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Indications, techniques et résultats


du traitement par ultrasons focalisés
du cancer localisé de la prostate
A. Gelet, S. Crouzet, O. Rouvière, J.-Y. Chapelon

Le traitement par ultrasons focalisés de haute intensité (HIFU) est un traitement mini-invasif du cancer
localisé de la prostate adapté aux patients qui ne sont pas candidats à la chirurgie radicale du fait de
l’agressivité faible ou modérée de la tumeur, de leur espérance de vie et/ou de comorbidités associées. Il
peut être réalisé chez les patients dysuriques (résection transurétrale associée) et chez les patients ayant
déjà subi une adénomectomie. Le traitement par HIFU peut être renouvelé plusieurs mois ou plusieurs
années après la première session si un foyer cancéreux résiduel est identifié par les biopsies de contrôle. En
cas d’échec, le recours à d’autres modalités thérapeutiques est possible (radiothérapie externe, chirurgie
radicale, cryothérapie). Par ailleurs, le traitement HIFU peut être utilisé comme traitement de rattra-
page chez les patients porteurs d’une récidive locale après radiothérapie externe. La mise au point d’un
appareillage de nouvelle génération (Focal One® ) permet de moduler avec précision le traitement en
fonction de l’extension du cancer dans la glande, que ce soit en première intention ou en cas de récidive
après radiothérapie : traitement total en cas de cancer bilatéral, traitement d’un seul lobe prostatique
(hémi-ablation) en cas de tumeur unilatérale, traitement focal (limité à la zone tumorale) guidé par un
système de fusion élastique entre les images obtenues par résonance magnétique (IRM) et les images
de l’échographie peropératoire pour les tumeurs dont les contours peuvent être définis sur les images
d’IRM multiparamétriques. Un système intégré d’imagerie ultrasonore de contraste permet en fin de trai-
tement de visualiser la zone de nécrose, et donc, si nécessaire, d’effectuer une complétion de traitement
immédiate.
© 2016 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Mots-clés : Cancer de prostate ; Thérapie par ultrasons ; HIFU ; Thérapie focale

Plan  Introduction
■ Introduction 1 Cancer localisé de la prostate : place
Cancer localisé de la prostate : place du traitement par ultrasons du traitement par ultrasons focalisés
focalisés de haute intensité 1

de haute intensité
Principe 2
■ Appareillage 2
Le traitement par ultrasons focalisés de haute intensité (HIFU)
est un traitement peu invasif destiné aux patients porteurs de can-
■ Techniques 5 cer localisé et qui ne sont pas candidats à la chirurgie du fait de
Traitement total en première intention 5 l’agressivité faible ou modérée de la tumeur ou bien à cause de
Retraitement par ultrasons focalisés de haute intensité 9 leur âge ou de comorbidités associées.
Traitement partiel en première intention 9 D’autre part, la récidive locale des cancers prostatiques ini-
Patient en récidive après radiothérapie 9 tialement traités par radiothérapie externe est fréquente [1] . Les
■ Soins postopératoires 10 traitements de rattrapage par chirurgie radicale ou par cryothéra-
■ Suivi carcinologique 10 pie sont grevés d’une importante morbidité. Le traitement par
HIFU est une alternative mini-invasive à but curatif pour les
■ Résultats 10
patients qui présentent une récidive locale après radiothérapie
Résultats des patients traités en première intention : traitement
sans métastase identifiée.
de toute la glande 10
Le traitement HIFU peut être modulé en fonction de l’extension
Complications postopératoires précoces et tardives 10
du cancer dans la glande prostatique. Les traitements focaux par
Résultats des patients traités en première intention : traitements
HIFU sont, pour des patients bien sélectionnés (biopsies guidées
limités à une partie des glandes 10
grâce à l’imagerie par résonance magnétique [IRM]), une alterna-
Résultats des patients traités en rattrapage pour récidive locale
tive face à la surveillance active et aux divers traitements radicaux
après radiothérapie externe 11
avec pour objectif l’obtention d’un contrôle local durable de la
■ Conclusion 11 maladie cancéreuse, sans les effets secondaires associés aux trai-
tements radicaux standard. Le principe est de détruire le ou les

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Volume 9 > n◦ 3 > juillet 2016
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http://dx.doi.org/10.1016/S1283-0879(16)68244-6
usage personnel seulement. Aucune autre utilisation n´est autorisée. Copyright ©2022. Elsevier Inc. Tous droits réservés.
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foyers cancéreux présents dans la glande tout en préservant un L’appareil Focal One® a été spécifiquement conçu pour permettre
maximum de tissu prostatique normal (au minimum 40 %) et le traitement focal du cancer de la prostate : cet appareil permet à
les structures sensibles périprostatiques (vessie, rectum, sphinc- l’opérateur de visualiser la cible tumorale (grâce à une fusion entre
ter strié et bandelettes vasculonerveuses). La multifocalité est les images IRM et les images obtenues par l’échographie temps réel
la règle dans le cancer de prostate mais l’étude des pièces de peropératoire), puis de détruire la cible de façon précise (grâce à
prostatectomie [2] a montré qu’environ 20 % des cancers locali- un transducteur phase array dont la focale varie électroniquement)
sés n’envahissaient qu’un seul lobe de la prostate et étaient donc et enfin de contrôler la nécrose de la cible par une échographie de
accessibles à un traitement ciblé préservant la moitié de la glande. contraste peropératoire (injection de microbulles), ce qui permet
D’autre part, la théorie de la tumeur index [3] permet d’envisager une complétion du traitement si la nécrose obtenue ne couvre pas
un traitement focal limité à la tumeur principale qui conditionne- suffisamment la zone cible. Cet appareil permet de traiter de façon
rait le pronostic de la maladie cancéreuse [4] , les tumeurs satellites focale les cancers localisés soit en traitant la totalité du lobe patho-
de petites tailles (< 3 mm) et de faible agressivité (Gleason < 7) logique (stratégie d’hémiablation), soit en ciblant uniquement la
étant laissées en place. L’IRM multiparamétrique qui oriente les tumeur grâce aux images de fusion IRM/échographie.
biopsies permet d’identifier les patients candidats à un traite-
ment focal [5] . Dans plus de 90 % des cas, la tumeur principale
(tumeur index) est identifiable [6] par l’association de l’IRM et des  Principe
biopsies guidées. Actuellement, on estime que 20 % des cancers
localisés pourraient être traités de façon focale soit en traitant la Le transducteur de thérapie est placé dans le rectum. Il est inclus
totalité du lobe pathologique (stratégie d’hémiablation), soit en dans un ballon contenant un liquide anticavitation réfrigéré. Le
ciblant uniquement la tumeur en utilisant des images de fusion transducteur de thérapie est couplé à une sonde échographique
élastique IRM/échographie. qui permet le repérage tridimensionnel de la glande prostatique.
La mise au point du traitement HIFU du cancer de la prostate Le transducteur de thérapie est un élément piézocomposite qui
a nécessité de nombreuses études sur l’animal et de nombreux émet des ultrasons convergents à haute intensité par salve d’une
essais cliniques. En 1992, Chapelon et al. [7] établissent les para- durée de 1 seconde. La destruction tissulaire dans la zone cible est
mètres acoustiques permettant d’obtenir des lésions irréversibles provoquée par la combinaison de trois phénomènes : nécrose de
dans les tissus vivants. Puis, une expérimentation réalisée sur coagulation, cavitation et accumulation thermique.
l’adénocarcinome prostatique expérimental Dunning a permis de Ces trois phénomènes ont été modélisés par les chercheurs de
démontrer que les ultrasons focalisés pouvaient détruire les tissus l’unité Inserm 1032 [15] , ce qui permet de prédire par le calcul
cancéreux et guérir la maladie cancéreuse sans induire de méta- l’influence in vivo des modifications de paramètres acoustiques
stases à distance [8] . Une étude réalisée sur la prostate de chien [9] de traitement.
a démontré qu’il était possible de créer des lésions irréversibles de
nécrose de coagulation dans la prostate, par voie transrectale, sans
induire de lésion rectale. Un premier appareil (Ablatherm® Maxis)  Appareillage
a été finalisé (marquage CE) en avril 2000. Un appareil de seconde
génération (Ablatherm® Imagerie Intégrée) a été commercialisé en L’Ablatherm® Focal One® est un dispositif médical contrôlé
mai 2005. Les résultats à moyen terme (huit ans) des patients trai- par ordinateur (Fig. 1) dans lequel se trouvent tous les disposi-
tés en première intention sont maintenant disponibles à travers tifs nécessaires au fonctionnement de l’appareil : générateur et
les publications des trois centres européens principaux de Lyon, amplificateur des impulsions ultrasonores pilotées par ordinateur,
Munich et Regensburg [10–12] ainsi que les résultats à moyen terme système de réfrigération pour le liquide de refroidissement, sys-
du traitement par ultrasons utilisé en rattrapage chez les patients tème de déplacement motorisé de la tête de tir en XYZ. La sonde
présentant une récidive locale après radiothérapie [13, 14] . endorectale est démontable pour permettre sa décontamination et
Un appareil de troisième génération (Focal One® ) a reçu le sa stérilisation entre deux traitements. Elle est composée de deux
marquage CE en 2013 et a été homologué au Canada en 2015. parties (Fig. 2A) :

A B
Figure 1. Appareillage et positionnement du patient.
A. Appareillage Focal One® .
B. Position du patient.

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5
R67
R60

R45
R32

A B
Figure 2. Sonde endorectale à focalisation dynamique.
A. Le transducteur d’imagerie est incrusté au centre du transducteur de thérapie.
B. Le transducteur de thérapie phase array piézocomposite permet de faire varier électroniquement la position du point focal le long de l’axe de propagation
des ultrasons.

Diametre
1.7 mm

1 2

A B
Figure 3. Principe de la focalisation dynamique. 1. Point focal ; 2. bulles de
cavitation (A à C).

• le transducteur de thérapie phase array piézocomposite (Fig. 2B) sans délai des focales : le transducteur fonctionne en continu
a été découpé en plusieurs éléments. Les 16 anneaux concen- avec un tir à chaque seconde ;
triques ont une surface identique et la focale naturelle est de • une sonde d’échographie B&K® monoplan fonctionnant à
60 mm ; ils sont alimentés indépendamment par le générateur, 7,5 MHz. La sonde d’échographie est incrustée en position
ce qui permet de retarder l’émission de chaque élément. Le transversale au centre du transducteur de thérapie (Fig. 2A, B).
déphasage des signaux d’excitation de chaque élément de la L’échographe B&K® UltraView incorpore un module permet-
découpe fait varier électroniquement la position du point focal tant de réaliser une imagerie de contraste.
le long de l’axe de propagation des ultrasons par application Ces deux éléments, transducteur de thérapie et sonde
des lois de phases (Fig. 3). On obtient huit focales de 32 mm à d’imagerie, sont placés dans un ballon de latex rempli par un
67 mm (f = 5 mm). Le système réalise un ajustement de la puis- liquide spécial anticavitation (Ablasonic® ) réfrigéré. Le remplis-
sance pour chacune des focales et permet un enchaînement sage de ce ballon est automatisé. Il faut soigneusement éviter

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Figure 4. Échographie : l’acquisition de tout le


volume de la glande sous forme de coupes axiales
successives permet au logiciel de la machine de
reconstituer des images sagittales (A, B).

A B

la présence de bulles d’air dans le ballon et dans le système de


refroidissement qui lui est raccordé. Le liquide de couplage anti-
cavitation est fourni dans un kit à usage unique (Focalpack® ) qui
comporte, outre les tubulures, un échangeur thermique qui est
placé dans une fente située dans la partie centrale de l’appareil.
Le refroidissement du liquide est assuré par un système utili-
sant l’effet Pelletier. Pendant le fonctionnement de l’appareil, une
pompe fait circuler le liquide Ablasonic® réfrigéré à volume cons-
tant dans le ballon et la température du liquide de couplage est
maintenue aux environs de 12 ◦ C. Ce système protège le transduc-
teur de thérapie de tout échauffement et maintient la température
de la muqueuse rectale à moins de 20 ◦ C quelle que soit la durée
de la session de traitement. Par ailleurs, un dispositif infrarouge
monté sur un flexible contrôle l’immobilité du malade grâce à un
miroir réfléchissant fixé sur la hanche du patient.
La planification du traitement peut être réalisée en utilisant uni-
quement les images échographiques qui sont acquises grâce un
déplacement motorisé de la sonde endorectale de l’apex jusqu’à
la base prostatique. L’acquisition de tout le volume de la glande
sous forme de coupes axiales successives permet au logiciel de la
machine de reconstituer des images sagittales (Fig. 4).
L’opérateur peut alors planifier les limites supérieures et infé-
rieures de la zone à traiter puis il définit sur les coupes transversales
les limites de la zone à traiter, ce qui lui permet de programmer un
traitement total (toute la glande) ou le traitement d’un seul lobe
ou bien un traitement focal limité à la zone tumorale.
La planification des traitements focaux fait appel à l’intégration
d’images IRM au format Dicom. La tumeur est identifiée grâce
à l’IRM multiparamétrique associée à des biopsies transrectales
randomisées (12 prélèvements) et à des biopsies ciblées (deux pré-
lèvements par cible IRM). Les contours de la prostate sont dessinés Figure 5. À l’aide du logiciel X-View, les contours de la glande prosta-
sur les coupes axiales T2 en utilisant un logiciel dédié X-View. tique et les contours de la tumeur cible sont dessinés à partir des images
Puis les contours de la tumeur index sont dessinés sur les coupes de l’imagerie par résonance magnétique multiparamétrique (la tumeur
axiales T2 en tenant compte des plus grandes dimensions de la apparaît incrustée en jaune dans la glande colorée en bleu).
lésion pour chaque modalité de l’IRM (T2, diffusion, images en
B2000 et images dynamiques après injection de gadolinium). Ces
images au format Dicom (Fig. 5) sont importées dans le logiciel de transférée sur les images axiales échographiques temps réel qui
fusion de la machine. L’opérateur réalise alors un contourage des sont utilisées pour la planification des tirs (Fig. 7). L’opérateur
images échographiques axiales acquises grâce à un déplacement peut donc, coupe par coupe, définir les contours de la zone à trai-
motorisé de la sonde endorectale de l’apex jusqu’à la base prosta- ter en ménageant une marge de sécurité autour l’image tumorale
tique. La machine peut afficher une Image 3D du volume IRM et projetée sur l’image échographique de planification.
une Image 3D du volume échographique. Ces deux volumes sont En fin de traitement, quelle que soit la modalité de traite-
alors fusionnés en un seul grâce au calculateur de l’appareil qui ment choisie (totale ou focale), le logiciel d’imagerie de contraste
réalise une fusion élastique des volumes IRM et échographique. peut être activé pour visualiser la zone de nécrose : après injec-
Dans cette image de fusion, les contours de la tumeur « cible » tion intraveineuse d’une dose de SonoVue® , l’opérateur réalise
sont transférés en prenant en compte la déformation élastique du une acquisition du volume échographique 3D et il peut compa-
volume IRM (Fig. 6). L’image de contours de la tumeur est alors rer l’image de l’échographie de contraste avec l’image standard

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Figure 6. Image de fusion imagerie par résonance magné-


tique/échographie (tumeur de la partie moyenne et de la base
droite).

Figure 7. Traitement focal guidé par image de fusion imagerie par réso-
en mode B. Les zones nécrosées (Fig. 8) apparaissent en noir
nance magnétique/échographie avec report des contours de la tumeur
(aucune microcirculation sanguine) contrastant avec les zones
sur les images axiales échographiques temps réel : l’opérateur définit les
encore vascularisées qui apparaissent en gris (persistance d’une
contours de la zone à traiter en ménageant une marge de sécurité d’au
vascularisation). S’il existe des zones non nécrosées qui doivent
moins 9 mm autour de l’image tumorale projetée sur l’image échogra-
être re-traitées, il est possible de les localiser avec précision puis
phique.
de programmer un traitement HIFU additionnel en respectant un
délai de 30 minutes par rapport à l’injection de SonoVue® pour
que toutes les microbulles soient dissoutes dans la circulation
relais par une héparine de bas poids moléculaire commencée
sanguine. Il a été en effet démontré [16] que les zones prenant le
une semaine avant le traitement et prolongée trois semaines après
contraste ultrasonore correspondent à du tissu encore vascularisé,
le traitement. Tous les patients sont prémédiqués quel que soit le
ou insuffisamment nécrosé par le traitement HIFU. Ce système
type d’anesthésie (locorégionale par rachianesthésie ou générale)
permet un véritable contrôle qualité du traitement alors que le
afin de limiter au maximum le risque de mouvement pendant le
patient est encore en position de traitement et sous anesthésie, ce
traitement.
qui autorise la réalisation immédiate de tirs additionnels dirigés
sur les zones incomplètement nécrosées (complétion de traite-
ment). La réalisation d’un examen IRM dans le mois qui suit le Endoscopie – Installation du patient
traitement est utile : la zone nécrosée est bien visible (Fig. 9). Cet
Le geste commence par la réalisation d’une endoscopie. Si le
examen contrôle également l’intégrité de la paroi rectale, ce qui est
patient n’a pas subi de résection endo-urétrale, une résection est
utile chez les patients « à risque », en particulier pour les patients
réalisée selon la technique standard. Il faut la pratiquer rapide-
traités par HIFU après radiothérapie.
ment en 15 à 30 minutes maximum, en évitant toute perforation
Les principales indications du traitement des cancers localisés
capsulaire et en effectuant une excellente hémostase. Si le patient
de la prostate par HIFU sont en première intention le traitement
a déjà subi une résection endo-urétrale au préalable, le but de
total ou subtotal de la glande chez les patients de plus de 70 ans et
l’endoscopie est de vérifier l’absence de sténose urétrale, de tissu
en situation de rattrapage, le traitement total ou focal des récidives
adénomateux résiduel et/ou de sclérose du col. En cas d’anomalie
locales après radiothérapie externe ou curiethérapie.
identifiée, un geste adéquat est réalisé (urétrotomie interne, résec-
tion complémentaire, incision du col vésical). Une sonde double
courant avec lavage continu est placée en fin de résection. Puis le
 Techniques patient est positionné sur la table d’opération en décubitus latéral
droit, jambes repliées en « chien de fusil » (Fig. 1B). Le positionne-
Traitement total en première intention ment du patient doit être contrôlé par l’opérateur. Il faut veiller
à ce que l’anus du patient soit placé en regard de la tête de tir,
Prise en charge préopératoire elle-même placée en position centrale. Il faut contrôler le posi-
Le patient est hospitalisé la veille du traitement et il reçoit une tionnement des coussins de protection qui protègent les chevilles
préparation colique associant la prise per os de 1 l de solution et les genoux. On doit rechercher la position du membre supérieur
hyperosmolaire dans l’après-midi et un lavement de 1,5 l de sérum qui évite toute douleur par compression au niveau de l’épaule
salé le soir. Les patients sous anticoagulant ou antiagrégant sont droite. L’utilisation d’un coussin spécial protégeant l’épaule est
gérés comme les patients candidats à une résection endo-urétrale recommandée, en particulier si le traitement est réalisé sous rachi-
de la prostate : arrêt du traitement une semaine avant le geste, anesthésie.

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Figure 8. Échographie
de contraste après traite-
ment (A à C) par ultrasons
focalisés de haute intensité
total : la dévascularisation
de la zone traitée apparaît
en noir (absence totale
de prise de contraste)
sur l’image en échogra-
phie de contraste (A)
alors qu’aucune modi-
fication n’est visible en
échographie B (B).

C
JPEG
***bpm
B

Technique
L’opérateur, après avoir dilaté digitalement l’anus par
l’introduction de deux doigts et après avoir vérifié la vacuité de
l’ampoule rectale, introduit la tête de tir et gonfle le ballon avec
100 à 150 ml de liquide Ablasonic® . Le geste de dilatation anale
ne pose pas de problème, sauf parfois chez les patients présentant
une sténose anale après chirurgie pour hémorroïdes ou fistule
anale.
L’opérateur saisit les identifiants du patient, le code du
Focalpack® et les paramètres de traitement. Les paramètres de
traitement en première intention (100 % de la puissance) sont des-
tinés aux patients qui n’ont pas reçu au préalable de traitement
HIFU ou de traitement par radiations ionisantes. La première étape
consiste à positionner la tête de tir en regard du lobe à traiter en
premier. L’opérateur vérifie, en déplaçant la sonde manuellement
dans l’axe du patient, que la tête de tir peut se déplacer de l’apex
jusqu’à la base prostatique. Il faut s’assurer que la ligne pointillée
orange puisse être positionnée au niveau de la muqueuse rectale
de l’apex à la base. En déplaçant la sonde en hauteur, en rotation et
en angulation (jusqu’à 10◦ ), il est possible de prépositionner la tête
de tir de manière à ce que le traitement puisse être réalisé sur toute
la hauteur du lobe en incluant, de façon satisfaisante, le bord droit
(traitement du lobe droit) ou le bord gauche (traitement du lobe
gauche) de la prostate. Puis l’opérateur place la tête de tir au niveau
du col vésical facilement identifié grâce au ballon de la sonde
de Foley et grâce à la visualisation des vésicules séminales (bien
visibles en arrière du col vésical). L’opérateur fait alors se mouvoir
la tête de tir de la base prostatique jusqu’à l’apex en utilisant la
commande du moteur longitudinal. En pratique, il faut amener
Figure 9. Imagerie par résonance magnétique (IRM) en coupe sagittale la tête de tir 1 cm au-dessous de l’apex prostatique. L’opérateur
apres injection de produit de contraste à j+2 post-traitement par ultra- déclenche alors le balayage échographique de la prostate. La
sons focalisés de haute intensité pour recidive après radiothérapie externe sonde se déplace automatiquement dans le sens apex/base. À la
(traitement total) : la zone traitée apparaît totalement dévascularisée. fin de ce mouvement, la sonde se positionne automatiquement

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A B
Figure 10. Échographie : traitement de toute la glande réalisé avec la stratégie en deux blocs (lobe droit puis lobe gauche) (A, B).

au niveau du col vésical dont la position a été gardée en mémoire. qu’il dessine (ligne orange). Si cette détection automatique n’est
L’ordinateur intègre les images transversales acquises lors du pas satisfaisante, l’opérateur peut dessiner manuellement avec la
balayage et fournit à l’écran une reconstitution du volume pros- souris de l’ordinateur la position exacte de la muqueuse rectale.
tatique. L’image située à gauche de l’écran correspond au plan L’ordinateur découpe le bloc de traitement dans le sens longitu-
longitudinal et l’image située à droite de l’écran au plan transver- dinal en tranches successives de 1,7 mm d’épaisseur. Pour chaque
sal. En manipulant les curseurs, l’opérateur peut observer tous les tranche, l’opérateur définit, à l’aide de la souris, les contours (ligne
plans de coupe transversaux et tous les plans de coupe sagittaux. bleue) de la zone à traiter. Les lésions ainsi programmées appa-
La mesure du volume prostatique est facile à réaliser en mar- raissent à l’écran comme une rangée de petits points verts alignés
quant les limites supérieures et inférieures de la prostate (apex le long de la paroi rectale. Le nombre de rangées de tir varie
et base), les limites droite et gauche de la prostate (largeur), et en fonction de la distance antéropostérieure de la prostate : au
les limites antérieure et postérieure de la prostate (épaisseur). Puis maximum huit rangées de tir peuvent être définies ; à partir de la
l’opérateur repère l’apex prostatique. Le repérage de l’apex est faci- cinquième rangée, les tirs sont doublés pour tenir compte de l’effet
lité par la vision simultanée des deux plans : on appelle « apex d’ « éventail » lié à la profondeur des tirs. Au niveau de l’apex, il
anatomique » le point de pénétration de la sonde urinaire dans faut toujours traiter les trois premières tranches avec un nombre
la prostate. Chez la plupart des patients, la prostate se prolonge limité de rangées (trois au maximum) : si on choisit un plus grand
en arrière, quelques millimètres au-dessous du point de péné- nombre de rangées, la puissance acoustique délivrée sera supé-
tration de la sonde : il est donc usuel d’observer au niveau de rieure et la diffusion thermique peut provoquer un risque de lésion
l’apex anatomique en imagerie transversale un peu de tissu prosta- du sphincter. La tête de tir avance tranche par tranche, de l’apex
tique (qui correspond au prolongement prostatique postérieur) en vers la base, par pas successifs de 1,7 mm. Pour chaque tranche,
arrière de l’image du cathéter et du sphincter. L’opérateur marque l’opérateur définit la zone à traiter. Par programme, le nombre de
l’ « apex anatomique » sur l’image sagittale puis il positionne la tranches qui peut être programmé est de quatre ou cinq tranches.
limite inférieure et supérieure de la première zone de traitement, Quand toutes les lésions sont programmées, le logiciel de trai-
qu’on appelle également bloc. En effet, il faut réaliser le traite- tement déplace automatiquement la tête de tir en regard de la
ment par blocs successifs. La stratégie de traitement standard est limite inférieure du bloc à traiter et le traitement se déroule par
une stratégie en deux blocs : un pour chaque lobe prostatique couches successives de 1,7 mm. La tête de tir oscille de droite à
(Fig. 10). gauche puis de gauche à droite, et tous les tirs programmés dans
Il est également possible d’utiliser une stratégie en trois blocs : chaque tranche sont réalisés successivement. L’opérateur observe
deux blocs latéraux (par chaque lobe prostatique) puis un bloc en temps réel le déroulement du traitement sur l’image située à
central qui recouvre partiellement les blocs latéraux. La stratégie droite de l’écran, Chaque tir dure 1 seconde : les tirs se déroulent
en trois blocs assure une meilleure couverture du volume pros- de la profondeur vers la capsule postérieure de la prostate sous
tatique car elle permet de mieux ajuster la hauteur des lésions à forme de trajectoire par déplacement électronique du point focal.
la forme de la prostate qui s’aplatit en forme de demi-lune sous Les tirs provoquent des flashs qui perturbent l’image échogra-
l’effet de la compression réalisée par le ballon. Cette stratégie est phique. Entre les trajectoires, le déplacement de la tête de tir dure
adaptée aux tumeurs antérieures envahissant la glande en avant pendant environ 1 seconde. Pendant la phase de tirs, l’image de la
de l’urètre. À cause de la diffusion de la chaleur, la limite inférieure prostate reste parfaitement visible. Les tirs réalisés sont matériali-
du premier bloc de traitement doit être placée 4 mm au-dessus de sés par le changement de couleur des points qui passent du vert au
l’apex anatomique. En effet, la zone traitée (nécrose de coagu- rouge. Au fur et à mesure du traitement, les points verts qui corres-
lation) est plus grande que la zone visée car la chaleur diffuse pondent aux tirs programmés deviennent rouges, correspondant
sur une distance de 4 mm au-delà de la zone visée. Cette dis- aux tirs réalisés.
tance de sécurité permet de protéger le sphincter strié. Une fois Il est fondamental que l’opérateur surveille tout le traite-
les limites inférieures et supérieures du premier bloc de traitement ment en observant le déroulement des tirs. En effet, pendant
déterminées, le logiciel de l’appareil positionne automatiquement le traitement, l’épaisseur de la paroi rectale peut changer. Si un
la tête de tir en regard de la limite inférieure du premier bloc épaississement de la paroi rectale se produit (œdème lié à la
de traitement. Le logiciel montre alors une image transversale diffusion de chaleur au niveau de la zone traitée), il faut inter-
de la prostate et détecte automatiquement la paroi du rectum rompre le traitement si l’epaisseur du rectum devient superieure.

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41-304-B  Indications, techniques et résultats du traitement par ultrasons focalisés du cancer localisé de la prostate

rectum est large et élastique mais ce phénomène est plus fré-


quent chez les patients en récidive après radiothérapie, qui ont
parfois un rectum étroit et peu élastique.

Traitement total en deux blocs (Fig. 10)


La sonde à demeure est laissée en place pendant le traitement
du premier bloc. En effet, le traitement de la glande se déroule
en plusieurs séquences successives. Il est conseillé de commen-
cer le traitement par le lobe pathologique : ce lobe est traité par
séquences successives de cinq tranches de l’apex jusqu’à la base
du lobe. Lorsque le traitement du premier lobe est terminé, la tête
de tir se repositionne automatiquement en regard du col vésical.
L’opérateur repositionne la tête de tir en face du second lobe à
traiter, puis il réalise une nouvelle acquisition du volume prosta-
tique et prépare le planning de traitement du second bloc selon les
mêmes modalités que pour le premier lobe. Le traitement du bloc
controlatéral se déroule sur la même stratégie, sonde à demeure
en place.

Traitement total en trois blocs


Si on veut obtenir un traitement plus complet de la zone cen-
trale de la prostate (en particulier dans les cas où la tumeur est
située en avant de l’urètre), il faut retirer la sonde à demeure
afin que le faisceau ultrasonore ne soit pas stoppé par la sonde
urétrale. En cas de traitement en trois blocs, le volume traité au
niveau de la partie centrale de la prostate recouvre partiellement
le traitement déjà réalisé au niveau des premières zones de traite-
ment : ce phénomène d’overlapping se traduit par un volume traité
final supérieur au volume prostatique mesuré. La sonde doit être
Figure 11. Cavitation excessive avec vaste plage blanche dans le lobe repositionnée sous contrôle échographique en fin de traitement.
traité et perte des contours prostatiques : dans cette situation, le traite-
ment doit être interrompu pendant plusieurs minutes (3 à 5 min) jusqu’à
réapparition des contours prostatiques.
Contrôle de la nécrose
L’appareil Focal One® intègre un système d’imagerie de
contraste par injection de microbulles utilisant le SonoVue® . En
Des images hyperéchogènes blanchâtres peuvent apparaître au fin de traitement, il est conseillé de réaliser une imagerie de
sein de la zone traitée : elles correspondent à des microbulles contraste (sauf contre-indication à l’usage de ce médicament),
intratissulaires induites par le phénomène de cavitation. Si ce ce qui permet d’obtenir un véritable « contrôle qualité » de la
phénomène s’amplifie avec apparition de vastes zones blanches nécrose tissulaire obtenue : l’échographe du Focal One® est réglé
associées à un cône d’ombre postérieur et à la disparition des en position imagerie de contraste et la tête de tir est position-
contours de la glande (Fig. 11), il faut interrompre le traitement née en position médiane en regard du col vésical. Deux images
pour une durée de trois à cinq minutes. Ce phénomène corres- apparaissent alors sur l’écran : en haut l’imagerie de contraste, en
pond à l’apparition de macrobulles dans le tissu prostatique qui dessous l’imagerie B standard.
entre en ébullition. Ces macrobulles gênent la pénétration du fais- L’opérateur va réaliser une acquisition 3D du volume pros-
ceau ultrasonore ; l’énergie ultrasonore peut alors s’accumuler en tatique. Il repère le col vésical puis déplace la tête de tir au
amont des macrobulles et provoquer une lésion thermique du milieu de la prostate. Une dose de SonoVue® est injectée par voie
rectum si le traitement est poursuivi sans pause (avec un risque intraveineuse en respectant les recommandations techniques du
majeur de fistule prostatorectale). fabricant. L’opérateur attend que les bulles apparaissent sur l’écran
du haut (le délai varie d’un patient à l’autre entre 1 et 3 min)
Systèmes de sécurité puis il déplace la tête de tir à l’apex et lance l’acquisition 3D
du volume prostatique. Il est alors possible de comparer l’image
Pendant la phase de traitement, l’appareil se comporte comme en échographie de contraste avec l’image en échographie. Nor-
un robot et quatre systèmes de sécurité sont activés : malement, toute la zone traitée est nécrosée et aucune prise de
• un système de contrôle permanent de la distance contraste n’est visible. Si l’échographie de contraste révèle des
transducteur-rectum. Entre chaque tir, l’appareil contrôle zones encore vascularisées (prise de contraste), il est possible de
la distance entre le centre du transducteur de thérapie et la réaliser un traitement additionnel avec les paramètres standards
muqueuse rectale si la distance mesurée diffère de plus de utilisés pour le traitement. Les limites supérieures et inférieures
1 mm par rapport à la distance théorique, et si les moteurs de du traitement additionnel peuvent être planifiées directement
la tête de tirs n’arrivent pas à corriger la distance, le traitement sur l’imagerie de contraste. Le dessin des zones de traitement est
est interrompu et l’opérateur doit corriger cette distance en réalisé ensuite (le logiciel revient automatiquement en mode de
modifiant le volume de liquide contenu dans le ballon ; planification [mode B images axiales]). Un délai de 20 minutes est
• un système de refroidissement maintient à température cons- recommandé entre la fin du traitement initial et le début du traite-
tante le liquide situé dans le ballon ; cette température est ment additionnel pour que toutes les microbulles soient dissoutes
affichée à l’écran ; elle protège à la fois la muqueuse rectale et et n’interfèrent pas avec les ultrasons thérapeutiques. Un second
le transducteur de thérapie en évitant tout échauffement ; contrôle par imagerie de contraste utilisant une seconde injection
• un dispositif infrarouge contrôle l’immobilité du patient : si le de SonoVue® est possible à la fin du traitement additionnel.
patient bouge, le traitement s’interrompt automatiquement ;
• un système de sécurité constitué par des capteurs de force situés
dans les moteurs destinés à détecter une éventuelle collision
Traitements subtotaux en première intention
entre la tête de tir et les parois du rectum. Si une collision se Il est possible de préserver une bandelette vasculonerveuse en
produit, les capteurs de force informent le logiciel qui inter- ménageant latéralement (du côté ou on souhaite effectuer cette
rompt immédiatement le traitement. Ce phénomène se produit préservation) une bande de tissu prostatique de 6 mm sur toute la
rarement chez les patients traités en première intention car le hauteur de la glande.

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A B C
Figure 12. Traitements partiels.
A. Hémi-ablation standard (patient traité en première intention).
B. Hémi-ablation élargie (patients en récidive postradiothérapie).
C. Traitement focal.

Retraitement par ultrasons focalisés de haute de la tumeur peut être superposée sur les images axiales écho-
graphiques temps réel qui sont utilisées pour la planification des
intensité tirs. L’opérateur peut donc, coupe par coupe, définir les contours
Les prostates déjà traitées par ultrasons sont en général de petite de la zone à traiter (Fig. 7) en ménageant une marge de sécurité
taille (10 ml et parfois moins). Une endoscopie préalable est sys- autour de l’image tumorale projetée sur l’image échographique de
tématiquement réalisée ; elle a pour but de vérifier l’absence de planification. La marge de sécurité dans le tissu prostatique doit
sténose urétrale : une urétrotomie à la lame froide est réalisée être d’au moins 6 mm. Une étude récente est en faveur de la prise
en cas de sténose urétrale. Puis l’opérateur explore la loge de en compte d’une marge de sécurité de 9 mm pour être certain
résection, il persiste parfois des débris nécrotiques plus ou moins d’inclure dans la zone traitée la totalité des extensions du tissu
calcifiés qu’il faut enlever avec l’anse du résecteur. Enfin, le col néoplasique autour de la masse tumorale identifiée par l’IRM [17] .
vésical peut être sténosé et il est souvent utile de réaliser une Un système de guidage du traitement à partir des biopsies sté-
section du col à sept heures et à cinq heures pour élargir l’orifice réotaxiques est en cours de mise au point. Il fait appel à un logiciel
cervical, ce qui facilite la reprise des mictions. En ce qui concerne de fusion entre les images générées par les systèmes de biopsies 3D
les paramètres du traitement par ultrasons, il faut sélectionner le disponibles sur le marché (systèmes Koelis, Medcom, Artemis) et
mode retraitement ; la puissance délivrée est réduite à 80 % de la les images d’échographie temps réel acquises avec le système Focal
puissance standard, ce qui réduit la dose thermique délivrée au One® . Le calculateur de l’appareil réalise une fusion élastique des
sein du tissu prostatique dont la vascularisation a été réduite par deux volumes échographiques. Dans cette image de fusion, les
la fibrose due à la première session d’ultrasons. La stratégie de contours de la prostate et l’image des biopsies positives sont défor-
traitement est une stratégie à deux blocs (les deux lobes). Il ne més en prenant en compte la déformation du volume prostatique
faut pas réaliser d’overlapping. On peut utiliser une stratégie en un par le ballon endorectal. L’opérateur peut alors planifier les zones
seul bloc (un lobe) si la récidive est unilatérale. La sonde doit être à traiter en se guidant sur la représentation des biopsies infiltrées
impérativement retirée pendant la phase de tir si la récidive est par le cancer à la place de la représentation IRM de la tumeur.
antérieure en avant de l’urètre prostatique. En fin de traitement, le logiciel d’imagerie de contraste est activé
pour visualiser la zone de nécrose ; après injection intraveineuse
d’une dose de SonoVue® : les zones ciblées doivent apparaître en
Traitement partiel en première intention noir (aucune microcirculation sanguine) en correspondance avec
L’objectif est de traiter la totalité des foyers tumoraux tout en la cible IRM. S’il existe des zones non nécrosées, il faut program-
préservant un maximum de tissu prostatique sain pour préserver mer un traitement HIFU additionnel. La prise de mesures (distance
la fonction sexuelle (Fig. 12). apex-tumeur, distance tumeur-urètre, distance tumeur-base, plus
grandes dimensions de la tumeur, etc.) sur les images de l’IRM
pré-HIFU peut être une aide précieuse pour vérifier si la nécrose
« Hemi ablation » recouvre bien toute la zone tumorale.
La stratégie la plus facile à mettre en œuvre est l’hemi ablation
(Fig. 12A), c’est-à-dire le traitement de la totalité du lobe où se Patient en récidive après radiothérapie
trouve le cancer en s’arrêtant à la ligne médiane matérialisée par
la sonde de Foley (50 % du volume de la glande). Les tirs sont réa- Les prostates irradiées sont, en général, de volume modéré (20
lisés dans tout le lobe, excepté à l’extrême apex pour préserver le à 25 ml). Le geste endoscopique préalable doit être adapté ; il ne
sphincter strié. L’échographie de contraste permet en peropéra- faut pas réaliser de résection endo-urétrale vraie qui expose à un
toire de vérifier la devascularisation de tout le lobe traité. Chez les fort risque d’incontinence. Seul un éventuel lobe médian justifie
patients dysuriques, une résection endo-urétrale peut être asso- un geste de résection. En général, une simple incision cervico-
ciée. prostatique bilatérale à neuf heures et trois heures est suffisante
pour assurer une bonne ouverture de la loge prostatique, permet-
Traitement focal vrai (moins de 50 % du volume tant une reprise rapide des mictions. Concernant le traitement par
ultrasons, il faut sélectionner le mode re-traitement. La puissance
de la glande) utilisée est de 80 %, ce qui réduit la dose thermique. En effet après
La tumeur doit avoir été localisée grâce à l’IRM multiparamé- la radiothérapie, la vascularisation prostatique et périprostatique
trique associée à des biopsies transrectales randomisées [7] et à est extrêmement faible à cause de la fibrose prostatique et péripros-
des biopsies ciblées (deux par cible IRM) : les contours de pros- tatique. L’utilisation de paramètres très spécifiques est nécessaire
tate et des zones tumorales préparées avec le logiciel X-View pour prévenir le risque de lésion rectale. Certains patients irradiés
au format Dicom sont importés dans le logiciel de fusion de la ont un rectum modifié, étroit et rigide. Il peut arriver que la tête
machine. L’opérateur réalise alors un contourage des images écho- de tir soit difficile à introduire dans le rectum ou bien qu’une fois
graphiques axiales acquises grâce à un déplacement motorisé de la introduite dans le rectum, il soit impossible de réaliser le traite-
sonde endorectale de l’apex jusqu’à la base prostatique. Le calcu- ment parce que le rectum est trop peu élastique pour permettre un
lateur de l’appareil réalise une fusion élastique des volumes IRM gonflage suffisant du ballon ; le patient doit avoir été prévenu de
et échographique. Dans cette image de fusion, les contours de cette éventualité. Cette situation peut être prévenue en analysant
la prostate et de la tumeur sont déformés en prenant en compte la capacité de distension rectale grâce à une IRM préopératoire
la déformation élastique du volume IRM. L’image des contours réalisée avec un ballon endorectal.

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Le traitement est réalisé en un (un lobe) ou deux blocs (les deux haut risque. Le score de Gleason initial et la valeur du PSA nadir
lobes) selon l’étendue de la récidive dans la prostate. Il ne faut pas prédisaient significativement le taux de récidive biochimique.
réaliser de bloc central pour éviter le phénomène d’overlapping • Ganzer et al. [12] ont rapporté les résultats obtenus à Regens-
qui augmente la dose thermique et expose au risque de lésions burg chez 538 patients consécutifs traités entre novembre 1997
rectales. L’objectif est de délivrer de l’énergie uniquement au et septembre 2009. Le suivi moyen a été de 8,1 ans (2,1–14,0).
niveau de la récidive pour prévenir les deux complications post- La survie sans progression biochimique à cinq et dix ans a été
opératoires principales de cette thérapie de rattrapage (sténose et calculée respectivement à 81 et 61 %. La survie sans progression
incontinence). Si les biopsies sont positives dans un seul lobe, biochimique pour les patients à risque faible, intermédiaire et
une stratégie d’hem/ablation doit être proposée, mais il faut tenir élevé a été respectivement à cinq ans de 88, 83 et 48 %, et à dix
compte des données recueillies sur les spécimens après prostatec- ans de 71, 63 et 32 %. Un traitement de sauvetage a été insti-
tomie de rattrapage : dans plus de 60 % des cas, la récidive franchit tué chez 18 % des patients. Le taux de métastases a été de 0,4,
la ligne médiane. Il faut donc inclure largement l’urètre dans la 5,7 et 15,4 % pour les patients a à risque faible, intermédiaire
zone traitée (Fig. 12B). et élevé et la survie spécifique a été respectivement de 0, 3,8 et
11 % chez les patients à risque faible, intermédiaire et élevé.
Ces résultats sont à rapprocher des résultats des traitements
 Soins postopératoires standards chirurgie radicale, radiothérapie externe et curiethé-
rapie. Pour Kupelian et al. [18] , chez 1054 patients traités par
Après traitement total ou subtotal, les soins postopératoires sont prostatectomie radicale, la survie sans progression à huit ans était
similaires aux soins habituels après résection transurétrale de la de 72 %. Pour Potters et al. [19] , chez 733 patients traités par curie-
prostate. Une irrigation vésicale continue par la sonde à double thérapie, la survie sans progression à sept ans était de 74 %. Dans la
courant est maintenue pendant 24 heures jusqu’à éclaircissement série de Zumsteg [1] , 2694 patients ont été traités par radiothérapie
des urines. La sonde urinaire est enlevée le deuxième jour postopé- externe avec une dose comprise entre 75,6 et 86,4 Gy ; 609 patients
ratoire : 80 % des patients reprennent des mictions sans résidu. Si ont récidivé et la survie sans progression à 8 ans après irradiation
une rétention survient, la sonde est remise en place. Dans ce cas, externe a été de 90,3, 77,3, et 57,1 % pour les patients à risque
la solution la plus simple est que le patient regagne son domicile faible, intermédiaire et élevé respectivement. Une hormonothéra-
avec cette sonde, qui sera enlevée 1 semaine plus tard en consul- pie palliative a été instituée chez 30,2, 48,5, et 79,1 % des patients
tation, lorsque l’œdème postopératoire de la glande a totalement classés respectivement risque faible, intermédiaire et élevé. Deux
régressé. Cette situation est un peu plus fréquente chez les patients études comparatives rétrospectives en match pair HIFU versus
traités pour récidive après radiothérapie. chirurgie radicale (HIFU = 310 ; chirurgie radicale = 413) et HIFU
Après traitement focal ou hem/ablation, une tentative d’ablation versus radiothérapie externe [20, 21] ont été publiées : dans l’étude
de sonde peut être réalisée dès le lendemain du traitement avec HIFU versus chirurgie radicale, aucune différence significative
cependant un risque de rétention qui peut nécessiter une recathé- n’a été observée concernant la survie spécifique, la survie sans
térisation de plusieurs jours. métastase et la survie sans hormonothérapie palliative à neuf ans.
La réalisation d’une IRM simplifiée avec injection de gadoli- Dans l’étude HIFU versus radiothérapie externe, aucune différence
nium dans le mois qui suit le traitement montre précisément les concernant la survie sans récidive biochimique n’a été observée
limites de la nécrose, ce qui permet à l’opérateur de contrôler la (HIFU 42 % versus radiothérapie 46 %) (p = 0,133), mais la survie
qualité de son geste opératoire. sans hormonothérapie palliative a été significativement meilleure
à huit ans dans le bras HIFU (HIFU 85 % versus radiothérapie 58 %)
(p < 0,002).
 Suivi carcinologique
On distingue les suivis carcinologiques après traitement total et Complications postopératoires précoces
après traitement partiel. et tardives
Les principaux effets secondaires après traitement par HIFU sont
 Résultats liés à l’action directe de la chaleur sur le tissu prostatique lui-même
et la diffusion de la chaleur vers les organes de voisinage.
Résultats des patients traités en première
intention : traitement de toute la glande Résultats des patients traités en première
intention : traitements limités à une partie
Les résultats des trois principaux centres européens ont été
publiés en 2013. des glandes
• Crouzet et al. [10] ont rapporté les résultats obtenus à Lyon chez
Traitement zonal
1002 patients. La médiane du PSA nadir a été de 0,14 ng/ml
(63 % des patients ont eu un PSA nadir PSA ≤ 0,3 ng/ml). Le Van Velthoven a rapporté en 2014 [22] les résultats à long terme
nombre de sessions HIFU a été d’une chez 66 % des patients, de 31 patients porteurs de cancers dans un seul lobe prostatique,
deux sessions chez 38 %, et de trois sessions chez 2 %. La survie traités de façon zonale entre janvier 2007 et juin 2011. Le taux de
sans progression biochimique à 8 ans (Phoenix définition) a été survie sans progression biochimique (critère de Phoenix) à 3 ans
respectivement de 76 %, 63 %, and 57 % pour les patients classés a été calculé à 82,7 %. Tous les patients étaient continents et 55 %
selon d’Amico à risque faible, intermédiaire et élevé (p < 0,001). ont conservé des érections permettant la pénétration.
À 10 ans, la survie spécifique et la survie sans métastases ont été
respectivement de 97 % et 94 %. Un traitement de sauvetage a Hémiablation
été réalisé par radiothérapie externe chez 13,8 % des patients, L’Association française d’urologie évalue actuellement les résul-
hormone et radiothérapie combinées chez 9,7 %, et hormono- tats de l’hemi ablation par HIFU (avec la machine Ablatherm®
thérapie seule chez 12,1 %. Imagerie Intégrée) comme traitement initial en première inten-
• Thüroff et Chaussy [11] ont rapporté les résultats obtenus à tion [23] . Les principaux critères d’inclusion de l’étude étaient :
Munich chez 704 patients dont 78,5 % étaient classés a risque âge supérieur à 50 ans, stade clinique T1 ou T2, PSA inférieur à
intermédiaire ou à haut risque selon d’Amico. À partir de 2005, 15 ng/ml, Gleason 6 ou 7, au maximum deux sextants contigus
le taux de retraitement a été de 15 % pour l’ensemble de la envahis dans un seul lobe prostatique. Tous les patients ont une
population. Le suivi moyen a été de 5,3 ans. Le taux de sur- IRM suivie de biopsies randomisées (12 prélèvements) et ciblées
vie spécifique a été de 99 % et le taux de survie sans métastase (deux prélèvements par cible IRM). La tumeur visible en IRM doit
de 95 %. À 10 ans, le taux de survie sans traitement complémen- être située à plus de 6 mm de l’apex et à plus de 5 mm de la ligne
taire a été de 98 % pour les patients à faible risque, 72 % pour les médiane. Seul le lobe pathologique est traité ; 111 patients ont été
patients à risque intermédiaire et 68 % pour les patients classés inclus : âge moyen 64,8 ans (50-78), PSA moyen 6,2 ng/ml, volume

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Indications, techniques et résultats du traitement par ultrasons focalisés du cancer localisé de la prostate  41-304-B

prostatique moyen 44 ml. Le score de Gleason était inférieur ou est certaine, mais l’interprétation des biopsies peut être difficile si
égal à 6 chez 82 patients (74 %) et 7 chez 29 patients (26 %). elles sont réalisées trop précocement : la distinction entre dystro-
Le PSA nadir a été de 1,9 ng/ml et le PSA moyen à 12 mois de phie radique et récidive peut être délicate. L’utilisation du positon
2,4 ng/ml (78 patients). Des biopsies de contrôle ont été réalisées emission tomography (PET)-scanner à la choline permet d’identifier
chez 101 patients. Les biopsies ont été négatives chez 68 patients des métastases infraradiologiques en général ganglionnaires qui
(67 %). Un foyer cancéreux significatif (Gleason 7 ou Gleason 6 échappent au bilan standard : scanner thoracoabdominal et scin-
avec plus de deux biopsies atteintes ou une longueur envahie tigraphie osseuse.
> 3 mm) a été identifié dans le lobe traité chez cinq patients
(4,9 %) et dans le lobe controlatéral chez sept patients (6,9 %). Résultats du traitement par ultrasons focalisés
Les thérapies complémentaires post-HIFU (première ligne) ont été
la surveillance active pour 16 patients, un retraitement HIFU pour de haute intensité de sauvetage limité à un lobe
huit patients, la radiothérapie externe pour trois patients et la chi- siège de la récidive (« hemi salvage » traitement
rurgie radicale pour six patients. Le taux de survie actuarielle sans par ultrasons focalisés de haute intensité)
traitement radical à 48 mois a été calculé à 89 %. Une incontinence
Chez certains patients, le bilan réalisé précocement après la réci-
de Grade 1 est survenue chez trois patients (2 %). La fonction érec-
dive biologique (IRM et biopsies) met en évidence une récidive
tile (score (International Index of Erectile Function [IIEF] > 16) a
locale de la tumeur dans un seul lobe de la prostate. Dans cette
été préservée chez 40 patients parmi les 51 qui avaient un score
situation, il est licite de proposer en première ligne une hem abla-
IIEF-5 supérieur à 16 avant la session HIFU (78 %).
tion par HIFU avec pour objectif de contrôler la maladie tout en
Des résultats similaires (taux de biopsies de contrôle négatives
réduisant le risque d’effets secondaires grâce à la réduction de la
et résultats fonctionnels) ont été publiés en 2015 par Cordiero
dose thermique globale administrée dans la glande. Les résultats
Feijoo [24] .
préliminaires de cette stratégie (hemi salvage HIFU [HSH]) ont été
publiés par Baco [25] . Entre 2009 et 2012, 48 patients ont été traités
Thérapie focale avec l’appareil Focal One® dans deux centres. Le suivi médian a été de 16,3 mois (10,5–24,5).
Les résultats du traitement focal réalisé avec l’appareil Focal Le PSA nadir moyen a été de 0,69 ng (médiane 0,83). La survie
One® sont des résultats préliminaires de séries incluant peu de sans progression à 12, 18 et 24 mois a été respectivement de 83,
patients avec un recul faible (un an). 64 et 52 %. Une incontinence grade 2/3 est survenue chez quatre
patients (8 %) et une incontinence grade 1 chez huit patients
Résultats des patients traités en rattrapage (17 %). Aucune incontinence n’est survenue chez 36 patients
(75 %) ; une ostéite pubienne est survenue chez deux patients.
pour récidive locale après radiothérapie
externe
Résultats du traitement par ultrasons focalisés  Conclusion
de haute intensité de sauvetage appliqué à toute
Le traitement par ultrasons focalisés est un traitement peu inva-
la glande sif du cancer de la prostate adapté aux patients non candidats à la
Le traitement de rattrapage par HIFU des patients en récidive chirurgie. Sa répétitivité est un atout majeur.
locale après radiothérapie est une option qui présente un ratio
bénéfice-risque intéressant par rapport au traitement de sauvetage
(chirurgie radicale, cryothérapie, curiethérapie). Crouzet et al.,
en 2012 [14] , ont rapporté les résultats obtenus chez 290 patients
présentant une récidive locale histologiquement démontrée d’un “ Points essentiels
cancer de prostate initialement traité par radiothérapie externe.
Les principaux facteurs prédictifs du succès ont été le score de • Le traitement par HIFU du cancer localisé de la pros-
D’Amico initial avant la radiothérapie, le taux de PSA pré-HIFU et tate peut être réalisé avec divers dispositifs médicaux :
le score de Gleason de la récidive.
Sonablate® 450 (SonacareTM ) et Ablatherm® Imagerie
Le contrôle local de la maladie estimé par biopsies de contrôle
a été de 81 % pour les 208 patients qui ont eu des biopsies post-
Intégrée qui ont obtenu le marquage CE et qui sont homo-
HIFU. La médiane du PSA nadir a été de 0,14 ng/ml ;127 patients logués par la Food and Drug Administration (FDA).
n’ont pas reçu de traitement hormonal, avec un suivi moyen de • L’appareil Focale One® est un appareil de dernière géné-
48 mois. ration qui a obtenu le marquage CE en 2013 et qui a été
La survie spécifique et la survie sans métastases à 7 ans ont été homologué au Canada en 2015. Il a été spécifiquement
calculées respectivement à 80 % et 79,6 %. La survie sans progres- conçu pour permettre le traitement focal du cancer de la
sion a été significativement influencée par le PSA pré-HIFU (hazard prostate grâce à un système de guidage par les images IRM
ratio [HR] : 1,09 ; intervalle de confiance [IC] 95 % : 1,04–1,13), le et/ou par des biopsies prostatiques 3D.
score de Gleason de la récidive supérieur ou égal à 8 versus infé- • Le comité de cancérologie de l’AFU a fait des recom-
rieur ou égal à 6 (HR : 1,17, IC 95 % : 1,03–1,3) et l’existence d’une
mandations sur les indications du traitement par HIFU pour
déprivation androgénique associée ou prescrite dans les suites de
la radiothérapie (HR : 1,28 ; IC 95 % : 1,09–1,46). Les taux de fistule
les patients porteurs de cancer localisé. Les recommanda-
urétrorectale et d’incontinence sévère ont été significativement tions portent sur l’espérance de vie, les caractéristiques de
réduits par l’adoption de paramètres acoustiques spécifiques qui la tumeur et de la glande (volume). Le traitement par HIFU
prennent en compte la faible vascularisation du tissu prostatique du cancer localisé de la prostate peut être proposé en pre-
irradié : taux de fistules 0,4 % et taux d’incontinence grade 2/3 mière intention aux patients qui ne sont pas candidats à la
19,5 %. Malgré l’utilisation de paramètres dédiés, le taux de sté- chirurgie du fait de leur âge (> 70–72 ans) ou du fait de leur
nose cervicoprostatique est resté relativement élevé (12 %) de état général (obésité, comorbidité, en particulier obésité
même que le taux d’ostéite pubienne (2,4 %). morbide et maladies cardiovasculaires), ou enfin chez des
Le véritable problème est la sélection des patients. Cette sélec- patients qui ont de lourds antécédents de chirurgie pros-
tion doit surtout prendre en compte le stade initial de la maladie
tatique (adénectomie par voie haute). Le traitement par
avant la radiothérapie externe. Il faut que le patient ait été traité
par radiothérapie à un stade initialement curable : les patients
ultrasons est recommandé uniquement chez des patients
à haut risque (T3, ou PSA > 20 ou Gleason > 7) sont de mauvais porteurs de cancer de la prostate localisé (stade T1/T2)
candidats aux traitements de rattrapage, quelle que soit la tech- dont le score de Gleason est inférieur ou égal à 7 et dont
nique utilisée. Le diagnostic de récidive locale doit être réalisé le PSA est inférieur ou égal à 15.
précocement après le PSA nadir dès que la récidive biologique

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41-304-B  Indications, techniques et résultats du traitement par ultrasons focalisés du cancer localisé de la prostate

Les résultats des traitements focaux (en particulier de la stratégie [11] Thüroff S, Chaussy C. Evolution and outcomes of 3 MHz high inten-
d’hemi ablation HIFU en cas de cancer unilatéral) sont prometteurs sity focused ultrasound therapy for localized prostate cancer during
cas ils ne compromettent pas la réalisation d’un traitement radical 15 years. J Urol 2013;190:702–10.
en cas d’échec. [12] Ganzer R, Fritsche HM, Brandtner A, Bründl J, Koch D, Wieland WF,
Le traitement par HIFU est un traitement de sauvetage pour et al. Fourteen-year oncological and functional outcomes of high-
les patients qui présentent une récidive locale de stade cli- intensity focused ultrasound in localized prostate cancer. BJU Int
nique T1-T2 après radiothérapie. Sa morbidité est acceptable 2013;112:322–9.
et il peut être proposé à un grand nombre de patients (ce [13] Murat FJ, Poissonnier L, Rabilloud M, Belot A, Bouvier R, Rouvière
qui n’est pas le cas de la chirurgie radicale). La sélection et O, et al. Mid-term results demonstrate salvage high-intensity focused
l’information des patients sont les deux étapes cruciales dans cette ultrasound (HIFU) as an effective and acceptably morbid salvage
indication. treatment option for locally radiorecurrent prostate cancer. Eur Urol
La plupart des cancers sont détectés dans le futur au stade local 2009;55:640–7.
et la mise au point d’un traitement peu invasif et répétable dans [14] Crouzet S, Murat FJ, Pommier P, Poissonnier L, Pasticier G,
le temps est un enjeu majeur pour la prise en charge des cancers Rouvière O, et al. Locally recurrent prostate cancer after initial
localisés qui ne justifient pas la chirurgie radicale. Par ailleurs, le radiation therapy: early salvage high-intensity focused ultra-
sound improves oncologic outcomes. Radiother Oncol 2012;105:
traitement HIFU est actuellement le traitement à visée curative
198–202.
le moins invasif pour les patients en récidive locale après radio-
[15] Chavrier F, Chapelon JY, Gelet A, Cathignol D. Modeling of high
thérapie externe, surtout quand la récidive est limitée en volume
intensity focused ultrasound induced lesion in presence of cavitation
permettant un traitement focal.
bubbles. J Acoust Am 2000;108:432–40.
[16] Rouvière O, Glas L, Girouin N, Mège-Lechevallier F, Gelet
A, Dantony E, et al. Prostate cancer ablation with trans-
Déclaration d’intérêts : A. Gelet : consultant pour la société EDAP-TMS.
rectal high-intensity focused ultrasound: assessment of tissue
S. Crouzet, O. Rouvière, J.-Y. Chapelon n’ont pas transmis de déclaration de
destruction with contrast-enhanced US. Radiology 2011;259:
liens d’intérêts en relation avec cet article.
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Indications, techniques et résultats du traitement par ultrasons focalisés du cancer localisé de la prostate  41-304-B

A. Gelet (albert.gelet@chu-lyon.fr).
Service d’urologie, Hôpital Édouard-Herriot, 5, place d’Arsonval, 69437 Lyon cedex 3, France.
Unité Inserm 1032, 151, cours Albert-Thomas, 69424 Lyon cedex 3, France.
S. Crouzet.
O. Rouvière.
Service d’urologie, Hôpital Édouard-Herriot, 5, place d’Arsonval, 69437 Lyon cedex 3, France.
J.-Y. Chapelon.
Unité Inserm 1032, 151, cours Albert-Thomas, 69424 Lyon cedex 3, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Gelet A, Crouzet S, Rouvière O, Chapelon JY. Indications, techniques et résultats du traitement par
ultrasons focalisés du cancer localisé de la prostate. EMC - Techniques chirurgicales - Urologie 2016;9(3):1-13 [Article 41-304-B].

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