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Droit des personnes

Stéphanie Mauclair

Maître de conférences HDR, Droit privé et sciences criminel es.


Directeur, Institut d’études judiciaires d’Orléans

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Dans la même collection aux éditions Ellipses

ISBN 9782340-033689

© Ellipses Édition Marketing S.A., 2019

32, rue Bargue 75740 Paris cedex 15

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SOMMAIRE

Introduction. La notion de personne


.................................................................................................5

Titre 1. L’existence de la personne

Chapitre 1. L’acquisition de la personnalité


.....................................................................................11

Section 1. Le moment de l’acquisition de la personnalité


................................................. 11

Section 2. L’extension de la personnalité


................................................................................ 13

Chapitre 2. Les effets de la personnalité


..........................................................................................17

Section 1. Le droit au respect de l’intégrité morale de la personne


..............................19
Section 2. Le droit au respect de l’intégrité physique de la
personne..........................26

Chapitre 3. La perte de la personnalité


.............................................................................................35

Section 1. L’absence et la disparition


.........................................................................................35

Section 2. La fin de la personnalité


............................................................................................41

Titre 2. L’identification de la personne

Chapitre 1. Le nom
..........................................................................................................................
.......53

Section 1. L’attribution du nom


...................................................................................................53

Section 2. L’utilisation du
nom.....................................................................................................56

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Chapitre 2. Les accessoires et compléments du nom


.................................................................. 63

Section 1. Le prénom
......................................................................................................................63

Section 2. Les pseudonymes, particules et titres de


noblesse.........................................67

Chapitre 3. Le sexe
..........................................................................................................................
.......71

Section 1. L’assignation
...................................................................................................................71

Section 2. La rectification
..............................................................................................................72

Chapitre 4. Le domicile
.........................................................................................................................
79

Section 1. La détermination du domicile


.................................................................................79

Section 2. L’unicité du domicile


...................................................................................................84

Chapitre 5. Les actes de l’état civil


......................................................................................................87

Section 1. L’établissement de l’acte de l’état civil


.................................................................87

Section 2. L’utilisation de l’acte de l’état civil


..........................................................................91

Section 3. La destruction de l’acte de l’état civil


...................................................................93

Titre 3. La protection de la personne

Chapitre 1. La protection des mineurs


............................................................................................. 99

Section 1. Les mineurs non émancipés


....................................................................................99
Section 2. Les mineurs émancipés
...........................................................................................109

Chapitre 2. La protection des majeurs


............................................................................................117

Section préliminaire. Les principes


directeurs..................................................................... 117

Section 1. La protection judiciaire du majeur


......................................................................121

Section 2. La protection non judiciaire du majeur


.............................................................132

Table des matières


................................................................................................145

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Introduction

La notion de personne

De prime abord, il peut paraître aisé de définir ce que l’on entend par
personne (§1) Toutefois, la tâche n’est pas si simple en effet, de plus en plus
de personnes revendiquent pour ce qui n’était jusqu’alors que des choses la
personnification (§2).

§ 1. La personne

Dans le langage quotidien, le mot personne désigne un être rationnel et


conscient de soi-même, qui possède une identité qui lui est propre. De son
côté, le droit français se structure autour d’une distinction fondamentale
entre celle des personnes (catégorie principale) et des choses (catégorie
résiduelle).
Le mot personne désigne alors à la fois la personne humaine, l’être humain,
et la personne juridique, c’est-à-dire l’être investi de la personnalité
juridique, qualité juridique attribuée par le droit aux individus, ou aux
groupes d’individus, et qui leur donne la capacité juridique.

L’un des éléments clefs pour désigner une personne serait la volonté libre,
l’aptitude à s’engager. La personnalité juridique serait alors la qualité
attribuée par le droit aux individus dotés de cette volonté.

§ 2. La personnification

Les revendications pour obtenir le statut de personne sont de plus en plus


nombreuses. On traitera ici de la nature (A) de l’animal (B) mais aussi du
robot (B) A. La nature

Se poser la question de considérer la nature comme une personne peut


sembler saugrenu. La réponse paraît évidente, la nature n’est pas une
personne. Pour autant, il est de plus en plus souvent question d’élargir la
notion de personne à la nature 9782340-033689_001-152.indd 5

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Introduction – La notion de personne

elle-même ou à certains de ses éléments. Cet élargissement est aujourd’hui


prôné par certains peuples qui la considèrent comme la « Terre mère » et se
proclament ses représentants pour la défendre contre les atteintes qui lui
sont portées1.

Ainsi, dès 2008, l’Équateur a accordé dans sa Constitution la qualité de


sujet de droit à la nature en tant que Terre nourricière. Elle en déduit de
véritables droits subjectifs : « La nature ou Pacha Mama, où la vie se
reproduit et se réalise, a droit au respect intégral de son existence et du
maintien et régénération de ses cycles vitaux, sa structure, ses fonctions et
ses processus évolutifs ». De même, la Constitution bolivienne, depuis
2009, reconnaît un droit à un environnement sain pour « les individus et
groupes des générations présentes et futures, ainsi qu’aux autres êtres
vivants, pour qu’ils puissent se développer de façon normale ». Certaines
villes américaines ont également passé ce cap (Pittsburg ou Dallas) pour
lutter contre les exploitations de gaz de schiste. Concrètement quelle est la
finalité de ce statut, de cette reconnaissance ? Il s’agit essentiellement de
permettre à la nature d’agir en justice pour défendre et rétablir ses droits. En
Nouvelle-Zélande, le fleuve sera représenté en justice par tout membre de la
tribu et un membre du gouvernement.

En Bolivie et Équateur, tout citoyen peut défendre les droits de la nature.

Des questions se posent alors sur l’utilité de cette reconnaissance. Est-ce


que cette qualité reconnue à la nature apporte plus à la défense de celle-ci
que la possibilité aujourd’hui donnée en France à des associations de
défendre l’environnement ?

Quelle serait la plus-value de la personnification de la nature, autrement que


symbolique ?

B. L’animal

L’animal n’est pas une personne, il rentre ainsi dans la catégorie des choses.

Mais pas n’importe laquelle, depuis la loi n° 2015-177 du 16 février 2015


(art. 515-14

c. civ.), il est reconnu comme un être vivant doté de sensibilité. Le même


article précise que « sous réserve des lois qui les protègent, les animaux
sont soumis au régime des biens ». Il faut donc en déduire que malgré ce
statut, l’animal n’a pas franchi la frontière pour passer à la qualité de
personne.

Néanmoins, la question de la personnification des animaux se pose de


manière récurrente. Ainsi, en Argentine, le 3 novembre 2016, un tribunal a
reconnu la qualité de « sujet de droit non humain » à une femelle orang-
outan, après que, dès 1999, la Nouvelle-Zélande a étendu le statut d’« êtres
humains » à des grands singes, comme l’Inde vient de le faire à des
dauphins.
1. Ainsi, en Inde, la haute Cour de l’Uttarakhand a reconnu au Gange,
fleuve sacré, et à son affluent, la Yamana, la qualité de personne morale. En
Nouvelle-Zélande, le 15 mars 2017, le Parlement a accordé au fleuve
Whanganui la personnalité juridique que les Maoris de la tribu Iwi (« Je
suis la rivière et la rivière est moi ») réclamaient et qui leur permettra, le cas
échéant, de défendre ses intérêts en justice.

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Introduction – La notion de personne

Si la question se pose en doctrine, le cap n’est pas franchi pas la


jurisprudence qui déclare irrecevable une action intentée au nom d’un
chien1 ou encore qui annule une libéralité faite à un animal de compagnie2.

C. Le robot

Le robot peut-il ou doit-il être considéré comme une personne ? La question


se pose de plus en plus du fait des progrès croissant de la technologie. Dans
le langage commun, un robot est « un appareil effectuant, grâce à un
système de commande automatique à base de microprocesseur, une tâche
précise pour laquelle il a été conçu, dans le domaine industriel, scientifique
ou domestique ». Dans un sens encore plus général, il peut être défini «
comme une machine […] à l’aspect humain capable d’agir et de parler
comme un être humain3 ». Dans la Charte des droits des robots, Alain
Bensoussan retient la définition suivante : « on appelle robot une machine
dotée d’intelligence artificielle, prenant des décisions autonomes, pouvant
se déplacer de manière autonome dans des environnements publics ou
privés et agissant en concertation avec les personnes humaines4 ».

En février 2017, le Parlement européen a voté une résolution demandant à


la Commission de Bruxelles de présenter une proposition de directive sur
les règles de droit civil sur la robotique5. Il l’invitait notamment « à la
création, à terme, d’une personnalité juridique spécifique aux robots pour
qu’au moins les robots autonomes les plus sophistiqués puissent être
considérés comme des personnes électroniques responsables et que soit
conférée la personnalité électronique à tout robot prenant une décision
autonome ou interagissant de manière indépendante avec des tiers ».
Parallèlement aux propositions du Parlement européen, d’autres organismes
se sont prononcés sur ces questions comme l’office parlementaire
d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) avec un
rapport

« Pour une intelligence artificielle maîtrisée, utile et démystifiée6 » ou


encore le comité économique et social européen qui s’est opposé dans un
avis du 31 mai 2017 à attribuer une quelconque personnalité juridique aux
robots7. Il propose au contraire de favoriser le développement de
l’intelligence artificielle au profit de 1. TA Strasbourg, ord. réf., 23 mars
2002, n° 0201013.

2. CA Lyon, 20 octobre 1958, D. 1959, 111.

3. Définitions du Centre national des ressources textuelles et lexicales


(CNRTL) 4. A. Benssoussan, Charte sur les droits et les devoirs des robots,
https ://www.alain-bensoussan.com/

wp-content/uploads/2014/10/Charte-droits-des-robots-Version-5.pdf.

5. Résolution du Parlement européen du 16 février 2017 contenant des


recommandations à la Commission concernant des règles de droit civil sur
la robotique (2015/2103(INL)).

6. www.senat.fr/rap/r16-464-1/r16-464-11.pdf.

7. INT/806, Intelligence artificielle, Avis, Comité économique et social


européen, « L’intelligence artificielle

– Les retombées de l’intelligence artificielle pour le marché unique


(numérique), la production, la consommation, l’emploi et la société »,
Rapporteure : C. Muller.

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Introduction – La notion de personne

l’humanité et suggère une approche « human-in-command » où l’homme


créerait des robots dotés de l’intelligence artificielle mais de manière
responsable. Le comité souhaite dès lors que ces machines restent des
machines « sous le contrôle permanent des humains »

On le voit, il n’est pas ici question de donner le statut de personne à tous les
objets robotisés mais seulement à ceux qui par certaines caractéristiques se
rapprochent le plus de l’homme. Ainsi, l’autonomie et la faculté d’auto-
apprentissage d’une machine figurent parmi les critères retenus par le
Parlement européen pour être éligible à l’attribution de cette nouvelle forme
de personnalité juridique1.

Dans certains États étrangers on voit apparaître les prémices de cette


reconnaissance. Ainsi dans l’État du Nevada, les robots se sont vus
reconnaître des attributs de la personne morale. Ils sont immatriculés et
répertoriés dans un registre. Il leur est assigné un capital, de sorte qu’ils
sont assurés directement pour répondre des dommages qu’ils pourraient
provoquer. Une charte éthique des robots inspirée des lois d’Asimov a été
instaurée, depuis plus de dix ans déjà, en Corée du Sud2.

Par ailleurs, le robot humanoïde Sophia, développé par l’entreprise


hongkongaise Hanson Robotics, a reçu fin octobre 2018 la citoyenneté
saoudienne. Aux États-Unis, au Danemark ou en Angleterre des discussions
ont lieu pour déterminer la place du robot dans la société faisant de ce
problème un enjeu mondial.

En définitive, ni la nature, ni l’animal, ni le robot ne se voient aujourd’hui


reconnaître la qualité de personne en France. Néanmoins, les débats qui
existent à l’échelle internationale montrent, d’une part, que la définition
aujourd’hui consacrée de la personne est susceptible d’évoluer et, d’autre
part, les enjeux liés à la notion de personne.
Pour apprécier l’importance de la notion de personne en droit français, il
importera d’abord de comprendre à partir de quand et jusqu’à quand la
personne existe (Titre 1) pour ensuite voir quels sont les éléments qui
permettent d’identifier une personne (Titre 2) et enfin apprécier comment la
personne est protégée (Titre 3).

1. Recommandations concernant le contenu de la proposition demandée


Définition et classification des « robots intelligents »

Il convient d’établir une définition européenne commune des différentes


catégories de robots autonomes et intelligents, en y intégrant des définitions
de leurs sous-catégories le cas échéant, compte tenu des caractéristiques
suivantes :

– la capacité d’acquisition d’autonomie grâce à des capteurs et/ou à


l’échange de données avec l’environnement (interconnectivité) et l’analyse
de données ;

– la capacité d’apprentissage à travers l’expérience et l’interaction ;

– la forme de l’enveloppe physique du robot ;

– la capacité d’adaptation de son comportement et de ses actes à son


environnement.

Résolution du Parlement européen du 16 février 2017 contenant des


recommandations à la Commission concernant des règles de droit civil sur
la robotique (2015/2103(INL)) 2. La Corée du Sud élabore une « charte
éthique des robots » : www.lemonde.fr/international/article/2007/03/07/

la-coree-du-sud-elabore-une-charte-ethique-des-
robots_880397_3210.html#p0LlCzfKCUEfzEfC.99

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TITRE 1
L’EXISTENCE DE LA PERSONNE

Afin d’étudier la notion de personne, il importe de savoir comment la


personnalité s’acquiert (Chapitre 1). L’acquisition de la personnalité est un
évènement déterminant puisqu’il va permettre de faire produire des effets
de droit (Chapitre 2) qui, pour la plupart, disparaîtront avec la fin de la
personnalité (Chapitre 3) 9782340-033689_001-152.indd 9

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Chapitre 1

L’acquisition de la personnalité

La personnalité s’acquiert, en principe, à un moment précisément défini


(Section 1). Néanmoins, à titre très exceptionnel, il arrive qu’une partie des
effets de la personnalité soient attribués alors même que ce moment n’a pas
encore eu lieu (Section 2).

Section 1

Le moment de l’acquisition de la personnalité

La naissance est la première condition pour obtenir la personnalité juridique


(§1), à cela s’ajoutent deux conditions médicales, la vie et la viabilité (§2)

§ 1. La naissance, première condition

Par principe, l’individu accède à la personnalité juridique au moment où il


naît.

Cette situation a été illustrée il y a quelques années à propos de la


qualification d’homicide involontaire et de son application au fœtus.

Selon la loi pénale, l’homicide involontaire est le fait de tuer une personne.
Or, le fœtus n’est pas une personne. En conséquence, celui qui provoque la
mort d’un fœtus, même viable et sur le point de naître n’est pas coupable
d’homicide involontaire. Dès lors, la Chambre criminelle de la Cour de
cassation retient que la Cour d’appel qui constate « pour déclarer une
femme coupable d’homicide involontaire qu’elle a, par un défaut de
maîtrise de son véhicule, causé la mort de l’enfant qui a vécu une heure
après sa naissance et qui est décédé des suites des lésions vitales
irréversibles subies au moment du choc, a justifié sa décision (Cass. Crim 2
décembre 2003, B. crim. 203, p. 931). Cette question est remontée jusque
devant la Cour européenne des droits de l’homme. Celle-ci considère que
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TITRE 1 – L’existence de la personne

la jurisprudence française qui subordonne la responsabilité pénale à la


naissance du fœtus vivant et viable n’est pas contraire au droit à la vie
protégé par l’article 2

de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des


libertés fondamentales. Elle estime, en effet, que le point de départ du droit
à la vie relève de la marge d’appréciation des États et qu’il n’est pas
possible ni souhaitable de répondre actuellement dans l’abstrait à la
question de savoir si l’enfant à naître est une personne au sens de cet article
2 (CEDH 8 juillet 2004, VO c/France, 53924/00).

Le fœtus n’est donc pas juridiquement une personne.

Pour pouvoir être connue de l’État une nouvelle personne doit faire l’objet
d’une déclaration réalisée dans les cinq jours qui suivent l’accouchement
(art. 55

du Code civil). À défaut, l’officier d’état civil ne pourra plus constater la


naissance sur les registres d’état civil qu’en vertu d’un jugement. Cette
déclaration est le plus souvent effectuée par le père, le médecin, la sage-
femme ayant assisté à la naissance ou toute autre personne témoin de
l’évènement.

Une fois la déclaration réalisée, l’officier d’état civil dresse l’acte de


naissance qui comporte les informations relatives :

– à l’enfant : jour, heure et lieu de la naissance, sexe, prénoms et nom de


famille ;

– à ses parents : prénoms, nom, âge, profession, domicile des parents ;

– et, le cas échéant, au déclarant.

§ 2. Les autres conditions

Il existe deux autres conditions cumulatives pour acquérir la personnalité


juridique. Il faut, en effet, constater que l’enfant est né vivant et viable.

Si l’on ne trouve pas clairement ces exigences dans le Code civil, on peut
néanmoins les déduire de certaines dispositions. Ainsi, l’article 318
mentionne qu’« aucune action n’est reçue quant à la filiation d’un enfant
qui n’est pas né viable ».

L’article 725 dispose quant à lui que « pour succéder, il faut exister à
l’instant de l’ouverture de la succession, ou, ayant déjà été conçu, naître
viable ».

Concernant la première condition : être né vivant, cela ne pose pas de


grande difficulté, il suffit d’avoir respiré au moins une fois pour être
considéré comme né vivant. En revanche, la condition de la viabilité est
plus complexe. On entend par viabilité l’aptitude à la vie, la capacité
physiologique à survivre. Il s’agit ici de constater la viabilité ex utero, c’est-
à-dire l’aptitude de l’enfant à vivre en dehors de l’organisme maternel.

Si ces conditions ne sont pas remplies, il ne saurait être question d’établir


un acte de naissance. En revanche, un acte d’enfant sans vie peut être dressé
en application de l’article 79-1 du Code civil. Cet acte aura beaucoup moins
d’effets que l’acte de naissance dans la mesure où il ne s’agit pas de
constater l’existence de la 9782340-033689_001-152.indd 12

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Chapitre 1 – L’acquisition de la personnalité

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personnalité juridique1. Il permet uniquement aux parents de donner à


l’enfant un prénom, qui sera mentionné sur les registres de l’état civil et sur
le livret de famille, d’organiser des obsèques et d’obtenir certains droits
sociaux (prime de naissance, indemnité de maternité et de paternité). En
revanche, cet acte n’établit pas la filiation et ne permet pas à l’enfant de se
voir reconnaître la qualité de successible ou de donataire.

Quant aux conditions d’obtention de cet acte d’enfant sans vie, la question
s’était posée de savoir si cet acte était réservé aux enfants respectant au
moins une des conditions d’acquisition de la personnalité, qu’ils soient
mort-nés viables ou nés vivants et non viables. La première chambre civile
de la Cour de cassation juge dans plusieurs arrêts du 6 février 2008 que
l’article 79-1 du Code civil ne subordonne

« l’établissement d’un acte d’enfants sans vie ni au poids du fœtus, ni à la


durée de la grossesse 2 ». Il en résulte que tout fœtus né sans vie peut être
inscrit sur les registres de l’état civil. Ainsi, la seule condition est la
délivrance d’un certificat médical d’accouchement.

Section 2

L’extension de la personnalité

Il s’agit ici de traiter d’une situation un peu particulière dans laquelle un


enfant à naître va bénéficier partiellement de la personnalité juridique sans
pour autant remplir les conditions précédentes. Ainsi, la jurisprudence
retient que l’enfant simplement conçu doit être considéré comme né chaque
fois qu’il y va de son intérêt. Ce principe est exprimé par l’adage : infans
conceptus pro nato habetur 1. Dans une réponse ministérielle du 16 janvier
2018, le ministre de la Justice a rappelé que la délivrance de l’acte d’enfant
sans vie vise seulement à reconnaître de façon symbolique et sociale
l’enfant mort-né pour faciliter le travail de deuil des familles.

« En application de l’article 79-1 du Code civil, l’acte d’enfant sans vie est
inscrit à sa date sur les registres de décès. Il énonce les jour, heure et lieu de
l’accouchement, les prénoms et noms, dates et lieux de naissance,
professions et domiciles des père et mère, et le cas échéant, ceux du
déclarant. Un ou des prénoms peuvent être donnés à l’enfant sans vie, si les
parents en expriment le désir. En outre, un livret de famille peut être délivré
comportant la date et le lieu de l’accouchement ainsi que l’inscription des
noms et prénoms des parents dans l’acte d’enfant sans vie, témoignant de la
sorte, de manière symbolique, de son appartenance à la famille. En
revanche, comme le précise la circulaire interministérielle n° 2009-182 du
19 juin 2009

relative à l’enregistrement à l’état civil des enfants décédés avant la


déclaration de naissance et de ceux pouvant donner lieu à un acte d’enfant
sans vie, aucun nom de famille ne peut lui être conféré et aucun lien de
filiation ne peut être établi à son égard. En effet, la filiation et le nom de
famille constituent des attributs de la personnalité juridique. Celle-ci résulte
du fait d’être né vivant et viable et ne peut en conséquence être conférée à
l’enfant sans vie. Il n’est pas envisagé de modifier l’état du droit sur cette
impossibilité d’attribution d’un nom de famille à un enfant sans vie qui
procède d’un équilibre délicat et sensible entre, d’une part, la douleur des
parents confrontés à la naissance d’un enfant sans vie et la reconnaissance
symbolique du lien qui les unit à celui-ci et, d’autre part, nos principes de
droit concernant la personnalité juridique. »

2. Cass. Civ. 1re 6 février 2008, n° 6-16498,6-16499,6-16 500, Bul . I, n°


41, 42, 43.

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TITRE 1 – L’existence de la personne

quoties de commodis ejus agitur. Les droits alors acquis par l’enfant au
moment de sa conception seront consolidés dès lors qu’il naîtra vivant et
viable.

Prenons un exemple en droit des successions pour l’illustrer. Imaginons


qu’une femme soit enceinte et que son mari vient à décéder. Selon cet
adage, on va considérer que pour succéder il suffit d’être conçu au moment
de l’ouverture de la succession (art. 725 du Code civil). Toutefois ce n’est
que si l’enfant vient à naître vivant et viable qu’il pourra réellement
bénéficier de la succession. On parle ici de consolidation de ses droits.

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Chapitre 1 – L’acquisition de la personnalité

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CAS PRATIQUE

L’acquisition de la personnalité

Sabrina a épousé Bernard au mois de mai, malheureusement alors qu’el e


est enceinte de leur premier enfant, Bernard décède dans un tragique
accident de bateau.

Bernard avait beaucoup d’argent et Sabrina souhaite que son enfant puisse
en hériter.

Qu’en pensez-vous ?

Correction du cas pratique

Un homme marié décède dans un accident alors que sa femme est enceinte
de leur premier enfant.
Un enfant à naître peut-il hériter de son père ?

Selon l’adage Infans conceptus, l’enfant est considéré comme né chaque


fois qu’il y va de son intérêt, à la condition de naître vivant et viable. Dans
ce cas, la personnalité juridique de l’enfant sera rétroactivement validée dès
la conception de l’enfant, et non pas uniquement à sa naissance.

L’application de la règle infans conceptus suppose la réunion de trois


conditions :

– La première condition concerne la conception de l’enfant. Cette


conception doit être intervenue au plus tard au moment de l’événement qui
conditionne l’existence du droit.

Pour recueillir une succession c’est au moment du décès du de cujus ou du


testateur qu’il faut que l’enfant soit conçu.

– La seconde condition porte sur l’intérêt de l’enfant. Pour que l’enfant


simplement conçu soit considéré comme né, il faut qu’il y trouve un intérêt.
C’est le cas lorsqu’il s’agit de recueillir une succession.

– La troisième et dernière condition réside dans la naissance de l’enfant


vivant et viable.

Cette naissance consolide la situation juridique de l’enfant. La personnalité


juridique qu’il acquiert rétroagit au jour de sa conception pour lui permettre
de recueillir les droits qui étaient suspendus.

Aux termes de cette règle, l’enfant simplement conçu peut bénéficier de la


personnalité juridique s’il en va de son intérêt. En l’espèce, l’enfant est bien
conçu au moment du décès de son père et il en va de son intérêt de recueillir
cette succession, dès lors si l’enfant naît vivant et viable il pourra recevoir
la succession de Bernard.

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Chapitre 2

Les effets de la personnalité

L’obtention de la personnalité juridique s’accompagne de l’obtention de


droits parmi lesquels on trouve le droit à l’intégrité morale (Section 1) et le
droit à l’intégrité physique (Section 2).

Plus largement, c’est bien souvent la dignité de la personne que l’on


cherche ici à protéger.

En droit interne, la valeur constitutionnelle de la sauvegarde de la dignité de


la personne humaine a été affirmée par le Conseil constitutionnel dans sa
décision n° 94-343-344 DC du 27 juil et 1994 relative aux lois sur la
bioéthique : « la sauvegarde de la dignité de la personne humaine contre
toute forme d’asservissement et de dégradation est un principe à valeur
constitutionnel ». Ainsi, les lois de bioéthique consacrent le droit à la
dignité et l’article 16 du Code civil dispose que « la loi assure la primauté
de la personne, interdit toute atteinte à la dignité de cel e-ci et garantit le
respect de l’être humain dès le commencement de sa vie ».

Autrement dit, le respect de la dignité humaine est un droit fondamental.


C’est aussi, une composante de l’ordre public. En effet, le Conseil d’État,
par deux arrêts du 27 octobre 1995, a affirmé « qu’il appartient à l’autorité
investie du pouvoir de police municipale de prendre toute mesure pour
prévenir une atteinte à l’ordre public ; que le respect de la dignité de la
personne humaine est une composante de l’ordre public ; que l’autorité
investie du pouvoir de police municipale peut, même en l’absence de
circonstances locales particulières, interdire une attraction qui porte
atteinte au respect de la dignité humaine ». Ainsi, l’ordre public vient
justifier une ingérence dans l’exercice des libertés individuelles d’une
personne au nom du respect de sa propre dignité (CE, Ass, 27 octobre 1995,
Commune de Morsang-sur-Orge, n° 136727).

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TITRE 1 – L’existence de la personne

CE 27 oct. 1995 n° 136727 Commune de Morsang-sur-Orge

Le 23 janvier 1992, le maire d’une commune interdit par un arrêté le


spectacle de lancer de nains. La société productrice du spectacle demande
alors au tribunal administratif d’annuler cet arrêté.

Le tribunal administratif de Marseille annule l’arrêté au fondement que


l’attraction litigieuse ne portait pas atteinte à la dignité de la personne
humaine et qu’ainsi elle ne mettait pas en cause ni la sécurité ni la moralité
publique.

La mairie par une requête sommaire et mémoire complémentaire demande


au conseil d’État d’annuler le jugement du tribunal administratif

Le maire d’une commune peut-il interdire, dans l’exercice de ses pouvoirs


de police, un spectacle de lancer de nains ? Un spectacle de lancer de nain
pour lequel les participants ont librement consentis est-il contraire au
principe du respect de la dignité humaine ?

Solution

Le Conseil d’État annule le jugement du Tribunal administratif aux motifs :


Qu’il appartient à l’autorité investie du pouvoir de police municipale de
prendre toute mesure pour prévenir une atteinte à l’ordre public et que le
respect de la dignité et de la personne humaine est l’une des composantes
de l’ordre public.

L’attraction de lancer de nains par son objet même porte atteinte à la dignité
de la personne humaine.

Dès lors, l’autorité investie du pouvoir de police municipale pouvait


interdire cette attraction.
Dans cet arrêt on met en avant le respect de la dignité humaine pour
empêcher la réification du corps humain. En effet, utiliser une personne de
petite taille comme projectile revient à le traiter comme une chose, en cela
il s’agit d’un acte contraire à la dignité humaine.

Il faut bien noter qu’en l’espèce la personne utilisée comme projectile avait
donné son consentement et en tirait même un certain profit. Le CE est passé
outre le fait qu’il y ait consentement, car le respect de la dignité humaine est
un principe d’ordre public.

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Chapitre 2 – Les effets de la personnalité

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Section 1

Le droit au respect de l’intégrité morale de la personne

De nombreux droits pourraient ici être étudiés, droit à la vie privée (§1),
droit à l’image (§2), mais aussi le droit à l’honneur ou encore au respect de
la présomption d’innocence, nous ne verrons pour notre part que les deux
premiers, droit à la vie privée et droit à l’image.

§ 1. Le respect du droit à la vie privée

L’article 9 du code civil dispose que chacun a droit au respect de sa vie


privée.

Pour en comprendre le sens, il nous faut d’abord nous intéresser aux


conditions de la protection (A) pour ensuite apprécier les sanctions
envisagées (B).

A. Les conditions de la protection


Pour que la protection puisse jouer encore faut-il pouvoir constater une
atteinte à la vie privée, il importe dès lors de cerner les contours de cette
notion (1). Ceux-ci appréhendés, un autre élément va s’avérer déterminant,
l’autorisation donnée à la divulgation (2).

1. Les contours de la notion de vie privée

La première difficulté tient au fait que la notion de vie privée n’est pas
définie par la loi. Pour saisir la notion, on oppose traditionnellement vie
privée et vie publique en incluant dans la première la vie personnelle et
familiale et dans la seconde les activités sociales et professionnelles. Il
existerait alors des faits publics par nature, à cause de leur notoriété, du
caractère public du lieu où ils se sont déroulés. À l’inverse certains faits
seraient privés par nature lorsqu’ils concernent la famille par exemple.
Ainsi, la vie privée est une notion large qui recoupe tout autant
l’identification, l’orientation sexuelle, la vie personnelle et familiale que la
situation patrimoniale.

La seconde difficulté est liée au domaine très large de la notion. Ainsi, le


domicile est par exemple un lieu dont la protection est garantie au nom de
la vie privée. Plus précisément, l’inviolabilité du domicile est garantie par la
loi pénale (art. 228-4

c pen), la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et


des libertés fondamentales (art. 8), et ce, au nom du droit au respect de la
vie privée.

Une illustration de la difficulté liée à la notion de vie privée peut être


trouvée dans le droit du travail. En effet, la vie privée doit aussi être
respectée au travail sans que ce respect ne puisse être total. Il doit se
concilier avec les droits de l’entreprise.

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TITRE 1 – L’existence de la personne

Le principe est que les obligations découlant du travail doivent respecter les
convictions religieuses du salarié (art. L 1132-1 c. trav.), de la vie privée et
familiale Par exemple une salariée de chez Renault avait acheté comme
véhicule personnel une Peugeot et pour cette raison avait été licenciée. Or,
la Cour de cassation a considéré comme abusif le licenciement dans la
mesure où dans sa vie privée la salariée était libre d’acheter les biens,
produits et marchandises de son choix1.

Néanmoins, les libertés du salarié peuvent être restreintes en raison de la


nature de la tâche à accomplir si ces limites sont raisonnables
(proportionnées au but recherché)2.

2. L’autorisation

Le consentement donné par la personne intéressée à la divulgation de sa vie


privée exclue toute atteinte. Cette autorisation n’a pas besoin d’être
expresse et peut donc rester tacite. Par exemple, le débal age de sa vie
privée par autobiographie est une autorisation tacite donnée à la
divulgation de sa vie privée. Si un fait est devenu public en raison
notamment du comportement ou des indiscrétions de la personne
concernée, alors la presse peut licitement en informer le public.

Toute la difficulté sera ici d’assurer l’équilibre entre la liberté d’information


et le droit au respect de la vie privée.

ILLUSTRATION

Cass. 1re civ., 6 octobre 2011, n° 10-23606

Attendu que le magazine Le Point a publié dans son édition du 17 juin


2010

un article de M. X… intitulé « Mes enregistrements secrets du Maître


d’hôtel », dans lequel il était relaté que le maître d’hôtel de Mme Y…
avait, un an durant à partir du mois de mai 2009, capté les propos
échangés dans la salle de l’hôtel particulier de Neuilly-sur-Seine où
Mme Y… tenait « ses réunions d’affaires »

avec certains de ses proches dont M. Z… chargé de la gestion de sa


fortune ; que l’article diffusé le 14 juin sur le site de l’hebdomadaire, fut
suivi d’autres, les 17 et 21 juin, également diffusés sur ce site ; que M. Z…
a assigné la société d’exploitation de l’hebdomadaire Le Point, MM. A…,
directeur de la publication et X…, journaliste, devant le juge des référés
pour, notamment, voir ordonner le retrait du site de l’hebdomadaire de tout
ou partie de la transcription des enregistrements il icites réalisés au domicile
de Mme Y…, l’interdiction de toute nouvel e publication de ces
retranscriptions et la publication d’un communiqué judiciaire ; 1. Cass. Soc.
22 janvier 1992, Bul . V n° 30, p. 18.

2. Cass. Soc. 24 mars 1998, Bul . V n° 171, p. 125 « Attendu que s’il est
exact que l’employeur est tenu de respecter les convictions religieuses de
son salarié, celles-ci, sauf clause expresse, n’entrent pas dans le cadre du
contrat de travail et l’employeur ne commet aucune faute en demandant au
salarié d’exécuter la tâche pour laquelle il a été embauché dès l’instant que
celle-ci n’est pas contraire à une disposition d’ordre public ».

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Chapitre 2 – Les effets de la personnalité

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Sur le premier moyen :

Vu les articles 226-1 et 226-2 du Code pénal ensemble l’article 809 du code
de procédure civile ;

Attendu que pour rejeter les demandes de M. Z… tirées de l’existence d’un


trouble manifestement illicite, l’arrêt énonce que l’article 226-2 du Code
pénal n’englobe pas dans sa prévention la diffusion de tout enregistrement
de propos réalisé – « dans la sphère privée » – sans le consentement de
l’auteur qui les a tenus, mais uniquement ceux qui portent « atteinte à
l’intimité de la vie privée d’autrui », comme l’énonce l’article 226-1 du
Code pénal, que relèvent par essence de l’intimité de la vie privée, la vie
affective et sentimentale, la vie familiale ainsi que la santé physique et
mentale de la personne et qu’il s’ensuit que le seul fait que les propos
diffusés aient été enregistrés dans le consentement de leurs auteurs, n’est
donc pas en lui-même suffisant pour qualifier de manifestement illicite le
trouble causé par leur diffusion ; que l’arrêt ajoute que les entretiens publiés
concernent la gestion du patrimoine de Liliane Y…

et sont de nature professionnelle pour M. Z… et patrimoniale pour Mme


Y…

et que les informations ainsi révélées mettant en cause la principale action-


naire de l’un des premiers groupes industriels français, et dont l’activité et
les libéralités font l’objet de très nombreux commentaires publics, relèvent
de la légitime information du public ;

Attendu cependant que constitue une atteinte à l’intimité de la vie privée,


que ne légitime pas l’information du public, la captation,
l’enregistrement ou la transmission sans le consentement de leur auteur
des paroles prononcées à titre privé ou confidentiel ; d’où il suit qu’en
statuant comme elle l’a fait, quand il ressort de ses propres constatations
que les entretiens litigieux présentaient un tel caractère, la cour d’appel a
violé les textes susvisés ;

B. Les sanctions de l’atteinte à la vie privée

Sur le fondement de l’article 9 du Code civil, des dommages et intérêts


peuvent être demandés. Notons qu’en la matière l’article 9 n’impose pas la
preuve d’une faute de la part de l’auteur de l’atteinte1. A cela peuvent
s’ajouter des sanctions pénales. L’article 226-1 du Code pénal interdit « au
moyen d’un procédé quelconque, volontairement de porter atteinte à
l’intimité de la vie privée d’autrui : 2° En fixant, enregistrant ou
transmettant, sans le consentement de celle-ci, l’image 1. Cass. 1re civ., Bul
. I, n° 378, p. 265. Par cet arrêt, la première chambre civile de la Cour de
cassation décide que « la seule constatation de l’atteinte à la vie privée
ouvrait droit à réparation ».
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TITRE 1 – L’existence de la personne

d’une personne se trouvant dans un lieu privé ». Les sanctions prévues sont
d’un an d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende. Toutefois, « lorsque
les actes […]

ont été accomplis au vu et au su des intéressés sans qu’ils s’y soient


opposés, alors qu’ils étaient en mesure de le faire, le consentement de ceux-
ci est présumé ».

Par ailleurs, le juge peut ordonner des sanctions préventives en nature pour
éviter le préjudice comme la non-parution d’un article de presse litigieux ou
encore la parution d’un communiqué rectificatif. Il peut aussi ordonner la
saisie ou la séquestre d’un journal, d’un livre ou d’un film. Mais cette
sanction n’est possible que si l’atteinte à l’intimité de la vie privée est d’une
gravité intolérable, qui ne peut pas être réparée par des dommages et
intérêts.

Enfin, toute personne physique ou morale mise en cause par une publication
écrite, une émission audiovisuelle, internet, même sans faute, bénéficie d’un
droit de réponse à condition de ne pas porter atteinte ni aux lois, ni aux
bonnes mœurs, ni à l’honneur du journaliste, ni à l’intérêt légitime d’un
tiers et que la réponse soit en rapport avec l’article en cause. Ce droit se
prescrit par trois mois.

§ 2. Le respect du droit à l’image

Par principe, une personne a droit au respect de son image (A), toutefois ce
droit n’est pas sans condition (B). On retrouve ici les mêmes sanctions que
celles vues précédemment.

A. Le principe
Une personne peut s’opposer à ce qu’un tiers capte et utilise son image, peu
importe ici le support ou le fait que le tiers ait agi ou non avec malveillance.

Plusieurs fondements ont été avancés pour justifier cette protection, le droit
de la propriété, le droit à la vie privée (toutefois, l’image peut faire l’objet
d’une atteinte en dehors de la vie privée notamment lorsque la photographie
est prise dans un lieu public) ou encore la protection de la dignité de la
personne. Ce droit est respecté quel qu’en soit le support : photographie,
télévision, dessin, affiche, caricature…

B. Les conditions

Une personne peut prétendre à faire respecter son image uniquement si elle
est identifiable et qu’est, le plus souvent mise en cause sa vie privée (1). Ce
droit disparaît si la reproduction de l’image a été autorisée ou justifiée par
les nécessités de l’information (2), sauf si elle porte atteinte à la dignité de
la personne (3).

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Chapitre 2 – Les effets de la personnalité

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1. Une personne identifiable et une mise en cause de la vie privée Il ne


peut y avoir atteinte à l’image d’une personne que si el e l’identifie.
Toutefois, il n’est nul ement nécessaire qu’un nom accompagne l’image,
seul compte le fait que la personne soit discernable.

Cour de cassation 1re civ. 5 avril 2012, Bull I, n° 86

Attendu que prétendant, selon l’arrêt attaqué (Paris, 19 janvier 2011) que la
société Tereos, exploitant la marque Beghin Say, à l’occasion d’une
campagne commerciale dite « Année du Brésil », avait fait figurer sans
son autorisation, sur l’emballage de morceaux de sucre, reproduit par
ailleurs sur son site internet, une photographie de sa personne réalisée
lorsqu’elle avait prêté son concours à une troupe de danse lors de
spectacles sur le même thème, Mme X… a introduit une action en justice
pour atteinte portée à son droit sur son image ; qu’elle a été déboutée ;

Attendu que, par motifs propres et adoptés, la cour d’appel, après avoir
relevé, outre la taille de trois millimètres sur deux du visage litigieux, sur
une vignette occupant seulement la plus grande face d’un morceau de sucre,
la mauvaise définition générale de l’image, a estimé que la personne
représentée était insusceptible d’identification ; qu’à partir de ces
constatations et appréciations souveraines, elle a pu retenir qu’aucune
atteinte à l’image n’était constituée ; que le moyen n’est pas fondé ;

Outre l’identification de la personne, la jurisprudence retient que l’atteinte à


la vie privée est déterminante. Ainsi, la reproduction de l’image d’une
personne sans son autorisation constitue une immixtion irrégulière du seul
fait qu’elle a eu pour objet sa vie privée.

Cour de cassation 1re civ. 16 mai 2012, n° 11-18449

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Versailles, 3 mars 2011), que la société


Hachette Filipacchi et associés (la société) a publié, dans le numéro
3299

du magazine Ici Paris daté du 23 au 29 septembre 2008, un article


intitulé

« PPDA et Anna-La tendre complicité », annoncé dès la page de


couverture, et illustré de quatre photographies représentant M. Patrick
X… seul ou en compagnie de la femme ainsi concernée ; que la société a
été condamnée à dommages-intérêts envers M. Patrick X… pour atteinte à
l’intimité de sa vie privée et violation de son droit sur son image ;

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TITRE 1 – L’existence de la personne

Attendu que la cour d’appel, à partir des exergues ou commentaires relevés


dans l’article litigieux et reproduit par elle, a considéré que le journal, au
lieu de se contenter du constat objectif de faits ou clichés saisis lors
d’événements médiatisés et concernant un journaliste jouissant d’une
certaine notoriété, lui avait prêté des sentiments sur la nature desquels le
lecteur ne pouvait se méprendre, spéculant sur sa vie sentimentale et
s’immisçant dans l’intimité de sa vie privée, malgré sa constante opposition
à toute divulgation à ce propos, sans qu’il y ait lieu de s’interroger sur un
caractère prétendument anodin ou sur une absence de malveillance ; qu’elle
a ainsi légalement justifié sa décision ; Et attendu, par ailleurs, que la
publication de photographies représentant une personne pour illustrer des
développements attentatoires à sa vie privée porte nécessairement atteinte à
son droit au respect de son image.

Néanmoins, l’atteinte à la vie privée n’est pas pour autant indispensable.


Une photographie prise dans un lieu public peut être considéré comme une
atteinte à la vie privée.

2. L’exception : l’absence de protection en cas d’autorisation

ou de nécessité de l’information

Pour qu’une publication porte atteinte au droit qu’une personne a sur son
image, il faut qu’elle ait été faite sans autorisation. On considère que
l’autorisation expressément donnée par une personne est limitée à son objet
et à sa cause.

C’est ce que permet d’illustrer la décision suivante :

Cass. 1re civ. 4 novembre 2011, Bull. I, 196

Sur le moyen unique :

Vu l’article 1134 du Code civil ;


Attendu, selon l’arrêt attaqué, que des fonctionnaires de police estimant
avoir été victimes d’atteintes à leur vie privée lors d’un reportage où ils
apparaissaient dans l’exercice de leurs missions au sein de la brigade
anticri-minalité de Nice, ont assigné la société de télévision TF1, M.
X…, directeur de la programmation et de la diffusion, et la société de
Productions Tony Comiti en réparation de leurs préjudices ;

Attendu que pour rejeter ces demandes, l’arrêt énonce que ces policiers ont
accepté d’être filmés et que leur image soit diffusée sans être « floutée »
mais qu’ils dénoncent le fait que leurs noms et grades ont été divulgués
alors qu’ils n’avaient donné aucune autorisation à cet égard, que dès lors
qu’el e avait été autorisée à diffuser les images de ces policiers, la société
de production était fondée à se croire tacitement autorisée à divulguer
également leurs noms et grades, et qu’il 9782340-033689_001-152.indd 24

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Chapitre 2 – Les effets de la personnalité

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n’y a pas eu dans ce contexte et de ce seul fait atteinte portée au respect de


leur vie privée, sachant que la révélation publique de leur profession
découlait nécessairement et complètement de la seule diffusion de leur
image, sans que cette révélation ait été en elle-même majorée par celle de
leur nom et grade, même si l’une et l’autre de ces révélations ont pu
conduire à des différences de réaction du public ;

Qu’en statuant ainsi, alors que l’accord donné par une personne pour la
diffusion de son image ne peut valoir accord pour la divulgation de ses
noms et grade, la cour d’appel a violé l’article susvisé.

De surcroît, si le droit à l’image est absolu, il connaît une limite liée aux
nécessités de l’information et de la création artistique. Quand une personne
est impliquée dans un évènement et que l’image est en relation avec
l’information, le droit du public à être informé l’emporte sur le droit de la
personne sur son image. Ainsi, la publication de l’image d’une personne se
trouvant dans une manifestation ou un lieu public n’est pas soumise à
autorisation.

En outre, si les personnes célèbres se voient reconnaître un droit à l’image,


la jurisprudence concilie ce principe avec le droit du public à l’information.
Dès lors, la captation et l’utilisation de l’image d’une personne publique
dans le cadre de ses activités publiques ne nécessitent pas d’autorisation
particulière.

Par ailleurs, des photographies peuvent être diffusées sans autorisation pour
rendre compte des évènements d’actualités que la personne concernée soit
célèbre ou non (Cass. 1re civ., 20 février 2001, Bul . I n° 42, 98-23471).).
Toutefois, les images ainsi prises doivent être des images banales, prises
sans recherche de sensationnalisme, elles ne doivent pas porter atteinte à la
dignité de la personne (Cass., 1re civ., 20 février 2001 précité).

3. L’exception à l’exception : l’atteinte à la dignité

La liberté d’expression permet la publication d’une photographie sans


l’autorisation de l’intéressé du moment qu’el e est en rapport avec
l’information même lorsqu’el e touche à sa vie privée mais seulement si el e
ne porte pas atteinte à la dignité de la personne. La dignité de la personne
fait ainsi tomber l’exception de l’information du public pour en revenir au
principe de l’atteinte au droit à l’image en l’absence d’autorisation de la
personne.

Dans l’affaire Erignac, Cass. 1re civ., 20 décembre 2000, Bul . I 341, après
la parution d’une photographie du préfet défunt, la question avait été posée
aux juges de savoir si le droit au respect de la vie privée devait s’écarter
devant la liberté d’expression. Ainsi, soit l’on devait considérer que ces
images étaient 9782340-033689_001-152.indd 25

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TITRE 1 – L’existence de la personne


attentatoires au droit au respect de la vie privée (article 9 C. civ.), voire au
principe de dignité (article 16 C. civ.), soit l’on devait conclure que l’image
devait bien être publiée au nom de la liberté d’expression et qu’aucune
responsabilité ne devait être recherchée. La Cour de cassation, ayant relevé
que la photographie publiée représentait distinctement le corps et le visage
du préfet assassiné gisant sur la chaussée d’une rue, décida que l’image était
attentatoire à la dignité de la personne humaine et contraire au respect de la
vie privée de la famille du défunt.

Section 2

Le droit au respect de l’intégrité physique de la personne

En la matière plusieurs grands principes s’appliquent, celui de


l’inviolabilité et de l’intégrité (§1) et celui de l’indisponibilité (§2).

§ 1. Les principes d’inviolabilité et d’intégrité du corps humain

Après avoir énoncé la définition de ces principes (A), nous verrons les
atteintes

légales (B).

A. L’énoncé des principes

L’article 16-1 du Code civil dispose en son alinéa 2 que « le corps humain
est inviolable ». L’article 16-3 alinéa 1 prévoit qu’« il ne peut être porté
atteinte à l’intégrité du corps humain qu’en cas de nécessité médicale pour
la personne ou à titre exceptionnel dans l’intérêt thérapeutique d’autrui ».
Et l’alinéa 2 de poursuivre :

« le consentement de l’intéressé doit être recueil i préalablement hors le cas


où son état rend nécessaire une intervention thérapeutique à laquel e il
n’est pas à même de consentir ».

Ainsi, le corps humain ne peut être violé par autrui. C’est pourquoi le droit
pénal prohibe toutes les infractions attentatoires au corps (homicide, coups
et blessures). De même, le droit civil permet la réparation des dommages
corporels.

À côté des atteintes illicites portées au corps, le législateur admet


l’existence d’atteintes licites. Pour les atteintes licites, telles que les actes de
soin, l’article 16-3 alinéa 2 met en avant le consentement nécessaire et
préalable de la personne, et ce, après l’information nécessaire du médecin
sur la nature et les risques de l’intervention. Au reste, le texte prévoit que
cette atteinte ne peut avoir lieu qu’en cas de nécessité médicale.

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Chapitre 2 – Les effets de la personnalité

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B. Les atteintes licites

De ce qui précède, il résulte qu’une atteinte à l’intégrité du corps humain ne


peut être effectuée que sous deux conditions : un intérêt légitime prévu par
la loi (intérêt médical, thérapeutique…) et le consentement de la personne.
Quelques situations permettent de l’illustrer.

Prenons tout d’abord, le don et l’utilisation des éléments et produits du


corps humain.

L’exigence d’un consentement préalable pour une intervention dans l’intérêt


thérapeutique d’autrui se retrouve dans le don et l’utilisation des éléments et
produits du corps humain. Mais, ça n’est pas la seule condition exigée par la
loi. Il faut tout d’abord respecter un principe de précaution : les éléments et
produits du corps humain ne peuvent être utilisés si le risque mesurable en
l’état des connaissances pour le receveur potentiel est supérieur à l’avantage
escompté pour celui-ci.

Il faut ensuite respecter le principe du consentement préalable du donneur.


Ce consentement est révocable à tout moment.
Il faut également respecter un principe de gratuité qui s’impose : aucun
paiement ne peut être reçu, sous quelque forme que ce soit.

Il faut enfin respecter un principe d’anonymat (art. 16-8 du Code civil) : le


donneur ne peut connaître l’identité du receveur ni le receveur celle du
donneur.

Néanmoins, certains produits du corps humain ne sont pas soumis à ces


principes (liste fixée par décret en Conseil d’État n° 95-904 du 4 août 1995)
: ce sont les cheveux, les poils, ongles, dents, ils sont cessibles à titre
onéreux, de la main à la main.

Prenons ensuite la question de la recherche biomédicale. La question de la


recherche biomédicale est délicate, car ce n’est plus l’intérêt médical direct
de la personne qui est en cause, mais l’intérêt plus diffus de la science.
L’atteinte à l’intégrité du corps humain est donc moins admissible. C’est
pourquoi la recherche sur l’être humain est très encadrée.

S’impose ici encore le nécessaire consentement libre et éclairé de la


personne ainsi que le principe de gratuité (hors remboursement des frais).

À cela s’ajoutent des conditions drastiques relativement à la recherche


entreprise :

– recherche fondée sur le dernier état des connaissances scientifiques ;

– risque prévisible proportionné avec le bénéfice de la recherche ;

– nécessité de réduire la douleur, les désagréments pour la personne.

De manière générale, l’intérêt des personnes qui se prêtent à une recherche


médicale prime toujours les seuls intérêts de la science et de la société.

Malgré les deux conditions posées par la loi pour qu’une atteinte soit licite,
on constate que dans certains cas, le législateur se contente d’une seule
condition.

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TITRE 1 – L’existence de la personne

En effet, il arrive que le consentement préalable ne soit pas requis. C’est le


cas notamment pour l’intervention chirurgicale d’urgence. L’article 16-3
alinéa 2 du Code civil prévoit en effet l’hypothèse dans laquelle l’état du
malade rend nécessaire une intervention thérapeutique à laquelle il n’est pas
à même de consentir.

Cela recouvre la situation dans laquelle le patient est hors d’état de


manifester sa volonté (coma, par ex.).

Toutefois, la jurisprudence a dans, une hypothèse bien différente, fait


bénéficier d’une immunité du même ordre au médecin dans le cas des
transfusions sanguines pratiquées pour sauver la vie d’un patient, et ce,
malgré son refus motivé par des raisons d’obédience religieuse (Témoins de
Jéhovah). Le patient en l’occurrence n’était pas hors d’état de manifester sa
volonté, puisqu’il a clairement mentionné qu’il ne souhaitait pas être
transfusé pour autant la jurisprudence a retenu que le médecin n’engageait
pas sa responsabilité. En effet, le Conseil d’État a posé en principe que
l’obligation pour le médecin de sauver la vie ne saurait prévaloir de façon
générale sur celle de respecter la volonté du malade (CE, 26 octobre 2001,
n° 198546) ; cependant, le médecin ne porte pas une atteinte grave à la
liberté du malade lorsqu’après avoir tout mis en œuvre pour convaincre le
patient, il accomplit dans le but de le sauver un acte indispensable à sa
survie et proportionné à son état.

L’absence de la condition du consentement se présente également pour la


vaccination obligatoire : il y a bien là une atteinte à l’intégrité du corps
humain qui s’opère sans le consentement préalable de l’intéressé. Le
Conseil d’État a pu considérer que les vaccinations obligatoires ne
constituaient pas une atteinte illicite aux principes d’inviolabilité et
d’intégrité du corps humain, dès lors qu’elles sont mises en œuvre pour
assurer la protection de la santé et qu’elles sont proportionnées à leur
objectif (CE, 26 novembre 2001, n° 222741).
§ 2. L’indisponibilité (du corps humain et de l’état des personnes) et la non-
patrimonialité

Le corps humain est hors du commerce. Dès lors, les conventions portant
sur

le corps humain sont interdites. Là encore, il existe certaines exceptions ;


le don

de sang ou encore l’essai thérapeutique. Il en résulte que

– l’aliénation du corps ou de certains de ses éléments est interdite (article


16-1 et 16-5 cciv) ;

– qu’il est impossible de vendre les services de son corps. C’est sur ce
fondement qu’a été prononcée l’annulation des contrats de maternité de
substitution.

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Chapitre 2 – Les effets de la personnalité

29

Ass. Plen. 31 mai 1991, Bul . AP n° 4

Faits :

Afin de remédier à la stérilité de la femme, un couple a recours au procédé


d’insémination artificielle. Le mari donne son sperme à une autre femme
qui est alors inséminée artificiellement porte et met au monde un enfant. À
la naissance l’enfant est déclaré comme né du père, mais sans indication de
la filiation maternelle (la mère biologique accouche sous X). L’épouse
introduit alors une requête en adoption plénière.

Le tribunal de GI de paris ayant rejeté cette demande le 26 juin 1989 un


appel fut interjeté. La CA de Paris infirme cette décision et prononce
l’adoption plénière de l’enfant à l’égard de l’épouse stérile. La méthode de
maternité substituée devant être considérée comme licite et non contraire à
l’ordre public et que cette adoption est conforme à l’intérêt de l’enfant.

Le procureur général près de la cour de cassation forme alors un pourvoi


dans l’intérêt de la loi.

Les conventions de maternité de substitution sont-elles licites ?

Solution, non, il s’agit d’un détournement de l’institution de l’adoption et


porte atteinte au principe de l’indisponibilité du corps humain.

« cette adoption n’était que l’ultime phase d’un processus d’ensemble


destiné à permettre à un couple l’accueil à son foyer d’un enfant, conçu en
exécution d’un contrat tendant à l’abandon à sa naissance par sa mère, et
que, portant atteinte aux principes de l’indisponibilité du corps humain et de
l’état des personnes, ce processus constituait un détournement de
l’institution de l’adoption, la cour d’appel a violé les textes susvisés »

Ensuite, aux termes de l’article 16-1 alinéa 3 du Code civil, « le corps


humain, ses éléments et ses produits ne peuvent faire l’objet d’un droit
patrimonial ».

En outre, l’article 16-5 du même code précise que « les conventions ayant
pour effet de conférer une valeur patrimoniale au corps humain, à ses
éléments ou à ses produits sont nulles ».

Enfin, l’article 16-6 du Code civil prévoit qu’aucune « rémunération ne


peut être allouée à celui se prête à une expérimentation sur sa personne, au
prélèvement d’éléments de son corps, ou la collecte de produits ».

La non-patrimonialité du corps humain se poursuit même après la mort de


la personne. Une affaire, dans laquelle il était question d’utilisée des
cadavres à des fins commerciales, portée devant la Cour de cassation
permet de l’illustrer.

En février 2009 l’exposition dénommée « Our Body » devait avoir lieu à


Paris, il s’agissait d’exposer des cadavres humains. La Cour de cassation a
retenu 9782340-033689_001-152.indd 29

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TITRE 1 – L’existence de la personne

l’interdiction de l’exposition muséale de cadavres humains en s’appuyant


sur les dispositions de l’article 16-1-1, alinéa 2 du Code civil, en vertu
desquels « les restes

des personnes décédées doivent être traités avec respect, dignité et décence
». Elle en a conclu que « l’exposition de cadavres à des fins commerciales
méconnaît cette exigence », et qu’elle devait être interdite en conséquence
(Civ. 1re, 16 septembre 2010, n° 09-67.456). Les expositions de cadavres à
des fins commerciales sont donc prohibées, fussent-elles d’ordre muséal.

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Chapitre 2 – Les effets de la personnalité

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CAS PRATIQUES

Les effets de la personnalité

Cas n° 1. Sansa cherche à gagner un peu d’argent pour pouvoir rentrer chez
el e et refaire sa vie. El e n’a aucune compétence particulière et n’a pas
vraiment le temps de trouver un travail, l’hiver approche et el e voudrait
très vite regagner sa maison. El e décide alors de vendre ses cheveux,
seulement cela ne rapporte pas grand-chose. El e envisage alors de vendre
également un rein. Qu’en pensez-vous ?

Cas n° 2. Sophie a récemment gagné une médail e d’or aux jeux


olympiques de Sydney.
El e est devenue célèbre et a même rencontré le président de la République
il y a quelques jours. Hier en se promenant dans la rue avec son chien
Rackam el e découvre avec stupeur que le magazine « Oups » va publier
prochainement une photo volée d’el e alors qu’el e se trouve dans le jardin
de la maison de campagne de ses parents. On la voit en compagnie de son
nouveau petit ami avec qui el e entretient une liaison secrète depuis
quelques mois.

El e est d’autant plus choquée que l’article spécule sur une éventuel e
grossesse, la photo semblant laisser deviner un ventre plus arrondit que
d’ordinaire.

Que peut-el e faire pour protéger ses droits ?

Corrections

Cas n° 1 : Une femme souhaite vendre ses cheveux et son rein.

Une personne peut-elle vendre ses cheveux et son rein ?

Article 16-1 du Code civil « Chacun a droit au respect de son corps.

Le corps humain est inviolable.

Le corps humain, ses éléments et ses produits ne peuvent faire l’objet d’un
droit patrimonial. »

Décret n° 95-904 du 4 août 1995 relatif aux produits du corps humain


non soumis aux dispositions du titre Ier du livre VI du code de la santé
publique Art. 1er. - Ne sont pas soumis aux dispositions du titre Ier du livre
VI du code de la santé publique les produits du corps humain désignés ci-
après :

– Les cheveux ;

– Les ongles ;

– Les poils ;
– Les dents.

Aux termes de l’article 16 -1 du Code civil, les éléments et produits du


corps humain ne peuvent pas faire l’objet d’un droit patrimonial. Toutefois,
l’article 1er du décret du 4 août 1995 fait dérogation à ce principe à l’égard
notamment des cheveux. Or, en l’espèce Sansa souhaite vendre ses cheveux
et son rein. Au regard de la loi, si el e ne pourra pas vendre son rein, el e
pourra, en revanche, céder ses cheveux à titre onéreux.

Cas n° 2 : Une sportive célèbre, récemment médail ée, a été prise en


photographie à son insu. Cette photographie est parue dans la presse
accompagnée d’un article spéculant sur sa vie sentimentale.

La photographie d’une personne célèbre prise à son insu porte-t-elle


atteinte à son droit à l’image ?

Selon l’article 9 du code civil, l’image de la personne est protégée. Le


simple fait que la personne soit identifiable sur l’image en question porte
atteinte à ses droits.

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TITRE 1 – L’existence de la personne

Toutefois, la jurisprudence décide que l’atteinte n’est pas constituée lorsque


la personne a consenti à cette captation ou quand la protection de l’image
doit être conciliée avec la liberté de la presse. Si les personnes célèbres se
voient reconnaître un droit à l’image, la jurisprudence concilie ce principe
avec le droit du public à l’information. Dès lors, la captation et l’utilisation
de l’image d’une personne publique dans le cadre de ses activités publiques
ne nécessitent pas d’autorisation particulière. Au-delà de cette situation, il
est permis de déroger à la nécessité d’autorisation lorsque l’image concerne
des personnes se trouvant impliquées dans un événement d’actualité.
Dans cette situation, des photographies peuvent être diffusées sans
autorisation pour rendre compte des évènements (Cass. 1re civ., 20 février
2001, Bull. I n° 42, 98-23471).).

Toutefois, les images ainsi prises doivent être des images banales, prises
sans recherche de sensationnalisme, el es ne doivent pas porter atteinte à la
dignité de la personne (Cass., 1re civ., 20 février 2001 précité).

De surcroît, la jurisprudence retient que « la publication de photographies


représentant une personne pour illustrer des développements attentatoires à
sa vie privée porte nécessairement atteinte à son droit au respect de son
image » (Cass., 1re civ., 27 février 2007, Bull. I n° 85, n° 06-10393).

En l’espèce, Sophie n’a pas donné son autorisation pour la publication de


cette image, en outre, la photographie a été prise alors qu’el e était chez el
e. On peut donc considérer non seulement que l’image a été prise dans un
lieu privé, mais aussi que l’activité en cause n’est pas publique. Néanmoins,
Sophie venant de gagner une médaille se trouve au cœur de l’actualité
sportive ce qui pourrait justifier qu’une photographie d’el e soit diffusée
même sans son autorisation afin de rendre compte d’un évènement
d’actualité. Reste que l’on ne saurait considérer, en l’espèce, que les images
soient banales en raison du caractère sentimental de cel e-ci. L’atteinte à
l’image est donc constituée.

Un article de presse spéculant sur les relations sentimentales d’une


sportive célèbre peut-il constituer une atteinte à sa vie privée ?

L’article 9, alinéa 1er, du Code civil dispose que « Chacun a droit au respect
de sa vie privée ».

La protection de la vie privée interdit à un organisme de presse de révéler


au public des informations relatives à la vie sentimentale d’une personne
(Cass. 1re civ., 5 novembre 1996, Bul . I n° 378, n° 94-14798). Toutefois, le
principe de protection de la vie privée connaît certaines limites relatives,
notamment, à la notoriété des personnes concernées. Si ces personnes ont le
droit au respect de leur vie privée, ce droit doit être concilié avec la liberté
de la presse et le droit du public à l’information (Cass., 1re civ., 9 juil et
2003 Bull. I n° 172, n° 00-20289). C’est la nature des informations révélées
et leur importance réel e pour le public qui commande alors la solution.
Ainsi, la révélation de l’existence d’un enfant naturel du Prince de Monaco
quelques jours après son accession au trône a été considérée comme une
atteinte à sa vie privée (Cass. 1re civ., 27 févr. 2007, précité : « Toute
personne, quel que soit son rang, sa naissance, sa fortune, ses fonctions
présentes ou à venir a droit au respect de sa vie privée »).

En l’espèce, les informations contenues dans l’article concernent bien la vie


privée de Sophie.

Sa célébrité pourrait remettre en cause l’atteinte ainsi portée à sa vie privée


si comme le dit la jurisprudence les informations sont réel ement
importantes pour le public. Or, l’article mentionne sa vie de couple et une
grossesse potentiel e, ce qui ne revêt pas un caractère d’importance pour le
public. De sorte que l’atteinte à sa vie privée est constituée.

De quels moyens dispose une personne pour faire cesser une atteinte à
sa vie privée et à son image ?

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Chapitre 2 – Les effets de la personnalité

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Concernant l’atteinte à son image

Les sanctions applicables en cas d’atteinte illicite au droit à l’image sont de


deux ordres.

Des sanctions civiles peuvent tout d’abord être prononcées sur le fondement
de l’article 9 du Code civil.

En outre, l’article 226-1 du Code pénal interdit « au moyen d’un procédé


quelconque, volontairement de porter atteinte à l’intimité de la vie privée
d’autrui : 2° En fixant, enregistrant ou transmettant, sans le consentement
de cel e-ci, l’image d’une personne se trouvant dans un lieu privé ». Les
sanctions prévues sont d’un an d’emprisonnement et 45 000 euros
d’amende.

Toutefois, « lorsque les actes […] ont été accomplis au vu et au su des


intéressés sans qu’ils s’y soient opposés, alors qu’ils étaient en mesure de le
faire, le consentement de ceux-ci est présumé ».

En l’espèce, Sophie pourra donc, obtenir, la réparation du préjudice


résultant de l’atteinte à son image. De surcroît, l’image a été prise alors
qu’el e se trouvait dans un lieu privé. La photographie a été prise à son insu.
Par conséquent, les sanctions pénales prévues par l’article 226-1 du Code
pénal sont applicables.

Concernant l’atteinte à sa vie privée

Ces sanctions sont de même nature que cel es qui ont été envisagées au titre
du droit à l’image Néanmoins, la jurisprudence estime que le préjudice
résultant de l’atteinte et celui qui résulte du droit à l’image sont deux
préjudices distincts devant être réparés distinctement (Cass. 1re civ., 10 mai
2005, Bull. I, n° 206, n° 02-14730). En outre, la seule constatation de
l’atteinte à la vie privée suffit à engager la responsabilité (Cass. 1re civ., 5
nov. 1996, précité) sans qu’il soit nécessaire de caractériser la faute de
l’auteur de cette atteinte et l’existence d’un préjudice subi.

L’article 9, alinéa 2 du Code civil, dispose que « les juges peuvent, sans
préjudice de la réparation du dommage subi, prescrire toutes mesure, tel es
que séquestre, saisie et autres, propres à empêcher ou faire cesser une
atteinte à l’intimité de la vie privée ; ces mesures peuvent, s’il y a urgence,
être ordonnées en référé ».

La personne à la vie privée de laquel e il est porté atteinte peut demander,


en vertu de ce texte, non seulement la réparation du dommage subi mais
aussi la mise en œuvre de sanctions propres à faire cesser le dommage.
Ainsi, Sophie pourra obtenir des dommages et intérêts et saisir le juge des
référés pour obtenir la saisie et le séquestre des exemplaires du journal.

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Chapitre 3

La perte de la personnalité

Avant que la perte de la personnalité ne soit définitive (Section 2), deux


situations préliminaires sont envisageables, l’absence et la disparition
(Section 1).

Section 1

L’absence et la disparition

Dans certaines situations, il est impossible de savoir si la personne est


morte ou non. Ce ne sont pas des raisons médicales qui sont en cause
mais des raisons purement factuelles. Ainsi, lorsque l’on ignore si la
personne est morte ou vivante, on parle d’absence (§1). Mais lorsque
l’incertitude est moins grande, que la mort est quasi certaine, on parle
de disparition (§2).

§ 1. L’absence (articles 102 à 132 du Code civil)

Juridiquement, une personne absente est celle qui a cessé de paraître à son
domicile ou à sa résidence sans avoir donné de nouvelles (article 112 c. civ.)
Depuis une réforme du 28 décembre 1977, entrée en vigueur le 31 mars
1978, il est possible de distinguer deux temps, celui de la présomption
d’absence où l’on présume que l’intéressé est vivant (A) et celui de la
déclaration d’absence où l’on présume que l’intéressé est décédé (B).

A. La présomption d’absence

Il importe, dans un premier temps, de faire constater la présomption


d’absence (1) ce qui permettra, dans un second temps, de protéger les
intérêts du présumé absent (2). Une fois que cette période de présomption
d’absence aura pris fin, certains effets pourront se produire (3)

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TITRE 1 – L’existence de la personne

1. La constatation de l’absence

Il s’agit principalement dans un premier temps de préserver les intérêts


patrimoniaux de l’absent et de sa famille, mais aussi de permettre dans un
second temps l’abrégement du délai imposé avant l’obtention d’une
décision de déclaration d’absence. Pour obtenir cette protection, il faut,
d’une part, saisir le juge (a) et, d’autre part, remplir les conditions de la
constatation (b).

a. La saisine du juge

La demande de constatation de l’absence peut émaner des parties


intéressées. Il s’agit par cette expression de désigner ceux qui ont intérêt à
voir protéger les intérêts patrimoniaux de l’absent. On désigne ainsi le
conjoint, les héritiers présomptifs, les créanciers, les associés de l’absent.
Finalement, tous ceux qui ont intérêt à la désignation d’un administrateur
chargé d’assurer la gestion du patrimoine de l’absent.

La présomption d’absence peut également être constatée par le ministère


public

« spécialement chargé de veiller aux intérêts des présumés absents »

Lorsque la demande émane du conjoint, celui-ci va saisir le tribunal de


grande instance sur le fondement des articles 217 ou 219, 1426 ou 1429 du
Code civil. En dehors de cette hypothèse particulière, les autres intéressés
saisiront le juge des tutelles. Concernant la compétence territoriale, celle-ci
est reconnue au juge qui exerce ses fonctions auprès du tribunal « dans le
ressort duquel la personne dont il s’agit de constater la présomption
d’absence demeure ou a eu sa dernière résidence connue (art. 1062 al. 1
CPC.). À défaut de domicile ou de dernière résidence connue, le juge
compétent est celui du tribunal où demeure le demandeur. Le juge est saisi
par simple requête adressée ou remise au secrétariat-greffe de la juridiction
(CPC, art. 1063 et 1217). Il est indispensable que le demandeur à l’action
démontre que la personne a cessé de paraître à son domicile et qu’aucune
nouvelle n’a été obtenue de l’intéresser. L’audience n’est pas publique. En
la matière, le juge dispose d’un pouvoir souverain

b. Les conditions de la constatation

Il appartient au magistrat saisi de vérifier si la personne se trouve bien dans


une situation d’absence, celle-ci aux termes de l’article 112 du Code civil se
caractérise par deux éléments :

– l’intéressé a cessé de paraître au lieu de son domicile ou de sa résidence ;

– l’intéressé n’a donné aucune nouvelle.

La réunion de ces deux éléments est suffisante pour que soit judiciairement
déclarée une présomption d’absence.

Il appartiendra alors à celui qui saisit le juge de faire la preuve d’éléments


qui établissent le bien-fondé de sa demande. La preuve de ce fait peut être
apportée 9782340-033689_001-152.indd 36

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Chapitre 3 – La perte de la personnalité

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par tous moyens. En la matière, le juge est souverain pour décider si les
éléments de fait rassemblés permettent de constater la présomption
d’absence. Il est aussi libre d’en fixer le point de départ.

2. La protection du présumé absent


La période de présomption d’absence est au minimum de dix ans à compter
du jour où la présomption a été judiciairement constatée ou vingt ans depuis
la réception des dernières nouvelles si elle n’a pas fait l’objet d’une telle
constatation.

Pendant tout ce temps, les situations patrimoniale (a) et familiale (b) du


présumé absent seront protégées.

a. La situation patrimoniale

L’intervention du juge des tutelles n’est que subsidiaire en matière de


gestion des biens de l’absent, en effet, il n’a pas à agir dans deux cas :

– le présumé absent a laissé une procuration suffisante afin de le représenter


ou d’administrer ses biens (art. 121 al 1er c. civ.) ;

– le conjoint peut pourvoir suffisamment aux intérêts en cause par


l’application du régime matrimonial, et notamment par l’effet d’une
décision obtenue en vertu des articles 217 et 219, 1426 et 1429 (art. 121 al 2
c.civ.).

Ainsi, en vertu de ces textes, le conjoint peut ou bien se faire autoriser en


justice à passer seul un acte pour lequel le concours ou le consentement de
son conjoint serait nécessaire (art. 217 c. civ.) ou bien se faire habiliter par
la justice à le représenter, d’une manière générale, ou pour certains actes
particuliers dans l’exercice des pouvoirs résultant du régime matrimonial,
les conditions et l’étendue de cette représentation étant fixées par le juge
(art. 219, al. 1er c.civ.).

Dans les autres cas, le juge des tutelles a pour mission d’organiser la gestion
des biens de l’absent. Pour cela, il faut désigner un ou plusieurs parents ou
alliés, ou le cas échéant toutes autres personnes pour représenter la
personne présumée absente et pour administrer tout ou partie de ses biens
(art. 113 c.civ.). Il devra de préférence choisir parmi les parents ou alliés de
l’absent dès lors que ce choix préserve les intérêts de l’absent.

La représentation du présumé absent et l’administration de ses biens sont


soumises aux règles applicables à la tutelle des majeurs (art. 113 c.civ.).
Il appartient également au juge de décider comment seront réglées les
dépenses mises en œuvre pour l’administration des biens de l’absent. Le
juge fixe ainsi selon l’importance des biens, les sommes qu’il convient
d’affecter annuellement à l’entretien de la famille et aux charges du mariage
et détermine comment il est pourvu à l’établissement des enfants (art. 114 c.
civ.).

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TITRE 1 – L’existence de la personne

b. La situation familiale

L’absent étant présumé vivant, son mariage demeure intact. Toutefois, un


éloignement de plus deux ans permet au conjoint d’obtenir le divorce sur le
fondement de l’article 238 c. civ pour altération définitive du lien conjugal.

Quant aux enfants, ils continuent à bénéficier de la présomption de paternité


du mari de l’article 212 du Code civil s’ils sont nés durant cette période
d’absence.

3. La fin de la période de présomption d’absence

Deux situations, aux conséquences très différentes, peuvent entraîner la fin


de cette période : le retour de l’absent (a) ou son décès (b).

a. En cas de retour de l’absent

Lorsque le présumé absent revient à son domicile, donne ou fait donner des
nouvelles, la période de présomption d’absence prend fin sans toutefois
provoquer la disparition automatique des mesures de représentation et
d’administration qui ont été prises (art. 118 c. civ.).

Les mesures d’administration ne seront ainsi supprimées par le juge des


tutelles qu’à la demande de l’intéressé. Celui-ci recouvre alors les biens
gérés ou acquis pour son compte durant la période d’absence (art. 118 c.
civ.).

b. En cas de décès de l’absent

Au moment où le décès de l’absent est établi, la période de présomption


d’absence prend fin rétroactivement à la date retenue pour le décès. Tous les
actes accomplis depuis ce jour par l’administrateur des biens de l’absent,
vente ou bail par exemple, sont en principe frappés de nullité dès lors qu’il
apparaît en réalité que l’absent a disparu dans des circonstances de nature à
mettre sa vie en danger.

Toutefois, le législateur a admis que les droits acquis sans fraude sur le
fondement de la présomption d‘absence ne seraient pas remis en cause,
quelle que fût la date du décès. Il s’agit ici tout autant de protéger les tiers
de bonne foi que les intérêts du présumé absent. La précarité des actes
passés aurait pu rendre complexe l’administration de ses biens.

B. La déclaration d’absence

Pour que l’absence puisse produire des effets (2) une procédure précise doit
être respectée (1). L’absence sera alors déclarée et durera jusqu’à ce que
cette situation prenne fin (3).

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Chapitre 3 – La perte de la personnalité

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1. La procédure

Deux situations se présentent :

– la présomption d’absence a été judiciairement constatée selon les


modalités de l’article 112 du Code civil ou à l’occasion d’une procédure
prévue aux articles 217, 219 1426 ou 1429 du même code, l’absence peut
être déclarée une fois écoulé un délai de 10 ans depuis cette constatation.

– La présomption d’absence n’a pas été constatée judiciairement, le délai


est de 20 ans. Le délai part depuis les dernières nouvelles de celui qui un
jour avait cessé de paraître à son domicile ou dans sa résidence.

2. Les effets

Il y a là une présomption de décès. Le jugement déclaratif d’absence


emporte, à partir de la transcription tous les effets que le décès certain de
l’absent aurait eus (art. 128 al 1 c.civ.). La décision de déclaration
d’absence entraîne la cessation des mesures de représentation et
d’administration des intérêts de l’absent mises en place au cours de la
période précédente.

Elle emporte également ouverture de la succession de l’absent à compter du


jour de la transcription opérée à la requête du Procureur de la République
sur les registres du décès du lieu du domicile de l’absent ou de sa dernière
résidence. À

la date de la déclaration de l’absence, le mariage est éteint en conséquence


son conjoint peut contracter une nouvelle union (pacs, mariage).

3. La fin de l’état d’absence

L’absent qui donne ou fait donner des nouvelles ne saurait continuer à être
déclaré absent.

Ainsi, dès lors qu’il réparait ou que son existence est prouvée
postérieurement au jugement déclaratif d’absence, le TGI peut être saisi aux
fins d’annulation de sa décision. L’initiative de la requête appartient à tous
intéressés, au procureur de la République et évidemment à l’absent lui-
même.

Au plan patrimonial, lorsque la déclaration d’absence a été obtenue sans


fraude, l’absent dont l’existence est judiciairement constatée recouvre ses
biens et ceux recueillis durant son absence par succession… Sans qu’une
quelconque indemnité ne soit possible (art. 130 c. civ.).

En revanche, si la déclaration d’absence a été obtenue par fraude, celui qui


s’en est rendu coupable restituera à l’absent les revenus des biens dont il a
eu la jouissance, majorés des intérêts légaux calculés à compter du jour où
ils furent perçus, le tout sans préjudice de dommages et intérêts
complémentaires (art. 131 al 1 c. civ.).

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TITRE 1 – L’existence de la personne

Dans le cas particulier où la fraude est imputable au conjoint du déclaré


absent, celui-ci à la faculté d’attaquer la liquidation du régime matrimonial
dont le jugement déclaratif avait provoqué la dissolution (art. 131 al 2 c.
civ.).

Au plan familial, l’article 132 du Code civil décide que le mariage reste
dissous, même si le jugement déclaratif d’absence a été annulé.

Une autre situation peut se présenter, celle du décès certain de l’absent.


L’état d’absence cesse par la certitude du décès. Les actes d’état civil seront
alors rectifiés en ce sens.

§ 2. La disparition (article 88 à 92 du Code civil)

Dans cette hypothèse, le décès est extrêmement probable, bien que le corps
n’ait pas pu être retrouvé, les circonstances de la disparition, de nature à
mettre sa vie en danger1, permettent de mettre en œuvre une procédure
simplifiée de déclaration de décès.

Un jugement déclaratif de décès peut être demandé au tribunal de grande


instance dans le ressort duquel la disparition est intervenue (si elle a eu lieu
en France, sinon on prend le dernier domicile du disparu).
Les personnes pouvant agir sont le procureur de la République ou tout
intéressé.

Le tribunal peut alors ordonner toutes mesures d’information


complémentaires, enquête administrative sur les circonstances de la
disparition…

La date précise de la mort est alors fixée en tenant compte des présomptions
tirées des circonstances de la cause, à défaut est retenue le jour de la
disparition (art. 90 al 3 c. civ.).

Le jugement tiendra lieu d’acte de décès (art. 91 al 3 c. civ.) et est


opposable aux tiers qui peuvent seulement en obtenir la rectification. Son
dispositif est transcrit sur les registres de l’état civil du lieu réel ou présumé
du décès ou du lieu du dernier domicile du défunt. Ce jugement emporte
dissolution du mariage et ouverture de la succession.

Dans le cas où le disparu venait à réapparaître, le procureur de la


République ou tout intéressé peut poursuivre dans les formes des articles 89
et s. du Code civil, l’annulation du jugement. Pour les effets de cette
réapparition, on appliquera alors les mêmes règles que pour le retour de la
personne déclarée absente.

1. Naufrage, crash aérien, guerre, incendie.

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Chapitre 3 – La perte de la personnalité

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Section 2

La fin de la personnalité

La mort marque la fin de la personnalité juridique. Une fois le moment de


la
mort déterminé (§1) certains effets juridiques vont s’y attacher (§2).

§ 1. Le moment de la mort

Le constat de la mort est fait par le médecin. Le décès doit être déclaré dans
les 24 heures de sa survenance par n’importe quelle personne.

Depuis un décret n° 96-1041 du 2 décembre 1996 (art. R. 1232-1 s. c. civ.).


Le constat de la mort lorsqu’une personne présente un arrêt cardiaque et
respiratoire persistant est subordonné à la présence de trois éléments :

– l’absence totale de conscience et d’activité motrice constatée ;

– l’abolition de tous les réflexes du tronc cérébral ;

– l’absence totale de ventilation spontanée.

La date de la mort doit être fixée précisément en raison des conséquences


juridiques qui s’y attachent notamment en matière successorale.

À défaut de toute indication, le décès est réputé s’être produit le jour où il a


été constaté par l’officier d’état civil. Il s’agit d’une présomption qui peut
être contredite en rapportant la preuve que le décès est intervenu à un autre
moment.

§ 2. Les conséquences de la mort

Le décès emporte disparition de la personnalité juridique et ouverture de la


succession du défunt.

Juridiquement, il n’y a plus de personne, néanmoins une protection


continue à s’appliquer pour les restes du défunt. L’article 16-1-1 du Code
civil dispose que « le respect dû au corps humain ne cesse pas avec la mort
» ; « Les restes des personnes décédées, y compris les cendres de celles
dont le corps a donné lieu à crémation, doivent être traités avec respect,
dignité et décence. » Cette disposition a par exemple été employée pour
interdire l’exposition « Our body, à corps ouvert ». Il s’agissait d’exposer
des cadavres conservés et découpés dans des attitudes censées en permettre
une étude anatomique. La Cour de cassation a confirmé l’interdiction des
premiers juges en considérant que la finalité commerciale de l’exposition
heurtait le respect dû aux cadavres1.

1. Cass. 1re civ., 16 septembre 2010, n° 09-67456, Bul . I 174. V.

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TITRE 1 – L’existence de la personne

Concernant la sépulture, le Conseil d’État considère que le choix d’un mode


de sépulture, fait par la personne avant son décès, participe de la
manifestation de ses convictions personnelles et, à ce titre, doit en principe
être respecté. Néanmoins, dans l’intérêt de l’ordre et de la santé publics, un
tel choix est limité à l’inhumation et à la crémation ce qui exclut la
conservation du cadavre par congélation1.

Dans l’hypothèse où la personne n’aurait pas formulé son choix de son


vivant, il faudra rechercher ses intentions par tous moyens et à défaut
désigner la personne la mieux qualifiée pour décider de ses funérailles.

Depuis la loi du 19 décembre 2008, le partage des cendres entre les


membres de la famille du défunt, même décidé par lui de son vivant, semble
interdite. En outre, l’urne cinéraire ne peut plus être conservée dans un lieu
privé, mais doit être déposée dans un site cinéraire (C Général des Col
ectivités Territoriales L. 2223-18-2)

« À la demande de la personne ayant qualité pour pourvoir aux funérailles,


les cendres sont en leur totalité :

– soit conservées dans l’urne cinéraire, qui peut être inhumée dans une
sépulture ou déposée dans une case de columbarium ou scellée sur un

monument funéraire à l’intérieur d’un cimetière ou d’un site cinéraire visé à


l’article L. 2223-40 ;
– soit dispersées dans un espace aménagé à cet effet d’un cimetière ou d’un
site cinéraire visé à l’article L. 2223-40 ;

– soit dispersées en pleine nature, sauf sur les voies publiques ».

FOCUS

Cour de cassation chambre civile 1

Audience publique du jeudi 16 septembre 2010

N° de pourvoi : 09-67456

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS LA COUR DE CASSATION,


PREMIÈRE

CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

Attendu que la société Encore Events (la société) avait organisé, dans un
local parisien et à partir du 12 février 2009, une exposition de cadavres
humains

« plastinés », ouverts ou disséqués, installés, pour certains, dans des


attitudes évoquant la pratique de différents sports, et montrant ainsi le
fonctionnement des muscles selon l’effort physique fourni ; que les
associations « Ensemble contre la peine de mort » et « Solidarité Chine »,
alléguant un trouble manifestement illicite au regard des articles 16 et
suivants du Code civil, L. 1232-1 du code 1. CE 29 juillet 2002, n° 222180.

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Chapitre 3 – La perte de la personnalité

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de la santé publique et 225-17 du Code pénal, et soupçonnant par ailleurs au
même titre un trafic de cadavres de ressortissants chinois prisonniers ou
condamnés à mort, ont demandé en référé la cessation de l’exposition, ainsi
que la constitution de la société en séquestre des corps et pièces
anatomiques présentés, et la production par elle de divers documents lui
permettant de justifier tant leur introduction sur le territoire français que
leur cession par la fondation ou la société commerciale dont elle prétendait
les tenir ; Sur le premier moyen du pourvoi principal de la société, tel
qu’exposé au mémoire en demande et reproduit en annexe :

Attendu qu’il n’y a pas lieu de se prononcer sur ce moyen, qui ne serait pas
de nature à permettre l’admission du pourvoi ;

Et sur le second moyen du même pourvoi :

Attendu que la société fait grief à l’arrêt attaqué (Paris, 30 avril 2009)
d’avoir dit y avoir lieu à référé et de lui avoir fait interdiction de poursuivre
l’exposition des corps et pièces anatomiques litigieuse, alors, selon le
moyen :

1° / que la formation des référés n’est compétente pour prescrire les


mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent pour faire
cesser un trouble que si celui-ci est manifestement illicite, c’est-à-dire d’une
totale évidence, consistant en un non-respect caractérisé de la règle de droit
; que sa compétence doit, dès lors, être exclue en cas de doute sérieux sur le
caractère illicite du trouble invoqué ; qu’en l’espèce, la cour d’appel, qui,
d’une part, a procédé à un véritable débat de fond sur le sens qu’il convenait
de donner à l’article 16-1-1

du Code civil et sur son éventuelle applicabilité au cas d’espèce et qui,


d’autre part, a rappelé les termes des fortes divergences qui opposaient les
parties sur l’origine licite ou non des corps litigieux, n’a pas tiré les
conclusions qui s’évinçaient de ses propres constations en estimant qu’elle
était en présence, non d’un doute sérieux sur le caractère illicite du prétendu
trouble invoqué, mais d’une violation manifeste de ce même article 16-1-1,
justifiant qu’il y ait lieu à référé, et a violé, de ce fait, l’article 809 du code
de procédure civile ; 2° / que le respect dû au corps humain ne cesse pas
avec la mort et les restes des personnes décédées, y compris les cendres de
celles dont le corps a donné lieu à crémation, doivent être traités avec
respect, dignité et décence ; qu’en l’espèce, pour déterminer si les corps
exposés avaient été traités avec respect, dignité et décence, la cour d’appel a
recherché s’ils avaient une origine licite et, plus particulièrement, si les
personnes intéressées avaient donné leur consentement de leur vivant à
l’utilisation de leurs cadavres ; qu’en se fondant sur ces motifs inopérants,
tout en refusant, comme il lui était demandé, d’examiner les conditions dans
lesquelles les corps étaient présentés au public, la cour d’appel a privé sa
décision de base légale au regard de l’article 16-1-1 du Code civil ;
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TITRE 1 – L’existence de la personne

3° / que, par ail eurs, la cour d’appel, a expressément relevé que « le respect
du corps n’interdisait pas le regard de la société sur la mort et sur les rites
religieux ou non qui l’entourent dans les différentes cultures, ce qui
permettait de donner à voir aux visiteurs d’un musée des momies extraites
de leur sépulture, voire d’exposer des reliques, sans entraîner d’indignation
ni de trouble à l’ordre public » ; que la juridiction d’appel a privé sa
décision de base légale au regard de l’article 16-1-1 du Code civil en ne
recherchant pas, comme sa propre motivation aurait dû l’y conduire, si,
précisément, l’exposition litigieuse n’avait pas pour objet d’élargir le champ
de la connaissance, notamment grâce aux techniques modernes, en la
rendant accessible au grand public de plus en plus curieux et soucieux
d’accroître son niveau de connaissances, aucune différence objective ne
pouvant être faite entre l’exposition de la momie d’un homme qui, en
considération de l’essence même du rite de la momification, n’a jamais
donné son consentement à l’utilisation de son cadavre et celle, comme en
l’espèce, d’un corps donné à voir au public a des fins artistiques,
scientifiques et éducatives ; 4° / qu’enfin celui qui réclame l’exécution
d’une obligation doit la prouver ; qu’en l’espèce, en ayant affirmé qu’il
appartenait à la société Encore Events, défenderesse à l’instance en référé,
de rapporter la preuve de l’origine licite et non frauduleuse des corps
litigieux et de l’existence de consentements autorisés, la cour d’appel a
inversé la charge de la preuve et a violé, de ce fait, l’article 1315 du Code
civil ;

Mais attendu qu’aux termes de l’article 16-1-1, alinéa 2, du Code civil,


les restes des personnes décédées doivent être traités avec respect,
dignité et décence ; que l’exposition de cadavres à des fins
commerciales méconnaît cette exigence ;

Qu’ayant constaté, par motifs adoptés non critiqués, que l’exposition


litigieuse poursuivait de telles fins, les juges du second degré n’ont fait
qu’user des pouvoirs qu’ils tiennent de l’article 16-2 du Code civil en
interdisant la poursuite de celle-ci ; que le moyen n’est pas fondé ;

Et sur le moyen unique du pourvoi incident, tel qu’il figure au mémoire en


défense et est reproduit en annexe :

Attendu qu’en ses trois branches le moyen ne tend qu’à contester


l’appréciation souveraine portée par la cour d’appel sur l’opportunité
d’ordonner les mesures sollicitées ; qu’il ne peut donc être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois principal et incident ;

Laisse à la société Encore Events, d’une part, et aux associations Ensemble


contre la peine de mort et Solidarité Chine, d’autre part, la charge des
dépens afférents à leur pourvoi respectif ;

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Chapitre 3 – La perte de la personnalité

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Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi


fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé
par le président en son audience publique du seize septembre deux mille
dix.

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TITRE 1 – L’existence de la personne

CAS PRATIQUE

La perte de la personnalité

Quentin, footbal eur, et Sophie se sont mariés en 2012, ils vivent ensemble
à Lyon. Il y a 3 mois, le mari de Sophie a malheureusement disparu au-
dessus de la Hongrie lors d’un trajet en avion. Ce dernier aurait disparu des
radars après une défail ance du moteur, mais le corps de Quentin n’a jamais
été retrouvé. Sophie ne sait pas trop où el e en est et ce qu’elle doit faire. Et
ce, d’autant plus qu’il a quelques semaines, elle a rencontré Vincent qui
parle déjà de l’épouser.

Que lui conseil ez-vous ? Pourra-t-el e épouser Vincent ?

Sophie s’interroge également sur la question de savoir ce qui se passerait si


el e épousait Vincent et que Quentin réapparaissait.

Correction

Un couple, marié en 2012, réside à Lyon. Il y a 3 mois, le conjoint disparaît


dans un accident d’avion. L’épouse souhaiterait pouvoir se remarier mais
s’inquiète du retour éventuel du disparu.

Quelle est la procédure à engager lorsqu’une personne disparaît dans


des circonstances de nature à mettre sa vie en danger ?

Lorsqu’une personne ne donne plus de nouvel es et ne reparaît plus à son


domicile, deux situations juridiques peuvent être envisagées : l’absence et la
disparition.

L’article 112 du Code civil prévoit que lorsqu’une personne a cessé de


paraître à son domicile ou à sa résidence et ne donne plus de nouvel es, le
juge des tutel es peut constater qu’il y a présomption d’absence.

L’article 88 du Code civil prévoit, dans son alinéa 1er, la possibilité de


déclaration judiciaire de décès de tout Français disparu en France ou hors
de France, dans des circonstances de nature à mettre sa vie en danger,
lorsque son corps n’a pu être retrouvé. La différence entre les deux
procédures porte donc sur l’existence ou non d’un danger de mort.

L’appréciation des circonstances de fait relève du pouvoir souverain des


juges du fond (Cass. 1re civ., 14 mars 1995, n° 92-21226).

Aux termes de l’article 88 du Code civil et de l’article 112, l’absence et la


disparition se distingue par les circonstances qui conduisent à mettre en
œuvre une procédure. En effet, dans le cas de la disparition, il existe un
danger de mort ce qui n’est pas le cas de l’absence.

Or, en l’espèce, Quentin a justement disparu dans des circonstances de


nature à mettre sa vie en danger : un crash d’avion, de sorte que c’est d’une
disparition dont il sera ici question.

Quelle est la procédure à mettre en œuvre pour faire constater une


disparition ?

Article 88 du Code civil

« Peut-être judiciairement déclaré, à la requête du procureur de la


République ou des parties intéressées, le décès de tout Français disparu en
France ou hors de France, dans des circonstances de nature à mettre sa vie
en danger, lorsque son corps n’a pu être retrouvé.

Peut, dans les mêmes conditions, être judiciairement déclaré le décès de


tout étranger ou apatride disparu soit sur un territoire relevant de l’autorité
de la France, soit à bord d’un bâtiment ou aéronef français, soit même à
l’étranger s’il avait son domicile ou sa résidence habituel e en France.
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Chapitre 3 – La perte de la personnalité

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La procédure de déclaration judiciaire de décès est également applicable


lorsque le décès est certain mais que le corps n’a pu être retrouvé. »

Article 89 du Code civil

« La requête est présentée au tribunal de grande instance du lieu de la mort


ou de la disparition, si cel e-ci s’est produite sur un territoire relevant de
l’autorité de la France, sinon au tribunal du domicile ou de la dernière
résidence du défunt ou du disparu ou, à défaut, au tribunal du lieu du port
d’attache de l’aéronef ou du bâtiment qui le transportait. À défaut de tout
autre, le tribunal de grande instance de Paris est compétent.

Si plusieurs personnes ont disparu au cours du même événement, une


requête col ective peut être présentée au tribunal du lieu de la disparition, à
celui du port d’attache du bâtiment ou de l’aéronef, au tribunal de grande
instance de Paris ou à tout autre tribunal de grande instance que l’intérêt de
la cause justifie. »

La procédure à mettre en œuvre en cas de disparition est la suivante. Tout


d’abord, une requête en disparition doit être présentée par le procureur de la
République ou les parties intéressées (C. civ., art. 88, al. 1er). La juridiction
compétente est le tribunal de grande instance du lieu de la mort ou de la
disparition si cel e-ci s’est produite sur un territoire relevant de l’autorité de
la France (C. civ., art. 89, al. 1er). Sinon, il s’agit du tribunal du domicile ou
de la dernière résidence ou, à défaut, le tribunal du lieu du port d’attache de
l’avion ou du navire qui le transportait. Enfin, à défaut de tout autre,
l’article 89 du Code civil attribue compétence au tribunal de grande
instance de Paris. En l’espèce, la disparition s’est produite à l’étranger. Par
conséquent, la juridiction compétente est le tribunal de grande instance du
domicile de Quentin. Ainsi, Sophie doit présenter une requête en disparition
devant le TGI de Lyon qui ordonnera une enquête s’il estime que le décès
n’est pas suffisamment établi (C. civ., art. 90, al. 2).

Suite à la mise en œuvre d’une procédure de disparition, la femme du


disparu peut-elle se remarier ?

Article 91 du Code civil

« Le dispositif du jugement déclaratif de décès est transcrit sur les registres


de l’état civil du lieu réel ou présumé du décès et, le cas échéant, sur ceux
du lieu du dernier domicile du défunt.

Mention de la transcription est faite en marge des registres à la date du


décès. En cas de jugement col ectif, des extraits individuels du dispositif
sont transmis aux officiers de l’état civil du dernier domicile de chacun des
disparus, en vue de la transcription.

Les jugements déclaratifs de décès tiennent lieu d’actes de décès et sont


opposables aux tiers, qui peuvent seulement en obtenir la rectification ou
l’annulation, conformément aux articles 99 et 99-1 du présent code. »

Aux termes de l’article 91 du Code civil, Le jugement déclaratif de décès


tiendra lieu d’acte de décès. En conséquence, Sophie sera considérée
comme veuve et pourra se remarier avec Quentin.

Quelles sont les conséquences de la réapparition du disparu sur le


remariage de son ex-épouse ?

Article 92 du Code civil

« Si celui dont le décès a été judiciairement déclaré reparaît postérieurement


au jugement déclaratif, le procureur de la République ou tout intéressé peut
poursuivre, dans les formes prévues aux articles 89 et suivants, l’annulation
du jugement.

Les dispositions des articles 130, 131 et 132 sont applicables, en tant que de
besoin.

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TITRE 1 – L’existence de la personne

Mention de l’annulation du jugement déclaratif sera faite en marge de sa


transcription. »

Article 132 du Code civil

« Le mariage de l’absent reste dissous, même si le jugement déclaratif


d’absence a été annulé. »

En vertu des articles 92 et 132 du Code civil, le mariage de l’absent ou du


disparu reste dissous, même si le jugement déclaratif de décès a été annulé
suite à la réapparition de l’absent ou du disparu.

Ainsi, le jugement déclaratif de décès de Quentin sera annulé mais son


mariage avec Sophie restera dissous. Dès lors, le mariage de Sophie et
Vincent demeurera valable 9782340-033689_001-152.indd 48

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Chapitre 3 – La perte de la personnalité

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QUIZ

L’existence de la personne

Q1. Le fœtus est une personne physique

OUI – NON – Cela dépend

Q2. Les conventions de mères porteuses sont autorisées en France au nom


du principe d’indisponibilité
OUI – NON – Cela dépend

Q3. L’urne funéraire peut être conservée au domicile de la famil e du défunt


OUI – NON – Cela dépend

Q4. Le consentement de la personne est nécessaire pour une intervention


chirurgicale OUI – NON – Cela dépend

Q5. En France, seule l’inhumation est autorisée

OUI – NON – Cela dépend

Q6. Il est possible de vendre un rein

OUI – NON – Cela dépend

Q7. La déclaration de la naissance d’un enfant se fait

R1. Dans les cinq jours maximum devant l’officier d’état civil

R2. Dans les deux jours maximum devant l’officier d’état civil

R3. Dans les trois jours maximum devant l’officier d’état civil

Q8. Pour pouvoir invoquer une atteinte à son droit à l’image, il faut
nécessairement R1. Être identifiable

R2. Avoir son nom mentionné sous l’image

R3. Être ridicule sur la photographie

Q9. Il peut être fait obstacle au droit à l’image d’une personne du fait de
R1. La liberté d’expression

R2. La liberté d’opinion

R3. La liberté de croyance

Q.10 Le disparu est-il présumé mort ou vivant ?


R1. Mort

R2. Vivant

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TITRE 1 – L’existence de la personne

Réponses

Q1. Non, la personnalité s’acquiert à la naissance à condition d’être né


vivant et viable.

Q2. Non, el es sont interdites en raison du principe d’indisponibilité.

Q3. Non, l’urne cinéraire ne peut plus être conservée dans un lieu privé,
mais doit être déposée dans un site cinéraire (C Général des Col ectivités
Territoriales L. 2223-18-2.

Q4. Cela dépend. En principe le consentement est nécessaire, mais par


exception l’article 16-3 du Code civil permet de passer outre le
consentement par exemple pour une intervention chirurgicale d’urgence.

Q5. Non, la crémation est aussi possible.

Q6. Non, le principe d’indisponibilité du corps humain l’interdit.

Q7. 1.

Q8. 1.

Q9. 1.

Q10. 1, en raison des circonstances particulières qui entourent sa


disparition, il est présumé décédé.
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Titre 2

L’IDENTIFICATION DE LA PERSONNE

Un des premiers éléments permettant d’identifier la personne est le nom


(Chapitre 1) auquel on attache certains compléments et accessoires
(Chapitre 2). À côté du nom et de ses accessoires figurent le sexe (Chapitre
3), le domicile (Chapitre 4) et l’état civil (Chapitre 5).

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Chapitre 1

Le nom

Deux questions principales vont nous intéresser, celle de l’attribution du


nom (Section 1) et celle de l’utilisation du nom et des droits qui s’y
attachent (Section 2).

Section 1

L’attribution du nom

Il existe deux modes d’attribution du nom. Le nom est le plus couramment


attribué en raison de la filiation (§1) mais il peut avoir une autre origine, en
cas d’accouchement sous x notamment (§2).

§ 1. L’attribution par la filiation


Trois situations sont possibles. L’enfant est né dans les liens du mariage
(A), hors de ces liens (B) ou a été adopté (C).

A. L’enfant né dans les liens du mariage

Traditionnellement, l’enfant né du mariage prenait de plein droit le nom de


son père. Désormais, la loi du 4 mars 2002, en principe applicable aux
enfants nés après le 1er janvier 2005, offre aux parents la faculté de donner
à l’enfant un autre nom que celui du père à condition qu’ils expriment leur
volonté en ce sens au moment de la déclaration de naissance. Selon l’article
311-21 du Code civil, « lorsque la filiation d’un enfant est établie à l’égard
de ses deux parents au plus tard le jour de la déclaration de sa naissance ou
par la suite mais simultanément, ces derniers choisissent le nom de famille
qui lui est dévolu : soit le nom du père, soit le nom de la mère, soit leurs
deux noms accolés dans l’ordre choisi par eux dans la limite d’un nom de
famille pour chacun d’eux. En l’absence de déclaration conjointe à
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Titre 2 – L’identification de la personne

l’officier de l’état civil mentionnant le choix du nom de l’enfant, celui-ci


prend le nom de celui de ses parents à l’égard duquel sa filiation est établie
en premier lieu et le nom de son père si sa filiation est établie
simultanément à l’égard de l’un et de l’autre. En cas de désaccord entre les
parents, signalé par l’un d’eux à l’officier de l’état civil, au plus tard au jour
de la déclaration de naissance ou après la naissance, lors de l’établissement
simultané de la filiation, l’enfant prend leurs deux noms, dans la limite du
premier nom de famille pour chacun d’eux, accolés selon l’ordre
alphabétique ».

En outre, il est prévu par cette même disposition que « lorsqu’il a déjà été
fait application du présent article, du deuxième alinéa de l’article 311-23 ou
de l’article 357 à l’égard d’un enfant commun, le nom précédemment
dévolu ou choisi vaut pour les autres enfants communs ».
Afin d’éviter les problèmes liés à l’addition de nom au fil des générations, il
est prévu que lorsque les parents ou l’un d’entre eux portent un double nom
de famille et décident d’attribuer à leur enfant le nom de chacun d’eux, ils
peuvent lui transmettre qu’un seul des éléments de ce double nom. L’enfant
de M. A-B et de Mme C-D pourra par exemple avoir pour nom A-C ; B-D.

B. L’enfant né hors du mariage

Tout dépend ici si les deux parents ont déclaré l’enfant au moment de sa
naissance ou si tel n’est pas le cas

Prenons la première hypothèse, la filiation est établie à l’égard des deux


parents dès la déclaration de naissance. Par principe, dans cette situation,
s’appliqueront les mêmes règles que celles relatives à l’enfant né dans le
mariage. L’enfant prend donc le nom de son père à défaut de manifestation
contraire de volonté de la part de ses deux parents au moment de la
déclaration de naissance.

Prenons la seconde hypothèse, la filiation de l’enfant est établie


successivement à l’égard de l’un puis de l’autre de ces parents. La mère a
par exemple déclaré son enfant dès la naissance et son père ne l’a reconnu
que plus tard. Dans ce cas, l’enfant porte en principe le nom de celui dont la
filiation a été établie en premier.

Toutefois, par déclaration conjointe devant l’officier d’état civil, les parents
peuvent pendant la minorité de l’enfant, et sous réserve de son accord s’il a
plus de 13 ans :

– substituer au nom qu’il portait jusqu’à présent le nom de celui de ses


parents à l’égard duquel la filiation a été établie en second lieu ;

– ou lui donner un nom formé des noms de ses parents accolés… (v. règles
précédentes).

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Chapitre 1 – Le nom

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C. L’enfant adopté

Les règles vont varier selon la nature de l’adoption qui peut être plénière (1)
ou simple (2).

1. L’adoption plénière

Du fait de l’adoption plénière de l’enfant, sa filiation d’origine est évincée.

L’éviction de la filiation emporte alors aussi celle du nom.

L’article 357 du Code civil dispose que « l’adoption confère à l’enfant le


nom de l’adoptant.

En cas d’adoption de l’enfant du conjoint ou d’adoption d’un enfant par


deux époux, l’adoptant et son conjoint ou les adoptants choisissent, par
déclaration conjointe, le nom de famille dévolu à l’enfant : soit le nom de
l’un d’eux, soit leurs deux noms accolés dans l’ordre choisi par eux, dans la
limite d’un nom de famille pour chacun d’eux.

Cette faculté de choix ne peut être exercée qu’une seule fois.

En l’absence de déclaration conjointe mentionnant le choix de nom de


l’enfant, celui-ci prend le nom de l’adoptant et de son conjoint ou de chacun
des deux adoptants, dans la limite du premier nom de famille pour chacun
d’eux, accolés selon l’ordre alphabétique.

Lorsqu’il a été fait application de l’article 311-21, du deuxième alinéa de


l’article 311-23 ou du présent article à l’égard d’un enfant commun, le nom
précédemment dévolu ou choisi vaut pour l’adopté.

Lorsque les adoptants ou l’un d’entre eux portent un double nom de famille,
ils peuvent, par une déclaration écrite conjointe, ne transmettre qu’un seul
nom à l’adopté.
Sur la demande du ou des adoptants, le tribunal peut modifier les prénoms
de l’enfant. »

On le voit il s’agit ici d’adapter à l’adoption les règles précédemment


énoncées pour un enfant né durant le mariage de ses parents.

2. L’adoption simple

Dans le cas d’une adoption simple l’article 363 du Code civil dispose :

« L’adoption simple confère le nom de l’adoptant à l’adopté en l’ajoutant au


nom de ce dernier. Toutefois, si l’adopté est majeur, il doit consentir à cette
adjonction.

Lorsque l’adopté et l’adoptant, ou l’un d’eux, portent un double nom de


famille, le nom conféré à l’adopté résulte de l’adjonction du nom de
l’adoptant à son propre nom, dans la limite d’un seul nom pour chacun
d’eux. Le choix du nom adjoint ainsi que l’ordre des deux noms appartient
à l’adoptant, qui doit recueillir le 9782340-033689_001-152.indd 55

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56

Titre 2 – L’identification de la personne

consentement personnel de l’adopté âgé de plus de treize ans. En cas de


désaccord ou à défaut de choix, le nom conféré à l’adopté résulte de
l’adjonction en seconde position du premier nom de l’adoptant au premier
nom de l’adopté.

En cas d’adoption par deux époux, le nom ajouté à celui de l’adopté est, à la
demande des adoptants, celui de l’un d’eux, dans la limite d’un nom. Si
l’adopté porte un double nom de famille, le choix du nom conservé et
l’ordre des noms adjoints appartient aux adoptants, qui doivent recueillir le
consentement personnel de l’adopté âgé de plus de treize ans. En cas de
désaccord ou à défaut de choix, le nom conféré à l’adopté résulte de
l’adjonction en seconde position du premier nom des adoptants selon
l’ordre alphabétique, au premier nom de l’adopté.

Le tribunal peut, toutefois, à la demande de l’adoptant, décider que l’adopté


ne portera que le nom de l’adoptant ou, en cas d’adoption de l’enfant du
conjoint, que l’adopté conservera son nom d’origine. En cas d’adoption par
deux époux, le nom de famille substitué à celui de l’adopté peut, au choix
des adoptants, être soit celui de l’un d’eux, soit leurs deux noms accolés
dans l’ordre choisi par eux et dans la limite d’un seul nom pour chacun
d’eux. Cette demande peut également être formée postérieurement à
l’adoption. Si l’adopté est âgé de plus de treize ans, son consentement
personnel à cette substitution du nom de famille est nécessaire. »

§ 2. Le cas particulier de l’accouchement sous x

Cette attribution est prévue par l’article 57 alinéa 2 du Code civil. Il dispose
que : « La femme qui a demandé le secret de son identité lors de
l’accouchement peut faire connaître les prénoms qu’elle souhaite voir
attribuer à l’enfant. À défaut ou lorsque les parents de celui-ci ne sont pas
connus, l’officier de l’état civil choisit trois prénoms dont le dernier tient
lieu de nom de famille à l’enfant. L’officier de l’état civil porte
immédiatement sur l’acte de naissance les prénoms choisis. Tout prénom
inscrit dans l’acte de naissance peut être choisi comme prénom usuel ».

Ainsi, l’enfant sans filiation connue reçoit de l’officier d’état civil un nom
et un prénom. L’attribution provisoire s’effacera si un lien de filiation est
créé.

Section 2

L’utilisation du nom

Durant la vie d’un personne son nom peut être amené à changer selon
certaines conditions (§1). En outre, ce nom patronymique doit être protégé
(§2).

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Chapitre 1 – Le nom

57

§ 1. Le changement de nom

Le changement de nom peut résulter d’un changement d’état (A) ou non


(B).

A. Le changement de nom par changement d’état

Parmi différentes situations, nous en envisagerons deux, le changement


d’état est lié à un changement de filiation ou à une demande de francisation.

D’une part, lorsque le lien de filiation a été établi ou modifié, il est


nécessaire de donner à l’enfant le nom qui correspond à sa nouvel e
filiation.

Ainsi, la reconnaissance d’un enfant pour lequel le secret de la naissance


avait d’abord été réclamé emporte l’éviction du nom que lui avait donné
l’officier de l’état civil (art. 58 al. 6 c. civ.). De même que l’adoption simple
peut pour des motifs graves être judiciairement révoquée de sorte que tous
les effets qui s’y attachent, et pour ce qui nous intéresse, le nom de l’enfant,
disparaissent.

D’autre part, toute personne qui acquiert ou recouvre la nationalité française


peut demander la francisation de son nom, mais aussi de ses prénoms,
lorsque son apparence, sa consonance ou son caractère étranger « peut
gêner son intégration dans la communauté française 1 ». Plusieurs
possibilités existent pour la francisation du nom :

– Traduire le nom s’il peut l’être ;

– Transformer le nom étranger pour lui donner une consonance française ;

– Reprendre le nom français d’un ascendant français.


En revanche, il est impossible de prendre un nouveau nom sans rapport
avec le nom de naissance ou jamais porté dans sa famille.

La francisation peut être sollicitée lors de la demande de naturalisation ou


de réintégration ou de déclaration d’acquisition de la nationalité française.
Tout intéressé peut faire opposition dans les deux mois suivant la
publication de l’acte au journal officiel.

B. Le changement de nom en l’absence de changement d’état

La loi du 8 janvier 1993 n° 93-22 dispose que « toute personne qui justifie
d’un intérêt légitime peut demander à changer de nom ». Il faudra pour
l’auteur de la demande, qui peut être présentée à tout moment, démontrer la
légitimité de l’intérêt qu’il évoque à l’appui de sa requête. (Articles 60 à 61-
4 du Code civil) La demande de changement de nom pour motif légitime
concerne par exemple les cas suivants :

1. L. 25 octobre 1972, n° 72-964, art. 1er.

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Titre 2 – L’identification de la personne

– nom difficile à porter, car pouvant être perçu comme ridicule ou péjoratif
;

– ou nom s’étant illustré de manière éclatante sur le plan national, (porter le


nom d’une personne célèbre avec une mauvaise réputation).

– consacrer l’usage constant et continu d’un nom (établir l’utilisation d’un


autre nom depuis longtemps et que celui-ci identifie la personne
publiquement).

– si les frères et sœurs portent des noms différents et que tous souhaitent
porter le même nom
– éviter les conséquences résultant de la gravité des agissements pour
lesquels les père ou mère ont été condamné.

À noter, dans une décision du 16 mai 20181, le Conseil d’État a rappelé que
des motifs d’ordre affectif peuvent, dans des circonstances exceptionnelles,
caractériser l’intérêt légitime requis par le Code civil pour changer de nom
de famille.

Dans cette affaire, la requérante demandait à ne plus porter le nom de son


père et à se voir attribuer celui de sa mère, qui l’avait élevée. À l’appui de
sa demande, elle faisait valoir qu’elle avait été abandonnée par son père à
l’âge de quatre ans.

Celui-ci n’avait plus eu aucun contact avec elle depuis lors. Il n’avait
subvenu ni à son éducation ni à son entretien, alors pourtant qu’il en avait
l’obligation en vertu d’une décision du juge aux affaires familiales. Il
n’avait pas non plus exercé le droit de visite et d’hébergement qui lui avait
été reconnu. Le Conseil d’État a considéré que ces circonstances
exceptionnelles étaient de nature à caractériser l’intérêt légitime requis pour
changer de nom et a accepté sa demande.

Le changement de nom doit alors être autorisé par décret. Il prend effet
lorsqu’il n’y a pas d’opposition à l’expiration d’un délai de deux mois.
L’opposition peut, par exemple, venir d’une personne qui porte le nom
qu’autrui souhaite prendre.

Le Conseil d’État va alors apprécier la légitimité des intérêts en présence :


risque de confusion, d’atteinte à l’image d’une famille déjà connue sous le
nom voulu…

En cas d’opposition, le décret prend effet au rejet de l’opposition. La


modification du nom s’étend de plein droit aux enfants du bénéficiaire s’ils
ont moins de 13

ans, au-delà leur consentement est requis. Mention est portée sur le registre
d’état civil de chacun des intéressés.

§ 2. La protection du nom
En raison de ces caractères bien particuliers (A), le nom va pouvoir faire
l’objet d’une protection notamment contre l’usurpation (B).

1. Conseil d’État, 2e et 7e chambres réunies décision du 16 mai 2018 n°


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Chapitre 1 – Le nom

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A. Les caractères du nom

En premier lieu, on dit que le nom est immuable. Une personne ne saurait a
priori acquérir un nom différent de celui que désigne son acte de naissance.

Il existe une exception à ce principe celle de l’utilisation prolongée d’un


nom d’emprunt. Ce mode particulier d’acquisition d’un nom suppose que
l’usage invoqué a été loyal (sans fraude), public (un nom couramment
employé), incontesté (nul ne s’est élevé contre l’emprunt de ce nom) et
anciennement établi, ce qui suppose en pratique une possession d’état
prolongé de l’ordre de plusieurs décennies.

Cour de cassation chambre civile 1

Audience publique du mercredi 23 juin 2010

Sur le moyen unique, pris en ses cinq branches, ci-après annexé :

Attendu que Mme X… est née le 25 mars 1990 à Bastia ; qu’elle avait été
reconnue par sa mère, Mme Y…, avant sa naissance, le 2 mars 1990 ;
qu’elle a été légitimée par le mariage, célébré le 6 décembre 1997, de Mme
Y… avec M.

X… ; que le 8 juin 2007, après son émancipation, Mme X… a saisi le


président du tribunal de grande instance d’une demande de rectification de
son nom patronymique au motif qu’elle justifiait d’une possession loyale et
prolongée du nom maternel Y… depuis sa naissance ;

Attendu que Mme X… fait grief à l’arrêt attaqué (Bastia, 25 juin 2008) de
l’avoir déboutée de sa demande tendant à voir substituer le nom « Y… » au
nom « X… » dans les actes de l’état civil ;

Attendu que si la possession d’un nom est propre à conférer à celui qui le
porte le droit à ce nom, la loi n’ayant réglé ni la durée, ni les conditions
d’une telle possession, il appartient aux juges du fond d’en apprécier
souverainement la loyauté et les effets ; que la cour d’appel, qui a
justement retenu que la possession devait être suffisamment longue
pour témoigner d’une volonté persistante de s’approprier ce nom, a
constaté, d’abord, que Mme X… avait acquis le nom de son père en
1997 à la suite de la légitimation puis, que pour justifier de l’usage du
nom de sa mère, elle produisait des pièces concernant sa scolarité, ses
activités culturelles, sa mutuelle, sa carte nationale d’identité et des
pièces bancaires couvrant une période de dix ans, entre le 6 décembre
1997 et 2007 ; qu’elle en a souverainement déduit que ces éléments étaient
insuffisants pour établir une possession prolongée de nature à permettre
l’acquisition du nom de « Y… » et a, par ce seul motif, légalement justifié
sa décision En deuxième lieu, le nom est indisponible. En tant que droit
extrapatrimonial, le nom est indisponible, il ne saurait ainsi être cédé à un
tiers. Toutefois, son 9782340-033689_001-152.indd 59

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Titre 2 – L’identification de la personne

titulaire peut renoncer à le défendre contre une éventuelle usurpation


moyennant une contrepartie financière. Le tiers cherchant par exemple à
utiliser ce nom dans un contexte commercial.

Le nom ne peut pas non plus être transmis par voie testamentaire sauf
exception tirée de la loi du 2 juillet 1993 relative aux citoyens morts pour la
patrie. Selon l’article 4 de la loi « tout individu, s’il est dans l’ordre de la
descendance, le dernier représentant d’une famil e, peut, en prévision du
cas où il serait tué à l’ennemi sans postérité, transmettre son nom de famil
e par disposition de dernière volonté à l’un de ses parents au degré
successible, même non appelé à sa succession ».

En troisième est dernier lieu, le nom est imprescriptible. En principe, le


nom ne saurait se perdre par le nom usage. Il est toujours possible d’agir en
justice pour en assurer la défense.

B. L’usurpation

Toute personne peut contester l’utilisation illicite par un tiers de son nom ou
encore l’attribution à un tiers de son propre nom.

L’article 433-19 du code pénal dispose qu’« Est puni de six mois
d’emprisonnement et de 7 500 euros d’amende le fait, dans un acte public
ou authentique ou dans un document administratif destiné à l’autorité
publique et hors les cas où la réglementation en vigueur autorise à souscrire
ces actes ou documents sous un état civil d’emprunt :

1° De prendre un nom ou un accessoire du nom autre que celui assigné par


l’état civil ;

2° De changer, altérer ou modifier le nom ou l’accessoire du nom assigné


par l’état civil. »

Une difficulté peut survenir lorsque le nom d’une personne est utilisé par
une entreprise, un artiste, un romancier… pour désigner un produit ou un
personnage.

Dans ces situations, il importe de concilier le droit au respect du nom avec


l’exercice des libertés fondamentales du commerce, de l’industrie, de la
création littéraire et artistique ou encore de la liberté d’expression. Ce qui
importe ici c’est le risque de confusion.

S’il est impossible de constater un risque de confusion préjudiciable au


titulaire du nom, ce dernier ne saurait s’opposer à l’utilisation du mot que
constitue son nom de famille au rang de marque servant à désigner un
produit personnage.

Ainsi, M. Dop n’a pas pu empêcher l’usage de son nom par la marque Dop1
; ni le 1. Cass. 1re civ., 26 mai 1970, Bul . I n° 174. “Après avoir rappelé à
bon droit que le demandeur est tenu de justifier de l’existence d’une
confusion possible a laquelle il a intérêt a mettre fin, lorsque, comme en
l’espèce, le nom patronymique est utilisé a des fins commerciales ou
publicitaires, les juges d’appel, ont relèvé “que 9782340-033689_001-
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Chapitre 1 – Le nom

61

docteur Virag pour le viagra1. Selon la même logique, le titulaire du nom ne


saurait interdire que ce dernier serve à identifier un personnage de BD, de
roman… lorsque son nom est très répandu ou sert à désigner un personnage
de fiction qui évolue dans des conditions très différentes de celles dans
lesquelles vit le demandeur.

ILLUSTRATION

Cour de cassation chambre civile 1,

10 avril 2013, n° 12-14525, Bull. I n° 73

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Versailles, 25 février 2010), que la société


américaine Coca-Cola Company commercialise des boissons sous la
marque française dénominative « Coca-Cola light sango », dont elle est
titulaire ; que M. X…, invoquant l’atteinte ainsi portée à son nom d’artiste
et à son nom patronymique, a assigné en réparation la société Coca-Cola
entreprise ; que les sociétés Coca-Cola Company et Coca-Cola services
France sont intervenues volontairement à l’instance ;
Attendu que M. X… fait grief à l’arrêt de le débouter de ses demandes
alors, selon le moyen :

1°/ que l’auteur jouit non seulement du droit au respect de son œuvre mais
également du droit au respect de son nom ; que comme le faisait valoir M.
X…, il avait droit au respect de son nom patronymique constituant
également son nom d’artiste, de telle sorte que celui-ci ne soit pas
ridiculisé par son apposition aux côtés d’une marque de boisson
gazeuse censée faire référence à l’orange sanguine dont cette boisson
était composée ; qu’en déboutant M. X…

de sa demande aux motifs qu’il ne pouvait prétendre à la protection de son


nom patronymique en tant que tel, quand cette protection était revendiquée
pour son nom en tant qu’auteur, la cour d’appel a violé l’article L. 121-1 du
code de la propriété intellectuelle ;

le nom de x… Figure dans les dictionnaires comme nom commun et que,


s’il n’est pas banal comme nom propre, il est cependant porte par plusieurs
personnes, non seulement en France et notamment dans la région
parisienne, mais aussi à l’étranger” ;

Que l’arrêt constate encore “que l’emploi de ce mot dans une rengaine
fréquemment répétée dans la presse ou par la radio constitue un procédé
habituel et normal de publicité sans que celle-ci ait eu pour résultat d’avilir
le nom de x… Au point de le rendre ridicule” ;

Qu’il souligne aussi “que les parents de x… N’ont pas protesté contre
l’utilisation commerciale de leur nom et que lui-même a attendu plus de
quatre ans après sa majorité pour s’aviser de faire défense, par justice, a la
société “l’oreal” de se servir de la marque sous laquelle elle vend ses
produits depuis plus de trente ans” ; Que de ces constatations, la cour
d’appel a souverainement déduit que l’utilisation de la marque “x…” par la
société “ l’oreal” n’avait pas créé un risque de confusion »

1. CA Paris, 4e ch. B, 15 décembre 2000, Virag c/St Pfizer. En l’espèce, le


docteur Virag assignait la société Pfizer pour avoir choisi “Viagra” comme
marque, car il pensait que la marque avait été inspirée par son patronyme.
Dans le cas présent, la Cour a rejeté la demande du docteur Virag, au motif
que la marque ne représentait qu’une imitation du nom, et que la notoriété
de ce nom était circonscrite au monde médical.

Le risque de confusion était dès lors très faible dans l’esprit du public.

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Titre 2 – L’identification de la personne

2°/ que M. X… a fait valoir qu’il avait acquis une certaine renommée en
tant que scénariste dans le milieu du cinéma, de sorte que l’usage de son
nom à des fins commerciales caractérisait une usurpation lui portant
préjudice ; que pour débouter M. X… de sa demande de protection sur le
fondement du droit des marques, la cour d’appel a estimé qu’il n’était pas
démontré que le patronyme X… aurait acquis une notoriété certaine auprès
des professionnels du cinéma ou de l’audiovisuel dès lors qu’il résultait des
extraits des pages jaunes obtenues à l’aide du moteur de recherches Google
que ce nom était amplement porté notamment dans le département des
Hauts-de-Seine ; qu’en statuant par ces motifs inopérants, la cour d’appel a
violé l’article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu que le droit moral de l’auteur au respect de son nom est
attaché à l’œuvre de l’esprit qui porte l’empreinte de sa personnalité ; que
c’est, dès lors, à bon droit que la cour d’appel a retenu que M. X… ne
pouvait prétendre, sur le fondement de l’article L. 121-1 du code de la
propriété intellectuelle, à la protection de son nom patronymique en tant
que tel, fût-il utilisé pour l’exercice de son activité artistique, ce nom, quelle
que soit sa renommée prétendue, ne constituant pas, en lui-même, une
œuvre de l’esprit ;

Et attendu que c’est sans encourir le grief de la seconde branche du moyen


que les juges d’appel, appréciant souverainement la valeur et la portée des
éléments de preuve qui leur étaient soumis, ont, par motifs propres et
adoptés, estimé, d’abord, que M. X… ne démontrait pas que le patronyme «
X… » aurait acquis, auprès des consommateurs français ou des
professionnels du cinéma ou de l’audiovisuel, une notoriété certaine
attachée à sa personnalité et relevé, ensuite, qu’il résultait des extraits des
« pages jaunes » obtenues à l’aide du moteur de recherche Google que
ce nom était amplement porté, notamment dans le département des
Hauts-de-Seine, et qu’ils en ont déduit que le choix de ce terme pour
former une marque ne pouvait induire un risque de confusion
susceptible de porter atteinte aux droits de la personnalité de M. X… ;
D’où il suit que le moyen n’est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

On note ici que l’élément déterminant pour le Cour est le fait que ce nom
soit amplement porté et qu’en conséquence il n’y avait aucun risque de
confusion possible

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Chapitre 2

Les accessoires et compléments du nom

À côté du prénom qui s’ajoute obligatoirement au nom sur l’acte d’état civil
(Section 1), on trouve d’autres éléments comme le pseudonyme, la particule
ou le titre de noblesse (Section 2).

Section 1

Le prénom

Une fois le prénom choisi (§1), des changements peuvent intervenir


(§2).
§ 1. Le choix du prénom

L’attribution d’un prénom est obligatoire (art. 57 al. 1er c. civ.). Le choix
est

librement effectué par les parents au titre de l’autorité parentale dont ils
disposent.

Pour autant, cette liberté est contrôlée. Longtemps le choix du prénom était
limité par la loi à ceux présents dans le calendrier, ceux des personnes
connues dans l’histoire ancienne (Loi du 11 germinal an XI). Il était alors
interdit aux officiers d’état civil d’en admettre d’autres. La loi du 8 janvier
1993 n° 93-22, est venue modifier la règle. Désormais la liberté est de mise,
sous contrôle de l’officier d’état civil qui reçoit la déclaration de naissance.
Si les prénoms choisis ou l’un d’eux seul ou associé aux autres prénoms ou
au nom lui paraissent contraires à l’intérêt de l’enfant ou au droit des tiers à
la protection de leur nom de famille, il en avise sans délai le procureur de la
République. Si ce dernier estime fondées les réserves formulées, il saisit le
Juge aux affaires familiales. Au terme de la procédure, si le magistrat
conclut dans le même sens, il ordonne la suppression du ou des prénoms
litigieux des registres de l’état civil. Les parents devront alors choisir un
nouveau 9782340-033689_001-152.indd 63

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Titre 2 – L’identification de la personne

prénom qui devra recevoir l’aval du juge. S’ils s’obstinent à retenir des
prénoms inacceptables, le juge procédera lui-même au choix du prénom.

Cour de cassation chambre civile 1, 15 février 2012

n° 10-27512

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Versailles, 7 octobre 2010), que M. X… a


déclaré vouloir prénommer son fils, né le 7 novembre 2009, Titeuf,
Gregory, Léo ; que l’officier d’état civil a informé le procureur de la
République que le choix du premier prénom, Titeuf, lui paraissait
contraire à l’intérêt de l’enfant ; que, sur le fondement de l’article 57
du Code civil, le parquet a fait assigner les parents afin de voir
prononcer la suppression du prénom Titeuf ; que, par jugement du 1er
juin 2010, le tribunal de grande instance de Pontoise, se fondant sur
l’intérêt de l’enfant, a ordonné la suppression du prénom Titeuf de son
acte de naissance et dit qu’il se prénommera Grégory, Léo ; Attendu que
M. X… et la mère de l’enfant, Mme Y…, font grief à l’arrêt de confirmer le
jugement, alors, selon le moyen :

1°/ que la contrariété à l’intérêt de l’enfant qui peut justifier que le prénom
choisi par ses parents soit supprimé doit être appréciée de façon objective ;
qu’en appréciant la conformité à l’intérêt de l’enfant du prénom Titeuf
uniquement par référence à un personnage de bande dessinée dont la
notoriété est nécessairement éphémère et limitée, dont elle relève au
demeurant qu’il est « plutôt sympathique », et en se livrant à une analyse
subjective des caractéristiques de ce personnage, sans se prononcer au
regard de critères objectifs seuls à même de garantir le principe d’égalité
devant la loi, la cour d’appel a violé l’article 57 du Code civil, ensemble
l’article 3 de la Convention de New York du 20 novembre 1989 et l’article
8 de la Convention européenne des droits de l’homme ; 2°/ que toute
restriction à la liberté de choix du prénom de l’enfant par ses parents ne
peut être justifiée que par l’intérêt de l’enfant ; qu’en jugeant que le prénom
Titeuf n’était pas conforme à l’intérêt de l’enfant et en ordonnant sa
suppression de l’acte de naissance, sans rechercher, ainsi qu’el e y était
invitée, si le fait qu’au moins un autre enfant ait reçu ce prénom sans
opposition du ministère public et que d’autres enfants aient reçu les
prénoms d’autres personnages de bande dessinée ou dessins animés n’était
pas de nature à mettre en évidence que le choix du prénom litigieux ne
portait pas atteinte à l’intérêt de l’enfant, la cour d’appel a privé sa décision
de base légale au regard de l’article 57 du Code civil, ensemble l’article 3
de la Convention de New York du 20 novembre 1989

et l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme ;

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Chapitre 2 – Les accessoires et compléments du nom 65

Mais attendu que c’est par une appréciation souveraine qu’en une décision
motivée la cour d’appel a estimé qu’il était contraire à l’intérêt de l’enfant
de le prénommer Titeuf ; que le moyen qui ne tend en réalité qu’à contester
cette appréciation ne peut être accueilli

Pour finir, si ni le père, ni la mère ne sont connus, il appartient à l’officier


d’état civil de lui attribuer un prénom.

§ 2. Le changement de prénom

Le changement de prénom peut se faire par la voie ordinaire (A) et par


volonté

de francisation (B).

A. Le changement par voie ordinaire

Toute personne peut demander à changer de prénom si elle justifie d’un


intérêt légitime (article 60 à 61-4 du Code civil). À l’origine la procédure
était judiciaire, désormais l’article 56 de la loi du 18 novembre 2016 n°
2016-1547 a déjudiciarisé la procédure de changement de prénom

La demande de changement de prénom doit aujourd’hui être portée devant


l’officier de l’état civil du lieu de résidence de la personne concernée ou du
lieu où l’acte de naissance a été dressé.

Si l’enfant est âgé de plus de 13 ans, son consentement personnel est requis.
De même le majeur sous tutelle doit consentir personnellement au
changement puisque la demande figure au nombre des actes personnels (C.
civ., art. 458).

L’officier de l’état civil devra apprécier l’intérêt légitime au changement


sollicité.
Après examen, l’officier pourra prendre une décision d’autorisation de
changement de prénom qui sera communiquée au demandeur ou à ses
représentants légaux par tout moyen dans un délai raisonnable.

Mais il pourra également saisir le procureur de la République s’il estime


que la demande ne revêt pas un intérêt légitime et devra en informer
parallèlement l’intéressé par tous moyens. Si le procureur de la République
s’oppose, par une décision motivée à ce changement, il devra notifier sa
décision par tous moyens au demandeur et en informer l’officier de l’état
civil saisi initialement. Le demandeur pourra alors saisir le juge aux affaires
familiales.

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Titre 2 – L’identification de la personne

Cour de cassation chambre civile 1, 23 mars 2011 n° 10-16761

Vu l’article 60 du Code civil ;

Attendu que, pour rejeter la demande de changement de prénom de Brigitte


en celui de Laetitia, subsidiairement en adjonction du prénom de Laetitia
avant celui de Brigitte, l’arrêt retient que Mme Brigitte X…, qui a la
double nationalité française et israélienne et dispose d’un acte du
ministère de l’intérieur israélien attestant du changement de son
patronyme ainsi que de son prénom en Laetitia, n’explique pas la raison
de ce changement et, qu’eu égard à la discordance importante existant entre
son identité française et son identité israélienne, sa demande de changement
de prénom apparaît prématurée ; Attendu qu’en statuant ainsi, alors que
l’acte du 10 octobre 2005 par lequel le ministère de l’intérieur israélien
l’avait autorisée à changer son prénom en celui de Laetitia caractérisait à lui
seul l’intérêt légitime, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;
Vu l’article L. 411-3 du code de l’organisation judiciaire, et attendu que la
cour de cassation est en mesure de mettre fin au litige ;

PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions,

l’arrêt rendu le 9 septembre 2008, entre les parties, par la cour d’appel de
Lyon ; DIT n’y avoir lieu à renvoi ;

Dit que Mme X…, née le 12 octobre 1958 à Paris (17e) de Mme Camille

Z… et de M. Elie X…, justifie d’un intérêt légitime pour changer le prénom


de Brigitte en celui de Laetitia et qu’elle est autorisée à porter ce dernier
prénom en remplacement de celui de Brigitte ;

La demande de changement de prénom peut aussi avoir pour but de mettre


en conformité le prénom avec le sexe apparent, qu’il y ait eu ou nom
changement de sexe biologique (CEDH 25 mars 1992, B c/France, n°
13343/87, Renée devenue René) (V. Chapitre suivant).

B. Le changement de prénom par la voie de la francisation

Comme pour le nom de famille, il est possible de franciser son prénom


lorsque son caractère étranger est susceptible de gêner son intégration dans
la communauté française (articles 1 et 2 de loi 25 octobre 1972 précitée). La
personne concernée devra indiquer dans sa requête le nouveau prénom dont
elle veut bénéficier.

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Chapitre 2 – Les accessoires et compléments du nom 67

Section 2

Les pseudonymes, particules et titres de noblesse

À côté du nom et du prénom, d’autres éléments peuvent permettre


l’identification de la personne, sans toutefois être obligatoires. Il s’agit des
pseudonymes (§1), particules et autres titres de noblesse (§2).

§ 1. Les pseudonymes

En pratique, ce nom d’emprunt a souvent vocation à dissimuler la véritable


identité d’une personne dans l’exercice de son activité professionnelle,
artistique ou commerciale. Or, par principe, aucune personne ne peut porter
de nom autre que celui inscrit dans son acte de naissance. C’est pourquoi,
une réglementation vient encadrer l’usage de ce nom d’emprunt.

Celle-ci permet d’abord de déterminer dans quelles conditions il est


possible de choisir un nom d’emprunt. On note ici que comme pour
l’utilisation du nom à titre de marque c’est le risque de confusion qui
importe. En effet, il faut éviter que le choix du nom d’emprunt ne porte
préjudice à autrui de par le risque de confusion.

Un arrêt de la Cour d’Appel de Paris permet de l’illustrer1.

En l’espèce, un compositeur interprète exerçant sous le pseudonyme Saint-


Preux prétendait solliciter la nullité des marques Saint-Preux exploitées par
la société Saint-Preux (fonds de commerce de Boulangerie).

Le Tribunal de Grande Instance a déclaré irrecevable la demande en nullité


des marques et dit que le compositeur ne justifiait pas d’un usage sérieux et
durable de son pseudonyme.

Le compositeur a interjeté appel.

La cour d’appel déboute le compositeur de sa demande de cessation


d’utilisation de son pseudonyme à titre commercial. Pour les juges du fond,
les activités exercées sont différentes, il y a donc aucun risque de confusion.
Le compositeur utilise son pseudonyme dans le cadre d’activités musicales.
La société St Preux exerce une activité de Boulangerie.

Peu importe ici la bonne foi de celui qui choisit le pseudonyme.

Cette réglementation permet ensuite d’encadrer l’utilisation concrète du


nom d’emprunt. En effet, celle-ci ne doit pas
– être générale, elle doit donc se limiter à des activités déterminées 1. CA.
Paris, 4e Chambre, sect. B, 20 janvier 2006

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Titre 2 – L’identification de la personne

– servir à détourner une prohibition légale (porter le nom d’un ex-conjoint


sans autorisation)

– couvrir l’exercice d’une profession réglementée (médecin.)

– être employé pour souscrire à un acte authentique ou public

Si ces conditions sont remplies, le pseudonyme utilisé loyalement, de


manière continue, public et paisible entraîne la création d’un droit
patrimonial qui à ce titre est juridiquement protégé.

§ 2. Les particules et titres de noblesse

La particule, du de la le, complète le nom, elle fait partie du nom


patronymique et à ce titre est protégée comme ce dernier. Si elle a été omise
sur l’acte d’état civil, elle pourra faire l’objet d’un rétablissement par le
recours à une action en rectification des actes d’état civil. Elle ne constitue
pas une qualification nobiliaire. La noblesse en tant que classe sociale
investie de privilèges a disparu depuis le mois d’août 1789.

Les titres de noblesse eux ont été rétablis par la Charte de 1814, dont
l’article 71 dispose : « l’ancienne noblesse reprendra ses titres, la nouvelle
conservera les siens. », puis par un décret du 27 janvier 1852. Le titre
nobiliaire ne fait pas partie du nom, il n’en est que l’accessoire, il n’a pas
pour rôle d’identifier une personne.

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Chapitre 2 – Les accessoires et compléments du nom 69

CAS PRATIQUE

Le nom et le prénom

Claire ROBERT, née DURAND, a donné naissance à un petit garçon. El e


et son mari Axel veulent tous deux donner leur nom à leur enfant sans
parvenir à se mettre d’accord. En revanche, ils sont d’accord sur une chose,
leur fils se prénommera Goldorak.

Que pensez-vous de leur conflit et de leur choix pour le prénom de leur


enfant ?

Correction

Un couple marié donne naissance à un enfant mais ne s’entend pas sur le


nom qu’ils veulent lui attribuer en revanche ils s’accordent sur le prénom de
« Goldorak ».

Comment est attribué le nom patronymique de l’enfant ?

L’article 311-21 du Code civil ouvre une faculté de choix du nom de


l’enfant lorsque celui-ci est l’objet d’un double lien de filiation établi de
façon simultanée. Trois hypothèses sont alors visées. Il peut s’agir de
l’enfant d’un couple marié. Il peut s’agir d’un enfant dont les parents, non
mariés, ont procédé à une double reconnaissance prénatale. Enfin, ce peut
être le cas de l’enfant d’un couple non marié dont les parents ont procédé à
une double reconnaissance postnatale simultanée.

Par ail eurs, cet article dispose que lorsque les parents sont en désaccord
quant au choix du nom, l’officier de l’état civil inscrit le nom de chacun des
parents, dans l’ordre alphabétique.

Il faut alors que les parents signalent leur désaccord à l’officier d’état civil
au plus tard au jour de la déclaration de naissance.
Aux termes de l’article 311-21 du Code civil, les époux choisissent : soit le
nom du père, soit le nom de la mère, soit les deux noms accolés. Le choix
résulte d’une déclaration conjointe des parents mentionnant le nom de
l’enfant. En cas de désaccord des parents signalé à l’officier d’état civil
celui-ci inscrit le nom de chacun des parents dans l’ordre alphabétique. S’il
ne dise rien, l’enfant prend de nom de son père. En l’espèce, deux situations
peuvent se présenter.

Soit les parents ne pensent pas à signaler leur désaccord : l’enfant se


nommera alors Robert.

Soit les parents signalent leur désaccord : l’enfant se nommera alors


Durand-Robert.

Un homme souhaite appeler son enfant Goldorak et se demande si on


pourra le lui refuser.

Les parents d’un enfant peuvent-ils choisir de prénommer celui-ci


Goldorak ?

Selon l’article 57 alinéa 2 du Code civil, l’attribution d’un prénom est


obligatoire Le choix est librement effectué par les parents de l’enfant.

Aux termes de l’alinéa 3, si les prénoms choisis ou l’un d’eux seul ou


associé aux autres prénoms ou au nom paraissent à l’officier d’état civil,
contraires à l’intérêt de l’enfant ou au droit des tiers à la protection de leur
nom de famil e, il en avise sans délai le procureur de la République. Si ce
dernier estime fondées les réserves formulées, il saisit le Juge aux affaires
familiales. Au terme de la procédure, si le magistrat conclut dans le même
sens, il ordonne la suppression du ou des prénoms litigieux des registres de
l’état civil. Les parents devront alors choisir un nouveau prénom qui devra
recevoir l’aval du juge. S’ils s’obstinent à retenir des prénoms
inacceptables, le juge procédera lui-même au choix du prénom.

Cass. 1re civ., 15 février 2012 : « c’est par une appréciation souveraine
qu’en une décision motivée la cour d’appel a estimé qu’il était contraire à
l’intérêt de l’enfant de le prénommer Titeuf ; que le moyen qui ne tend en
réalité qu’à contester cette appréciation ne peut être accueilli »
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Titre 2 – L’identification de la personne

Aux termes de l’article 57 alinéa 2 du Code civil, les parents choisissent


librement le prénom qu’ils souhaitent donner à leur enfant. Toutefois, si
l’officier d’état civil juge ce prénom contraire à l’intérêt de l’enfant il peut
refuser de l’inscrire et avertir le procureur de la République. En l’espèce,
les parents souhaitent appeler leur enfant Goldorak. Ce prénom fait
référence à un dessin animé et comme dans l’arrêt du 15 février 2012,
pourrait être considéré comme contraire à l’intérêt de l’enfant (ridicule…) Il
semble donc opportun de conseil er au couple de faire un autre choix.

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Chapitre 3

Le sexe

La mention du sexe sur les registres d’état civil est essentielle dans la
mesure où il s’agit d’un élément d’identification de la personne. En la
matière deux questions peuvent se poser ; celle de l’assignation du sexe,
autrement dit déterminer le sexe à apposer sur les registres de l’état civil au
moment de la naissance (Section 1) et celle de la rectification du sexe soit
ici appréhender les conséquences d’un changement de sexe sur les registres
de l’état civil (Section 2).

Section 1

L’assignation

L’article 57 du Code civil dispose que « l’acte de naissance énoncera le


jour, l’heure et le lieu de naissance, le sexe de l’enfant, les prénoms qui
lui seront donnés, le nom de famille… ». Ainsi, le sexe de l’enfant doit
être précisé dans l’acte de naissance. Seuls deux sexes sont reconnus :
Féminin et Masculin.

Toutefois des difficultés peuvent survenir lorsqu’il est impossible à la


naissance de l’enfant de déterminer son sexe. L’article 55 de la circulaire du
28 octobre 2011

relative aux règles particulières à divers actes de l’état civil dispose que «
Lorsque le sexe d’un nouveau-né est incertain », il convient d’éviter de
porter l’indication « de sexe indéterminé » dans son acte de naissance. Il y a
lieu de conseiller aux parents de se renseigner auprès de leur médecin pour
savoir quel est le sexe qui apparaît le plus probable compte tenu, le cas
échéant, des résultats prévisibles d’un traitement médical. Ce sexe sera
indiqué dans l’acte, l’indication sera, le cas échéant, rectifiée judiciairement
par la suite en cas d’erreur. Si, dans certains cas exceptionnels, le médecin
estime ne pouvoir immédiatement donner aucune indication sur le sexe
probable d’un nouveau-né, mais si ce sexe peut être déterminé
définitivement, dans un délai d’un ou deux ans, à la suite de traitements
appropriés, il pourrait 9782340-033689_001-152.indd 71

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Titre 2 – L’identification de la personne

être admis, avec l’accord du procureur de la République, qu’aucune


mention sur le sexe de l’enfant ne soit initialement inscrite dans l’acte de
naissance. Dans une telle hypothèse, il convient de prendre toutes mesures
utiles pour que, par la suite, l’acte de naissance puisse être effectivement
complété par décision judiciaire. Dans tous les cas d’ambiguïté sexuelle, il
doit être conseillé aux parents de choisir pour l’enfant un prénom pouvant
être porté par une fille ou par un garçon.

Section 2

La rectification
L’admission de la rectification des registres de l’état civil à l’égard de la
mention du sexe de la personne s’est faite en plusieurs étapes.

Dans un premier temps, en l’absence de disposition législative, c’est à la


jurisprudence et plus précisément à quatre arrêts de la Cour de cassation en
date du 7 mars 20121 et du 13 février 20132 que l’on doit d’avoir posé les
conditions que devaient réunir une personne pour changer la mention de son
sexe sur les registres de l’état civil. Ces arrêts pesaient le principe suivant :
« Pour justifier une demande de rectification de la mention du sexe figurant
dans un acte de naissance, la personne doit établir, au regard de ce qui est
communément admis par la communauté scientifique, la réalité du
syndrome transsexuel dont elle est atteinte ainsi que le caractère irréversible
de la transformation de son apparence. » Ainsi deux conditions
s’imposaient, d’une part le diagnostic du transsexualisme et, d’autre part,
l’irréversibilité de la transformation de l’apparence physique. Seulement, la
jurisprudence s’est avérée très, voire trop, fluctuante d’une juridiction à
l’autre. En effet, certains tribunaux ordonnaient systématiquement une ou
plusieurs expertises (médicales, psychologiques) tandis que d’autres se
contentaient de la remise d’attestations fournis par des médecins dont la
compétence est reconnue en la matière.

Pour tenter d’y remédier, une circulaire datant du 14 mai 2010 a invité le
juge à « donner un avis favorable à la demande de changement d’état civil
dès lors que les traitements hormonaux ayant pour effet une transformation
physique ou physiologique définitive, associés, le cas échéant, à des
opérations de chirurgie plastique (prothèses ou ablation des glandes
mammaires, chirurgie esthétique du visage…), ont entraîné un changement
de sexe irréversible, sans exiger pour autant l’ablation des organes
génitaux3 ».

1. Cass. 2e civ., 7 mars 2012, n° 10-26947

2. Cass. 2e civ., 13 février 2013, n° 12-11949

3. Circulaire de la DACS n° CIV/07/10 du 14 mai 2010 relative aux


demandes de changement de sexe à l’état civil.

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Chapitre 3 – Le sexe

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Dans un second temps, le législateur a pris le relais. Dorénavant, toute


personne majeure ou mineure émancipée qui démontre par une réunion
suffisante de faits que la mention relative à son sexe dans les actes de l’état
civil ne correspond pas à celui dans lequel elle se présente et est connue
peut en obtenir la transformation.

Elle peut, à ce titre, établir par tous moyens qu’elle se présente


publiquement comme appartenant au sexe revendiqué, qu’elle est connue
sous le sexe revendiqué de son entourage familial, amical ou professionnel
ou qu’elle a obtenu le changement de son prénom afin qu’il corresponde au
sexe revendiqué.

La demande est présentée devant le tribunal de grande instance (C. civ., art.

61-6). À noter, le fait de ne pas avoir subi des traitements médicaux, une
opération chirurgicale ou une stérilisation ne peut pas motiver le refus de
faire droit à sa demande (C. civ. art. 61-6, al. 3). La procédure est
judiciaire, mais, elle, est démédi-calisée. Dès lors que le tribunal ordonne la
modification de la mention relative au sexe et au prénom de l’intéressé, il
est prévu qu’une mention doit être portée dans l’acte de naissance de
l’intéressé, à la requête du procureur de la République dans les quinze jours
de la décision (C. civ., art. 61-7, al. 1er). Cette mention ne produira aucun
effet quant aux liens de filiation établis avant le changement de sexe (C.
civ., art. 61-8).

POINT D’ACTUALITÉ

La reconnaissance du sexe neutre

On l’a vu en France seule deux sexes sont reconnus : Féminin et Masculin.


L’affaire dite du sexe neutre qui a débuté devant le TGI de Tours pour se
poursuivre devant la Cour d’appel d’Orléans le 22 mars 2016 a mis en avant
la question de la possibilité d’inscrire un autre sexe sur l’état civil d’une
personne (CA. Orléans 22 mars 2016, n° RG : 15/03281). En l’espèce, par
requête en date du 12 janvier 2015 sur le fondement des articles 99 du Code
civil et 1047 et suivants du code de procédure civile, un homme a demandé
au procureur de la République de saisir le président du TGI de Tours afin
qu’il remplace la mention masculin par celle de « sexe neutre » ou à défaut
« intersexe » sur son acte d’état civil. Par jugement en date du 20 août 2015,
le TGI a fait droit à sa demande en ordonnant que soit substitué dans l’acte
de naissance du demandeur la mention sexe neutre à la mention sexe
masculin. Le procureur a fait appel de ce jugement et la Cour d’appel
d’Orléans l’a infirmé. Sur la demande de rectification, la Cour commence
par rappeler que l’assignation d’un sexe à la naissance est obligatoire. Elle
ajoute que la création d’une nouvelle catégorie sexuelle ne relève pas du
pouvoir des juges mais plutôt de celui du législateur.

En outre, la Cour relève « qu’en considération de la marge d’appréciation


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Titre 2 – L’identification de la personne

reconnue aux autorités nationales dans la mise en œuvre des obligations qui
leur incombent au titre de l’article 8 de la convention européenne de
sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, il doit être
recherché un juste équilibre entre la protection de l’état des personnes qui
est d’ordre public et le respect de la vie privée des personnes présentant une
variation du développement sexuel ».

Concernant la demande de rectification de l’état civil pour les personnes


dont le sexe serait indéterminé à la naissance, la Cour d’appel d’Orléans, le
22 mars 2016, énonce que l’une des possibilités permettant de se mettre en
conformité avec la recherche d’un juste équilibre entre la protection de
l’état des personnes et le respect de la vie privé est d’autoriser à ce que soit
modifié le sexe qui a été assigné à la personne dès lors qu’il n’est pas en
correspondance avec son apparence physique et son comportement social.
Ce faisant, la Cour pose deux conditions à la demande de rectification : il
faut, d’une part, une variation du développement sexuel de la personne
autrement dit une condition médicale et, d’autre part, une apparence
physique ainsi qu’un comportement social correspondant au sexe demandé.
Or, en l’espèce, le demandeur, bien que remplissant la condition médicale,
présentait une apparence physique masculine, était marié et avait adopté un
enfant. Sa demande se trouvait donc en contradiction avec son apparence et
son comportement de sorte qu’elle ne pouvait être accueillie.

L’affaire est portée devant la Cour de cassation le 4 mai 20171. Celle-ci


retient que la loi française ne permet pas de faire figurer, dans les actes
de l’état civil, l’indication d’un sexe autre que masculin ou féminin. En
outre, Au regard du droit au respect de la vie privée garanti par l’article
8 de la Convention européenne des droits de l’homme, la Cour précise que :

– dans les actes d’état civil, il n’existe que deux mentions relatives au sexe
(« masculin »/ « féminin »). Cette binarité poursuit un but légitime, car elle
est nécessaire à l’organisation sociale et juridique, dont elle constitue un
élément fondateur ;

– la reconnaissance par le juge d’une troisième catégorie de sexe aurait des


répercussions profondes sur les règles du droit français construites à partir
de la binarité des sexes et impliquerait de nombreuses modifications
législatives de coordination ;

1. Cass. 1re civ., 4 mai 2017, n° 16-17189

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Chapitre 3 – Le sexe

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– dans le cas d’espèce en cause, l’atteinte au droit au respect de sa vie
privée n’est pas disproportionnée au regard du but légitime poursuivi :
en effet, si la personne présente une ambiguïté sexuelle, la cour d’appel a
constaté que son apparence physique est masculine, qu’il s’est marié en
1993 et qu’il a adopté un enfant avec son épouse, de sorte que son
apparence et son comportement social sont, aux yeux des tiers, ceux

d’une personne de sexe masculin et conformes à la mention figurant

dans son acte de naissance.

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Titre 2 – L’identification de la personne

CAS PRATIQUE

Le sexe

Vincent et Sophie sont mariés depuis un mois lorsque Vincent lui demande
si el e accepterait qu’il officialise son changement de sexe. En effet, depuis
plusieurs années déjà Vincent a décidé de cesser de nier cette sensation
qu’il avait depuis très jeune qu’il n’était pas né dans le bon corps. Si ses
amis et sa famil e sont au courant, il pense qu’il est temps pour lui de passer
un cap et de demander en justice à ce que son état civil soit modifié. Il ne
veut pas pour autant subir d’opération chirurgicale. Sophie quant à el e
souhaiterait changer son nom de famil e, el e ne supporte plus de s’appeler
Sophie Nouil e et aimerait bien s’appeler Levent. El e connaît quelqu’un qui
porte ce nom et trouve cela très poétique. Le couple vous interroge non
seulement sur les procédures à suivre pour opérer leurs changements mais
aussi sur les effets de ces modifications sur l’état civil de leur fils Théo
Nouil e, 14 ans.

Correction
Un couple marié avec un enfant de 14 ans souhaite effectuer des démarches
pour modifier leur état civil respectif. Le mari veut changer de sexe et
l’épouse veut changer son nom patronymique qu’elle juge ridicule.

Quelle est la procédure à mettre en œuvre pour changer son sexe sur les
registres de l’état civil ?

Article 61-5 du code civil

Toute personne majeure ou mineure émancipée qui démontre par une


réunion suffisante de faits que la mention relative à son sexe dans les actes
de l’état civil ne correspond pas à celui dans lequel el e se présente et est
connue peut en obtenir la transformation. El e peut, à ce titre, établir par
tous moyens qu’el e se présente publiquement comme appartenant au sexe
revendiqué, qu’el e est connue sous le sexe revendiqué de son entourage
familial, amical ou professionnel ou qu’el e a obtenu le changement de son
prénom afin qu’il corresponde au sexe revendiqué.

Article 61-6 c. civ.

La demande est présentée devant le tribunal de grande instance.

À noter, le fait de ne pas avoir subi des traitements médicaux, une opération
chirurgicale ou une stérilisation ne peut pas motiver le refus de faire droit à
sa demande (C. civ. art.

61-6, al. 3).

Article 61-7 du Code civil

Le tribunal ordonne la modification de la mention relative au sexe et au


prénom de l’intéressé, il est prévu qu’une mention doit être portée dans
l’acte de naissance de l’intéressé, à la requête du procureur de la
République dans les quinze jours de la décision.

Aux termes de la loi, l’individu qui souhaite changer de sexe devra établir
par tous moyens qu’il se présente publiquement comme appartenant au sexe
revendiqué, qu’il est connue sous le sexe revendiqué de son entourage
familial, amical ou professionnel ou qu’il a obtenu le changement de son
prénom afin qu’il corresponde au sexe revendiqué. Il portera sa demande
devant le tribunal de grande instance. Aucun changement d’ordre médical
ne sera exigé.

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Chapitre 3 – Le sexe

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En l’espèce, Vincent se présente devant son entourage amical et familial


comme une femme et demande à obtenir le changement de sexe en ce sens.
Il devra à l’aide du témoignage de sa famil e et de ses amis établir qu’il se
présente publiquement comme appartenant au sexe féminin et qu’il est
connu ainsi de son entourage. Il devra porter sa demande devant le TGI qui
au vu des éléments précédents devrait y accéder.

Quelle est la procédure à suivre pour changer son nom patronymique


sur les registres de l’état civil ?

La loi du 8 janvier 1993 n° 93-22 dispose que « toute personne qui justifie
d’un intérêt légitime peut demander à changer de nom ». Il faudra pour
l’auteur de la demande, qui peut être présentée à tout moment, démontrer la
légitimité de l’intérêt qu’il évoque à l’appui de sa requête. (Articles 60 à 61-
4 du Code civil)

La demande de changement de nom pour motif légitime concerne par


exemple les cas suivants :

– nom difficile à porter, car pouvant être perçu comme ridicule ou péjoratif
;

– ou nom s’étant illustré de manière éclatante sur le plan national, (porter le


nom d’une personne célèbre avec une mauvaise réputation) ;
– consacrer l’usage constant et continu d’un nom (établir l’utilisation d’un
autre nom depuis longtemps et que celui-ci identifie la personne
publiquement) ;

– si les frères et sœurs portent des noms différents et que tous souhaitent
porter le même nom ;

– éviter les conséquences résultant de la gravité des agissements pour


lesquels les père ou mère ont été condamné.

Le changement de nom doit alors être autorisé par décret. Il prend effet
lorsqu’il n’y a pas d’opposition à l’expiration d’un délai de deux mois.
L’opposition peut, par exemple, venir d’une personne qui porte le nom
qu’autrui souhaite prendre. Le Conseil d’État va alors apprécier la légitimité
des intérêts en présence : risque de confusion, d’atteinte à l’image d’une
famil e déjà connue sous le nom voulu… En cas d’opposition, le décret
prend effet au rejet de l’opposition.

Aux termes des articles 60 et suivants du Code civil, il est possible de


changer son nom de famil e lorsque l’on présente un motif légitime. Ce
motif peut être le caractère ridicule ou péjoratif du nom de famil e. En
l’espèce Sophie souffre du caractère ridicule de son nom : Sophie Nouille et
pourra évoquer cela comme motif légitime pour un changement. El e
adressera sa demande au ministère de la justice dans laquel e el e précisera
le nom qu’el e souhaiterait porter.

Quelles sont les conséquences pour un enfant mineur de 14 ans des


changements opérés par ses parents sur leurs états civils respectifs ?

Quant au changement de sexe

Article 61-7 du Code civil

Par dérogation à l’article 61-4, les modifications de prénoms corrélatives à


une décision de modification de sexe ne sont portées en marge des actes de
l’état civil des conjoints et enfants qu’avec le consentement des intéressés
ou de leurs représentants légaux.
Article 61-8 du Code civil

Cette mention ne produira aucun effet quant aux liens de filiation établis
avant le changement de sexe

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Titre 2 – L’identification de la personne

Aux termes des articles 61-7 et 61-8 du Code civil, si le changement de


sexe s’accompagne d’un changement de prénom, l’état civil des conjoints et
des enfants est modifié avec leur accord. En outre, le changement de sexe
ne modifiera pas le lien de filiation déjà existant.

En l’espèce, si Vincent change de prénom en même temps qu’il change de


sexe, il faudra l’accord des intéressés (conjoint et enfant) pour que l’état
civil de ces derniers soit modifié.

Quant au lien de filiation établi antérieurement à l’égard de Théo, celui-ci


n’est pas modifié, Vincent restera le père de Théo.

Quant au changement de nom :

Articles 61-2 et 61-3 du Code civil

La modification du nom s’étend de plein droit aux enfants du bénéficiaire


s’ils ont moins de 13 ans, au-delà leur consentement est requis. Mention est
portée sur le registre d’état civil de chacun des intéressés.

Article 61-4 du Code civil : Mention des décisions de changement de


prénoms et de nom est portée en marge des actes de l’état civil de
l’intéressé et, le cas échéant, de ceux de son conjoint, de son partenaire lié
par un pacte civil de solidarité et de ses enfants.
Aux termes des articles 61-2, 61-3 et 61-4 du Code civil, le changement de
nom s’étend aux enfants s’ils ont moins de 13 ans au-delà ils doivent y
consentir. Si le mineur de plus de 13 ans y consent ses actes d’état civil
seront modifiés en ce sens. En l’espèce, Théo ayant 14 ans il faudra obtenir
son accord pour la modification de son nom patronymique. S’il accepte son
état civil sera modifié en conséquence.

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Chapitre 4

Le domicile

Comme les éléments précédents, le domicile est lui aussi essentiel pour
l’identification de la personne. Pour en faciliter la détermination (Section 1)
un principe d’unicité a été posé (Section 2).

Section 1

La détermination du domicile

En principe, le domicile est librement choisi par la personne (§1), il


arrive pourtant que la loi ou le contrat en décide autrement (§2).

§ 1. Le libre choix du domicile

Selon l’article 102 du Code civil, le domicile de tout français est le lieu où
il a son principal établissement.

Pour pouvoir établir objectivement le lieu du principal établissement on


s’appuie sur deux éléments, l’un matériel (A) l’autre intentionnel (B).

A. L’élément matériel

La notion d’établissement renvoie à l’existence d’une installation.


L’intéressé dispose d’un lieu où il est chez lui, quel que soit le titre
juridique qui fonde sa présence : propriété, usufruit, bail…
Par la notion de principal, on distingue les autres lieux de vie : résidence et
habitation. En effet, le domicile est le lieu de rattachement fixe et
permanent conservant cette qualité même si la personne ne l’occupe pas.
Les deux autres dénominations désignent des lieux de vie provisoire.

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Titre 2 – L’identification de la personne

Quant à la résidence, c’est le lieu où la personne séjourne effectivement de


manière stable, mais non définitive. La résidence a dans certaines situations
un intérêt particulier pour la personne. Ainsi, elle peut :

– évincer le domicile, ex : art 515-3 du C civ. Pour la détermination du


tribunal d’instance compétent en vue de recevoir une déclaration de PACS ;

– concurrencer le domicile, ex : mariage art. 74 c. civ (le mariage aura lieu


dans la commune où l’un des deux époux aura son domicile ou sa résidence
établie depuis 1 mois au moins d’habitation continue à la date de la
publication prévue par la loi ;

– compléter le domicile, ex : lorsque le juge confie l’enfant à un tiers chez


qui il fixe sa résidence alors même qu’il est domicilié chez ses parents ;

– suppléer le domicile, lorsque celui-ci est inconnu, pour désigner un juge


ou le lieu de signification d’un acte.

Quant à l’habitation, c’est le lieu où une personne séjourne effectivement,


mais pour un temps très bref (ex : une chambre d’hôtel).

B. L’élément intentionnel

Il s’agit de rechercher le lieu que la personne a réellement choisi comme


son domicile. Elle a la volonté réelle et effective de s’installer à l’adresse
désignée par l’élément précédent.
L’élément intentionnel est difficile à prouver vu sa subjectivité, il sera alors
le plus souvent tenu compte des circonstances. Le juge s’appuyant le plus
souvent sur des indices parmi lesquels on trouve

– l’existence régulière en un lieu ;

– la localisation du cercle familial, les fonctions municipales, associatives ;

– le rattachement à un bureau de vote ou à une direction fiscale.

§ 2. Le domicile imposé

Le domicile est parfois imposé par la loi (A) ou par le contrat (B).

A. Le domicile imposé par la loi

En raison de leur profession certaines personnes peuvent être amenées à


souvent se déplacer ce qui rend difficile la détermination de leur domicile
au point qu’un domicile leur est imposé (1). D’autres n’ayant pas
d’indépendance du fait de la loi se voient aussi imposer un domicile (2).

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Chapitre 4 – Le domicile

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1. La mobilité

Le batelier ainsi que toutes les personnes vivant à bord d’un bateau de
navigation intérieure en France et qui n’ont pas de domicile déterminé selon
les règles de droit commun, doivent choisir l’une des communes dont la
liste est établie par l’administration (art. 102 al.2). Le batelier salarié et les
personnes vivant avec eux ont en outre la possibilité de se rattacher à la
commune où l’entreprise qui exploite le bateau à son siège ou dans celle où
elle dispose d’un établissement.
À noter que jusqu’au 29 janvier 2017, celui qui exerçait une activité
ambulante et qui ne disposait pas de domicile déterminé selon les règles de
droit commun se voyait rattacher à une commune. Il avait le choix de la
commune à laquelle il souhaitait se rattacher, et ce, pour une durée
minimale de deux ans (Loi 3 janvier 1969 n° 69-3 art 7 et s.) La loi n°
2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté, entrée en
vigueur s’agissant des dispositions relatives au statut des gens du voyage, le
29 janvier 2017, prévoit dans son article 195 l’abrogation de la loi n° 69-3
du 3 janvier 1969 relative à l’exercice des activités ambulantes et au régime
applicable aux personnes circulant en France sans domicile ni résidence
fixe. Dès lors, les dispositions relatives aux titres de circulation (livrets
spéciaux de circulation et livrets de circulation) et à la commune de
rattachement sont abrogées.

En conséquence :

– les préfectures et les sous-préfectures ne délivreront plus, d’une part, de


titres de circulation et, d’autre part, d’arrêtés portant rattachement à une
commune ;

– les gens du voyage n’ont plus à justifier de la possession de ces titres de


circulation auprès des officiers ou agents de police judiciaire ou des agents
de la force ou de l’autorité publique depuis l’entrée en vigueur de ces
dispositions.

2. L’indépendance

Jusqu’en 1975, les femmes mariées ne pouvaient avoir de domicile distinct


de leurs époux. Désormais, les époux peuvent avoir des domiciles distincts
sans qu’il soit porté atteinte à la règle de la communauté de vie.

D’autres personnes sont aujourd’hui considérées comme n’étant pas


suffisamment indépendantes et se voient imposer un domicile. C’est le cas
du mineur non émancipé qui a nécessairement son domicile chez ses
parents ou en cas de séparation chez celui chez qui il réside le plus
longuement (en cas de résidence alternée). En cas de tutelle, le mineur
comme le majeur aura nécessairement pour domicile celui de son tuteur.
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Titre 2 – L’identification de la personne

B. Le domicile imposé par le contrat

Dans certains contrats de travail, il est possible de trouver des clauses qui
imposent au salarié d’avoir son domicile près du lieu où il exerce son
activité.

Pour ne pas contrevenir à l’article 8 de la convention européenne de


sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales duquel on
déduit le droit au respect du domicile, ce qui inclut la liberté de son choix,
la clause du contrat doit répondre à une double exigence :

– la nécessité, la restriction du choix est indispensable à la bonne marche de


l’entreprise ;

– la proportionnalité, la restriction est proportionnée à l’emploi occupé et au


travail demandé1.

En pratique, il s’avère souvent difficile de justifier l’atteinte ainsi portée au


libre choix du domicile.

ILLUSTRATION

Atteinte non justifiée

Cour de cassation chambre sociale

Audience publique du mardi 28 février 2012

N° de pourvoi : 10-18308
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt
suivant :

Sur le moyen unique :

Vu les articles 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de


l’homme et des libertés fondamentales, 9 du Code civil et L. 1121-1 du
Code du travail ;

Attendu que toute personne dispose de la liberté de choisir son domicile et


que nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés
individuelles et collectives des restrictions qui ne seraient pas justifiées par
la nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que Mme X… a été engagée à compter du 23


janvier 1999 par l’association Maison départementale de la famille en
qualité d’employée gouvernante, ses fonctions consistant à veiller au
confort physique et moral des majeurs sous tutelle ou curatelle, logés par
l’association dans un appartement ; que la durée de travail était fixée à 35
heures dans les plages horaires obligatoires de 8 h 00 à 12 h 30 et 18 heures
à 19 h 30, sur 5

jours à raison de 6 heures par jour et d’une demi-journée de 3 h 30, outre un


1. Cass. soc. 23 septembre 2009 n° 08-41641

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Chapitre 4 – Le domicile

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temps de 6 h 30 destiné tous les mois à participer aux activités, réunions,


visites psychiatres, accompagnement, sans astreintes ; qu’elle a été licenciée
par lettre du 30 janvier 2007 pour avoir méconnu l’obligation contractuelle
de résider à proximité de son lieu de travail ;
Attendu que pour dire le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse,
l’arrêt retient qu’en s’éloignant de son lieu de travail de 20 km, soit un
parcours de 25 minutes en véhicule personnel, la salariée n’était plus en
mesure de respecter l’obligation de résidence insérée dans le contrat de
travail lui imposant d’avoir son domicile à moins de 200 mètres de son lieu
de travail qui est une condition substantielle de son contrat de travail et que
cette obligation est indispensable à la protection des intérêts légitimes de
l’association et des personnes auprès desquelles la salariée a pour objet
d’intervenir et proportionnée, compte tenu de la nature de l’emploi occupé,
au but recherché ;

Qu’en statuant ainsi, par des motifs impropres à établir que l’atteinte au
libre choix par la salariée de son domicile était justifiée par la nature du
travail à accomplir et proportionnée au but recherché, la cour d’appel a
violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 31 mars


2010, entre les parties, par la cour d’appel de Reims ; remet, en
conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant
ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de
Douai ;

Condamne l’association Maison départementale de la famille aux dépens ;


Vu l’article 700 du code de procédure civile, condamne l’association
Maison départementale de la famille à payer à Mme X… la somme de 2
500 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de
cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la
suite de l’arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par
le président en son audience publique du vingt-huit février deux mille
douze.

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Titre 2 – L’identification de la personne

Section 2

L’unicité du domicile

Au principe d’unicité (§1) est assorti certaines dérogations (§2).

§ 1. Le principe d’unicité

Le principe est que chaque individu n’a qu’un seul domicile (art. 102 c.
civ.).

Ainsi, tout ce qui n’est pas domicile principal n’est que résidence ou
habitation. On

considère que pour changer de domicile, la personne doit al er habiter


réel ement

dans un autre lieu et avoir l’intention d’y fixer son principal


établissement. Là

encore, on retrouve les deux éléments matériel et intentionnel.

Selon l’article 104 du Code civil, pour extérioriser ce changement, une


double déclaration peut être faite à la mairie du lieu que l’on quitte et à celle
du lieu où l’on va habiter. Pour autant, ce moyen n’est pas toujours
suffisant, les deux éléments devront être prouvés si contentieux il y a.

§ 2. Les dérogations au principe

L’élection de domicile est une technique qui vient déroger au principe


d’unicité en attribuant à une personne un domicile spécial et purement fictif
dans le but de donner compétence à un tribunal ou encore de donner
certains pouvoirs à un mandataire. Cette technique est employée pour des
dérogations légales (A) ou conventionnelles (B).
A. Les dérogations légales

La loi prévoit plusieurs situations où il est fait recours à la technique de


l’élection de domicile.

En matière de procédure, il est ainsi admis que celui qui forme un pourvoi
en cassation doive prendre un avocat au Conseil ce qui entraîne élection de
domicile chez l’avocat choisi (art. 973 CPC). Pareillement, la remise d’un
titre à un huissier de justice en vue de son exécution emporte en principe
pour toutes notifications relatives à cel e-ci, élection de domicile en son
étude (Art. 2 du décret 31 juil et 1992).

En matière de droit de la famille, tout acte d’opposition à mariage doit


contenir élection de domicile au lieu où le mariage a vocation à être célébré
(art. 176 al 1 c. civ.) 9782340-033689_001-152.indd 84

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Chapitre 4 – Le domicile

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B. La dérogation conventionnel e

Les parties a un contrat peuvent décider dans le cadre de celui-ci que pour
l’exécution du contrat, l’une d’entre elles est réputée avoir domicile à un
lieu donné (l’étude du notaire par exemple).

Toutefois, si une telle élection de domicile emporte dérogation aux règles de


compétences territoriales, selon lesquelles le tribunal compétent est en
principe celui du lieu du domicile du défendeur, elle ne sera valable qu’à la
double condition :

– d’avoir été conclue entre personne ayant toute la qualité de commerçant ;

– d’être spécifiée de manière très apparente dans l’engagement de la partie


à laquelle elle est opposée. (art. 48 CPC).

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Titre 2 – L’identification de la personne

CAS PRATIQUE

Le domicile

M. Heisenberg est représentant pour une société de bijoux. Il conserve donc


chez lui certaines pièces : bagues, colliers… Depuis qu’il a commencé à
travail er pour cette société, il a déjà été victime de deux agressions à son
domicile visant à le cambrioler.

Son employeur lui demande de déménager et de prendre un domicile dans


une vil e où les cambriolages sont moins fréquents.

Il vient alors vous consulter pour avoir si son employeur peut réel ement le
contraindre à déménager.

Correction

Un salarié entrepose de la marchandise de son entreprise à son domicile. En


raison des nombreuses agressions à son domicile dont il a été victime, son
employeur exige qu’il déménage.

Un employeur peut-il imposer à son salarié qui ramène chez lui de la


marchandise un changement de domicile en raison des cambriolages
dont il a été victime ?

Article 9 du Code civil : « Chacun à droit au respect de sa vie privée. »

La jurisprudence considère que pour ne pas contrevenir à l’article 9 du


Code civil ainsi qu’à la Convention européenne de sauvegarde des droits de
l’homme et des libertés fondamentales, qui dans son article 8 impose le
respect du domicile, ce qui inclut la liberté de son choix, la clause du
contrat doit répondre à une double exigence :
– la nécessité, la restriction du choix est indispensable à la bonne marche de
l’entreprise ;

– la proportionnalité, la restriction est proportionnée à l’emploi occupé et au


travail demandé (Cass. soc. 23 septembre 2009, n° 08-40434 :

– « Toute personne dispose de la liberté de choisir son domicile et que nul


ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuel es et col
ectives des restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche
à accomplir et proportionnées au but recherché »)

En l’espèce, le refus du salarié de déménager suite aux agressions dont il


avait été victime à son domicile était un motif impropre à établir que
l’atteinte au libre choix par le salarié de son domicile était justifiée par la
nature du travail à accomplir et proportionnée au but recherché, la cour
d’appel a violé les textes susvisés.

Aux termes des articles 9 du Code civil et 8 CEDH, un employeur ne peut


imposer son domicile à son salarié sauf s’il justifie de la nécessité de sa
demande et de sa proportionnalité au regard de l’emploi occupé. Or en
l’espèce, l’employeur demande à son salarié de déménager suite à des
cambriolages fréquents à son domicile. Au regard de la jurisprudence et
notamment de l’arrêt du 23 septembre 2009 rendu par la Chambre sociale
de la Cour de cassation, il ne s’agit pas d’un motif justifiant de porter
atteinte au libre choix par une personne de son domicile. Donc, Monsieur
Heisenberg peut être rassuré son employeur ne pourra le forcer à
déménager.

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Chapitre 5

Les actes de l’état civil

Établir l’acte d’état civil (Section 1) d’une personne est essentiel pour son
identification (Section 2), il arrive alors parfois que l’acte soit détruit, il
convient dès lors de remédier à cette situation (Section 3).

Section 1

L’établissement de l’acte de l’état civil

Dans certaines circonstances dresser un acte d’état civil est obligatoire, la


force probante qui est alors attachée à l’acte oblige à ce que certaines
conditions soient respectées au moment de sa rédaction (§1). Leurs non-
respects entraînant alors des sanctions (§2).

§ 1. Les conditions de rédaction

Des règles générales viennent gouverner la rédaction des actes de l’état civil
(A) auxquelles il peut parfois être dérogé (B).

A. Les règles générales applicables à la rédaction


Celles-ci s’appliquent à l’auteur (1), au contenu (2) et à la date (3).

1. L’auteur de l’acte

Les actes de l’état civil sont établis par un officier d’état civil qualité
reconnu au maire de la commune qui peut la déléguer à d’autres membres
du conseil municipal, voire à des agents communaux.

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Titre 2 – L’identification de la personne

L’officier d’état civil ou son délégué reçoit les déclarations qui lui sont
faites sans avoir à en vérifier la sincérité. Il est là pour constater la présence
et les propos des parties ou déclarants ainsi que des témoins.

Notons que les parties sont les personnes dont l’état civil va être modifié.
Ils doivent être présents en cas de mariage. Les déclarants sont les
personnes sur la déclaration desquelles l’officier d’état civil établit l’acte,
l’individu concerné étant dans l’impossibilité d’intervenir lui-même(Par
exemple le père qui doit déclarer son enfant dans les cinq jours de la
naissance). Les témoins ne sont requis qu’à l’occasion de l’établissement
d’un acte de mariage.

Néanmoins, la responsabilité civile de l’officier d’état civil peut être


recherchée s’il est démontré qu’il s’est rendu coupable d’imprudence, de
négligence ou de fraude. La responsabilité pénale de l’officier d’état civil
peut aussi être retenue, il est exposé au paiement d’une amende comme à
des poursuites si celui-ci commet un faux. De surcroît, il peut engager sa
responsabilité disciplinaire mesures de suspension ou de révocation).

2. Le contenu de l’acte
Un acte d’état civil doit comporter dès son origine différentes mentions (a)
et peut par la suite être complété (b).

a. Les mentions d’origines

Certaines mentions doivent figurer sur tous les actes, il s’agit de la date, de
l’identité et du domicile. Plus précisément, l’acte d’état civil doit
mentionner, en langue française, l’année, le jour et l’heure où il est établi,
les prénoms, noms, profession et domicile de ceux qui y sont cités (art. 34
al. 1er c. civ.) et enfin l’identité de celui qui l’a dressé.

D’autres mentions sont propres à un acte en particulier.

Ainsi, pour un acte de mariage, il est nécessaire de faire mention de


l’identité des époux, de leurs parents, de leurs témoins et le cas échéant le
consentement du conseil de famille, l’accord des ascendants, la déclaration
des conjoints de se prendre pour époux, le prononcé de leur union par
l’officier d’état civil, la présence ou non d’un contrat de mariage.

Pour un acte de naissance, il faut faire mention du jour, de l’heure, du lieu


réel de la naissance, du sexe de l’enfant. Les prénoms de l’enfant, son nom
de famille, les noms et prénoms, âge, profession et domicile de ses parents.
Lorsque ce n’est pas le père qui a déclaré l’enfant, il faut faire état du nom,
prénom, domicile et profession du déclarant (art. 57 al 1 c. civ.).

Quelques cas particuliers sont à prendre en compte : toute personne qui


trouve un enfant nouveau-né est tenue d’en faire la déclaration à l’officier
de l’état civil 9782340-033689_001-152.indd 88

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Chapitre 5 – Les actes de l’état civil

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du lieu de la découverte. L’officier d’état civil dresse un procès-verbal qui


outre les mentions précédentes indique la date, l’heure, le lieu et les
circonstances de la découverte, l’âge apparent et le sexe de l’enfant et toute
particularité permettant de l’identifier. Pour finir, il est fait mention de
l’autorité à laquelle il a été confié.

b. Les mentions rajoutées

Durant la vie d’une personne, certaines mentions figurant dans son état civil
peuvent être modifiées. On songe par exemple aux modifications apportées
à l’acte de naissance lors d’une reconnaissance, des changements de
prénom ou de nom, de sexe, de la célébration d’un mariage. L’acte de
mariage est lui aussi amené à évoluer en cas de divorce, de séparation de
corps, de changement de nom, de prénom ou encore de sexe…

3. La date de l’acte

Lors de la déclaration de naissance, l’acte la relatant doit immédiatement


être rédigé. Il en est de même en cas de mariage, une fois que l’officier
d’état civil aura reçu des parties la déclaration qu’elles veulent se prendre
pour mari et femme, « il prononcera au nom de la loi qu’elles sont unies par
le mariage et il en dressera l’acte sur le champ » (Art. 75 al. 6 c. civ.). En
matière de décès, il est aussi d’usage de dresser l’acte de décès sitôt la
déclaration reçue.

B. Les dérogations aux règles de rédaction

Dans certaines situations où un élément d’extranéité est en cause, des


dispositions particulières s’appliquent aux actes d’état civil.

Ainsi, tous actes d’état civil dressés en pays étranger concernant un


Français sont valables s’ils ont été reçus conformément aux lois françaises
par les agents diplomatiques ou consulaires. C’est le ministère des affaires
étrangères qui est chargé de conserver un double des actes.

Si l’acte concernant le ressortissant français est rédigé dans les formes


prévues par le pays étranger, alors il fait foi, sauf si d’autres actes ou pièces
détenues permettent d’établir que le premier acte est irrégulier ou falsifié.

On peut ici citer comme exemple celui des affaires liées aux conventions de
mère porteuse et notamment un arrêt de la première chambre civile de la
Cour de cassation 17 décembre 2008 ( Bul . I n° 1285). En l’espèce, un
couple a eu recours à une mère porteuse en Californie et de retour en France
demande transcription sur les registres de l’état civil des actes de naissances
établis en Californie. La Cour de cassation a admis que le Ministère public
était fondé à demander l’annulation de la transcription de ces actes en
raison de la fraude à la loi qui avait été commise.

En effet, en France, les conventions de mères porteuses sont prohibées.


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Titre 2 – L’identification de la personne

annulation ne prive pas pour autant l’enfant de son état civil américain tel
qu’il résulte de l’acte dressé aux États-Unis.

§ 2. Les sanctions

En dehors d’une éventuel e action en dommages et intérêts lorsque la


mauvaise

rédaction de l’acte porterait préjudice à la personne, les défauts affectant


l’acte

peuvent entraîner sa rectification (A) ou son annulation (B).

A. La rectification de l’acte

La rectification de l’acte est le plus souvent judiciaire (1), mais peut aussi
résulter d’une décision administrative (2).

1. La rectification judiciaire

La rectification judiciaire peut intervenir lorsque l’acte est entaché d’une


irrégularité. La demande est présentée par le Procureur de la République
devant le tribunal de grande instance, qui agit d’office lorsque la
rectification tend à réparer une erreur ou une omission sur une indication
essentielle (art. 99 al. 3 c. civ.) ou par toute personne justifiant d’un intérêt
au moins moral.

Une fois la rectification ordonnée la mention est rajoutée ou rectifiée sur


l’acte Le dispositif de la décision est alors transmis immédiatement par le
Procureur de la République au dépositaire de l’acte rectifié (art. 101 c. civ.).

2. La rectification administrative

Le législateur a simplifié les démarches permettant de rectifier des erreurs


matérielles visant les actes de l’état civil. Désormais, les simples erreurs
ainsi que les omissions matérielles qui viennent entacher les énonciations et
mentions apposées en marge des actes de l’état civil pourront être corrigées
par les officiers de l’état civil, sans qu’ils soient obligés de se référer au
procureur de la République.

La rectification est opposable à tous à compter de sa publicité sur les actes


de l’état civil (C. civ., art. 100).

B. L’annulation de l’acte

L’annulation peut être demandée par toute personne qui y a un intérêt ou par
le ministère public. Elle est présentée au tribunal de grande instance qui ne
la prononcera que s’il relève la méconnaissance d’une norme substantielle.

Par exemple, l’acte a été dressé par une personne n’ayant pas la qualité
d’officier de l’état civil (irrégularité de forme), ou encore un mariage
célébré entre un frère et sa sœur (irrégularité de fond)

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Chapitre 5 – Les actes de l’état civil

91
Il appartient au juge d’apprécier si l’annulation est bien nécessaire ou si la
simple rectification peut suffire.

Section 2

L’utilisation de l’acte de l’état civil

Trois points vont ici retenir notre attention : la consultation directe de l’acte,
l’obtention d’une copie et la demande d’un extrait.

§ 1. La consultation directe

Si l’on doit pouvoir consulter les registres d’état civil, cela doit être fait en
considération du droit au respect de la vie privée. Ainsi, des règles ont été
établies.

Pour les registres de plus de 100 ans, le principe est celui du libre accès,
toute personne pouvant les consulter sans toutefois être autorisée par
principe à en faire une copie.

Pour les registres de moins de 100 ans, seuls les agents de l’État habilités à
cet effet sont autorisés à les consulter ainsi que les personnes munies d’une
autorisation écrite du procureur de la République (article 8 du décret du 3
août 1962).

§ 2. La copie

Une personne majeure ou émancipée, ses descendants et ascendants, son


conjoint, son représentant légal, le procureur de la République, le greffier en
chef du tribunal d’instance (en vue de l’établissement des certificats de
nationalité française), peuvent obtenir une copie intégrale de ses actes de
naissance et de mariage.

Les autres ne peuvent obtenir cette copie qu’avec l’autorisation du Parquet


ou, à défaut, du président du TGI statuant en référé1.

1. Article 9, décret du 3 août 1962


Toute personne majeure ou émancipée peut obtenir, sur indication des nom
et prénom usuel de ses parents, des copies intégrales de son acte de
naissance ou de mariage. Les ascendants ou descendants de la personne que
l’acte concerne, son conjoint et son représentant légal peuvent aussi obtenir
les mêmes copies en fournissant l’indication des nom et prénom usuel des
parents de cette personne. Ces copies peuvent être aussi délivrées au
procureur de la République, au greffier en chef du tribunal d’instance pour
l’établissement des certificats de nationalité française et, dans les cas où les
lois et règlements les y autorisent, aux administrations publiques.

Les copies intégrales des actes de reconnaissance ne sont délivrées qu’aux


personnes mentionnées à l’alinéa précédent, ainsi qu’aux héritiers de
l’enfant.

Les autres personnes ne peuvent obtenir la copie intégrale d’un acte de


naissance, de reconnaissance ou de mariage qu’en vertu d’une autorisation
du procureur de la République.

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Titre 2 – L’identification de la personne

Concernant les actes de décès, toute personne, sans avoir à justifier d’un
intérêt particulier, peut en obtenir une copie.

§ 3. L’extrait

Des extraits des actes de naissance et de mariage peuvent être obtenus par
toute personne qui en fait la demande. Toutefois, seuls certains éléments
peuvent y figurer.

Pour l’acte de naissance : y sont mentionnés le jour, l’année, l’heure et le


lieu de naissance, le sexe, les prénoms et le nom de l’enfant, et, le cas
échéant, mariage, divorce, séparation de corps, conclusion, dissolution,
modification d’un Pacte civil de solidarité (PACS), décès, décision
judiciaire quant à sa capacité1.

Des restrictions particulières s’appliquent concernant l’indication des noms,


prénoms date et lieu de naissance des parents de l’enfant2.

Pour l’acte de mariage, ne peuvent y figurer que l’année et le jour du


mariage, les noms et prénoms date et lieu de naissance des époux ainsi que
les mentions En cas de refus, la demande sera portée devant le président du
tribunal de grande instance, qui statuera par ordonnance de référé.

Les copies d’actes de décès peuvent être délivrées à toute personne.

1. Article 10, décret 3 août 1962

Les dépositaires des registres seront tenus de délivrer à tout requérant des
extraits des actes de naissance et de mariage.

Les extraits d’acte de naissance indiqueront, sans autres renseignements,


l’année, le jour, l’heure et le lieu de naissance, le sexe, les prénoms et le
nom de l’enfant tels qu’ils résulteront des énonciations de l’acte de
naissance ou des mentions portées en marge de cet acte. En outre, ils
reproduiront éventuellement les mentions de mariage, de divorce, de
séparation de corps, de conclusion, modification ou dissolution de pacte
civil de solidarité, de décès et de décisions judiciaires relatives à la capacité
de l’intéressé. Les mentions relatives à la nationalité française qui auront
été portées en marge de l’acte de naissance ne seront reproduites sur
l’extrait d’acte de naissance que dans les conditions prévues à l’article 28-1
du Code civil.

2. Article 11 décret du 3 août 1962

Toute personne majeure ou émancipée peut obtenir, sur indication des nom
et prénom usuel de ses parents, des extraits de son acte de naissance
précisant en outre les noms, prénoms, dates et lieux de naissance de ses père
et mère. Les ascendants, les descendants ou les héritiers de cette personne,
son conjoint et son représentant légal, peuvent obtenir les mêmes extraits en
fournissant l’indication des nom et prénom usuel des parents de la personne
que l’acte concerne. Cette dernière condition n’est pas requise des héritiers
autres que les ascendants, descendants, frères et sœurs ou conjoint, dès lors
qu’ils justifient de leur qualité.

Ces extraits peuvent aussi être délivrés au procureur de la République, au


greffier en chef du tribunal d’instance pour l’établissement des certificats de
nationalité française et, dans les cas où les lois et règlements les y
autorisent, aux administrations publiques.

Les autres personnes ne peuvent se voir délivrer ces extraits que dans les
conditions prévues aux troisième et quatrième alinéas de l’article 9
(autorisation du Procureur de la république).

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Chapitre 5 – Les actes de l’état civil

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relatives à leur régime matrimonial, divorce, ou séparation de corps1.


L’indication des noms et prénoms des père et mère ne peut être obtenue que
dans certains cas2.

Section 3

La destruction de l’acte de l’état civil

L’article 46 du Code civil dispose : « Lorsqu’il n’aura pas existé de


registres, ou qu’ils seront perdus, la preuve en sera reçue tant par titres que
par témoins ; et, dans ces cas, les mariages, naissances et décès pourront
être prouvés tant par les registres et papiers émanés des pères et mères
décédés, que par témoins. » Deux situations sont ici prévues, celle où l’acte
a été perdu et celle où il n’a jamais été établi. D’autres évènements, non
prévus par cette disposition, peuvent empêcher une personne de présenter
son acte d’état civil, les registres ont été détruits, la personne ne sait pas en
quel lieu l’acte a été établi.
Pour faire établir de nouveau l’acte d’état civil, il faudra prouver d’une part,
les circonstances d’où il résulte l’impossibilité de produire l’acte de l’état
civil. Et d’autre part, la réalité de l’évènement, décès, mariage… qui aurait
dû y figurer. La preuve de la naissance, du mariage, du décès et d’autres
éléments mentionnés sur cet acte peut alors être apportée en justice, par tous
moyens, témoignage inclus.

Le juge appréciera souverainement la véracité de ces éléments.

Le jugement constatant ces deux éléments remplace alors l’acte, il est


opposable à tous et est transcrit sur les registres de l’état civil.

1. Article 10 alinéa 3 du décret du 3 août 1962

Les extraits d’acte de mariage indiqueront, sans autres renseignements,


l’année et le jour du mariage, ainsi que les noms et prénoms, dates et lieux
de naissance des époux, tels qu’ils résulteront des énonciations de l’acte de
mariage ou des mentions portées en marge de cet acte. En outre, ils
reproduiront les énonciations et mentions relatives au régime matrimonial
ainsi que mentions de divorce et de séparation de corps.

2. Article 11 alinéa 4

Les extraits d’actes de mariage précisant les noms et prénoms des père et
mère ne pourront être délivrés qu’avec autorisation du Procureur de la
République.

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Titre 2 – L’identification de la personne

QUIZ

L’identification de la personne
Plusieurs réponses sont parfois attendues

Q1. Le nom de famil e est immuable

OUI – NON – Cela dépend

Q2. Il est nécessaire de donner à un enfant un prénom figurant dans le


calendrier OUI – NON – Cela dépend

Q3. Il est possible de se servir d’un pseudonyme pour exercer une


profession réglementée OUI – NON – Cela dépend

Q4. L’employeur peut imposer un domicile à son salarié

OUI – NON – Cela dépend

Q5. L’officier d’état civil peut imposer un prénom aux parents de l’enfant
OUI – NON – Cela dépend

Q6. Puis-je donner à mon enfant le nom de son père et le mien accolé
sachant que son père porte déjà deux noms de famil e, Ex : le père :
Mauclair Bernard et la mère Dail ant R1. Oui, l’enfant pourra s’appeler
Mauclair Bernard Daillant

R2. Non, les parents doivent se limiter à deux noms de famil e

Q7. Il est possible d’assigner à un enfant le sexe

R1. Féminin

R2. Masculin

R3. Neutre

Q8. Pour pouvoir changer de sexe sur les registres de l’état civil, il faut R1
Avoir subi des opérations chirurgicales irréversibles

R2. En faire la demande au Président de la République


R3. En faire la demande au Tribunal de Grande Instance

Q9 Qui va choisir les prénoms et nom de l’enfant né sous X ?

R1. La sage-femme

R2. L’officier d’état civil

R.3 Le préfet

Réponses p. 95.

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Réponses

Q1. Cela dépend. Une personne ne saurait a priori acquérir un nom différent
de celui que désigne son acte de naissance.

Sauf le cas de l’utilisation prolongée d’un nom d’emprunt. Ce mode


particulier d’acquisition d’un nom suppose que l’usage invoqué a été loyal
(sans fraude), public (un nom couramment employé), incontesté (nul ne
s’est élevé contre l’emprunt de ce nom) et anciennement établi, ce qui
suppose en pratique une possession d’état prolongé de l’ordre de plusieurs
décennies.

Q2. : Non plus depuis la loi du 8 janvier 1993.

Q3. : Non.

Q4. : Cela dépend : la clause du contrat doit répondre à une double exigence
:

– la nécessité, la restriction du choix est indispensable à la bonne marche de


l’entreprise
– la proportionnalité, la restriction est proportionnée à l’emploi occupé et au
travail demandé.

Q5. : Non, Si les prénoms choisis ou l’un d’eux seul ou associé aux autres
prénoms ou au nom lui paraissent contraires à l’intérêt de l’enfant ou au
droit des tiers à la protection de leur nom de famil e, il en avise sans délai le
procureur de la République. Si ce dernier estime fondées les réserves
formulées, il saisit le Juge aux affaires familiales. Ce dernier pourra
imposer le prénom, si les parents persistent.

Q6. : 2.

Q7. : 1 et 2.

Q8. : 3.

Q9. : 2 article 57 al. 2 du Code civil « l’officier de l’état civil choisit trois
prénoms dont le dernier tient lieu de nom de famil e à l’enfant. »

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TITRE 3

LA PROTECTION DE LA PERSONNE

Au droit traditionnel des incapacités s’est substitué depuis une quarantaine


d’années celui des personnes protégées. Depuis les lois du 3 janvier 1968 et
du 5 mars 2007, le législateur a quasiment remplacé tous les termes
d’incapacité jugés humiliants par ceux de personne protégée. Comme
l’énonce l’article 1123

du Code civil1, la capacité est la règle, l’incapacité de la personne doit donc


rester exceptionnelle. L’incapacité connaît différents niveaux selon sa
gravité. On oppose ainsi incapacité d’exercice et incapacité de jouissance.
L’incapacité de jouissance s’entend du fait de priver quelqu’un de l’aptitude
à être titulaire de certains droits.

Cette incapacité ne peut être que spéciale. L’incapacité d’exercice s’entend


du fait de priver une personne de la possibilité de mettre en œuvre seule
tout ou partie des droits dont elle est titulaire.

La personne peut alors faire l’objet d’une protection particulière en fonction


de sa vulnérabilité. Du fait de son âge, le mineur est nécessairement
reconnu comme vulnérable et va donc être protégé (Chapitre 1). Le majeur,
lui, est, par principe, capable et ne bénéficiera qu’exceptionnellement d’une
protection si sa vulnérabilité est reconnue (Chapitre 2).

1. « Toute personne peut contracter, si el e n’en a pas été déclarée


incapable par la loi ».

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Chapitre 1

La protection des mineurs

Cette protection change si l’on a affaire à un mineur non émancipé (Section


1) ou émancipé (Section 2).

Section 1

Les mineurs non émancipés

Le mineur de moins de 18 ans tant qu’il n’est pas émancipé est protégé par
une incapacité générale d’exercice. Juridiquement inapte à administrer seul
ses biens et sa personne, il est placé sous administration légale (§1) ou
tutelle (§2), et ce, sous le contrôle du juge des tutelles1.

Notons que l’administration légale est ouverte tant qu’au moins un des deux
parents est en vie et qu’il conserve son autorité parentale sur l’enfant.

§ 1. L’administration légale

Le régime de protection des mineurs a fait l’objet d’une réforme d’ampleur


le 15 octobre 2015. En effet, avant l’ordonnance du 15 octobre 2015, la loi
opérait une distinction selon la composition de la famille du mineur. Ainsi,
trois situations étaient envisageables :

– les deux parents sont vivants ou les deux parents ont bien l’autorité
parentale, le mineur est placé sous un régime d’administration légale pure et
simple ;

– le mineur n’a aucun de ces deux parents : régime de la tutelle ;

– un seul des deux parents est vivant ou dispose de l’autorité parentale.

1. Le juge des tutelles est un magistrat du siège du tribunal d’instance


spécialisé dans la surveillance des administrations légales et de tutelles.

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TITRE 3 – La protection de la personne

Dans ce dernier cas, un système intermédiaire était établi, celui de


l’administration légale sous contrôle de justice. Plus précisément, il
s’appliquait dans les cas suivants :

– l’un des parents est décédé ;

– l’un des parents est privé de l’autorité parentale ;


– l’enfant a été adopté par un seul parent ;

– les parents du mineur sont séparés et n’exercent plus en commun


l’autorité parentale ;

– la filiation de l’enfant n’a été établie qu’à l’égard d’un seul parent.

L’administration légale sous contrôle de justice s’organisait alors de la


manière suivante. Par principe c’est celui des deux parents qui exerce
l’autorité parentale sur l’enfant qui devient administrateur légal de ces
biens. Il est en droit d’accomplir seul un certain nombre d’actes jugés moins
graves mais doit, en revanche, obtenir l’accord préalable du juge des
tutelles pour les actes les plus graves comme par exemple vendre un
immeuble appartenant au mineur. En outre, le parent, administrateur, est
tenu chaque année de rendre des comptes de sa gestion des biens du mineur
au juge des tutelles. En définitive, le système de l’administration légale sous
contrôle judiciaire s’avère bien plus contraignant que celui de
l’administration légale pure et simple, laissant plus de liberté aux parents.
Comme si, en quelque sorte un parent unique ne pouvait pas gérer aussi
bien le patrimoine de son enfant que deux parents. Avec l’ordonnance de
2015, législateur a entendu mettre fin à ce système jugé stigmatisant pour
les familles monoparentales. De surcroît, en pratique le système s’avérait
bien souvent inopérant puisque seul le parent dont le conjoint était décédé
était soumis à l’administration légale sous contrôle de justice, faute de
dispositif de recensement de l’ensemble des familles monoparentales.

La réforme répond donc à la volonté d’assurer une égalité de traitement


quel que soit le mode d’organisation de la famille, en mettant l’accent sur
une présomption de bonne gestion des biens du mineur par ses représentants
légaux et en réservant en principe le contrôle du juge aux seuls actes qui
pourraient affecter de manière grave le patrimoine du mineur.

Par ailleurs, il faut noter qu’après avoir totalement remanié les deux
systèmes précédents d’administration, l’ordonnance a également modifié la
place des règles concernant l’administration légale dans le Code civil.
L’ensemble des règles est aujourd’hui inséré dans le chapitre consacré à
l’exercice de l’autorité parentale relativement eux biens de l’enfant. Ce
choix traduit la volonté de donner la même place aux parents qu’ils agissent
sur la personne de leur enfant ou sur leurs biens.

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Chapitre 1 – La protection des mineurs

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A. La gestion des biens du mineur

La personne qui assurera la gestion des biens du mineur est précisément


nommée par le Code civil. On évoque ici celui qui reçoit la qualité
d’administrateur (1).

L’administrateur désigné est alors investi d’un certain nombre de pouvoirs


(2).

1. La qualité d’administrateur

L’administration légale nous dit l’article 382 du code civil appartient aux
parents.

Si l’autorité parentale est exercée en commun par les deux parents, chacun
d’eux est donc administrateur légal.

Ce régime vaut alors pour les enfants nés du mariage, ceux nés hors des
liens du mariage dont les parents exercent en commun l’autorité parentale,
ceux adoptés par deux parents, comme ceux qui n’auraient qu’un seul
parent exerçant l’autorité parentale, peu important la raison.

Par ailleurs, l’article 371-1 du Code civil dispose désormais que l’autorité
parentale « appartient aux parents », et non plus aux père et mère, « jusqu’à
la majorité ou l’émancipation de l’enfant pour le protéger dans sa sécurité,
sa santé et sa moralité, pour assurer son éducation et permettre son
développement, dans le respect dû à sa personne ».
Dans de très rares occasions, le principe selon lequel le parent est
administrateur des biens de son enfant connaît des dérogations.

C’est le cas lorsqu’il existe une opposition d’intérêts entre l’enfant et ses
parents ou l’un de ses parents à l’occasion de la liquidation d’une
succession par exemple.

Dans ce cas, le juge va nommer un tiers pour assurer la protection des


intérêts du mineur. On le nomme l’administrateur ad hoc. Il est choisi de
préférence au sein de la famille ou si cela est impossible sur une liste établie
par ressort de cour d’appel (article 383 du Code civil)

C’est le cas également, lorsqu’une personne donne ou lègue un bien à un


enfant sous la condition d’être administré non pas par les parents, mais par
un tiers dont les pouvoirs sont déterminés par l’acte de transfert (donation
ou testament). Dans l’hypothèse où le tiers administrateur refuse cette
fonction ou ne peut l’exercer, le juge des tutelles nomme un administrateur
ad hoc pour le remplacer (article 384

du Code civil)

2. Les pouvoirs de l’administrateur

Un principe gouverne cette gestion. L’administrateur légal est tenu


d’apporter dans la gestion des biens du mineur des soins prudents, diligents
et avisé dans le seul intérêt du mineur (article 385 du Code civil).

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TITRE 3 – La protection de la personne

Les pouvoirs dévolus à l’administrateur sont définis en fonction de la


gravité des actes en cause. On opère ainsi classiquement en matière de
protection des personnes une distinction entre trois catégories d’actes : les
actes de conservations ; les actes d’administration ; les actes de
dispositions1.

Les premiers, actes de conservation ou actes conservatoires, sont les moins


graves, ils n’engagent pas le patrimoine du mineur et ont pour seule
vocation comme leur nom l’indique d’en conserver la valeur. Ils sont
considérés comme utiles mais non nécessaires. Il peut s’agir d’inscrire une
hypothèque ou d’inter-rompre une prescription.

Les deuxièmes, actes d’administration, sont considérés comme nécessaires


à la gestion du patrimoine du mineur. Il s’agit des actes qui n’emportent pas
de risque anormal pour le patrimoine du mineur. On inclut ici la conclusion
d’un bail pour une durée de neuf ans maximum ; les travaux nécessaires
d’entretien ou encore d’amélioration ; l’ouverture d’un premier compte ou
d’un livret au nom du mineur.

Les derniers, actes de dispositions, sont les plus graves. Ce sont ceux qui
peuvent engager le patrimoine du mineur de manière durable et
substantielle. Le décret du 22 décembre 2008 les définit comme ceux qui
engagent le patrimoine du mineur

« pour le présent ou l’avenir, par une modification importante de son


contenu, une dépréciation significative de sa valeur en capital ou une
altération durable 1. Le décret n° 2008-1484 du 22 décembre 2008 relatif
aux actes de gestion du patrimoine des personnes placées en curatelle ou en
tutelle, énonce dans son article 1er que « constituent des actes
d’administration les actes d’exploitation ou de mise en valeur du patrimoine
de la personne protégée dénués de risque anormal. »

L’article 3 prévoit que les actes conservatoires sont ceux « qui permettent
de sauvegarder le patrimoine ou de soustraire un bien à un péril imminent
ou à une dépréciation inévitable sans compromettre aucune prérogative du
propriétaire ». Le décret n° 2008-1484 du 22 décembre 2008 relatif aux
actes de gestion du patrimoine des personnes placées en curatelle ou en
tutelle, énonce dans son article dans son article 2 que

« constituent des actes de disposition, les actes qui engagent le patrimoine


de la personne protégée, pour le présent ou l’avenir, par une modification
importante de son contenu, une dépréciation significative de sa valeur en
capital ou une altération durable des prérogatives de son titulaire ».

Le décret du 22 décembre 2008 précité établit une liste des actes de


disposition à titre gratuit :

– donation consentie par une personne protégée majeure (art. 470, al. 2 et
476, al. 1er du Code civil) ;

– partage amiable (art. 507 du Code civil) ;

– acceptation pure et simple d’une succession (art. 507-1, al. 1er, du Code
civil) ;

– révocation d’une renonciation à une succession ou à un legs universel ou


à titre universel (art. 507-2

du Code civil) ;

– acceptation pure et simple d’un legs universel ou à titre universel (art.


724-1 du Code civil) ;

– révocation d’une renonciation à un legs (art. 724-1 du Code civil) ;

– choix par le donataire de rapporter en nature le bien donné (art. 859 du


Code civil) ;

– renonciation à une succession (art. 507-1, al. 2, du Code civil) ;

– renonciation à un legs (art. 724-1 du Code civil) ;

– renonciation à une action en réduction des libéralités excessives après le


décès du prémourant (art.

920 du Code civil) ;

– acceptation de legs à titre particulier et de donations grevés de charges ;

– renonciation à un legs universel grevé de charges ;


– révocation d’une donation entre époux (art. 953 du Code civil) ;

– consentement à exécution d’une donation entre époux.

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Chapitre 1 – La protection des mineurs

103

des prérogatives de son titulaire ». On peut citer la vente d’un bien


immobilier, la conclusion d’un bail de plus de neuf ans, la demande de
délivrance d’une carte bancaire de crédit…

Si on en revient à l’administration légale, on constate que selon la loi,


l’administrateur légal est en principe muni du pouvoir de gérer seul les
biens de son enfant, qu’il s’agisse des actes conservatoires, des actes
d’administrations ou des actes de dispositions (en principe). Il bénéficie à
ce titre d’une présomption simple de bonne gestion des biens du mineur qui
peut être remise en cause dans l’intérêt de ce dernier. C’est là notamment
qu’intervient le juge des tutelles dans sa fonction de contrôle de la gestion
des biens du mineur.

Toutefois, certains actes de par leur exceptionnelle gravité et leur impact sur
la situation patrimoniale du mineur ne pourront jamais être accomplis par
l’administrateur légal. Ce sont les actes mentionnés par l’article 387-2 du
Code civil. Par exemple, l’administrateur légal ne peut jamais donner un
bien appartenant à un mineur de moins de 16 ans, ni lui faire cautionner la
dette d’autrui, exercer une activité commerciale au nom de ce dernier…

B. Le contrôle de la gestion des biens du mineur

La présomption de bonne gestion des biens du mineur qui s’impose en


matière d’administration légale est, comme nous l’avons vu, simple, ce qui
permet de la remettre en cause dans l’intérêt du mineur. C’est dans ce cas
que peut intervenir le juge des tutelles (1) et qu’une sanction de
l’administrateur peut être prononcée (2).

1. Le rôle du juge des tutelles

L’ordonnance de 2015 vient supprimer le contrôle systématique du juge


afin de permettre de recentrer ses missions sur les situations les plus à
risques. Ainsi, afin de garantir la protection des intérêts du mineur, il est
prévu d’une part, que le juge des tutel es pourra soumettre certains
évènements à son contrôle périodique si la situation du mineur paraît
l’exiger et d’autre part, que la situation d’un mineur pourra être signalée
au juge des tutel es par des professionnels ou des membres de la famil e
ayant une inquiétude à cet égard.

Plusieurs hypothèses d’interventions du juge des tutelles sont alors


envisagées par les articles 387 à 387-6 du Code civil.

Tout d’abord, une intervention est prévue en cas de désaccords entre les
deux parents sur un acte à prendre quant aux biens de leur enfant. Ainsi,
l’article 387

dispose que dans ce cas, le juge des tutelles est saisi aux fins d’autorisation
de l’acte.

Ensuite, l’ordonnance exige une autorisation du juge pour un certain


nombre d’actes de disposition qui sont jugés les plus graves. L’article 387-1
dispose ainsi que l’administrateur légal ne peut, sans autorisation préalable
du juge des tutelles, 9782340-033689_001-152.indd 103

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TITRE 3 – La protection de la personne

procéder aux actes de disposition suivants sur les biens du mineur : vendre
de gré à gré un immeuble ou un fonds de commerce lui appartenant ;
apporter en société un immeuble ou un fonds de commerce lui appartenant ;
contracter un emprunt en son nom, renoncer en son nom à un droit,
transiger ou compromettre en son nom ; accepter purement et simplement
une succession lui revenant ; acheter des biens du mineur ou les prendre à
bail ; constituer gratuitement une sûreté en son nom pour garantir la dette
d’un tiers ou faire procéder à la réalisation d’un acte portant sur des valeurs
mobilières ou des instruments financiers si l’acte engage le patrimoine du
mineur pour le présent ou pour l’avenir par une modification importante de
son contenu, une dépréciation significative de sa valeur en capital ou une
altération durable des prérogatives du mineur.

De surcroît, l’article 387-3 prévoit un contrôle par le juge des tutelles des
situations dans lesquelles seraient identifiées un risque d’atteinte aux
intérêts du mineur.

À l’occasion de l’examen des actes soumis à son autorisation, le juge peut


en effet estimer que, en raison de la composition du patrimoine, ou de la
situation familiale (par exemple un conflit important entre les parents),
l’intérêt du mineur justifie de soumettre certains actes à son contrôle ; tel
serait par exemple le cas lorsque le juge sera saisi pour autoriser un mineur
à accepter purement et simplement une succession revenant au mineur à la
suite du décès d’un de ses parents.

Cet article crée par ailleurs un dispositif d’alerte permettant à un tiers, à un


parent ou au ministère public ayant connaissance d’une situation à risque
pour les intérêts patrimoniaux du mineur ou d’un acte ou d’une omission
portant une atteinte grave à ses intérêts de saisir le juge des tutelles.

Enfin, les articles 387-3, 387-4 et 387-5 du Code civil prévoient que le juge
peut solliciter de l’administrateur légal la réalisation d’un inventaire et ou la
remise de compte de gestion annuel.

2. La sanction de la mauvaise gestion

Toute faute de gestion peut conduire à engager la responsabilité civile de


l’administrateur légal. L’article 386 du Code civil précise que
l’administrateur légal est responsable pour faute quelconque de tout
préjudice causé aux intérêts du mineur.
La responsabilité solidaire des parents est maintenue. L’enfant a cinq ans
pour agir suivant sa majorité ou son émancipation. Dans les cas les plus
graves, le juge peut être amené à mettre fin au régime de l’administration
légale pour lui substituer celui de la tutelle (cela ne concerne que
l’administration des biens de l’enfant, les parents conservant leur autorité
sur la personne de l’enfant et ne concerne que les cas où il y a volonté de
nuire à l’enfant par l’acte frauduleux).

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Chapitre 1 – La protection des mineurs

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L’État peut également voir sa responsabilité engagée en cas de dommages


occasionnés par le juge dans sa fonction de contrôle de l’administration
légale (article 412 du Code civil).

C. La fin de l’administration légale

L’administration légale s’éteint normalement avec l’émancipation ou la


majorité de l’enfant.

Exceptionnellement, elle prend fin

– en raison du comportement des parents justifiant une mesure de clôture


par le juge des tutelles (cause grave) qui conduirait à l’ouverture d’une
tutelle (V. B. 2 précédent).

– en raison du décès de l’enfant

– en raison du décès des deux parents

– en raison du retrait total de l’autorité parentale pour les deux parents

§ 2. La tutel e
Lorsque les titulaires de l’autorité parentale ne peuvent plus l’exercer, une
tutelle est ouverte pour les enfants mineurs (article 390 du Code civil).

Un enfant mineur est placé sous le régime de la tutelle :

– si ses deux parents sont décédés ;

– ou s’ils font l’objet tous les deux d’un retrait total de l’autorité parentale ;

– ou si l’enfant n’a ni père ni mère.

À cela s’ajoute le cas exceptionnel où l’administration légale a été fermée


pour lui substituer le régime de la tutelle (V. paragraphe précédent).

La tutelle peut alors être familiale ou administrative. Il est mis en place une
tutelle administrative lorsque la tutelle est dite vacante, nul ne pouvant ou
ne voulant en assumer la charge au sein de la famille ; ou encore l’enfant
n’a pas de famille connue (pupille de l’État). Dans cette hypothèse, la
tutelle est confiée au conseil général. La tutelle est alors exercée sans
conseil de famille, ni subrogé tuteur.

Nous allons nous intéresser ici plus particulièrement à la tutelle familiale en


commençant par apprécier son organisation et son fonctionnement (A) pour
ensuite voir les droits du mineur à l’égard des délibérations du conseil de
famille (B) et enfin la fin de la tutelle (C).

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TITRE 3 – La protection de la personne

A. L’organisation et le fonctionnement de la tutelle

Quatre responsables de l’enfant sont désignés par la loi : le conseil de


famille (1), le tuteur (2) le subrogé tuteur (3) et le juge des tutelles.
1. Le conseil de famille (articles 398 et s. du Code civil)

Le juge des tutelles commence par constituer un conseil de famille d’au


moins quatre membres choisis en considération de l’intérêt du mineur, en
veillant si possible à ce que les deux branches de la famille (paternelle et
maternelle) soient représentées. Le juge préside le conseil de famille et le
tuteur et le subrogé tuteur en sont membres.

Pour son choix, le juge se réfère à l’aptitude, aux relations habituellement


entre-tenues avec le père ou la mère de l’enfant, aux liens affectifs avec ce
dernier ainsi qu’à la disponibilité des personnes. Les membres de la famille
de l’enfant peuvent faire partie du conseil de famille mais aussi des amis et
toutes autres personnes qui semblent pouvoir s’intéresser à l’enfant (article
399 du Code civil).

Le conseil de famille, une fois constitué, est chargé de régler les conditions
générales de l’entretien et de l’éducation du mineur en tenant compte de la
volonté que les parents avaient pu exprimer de leur vivant.

Il délibère par vote à la majorité. Dans le conseil de famille, le tuteur ne


vote pas. Il agit comme un organe de contrôle. La mission du conseil prend
fin avec la majorité ou l’émancipation de l’enfant. Mais rien n’interdit à
l’un de ses membres de demander au juge d’être déchargé de sa mission en
raison d’un changement important dans sa situation (art. 396 alinéa 2 du
Code civil). Si le juge des tutelles fait droit à cette demande, il procède à
son remplacement dans la foulée et dans les plus brefs délais notamment
lorsque le conseil ne comportait que les 4 membres requis.

2. Le tuteur (articles 403 et suivants du Code civil)

Il s’agira ici de traiter du choix et de la fonction de tuteur (a) puis de ses


pouvoirs (b).

a. Le choix du tuteur

Deux hypothèses de désignation du tuteur sont prévues par la loi. Le tuteur


peut avoir été désigné par le dernier parent vivant, par testament ou
déclaration devant notaire. Lorsqu’il n’a pas été choisi de tuteur par le
dernier mourant des père et mère ou que celui-ci vient à cesser ses
fonctions, un tuteur sera nommé par le conseil de famille (article 404 du
Code civil).

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Chapitre 1 – La protection des mineurs

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La tutelle est considérée comme une charge publique imposée pour la


protection de l’enfant et dans l’intérêt général. Celui qui se voit proposer
cette charge que ce soit par testament ou par le Conseil peut la refuser, peu
importent les raisons.

Une fois sa décision prise, il est engagé jusqu’à l’émancipation ou la


majorité du mineur. Seul un changement important dans sa situation
intervenu postérieurement à sa nomination peut justifier qu’il sollicite du
conseil de famille d’en être libérée.

Si la charge qu’il occupe est gratuite, le Conseil de famille peut lui allouer
des indemnités dont le montant sera prélevé sur les revenus du patrimoine
du mineur.

b. Les pouvoirs du tuteur (articles 503 et suivants du Code civil)

Les pouvoirs du tuteur s’exercent à la fois sur la personne du mineur, mais


aussi sur ses biens. Sauf hypothèse où :

– la tutelle s’exerce en même temps que l’autorité parentale ce qui réduit les
pouvoirs du tuteur à la gestion du patrimoine

– la tutelle a été divisée en deux, avec un tuteur à la personne et un tuteur


aux biens.

Reprenons cette distinction entre la tutelle à la personne et la tutelle aux


biens.
Dans la tutelle à la personne, le tuteur assure la direction de la personne de
l’enfant, lequel est domicilié chez lui. Il en est responsable au sens de
l’article 1242, alinéa 4 du Code civil dans la mesure où il lui incombe de
contrôler de manière permanente le mode de vie et l’activité de l’enfant. Le
tuteur assure aussi l’éducation de l’enfant. Toutefois, il est limité dans ses
choix par l’obligation de respecter les intentions manifestées de manière
formelle ou implicite par les parents, mais aussi par les orientations fixées
par le Conseil de famille.

Quant à la tutelle aux biens, dans les six mois qui suivent l’ouverture de la
tutelle, le tuteur doit faire procéder en présence du subrogé tuteur à
l’inventaire des biens du mineur. En cas d’omission du tuteur de réaliser cet
inventaire, le subrogé tuteur, à peine d’être solidairement responsable avec
le tuteur, doit saisir le juge des tutelles. Celui-ci peut réunir le Conseil de
famille pour qu’il soit procédé au changement de tuteur.

Comme dans la situation précédente de l’administration légale des biens du


mineur, on retrouve ici les trois catégories d’actes, actes conservatoires,
d’administration et de disposition. Les pouvoirs dévolus au tuteur sont alors
fonction de ces actes. Ainsi, certains d’entre eux pourront être réalisés seul
par le tuteur et d’autres nécessiteront des autorisations.

Il est prévu que le tuteur peut seul réaliser les actes conservatoires
(inscription d’hypothèque, interruption de prescription) et d’administration
nécessaires à la gestion du patrimoine du mineur. Il s’agit des actes qui
n’emportent pas de risque anormal pour le patrimoine du mineur (baux de
neuf ans maximum, résiliation 9782340-033689_001-152.indd 107

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TITRE 3 – La protection de la personne

d’un bail d’habitation en tant que bailleur, travaux d’aménagements,


d’entretien ou d’amélioration utiles…, ouverture d’un premier compte ou
livret au nom du mineur).
En revanche, le tuteur doit obtenir l’autorisation du Conseil de famille ou
du juge des tutelles pour les actes de disposition, comme par exemple, la
vente d’un immeuble, la demande de délivrance d’une carte bancaire de
crédit.

3. Le subrogé tuteur (articles 409 et suivants du Code civil)

Le conseil de famille doit choisir un subrogé tuteur parmi ses membres. Si


le tuteur a été choisi parmi les membres d’une des branches de la famille du
mineur, le subrogé tuteur est si possible choisi dans l’autre branche.

Il est chargé de surveiller la gestion du tuteur et de représenter le mineur si


ses intérêts sont en opposition avec ceux du tuteur. S’il constate des fautes
dans la gestion du tuteur, il doit en informer immédiatement le juge des
tutelles.

4. Le juge des tutelles

C’est un magistrat du tribunal d’instance dans le ressort duquel est située la


résidence habituelle du pupille ou le domicile du tuteur (article 1211 du
code de procédure civile). Le juge des tutelles est le président du conseil de
famille, il assume la charge de la sur veillance générale de la tutelle. À ce
titre il peut convoquer le tuteur, le subrogé tuteur ou un membre du conseil
de famille pour obtenir des éclaircissements ou leur enjoindre de
communiquer certaines informations (articles 393 et suivants du Code
civil).

B. Les droits du mineur à l’égard des délibérations du conseil de famil e Le


mineur peut obtenir une réunion du conseil de famille (par exemple, pour
lui exprimer son avis sur des décisions qui le concernent). Plus précisément,
à partir du moment où il a seize ans révolus il devra obtenir cette réunion.
S’il a moins de seize ans, en revanche, il en fera la demande et le juge
pourra ou non lui accorder.

Le mineur peut en outre assister aux réunions du conseil de famille (à titre


consultatif), sauf si le juge estime sa présence contraire à son intérêt.
Les délibérations du conseil de famil e peuvent enfin être contestées par le
tuteur, le subrogé tuteur ou les membres du conseil de famille dans les deux
ans qui suivent cette délibération ou qui suivent la découverte des
agissements frauduleux qui ont permis cette délibération et par le mineur
lui-même dans les cinq ans qui suivent sa majorité. Il peut d’ailleurs exercer
une action en justice contre n’importe quel organe de la tutelle (juge,
greffier, conseil de famille) s’il le juge responsable du dommage résultant
d’une faute quelconque commise dans l’exercice de sa fonction.

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Chapitre 1 – La protection des mineurs

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C. La fin de la tutel e

La tutelle prend fin à la majorité ou à l’émancipation du mineur, ainsi qu’à


son décès.

L’extinction de la tutelle entraîne la reddition de compte. Le tuteur établit


ainsi un ultime compte de gestion des opérations effectuées depuis la
réalisation du dernier compte annuel et le soumet à vérification et à
approbation. Dans les trois mois qui suivent la fin de sa mission, le tuteur
doit remettre une copie du compte de gestion précédent ainsi que des cinq
derniers comptes de gestion annuels :

– à l’enfant

– aux héritiers de l’enfant si la tutelle cesse par son décès.

Il doit aussi remettre l’inventaire initial des biens et les actualisations


réalisées sur les biens du mineur.

Section 2

Les mineurs émancipés


L’émancipation est l’acte par lequel un mineur est juridiquement
assimilé à un majeur. Elle est prévue par les articles 413-1 et suivants
du Code civil. Elle peut survenir à deux occasions. Tout d’abord,
l’émancipation peut être obtenue par le mariage (§1). Ensuite,
l’émancipation peut intervenir sur décision de justice (§2). Elle
emporte alors des effets sur les biens comme sur la personne (§3).

§ 1. L’émancipation par mariage

On considère que le mariage emporte de plein droit émancipation du


mineur.

Néanmoins cette situation reste rare, en effet, en matière de mariage la règle


de principe est que seules des personnes majeures peuvent se marier (art.
144 du Code civil). Dès lors, les mineurs ne sauraient contracter un
mariage.

Toutefois ce principe connaît une exception strictement encadrée par la loi.


En effet, le législateur a accepté sous certaines conditions cumulatives
qu’un mineur puisse se marier. Il lui faudra pour cela avoir l’accord d’au
moins un de ses deux parents ou, le cas échéant, celui du conseil de famille
(article 148 du Code civil). Seul l’accord d’un des deux parents suffit.
Autrement dit, le père du mineur, par exemple peut être d’accord pour le
mariage, tandis que la mère le refuse. Outre cet accord parental, il faudra
obtenir une dispense auprès du Procureur de la République qui ne
l’accordera que pour de motifs graves (article 145 du Code civil). En
résumé, il faudra réunir trois conditions :

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TITRE 3 – La protection de la personne

– l’accord d’au moins un des deux parents


– la dispense du procureur de la République

– le motif grave

Si ces différentes conditions sont remplies, le mineur pourra se marier et


son mariage entraînera automatiquement son émancipation avec tous les
effets qui vont avec.

Notons, qu’une dissolution ultérieure de l’union par le divorce ou le décès


du conjoint ne remet pas en cause l’émancipation.

§ 2. L’émancipation par décision de justice

Une fois atteint l’âge de seize ans, l’enfant peut être émancipé à la demande
de ses parents ou du conseil de famille par décision du juge.

Seuls les père et mère investis de l’autorité parentale peuvent faire cette
demande.

Même s’ils exercent en commun cette autorité, ils peuvent en faire la


demande séparément. Si l’enfant n’est plus sous l’autorité parentale, alors
c’est au Conseil de famille qu’il appartient de solliciter cette mesure.

La décision relève du juge des tutelles des mineurs du tribunal de grande


instance du lieu où réside habituellement le mineur ou du domicile de son
représentant légal. Il appréciera l’existence de justes motifs à l’appui de
cette demande.

Bien souvent les demandes d’émancipation sont formulées lorsque l’enfant


part faire des études à l’étranger ou encore dans le cas de jeunes mères de
famille qui ont bien l’autorité parentale sur leur enfant mais qui en raison de
leur minorité ne sont pas autonomes. Le juge entendra les père et mère de
l’enfant, ce dernier, ainsi que toutes personnes utiles pour prendre sa
décision.

Dans le cas où le juge constate que le mineur n’est pas suffisamment mature
pour subvenir lui-même à ses besoins et gérer sa vie, ou encore qu’il n’y a
pas de juste motif à l’appui de la demande, il pourra refuser l’émancipation
du mineur.

La famille pourra alors faire appel dans les 15 jours de sa décision.

§ 3. Les effets de l’émancipation

L’émancipation emporte un élargissement des droits du mineur (A) mais


des

limites demeurent (B).

A. L’élargissement des droits du mineur

Un mineur émancipé ne dépend plus de l’autorité de ses parents. En effet,


l’émancipation met automatiquement fin à l’autorité parentale exercée sur
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Chapitre 1 – La protection des mineurs

111

mineur. L’administration légale comme la tutelle cessent entraînant


reddition des comptes1 dans les trois mois. Toutefois, les parents demeurent
tenus à l’égard de l’enfant d’une une obligation d’entretien et d’éducation,
et ce, jusqu’à sa majorité (article 371-2 c.civ.).

Il devient capable comme une personne majeure de tous les actes de la vie
civile (article 413-6 alinéa 1 c.civ.). Un mineur émancipé peut ainsi passer
tous les contrats, exercer des actions en justice. Il peut à ce titre ouvrir seul
un compte bancaire, contracter un crédit, signer un contrat de travail,
percevoir ses propres revenus…

Il devient aussi seul responsable des dettes contractées. Par ailleurs, en cas
de délit, ses parents ne sont plus responsables des dommages qu’il pourrait
causer à autrui.
B. Les limites aux droits du mineur

Par l’émancipation, la capacité du mineur est élargie pour autant il n’est pas
traité à l’égal du majeur. Des limites sont ainsi prévues quant à ses droits.
En effet, le mineur émancipé ne peut pas voter ou passer son permis de
conduire. Il n’a pas non plus la possibilité de se marier sans le
consentement de ses parents. De même qu’il ne peut pas devenir
commerçant à moins d’obtenir une autorisation du juge en ce sens.

1. La reddition est une procédure consistant pour celui qui a géré les intérêts
d’autrui à présenter l’état détaillé de ce qu’il a reçu et dépensé dans le but
d’arriver à la fixation du reliquat.

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TITRE 3 – La protection de la personne

CAS PRATIQUE

La protection des mineurs

Sue Heck et Darel Brun se sont rencontrés grâce au grand frère de Sue,
Axel, le jour de son anniversaire. Il fêtait alors ses 18 ans. Il se trouve, en
effet, que Darel est son meil eur ami.

Les relations de la famil e avec le couple ne sont pas toujours faciles. Entre
autres choses, le père de Sue a du mal à accepter que Darel soit déjà majeur
et à l’université alors que Sue vient à peine d’avoir 16 ans. Il est aussi assez
réticent à l’idée que Sue parte dès l’année prochaine poursuivre ses études
en Suisse pour faire une école de chocolatier et suivre Darel qui va entrer
dans une école pour devenir électricien. Brick, le petit frère de Sue, qui
vient d’avoir 10 ans, est lui aussi très triste à l’idée de voir partir sa sœur si
loin. Heureusement, son chagrin est vite oublié lorsqu’il apprend qu’une
vieille tante (on n’est d’ail eurs pas bien certain qu’el e soit vraiment de la
famil e) a décidé de lui léguer un appartement de 62 m2 à Limoges. Tante
Zelda a toujours adoré Brick et partageait sa passion pour la lecture ce qui
les a beaucoup rapprochés. En revanche, el e déteste les parents de Brick et
a bien spécifié dans son testament que l’appartement ne pourrait pas être
géré par ces derniers mais uniquement par Axel. Les parents de Brick ne
comprennent pas vraiment ce que cela veut dire mais comme ils ont besoin
d’argent tout de suite pour réparer la toiture de leur maison, ils veulent
vendre l’appartement. Ils pensent également al er voir leur banquier pour
contracter un emprunt au nom de Brick.

Depuis quelques jours, Sue se demande s’il sera facile de vivre en Suisse
avec Darel tout en étant sous l’autorité de ses parents. El e songe à
demander son émancipation. De son côté, sa mère n’y voit pas trop
d’inconvénients, el e aura un enfant en moins à sa charge et donc moins de
frais pour la nourrir ou lui payer ses études. Darel est parfaitement d’accord
avec le projet de Sue d’autant qu’il songe à la demander en mariage avant
de partir pour la Suisse et qu’il sait que Monsieur et Madame Heck ne
seront jamais d’accord. Il se dit qu’une fois émancipée, cela ne posera plus
de problème vu qu’el e sera majeure. Il a même déjà songé à la fête à l’issue
de la cérémonie qu’il voudrait faire dans un casino au bord de la plage en
Normandie.

QUID JURIS ?

Correction

Pour plus de clarté, il est possible de distinguer ici deux situations : cel e de
Sue, d’une part et cel e de Brick, d’autre part.

Les problèmes de SUE

Une jeune fil e de 16 ans souhaite demander son émancipation pour faciliter
son départ à l’étranger où elle souhaite faire ses études. Sa mère ne s’y
oppose pas d’autant qu’elle pense ainsi échapper aux obligations d’entretien
et d’éducation de son enfant. Son père, en revanche, n’est pas d’accord avec
ce projet. Paral èlement, son ami, majeur, souhaite la demander en mariage.
Il veut le faire au plus vite, et pense que l’émancipation de cel e-ci lui
permettra de passer outre le refus des parents de la jeune fil e. Il souhaite
également à l’issue du mariage faire la fête dans un casino.

1er problème de droit

Un mineur de 16 ans peut-il lui-même engager une procédure


d’émancipation ?

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Chapitre 1 – La protection des mineurs

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Article 413-2 du Code civil

« Le mineur, même non marié, pourra être émancipé lorsqu’il aura atteint
l’âge de seize ans révolus.

Après audition du mineur, cette émancipation sera prononcée, s’il y a de


justes motifs, par le juge des tutel es, à la demande des père et mère ou de
l’un d’eux.

Lorsque la demande sera présentée par un seul des parents, le juge décidera,
après avoir entendu l’autre, à moins que ce dernier soit dans l’impossibilité
de manifester sa volonté. »

Aux termes de l’article 413-2 du Code civil, seuls les parents ou au moins
l’un d’eux peut faire la demande d’émancipation dès lors que leur enfant est
âgé d’au moins 16 ans. Or, en l’espèce, Sue souhaite faire elle-même cette
demande. Une tel e démarche personnelle ne sera pas possible. En
revanche, puisque sa mère est d’accord, rien n’empêche cel e-ci d’engager
la procédure d’émancipation peu importe l’accord de son époux.

2e problème de droit
Le fait pour un mineur de partir faire ses études à l’étranger peut-il
constituer un motif suffisant pour demander son émancipation ?

Article 413-2 du Code civil

« Le mineur, même non marié, pourra être émancipé lorsqu’il aura atteint
l’âge de seize ans révolus.

Après audition du mineur, cette émancipation sera prononcée, s’il y a de


justes motifs, par le juge des tutel es, à la demande des père et mère ou de
l’un d’eux.

Lorsque la demande sera présentée par un seul des parents, le juge décidera,
après avoir entendu l’autre, à moins que ce dernier soit dans l’impossibilité
de manifester sa volonté. »

Fort-de-France, 26 nov. 2019, RG no 10/539 : Il est possible d’envisager


une émancipation pour faciliter la poursuite des études de l’enfant à
l’étranger. Dans cette décision il s’agissait de la possibilité de suivre une
formation à l’étranger dans un pays qui exigerait que le mineur ait un
représentant légal sur place.

L’article 413-2 rend possible l’émancipation du mineur à la condition que le


juge des tutel es constate que de justes motifs lui sont présentés. Cette
appréciation est souveraine et sa décision pourra faire l’objet d’une
contestation. La jurisprudence accepte parfois comme motif la poursuite
d’études à l’étranger. En l’espèce, la raison de la demande d’émancipation
est le départ de Sue à l’étranger pour poursuivre ses études. On peut
considérer qu’il est difficile de partir à l’étranger pour ses études sans avoir
d’autonomie. Le juge des tutel es pourrait ainsi accepter l’émancipation. En
revanche, le fait que la mère veuil e se décharger de ses obligations légales
n’est pas un juste motif pour l’émancipation de sa fil e.

3e problème de droit

L’émancipation du mineur retire-t-elle toutes obligations des parents


envers leur enfant ?
Article 413-7 du Code civil

« Le mineur émancipé cesse d’être sous l’autorité de ses père et mère.

Ceux-ci ne sont pas responsables de plein droit, en leur seule qualité de père
ou de mère, du dommage qu’il pourra causer à autrui postérieurement à son
émancipation. »

Article 371-2 du Code civil

« Chacun des parents contribue à l’entretien et à l’éducation des enfants à


proportion de ses ressources, de cel es de l’autre parent, ainsi que des
besoins de l’enfant.

Cette obligation ne cesse pas de plein droit lorsque l’enfant est majeur. »

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TITRE 3 – La protection de la personne

Aux termes de ces deux dispositions, si le mineur émancipé cesse d’être


sous l’autorité de ses père et mère, le devoir d’entretien imposé aux parents
demeure malgré l’émancipation de l’enfant. Le cas échéant, une pension
alimentaire est calculée en fonction de ses besoins et des ressources de ses
père et mère. Or, en l’espèce, la mère de Sue pense se décharger de toutes
ses obligations avec l’émancipation de sa fil e. Il s’agit ici d’une erreur de
sa part, si sa fil e deviendra responsable de ses dettes et des délits qu’el e
pourrait commettre, Madame Heck demeurera tenu d’une obligation
d’entretien et d’éducation.

4e problème de droit

Un mineur émancipé peut-il se marier sans l’accord de ses parents ?

Article 148 du Code civil


« Les mineurs ne peuvent contracter mariage sans le consentement de leurs
père et mère ; en cas de dissentiment entre le père et la mère, ce partage
emporte consentement. »

Article 413-6 du Code civil

« Le mineur émancipé est capable, comme un majeur, de tous les actes de la


vie civile.

Il doit néanmoins, pour se marier ou se donner en adoption, observer les


mêmes règles que s’il n’était point émancipé. »

Malgré l’émancipation, le consentement d’au moins l’un des parents pour le


mariage du mineur émancipé reste nécessaire. Or, en l’espèce même si Sue
parvient à être émancipée, el e devra avoir l’accord d’au moins l’un de ses
deux parents pour se marier. À défaut aucun mariage ne sera possible.

5e problème de droit

Un mineur émancipé ou non peut-il entrer dans un casino ?

Article 23 alinéa 1er de l’arrêté du 14 mai 2007 relatif à la réglementation


des jeux dans les casinos

« La direction du casino doit refuser l’entrée des sal es aux mineurs, même
émancipés, et aux personnes qui font l’objet d’une interdiction par le
ministre de l’intérieur. »

Aux termes de l’alinéa 1er de l’article 23 de l’arrêté du 14 mai 2007, le


mineur même émancipé ne peut entrer dans un casino. Or, en l’espèce, Sue
souhaite fêter son mariage dans un casino. Peu importe qu’el e soit
émancipée ou non, el e ne pourra entrer dans un casino en raison de sa
minorité.

Les problèmes de BRICK

Un mineur de dix ans, sous l’administration légale de ses parents, a reçu en


legs un appartement. La personne qui lui a légué a spécifié que celui-ci
serait géré exclusivement pas son frère majeur et non par leurs parents. Ces
derniers souhaitent pour autant vendre le bien objet du legs et veulent
également contracter un emprunt au nom de leur enfant mineur.

1er problème de droit

Un bien peut-il être légué à un mineur sous réserve que celui-ci soit
géré non pas par les administrateurs légaux mais par un tiers ?

Article 384 du Code civil

« Ne sont pas soumis à l’administration légale les biens donnés ou légués au


mineur sous la condition qu’ils soient administrés par un tiers.

Le tiers administrateur a les pouvoirs qui lui sont conférés par la donation,
le testament ou, à défaut, ceux d’un administrateur légal.

Lorsque le tiers administrateur refuse cette fonction ou se trouve dans une


des situations prévues aux articles 395 et 396, le juge des tutel es désigne un
administrateur ad hoc pour le remplacer. »

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Chapitre 1 – La protection des mineurs

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Aux termes de l’article 384 du Code civil, il est possible pour une personne
de léguer un bien à un mineur sous réserve qu’il soit administré par un tiers.
Or, en l’espèce, La tante de Brick pouvait choisir de léguer le bien à ce
dernier sous réserve qu’Axel en assure la gestion.

2e problème de droit

Les administrateurs légaux d’un enfant peuvent-il vendre un bien lui


appartenant alors que sa gestion a été confiée à un tiers ?

Article 384 du Code civil


« Ne sont pas soumis à l’administration légale les biens donnés ou légués au
mineur sous la condition qu’ils soient administrés par un tiers. »

L’article 384 alinéa 1er du Code civil prévoit que le bien légué au mineur
sous la condition qu’il soit administré par un tiers n’est pas soumis à
l’administration légale. Or, en l’espèce, l’appartement a été légué à Brick
sous réserve de son administration par Axel, dès lors les parents de Brick
n’ont pas à gérer ce bien et ne peuvent chercher à le vendre.

3e problème de droit

Les administrateurs légaux d’un enfant peuvent-ils contracter un


emprunt au nom de celui-ci ?

Article 387-1 du Code civil

« L’administrateur légal ne peut, sans l’autorisation préalable du juge des


tutel es : 3° Contracter un emprunt au nom du mineur ; »

L’article 387-1 du Code civil interdit aux administrateurs légaux de


contracter un emprunt au nom du mineur sans l’accord du juge des tutel es.
Or, en l’espèce, les Heck souhaitent contracter un emprunt au nom de Brick.
Brick étant mineur, les parents, administrateurs légaux devront obtenir
l’accord du juge des tutel es pour un tel acte.

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Chapitre 2

La protection des majeurs

Avant de s’intéresser concrètement à la protection des majeurs, il convient


d’exposer les grands principes qui dirigent cette protection et qui permettent
d’assurer que la dignité de la personne soit préservée (Section préliminaire).
Ces principes guideront alors les mesures judiciaires (Section 1) et non
judiciaires (section 2) de protection.

Section préliminaire

Les principes directeurs

La notion d’intérêt de la personne protégée agit comme un standard pour


guider les décisions relatives à la mise en place comme à l’organisation de
la protection (choix du tuteur, de la mesure…). Un certain nombre de
principes sont alors là pour assurer que la mesure de protection est prise en
conformité avec le respect de cet intérêt. Aux principes directeurs de
l’article 428 du Code civil (§1) viennent s’ajouter d’autres principes qui eux
aussi guident l’esprit de ces mesures (§2)

§ 1. Les principes directeurs de l’article 428 du Code civil

L’article 428 du Code civil énonce une série de principes dirigeant les
mesures de protection judiciaire : la nécessité (A), la subsidiarité (B), la
proportionnalité et l’individualisation (C).

A. Le principe de nécessité

Ce principe gouverne déjà l’ouverture de la mesure. Ainsi, pour qu’une


mesure de protection judiciaire soit mise en place, il faut en constater la
nécessité.

Autrement dit, la mesure prononcée par le juge doit demeurer


exceptionnelle et 9782340-033689_001-152.indd 117

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TITRE 3 – La protection de la personne

ne s’imposer qu’en ultime recours. Ensuite, le principe concerne la durée de


cette mesure. En effet, celle-ci ne doit subsister qu’autant que l’état du
majeur l’exige, d’ailleurs les mesures sont à durée limitée et ne sauraient
être reconduites de droit.

Enfin, ce principe connaît une expression dans l’impératif du recours au


médecin.

L’ouverture comme le maintien de la mesure sont guidés par un constat


médical qui atteste de ce que l’altération des facultés mentales ou
corporelles empêchant l’expression de la volonté les justifie. Toutes autres
considérations, sociales, financières, ou encore l’appartenance du majeur à
une secte ne sauraient permettre la mise en place d’une mesure de
protection judiciaire (Cass. 1re civ., 2 octobre 2001, n° 99-15577, Bul . civ. I
n° 238).

B. Le principe de subsidiarité

Le principe de subsidiarité signifie déjà qu’entre les mesures de protection


judiciaires il existe une graduation qui conduira le juge à se tourner d’abord
vers la mesure la moins grave pour aller ensuite vers les autres mesures
comme la tutelle. C’est ce qui ressort de l’article 440 du Code civil. De
surcroît, ce principe fait état de ce que les mesures de protection judiciaires
sont elles-mêmes subsidiaires par rapport aux autres mesures de protection
qui existent. Ainsi, l’article 428 du Code civil prévoit qu’il ne sera pas mis
en place de mesure de protection judiciaire lorsque l’application des règles
du droit commun de la représentation ou de celles relatives aux droits et
devoirs respectifs des époux et des règles des régimes matrimoniaux
permettent de pourvoir suffisamment aux intérêts de la personne protégée.
Dans l’hypothèse où la personne vulnérable est mariée, l’article 212 du
Code civil en assure la protection par le devoir d’assistance. Quant à la
gestion patrimoniale, des biens propres, communs et indivis, elle résulte des
articles 217 et suivants, 1426 et 1429 du Code civil. Pour autant, rien
n’interdit en pratique au juge des tutelles de décider de l’ouverture d’une
mesure de protection judiciaire pour une personne mariée, s’il estime que
c’est le moyen le plus adéquat de satisfaire ses intérêts. En la matière, les
juges sont très attentifs au respect des intérêts des époux et de la personne
vulnérable. Dans une affaire jugée par la 1re chambre civile de la Cour de
cassation le 1er février 2012, un époux était tombé dans un coma végétatif
sans espoir d’amélioration, son épouse avait été autorisée par un jugement à
se substituer à son époux dans l’exercice des droits résultant du régime
matrimonial, mais l’enfant souhaitait, pour sa part, l’ouverture d’une
mesure de tutelle. Or, les faits reprochés à l’épouse n’établissaient pas un
risque de dilapidation des biens, de sorte que la mesure de protection
n’avait pas à être ouverte (Cass. civ. 1re, 1er février 2012, n° 11-11346).

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Chapitre 2 – La protection des majeurs

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C. Les principes de proportionnalité et d’individualisation

Les individus amenés un jour à bénéficier d’une mesure de protection


judiciaire sont tous différents que ce soit quant à leur état de santé et à leur
degré d’incapacité, ou quant au contexte familial dans lequel ils se trouvent
ou encore quant au lieu où ils vivent… Tous ses éléments et bien d’autres
encore font de chaque situation présentée au juge une situation particulière,
inédite, qu’il convient de traiter comme telle. Les principes de
proportionnalité et d’individualisation accompagnent alors la mesure tout
au long de son déroulement. Lors de sa mise en place, il s’agira notamment
pour le juge d’en apprécier la durée. À ce titre, depuis la loi n° 2015-177

du 16 février 2015, la durée initiale de la mesure reste limitée à cinq années


toutefois, en matière de tutelle, elle peut être portée à dix ans au maximum
lorsque plusieurs conditions sont réunies : une décision spécialement
motivée du juge ; un avis conforme du médecin ; une altération des facultés
personnelles de l’intéressé n’apparaissant manifestement pas susceptible de
connaître une amélioration selon les données acquises de la science (article
441 alinéa 2 du Code civil). La mesure peut également faire l’objet d’un
renouvellement. Pour la tutelle comme pour la curatelle une durée
maximale de 20 ans est prévue (article 442 alinéa 2 du Code civil). Puis,
lorsque la mesure est en place, ces principes conduiront le juge à en
réévaluer la pertinence et l’efficacité. Il pourra alors s’agir de modifier la
mesure dans le sens d’une aggravation, en passant par exemple d’une
curatelle simple à une curatelle renforcée ou d’une amélioration toujours eu
égard à l’évolution de l’état de la personne protégée.

§ 2. Les autres principes de l’article 415 du Code civil

L’article 415 du Code civil dispose : « les personnes majeures reçoivent la


protection de leur personne et de leurs biens que leur état ou leur situation
rend nécessaire selon les modalités prévues au présent titre. Cette protection
est instaurée et assurée dans le respect des libertés individuelles, des droits
fondamentaux et de la dignité de la personne.

Elle a pour finalité l’intérêt de la personne protégée. Elle favorise, dans la


mesure du possible, l’autonomie de celle-ci.

Elle est un devoir des familles et de la collectivité publique. »

Cet article impose donc le respect des droits fondamentaux, des libertés
individuelles et de la dignité de la personne (A) et pose un principe de
solidarité familiale (B).

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TITRE 3 – La protection de la personne

A. Le respect des droits fondamentaux, des libertés individuel es

et de la dignité de la personne

Il va sans dire que les mesures de protection mise en place doivent respecter
les droits fondamentaux, les libertés individuelles et la dignité de la
personne. À

ce titre, la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) rappelle que


toute mesure dont l’objet est de diminuer la capacité juridique d’une
personne, constitue une atteinte au droit au respect de la vie privée tel que
garanti par l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme.
Dès lors, les mesures de protection doivent respecter le principe de
proportionnalité du point de vue de sa légalité, de sa légitimité et de sa
nécessité (CEDH 22 novembre 2012, Sykorac/République Tchèque, req. n°
23419/07, CEDH 22 janvier 2013, Lashin c/Russie, req. n° 33117/02).

La procédure mise en place doit alors garantir ces droits fondamentaux. Le


respect de cette exigence passe notamment par le fait que pour qu’une
mesure de protection soit ouverte, la personne à protéger doit être entendue
ou appelée par le juge. En outre, l’exigence d’une constatation médicale de
la perte d’autonomie est aussi un des éléments garantissant le respect des
droits de la personne. À ce titre la Cour européenne des droits de l’homme a
condamné la Croatie pour violation de l’article 8, en raison des lacunes dans
la procédure engagée en vue de priver une majeure de sa capacité juridique
dans la mesure où le rapport psychiatrique, à l’origine de cette procédure,
avait été réalisé sans que le psychiatre n’ait rencontré l’intéressée (CEDH
25 avril 2013, M.S. c/Croatie, req. n° 363337/10).

B. La solidarité familiale

Par principe, les mesures sont prises en tenant compte de l’environnement


familial de la personne à protéger. La protection du majeur est d’abord un
devoir des familles (article 415 alinéa 4 du Code civil) avant d’être celui de
la collectivité.

La famille est ainsi au cœur de la mesure. À ce titre, la famille peut déjà


demander l’ouverture de la mesure de protection (article 430 du Code civil).
D’ailleurs, le législateur a permis une évolution de la matière en
comprenant largement la famille pour y inclure toutes les formes d’union,
mariage, pacs et concubinage.

La famille s’entend alors du compagnon du majeur quels que soient les


liens avec lui, des parents et des alliés.

La famille peut ensuite être chargée de la mesure. L’article 449 du Code


civil institue une préférence familiale légale au bénéfice des membres de la
famille pour assurer le rôle de représentant ou d’assistant du majeur. Pour
autant, le juge tient compte également des pressions familiales ou des
difficultés qui existent au sein de la famille pour s’assurer de confier la
mesure de protection à la personne la plus à même de préserver les intérêts
du majeur protégé.

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Chapitre 2 – La protection des majeurs

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Pour autant, la famille n’est pas « toute puissante », la mesure peut aussi
être confiée à un mandataire judiciaire à la protection des majeurs (article L
471-1 et s.

du Code de l’action sociale et des familles). Ces derniers suppléeront la


famille en cas de carence. Contrairement à elle, leur intervention est
effectuée à titre onéreux (article L. 472-3 CASF) et le coût en est prélevé
sur le patrimoine du majeur protégé (article 419 alinéa 2 du Code civil).
Néanmoins si d’aventure le majeur ne dispose pas de ressources suffisantes
pour assumer le poids de cette protection, l’État pourra y contribuer (article
419 alinéa 3 du Code civil et L.361-1 s. CASF).

Section 1

La protection judiciaire du majeur

La protection judiciaire du majeur peut prendre trois formes d’abord celle


de la sauvegarde de justice (§1) ensuite celle de la curatelle (§2) et enfin
celle de la tutelle (§3).

§ 1. La sauvegarde de justice

La sauvegarde de justice est assez simple à mettre en œuvre, en effet, il ne


s’agit pas là, en principe, d’altérer la capacité de celui qui y est soumis mais
uniquement de lui assurer un minimum de protection dans l’attente, le cas
échéant, du début ou de la fin d’un authentique régime d’assistance ou de
représentation.
Ces effets limités (B) expliquent que les conditions de la sauvegarde soient
assez simples (A), cette mesure n’est après tout que temporaire (C).

A. Les conditions de la sauvegarde de justice

Nous nous intéresserons d’abord aux bénéficiaires de la protection (1) et


ensuite à la mise en place de la protection (2).

1. Les bénéficiaires de la protection

Peuvent être placés sous sauvegarde de justice les personnes majeures ou


mineurs émancipés qui sont dans l’impossibilité de pourvoir seuls à leurs
intérêts en raison d’une altération de leurs facultés mentales ou corporel es
de nature à empêcher l’expression de leur volonté (art. 433 s. c. civ).

En principe, cette mesure doit être exclue en présence de personnes dont les
facultés seraient profondément altérées.

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TITRE 3 – La protection de la personne

Il s’agit là d’une mesure temporaire qui permet de faire face à une altération
passagère des facultés de la personne liée notamment à une maladie dont la
durée est prévisible ou encore de ménager une période de transition avant le
début ou la fin d’une mesure de protection plus importante.

2. La mise en place du régime de protection

Deux modes de placement sont prévues par la loi, un placement par


déclaration médicale (a) et un placement sur décision du juge des tutel es
(b).

a. La déclaration médicale
Cette déclaration est en principe facultative. En effet, le médecin qui
constate que la personne qu’il soigne a besoin d’être protégée dans les actes
de la vie civile en raison d’une altération de ses facultés peut en faire la
déclaration au procureur de la République.

Cette déclaration entraînera le placement de la personne sous le régime de


la sauvegarde de justice à condition qu’elle soit confortée par un avis
conforme d’un psychiatre (Un double avis est ici nécessaire, quand bien
même le 1er médecin serait aussi psychiatre).

Par exception, la déclaration médicale devient obligatoire lorsque le patient


dont les facultés sont altérées au point de nécessité cette mesure, est soigné
dans un des établissements psychiatriques mentionnés aux articles L. 3211-
6 du Code de la santé publique.

Dans cette situation le médecin qui constate l’altération des facultés du


malade en informe le procureur de la République. Le malade est alors placé
sous sauvegarde de justice sans qu’il soit requis l’avis conforme d’un
psychiatre.

b. La décision du juge des tutelles

Il est possible pour le juge des tutel es de décider au moment de l’ouverture


d’une procédure de tutel e ou de curatel e de mettre en place à titre
provisoire (pour la durée de l’instance), une mesure de sauvegarde de
justice.

Il se peut aussi que la demande de placement en sauvegarde de justice soit


présentée au juge des tutelles par :

– la personne qu’il y a lieu de protéger ;

– son conjoint, son partenaire (PACS) ou son concubin (à condition qu’il y


ait toujours une vie commune) ;

– un parent ou un allié ;
– une personne entretenant avec celui qu’il conviendrait de protéger des
liens étroits et stables ;

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Chapitre 2 – La protection des majeurs

123

– la personne qui exerce déjà à l’égard de l’intéressé une mesure de


protection juridique (mandat de protection future1) ;

– le procureur de la République agissant d’office ou à la demande d’un


tiers.

La demande doit à peine d’irrecevabilité être accompagnée d’un certificat


médical circonstancié établi par un médecin choisi sur une liste dressée par
le procureur de la République. Ce certificat doit être produit uniquement par
un médecin inscrit sur une liste établie par le procureur de la République.

Ce médecin a la possibilité de demander l’avis du médecin traitant de la


personne.

Le certificat circonstancié décrit l’altération des facultés du majeur et


l’évolution prévisible.

Il précise les conséquences de cette altération sur la nécessité d’être assisté


ou représenté, et indique si la personne est en état d’être auditionnée.

Le juge auditionne le majeur à protéger, qui peut se faire accompagner d’un


avocat, ou, sur accord du juge, de toute autre personne de son choix.
L’audition n’est pas publique. Le juge peut décider, après avis du médecin
ayant établi le certificat médical, de ne pas entendre la personne si
l’audition peut nuire à sa santé ou si la personne ne peut exprimer sa
volonté. Le juge doit motiver cette décision.
La décision est transmise au Procureur de la République qui en assure la
publicité (mention sur un répertoire spécifique et avis adressé au procureur
du lieu de la résidence habituelle de l’intéressé). En cas de sauvegarde de
justice sur déclaration médicale au procureur de la République, la personne
protégée peut faire un recours amiable pour obtenir la radiation de cette
sauvegarde. Ce recours doit être adressé au procureur de la République.

B. Les effets de la sauvegarde de justice

1. Les mesures de protection quant aux actes accomplis

par la personne protégée

Le majeur protégé conserve la possibilité d’effectuer seul tous les actes


juridiques, mais ces actes peuvent être remis en cause par l’annulation (a),
la rescision pour lésion (b) ou la réduction (c).

a. L’annulation des actes

L’article 414-1 du Code civil prévoit la possibilité d’annuler les actes passés
sous sauvegarde de justice par le majeur protégé, à la condition d’établir
l’insanité d’esprit au moment de l’émission de la volonté.

1. Voir section suivante

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TITRE 3 – La protection de la personne

La preuve de cet élément est grandement facilitée par l’existence de la


mesure de sauvegarde.

b. La rescision pour lésion1


La rescision pour lésion de tout acte à titre onéreux peut être sollicitée,
quelle qu’en ait été la nature (vente, louage.) dès lors qu’il a été accompli
postérieurement à l’ouverture du régime de protection. Il n’est pas ici
nécessaire d’établir l’altération des facultés mentales au moment de l’acte,
seul importe l’existence, au détriment de la personne protégée, d’un
déséquilibre entre les prestations réciproques des parties. (art. 435 al 2 du
Code civil). Si la rescision est prononcée, il y a restitution des prestations
réciproques fournies, l’opération visée étant rétroactivement anéantie.

c. La réduction pour excès

L’action en réduction suppose une dépense disproportionnée aux ressources


du majeur protégé. Peu importe ici l’équilibre des prestations réciproques.
Le succès de la demande entraîne la réduction de l’opération à des
proportions raisonnables eu égard à la situation pécuniaire de l’intéressé.

2. Les mesures de protections quant à la gestion des biens

de la personne protégée

Il est possible qu’un mandataire soit désigné pour assurer la gestion des
biens de la personne protégée. Cette dernière est en droit de donner mandat
à un tiers même après avoir été placée sous sauvegarde en vue
d’administrer ses biens (art.

436 du Code civil). Le mandataire se verra alors confier la tâche


d’accomplir tous les actes d’administration (les actes de disposition
nécessitant un mandat spécial).

Il est aussi envisageable qu’une personne de la famille décide d’exercer


cette gestion sans en avoir reçu mandat. Sont alors applicables les règles de
la gestion d’affaires (art. 436 al 2 du Code civil).

De surcroît, le juge des tutelles peut désigner un mandataire par un mandat


spécial qui pourra accomplir des actes d’administration et de disposition. Le
juge prendra cette mesure en considération d’un impératif de nécessité et en
vue d’opérations précisément déterminées.
C. La fin de la mesure de sauvegarde

Par principe, la mesure de sauvegarde ne peut excéder un an, le juge des


tutelles pouvant exceptionnellement décider d’office ou à la requête d’une
des personnes admises à sol iciter cette mesure, de la renouveler pour une
durée maximale d’un an.

1. La rescision pour lésion désigne l’annulation par décision de justice d’un


acte lésionnaire 9782340-033689_001-152.indd 124

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Chapitre 2 – La protection des majeurs

125

La mesure cesse lorsqu’est ouverte une mesure de curatelle ou de tutelle.

Ensuite, une mesure de sauvegarde ouverte sur déclaration médicale peut


toujours prendre fin par déclaration médicale, pouvant venir d’un autre
médecin que celui qui a fait la déclaration initiale, adressée au procureur de
la République.

Cette déclaration atteste de ce que le besoin a cessé.

En outre, le procureur de la République peut lui aussi mettre fin à la mesure


en procédant à la radiation de la déclaration médicale qui avait permis
l’ouverture de la mesure.

Enfin, le juge des tutelles qui a décidé cette mesure peut y mettre fin.

§ 2. La curatel e

Comme pour la mesure précédente, il nous faudra étudier les conditions


(A), les effets de la curatelle (B) et son extinction (C).

A. Les conditions de la curatel e


Ces conditions portent sur les personnes pouvant bénéficier de la mesure et
sur sa mise en place.

1. Les bénéficiaires de la protection

Le placement en curatelle peut concerner un majeur ou un mineur


émancipé.

La curatelle a été conçue pour s’appliquer dans les hypothèses où


l’altération des facultés personnelles est trop grave pour qu’une simple
sauvegarde de justice soit suffisante, tout en n’atteignant pas un degré tel
que la tutelle s’impose. Ainsi, la curatelle suppose que la personne ait
besoin d’être assistée ou contrôlée d’une manière continue dans les actes
courants de la vie civile.

En effet, elle souffre d’une altération médicalement constatée de ses


facultés mentales ou corporelles de nature à empêcher l’expression de sa
volonté. En revanche, l’altération ne l’empêche pas d’agir elle-même. En
pratique, la frontière est difficile à faire entre les cas où la curatelle suffit, la
personne pouvant agir seul sous réserve d’assistance et de contrôle et les
cas où la tutelle est requise.

Il appartient ici au juge de choisir, avec l’avis du médecin (désigné sur une
liste établie par le Procureur de la République), la mesure la plus adaptée.

Outre l’altération des facultés mentales ou corporelles empêchant


l’expression de la volonté médicalement constatée, il appartient donc au
juge d’établir le besoin d’assistance (V., par ex., Civ. 1re, 24 oct. 1995, n°
93-21.484, Bul . civ., n° 371, la Cour de cassation précise que la mise en
curatelle prévue par ces textes exige la constatation par les juges du fond, «
d’une part, de l’altération médicalement établie des 9782340-033689_001-
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TITRE 3 – La protection de la personne


facultés mentales et, d’autre part, de la nécessité pour celui-ci d’être
conseillé ou contrôlé dans la vie civile »). Il doit, en outre, conformément
au principe de subsidiarité, établir que la sauvegarde de justice ne permet
pas d’assurer une protection suffisante (C. civ., art. 440, al. 2).

2. La mise en place du régime de protection

Le régime de protection est ouvert par le juge (a) qui décide du degré de
curatelle à mettre en place (b) et désigne le curateur (c).

a. L’ouverture de la curatelle

La décision d’ouvrir une curatelle appartient au juge des tutelles. Ce dernier


peut être saisi par l’intéressé lui-même

– son conjoint, son partenaire (PACS) ou son concubin (à condition qu’il y


ait toujours une vie commune) ;

– un parent ou un allié ;

– une personne entretenant avec celui qu’il conviendrait de protéger des


liens étroits et stables ;

– la personne qui exerce déjà à l’égard de l’intéressé une mesure de


protection juridique (mandat de protection future) ;

– le procureur de la République agissant d’office ou à la demande d’un


tiers.

La demande doit, là aussi, à peine d’irrecevabilité être accompagnée d’un


certificat médical circonstancié1 établi par un médecin choisi sur une liste
dressée par le procureur de la République.

Le juge doit alors recevoir en audition la personne qui doit être placée sous
curatelle, toutefois si l’intéressé est hors d’état de manifester sa volonté, le
juge peut se passer de cette audition2.

Des recours sont alors possibles contre la décision du juge d’ouvrir la


curatelle.
b. Les degrés de curatelle

Il existe différents degrés de curatel e.

On trouve la curatelle simple. La personne accomplit seule les actes de


gestion courante (dits actes d’administration ou actes conservatoires),
comme la gestion du compte bancaire ou la souscription d’une assurance.
En revanche, elle doit être assistée de son curateur pour des actes plus
importants (dits actes de disposition).

Par exemple, le curateur doit consentir à un emprunt.

1. Voir le développement consacré au certificat médical circonstancié dans


le paragraphe relatif à la sauvegarde de justice

2. Voir le développement consacré à l’audition dans le paragraphe relatif à


la sauvegarde de justice 9782340-033689_001-152.indd 126

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Chapitre 2 – La protection des majeurs

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On trouve également la curatelle renforcée. La curatelle renforcée se


différencie de la curatelle simple par le contrôle du curateur sur les revenus
et les dépenses du curatélaire (C. civ., art. 472). Le majeur a toujours un
besoin d’assistance ou de contrôle, mais ce besoin doit être ressenti pour
certains actes importants de la vie civile précisément identifiés.

Le curateur perçoit les ressources de la personne et règle ses dépenses sur


un compte ouvert au nom de celle-ci. Il est dans ce cas essentiel que le juge
mentionne le besoin d’assistance pour la perception des revenus et
l’engagement des dépenses afin de justifier la mise en place d’une telle
mesure

c. La désignation du curateur
Le juge nomme un curateur. Il a la possibilité de nommer plusieurs
curateurs, notamment pour diviser la mesure de protection entre la
protection de la personne et la gestion patrimoniale.

Le curateur est choisi en priorité parmi les proches de la personne à


protéger.

En premier lieu son conjoint, partenaire ou concubin, sauf empêchements


prévus par la loi (art 395 c. civ.), ou impossibilité constatée par le juge. En
second lieu, un parent, un allié ou une personne résidant avec la personne à
protéger.

Si c’est impossible, la curatelle est confiée à un professionnel appelé «


mandataire judiciaire à la protection des majeurs », inscrit sur une liste
dressée et tenue à jour par le préfet.

Le juge peut aussi se voir imposer la personne du curateur par la personne


bénéficiaire de la mesure, elle-même. En effet, si celle-ci avait, par avance,
pour le cas où elle serait mise en curatelle, désigné une personne en vue
d’exercer la fonction de curateur alors le juge est tenu de la nommer comme
curateur. À moins que cette personne ne refuse cette charge ou qu’il ne soit
pas dans l’intérêt de la personne à protéger qu’elle l’exerce,

En plus du curateur, Le juge peut désigner si nécessaire un subrogé curateur


pour surveiller les actes passés par le curateur, ou le remplacer en cas de
conflit d’intérêts. Lorsque le curateur est un membre de la famille, le juge
choisit, si possible, le subrogé curateur dans l’autre branche de celle-ci.

B. Les effets de la curatel e

Il importe d’avoir à l’esprit que la curatelle est bien un régime d’assistance


et non de représentation comme le rappelle l’article 469 du Code civil. Le
curateur ne peut se substituer à la personne en curatelle pour agir en son
nom. La curatelle offre ainsi une certaine autonomie au majeur, mais elle ne
doit pas aboutir à compromettre ses intérêts. Le curateur doit y veiller et
peut dès lors solliciter le 9782340-033689_001-152.indd 127

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TITRE 3 – La protection de la personne

juge pour accomplir seul un acte déterminé ou provoquer l’ouverture d’une


tutelle (C. civ., art. 469, al. 2).

Les effets de la curatelle dépendent évidemment du degré de curatelle, nous


ne traiterons ici que des principaux effets sur la personne (1) et sur ses biens
(2).

1. Protection de la personne

Une personne protégée par une curatelle prend seule les décisions relatives
à sa personne (exemples : se déplacer, changer d’emploi) dans la mesure où
son état le permet. Elle choisit notamment son lieu de vie. Le juge statue en
cas de difficulté.

Elle conserve le droit de vote. Elle accomplit seule certains actes dits «
strictement personnels » (comme la reconnaissance d’un enfant).

En revanche, elle doit obtenir l’autorisation du curateur, ou à défaut celle du


juge, pour se marier. Elle doit être assistée de son curateur pour conclure un
pacte civil de solidarité (PACS).

2. Protection des biens

En règle générale, la personne en curatelle peut accomplir seule les actes


d’administration (par exemple : effectuer des travaux d’entretiens dans son
logement).

Elle doit être assistée de son curateur pour accomplir les actes de
disposition (par exemple : vendre un appartement). Elle peut rédiger un
testament seul, et peut faire des donations avec l’assistance de son curateur.

Lorsque la curatelle est renforcée, le curateur perçoit les revenus de la


personne protégée, règle les dépenses de celle-ci auprès des tiers et lui
reverse l’excédent.
C. La fin de la curatel e

Le juge fixe la durée, qui ne peut excéder cinq ans.

Il peut décider de la renouveler pour une durée plus longue si l’altération


des facultés du majeur protégé apparaît irrémédiable, sur avis conforme du
médecin inscrit sur la liste établie par le procureur de la République.

La mesure peut prendre fin :

– à tout moment si le juge le décide qu’elle n’est plus nécessaire (par


jugement dit « de mainlevée »), à la demande du majeur ou de toute
personne habilitée à demander une mise sous curatelle, après avis médical
constatant que la protection n’est plus nécessaire ;

– à l’expiration de la durée fixée, en l’absence de renouvellement ;

– si une mesure de tutelle est prononcée en remplacement de la curatelle, au


décès de la personne protégée.

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Chapitre 2 – La protection des majeurs

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§ 3. La tutel e

Comme pour les deux autres mesures nous commencerons par voir les
condi-

tions de la tutel e (A), puis ses effets (B) pour finir son extinction (C).

A. Les conditions de la tutel e

Ces conditions portent sur les personnes pouvant bénéficier de la mesure et


sur sa mise en place.
1. Les bénéficiaires de la mesure

La tutel e est une mesure judiciaire destinée à protéger une personne


majeure et/

ou tout ou partie de son patrimoine si el e n’est plus en état de veil er sur


ses propres intérêts. Un tuteur la représente dans les actes de la vie civile.

Les personnes concernées sont des personnes majeures ou mineures


émancipées ayant besoin d’être représentées de manière continue dans les
actes de la vie civile du fait de l’altération de leurs facultés mentales, ou
lorsque leurs facultés corporelles sont altérées au point d’empêcher
l’expression de leur volonté, et pour qui toute autre mesure de protection
moins contraignante (curatelle, sauvegarde de justice) serait insuffisante

2. La mise en place de la mesure

Nous verrons ici la décision du juge d’ouvrir la mesure (a) ainsi que la
désignation du tuteur (b).

a. L’ouverture de la mesure

L’ouverture d’une mesure de tutelle ne peut être demandée au juge que par
certaines personnes. La personne à protéger elle-même, ou la personne avec
qui elle vit en couple ; un membre de sa famille ; des proches entretenant
des relations étroites et stables avec elle ; la personne qui exerce déjà à son
égard une mesure de protection juridique ; le procureur de la République,
qui formule cette demande soit de sa propre initiative, soit à la demande
d’un tiers (par exemple : médecin, directeur d’établissement de santé).

La demande doit comporter :

– le certificat médical circonstancié établissant l’altération des facultés de la


personne1 ;

– l’identité de la personne à protéger ;

– l’énoncé des faits qui appellent cette protection.


1. Voir développements sur le certificat médical circonstancié dans la
sauvegarde de justice 9782340-033689_001-152.indd 129

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130

TITRE 3 – La protection de la personne

Elle est adressée au juge des tutelles dont dépend le lieu de résidence du
majeur à protéger.

Le juge auditionne le majeur à protéger et examine la requête.

En cas d’ouverture ou de refus de mettre fin à une tutelle, la personne elle-


même ou toute personne habilitée à demander sa mise sous tutelle, peut
faire appel de la décision.

En cas de refus de mise en place de la tutelle, seule la personne qui a déposé


la demande de mise sous tutelle peut faire appel.

L’appel s’exerce dans les 15 jours suivant le jugement ou la date de sa


notification pour les personnes à qui il est notifié. L’appel est formé par
déclaration faite ou adressée par lettre recommandée avec demande
d’accusé de réception au greffe du tribunal.

b. La désignation du tuteur

À l’audience, le juge entend la personne à protéger (si cela est possible),


celle qui a fait la demande, et leurs éventuels avocats.

Le juge nomme un tuteur. Il a la possibilité de nommer plusieurs tuteurs,


notamment pour diviser la mesure de protection entre la protection de la
personne et la gestion patrimoniale.

Le tuteur est choisi en priorité parmi les proches de la personne à protéger.

On retrouve ici les règles précédemment exposées en matière de curatelle.


Si c’est impossible, le juge désigne un professionnel, appelé « mandataire
judiciaire à la protection des majeurs », inscrit sur une liste dressée et tenue
à jour par le préfet.

Le juge peut aussi désigner si nécessaire un subrogé tuteur pour surveiller


les actes passés par le tuteur, ou le remplacer en cas de conflit d’intérêts.
Les articles 512

et 514 du Code civil mettent désormais en place un système de contrôle des


comptes interne à la mesure de protection. Ces derniers sont vérifiés et
approuvés, chaque année et à la fin de la mission du protecteur, par le
subrogé tuteur. (loi 23 mars 2019).

Lorsque le tuteur est un membre de la famille, le juge choisit, si possible, le


subrogé tuteur dans l’autre branche de celle-ci. En l’absence d’un subrogé
tuteur, le juge peut aussi, pour certains actes, désigner un tuteur ad hoc,
notamment s’il y a conflit d’intérêts entre le tuteur et la personne protégée.

Le tuteur est tenu de rendre compte de l’exécution de son mandat à la


personne protégée et au juge. Néanmoins, la loi du 23 mars 2019 a multiplié
les dispenses de contrôle. Ainsi, le juge peut dispenser le tuteur de
soumettre le compte de gestion à approbation en considération de la
modicité des revenus ou du patrimoine de la personne protégée. Par ailleurs
lorsque la mesure est confiée à l’entourage, le juge peut aussi dispenser,
sous les mêmes conditions, le tuteur d’établir le compte de gestion (article
513 du Code civil) loi 23 mars 2019.

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Chapitre 2 – La protection des majeurs

131

Dans certains cas, peu fréquents, le juge peut nommer un conseil de famille,
qui désigne le tuteur, le subrogé tuteur et le cas échéant le tuteur ad hoc. Le
juge peut autoriser le conseil de famille à se réunir et délibérer hors de sa
présence lorsque ce dernier a désigné un mandataire judiciaire à la
protection des majeurs comme tuteur ou subrogé tuteur.

B. Les effets de la tutel e

La tutelle est une mesure de représentation et non plus d’assistance comme


la curatelle. Elle va donc avoir des conséquences plus importantes sur la
perte de l’autonomie de la personne protégée. Nous verrons ici quels sont
les principaux effets de la mesure tant sur la personne (1) que sur ses biens
(2).

1. Protection de la personne

Comme pour la curatelle, une personne protégée par une tutelle prend seule
les décisions relatives à sa personne (ex. : se déplacer, changer d’emploi)
dans la mesure où son état le permet. Elle choisit notamment son lieu de
résidence, elle conserve sont droit de vote. Le juge statue en cas de
difficulté. Elle accomplit seule certains actes dits « strictement personnels »
(par ex. : déclarer la naissance d’un enfant).

La loi du 23 mars 2019 dispense d’autorisation judiciaire le mariage et le


Pacs de la personne protégée. La suppression de l’autorisation à mariage est
assortie de la justification de l’information préalable du protecteur du projet
de mariage du majeur qu’il assiste ou représente.

La tutelle n’entraîne pas la privation de l’autorité parentale.

2. Protection des biens

En règle générale :

– le tuteur peut effectuer seul les actes d’administration (par ex. : effectuer
des travaux d’entretiens dans le logement de la personne protégée) ;

– seul le conseil de famille, s’il a été constitué, ou à défaut le juge, peut


autoriser les actes de disposition (par ex. : vendre un appartement).

Le majeur peut faire seul son testament avec l’autorisation du juge ou du


conseil de famille. Il peut le révoquer seul.
Le majeur en tutelle peut faire des donations en étant assisté ou représenté
par le tuteur, avec l’autorisation du juge ou du conseil de famille.

C. La fin de la tutel e

Le juge fixe la durée, qui ne peut excéder cinq ans.

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132

TITRE 3 – La protection de la personne

Le juge peut décider de la renouveler pour une durée plus longue si


l’altération des facultés du majeur protégé apparaît irrémédiable. Il doit
recueillir l’avis conforme du médecin inscrit sur la liste établie par le
procureur de la République.

Le juge peut alléger la mesure à tout moment (par exemple : réduire la


durée fixée, augmenter le nombre de décisions que le majeur peut effectuer
seul).

La mesure peut prendre fin :

– à tout moment si le juge décide qu’elle n’est plus nécessaire, à la demande


du majeur ou de toute personne habilitée à demander une mise sous tutelle,
le juge statuant par jugement dit « de mainlevée » rendu après avis médical
;

– à l’expiration de la durée fixée, en l’absence de renouvellement ;

– si une mesure de curatelle est prononcée en remplacement de la tutelle ;

– au décès de la personne.

Section 2
La protection non judiciaire du majeur

Nous étudierons ici deux formes de protection non judiciaire du


majeur, le mandat de protection future (§1) ainsi que l’habilitation
familiale (§2)

§ 1. Le mandat de protection future

Afin de bien comprendre le fonctionnement du mandat de protection future,


il convient, d’une part, d’en voir la mise en place (A) et, d’autre part, les
effets (B).

A. La mise en place du mandat de protection future

Le mandat de protection future est un dispositif qui permet à toute personne


de désigner une autre ou plusieurs autres personnes de confiance qui seront
chargées de la représenter dans le cas où elle ne serait plus en mesure de
pourvoir seule à ses intérêts en raison d’une altération de ses facultés
mentales ou d’une altération de ses facultés corporelles empêchant
l’expression de sa volonté.

La personne qui établit le mandat, dite le mandant, doit être majeure ou


mineure émancipé, ne faisant pas l’objet d’une tutelle. Elle peut désigner
comme mandataire toute personne physique de son choix (membre de sa
famille, un ami, un voisin, une relation de travail, un professionnel…) ou
une personne morale inscrite sur la liste des mandataires judiciaires à la
protection des majeurs. Il également possible de désigner plusieurs
mandataires. En distinguant par exemple entre un mandataire 9782340-
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Chapitre 2 – La protection des majeurs

133

pour la protection de la personne, et un pour la protection de ses biens ou


encore un mandataire pour le patrimoine privé et un autre pour le
patrimoine professionnel.

Concernant sa forme, le mandat de protection future peut être conclu soit


par acte notarié, soit par acte sous seing privé. Lorsque le mandat est reçu
par acte notarié, le notaire est choisi par le mandant et l’acceptation du
mandataire est reçue dans les mêmes formes (C. civ., art. 489 à 491). Quant
au mandat sous seing privé, il doit être contresigné par un avocat ou établi
selon un modèle défini par décret (C. civ., art. 492 à 494).

B. Les effets du mandat de protection future

La vocation de ce mandat est d’assurer la protection de la personne et de ses


intérêts patrimoniaux. Tant que le mandat n’a pas encore pris effet, il est
toujours permis de revenir sur sa décision. En effet, le mandat peut être
révoqué ou modifié par le mandant dans les mêmes formes que celles qui
l’ont établie. De son côté, le mandataire peut y renoncer en notifiant sa
renonciation au notaire (mandat notarié) ou au mandant (mandat sous seing
privé).

Les effets du mandat débuteront dès que le mandant ne peut plus pourvoir
seul à ses intérêts en raison d’une altération de ses facultés mentales ou de
ses facultés corporelles empêchant l’expression de sa volonté. Le mandant
doit alors produire au greffe du tribunal de grande instance le mandat et un
certificat médical émanant d’un médecin inscrit sur la liste établie par le
procureur de la République.

Les pouvoirs du mandataire varieront selon la forme du mandat. Ainsi, en


cas de mandat sous seing privé, le mandataire ne peut effectuer que les actes
qu’un tuteur peut faire sans autorisation du juge des tutelles, c’est-à-dire les
actes conservatoires et d’administration (C. civ., art. 493, al. 1er). Le juge
autorise les autres actes s’ils sont nécessaires dans l’intérêt du mandant. En
cas de mandat notarié, le mandataire effectue tous les actes patrimoniaux
que le tuteur peut accomplir seul ou avec autorisation (C. civ., art. 490, al.
1er). Toutefois, les actes de disposition à titre gratuit nécessitent une
autorisation du juge des tutelles (art. 490, al. 2). Afin de garantir que les
intérêts de la personne vulnérable soient protégés, il est prévu que, quel que
soit le mandat, le mandataire dresse un inventaire, établit chaque année le
compte de sa gestion et le présente au juge des tutelles. À l’expiration de sa
mission et dans les cinq ans qui suivent, il tient à la disposition l’inventaire
et les cinq derniers comptes de gestion.

Pour finir, ce mandat se termine, soit par le rétablissement des facultés


personnelles du mandant constaté à la demande du mandant ou du
mandataire ; soit par le décès de la personne, ou son placement en tutelle ou
curatelle sauf décision contraire du juge des tutelles, soit par le décès du
mandataire ou son placement 9782340-033689_001-152.indd 133

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TITRE 3 – La protection de la personne

sous une mesure de protection ou sa déconfiture, soit enfin par la révocation


du mandataire prononcée par le juge des tutelles à la demande de tout
intéressé.

§ 2. L’habilitation familiale

Ce dispositif permet aux familles qui sont en mesure de pourvoir, seules,


aux intérêts de leur proche vulnérable d’assurer cette protection, sans se
soumettre au formalisme des mesures de protection judiciaire. Le rôle
essentiel de la famille se ressent alors dans toutes les étapes du dispositif, de
son ouverture (A) à sa mise en œuvre (B).

A. L’ouverture de la mesure

Pour comprendre cette mesure de protection, il faut déjà s’intéresser aux


personnes pouvant saisir le juge pour en demander l’ouverture (1) puis à la
durée de la mesure (2) et, à la fin de celle-ci (3).

1. Les personnes pouvant saisir le juge

L’ouverture de ce dispositif passe par une saisine du juge des tutelles. En la


matière, conformément au principe de nécessité, cette saisine est
subordonnée au dépôt d’une requête accompagnée d’un certificat médical
circonstancié établi par un médecin choisi sur une liste émise par le
procureur de la République, comme en matière de tutelle et de curatelle
(article 494-3 alinéa 2 du Code civil). Le certificat doit établir que
l’intéressé est dans l’impossibilité de pourvoir seule à ses intérêts par suite
d’une altérarion de ses facultés mentales ou de ses facultés corporelles de
nature à empêcher l’expression de sa volonté (article 494-1 du Code civil)
(loi 23 mars 2019).

Le dispositif d’habilitation peut être demandé par :

– la personne à protéger (loi 23 mars 2019) ;

– les ascendants, descendants ;

– frères et sœurs ;

– partenaire d’un pacte civil de solidarité, concubin ou conjoint ;

– par le procureur de la République à la demande des personnes précitées.

En outre, la mesure fait l’objet d’un assentiment donné par la famille du


majeur protégé tant sur son principe que sur la personne désignée pour
l’assurer.

Ainsi, l’article 494-4 du Code civil prévoit que « le juge s’assure de


l’adhésion ou, à défaut, de l’absence d’opposition légitime à la mesure
d’habilitation et au choix de la personne habilitée des proches mentionnés à
l’article 494-1 qui entretiennent des liens étroits et stables avec la personne
ou qui manifestent de l’intérêt à son 9782340-033689_001-152.indd 134

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Chapitre 2 – La protection des majeurs

135

égard et dont il connaît l’existence au moment où il statue ». Par les


conditions de proximité avec le majeur protégé et d’identification par le
juge, la liste des personnes qui peuvent manifester leur opposition est
limitée par rapport à celle fixée pour l’ouverture de la mesure. On
comprend qu’il faille ici faciliter la tâche du juge qui ne doit finalement
s’assurer que de l’assentiment des personnes qui sont « moralement » en
droit de le donner en raison des liens qu’ils entretiennent avec le majeur
protégé. Le juge statue alors sur le choix de la personne habilitée en
s’assurant que le dispositif projeté est conforme aux intérêts patrimoniaux
et personnels de l’intéressé (article 494-5 c. civ.).

2. La durée de la mesure

Au moment d’ouvrir la mesure d’habilitation familiale, le juge pourra


choisir une durée longue de dix ans (article 494-6c. civ.). Nul n’est besoin
dans ce cas de requérir l’avis conforme du médecin ou de motiver
spécialement sa décision, et ce, contrairement à la tutelle (article 441 alinéa
2c. civ.). En outre, la mesure peut faire l’objet d’un renouvellement.
L’article 496-6 précité dispose que « statuant sur requête de l’une des
personnes mentionnées à l’article 494-1 ou du procureur de la République
saisi à la demande de l’une d’elles, il (le juge) peut renouveler l’habilitation
lorsque les conditions prévues aux articles 431 et 494-5 du Code civil sont
remplies. Le renouvellement peut être prononcé pour la même durée.

Toutefois, lorsque l’altération des facultés personnelles de la personne à


l’égard de qui l’habilitation a été délivrée n’apparaît manifestement pas
susceptible de connaître une amélioration selon les données acquises de la
science, le juge peut, par décision spécialement motivée et sur avis
conforme du médecin mentionné à l’article 431, renouveler le dispositif
pour une durée plus longue qu’il détermine, n’excédant pas vingt ans ».

3. La fin de la mesure

Comme pour la tutelle, l’habilitation familiale prend fin en cas de décès de


la personne protégée, si le terme arrive et si une mainlevée judiciaire est
prononcée.

El e s’éteint également lorsqu’el e n’est plus utile, les actes pour lesquels
l’habilitation a été délivrée sont accomplis. Mais aussi lorsqu’elle n’est plus
efficace, la mesure nuit à l’intéressé ou la situation a évolué au point que le
placement de la personne vulnérable sous sauvegarde de justice, curatelle
ou encore tutelle est nécessaire. On le voit, l’ouverture du dispositif
d’habilitation familiale est conforme aux principes de nécessité et de
subsidiarité qui régissent l’ensemble des mesures juridiques de protection.

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TITRE 3 – La protection de la personne

B. La mise en œuvre de la mesure

Pour étudier la mise en œuvre de la mesure, il nous faut commencer par


apprécier les pouvoirs de la personne habilitée (1), l’encadrement de la
mesure (2) et pour finir l’autonomie laissée à la personne vulnérable (3).

1. Les pouvoirs de la personne habilitée

Une certaine autonomie est laissée à la personne habilitée par le juge pour
gérer les biens du majeur protégé (art. 494-6 du Code civil). La personne
désignée par le juge peut ainsi recevoir un pouvoir spécial pour représenter
le majeur protégé pour un acte en particulier. Elle peut également se voir
confier un pouvoir général de gestion, lui permettant de gérer tant les actes
d’administration que les actes de disposition. En donnant une habilitation
générale, le juge facilite grandement la tâche du représentant de la personne
vulnérable qui n’aura pas à s’intéresser à la distinction parfois complexe
entre acte de disposition et acte d’administration, évitant ainsi les écueils de
la tutelle familiale. L’article 494-7 du Code civil prévoit même que la
personne habilitée à représenter la personne protégée peut, sauf décision
contraire du juge, procéder sans autorisation aux actes mentionnés au
premier alinéa de l’article 427 du Code civil. Il est ainsi fait dérogation à
cette disposition générale applicable à toutes les mesures de protection
judiciaire, tutelle, curatelle et sauvegarde de justice, qui interdit à la
personne chargée de la mesure de protection de procéder avant le prononcé
de la mesure à la modification des comptes ou livrets ouverts au nom de la
personne protégée et à l’ouverture d’un autre compte ou livret auprès d’un
établissement habilité à recevoir des fonds du public. Une telle habilitation,
confiée à l’un des membres de la famille de la personne vulnérable, conduit
finalement à lui donner plus de pouvoir qu’un époux en aurait par une
habilitation générale sur les biens communs. En effet, ce dernier a les
mêmes pouvoirs qu’aurait eus l’époux qu’il remplace mais il lui faut
l’autorisation du juge pour les actes pour lesquels le consentement de son
époux aurait été requis s’il n’y avait pas eu substitution (article 1426 c.
civ.).

2. L’encadrement de la mesure

Afin de protéger les intérêts du majeur comme ceux de sa famille, le juge,


s’il décide de délivrer une habilitation générale, doit s’assurer de l’adhésion
ou, à défaut, de l’absence d’opposition légitime des proches mentionnés à
l’article 494-1

du Code civil qui entretiennent des liens étroits et stables avec la personne
ou qui manifestent de l’intérêt à son égard et dont il connaît l’existence au
moment où il statue (article 494-4 al.2 c. civ.) En outre, il n’est pas prévu
d’obligation pour la personne habilitée d’établir un compte de gestion
annuel. Ce faisant, l’habilitation familiale est plus simple à l’usage que la
tutelle qui exige la tenue de ce compte, sauf 9782340-033689_001-152.indd
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Chapitre 2 – La protection des majeurs

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si la modicité des revenus et du patrimoine du majeur ne la rend inutile


(article 512

c. civ.). Ainsi, la confiance envers la famille est largement mise en avant


dans ce dispositif.

De surcroît, les actes les plus graves sont soumis à l’autorisation du juge
des tutelles, c’est le cas lorsque la personne habilitée entend disposer à titre
gratuit des biens du majeur protégé (article 494-6 al. 4). De même que, pour
confirmer l’acte contesté, il faudra obtenir l’aval du juge (article 494-9 al.
6). La personne habilitée ne peut sans l’accord du juge accomplir un acte
pour lequel elle serait en opposition d’intérêts avec la personne protégée
(article 494-6 al. 6). Pour finir, le juge peut statuer, à la demande de tout
intéressé (article 494-1 du Code civil), sur les difficultés qui pourraient
survenir dans la mise en œuvre de l’habilitation familiale. Il peut dès lors
être amené à modifier l’étendue de l’habilitation délivrée ou à y mettre fin.

3. L’autonomie de la personne vulnérable

La personne vulnérable est dotée d’une certaine autonomie. En effet,


lorsque la mesure concerne la personne du majeur, il est prévu que
l’habilitation s’exerce dans le respect des dispositions des articles 457-1 à
459-2 du Code civil (article 494-6

alinéa 2). Autrement dit, la personne vulnérable reste libre de se marier, de


conclure un pacte civil de solidarité, de voter… De même que la personne à
l’égard de qui l’habilitation a été délivrée conserve l’exercice des droits qui
n’ont pas été confiés à la personne habilitée, en conséquence, en cas de
pouvoir spécial confié à cette dernière, la personne vulnérable voit sa
capacité contractuelle étendue.

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TITRE 3 – La protection de la personne

CAS PRATIQUE

La protection des majeurs

Madame Cantillon est très inquiète pour sa mère, depuis quelque temps
celle-ci a des difficultés pour s’occuper de certaines choses du quotidien et
notamment de ses comptes.
Si el e peut encore faire ses courses, son ménage et un certain nombre
d’autres taches, son état de santé déclinant, el e n’arrive plus à gérer les
factures, le paiement des impôts et celui de ses différents crédits. Sa mère
qui écoute attentivement France bleue tous les matins a entendu parler
d’une habilitation de la famil e ou quelque chose du genre et pense qu’el e
pourrait elle-même en faire la demande afin de désigner son fils comme
personne pouvant s’occuper d’elle. Si son fils est d’accord, Madame
Cantillon, elle n’est pas très ouverte à l’idée, il faut dire qu’el e ne s’entend
pas bien avec son frère qui a tendance à contracter de nombreuses dettes
auprès des membres de la famil e sans rien rembourser. El e préférerait
qu’un juge tranche la question.

Qu’en pensez-vous ? Comment aider la mère de Mme Cantil on ?

Correction

Une femme âgée connaît des difficultés pour gérer ses comptes bancaires.
Sa fil e souhaite mettre en place une mesure de protection judiciaire pour
l’aider. De son côté la personne à protéger souhaiterait demander la mise en
place d’une habilitation familiale au profit de son fils qui en est d’accord.

La personne à protéger elle-même peut-elle demander la mise en place


d’une habilitation familiale ?

Article 494-1 du Code civil

« Lorsqu’une personne est dans l’impossibilité de pourvoir seule à ses


intérêts en raison d’une altération, médicalement constatée soit de ses
facultés mentales, soit de ses facultés corporelles de nature à empêcher
l’expression de sa volonté, le juge des tutelles peut habiliter une ou
plusieurs personnes choisies parmi ses ascendants ou descendants, frères et
sœurs ou, à moins que la communauté de vie ait cessé entre eux, le conjoint,
le partenaire auquel el e est liée par un pacte civil de solidarité ou le
concubin à la représenter à l’assister dans les conditions prévues à l’article
467 ou à passer un ou des actes en son nom dans les conditions et selon les
modalités prévues à la présente section et à cel es du titre XIII du livre III
qui ne lui sont pas contraires, afin d’assurer la sauvegarde de ses intérêts.
La personne habilitée doit remplir les conditions pour exercer les charges
tutélaires. El e exerce sa mission à titre gratuit. »

Aux termes de l’article 494-1 du Code civil, la personne à protéger el e-


même ne peut pas faire une demande d’habilitation familiale. En
l’occurrence, la mère de Madame Cantil on ne pourra pas effectuer cette
démarche. Néanmoins, son fils pourrait, lui, le faire Le fils de la personne
à protéger peut-il demander une mesure d’habilitation familiale ?

Article 494-1 du Code civil

« Lorsqu’une personne est dans l’impossibilité de pourvoir seule à ses


intérêts en raison d’une altération, médicalement constatée soit de ses
facultés mentales, soit de ses facultés corporelles de nature à empêcher
l’expression de sa volonté, le juge des tutelles peut habiliter une ou
plusieurs personnes choisies parmi ses ascendants ou descendants, frères et
sœurs ou, à moins que la communauté de vie ait cessé entre eux, le conjoint,
le partenaire 9782340-033689_001-152.indd 138

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Chapitre 2 – La protection des majeurs

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auquel el e est liée par un pacte civil de solidarité ou le concubin à la


représenter à l’assister dans les conditions prévues à l’article 467 ou à
passer un ou des actes en son nom dans les conditions et selon les modalités
prévues à la présente section et à cel es du titre XIII du livre III qui ne lui
sont pas contraires, afin d’assurer la sauvegarde de ses intérêts.

La personne habilitée doit remplir les conditions pour exercer les charges
tutélaires. El e exerce sa mission à titre gratuit. »

Article 494-2 du Code civil

« L’habilitation familiale ne peut être ordonnée par le juge qu’en cas de


nécessité et lorsqu’il ne peut être suffisamment pourvu aux intérêts de la
personne par l’application des règles du droit commun de la représentation,
de cel es relatives aux droits et devoirs respectifs des époux et des règles
des régimes matrimoniaux, en particulier cel es prévues aux articles
217,219,1426 et 1429, ou par les stipulations du mandat de protection
future conclu par l’intéressé. »

Article 494-3 du Code civil

« La demande aux fins de désignation d’une personne habilitée peut être


présentée au juge par la personne qu’il y lieu de protéger, par l’une des
personnes mentionnées à l’article 494-1 ou par le procureur de la
République à la demande de l’une d’el es.

La demande est introduite, instruite et jugée conformément aux règles du


code de procédure civile et dans le respect des dispositions des articles 429
et 431.

La désignation d’une personne habilitée est également possible à l’issue de


l’instruction d’une requête aux fins d’ouverture d’une mesure de protection
judiciaire ou lorsque, en application du troisième alinéa de l’article 442, le
juge des tutel es substitue une habilitation familiale à une mesure de curatel
e ou de tutel e. »

Article 494-4 du Code civil

« La personne à l’égard de qui l’habilitation est demandée est entendue ou


appelée selon les modalités prévues au premier alinéa de l’article 432.
Toutefois, le juge peut, par décision spécialement motivée et sur avis du
médecin mentionné à l’article 431, décider qu’il n’y a pas lieu de procéder à
son audition si cel e-ci est de nature à porter atteinte à sa santé ou si la
personne est hors d’état de s’exprimer.

Le juge s’assure de l’adhésion ou, à défaut, de l’absence d’opposition


légitime à la mesure d’habilitation et au choix de la personne habilitée des
proches mentionnés à l’article 494-1

qui entretiennent des liens étroits et stables avec la personne ou qui


manifestent de l’intérêt à son égard et dont il connaît l’existence au moment
où il statue. »

Aux termes de l’article 494-1 du Code civil, le fils de la personne à protéger


peut faire la démarche pour obtenir l’habilitation familiale. Le juge
l’acceptera si la mesure est nécessaire. De surcroît, aux termes de l’article
494-4 du Code civil le juge s’assure de l’adhésion ou, à défaut, de l’absence
d’opposition légitime à la mesure d’habilitation et au choix de la personne
habilitée des proches mentionnés à l’article 494-1 qui entretiennent des
liens étroits et stables avec la personne ou qui manifestent de l’intérêt à son
égard et dont il connaît l’existence au moment où il statue. En l’espèce, si le
fils de Madame Cantil on peut parfaitement faire la demande d’habilitation
familiale, les fortes réserves évoquées par Madame Cantil on à son égard
pourraient conduire le juge à ne pas accéder à sa demande.

Il est alors permis de se demander si une autre mesure, plus adaptée pourrait
être proposée.

Quelle est la mesure de protection la plus adaptée pour une personne


dont l’état de santé décline et qui n’arrive plus à gérer seule ses
comptes ?

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TITRE 3 – La protection de la personne

Plusieurs mesures judiciaires de protection existent : tutel e, curatel e et


sauvegarde de justice. Le juge devra ordonner la mesure la plus efficace au
regard des intérêts de la personne à protéger. La sauvegarde de justice est
une mesure temporaire qui n’altère en rien la capacité de la personne à
protéger, la tutel e quant à el e est une mesure de représentation et la
curatelle une mesure d’assistance. Toutes trois exigent que la personne
souffre d’une altération médicalement constatée de ses facultés mentales ou
corporel es de nature à empêcher l’expression de sa volonté.
La curatel e est prévue aux articles 440 et suivants du Code civil.

La curatel e a été conçue pour s’appliquer dans les hypothèses où


l’altération des facultés personnel es est trop grave pour qu’une simple
sauvegarde de justice soit suffisante, tout en n’atteignant pas un degré tel
que la tutel e s’impose. Ainsi, la curatel e suppose que la personne ait
besoin d’être assistée ou contrôlée d’une manière continue dans les actes
courants de la vie civile.

La décision d’ouvrir une curatel e appartient au juge des tutel es. Ce dernier
peut être saisi par l’intéressé lui-même

– son conjoint, son partenaire (PACS) ou son concubin (à condition qu’il y


ait toujours une vie commune) ;

– un parent ou un allié ;

– une personne entretenant avec celui qu’il conviendrait de protéger des


liens étroits et stables ;

– la personne qui exerce déjà à l’égard de l’intéressé une mesure de


protection juridique (mandat de protection future) ;

– le procureur de la République agissant d’office ou à la demande d’un


tiers.

La curatel e renforcée se différencie de la curatel e simple par le contrôle du


curateur sur les revenus et les dépenses du curatélaire (C. civ., art. 472). Le
majeur a toujours un besoin d’assistance ou de contrôle, mais ce besoin doit
être ressenti pour certains actes importants de la vie civile précisément
identifiés.

Le curateur perçoit les ressources de la personne et règle ses dépenses sur


un compte ouvert au nom de cel e-ci. Il est dans ce cas essentiel que le juge
mentionne le besoin d’assistance pour la perception des revenus et
l’engagement des dépenses afin de justifier la mise en place d’une tel e
mesure
Article 445 et suivants du Code civil. Le juge nomme un curateur. Il a la
possibilité de nommer plusieurs curateurs, notamment pour diviser la
mesure de protection entre la protection de la personne et la gestion
patrimoniale. Le curateur est choisi en priorité parmi les proches de la
personne à protéger. En premier lieu son conjoint, partenaire ou concubin,
sauf empêchements prévus par la loi, ou impossibilité constatée par le juge.
En second lieu, un parent, un allié ou une personne résidant avec la
personne à protéger.

Aux termes de la loi, la curatelle est une mesure d’assistance qui permet
lorsqu’elle est renforcée d’assister une personne, dont les facultés personnel
es sont altérées mais pour laquel e une mesure de tutel e serait trop
importante, dans la gestion de ses revenus et de ses dépenses. El e peut être
demandée par les enfants de la personne à protéger. En l’espèce Madame
Cantil on pourrait faire une demande au juge pour ouvrir une mesure de
curatel e renforcée afin qu’un curateur assiste sa mère dans la gestion de ses
dépenses et de ses revenus. El e pourra même demander à être nommée
curateur, ou si le conflit avec son frère rend la chose délicate, un tiers
pourrait être désigné par le juge (mandataire judiciaire à la protection des
personnes).

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Chapitre 2 – La protection des majeurs

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QUIZ

La protection de la personne

Plusieurs réponses sont parfois attendues

Q1. Par quel système a été remplacée en 2015 l’administration légale sous
contrôle de justice ?
R1. La tutel e

R2. L’administration légale pure et simple

R 3. L’administration légale

Q2. Quel est le juge compétent pour assurer le contrôle de la gestion des
biens du mineur ?

R1. Le juge des tutel es

R2. Le juge aux affaires familiales

R3. Le juge des enfants

Q3. La conclusion d’un bail de plus de 9 ans est considérée comme un acte
R1. Conservatoire

R2. D’administration

R3. De disposition

Q4. Dans le cas où les parents ont eu la volonté de nuire à leur enfant en
commettant un acte de gestion frauduleux, quel e est la sanction prévue ?

R1. Le juge des tutel es va exercer une surveil ance plus importante des
parents R2. Le juge des tutel es va nommer un administrateur ad hoc pour
assurer la gestion des biens du mineur

R3. Le juge des tutelles va mettre fin au régime de l’administration légale


pour lui substituer celui de la tutel e

Q5. Le tuteur peut être choisi

R1 Parmi les membres de la famil e du mineur exclusivement

R2 Parmi les amis et la famil e de l’enfant

R3. Parmi les personnes les plus éloignées de l’enfant


Q6. Le mineur peut obtenir des réunions du Conseil de famil e

R1. S’il a 16 ans révolus uniquement

R2. Peu importe son âge

R3. Seul le juge peut obtenir des réunions

Q7. La tutel e est mise en place

R1. À partir du moment où un enfant né

R2. À partir du moment où un mineur reçoit un héritage

R3. À partir du moment où il n’a pas ni père ni mère

Q8. Le tuteur dispose du pouvoir de réaliser seul

R1. Les actes de disposition

R2. Les actes d’administration

R3. Les actes conservatoires

Q9. L’émancipation du mineur peut se faire à la demande

R1. Des deux parents exclusivement

R2 D’un seul des deux parents

R3. Du mineur lui-même

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TITRE 3 – La protection de la personne


Q10. L’émancipation permet au mineur

R1. De devenir majeur

R2. De se marier sans le consentement de ses parents

R3. De contracter un crédit

Q11. L’émancipation du mineur par le mariage nécessite

R1. L’accord de ses deux parents

R2. Une dispense du procureur de la République

R3. Un mariage entre deux personnes de sexes différents

Q12. Le mineur émancipé peut

R1. Voter

R2. Entrer dans un casino

R3 Devenir commerçant

Q13. Les parents du mineur émancipé demeurent

R1. Tenus d’une obligation d’éducation et d’entretien envers le mineur R2.


Responsables des dettes du mineur

R3. Responsables pour les délits du mineur

Réponses p.143.

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Chapitre 2 – La protection des majeurs

143
Réponses

Q1. : 3, l’ordonnance de 2015 a mis fin à la distinction entre administration


légale pure et simple où les deux parents géraient les biens de leurs enfants
et l’administration légale sous contrôle judiciaire où un seul parent était
administrateur. El e a choisi de mettre en place un régime moins complexe
d’administration légale.

Q2. : 1, c’est le juge des tutel es qui veil e à la bonne gestion des biens du
mineur, si son rôle a été sensiblement amoindri par l’ordonnance de 2015,
sa place dans le mécanisme de l’administration légale demeure essentiel e.
Le juge aux affaires familiales (JAF) est un magistrat du siège du tribunal
de grande instance chargé principalement des litiges relatifs au divorce, à
l’autorité parentale, aux obligations alimentaires au sein de la famil e. Le
juge des enfants, quant à lui, est un magistrat spécialisé du siège du tribunal
de grande instance chargé de la protection de l’enfance en danger et de la
répression des mineurs délinquants.

Q3. : 3, il s’agit d’un acte de disposition. La conclusion d’un bail de plus de


9 ans est considérée comme un acte grave qui altère le patrimoine du
mineur en ce que le bien est

« bloqué » pendant 9 ans et rend difficile par exemple pour le mineur la


vente de celui-ci.

Q4. : 3. Le juge des tutel es va dans ce cas mettre fin à l’administration


légale. La gravité de la situation impose cette sanction extrême.

Q5. : 2, le tuteur est choisi parmi ceux qui s’intéressent à l’enfant, si l’on se
tourne en priorité vers sa famille, il est aussi possible de faire appel à des
amis des parents qui auraient montré leur intérêt pour l’enfant.

Q6. : 2, peu importe son âge, le mineur peut obtenir des réunions du conseil
de famil e.

L’âge va juste permettre de distinguer les situations dans lesquel es il les


obtiendra toujours, parce qu’il a 16 ans révolus, de cel es où il pourra les
obtenir.
Q7. : 3, À partir du moment où un enfant n’a ni père ni mère, il est placé
sous tutel e.

Dès sa naissance, l’enfant sera placé sous un régime de protection qui sera
selon les circonstances l’administration légale ou la tutel e.

Q8. : 2 et 3, le tuteur a la possibilité de faire seul aussi bien les actes


d’administration que les actes conservatoires. Il lui faut, en revanche, une
autorisation pour les actes de disposition.

Q9. : 2. L’émancipation peut être demandée par un seul des deux parents
qui exercent l’autorité parentale. Le juge sera ici attentif lors de l’audition
des parents aux raisons qui poussent l’un des deux à refuser l’émancipation.

Q10. : 3. L’émancipation ne rend pas le mineur majeur, il est juste assimilé


à un majeur sans pour autant bénéficier des mêmes droits que ce dernier. À
ce titre, il ne peut toujours pas se marier sans le consentement d’au moins
l’un de ses deux parents. En revanche, il lui est possible de passer des
contrats et notamment de contracter un crédit.

Q11. : 2. L’émancipation par le mariage n’est possible qu’avec une dispense


du Procureur de la République et le consentement d’au moins un des deux
parents. Conformément à la loi du 17 mai 2013, le mariage est possible
entre personnes de même sexe ou de sexe différent.

Q12. : 3. Sous réserve de l’autorisation du juge, me mineur émancipé peut


devenir commerçant. En revanche, pour pouvoir voter ou encore entrer dans
un casino, il faut avoir 18 ans.

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TITRE 3 – La protection de la personne

Q13. : 1. Une fois le mineur émancipé, les parents sont encore tenus d’une
obligation d’éducation et d’entretien. En revanche, ils ne sont plus
responsables de ses dettes ou encore des délits qu’il pourrait commettre.

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TABLE DES MATIÈRES

Introduction

La notion de personne
...............................................................................................5

§ 1. La personne
...................................................................................................................5

§ 2. La personnification
......................................................................................................5

A. La nature
..........................................................................................................................
.......5

B. L’animal
..........................................................................................................................
..........6

C. Le robot
..........................................................................................................................
.........7

TITRE 1

L’existence de la personne

Chapitre 1

L’acquisition de la personnalité
..............................................................................11
Section 1

Le moment de l’acquisition de la personnalité


..................................................................... 11

§ 1. La naissance, première condition


............................................................................11

§ 2. Les autres conditions


.................................................................................................12

Section 2

L’extension de la personnalité
.....................................................................................................13

CAS PRATIQUE : L’acquisition de la personnalité


.....................................................15

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146

Table des matières

Chapitre 2

Les effets de la personnalité


...................................................................................17

Section 1

Le droit au respect de l’intégrité morale de la personne


..................................................19

§ 1. Le respect du droit à la vie privée


............................................................................19
A. Les conditions de la
protection...........................................................................................19

1. Les contours de la notion de vie privée


................................................................................. 19

2. L’autorisation
..........................................................................................................................
...20

B. Les sanctions de l’atteinte à la vie privée


.......................................................................... 21

§ 2. Le respect du droit à l’image


....................................................................................22

A. Le principe
..........................................................................................................................
...22

B. Les conditions
.......................................................................................................................2
2

1. Une personne identifiable et une mise en cause de la vie


privée.......................................23

2. L’exception : l’absence de protection en cas d’autorisation ou de


nécessité de l’information
........................................................................................................................2
4

3. L’exception à l’exception : l’atteinte à la dignité


................................................................... 25

Section 2

Le droit au respect de l’intégrité physique de la personne


..............................................26
§ 1. Les principes d’inviolabilité et d’intégrité du corps humain
..............................26

A. L’énoncé des principes


.........................................................................................................26

B. Les atteintes licites


................................................................................................................27

§ 2. L’indisponibilité (du corps humain et de l’état des personnes) et la non-


patrimonialité
.............................................................................................................28

CAS PRATIQUES : Les effets de la personnalité


.........................................................31

Chapitre 3

La perte de la personnalité
.....................................................................................35

Section 1

L’absence et la disparition
.............................................................................................................35

§ 1. L’absence (articles 102 à 132 du Code civil)


...........................................................35

A. La présomption d’absence
...................................................................................................35

1. La constatation de l’absence
....................................................................................................36

a. La saisine du juge
.......................................................................................................................3
6
b. Les conditions de la constatation
..............................................................................................36

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Table des matières

147

2. La protection du présumé absent


........................................................................................... 37

a. La situation patrimoniale
..........................................................................................................37

b. La situation familiale
.................................................................................................................38

3. La fin de la période de présomption d’absence


.................................................................... 38

a. En cas de retour de l’absent


.......................................................................................................38

b. En cas de décès de l’absent


.........................................................................................................38

B. La déclaration d’absence
......................................................................................................38

1. La procédure
..........................................................................................................................
.... 39

2. Les effets
..........................................................................................................................
........... 39
3. La fin de l’état d’absence
.......................................................................................................... 39

§ 2. La disparition (article 88 à 92 du Code civil)


........................................................40

Section 2

La fin de la personnalité
................................................................................................................41

§ 1. Le moment de la mort
...............................................................................................41

§ 2. Les conséquences de la mort


...................................................................................41

CAS PRATIQUE : La perte de la personnalité


.............................................................46

QUIZ : L’existence de la personne


..................................................................................49

Titre 2

L’identification de la personne

Chapitre 1

Le nom
.......................................................................................................................5
3

Section 1

L’attribution du nom
.......................................................................................................................5
3
§ 1. L’attribution par la filiation
......................................................................................53

A. L’enfant né dans les liens du mariage


................................................................................53

B. L’enfant né hors du mariage


................................................................................................54

C. L’enfant adopté
......................................................................................................................55

1. L’adoption plénière
.................................................................................................................... 55

2. L’adoption simple
......................................................................................................................
55

§ 2. Le cas particulier de l’accouchement sous x


..........................................................56

Section 2

L’utilisation du nom
.........................................................................................................................
56

§ 1. Le changement de nom
.............................................................................................57

A. Le changement de nom par changement d’état


...............................................................57

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148
Table des matières

B. Le changement de nom en l’absence de changement d’état


..........................................57

§ 2. La protection du nom
................................................................................................58

A. Les caractères du nom


.........................................................................................................59

B. L’usurpation
..........................................................................................................................
60

Chapitre 2

Les accessoires et compléments du nom


...............................................................63

Section 1

Le prénom
..........................................................................................................................
................63

§ 1. Le choix du prénom
...................................................................................................63

§ 2. Le changement de prénom
.......................................................................................65

A. Le changement par voie ordinaire


....................................................................................65

B. Le changement de prénom par la voie de la francisation


...............................................66

Section 2
Les pseudonymes, particules et titres de noblesse
.............................................................67

§ 1. Les pseudonymes
.......................................................................................................67

§ 2. Les particules et titres de noblesse


..........................................................................68

CAS PRATIQUE : Le nom et le prénom


.......................................................................69

Chapitre 3

Le sexe
.......................................................................................................................7
1

Section 1

L’assignation
..........................................................................................................................
.............71

Section 2

La rectification
..........................................................................................................................
........72

CAS PRATIQUE : Le sexe


...............................................................................................76

Chapitre 4

Le domicile
................................................................................................................79

Section 1
La détermination du domicile
.....................................................................................................79

§ 1. Le libre choix du domicile


........................................................................................79

A. L’élément matériel
.................................................................................................................79

B. L’élément intentionnel
.........................................................................................................80

§ 2. Le domicile imposé
....................................................................................................80

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Table des matières

149

A. Le domicile imposé par la loi


..............................................................................................80

1. La mobilité
..........................................................................................................................
....... 81

2. L’indépendance
.........................................................................................................................
81

B. Le domicile imposé par le contrat


......................................................................................82

Section 2
L’unicité du domicile
.......................................................................................................................8
4

§ 1. Le principe d’unicité
..................................................................................................84

§ 2. Les dérogations au principe


......................................................................................84

A. Les dérogations légales


.........................................................................................................84

B. La dérogation conventionnelle
...........................................................................................85

CAS PRATIQUE : Le domicile


.......................................................................................86

Chapitre 5

Les actes de l’état civil


.............................................................................................87

Section 1

L’établissement de l’acte de l’état civil


.....................................................................................87

§ 1. Les conditions de rédaction


.....................................................................................87

A. Les règles générales applicables à la rédaction


.................................................................87

1. L’auteur de l’acte
........................................................................................................................
87
2. Le contenu de
l’acte.................................................................................................................
..88

a. Les mentions d’origines


..............................................................................................................88

b. Les mentions rajoutées


...............................................................................................................89

3. La date de l’acte
..........................................................................................................................
89

B. Les dérogations aux règles de rédaction


...........................................................................89

§ 2. Les sanctions
...............................................................................................................90

A. La rectification de l’acte
......................................................................................................90

1. La rectification judiciaire
.........................................................................................................90

2. La rectification administrative
...............................................................................................90

B. L’annulation de l’acte
...........................................................................................................90

Section 2

L’utilisation de l’acte de l’état civil


..............................................................................................91

§ 1. La consultation
directe..............................................................................................91
§ 2. La copie
........................................................................................................................9
1

§ 3. L’extrait
........................................................................................................................9
2

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Table des matières

Section 3

La destruction de l’acte de l’état civil


.......................................................................................93

QUIZ : L’identification de la personne


..........................................................................94

TITRE 3

La protection de la personne

Chapitre 1

La protection des
mineurs.......................................................................................99

Section 1

Les mineurs non émancipés


........................................................................................................99
§ 1. L’administration légale
..............................................................................................99

A. La gestion des biens du mineur


........................................................................................ 101

1. La qualité d’administrateur
.................................................................................................. 101

2. Les pouvoirs de l’administrateur


......................................................................................... 101

B. Le contrôle de la gestion des biens du mineur


...............................................................103

1. Le rôle du juge des tutelles


..................................................................................................... 103

2. La sanction de la mauvaise gestion


......................................................................................104

C. La fin de l’administration légale


.......................................................................................105

§ 2. La tutelle
....................................................................................................................105

A. L’organisation et le fonctionnement de la tutelle


..........................................................106

1. Le conseil de famille (articles 398 et s. du Code civil)


......................................................106

2. Le tuteur (articles 403 et suivants du Code civil)


..............................................................106

a. Le choix du tuteur
.....................................................................................................................10
6
b. Les pouvoirs du tuteur (articles 503 et suivants du Code civil)
............................................107

3. Le subrogé tuteur (articles 409 et suivants du Code civil)


...............................................108

4. Le juge des tutelles


..................................................................................................................108

B. Les droits du mineur à l’égard des délibérations du conseil de famille


.....................108

C. La fin de la tutelle
................................................................................................................109

Section 2

Les mineurs émancipés


...............................................................................................................109

§ 1. L’émancipation par mariage


...................................................................................109

§ 2. L’émancipation par décision de justice


.................................................................110

§ 3. Les effets de l’émancipation


...................................................................................110

A. L’élargissement des droits du


mineur............................................................................. 110

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Table des matières

151
B. Les limites aux droits du mineur
..................................................................................... 111

CAS PRATIQUE : La protection des mineurs


..........................................................112

Chapitre 2

La protection des majeurs


.....................................................................................117

Section préliminaire

Les principes directeurs


............................................................................................................... 117

§ 1. Les principes directeurs de l’article 428 du Code civil


......................................117

A. Le principe de nécessité
..................................................................................................... 117

B. Le principe de subsidiarité
................................................................................................ 118

C. Les principes de proportionnalité et d’individualisation


............................................ 119

§ 2. Les autres principes de l’article 415 du Code civil


..............................................119

A. Le respect des droits fondamentaux, des libertés individuelles et de la


dignité de la personne
......................................................................................................................12
0

B. La solidarité familiale
........................................................................................................120
Section 1

La protection judiciaire du majeur


..........................................................................................121

§ 1. La sauvegarde de justice
..........................................................................................121

A. Les conditions de la sauvegarde de justice


......................................................................121

1. Les bénéficiaires de la protection


......................................................................................... 121

2. La mise en place du régime de protection


..........................................................................122

a. La déclaration médicale
...........................................................................................................122

b. La décision du juge des tutel es


...............................................................................................122

B. Les effets de la sauvegarde de justice


...............................................................................123

1. Les mesures de protection quant aux actes accomplis par la personne


protégée ........123

a. L’annulation des actes


..............................................................................................................123

b. La rescision pour lésion


............................................................................................................124

c. La réduction pour excès


............................................................................................................124
2. Les mesures de protections quant à la gestion des biens de la personne
protégée .......124

C. La fin de la mesure de sauvegarde


....................................................................................124

§ 2. La curatelle
................................................................................................................125

A. Les conditions de la curatelle


............................................................................................125

1. Les bénéficiaires de la protection


.........................................................................................125

2. La mise en place du régime de protection


..........................................................................126

a. L’ouverture de la curatel e
........................................................................................................126

b. Les degrés de curatel e


..............................................................................................................126

c. La désignation du curateur
......................................................................................................127

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152

Table des matières

B. Les effets de la curatelle


.....................................................................................................127
1. Protection de la personne
......................................................................................................128

2. Protection des biens


................................................................................................................128

C. La fin de la curatelle
...........................................................................................................128

§ 3. La tutelle
....................................................................................................................129

A. Les conditions de la tutelle


................................................................................................129

1. Les bénéficiaires de la mesure


...............................................................................................129

2. La mise en place de la mesure


...............................................................................................129

a. L’ouverture de la mesure
..........................................................................................................129

b. La désignation du tuteur
..........................................................................................................130

B. Les effets de la tutelle


.......................................................................................................... 131

1. Protection de la personne
...................................................................................................... 131

2. Protection des biens


................................................................................................................ 131

C. La fin de la tutelle
................................................................................................................ 131
Section 2

La protection non judiciaire du majeur


.................................................................................132

§ 1. Le mandat de protection future


.............................................................................132

A. La mise en place du mandat de protection future


.........................................................132

B. Les effets du mandat de protection future


......................................................................133

§ 2. L’habilitation familiale
............................................................................................134

A. L’ouverture de la mesure
....................................................................................................134

1. Les personnes pouvant saisir le juge


....................................................................................134

2. La durée de la mesure
............................................................................................................. 135

3. La fin de la mesure
.................................................................................................................. 135

B. La mise en œuvre de la
mesure.........................................................................................136

1. Les pouvoirs de la personne habilitée


..................................................................................136

2. L’encadrement de la mesure
..................................................................................................136
3. L’autonomie de la personne vulnérable
............................................................................... 137

CAS PRATIQUE: La protection des majeurs


.............................................................138

QUIZ: La protection de la personne


............................................................................141

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SOMMAIRE
Introduction - La notion de personne
TITRE 1 - L’EXISTENCE DE LA PERSONNE
Chapitre 1 - L’acquisition de la personnalité
Chapitre 2 - Les effets de la personnalité
Chapitre 3 - La perte de la personnalité
TITRE 2 - L’IDENTIFICATION DE LA PERSONNE
Chapitre 1 - Le nom
Chapitre 2 - Les accessoires et compléments du nom
Chapitre 3 - Le sexe
Chapitre 4 - Le domicile
Chapitre 5 - Les actes de l’état civil
TITRE 3 - LA PROTECTION DE LA PERSONNE
Chapitre 1 - La protection des mineurs
Chapitre 2 - La protection des majeurs
TABLE DES MATIÈRES
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