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TRAVAUX DIRIGES
DE DROIT JUDICIAIRE PRIVE
M. Serge JAHIER
Docteur en droit, Avocat au barreau de Marseille
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Sommaire
Séance 1 L’action et la demande en justice
==> Vous définirez les termes suivants : action, intérêt, qualité, demande, assignation, requête,
constitution
==> Vous expliquerez les arrêts suivants sous forme de plan, détaillé, avec intitulés, et introduction
rédigée comprenant la relation des affaires et le ou les problèmes juridiques qu’ils semblent poser.
Vous pourrez procéder à un plan et à une introduction groupés si vous l’estimez opportun et pouvez
le justifier.
1. Conditions d’ouverture de l’action : l’intérêt (Civ. 3e, 5 févr. 1997, n° 95-12368 ; Civ, 2e, 6 mai
2004, n° 02-16.314 ; Civ 3e, 4 nov. 2004 n° 03-11.377 ; Civ. 1re, 9 juin 2011, n°10-10.348) ; la
qualité (Com. 19 janv. 1999, n° 96-19.495 ; Civ, 1re, 18 sept. 2008 n°06-22.038).
2. La demande en justice : la demande initiale (Ass. plén. 3 avr. 1987, n° 86-11.536) ; la question de
l’assignation inexistante (Ch. mixte, 7 juill. 2006, n° 03-20.026).
4. Le point sur la communication en temps utile des pièces et le rôle des parties dans la
détermination de la matière litigieuse : Civ. 1re, 11 juill. 2019, n° 18-20.212.
1. L’effet dévolutif de l’appel : Civ. 2e, 6 janv. 2012, n° 10-17.824 ; Civ. 2e, 9 févr. 2012, n° 11-17.212 ;
Civ. 2e, 2 juill. 2020, n° 19-16.954 ; Civ. 2e, 19 mars 2020, n° 19-11.387
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celui-ci a remis au prêteur les sommes qui lui étaient dues, et a également versé une certaine
somme à une société Fontinel Investissement, cessionnaire d'une créance de la société SOFAL
résultant d'une condamnation prononcée contre M. et Mme X... par une décision judiciaire et
garantie par une hypothèque judiciaire provisoire ; que M. et Mme X... ont assigné M. A..., la SCP
de notaires A... et B..., M. Y... et M. Z... en paiement de diverses sommes à titre d'intérêts et en
remboursement de la somme versée à la société SOFAL ;
Attendu que, pour déclarer irrecevables les demandes de M. X..., faute de qualité et d'intérêt
pour agir, l'arrêt se borne à retenir qu'il ne résulte aucun préjudice des versements effectués par
le notaire ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'intérêt à agir n'est pas subordonné à la démonstration préalable
du bien-fondé de l'action, et que l'existence du préjudice invoqué par le demandeur n'est pas une
condition de recevabilité de son action mais de son succès, la cour d'appel a violé le texte susvisé
;
alors, selon le moyen, que l’intérêt au succès ou au rejet d’une prétention s’apprécie au jour de
l’introduction de la demande en justice ; qu’en particulier est irrecevable en l’absence de litige né
et actuel, l’action préventive tendant à forcer une personne, qui peut se prévaloir d’avoir un droit,
à prouver ses prétentions en justice ; que dès lors, en se déterminant comme elle l’a fait tout en
constatant que la caisse régionale de crédit agricole mutuel n’avait émis aucune prétention à
l’égard de Mme Y..., la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision au regard de
l’article 31 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu’après avoir exactement retenu que, même en dehors de tout litige, Mme Y...
avait intérêt à faire constater la prescription de la créance de la banque afin de lui permettre de
connaître la consistance exacte du patrimoine dont elle avait hérité et l’étendue des droits dont
elle pouvait disposer compte tenu des hypothèques garantissant cette créance, c’est à bon droit
que la cour d’appel a déclaré l’action recevable ;
PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;
5. Cass. com., 19 janv. 1999, n° 96-19.495
REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que la société H, qui exploite une liaison maritime entre les ports
de Folkestone et Boulogne-sur-Mer, ne recourt pas, dans ce dernier port, pour l’exécution des
opérations de lamanage concernant ses navires, aux services de la Société B, qui est agréée pour
ces opérations, mais les fait exécuter en partie par son personnel de quai ; que, soutenant que
cette pratique est irrégulière au regard de la réglementation française du lamanage, l’Association
professionnelle du batelage lamanage des ports français (l’association) a demandé réparation du
préjudice résultant de l’atteinte ainsi portée aux intérêts collectifs qu’elle dit représenter ;
Attendu que l’Association reproche à l’arrêt d’avoir déclaré sa demande irrecevable alors, selon
le pourvoi, d’une part, qu’une association peut, conformément à son objet, réclamer en justice la
réparation de l’atteinte portée aux intérêts collectifs de ses membres ; que, pour dire
l’Association irrecevable à agir à l’encontre de la société H, la cour d’appel a énoncé qu’elle ne
pouvait se réclamer d’aucune disposition législative, réglementaire ou statutaire lui permettant
d’agir en justice pour la défense de l’intérêt collectif ; qu’en statuant ainsi quand il lui appartenait
de rechercher si, compte tenu de son objet (« la défense et la reconnaissance de la profession du
lamanage, la défense des intérêts généraux des entreprises de lamanage sur les questions
économiques, administratives et juridiques »), l’Association n’avait pas intérêt à agir en
réparation du préjudice résultant, pour les intérêts collectifs de ses membres, de l’exercice par la
société H de l’activité de lamanage nonobstant l’absence d’agrément et sans respect de la
réglementation applicable, la cour d’appel a violé l’article 31 du NCPC ; alors, d’autre part, qu’une
association déclarée peut, conformément à son objet, réclamer en justice la réparation de
l’atteinte portée aux intérêts collectifs de ses membres, indépendamment du préjudice personnel
subi par chacun d’eux ; qu’en énonçant, dès lors, pour débouter l’Association de son action en
réparation du dommage résultant de l’exercice irrégulier de l’activité de lamanage par la société
H, qu’aucun membre de l’Association n’était présent à Boulogne-sur-Mer, la cour d’appel a violé
l’article 31 du NCPC ; et alors, enfin, que pour déclarer l’action de l’Association irrecevable, la cour
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d’appel a énoncé qu’elle s’analysait en une intervention dans la marche commerciale et financière
de la Société B, prohibée par l’article 3 des statuts de l’Association ; qu’en statuant ainsi quand
elle constatait que cette société n’était pas adhérente de l’Association, la cour d’appel a statué
par un motif inopérant et a privé sa décision de base légale au regard de l’article 31 du NCPC ;
Mais attendu qu’ayant relevé que la Société B n’est pas membre de l’Association, ce dont il résulte
qu’elle ne lui a pas confié la défense de ses intérêts, la cour d’appel en a exactement déduit
l’irrecevabilité de la demande ; que le moyen n’est fondé en aucune de ses branches ;
attachée à la seule délivrance de l’assignation ; que, d’autre part, l’article 2247 du Code civil pose
une exception à la règle figurant à l’article 2246 du même Code ; que, dès lors, les cas dans
lesquels l’assignation, bien que régulièrement délivrée, n’interrompt pas la prescription, sont
limitativement énumérés par l’article 2247 ; qu’enfin, s’il fallait subordonner l’effet interruptif de
l’assignation à son enrôlement dans le délai de quatre mois, il faudrait nécessairement faire
produire au défaut d’enrôlement un effet rétroactif que n’implique nullement l’article 757 du
nouveau Code de procédure civile dans la mesure où la caducité n’interdit au juge de statuer qu’à
l’expiration du délai de quatre mois ; d’où il suit qu’en statuant comme elle l’a fait, la cour d’appel
a violé les articles 215, 2246 et 2247 du Code civil, 757 du NCPC ;
Mais attendu qu’une assignation dont la caducité a été constatée n’a pu interrompre le cours de
la prescription ; que, dès lors, la cour d’appel, qui a relevé que la seconde assignation avait été
délivrée hors du délai légal, en a justement déduit que l’action était prescrite ;
D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi
8. Cass., ch. mixte, 7 juill. 2006, n° 03-20.026
REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches :
Vu les articles 114 et 117 du nouveau code de procédure civile, ensemble l’article 855 du même
code ;
Attendu que, quelle que soit la gravité des irrégularités alléguées, seuls affectent la validité d’un
acte de procédure, soit les vices de forme faisant grief, soit les irrégularités de fond limitativement
énumérées à l’article 117 du nouveau code de procédure civile ;
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que les sociétés KTI et Technip avaient confié à la société Jules Roy,
désormais dénommée société Schenker BTL, le transport d’une cargaison qui a subi des avaries
constatées lors de son débarquement, le 19 avril 1995 ; que par acte du 17 avril 1996, ces deux
sociétés, ainsi que leurs assureurs, ont assigné à comparaître devant un tribunal de commerce, à
l’audience du 16 mai suivant, la société Jules Roy qui a appelé en cause d’autres sociétés ; que le
16 mai 1996 étant un jour férié, les sociétés demanderesses ont réitéré leur assignation par acte
du 10 mai 1996 ; que la société Jules Roy a soulevé la nullité de la première assignation et invoqué
la prescription d’un an prévue par l’article L. 133-6 du code de commerce ;
Attendu que pour déclarer prescrite l’action des sociétés KTI, Technip et de leurs assureurs,
l’arrêt, après avoir relevé que l’assignation délivrée le 17 avril 1996 portait mention d’une date
correspondant à un jour férié et où la juridiction ne siégeait pas, retient que cet acte, privé d’une
mention substantielle, était impuissant à saisir les premiers juges, devait être tenu pour inexistant
sans qu’il soit besoin d’en prononcer la nullité et ne pouvait avoir d’effet interruptif de la
prescription ;
Qu’en statuant ainsi, alors qu’il résultait de ses constatations que l’acte était affecté d’un vice de
forme, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt.
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Attendu que le défendeur représenté en première instance, qui aurait pu invoquer, à ce stade de
la procédure, l’incompétence de la juridiction saisie et qui ne l’a pas valablement fait, est
irrecevable à soulever une telle exception pour la première fois en cause d’appel ;
Attendu que, pour déclarer recevable l’exception d’incompétence des juridictions étatiques,
l’arrêt attaqué relève que les appelantes n’ont pas régulièrement soumis l’exception au tribunal
de grande instance qui, sans être critiqué sur ce point, a rejeté comme tardives les conclusions
qui l’invoquaient et qu’il s’ensuivait que, soumise pour la première fois à l’examen des juges
d’appel, l’exception était recevable par application de l’article 74 du code de procédure civile ;
Qu’en statuant ainsi, alors que les sociétés TECA et MDI entreprises n’étaient pas défaillantes en
première instance, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;
Sur le pourvoi principal des sociétés TECA et MDI entreprises, pris en ses trois branches, ci-après
annexé :
Attendu que la cassation intervenue sur le pourvoi incident rend sans objet l’examen du pourvoi
principal ;
Vu l’article L. 411-3 du code de l’organisation judiciaire ;
Et attendu que la Cour de cassation est en mesure de mettre fin au litige en déclarant l’exception
d’incompétence irrecevable ;
PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il a déclaré recevable et a rejeté
l’exception d’incompétence soulevée pour la première fois en cause d’appel par les sociétés TECA
et MDI entreprises, l’arrêt.
4. Cass. Soc. 28 mars 2012, n° 11-61.180
REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Attendu, selon le jugement attaqué, que contestant la présentation par le syndicat CFTC de la
métallurgie de l’Essonne au premier tour des élections des délégués du personnel et des membres
du comité d’entreprise de la société Thales Raytheon Systems d’une liste au motif qu’elle serait
commune avec une union de salariés n’ayant pas la qualité de syndicat, le syndicat CFDT
Métallurgie du Sud francilien et plusieurs salariés ont saisi le tribunal d’instance d’une demande
d’annulation des élections qui se sont déroulées le 9 juin 2011 ; que le tribunal a rejeté cette
demande ;
Sur la recevabilité du pourvoi, examinée d’office après avis donné par la deuxième chambre civile
en application de l’article 1015-1 du code de procédure civile :
Attendu que selon l’article 1022-2 du code de procédure civile, applicable en matière de
contentieux des élections professionnelles, le demandeur justifie de l’acquittement de la
contribution pour l’aide juridique au plus tard au moment de la remise de son mémoire ; qu’en
application de l’article 126 du code de procédure civile, la justification du paiement de cette
contribution avant décision du juge statuant sur la recevabilité de la demande régularise la
procédure ;
Qu’il s’ensuit que le demandeur au pourvoi formé le 22 novembre 2011 ayant justifié du paiement
de la contribution pour l’aide juridique le 29 novembre 2011, le pourvoi est recevable ; (…)
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Cour de Cassation.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Rouen, 4 juin 2020), sur le fondement d'un acte notarié, la société Les
Vergers a fait délivrer, le 14 décembre 2017, un commandement de payer valant saisie
immobilière à la société [Adresse 3] (la société [Adresse 3]).
2. Par acte du 20 mars 2018, M. [J], associé de la société [Adresse 3], et cette dernière ont
assigné la société Les Vergers devant un tribunal de grande instance en nullité du contrat de
prêt.
3. Par jugement du 12 août 2019, un juge de l'exécution a sursis à statuer sur la procédure de
saisie immobilière, dans l'attente de la décision du tribunal de grande instance.
4. La société Les Vergers a été autorisée par le premier président d'une cour d'appel à interjeter
appel immédiat de ce jugement.
6. La société [Adresse 3] fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevables les conclusions et les pièces
n° 25 à 38 qu'elle a déposées le 20 janvier 2020, alors « que le juge doit, en toutes
circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en
déclarant irrecevables, à la demande de la société Les Vergers, les conclusions et pièces
numéros 25 à 38 déposées le 20 janvier 2020 par la SCCV [Adresse 3], au motif que ces écritures
et pièces avaient été déposées trois heures avant l'audience de plaidoiries, de sorte que la
société Les Vergers s'était trouvée dans l'impossibilité d'en prendre connaissance en temps
utile, sans préciser à quelle heure la société Les Vergers avait contesté ce dépôt prétendument
tardif de conclusions et de pièces et sans rechercher si la SCCV [Adresse 3] avait été en mesure
de s'expliquer sur ce point, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile. »
Réponse au moyen
7. En premier lieu, l'arrêt constate qu'en application d'une ordonnance du 24 octobre 2019
fixant un calendrier de procédure, la société Les Vergers a assigné la société [Adresse 3] le 6
novembre 2019 et que cette dernière a conclu le dernier jour du délai qui lui était imparti, soit
le 20 décembre 2019, sans communiquer ses pièces malgré une sommation du 24 décembre
2019.
8. En deuxième lieu, il relève que la société Les Vergers a répliqué par conclusions notifiées le 6
janvier 2020 tandis que la société [Adresse 3] a attendu le 20 janvier 2020 à 11 heures 39 pour
notifier de nouvelles conclusions, à 12 heures 03 pour communiquer ses pièces n° 1 à 11, à 12
heures 28 ses pièces 21 à 24, et à 12 heures 36 pour communiquer ses nouvelles pièces 25 à 30
non produites en première instance, soit moins de 3 heures avant l'audience de plaidoiries fixée
dès l'ordonnance de référé rendue le 16 octobre 2019 par la juridiction du premier président.
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9. En dernier lieu, l'arrêt retient qu'aucun motif ne justifie un tel comportement contraire à la
loyauté des débats et au principe du contradictoire qui, du fait du dépôt tardif de nouvelles
écritures et de nouvelles pièces, a mis la société Les Vergers dans l'impossibilité d'en prendre
connaissance en temps utile.
10. C'est en l'état de ces constatations et énonciations que la cour d'appel, qui n'avait pas à
rechercher si la société [Adresse 3] avait été en mesure de s'expliquer sur la demande de rejet
des conclusions tardives et des pièces, a souverainement apprécié si la société Les Vergers avait
eu un temps utile pour prendre connaissance des dernières conclusions et pièces.
12. La société fait grief à l'arrêt la débouter de toutes ses demandes, de mentionner que la
créance de la société Les Vergers s'élevait à 1 000 000 euros avec intérêts au taux de 17 % l'an
du 15 décembre 2011 jusqu'à complet remboursement du prêt, avec imputation sur les intérêts
des sommes de 107 819,34 euros le 7 novembre 2013, 51 426,72 euros le 3 août 2016, 9 000
euros le 30 décembre 2016 et 250 000 euros le 10 avril 2017 et d'ordonner la vente forcée des
biens saisis, alors « qu'aux termes de l'article 16 du code de procédure civile, le juge doit, en
toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en
retenant, pour débouter la SCCV de toutes ses demandes, fixer la créance de la société Les
Vergers et ordonner la vente forcée des biens saisis, que les pièces n° 12 à 20 produites par la
SCCV [Adresse 3] ne figuraient pas au dossier remis à la cour d'appel, sans inviter les parties à
s'expliquer sur l'absence au dossier de ces pièces qui figuraient au bordereau de pièces annexé
aux conclusions d'intimées de la SCCV notifiées le 20 décembre 2019, déclarées recevables, et
dont la communication n'avait pas été contestée, la cour d'appel a violé le texte susvisé. »
Réponse de la Cour
13. Après avoir constaté que les pièces numéros 12 à 20 et 31 à 38 visées au bordereau de
pièces ne figuraient pas au dossier de plaidoirie, la cour d'appel, qui ne s'est pas fondée sur
cette absence de pièces, n'avait donc pas à inviter les parties à s'expliquer.
financière des temps d'habillage" sous la forme d'une prime forfaitaire annuelle de 375 euros ;
qu'en 2008, lors de la négociation annuelle obligatoire, l'employeur a conclu avec les mêmes
partenaires sociaux un accord prévoyant en son article 3 que la "prime d'habillement" pour
l'année 2008 s'éléverait à la somme de 420 euros pour les conducteurs et à 460 euros pour les
agents de maîtrise ; que M. X..., salarié de la société Trans Fensch a saisi la juridiction prud'homale
pour obtenir le remboursement des frais d'entretien de ses vêtements de travail ;
Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches : …
Mais sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :
Vu l'article 7 du code de procédure civile ;
Attendu que pour évaluer la somme due au salarié pour l'entretien de ses vêtements
professionnels, le conseil de prud'hommes, après avoir relevé que l'intéressé ne justifiait pas des
frais qu'il avait réellement exposés, s'est fondé sur une recherche réalisée à partir de différents
sites internet, relative à la consommation en électricité et en eau nécessaire au fonctionnement
d'un lave-linge, à l'amortissement du matériel utilisé au prorata du volume lavé, au coût de la
poudre à laver et au temps nécessaire pour que les vêtements soient prêts à être réutilisés ;
Qu'en retenant ainsi, des éléments qui n'étaient pas dans le débat, le conseil de prud'hommes a
violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE,
7 Civ. 1re, 21 févr. 2006, n° 03-12004 P
REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Attendu que M. X, notaire associé de la société d’exercice libéral à responsabilité limitée X (la
SELARL) puis, à partir de mai 1995, de la société civile professionnelle X et Ducros (la SCP), a signé,
le 15 octobre 1993, indiquant dans l’acte sa qualité de notaire, un contrat de location bureautique
avec la société Rank Xerox représentée par le directeur général de la société Vaucluse
bureautique service (la société VBS), devenue la société Ordinasud technologies, ainsi qu’un
contrat d’entretien et un contrat de fourniture de logiciels ; que ces conventions avaient pour
objet la fourniture au locataire d’un serveur informatique, de micro-ordinateurs, de divers
matériels et logiciels spécifiques pour chaque poste de travail et le serveur avec un système
d’exploitation produit par IBM, outre le logiciel réseau et les produits de la société Formatext ;
qu’un nouveau contrat de location a été signé le 20 octobre 1993 par M. X avec la société Burobail,
société financière acheteuse du matériel précité, qui prévoyait sa livraison au plus tard le 30
décembre 1993 et le paiement par le locataire d’échéances trimestrielles pendant cinq ans ; que
se plaignant de rencontrer des difficultés dans l’utilisation du réseau informatique, la SCP X et
Ducros a obtenu en référé la désignation d’un expert, contradictoirement avec la société VBS qui
a appelé en cause les sociétés Rank Xerox et Formatext ; qu’après dépôt du rapport d’expertise,
l’”office notarial” a assigné les sociétés VBS, Rank Xerox, Formatext et Burobail pour faire
prononcer la résolution du contrat de vente de l’ensemble des fournitures informatiques, celle
du contrat de location ainsi qu’à les faire condamner à la restitution des loyers et au paiement de
dommages-intérêts ;
…
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exploitation viticole ; qu’après le décès de J... I..., T... E... et ses enfants ont conclu, le 29 décembre
1999, une convention relative à l’exercice des droits indivis portant sur une partie des parcelles
objets de la donation-partage, applicable rétroactivement à compter du 17 juin 1999 et pour une
période de cinq ans, renouvelable par tacite reconduction sauf opposition par lettre
recommandée avec avis de réception par l’un des indivisaires trois mois avant l’échéance ; que,
le 23 décembre 2000, T... E... a consenti à chacun de ses fils et au concubin de sa fille, un bail rural
sur certaines desdites parcelles, contre paiement par chaque preneur du tiers de la récolte des
vignes louées ; qu’après le décès de T... E..., survenu le [...] , Mme H... E... a, par lettre
recommandée du 17 juin 2011, notifié sa sortie de l’indivision avec effet rétroactif au 19
novembre 2010 ; que MM. D... et U... E... l’ont assignée pour voir juger que la convention
demeurait conclue jusqu’au 17 juin 2014 ;
…
Mais sur le premier moyen :
Vu l’article 15 du code de procédure civile ;
Attendu que, pour écarter des débats la pièce n° 74 de MM. E, l’arrêt retient que celle-ci,
communiquée le jour-même de la clôture, ne l’a pas été en temps utile et doit être écartée des
débats ;
Qu’en se déterminant ainsi, sans expliquer, même sommairement, en quoi cette pièce appelait
une réponse, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision ;
Et sur le deuxième moyen :
Vu l’article 4 du code de procédure civile ;
Attendu que, pour dire Mme E fondée à demander le partage de l’indivision conventionnelle en
raison de justes motifs et ce, à compter du 17 juin 2011, et rejeter en conséquence les demandes
de MM. E au titre des manquements contractuels de leur soeur après cette date, l’arrêt relève
que, si les considérations sur les effets d’une requalification de la convention du 29 décembre
1999 en société créée de fait sont inopérantes et que les termes de cette convention ne prévoient
pas la cessation de l’indivision en cas de décès de l’usufruitier, Mme E invoque également l’article
1873-3 du c. civil aux termes duquel le partage ne peut être provoqué avant le terme convenu
qu’autant qu’il y en a de justes motifs, et retient que ceux-ci sont établis ;
Qu’en statuant ainsi, alors que, dans le dispositif de ses conclusions, Mme E sollicitait la nullité de
la convention du 29 décembre 1999, la cour d’appel, qui a modifié l’objet du litige, a violé le texte
susvisé ;
PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il écarte des débats la pièce n° 74
de MM. E communiquée tardivement, … l’arrêt rendu le 25 mai 2018…
soient tirés des faits ou déduits d’un texte ou d’une notion juridique, en sorte que la présentation d’un
moyen nouveau n’a pas pour conséquence de faire obstacle à l’autorité de la chose, dès lors que la cause
de la demande demeure la même ;
ALORS QUE l’autorité de la chose jugée n’a lieu qu’en cas d’identité de cause, c’est-à-dire si les demandes
successives sont fondées sur le même texte ou le même principe ; que la cour d’appel a constaté que la
première demande de M. Gilbert Y... avait été fondée sur le salaire différé défini par le code rural, tandis
que la demande dont elle était saisie était fondée sur l’enrichissement sans cause ; qu’en estimant que ces
deux demandes avaient une cause identique, la cour n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres
constatations et a violé les articles 1351 du code civil et 480 du nouveau code de procédure civile.
2. Civ. 3e, 13 février 2008, n° 06-22.093
REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Attendu, selon l’arrêt attaqué, qu’un arrêt du 27 janvier 2000 a, à la demande de M. X..., dit la
société civile immobilière du 24 rue des Petites Ecuries (la SCI) tenue de régulariser la vente d’un
lot de copropriété ; que la SCI a assigné le 2 février suivant M. X... en rescision pour lésion ;
Sur le premier moyen :
Vu l’article 1351 du code civil ;
Attendu que pour dire l’action en rescision recevable, l’arrêt retient qu’il ressort des conclusions
déposées par la SCI dans l’instance ayant abouti à l’arrêt du 27 janvier 2000 et des termes mêmes
de cet arrêt que la SCI qui soutenait que le contrat de réservation ne pouvait être requalifié en
promesse de vente valant vente, n’a pas à l’époque demandé la rescision de la vente pour lésion
mais simplement excipé d’un préjudice résultant du fait qu’elle n’avait pu vendre le bien sur la
base d’un prix minimal de 14 000 francs le m² ; que son action présente ne se heurte donc pas à
l’autorité de la chose jugée attachée à l’arrêt précité qui a rejeté toutes ses demandes ;
Qu’en statuant ainsi, alors qu’il incombait à la SCI défenderesse à l’action en régularisation forcée
de la vente de présenter dès cette instance l’ensemble des moyens qu’elle estimait de nature à
faire échec à la demande en invoquant notamment la lésion, fondement juridique qu’elle s’était
abstenue de présenter en temps utile, de sorte que l’action en rescision se heurtait à l’autorité
de la chose jugée s’attachant à l’arrêt précédent qui avait constaté l’efficacité du contrat de vente,
la cour d’appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt.
3. Civ. 1re, 1er juillet 2010, n° 09-10.364
REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :
Attendu que, suite au placement en liquidation des biens de la société Fruits et légumes X et fils
à laquelle la caisse régionale de crédit agricole mutuel Alpes Provence avait consenti deux crédits,
celle-ci a assigné les consorts X, qui s’étaient portés cautions de cette société en garantie du
remboursement de ces crédits, en exécution de leurs engagements ; que par jugement
irrévocable du 17 mars 1995, le tribunal de commerce d’Avignon a condamné les consorts X à
payer à la banque les sommes de 800 000 francs et 1 000 000 francs et dit “que les cent bons de
caisse détenus par la caisse régionale de crédit agricole mutuel d’Avignon pour le compte de
Claude et Yves X doivent revenir à ces derniers pour leur montant, augmenté des intérêts
24
conventionnels courus depuis leur dépôt entre les mains de la caisse régionale de crédit agricole
mutuel d’Avignon, venir à due concurrence en compensation des sommes dues à la caisse
régionale de crédit agricole mutuel” ; que les consorts X ont ensuite assigné la banque en
paiement, respectivement, des sommes de 800 000 francs et 1 000 000 francs à titre de
dommages-intérêts, lui reprochant d’abord de ne pas avoir procédé au renouvellement des
hypothèques prises sur les biens de la société Fruits et légumes X et fils en garantie du crédit de
800 000 francs, ensuite de s’être abstenue de demander à la Caisse nationale de crédit agricole
le remboursement des bons de caisse anonymes donnés en gage en garantie du crédit de 1 000
000 francs ;
Attendu que le moyen fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir déclaré ces demandes irrecevables en
raison de l’autorité de la chose jugée par le jugement du 17 mars 1995, alors, selon le moyen :
1°/ que l’autorité de la chose jugée n’a lieu qu’à l’égard de ce qui a fait l’objet du jugement; qu’il
faut que la chose demandée soit la même, que la demande soit fondée sur la même cause, que
la demande soit entre les mêmes parties et formée par elles et contre elles en la même qualité ;
qu’en l’espèce, ainsi qu’il résulte des constatations de l’arrêt, un jugement du 17 mars 1995,
devenu définitif, a condamné les consorts X..., en leurs qualités de cautions, au paiement d’une
certaine somme au profit de la banque créancière, après avoir consacré la dette en son principe
et en son montant ; qu’au cours de l’instance ayant donné lieu à cette première décision, les
cautions se sont bornées à discuter de la validité et de la portée de leurs engagements ; que
comme le constate la cour d’appel elle-même, au cours de cette instance initiale, les consorts X...
n’ont présenté aucune demande reconventionnelle tendant au paiement, par le banquier fautif,
de dommages-intérêts et à la compensation entre ces dommages-intérêts et la créance de la
banque; qu’il s’ensuit que l’autorité de la chose jugée attachée à la décision du 17 mars 1995,
ayant statué sur la seule demande en paiement de la banque dirigée contre les cautions, ne
s’opposait pas, faute d’identité d’objet entre les deux demandes, qui n’avaient pas les mêmes
fins, à la demande ultérieure des consorts X... tendant à la condamnation de la banque au
paiement de dommages-intérêts, pas plus qu’au jeu de la compensation entre ces dommages-
intérêts et la créance de la banque ; qu’en décidant le contraire, la cour d’appel a violé l’article
1351 du code civil ;
2°/ que seules les parties introduisent l’instance; que l’objet du litige est déterminé par les
prétentions respectives des parties; qu’en l’espèce, pour déclarer irrecevable la demande des
consorts X... tendant à la condamnation de la banque au paiement de dommages-intérêts, fondé
sur le comportement fautif de cette dernière, en raison de l’autorité de la chose jugée attachée
au jugement du 17 mars 1995 ayant condamné les cautions au paiement de la dette principale,
la cour d’appel retient notamment que, poursuivis en paiement par la banque au cours de
l’instance initiale, les cautions n’avaient formé aucune demande reconventionnelle tirée de
l’article 2037 du code civil ou d’un comportement fautif de la banque, tandis qu’elles auraient pu
découvrir les faits de nature à justifier une telle demande ; qu’en statuant ainsi, alors que les
consorts X... n’avaient aucune obligation de mettre en jeu la responsabilité de la banque dès
l’instance ayant abouti à leur condamnation au paiement en qualité de cautions, la cour d’appel
a violé les articles 1 et 4 du code de procédure civile, ensemble l’article 6 § 1 de la Convention
européenne des droits de l’homme ;
Mais attendu qu’il appartenait aux consorts X... de présenter dès l’instance initiale l’ensemble des
25
moyens qu’ils estimaient de nature à justifier le rejet total ou partiel de la demande ; qu’ayant
relevé que, poursuivis en exécution de leurs engagements de caution, les consorts X... n’avaient
développé lors de l’instance initiale que des contestations relatives à la validité et à la portée de
ces engagements sans faire valoir que la banque avait engagé sa responsabilité civile à leur égard
et devait être condamnée à leur payer des dommages-intérêts qui viendraient en compensation
avec les condamnations prononcées à leur encontre, la cour d’appel en a exactement déduit
qu’était irrecevable la demande dont elle était saisie, qui ne tendait qu’à remettre en cause, par
un nouveau moyen qui n’avait pas été formé en temps utile, la condamnation irrévocable
prononcée à leur encontre ; que le moyen n’est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;
4. Civ. 3e, 17 juin 2015, n° 14-14.372
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 14 janvier 2014), rendu en matière de référé, que M. et Mme
X... ont conclu un contrat de construction de maison individuelle avec la société Babeau Seguin ;
qu'à la demande des maîtres d'ouvrage, un précédent arrêt a annulé le contrat et condamné la
société Babeau Seguin à leur restituer les sommes qu'ils avaient versées ; que cette société a
assigné M. et Mme X... pour obtenir l'organisation d'une expertise visant à déterminer la valeur
de la maison conservée par les maîtres de l'ouvrage et le versement d'une provision ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. et Mme X... font grief à l'arrêt de déclarer recevables les demandes de la société
Babeau Seguin, alors, selon le moyen, qu'il incombe aux parties de présenter dans la même
instance toutes les demandes fondées sur la même cause et qu'elles ne peuvent invoquer dans
une instance postérieure un fondement juridique qu'elles s'étaient abstenues de soulever en
temps utile ; qu'en jugeant, après avoir constaté que la cour d'appel avait statué sur la demande
de restitution des époux X... et condamné le constructeur à leur verser, à ce titre, la somme de
114 646, 50 euros, qu'ils ne pouvaient opposer à la société Babeau Seguin « le principe de
concentration des moyens dès lors que la société adverse n'invoque pas un nouveau moyen à
l'appui d'une demande mais une nouvelle demande qui n'a pas été présentée dans le cadre de
l'instance en nullité du contrat ayant abouti à l'arrêt de la cour d'appel » du 13 juin 2012 ni «
aucune autorité de chose jugée », bien qu'il eût appartenu au constructeur de présenter cette
demande, relative à la nullité et aux restitutions, pour s'opposer à la demande de restitution
formulée par les maîtres de l'ouvrage dans cette instance et fonder ses demandes indemnitaires,
la cour d'appel a violé les articles 1351 du code civil et 480 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant constaté que la cour d'appel n'avait statué que sur la demande de nullité
du contrat de construction de maison individuelle et la demande de restitution des sommes
versées au constructeur en exécution du contrat et ne s'était pas prononcée sur le
remboursement éventuel des prestations fournies par la société Babeau Seguin et retenu que
cette société, qui sollicitait le versement d'une provision à valoir sur le coût de ses prestations,
n'invoquait pas un nouveau moyen à l'appui d'une demande, mais formait une nouvelle
demande, la cour d'appel en a exactement déduit, sans violer le principe de l'autorité de la chose
jugée, que les demandes de la société Babeau Seguin étaient recevables ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
26
de ce qui fait l’objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même, que la demande
soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles
et contre elles en la même qualité.” Dans le cas présent la SA CA CONSUMER FINANCE soulève
l’irrecevabilité des demandes de M. I... S... et Mme U... R... épouse S... car elles sont fondées sur
le même contrat de prêt que celui pour lequel le tribunal de grande instance de Draguignan a déjà
statué le 20 mai 2015 qui est quant à lui revêtu de l’autorité de la chose jugée. Par des motifs
pertinents que la cour adopte le premier juge a considéré à bon droit que le jugement
précédemment rendu par le tribunal de grande instance de Draguignan a bien statué sur la même
cause puisque c’est le même contrat de prêt dont il a été sollicité l’application par les mêmes
parties, et alors que l’état de M. S... avait bien été consolidé en 2003, soit bien avant que le
jugement soit rendu de telle manière que les demandeurs ne peuvent faire valoir aucune
circonstance nouvelle. Surabondamment il convient de souligner qu’il résulte d’une jurisprudence
constante que la demande qui repose sur un fondement juridique que le demandeur s’était
abstenue de soulever en temps utile (s’agissant ici d’une demande visant à obtenir la nullité du
contrat) se heurte à la chose précédemment jugée relativement à la même contestation, le
demandeur devant présenter dès l’instance relative à la première demande l’ensemble des
demandes qu’il estime de nature à fonder celle-ci. Il convient dès lors au regard de l’autorité de
la chose jugée s’attachant au jugement du tribunal de grande instance de Draguignan en date du
20 mai 2015, de confirmer le jugement querellé en ce qu’il a déclaré irrecevables les demandes
formées par M. I... S... et Mme U... R... épouse S... » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « l’article 1351 du code civil définit l’autorité de chose jugée
comme celle ayant fait [’objet d’un jugement sur la même chose demandée, la même cause et les
mêmes parties ; que la nouvelle demande qui invoque un fondement juridique que le demandeur
s’était abstenu de soulever en temps utile se heurte à la chose précédemment jugée relativement
à la même contestation, le demandeur devant présenter, dès l’instance relative à la première
demande, l’ensemble des moyens qu’il estime de nature à fonder celle-ci ; que les demandeurs
ne peuvent contester l’identité de cause des deux demandes (le contrat de prêt d’espèce) en
invoquant un fondement juridique qu’ils s’étaient abstenus de soulever lors de la première
instance, ce d’autant que les faits à l’origine du fondement existaient déjà de sorte que les
circonstances n’ont pas été modifiées ultérieurement ; qu’en l’espèce le jugement
précédemment rendu par le tribunal de grande instance a bien statué sur la même cause puisque
c’est le même contrat de prêt dont il a été sollicité l’application par les mêmes parties, et alors
que l’état de monsieur S... avait déjà été consolidé en 2003 soit bien avant que le jugement soit
rendu de sorte que les demandeurs ne peuvent faire valoir aucune circonstance nouvelle ; que la
demande est donc irrecevable » ;
ALORS, premièrement, QUE pour déclarer irrecevable la demande des époux S... en nullité du
prêt de 75 000 € et en restitutions corrélatives, comme se heurtant à l’autorité de chose jugée
par le tribunal de grande instance de Draguignan dans son jugement du 20 mai 2015, les juges du
fond ont considéré que les exposants avaient la qualité de demandeurs ; qu’en statuant ainsi,
quand il résulte des énonciations de ce jugement que les époux S... étaient défendeurs à la
demande de la société CA consumer finance tendant à leur condamnation à payer les sommes
dues au titre de ce prêt,, la cour d’appel a dénaturé ledit jugement du 20 mai 2015 en violation
de son obligation de ne pas dénaturer les documents de la cause ;
30
ALORS, deuxièmement, QU’en déclarant irrecevable la demande des époux S... tendant à
l’annulation du prêt de 75 000 € et aux restitutions corrélatives au prétexte qu’elle aurait dû être
formulée durant l’instance où l’exécution du prêt a été sollicitée et ayant donné lieu au jugement
du tribunal de grande instance de Draguignan du 20 mai 2015, quand les exposants, qui lors de
cette instance défendaient à la demande d’exécution du prêt émise par la banque, n’avaient pas
à formuler une demande reconventionnelle en nullité dudit prêt et en restitutions corrélatives, la
cour d’appel a violé l’autorité de chose jugée et l’article 1351, devenu 1355 du code civil.
Séance 6 Le jugement
==> Vous définirez les termes suivants : jugement, arrêt, ordonnance, force de chose jugée,
notification, signification, titre exécutoire.
==> Vous expliquerez les arrêts suivants sous forme de plan, détaillé, avec intitulés, et introduction
rédigée comprenant la relation des affaires sous forme de trame générale, et la ou les
problématiques qu’elles semblent poser. Vous pourrez procéder à un plan et à une introduction
groupés si vous l’estimez opportun et pouvez le justifier.
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir inclus dans le plan de redressement la créance de la
banque fixée par le jugement du tribunal de commerce de Paris dont il soulevait la nullité ;
Mais attendu que l'irrégularité dont peut être entachée une décision judiciaire, celle-ci eût-elle
même été prononcée hors des limites de la compétence de la juridiction saisie, ne fait pas
obstacle à ce que cette décision acquière l'autorité de la chose jugée, si elle n'a pas été attaquée
par les voies de recours ; qu'ayant constaté qu'aucune voie de recours n'avait été exercée à
l'encontre du jugement du tribunal de commerce du 29 avril 1994, la cour d'appel n'avait pas à
répondre aux moyens tirés d'une prétendue nullité de cette décision ;
D'où il suit que le moyen est inopérant ;
31
fondé à réclamer la résolution du bail, la décharge des loyers, la condamnation de Claude Y... ou de sa
société Remi à lui rembourser ses investissements et à lui payer des dommages et intérêts et a donc
demandé la compensation entre les sommes dues et les sommes qui lui étaient réclamées ; que la Cour
note encore que, par jugement du 19 décembre 1995, après avoir examiné les demandes
reconventionnelles d’Antoine X... et avoir conclu qu’elles étaient dépourvues de fondement au regard des
termes du contrat de bail et notamment de la portée réelle des obligations du bailleur, le tribunal
d’instance a énoncé dans son dispositif «qu’Antoine X... était mal fondé en toutes ses exceptions», et que,
faisant droit en revanche à la demande de Claude Y..., le tribunal a constaté la résiliation du bail, ordonné
l’expulsion du locataire, condamné l’EURL Antoine X... et Antoine X... à payer à Claude Y... 104 000 francs
d’arriérés de loyers, avec exécution provisoire de la décision ; qu’en cet état, la Cour observe que, si le
tribunal n’a pas expressément dit dans son dispositif «qu’il rejetait les demandes de M. X...», il n’en
demeure pas moins qu’en disant les exceptions d’inexécution et de compensation mal fondées et en
faisant intégralement droit à la demande de M. X..., le tribunal a implicitement mais nécessairement écarté
lesdites demandes ; que la Cour note d’ailleurs que M. X... ne s’est pas mépris sur la portée de cette
décision puisque, avant de se désister de son appel, M. Antoine X... a demandé à la Cour d’appel de Paris,
dans des conclusions en date du 14 mai 1996, d’infirmer les dispositions du jugement du 19 décembre
1995 le déboutant de ses demandes reconventionnelles ; que c’est donc en connaissance de cause
qu’ultérieurement, M. Antoine X... et l’EURL Antoine X... ont déclaré, par conclusions du 21 mai 1997, se
désister purement et simplement de leur appel (en conséquence de quoi le conseiller de la mise en état a
constaté, par ordonnance du 18 juin 1997, ledit désistement, l’extinction de l’instance et le
dessaisissement de la Cour) ; que cependant, par acte en date du 5 février 1999, Antoine X... a assigné
Claude Y... et la société Remi en vue de faire juger que, compte tenu des sommes que son bailleur lui devait
et qui venaient en compensation des sommes que ce dernier réclamait, la clause résolutoire n’avait jamais
été acquise et qu’il était dès lors fondé à demander la résolution du contrat et à réclamer l’indemnisation
de tous les investissements qu’il avait réalisés et, au soutien de ces prétentions, il a repris intégralement
son argumentation antérieure et a soutenu que son bailleur n’ayant pas respecté ses propres
engagements, il était fondé à réclamer la résolution du bail, la décharge des loyers, la condamnation de
Claude Y... ou de sa société Remi à lui rembourser ses investissements et à lui payer des dommages et
intérêts, et que les sommes qui lui étaient dues devaient venir en compensation des loyers au paiement
desquels il avait été condamné ; que force est de constater qu’hormis la demande dirigée contre la société
Remi (qui sera examinée ci-après), Antoine X... persiste à présenter une demande qui s’avère en tous
points identique à celle qu’il a présentée le 7 août 1995 et qui a donné lieu à une décision de rejet du 19
décembre 1995 alors que ladite demande vise toujours la même personne et qu’elle est toujours formée
en la même qualité : Antoine X... demande toujours la résolution du contrat aux torts du bailleur pour les
mêmes manquements aux mêmes obligations, la restitution de toutes les sommes qu’il a versées à
quelque titre que ce soit et, à titre de dommages et intérêts, le remboursement de toutes les dépenses
qu’il a faites et des pertes financières qu’il a subies (...)» (arrêt, p. 7, avant-dernier et dernier § et p.8) ;
ALORS QUE, premièrement, l’autorité de chose jugée ne peut être opposée que pour autant qu’il y a
identité entre l’objet de la demande sur laquelle il a été précédemment statué et l’objet de la demande
dont le juge est saisi ;
Qu’il résulte du jugement rendu le 19 décembre 1995 par le tribunal d’instance du 9e arrondissement de
Paris que ce dernier n’a statué que sur la demande de M. Y... tendant à faire constater l’acquisition de la
clause résolutoire et à obtenir le paiement de loyers arriérés ainsi que l’expulsion de l’EURL Antoine X... ;
que l’autorité de chose jugée attachée à cette décision ne pouvait dès lors faire obstacle à la demande
formée par M. X..., qui n’avait pas été soumise au tribunal d’instance du 9e arrondissement de Paris, visant
à l’octroi de dommages et intérêts ; qu’en décidant le contraire, les juges du fond ont violé l’article 1351
du code civil, ensemble l’article 480 du nouveau code de procédure civile ;
33
ALORS QUE, deuxièmement et en tout cas, faute d’avoir recherché si la demande en dommages et intérêts
formée par M. X... dans le cadre de la présente instance avait été soumise au tribunal d’instance du 9e
arrondissement de Paris quand il a rendu sa décision du 19 décembre 1995, les juges du fond ont privé
leur décision de base légale au regard de l’article 1351 du Code civil, ensemble au regard de l’article 480
du nouveau code de procédure civile.
fins sur le fondement de l’article 1147 du code précité, dans sa rédaction antérieure à celle issue
de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, le chirurgien-dentiste et l’assureur, qui ont
opposé une fin de non-recevoir tirée de l’autorité de la chose jugée ;
Sur la recevabilité du premier moyen, contestée par la défense :
Attendu, d’une part, que le moyen attaque, outre le chef de l’arrêt qui rejette la fin de non-
recevoir tirée de l’autorité de la chose jugée, la disposition condamnant le chirurgien-dentiste et
l’assureur à payer une indemnité à M. Y..., en réparation de ses préjudices ;
Attendu, d’autre part, que ce moyen, fondé sur le principe de concentration des moyens, est né
de la décision attaquée ;
D’où il suit que le moyen est recevable ;
Et sur ce moyen :
Vu l’article 1351 du code civil ;
Attendu qu’il incombe au demandeur de présenter dès l’instance relative à la première demande
l’ensemble des moyens qu’il estime de nature à fonder celle-ci ;
Attendu que, pour rejeter la fin de non-recevoir tirée de l’autorité de la chose jugée, déclarer M.
Y... recevable en ses demandes et accueillir ses prétentions tendant au paiement de différentes
sommes, l’arrêt relève que les deux instances ont été introduites sur des fondements différents,
de sorte qu’il n’y a pas identité de cause et que le chirurgien-dentiste et l’assureur ne peuvent se
prévaloir de l’autorité de la chose jugée du jugement du 2 juillet 2015 ;
Qu’en statuant ainsi, alors que la nouvelle demande formée par M. Y... entre les même parties,
avait le même objet et était fondée sur la même cause que la première demande, seul le
fondement juridique différant, de sorte qu’elle se heurtait à l’autorité de la chose jugée, la cour
d’appel a violé le texte susvisé ;
Et vu les articles L. 411-3 du code de l’organisation judiciaire et 1015 du code de procédure civile
;
Attendu que la cassation n’impliquant pas qu’il soit à nouveau statué sur le fond, il n’y a pas lieu
à renvoi ;
PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE dans toutes ses dispositions, l’arrêt ; Déclare irrecevables les
demandes de M. Y ;
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Richard, avocat aux Conseils, pour Mme X... et la société Le Sou
médical.
PREMIER MOYEN DE CASSATION
IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt attaqué d’avoir rejeté la fin de non-recevoir tirée de l’autorité de la
chose jugée attachée au jugement du Tribunal de grande instance de Valence du 2 juillet 2015 et
d’avoir, en conséquence, déclaré Monsieur Ludovic Y... recevable en ses demandes, puis d’avoir
condamné solidairement le Docteur Pascale X... et le SOU MEDICAL à lui payer la somme de 1.000
euros à titre de dommages-intérêts, en réparation de son préjudice d’agrément temporaire et
35
2. La notification du jugement
2.1 Cass. civ. 2e, 16 juin 2005, n° 03-18.982 P
REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :
Vu l’article l’article 503 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu qu’aux termes de ce texte, les jugements ne peuvent être exécutés contre ceux auxquels
ils sont opposés qu’après leur avoir été notifiés, à moins que l’exécution n’en soit volontaire ;
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que M. X..., a été condamné par une cour d’assises, statuant sur
les intérêts civils, à payer des dommages-intérêts à une victime de viols ; que le Fonds de garantie
des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions (le FGTI), après avoir versé à la victime
l’indemnité fixée par une commission d’indemnisation des victimes d’infractions, a fait pratiquer
une saisie-attribution sur un compte ouvert au nom de M. X... à La Poste, prise en qualité de tiers
saisi ; que M. X... a saisi le juge de l’exécution d’une demande tendant à voir déclarer nulle cette
saisie ;
36
Attendu que pour rejeter cette demande, l’arrêt énonce que la décision de la CIVI n’avait pas à
être signifiée à M. X... puisqu’il n’était pas partie à la procédure devant cette juridiction et que
cette procédure est dérogatoire à l’exigence de l’article 502 du nouveau Code de procédure civile
quant à la formule exécutoire puisque la décision de cette commission est exécutoire par elle-
même, mettant en oeuvre l’obligation de paiement qui incombe au FGTI, simple organisme
payeur ;
Qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt
Publication : Bulletin 2005 II N° 155 p. 137
Précédents jurisprudentiels : Sur la nécessité de procéder à la notification d’une décision de justice,
préalablement à son exécution forcée, à rapprocher : Chambre civile 2, 1995-03-15, Bulletin 1995,
II, n° 88 ; Chambre civile 2, 2004-01-29, Bulletin 2004, II, n° 33, et l’arrêt cité.
2.2 Civ 2e, 14 septembre 2006, n° 04-20.602
REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu les articles 502 et 503 du nouveau code de procédure civile ;
Attendu que la force de chose jugée attachée à une décision judiciaire dès son prononcé ne peut
avoir pour effet de priver une partie d’un droit tant que cette décision ne lui a pas été notifiée ;
Attendu, selon l’arrêt attaqué et les productions, qu’un juge aux affaires familiales a, par une
ordonnance de non-conciliation du 9 mai 2001, autorisé les époux X... à résider séparément,
attribué la jouissance du logement à l’épouse et dit que l’autre époux devra quitter les lieux au
plus tard le 15 juin 2001 ; que Mme Y ayant fait changer les serrures du logement, M. Z a saisi un
tribunal d’instance d’une demande de dommages-intérêts à raison du trouble de jouissance
résultant de la voie de fait commise par son épouse ; que M. Z a été débouté de ses demandes ;
Attendu que, pour confirmer le jugement, l’arrêt retient que l’ordonnance du juge aux affaires
familiales étant exécutoire de droit à titre provisoire dès son prononcé, M. Z... n’avait plus aucun
droit de demeurer dans l’appartement et Mme Y... avait le pouvoir de prendre les mesures lui
garantissant la libre jouissance des lieux, dont celle de changer les serrures ;
Qu’en statuant ainsi, alors que M. Z... soutenait que l’ordonnance de non-conciliation lui avait été
signifiée le 6 juin 2001 par un acte irrégulier et incomplet, la cour d’appel n’a pas donné de base
légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt…
3. L’exécution provisoire du jugement
3.1 Un bénéfice traditionnel pour le gagnant, mais avec des dangers :
3.1.1 : Civ. 2e, 10 sept. 2009, n° 08-18.683
REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Attendu, selon l’ordonnance attaquée rendue en référé par un premier président, qu’un
37
jugement assorti de l’exécution provisoire a condamné Mme X à payer diverses sommes d’une
part à M. Y, d’autre part au groupement foncier agricole du Château de Saint-Auriol qui a fait
pratiquer à son encontre plusieurs saisies-attributions ; que Mme X a demandé l’arrêt de
l’exécution provisoire du jugement ;
Sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :
Vu l’article 524 du code de procédure civile ;
Attendu que pour arrêter l’exécution provisoire du jugement, l’ordonnance se borne à retenir
que le paiement des sommes auxquelles Mme X... a été condamnée peut être très difficilement
récupéré en cas d’infirmation du jugement ;
Qu’en statuant par de tels motifs d’où il ne résulte pas que l’exécution provisoire risquait
d’entraîner pour la débitrice des conséquences manifestement excessives eu égard à ses facultés
de paiement ou aux facultés de remboursement du créancier, le premier président a violé le texte
susvisé ;
PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE l’ordonnance rendue par le premier président de la cour
d’appel de Montpellier ; remet la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ladite
ordonnance et les renvoie devant le premier président de la cour d’appel de Nîmes ;
3.1.2 : Cass. ass. plén., 24 févr. 2006, n°05-12.679
REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Sur le moyen unique :
Vu l’article 31 de la loi du 9 juillet 1991 ;
Attendu que l’exécution d’une décision de justice exécutoire à titre provisoire n’a lieu qu’aux
risques de celui qui la poursuit, à charge par lui, si le titre est ultérieurement modifié, d’en réparer
les conséquences dommageables ;
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que les époux X..., cessionnaires d’un fonds de commerce, ont
obtenu une ordonnance de référé enjoignant à M. Y... de cesser toute activité de livraison de fioul
et d’enlever sous astreinte tout élément permettant de procéder à cette vente ; que cette
décision ayant été infirmée, M. Y... a fait assigner les époux X... en réparation de son préjudice né
de l’exécution de l’ordonnance ; qu’un jugement a condamné les époux X... à payer des
dommages-intérêts à M. Y... ; que par arrêt du 10 juillet 2003 (2e Civ., Bull. 2003, II, n° 244), la
Cour de cassation a cassé la décision d’une cour d’appel ayant infirmé ce jugement et a renvoyé
l’affaire devant une autre cour ;
Attendu que pour rejeter la demande de M. Y..., l’arrêt retient que les époux X... n’ont effectué
aucun acte d’exécution forcée de l’ordonnance du 18 mai 1992, qui a été spontanément exécutée
par M. Y..., lequel, dès lors, ne peut obtenir réparation du préjudice qu’il a subi du fait de cette
exécution ;
Qu’en statuant ainsi, alors que l’ordonnance de référé ayant été signifiée à la requête des époux
X à M. Y le 29 mai 1992, ce dernier était tenu de l’exécuter, la cour d’appel a violé le texte susvisé
;
38
Cette systématisation ne devrait pas faire l’unanimité, car les oppositions ont toujours été fortes sur la
question. Du côté des tenants de la nouvelle solution de principe, l’argumentaire est connu. On peut lire
dans le Rapport Coulon de 1997 qu’il convient « dans un souci de bonne administration de la justice, par
l’exécution immédiate, de donner son plein effet au jugement rendu en première instance et de lutter
contre les recours dilatoires », et dans le rapport Agostini-Molfessis de 2018 que « la qualité du service
rendu au justiciable impose à la justice civile d’intégrer la dimension de l’exécution dans les décisions qu’elle
rend », « la revalorisation de la décision civile de première instance [devant] s’accompagner de l’inversion
du dispositif prévu par les articles 514 et suivants du code de procédure civile » (Rapp., p. 37-38). Du côté
des opposants, Roger Perrot, tout particulièrement, soulignait en 2002 que l’instrument d’une exécution
rapide existait déjà entre les mains du premier juge, qui, s’il l’estimait nécessaire, pouvait toujours
ordonner l’exécution provisoire, y compris d’office (Bull. inf. C. cass., Hors série, Rencontre Université-
Cour de cassation – La procédure civile, L’exécution provisoire, Bilan et perspectives – Débats, 14 juin
2002), et qu’aurait-il oublié de l’ordonner, ou l’aurait-il refusé, l’exécution provisoire pouvait encore être
demandée, en cas d’appel, au premier président statuant en référé, ou, dès lors qu’il était saisi, au
magistrat chargé de la mise en état (CPC, art. 525 et 525-1) ; et de conclure qu’une exécution provisoire
automatique incitant les praticiens à donner toute son importance au premier degré de juridiction,
revenait en réalité à décourager l’appel avec les dangers que cela comporte pour le justiciable condamné
si le premier juge s’est trompé.
Ces dangers ont effectivement été perçus, car l’exécution provisoire de droit nonobstant appel se heurte
de front au risque de non-représentation des fonds en cas de condamnation pécuniaire infirmée au second
degré, ou aux conséquences irréversibles de certaines mesures comme l’expulsion ou la démolition. Le
droit pour le justiciable de demander au premier président de la cour d’appel un sursis à exécution de la
décision attaquée constitue ici une garantie essentielle des droits de la défense, la généralisation de
l’exécution provisoire nonobstant appel n’étant tolérable que s’il est réellement possible d’obtenir le
sursis. On y reviendra plus loin, mais le décret du 11 décembre 2019 ne semble pas s’inscrire dans une
perspective large du cas d’ouverture.
Plus largement, même si les décisions de justice puisent leur efficacité dans leur exécution, l’exécution
provisoire de droit doit impérativement s’accompagner d’autres limites. Notamment, elle ne doit pas être
admise dans certains cas énumérés par la loi (par exemple en matière d’état et de capacité des personnes,
en matière familiale certaines décisions, en matière de divorce judiciaire la prestation compensatoire, ou
s’agissant des jugements en matière de filiation), et le juge de première instance doit pouvoir, d’office ou
à la demande des parties, l’écarter par une décision motivée, ou la subordonner à la constitution d’une
garantie par le bénéficiaire.
Avec l’instauration du principe de l’exécution provisoire de droit des décisions de première instance, de
telles soupapes de sécurité deviennent essentielles. Qu’en est-il dans le décret du 11 décembre 2019
réformant la procédure civile ?
Nouveau principe. Jusqu’au 1er janvier 2020, l’article 514 alinéa 1er disposait que « l’exécution ne peut pas
être poursuivie sans avoir été ordonnée si ce n’est pour les décisions qui en bénéficient de plein droit ». Or,
l’article 514 nouveau, en tête du chapitre consacré à l’exécution provisoire lui-même divisé, à partir des
articles 514-1 et suivants, en trois nouvelles sections, inverse ce principe, et dispose désormais que « les
décisions de première instance sont de droit exécutoire à titre provisoire à moins que la loi ou la décision
rendue n’en dispose autrement ». L’exécution est de plein droit mais reste une exécution provisoire,
d’origine légale, que dans le régime nouveau la loi ou le juge peuvent écarter. Le texte organise, on le voit,
une répartition des pouvoirs entre la loi et le juge. Si elle reste provisoire, l’exécution de droit se fait donc
toujours aux risques du créancier, particulièrement sous l’angle d’éventuelles mesures d’exécution forcée.
On sait que l’article L. 111-10, alinéa 1er, du code des procédures civiles d’exécution admet que l’exécution
forcée puisse « être poursuivie jusqu’à son terme en vertu d’un titre exécutoire à titre provisoire », et de ce
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point de vue son application est renforcée par le nouveau principe, mais, dans ce cadre, l’application de
son alinéa 2 aussi, qui souligne que « l’exécution est poursuivie aux risques du créancier ».
L’exécution provisoire de droit. C’est l’intitulé de la section 1 nouvelle du chapitre sur l’exécution
provisoire, articles 514-1 à 514-6, d’où il ressort, à première lecture, une place importante accordée au
juge dans le cadre légal, puisque c’est lui qui « peut écarter l’exécution provisoire de droit, en tout ou partie,
s’il estime qu’elle est incompatible avec la nature de l’affaire » (art. 514-1, al. 1). Cette faculté de mise à
l’écart ab initio par la décision en cause (CPC, art. 514-2), avec appréciation souveraine, est importante,
car dans le régime antérieur, s’agissant de l’exécution provisoire attachée de plein droit à une décision,
seul un arrêt était possible, par le premier président, « en cas de violation manifeste du principe du
contradictoire ou de l’article 12 et lorsque l’exécution risque d’entraîner des conséquences manifestement
excessives » (CPC, art. 524 ancien, dern. al.) ; où l’on voit, dans le nouveau régime, que l’exécution
provisoire de droit est légale par sa source, mais judiciaire dans sa mise en œuvre si le juge peut décider
de l’écarter : « à la demande d’une partie », et même « d’office » précise l’alinéa 2 de l’article 514-1, et en
tout cas « par décision spécialement motivée ». L’alinéa 3 de l’article 514-1 rappelle cependant
l’interdiction faite au juge d’écarter l’exécution provisoire de droit dans un certain nombre de cas : il en
est ainsi « lorsqu’il statue en référé, qu’il prescrit des mesures provisoires pour le cours de l’instance, qu’il
ordonne des mesures conservatoires ainsi que lorsqu’il accorde une provision au créancier en qualité de
juge de la mise en état ». Ces décisions sont exécutoires de droit à titre provisoire, comme dans l’ancien
article 514 alinéa 2, et sont sanctuarisées en tant que telles.
Comme il y a des dangers à une exécution immédiate, comme il y a quelque chose de brutal dans
l’automaticité de l’exécution de plein droit (V. déjà H. Croze, Bull. inf. C. cass., Hors série, préc., L’arrêt et
l’aménagement de l’exécution provisoire), il était capital de permettre un arrêt indirect de celle-ci par le
juge, en organisant un sursis à l’exécution de la décision. Mais la difficulté, ici, était d’imaginer un système
équilibré : le sursis à exécution devait constituer une véritable soupape de sécurité, mais le législateur a
voulu en limiter le fonctionnement, de manière à ce qu’il n’aboutisse pas à anéantir la nouvelle exécution
provisoire de droit des décisions de première instance, c’est-à-dire à restituer trop facilement à l’appel un
effet suspensif d’exécution. De fait, si le droit au sursis à exécution existe bien, dans l’article 514-3 du CPC,
devant le premier président en cas d’appel (Il existe aussi en cas d’opposition, l’alinéa 3 de l’article 514-3
disposant que dans ce cas, « le juge qui a rendu la décision peut, d’office ou à la demande d’une partie,
arrêter l’exécution provisoire de droit lorsqu’elle risque d’entraîner des conséquences manifestement
excessives »), les critères cumulatifs permettant de l’obtenir seront a priori rarement réunis.
Le premier de ces critères, l’expérience en a été faite avec les décisions rendues par le juge de
l’exécution. On sait qu’en cette matière, l’appel n’a pas d’effet suspensif (C. pr. exéc., art. R. 121-21), mais
qu’un sursis à l’exécution des décisions prises par le JEX peut être demandé, par assignation en référé au
premier président, qui ne l’accordera « que s’il existe des moyens sérieux d’annulation ou de réformation
de la décision déférée à la cour » (même texte, al. 3). Il est certain qu’un sursis à exécution n’a de sens que
s’il existe des moyens sérieux d’infirmation (ou d’annulation), mais on sait aussi qu’une telle demande
amène un premier président à se prononcer sur le caractère sérieux du moyen d’appel dans une affaire
dont il n’a aucune connaissance antérieure ; outre le temps que cela nécessite, un chef de juridiction est
a priori peu enclin à faire cet examen au fond des mérites de l’appel, et à anticiper, même à titre provisoire
et au niveau des apparences, sur ce qui sera ultérieurement jugé par la cour, au risque d’être contredit par
la formation collégiale appelée à statuer sur le fond (V. R. Perrot, obs. préc., et à la RTD civ. 2012, P. 774,
sous Civ. 2e, 28 juin 2012, n° 10-13.884). Bref, ce critère n’est pas d’un maniement simple, et son aspect
qualitatif propice au contentieux.
Mais ce n’est pas le seul, car aux termes de l’article 514-3, alinéa 1er, du CPC, le premier président ne
pourra arrêter l’exécution provisoire de la décision que si, en plus, elle « risque d’entraîner des
conséquences manifestement excessives » pour le débiteur, eu égard aux facultés de remboursement du
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créancier (V. Cass. Ass. plén., 2 nov. 1990, n° 90-12.698). Autant dire qu’avec un tel cumul, l’exécution
provisoire de principe des décisions de première instance sera rarement arrêtée, ce qui est sans doute le
vœu du législateur face aux recours, nombreux, qui seront portés devant le premier président en cas
d’appel. Précision qui a son importance : dans le cadre de ce recours devant le premier président, la
demande de la partie qui, comparante en première instance, n’avait pas fait valoir d’observations sur
l’exécution provisoire, ne sera recevable que si, outre l’existence d’un moyen sérieux d’annulation ou de
réformation, l’exécution provisoire risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives « qui
se sont révélées postérieurement à la décision de première instance » (même texte, al. 2). Le système est
encore plus verrouillé dans cette hypothèse de négligence ou d’oubli…
Reste globalement à savoir quelle sera, en amont, la réaction des juges de première instance face à une
exécution provisoire désormais automatique, et s’ils y verront une situation à problème les incitant à
écarter celle-ci, parce qu’ils l’estiment « incompatible avec la nature de l’affaire » aux termes de l’article
514-1, alinéa 1 du CPC. On peut regretter que le cas où l’exécution provisoire présenterait d’emblée un
risque de conséquences manifestement excessives n’ait pas été ajouté, cela aurait donné au juge un réel
pouvoir d’écarter l’exécution provisoire de droit…
L’application automatique de l’exécution provisoire des décisions de première instance peut aussi être
tempérée par des mécanismes de sauvegarde, qui remédient à son irréversibilité. Dans le décret du 11
décembre 2019, ces modalités d’aménagement revêtent une grande importance, et reposent sur des
techniques connues de constitution de garantie ou de consignation. C’est ainsi qu’aux termes de l’article
514-5, « le rejet de la demande tendant à voir écarter ou arrêter l’exécution provisoire de droit (et le
rétablissement de l’exécution provisoire de droit) peuvent être subordonnés, à la demande d’une partie ou
d’office, à la constitution d’une garantie, réelle ou personnelle, suffisante pour répondre de toutes
restitutions ou réparations ». Le risque de défaillance financière du créancier accipiens est ainsi conjuré.
Par ailleurs, l’article 521, alinéa 1, inséré dans la nouvelle section III : Dispositions communes (à l’exécution
provisoire de droit de la section I et à celle facultative de la section II), du chapitre sur l’exécution
provisoire, rappelle que « la partie condamnée au paiement de sommes autres que des aliments, des rentes
indemnitaires ou des provisions peut éviter que l’exécution provisoire soit poursuivie en consignant, sur
autorisation du juge, les espèces ou les valeurs suffisantes pour garantir, en principal, intérêts et frais, le
montant de la condamnation » (L’alinéa 2 de l’article 521 dispose comme auparavant qu’ « en cas de
condamnation au versement d’un capital en réparation d’un dommage corporel, le juge peut aussi
ordonner que ce capital sera confié à un séquestre à charge d’en verser périodiquement à la victime la part
que le juge détermine »). L’exécution est donc évitée en contrepartie d’une consignation par le débiteur
solvens.
Enfin, dans l’hypothèse où l’exécution provisoire de droit aurait été écartée, en tout ou partie, par la
décision de première instance qui l’aurait estimé incompatible avec la nature de l’affaire, la juridiction des
premiers présidents sera également sollicitée. En effet, le décret du 11 décembre 2019 donne au premier
président ou, dès lors qu’il est saisi, au magistrat chargé de la mise en état, dans le nouvel article 514-4 du
CPC, le pouvoir de la rétablir en cas d’appel, mais à des conditions très strictes puisque trois critères
cumulatifs doivent être réunis : il faut « qu’il y ait urgence, que ce rétablissement soit compatible avec la
nature de l’affaire et qu’il ne risque pas d’entraîner des conséquences manifestement excessives ». Autant
de limites : « urgence », « conséquences manifestement excessives », qui caractérisent la juridiction des
référés ; l’article 514-6 le confirme, qui dispose que lorsqu’il est saisi de la demande de rétablissement en
application de l’article 514-4, « le premier président statue en référé, par une décision non susceptible de
pourvoi ».
Il est difficile de tirer une conclusion sur le nouveau droit positif, mais il n’y a, a priori, que peu de
différences entre un système dans lequel le juge peut, même d’office, assortir sa décision de l’exécution
provisoire, et celui issu du décret du 11 décembre 2019 dans lequel l’exécution provisoire est de droit,
sauf au juge à l’écarter (En ce sens, obs. H. Croze, préc.). En revanche, la juridiction du premier président
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est appelée à jouer un rôle essentiel, car c’est d’elle que va dépendre, concrètement, la possibilité
d’arrêter l’exécution au travers des critères stricts et délicats de l’article 514-3, alinéa 1, du CPC…
L’exécution provisoire facultative. A côté de l’exécution provisoire de droit des décisions de première
instance, prévue par la section 1 du chapitre IV consacré à l’exécution provisoire (art. 514-1 à 514-6), le
décret du 11 décembre 2019 a organisé une section 2 relative à l’exécution provisoire facultative, articles
515 à 517-4. Il n’y a que peu d’intérêt à détailler ici un système qui est connu. Rappelons simplement la
nouvelle formulation de l’article 515, alinéa 1, du code de procédure civile : « lorsqu’il est prévu par la loi
que l’exécution provisoire est facultative, elle peut être ordonnée, d’office ou à la demande d’une partie,
chaque fois que le juge l’estime nécessaire et compatible avec la nature de l’affaire », et pour tout ou partie
de la décision. Elle peut bien sûr être subordonnée à la constitution d’une garantie suffisante pour
répondre d’éventuelles restitutions ou réparations (art. 517).
Il convient toutefois de noter, en matière d’arrêt, en cas d’appel, de l’exécution provisoire ordonnée, la
réunion obligatoire des deux critères cumulatifs déjà évoqués pour l’arrêt de l’exécution provisoire de
droit, c’est-à-dire que le premier président devra constater qu’il « existe un moyen sérieux d’annulation ou
de réformation de la décision et que l’exécution risque d’entraîner des conséquences manifestement
excessives » (CPC, art. 517-1, 2°). Son office est donc ici aussi étendu, avec le même risque de pré-jugement
de l’appel. Jusqu’au 1er janvier 2020, seul le risque de conséquences manifestement excessives était
nécessaire.
A noter également que le même pouvoir appartient, en cas d’opposition, au juge qui a rendu la décision,
« lorsque l’exécution risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives » (même texte, al. 2).
Les autres dispositions restent identiques même si leur numérotation change.
Exceptions à l’exécution provisoire de droit. Le décret du 11 décembre 2019 a également prévu un certain
nombre d’exceptions à l’exécution provisoire de droit, par ajout de dispositions nouvelles à des textes
existants.
En matière de nationalité des personnes physiques, l’article 1045 disposait déjà que « le délai de pourvoi
en cassation suspend l’exécution de l’arrêt qui statue sur la nationalité ; le pourvoi en cassation exercé
dans ce délai est également suspensif » ; le décret de 2019 insère un premier alinéa à ce texte, précisant
que « le jugement qui statue sur la nationalité n’est pas de droit exécutoire à titre provisoire ». C’est la
même chose : - s’agissant des actes de l’état civil, où, à propos de la rectification et de l’annulation
judiciaire, le nouvel article 1054-1 décide que la décision qui ordonne la modification « n’est pas de droit
exécutoire à titre provisoire » ; - s’agissant des procédures relatives au prénom (art. 1055-3, second al.
nouv.) ; - s’agissant de la modification de la mention du sexe dans les actes de l’état civil (art. 1055-10
nouv.) ; - en matière de déclaration d’absence (art. 1067-1 nouv.) ; - dans la procédure en matière
familiale, où l’article 1074-1 est modifié, un alinéa premier nouveau venant préciser qu’ « à moins qu’il
n’en soit disposé autrement, les décisions du juge aux affaires familiales qui mettent fin à l’instance ne sont
pas, de droit, exécutoires à titre provisoire » (en revanche, « par exception », les mesures portant
notamment sur la pension alimentaire, la contribution à l’entretien et à l’éducation de l’enfant et la
contribution aux charges du mariage, ainsi que toutes les mesures prises en application de l’article 255 du
code civil, sont exécutoires de droit à titre provisoire (CPC, art. 1074-1, al. 2) ; - en matière d’actions
relatives à la filiation et aux subsides, le deuxième alinéa de l’article 1149, complété, posant expressément
le principe que le jugement « n’est pas de droit exécutoire à titre provisoire » ; - dans les dispositions
communes à l’adoption, enfin, un nouvel alinéa étant inséré au début de l’article 1178-1 pour affirmer la
règle que « la décision relative à l’adoption n’est pas de droit exécutoire à titre provisoire ».
(…).
Attendu que l’appel remet la chose jugée en question devant la juridiction d’appel pour qu’il soit
à nouveau statué en fait et en droit ;
Attendu que l’arrêt, constatant qu’une expertise a été ordonnée par le tribunal de grande
instance, dit qu’il appartiendra à M. X..., assisté de sa curatrice, de chiffrer devant le premier juge
qui a renvoyé l’affaire à la mise en état pour l’évaluation de son préjudice corporel sa demande
d’indemnisation des conséquences corporelles de l’accident du 2 mai 1995 au vu des
constatations médico-légales du professeur Z... et du docteur A... dans leur rapport du 9
décembre 2003 ;
Qu’en statuant ainsi, la cour d’appel, qui était saisie de l’entier litige par l’appel général interjeté,
a méconnu l’étendue de ses pouvoirs et violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE…
1. Selon l’arrêt attaqué (Rouen, 20 mars 2019), un jugement du 21 septembre 2017 a condamné
la société Siloge à payer une certaine somme à la société Normafi et a débouté ces deux sociétés
de leurs autres demandes.
2. La société Normafi ayant interjeté appel de cette décision, la société Siloge a soutenu que la
cour d’appel n’était saisie d’aucune demande, faute pour l’appelante d’avoir indiqué dans la
déclaration d’appel les chefs du jugement critiqués.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en ses cinquième et sixième branches, ci-après annexé (…)
Enoncé du moyen
4. La société Normafi fait grief à l’arrêt de « constater l’absence d’effet dévolutif de l’appel, la cour
n’étant saisie d’aucune demande de la société Normafi tendant à voir réformer ou infirmer telle
ou telle disposition du jugement entrepris », et dire en conséquence n’y avoir lieu de statuer sur
son appel principal, alors :
1° / que l’appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu’il critique
expressément ; que la déclaration d’appel de la société Normafi indiquait expressément que ce
dernier tendait à la « réformation et/ou annulation de la décision sur les chefs » relatifs aux
demandes qu’elle énumérait, de sorte que l’appel avait déféré à la cour la connaissance de ces
chefs du jugement ; qu’en retenant qu’elle n’aurait été saisie d’aucune demande de la société
45
Normafi tendant à voir réformer « telle ou telle disposition du jugement entrepris », la cour
d’appel a violé les articles 4 et 562 du code de procédure civile ;
2°/ que le juge a l’obligation de ne pas dénaturer l’écrit qui lui est soumis ; que la déclaration
d’appel définissait expressément l’objet de l’appel dans les termes suivants : « réformation et/ou
annulation de la décision sur les chefs suivants : appel aux fins de voir : - prononcer le sursis à
statuer - débouter la SA Siloge de toutes ses demandes - constater que les PV de réception ont été
établis le 2 mars 2012 - prononcer la réception judiciaire du chantier au 2 mars 2012 - condamner
la SA Siloge à transmettre les PV datés du 2 mars 2012, sous astreinte - constater que la SA Siloge
reconnaît devoir 95 452,08 euros - écarter toute compensation - ordonner la consignation sous
astreinte de 132 000 euros », soit les demandes de la société Normafi rejetées par le jugement et
donc, les chefs du jugement par lesquels la société Normafi avait été déboutée de ces demandes ;
qu’en retenant que la déclaration d’appel se serait bornée à énumérer certaines demandes de
l’appelante, sans qu’il soit « aucunement fait référence » aux chefs du jugement critiqués, la cour
d’appel a dénaturé cet acte et violé le principe susvisé ;
3°/ qu’en tout état de cause, la seule sanction attachée à l’absence de mention, dans la déclaration
d’appel, des chefs du jugement critiqués, consiste dans la nullité de l’acte pour vice de forme,
l’article 562 du code de procédure civile n’édictant aucune fin de non-recevoir ; qu’en déniant à
l’appel tout effet dévolutif, sans avoir caractérisé la nullité de la déclaration d’appel, la cour
d’appel a violé les articles 562 et 901 4° du code de procédure civile ;
4°/ qu’en toute hypothèse, les limitations apportées au droit d’accès au juge doivent être
proportionnées à l’objectif visé ; qu’en retenant, pour dire qu’elle n’était saisie d’aucune demande
tendant à voir réformer le jugement, que la déclaration d’appel se bornait à énumérer des
demandes de l’appelante, sans qu’il soit fait référence aux chefs du jugement critiqués, quand le
visa, au titre des chefs critiqués, des demandes dont l’appelante avait été déboutée par le tribunal
de commerce, ne laissait subsister aucun doute sur l’objet de l’appel, qui critiquait ainsi sans
ambiguïté le chef par lequel le jugement avait débouté la société Normafi de ces demandes, la
cour d’appel, procédant à une application excessivement formaliste de l’article 562 du code de
procédure civile, a porté une atteinte disproportionnée au droit d’accès au juge, au point de
l’atteindre dans sa substance même, et a violé l’article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des
droits de l’homme et des libertés fondamentales.
Réponse de la Cour
5. En vertu de l’article 562 du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n° 2017-
891 du 6 mai 2017, l’appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu’il critique
expressément et de ceux qui en dépendent, la dévolution ne s’opérant pour le tout que lorsque
l’appel tend à l’annulation du jugement ou si l’objet du litige est indivisible.
6. En outre, seul l’acte d’appel opère la dévolution des chefs critiqués du jugement.
46
8. Par ailleurs, la déclaration d’appel affectée d’une irrégularité, en ce qu’elle ne mentionne pas
les chefs du jugement attaqués, peut être régularisée par une nouvelle déclaration d’appel, dans
le délai imparti à l’appelant pour conclure au fond conformément à l’article 910-4, alinéa 1, du
code de procédure civile.
9. Ces règles encadrant les conditions d’exercice du droit d’appel dans les procédures dans
lesquelles l’appelant est représenté par un professionnel du droit, sont dépourvues d’ambiguïté
et concourent à une bonne administration de la justice en assurant la sécurité juridique de cette
procédure. Elles ne portent donc pas atteinte, en elles-mêmes, à la substance du droit d’accès au
juge d’appel.
10. Dès lors, la cour d’appel, ayant constaté que la déclaration d’appel se bornait à solliciter la
réformation et/ou l’annulation de la décision sur les chefs qu’elle énumérait et que l’énumération
ne comportait que l’énoncé des demandes formulées devant le premier juge, en a déduit à bon
droit, sans dénaturer la déclaration d’appel et sans méconnaître les dispositions de l’article 6, §
1, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, qu’elle
n’était saisie d’aucun chef du dispositif du jugement.
Faits et procédure
1. Selon l’arrêt attaqué (Dijon, 29 novembre 2018), un tribunal des affaires de sécurité sociale,
saisi d’une opposition formée par M. E... contre une contrainte émise à son encontre par la caisse
du régime social des indépendants, devenue la caisse locale déléguée à la sécurité sociale des
indépendants de Bourgogne-Franche-Comté (la caisse), a validé cette contrainte et condamné,
en conséquence, M. E... à verser une certaine somme à cette caisse.
2. M. E... a relevé appel de ce jugement par une déclaration indiquant former un « appel en nullité
» puis, a demandé, à l’audience de la cour d’appel, l’annulation de la contrainte pour les motifs
qu’il avait invoqués devant le premier juge.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
4. M. E... fait grief à l’arrêt de le débouter de sa demande d’annulation du jugement et de dire en
47
conséquence que le jugement rendu le 9 janvier 2018 par le tribunal des affaires de sécurité
sociale de Dijon produira tous ses effets alors « que lorsque l’appel porte sur la nullité du
jugement et non sur celle de l’acte introductif d’instance, la cour d’appel, saisie de l’entier litige
par l’effet dévolutif de l’appel, est tenue de statuer sur le fond quelle que soit sa décision sur la
nullité ; qu’en se contentant de se prononcer sur la demande tendant à l’annulation du jugement
et, à ce titre, de juger non fondé le moyen tiré de l’absence de partialité du tribunal des affaires
de sécurité sociale, la cour d’appel, qui n’a pas statué sur le fond de la contestation, ce dont elle
était pourtant tenue, a violé l’article 562, alinéa 2, du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 561 et 562, alinéa 2, du code de procédure civile, ensemble l’article 549 du même
code :
5. Lorsqu’un appel porte sur la nullité du jugement et non sur celle de l’acte introductif d’instance,
la cour d’appel, saisie de l’entier litige par l’effet dévolutif de l’appel, est tenue de statuer sur le
fond quelle que soit sa décision sur la nullité.
6. Pour dire que le jugement déféré produira tous ses effets, l’arrêt retient que l’appelant a fait
le choix de ne poursuivre que l’annulation du jugement par la voie de son appel, de sorte qu’il
n’est pas en droit d’étendre ultérieurement cet appel à une demande de réformation de ce
jugement en l’absence d’appel incident de l’Urssaf, qui exclut l’application de l’article 549 du code
de procédure civile permettant à une partie, même si elle a été l’auteur d’un appel principal, de
former un appel incident à condition qu’il ait été provoqué par l’appel d’une autre partie.
7. En statuant ainsi, alors qu’elle était saisie d’un appel tendant à l’annulation du jugement, ce
dont il résultait qu’en réitérant les moyens qu’il avait soumis au premier juge l’appelant ne
formait pas un appel incident, la cour d’appel, qui n’a pas statué sur le fond, a violé les textes
susvisés.
Portée et conséquences de la cassation
8. Le premier moyen ne formulant aucune critique contre les motifs de l’arrêt fondant la décision
de débouter M. E... de sa demande d’annulation du jugement, la cassation ne peut s’étendre à
cette disposition de l’arrêt qui n’est pas dans un lien de dépendance avec les dispositions de
l’arrêt critiqués par ce moyen.
9. La cassation à intervenir sur le premier moyen entraîne, toutefois, par voie de conséquence, la
cassation des chefs de dispositif qui « déclare irrecevable l’appel incident, formé oralement à
l’audience, tendant à la réformation du jugement » et « condamne M. E... à payer le droit prévu
à l’article R. 144-10 du code de la sécurité sociale et liquide le montant de ce droit à la somme de
331 euros ».
PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il dit que le jugement
rendu le 9 janvier 2018 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Dijon produira tous ses
effets, déclare irrecevable l’appel incident, formé oralement à l’audience, tendant à la
réformation du jugement, condamne M. E... à payer le droit prévu à l’article R. 144-10 du code de
la sécurité sociale et liquide le montant de ce droit à la somme de 331 euros, l’arrêt rendu le 29
novembre 2018, entre les parties, par la cour d’appel de Dijon ;
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Remet, sur ces points, l’affaire et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant cet arrêt et
les renvoie devant la cour d’appel de Besançon ;
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
PREMIER MOYEN DE CASSATION
M. E... fait grief à l’arrêt attaqué de l’avoir débouté de sa demande d’annulation du jugement et
d’avoir en conséquent dit que le jugement rendu le 9 janvier 2018 par le tribunal des affaires de
sécurité sociale de Dijon produira tous ses effets ;
AUX MOTIFS QUE le président a, à l’audience, attiré l’attention des parties sur le fait qu’un «
appel-nullité » ne tendait qu’à l’annulation du jugement et non à sa réformation, et leur a
demandé de présenter leurs observations sur la possibilité d’ajouter à l’audience une demande
de réformation ; que M. E... a indiqué avoir utilisé un formulaire obtenu auprès d’un groupement
dont il est membre ; que la déclaration d’appel est ainsi rédigée : « Je fais appel en NULLITE du
jugement du 9/01/2018 ... L’appel nullité est de droit quand sont portées des atteintes graves aux
droits fondamentaux. Tel est le cas, le tribunal ayant fait preuve d’une partialité systématique à
l’avantage de mon adversaire en refusant d’appliquer les dispositions européennes et les lois
françaises qui les ont transposées, violant ainsi les dispositions de la constitution française et de
la Convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales qui donnent à
tout justiciable le droit d’un tribunal impartial » ; qu’aux termes de l’article 542 du code de
procédure civile, l’appel tend, par la critique du jugement rendu par une juridiction du premier
degré, à sa réformation ou à son annulation par la cour d’appel ; que M E... s’est en réalité situé
dans ce cadre légal et non dans celui de l’appel-nullité permis seulement, alors qu’aucun recours
n’est normalement ouvert, en cas d’excès de pouvoir commis par une juridiction ; que son appel
est donc recevable ; que M E... a fait le choix de ne poursuivre que l’annulation du jugement par
la voie de son appel ; qu’il n’est pas en droit d’étendre maintenant cet appel à une demande de
réformation de ce jugement ; que l’URSSAF ne forme aucun appel incident puisqu’elle demande
au fond la confirmation du jugement ; qu’il n’y a donc pas lieu à application de l’article 549 du
code de procédure civile qui permet à une partie, même si elle a été l’auteur d’un appel principal,
de former un appel incident à condition qu’il ait été provoqué par l’appel d’une autre partiel ; que
le tribunal des affaires de sécurité sociale a loyalement exposé les arguments de fait et de droit
soutenus par M E... et y a répondu : - au sujet de la qualité juridique du RSI, en retenant, après
rappel des dispositions des articles L.111-2-2 et L.111-1 du code de la sécurité sociale et des
directives communautaires assurances n°92/96 et 92/49, que chaque Etat restait libre d’organiser
son propre système de protection obligatoire, que le principe de mise en concurrence ne
concernait pas la protection sociale obligatoire et que l’affiliation à un régime de sécurité sociale
conformément à la législation nationale applicable était et demeurait obligatoire, - en ajoutant
qu’en tant qu’organisme légal de sécurité sociale, le RSI ne relevait pas du code de la mutualité, -
au sujet de la capacité des caisses du RSI à ester en justice, qu’elles avaient la personnalité morale
conformément à l’article L.611-3 du code de la sécurité sociale, que l’article L.133-6-4 ancien lui
avait confié le recouvrement amiable ou contentieux des cotisations, que l’article R.631-2 avait
organisé les relations entre caisse nationale et caisses de bases et que les caisses, non créées par
arrêté préfectoral, tenaient de plein droit de la loi capacité et qualité à agir, - au sujet de la
contrainte, face au décompte précis et détaillé des cotisations dues, que M E... ne démontrait
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aucunement l’existence d’une erreur sur les revenus pris en compte et le calcul des cotisations ;
que le tribunal a ainsi statué par une motivation suffisamment développée ; qu’il ne résulte pas
des termes même de son jugement que ni l’interprétation ni l’application qu’il a faites des règles
juridiques invoquées ait pu dégénérer en une quelconque partialité en faveur du RSI ; que M E...
n’apporte pas d’autres éléments susceptibles de le faire présumer ; que les arrêts de la Cour de
justice des communautés européennes dont se prévaut l’URSSAF sont plutôt de nature à
conforter l’appréciation du tribunal : - dans son arrêt du 7 février 1984 (Duphar BV et autres
contre Etat néerlandais., affaire 238/82), cette cour a posé pour principe (considérant n°16) que
le droit communautaire ne portait pas atteinte à la compétence des Etats membres pour
aménager leurs systèmes de sécurité sociale, ici en matière de dispositions destinées à régler la
consommation de produits pharmaceutiques dans l’intérêt de l’équilibre financier de leurs
régimes d’assurance de soins de santé, - plus nettement dans son arrêt du 26 mars 1996 (L... B...
e.a. contre Mutuelle de prévoyance sociale d’Aquitaine e.a., n°C-238/94) dont le sommaire
indique que : « l’article 2, paragraphe 2, de la directive 92/49, portant coordination des
dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l’assurance directe autre
que l’assurance sur la vie et modifiant les directives 73/239 et 88/357, doit être interprété en ce
sens que des régimes de sécurité sociale, tels que les régimes légaux de sécurité sociale français
dont relèvent l’assurance maladie et maternité des travailleurs non salariés des professions non
agricoles, l’assurance vieillesse des professions artisanales et l’assurance vieillesse des
professions industrielles et commerciales, sont exclus du champ d’application de la directive
92/49. En effet, cette disposition établit clairement qu’elle exclut du champ d’application de la
directive non seulement les organismes de sécurité sociale, mais également les assurances et les
opérations qu’ils effectuent à ce titre. En outre, les États membres ont conservé leur compétence
pour aménager leurs systèmes de sécurité sociale, et donc pour organiser des régimes
obligatoires fondés sur la solidarité, régimes qui ne pourraient survivre si la directive qui implique
la suppression de l’obligation d’affiliation devait leur être appliquée » ; que si M E... demeure libre
de la contester, l’adoption de cette solution par le tribunal ne peut pas être considérée comme
une marque de partialité ; qu’en conséquence, M E... doit être débouté de sa demande
d’annulation du jugement ;
ALORS QUE lorsque l’appel porte sur la nullité du jugement et non sur celle de l’acte introductif
d’instance, la cour d’appel, saisie de l’entier litige par l’effet dévolutif de l’appel, est tenue de
statuer sur le fond quelle que soit sa décision sur la nullité ; qu’en se contentant de se prononcer
sur la demande tendant à l’annulation du jugement et, à ce titre, de juger non fondé le moyen
tiré de l’absence de partialité du tribunal des affaires de sécurité sociale, la cour d’appel, qui n’a
pas statué sur le fond de la contestation, ce dont elle était pourtant tenue, a violé l’article 562,
alinéa 2, du code de procédure civile.