables. Sur le plan économique, l'attitude de l'autorité maritime est susceptible
d'emporter des conséquences d'une extrême gravité ; il y a un risque de délocalisation
du contentieux au profit des juridictions et avocats étrangers.

Ceci étant, et malgré tous les reproches qui sont apportés à cette
véritable institution originale de droit maritime liée à la saisie conservatoire des
navires, il n'y a pas lieu de s'alarmer outre mesure car il existe des leviers pour
désamorcer l'institution. L'on peut arguer par exemple que l'autorité maritime n'émet
qu'un avis et non une autorisation 177, lequel avis par hypothèse ne lie pas le juge qui
reste libre d'y passer outre. Aussi bien, le texte n'indique même pas dans quel sens cet
avis doit être donné178, ce qui prouve que le juge n'est pas lié par celui-ci. Cet avis
n'aurait pu s'imposer au juge que s'il était mentionné au Code que la saisie est
subordonnée à l'avis « favorable » de l'autorité maritime compétente, ce qui serait pis
encore, puisque le juge serait pratiquement à la dévotion de l'autorité maritime
compétente179 qui deviendrait par conséquent le véritable maître de la saisie
conservatoire des navires.

En tout état de cause, et à notre sens, cette autorité participe de


l'authenticité de la saisie conservatoire des navires et répond au souci de rendre

177
L'autorité maritime n'émet qu'un simple avis. C'est en fait le PTPI qui autorise la saisie conservatoire du
navire.
178
En effet, l'article 118 du CCMM dispose que « L'avis de l'autorité maritime compétente (...) a un caractère
consultatif et ne lie pas le juge ». Cette disposition ne doit pas nous fourvoyer car ledit article précise qu'il s'agit
des avis résultant des articles 116 et 117 sur l'autorisation de départ du navire et sur le délai dans lequel le navire
doit regagner le port, et non sur l'article 120 sur l'autorisation de saisie
179
NGAMKAN (G.), op.cit. p 115
53

typique ladite saisie ; les règles applicables au déroulement de cette saisie répondent
aussi à ce souci.

§2. L'originalité dans le déroulement de la saisie conservatoire des navires

Le déroulement de la saisie conservatoire des navires constitue une


originalité toute aussi importante, autant que celle qui a été observée dans les
personnes impliquées dans la procédure de saisie. Dans sa phase consacrée au
déroulement, l'originalité pourrait se concevoir tant dans le déroulement normal de la
saisie conservatoire des navires (A) que dans le déroulement émaillé d'incidents de
ladite saisie (B).

A. Le déroulement normal de la saisie conservatoire des navires

La procédure de saisie conservatoire des navires se déroule


normalement lorsqu'elle n'est émaillée d'aucun incident qui puisse en affecter le cours
et permettre que ladite saisie ne puisse pas arriver à son terme. Ceci dit, lorsqu'un
créancier exerce une saisie conservatoire des navires, il espère le plus souvent d'une
part que son débiteur, après un rapide calcul coût/avantage, s'acquittera de sa dette afin
de pouvoir faire repartir le navire, que l'immobilisation ne lui ait coûté d'autres frais
que l'acquittement de sa dette envers ledit créancier ; d'autre part que son débiteur
mette en place une garantie personnelle émise par un tiers ; ainsi, au navire, élément
mobile et soumis aux péril de la mer, se substitue ainsi une banque ou
un P§I Club180 tenu personnellement envers le créancier saisissant en vertu d'une lettre
de garantie exécutoire à première demande. Tels sont les effets recherchés par le
créancier saisissant à titre conservatoire un navire. Toutefois l'effet principal et c'est là
que demeure l'originalité la plus remarquable de ce type de saisie, est l'immobilisation
du navire au port de saisie (1) qui nécessitera l'accomplissement de certaines
diligences par les différents protagonistes à la saisie (2).

1. L'originalité de l'effet de la saisie conservatoire des navires : l'immobilisation du


navire saisi

La saisie conservatoire des navires telle qu'elle est organisée par les
différents textes se démarque très nettement de la saisie conservatoire des biens
meubles telle qu'elle est organisée par l'AUPSRVE ; ceci se manifeste à plusieurs

180
Mutuelle d'armateur
54

égards dont l'un des plus révélateurs se situe dans les effets de ces différentes saisies
conservatoires. Pendant que l'AUPSRVE reconnaît comme effet à la saisie
conservatoire des biens meubles, l'indisponibilité181, les textes particuliers
réglementant la saisie conservatoire des navires lui reconnaissent plutôt comme effet
l'immobilisation (a) ; cependant, au regard des effets liés à cette immobilisation,
surtout aux rondelets coûts que ladite immobilisation est susceptible d'engendrer au
port d'immobilisation, l'on se doit d'examiner les effets nocifs que cette inactivité est
susceptible de susciter au port victime de la saisie (b). Toutefois, cette immobilisation
n'a pas forcément un caractère définitif car étant dans une situation de précarité,
certaines circonstances pourraient permettre au juge d'accorder une autorisation de
départ dudit navire (c). Aussi convient-il d'examiner la problématique de la garde du
navire qui aurait été immobilisé du fait de la saisie (d).

a. L'immobilisation du navire au port de saisie

Parmi les particularités liées à la saisie des navires, se situe en très


bonne place l'effet de la saisie conservatoire qui en résulte ; cet effet est
l'immobilisation du navire saisi, consacrée tant par les conventions internationales que
par le code CEMAC182, le code de la navigation maritime congolaise n’a fait mention
expresse de l’immobilisation183, contrairement au droit commun qui prévoit
l'indisponibilité.

En effet, l'indisponibilité qui résulte du droit commun de la saisie


conservatoire des biens meubles énoncée par l'article 36 alinéa 2 de l'AUPSRVE a
pour conséquence d'interdire au débiteur saisi tout acte de disposition portant sur les
biens saisis dès l'établissement du procès-verbal de saisie. Le débiteur saisi demeure
181
Article 36 alinéa 2 de l'AUPSRVE : « L'acte de saisie rend indisponibles les biens qui en sont l'objet » ; voir
aussi l'article 56 de l'AUPSRVE : « La saisie conservatoire peut porter sur tous les biens mobiliers, corporels ou
incorporels appartenant au débiteur. Elle les rend indisponibles »
182
En effet, la convention internationale de Bruxelles qui a trait à la saisie conservatoire des navires uniquement
dispose en son article 1 paragraphe 2 que la saisie selon elle signifie « l'immobilisation du navire... » ; tel est
l'esprit aussi de la convention internationale de Genève (article 1 paragraphe 2). le CCMM dispose en son article
121 que : « La saisie conservatoire empêche le départ du navire. Elle ne porte aucune atteinte aux droits du
propriétaire ».
183
En droit interne, la loi ne dit pas clairement ce que ça signifie la saisie conservatoire.
55

cependant le propriétaire des biens saisis puisque la saisie n'a pas pour effet d'entraîner
un transfert de propriété des biens saisis du débiteur au créancier saisissant 184. Par
conséquent, les risques demeurent à la charge du débiteur saisi jusqu'à l'adjudication
éventuelle ou la mainlevée de la saisie. Mais tout en demeurant propriétaire des biens
saisis, le débiteur saisi ne peut ni les aliéner à titre gratuit ou onéreux, ni les constituer
en gage ou les prêter185.

Cependant, en matière de saisie conservatoire des navires, l'effet


d'immobilisation qui en résulte ne semble pas de nature à empêcher son propriétaire
d'en disposer, seul le CCMM précisant que la saisie « ne porte aucune atteinte aux
droits du propriétaire »186 ; cette solution malgré son absence dans les conventions
internationales devrait être la même, ainsi qu’eb droit positif congolais. De ce fait, le
propriétaire du navire saisi conserve tous les attributs du droit de propriété notamment
son pouvoir de disposition du navire saisi ; il peut aussi le fréter, l'hypothéquer. Cette
affirmation ne devrait pas nous leurrer car l'immobilisation de la saisie empêche toute
utilisation du navire, puisque la saisie doit être dénoncée à l'autorité maritime
compétente afin qu'il émette l'interdiction d'appareiller tout en assurant son
application, empêchant ainsi le navire de prendre la mer.

Observons tout de même que contrairement à l'indisponibilité qui


résulte de la saisie conservatoire des biens meubles et qui est très souvent un prélude à
la saisie exécutoire du bien en question, l'immobilisation qui résulte de la saisie
conservatoire des navires a tout simplement un effet comminatoire car destinée à faire
pression au débiteur du navire saisi.

Pour en conclure, nous dirons que la saisie conservatoire des navires,


compte tenu des coûts du navire et de son immobilisation (paralysie de l'outil essentiel
de l'entreprise d'armement), est un moyen de pression extrêmement puissant qui
pourrait néanmoins préjudicier à l'armateur-exploitant du navire sur le plan
économique. En effet, celui-ci est dans l'impossibilité d'exploiter le navire alors qu'il
reste tenu de tous les frais liés au navire saisi, notamment pour son entretien surtout si
ultérieurement, la saisie conservatoire dudit navire se serait avérée abusive.

184
Cependant, en matière de saisie-attribution, la créance, objet de la saisie est attribuée au créancier saisissant
dès l'exploit de saisie
185
ASSI-ESSO (A.-M.), DIOUF (N.), OHADA, Recouvrement des créances, Bruxelles, Bruylant, Coll. Droit
uniforme africain, 2002, p 6
186
Telle est la même formulation en droit interne français de l'article 30 du décret du 27 octobre 1967 précité
56

b. Les effets nocifs de l’inactivité du navire au port victime

Cependant l'immobilisation du navire a un revers de la médaille surtout


lorsqu'on sait que très souvent, le navire est immobilisé pour une durée très longue au
port de saisie, ce qui pourrait créer des effets nocifs à ce port de saisie, d'où la notion
de port victime de la saisie187. En effet, l'immobilisation des navires saisis dans les
ports représente pour les gestionnaires publics de ces ports, un encombrant poids,
voire un handicap dans leur gestion commerciale des outillages publics d'autant plus
que l'on constate une utilisation de plus en plus fréquente des saisies. Donc il apparaît
très vite que la saisie va à l'encontre de la finalité même du service public portuaire qui
est la mise à disposition de l'usager d'infrastructures permettant le chargement et le
déchargement des navires à partir des quais, le fonctionnement normal de ce service
nécessitant une optimisation de cette finalité 188. L'immobilisation des navires par une
saisie handicape donc tout le service et nécessiterait logiquement l'intervention de la
police portuaire189.

C'est pour cette raison parmi tant d'autres que, dans certaines
conditions, le navire immobilisé pourrait être autorisé à partir.

c. La possibilité d'autorisation de départ du navire

La possibilité d'autorisation de départ du navire ne devrait pas être


confondue avec la mainlevée de la saisie. Malgré l'immobilisation, dans certaines
circonstances, le navire immobilisé pourra être autorisé à effectuer un ou plusieurs
voyages. Ceci ne résulte pas clairement des conventions internationales mais plutôt du
CCMM.

En effet, le CCMM dispose que : « Nonobstant toute saisie et à tout


moment, le tribunal compétent peut après l'avis de l'autorité maritime autoriser le
départ du navire pour un ou plusieurs voyages déterminés. Pour obtenir cette

187
PRINTEMS (F.), L'immobilisation du navire dans un port suite à une décision judiciaire de saisie conservatoire
ou la notion de port victime, revue juridique NEPTUNUS
188
Par conséquent une libération immédiate des mêmes quais à la fin des opérations
189
Cette dernière répondant aux besoins de l'existence d'une autorité pour faire respecter les règles découlant de
l'activité du port
57

autorisation, le requérant doit fournir une garantie suffisante »190. C'est donc dire que
le saisi, propriétaire ou non du navire, et son propriétaire, débiteur personnel ou non
peuvent demander l'autorisation de départ du navire saisi et immobilisé pour un ou
plusieurs voyages déterminés contre constitution d'une garantie suffisante. Il
appartient donc au tribunal compétent qui, à défaut de précision par le CCMM, serait
logiquement le juge des référés191, après avis de l'autorité maritime compétente de
fixer le délai dans lequel le navire devra regagner le port de saisie, étant donné qu'il
peut ultérieurement modifier ce délai pour tenir compte des circonstances et, le cas
échéant, autoriser le navire à faire des voyages 192. Si à l'expiration du délai fixé, le
navire n'a pas rejoint son port, la somme déposée en garantie est acquise aux
créanciers, sauf le jeu de l'assurance en cas de sinistres couverts par la police193.

En droit international, et en l'absence de dispositions réglementant


l'autorisation de départ du navire saisi, l'autorisation de départ est la seule possibilité
offerte lorsque la créance a pour cause la propriété contestée d'un navire, la
copropriété contestée d'un navire ou sa possession, ou son exploitation, ou les droits
aux produits d'exploitation d'un navire en copropriété car les deux conventions
disposent que dans ces cas exclus de la mainlevée, le juge peut permettre l'exploitation
du navire par le possesseur, lorsque celui-ci aura fourni des garanties suffisantes, ou
régler la gestion du navire pendant la durée de la saisie 194. Pour le reste des questions
non réglées par ces conventions, compte tenu du caractère supplétif du CCMM, ce
dernier recevra application.

Lorsque les conditions d'autorisation de départ du navire n'auront pas


été respectées, le navire restera immobilisé et ladite immobilisation pose le problème
de la garde du navire en cause.

d. La problématique de la garde du navire saisi

La question de la garde des navires saisis répond à celle de la


détermination de la personne responsable des dommages causés par le navire saisi.

190
Article 116 du CCMM.
191
À l'instar du droit interne français qui prévoit à l'article 27 du décret de 1967 précité que : « Nonobstant toute
saisie, le président du tribunal de grande instance statuant en la forme des référés peut autoriser le départ du
navire pour un ou plusieurs voyages déterminés. Pour obtenir cette autorisation, le requérant doit fournir une
garantie suffisante ».
192
Article 117 alinéa 1 du CCMM.
193
Article 117 alinéa 2 du CCMM.
194
Voir l'article 5 de la convention de Bruxelles et l'article 4 de la convention de Genève.
58

Cette question se pose avec une grande acuité lorsque le navire fait l'objet d'une saisie
conservatoire au sein des zones cycloniques et qui occasionne des dommages aux
installations portuaires au cours de son immobilisation qui peut parfois s'étendre sur
une période de plusieurs mois.

En droit international, les conventions n'ont pas résolu le problème de


la garde du navire soumis à saisie conservatoire. Pour ce faire, et de par le régime
supplétif du droit interne, la question devrait être régie dans notre contexte par le
CCMM.

De ce fait, tant en droit interne 195 qu'en droit international, la


problématique de la garde du navire sera régie par le CCMM. Ceci étant, ce texte
dispose : « L'autorité maritime compétente est constituée gardien du navire saisi »196.
C'est donc dire qu'au Cameroun, et en vertu des analyses qui ont été ci-dessus faites à
propos de l'autorité maritime compétente, la garde du navire saisi au Cameroun est
l'apanage du ministre des transports qui l'exerce par l'intermédiaire du directeur des
affaires maritimes et des voies navigables à Douala, anciennement directeur de la
marine marchande197.

Cette solution retenue par le CCMM diffère radicalement du droit


commun de la saisie conservatoire des biens meubles corporels. En effet, selon
l'AUPSRVE, « Si la saisie porte sur des biens corporels, le débiteur saisi ou le tiers
détenteur entre les mains de qui la saisie a été effectuée est réputé gardien des objets
saisis... »198. Ceci démontre une nouvelle fois comment le droit spécial de la saisie
conservatoire des navires se démarque radicalement sur certains aspects, du droit
commun de la saisie des biens meubles corporels.

Quant au régime de la garde du navire saisi, celui-ci est expressément


prévu par le même CCMM. Celui-ci dispose : « Dans l'accomplissement de son
mandat, le gardien n'assure qu'une obligation de moyens »199. On peut définir
195
Article 119 du code de la navigation maritime
196
Article 124 du CCMM
197
Cependant en droit interne français, la question de la garde du navire n'a pas été résolue par les dispositions
qui font office de droit interne français de la saisie conservatoire des navires mais plutôt par celles sur la saisie-
exécution. En l'absence de telles dispositions et à l'inverse de ce qui est observé en droit interne CEMAC, le C.E.
a exclu la possibilité pour l'autorité portuaire d'être désignée gardien du navire saisi (C.E. 20 janvier 1989,
Dalloz 1989, p 619). De ce fait, généralement, les huissiers de justice, de leur propre initiative, dans leur procès-
verbal de saisie, désignent un gardien ; ce peut être le clerc de l'huissier, le commandant du port (uniquement en
sa qualité de personne privée), le capitaine du navire ou encore le débiteur saisi.
198
Article 36 alinéa 1 de l'AUPSRVE.
199
Article 124 in fine du CCMM
59

l'obligation de moyens comme une obligation en vertu de laquelle le débiteur n'est pas
tenu d'un résultat précis ; le créancier d'une telle obligation ne peut mettre en jeu la
responsabilité de son débiteur que s'il prouve que ce dernier a commis une faute ou n'a
pas utilisé tous les moyens promis 200. Plus précisément, l'autorité maritime compétente
ne verra sa responsabilité engagée qu'en cas de faute ou lorsqu'il n'a pas fait
loyalement ce qu'il avait promis de faire.

Une fois l'effet principal ainsi que les contours de la saisie


conservatoire des navires précisés, il reste à déterminer les précautions à prendre par
les différentes personnes intéressées par ladite saisie.

1. Les différentes diligences à observer

Toujours en vertu de la subsidiarité du droit interne de la saisie


conservatoire des navires telle qu'énoncée par les conventions internationales dans les
matières qu'elles n'ont rien prévu et qu'elles laissent aux empires des différents droits
internes, le CCMM fera office de repère tant en droit interne qu'en droit international
en matière de diligences à observer pour la suite de la saisie conservatoire puisque
justement, elles n'ont rien prévu à ce propos. Deux personnes sont particulièrement
impliquées dans la suite de la procédure de saisie conservatoire des navires, et chacun
tenant un rôle bien précis ; il s'agit de l'huissier de justice et du créancier saisissant.

En ce qui concerne l'huissier de justice, la saisie conservatoire est


pratiquée entre les mains du capitaine du navire par un huissier de justice qui dresse un
procès-verbal. Copie du procès-verbal est adressée au commandant du port, à l'autorité
maritime compétente ainsi qu'au consul de l'État du pavillon. L'huissier énonce dans
son procès-verbal : les noms, profession et domicile du créancier pour qui il agit ; la
décision judiciaire autorisant la saisie ; le montant de la créance justifiant la saisie ; la
date du commandement de payer ; l'élection de domicile faite par le créancier dans le
lieu où siège l'autorité judiciaire compétente, et dans le lieu où le navire est amarré ;
les noms et adresse du propriétaire du navire ; les noms, catégorie, tonnage et
nationalité du navire. Il est fait énonciation et description dans le procès-verbal, des
chaloupes, agrès et apparaux du navire, ainsi que ses provisions et soutes. Si le navire
saisi bat pavillon d'un État membre de la CEMAC, le procès-verbal de saisie est inscrit
sur le registre tenu par l'autorité maritime compétente et sur lequel le navire est

200
Lexique des termes juridiques, Paris, Dalloz, 14ème éd, 2003, pp 398-399
60

immatriculé. Cette inscription est requise dans un délai de sept jours à compter de la
date du procès-verbal. Ce délai est augmenté de vingt jours si le lieu de la saisie et le
lieu où le registre des immatriculations est tenu, ne sont pas situés dans le même État
de la CEMAC201. Il est à noter que les mentions contenues dans le procès-verbal de
saisie conservatoire des navires, sans être totalement différentes de celles contenues
dans le procès-verbal de saisie conservatoire des biens meubles corporels 202 s'en
rapprochent néanmoins ; les particularités des mentions de la première saisie tenant
forcément à la singularité du navire.

Pour ce qui est du créancier saisissant, à compter de la notification du


procès-verbal de saisie conservatoire, et à peine de caducité, le saisissant doit dans un
délai d'un mois, introduire une procédure ou accomplir les formalités nécessaires à
l'obtention du titre exécutoire203. Telle est à quelques différences près la même
formulation que celle découlant de la saisie conservatoire des biens meubles
corporels204.

Cependant, contrairement au droit commun de la saisie conservatoire


des biens qui prévoit un délai pour mettre en œuvre la mesure accordée par
l'autorisation judiciaire205, le droit spécial de la saisie conservatoire des navires incarné
par le CCMM est muet sur la question. À notre avis, il aurait été opportun pour le
législateur CEMAC de mentionner explicitement cette obligation comme il l'a fait
pour ce qui est de l'obtention du titre exécutoire. En l'absence donc de cette
disposition, nous pouvons dans le cadre de la procédure de saisie conservatoire des
navires soumettre le créancier saisissant à cette obligation ; et la défaillance du
créancier à cette obligation tout comme à l'obligation d'introduire une procédure ou
d'accomplir les formalités nécessaires à l'obtention du titre exécutoire aurait pour
sanction immédiate la caducité, laquelle caducité devra entraîner la mainlevée de la
saisie, signe du déroulement défectueux de la saisie conservatoire des navires.

201
Article 122 du CCMM
202
Apparaissant à l'article 64 de l'AUPSRVE
203
Article 125 du CCMM
204
Article 61 de l'AUPSRVE : « Si ce n'est dans le cas où la saisie conservatoire a été pratiquée avec un titre
exécutoire, le créancier doit, dans le mois qui suit ladite saisie, à peine de caducité, introduire une procédure ou
accomplir les formalités nécessaires à l'obtention d'un titre exécutoire ».
205
Article 60 de l'AUPSRVE : « L'autorisation judiciaire est caduque si la saisie conservatoire n'est pas
pratiquée dans un délai de trois mois à compter de la décision autorisant la saisie ».
61

2. Les incidents de la saisie conservatoire des navires

La saisie conservatoire des navires n'est pas toujours une procédure


normale de saisie. Très souvent, elle est émaillée d'incidents qui viennent en affecter le
cours normal. Parmi ces incidents, les plus retenus sont la mainlevée de la saisie et
l'autorisation de départ du navire ; ce dernier cas pourrait néanmoins être compris dans
le cadre du déroulement normal de la procédure de saisie conservatoire des navires
résultant de l'immobilisation du navire que nous avons déjà examinée, raison pour
laquelle dans le cadre de nos développements, nous nous affranchirons de
l'autorisation de départ du navire pour ne nous consacrer que sur la mainlevée de la
saisie (1) qui devrait normalement et logiquement produire des effets plus ou moins
énergiques (2).

1. La mainlevée de la saisie

Dans notre contexte, l'on entend par mainlevée, l'acte par lequel le juge
ou une partie arrête les effets de la saisie conservatoire des navires ; c'est donc dire que
la mainlevée peut être aussi bien amiable (a) que judiciaire (b).

a. La mainlevée amiable

En pratique, le créancier saisissant exige souvent une lettre de


garantie206 émanant d'un organisme bancaire, du club du propriétaire du navire ou
encore du transporteur maritime, aux termes de laquelle l'auteur de ladite lettre
s'engage à régler la créance cause de la saisie. Or ces lettres de garantie auxquelles ne
font généralement pas partie les débiteurs, comportent souvent une clause attributive
de compétence à une juridiction pour statuer sur le fond de la créance207.

Lorsque la mainlevée n'a pas pu être obtenue à l'amiable entre le saisi et


le saisissant, la voie judiciaire peut s'avérer propice.

b. La mainlevée judiciaire

La mainlevée de la saisie conservatoire des navires consécutive à une


décision judiciaire peut résulter de l'offre par le saisi d'une garantie ou d'une caution,
206
La lettre de garantie club permet la libération du navire ou encore elle empêche la saisie conservatoire du
navire en offrant au réclamant du transporteur une garantie financière à la place du navire. Elle est délivrée par
les associations mutuelles de protection et d'indemnisation plus communément appelées P & I club
207
JULIEN (J.) et TAORMINA (G.), op.cit., p 546
62

de la caducité de la procédure de saisie et de l'abus dans la saisie. Le juge compétent


est le même que celui ayant autorisé la saisie, cette fois saisi en référé. Ce qui revient à
dire dans le contexte camerounais que le juge compétent en la matière est le PTPI ou
le magistrat qu'il délègue à cet effet statuant en matière de référé. Analysons ces
différentes causes de mainlevée judiciaire.

Premièrement, la mainlevée de la saisie consécutive à l'offre par le saisi


d'une caution ou d'une garantie résulte des dispositions internationales et internes sur
la saisie conservatoire des navires. Cette possibilité de mainlevée de la saisie
moyennant caution ou garantie est prévue par la convention de Bruxelles 208, par celle
de Genève209 et aussi sur le plan interne par le CCMM210.

Les deux conventions admettent cette possibilité de mainlevée mais


l'excluent lorsque la créance a pour cause la propriété contestée d'un navire, la
copropriété contestée d'un navire ou sa possession, ou son exploitation, ou les droits
aux produits d'exploitation d'un navire en copropriété ; dans ces cas, seule une
autorisation de départ du navire est possible.

En vertu de la convention de Bruxelles actuellement applicable sur le


plan international, à défaut d'accord des parties sur le montant de la garantie, il
appartiendra au juge de le fixer. Cependant lorsque la créance n'est que partiellement
maritime, il a été considéré que le montant de la garantie de substitution ne soit
équivalent dans sa valeur, qu'à la partie maritime de la créance ; lorsque la garantie de
substitution nécessite pour sa mise en œuvre, une décision de justice prononcée contre
le débiteur, il a été admis qu'une décision définitive n'était pas nécessaire, mais qu'une
décision simplement exécutoire suffirait. Des solutions équivalentes ont été prévues
par la convention de Genève qui rappelons-le, n'est pas encore entrée en vigueur,
laquelle convention dissipe au passage les incertitudes en la matière211.
208
Article 5 de la convention de Bruxelles : « Le tribunal ou toute autre autorité judiciaire compétente dans le
ressort duquel le navire a été saisi, accordera la mainlevée de la saisie lorsqu'une caution ou une garantie
suffisante auront été fournies... »
209
Article 4 paragraphe 1er de la convention de Genève : « Un navire qui a été saisi doit être libéré lorsqu'une
sûreté d'un montant suffisant a été constituée... »
210
Article 116 du CCMM : « ... Pour obtenir cette autorisation, le requérant doit fournir une caution suffisante »
211
Ce texte dispose en effet en son article 4 : « 1. Un navire qui a été saisi doit être libéré lorsqu'une sûreté d'un
montant suffisant et sous une forme satisfaisante a été constituée, sauf dans le cas où la saisie est pratiquée en
raison des créances maritimes énumérées aux alinéas s) et t) du paragraphe 1 de l'article premier. En ce cas, le
tribunal peut permettre l'exploitation du navire par la personne qui en a la possession, lorsque celle-ci aura
constitué une sûreté d'un montant suffisant, ou régler de toute autre façon la question de la gestion du navire
pendant la durée de la saisie
Ce texte dispose en effet en son article 4 : « 1. Un navire qui a été saisi doit être libéré lorsqu'une sûreté d'un
montant suffisant et sous une forme satisfaisante a été constituée, sauf dans le cas où la saisie est pratiquée en
63

Deuxièmement, La mainlevée de la saisie pourrait aussi résulter de la


caducité de la procédure notamment lorsque le saisissant n'aura pas comme il a été ci-
dessus signalé, dans le délai d'un mois à compter de la notification du procès-verbal de
saisie conservatoire, introduit une procédure ou accomplir les formalités en vue de
l'obtention d'un titre exécutoire. Telle est la cause de mainlevée de saisie résultant de
l'affaire « Salam 4 »212.

Troisièmement, la mainlevée judiciaire peut être consécutive à une


saisie conservatoire injustifiée du navire. Tant en droit international qu'en droit interne
CEMAC, la mainlevée consécutive à une saisie conservatoire injustifiée des navires
peut résulter de plusieurs facteurs. Pour mieux cerner la réalité de ces facteurs, nous
ferons appel à une décision rendue sur le territoire camerounais et mettant la lumière
sur la saisie conservatoire injustifiée des navires ; il s'agit de l'affaire du navire « Tim
Buck »213 dont les faits et les résolutions prises par le juge de l'espèce sont les
suivants :

Courant mai 2007, de passage au port de Douala, le navire « Tim


Buck », propriété de la société NB Shipping Ltd, a fait l'objet d'une saisie
conservatoire à l'initiative de la Société Cameroun Continental Merchants Ltd,
laquelle prétendait avoir subi un préjudice évalué à environ 250 000 000 F CFA, en
raison des avaries constatées sur sa cargaison de 3 125 tonnes de blé transportée par le
raison des créances maritimes énumérées aux alinéas s) et t) du paragraphe 1 de l'article premier. En ce cas, le
tribunal peut permettre l'exploitation du navire par la personne qui en a la possession, lorsque celle-ci aura
constitué une sûreté d'un montant suffisant, ou régler de toute autre façon la question de la gestion du navire
pendant la durée de la saisie.
2. Si les parties intéressées ne parviennent pas à un accord sur l'importance et la forme de la sûreté, le tribunal en
détermine la nature et le montant, qui ne peut excéder la valeur du navire saisi.
3. Aucune demande tendant à la libération du navire contre la constitution d'une sûreté ne peut être interprétée
comme une reconnaissance de responsabilité ni comme une renonciation à toute défense ou tout droit de limiter
la responsabilité.
4. Si un navire a été saisi dans un État non partie et n'est pas libéré malgré la constitution d'une sûreté
concernant ce navire dans un État partie relativement à la même créance, la mainlevée de cette sûreté est
autorisée par le tribunal de l'État partie, par ordonnance rendue sur requête;
5. Si, dans un État non partie, le navire est libéré contre la constitution d'une sûreté suffisante concernant ce
navire, la mainlevée de toute sûreté constituée dans un État partie relativement à la même créance est autorisée
par ordonnance si le montant total de la sûreté constituée dans les deux États dépasse :
a) Soit le montant de la créance au titre de laquelle la saisie a été pratiquée;
b) Soit la valeur du navire; la moins élevée des deux devant prévaloir. Cette mainlevée n'est toutefois autorisée
par ordonnance que si la sûreté constituée est effectivement disponible dans l'État non partie et librement
transférable au profit du créancier »
212
PTPI-Bonanjo, ordonnance de référé n°480 du 05 Octobre 2007, affaire Salam international transport and
trading Co. Ltd contre A/S Dan Bunkering, Ecobank S.A. et le greffier en chef du tribunal de première instance
de Douala-Bonanjo, navire « Salam 4 » (inédit)
213
PTPI-Bonanjo, ordonnance de référé n°285 du 18 Mai 2007, affaire capitaine-commandant du navire « Tim
Bunk », Société NB shipping Ltd contre Société Cameroun Continental Merchants Ltd, navire « Tim Bunk »
(inédit)
64

navire « African Sky », lors du déchargement de ce navire au Port Autonome de


Douala (PAD) le 8 octobre 2005. La Société Cameroun Continental Merchants Ltd
s'est alors fondée sur les prévisions de l'article 114 du CCMM, texte qui, à l'instar de
l'article 3 paragraphe 1er de la Convention internationale de Bruxelles du 10 mai 1952
sur la saisie conservatoire de navires, dispose que : « La saisie peut être pratiquée soit
sur le navire auquel la créance se rapporte, soit sur tout autre navire appartenant à
celui qui était, au moment où est née la créance maritime, propriétaire du navire
auquel la créance se rapporte ». En effet, dans l'opinion de la Société Cameroun
Continental Merchants Ltd, le navire « Tim Buck » n'était guère qu'un navire
apparenté, un « sister ship » du navire « African Sky » et, par suite, pouvait être saisi
pour des dettes consécutives à l'exploitation de celui-ci. Le créancier saisissant
affirmait par ailleurs que, pour sécuriser sa créance, il avait déjà saisi, le 10 novembre
2005, le navire « African Sky » à la suite de quoi, une lettre de garantie avait été émise
par le P & I214 club de l'armateur, « The Japan Ship Owners Mutual Protection and
Indemnity », pour un montant de 285 428 euros, en libération du navire. La Société
Cameroun Continental Merchants Ltd faisait assurément fausse route par cela seul que
le navire « Tim Buck » n'avait aucun lien de droit avec le navire débiteur ou causal
qu'était le navire « African Sky », pas plus qu'il n'en avait avec la créance alléguée.
D'autre part, et cela a déjà été relevé ci-dessus, la saisie conservatoire du navire « Tim
Buck » est intervenue après qu'une garantie suffisante ait déjà été fournie, pour la
même créance, à l'occasion d'une précédente saisie. Dans ces conditions, la seconde
saisie devenait assurément abusive. Aussi, se fondant sur les dispositions de l'article 3
paragraphe 1er, mais surtout sur celles du paragraphe 3 de la Convention de Bruxelles
susvisée, le Capitaine-commandant et l'armateur du navire « Tim Buck », défendus par
le Cabinet NGAMKAN, se sont pourvus devant le juge des référés en rétractation de
l'ordonnance ayant autorisé la saisie et en mainlevée de cette saisie. En effet, l'article 3
paragraphe 3 de la Convention prescrit que : « Un navire ne peut être saisi et caution
ou garantie ne sera donnée plus d'une fois dans la juridiction d'un ou plusieurs des
États contractants, pour la même créance et par le même demandeur ; et, un navire est
saisi dans une desdites juridictions et une caution ou une garantie a été fournie, soit
pour obtenir la mainlevée de la saisie, soit pour éviter toute saisie ultérieure de ce

214
Protection and indemnity club, ce sont les associations de protection et d'indemnisation d'armateurs qui
s'assurent mutuellement contre les risques de responsabilité qu'ils encourent vis-à-vis des tiers lors de
l'exploitation des navires et contre quelques responsabilités contractuelles découlant de la gestion et de
l'exploitation des navires
65

navire, ou de n'importe quel autre navire appartenant au même propriétaire, par le


demandeur et pour la même créance maritime, sera levée et le navire sera libéré par le
tribunal ou toute autre juridiction compétente dudit État, à moins que le demandeur ne
prouve, à la satisfaction du tribunal ou de toute autre autorité judiciaire compétente,
que la garantie ou la caution a été définitivement libérée avant que la saisie
subséquente n'ait été pratiquée ou qu'il n'y ait une autre raison valable pour la
maintenir ». Le juge des référés a accédé aux demandes du capitaine et de l'armateur
sur la base des considérations ci-après : « En l'espèce, de part leur dénomination, le
navire auquel la créance se rapporte et celui sur lequel la saisie est pratiquée sont
différents et aucune preuve n'a été rapportée établissant que celui à qui il appartient, en
l'occurrence NB Shipping Ltd, était propriétaire de celui auquel la créance se rattache
au moment où cette créance est née ; selon toute apparence, au regard des pièces
produites par le demandeur, le navire « Tim Buck » appartient à la société NB
Shipping Ltd et n'a jamais changé de propriétaire depuis 1994 ; une garantie avait déjà
été donnée au même saisissant pour la même créance... »215.

On comprend bien à l'analyse de ces décisions que la saisie peut


paraître abusive dès lors qu'une caution jugée suffisante a déjà été donnée pour la
garantie de la créance cause de la saisie ; dans ce cas, la deuxième saisie sera
injustifiée ; il peut en être aussi lorsque l'immobilisation consécutive à la saisie
conservatoire d'un navire aurait causé un préjudice au propriétaire dudit navire alors
que le navire saisi n'est point un navire apparenté au navire causal ; Dans ces
circonstances, la mainlevée du navire saisi qui découlera de la décision du juge
produira forcément des effets.

2. Les effets de la mainlevée

L'effet principal de toute mainlevée de saisie conservatoire du navire


est tout logiquement la libération du navire.

Cet effet s'applique pleinement et sans autre effet lorsqu'il s'agit de la


mainlevée amiable et de la mainlevée suite à l'offre d'une caution ou d'une garantie.

Pour ce qui est de la mainlevée consécutive à la caducité de la saisie, en


plus de la libération du navire, le débiteur saisi pourra réclamer devant le juge des
référés le remboursement des sommes avancées pour la libération dudit navire. Telle
215
www.cabinet-ngamkan.com.
66

est la solution retenue par le PTPI de Bonanjo dans l'affaire « Salam 4 » ci-dessus. En
effet, le créancier saisissant n'ayant pas à temps enrôlé son assignation pour l'obtention
du titre exécutoire devant le TGI du Wouri, la partie saisie, nantie d'un certificat de
non enrôlement délivré par le greffier en chef dudit TGI a assigné la partie saisissante
en restitution de la garantie devant le PTPI de Bonanjo statuant en matière de référé
d'heure à heure, lequel PTPI a ordonné la restitution immédiate et sans condition de la
garantie faisant ainsi suite favorablement aux desiderata de la partie saisie.

La mainlevée produira des effets beaucoup plus énergiques lorsque la


saisie dont la mainlevée est demandée et obtenue aurait été abusive ou injustifiée.
Dans ce cas, le CCMM s'est prononcé et dispose : « Tout propriétaire de navire, qui
aura obtenu la mainlevée ou la rétractation de la saisie pourra assigner le saisissant en
réparation du préjudice subi du fait de l'immobilisation du navire, s'il est avéré que la
saisie était injustifiée »216. Toujours dans le contexte camerounais, les suites de
l'affaire « Tim Buck » ci-dessus analysée en sont très significatives.

216
Article 126 du CCMM, inspiré de l'article 6 paragraphe 2 de la convention de Genève
67

CHAPITRE II. L'ADAPTATION DES RÈGLES DE SAISIE DE DROIT COMMUN À


LA SAISIE DES NAVIRES

Comme il a déjà été dit, sans toutefois se démarquer fondamentalement


du droit commun de la saisie en général 217, la saisie des navires conserve certaines
singularités avec les règles découlant de l'AUPSRVE ; ces singularités étant observées
soit à l'analyse comparative des règles de la saisie des navires 218 avec celles de la saisie
de droit commun, soit par renvoi des textes régissant la saisie des navires à ceux
régissant le droit commun, soit tout simplement en cas de silence des textes sur la
saisie des navires en ce qui concerne une question bien précise des procédures civiles
d'exécution dont l'éclaircissement mérite d'être fait. Ces singularités sont observées
dans les deux facettes de la saisie des navires, c'est-à-dire dans la saisie conservatoire
et dans la saisie-exécution desdits navires.

C'est ainsi que dans un premier temps, le navire, étant considéré comme
ayant une nature juridique mobilière corporelle219, il sera soumis au régime de la saisie
conservatoire dont l'adaptation des règles qui en découlent sera faite avec celles
découlant de la saisie conservatoire des biens meubles corporels (section 1).

Dans un second temps, le navire, ayant un régime s'apparentant à celui


d'un immeuble, il sera soumis plutôt à la saisie-exécution220, c'est-à-dire la phase
exécutoire de la saisie ; ceci étant, l'adaptation des règles de cette phase exécutoire
sera faite avec celles ayant cours à la saisie immobilière (section).

217
Aussi bien la saisie des biens meubles que celle des biens immeubles
218
Aussi bien la saisie conservatoire que la saisie-exécution des navires
219
Ordonnance-loi n°66-98 du 14/3/1966 portant code de la navigation maritime, Article 2
220
Étant donné que les immeubles ne peuvent être conservatoirement saisis
68

Section 1. L'adaptation des règles de la saisie conservatoire des biens meubles corporels
à la saisie conservatoire des navires

À la lecture des textes régissant la saisie des navires, l'on se rend


compte que certaines conditions permettant l'ouverture de ladite saisie sont celles que
l'on retrouve in extenso dans les textes régissant les procédures civiles d'exécution de
droit commun au point où l'on pourrait affirmer sans ambages que les législateurs
spéciaux de la saisie des navires en ont fait une pure et simple adaptation.

En tout état de cause, l'adaptation des règles de la saisie conservatoire


des biens meubles corporels à la saisie des navires concerne à notre sens les conditions
de saisie et il nous incombe dès lors de les analyser tant en ce qui concerne les
conditions objectives (paragraphe 1) qu'en ce qui concerne les conditions subjectives
(paragraphe 2) de saisie du bien.

§1. L'adaptation quant aux conditions objectives de saisie du bien

Certaines de ces conditions objectives sont extrinsèques au bien qui fait


l'objet de la saisie conservatoire, et concernent tout simplement la formalité à
accomplir pour l'ouverture de toute saisie conservatoire de biens meubles, il s'agit de
l'obtention d'une autorisation judiciaire de saisie (A) ; d'autres par contre sont
intrinsèques parce qu'elles tiennent au bien lui-même, il s'agit dès lors de conditions
relatives au bien, objet de la saisie (B).

A. L'exigence d'une autorisation judiciaire

En saisie des navires, et plus qu'en saisie conservatoire mobilière de droit


commun, elle est rendue nécessaire et obligatoire (1) et le refus par le juge d'octroyer
69

cette autorisation, pourrait déboucher à une suite qui n'est pas autre chose que le
recours reconnu au saisissant contre ladite décision de refus (2).

1. La nécessité d'une autorisation judiciaire

Pour l'exercice d'une saisie conservatoire corporelle de droit commun,


l'AUPSRVE exige que soit donné l'accord d'une autorité judiciaire ; cet accord est
appréhendé sous la forme d'une autorisation221.

Ce principe d'exigence d'une autorisation judiciaire pour saisir


conservatoirement un bien meuble n'est pas dérogé lorsque le bien meuble en question
est un navire. Pour ce faire, tant le droit international notamment la CEMAC 222 qu’en
droit interne congolais exigent une autorisation judiciaire pour pratiquer une saisie
conservatoire de navire. Dans cette optique, l'article 4 de la convention de Bruxelles 223
ainsi que le deuxième alinéa de l'article 6 224 et l'article 108225 exigent une autorisation
délivrée par l'autorité judiciaire compétente dont description a déjà été faite.

Conséquemment, la saisie conservatoire de navire pratiquée sans


autorisation délivrée par l'autorité judiciaire compétente devrait tout comme en droit
commun de la saisie conservatoire mobilière donner lieu à la mainlevée 226 qui
s'analyserait dans ce cas comme une nullité. C'est en tout cas la solution retenue en
droit français dont à titre d'exemple de ce principe, on peut citer un arrêt où les juges
de la Cour de cassation ont jugé qu' « en vertu de l'article 4227 de la convention de
Bruxelles du 10 mai 1952 comme de l'article 29 du décret du 27 octobre 1967228, il ne
221
l'article 54 de l'AUPSRVE
222
Article 115 de la CCMM CEMAC
223
convention de Bruxelles de 10 mai 1952 pour l’unification de certainses règles sur la saisie conservatoire des
navires de me, Article 4: « Un navire ne peut être saisi qu'avec l'autorisation d'un Tribunal ou de toute autre
Autorité Judiciaire compétente de l'État Contractant dans lequel la saisie est pratiquée » ; voir aussi l'article 2
de la convention de Genève ultérieurement applicable.
224
convention de Bruxelles de 10 mai 1952 pour l’unification de certainses règles sur la saisie conservatoire des
navires de me, Article 6 alinéa 2: « Les règles de procédure relatives à la saisie d'un navire, à l'obtention de
l'autorisation visée à l'art. 4 et à tous autres incidents de procédure qu'une saisie peut soulever sont régies par
la loi de l'État Contractant dans lequel la saisie a été pratiquée ou demandée »
225
Ordonnance-loi n°66-98 du 14/3/1966 portant code de la navigation maritime, L’article 108: « Dans les cas
qui requièrent célérité, le président du tribunal de première instance peut permettre de saisir conservatoirement
les navires qui se trouvent dans le ressort du tribunal. Le juge-président du tribunal de district peut également
autoriser la saisie lorsque le bâtiment se trouve dans le ressort de son tribunal. L'autorisation ne peut être
accordée que pour garantir une créance maritime
226
Article 62 de l'AUPSRVE
227
Article 4 : « Un navire ne peut être saisi qu’avec l’autorisation d’un Tribunal ou de toute autre Autorité
Judiciaire compétente de l’Etat Contractant dans lequel la saisie est pratiquée »
228
Il a déjà été dit que le décret français de 1967 relatif au statut des navires et autres batiment de mer, fait office
de droit interne français en matière de saisie conservatoire de navire. Son article 29 dispose : « La saisie
conservatoire est autorisée par ordonnance rendue sur requête par le président du tribunal de commerce ou, à
70

peut être pratiqué de saisie conservatoire d'un navire sans l'autorisation préalable du
juge et qu'à défaut, la saisie est nulle »229. Dans la présente espèce, la société Recofi
était créancière de la société de droit angolais Important en vertu d'un jugement du
tribunal de commerce de Paris rendu le 13 octobre 1992. Afin de contraindre la
débitrice de payer la somme due, elle a fait saisir conservatoirement le navire « Secil
Angola », appartenant à la société de droit angolais Secil Maritima. Dans la présente
espèce, la saisie était pratiquée sans l'autorisation préalable du juge, sur le seul vu du
jugement de condamnation et elle était valide selon les juges du fond. La Cour de
cassation a jugé qu'une autorisation du juge était nécessaire, l'absence de celle-ci
entraîne l'annulation de la saisie. Cette solution semble logique pour plusieurs
arguments : en premier lieu, il s'agit d'une condition qui ressort du texte même du
décret interne français de 1967 : « La saisie conservatoire est autorisée par
ordonnance... ».

Ensuite, on peut souligner que le rôle du juge en matière de saisie


conservatoire consiste d'une part à vérifier que le saisissant a une apparence de
créance et d'autre part, que le navire à saisir répond à la dette invoquée. Il paraît
nécessaire, avant de prendre une mesure immédiatement préjudiciable sur le plan
économique, telle que la saisie conservatoire d'un navire, que le juge puisse s'assurer
de la réalité des faits afin d'éviter les saisies abusives230.

Force est alors de constater qu'une autorisation préalable à la saisie


accordée par le juge doit avoir lieu, ne serait-ce que pour ne pas laisser le créancier
opérer sans contrôle.

En vertu de son pouvoir souverain d'appréciation, le président du


tribunal peut rejeter la requête du saisissant ou faire droit à celle-ci en autorisant la
saisie. La décision autorisant la saisie doit à peine de nullité préciser le montant des
sommes pour la garantie desquelles la saisie est autorisée et préciser les
caractéristiques du navire sur lequel porte la saisie 231. Dans la pratique, la décision du
juge autorisant la saisie figure en bas de la requête sollicitant cette mesure.

défaut, par le juge d'instance »


229
Cass.com 1er octobre 1997, Société Secil Maritima c/ Société Recofi
230
GOUILLOUD (R.), Droit maritime, Pédone, 2ème édition 1993, n°289, p. 181
231
Article 59 de l'AUPSRVE
71

Au regard de ces analyses, on comprend bien qu'une autorisation


judiciaire s'avère obligatoirement nécessaire pour contourner les éventuels abus du
créancier véreux nonobstant les dispositions de l'article 55 de l'AUPSRVE 232. En cas
de refus par le juge d'autoriser ladite saisie, le créancier pourra en vertu du droit
commun, intenter un recours.

2. Le recours contre la décision judiciaire de refus d'autorisation de saisie

En l'absence de précisions des textes sur la saisie des navires en ce qui


concerne le recours contre la décision judiciaire de refus d'autorisation de saisie
conservatoire des navires, il est important de faire un important détour aux règles qui
ont cours en droit commun. Ceci étant, l'article 49 de l'AUPSRVE est le siège de cette
institution contentieuse233.

L'alinéa 1er de cet article dispose que la juridiction compétente pour


statuer sur tout litige ou sur toute demande relative à une mesure d'exécution forcée ou
à une saisie conservatoire est le président de la juridiction statuant en matière
d'urgence ou le magistrat délégué par lui234.

Son alinéa 2 exige comme voie de recours contre ce refus d'autorisation


judiciaire de saisie, l'appel qui doit être exercé dans un délai de quinze jours à compter
du prononcé de cette décision de refus. Le délai d'appel, comme l'exercice de cette

232
Cet article dispose : « Une autorisation judiciaire préalable de la juridiction compétente n'est pas nécessaire
lorsque le créancier se prévaut d'un titre exécutoire. Il en est de même en cas de défaut de paiement, dûment
établi, d'une lettre de change acceptée, d'un billet à ordre, d'un chèque, ou d'un loyer impayé après
commandement dès lors que celui-ci est dû en vertu d'un contrat de bail d'immeuble écrit »
233
Article 49 : « La juridiction compétente pour statuer sur tout litige ou toute demande relative à une mesure
d'exécution forcée ou à une saisie conservatoire est le président de la juridiction statuant en matière d'urgence
ou le magistrat délégué par lui.
Sa décision est susceptible d'appel dans un délai de quinze jours à compter de son prononcé.
Le délai d'appel comme l'exercice de cette voie de recours n'ont pas un caractère suspensif, sauf décision
contraire spécialement motivée du président de la juridiction compétente »
234
En droit congolais, c’est le tribunal de commerce, article 17 Loi n° 002/2001 du 03 juillet 2001 portant
création, organisation et fonctionnement des tribunaux de commerce. En cas éventuel, c’est le tribunal de paix tel
que libélé par l’article 111 de la loi n°13/011 – B du 11 avril 2013 portant organisation, fonctionnement et
compétence de juridiction de l’ordre judiciaire
72

voie de recours, précise l'alinéa 3, n'ont pas un caractère suspensif, sauf décision
contraire spécialement motivée du président de la juridiction compétente.

Si à l'issue de ce contentieux, le créancier obtient gain de cause, la


saisie conservatoire intentée par lui pourrait éventuellement être neutralisée par l'effet
d'une mainlevée lorsque les conditions relatives au bien qui forme l'objet de la saisie,
n'ont pas été observées.

B. Les conditions relatives au bien, objet de la saisie

Suivant le droit commun de la saisie conservatoire mobilière, le


principe de la saisissabilité des navires peut être dégagé (1) ; et comme tout principe,
des exceptions lui sont logiquement reconnues (2).

1. Le principe de la saisissabilité des navires

Il est de principe en droit commun de la saisie conservatoire mobilière


que tous les biens appartenant au débiteur peuvent être saisis sauf s'ils ont été déclarés
insaisissables par la loi nationale de chaque État partie 235. Ce principe communément
admis trouve aussi toute sa légitimité lorsqu'il s'agit de procéder conservatoirement à
la saisie de navire. Ceci dit, et par analogie, tous les navires appartenant au débiteur
sont saisissables à moins qu'ils n'aient été déclarés insaisissables par la loi nationale 236,
le code de la navigation maritime est resté silencieux, on ne peut admettre la
saisissabilité de navire de l’Etat du fait qu’elle necessite la satisfaction de l’intéret
génral ou par un ordre juridique international étant donné la dimension
particulièrement planétaire du navire.

Cependant, la problématique des navires prêts à faire voile 237 a été


soulevée en France. Traditionnellement, en droit français, le législateur a voulu
faciliter la liberté de navigation. Par conséquent, les navires prêts à faire voile ne
pouvaient faire l'objet d'une saisie puisque leur immobilisation entraînait des pertes
financières. L'article 215 du Code de Commerce interdisait la saisie des navires prêts à

235
Article 50 de l'AUPSRVE
236
Article 10 de la loi du 20 juillet 1973 : « Les biens de l’Etat qui sont affectés à un usage ou à un service
public sont hors commerce, tant qu’ils ne sont pas régulièrement désaffectés »
237
RODIÈRE (R.), Droit maritime, Le navire, Paris, Dalloz, t.1 1980, n°190 : il faut entendre par « navire prêt à
faire voile », celui qui a « reçu ses expéditions pour le départ, congé, patente de santé », c'est-à-dire que le
navire est prêt à appareiller
73

faire voile. Cette règle a été écartée expressément par la Convention de 1952 238. Elle
ne figure pas non plus dans la loi de 1967. Désormais, la saisie des navires prêts à
faire voile tend à devenir la règle. Toutefois, étant donné l'importance des préjudices
occasionnés par cette saisie, le juge se livre à un contrôle en tenant compte de la valeur
des intérêts en jeu. Dans cette affaire, les juges de la Cour d'appel d'Aix en Provence
ont estimé que la saisie pratiquée sciemment et sans nécessité un vendredi en fin de
matinée, sur un navire en partance et en charge de ses passagers et véhicules, dépassait
la fin légitime d'une saisie conservatoire et exerçait une pression quasi intolérable sur
le débiteur239.

Selon l'article 50 de l'AUPSRVE, « Les saisies peuvent porter sur tous


les biens appartenant au débiteur alors même qu'ils seraient détenus par des tiers ... ».
La saisie du navire et comme il a déjà été dit, ne tient pas compte en principe de son
affectation au commerce, à la pêche, à la plaisance. Tous les navires sont saisissables
dans les mêmes conditions. Cependant, ce principe souffre d'exceptions tirées pour la
plupart du droit commun.

2. Les exceptions : les insaisissabilités

Ces insaisissabilités peuvent résulter du principe selon lequel, « saisie


sur saisie ne vaut » (a), et de la règle établie par l'article 51 de l'AUPSRVE (b)240.

a. Le principe général « saisie sur saisie ne vaut »

Il est de règle générale que lorsque les biens du débiteur ont déjà fait
l'objet d'une première saisie, d'autres saisies ultérieures ne peuvent plus être pratiquées
sur ces mêmes biens ; la première saisie ayant déjà rendu ces biens indisponibles.
Telle est la signification de la règle selon laquelle, « saisie sur saisie ne vaut ». Cette
règle interdisait au second créancier de saisir une seconde fois les mêmes biens.
Toutefois, il lui était loisible de se joindre aux poursuites déjà engagées en établissant
un procès-verbal de récolement241.

238
convention de Bruxelles de 10 mai 1952 pour l’unification de certainses règles sur la saisie conservatoire des
navires de me, Article 3 dont il ressort que le créancier peut saisir le navire qui serait prêt à faire voile.
239
GEORGIEVA (R.), La saisie conservatoire des navires (Étude comparative en Droit Français et en Droit
International), Mémoire pour le Master 2 « Droit Maritime et des Transports », Université PAUL CÉZANNE
d'Aix-Marseille III, année universitaire 2010-2011, p 30
240
Cet article dispose : « Les biens et droits insaisissables sont définis par chacun des États parties »
241
ASSI-ESSO (A.-M.), DIOUF (N.), op.cit., p 58.
74

Cette règle découlant du régime général des saisies de certains Etats


n'est pas dérogée en matière de saisie conservatoire des navires ; d'ailleurs, elle y
reçoit même une adaptation nettement perceptible dans les textes afférents dont la
jurisprudence en a fait application.

En effet, en droit international de la saisie des navires, la convention de


Bruxelles donne une appréhension particulière à la règle « saisie sur saisie ne vaut »
dans son article 3 paragraphe 3 dont la teneur est : « Un navire ne peut être saisi et
caution ou garantie ne sera donnée, plus d'une fois dans la juridiction d'un ou
plusieurs des États contractants, pour la même créance et par le même demandeur; et
si un navire est saisi dans une desdites juridictions et une caution ou une garantie a
été donnée, soit pour obtenir la mainlevée de la saisie, soit pour éviter celle-ci, toute
saisie ultérieure de ce navire, ou de n'importe quel autre navire, appartenant au même
propriétaire, par le demandeur et pour la même créance maritime, sera levée et le
navire sera libéré par le tribunal ou toute autre juridiction compétente dudit État, à
moins que le demandeur ne prouve, à la satisfaction du tribunal ou de toute autre
autorité judiciaire compétente, que la garantie ou la caution a été définitivement
libérée avant que la saisie subséquente n'ait été pratiquée ou qu'il n'y ait une autre
raison valable pour la maintenir »242.

La jurisprudence française243 a eu l'occasion de faire une application


littérale de ce principe. En effet, la Cour de cassation en 2011 a prononcé un arrêt de
rejet confirmant en quelque sorte l'adage « saisie sur saisie ne vaut ». Cet arrêt de rejet
a pour point de départ un contrat de réparation navale qui a donné lieu à un
contentieux entre les parties, le propriétaire du navire reprochant, entre autres, au

242
La future convention de Genève reprend en son article 5 les exigences de la convention de Bruxelles de
1952mais avec plus de souplesse et de tolérance puisque cet article dispose : « 1. Lorsque, dans un État, un
navire a déjà été saisi et libéré ou qu'une sûreté a déjà été constituée pour garantir une créance maritime, ce
navire ne peut ensuite faire l'objet d'aucune saisie fondée sur la même créance maritime, à moins que :
a) La nature ou le montant de la sûreté concernant ce navire déjà constituée en vertu de la même créance ne soit
pas suffisant, à condition que le montant total des sûretés ne dépasse pas la valeur du navire; ou
b) La personne qui a déjà constitué la sûreté ne soit ou ne paraisse pas capable d'exécuter tout ou partie de ses
obligations; ou
c) La mainlevée de la saisie ou la libération de la sûreté ne soit intervenue :
i) soit à la demande ou avec le consentement du créancier agissant pour des motifs raisonnables,
ii) soit parce que le créancier n'a pu par des mesures raisonnables empêcher cette mainlevée ou cette libération.
2. Tout autre navire qui serait autrement susceptible d'être saisi en vertu de la même créance maritime ne peut
être saisi à moins que :
a) La nature ou le montant de la sûreté déjà constituée en vertu de la même créance ne soit pas suffisant; ou
b) Les dispositions du paragraphe 1 b) ou c) du présent article ne soient applicables »
243
Cass.com, 8 mars 2011, Société Indian Empress Limited c/ Société Nautical Technologies, navire « Indian
Empress »
75

réparateur des surfacturations244. Par ordonnance de référé, le réparateur obtient la


condamnation du propriétaire à lui verser une provision, ordonnance sur le fondement
de laquelle le premier fait pratiquer une saisie conservatoire sur le navire, situé à
Malte245. Par la suite, la mainlevée de cette saisie a été ordonnée, mais moyennant la
consignation d'une certaine somme d'argent. Puis la société de réparation obtient la
condamnation du propriétaire du navire sur le fond, à la suite de quoi il fait à nouveau
pratiquer, sur ordonnance, une saisie conservatoire sur le même navire, cette fois en
France, et également avec succès. La mainlevée de cette seconde saisie est également
ordonnée, cette fois après remise d'une caution bancaire. Le propriétaire du navire a
alors demandé la rétractation de l'ordonnance autorisant la seconde saisie, ce qui lui
est refusé. Ce refus est confirmé par la Cour de cassation, au vu de l'article 3
paragraphe 3 de la Convention de Bruxelles du 10 mai 1952 pour l'unification de
certaines règles sur la saisie conservatoire des navires de mer, selon lequel un navire
ne peut être saisi plus d'une fois dans la juridiction d'un ou plusieurs des États
contractants, pour la même créance et par le même demandeur. Ce texte ne fait en
réalité que reprendre un vieil adage du droit des procédures d'exécution : « saisie sur
saisie ne vaut ». Or, la saisie ayant été pratiquée à Malte, État non signataire de la
convention de 1952, le texte en cause ne pouvait recevoir application. La Cour de
cassation approuve d'ailleurs pleinement la Cour d'appel d'avoir limité la portée de
l'interdiction posée par ce texte aux saisies pratiquées dans les États contractants et
d'en avoir déduit que la saisie pratiquée en France ne pouvait être rétractée au regard
de ladite convention. Seule la violation de cette dernière ayant, semble-t-il, été
invoquée par le propriétaire du navire, il ne pouvait être reproché aux juges d'avoir
invalidé la seconde saisie, cette fois sur le fondement du droit commun français des
procédures civiles d'exécution.

En résumé l'adage « saisie sur saisie ne vaut » dégagé en vertu du


dispositif de l'article 3 paragraphe 3 de la convention de Bruxelles ne s'appliquerait
que si le navire qui avait déjà été saisi dans un État signataire de ladite convention
vient une fois de plus à être l'objet d'une nouvelle saisie par le même demandeur et

244
Sur l'arrêt d'appel, V. Aix-en-Provence, 12 nov. 2009, DMF 2010. 52, obs. RÉMOND-GOUILLOUD
245
On précisera qu'en matière de saisie conservatoire de navire, ce n'est pas le juge de l'exécution qui est
compétent, mais le président du tribunal de commerce ou à défaut celui du tribunal d'instance, statuant également
par voie d'ordonnance ; V. décret n° 67-967 du 27 octobre 1967, article 29 -- V. Racine, Rép. com., v° Navire
[Saisie et vente publique], mai 2008, nos 26 s
76

pour la même créance maritime. Cette règle est en vertu du même texte étendue à tous
les navires appartenant au débiteur.

Cependant, en droit camérounais, étant donné le caractère subsidiaire


du CCMM en matière de saisie de navire, et vu le fait que la quasi-totalité des États
membres de la CEMAC sont parties à la convention de Bruxelles, cette règle devrait y
recevoir pleine application en matière de saisie ultérieure.

Toutefois, pour que ce principe reçoive cette pleine application, il ne


faudrait pas que le navire en cause soit déclaré insaisissable en vertu de l'article 51 de
l'AUPSRVE.

b. Les insaisissabilités en vertu de l'article 51 de l'AUPSRVE

L'article 51 de l'AUPSRVE dispose : « Les biens et droits insaisissables


sont définis par chacun des États parties ». L'Acte uniforme renvoie ainsi à la loi
nationale de chaque État partie pour fixer la liste des biens et droits insaisissables.
Généralement, plusieurs cas d'insaisissabilités sont prévus. Premièrement, il y a ceux
qui sont édictés dans l'intérêt du débiteur. Ainsi, sont insaisissables, les objets
mobiliers corporels indispensables à la vie du débiteur, les créances ayant un caractère
alimentaire, les pensions civiles et militaires, les indemnités ou rentes perçues en vertu
de la réglementation sur les accidents de travail, les prestations familiales et les
salaires pour la fraction fixée par la loi. Deuxièmement, il y a des cas
d'insaisissabilités édictés pour des raisons sociales ; ainsi, certaines législations
prévoient que les immeubles et les objets mobiliers nécessaires aux réunions des
syndicats, à leur bibliothèque et à leur cours d'instruction professionnelle sont
insaisissables. Troisièmement et enfin, il y a le cas d'insaisissabilité édicté dans
l'intérêt du commerce ; dans beaucoup de législations, les effets de commerce sont
insaisissables.

Tels sont les cas d'insaisissabilités que l'on retrouve en matière de saisie
conservatoire mobilière de droit commun et qui sont dans le contexte camerounais
contenus dans les articles 327 et suivants du CPCC. Ces insaisissabilités devraient à
notre sens recevoir application en matière de saisie particulière de navire ; mais, étant
donné le caractère particulièrement général de ces insaisissabilités, seuls quelques cas
seulement méritent une adaptation à la saisie conservatoire des navires, les autres cas
s'avérant inappropriés à l'objet que constitue le navire.
77

Ceci étant, l'insaisissabilité la plus marquante du navire et découlant du


droit commun est l'insaisissabilité qui est édictée dans l'intérêt du commerce et par
adaptation, dans l'intérêt du commerce maritime. Ceci tient particulièrement aux
navires qui sont les instruments indispensables de travail du débiteur ; il s'agit là de
l'insaisissabilité de principe dont les arguments qui la corroborent seront puisés dans le
droit français.

En France, la loi protège efficacement les navires, instruments de


travail par une insaisissabilité de principe, pour autant que sont réunies deux
conditions : l'exercice d'une activité professionnelle (le travail) et l'utilisation du navire
allégué (l'instrument nécessaire et indispensable à l'exercice de cette activité). Le
principe a été appliqué par les tribunaux français aux navires de pêche 246. Ce principe
subit des dérogations selon l'article 14 alinéa 4 de la loi du 9 juillet 1991 portant
réforme des procédures civiles d'exécution. D'après cet article, les navires sont
susceptibles d'être saisis s' « ils se trouvent dans un lieu autre que celui où le saisi
demeure ou travaille habituellement » et s' « ils sont des biens de valeur, en raison
notamment de leur importance, de leur matière, de leur rareté, de leur ancienneté ou
de leur caractère luxueux ». Cependant, il faut noter que cette circonstance reste sans
effet si le navire est l'unique instrument de travail de l'artisan que la loi protège 247.

L'on se rend donc compte que, relativement aux conditions objectives


de la saisie conservatoire des navires, certaines adaptations ont mérité d'être faites
avec les règles issues du droit commun de la saisie conservatoire mobilière, ce travail
intellectuel se prolongera également au niveau des conditions subjectives.

§2. L'adaptation quant aux conditions subjectives de saisie du bien

La saisie conservatoire des navires fait intervenir généralement deux


principaux personnages que l'on retrouve également dans les saisies conservatoires de
droit commun d'où l'adaptation a été faite ; cette adaptation se fera tout d'abord en ce
qui concerne la personne du saisissant (A) et ensuite en ce qui concerne celle du saisi
(B).

A. Quant au saisissant
246
Trib. Com Montpellier, 19 octobre 1978, navire « PHOEBUS », DMF 1979, p.336
247
Idem
78

Le créancier saisissant est celui qui est titulaire du droit de saisir ; mais
en réalité, il n'exerce pas toujours ce droit lui-même. C'est donc dire que la qualité de
saisissant, si elle est principalement réservée au créancier originel (1), il est des cas où
celui-ci ne peut agir et par conséquent, d'autres personnes auront cette qualité (2).

1. Le créancier originel

La définition lapidaire qui est donnée au terme « créancier » est qu'il est
un « titulaire d'un droit de créance »248. C'est cette qualité qui confère à toute personne
le droit de saisir en matière de droit commun de la saisie puisque l'AUPSRVE dispose
que : « À défaut d'exécution volontaire, tout créancier peut (...) pratiquer une mesure
conservatoire pour assurer la sauvegarde de son droit »249. Il s'agit là en quelque sorte
du fondement de la qualité pour agir en saisie conservatoire. C'est donc en principe le
créancier originel qui a qualité pour agir ; il s'agit du créancier qui est personnellement
en relation avec le débiteur.

En matière de saisie conservatoire de navire, les textes actuellement


applicables n'utilisent pas expressément le vocable « créancier » en ce qui concerne le
droit d'agir. Ils se contentent d'employer le terme « demandeur » pour ce qui est de la
convention internationale de Bruxelles250 et aucun terme subjectif pour ce qui est du
CCMM251. Mais dans l'un et dans l'autre cas, il faudra exciper la qualité de créancier
pour pouvoir parvenir à la saisie conservatoire du navire.

Étant donné la vacuité des textes particuliers sur la saisie des navires, le
créancier, à l'image du droit commun peut être un créancier chirographaire ou
privilégié. Dans la même logique, et dans la même lancée d'adaptation de la saisie
conservatoire de droit commun à la saisie conservatoire des navires, si la créance
alléguée par le créancier n'est pas hypothécaire ou privilégiée, l'exécution doit être
poursuivie en premier lieu sur les biens meubles et en cas d'insuffisance, sur les
immeubles252. Pratiquement, il s'agit de dire qu'étant donné la nature juridique

248
GUILLIEN (R.) et VINCENT (J.), op.cit., p 178
249
Article 28 alinéa 1 de l'AUPSRVE
250
convention de Bruxelles de 10 mai 1952 pour l’unification de certainses règles sur la saisie conservatoire des
navires de me, Article 3: « ... tout demandeur peut saisir... ». Au sens de cette convention, le terme demandeur
renvoie à une « personne, invoquant à son profit, l'existence d'une créance maritime » (article 1 paragraphe 4)
251
Le CCMM se contente uniquement de l'allégation d'une créance maritime paraissant fondée dans son principe,
même si cela renvoie à la qualité de créancier
252
Ceci en vertu de l'article 28 alinéa 2 de l'AUPSRVE qui dispose : « Sauf s'il s'agit d'une créance hypothécaire
ou privilégiée, l'exécution est poursuivie en premier lieu sur les biens meubles et, en cas d'insuffisance de ceux-
ci, sur les immeubles »
79

mobilière conférée au navire253, celui qui allègue une créance maritime chirographaire
ne pourra saisir un immeuble du débiteur qu'en cas d'insuffisance des navires et des
autres meubles pour régler la totalité de la créance 254. Il en est de même si le créancier
a une hypothèque ou un privilège sur le navire, auquel cas il ne pourra saisir un
immeuble du débiteur que si le navire couvert par l'hypothèque ou par le privilège s'est
avéré insuffisant.

De toutes les façons, il devra se poser un problème de capacité du


créancier pour l'exercice de la saisie conservatoire du navire. Ce problème se pose
lorsque le créancier saisissant est frappé d'une incapacité. Cet état de choses concerne
les mineurs non émancipés et les majeurs incapables. Tout comme en droit commun
de la saisie conservatoire des biens, la véritable difficulté est celle de déterminer si la
saisie conservatoire mobilière est un acte d'administration, un acte de disposition ou
un acte judiciaire. Contrairement à la loi française 255 dont il s'inspire, l'AUPSRVE n'a
pas expressément déterminé la nature juridique de la saisie. Mais si l'on se réfère à la
définition de la saisie qu'il donne, cette lacune peut être comblée ; la saisie étant une
procédure de recouvrement de créance, elle doit à ce titre être qualifiée d'acte
d'administration, c'est-à-dire un acte de gestion courante d'un patrimoine. Ayant la
capacité requise pour effectuer un acte d'administration si la loi l'y autorise, le mineur
non émancipé peut pratiquer les saisies mobilières et par conséquent les saisies
conservatoires de navire, lesquelles seront donc par nature, et comme toutes les saisies
mobilières, des actes d'administration.

C'est donc dire que dans les cas où la loi ne l'y autorise pas, la mineur
non émancipé ne serait pas fondé à intenter par lui-même des saisies mobilières. Tout
de même, si les saisies mobilières étaient considérées purement et simplement comme
des actes de disposition, le mineur non émancipé ne serait pas admis auxdites saisies ;
dans ces deux cas comme dans bien d'autres, d'autres personnes seront appelées à agir.

2. Les autres personnes pouvant saisir

253
Article 1 du code de la navigation maritime congolaise
254
Ce sont des situations rarissimes et même inexistantes car il est illogique que le navire, au regard de sa valeur
colossale ne suffise pas à désintéresser les créanciers maritimes.
255
Voy. l'article 26 de la loi française du 9 juillet 1991, lequel prévoit que « sauf disposition contraire, l'exercice
d'une mesure d'exécution ou d'une mesure conservatoire est considéré comme un acte d'administration sous
réserve des dispositions du Code civil relatives à la réception des deniers »
80

La question des autres personnes pouvant saisir se pose lorsqu'il est question de parler du
pouvoir de saisie ; celui-ci est soulevé lorsque la saisie est pratiquée au nom d'une personne
autre que le créancier saisissant lui-même. Il peut s'agir soit d'un ayant cause du créancier
saisissant (a), soit du représentant de celui-ci (b).

a. Les ayants causes du créancier originel

En application du droit commun, le droit de saisir du créancier originel,


en cas de décès, est transmis par voie successorale à ses héritiers appelés ayants cause
universels, à titre universel et ayants cause particuliers 256. Le fondement de la
transmission du droit de saisir aux ayants cause est la fiction juridique selon laquelle
les héritiers continuent la personnalité juridique du créancier originel décédé. Mais
quel que soit le cas, les ayants cause ne peuvent procéder à la saisie à la place du
créancier originel décédé que s'ils justifient de leur droit de saisir. Ils doivent, à cette
fin, notifier au débiteur le titre en vertu duquel ils commencent ou poursuivent la
saisie en lieu et place du créancier défunt. Aussi, l'héritier légal devra notifier au
débiteur l'acte de décès de son auteur et un acte notarié attestant qu'il est héritier.
Quant au légataire universel ou à titre universel, il doit notifier au débiteur le testament
qui lui a conféré cette qualité. Contrairement aux ayants cause universel et à titre
universel, le droit de saisir transmis à l'ayant causes particulier est beaucoup plus
limité. Il ne peut exercer le droit de saisir que pour le recouvrement de la créance qui
lui a été cédée par le créancier originel défunt. Mais comme les autres ayants cause,
les ayants cause particuliers doivent, également, par une notification préalable au
débiteur, fournir une justification de leur qualité. Ils doivent par exemple, notifier au
débiteur la disposition du testament contenant le legs particulier. S'il s'agit d'un
cessionnaire de créances, il devra établir la cession de créance à son profit
conformément aux conditions prévues par la loi applicable à la cession de créances.

Conformément aux règles ci-dessus établies et qui sont communément


admises en droit commun des saisies, ces successeurs peuvent poursuivre le débiteur
et intenter une saisie conservatoire de navire en vertu d'une créance maritime née du
chef de celui par qui ils tiennent la dénomination de successeurs.

256
L'ayant cause universel est celui qui détient la totalité des biens du de cujus (le défunt) à cause de mort ; c'est
le cas de l'héritier légal. L'ayant cause à titre universel ne détient qu'une quote-part seulement des biens du de
cujus. L'ayant cause à titre particulier ne détient qu'un bien ou un droit particulier : par exemple, le cessionnaire
d'une créance ou un légataire particulier
81

En dehors du décès, le droit de saisir peut être transmis par la volonté même du créancier à un
représentant.

b. Les représentants du créancier

En droit commun de la saisie, il est des situations dans lesquelles le


créancier confie son pouvoir de saisie à d'autres personnes par le mécanisme du
mandat ; ces personnes seront alors considérées comme ses représentants.

Une distinction doit être faite entre les représentants légaux et les
représentants conventionnels. Les pouvoirs des représentants légaux pour effectuer
une saisie, dépendent de la nature de la saisie. En tant que mandataires, les
représentants légaux peuvent accomplir les actes d'administration. Par conséquent, ils
peuvent pratiquer des saisies mobilières, lesquelles sont par nature des actes
d'administration. En revanche, les représentants légaux du créancier saisissant ne
peuvent pratiquer une saisie immobilière, acte virtuel de disposition, sans pouvoir
spécial. Toute saisie nécessite le recours à un représentant conventionnel. Le créancier
saisissant, quelle que soit sa profession, ne peut pratiquer lui-même la saisie ; ce
représentant conventionnel, selon l'AUPSRVE, sera soit un huissier de justice 257, soit
un agent d'exécution258 dans les États parties où la profession d'huissier n'est pas
réglementée.

Le problème de la représentation du créancier, n'ayant pas été résolu


dans les différents textes sur la saisie conservatoire des navires, dans une optique
d'harmonisation des différentes règles sur les saisies, il serait loisible en vertu du
caractère supplétif de l'AUPSRVE que l'on puisse avoir recours à ce texte dans ses
dispositions sur la saisie conservatoire des biens meubles et par conséquent,
l'appliquer au cas du navire.

257
Les huissiers de justice sont des officiers ministériels qui bénéficient en principe d'un monopole en matière de
saisie. Les fonctions d'huissier de justice sont réglementées par les lois nationales de chaque État partie. C'est par
conséquent cette loi nationale qui détermine si un huissier peut instrumenter ou non en dehors de son ressort
territorial. De manière générale, la remise à l'huissier d'un titre en vue de la saisie emporte élection de domicile
en son étude pour toutes notifications relatives à cette saisie. Si ce mandat général est suffisant pour les saisies
mobilières, la saisie immobilière exige la remise à l'huissier d'un pouvoir spécial (article 254 de l'AUPSRVE)
258
En dehors des huissiers de justice, l'Acte uniforme cite comme personnel de la saisie les agents d'exécution.
Cette appellation désigne à notre avis les personnes physiques ou morales qui, d'une manière habituelle ou
occasionnelle procèdent au recouvrement des créances pour le compte d'autrui notamment dans les États où la
profession d'huissier n'existe pas où n'est pas réglementée. Cette dénomination pourrait concerner les agents
huissier du trésor, les agents de poursuite, les agents des douanes, les ingénieurs et agents techniques des eaux et
forêts, les commissaires-priseurs
82

Cet état de choses nous conduira certainement à étendre le caractère supplétif de l'AUPSRVE
au sujet passif de la saisie que constitue le saisi.

B. Quant au saisi

Tout comme l'AUPSRVE, les textes sur la saisie conservatoire des


navires posent en la matière le principe selon lequel tout débiteur peut être saisi. Ceci
étant, nous analyserons les personnes susceptibles d'être saisies (1) dont les
dérogations sont pour la plupart tirées du droit commun et desquelles la principale
concerne les immunités d'exécution (2).

1. Les personnes susceptibles d'être saisies

Deux catégories de personnes peuvent être saisies : le propriétaire du navire à l'origine de la


créance (a) et le tiers détenteur du navire (b).

a. Le propriétaire du navire à l'origine de la créance

Le propriétaire du navire à l'origine de la créance est en quelque sorte le


sujet passif de la saisie. Tout comme en droit commun, le principe est celui selon
lequel toute personne ayant la qualité de débiteur peut être saisie et uniquement cette
personne.

Cette hypothèse est manifestement la seule envisagée par les textes.


Elle nécessite l'accomplissement des deux formalités suivantes : la signification au
débiteur d'un procès verbal de saisie et la dénonciation au commandement du port,
ceci en vertu des dispositions du droit interne CEMAC 259. Le saisi n'aura connaissance
de l'ordonnance de saisie qu'au moment de l'exécution, c'est-à-dire lorsque l'huissier de
justice mandaté par le créancier procédera à la signification du procès-verbal de saisie
au débiteur, cet acte étant le premier de la saisie conservatoire. Les actes de saisie
représentés en pratique par le procès-verbal et l'ordonnance, devront être
simultanément dénoncés en copie au commandement du port afin que celui-ci refuse
l'autorisation de départ du navire. Lorsque la saisie est faite pour recouvrement d'une
créance contre l'affréteur, elle devra aussi être dénoncée au fréteur propriétaire du
navire par signification au capitaine de celui-ci. Lorsque le navire est hypothéqué, la

259
Voy. l'article 122 du CCMM déjà analysé plus haut dans le cadre des diligences à observer.
83

pratique recommande pour l'opposabilité aux tiers, que la saisie soit également
dénoncée à la conservation des hypothèques maritimes260.

La situation n'est pas forcément la même lorsque la saisie a été


pratiquée entre les mains d'un tiers.

b. La saisie du navire entre les mains d'un tiers

Cette situation n'a pas été organisée par les textes particuliers régissant
la saisie des navires car les conventions internationales sur la saisie des navires et le
CCMM n'ont manifestement et techniquement envisagé qu'un seul cas de figure : la
saisie pratiquée directement entre les mains du propriétaire du navire. Or il n'est pas
inconcevable qu'au moment où le créancier désire faire saisir le navire, celui-ci soit
entre les mains d'un tiers261. Les principales hypothèses sont celle du contrat
d'affrètement dans lequel le navire est mis à la disposition d'un affréteur et celle du
chantier naval à qui tel navire est confié pour entretien et réparation. Ces tiers ont en
commun de ne pas être propriétaires du navire ; cette détention du navire par un tiers
induit-elle des modalités spécifiques de saisie ? On sait en effet que dans toutes les
autres procédures, en pareil cas, la saisie est pratiquée entre les mains du tiers puis
dénoncée au propriétaire du bien ; doit-il en être de même concernant la saisie
conservatoire de navires ? La solution la plus simple à notre avis serait de faire recours
aux règles supplétives posées par le droit commun des saisies conservatoires. À cet
effet, l'article 50 de l'AUPSRVE dispose : « Les saisies peuvent porter sur tous les
biens appartenant au débiteur alors même qu'il seraient détenus par des tiers... ».
Conséquemment, cette situation nécessitera l'accomplissement des trois formalités
suivantes : la signification au débiteur d'un procès-verbal de saisie 262, la dénonciation
de la saisie au débiteur et la dénonciation au commandement du port263.

Toutes ces différentes procédures ne pourront être mises en exécution


lorsque le sujet passif de la saisie en cause, bénéficie des faveurs l'immunisant contre
toute exécution sur ses biens.

2. Les immunités d'exécution

260
JULIEN (P.) et TAORMINA (G.), op.cit., pp 542 et 543
261
Cette possibilité a été admise en pratique : CA de Rennes, 16 juin 1968, DMF 1969, p 741, note Bokobza-
Boquet ; CA d'Aix-en-Provence, 25 février 1986, DMF 1987, p 164, note Pestel-Debord
262
Ce procès verbal de saisie pourrait être vraisemblablement celui de l'article 122 du CCMM et déjà analysé
263
Voir article 122 du CCMM
84

C'est une faveur exceptionnelle de la loi en vertu de laquelle certains


débiteurs ne peuvent faire l'objet d'une exécution forcée. Bien que relevant de la même
inspiration que l'insaisissabilité, elle s'en sépare par son caractère personnel puis
qu'elle est orientée vers les personnes et non pas vers les biens comme
l'insaisissabilité. Par définition, tous les biens d'une personne bénéficiaire de
l'immunité d'exécution sont insaisissables. La règle ainsi posée découle de l'article 30
de l'AUPSRVE selon lequel : « L'exécution forcée et les mesures conservatoires ne
sont pas applicables aux personnes qui bénéficient d'une immunité d'exécution ».

Prenant la suite de cette disposition, le droit spécial de la saisie des


navires, à l'image du droit commun de la saisie a tenu à apporter quelques
éclaircissements sur les personnes bénéficiaires de l'immunité d'exécution.

Sur le plan interne, le CCMM dispose à cet effet que, « Les navires
appartenant à un État, ou exploités par lui, ne peuvent être saisis si, au moment où la
créance est née, ils étaient affectés exclusivement à un service gouvernemental et non
commercial »264.

Sur le plan international, et tout comme le droit interne CEMAC,


conformément aux exigences de la convention de Bruxelles du 10 avril 1926 sur
l'immunité des navires d'État, les navires d'État affectés exclusivement à une activité
gouvernementale et non commerciale ne sont pas saisissables, en vertu des immunités
d'exécution et de juridiction qu'on doit leur reconnaître.

En définitive, selon ces deux ordres juridiques, l'immunité d'exécution


est une véritable immunité personnelle, c'est-à-dire en raison de la qualité de leurs
propriétaires. En matière de saisie de navires, l'immunité personnelle la plus fréquente
sera celle conférée par le droit international public concernant les navires appartenant
à un État ou souverain étranger. Cette immunité a donné lieu à la théorie des navires
apparentés. On sait qu'en règle générale, l'immunité d'exécution devra être écartée
chaque fois qu'il s'agit de recouvrer une dette contractée dans le cadre de l'exercice,
par un État étranger, d'une activité économique ou commerciale, c'est-à-dire sans
rapport avec sa souveraineté, et que ne seront alors saisissables que les biens affectés à
cette activité. La solution est la même lorsque les biens d'un organisme public distinct
d'un État étranger, donc notamment une compagnie maritime, ont été affectés par

264
Article 114 alinéa 2 du CCMM
85

celui-ci à une activité économique ou commerciale, ledit organisme, en raison de son


caractère public, étant considéré comme une émanation de l'État lui-même 265. Or, pour
échapper à la saisie de leurs biens, la tentation est grande pour certains États, ayant
traditionnellement un secteur privé réduit voire inexistant, de multiplier les
établissements publics ou les sociétés de droit privé à la personnalité juridique soi-
disant distincte, propriétaires de biens tels des navires. Dans ce cas, pour faire échec à
cette fraude et saisir les biens de cet organisme public, les créanciers auront
l'obligation de démontrer en quoi celui-ci ne dispose pas véritablement d'un
patrimoine distinct de celui de l'État étranger dont on dit alors qu'il n'est qu'une
émanation ; cette solution n'a pas cours lorsque ce sont les biens d'un organisme de
droit privé qui ont ainsi été affectés à cette activité, même si l'État étranger y dispose
de la plus forte participation, il n'est pas alors vu comme une émanation de l'État
étranger266. Dans le même ordre d'idées, toujours à propos de la constitution d'une
société de droit privé, la Cour de cassation française estime que « l'allégation selon
laquelle un État a eu pour but, dans la création de sociétés d'armement, de limiter le
gage de ses créanciers maritimes ne démontre pas, par elle-même, que ces sociétés
seraient fictives et ne constitueraient que des émanations de cet État, dès lors qu'elles
possèdent un patrimoine propre »267.

Enfin, notons que la convention de Genève du 12 mars 1999, non


encore en vigueur, dispose en son article 8 paragraphe 2, qu'elle « n'est pas applicable
aux navires de guerre, navires de guerre auxiliaires et autres navires appartenant à un
État ou exploités par lui et exclusivement affectés, jusqu'à nouvel ordre, à un service
public non commercial ».

Section 2. L'adaptation des règles de la saisie immobilière à la saisie-exécution des


navires

Comme en droit commun, deux types de saisies peuvent être pratiquées


sur un navire : la saisie conservatoire et la saisie-exécution. La saisie-
exécution268 permet au titulaire d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et
exigible, de faire procéder à la saisie et à la vente du navire de son débiteur.

265
JULIEN (P.) et TAORMINA (G.), op.cit., pp 520 et 521
266
JULIEN (P.) et TAORMINA (G.), op. cit. p 521
267
Cass.com, 23 novembre, Bull.civ. IV, n°204, DMF 2000, p.719, obs. N. MOLFESSIS
268
Qu'il est proposé d'appeler saisie-vente dans le projet de révision du CCMM, initié en 2010
86

Il est important de souligner que les textes internationaux ne règlent


guère la procédure de saisie-exécution des navires ; ils ne se contentent que de son
aspect conservatoire. Le code de la navigation maritime congolaise prévoit la saisie-
exécution des navires269. La saisie-exécution y est une notion plurielle et regroupe
deux variétés : la saisie-exécution des navires précédée d'une saisie-conservatoire
dudit navire, et la saisie-exécution des navires non précédée d'une saisie-conservatoire
sur le même navire270. Tout en réglant certains aspects particuliers de la saisie-
exécution des navires dans son corpus, le CCMM renvoie pour la plupart aux
dispositions sur la saisie immobilière car son article 128 dispose : « Lorsqu'elle n'est
pas précédée d'une saisie conservatoire, la saisie-exécution est demandée au juge du
fond dans les conditions et selon la procédure en vigueur pour les saisies
immobilières. Un procès-verbal est dressé et un gardien est désigné dans les mêmes
conditions qu'en matière de saisie conservatoire ». On pourrait comprendre dès lors la
raison pour laquelle ce texte ne s'arrête que sur la saisie-exécution non précédée d'une
saisie conservatoire, car celle précédée d'une saisie conservatoire devrait
originellement satisfaire aux conditions liées à la saisie conservatoire notamment celle
de l'allégation d'une créance maritime paraissant fondée dans son principe 271 et intenter
une procédure au fond afin d'obtenir un titre exécutoire 272 qui lui permettra de
convertir la saisie conservatoire en saisie-exécution des navires. Or si au départ, le
créancier détient déjà le titre exécutoire 273, il pourra, sans passer par la saisie
conservatoire, intenter directement une saisie-exécution du navire.

Quoi qu'il en soit, l'analyse des dispositions du CCMM sur la saisie-


exécution des navires, nous indique une certaine adaptation des règles de la saisie
immobilière de droit commun à la saisie-exécution des navires, ceci à deux niveaux :
au niveau des conditions de saisie (paragraphe 1) et au niveau de la procédure de saisie
(paragraphe 2).

§1. L'adaptation quant aux conditions de saisie

Ces conditions sont diverses. Cependant, malgré cette diversité, on peut


tenter de les classer en mettant en relief les intérêts que les rédacteurs de l'Acte

269
Article 127 à 133 du CCMM
270
Ceci peut s'analyser à travers la lecture de l'article 128 du CCMM
271
Article 120 alinéa 2 du CCMM
272
Article 125 du CCMM
273
Constatant une créance pas forcément maritime.
87

uniforme ont voulu protéger. On se rend compte alors qu'il y a deux séries de
conditions : d'une part, les conditions destinées d'abord à éviter l'utilisation arbitraire
de cette procédure et ensuite, à éviter le recours à cette procédure pour saisir et faire
vendre les biens qui échappent au droit de poursuite des créanciers ; ce sont les
conditions objectives (A) ; d'autre part, les conditions qui sont destinées à éviter une
procédure initiée par une personne qui ne justifie pas d'un droit de créance ou dirigée
contre une personne qui n'est pas tenue envers le créancier ; ce sont les conditions
subjectives liées à la saisie des navires (B).

A. Quant aux conditions objectives

Pour exercer sa saisie-exécution en toute légitimité, le demandeur devra exciper l'existence


d'un titre exécutoire (1) auquel d'autres conditions liées au bien saisissable sont requises (2).

1. L'exigence d'un titre exécutoire

Pour permettre l'exécution forcée, la créance qui la justifie doit être


constatée dans un titre exécutoire ; telle est en quelque sorte l'exigence de l'article 127
du CCMM qui cite les divers titres exécutoires et de l'article 128 du même code qui
renvoie à la saisie-exécution des navires aux conditions et à la procédure en vigueur
dans la saisie immobilière classique274. Ainsi, pour la détermination des titres
exécutoires, nous pouvons interpeler deux articles : l'article 127 du CCMM et l'article
33 de l'AUPSRVE déterminant les types de titres exécutoires en matière de saisie de
droit commun. Quoi qu'il en soit, ces articles sont similaires, ce qui ne poserait donc
par conséquent aucun souci de cohésion ou d'harmonie. Ils disposent en effet :
« Constituent des titres exécutoires : les décisions juridictionnelles revêtues de la
formule exécutoire et celles qui sont exécutoires sur minutes ; les actes et décisions
juridictionnels étrangers ainsi que les sentences arbitrales déclarées exécutoires par
une décision juridictionnelle non susceptible de recours suspensif d'exécution de l'État

274
Cet article énonce en effet : « Lorsqu'elle n'est pas précédée d'une saisie conservatoire, la saisie-exécution est
demandée au juge du fond dans les conditions et selon la procédure en vigueur pour les saisies immobilières. Un
procès-verbal est dressé et un gardien est désigné dans les mêmes conditions qu'en matière de saisie
conservatoire »
88

dans lequel ce titre est invoqué ; les procès-verbaux de conciliation signés par le juge
et les parties ; les actes notariés revêtus de la formule exécutoire ; les décisions
auxquelles la loi nationale de chaque État partie attache les effets d'une décision
judiciaire ».

Différents titres ont donc la nature de titre exécutoire. Il en est ainsi des
actes judiciaires des juridictions nationales et ceux émanant de juridictions étrangères.
Seules les décisions des juridictions nationales revêtues de la formule exécutoire sont
considérées comme des titres exécutoires. Cette formule ordonne aux huissiers de
justice de mettre à exécution l'acte contenant ladite formule et à la force publique de
leur prêter main forte lorsqu'elle en sera légalement requise. Cette formule contient
généralement les termes suivants : « en conséquence, la République mande et ordonne
à tous les huissiers de justice, à ce requis, de mettre ledit jugement ou arrêt à
exécution, aux procureurs généraux, d'y tenir la main, à tous les commandants et
officiers de la force publique de prêter main forte lorsqu'ils en seront légalement
requis ». En plus de la formule exécutoire, la décision juridictionnelle nationale doit
contenir la condamnation du débiteur, avoir été régulièrement signifiée et être passée
en force de chose jugée275. Par les termes « décision juridictionnelle nationale revêtue
de la formule exécutoire », aussi bien l'Acte uniforme que le CCMM vise également
les décisions qui sont exécutoires sur minute.

Quant aux actes et décisions juridictionnelles étrangers ainsi que les


sentences arbitrales étrangères, ils ne sont, en principe, exécutoires dans l'État du
for que s'ils ont préalablement obtenu l'exéquatur ; l'exéquatur est la décision
juridictionnelle nationale déclarant la décision étrangère exécutoire sur le territoire du
for ; ce jugement d'exéquatur doit être revêtu de l'autorité de la chose jugée c'est-à-dire
qu'il ne doit pas être susceptible d'un recours suspensif d'exécution.

Les textes ci-dessus cités assimilent aux actes judiciaires les procès-
verbaux de conciliation signés par le juge et les parties. Ces procès-verbaux sont des
actes judiciaires mais ils ne sont pas pour autant des décisions de justice. Il en est ainsi
du procès-verbal de conciliation dressé par la juridiction saisie sur opposition au cours
de la procédure d'injonction276.

275
Article 34 AUPSRVE (solution implicite)
276
Article 12 alinéa 7 et 26 de l'AUPSRVE
89

En dehors des procès-verbaux de conciliation, ces textes assimilent


également aux actes judiciaires les décisions auxquelles la loi nationale de chaque État
partie attache les effets d'une décision judiciaire. L'on peut citer à titre d'illustration le
certificat de non-paiement délivré par l'huissier en cas de non-paiement d'un chèque
pour défaut de provision suffisante. Ce certificat de non-paiement doit être signifié au
tireur. Dans les quinze jours de la notification, l'huissier de justice qui n'a pas reçu
justification du paiement délivre un titre exécutoire.

Consacrant une solution classique, ces dispositions, dans leur


énumération des titres exécutoires, citent les actes notariés revêtus de la formule
exécutoire. En effet, dans sa qualité d'officier public, le notaire peut délivrer des
expéditions des actes authentiques qu'il établit et les revêtir de la formule exécutoire. Il
faut assimiler à ces actes notariés les actes sous seing privé qui sont reconnus sincères
par les parties devant notaire et déposés en son étude. Cette force exécutoire de l'acte
notarié est suspendue lorsqu'une procédure d'inscription en faux277 est engagée contre
cet acte.

Cependant, ces dispositions ne comportant aucune formule limitative,


l'on doit inclure dans son énumération des titres exécutoires des actes omis. Il en est
ainsi des titres délivrés par des personnes morales de droit public et déclarés
exécutoires par la loi nationale de l'État partie. Bien que ces titres ne soient pas revêtus
de la formule exécutoire, ils constituent incontestablement des titres exécutoires. Il
s'agit des actes administratifs. Ces actes sont définis comme des titres émis par
l'administration et qui sont exécutoires par eux-mêmes. Tel est le cas des marchés de
fourniture qui sont des actes contractuels de l'administration. On peut encore citer les
états de perception ou avis de mise en recouvrement qui sont des actes unilatéraux de
l'administration. Ce pouvoir de l'administration de se créer elle-même des titres
exécutoires s'explique par les prérogatives de puissance publique qu'elle détient278.

In fine, nous dirons qu'en principe, le créancier doit détenir un titre


exécutoire, mais une difficulté peut se poser s'agissant des titres constitués de
jugement assorti de l'exécution provisoire. Le titre exécutoire par provision peut-il
277
Il s'agit d'une procédure principale ou incidente dirigée contre un acte authentique pour montrer qu'il a été
altéré, modifié, complété par de fausses indications, ou même fabriqué. Une procédure analogue peut être
utilisée à titre principal ou incident contre un acte sous seing privé ayant déjà fait l'objet d'une vérification
d'écriture si la partie soutient que l'acte a été matériellement altéré ou falsifié depuis sa vérification. GUILLIEN
(R.) et VINCENT (J.), op.cit., p 270
278
ASSI-ESSO (A.-M.), DIOUF (N.), OHADA, op.cit., p 54
90

fonder une poursuite par voie de saisie immobilière-saisie de navire ? Le CCMM ne


dit mot ; l'AUPSRVE pourrait combler cette lacune. En effet, l'article 247 alinéa 2 de
l'AUPSRVE répond par l'affirmative. Aux termes de ce texte, « ... la poursuite peut
également avoir lieu en vertu d'un titre exécutoire par provision, ou pour une créance
en espèces non liquidée ; mais l'adjudication ne peut être effectuée que sur un titre
définitivement exécutoire et après liquidation ». Il en résulte que si la poursuite peut
commencer sur le fondement d'un titre provisoirement exécutoire, l'adjudication quant
à elle est subordonnée à l'obtention d'un titre définitivement exécutoire. Sur ce point
l'article 247 rejoint les dispositions de l'article 32 du même Acte uniforme 279. Le
législateur de l'OHADA, en exigeant un titre définitivement exécutoire pour les
adjudications est soucieux de l'importance de l'immeuble (en l'espèce il s'agit du
navire) dans le patrimoine de l'individu. Le danger n'est cependant pas écarté. Le titre
exécutoire sur la base duquel une vente de navire a été initiée et poursuivie jusqu'à son
terme peut être annulé pour des vices intrinsèques à ce titre ; quel sera donc le sort de
la vente intervenue280 ?

En tout état de cause, pour y parvenir, il faudrait que le navire soit


d'abord saisissable.

2. Les conditions liées aux navires saisissables

Le principe est que tous les navires sont saisissables (a) mais il y a des restrictions à ce
principe (b).

a. Le principe de la saisissabilité des navires

En principe tous les navires sont saisissables ainsi que leurs accessoires
appartenant au débiteur. Contrairement à ce qui a cours en matière de saisie-
conservatoire de navire281, le créancier qui voudrait saisir-exécuter le navire devra
s'attaquer au navire appartenant au véritable débiteur.

Ces navires doivent faire l'objet d'une immatriculation préalable 282.


Selon l'article 253 de l'AUPSRVE, si les navires devant faire l'objet de la poursuite ne
sont pas immatriculés, le créancier est tenu de requérir l'immatriculation à la
279
L'article 32 de l'AUPSRVE dispose en effet : « À l'exception de l'adjudication des immeubles, l'exécution
forcée peut être poursuivie jusqu'à son terme en vertu d'un titre exécutoire par provision... »
280
POUGOUE (P.-G.) et TEPPI KOLOKO (F.), La saisie immobilière dans l'espace OHADA. PUA 2010, p 59
281
Dans la saisie conservatoire des navires, dans certaines circonstances déjà examinées, l'on peut saisir le navire
qui n'appartient pas ou plus au débiteur
282
Ordonnance-loi n°66-98 du 14/3/1966 portant code de la navigation maritime, Article 9
91

conservation des hypothèques maritimes après y avoir été autorisé par décision du
président de la juridiction compétente de la situation des biens, rendue sur requête non
susceptible de recours. À peine de nullité, le commandement ne peut être signifié
qu'après le dépôt de la réquisition d'immatriculation et la vente ne peut y avoir lieu
qu'après la délivrance du numéro d'immatriculation.

Cependant, cette étape ne pourrait être atteinte si à la base, le navire est


soumis à une restriction de saisie.

b. Les restrictions au principe de la saisissabilité des navires

Elles sont de deux ordres : les restrictions générales et les restrictions


particulières.

En ce qui concerne les restrictions d'ordre général, en plus du droit


d'usage et d'habitation, de l'hypothèque, ne peuvent être saisies les valeurs
immobilières. Cependant la problématique de la saisie-exécution des droits indivis sur
les navires méritent une attention particulière. À ce sujet, deux situations doivent être
distinguées. Premièrement, si le débiteur détient des parts minoritaires, la saisie ne
peut porter que sur les parts et non sur le navire lui-même. Deuxièmement, si la saisie
porte sur des parts représentant plus de la moitié du navire, la vente sera étendue à tout
le navire, sauf opposition des autres copropriétaires pour des motifs reconnus sérieux
et légitimes283. Autrement dit, en cas d'opposition, il ne sera procédé qu'à la saisie et à
la vente de la partie affectée à la garantie. Mais il est inimaginable de procéder à une
saisie morcelée d'un même corps du navire. Dès lors, seules les parts du quirataire, et
non pas le navire, sont saisies. Il s'agit d'une véritable subrogation réelle. On peut dès
lors se demander suivant quelle procédure cette saisie sera ordonnée. La copropriété
n'étant pas une société, les quirataires n'étant pas des associés, on a de la peine à
imaginer qu'il puisse s'agir d'une saisie des droits d'associés. On songerait plutôt à une
saisie des valeurs mobilières. En faisant reposer l'hypothèse de saisie du navire sur le
nombre de parts du quirataire en cas d'opposition des autres quirataires, le CCMM
n'en a pas mesuré la portée sur la nature et la procédure de saisie. Il s'est contenté
d'évoquer cette alternative, pour ne réglementer que les seules saisies du bâtiment de
mer tout entier.

283
Article 71 du CCMM : « Si une saisie porte sur des parts représentant plus de la moitié du navire, la vente
sera étendue à tout le navire, sauf opposition des autres copropriétaires pour des motifs reconnus sérieux et
légitimes. »
92

Pour ce qui est des restrictions d'ordre particulier :

Premièrement, les navires appartenant à un incapable ne peuvent être


saisis que si les biens mobiliers de l'incapable l'ont été ou se sont révélés insuffisants
pour faire face au paiement de sa créance.

Deuxièmement, il s'agit du cas où la créance est inférieure ou égale au


revenu biannuel du navire284. Autrement dit, les procédures de saisie de navire sont
suspendues si les conditions suivantes sont réunies : d'abord les revenus des deux
années du navire sont suffisants pour régler la créance en capital, intérêts et frais ;
ensuite, le débiteur offre la délégation de ces revenus au créancier. La suspension des
poursuites est provisoire et peut être reprise sur décision du juge.

Troisièmement et enfin, l'hypothèque portant sur plusieurs navires ;


deux cas de figure peuvent se présenter : premier cas de figure : aux termes de l'article
251 de l'AUPSRVE, le créancier ne peut poursuivre la vente des navires qui ne lui
sont pas hypothéqués que dans le cas d'insuffisance des navires qui lui sont
hypothéqués pour garantir le paiement sauf si l'ensemble de ces biens constituent une
seule et même exploitation et si le débiteur le requiert. Deuxième cas de figure : selon
l'article 252 de l'AUPSRVE, la vente forcée des navires situés dans les ressorts des
juridictions différentes ne peut être poursuivie que successivement. Toutefois, poursuit
l'article 252, et sans préjudice de l'article 251, elle peut être poursuivie simultanément
lorsque les navires font partie d'une seule et exploitation, et après autorisation du
président de la juridiction lorsque la valeur des navires situés dans un même ressort est
inférieure au total des sommes dues tant au créancier saisissant qu'aux créanciers
inscrits ; l'autorisation peut concerner tout ou partie des biens.

B. Quant aux conditions subjectives

À l'image de ce qui a cours à la saisie immobilière, deux catégories de


personnes interviennent dans la saisie des navires que l'on peut analyser en termes de
sujets actifs (1) et de sujets passifs (2).

1. Les sujets actifs de la saisie

Il s'agit des demandeurs à la saisie, et que l'on appelle encore créanciers


saisissants.

284
Article 265 de l'AUPSRVE
93

Il convient d'observer que, d'emblée tous les créanciers peuvent


déclencher une procédure de saisie de navire. Il n'y a pas lieu de faire une distinction
entre créanciers hypothécaires et créanciers chirographaires. Le caractère
chirographaire d'une créance n'enlève pas à son titulaire le droit de poursuivre
l'expropriation forcée d'un navire de son débiteur. Cela s'explique aisément : les causes
de préférence entre créanciers n'intéressent pas le droit de saisir ; elles n'interviennent
que dans la distribution des deniers. Le droit des créanciers chirographaires est
cependant limité par les dispositions de l'article 28 alinéa 2 de l'Acte uniforme ; il
résulte de ce texte que ces créanciers ne peuvent poursuivre l'expropriation forcée des
navires qu'après la réalisation des autres meubles et si les deniers provenant de cette
réalisation sont insuffisants. À la lecture de ce texte, on a l'impression que le
législateur veut obliger le créancier à prouver, avant toute saisie de navire, qu'il a
effectué une saisie des autres biens meubles du débiteur et que le produit de la vente
n'a pas permis à le désintéresser totalement. Cela reviendrait à mettre concrètement à
sa charge l'obligation de produire un procès-verbal de carence avant toute procédure
de saisie-exécution de navire.

Au vu de ce qui précède, nous pensons qu'il appartient au débiteur


d'opposer un moyen de défense tiré de ce qu'il dispose de biens meubles dont la vente
permettrait de désintéresser le créancier saisissant et d'apporter, en cas de contestation,
la preuve de ses allégations.

Relevons tout de même qu'il ne suffit pas d'être créancier pour pouvoir
pratiquer une saisie-exécution de navire ; il faut aussi avoir la capacité d'ester en
justice. En effet, la possibilité d'une intervention du tribunal ne doit jamais être
écartée, compte tenu des incidents qui peuvent être soulevés. L'éventualité de
l'intervention du tribunal fait que, même si l'Acte uniforme ne l'a pas expressément
prévue, le créancier saisissant doit avoir la capacité d'ester en justice. Par conséquent,
ne peuvent pratiquer elles-mêmes une saisie-exécution de navire, les personnes
frappées d'incapacité d'exercice, c'est-à-dire les personnes auxquelles la loi a enlevé le
droit de participer au commerce juridique pour les protéger, soit contre leur
inexpérience (les mineurs), soit contre la défaillance de leurs facultés mentales ou
incorporelles (majeurs incapables).
94

Quoi qu'il en soit, les poursuites sont dirigées contre une personne bien
précise.

2. Les sujets passifs de la saisie

Ce sont les défendeurs à la saisie que l'on appelle encore les saisis.

Le défendeur à la procédure est, dans la plupart des cas, le débiteur


propriétaire du navire, mais il arrive qu'elle soit dirigée contre une personne autre que
le débiteur.

L'hypothèse de la saisie dirigée contre le débiteur ne soulève pas de


difficulté particulière. Le débiteur est celui qui est tenu personnellement ou
solidairement de la dette ; et à ce propos, il y a juste lieu de rappeler les règles
contenues dans les articles 249 et 250 de l'Acte uniforme. Le premier prévoit que,
lorsque le débiteur est dans une indivision, les créanciers ne peuvent mettre en vente
sa part avant le partage ou la liquidation qu'ils peuvent cependant provoquer. Ce texte
vise seulement les créanciers personnels. On doit en déduire que les créanciers dont le
droit est antérieur à l'indivision et ceux dont la créance résulte de la conservation et de
la gestion des biens indivis peuvent poursuivre la saisie des navires indivis. Le second
texte vise la vente des biens communs ; il prévoit qu'elle peut être poursuivie contre
les deux époux. Notons qu'en cas de décès du débiteur, la poursuite sera dirigée à
l'encontre des héritiers au moins huit jours après signification du titre exécutoire à
ceux-ci conformément à l'article 877 du code civil camerounais, en droit congolais,
la loi n’a pas précisé après combien de temps les héritiers 285. Il en serait
logiquement de même si le débiteur décède en cours de procédure ; dans ce dernier
cas, les formalités ne seront valablement continuées qu'après notification préalable aux
héritiers du titre exécutoire.

L'autre hypothèse est celle de la saisie dirigée contre une personne


autre que le débiteur. Premièrement la saisie peut être dirigée contre le tiers acquéreur
d'un navire hypothéqué ; en effet, en raison du droit de suite attaché aux sûretés réelles
immobilières, la saisie-exécution de navire peut être pratiquée contre l'acquéreur. On
justifie cette règle par le fait que le tiers acquéreur a commis une faute par imprudence
ou négligence en ne purgeant pas les hypothèques grevant le navire acquis. L'Acte
uniforme donne trois possibilités à l'acquéreur obligé de supporter la procédure :
285
Articles 755 à 818 du code de la famille
95

d'abord, il peut payer l'intégralité de la dette en capital, intérêts et frais ; en


désintéressant le créancier poursuivant, il est subrogé dans ses droits ; ensuite, il peut
délaisser le navire hypothéqué ; le délaissement se fait au tribunal du lieu de la
situation du bien ; lorsque l'acquéreur choisit de délaisser le navire, il lui en est donné
acte ; enfin, il peut subir la procédure ; dans une telle hypothèse, il devrait pouvoir
exercer un recours en garantie contre son vendeur mais ce recours est souvent illusoire
car celui-ci est, par hypothèse, insolvable. Deuxièmement, la procédure de saisie-
exécution de navire peut aussi être dirigée contre la caution réelle, c'est-à-dire la
caution qui garantit par son engagement en consentant une sûreté réelle sur son
navire286. La caution réelle est comme le tiers détenteur, tenu propter rem ; mais elle
est engagée de manière plus rigoureuse que celui-ci, car elle est partie à l'acte
constitutif d'hypothèque, c'est pourquoi on considère généralement qu'elle ne peut
purger l'hypothèque.

L'examen des conditions relatives à la saisie-exécution non précédée de


saisie-conservatoire des navires permet de constater que les formalités prescrites par
l'Acte uniforme sont telles que l'exercice de cette voie d'exécution que constitue la
saisie immobilière-saisie exécution des navires apparaît comme un parcours difficile ;
cette situation est toute aussi remarquable lorsqu'il s'agit de parler de l'adaptation des
règles de procédure de saisie immobilière à celle de la saisie-exécution des navires.

§2. L'ADAPTATION QUANT À LA PROCÉDURE DE SAISIE

Tout comme en matière de saisie conservatoire des navires, la saisie-


exécution des navires peut se dérouler normalement (A), de même qu'elle pourrait être
émaillée d'incidents qui remettraient en cause sa légitimité (B) ; toujours est-il que les

286
Article 22 de l'Acte uniforme portant organisation des sûretés adopté le 15 décembre 2010 : « La caution peut
garantir son engagement en consentant une sûreté réelle sur un ou plusieurs de ses biens »
96

deux procédures sont dominées par les règles en vigueur en matière de saisie
immobilière de droit commun.

A. La procédure normale de saisie

La procédure normale de saisie-exécution des navires comporte des


étapes préalables (1) qui pourraient aboutir à l'adjudication du navire (2).

1. Les étapes préalables à l'adjudication du navire

Pour préparer l'adjudication du navire, l'Acte uniforme exige


l'établissement d'un commandement valant saisie (a), la rédaction d'un cahier de
charges (b) qui pourrait éventuellement donner lieu à contestations et susciter une
audience (c) ; après ces étapes, une publicité en vue de la vente s'avère nécessaire pour
porter les enchères au meilleur prix (d).

a. L'établissement du commandement valant saisie

Dans sa première phase, la procédure se déroule pratiquement en


dehors du tribunal, le commandement est l'élément fondamental et tout est lié dans
cette phase à cet acte dont le régime est fixé par les articles 254 et suivants de l'Acte
uniforme. Ces textes indiquent les modalités de rédaction, de signification et de
publication du commandement.

D'abord, en ce qui concerne les modalités de rédaction, le mot


commandement renvoie à l'idée d'exploit d'huissier. On peut donc être tenté de penser
que le commandement est nécessairement établi par huissier. Ce n'est pourtant pas le
cas ; en effet, l'Acte uniforme a supprimé le monopole des huissiers en la matière en
permettant aussi aux agents d'exécution de l'établir. Le pouvoir d'établir le
commandement est donc partagé entre les huissiers et les agents d'exécution. Cette
option se justifie certainement par la volonté de tenir compte de la situation de certains
pays où la profession d'huissier n'est pas bien organisée.

Si le commandement peut être établi par un huissier, il prend la forme


d'un exploit et, en tant que tel, il doit comporter toutes les mentions requises pour la
validité des exploits. Il doit en outre contenir les mentions propres prévues par l'article
254 de l'AUPSRVE. Selon ce texte, le commandement doit contenir un certain nombre
d'indications dont l'absence peut entraîner une sanction grave : la nullité.
97

En ce qui concerne les mentions exigées, il y a premièrement la


reproduction ou la copie du titre exécutoire et le montant de la dette ainsi que les
noms, prénoms et adresses des personnes impliquées287. Deuxièmement, la copie du
pouvoir spécial de saisie donnée à l'huissier ; la saisie des navires est un acte aux
conséquences graves, il ne faut donc pas que l'huissier la déclenche de sa propre
initiative. Troisièmement, l'avertissement que faute de payer dans les 20 jours, le
commandement pourra être transmis au registre des hypothèques maritimes et vaudra
saisie à compter de sa publication 288. Quatrièmement, l'indication de la juridiction où
l'expropriation sera poursuivie ; c'est l'article 248 de l'AUPSRVE qui fixe les règles de
compétence en la matière289 ; ce texte, en parlant de plénitude de juridiction, pense
probablement aux tribunaux de droit commun, le tribunal de commerce, pour les cas
où les deux parties sont commerçantes ou le défendeur 290. En cas éventuel le tribunal
de paix291. Cinquièmement, le numéro d'immatriculation du navire. Sixièmement et
enfin, la constitution d'avocat ; le créancier poursuivant doit élire domicile chez
l'avocat constitué et c'est là que devront lui être notifiés les actes d'opposition au
commandement, offres réelles et toutes significations relatives à la saisie.

Les énonciations figurant dans l'article 254 sont exigées à peine de


nullité du commandement. Cette nullité ne s'attache pas automatiquement à l'absence
d'une mention ; il est nécessaire que celui qui se prévaut de l'irrégularité apporte la
preuve d'un grief conformément à l'article 297 alinéa 2 de l'AUPSRVE292.

Ensuite, pour ce qui est de la signification du commandement au


débiteur, l'article 254 de l'AUPSRVE prévoit que le commandement est signifié au
débiteur sans autre précision. Le CCMM comble cette lacune en matière de saisie-
exécution des navires. Ce texte dispose en effet en son article 129: « Le saisissant doit,
dans un délai de trois jours, notifier au propriétaire copie du procès-verbal de saisie et
le faire citer devant le tribunal du lieu de la saisie, pour s'entendre dire qu'il sera
287
Cette exigence de l'Acte uniforme est une source de frais inutiles. Une simple mention du titre exécutoire
aurait suffi pour permettre à l'acte de remplir sa fonction
288
C'est une sorte de mise en demeure destinée à attirer l'attention du débiteur sur les conséquences du défaut de
paiement
289
Selon ce texte, « La juridiction devant laquelle la vente est poursuivie est celle ayant plénitude de juridiction
dans le ressort territorial où se trouvent les immeubles (sous-entendus navires saisis) »
290
Article 17 de la loi loi n° 002/2001 du 03 juillet 2001 portant création, organisation et fonctionnement des
tribunaux de commerce
291
Article 111 de la Loi organique n° 13/011-B du 11 avril 2013 portant organisation, fonctionnement et
compétences des juridictions de l'ordre judiciaire
292
Ce texte dispose : « Les formalités prévues (...) par les articles 254, 267 et 277 ci-dessus ne sont sanctionnées
par la nullité que si l'irrégularité a eu pour effet de causer un préjudice aux intérêts de celui qui l'invoque »
98

procédé à la vente du navire saisi. Si le propriétaire n'est pas domicilié dans le ressort
du tribunal, les signification et citations lui sont données en la personne du capitaine
du bâtiment saisi, ou, en son absence, en la personne de celui qui représente le
propriétaire ou le capitaine. Le délai de trois jours est augmenté de trente jours si le
destinataire demeure hors du territoire de la C.E.M.A.C. S'il est étranger, hors du
territoire C.E.M.A.C. et non représenté, les citations et significations sont données
selon les voies de droit commun ».

Enfin, il s'agit de la publication du commandement. Pour ce faire, il


convient d'examiner successivement les modalités de la publication du
commandement et ses suites.

Premièrement, s'agissant des modalités de publication, en application


de l'article 259 alinéa 1 de l'AUPSRVE, on dira que c'est l'huissier qui fait viser
l'original du commandement par le conservateur des hypothèques ; l'article 130 du
CCMM prenant en considération le particularisme de la saisie des navires et la célérité
que requiert le domaine maritime, dispose que le commandement, tenant lieu de
procès-verbal, est inscrit sur le registre des hypothèques maritimes tenu par l'autorité
administrative compétente ; cette inscription est requise dans le délai de sept jours à
compter de la date de signification du procès-verbal, augmentés de vingt jours si le
lieu de la saisie et le lieu où le registre est tenu, ne sont pas situés dans le même port.;
passé ce délai, le créancier ne peut plus publier le commandement ; il ne peut
reprendre les poursuites qu'en les réitérant.

Deuxièmement, en ce qui concerne les suites de la publication, à partir


de l'inscription, la suite de la procédure va dépendre de l'attitude du débiteur : le
paiement va mettre un terme à la procédure, alors que le défaut de paiement marque le
point de départ d'une nouvelle étape. Si le débiteur paie dans les vingt jours,
l'inscription du commandement est radiée par le conservateur ou l'autorité
administrative sur mainlevée donnée par le créancier. Il est possible que la radiation ne
soit pas opérée malgré le paiement ; dans une telle hypothèse, le débiteur ou tout
intéressé pourra provoquer la radiation en saisissant la juridiction compétente en
matière d'urgence. Si le débiteur ne paie pas, le commandement vaudra saisie à
compter de son inscription. À partir de ce moment, les prérogatives qui s'attachent au
droit de propriété vont être restreintes. Des effets importants s'attachent à cette
99

situation. On peut les regrouper autour de trois idées : d'abord, l'interdiction des actes
de disposition ; à compter de son inscription, le débiteur, bien qu'étant toujours
propriétaire de son navire, ne peut plus l'aliéner ou le grever de droit réel ou charge.
Que se passera-t-il si le débiteur accomplit des actes de disposition en violation de
cette règle ? L'Acte uniforme ne prévoit pas expressément de sanction. On peut
cependant déduire celle-ci de la rédaction de l'article 262 alinéa 4. Ce texte commence
par poser le principe de l'interdiction des aliénations et constitutions de droit réels
ainsi que l'obligation pour le conservateur de refuser toute nouvelle inscription. Il
prévoit ensuite une exception au principe en considérant comme valables les
aliénations et constitutions de droits réels dans l'hypothèse où l'acquéreur ou le
créancier (bénéficiaire de l'acte) consigne une somme suffisante pour acquitter en
principal, intérêts et frais ce qui est dû aux créanciers inscrits et au saisissant. Cela
veut dire a contrario, qu'à défaut de consignation, les actes d'aliénation et les
constitutions de droits réels ne sont pas valables. La nullité des actes de disposition
s'explique aisément : les tiers ont été informés ou devaient être informés de la saisie
pratiquée ; il n'y a donc aucune raison de leur accorder une protection spéciale.
Ensuite, la limitation au droit d'administration et de jouissance. Certes, le débiteur
reste jusqu'à l'adjudication, en possession du navire si celui-ci n'est pas affrété, mais
c'est en qualité de séquestre judiciaire ; cela signifie qu'il devra gérer le navire en bon
père de famille, qu'il sera comptable des fruits et qu'il devra rendre compte de sa
gestion. L'article 263 alinéa 2 in fine prévoit sur ce point qu'il peut en être décidé
autrement, à la demande du ou des créanciers, par le président de la juridiction
compétente. Enfin, l'immobilisation des fruits ; à compter du commandement, les
fruits sont immobilisés pour être distribués avec le prix du navire et il n'y a pas lieu de
distinguer selon qu'il s'agit de fruits industriels ou civils. Les fruits recueillis sont
déposés à la caisse des dépôts et consignations ou entre les mains d'un séquestre
désigné par le président de la juridiction compétente.

Il convient toutefois de noter que lorsque la saisie porte sur un navire


détenu par un tiers, il faut accomplir une formalité supplémentaire : c'est la
signification avec sommation à tiers détenteur. Sur ce point, l'Acte uniforme lève toute
incertitude en indiquant clairement qu'à peine de nullité, le commandement est signifié
au tiers détenteur avec sommation, soit de payer l'intégralité de la dette en principal et
intérêts, soit de délaisser le navire hypothéqué, soit enfin de subir l'expropriation. Le
100

caractère obligatoire de la sommation préalable est pleinement justifié : le tiers


détenteur n'est pas le débiteur ; il est seulement tenu en raison de la détention du
navire; il faut dès lors lui permettre d'exercer l'option que la loi lui reconnaît avant de
procéder à la réalisation du navire. Ce qui donne lieu forcément à l'établissement d'un
cahier des charges.

b. L'établissement du cahier de charges

Le cahier des charges est rédigé par l'avocat poursuivant. L'Acte


uniforme indique les mentions qui doivent figurer dans le cahier des charges à peine
de nullité. L'article 267, fixant le contenu du cahier des charges, vise neuf mentions 293.
Le cahier des charges auquel est annexé l'état des droits réels doit être déposé dans les
conditions prévues par l'article 266294. Le dépôt donne lieu à l'établissement d'un acte
appelé acte de dépôt qui indique la date de la vente ; celle-ci doit se situer entre le
quarante-cinquième (45ème) jour et le quatre-vingt-dixième (90ème) jour après le dépôt.

Jusqu'au dépôt du cahier des charges, la procédure est conduite


unilatéralement par le poursuivant. Pourtant, d'autres personnes peuvent être
intéressées ; c'est pourquoi, les rédacteurs de l'Acte uniforme font obligation au
293
Il s'agit de :
1) l'intitulé de l'acte ;
2) l'énonciation du titre exécutoire en vertu duquel les poursuites sont exercées contre le débiteur et du
commandement avec la mention de sa publication ainsi que des autres actes et décisions judiciaires intervenus
postérieurement au commandement et qui ont été notifiés au créancier poursuivant ;
3) l'indication de la juridiction ou du notaire convenu entre le poursuivant et le saisi devant qui l'adjudication est
poursuivie ;
4) l'indication du lieu où se tiendra l'audience éventuelle prévue par l'article 270 ci-après;
5) les nom, prénoms, profession, nationalité, date de naissance et domicile du créancier poursuivant ;
6) les nom, qualité et adresse de l'avocat poursuivant ;
7) la désignation du navire saisi contenue dans le commandement ou le procès verbal de description dressé par
l'huissier ou l'agent d'exécution ;
8) les conditions de la vente et, notamment, les droits et obligations des vendeurs et adjudicataires, le rappel des
frais de poursuite et toute condition particulière ;
9) la mise à prix fixée par le poursuivant, laquelle ne peut être inférieure au quart de la valeur vénale du navire.
La valeur du navire doit être appréciée, soit au regard de l'évaluation faite par les parties lors de la conclusion de
l'hypothèque maritime, soit, à défaut, par comparaison avec les transactions portant sur des navires de nature et
de situation semblables.
294
Article 266 de l'AUPSRVE : « Le cahier des charges est le document, rédigé et signé par l'avocat du
créancier poursuivant, qui précise les conditions et modalités de la vente du navire saisi. Il est déposé au greffe
de la juridiction dans le ressort de laquelle se trouve le navire saisi dans un délai maximum de cinquante jours à
compter de la publication du commandement, à peine de déchéance »
101

poursuivant de faire sommation aux personnes qui peuvent être intéressées de prendre
communication du cahier des charges et d'y insérer leurs dires.

L'article 267 de l'AUPSRVE vise deux catégories de personnes


sommées de prendre communication du cahier des charges : le saisi et les créanciers
inscrits. Il s'en suit que ni les créanciers chirographaires ni les créanciers
hypothécaires non-inscrits n'ont à recevoir la sommation. L'obligation de signifier la
sommation au saisi s'explique aisément : c'est son navire qui doit être vendu ; il est
normal qu'il soit invité à prendre connaissance du cahier des charges pour connaître
les conditions de la vente. La signification au saisi se fait à personne ou à domicile.
L'obligation de signifier la sommation aux créanciers inscrits se justifie tout autant : en
effet, compte tenu de l'effet de purge qui s'attache à l'adjudication, il est normal qu'ils
soient invités à prendre connaissance du cahier des charges pour y insérer leurs dires
et observations ; la signification est faite pour ces créanciers, à domicile élu. Il
convient de préciser qu'en parlant de créanciers inscrits, les rédacteurs de l'Acte
uniforme visent non seulement les créanciers qui ont obtenu une hypothèque pour
garantie d'un prêt, et qu'ils l'ont faite inscrire, mais aussi le vendeur, le copartageant et
l'échangiste.

Le contenu de la sommation de prendre communication du cahier des


charges est fixé par l'article 270 de l'AUPSRVE. Cette sommation doit indiquer à
peine de nullité : premièrement, les jour et heure de l'audience éventuelle ;
deuxièmement, les jour et heure prévus pour l'audience d'adjudication ; troisièmement
et enfin, l'avertissement que les dires et observations seront reçus, à peine de
déchéance, jusqu'au cinquième jour précédent l'audience éventuelle et qu'à défaut de
former et de faire mentionner à la suite du cahier des charges, dans ce même délai, la
demande en résolution d'une vente antérieure ou la poursuite de folle enchère d'une
réalisation forcée antérieure, il y aura déchéance du droit d'exercer ces actions.

Le délai pour faire la sommation est de huit jours, et il a pour point de


départ le jour du dépôt du cahier des charges. Ce délai est prescrit à peine de
déchéance295.

La sommation est non seulement destinée à informer les personnes


intéressées mais aussi à provoquer leurs dires et observations. Ces dires et

295
Article 297 alinéa 1er de l'AUPSRVE
102

observations doivent être déposés, à peine de déchéance, au plus tard le cinquième


jour précédent l'audience éventuelle ; c'est au cours de cette audience que ces dires
seront jugés.

c. L'audience éventuelle

Cette audience éventuelle ne peut avoir lieu moins de trente jours après
la dernière sommation. Ce délai de trente jours est fixé pour permettre aux créanciers
inscrits et au saisi de disposer du temps nécessaire pour préparer leurs argumentations.
Il faut rappeler que la sommation doit indiquer la date retenue pour la tenue de cette
audience. Cette date ne peut en principe être modifiée. Toutefois, il peut y avoir
remise de l'audience éventuelle dans deux cas : premièrement, s'il y a des causes
graves et dûment justifiées ; deuxièmement, si la juridiction saisie exerce d'office son
contrôle sur le cahier des charges dans les conditions prévues par la loi296.

Lors de l'audience éventuelle, les principes directeurs du procès doivent


être respectés. L'un des principes consacrés est le principe dispositif. C'est ce qui
explique que le tribunal ne puisse se prononcer que sur les questions soulevées dans
les dires et observations. Il peut cependant prendre d’offices certaines mesures : il peut
tout d'abord ordonner d'office la distraction de certains biens, lorsque la valeur
apparaît disproportionnée par rapport au montant des créances à recouvrer ; il peut
aussi modifier d'office, le montant de la mise à prix si celle-ci est fixée en violation
des dispositions de l'article 267 sur la mise à prix fixée par le poursuivant. En plus du
principe du dispositif, le juge doit veiller au respect du principe du contradictoire.
Ainsi, les dires et observations sont jugés après échange de conclusions motivées 297.
Le juge doit lui-même respecter ce principe ; c'est pourquoi le tribunal doit, lorsqu'il
est amené à modifier le cahier des charges, inviter les parties à présenter leurs
observations dans un délai de cinq jours298.

La décision judiciaire rendue à l'occasion de l'audience éventuelle est


transcrite par les soins du greffier sur le cahier des charges ; elle est levée et signifiée à
la demande de la partie la plus diligente.

296
Article 273 de l'AUPSRVE
297
L'article 272 alinéa 1er rappelle d'ailleurs expressément que cet échange doit être fait dans le respect du
principe du contradictoire
298
Article 275 alinéa 2 de l'AUPSRVE
103

Pour que le concours de nombreux acheteurs porte les enchères au


meilleur prix, il est de l'intérêt du poursuivant de donner à la réalisation du navire la
plus large publicité possible.

d. La publicité en vue de la vente

Il faut informer ceux qui pourraient être intéressés par l'adjudication de


telle sorte que, la concurrence aidant, la vente puisse se faire au meilleur prix. L'article
276 détermine soigneusement les modalités et les délais de cette publicité.

En ce qui concerne les modalités, selon l'article 276, un extrait du


cahier des charges doit être publié sous la signature de l'avocat poursuivant, par
insertion dans un journal d'annonces légales et par apposition de placards. L'extrait
doit à peine de nullité, contenir les indications prévues par l'article 277 299. Ceci dit, les
placards sont apposés à la porte du domicile du saisi, de la juridiction compétente ou
de l'étude du notaire convenu ainsi que dans les lieux officiels d'affichage. Prenant en
compte la particularité du navire, l'apposition devrait aussi se faire sur la partie
apparente du navire saisi, sur le quai du port où le navire est amarré, à la chambre de
commerce, au bureau de la douane et au siège de la circonscription maritime du lieu
de la saisie. La publicité prévue par l'article 276 de l'AUPSRVE peut être augmentée
ou restreinte par ordonnance (sur requête) du président du tribunal. Celui-ci rend son
ordonnance en tenant compte de la nature et de la valeur du navire saisi.

Pour ce qui est des délais, la publicité ne doit avoir lieu ni trop tôt 300 ni
trop tard301. C'est ce qui explique les délais fixés par l'article 276. Ce texte prévoit que
la publicité doit avoir lieu trente jours au plus tôt et quinze jours au plus tard avant
l'adjudication302.

2. L'adjudication du navire

299
Il s'agit de : 1) les noms, prénoms, professions, domiciles ou demeures des parties et de leurs avocats ;
2) la désignation des navires saisis telle qu'elle est insérée dans le cahier des charges ;
3) la mise à prix ;
4) l'indication des jour, lieu et heure de l'adjudication, de la juridiction compétente ou du notaire convenu devant
qui elle se fera
300
Car les intéressés peuvent oublier la vente
301
Car il ne faut pas que les intéressés soient obligés de se décider dans la précipitation
302
L'article 297 de l'AUPSRVE prévoit que le non-respect des délais prévus par l'article 276 est sanctionné par la
déchéance. Cette règle est curieuse. On peut en effet se demander comment sanctionner par la déchéance celui
qui a accompli plus tôt que prévu la formalité requise. Il nous semble que celui qui a accompli les mesures trop
tôt et qui s'en rend compte peut parfaitement les refaire
104

C'est le dénouement normal de la procédure de saisie des navires. Elle a


lieu à la barre du tribunal ou en l'étude du notaire convenu. L'AUPSRVE ne donne
aucune indication sur la convention désignant le notaire. Il règle en revanche trois
problèmes : le moment (a), le déroulement (b) et les effets (c) de l'adjudication.

a. Le moment de l'adjudication

La date d'adjudication qui figure dans les sommations doit se situer


entre le trentième et le soixantième jour après l'audience éventuelle. Il peut arriver
cependant que la date fixée ne soit pas celle où l'adjudication aura effectivement lieu.
Il en est ainsi dans trois cas : le premier est visé par l'article 271 alinéa 1er de
l'AUPSRVE. Il résulte de ce texte que s'il a été régulièrement introduit une demande
en résolution d'une vente antérieure ou une poursuite sur folle enchère d'une
réalisation forcée antérieure, il est sursis aux poursuites. Ce sursis s'explique par le fait
que de la décision rendue à propos de ces demandes, dépend la validité de
l'adjudication. Le second est visé par l'article 274 de l'AUPSRVE. Pour comprendre la
situation envisagée par ces textes, il faut partir de l'idée que les dires et observations
peuvent rendre nécessairement la tenue d'une audience éventuelle. Si le tribunal est
dans l'impossibilité de statuer immédiatement, il ne sera pas possible de tenir
l'audience d'adjudication à la date prévue. C'est pourquoi l'article 274 alinéa 2 de
l'AUPSRVE prévoit que la juridiction compétente fixe une nouvelle date si celle qui
était antérieurement fixée ne peut être maintenue. Le troisième cas est fixé par l'article
281 de l'AUPSRVE. Ce texte prévoit que l'adjudication peut être remise pour causes
graves et légitimes. La remise prévue par ce texte doit être demandée par requête au
moins cinq jours avant la date fixée pour la vente. Elle fait l'objet d'une décision
motivée qui doit fixer le jour du déroulement de l'adjudication qui ne peut être éloigné
de plus de soixante jours.

b. Le déroulement de l'adjudication

Le déroulement de l'adjudication comporte trois étapes : la réquisition,


les enchères et la décision.

Pour ce qui est premièrement de la réquisition, le tribunal ne peut


procéder à l'adjudication sans en être requis par le poursuivant ; c'est le sens de l'article
280 de l'AUPSRVE selon lequel « au jour indiqué pour l'adjudication, il est procédé à
la vente sur réquisition, même verbale, de l'avocat du poursuivant ». Toutefois, à
105

défaut pour le poursuivant de requérir l'adjudication, il peut y être procédé sur


demande de l'un des créanciers inscrits.

En ce qui concerne deuxièmement les enchères, elles sont définies par


l'article 282 alinéa 2 comme des offres successives et de plus en plus élevées
présentées par des personnes qui désirent acquérir le navire. En principe, tout intéressé
peut enchérir mais il y a cependant des limites. En effet, ne peuvent enchérir ceux qui
sont frappés d'incapacité de droit commun ; par conséquent, une personne incapable
soumise à un régime de représentation ne peut enchérir dans une adjudication sur
saisie des navires que par l'intermédiaire de son représentant légal ; un majeur en
curatelle doit se faire représenter. Ne peuvent non plus enchérir, les personnes visées
par l'article 284 de l'AUPSRVE. Ce texte parle des membres du tribunal ou de l'étude
du notaire, de l'avocat poursuivant qui ne peut enchérir pour lui-même, du saisi et des
personnes notoirement insolvables303. La transgression de ces règles portant incapacité
d'enchérir est sanctionnée par la nullité de l'enchère. L'article 284 qui édicte cette
sanction ne se prononce pas, toutefois, sur le caractère de cette nullité. On pourrait
penser que s'il s'agit d'incapacité de droit commun, la nullité sera relative et que dans
les autres cas, la nullité sera absolue. La nullité n'est cependant pas la seule sanction
encourue ; l'article 284 prévoit, par ailleurs, que l'avocat qui a présenté une enchère
pour une personne frappée d'incapacité spéciale peut être condamné au paiement des
dommages et intérêts.

Avant l'entrée en vigueur de l'Acte uniforme, ceux qui voulaient


enchérir devaient s'attacher les services d'un avocat, car les enchères étaient
nécessairement portées par ministère d'avocat. On justifiait l'assistance obligatoire de
l'avocat en soutenant qu'elle limitait les risques d'incidents entre enchérisseurs et
qu'elle garantissait le sérieux des enchères. Aujourd'hui, l'article 282 alinéa 3 304 de
l'AUPSRVE donne aussi aux enchérisseurs le droit de porter eux-mêmes leurs
enchères.

303
L'interdiction d'enchérir en ce qu'elle concerne les personnes notoirement insolvables est sans intérêt. En effet,
il y a une formule que l'on retrouve presque dans tous les cahiers des charges et qui apparaît comme une clause
de style « nul ne peut enchérir sans versement préalable d'une caution égale au montant de la mise à prix sauf
dispense de l'avocat poursuivant »
304
Article 282 alinéa 3 de l'AUPSRVE : « Les offres sont portées par ministère d'avocat ou par les enchérisseurs
eux-mêmes ; le même avocat peut représenter plusieurs enchérisseurs lorsque ceux-ci désirent se porter co-
adjudicataires »
106

L'article 283, consacré au déroulement de la procédure d'adjudication,


prévoit qu'avant l'ouverture des enchères, il est préparé des bougies de manière que
chacune d'elles ait une durée d'une minute. Aussitôt les enchères ouvertes, il est
allumé une bougie et le montant de la mise à prix est annoncé. Deux cas de figures
peuvent alors se présenter : il se peut tout d'abord qu'il n'y ait pas d'enchère après
l'extinction de trois bougies ; dans ce cas, le poursuivant est déclaré adjudicataire à
moins qu'il ne demande la remise de l'adjudication à une autre audience pour une
nouvelle mise à prix. En cas de remise 305, si aucune enchère n'est portée, lors de la
nouvelle adjudication, le poursuivant est déclaré adjudicataire pour la première mise à
prix306 ; il se peut ensuite que plusieurs enchères soient portées, dans ce cas, les règles
suivantes sont applicables : si, avant l'extinction d'une bougie, il survient une enchère,
celle-ci ne devient définitive et n'entraîne l'adjudication que s'il n'en survient pas une
nouvelle avant l'extinction de deux bougies. Toute enchère portée pendant cette
période couvre automatiquement l'enchère précédente et libère l'enchérisseur
précédent, même si la nouvelle enchère est nulle. Lorsque la dernière enchère est
portée par ministère d'avocat, l'avocat dernier enchérisseur a trois jours pour faire
connaître le nom de l'adjudicataire et fournir son acceptation ou représenter son
pouvoir307. À défaut, il est réputé adjudicataire en son nom308.

Troisièmement et enfin, les biens sont adjugés à celui qui a porté


l'enchère la plus élevée par décision judiciaire 309 ou procès-verbal du notaire porté en
minute à la suite du cahier des charges. Selon l'article 293 de l'AUPSRVE, la décision
judiciaire ou le procès-verbal d'adjudication ne peut faire l'objet d'aucune voie de
recours. Cette décision peut cependant être attaquée par la voie d'action principale en
nullité portée devant la juridiction compétente 310 ; cela résulte de l'article 313 de
l'AUPSRVE. Même si ce texte ne parle que d'action principale en nullité, rien ne
devrait s'opposer à ce que la demande en nullité soit présentée sous forme d'exception
au cours d'un procès contentieux où la décision d'adjudication est invoquée.
305
En cas de remise, les mesures de publicité sont réitérées
306
Article 283 alinéa 6
307
Cette déclaration d'acceptation ne doit pas être confondue avec la déclaration de command qui consiste pour
l'adjudicataire à faire savoir que ce n'est pas pour son propre compte qu'il s'est rendu acquéreur, mais pour une
autre personne dont il révèle alors le nom. La déclaration de command doit être faite dans les vingt-quatre heures
308
Article 286 alinéa 1er de l'AUPSRVE. Cette disposition, curieusement, revient à contredire celle de l'article
284 alinéa 2
309
Article 286 alinéa 1er de l'AUPSRVE. Cette disposition, curieusement, revient à contredire celle de l'article
284 alinéa 2
310
La possibilité d'une action principale en nullité prouve que la décision d'adjudication est une décision
gracieuse
107

Une fois le déroulement de l'adjudication achevé, l'on assiste à une


véritable modification des droits et obligations du principal protagoniste à
l'adjudication à savoir l'adjudicataire, ce qui est nettement perceptible dans les effets
de l'adjudication.

c. Les effets de l'adjudication

L'adjudication donne des droits à l'adjudicataire et fait naître des


obligations à sa charge.

En ce qui concerne les droits de l'adjudicataire, ce dernier acquiert la


propriété du débiteur saisi mais seulement cela. C'est ce qui résulte de l'article 296 aux
termes duquel, l'adjudication même publiée au bureau de la conservation des
hypothèques maritimes, ne transmet à l'adjudicataire d'autres droits réels que ceux
appartenant au saisi. Il s'en suit que si le saisi n'était pas propriétaire, l'adjudicataire
n'acquiert pas la propriété du navire. Dans le même ordre d'idées, si la propriété du
saisi était menacée par une action en annulation, en résolution ou en révocation, celle
de l'adjudicataire serait menacée de la même manière. Il y a cependant une dérogation
à ce principe. Elle apparaît lorsque le navire était grevé d'hypothèque ou de privilège.
En effet, lorsque l'expédition est déposée à la conservation, le conservateur procède à
la radiation de tous les privilèges et hypothèques inscrits qui se trouvent purgés par la
vente. Les créanciers n'auront alors plus d'action que sur le prix.

Pour ce qui est des obligations de l'adjudicataire, il est tenu de toutes les
obligations stipulées dans le cahier des charges 311 et spécialement l'obligation de payer
le prix. L'inexécution de ces obligations entraîne un certain nombre de conséquences :
tout d'abord les créanciers colloqués pourront recourir aux voies d'exécution. Ensuite,
le greffier ou le notaire pourra refuser de délivrer l'expédition de la décision ou du
procès-verbal312. Cela résulte de l'article 290 alinéa 2 de l'AUPSRVE selon lequel le
greffier ou le notaire délivre l'expédition après paiement du prix d'adjudication et des
frais de poursuite et après l'accomplissement des obligations du cahier des charges.
Cela veut dire que la délivrance ne pourra intervenir avant l'exécution de telles
obligations. Enfin, la revente sur folle enchère pourra être poursuivie. En effet, l'article
290, dernier alinéa de l'AUPSRVE indique clairement que le défaut de production

311
Ces obligations doivent être exécutées dans les vingt jours de l'adjudication
312
C'est une sorte d'exception d'inexécution
108

dans les vingt jours de l'adjudication, de la quittance de paiement et des pièces


justificatives, peut entraîner des poursuites pour folle enchère.

Si l'adjudicataire exécute ses obligations, il peut s'attendre légitimement


à un transfert de propriété à son profit. Toutefois, ce transfert ne s'opère pas toujours,
il peut être remis en cause par un incident survenu en cours de procédure.

B. Les incidents de la saisie des navires

En adaptation des règles de la saisie immobilière, il existe deux types


de règles ayant vocation à régir les incidents de la saisie-exécution des navires : les
règles propres à chaque incident (1) et les règles communes à tous les incidents (2).

1. Les règles propres à chaque type d'incident

L'AUPSRVE envisage quatre types d'incidents : les incidents nés de la


pluralité des saisies (a), les demandes en distraction (b), les demandes en annulation
(c) et la folle enchère (d) ; on devrait leur embrasser un cinquième prévu par
l'AUPCAP : l'ouverture d'une procédure collective (e).

a. Les incidents nés de la pluralité des saisies : les oppositions

Lorsque plusieurs créanciers poursuivent le même débiteur, il y a, le


plus souvent jonction, les poursuites étant menées pour le compte de tous par le
premier saisissant. Mais il y a des hypothèses où un autre créancier demande à être
subrogé dans les poursuites.

En ce qui concerne premièrement la jonction des poursuites, il faut


observer tout d'abord que lorsqu'un créancier entend saisie-exécuter un navire ayant
déjà fait l'objet d'une saisie, il ne peut mener une poursuite indépendante de la
première. C'est une application de la règle « saisie sur saisie ne vaut »313. Il résulte de
la combinaison des alinéas 2 et 3 de l'article 260 que le conservateur, dans une telle
hypothèse, ne peut publier le second commandement. Il se borne à le mentionner en
marge de la première transcription ; il doit également constater, en marge et à la suite
de ce second commandement, son refus de transcription ; ce système permet à tous les
créanciers de se connaître ; la procédure est poursuivie par le saisissant, mais la
radiation ne peut être opérée sans le consentement des créanciers postérieurs

313
Cette règle a déjà été observée lorsqu'il s'agissait de parler de la saisie conservatoire des navires
109

révélés314. Il faut dire que cette situation ne constitue pas véritablement un incident ; en
effet, non seulement, elle n'implique pas l'intervention d'un tribunal, mais en plus, elle
n'est pas traitée dans les dispositions consacrées aux incidents. En matière de pluralité
de saisies, l'Acte uniforme n'envisage que deux situations consécutives d'incidents : la
première correspond à celle où deux ou plusieurs créanciers ont fait publier des
commandements relatifs à des navires différents appartenant au même débiteur et dont
la saisie est poursuivie devant la même juridiction315 ; dans une telle hypothèse, les
poursuites sont réunies à la requête de la partie la plus diligente 316 et continuées par le
premier saisissant317. La seconde situation correspond à celle où le second
commandement englobe, outre le navire de la première saisie, d'autres navires. Dans
ce cas, le deuxième saisissant est tenu de dénoncer son commandement 318 au premier
saisissant, et alors, de deux choses l'une : soit les deux procédures sont au même état,
alors le premier saisissant poursuit les deux saisies ; soit elles ne sont pas au même
état ; dans ce cas, le premier saisissant sursoit à sa saisie et poursuit la deuxième afin
de la mettre au même niveau ; les deux saisies seront alors réunies devant la juridiction
de la première saisie.

Deuxièmement et enfin, en ce qui concerne la subrogation dans les


poursuites, l'AUPSRVE a voulu que le premier saisissant assure la direction des
opérations en cas de pluralité de saisies ; certes, les autres créanciers participent aux
opérations, mais leur rôle est négligeable. Cependant, il faut leur permettre d'intervenir
de manière plus active lorsque celui qui conduit les opérations n'assume pas sa
mission ou cesse de conduire la procédure dans l'intérêt de tous. Aussi, l'Acte
uniforme a-t-il prévu la possibilité pour ces créanciers de se substituer au premier
saisissant : c'est ce que l'on appelle la subrogation dans les poursuites. Deux cas de
subrogation sont réglementés par l'Acte uniforme : le premier cas est prévu par l'article
304 qui envisage l'hypothèse où le premier saisissant à qui une seconde saisie a été

314
Article 260 de l'AUPSRVE
315
Article 302 de l'AUPSRVE
316
Le tribunal ne peut ordonner d'office la jonction ; il faut nécessairement une requête de l'une des parties
317
L'alinéa 2 de l'article 302 apporte une importante précision permettant de déterminer le premier saisissant.
Selon ce texte, « si les commandements ont été publiés le même jour, la poursuite appartient au créancier dont
le commandement est le premier en date et si les commandements sont de même jour, au créancier le plus
ancien ». L'expression « créancier le plus ancien » est cependant énigmatique. En France, il est question de
l'avocat le plus ancien, cela se comprend puisque l'ancienneté de l'inscription confère certains droits. Si on peut
s'appuyer sur les dates d'inscription pour déterminer l'ancienneté des avocats, un tel critère ne peut
manifestement être utilisé pour des créanciers. L'Acte uniforme veut-il se référer à la date de la créance ? Nous le
pensons
318
Ce commandement est publié pour les biens non compris dans le premier commandement
110

dénoncée s'abstient de diriger les poursuites ; dans ce cas, le second saisissant peut,
par un acte écrit adressé au conservateur, demander la subrogation. Le second cas de
subrogation est prévu par l'article 305 ; ce texte autorise la demande en subrogation s'il
y a collusion, fraude, négligence ou toute autre forme de retard imputable au
saisissant. En cas de subrogation, la poursuite est reprise par le subrogé qui la continue
à partir du dernier acte utile ; il ne la recommence pas.

b. Les demandes en distraction

La distraction en l'espèce est l'incident de la saisie des navires par


lequel un tiers qui se prétend propriétaire du navire cherche à le soustraire de la saisie.

L'incident ne peut être provoqué que par un tiers. La demande en


distraction fait partie des incidents qui peuvent être présentés après l'audience
éventuelle, mais seulement jusqu'au huitième jour avant l'adjudication. La demande en
distraction suspend les poursuites si elle porte sur la totalité des biens. En revanche, si
elle porte sur une partie des biens saisis, il pourra être procédé à l'adjudication du
surplus, mais le tribunal peut, à la demande des parties intéressées, ordonner le sursis
pour le tout. En cas de distraction partielle, le poursuivant est admis à changer la mise
à prix portée au cahier des charges.

Outre le cas de distraction, la procédure de saisie-exécution des navires


pourrait être phagocytée par des demandes en annulation favorables.

c. Les demandes en annulation

Elles devraient constituer tout comme en matière de saisie immobilière,


les incidents les plus fréquents de la saisie des navires, car les conditions de fond et de
forme sont très nombreuses.

Il existe deux cas de nullité ; d'une part, les nullités pour vice de fond ;
d'autre part, les nullités pour vice de forme qui sanctionnent les actes irrégulièrement
accomplis.

Il faut combiner les articles 299 et 311 alinéa 1er de l'AUPSRVE pour
avoir une idée du délai dans lequel les moyens de nullité doivent être soulevés.

Lorsqu'il s'agit d'une demande dirigée contre la procédure qui précède


l'audience éventuelle, il faut un dire annexé au cahier des charges cinq jours au plus
111

tard avant la date fixée pour cette audience ; il n'en serait autrement que si la cause de
nullité était découverte postérieurement à cette audience.

Lorsqu'il s'agit d'une demande dirigée contre la procédure suivie à


l'audience éventuelle, elle peut être présentée après l'audience éventuelle, mais
seulement jusqu'au huitième jour avant l'adjudication.

Un cas particulier est visé par l'article 313 de l'AUPSRVE, mais on peut
se demander s'il s'agit réellement d'un incident, car il concerne une demande introduite
après l'adjudication : c'est la demande en nullité de la décision judiciaire ou du procès-
verbal notarié d'adjudication. Une telle demande peut être faite par voie d'action
principale en nullité portée devant la juridiction compétente dans le ressort de laquelle
l'adjudication a été faite. Cette demande doit être présentée dans le délai de quinze
jours à compter de l'adjudication.

Les effets de la nullité de la procédure suivie sont déterminés par


l'article 311 alinéa 1er de l'AUPSRVE. Selon ce texte, si les moyens de nullité sont
admis, la procédure peut être reprise à partir du dernier acte valable et les délais pour
accomplir les actes suivants courent à la date de la signification de la décision
judiciaire qui a prononcé la nullité.

C'est l'article 313 de l'AUPSRVE qui est consacré à la nullité de la


décision d'adjudication ; selon ce texte, le jugement d'annulation a pour effet
d'invalider la procédure à partir de l'audience éventuelle ou postérieurement à celle-ci
selon les causes de l'annulation319.

Il convient de signaler que la nullité n'est pas nécessairement prononcée


à la suite de la contestation d'une irrégularité. Dans certains cas, l'irrégularité n'est
sanctionnée par la nullité que si celui qui s'en prévaut justifie d'un grief. L'Acte
uniforme n'a pas, il est vrai, consacré de manière générale, la règle « pas de nullité
sans grief », mais il énumère dans l'article 299 de l'AUPSRVE un certain nombre de
formalités qui ne sont sanctionnées par la nullité que si l'irrégularité a eu pour effet de
causer un préjudice aux intérêts de celui qui l'invoque. La liste dressée par l'article 299
de l'AUPSRVE est limitative dans la mesure où la nullité n'est pas subordonnée à un
grief lorsque la formalité en cause n'est pas visée par le texte.
319
Il serait difficilement concevable d'invalider la procédure antérieurement à l'audience éventuelle puisque les
demandes dirigées contre cette procédure doivent être introduites avant cette audience et jugées au cours de
celle-ci
112

Si la demande en nullité n'est pas justifiée et que l'adjudication a eu lieu, l'adjudicataire est
astreint à certaines formalités sous peine de revente du navire par la procédure de folle
enchère.

d. la folle enchère

On peut d'emblée se demander si la folle enchère est un incident de la


saisie des navires car, étant dirigée contre l'adjudicataire, cette procédure intervient
après l'adjudication et l'expropriation forcée du navire. Il s'agit donc plus d'une suite
de la saisie des navires que d'un incident. Il faut cependant nuancer une telle analyse,
car il ne faut pas perdre de vue que la saisie n'est vraiment terminée qu'au moment où
les créanciers peuvent exercer effectivement leur droit de préférence sur un prix
d'adjudication payé par un acquéreur solvable.

Ceci étant, l'article 314 de l'AUPSRVE définit la folle enchère comme


la procédure ayant pour objet de mettre à néant l'adjudication en raison des
manquements de l'adjudicataire à ses obligations et de provoquer une nouvelle vente
aux enchères du navire. Il y aurait donc folle enchère lorsque l'adjudicataire n'est pas
en mesure de tenir ses engagements, généralement parce qu'il a porté les enchères à un
prix très supérieur à ses ressources. La poursuite de la folle enchère conduira à la
résolution de l'adjudication avec remise en vente du navire.

La folle enchère est donc ouverte dans deux cas : premièrement lorsque
l'adjudicataire ne justifie pas dans les vingt jours suivant l'adjudication qu'il a payé le
prix, les frais, et satisfait aux conditions du cahier des charges ; deuxièmement lorsque
l'adjudicataire ne fait pas publier la décision judiciaire ou le procès-verbal notarié
d'adjudication à la conservation des hypothèques maritimes dans le délai de deux mois
à compter de la décision.

La folle enchère peut être intentée par le saisi, le créancier poursuivant


et les créanciers inscrits et chirographaires. La procédure se déroule selon les règles
des articles 316 à 323 de l'AUPSRVE. Le fol enchérisseur est responsable du non
paiement de son prix d'adjudication. La folle enchère n'aura un effet sur l'adjudicataire
défaillant que si le navire a été vendu à un prix plus bas que celui qu'il avait proposé ;
il devra donc payer la différence entre ces prix.
113

Ces quatre cas sont prévus par l'AUPSRVE et sont propres aux voies
d'exécution. Cependant, à la lecture de l'AUPCAP, l'on se rend compte qu'il pourrait
avoir collision entre les procédures collectives et les voies d'exécution, toutes deux
ouvertes à l'encontre d'une personne. Dans cette situation, l'AUPCAP prévoit dans
certains cas la suspension des poursuites individuelles, donc des voies d'exécution,
d'où la considération selon laquelle l'ouverture d'une procédure collective pourrait
constituer un incident de saisie-exécution des navires.

e. l'ouverture d'une procédure collective

Depuis l'avènement de l'OHADA, les procédures collectives sont régies


par un Acte uniforme appelé Acte uniforme portant organisation des procédures
collectives d'apurement du passif. Adopté le 10 avril 1998, cet Acte uniforme est entré
en vigueur le 1er janvier 1999.

Tout comme en matière de saisie de droit commun, la survenance d'une


procédure collective en cours de saisie-exécution de navires devrait logiquement
suspendre les poursuites individuelles entreprises à l'occasion de cette voie
d'exécution, ceci en vertu des articles 9278(*)institué pour la procédure de règlement
préventif, et 75 de l'AUPCAP320 institué à propos des procédures de redressement
judiciaire et liquidation des biens.

Le règlement préventif est une procédure destinée à éviter la cessation


des paiements ou la cessation d'activités de l'entreprise et à permettre l'apurement de
son passif au moyen d'un concordat préventif. Pour ce faire, les poursuites
individuelles engagées contre les personnes soumises à une telle procédure devraient
être suspendues et les créanciers devraient se soumettre à une discipline collective.

Dans le redressement judiciaire, l'objectif étant le redressement de


l'entreprise, tous les créanciers, chirographaires ou titulaires de sûretés, subissent la
suspension des poursuites individuelles jusqu'à la résolution ou l'annulation du
concordat321.

320
L'article 75 de l'AUPCAP dispose : « La décision d'ouverture suspend ou interdit toutes les poursuites
individuelles tendant à faire reconnaître des droits et des créances ainsi que toutes les voies d'exécution tendant
à en obtenir le paiement, exercées par les créanciers composant la masse sur les meubles et immeubles du
débiteur »
321
Article 76 et suivants de l'AUPCAP
114

Dans la liquidation des biens, comme son nom l'indique, l'apurement du


passif est obtenu à l'issue des opérations de liquidation de l'actif mobilier et
immobilier. Pour faciliter les opérations de liquidation de l'actif mobilier et
immobilier, le droit de poursuite des créanciers gagistes, des créanciers nantis et
hypothécaires est suspendu jusqu'à l'expiration d'un délai de trois mois suivant le
jugement prononçant la liquidation des biens. Passé ce délai, si le syndic n'a pas
réalisé les biens concernés, les créanciers peuvent reprendre l'exercice de leur droit 322.

Les dispositions propres à chaque incident, ayant une portée limitée,


celles communes à tous les incidents seraient destinées à les compléter.

2. Les règles communes à tous les incidents

Elles se rapportent à la compétence et à la procédure d'une part, et aux


voies de recours d'autre part.

Pour ce qui est de la compétence et de la procédure, tout incident


suppose une instance principale. On peut considérer comme telle la procédure elle-
même. Dans ces conditions, le tribunal chargé de cette procédure est seul compétent
pour trancher les incidents de la saisie des navires ; cette compétence du tribunal
chargé de la procédure d'expropriation exclut celle de toute autre juridiction. La
procédure est caractérisée par la simplicité et la rapidité. La procédure est simple car la
contestation ou la demande est formée par simple acte d'avocat contenant les moyens
et conclusions. C'est seulement lorsqu'elle est dirigée contre une partie n'ayant pas
constitué d'avocat qu'elle est faite par « requête avec assignation »323 ainsi que
l'indique l'article 298 alinéa 1er de l'AUPSRVE. La procédure est rapide car l'affaire
est instruite et jugée d'urgence, mais aucun délai n'est fixé324.

Le régime des voies de recours applicables aux jugements rendus sur


les incidents de la saisie des navires est fixé par les articles 300 et 301 de l'AUPSRVE.
L'article 300 exclut l'opposition qui ne peut donc jamais être exercée contre un
jugement ayant statué sur un incident. En ce qui concerne l'appel, ce texte le soumet à

322
Article 149 et 150 de l'AUPCAP
323
L'article 298 alinéa 1er de l'AUPSRVE utilise l'expression « requête avec assignation » ; c'est étonnant
puisque la requête et l'assignation constituent deux modalités différentes de saisine d'une juridiction. Cette
formule ne s'explique que si l'appel est dirigé à la fois contre des parties ayant constitué avocat et d'autres qui ne
l'auraient pas fait
324
En France non plus, aucun délai n'est fixé ; c'est ce qui explique qu'on ait pu qualifier cette règle de simple
recommandation faite au tribunal
115

des règles très strictes. En effet, il n'admet l'appel que lorsque la décision statue sur le
principe même de la créance ou sur des moyens de fond tirés de l'incapacité de l'une
des parties, de la propriété, de l'insaisissabilité ou de l'inaliénabilité des biens saisis.
L'appel doit donc être déclaré irrecevable lorsque le jugement attaqué a statué sur des
incidents concernant la régularité formelle de la procédure de saisie de navires. Dans
les cas où l'appel est recevable, l'intéressé doit respecter les règles du droit commun ;
c'est ce qui résulte de l'article 300 alinéa 4 de l'AUPSRVE selon lequel l'appel est
exercé selon les conditions du droit. Quelques règles particulières résultent de l'article
301. Ce texte fait obligation à l'appelant de notifier l'acte d'appel à toutes les parties en
cause à leur domicile réel ou élu et au greffier de la juridiction compétente. La
juridiction d'appel, lorsqu'elle est régulièrement saisie, doit statuer dans la quinzaine
de l'appel
116

CONCLUSION

L'on se rend compte d'une originalité remarquable de la saisie


conservatoire des navires par rapport à la saisie conservatoire des biens meubles à
laquelle le navire aurait pu être soumis. Tout d'abord, la saisie conservatoire des
navires dans le contexte congolais est soumise à un double régime législatif : le droit
international incarné par le convention internationale 325, et le droit communautaire
CEMAC par le Code de navigation maritime Congolaise. Au regard du corpus de ces
textes, l'on se rend compte que la saisie conservatoire des navires conserve une
originalité dans l'ouverture de la saisie conservatoire liée à cet objet.

Ainsi, il a été observé d'une part, que le navire est un objet mobilier
« pluriel » car derrière le navire, se cachent plusieurs autres objets qui participent à sa
raison d'être au point où il eut été nécessaire que nous analysassions les objets
susceptibles d'être soumis au régime de la saisie conservatoire des navires. Ceci dit,
nous avons constaté qu'outre le navire qui est d'emblée admis à cette saisie, d'autres
accessoires, bien que détachables, mais qui participent à son existence et à son
fonctionnement tels les soutes se voient aussi appliquer ce régime mais à l'occasion
d'une saisie globale du navire. D'autre part, le principe est que seul le navire qui est à
l'origine de la créance maritime devrait seul souffrir de l'ouverture d'une saisie
conservatoire, ce qui a donné lieu à la conception de « navire-débiteur » même s'il
n'appartient plus au véritable débiteur personne physique ; à coté de ce navire, d'autres
navires sont également saisissables, il s'agit des navires appartenant au propriétaire du
navire auquel la créance se rapporte.

Contrairement à ce qui a cours en matière de saisie conservatoire


mobilière de droit commun où toute créance peut donner lieu à saisie conservatoire,

325
Convention internationale pour l’unification de certaines règles sur la saisie conservatoire des navires de mer
Conclue à Bruxelles, le 10 mai 1952
117

l'ouverture d'une saisie conservatoire des navires n'est possible que pour la garantie
d'une créance maritime, qui doit paraître fondée en son principe, ou pas forcément,
selon que le texte à appliquer est le CCMM ou les conventions internationales.

Les rédacteurs des textes sur la saisie conservatoire ne se sont pas


contentés de particulariser la saisie conservatoire des navires uniquement dans son
ouverture, ils ont prolongé cette particularisation dans la mise en oeuvre de ladite
saisie.

En droit interne congolais, il n’est pas fait mention d’un avis


préalable de l’autorité maritime pour autoriser la saisie conservatoire de navire, hormis
la décision du tribunal.

De force est de constater que le navire étant un meuble, possède des


caractéristiques qui le distinguent des autres meubles ordinaires, raison pour laquelle
le régime de sa saisie déroge très fortement à celui qui est en vigueur pour les meubles
ordinaires. La réaction du droit OHADA n'est pas en elle-même étonnante.

Ceci étant, tout au long de cette première partie, nous nous sommes
attelés à déceler les particularités de la saisie conservatoire des navires par rapport à la
saisie conservatoire de droit commun des biens meubles. Ces particularités se
manifestent tant en ce qui concerne l'ouverture de la saisie conservatoire des navires
qu'en ce qui concerne la mise en oeuvre de ladite saisie.

Nonobstant ces singularités, il est des cas où d'une part, l'on observe des
rapprochements entre les règles de la saisie des navires en particulier et celles de la
saisie de droit commun en général, et où d'autre part l'on se verra pour une raison ou
pour une autre, appliquer les règles découlant du droit commun des procédures civiles
d'exécution, ce qui pose le problème de l'adaptation des règles de la saisie de droit
commun à la saisie des navires

À l'épilogue de la première section, l'on se rend compte que la saisie


conservatoire de navire n'a de spécial que le nom, car à l'analyse de certaine conditions
de ladite saisie, il est remarqué d'une part que les textes sur la saisie conservatoire des
navires adaptent certaines de leurs dispositions à celles qui sont issues du droit
commun de la saisie conservatoire mobilière de droit commun découlant de
l'AUPSRVE ; et d'autre part, l'on aperçoit la vacuité juridique dont ces textes sont
118

coupables sur certains sujets intéressant fondamentalement les procédures civiles


d'exécution ; fort heureusement, en vertu du caractère supplétif de l'AUPSRVE, une
adaptation s'est imposée et a nécessité un travail d'ajustement, chose qui a été faite.

Cependant, l'on ne s'arrêtera pas là ; la faute revient soit au renvoi


exprès des textes sur la saisie, soit au vide juridique constaté sur une question cruciale
des voies d'exécution. Tel sera le cas lorsqu'on prendra la deuxième facette possible en
voies d'exécution des navires à savoir la saisie-exécution dont le sort est plus ou moins
lié aux règles de la saisie immobilière de droit commun dont une nécessaire adaptation
mérite d'être faite

La saisie-exécution des navires n'a point été prévue par les textes
internationaux, ceci est dû à notre avis à la disette d'une telle saisie. Seul le code de
navigation maritime dans notre contexte en parle et en distingue deux types : la saisie-
exécution du navire précédé d'une saisie conservatoire dudit navire, et la saisie-
exécution du navire non précédée d'une saisie conservatoire de ce navire. En ce qui
concerne le régime d'une telle saisie, ce texte renvoie pour la plupart aux règles issues
du droit commun de la saisie immobilière telles que prévues par l'AUPSRVE. Ce
renvoi concerne aussi bien les conditions d'ouverture que la procédure de cette saisie
d'où l'adaptation au droit maritime qui a nécessité un travail d'envergure

Ainsi, l'on peut constater une certaine dépendance du régime de


la saisie des navires à celui des saisies de droit commun tant en ce qui concerne la
saisie conservatoire des biens meubles corporels qu'en ce qui concerne la saisie
immobilière. Chacune de ces saisies voit certains éléments de leur régime, empruntés,
adaptés et appliqués à la saisie des navires, soit par renvoi des textes particuliers sur la
saisie des navires, soit tout simplement par vide juridique de ces textes. Ceci a donc
contribué à appliquer d'une part certaines règles de la saisie conservatoire des biens
meubles corporels à la saisie conservatoire des navires, et d'autre part les règles de la
saisie immobilière à la saisie-exécution des navires

À la péroraison de cette étude analytique entre la saisie des navires et la


saisie de droit commun, il apparaît tout d'abord que la saisie des navires est prévues
par le code de la navigation maritime 326 et par comparaison CEMAC. L'Acte uniforme
portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement des créances et des

326
Ordonnance-loi n°66-98 du 14/3/1966 portant code de la navigation maritime
119

voies d'exécution n’a pas prévue la saisie de navire mais plutôt, sur le plan
international par la convention internationale de Bruxelles sur l'unification de certaines
règles sur la saisie conservatoire des navires de mer du 10 mai 1952, destinée à être
remplacée par la convention internationale de Genève sur la saisie conservatoire des
navires du 12 mars 1999. Notre analyse se trouve confortée par l'article 8 paragraphe 4
de la convention de Bruxelles, texte qui énonce : « Aucune disposition de la présente
Convention ne modifiera ou n'affectera la loi interne des États Contractants en ce qui
concerne la saisie d'un navire dans le ressort de l'État dont il bat pavillon par une
personne ayant sa résidence habituelle ou son principal établissement dans cet État ».

Ceci étant, des particularités sont reconnues à la saisie notamment


conservatoire des navires comparativement à la saisie observée en droit commun. Les
textes font appel pour ce faire au terme « créance maritime », laquelle permettra
d'ouvrir une saisie conservatoire sur un navire, à l'exclusion des créances terrestres, et
le fait qu'en principe, seul le navire à l'origine de la créance devrait en supporter, a
donné lieu à la consécration des termes suivants : « navire-débiteur », « patrimoine
d'affectation », « action in rem », ce qui est une particularité remarquable dans
l'ouverture d'une telle saisie que sa mise en oeuvre l'est toute aussi.

Cependant les particularités relevées ne devraient pas flagorner ; en


effet, la saisie des navires obéit dans certains cas aux règles issues du droit commun de
la saisie, ce qui permettra de prendre en considération le régime hybride d'une telle
saisie, et adapter d'une part les règles de droit commun de la saisie conservatoire des
biens meubles corporels à la saisie conservatoire des navires d'une part, et d'autre part,
d'adapter les règles de droit commun de la saisie immobilière à la saisie-exécution des
navires.

Ceci permet d'arriver tout logiquement à la conclusion selon laquelle


« le spécial déroge au général » ; c'est dans le cas donc où le spécial ne prévoit rien,
que le général devrait recevoir application ; il en est de même en cas de renvoi
explicite ou implicite du spécial au général. C'est donc dire que l'AUPSRVE devrait
s'appliquer de façon supplétive à la saisie des navires lorsque le code de la navigation
maritime ou les conventions ont sur une question précise des voies d'exécution fait
l'impasse en renvoyant à cet Acte uniforme ou tout simplement lorsqu'ils n'ont rien
prévu.
120

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ANNEXE
LISTE DES DISPOSITIONS ABROGEES DU DROIT CONGOLAIS

ORDONNANCE DU 12 NOVEMBRE 1886


SAISIES IMMOBILIERES - FRAIS DE VENTE PAR MINISTÈRE D’HUISSIER
120

EXTE CONGOLAIS OBJET DISPOSITIONS OBSERVATIONS


CORRESPONDANTES
Ordonnance de 1886 DE L’AUPSRVE

Conditions de la saisie Identité d’objet.


Article 1 Articles 246 et 247.
immobilière. Abrogation de l’article 1er.

Article 2 (abrogé)

Article 3 Délivrance d’un extrait du Aucune disposition. Contraire en ce qu’il impose une
livre d’enregistrement et procédure supplémentaire non prévue par
constat de l’AUPSRVE : l’obtention auprès du
l’immatriculation. Conservateur des titres foncier, d’un
extrait du livre d’enregistrement
constatant que l’immeuble est inscrit au
nom du débiteur avant tout expropriation.
Abrogation de l’article 3.
NB 1 : cet article permet néanmoins de
constater que le terme « titre
immobilier » est également utilisé en
RDC et que la fonction de
« Conservateur des titres
immobiliers » est aussi réglementée en
RDC sous la même appellation.
NB 2 : cet article permet également de
confirmer que le droit congolais impose
l‘immatriculation des immeubles à la
Conservation foncière.
121

TEXTE CONGOLAIS OBJET DISPOSITIONS OBSERVATIONS


CORRESPONDANTE
Ordonnance de
S DE L’AUPSRVE
1886

Partage et liquidation de Identité d’objet et disposition contraire.


Article 4 Article 249.
l’immeuble. Abrogation de l’article 4.

Désignation d’un
administrateur des biens dans
Maintien de l’article 4 bis en ce qu’il
Article 4 bis l’hypothèse où le propriétaire Aucune disposition.
complète l’AUPSRVE.
ne peut être atteint par un
acte de procédure.

Identité d’objet et disposition contraire.


Article 5 Le commandement. Articles 254 à 265.
Abrogation de l’article 5.

Vente publique aux enchères Identité d’objet et disposition contraire.


Article 6 Article 282.
par un notaire. Abrogation de l’article 6.

Publicité de la vente - date et Identité d’objet et dispositions contraires.


Articles 276 à 279
Articles 7 et 8 lieu de l’adjudication et Abrogation des articles 7 et 8 (et du
Articles 280 et 282.
procédure d’adjudication. décret du 22 février 1918).

Identité d’objet et disposition contraire.


Article 9 Remise de l’adjudication. Article 281.
Abrogation de l’article 9.
122

TEXTE CONGOLAIS OBJET DISPOSITIONS OBSERVATIONS


CORRESPONDANTE
Ordonnance de
S DE L’AUPSRVE
1886

Vente sur plusieurs


immeubles : l’adjudication
prendra fin dès que le produit Maintien de l’article 10 qui est
Article 10 Aucune disposition.
de la vente suffira pour compatible avec l’esprit de l’AUPSRVE.
couvrir le montant de la
créance.

Saisie sur plusieurs Maintien de l’article 11 qui permet au


immeubles : indication par le débiteur de choisir l’ordre de la vente de
Article 11 Aucune disposition.
débiteur de l’ordre des ses immeubles, ce qui n’est pas contraire
ventes. à l’esprit de l’AUPSRVE.

Si le débiteur possède
plusieurs immeubles dont une
partie seulement a été saisie,
le créancier peut être Maintien de l’article 12 qui est
Article 12 Aucune disposition.
contraint par ordonnance du compatible avec l’esprit de l’AUPSRVE.
juge de saisir également les
autres immeubles dont le
débiteur est propriétaire.

L’adjudication et le paiement Identité d’objet et disposition contraire.


Article 13 Articles 290 et 324.
du prix. Abrogation de l’article 13.
123

TEXTE CONGOLAIS OBJET DISPOSITIONS OBSERVATIONS


CORRESPONDANTES
Ordonnance de
DE L’AUPSRVE
1886

Frais sur le prix de


l’adjudication : 6% au profit Aucune disposition
du Trésor sur le montant du
Article 14 prix de l’adjudication. (le (mention des frais à Maintien de l’article 14.
montant était auparavant de régler à l’article 290
8%, il est passé récemment à notamment).
6%).

Identité d’objet et disposition contraire.


Article 15 Solde du produit de la vente. Article 324.
Abrogation de l’article 15.

Article 16 (abrogé)

Annulation des baux qui n’ont


pas de date certaine avant le
Article 17 Aucune disposition. Maintien de l’article 17.
commandement et consenti
après le commandement.

Aliénation des immeubles Identité d’objet et disposition contraire.


Article 18 après le commandement et Article 262.
avant l’adjudication. Abrogation de l’article 18.

Les créanciers autres que le Contraire à l’esprit de l’AUPSRVE qui ne


poursuivant ne pourront soumet l’intervention des autres
Article 19 intervenir que si la sincérité Aucune disposition. créanciers à aucune autre condition que
de leur créance a été leur inscription.
constatée par jugement. Abrogation de l’article 19.
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125

TEXTE CONGOLAIS OBJET DISPOSITIONS OBSERVATIONS


CORRESPONDANTES
Ordonnance de
DE L’AUPSRVE
1886

Voies de recours et règlement


des difficultés de procédure Identité d’objet et disposition contraire.
Article 20 Articles 298 à 323.
au cours de la saisie Abrogation de l’article 20.
immobilière.

Identité d’objet et disposition contraire.


Abrogation de l’article 21.

NB : Cet article permet toutefois de


comprendre que le terme « Président de
la juridiction » utilisé à l’article 326 de
Distribution du prix et l’AUPSRVE est en droit congolais, le
Article 21 Articles 324 à 334.
contentieux. « Président du Tribunal de Commerce
ou, à défaut, de Grande Instance ».
Ainsi, la juridiction compétente en matière
de difficultés liées à la distribution du prix
est en droit congolais, « le Président du
Tribunal de Commerce ou, à défaut,
de Grande Instance, du lieu de la
vente. »
126

Ordonnance loi n°66-98 du 14 mars 1966 - Code de la navigation maritime


Articles 108 à 148

NB : L’AUPSRVE indique expressément que les saisies peuvent porter sur tous les biens - mobiliers corporels ou incorporels ou immeubles -
appartenant au débiteur alors même qu’ils seraient détenus par des tiers, sauf s’ils ont été déclarés insaisissables par la loi nationale de
chaque Etat partie (article 50 de l’AUSPRVE combiné notamment avec les articles 54, 91 et 246). Par ailleurs, l’AUPSRVE précise que
ces mesures d’exécution peuvent être engagées quelle que soit la nature de la créance.

L’AUPSRVE contient des dispositions générales à propos des différentes procédures de saisie mais aussi des dispositions particulières
limitativement énumérées relatives à la saisie conservatoire des droits des associés et des valeurs mobilières, la saisie la saisie des
rémunérations, la saisie appréhension et la saisie-revendication des biens meubles corporels.

Ainsi, l’AUPSRVE ne prévoit pas de procédure spécifique liée à la saisie des navires qui est de ce fait, régie par le régime général des
mesures d’exécution.

Toute disposition de droit interne relative à cette matière doit ainsi être abrogée conformément à l’article 336 de l’AUPSRVE.
127
128

TEXTE CONGOLAIS OBJET DISPOSITIONS OBSERVATIONS


CORRESPONDANTE
Code de la navigation
S DE L’AUPSRVE
maritime

Identité d’objet et disposition contraire.


Aux termes de l’AUPSRVE, « la célérité »
n’est pas une condition d’engagement
d’une procédure de saisie conservatoire.
Il suffit d’une créance fondée en son
principe et de circonstances qui en
menacent le recouvrement.
Abrogation de l’article 108.

Saisie conservatoire - NB : Cet article permet toutefois de


Article 108 Article 253.
conditions. comprendre que la « juridiction
compétente » - en matière de saisie
conservatoire de créance maritime - visée
aux articles 54 et suivants de l’AUPSRVE,
est en droit congolais de la navigation
maritime, le « Président du Tribunal
de Grande Instance dans le ressort
duquel le navire se trouve » ou encore
« le Juge Président du Tribunal de
Grande dans le ressort duquel le
bâtiment se trouve ».

Saisie conservatoire -
Maintien de l’article 109 en ce qu’il
Article 109 Définition de la créance Aucune disposition.
définit les créances maritimes.
maritime.
129
130

TEXTE CONGOLAIS OBJET DISPOSITIONS OBSERVATIONS


CORRESPONDANTE
Code de la navigation
S DE L’AUPSRVE
maritime

Saisie conservatoire -
Identification du navire
saisissable : celui auquel la
créance se rapporte ou tout
Maintien de l’article 110 qui indique
navire appartenant à celui
Article 110 Aucune disposition. les navires saisissables conformément à
qui était au moment où est
l’article 51 de l’AUPSRVE.
née la créance maritime,
propriétaire du navire
auquel cette créance se
rapporte.

Saisie conservatoire -
Maintien de l’article 111 en ce qu’il
Article 111 Affrètement d’un navire et Aucune disposition.
complète utilement l’AUPSRVE.
saisie.

Dispositions contraires. La main levée de


Saisie conservatoire - Main la mesure conservatoire est ordonnée
levée de la saisie dans des conditions limitativement
Article 112 à 115 Articles 62 et 63. énumérées (non respect des articles 54,
conservatoire contre
versement d’une caution. 55 et 59 à 61 de l’AUPSRVE).
Abrogation des articles 112 à 115.
131

TEXTE CONGOLAIS OBJET DISPOSITIONS OBSERVATIONS


CORRESPONDANTE
Code de la navigation
S DE L’AUPSRVE
maritime

Identité d’objet et contraires.


Abrogation des articles 116 et 117.
Saisie conservatoire -
Articles 116 et 117 Jugement de validation de Article 61.
la saisie. NB : Ces articles précisent toutefois que
l’action au fond visée par l'article 61de
l'AUPSRVE, doit être engagée devant le
Tribunal de Grande Instance.

Saisie conservatoire -
Articles 64 et 65 et 99 Identité d’objet et dispositions contraires.
Articles 118 et 119 Procès-verbal de saisie et
à 103. Abrogation des articles 118 et 119.
signification.

Saisie conservatoire -
Inscription des saisies au
Articles 120 à 126 Aucune disposition. Maintien des articles 120 à 126.
registre matricule des
hypothèques maritimes.

Saisie exécution (cette


procédure ressemble à la
saisie immobilière de
Saisie vente de Dispositions contraires.
l’AUPSRVE. Pourtant, le
Articles 127 à 142 meubles corporels -
Code de la Navigation Abrogation des articles 127 à 142.
Articles 91 à 145.
Maritime indique
expressément que les
Navires sont Meubles).
TEXTE CONGOLAIS OBJET DISPOSITIONS OBSERVATIONS
132
131

TABLE DES MATIERES

DEDICACE.................................................................................................................................i
REMERCIEMENTS...................................................................................................................ii
PRINCIPAUX SIGLES.............................................................................................................iv
INTRODUCTION......................................................................................................................1
I. Motivation...........................................................................................................................1
II. Problématique..................................................................................................................2
III. Objet et intérêt de l’étude.............................................................................................8
a. Intérêt intellectuel............................................................................................................8
b. Intérêt pratique.................................................................................................................8
IV. Hypothèse.....................................................................................................................9
V. Méthodes et techniques du travail....................................................................................9
a. Méthodes..........................................................................................................................9
b. Technique.......................................................................................................................10
CHAPITRE I. L’ORIGINALITE DE LA SAISIE DE NAVIRE.............................................11
Section I. L’ouverture de la saisie conservatoire des navires...................................................12
§1. L’originalité quant aux biens susceptibles d’ouverture de saisie des navires....................12
A. La détermination de l’assiette de la saisie des navires...................................................12
1. La détermination évidente de l’assiette de la saisie : le navire, seul bien susceptible de
saisie......................................................................................................................................13
2. La problématique de l’application des règles de la saisie des navires à la saisie des
accessoires du navire.............................................................................................................15
A. L’étendue des navires susceptibles d’être saisis................................................................19
1. Le navire auquel la créance se rapporte.............................................................................19
2. Les autres navires appartenant au propriétaire du navire auquel la créance se rapporte
22
§2. L’originalité quant à la créance susceptible d’ouverture de la saisie conservatoire des
navires...................................................................................................................................25
A. Les conditions relatives à la créance à garantir.............................................................25
1. L’allégation d’une créance maritime.............................................................................25
a. Définition de la créance maritime selon la doctrine......................................................26
b. Les créances maritimes au sens des conventions internationales sur la saisie
conservatoire des navires......................................................................................................26
 La convention de Bruxelles du 10 mai 1952.................................................................26
 La convention de Genève du 12 mars 1999...................................................................28
 Le CCMM......................................................................................................................31
132

c. Ordonnance-loi n°66-98 du 14 mars 1966–code de la navigation maritime................33


2. Le caractère exhaustif ou non des créances maritimes..................................................35
3. La portée de l’obligation d’allégation d’une créance maritime.....................................38
b. La problématique de l’exigence d’une créance maritime paraissant fondée dans son
principe..................................................................................................................................40
1. L’affirmation dans le CCMM........................................................................................40
2. L’absence de l’exigence d’une créance maritime paraissant fondée dans son principe
dans les conventions internationales.....................................................................................42
Section 2. L’originalité tirée de la mise en œuvre de la saisie conservatoire des navires........43
§1. L'originalité des personnes impliquées dans les opérations de saisie conservatoire des
navires.......................................................................................................................................44
A. L'intervention de l'autorité judiciaire compétente..........................................................44
1. L'identification de l'autorité judiciaire compétente........................................................44
2. Le mode de saisine.........................................................................................................45
B. L'intervention d'une véritable institution propre au droit maritime : l'autorité maritime
compétente................................................................................................................................47
1. L'identification de l'autorité maritime compétente............................................................47
2. L'opportunité ou non de l'intervention de l'autorité maritime compétente dans la saisie
conservatoire des navires......................................................................................................48
§2. L'originalité dans le déroulement de la saisie conservatoire des navires...........................50
A. Le déroulement normal de la saisie conservatoire des navires..........................................50
1. L'originalité de l'effet de la saisie conservatoire des navires : l'immobilisation du navire
saisi51
a. L'immobilisation du navire au port de saisie.................................................................52
b. Les effets nocifs de l’inactivité du navire au port victime.............................................53
c. La possibilité d'autorisation de départ du navire...........................................................54
d. La problématique de la garde du navire saisi.................................................................55
1. Les différentes diligences à observer.............................................................................56
2. Les incidents de la saisie conservatoire des navires..........................................................58
1. La mainlevée de la saisie...............................................................................................58
a. La mainlevée amiable....................................................................................................58
b. La mainlevée judiciaire..................................................................................................58
2. Les effets de la mainlevée..............................................................................................62
CHAPITRE II. L'ADAPTATION DES RÈGLES DE SAISIE DE DROIT COMMUN À LA
SAISIE DES NAVIRES...........................................................................................................64
Section 1. L'adaptation des règles de la saisie conservatoire des biens meubles corporels à la
saisie conservatoire des navires................................................................................................65
133

§1. L'adaptation quant aux conditions objectives de saisie du bien..........................................65


A. L'exigence d'une autorisation judiciaire.........................................................................65
1. La nécessité d'une autorisation judiciaire......................................................................65
2. Le recours contre la décision judiciaire de refus d'autorisation de saisie......................68
B. Les conditions relatives au bien, objet de la saisie........................................................68
2. Les exceptions : les insaisissabilités..................................................................................70
a. Le principe général « saisie sur saisie ne vaut »................................................................70
b. Les insaisissabilités en vertu de l'article 51 de l'AUPSRVE.........................................72
§2. L'adaptation quant aux conditions subjectives de saisie du bien........................................74
A. Quant au saisissant.........................................................................................................74
1. Le créancier originel......................................................................................................74
2. Les autres personnes pouvant saisir...............................................................................76
a. Les ayants causes du créancier originel.........................................................................76
b. Les représentants du créancier.......................................................................................77
B. Quant au saisi.................................................................................................................78
1. Les personnes susceptibles d'être saisies.......................................................................78
a. Le propriétaire du navire à l'origine de la créance.........................................................78
2. Les immunités d'exécution.............................................................................................79
Section 2. L'adaptation des règles de la saisie immobilière à la saisie-exécution des navires. 81
§1. L'adaptation quant aux conditions de saisie........................................................................82
A. Quant aux conditions objectives....................................................................................83
1. L'exigence d'un titre exécutoire.....................................................................................83
2. Les conditions liées aux navires saisissables.................................................................86
a. Le principe de la saisissabilité des navires....................................................................86
b. Les restrictions au principe de la saisissabilité des navires...........................................86
B. Quant aux conditions subjectives...................................................................................88
1. Les sujets actifs de la saisie...........................................................................................88
2. Les sujets passifs de la saisie.........................................................................................89
§2. L'ADAPTATION QUANT À LA PROCÉDURE DE SAISIE......................................91
A. La procédure normale de saisie......................................................................................91
1. Les étapes préalables à l'adjudication du navire............................................................91
a. L'établissement du commandement valant saisie..............................................................91
b. L'établissement du cahier de charges.............................................................................95
c. L'audience éventuelle.................................................................................................96
d. La publicité en vue de la vente......................................................................................97
134

2. L'adjudication du navire.................................................................................................98
a. Le moment de l'adjudication..........................................................................................98
b. Le déroulement de l'adjudication...................................................................................99
c. Les effets de l'adjudication..........................................................................................101
B. Les incidents de la saisie des navires...........................................................................102
a. Les incidents nés de la pluralité des saisies : les oppositions......................................102
b. Les demandes en distraction........................................................................................104
c. Les demandes en annulation........................................................................................104
d. la folle enchère.............................................................................................................106
2. Les règles communes à tous les incidents....................................................................108
CONCLUSION.......................................................................................................................110
BIBLIOGRAPHIE..................................................................................................................114
TABLE DES MATIERES......................................................................................................131

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