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© De Boeck Supérieur | Téléchargé le 13/04/2021 sur www.cairn.info via BIU Montpellier (IP: 194.57.207.215)
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Geneviève de Weck, Mireille Rodi
INTRODUCTION
L’objectif de ce chapitre est de présenter les principes méthodologiques
et quelques outils d’évaluation des capacités pragmatiques et discursives
des enfants, ainsi que leurs fondements. Précisons d’emblée que nous
nous limitons ici à la production langagière1.
Dans la première section de ce chapitre, une définition des principales
caractéristiques des perspectives pragmatique et discursive est propo-
sée, en les différenciant de la perspective structurale, encore actuellement
la plus répandue et préconisée aussi bien par les chercheurs que par les
cliniciens. Afin que l’importance de ces perspectives soit bien comprise,
nous les mettons en lien avec des théories de l’acquisition du langage et
avec les études sur les troubles pragmatiques et discursifs d’une part, et
nous rappelons brièvement les enjeux d’une évaluation logopédique-
orthophonique des capacités langagières d’autre part.
La seconde section est consacrée aux principes méthodologiques
sous-jacents à l’évaluation des interactions verbales. Nous discutons des
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L’évaluation du langage en situation naturelle : pragmatique et discours
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et en analysent l’influence sur les productions langagières des partici-
pants à l’interaction. L’adaptation et l’adéquation des productions au
contexte peuvent ainsi être étudiées. Par ailleurs, les dialogues et les
discours, résultats d’une construction collective et donc d’un réseau
d’influences mutuelles, constituent les unités d’analyse privilégiées.
Du point de vue des spécificités de ces approches, la pragmatique
analyse les caractéristiques générales des dialogues (tours de parole,
gestion des thèmes, actes de langage, paires adjacentes de type question
– réponse, etc.). La perspective discursive étudie les genres de discours
en vigueur dans la société et leur appropriation par les enfants ; les
discours peuvent être polygérés ou monogérés, les premiers étant co-
produits par au moins deux interlocuteurs ; la gestion des seconds est
assumée par le seul locuteur. Pour tous les genres, il s’agit d’analyser la
planification discursive et les unités linguistiques qui ont un fonctionne-
ment discursif.
La distinction que nous proposons entre pragmatique et discours n’est
pas retenue par tout le monde, dans la mesure où le terme de pragmatique
peut avoir des extensions variables, incluant parfois des aspects relevant
du discours, tels que la cohésion. Cette frontière mouvante se retrouve
dans les outils que nous présentons dans les sections 3 et 4. Ainsi, la
section 3 concerne des outils privilégiant la dimension pragmatique, et la
section 4 se focalise sur la notion de genre de discours. Des aspects d’une
perspective sont parfois inclus dans l’autre.
Ces deux perspectives s’opposent à la perspective structurale, sous-
jacente à la plupart des tests de langage et à l’analyse du langage
spontané. Cette approche interne se caractérise par une centration sur la
connaissance de la structure de la langue et ne prend pas en considération
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les détails (pour une synthèse en français, voir de Weck et Rosat, 2003),
on rappellera la possibilité que des enfants présentent des troubles
pragmatiques – concernant différents aspects de la gestion des conver-
sations – et/ou des troubles discursifs – relatifs à la planification et à
l’emploi d’unités linguistiques. Ces troubles ne peuvent être mis en
évidence par des tests structuraux et l’analyse du langage spontané,
même si ceux-ci analysent des unités linguistiques également retenues
dans les approches discursives (Dunn et al., 1996). En effet, d’une part
les critères restent essentiellement phrastiques, et d’autre part les tâches
diffèrent grandement : compléter et/ou répéter des phrases, par exemple,
n’impliquent pas les mêmes capacités langagières que la production
d’énoncés dans le cadre d’un genre de discours particulier.
Dans ces conditions, évaluer les capacités langagières des enfants,
dans le cadre d’une consultation logopédique-orthophonique, signifie
évaluer leurs capacités à participer à la co-production de différents genres
de discours. Il s’agit d’analyser la façon dont ils parviennent à gérer une
conversation, à s’adapter à leurs interlocuteurs, à choisir les modèles de
discours appropriés à la situation, à planifier les différentes séquences
discursives, à utiliser les unités linguistiques de façon appropriée, etc.
Cette évaluation vise ainsi à apprécier aussi bien les difficultés que les
ressources des enfants dans les différents domaines cités, ainsi que celles
de leur entourage.
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L’évaluation du langage en situation naturelle : pragmatique et discours
2 PRINCIPES MÉTHODOLOGIQUES
Plusieurs principes méthodologiques sous-tendent la démarche d’ana-
lyse des interactions verbales. Ils concernent trois aspects : les situations
d’interaction, le recueil et la transcription des données. Faute de place,
nous ne les détaillons pas, mais indiquons quelques éléments principaux
(voir de Weck, 2002).
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connaissance partagée du référent), ainsi que de la nature du référent
(événements fictifs, événements vécus, matériel à construire, jeu, etc.) et
de sa relation au contexte (présence vs absence notamment). Que ce soit
dans le cadre de recherches ou d’évaluations cliniques, il importe de
proposer plusieurs activités langagières afin de les comparer. En effet, les
locuteurs n’actualisant pas leurs capacités langagières de façon identique
dans toutes les situations, une évaluation différentielle de cette actualisa-
tion permet d’apprécier le degré de facilité vs difficulté des situations
proposées. Au-delà de l’évaluation, une telle comparaison permet de
préciser les situations les plus favorables ; elles peuvent alors constituer
une base pour l’élaboration de démarches thérapeutiques.
Deux situations d’interaction sont souvent utilisées par les cliniciens
et les chercheurs. Il s’agit d’une part de la communication référentielle
(McTear et Conti-Ramsden, 1992). Dans la mesure où la communication
non verbale y est supprimée en raison de l’écran séparant les interlocu-
teurs, cette situation est considérée par certains auteurs comme étant
performante dans la mise en évidence de troubles pragmatiques (Bishop
et Adams, 1991) ou lors des thérapies (Lamb et al., 1997).
D’autre part, avec les enfants d’âge pré-scolaire surtout, le jeu
symbolique constitue un outil intéressant pour l’évaluation des capacités
langagières (Rescorla et Goossens, 1982 ; Roth et Clark, 1987 ; de Weck,
1996, entre autres). Ce contexte d’interaction peut être envisagé comme
propice à l’exploration des ressources langagières de l’enfant sur le plan
représentatif et communicatif. Dans une situation de jeu symbolique,
l’activité langagière n’est pas perçue exclusivement comme la transmis-
sion d’un contenu informationnel, mais également comme un instrument
de construction d’une relation intersubjective. Les productions verbales
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sont transcrites. Cette transcription permet d’atteindre différents objectifs
concernant le diagnostic ou l’évolution de la thérapie. Elle permet de
« fixer » certains aspects de la production langagière d’un sujet, afin de
pouvoir effectuer des comparaisons ultérieures (Ménager et Abou Haidar,
2002). Le corpus ainsi obtenu est ensuite analysé selon des critères
définis préalablement. C’est l’objet des sections 3 et 4 de ce chapitre.
Sans entrer dans le détail des conventions3 précisons quelques
éléments concernant la transcription. Celle-ci concerne le dialogue dans
son ensemble, dans la mesure où il s’agit le plus souvent d’une production
polygérée de discours. Rares sont les moments où les enfants font preuve
de capacité de monogestion, ces moments-là étant aussi à prendre en
considération.
Considérer le dialogue dans son ensemble signifie en effectuer une
transcription intégrale. Une transcription partielle (les x premières minu-
tes ou tours de parole) ne permet pas une analyse des phénomènes
discursifs globaux, et oblige à se limiter à une analyse de la textualisation
locale. De plus, selon la nature du référent, des indications non verbales
sont également relevées, en fonction de leur pertinence par rapport à la
situation. Dans le jeu symbolique, par exemple, un enfant peut prendre
son tour de façon non verbale, sous forme d’une action et/ou d’un geste
pertinents par rapport au tour de parole précédent, ce qui permet à
l’interlocuteur de poursuivre l’interaction. De même, sont prises en
considération les interventions des deux partenaires. On notera toutefois
que, même si ce principe nous paraît fondamental, il n’est pas respecté
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L’évaluation du langage en situation naturelle : pragmatique et discours
dans tous les outils présentés par la suite ; il l’est surtout dans les
approches évoquées dans la quatrième section de ce chapitre.
Pourquoi est-il important de transcrire et d’analyser aussi les interven-
tions de l’interlocuteur de l’enfant ? D’une part, l’analyse conversationnelle
montre que les interventions de chaque participant sont fortement
dépendantes de celles de l’interlocuteur. En ce sens, se limiter à analyser
uniquement les productions de l’enfant peut mener à une évaluation
erronée. La seule prise en compte de ses réponses aux questions de
l’adulte en est un exemple classique. Il peut être considéré à tort comme
économe, alors que l’adulte lui pose essentiellement des questions
fermées.
D’autre part, la participation verbale de l’enfant et celle de l’adulte à
la co-construction discursive peuvent être appréhendées, aussi bien en
termes quantitatifs que qualitatifs (cf. section 4). À certains moments de
l’interaction, les interventions de l’adulte peuvent par ailleurs jouer un rôle
d’étayage verbal, dont on sait le rôle primordial dans l’acquisition des
capacités langagières (Bruner, 1983 et 1987). Son analyse permet de
déterminer les formes et les fonctions des stratégies utilisées par l’adulte
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(Rondal, 1983 ; Rosat, 1998 ; de Weck, 1998, 2000, notamment), et
d’apprécier les réactions de l’enfant. Cette double appréciation vise à
rendre compte de la zone proximale de développement de l’enfant
(Vygotski, 1936/1985) dans le but d’élaborer des priorités pour l’inter-
vention logopédique-orthophonique.
Enfin, la transcription des interventions de l’adulte permet d’estimer
l’effet de la variation de l’interlocuteur sur l’actualisation des capacités
langagières de l’enfant, si ce dernier interagit avec diverses personnes.
Une différence d’interlocuteur peut avoir des répercussions importantes
sur la quantité et la qualité des productions de l’enfant. Des travaux
commencent à montrer la pertinence de comparer des interactions mère
– enfant et logopédiste – enfant, de les analyser non seulement sur le plan
affectif-relationnel, mais également sur le plan des interactions verbales
(Moser et Rodi, 1997). En effet, dans l’idée d’observer un éventail élargi
de capacités langagières, nous pouvons supposer que la mère (souvent
interlocuteur privilégié de l’enfant) joue un rôle facilitateur dans l’actua-
lisation de ses capacités. Elle est susceptible de connaître certaines de ses
ressources et stratégies langagières, de pouvoir en faire l’inventaire et de
les mettre à profit. Ces aspects peuvent être fort instructifs dans le choix
de la mise en place d’une intervention sous forme de guidance par
exemple (Rodi et Seydoux, 2003).
Pour clore cette discussion méthodologique, notons que les outils
pragmatiques et discursifs ne peuvent présenter les mêmes caractéristi-
ques que les tests structuraux4 Sans entrer dans les détails, signalons
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3 ÉVALUATION DES CAPACITÉS PRAGMATIQUES
Une approche pragmatique de l’évaluation des capacités langagières
implique l’établissement de liens entre la forme d’un énoncé et un
contexte de communication. Dans ce sens, trois questions peuvent
orienter l’observation clinique : le but des productions langagières de
l’enfant (French, 1989), leur contenu (cohérence des topics) et la
manière de s’exprimer. Des auteurs ont ainsi porté leur attention sur l’une
ou l’autre de ces questions par des moyens de formalisation différents
(tests, inventaires, etc.).
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Plus récemment, des propositions plus satisfaisantes s’inscrivant
dans une approche interactioniste ont vu le jour. Elles concernent des
enfants de différents âges. Nous en décrivons deux5.
L’Échelle d’Évaluation de la Communication Sociale Précoce (ECSP,
Guidetti et Tourette, 1992 et 1993) permet d’évaluer plusieurs dimen-
sions du développement social et communicatif au sein d’une relation
adulte – enfant. Ce test vise l’identification des compétences interaction-
nelles d’enfants de 3 à 30 mois, en se basant sur l’hypothèse d’une
continuité fonctionnelle entre le développement prélinguistique et linguis-
tique (Bruner, 1983 et 1987). Il met en évidence des comportements
(échanges d’objets, attention conjointe ou pointage), certains étant
organisés en routines voire formats. Les vocalises et les premières
productions verbales sont également observées. Trois fonctions interac-
tives sont analysées :
– l’interaction sociale : agir pour attirer l’attention et établir une interac-
tion ludique ;
– l’attention conjointe : l’objet et/ou l’action sont le centre d’intérêt
principal des deux partenaires ;
– la régulation du comportement : agir sur l’autre pour atteindre un but.
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3.2 Les grilles et les inventaires pragmatiques
Les grilles et autres inventaires déterminent une liste de critères spécifi-
ques. Leur absence ou certains de leurs aspects déviants affectent
l’efficacité des actes illocutoires ou leur adéquation par rapport à certai-
nes attentes (Hilton, 1990). Ce domaine de recherche étant encore
récent, ces outils n’ont pas la prétention d’être exhaustifs. Ils contribuent
toutefois à l’établissement d’une taxonomie descriptive permettant l’éta-
blissement de profils de communication, en vue d’un diagnostic. Ils
présentent un degré variable de formalisation, concernent différents
aspects pragmatiques ou se focalisent sur un domaine particulier.
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L’observation est menée dans le cadre d’une conversation entre un enfant
(ou un adulte) avec troubles du langage et un partenaire familier. Chaque
paramètre est défini comme « approprié » ou « inapproprié » (tout paramè-
tre n’ayant pu être observé est ainsi signalé). L’intérêt et la pertinence de
ce protocole résident dans la mise en évidence des habiletés et des
manques sur le plan pragmatique dans une perspective thérapeutique. Il
permet de distinguer divers patterns de troubles pragmatiques. La gravité
des déficits observés ne peut cependant être appréciée, ceci nécessitant
une observation plus approfondie.
La Children Communication Checklist (CCC) de Bishop (1998) inclut
l’évaluation du fonctionnement sémantique et pragmatique. Elle permet
d’investiguer les difficultés de communication et d’obtenir des informa-
tions qualitatives sur leur spécificité chez certains enfants avec troubles
du développement du langage. Les critères sont répartis en neuf catégo-
ries (Nathan, 2002).
– l’intelligibilité et la fluence ;
– la syntaxe : longueur des énoncés, erreurs grammaticales ;
– les initiations inappropriées : capacité de s’exprimer adéquatement
en fonction du partenaire et de la situation d’interlocution ;
– la cohérence : informations appropriées, capacité de parler du futur
ou du passé ;
– les aspects stéréotypés de la conversation : formes redondantes
d’énoncés ou de thèmes de conversation ;
– l’utilisation du contexte conversationnel : compréhension des règles
de conversation, adéquation sociale, modifications linguistiques en
fonction de celles de l’interlocuteur ;
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– les réponses à une initiation : changement radical de topic, réponse
inattendue mais en lien, réponse trop spécifique ou trop générale,
manque de sélection des informations, séquences parallèles ;
– problèmes dans la gestion de séquences d’interaction plus longues :
intervention inadéquate de l’enfant au cours d’un tour de parole de
l’adulte, non-compréhension des implications d’une intervention de
l’interlocuteur ;
– les inadéquations de sens : confusions lexicales, confusions dans
l’emploi de pronoms ou de prépositions, contradictions.
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les comportements non verbaux et verbaux de l’enfant (de 9 à 36 mois)
sont enregistrés, afin d’en déterminer la fonction. Deux fonctions sont
analysées : la demande (d’action, d’information et d’attention) et la
déclaration, sous forme de descriptions d’objets au présent, ou de récit au
passé ou au futur, les descriptions pouvant concerner des objets externes
ou propres au sujet.
Quant à la gestion des topic, elle dépend de la contribution conjointe
des sujets en interaction et repose sur des connaissances à la fois
cognitives et langagières. Elle requiert des capacités relatives :
– à l’introduction du topic, qui permet l’initiation ou le changement de
thème6 ;
– au maintien de ce topic, impliquant la capacité de structurer et
d’organiser des informations liées au thème.
L’évaluation (Mentis, 1994) va porter sur ces deux aspects qui impliquent
l’utilisation d’unités linguistiques particulières. L’observation de l’intro-
duction des topics comprend trois critères : le nombre et le type (repris ou
nouveau) de thèmes introduits, ainsi que la manière de les introduire.
Concernant le maintien d’un topic, chaque apport d’informations des
divers interlocuteurs y contribue. Différents paramètres sont retenus : la
cohérence, locale et globale, la contribution aux informations nouvelles,
le maintien du thème sans apport d’information nouvelle, les séquences
parallèles, et les productions problématiques. Selon les troubles observés
au niveau de l’introduction ou du maintien, divers profils de gestion du
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le clinicien peut proposer aux parents un entretien dirigé investiguant les
capacités de communication verbale et non verbale de l’enfant, notam-
ment autiste (Cuny et Gasser, 2000). La récolte des données est réalisée
au moyen d’une grille à double entrée. Cette grille est définie d’une part
par la situation particulière de communication (demande d’entrée en
interaction, demande d’action, d’objet, situation de protestation, com-
mentaires ou déclarations), et d’autre part par la manière d’y répondre
(agressive, passive, par le regard, l’action, la vocalisation, etc.). Cette
procédure permet de répertorier divers modes de communication de
l’enfant, en particulier sur le plan de la demande. L’entretien est suivi
d’une évaluation complémentaire par le thérapeute des capacités récep-
tives et expressives de l’enfant.
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– les significations interpersonnelles : l’orientation que prend la cons-
truction conjointe de l’interaction. Trois domaines sont analysés : les
marqueurs de politesse (modalisations de tout type), les structures
d’échanges (demandes et apports d’informations), les genres (narra-
tif, descriptif, expositif) ;
– les significations textuelles : les liens entre les mots sélectionnés et le
contexte d’une part et le co-texte d’autre part.
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l’âge et la longueur moyenne des énoncés. Botting (2002) tente d’évaluer
les capacités de narration d’enfants avec troubles linguistiques ou prag-
matiques au moyen de cette épreuve et d’une activité de production de
récit à partir d’un autre livre d’images sans texte (Frog story). Les critères
pris en compte dans cette évaluation permettent d’observer des aspects
quantitatifs (nombres de mots et de propositions9), certaines caractéris-
tiques narratives (termes référant aux théories de l’esprit, marques de
négation, de causalité, de modalisation et discours direct) et des aspects
de planification (schéma en cinq phases : ouverture, présentation des
personnages et/ou de la situation, mention explicite du thème, résolution
et clôture ; Tager-Flusberg, 1995, cité par Botting, 2002).
Avec le Narrative Assessment Profile (Bliss, McCabe et Miranda,1998),
prévu pour des enfants scolarisés, six aspects de la production d’une
narration peuvent être évalués.
– le maintien du topic se réfère aux interventions en lien avec le thème
principal par des procédés comme l’expansion, la continuité ou la
contradiction ;
– les séquences d’événements (présentation dans un ordre chronologi-
que) ;
– l’explicitation qui implique l’informativité (quantité d’informations
suffisantes), l’élaboration (détails nécessaires à la cohérence du
texte), les composants du schéma narratif (descriptions, actions,
évaluations) ;
9. Une proposition est définie comme contenant au moins un nom et un verbe (Botting,
2002).
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gage, dans le sens où il exerce un contrôle sur l’organisation du discours
et les unités de surface du texte. Ils décrivent les variables pertinentes de
la situation dans laquelle se déroule l’action langagière, définissant ainsi
l’espace référentiel et différents paramètres physiques et sociaux concer-
nant les partenaires de l’interaction, leurs buts et le cadre spatio-temporel.
Ce modèle met en évidence l’impact de la situation sur les décisions que
les interlocuteurs doivent prendre quant au choix d’un modèle de dis-
cours, et par conséquent sur les capacités langagières actualisées. Il
donne un éclairage sur les capacités langagières de l’enfant, tenant
compte de ses partenaires dans l’interaction. En faisant varier le référent,
les interlocuteurs, leur rôle et le but d’une activité langagière, certaines
études (de Weck et al., 1995 ; de Weck, 1996 ; pour une synthèse, voir de
Weck et Rosat, 2003) soulignent la possibilité de modifier le type de texte
produit et sa planification. Ces aspects mettent en évidence la sensibilité
de l’enfant aux paramètres contextuels et sa capacité à s’y adapter. Trois
principaux niveaux d’analyse sont distingués :
– la gestion générale du discours : la participation verbale de chaque
locuteur (pourcentage de mots produits, tours de parole vs régula-
teurs) permet de définir le degré de polygestion vs de monogestion du
discours ;
– la planification du discours : tout dialogue comprend trois phases
(l’ouverture, la transaction et la clôture ; Adam, 1992), la phase
transactionnelle se caractérisant par la planification spécifique du
genre de discours co-produit. Quant au discours monogéré, il se
caractérise par une ou plusieurs séquences discursives. Dans les deux
cas, il peut s’agir d’une séquence narrative, descriptive, injonctive,
explicative, etc. ;
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interprétées en termes d’étayage verbal (Bruner, 1983) ; il s’agit d’ana-
lyser les stratégies d’étayage (questions, reformulations, répétitions,
voire formulations) utilisées par l’adulte, ainsi que leurs fonctions (de
Weck, 1998 et 2000 ; Rosat, 1998 ; Rosat et von Ins, 1997) articulées aux
différents niveaux de l’interaction.
CONCLUSION
Ce chapitre avait pour objectif de présenter les principes méthodologi-
ques et quelques outils d’analyse des capacités pragmatiques et discur-
sives chez l’enfant. Nous avons distingué les outils permettant une
analyse de la pragmatique de ceux concernant le discours, les premiers
étant actuellement plus nombreux que les seconds. Ce constat reflète
l’état de la recherche tant en linguistique, qu’en psychologie, en psycho-
linguistique ou en orthophonie-logopédie. Pour terminer, nous souhai-
tons d’une part résumer ce qui différencie ces approches de l’analyse du
langage spontané, et d’autre part montrer la complémentarité des appro-
ches pragmatiques et discursives dans le cadre d’une évaluation
logopédique des capacités langagières.
En ce qui concerne les différences entre les modes d’analyse propo-
sés et ceux préconisés pour le langage spontané, nous retiendrons cinq
principaux domaines de comparaison :
– les paramètres contextuels sont différenciés, et leur influence prise en
compte pour la pragmatique et le discours uniquement ;
– la nature des productions : les genres de discours sont distingués dans
la perspective discursive ; la conversation est requise en pragmati-
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complémentarité des perspectives pragmatique et discursive qui rendent
compte de façon pertinente des capacités langagières des locuteurs,
conformément à une vision interactioniste du développement du langage
et de ses troubles. Ainsi, dans le cadre des consultations – évaluations
logopédiques, il paraît important de privilégier ces deux approches en les
intégrant (de Weck, 2003), ce qui signifie notamment prendre en consi-
dération les influences du contexte sur l’organisation de l’interaction et de
la production discursive. Pour cela, il s’agit de proposer différentes
situations de communication en faisant varier les paramètres contextuels,
dont l’interlocuteur, et de définir les genres de discours sollicités par ces
situations. L’observation consiste à évaluer l’interprétation qui en est
faite. Autrement dit, les interlocuteurs co-produisent-ils les genres de
discours attendus ? Comment gèrent-ils la planification et la textualisation
du discours ? Comment s’adaptent-ils mutuellement à l’autre ? Par ailleurs,
en s’inspirant de l’analyse conversationnelle, l’observation des interven-
tions des différents partenaires vise à mettre en évidence la dynamique
des interactions verbales. Ainsi, la consultation-évaluation en logopédie-
orthophonie doit permettre à l’enfant de recréer ses propres repères, en
fonction de ses connaissances, pour mettre en œuvre des moyens de
communication les plus efficaces possibles. Elle doit aussi chercher à
déterminer les ressources et les difficultés de l’enfant, ainsi que celles de
son entourage, en utilisant des critères relevant des approches pragma-
tiques et discursives. À terme, l’objectif est aussi de mieux cerner les
troubles pragmatiques et discursifs, ainsi que leurs liens de dépendance
ou d’indépendance.
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